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Biomécanique des traumatismes balistiquesO. Lamour, D. Tillant, A.Teboul, J.M. Laborie

Département d'anesthésie-réanimation - Samu de Paris, hôpital Necker, 149, rue de Sèvres, 75743 Paris cedex 15, Francee-mail : [email protected]

POINTS ESSENTIELS· La connaissance du mécanisme lésionnel est importante en matière de traumatologie balistique car l'apparence des lésions est souvent trompeuse.

· La différence entre traumatologie militaire et traumatologie civile tend à s'estomper. Tandis que les conflits se déroulent de plus en plus souvent entre une armée d'un côté et une « guérilla » de l'autre, la fin du monde bipolaire et la prolifération subséquente ont induit l'usage d'armes militaires lors de violences civiles.

· Les traumatismes non pénétrants et les traumatismes tangentiels ne doivent en aucun cas être négligés en raison de leurs spécificités et de leurs dangerosités avérées.

· Les différentes tentatives de modélisation des traumatismes balistiques restent imparfaites. D'une part, elles ne reproduisent que très partiellement l'élasticité et l'inhomogénéité du corps humain. D'autre part, elles ne permettent pas de se figurer la multitude des situations que la réalité produit.

· Les protections balistiques ne réduisent pas à néant, en toutes circonstances, le risque d'une blessure grave dans une zone couverte.

· Tout projectile traversant un gilet de protection sera déstabilisé de façon plus précoce dans l'organisme et verra son potentiel délabrant augmenté.

· Les munitions « non-létales » n'existent pas. De même, la notion de létalité réduite ou de « sub-létalité » ne signifie pas que les projectiles tuent « un peu » mais plutôt qu'ils blessent « toujours », parfois mortellement.

· Il n'existe pas de corrélation systématique entre une munition et les lésions qu'elle provoque.

· En dehors du champ de bataille, les progrès de l'imagerie permettent de plus en plus souvent d'éviter le recours à la chirurgie.

· Une petite munition placée « pleine cible » peut se révéler nettement plus pathogène qu'une plus grosse située « juste à côté » !

INTRODUCTION

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Les traumatismes balistiques (TB) ne sont plus, depuis longtemps, le domaine exclusif des militaires sur les champs de bataille. Ils ont investi le domaine civil, le plus souvent par le fait de violences urbaines. Le problème est mondial. Parmi les pays à haut niveau socio-économique [1], une nation comme les États-Unis, dont la Constitution autorise en son deuxième amendement la possession et la vente quasi-libre des armes à feu, en paie un lourd tribut en termes de morbidité et de mortalité [2], en particulier chez les enfants [3]. Les nations moins favorisées ne sont pas non plus épargnées [4]. Au drame humain qu'ils constituent, les TB entraînent de plus un coût financier considérable [5].

En traumatologie, la bonne connaissance des mécanismes lésionnels permet souvent de guider les démarches diagnostiques et thérapeutiques. Pourtant, la littérature traitant de la balistique abonde d'articles qui, sans fondamentalement remettre en cause les principes de cette science, questionnent son intérêt pratique en clinique humaine. Il est donc utile de faire le point sur les différentes manières qu'a un projectile d'exprimer son action délétère sur le corps humain.

BALISTIQUE THÉORIQUE

On distingue :

- la balistique proximale, qui correspond aux phénomènes se produisant depuis la mise à feu du projectile dans son lanceur, quel qu'il soit, jusqu'à la bouche de sortie du canon ;

- la balistique intermédiaire, qui analyse le comportement de la balle en « zone libre », c'est-à-dire entre le bout du canon et la cible ;

- la balistique terminale, encore appelée lésionnelle quand elle touche un organisme vivant. Elle décrit les interactions théoriques entre le projectile et la cible spécifique qu'est le corps humain en analysant les modes possibles de transfert énergétique et les lésions probables auxquelles on peut s'attendre. C'est plus particulièrement cette portion ultime du trajet d'un projectile qui va nous intéresser ici.

