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Bulletin des éleveurs bovins et caprins du Bassin laitier Charentes-Poitou 15 décembre 2013 L ' alimentation : facteur premier de la rentabilité Tous les éleveurs savent combien le manque de fourrages peut être pénalisant pour le revenu et le moral. On est plus tranquille avec un stock de sécurité ou la possibilité de récolter des surfaces initialement destinées à la vente. Face aux aléas, la réactivité nécessaire peut encore dépendre de la météo quand il s’agit d’implanter derrière une céréale. L’achat est parfois la seule solution, avec un coût. Produire du fourrage coûte et le distribuer aussi. Les conséquences ne sont pas minces financièrement mais également en terme de pénibilité, de temps de travail et d’investissement. Il faut adapter l’existant et ne pas oublier cet enjeu dans l’élaboration de tout nouveau projet. Des études et des témoignages éclairent ces problématiques dans ce bulletin. La recherche ose explorer de nouvelles pistes pour répondre aux aléas climatiques, nous éleveurs, devons oser de nouvelles pratiques. Faire face aux aléas climatiques Coût de la distribution de l'alimentation édito Ce bulletin est réalisé par les Chambres d’agriculture de Poitou-Charentes avec la collaboration des organismes de la filière laitière Charentes-Poitou 1. Synthèse des enquêtes en élevage : priorité à la production Une trentaine d’enquêtes a été menée auprès des éleveurs de la région suite à la sécheresse 2011. Les principaux choix retenus par les éleveurs pour pallier le déficit fourrager sont : L’alimentation des génisses : 1 er poste modifié. 90% des éleveurs ont modifié ce poste, le foin est remplacé par de la paille et du concentré. La majorité des éleveurs sont prêts à renouveler cette stratégie dans le cas d’un épisode similaire. L’achat de fourrages : plus d’un éleveur sur deux (maïs ensilage, paille). L’ensilage de céréales immatures : 1/3 des éleveurs enquêtés. En moyenne 9 ha ont été ensilés. Cet ensilage remplace une partie de l’ensilage de maïs ou de l’enrubannage distribué aux vaches avec ajustement de la complémentation. Plus d’un éleveur sur deux a implanté des dérobées derrière céréales récoltées l'été en foin (moha, millet + trèfle d’Alexandrie, sorgho fourrager). Derrière une céréale récoltée en grain, la plupart des éleveurs ont implanté un mélange céréales/protéagineux ou un RGI sur une partie de la surface afin de l’ensiler au printemps de l’année suivante. Le niveau de production et les pratiques autour des laitières n’ont jamais été un levier d’adaptation. Le réseau Bovins Lait Poitou-Charentes a étudié l’impact économique d’une sécheresse sur les exploitations laitières de la région ainsi que les adaptations possibles des systèmes fourragers. Pour cela, après avoir observé les adaptations mises en place par les éleveurs suite à la sécheresse de 2011, des simulations ont été réalisées en proposant de nouveaux plans d’alimentation permettant de pallier les manques de fourrages. Adapter les systèmes d'alimentation face aux aléas climatiques Bovins Ca prins Gilles AMIOT Responsable Recherche et Développement au Brilac Le changement climatique aura (et a d’ores-et- déjà) des impacts sur les productions fourragères en Poitou-Charentes : production avancée et accrue au printemps, en baisse l’été, prolongée et accrue en automne, variabilité accrue entre années. Les stratégies de stockage devront être adaptées en conséquence. Pour quantifier les évolutions climatiques et agricoles perceptibles en Poitou-Charentes, un Observatoire Régional sur l’Agriculture et le Changement cLimatiquE (ORACLE) a été mis en place par la CRA- PC et l’ADEME, librement consultable sur : http:// www.poitou-charentes.chambagri.fr/innovation/ changement-climatique/oracle-observatoire.html Le réchauffement climatique, une réalité à intégrer ! Evolution du cumul annuel de l’évapotranspiration potentielle sur l’ensemble de la région Poitou-Charentes de 1959 à 2011. Source : ORACLE Poitou-Charentes.

