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Vers un écosysteme d'information ouvert

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Une réflexion sur la manière, pour une administration publique, d’envisager le nouveau paradigme induit par la nouvelle société du savoir et de le traduire dans sa stratégie informatique en se basant notamment sur l’utilisation des standards ouverts et des logiciels libres.

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REPUBLIQUE ET CANTON DE GENEVE Département des constructions et des technologies de l'information

Centre des technologies de l'information

Observatoire technologique Téléphone +41 (22) 388 13 50 • Fax +41 (22) 388 13 57 • www.geneve.ch/

Vers un écosystème d'information ouvert

Auteur Patrick GENOUD, Giorgio PAULETTO et Jean-Marie LECLERC Observatoire technologique

Version / date d’enregistrement V 1.0/ 2007-04-18

Table des matières

1 LA VISION...................................................................................................................................... 2 1.1 La technologie au service de la société ........................................................................................... 2 1.2 L'information comme ressource stratégique................................................................................... 3 1.3 La maîtrise de nos systèmes d'information ..................................................................................... 4

2 VERS UN ECOSYSTÈME OUVERT.............................................................................................. 5 2.1 L'approche systémique...................................................................................................................... 5 2.2 Un écosystème d'information ouvert................................................................................................ 7 2.3 Pourquoi un écosystème d'information ouvert ? ............................................................................ 7

3 STRATEGIE RETENUE ............................................................................................................... 10 3.1 Au niveau sociétal ............................................................................................................................ 10 3.2 Au niveau organisationnel............................................................................................................... 10 3.3 Au niveau technologique................................................................................................................. 11 3.4 Eléments de base pour répondre aux impératifs identifiés.......................................................... 11

Annexe 1 : Clarification des notions ................................................................................................. 16

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1 LA VISION Avec le nouveau millénaire, nous entrons dans une ère nouvelle de l'information, de la connaissance et du savoir. Les technologies de l’information et de la communication, qui en sont les moteurs, induisent des changements profonds sur les organisations privées et publiques et sur la société en général. Leur principal effet est d’amplifier les qualités ou les défauts des organisations antérieures au travers d'une extraordinaire dynamique du changement liée à une complexité grandissante. D’un côté les utilisateurs expriment aujourd'hui des exigences croissantes, que ce soit en terme de performances, d'interactivité, de simplicité ou de personnalisation. De l’autre l'administration dispose de nouveaux outils lui permettant de déployer une volonté d’innovation jamais vue jusqu'ici.

Par ailleurs, la globalisation, la diffusion de la technologie, l'essor d'Internet et le flux massif d'informations créent un nouvel environnement aussi bien pour les administrations que pour les entreprises qui les oblige à se tourner vers leurs clients et à s'adapter continuellement à un environnement changeant. Les organisations doivent ainsi devenir plus efficientes et l'économie plus innovante. Dans ce contexte il serait faux de considérer les technologies comme une fin en soi. Elles doivent plutôt être envisagées dans une approche holistique qui prend en compte le développement harmonieux de la société, les besoins réels des utilisateurs et la nécessité de maîtriser la gestion des données, de l'information et des processus. L'évolution constante des technologies, tout comme celle des métiers qu'elles sont amenées à servir, nous conduit naturellement à définir une stratégie à même de prendre en compte cette dynamique.

Cette stratégie se base sur une vision déclinée selon les trois axes forts présentés dans ce chapitre. Le premier envisage une technologie au service de la société et du citoyen. Le second insiste sur la nécessité de considérer l'information comme une ressource stratégique, comme un véritable capital sociétal. Et le troisième met en évidence l'exigence de conserver la maîtrise de nos systèmes d'information.

1.1 La technologie au service de la société La mission de l'administration n'est pas celle du secteur privé auquel on aurait faussement tendance à la comparer. Le secteur public doit en effet répondre à un certain nombre de contraintes fortes ayant une incidence directe sur les stratégies à adopter lors de la prise en compte des nouvelles technologies. Ces exigences dépassent largement le cadre technique et inscrivent notre stratégie dans une vision globale prenant également en compte les mutations et les enjeux sociaux d'aujourd'hui et de demain. Le développement technologique seul ne garantit ni la croissance économique, ni la compétitivité à long terme. Il doit être accompagné d'une réflexion prenant en compte le fait que nous sommes entrés de plain-pied dans une société de l'information et du savoir dont la dynamique aura des implications fortes et encore difficilement évaluables sur le développement et le mode de fonctionnement de notre société et de nos institutions.

Nous relèverons tout d'abord la nécessité de placer le citoyen au centre des réflexions en privilégiant celles qui sont axées sur les usages des technologies plutôt que sur les technologies elles-mêmes. Mais les usages doivent être compris ici dans leur acception la plus large qui intègre les problématiques clés régissant les rapports entre technologies et société. Ce sont les problématiques que l'on retrouve dans le référentiel e-Société1 élaboré par l'Observatoire technologique du CTI et validé en 2002 par la délégation du Conseil d'Etat aux systèmes d'information. Des notions telles que l’inclusion, l’éthique ou la valeur ajoutée au niveau de la société y sont explicitement reconnues comme des dimensions importantes

1 Référentiel e-Société, P. Genoud et G. Pauletto, Observatoire technologique, Centre des technologies de l’information du canton de Genève, 2002, http://ot.geneve.ch

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à prendre en compte si l’on souhaite développer de façon cohérente une administration électronique harmonieuse mettant le citoyen et la société au coeur des préoccupations.

En effet, les mutations que connaît actuellement notre société poussent les systèmes d’information de l’Etat à s’ouvrir activement sur l’ensemble des citoyens et sur la société civile. Mais le citoyen d'aujourd'hui doit être compris dans sa globalité. C'est un individu multiple dans les relations qu'il entretient avec son environnement, que ce soit avec l'administration genevoise, avec d'autres administrations, avec des communautés d'intérêt ou avec son environnement général.

Au-delà, les technologies de l'information et de la communication doivent être envisagées en regard des formidables capacités d'intégration qu'elles peuvent offrir, que ce soit en terme d'accessibilité aux contenus informationnels de l'administration par le plus grand nombre ou de valorisation des compétences d'individus marginalisés. Cette notion d'inclusion s’exprime à travers toute une série de problématiques dont il faudra tenir compte car elles constituent autant de lignes de fracture potentielles pouvant éloigner certains citoyens de leur administration.