Le paramètre de base à prendre en compte est l'énergie cinétique potentielle (E) du projectile. Elle dépend de sa masse (m) et de sa vitesse (V) à l'arrivée sur cible. Ces valeurs sont reliées entre elles par la formule bien connue E = 1/2 m·V2. L'énergie potentielle d'un projectile croît donc beaucoup plus vite avec sa vitesse qu'avec sa masse. Curieusement, les marchands d'armes ont surtout cherché à offrir suffisamment de puissance pour augmenter la distance de tir et la précision, sans véritablement évaluer les liens qui pouvaient exister entre l'énergie pure et les dégâts provoqués.

Dès le XIVe siècle, les premières armes à feu propulsaient une lourde balle (20 à 40 g) en plomb grâce à une charge de poudre noire. Ce n'est qu'au XIXe siècle que la poudre pyroxylée, dite « sans fumée » et infiniment plus puissante que l'ancienne, fut adoptée. En parallèle, la surface interne des canons fut rainurée pour induire une rotation, augmentant ainsi la stabilité sur trajectoire, donc la précision du tir. L'arrivée des armes à rechargement automatique pouvant tirer en rafale aboutit aux armes de guerre d'aujourd'hui, avec leurs projectiles très légers (quelques grammes), animés d'une vitesse de rotation de plusieurs milliers de tours par seconde

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et dotés d'une vitesse de déplacement avoisinant 900 m/s. La notion de « calibre » correspond au diamètre interne du canon. Il indique le diamètre sagittal et constitue l'un des éléments de masse. Bien que les différentes classifications des projectiles se réfèrent à ce diamètre, la variabilité des unités de mesure (anglo-saxonnes ou métriques) et l'inhomogénéité des constructeurs rendent bien complexe l'établissement d'une norme (tableau   I) . Dans ce vaste catalogue, s'y retrouver parfaitement reste encore du domaine du vœu pieux !

Tableau I. Équivalences de calibre entre les classifications US (pouces) et OTAN (mm), indépendamment des charges propulsives.

OTAN (mm) 5,56 5,7 7,62 9 11,43 12 12,7US (pouces) .22

.223- .303 .38

.357.45 - .50

Le principe de base de vulnérance des projectiles est décrit depuis les « Traités de chirurgie de guerre » publiés à la fin du XIXe siècle par Delorme [6] : « La force vive des projectiles qui pénètrent nos tissus agit suivant des modes d'actions divers qui aboutissent tous à produire une plaie contuse et dilacérée. Ces modes d'action consistent en une compression, un écartement, une dilacération des tissus, un étirement, une abrasion et une projection ». Ainsi poursuit-il : « Les projectiles communiquent aux parcelles de tissu une quantité de force vive d'autant plus grande que leur vitesse restante est plus grande et que leur action plus abrasante. Les parcelles jouent le rôle de projectiles secondaires qui, propulsés en avant de la balle, préparent le trajet, puis qui, glissant sur les parois du projectile, étendent transversalement le canal de la plaie, le contusionnent et l'ébranlent plus ou moins ». Suivant les préceptes de cette époque, la vélocité des projectiles fut ainsi doublée passant de 396 à 731 mètres par seconde, grâce l'utilisation du blindage métallique de l'ogive antérieure de la balle. L'énergie cinétique se trouvant quadruplée, il aurait été logique de constater sur les théâtres d'opérations militaires un pouvoir délétère nettement supérieur. Or, ce fut l'effet contraire qui fut observé [7] [8]. L'effet purement mathématique de la vitesse était ainsi mis en défaut par les faits.

TENTATIVES DE MODÉLISATION

Des recherches ont été menées pour tenter de reproduire fidèlement les effets et le comportement d'une balle à l'intérieur du corps humain. Elles ont consisté en l'analyse expérimentale des phénomènes physiques induits par des tirs avec des armes et des munitions différentes sur des matériaux ayant vocation à simuler des tissus humains homogènes comme le tissu musculaire, à forte composante hydrique. Les pains de plastiline (sorte de pâte à modeler), d'argile, de savon sont tous des milieux figés et très peu élastiques. Les blocs de gélatine (10 % à 4 oC ou 20 % à 10 oC) sont plus adaptés car plus proches de l'élasticité et de la réactivité du muscle vivant. Plus récemment, d'autres matériaux d'expérimentation comme le kraton, association d'un polymère avec un gel transparent de paraffine de bougie ont été utilisés [9]. Classiquement, des tirs avec des projectiles variés et en différentes circonstances sont filmés grâce à des ultracaméras à 10 000 images par seconde. Les matériaux homogènes sont ensuite inspectés puis radiographiés afin de tenter de modéliser « l'empreinte » comportementale du projectile.