Vivre du lait region poitou

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Page 1: Vivre du lait region poitou

Bulletin des éleveurs bovins et caprins du Bassin laitier Charentes-Poitou

n°15décembre 2013

L 'alimentation : facteur premier

de la rentabilité

Tous les éleveurs savent combien le manque de fourrages peut être pénalisant pour le revenu et le moral.

On est plus tranquille avec un stock de sécurité ou la possibilité de récolter des surfaces initialement destinées à la vente. Face aux aléas, la réactivité nécessaire peut encore dépendre de la météo quand il s’agit d’implanter derrière une céréale. L’achat est parfois la seule solution, avec un coût.

Produire du fourrage coûte et le distribuer aussi. Les conséquences ne sont pas minces financièrement mais également en terme de pénibilité, de temps de travail et d’investissement. Il faut adapter l’existant et ne pas oublier cet enjeu dans l’élaboration de tout nouveau projet.

Des études et des témoignages éclairent ces problématiques dans ce bulletin. La recherche ose explorer de nouvelles pistes pour répondre aux aléas climatiques, nous éleveurs, devons oser de nouvelles pratiques.

Faire face aux aléas climatiquesCoût de la distribution de l'alimentation

édito

Ce bulletin est réalisé par les Chambres d’agriculture de Poitou-Charentes avec la collaboration des organismes de la filière laitière Charentes-Poitou

1. Synthèse des enquêtes en élevage : priorité à la production

Une trentaine d’enquêtes a été menée auprès des éleveurs de la région suite à la sécheresse 2011. Les principaux choix retenus par les éleveurs pour pallier le déficit fourrager sont : • L’alimentation des génisses : 1er poste modifié. 90% des éleveurs ont modifié ce poste, le foin est remplacé par de la paille et du concentré. La majorité des éleveurs sont prêts à renouveler cette stratégie dans le cas d’un épisode similaire. L’achat de fourrages : plus d’un éleveur sur deux (maïs ensilage, paille).

• L’ensilage de céréales immatures : 1/3 des éleveurs enquêtés. En moyenne 9 ha ont été ensilés. Cet ensilage remplace une partie

de l’ensilage de maïs ou de l’enrubannage distribué aux vaches avec ajustement de la complémentation.

• Plus d’un éleveur sur deux a implanté des dérobées derrière céréales récoltées l'été en foin (moha, millet + trèfle d’Alexandrie, sorgho fourrager). Derrière une céréale récoltée en grain, la plupart des éleveurs ont implanté un mélange céréales/protéagineux ou un RGI sur une partie de la surface afin de l’ensiler au printemps de l’année suivante.

• Le niveau de production et les pratiques autour des laitières n’ont jamais été un levier d’adaptation.

Le réseau Bovins Lait Poitou-Charentes a étudié l’impact économique d’une sécheresse sur les exploitations laitières de la région ainsi que les adaptations possibles des systèmes fourragers. Pour cela, après avoir observé les adaptations

mises en place par les éleveurs suite à la sécheresse de 2011, des simulations ont été réalisées en proposant de nouveaux plans d’alimentation permettant de pallier les manques de fourrages.

Adapter les systèmes d'alimentation face aux aléas climatiques

Bovins

Caprins

Gilles AMIOTResponsable Recherche

et Développement au Brilac

Le changement climatique aura (et a d’ores-et-déjà) des impacts sur les productions fourragères en Poitou-Charentes : production avancée et accrue au printemps, en baisse l’été, prolongée et accrue en automne, variabilité accrue entre années. Les stratégies de stockage devront être adaptées en conséquence.Pour quantifier les évolutions climatiques et agricoles perceptibles en Poitou-Charentes, un Observatoire Régional sur l’Agriculture et le Changement cLimatiquE (ORACLE) a été mis en place par la CRA-PC et l’ADEME, librement consultable sur : http://www.poitou-charentes.chambagri.fr/innovation/changement-climatique/oracle-observatoire.html

Le réchauffement climatique, une réalité à intégrer !

