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"Culture de la pomme de terre : avec ou sans labour ?" En collaboration avec la Fiwap, l'asbl Greenotec réalise depuis 2007 des essais de travail du sol différencié en culture de pomme de terre. Cette année, 5 itinéraires techniques ont été testés (voir tableau 1). Cet article reprend les premières observations de profils de sol réalisées en juillet 2008, ainsi que les premiers résultats de qualité des tubercules. Tableau 1 : détails des itinéraires techniques Variante Type de travail Date d'intervention Outil A1 Déchaumage Septembre Chisel A2 Décompactage Septembre Décompacteur + Chisel A3 Pseudo-labour Septembre Chisel lourd A4 Décompactage Septembre Décompacteur + Chisel A5 Labour Septembre Charrue A6 Labour Janvier Charrue Profils culturaux Description de la méthode Le mardi 22 juillet 2008 a été mis à profit pour réaliser dans chacun des objets en com- paraison une analyse de profil cultural selon une version simplifiée de la méthode dite de Gautronneau et Manichon (tous les rensei- gnements sur cette méthode peuvent être obtenus en cliquant sur le lien http://www.isara.fr/fr/profilcultural/default.ht m ). L’analyse du profil cultural permet de mesu- rer la profondeur exacte des outils et d’évaluer la qualité du travail : intensité de restructuration des zones compactées anté- rieurement, dégradation ou non des semelles, présence ou absence de lissages ou de creux dans le profil, etc. Une fosse d’une largeur de 270 cm (soit la largeur de trois buttes), d’une longueur de 80 cm et d’une profondeur de 60 cm a été creu- sée à la bêche dans le sol perpendiculaire- ment au sens du travail des outils dans cha- que placette. La face de la fosse a été analy- sée à l’aide d’un couteau de manière à « ré- véler la structure du sol », càd mettre en évi- dence différentes zones dans le profil se dis- tinguant sur base de la porosité visible à l’œil nu et de la morphologie des faces de rupture des mottes. Dans un premier temps, on a distingué deux catégories de mottes : d’une part, les mottes Δ (elles seront as- sociées à une couleur rouge) d’apparence compacte, caractérisées par une très fai- ble voire une absence totale de porosité visible à l’œil nu et des faces de ruptures planes (elles sont la conséquence d’un compactage sévère du sol) ; d’autre part, les mottes Γ (couleur verte), caractérisées par une importante porosité visible à l’œil nu et des faces de rupture hétérogènes ; la terre non structurée sous forme de mot- tes est caractérisée de « terre fine » (cou- leur blanche). Dans un second temps une note correspon- dant au mode d’assemblage des mottes a été attribuée à chacun des éléments de cette dis- tinction de base : M pour « massif », SD pour « soudé difficilement discernable » et SF pour « soudé facilement discernable ».

Variante Type de travail Date d'intervention Outilpro.ovh.net/~fiwap/uploads/File/Bibliotheques/Technique/Techniques... · s’est aussi chargée des analyses de qualité et de rendement

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"Culture de la pomme de terre : avec ou sans labour ?"

En collaboration avec la Fiwap, l'asbl Greenotec réalise depuis 2007 des essais de travail du sol

différencié en culture de pomme de terre. Cette année, 5 itinéraires techniques ont été testés (voir

tableau 1). Cet article reprend les premières observations de profils de sol réalisées en juillet 2008,

ainsi que les premiers résultats de qualité des tubercules.

Tableau 1 : détails des itinéraires techniques

Variante Type de travail Date d'intervention Outil

A1 Déchaumage Septembre Chisel

A2 Décompactage Septembre Décompacteur + Chisel

A3 Pseudo-labour Septembre Chisel lourd

A4 Décompactage Septembre Décompacteur + Chisel

A5 Labour Septembre Charrue

A6 Labour Janvier Charrue

Profils culturaux Description de la méthode

Le mardi 22 juillet 2008 a été mis à profit

pour réaliser dans chacun des objets en com-

paraison une analyse de profil cultural selon

une version simplifiée de la méthode dite de

Gautronneau et Manichon (tous les rensei-

gnements sur cette méthode peuvent être

obtenus en cliquant sur le lien

http://www.isara.fr/fr/profilcultural/default.ht

m).