Plus généralement, les technologies mises en œuvre par notre administration doivent toujours être envisagées dans un respect strict du cadre légal et du cadre éthique en vigueur, en conciliant notamment le nécessaire respect de la sphère privée avec la transparence des institutions demandée par les citoyens.

Une vision holistique de l'évolution des systèmes d'information nous amène ainsi à comprendre que l'avènement des technologies et les échanges croissants d'informations, qui sont autant de forces accélératrices nécessaires, devra parallèlement s'accompagner de forces décélératrices permettant une régulation incluse dans nos organisations de manière à atteindre un équilibre répondant aux réels besoins de notre société en général et de notre administration en particulier. Nous ne pouvons ainsi plus penser technologie sans penser société.

1.2 L'information comme ressource stratégique Le Sommet mondial sur la société de l’information qui s’est tenu à Genève en décembre 2003 a mis en exergue le rôle fondamental que joue l’information dans notre société. L'émergence des technologies de l'information et de la communication en constitue le catalyseur. Elles permettent un traitement industriel des données et de l'information, nous ouvrant ainsi les portes de la société du savoir.

L’information constitue la matière première dont se nourrit la société du savoir. Et son rôle est tout aussi important au niveau d’un gouvernement ou d’une administration puisqu’une grande part de leurs tâches a trait à la gestion et à la mise en valeur du capital informationnel, que ce soit au niveau de la prestation de services, de la nécessité de recueillir des données, de la prise de décisions, de la responsabilisation à l’égard des résultats ou encore de la préservation du patrimoine. L'Etat n'est dans la plupart des cas que le dépositaire de cette information. Il doit en garantir la valorisation, la pérennité, la sécurité et l'indépendance.

Les technologies informatiques ont fait passablement évoluer les règles régissant l’exploitation de cette ressource. Non pas que les principes de base aient changé : la nature de l’information reste identique, que son support soit numérique ou non. Mais les potentialités du numérique posent de nouveaux défis lorsqu’on parle d'interopérabilité et de transversalité, de confidentialité, de pérennité ou de classement, tout comme elles offrent des opportunités encore insoupçonnées en terme de partage, de transparence ou de valorisation.

Ces différents aspects nous amènent naturellement à promouvoir la nécessité de gérer l’information comme une ressource stratégique de l’administration genevoise, comme un

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véritable patrimoine sociétal qui représente un enjeu primordial pour l’évolution de notre société (pour illustration, le coût d'une hypothétique reconstruction du Système d'Information du Territoire Genevois (SITG) est estimé à près de 80 millions de francs). Cela implique de la maîtriser efficacement et conformément aux exigences légales, de la mettre à disposition du public de manière accessible, d’en respecter la confidentialité, d’en garantir la protection et la disponibilité. Les incidences technologiques d’une telle vision imposent des choix adaptés en terme de sécurité, d’architecture et de normes d’échange notamment.

1.3 La maîtrise de nos systèmes d'information L'Etat de Genève est responsable de ses systèmes d'information qui constituent un capital inestimable. Il est très naturellement amené à en revendiquer la meilleure maîtrise possible, sachant que ces systèmes sont trop complexes et évoluent trop rapidement pour que l'on puisse prétendre en avoir une maîtrise totale.

La notion de maîtrise que nous évoquons dans cette section correspond à différentes problématiques qui s'inscrivent dans un espace très large contraint à la fois par des variables technologiques, financières, organisationnelles et sociétales.

Maîtrise signifie tout d'abord souveraineté. Si l'on admet la valeur stratégique de nos systèmes d'information, il est difficilement concevable de laisser guider leur évolution par nos fournisseurs informatiques. Mais cette volonté d'indépendance ne s'inscrit nullement dans une logique d'opposition à ces fournisseurs qui sont la plupart du temps nos partenaires. Elle exprime simplement la nécessité d'éviter les phénomènes de verrouillage (lock-in) engendrés notamment par un manque d'interopérabilité et de pouvoir ainsi bénéficier de la marge de manœuvre qui nous permet de remplacer indépendamment l'un ou l'autre composant de nos systèmes selon un agenda librement choisi. La pérennité des solutions déployées et des données que nous gérons est à ce prix.

Maîtrise signifie également capacité à gérer la complexité de nos systèmes, que celle-ci soit intrinsèque ou liée à l'interconnexion des systèmes entre eux. Car si nous avons appris à maîtriser la complexité des systèmes d'information pris indépendamment, nous n'en sommes par contre qu'aux prémices d'une véritable maîtrise de ces systèmes pris dans leur globalité. L'évolution actuelle de l'administration impose en effet un décloisonnement des services qui offre des opportunités extraordinaires mais qui complique singulièrement notre tâche. La transversalité des données et des processus que nous sommes amenés à gérer place ainsi la notion d'interopérabilité au cœur de nos préoccupations.

La situation est encore complexifiée par l'évolution rapide que connaissent les technologies, les organisations et la société en général. La maîtrise de nos systèmes d'information leur impose ainsi une flexibilité permettant de pouvoir s'adapter constamment à ces changements. Cette flexibilité, on doit la retrouver au niveau des technologies en amenant les notions de composants, de services et de virtualisation notamment; mais il faut également l'envisager au niveau organisationnel et humain au travers la mise en place d'équipes pluridisciplinaires, en intensifiant les relations avec les communes, les autres cantons, la Confédération, ainsi qu'avec tous nos partenaires potentiels. Ceci n'hypothèque en rien notre indépendance. Au contraire, cela permet d'augmenter nos capacités et de mieux gérer nos connaissances grâce à une mise en commun de nos forces et de nos compétences. Dans tous les cas, la perpétuelle évolution de notre environnement nous incite à nous inscrire dans la dynamique imposée de manière à pouvoir répondre efficacement à la complexité qui en découle.

Finalement, la maîtrise de nos systèmes d’information doit pouvoir s'exprimer au niveau des coûts. La réalité des budgets nous impose de faire au mieux avec les moyens à disposition. Cela passe notamment par une mutualisation des compétences et des réalisations ainsi qu'en favorisant les partenariats de tous ordres (locaux, cantonaux, publics/privés) et en

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s'appuyant au mieux sur les compétences locales. La notion de communauté prend alors ici toute sa signification.

La multiplicité des acteurs, l'interconnexion des systèmes, leur interdépendance parfois, ainsi que leur évolution souvent rapide mais rarement synchrone, amène naturellement à avoir une vision systémique des choses et conduit à la notion d'écosystème ouvert présenté au chapitre suivant.