Evolution du cumul annuel de l’évapotranspiration potentielle sur l’ensemble de la région

Poitou-Charentes de 1959 à 2011. So

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Page 2: Vivre du lait region poitou

A partir des adaptations constatées en élevage, le Réseau Bovins Lait a simulé l’impact d’une sécheresse forte sur les rendements, soit 30 % en moins, sur 4 exploitations type dont 2 Spécialisées : système fourrager « Silo Fermé » et « Maïs-Herbe », et 2 Lait+Culture : système fourrager « Maïs-Herbe » et « Maxi-Stock ».Lorsqu’il y a du pâturage pour les vaches, celui-ci est favorisé au détriment des surfaces de fauche. Une partie des surfaces en céréales est ensilée (mais jamais plus d’1 ha pour 10 VL). Des plantes estivales sont implantées mais seules celles semées précocement (après ensilage de céréales immatures) ont un rendement suffisant et sont récoltées. L’objectif est de garder des fourrages de qualité pour les vaches et maintenir la production laitière. Pour cela, le foin est réservé aux laitières, le maïs grain est finalement ensilé et si cela ne suffit pas, une part est achetée sur pied à proximité. L’achat de paille et de concentrés vient compléter le déficit fourrager notamment pour les génisses.

Les adaptations nécessaires pour faire face aux fortes baisses de rendement coûtent à l’exploitation de 37 à 45 €/1000 L (hors achat de litière).

D’autres solutions sont envisageables, mais ... • Utiliser le levier animal est peu réalisé mais possible :

réformes prématurées, tarissements avancés, diminution de la production… Il peut s’avérer malgré tout risqué avec des conséquences difficilement chiffrables (résultats reproduction, sanitaires, valorisation de la viande…).

• L’ensilage de céréales immatures reste peu intéressant notamment en conjoncture céréalière favorable, lorsque les niveaux de production par vache sont élevés et qu’il y a des cultures de maïs à proximité.

Rendre le système moins sensible :• Avoir du report sur pied : pour compenser tout ou partie du

déficit, il faudrait cultiver davantage de maïs si les terres le per-mettent afin de les ensiler si l’année est mauvaise.

• Avoir du report de stock en silo : bien qu’idéale, cette solution implique une immobilisation forte de trésorerie difficilement supportable surtout en conjoncture céréalière favorable. D’autant plus que cela implique un investissement dans des capacités de stockage supplémentaires. Vouloir couvrir l’ensemble d’un tel déficit fourrager n’est donc pas judicieux. Il faut plutôt trouver un juste milieu (0.3 à 1 T MS/UGB selon le potentiel des sols) et constituer des stocks progressivement sur plusieurs années quand le cours des céréales est moins élevé.

• Réaliser une épargne de précaution correspondant au niveau d’aliment à acheter pour compenser le déficit fourrager. L’analyse des 12 dernières années montre que les pertes de rendement allant jusqu’à 30 % sont très rares, on peut donc rechercher un juste milieu en calculant une épargne de précaution correspon-dant à des pertes fourragères de 15 à 20 %. Cette remarque est aussi valable pour le calcul des reports de stock.

Retrouvez l’étude complète sur le site internet de votre Chambre d’agriculture départementale (rubrique élevage) ou auprès de votre conseiller Bovins lait Anne-Laure Veysset, CA 16Jérôme Piveteau, CA 79Arnaud Mouillet, CA 86Christophe Mauger, CA 17

Impact d'une sécheresse (moins 30 % de rendement) sur 4 exploitations type

SpécialiséSilo Fermé

SpécialiséMaïs-Herbe

Lait et CultureMaïs-Herbe

Lait et CultureMaxi stock

Structure SAU : 60 haSFP : 53 ha46 VL à 7000 L/VL produitsLait vendu : 306 000 L63 UGBChargement : 1,2 UGB/ha SFP

SAU : 75 haSFP : 56 ha58 VL à 8100 L/VL produitsLait vendu : 452 400 L79 UGBChargement : 1,4 UGB/ha SFP

SAU : 128 haSFP : 53 ha58 VL à 8100 L/VL produitsLait vendu : 452 400 L79 UGBChargement : 1,5 UGB/ha SFP

SAU : 128 haSFP : 62 ha73 VL à 8600 L/VL produitsLait vendu : 605 900 L104 UGBChargement : 1,7 UGB/ha SFP

Impact sécheresseDéficitfourrager:

99 T MSSoit 1,6 T MS/UGB

122 T MSSoit 1,6 T MS/UGB

127 T MSSoit 1,6 T MS/UGB

160 T MSSoit 1,5 T MS/UGB

Compensation du déficitpar:

7 ha de céréales ensilées 7 ha de moha après l’ensilage de céréales

Achat de paille et de concen-tré pour compenser le reste du déficit

6 ha de céréales ensilées 6 ha de moha après l’ensilage de céréales

Achat de 2.5 ha de maïs ensilageAchat de paille et de concen-tré pour compenser le reste du déficit

3.3 ha de maïs ensilage prévu en grain6 ha d’ensilage de céréales immatures6 ha de moha après ensilage de céréalesAchat de paille et de concen-tré pour compenser le reste du déficit

5 ha de maïs ensilage prévu en grain

Achat de 4 ha de maïs ensilageAchat d’aliment sécheresseAchat de paille et de concen-tré pour compenser le reste du déficit

Impacts écono-miques (hors achat de litière)

- 13 679 €Soit 45 €/1000 L

- 18 481 €Soit 41 €/1000 L

- 16 576 €Soit 37€/1000 L

- 24 747 €Soit 41€/1000 L

2. Adaptation des systèmes alimentaires et fourragers

Faire face aux aléas climatiques (suite)

Page 3: Vivre du lait region poitou

Etude réalisée par le

Réseau d’élevage caprin Poitou-Charentes

Vendée et Maine et Loire

Sur chaque exploitation du réseau, les tonnages de fourrages et de concentrés distribués ont été recueillis. Les itinéraires de distribu-tion (du lieu de stockage à la gueule de l’animal) ont été décrits avec le matériel utilisé.Les coûts des matériels retenus comprennent les charges fixes, les frais d’utilisation et d’entretien. Les coûts ayant trait à la main d’œuvre ne sont pas comptabilisés. Seul le temps consacré à la distribution a été relevé.

Les coûts de distribution ainsi obtenus ont été ramenés à la tonne de matière sèche.

Attention : les données recueillies sont des données réelles, fournies par les éleveurs. Certains investissements sont amortis. Les coûts moyens présentés ne peuvent donc pas être utilisés en tant que tel pour calculer un projet économique (installation, investissement, agrandissement,…).

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Coût et temps consacrés à la distribution de l’alimentation selon les systèmes alimentaires

Source : Réseau d’élevage caprin Poitou-Charentes Vendée et Maine et Loire - 2012* Attention : compte tenu du petit nombre d’élevages en systèmes « foin et pâturage » et « foin séché vrac ou balles » ces données sont à prendre avec précaution.

Ensilage Foin et déshydratés

Foin dominant

Foin séché vrac ou balles*

Foin et pâturage* Ensemble

Nombre d’élevages 8 7 9 2 3 29

Coût de la distribution en €/tonne 35 € 25 € 21 € 68 € 16 € 28 €

Soit au 1000 litres 46 € 34 € 30 € 124 € 30 € 42 €

Temps quotidien consacré à la distribution

2h30 2h00 2h20 1h50 1h40 2h10

En 2009, le réseau d’élevage caprin a calculé le coût de production des fourrages de l’implantation à la récolte, rendu exploitation. En 2011, ce travail a été complété par le calcul du coût de la distribution pour arriver à un coût alimentaire du champ à la bouche de l’animal. 29 élevages du réseau d’élevage caprin de Poitou-Charentes, Vendée et Maine et Loire ont fait l’objet de cette enquête.

Coût de la distribution aux chèvresFourrageLe coût global de la distribution des fourrages est en moyenne de 34 € par Tonne de matière sèche. Ce coût est d’abord constitué par des coûts de distribution puis de stockage. Les coûts de transforma-tion concernent uniquement le système "foin séché vrac ou balles". Le coût global de la distribution des fourrages varie de 11 (quart inférieur) à 62 € (quart supérieur) par Tonne de Matière Sèche. Une analyse par nature de fourrage montre qu’il y a assez peu d’écart de coût entre l’ensilage et les différents types de foin (34-35€/T). Le coût de stockage et distribution de l’enrubannage est un peu inférieur (25€/T)ConcentréLe coût global de la distribution des concentrés est en moyenne de 24 € par Tonne. Ce coût est d’abord constitué par des coûts de dis-tribution puis de stockage. Les coûts de transformation concernent très peu d’élevages. Le coût global de la distribution des concentrés varie de 6 (quart inférieur) à 54 € (quart supérieur) par tonne.