D'autres expérimentations en particulier animales (sur cochons vivants anesthésiés ou morts) ont été menées pour se rapprocher au mieux de la réalité humaine, inhomogène par nature. Pour des

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raisons éthiques, ces travaux auraient été « officiellement » abandonnés [10] [11]. Enfin, une équipe suisse a récemment fait état de la mise au point d'un os synthétique susceptible de se comporter comme la structure originale organique face à un projectile [12].

La balle constituant le « projectile matériel » par opposition au « projectile immatériel » représenté par les phénomènes d'ondes, ces travaux produisent, en cas de traumatisme pénétrant, les résultats suivants.

Lésions directes

Elles correspondent à une plaie de profondeur variable. Elles sont provoquées par le passage de la balle à travers les différents tissus successivement détruits par lacération ou écrasement au voisinage immédiat du projectile. Ce mécanisme est prépondérant pour les projectiles à faible vélocité (de 200 à 400 m/s). Tirées par des armes de poing, il peut s'agir de petits projectiles de.22 LR (2,6 g), de 6.35 mm (3,2 g) et de 7.65 mm (4,6 g), de moyens comme le 9 mm Parabellum (8 g) et de ses calibres correspondants (.38 Special et 357 Magnum) ou de plus lourds comme les .45 ACP (15 g) communément appelés 11,43 mm. Ceci reste vrai tant que ces projectiles ne se déforment pas trop à l'impact, ne se fragmentent pas et restent globalement stables sur la trajectoire in corpore.

Lésions indirectes

Les phénomènes d'ondes sont l'apanage des projectiles à vitesse moyenne ou élevée (de 600 à 1 000 m/s) qui sont tirées par des armes longues ou d'épaule en raison du recul important à la mise à feu. Ces ondes, mises en évidence par Harvey en 1948, peuvent être schématiquement séparées en deux [13].

La première, de type sonore, est générée par le déplacement du projectile dans l'air puis dans la cible. Cette onde précède la balle à la vitesse approximative de 1 000 m/s, c'est-à-dire qu'elle est plus rapide que la vitesse initiale propre du projectile. Elle se propage ensuite dans les tissus selon les trois axes orthonormés, avec une pression de crête élevée (plusieurs dizaines d'ATA), mais sur une très courte durée (quelques microsecondes). Elle ne serait en fait pas directement vulnérante, quel que soit le projectile concerné.

Immédiatement après, une deuxième onde dite « de choc » suit. Celle-ci correspond à la pénétration directe du projectile dans un milieu plus dense que l'air. Elle va se propager et entraîner une dilacération et un étirement des tissus concernés à proximité immédiate du trajet emprunté par la balle. Le phénomène va s'amortir après quelques cycles suivant une sinusoïde biphasique. Ce freinage serait à la base de la création d'une cavité pulsatoire que pourrait expliquer l'analogie avec un écoulement de fluide le long de la paroi du projectile. Si cet écoulement était purement laminaire (fluide incompressible et viscosité nulle), les tissus s'écarteraient simplement sur le passage de la balle, pour revenir ensuite à leur position d'origine. Mais ce n'est pas le cas, la viscosité des tissus et leur compressibilité, les caractéristiques de la balle, sa forme après impact, son éventuelle fragmentation créent une interface mobile « projectiles(s)-tissus », où va être abandonnée une certaine quantité d'énergie. L'écoulement est donc turbulent et les tissus sont accélérés plus ou moins fortement (donc irrégulièrement) selon