2 VERS UN ECOSYSTÈME OUVERT La vision dans laquelle s'inscrit ce plan stratégique témoigne résolument de la nécessité d'engager nos systèmes d'information dans la société du savoir. Ce nouveau paradigme, caractérisé par sa complexité ainsi que par la multiplicité des points de vue, des manières de fonctionner, des niveaux de maturité et des vitesses d'évolution de chacun, nous oblige à revoir nos modèles.

L'approche sociétale implique une ouverture de l'administration vers le citoyen et vers la société civile; le fait de considérer l'information comme une ressource stratégique amène les notions de pérennité et d'indépendance; enfin la maîtrise de nos systèmes d'information est fortement liée aux notions d'interopérabilité et de flexibilité. La stratégie envisagée doit pouvoir prendre en compte ces différents éléments en y incluant également les concepts d'efficience, d'innovation et de croissance sur lesquels veut bâtir le gouvernement genevois actuel.

Les notions de collaboration, de flexibilité et de cohabitation de systèmes ouverts et indépendant sont particulièrement bien prises en compte par les modèles que nous proposent les systèmes biologiques et économiques dont nous nous sommes inspirés dans notre approche.

2.1 L'approche systémique Appréhender un système complexe, tel que l'ensemble des systèmes d'information de l'administration, est une tâche ardue qui requiert des outils nouveaux. En effet, la méthode traditionnelle souvent utilisée est celle de l'analyse cartésienne qui utilise la causalité déterministe et le découpage mécaniste afin de résoudre un problème. Par ailleurs, les organisations sont aujourd'hui encore administrées de façon verticale et pyramidale en se fondant sur la division et la gestion scientifique du travail. Ces approches ont été créées et utilisées avec succès dans les économies de production de masse du secteur secondaire, mais ne suffisent plus à prendre en compte la complexité, l'hétérogénéité et la dynamique des systèmes actuels et de leur évolution.

La méthode scientifique classique est avantageusement complétée par une approche systémique qui cherche à comprendre par la synthèse et par l'analyse les relations que les éléments entretiennent entre eux. Cette approche propose de prendre en compte la complexité de façon globale et de gérer ces interrelations plutôt que de vouloir agir sur les éléments eux-mêmes. Un système est un ensemble d'éléments en interaction dynamique, organisés en fonction d'un but. Un système est global dans le sens où, d'une part, il ne se réduit pas à l'union de chacun des éléments qui le composent et que, d'autre part, des effets apparaissent au niveau global qui ne sont pas présents au niveau élémentaire. La notion d'organisation est essentielle, car selon son agencement un système n'aura pas les mêmes propriétés et permettra donc d'obtenir des résultats différents. La variété d'un système permet à celui-ci d'assurer un changement suffisant et d'éviter un phénomène de sclérose. L'une des règles qui permet de mieux comprendre la gestion d'un système est que pour pouvoir contrôler un système donné, il faut que le système de contrôle possède lui-même au moins la variété du système à contrôler. La notion clé devient alors la maîtrise de la

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régulation du système. Celle-ci permet d'orienter les actions du système vers les buts que l'on s'est fixé.

Un système est indéniablement influencé par des variables internes qui sont contrôlables. Toutefois afin de pouvoir établir une stratégie de façon fiable et pérenne, il est indispensable d'intégrer dans la régulation du système les variables externes. Celles-ci ne sont pas maîtrisables de façon endogène, mais représentent une facette cruciale dans le cadre de la stratégie informatique de l'administration. Elles sont de quatre grands types: les variables technologiques, les variables économiques, les variables sociétales et les variables politiques. Une stratégie robuste permet d'en tenir compte et de ne pas mettre en péril l'ensemble de la démarche lorsqu'un changement externe intervient. Idéalement, en tenir compte permet de les faire entrer dans la stratégie retenue, voire de les utiliser comme levier pour réaliser les objectifs à atteindre.

Dans un tel système, le mode d'organisation est essentiel. Une structuration classique du travail basée sur l'organisation scientifique apportée par Ford ou Taylor peut être vue comme une façon de garder le contrôle et de gérer efficacement les ressources. Aujourd'hui toutefois, les notions de motivation fondées sur des objectifs mesurables et par une coopération des agents doivent prendre le dessus. Un mode d'organisation coopératif permet de mettre en synergie les capacités des collaborateurs afin d'obtenir des résultats de qualité supérieure et avec des ressources moindres par rapport à d'autres modes d'organisation. Cette forme d'organisation émerge comme celle à privilégier dans le secteur tertiaire qui s'oriente vers la société du savoir.

Nous pouvons aisément reconnaître des caractéristiques complexes dans les systèmes d'information. Ce sont des ensembles de composants souvent hétérogènes, en interaction dynamique, évoluant dans des échelles de temps différentes, joignant les matériels, les logiciels et les humains afin de répondre à des missions évolutives, dans un environnement incertain et sous des contraintes fortes de ressources. Ainsi, l'approche systémique proposée permet de mieux prendre en compte ce domaine et d'approcher un sujet difficile car faisant intervenir des aspects humains, organisationnels et technologiques.

On voit donc se dégager l'une des notions centrales qui est celle d'un ensemble formé de différents acteurs et de différentes technologies qui développent un réseau leur permettant d'évoluer dans la société et dans l'économie. C'est cette notion que nous appelons écosystème en recourant à la métaphore biologique. Dans cette approche, les partenariats entre les différentes structures deviennent un enjeu essentiel, aussi bien dans le monde privé quand dans la sphère publique. Les deux visions souvent présentées comme opposées sont naturellement amenées à converger, bien que leurs objectifs soient différents, et peuvent trouver une nouvelle forme de coopération à travers des contrats de partenariats public-privé.

L'analyse des comportements des organisations montrent que les acteurs économiques sont de moins en moins des entités isolées, mais développent leurs stratégies au sein d'un réseau dense et global de relations. La constitution d'un écosystème d'affaires2,3 permet de développer les organisations en prenant en compte la complexité environnante. Ces organisations sont parfois simultanément en coopération et en compétition dans le but de satisfaire à la demande, d'avoir un meilleur rendement, de croître et d'innover. Il est aujourd'hui largement reconnu que le secteur des technologies de l'information forme naturellement un tel écosystème d'affaires.