Temps de travailEn 2002, le temps consacré à l’alimentation, de la reprise des ali-ments à leur distribution représentait 45% du travail d’astreinte et s’établissait à 3h20 par jour avec des écarts très grands entre éle-vages, de 2h40 pour le quart inférieur à 10h20 pour le quart supé-rieur (Source : Le travail en élevage caprin Résultats du réseau d’élevage caprin Poitou-Charentes et Pays de la Loire août 2002).

Aujourd’hui, le temps consacré à l’alimentation a fortement dimi-nué avec en particulier la généralisation de l’automatisation de la distribution des concentrés. Il s’établit en moyenne à 2h10 dans les 29 élevages enquêtés. L’élevage le plus rapide consacre, à peine une heure par jour à alimenter son troupeau. Cet éleveur assure à lui seul l’alimentation de 550 chèvres. Mécanisé pour distribuer sa ration « ensilage de maïs, enrubannage et foin », il a aussi automatisé la distribution des concentrés. L’élevage le moins efficient passe 4 heures à alimenter son troupeau. Cet éleveur distribue le foin et les concentrés manuellement. C’est aussi un « animalier » qui aime passer du temps auprès de ses animaux.

Les éleveurs enquêtés passent en moyenne 1h40 pour distribuer les fourrages avec des écarts allant de 1h pour le quart inférieur à 2h30 pour le quart supérieur.Ils consacrent en moyenne à peine 30 mn pour distribuer les concentrés mais ce chiffre masque des situations très contrastées entre les éleveurs qui ne passent pas de temps au quotidien car ils ont automatisé cette tâche et ceux qui distribuent l’ensemble des concentrés à la main.

Même si les écarts observés entre exploitations sont grands et souvent liés à des situations bien spécifiques, des tendances se dessinent :• Le coût de la distribution de l’alimentation, c’est 28 €/tonne dis-

tribuée et 42€/1000 litres en moyenne soit environ 7% du coût de production d’un atelier laitier caprin (avant rémunération de la main d’œuvre).

• Du champ à l’auge, le coût de la distribution représente un tiers du coût du fourrage.

• Du fournisseur à l’auge, la distribution représente 5% du coût du concentré.

• Depuis 10 ans, le temps de travail consacré à la distribution de l’alimentation a considérablement diminué.

• Pour éviter le dérapage du coût de la distribution, il faut ajuster au mieux les investissements avec les tonnages à distribuer.

Du champs à l'auge, le Réseau Caprins calcule le coût des aliments

Page 4: Vivre du lait region poitou

GAEC LES CABANESAlexandre LORITSaint Cyr du Doret (17)400 chèvres Saanen

Il a fait le choix de la mécanisation pour distribuer les fourrages. Lorsque l’étude « coût de

la distribution » des réseaux d’élevage caprin affiche une moyenne de 1h40 de temps de distribution journalier, Alexandre en passe à peine 1 heure. Son coût « stockage + distribution » par tonne de fourrage est 10% inférieur au coût moyen observé et 50% inférieur lorsque l’on y inclut la rémunération de la main d’œuvre.

Qu’est-ce qui vous a poussé à choisir une dérouleuse électrique automotrice et un tapis d’alimentation ?« Avant de construire le bâtiment, nous avions 200 chèvres. Il fallait 1h30 pour affourager les animaux. Aujourd’hui on peut dire qu’avec 2 fois plus de chèvres, je mets 2 fois moins de temps et c’est beaucoup moins pénible ! On ne balaye plus, le tapis nous sort les refus en tas ! Je gagne aussi de la place sous le bâtiment : moins de surfaces en béton et moins de toiture ! Le système est démontable et le bâtiment peut être réorganisé ou réorienté si nécessaire. Cela donne beaucoup de souplesse. »