L’analyse du profil cultural permet de mesu-

rer la profondeur exacte des outils et

d’évaluer la qualité du travail : intensité de

restructuration des zones compactées anté-

rieurement, dégradation ou non des semelles,

présence ou absence de lissages ou de creux

dans le profil, etc.

Une fosse d’une largeur de 270 cm (soit la

largeur de trois buttes), d’une longueur de 80

cm et d’une profondeur de 60 cm a été creu-

sée à la bêche dans le sol perpendiculaire-

ment au sens du travail des outils dans cha-

que placette. La face de la fosse a été analy-

sée à l’aide d’un couteau de manière à « ré-

véler la structure du sol », càd mettre en évi-

dence différentes zones dans le profil se dis-

tinguant sur base de la porosité visible à l’œil

nu et de la morphologie des faces de rupture

des mottes.

Dans un premier temps, on a distingué deux

catégories de mottes :

• d’une part, les mottes ∆ (elles seront as-

sociées à une couleur rouge) d’apparence

compacte, caractérisées par une très fai-

ble voire une absence totale de porosité

visible à l’œil nu et des faces de ruptures

planes (elles sont la conséquence d’un

compactage sévère du sol) ;

• d’autre part, les mottes Γ (couleur verte),

caractérisées par une importante porosité

visible à l’œil nu et des faces de rupture

hétérogènes ;

• la terre non structurée sous forme de mot-

tes est caractérisée de « terre fine » (cou-

leur blanche).

Dans un second temps une note correspon-

dant au mode d’assemblage des mottes a été

attribuée à chacun des éléments de cette dis-

tinction de base : M pour « massif », SD pour

« soudé difficilement discernable » et SF

pour « soudé facilement discernable ».

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Résultats

Les cinq photomontages suivants illustrent les observations qui ont pu être réalisées sur les profils

culturaux.

Figure 1 : profil cultural de l'objet A1 (Greenotec ASBL, 22/07/2008)

La Figure 1 est le profil cultural de l’objet A1, càd l’objet sans travail profond du sol. Les annota-

tions latérales (présentes également sur les photos suivantes) permettent de caractériser les diffé-

rents horizons de sol :

• H1 correspond à l’horizon qui a été repris au printemps (en l’occurrence un passage à faible

profondeur de décompacteur et deux passages de herse rotative) ;

• H5 correspond au dernier travail profond du sol (variable dans le cas présent selon les objets

en comparaison) ;

• H6 correspond au plus profond travail du sol qui ait été réalisé sur la parcelle (similaire entre

les objets vu l’historique cultural commun pour toutes les placettes avant la mise en place de

l’essai) ;

• la zone située sous H6 correspond au premier horizon pédologique (« terre jaune »).

Chacun des horizons est accompagné de nombres qui précisent ses limites supérieures et inférieu-

res, ces distances ayant été mesurées non pas par rapport au niveau initial du sol mais bien par

rapport au sommet des buttes. Les annotations situées au-dessus de la photo n’ont pas

d’importance dans le cadre de cet essai.

L’objet A1 n’ayant connu aucun travail profond du sol depuis la moisson précédente, il donne une

idée de l’état structural avant la mise en place de l’essai. De manière générale, on peut constater

que la structure initiale de la couche arable était relativement favorable : une majorité de zone SD

Γ (couleur verte), càd n’ayant pas été sévèrement compactée et dans une moindre mesure des zo-

nes SD ∆ (couleur rouge) résultant d’un tassement modéré mais fissurées et laissant passer les

racines des plantes.

La partie inférieure de la couche arable (zone H6) est cependant caractérisée par une frange de sol

de quelques centimètres d’épaisseur appartenant à la classe M ∆ (couleur rouge également), càd ni

poreuse ni fissurée et ne laissant descendre les racines qu’à la faveur de galeries de vers de terre :

cette zone correspond à une semelle de labour (ou de non-labour, car certains décompacteurs aux

ailettes larges peuvent avoir une action aussi néfaste voire davantage qu’un soc de charrue).