Dans cet univers, une nouvelle ouverture se dessine, par nécessité, alimentée par la vague technologique, mais aussi et surtout par le moteur économique et sociétal. Cette ouverture 2 La notion d'écosystème d'affaires a été initialement apportée par James Moore en 1993 avec son article Predators and prey : a new ecology of competition paru dans Harvard Business Review (May-June 1993, pp. 75-86) et pour lequel l'auteur a obtenu le McKinsey Award. 3 Voir aussi sur Wikipedia: http://fr.wikipedia.org/wiki/écosystème_d'affaires

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permet de libérer les verrous de l'efficience, de la standardisation et de la flexibilité qui sont nécessaires à l'évolution des gouvernements et des entreprises. Cette ouverture permet également une synthèse de collaboration créative, de connectivité, d'accessibilité et de transparence, qui sont des exigences aujourd'hui demandées par les citoyens, les entreprises et les communautés d'intérêt.

2.2 Un écosystème d'information ouvert Ce document propose le concept d'un écosystème d'information ouvert4. Un système d'information peut être défini comme un ensemble de moyens humains, logiciels et matériels permettant d'acquérir, de conserver et de mettre en réseau des informations afin de permettre aux utilisateurs de décider et d'agir. Un écosystème d'information ouvert est lui défini comme un ensemble de systèmes d'informations qui incorporent et assurent des notions telles que l'interopérabilité, le développement collaboratif et la transparence. Ces caractéristiques permettent de créer des applications flexibles et orientées services dont les composants peuvent être détachés et recombinés pour répondre avec plus d'efficacité et d'efficience à des besoins changeants.

Un écosystème d'information ouvert est fondé sur un ensemble de principes fondamentaux. Il est:

• Interopérable: il permet, grâce à la mise en oeuvre de standards ouverts, l'échange, la réutilisation et l'interprétation des données au travers de différentes architectures et organisations.

• Centré sur l'utilisateur: il donne la priorité aux services répondant aux besoins des utilisateurs par rapport aux contraintes matérielles et logicielles.

• Collaboratif: il permet aux gouvernements, mais aussi aux entreprises et à la société civile, d'innover et de faire évoluer les projets en fédérant les efforts pour résoudre les problèmes; ce principe s'applique aussi bien de façon interne qu'externe aux organisations en s'appuyant alors sur la notion de partenariat.

• Pérenne: il maintient un équilibre et une durabilité, tout en répondant aux contraintes organisationnelles, techniques, financières et légales de façon à permettre son évolution et sa croissance.

• Flexible: il s'adapte aux nouvelles informations, technologies, protocoles et relations en les intégrant et en permettant la création de nouveaux marchés et de nouveaux processus gouvernementaux.

2.3 Pourquoi un écosystème d'information ouvert ? Plusieurs motivations importantes amènent à s'orienter vers un tel système. Les trois axes majeurs que l'ont peut souligner sont l'efficience, l'innovation et la croissance.

2.3.1 Efficience Les organisations choisissant un écosystème d'information ouvert gagnent en efficience, c'est-à-dire qu'elles améliorent le rapport entre les résultats obtenus et les ressources utilisées. Une plus grande concurrence entre les fournisseurs, les produits et les services aident par exemple les administrations à optimiser leur allocation de ressources. L'ouverture renforce d'une part la position de l'acheteur dans la négociation en lui offrant plus d'options et d'alternatives dans ses choix et, d'autre part, offre au vendeur un plus grand ensemble

4 Roadmap for Open ICT Ecosystems, Berkman Center for Internet & Society, Harvard Law School, 2005, http://cyber.law.harvard.edu/epolicy/.

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potentiel de clients avec lesquels il peut entrer en matière et fournir des propositions intéressantes. Cette opportunité de choix tend non seulement à abaisser les coûts, mais donne aux usagers une plus grande latitude pour fixer les pré requis et les performances souhaitées. Le coût n'est en revanche qu'un des facteurs à considérer et il doit être pondéré dans le processus de décision. Pour prendre une bonne décision on doit également tenir compte de façon équilibrée de critères tels que les priorités stratégiques fixées et les besoins des utilisateurs.

L'interopérabilité — dans son acception large au niveau de l'information, des processus et des technologies — permet une plus grande accessibilité, une flexibilité des architectures et une collaboration accrue. L'ouverture permet aux différents acteurs de faire des contributions et ainsi de pousser l'évolution aussi bien des technologies que des standards ouverts. Différentes populations, tant au sein des départements qu'à l'extérieur de l'administration, peuvent partager l'information pertinente et collaborer dans un but commun prédéfini. Mentionnons encore le fait que l'ouverture des standards facilite l'utilisation et la maintenance, et fournit aussi aux gouvernements des leviers dans les processus d'approvisionnement. Sur un autre plan, l'accessibilité est fondamentale lorsqu'on désire combler le fossé numérique que nos sociétés continuent souvent par ailleurs de creuser. Ce rôle est bien entendu souvent primordial pour une administration qui s'adresse à la population dans son ensemble, sans discrimination.

L'interopérabilité et l'utilisation de standards ouverts facilitent la transversalité en dépassant les silos verticaux et les architectures fermées. Les nouveaux composants s'intègrent plus aisément et facilitent les migrations qui ne sont, par ailleurs, pas éliminées. Les changements majeurs demanderont toujours des efforts concertés entre utilisateurs et fournisseurs, mais laissent le choix à chacun dans les configurations et les interfaces afin de minimiser les difficultés.

Les écosystèmes ouverts permettent une plus grande maîtrise des systèmes d'information. La dynamique de régulation du système est recentrée sur les usagers et les gouvernements plutôt que sur les seuls fournisseurs. Cela permet d'exercer un contrôle plus direct sur l'évolution, les fonctionnalités, les composants et la maintenabilité. Les décisions de migrations et le choix des sociétés fournissant le support sont en main des acheteurs, leur permettant une palette d'options et d'alternatives plus grande. Tout en évoluant vers des technologies plus récentes, les gouvernements peuvent assurer une plus grande efficience des dépenses publiques et une plus grande efficacité en atteignant les objectifs demandés par les citoyens et les entreprises.

La transparence et la sécurité sont deux éléments cruciaux des écosystèmes d'information ouverts. L'administration, les citoyens, les entreprises et les communautés d'intérêt doivent pouvoir trouver le point d'équilibre entre la protection, l'ouverture, les risques et les coûts. La sécurité n'est pas qu'une question de code informatique. Un cadre de sécurité équilibré, des processus et une gestion transparents sont plus importants que le choix de modèles techniques. Des standards ouverts de sécurité existent et peuvent être requis, que les logiciels soient d'ailleurs eux-mêmes ouverts ou non. Bien que leur utilisation ne garantisse pas à elle seule la sécurité, ces standards augmentent les chances que les vulnérabilités soient détectées et corrigées. L'enjeu devient bien plus celui d'assurer la sécurité du processus de construction de la réponse à une question, que celui de la sécurité des informations elles-mêmes.