Il y a sûrement des inconvénients ?« Oui, par exemple, on passe plus de temps lorsque l’on veut distribuer plusieurs foins en même temps et les chèvres d’un même lot doivent être en vis-à-vis pour recevoir la même alimentation. Mais l’inconvénient premier, c’est l’accès pour le paillage. Pour les bottes carrées, il y a un chariot roulant, tout simple, qui peut s’adapter au-dessus du tapis. On pose la botte et on peut pailler en hauteur, en se déplaçant avec la botte. Nous utilisons des bottes rondes qui, elles, ne tiennent pas en équilibre sur le chariot ! »

Si c’était à refaire ?« Je ne prendrais qu’un seul tapis avec un bâtiment en longueur. Ca diminuerait encore le coût et le temps de travail. Actuellement, il y a 2 tapis pour les chèvres et 1 tapis pour les chevrettes et même si la dérouleuse est automotrice, il faut la déplacer. La contrainte de l’élevage, c’est le temps à passer et la pénibilité de certaines tâches. Pour moi, c’est là-dessus qu’il faut travailler pour que l’activité fonctionne bien. »

EARL LEMAIRé et AMIOTChey (79) - 300 chèvres AlpinesPatrick CHARPENTIERSepvret (79) - 300 chèvres Saanen

Suite à l’enquête sur le coût de la distribu-tion de l’alimentation, nous avons constaté que l’utilisation de matériel en co-propriété permettait de réduire fortement le coût de la distribution. C’est le choix qu’ont fait 2 ex-ploitations du Mellois depuis de nombreuses années sur tout leur matériel.

Ces 2 exploitations à 200 mètres l’une de l’autre ont acheté en dé-cembre 2009 une autochargeuse de 23m3 (21 000 € HT) utilisée en complément du pâturage des chèvres, en place depuis déjà une dizaine d’années.

Pourquoi avez-vous fait le choix de vous équiper en commun ?Tout le matériel que nous achetons, nous l’achetons pour une utilisation commune. Chacun note ses heures d’utilisation ou le nombre d’autochargeuse et nous comptons en fin d’année les frais de chacun en utilisant les tarifs d’entraide. Les 2 troupeaux pratiquaient le pâturage mais pour optimiser encore la production d’herbe nous avons opté pour l’affouragement en vert.Cette technique nous permet d’exploiter des parcelles éloignées, en vert donc une rotation des cultures plus simple sur la totalité du parcellaire, et d’optimiser l’exploitation de l’herbe en récoltant à des stades plus tardifs que pour la pâture par exemple. De plus, nous avions l’habitude de ressortir les chèvres après la traite du soir ce qui était parfois contraignant, ce temps de pâturage a été remplacé par une autochargeuse. Exploiter l'herbe à l'automne n’était pas toujours possible non plus avec le pâturage.Le pâturage n’engendre que très peu de frais en comparaison à l’af-fouragement (charge de mécanisation supplémentaire, plus de temps de travail …) sans l’achat en commun il était difficile de faire cet investissement.

Comment s’organise le travail avec un matériel de distribution en commun ?Nous utilisons l’autochargeuse chacun notre tour dans la journée, ça ne pose aucun souci d’organisation. C’est même un atout car en cas d’absence il est plus facile de se faire remplacer sur l’exploitation que s’il fallait sortir les chèvres.Nous exploitons également les prairies à leur meilleur stade et il n’y a pas d’arrêt dans la distribution du vert car si une exploitation manque d’herbe à une période, elle utilise les parcelles de l’autre exploitation.Un autre échange de bon procédé, c’est le nettoyage des toutes les prairies des 2 exploitations en hiver par les vaches de Patrick.

Si c’était à refaire ?Nous rachèterions notre prochaine autochargeuse ensemble ! Avec un démêleur peut être pour une distribution plus régulière à l’auge. La copropriété permet une économie évidente (de moitié) des frais d’amortissement, des frais d’entre-tien et d’optimiser le temps d’utilisa-tion de l’autochar-geuse qui néces-site quand même un tracteur (75 chevaux) attelé en permanence de mars à novembre!L’affouragement en vert permet aussi de passer seulement 35 minutes en moyenne (selon la proximité des parcelles) pour récolter et distribuer 300kg de MS soit 2h par tonne de MS contre 3h30 en moyenne.Le seul impératif est d’avoir confiance en l’autre en termes de temps d’utilisation !