Des relevés racinaires n’ont pas permis de constater de différence entre les objets : la majorité des

racines restaient concentrées en H1 et en H5, peu d’entre elles rejoignaient la zone située sous la

couche arable (la pluviométrie importante de la première partie de la saison culturale 2008 pour-

rait constituer une explication).

Figure 2 : profil cultural de l'objet A3 (Greenotec ASBL, 22/07/2008)

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Dans l’objet A3 (Figure 2), trois caractéristiques majeures sont à noter par rapport au premier pro-

fil :

• une absence de zones M ∆ dans l’horizon H5 : on peut donc supposer que les quelques défauts

de structure ont été récupérés lors du pseudo-labour en septembre 2007 ;

• l’apparition de zones SD Γ dans l’horizon H5, notamment entre 175 cm et 215 cm (roue de la

planteuse à pommes de terre) et entre 120 cm et 150 cm (probablement suite au passage de la

seconde herse rotative sur une terre préalablement affinée) qui résulte d’un tassement modéré

et que l’on retrouve également dans tous les autres itinéraires techniques ;

• la disparition partielle de la semelle initialement présente en H6, notamment entre 50 cm et

120 cm et au-delà de 240 cm.

Figure 3 : profil cultural de l'objet A4 (Greenotec ASBL, 22/07/2008)

En ce qui concerne le profil de l’objet A4 (décompactage avec un outil équipé de pointes à ailet-

tes), on remarquera que les pointes de la machine ont effleuré la semelle et ont permis de l’éclater

ponctuellement (notamment à 230 cm). La création de terre fine en profondeur, non structurée

(aux alentours de 200 cm) est cependant à éviter.

Figure 4 : profil cultural de l'objet A5 (Greenotec ASBL, 22/07/2008)

La caractéristique principale du labour d’été (objet A5 représenté à la Figure 4) était la présence

très importante de pailles non décomposées ou insuffisamment décomposées dans la l’horizon H5

(non visible sur la photo) parfois en contact avec les tubercules.

Figure 5 : profil cultural de l'objet A6 (Greenotec ASBL, 22/07/2008)

Le labour d’hiver (A6, dont le profil cultural est représenté à la Figure 5) ne présentait pas autant

de pailles insuffisamment décomposées que l'objet A5: leur séjour à la surface du sol quatre mois

supplémentaires par rapport au labour de septembre pourrait en constituer une raison.

Par contre, les conditions d’humidité du sol nettement plus défavorables en janvier se sont tradui-

tes par la création en fond de raie d’un lissage prononcé sur toute la largeur de travail. Ce type de

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lissage est très préjudiciable parce qu’il rompt la continuité du profil cultural (accumulation d’eau

superficielle lors des saisons humides et obstacle à l’exploration racinaire lors des saisons sèches)

et que sa répétition est à l’origine des semelles de labour.

On notera également (anecdotiquement) que la tâche noire située à 45 cm correspond à la pointe

du décompacteur utilisé en complément de la herse rotative au printemps.

En résumé

Quel que soit l’objet expérimental, la structure du sol a pu être jugée bonne indépendamment du

type d’outil utilisé. Aucune différence n’a pu être mise en évidence quant à l’exploration racinaire,

concentrée essentiellement dans la couche arable.

Dans le cadre de l’essai, les outils (et leurs réglages !) se sont distingués principalement par leur

action vis-à-vis de la semelle de labour initialement présente :

• dégradation importante (A3 - pseudo-labour) ou ponctuelle (A4 - décompactage) ;

• action nulle pour les objets A1 (absence de travail profond, ce qui est logique) et A5 (labour

d’été) ;

• renforcement de la semelle pour l’objet A6 (labour d’hiver) vu les conditions d’humidité.

La comparaison des labours de janvier et de septembre a permis de constater en outre que

l’enfouissement profond de paille à la fin de l’été semblait ralentir fortement sa dégradation.