2.3.2 Innovation L'innovation est fondamentale pour les gouvernements et les entreprises qui se trouvent aujourd'hui plongés dans un environnement économique globalisé. Il est aussi important de favoriser cet aspect dans le but de construire une industrie locale robuste.

S'orienter vers un écosystème d'information ouvert crée de nouvelles opportunités pour les utilisateurs finaux que ceux-ci soient les citoyens, les entreprises ou les

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administrations. Chacun peut réaliser à son niveau un bénéfice à mesure que l'innovation et la collaboration entre entités produisent une sélection plus large de produits et de services à coûts moindres en provenance d'un ensemble élargi de fournisseurs en concurrence. Au fur et à mesure que les technologies, les formats et les protocoles deviennent plus ouverts et accessibles, la diversité s'installe naturellement aussi bien au niveau du matériel que du logiciel ou des services.

L'accès ouvert favorise aussi l'innovation. Des partenariats naissent plus aisément dans le contexte d'un écosystème d'information ouvert que dans un monde propriétaire fermé. Les problèmes complexes d'aujourd'hui ne peuvent plus être résolus de façon isolée et unilatérale, que ce soit au niveau public ou privé. Les collaborations deviennent essentielles et un système ouvert permet aux utilisateurs de renforcer leurs compétences et de construire des communautés favorisant l'échange de savoirs. Bien que chacun reste maître de son propre domaine, les connaissances et les expériences contribuent à un essor de l'innovation dans la société.

Les gouvernements sont les garants de l'information des citoyens et des entreprises. Plus cette quantité d'information digitale s'accroît, plus il devient important de savoir la gérer et de garantir son stockage, sa modification, son partage, son analyse et sa synthèse sans contraintes de la part d'acteurs extérieurs. En évitant les effets de verrouillage dans une technologie propriétaire, les systèmes d'information ouverts permettent de mieux préserver ses propres options futures et l'indépendance de tout revirement stratégique d'un fournisseur particulier.

2.3.3 Croissance Pour un grand nombre de gouvernements, un écosystème d'information ouvert devient un facteur clé dans le développement économique local. On peut y voir un moteur de croissance dans un cycle qui crée un accès plus facile aux entreprises et au secteur public ce qui engendre à son tour des opportunités pour des entreprises sur le marché local. D'autres points de vue présentent une facette différente entre concurrence et ouverture, mais il est indéniable que les écosystèmes d'information ouverts sont aujourd'hui une force vive dans l'industrie des technologies de l'information. Les systèmes ouverts abaissent les barrières d'entrée des marchés et des communautés. En s'accordant sur des standards ouverts interopérables, les entrepreneurs bénéficient de coût inférieurs et de risques moindres car les implémentations sont plus faciles à réaliser et tendent à se répandre plus largement. Ceci est particulièrement favorable pour le tissu économique et social local qui doit fréquemment suivre le rythme des évolutions technologiques avec des ressources moindres que les gros acteurs du marché.

Les fournisseurs jouent toujours un rôle important dans un tel écosystème, mais les cartes ne sont plus toutes dans les mêmes mains, car l'accès et le contrôle des spécifications, des protocoles, des formats et des processus restent ouverts aux acteurs intéressés, en particulier aux usagers des technologies.

Les écosystèmes d'information ouverts ne sont pas la panacée et ne sont pas mis en oeuvre du jour au lendemain. Ils contribuent fortement à replacer les technologies de l'information au service de la société dans son ensemble, à valoriser le patrimoine sociétal constitué par l'information et les processus qui la régissent et à favoriser la maîtrise et la pérennisation des systèmes d'information. Ils sont inscrits dans une dynamique évolutive, ce qui nous oblige à apprendre à les gérer différemment. Ces écosystèmes sont hétérogènes, composés d'un mélange historique de technologies et de processus plus ou moins ouverts. Réussir à conduire la transition vers un écosystème plus ouvert par rapport à l'environnement qui l'entoure demande aux décideurs de voir plus loin que les seuls changements technologiques. Il s'agit surtout de maîtriser les éléments de régulation qui permettent de piloter les changements en tenant compte simultanément des variables technologiques, économiques, sociétales et politiques qui façonnent notre monde.

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3 STRATEGIE RETENUE

3.1 Au niveau sociétal La stratégie retenue s'inscrit dans la continuité des actions entreprises jusqu'ici. Elle doit donc être vue avant tout comme une stratégie de consolidation, que ce soit dans la prise en compte des composantes politiques, sociétales, organisationnelles ou technologiques. Mais au-delà du renforcement des bases sur lesquelles nous nous appuyons quotidiennement, l'objectif est de créer les conditions favorables à l'émergence de l'écosystème d'information ouvert esquissé au chapitre précédent.

Un tel écosystème permet selon nous de s'inscrire naturellement dans le changement de paradigme qu'induit notre entrée dans la société du savoir. Il contribue notamment à mieux répondre aux nouvelles missions du service public qui doit de plus en plus aller vers le citoyen et le placer au centre de ses préoccupations. Mais derrière l'apparente simplicité de cette intention se cache une réalité souvent complexe et difficile à mettre en œuvre tant elle se heurte à des obstacles divers, que ceux-ci soient politiques, humains, organisationnels ou technologiques.

La volonté d'ouvrir les systèmes d'information de l'administration genevoise vers le citoyen se traduit avant tout par la volonté de mettre à disposition des services en ligne destinés à faciliter et à étendre son accès à l’administration publique. Mais l'administration en ligne présente une complexité qui ne caractérisait pas la plupart des projets informatiques mis en place jusqu’ici et qui découle de plusieurs facteurs. Le premier est que par essence l'administration en ligne va influencer fortement les structures de l’administration. Le second est qu’elle dépasse largement le cadre purement technologique en raison notamment du rapport très fort qu’elle entretient avec le citoyen en particulier et avec la société en général. Et le troisième est que ses spécificités ne sont encore pas toutes définies.