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40 minutes gagnées à l'aide d'une dérouleuse électrique + tapis

La co-propriété pour économiser

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Page 5: Vivre du lait region poitou

Sandra NOVAKIngénieure de recherche Systèmes Fourragers Innovants à l’INRA de Lusignan

A l’INRA de Lusignan, on cherche à répondre aux nouveaux défis auxquels l’élevage laitier aura à faire face dans 50 ans, notamment en

ce qui concerne les aléas climatiques plus fréquents et la raréfaction des ressources en eau et en énergie fossile. Pour cela une nouvelle approche est en cours : c’est une expérimentation visant à reconstruire complètement un système d’exploitation (nommée OasYs) en se basant sur la diversification des ressources fourragères, le développement du pâturage et des légumineuses, le recyclage de l’eau et des éléments nutritifs dans un système alliant élevage et cultures.

En quoi la diversification des fourrages est-elle nouvelle par rapport à ce que l’on peut déjà observer dans les fermes ?Nous avons imaginé d’aller le plus loin possible dans la diversification avec à la fois des mélanges d’espèces et de variétés. Par exemple, nous allons tester différents mélanges variétaux pour avoir une production d’herbe aussi en été et en hiver, et nous mettons en place des associations avec des légumineuses pour des cultures fourragères annuelles du type sorgho ou maïs. Nous allons également diversifier en introduisant des arbres et des arbustes, qui auront pour vocation de produire un fourrage complémentaire aux périodes creuses, mais aussi de décaler la production d’herbe à leur pied et de limiter le stress thermique des cultures (effet "parasol"), en plus des autres effets bénéfiques attendus, comme l’amélioration du bien-être animal, de la fertilité des sols, ou l’augmentation des auxiliaires de culture. Cette diversification "des fonctions" que l’on attend pour les arbres, est également recherchée en introduisant d’autres fourrages aux fonctions multiples, comme par exemple le navet ou la betterave riches en eau ("boire en même temps que manger"), ou encore des cultures que l’on peut pâturer, ensiler ou récolter en grain en fonction des besoins en fourrage, comme par exemple le méteil.

Ce nouveau système fourrager implique de revoir complètement la stratégie de l’élevage ?L’exploitation laitière sera d’autant mieux adaptée et apte à répondre à ses nouveaux objectifs qu’il y aura une cohérence entre ce qui est fait au niveau du système fourrager et la conduite de l’élevage. Dans notre système nous allons tester plusieurs leviers.Le premier concerne la mise en place de deux périodes de vêlage centrées sur le printemps et l’automne afin de limiter

les besoins du troupeau pendant les périodes creuses d’été et d’hiver et de rendre le système moins tributaire des aléas pouvant survenir à ces périodes de l’année. Le deuxième consiste à limiter les périodes non productives durant la carrière de la vache (avant son premier vêlage et pendant les phases de tarissement). Pour cela les génisses seront conduites en vêlage précoce à deux ans et la durée de lactation sera allongée à 16 mois. Le troisième levier repose sur l’évolution génétique du troupeau, qui a pour objectif de disposer de vaches plus rustiques, moins sensibles aux maladies, avec de bonnes capacités de reproduction et bien adaptées au pâturage et à des ressources fourragères de qualité limitée à certaines périodes de l’année. Pour cela un croisement à trois voies (Holstein, Jersiaise et Rouge Scandinave) favorisant l’effet d’hétérosis est mis en place.

Mais mettre en place des mélanges graminées-légumineuses et pâturer autant que possible, en utilisant le minimum d’irrigation et d’intrants c’est déjà un grand pas dans la bonne direction et, d’ailleurs, des éleveurs précurseurs ont déjà bien compris que c’est une bonne manière de mieux vivre du lait.