Quantités et qualité des tubercules à mi-saison Des prélèvements de tubercules dans les buttes (5 plantes par placette, soit 20 plantes par itinéraire

technique) ont également été réalisés le mardi 22 juillet 2008 en collaboration avec la Fiwap, qui

s’est aussi chargée des analyses de qualité et de rendement – calibrage.

Les résultats de rendements, de tubérisation, de pourcentages de pommes de terre fritables et de

poids sous eau à mi-saison sont repris dans le tableau 2.

Tableau 2 : quantité et qualité (valeurs moyennes) des tubercules à mi-saison (prélèvements et

analyses réalisés par la Fiwap le 22/07/2008)

Objet Rendement total en

35 mm + (t/ha)*

Nombre de tuber-

cules / 5 plantes

Tubercules fri-

tables**

PSE des 35 mm

+ (g / 5 kg) A1 27,8 68,8 50,6 % 319

A3 28,0 69,3 48,6 % 311

A4 25,4 69,0 44,3 % 291

A5 23,2 65,7 32,4 % 301

A6 26,0 58,0 52,0 % 285

* rendement réduit de 20 % pour tenir compte des courts tours, des trains de pulvérisateur, …

** tubercules fritables = % de 50 mm + sur le 35 mm +

En ce qui concerne les rendements à mi-

saison, le pseudo-labour (A3) arrive en tête

avec 28 tonnes de 35 mm + par hectare, légè-

rement devant l’absence de travail profond à

l’arrière-saison (A1) mais nettement devant

(près de 20 % de différence) le labour de

septembre (A5) ! Sans tirer de conclusion

hâtive (en l’absence actuelle d’analyse statis-

tique), on remarquera toutefois que l’an der-

nier, le classement des rendements à mi-

saison et finaux était identique : A3 en pre-

mier, A1 en deuxième et A5 en dernier (sans

considérer l’objet A2 qui n’a pu être testé en

2008). Les résultats 2008 confirmeraient

donc en première approche ceux de 2007.

En matière de tubérisation (nombre moyen

de tubercules par cinq plantes), on constate

que les trois itinéraires sans labour (A1, A3

et A4) occupent quasi ex-aequo la première

place légèrement devant le labour d’été (A5),

le labour hiver (A6) occupant le dernière

place avec plus de dix tubercules en moins

par cinq plantes que le trio de tête.

Les tubercules apparaissent cependant relati-

vement plus gros dans cet objet A6 (pourcen-

tage de tubercules fritables le plus élevé).

L’avancement du labour du mois de janvier

au mois de septembre semble, dans le cas de

cet essai, conduire à un effondrement du

pourcentage de « fritables » (objet A5 par

rapport à l’objet A6).

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Enfin, pour ce qui est des poids sous eau, les

pommes de terre aux matières sèches les plus

élevées sont observées également dans

l’objet A1. Tous paramètres confondus, dans

les conditions expérimentales de 2008, les

meilleurs résultats globaux à mi-saison ont

été obtenus pour cet itinéraire A1 sans travail

profond si ce n’est celui du décompacteur au

printemps dont les ailettes étaient position-

nées juste sous le niveau inférieur des dents

de la herse rotative. Le labour de septembre

apparaît comme la technique la moins appro-

priée.

Ces moyennes à mi-saison ne doivent cepen-

dant pas cacher la forte variabilité qui a pu

être notée dans les résultats et qui est due aux

dégâts qui ont touché la placette au cours des

violents épisodes orageux rencontrés après la

plantation. Les quatre répétitions de chaque

objet expérimental, disposées de manière

aléatoire en « damier » au sein de la parcelle

d’essai (dispositif statistique dit en blocs

aléatoires complets) ont permis cependant de

s’affranchir au maximum de ces effets néfas-

tes.

Greenotec asbl Rue de la Charmille 16, B-4577 Strée-lez-Huy

Contact :

Ir. Weykmans Sébastien, Coordinateur

GSM : 0478/222.756

Tél. : 085/27.49.78

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