Un autre défi auquel nous devrons pouvoir répondre est celui de l'innovation: le monde dans lequel nous vivons évolue constamment et les cycles caractérisant ces changements sont toujours plus courts. Cette réalité est particulièrement vraie dans le monde des technologies de l'information et de la communication. Le CTI devra donc être à même de faire profiter les utilisateurs des avancées significatives dans ce domaine en proposant une architecture flexible, capable d'intégrer au mieux des technologies hétérogènes en constante évolution. Mais ceci sans tomber dans le piège de la fuite en avant technologique et en jaugeant toujours les solutions mises en œuvre à l'aulne d'un outil tel que le référentiel e-Société qui permet de mesurer l'impact global des choix effectués.

L'innovation est également une plus value que nous pouvons cultiver plus efficacement avec nos partenaires, publics et privés, que ce soit au niveau local, régional ou national. Un certain nombre de nos partenaires naturels ont, et auront toujours plus à traiter des problématiques similaires aux nôtres. A terme les potentialités des collaborations menées à tous les niveaux devraient pouvoir s'exprimer au travers d'une véritable entité genevoise dans le domaine des technologies de l'information et de la communication.

3.2 Au niveau organisationnel L’administration en ligne recouvre l’utilisation de nouvelles technologies en vue de transformer les administrations publiques et d’améliorer radicalement les contacts avec les citoyens, les entreprises ou les autres administrations. Ces transformations se traduisent notamment par une approche centrée sur les prestations, par une simplification de l'administration, par une meilleure définition des nomenclatures métiers et par un décloisonnement des divers services et départements. Mais lorsqu’il s’agit de faire communiquer entre eux les différents systèmes d’information concernés, une transversalité

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croissante, qu'il faut envisager tant au niveau des données que de celui des processus, ne va pas sans poser des problèmes à la fois techniques et organisationnels. La solution est à rechercher au travers d'une approche globale, en évitant l'illusion d'une réponse uniquement technologique. C'est plutôt au niveau d'une orientation services qu'il faut la rechercher (voir §3.4.2).

Au niveau de la gestion de la connaissance, la transversalité implique une approche pluridisciplinaire permettant de prendre en compte les besoins de chacun. La notion de centres de compétence, que ceux-ci soient réels (entité structurelle) ou virtuels (via une collaboration en réseau), constitue ainsi une piste que nous envisagerons autant que possible.

La mise en œuvre de l'administration en ligne exigera la maîtrise de nos systèmes d'information; et le domaine est bien trop complexe pour s'y aventurer sans carte ni boussole. Une étape indispensable pour pouvoir aller sereinement de l'avant consistera donc à cartographier les systèmes d'information. Une vision de ces systèmes dans leur globalité ainsi que des interrelations qu'ils entretiennent entre eux permettra de mesurer les impacts des changements politiques et législatifs et d'envisager les évolutions fonctionnelles et technologiques qui peuvent en résulter.

La réalité actuelle des finances de l'Etat impose à l'administration genevoise d'inscrire ses réalisations futures dans une perspective d'efficience à laquelle l'informatique devra naturellement participer par une gestion rationnelle de ses ressources et des investissements effectués mais à laquelle elle pourra également contribuer en accompagnant activement le processus de simplification de l'administration et en facilitant la mutualisation de nos développements avec nos partenaires.

3.3 Au niveau technologique Les choix technologiques à venir devront s'inscrire dans la vision d'une administration en ligne construite sur des structures décloisonnées qui savent gérer la transversalité. Dans ce contexte ils seront confrontés à un double défi apparemment antinomique : permettre d'une part aux processus métier et à l'organisation d'évoluer à un rythme souvent rapide, tout en garantissant la stabilité des données utilisées par ces processus.

L'approche envisagée pour répondre à ces défis consiste à mettre en œuvre une architecture orientée services (SOA pour Service Oriented Architecture) qui constitue une véritable architecture d'intégration, à même de prendre en compte l'hétérogénéité des solutions (voir § 3.4.2).

Mais le succès d'une telle approche dépend de la maîtrise de nos architectures basée notamment sur des notions d'urbanisation et des pré requis d'interopérabilité et de standardisation forts.

3.4 Eléments de base pour répondre aux impératifs identifiés La stratégie retenue s'inscrit pleinement dans le changement de paradigme que nous sommes en train de vivre et qui nous impose, et nous imposera toujours plus, de continuellement adapter nos organisations et notre manière de fonctionner. La charge nous incombe donc de favoriser l'émergence d'un écosystème d'information ouvert qui y contribuera largement.

Le concept fondamental sur lequel s'appuie la notion d'écosystème ouvert est évidemment celui d'ouverture. Ce mot doit être compris ici dans son acception la plus large qui peut grandement varier suivant le contexte dans lequel il est utilisé. Il véhicule des valeurs essentielles comme l'accès et l'usage à des ressources, que celles-ci soient du code

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informatique, des données, de l'information ou du savoir. L'ouverture constitue ainsi le terreau sur lequel l'intelligence collective en réseau est la mieux à même de s'exprimer.

Un écosystème ouvert ne se décrète pas. Tout au plus peut on faciliter son émergence en mettant en oeuvre les éléments essentiels à son développement. Nous en avons identifié cinq qui constituent les piliers sur lesquels nous pourrons asseoir la stratégie retenue, à savoir l'interopérabilité, l'orientation services, le passage des données au savoir, les standards ouverts et les logiciels libres. Chacun de ces éléments amène sa contribution à la notion d'écosystème ouvert, et par là même à notre stratégie, tout en entretenant avec les quatre autres des liens étroits garants de la cohérence de notre approche.

Une clarification des notions d'interopérabilité, de standard ouvert et de logiciel libre est donnée dans l'Annexe 1.

3.4.1 Interopérabilité L’interopérabilité des systèmes d’information de l'administration genevoise constitue une condition préalable indispensable si l’on désire mettre en place un service public compétitif et orienté vers les services aux citoyens. Elle contribue également à des impératifs stratégiques comme l’accessibilité, la sécurité ou la transversalité.

L’interopérabilité se situe au coeur du rapprochement des services de l'administration. Elle garantit leur pérennité et leur accessibilité dans le futur. L’interopérabilité constitue une exigence fondamentale pour développer une administration en ligne efficace, performante et durable. Plus généralement, elle doit être considérée comme un élément clé des architectures actuelles, qu’elles soient métiers, applicatives ou techniques.

Nous entendons porter à l'avenir la plus grande attention à la prise en compte des aspects techniques liés à l’interopérabilité tout en rappelant que cet élément est nécessaire mais pas suffisant lorsque l’on désire atteindre une interopérabilité effective. Même si la technologie peut constituer un levier fort, l’interopérabilité doit avant tout être envisagée comme une réponse à des besoins métiers en regard desquels les notions d’interopérabilité sémantique et organisationnelle sont essentielles.