Où en êtes-vous et quel est le « planning » de cette expérimentation ?Le système a été lancé officiellement fin juin 2013 en présence de responsables scientifiques de l’INRA et d’acteurs de la recherche et du développement. Nous n’en sommes qu’au tout début et le système va être installé progressivement sur notre site. Nous avons commencé à mettre en place sur 90 ha les différentes rotations que nous avons imaginées et les premiers arbres vont être implantés en 2014. Nous testerons progressivement de nouveaux mélanges de variétés et d’espèces fourragères. Les IA avec des semences de Jersiaise et de Rouge scandinave ont débuté avec notre troupeau Holstein. Puis suivront les vêlages en deux saisons et l’allongement des lactations. Pendant la mise en place du système, nous cherchons à nous améliorer progressivement sur la durée de pâturage et la réduction des concentrés. Pour pouvoir étudier les effets du nouveau système fourrager et de la stratégie d’élevage associée, ce système va être expérimenté sur le long terme.Nous avons également la volonté d’échanger avec la profession agricole sur ce système qui a pour vocation d’apporter des réponses aux questions auxquelles les éleveurs devront bientôt tous faire face.

Questions à Sandra Novak, Ingénieure de recherche Systèmes Fourragers Innovants à l’INRA de Lusignan

Face aux aléas climatiques, que fait la recherche ?

Page 6: Vivre du lait region poitou

Faire du bon foin pour les chèvres

CaprinsBovins

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avec le soutien financier de FranceAgriMer, du CRIEL Charentes-Poitou et du BRILAC

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Baromètre : Prix moyen payé au producteur en Poitou-Charentes

Le prix du lait est calculé par le SCEES après enquête mensuelle des laiteries. C’est un prix du lait moyen payé au producteur, toutes primes comprises et toutes qualités confondues. Attention, il ne prend pas en compte les compléments de prix. Les données 2013 sont provisoires.

Collecte du lait de chèvre

Evolution indice IPAMPA - Lait de chèvre

Cotation Beurre - Poudre

Sour

ce F

ranc

e Ag

ricol

e

€/T

Evolution de la collecte nationale (source FranceAgriMer):janvier-septembre 2012/2013 : - 8,9 %

sur 12 mois glissants (octobre à septembre 2012/2013)

+ 4,2 % + 5,4 %

2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 1er trim. 545 610 627 643 584 571 613 2ème trim. 469 544 555 539 511 513 554 3ème trim. 521 592 602 568 558 546 611 4ème trim. 654 711 716 676 649 651 ANNEE 530 601 613 594 565 560

Soja 48%, Brésil, pellet départ Montoir€/T

L'indice IPAMPA est un indicateur du coût de production du lait. Il couvre 65 à 80 % des charges totales de l'atelier.

Sour

ce F

ranc

eAgr

iMer

Evolution indice IPAMPA - Lait de vache

2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 1er trim. 291 389 304 303 328 339 334 2ème trim. 253 314 256 273 316 306 326 3ème trim. 305 346 263 319 344 306 362 4ème trim. 367 323 286 332 327 311 ANNEE 302 344 278 306 328 316

€/T Blé tendre rendu Rouen

1400

1900

2400

2900

3400

3900

4400

1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013

euros / tonne

Cotations Beurre - Poudre

Prix facturation beurre standard 82 % MG Prix contrat poudre de lait 0% MG conso humaine

La valorisation des fourrages dans la ration est un levier important pour maîtriser le coût alimentaire dans les élevages.

La plaquette FAIRE DU BON FOIN POUR LES CHèVRES synthétise des données bibliographiques et l’expérience des techniciens caprins du Réseau REDCap.Elle est en ligne sur le site www.redcap.terredeschevres.fr

REDCap – Réseau d’Expérimentation et de Développement Caprin sur l’autonomie et l’alimentation en herbe des chèvres

Une réunion destinée aux éleveurs de vaches laitières est prévue fin mars avec pour thème LES ATOUTS DE LA RéGION FACE à LA SORTIE DES qUOTAS.

A l’initiative du GIE Elevage Poitou-Charentes, cette rencontre permettra de mettre en avant les atouts de la région. Les stratégies mises en place dans les différents bassins laitiers seront présentées tout comme l’intérêt mutuel que doivent se porter laiteries et éleveurs dans ce nouveau contexte plus ouvert. La marge de sécurité sera aussi évoquée car elle devient essentielle dans un monde sans quota avec du lait vendu sur le marché mondial.

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Document imprimé par Imprimerie Rochelaise - Le Nouvel R