3.4.2 Orientation service L'ouverture vers le citoyen et vers les partenaires de l'administration consiste notamment à leur offrir des services qui répondent très directement à leurs attentes et à leurs besoins tout en masquant la complexité des processus sous-jacents. Mais la complexité intrinsèque des processus administratifs est encore accrue par la nécessaire transversalité qu'impose une telle démarche. Il s'agit alors de partager des données décentralisées et d'orchestrer des processus à travers différentes structures organisationnelles tout en s'accommodant de technologies hétérogènes; la contrainte supplémentaire étant de garantir la stabilité des données tout en préservant la capacité d'évolution des processus.

Une réponse à ces défis est apportée par les architectures orientées services qui permettent d'installer la transversalité au cœur même des différentes structures organisationnelles. Dans ces architectures, les services (porteurs de la logique métier) sont construits comme des composants modulaires, de granularité plus fine que les applications et présentant à la fois une forte cohérence interne et des couplages externes faibles.

Le fait de dissocier l'architecture applicative en composants de services discrets (qu'ils soient services de moyens ou orientés citoyens) permet d'affranchir les processus métiers des contraintes liées à une plateforme applicative. Cela favorise en outre le partage et la réutilisation des données et des processus et contribue à réutiliser plus efficacement les connaissances métiers qui y sont transcrites. De par leur modularité, les services fournissent un environnement d'exploitation qui permet de rester centré sur les besoins des métiers et

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des utilisateurs dont l'évolution continue et parfois rapide nécessite une adaptabilité et une flexibilité permanentes.

Il est fondamental en contrepartie d'avoir une vision axée sur les données (en termes de redondance, de qualité et de cohérence). De plus une communication et une collaboration véritables à tous les niveaux sont essentielles pour capitaliser sur une telle approche.

Dans le souci de répondre aux impératifs ci-dessus, la stratégie retenue envisage une orientation service bâtie sur des standards ouverts qui s'y inscrivent de façon naturelle.

Gardons cependant à l'esprit le fait que l'architecture orientée services sur laquelle nous nous appuierons durant les années à venir ne constitue que les prémices de l'architecture événementielle de demain, seule à même de prendre en compte la dynamique et la complexité croissante du monde dans lequel nous vivons.

3.4.3 Des données au savoir Les térabytes de données stockés dans les serveurs de l'administration genevoise recèlent des potentialités énormes, pour autant qu'on les envisage dans une perspective large. Ces données constituent en effet le premier maillon de la chaîne qui les relie au savoir, via l'information (en contextualisant ces données) et la connaissance (en donnant un sens à cette information). C'est l'appropriation de ces connaissances qui constitue le savoir. Le passage des données au savoir constitue l'un des défis auxquels il faudra savoir répondre dans les années à venir.

La qualité, la sécurité et la pérennité de nos données constituent à cet égard les conditions essentielles permettant de construire sur des bases solides. Mais les véritables enjeux se situent au-delà. Car la vraie valeur ajoutée, pour le citoyen, pour les entreprises et pour l'administration elle-même se situe au niveau de la valorisation, du partage et de la réutilisation des données au travers de nos systèmes d'information. Et cette nécessaire transversalité des données impose de les replacer au centre de nos préoccupations. Cela passe notamment par une volonté affirmée de :

• Favoriser l'interopérabilité sémantique en se basant sur des standards ouverts; • Créer des architectures de données interopérables; • Donner les moyens techniques permettant d'améliorer la qualité des données; • Permettre de stocker les données et d'y accéder de manière efficace, sûre et

pérenne; • Créer des registres et des référentiels de données; • Établir des vocabulaires de données (nomenclatures) communs; • Contextualiser les données aux moyens de métadonnées; • Donner du sens aux informations en favorisant l'utilisation d'ontologies; • Réutiliser les données plutôt que les dupliquer; • Garantir à la fois la transparence des données et de l'information tout en respectant

la sphère privée des individus.

La stratégie retenue envisage de proposer les outils et les infrastructures à même de répondre à ces différentes problématiques, sachant que les vrais défis dans ce domaine sont humains et organisationnels avant d'être technologiques.

3.4.4 Standards ouverts La standardisation est au cœur de la notion d'interopérabilité que celle-ci soit technique ou sémantique. Les standards ouverts répondent ainsi de façon très naturelle à la nécessité de mettre en œuvre de manière maîtrisée et flexible la notion d'interopérabilité au sein et entre différents écosystèmes d'information.

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L’utilisation de standards ouverts participe naturellement à la notion d’écosystème ouvert avec pour vocation de répondre aux objectifs stratégiques suivants :

• Maximiser l’indépendance des utilisateurs en augmentant leur liberté d’action, en évitant de leur imposer des décisions technologiques et en prévenant les phénomènes de verrouillage de la part des fournisseurs informatiques. Car aussi bien l’orientation que la vitesse d’évolution d’un standard ouvert ne peuvent être imposées par un seul acteur.

• Contribuer à la maîtrise et à la flexibilité des systèmes d'information en garantissant leur interopérabilité.

• Améliorer l’échange et l’accessibilité à l’information; capitaliser sur le savoir en favorisant la valorisation des données et des informations.

• Favoriser la pérennité de l’information et de la connaissance puisque leur accès n’est plus lié à un fournisseur informatique ou à un produit particuliers.

• Tendre à une meilleure gestion des coûts via une diminution du prix des licences induite par une concurrence accrue. L’utilisateur peut ainsi choisir le composant logiciel présentant le meilleur rapport qualité/prix.

• Assurer que tous les acteurs soient au même niveau (faible coût d’entrée sur le marché) concernant l’utilisation de ces standards, ce qui favorise l’innovation.

• Réduire la fracture numérique en plaçant les standards ouverts au rang de biens communs de l’humanité (gratuits, libres d’accès et de droits).

Il ne faut pas négliger non plus les enjeux politiques et sociaux auxquels peuvent répondre les standards ouverts. Les rapports entre l’administration et les citoyens sont en effet en train de changer. Ces derniers, dans un souci de transparence des institutions, revendiquent toujours plus vivement la possibilité de pouvoir accéder aux standards mis en œuvre. Or seul le processus d’élaboration d’un standard ouvert permet de prendre en compte valablement les intérêts de la société civile.

3.4.5 Logiciel libre L'utilisation des logiciels libres dans l'administration genevoise répond à des objectifs stratégiques clairs :

• Permettre une plus grande neutralité dans le choix de fournisseurs et contribuer ainsi à nous libérer de positions de monopole qui risquent de mettre en péril notre indépendance.

• Assurer une meilleure maîtrise de nos systèmes d’information et favoriser ainsi leur pérennité.

• Capitaliser sur les développements réalisés par et pour l'administration genevoise et permettre leur mutualisation avec nos partenaires, favorisant ainsi une meilleure maîtrise des coûts.

• Permettre une plus grande adaptabilité aux besoins des utilisateurs. • Favoriser l'ouverture, la transparence et le droit à l’information pour les citoyens et

les entreprises. • Contribuer à l’émergence de compétences et d’une économie locales liées au

développement de logiciels libres.

Les standards ouverts et le logiciel libre constituent les éléments importants d'un écosystème ouvert. Ils partagent des bases communes puisque ils résultent tous deux d'un processus d'élaboration collaboratif, auquel chacun peut contribuer, basé sur le partage des connaissances et la réutilisation des composants. Cette philosophie amène naturellement la plupart des solutions de logiciels libres à implémenter des standards ouverts.

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L’adoption de standards ouverts et de logiciels libres doit être vue comme un processus global et rationnel. Ces éléments constituent un axe fort de notre stratégie mais ils ne doivent pas représenter une fin en soi. L'accès au code source et l'ouverture des standards constituent en effet des paramètres essentiels qui ne doivent cependant pas occulter d'autres caractéristiques comme leur maturité, leurs qualités intrinsèques ou leur réponse aux besoins exprimés.

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Annexe 1 : Clarification des notions Les notions d'interopérabilité, de standard ouvert et de logiciel libre sont au cœur de la stratégie retenue. Elles sont brièvement clarifiées ci-dessous.

Interopérabilité L’interopérabilité désigne ici la capacité qu’ont ces technologies ainsi que les processus qu’elles soutiennent à échanger des données et à permettre le partage de l’information et de la connaissance.

Il est nécessaire de considérer l’interopérabilité comme une problématique globale. L'interopérabilité passe en effet d’abord par la réorganisation des processus administratifs et par la nécessité de prendre en compte la notion de partage de l’information. On considère ainsi trois aspects fondamentaux liés à l’interopérabilité des systèmes d’information:

1. L’interopérabilité organisationnelle qui concerne principalement la modélisation des processus métiers dans le but de prendre en compte la collaboration entre services qui n’ont pas les mêmes structures organisationnelles et qui ne gèrent pas des processus similaires. Pratiquement, il s’agit de s’assurer que les processus pourront être facilement intégrés les uns aux autres et exploités par d’autres utilisateurs. L’interopérabilité organisationnelle a notamment pour objectif de prendre en compte les besoins des utilisateurs en proposant des services accessibles, aisément identifiables et orientés vers eux. Cela passe par la nécessité de rendre la complexité organisationnelle des services transparente pour les utilisateurs.

2. L’interopérabilité sémantique qui garantit que le sens exact des informations échangées peut être compris par toute application qui n’a pas été conçue initialement dans ce but. L’interopérabilité sémantique facilite l’agrégation et la réutilisation d’informations hétérogènes (de par leur nature ou leur mode de création) et participe ainsi de manière essentielle à la valorisation de notre patrimoine informationnel. Cela va donc beaucoup plus loin que la simple connexion de différentes sources d’information, l’objectif plus fondamental étant de faciliter le passage de l’information à la connaissance.

3. L’interopérabilité technique concerne les aspects liés à la connexion des systèmes et des services informatiques. Cela touche des domaines aussi variés que la définition d’interfaces et de standards ouverts, l’intégration des données, la couche middleware, la présentation et l’échange d’informations, l’accessibilité ou les services de sécurité.

Standards ouverts Retenant la définition proposée par la Commission européenne5, on peut qualifier un standard d’ouvert si :

1. Il est adopté et maintenu par une organisation à but non lucratif. Son développement se fait sur la base d’une procédure de décision ouverte disponible à toutes les parties intéressées (par consensus ou à la majorité par exemple).

2. Il a été publié et sa spécification est disponible soit gratuitement, soit à un coût nominal. Il doit être permis à chacun de le copier, de le distribuer et de l’utiliser soit gratuitement, soit à un coût nominal.

5 European Interoperability Framework for Pan-European eGovernment Services, IDABC, Commission Européenne, 2004, http://europa.eu.int

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3. La propriété intellectuelle, c’est-à-dire les brevets éventuels, de tout ou partie du standard est cédée irrévocablement sur une base libre de royalties.

4. Il n’y a aucune contrainte à sa réutilisation.

Du point de vue des organismes étatiques et para-étatiques, l’ouverture des standards constitue une qualité première lorsque l’on désire développer une relation tournée directement vers les citoyens et les entreprises. D’une part, leur définition et leur évolution constituent les enjeux d’un débat public dans lequel peuvent intervenir un grand nombre d’acteurs concernés; d’autre part, comme leur utilisation ne peut être contrôlée par un seul acteur, celui qui veut les intégrer à de nouveaux produits peut se les approprier. Cependant, en tant que biens collectifs, ils n’appartiennent à personne dans le sens où aucun acteur ne peut profiter plus qu’un autre de la valeur ajoutée générée par l’adoption publique d’un standard.

Logiciel libre Selon la Free Software Foundation6, un logiciel est considéré comme libre si sa licence garantit à l’utilisateur les quatre libertés suivantes qu’elle numérote de zéro à trois :

0. La liberté d’exécuter le programme, pour tous les usages.

1. La liberté d’étudier le fonctionnement du programme et de l’adapter aux besoins. Pour ceci l’accès au code source est une condition requise.

2. La liberté de redistribuer des copies, donc d’aider son voisin.

3. La liberté d’améliorer le programme et de publier des améliorations, pour en faire profiter toute la communauté. Pour ceci l’accès au code source est une condition requise.

Le logiciel libre représente aujourd’hui bien plus qu'un simple phénomène de mode. Le support professionnel s’organise et de grandes, moyennes et petites entreprises offrent leurs compétences dans le domaine. Des projets de logiciels libres d’envergure se fédèrent autour de communautés organisées ayant un mode de fonctionnement et une feuille de route clairs. Le modèle même du logiciel libre est robuste aux changements économiques, car le produit ne dépend plus d’un seul acteur, mais d’un écosystème qui lui permet de vivre et d’évoluer.

6 Free Software Foundation, http://www.fsf.org/