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la pression développée au contact du trajet de la balle. De proche en proche, une sorte de sphère de pression dont le diamètre peut, selon les cas, dépasser de 20 à 30 fois le diamètre du projectile, se déplace jusqu'à épuisement énergétique. Ce phénomène transitoire est à l'origine de la « cavitation temporaire ». On conçoit que, selon l'élasticité des tissus concernés (en l'occurrence faible dans les tissus liquidiens : foie, rate, estomac plein ou vessie pleine) et l'angle de pénétration, les dégâts anatomiques soient variables. Le point de rupture au cisaillement peut donc être théoriquement atteint à une certaine distance du canal de perforation de la balle. Cette notion serait essentielle à la compréhension des lésions retrouvées à distance du trajet effectif du projectile. La mise en évidence de fissures radiées à partir du trajet de la balle dans la gélatine expérimentale permet partiellement de tracer ces phénomènes temporaires de cavitation. Il existe donc autour du cône d'attrition correspondant au passage du projectile, sur son trajet direct, une cavité temporaire, fugace, correspondant à la limite des dilatations induites par la surpression. Après mise en jeu des mécanismes d'élasticité, on aboutit à une zone d'équilibre appelée « cavité résiduelle. C'est cette cavité résiduelle qui correspond aux dégâts objectifs et permanents (le fameux « cône d'attrition ») alors que les limites de la cavité temporaire n'évoquent eux que les limites d'un volume potentiellement touché sans pour autant être nécessairement et automatiquement lésé.

Dans les traumatismes tangentiels, en particulier crâniens, l'énergie cinétique potentielle peut être transmise au parenchyme cérébral par l'intermédiaire de la structure indéformable qu'est la boîte crânienne. Cette transmission en milieu solide est à haut rendement, donnant aux projectiles (même de faible vélocité) non pénétrants une aptitude non négligeable à léser la table osseuse et à provoquer des dégâts intraparenchymateux, comme le prouve une étude rétrospective menée à Chicago chez 168 patients victimes d'un traumatisme balistique crânien tangentiel [14]. Il est à noter que, dans ce travail, les patients chez qui le projectile était ressorti (plaie transfixiante) présentaient sur le scanner moins de lésions que ceux chez qui la balle ou ses fragments étaient restés inclus. Tout cela serait donc concordant avec le principe de base qui régit « l'efficacité » d'une arme à feu et de son projectile : transmettre un maximum d'énergie à la structure qu'il rencontre.

Enfin, des phénomènes d'échauffement étant nécessairement associés au ralentissement de la balle, certains auteurs se sont, à juste titre, interrogés sur l'impact des brûlures, macro- ou microscopiques, au sein des tissus concernés. Aucune action hémostatique ou stérilisante n'a été constatée, à l'exception peut-être des traumatismes occasionnés par des balles traçantes.

PHÉNOMÈNES COMPLÉMENTAIRES

Ces notions d'effets de souffle et de cavité temporaire sont en réalité très discutées. Fackler conteste que ces mécanismes purement énergétiques soient responsables de l'intégralité des conséquences lésionnelles, en raison de la capacité souvent élevée de la majorité des tissus (élastiques) à absorber ces variations de pression. Pour lui, la localisation du canal d'attrition et surtout le comportement du projectile à l'intérieur du corps sont les facteurs essentiels [15]. Détaillons ce dernier point qui revêt bien des aspects.

Instabilité

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Elle est liée avant tout à la composition, au « profil » du projectile. Prenons l'exemple de la munition 7.62 x 51 mm OTAN (utilisée dans une mitrailleuse ou par un sniper) qui est une balle cylindro-ogivale chemisée en cupro-nickel à haute vélocité (850 m/s), assez longue et pesant entre 9,4 et 10 g. Alors que, dans l'air, sa trajectoire est maintenue stable par les mouvements gyroscopiques très rapides imprimés par le rainurage interne du canon, cette balle est particulière par sa disposition à devenir hautement instable à l'impact, en raison de l'écart qui existe entre son centre de gravité (en arrière) et le point d'application des forces de frottement (en avant) devenues considérables dès l'entrée dans le corps (figure   1) . À la pénétration, après avoir franchi de manière rectiligne une certaine profondeur (le cou ou neck en anglais), ces projectiles basculent et offrent ainsi, de façon aléatoire, une plus grande surface de contact avec les tissus traversés. Il existe alors une majoration de la taille du cône d'attrition et du transfert énergétique potentiel. On retrouve dans ce cas une dimension de l'orifice de sortie (quand il existe) très supérieure à celle du point d'entrée. Parée de cette même caractéristique, la munition 5.56 OTAN (équivalent de la 5.45 x 39 mm ex-soviétique) très légère (3,6 g) et rapide (jusqu'à 1 000 m/s, d'où sa catégorisation en munition de Très Haute Vélocité), apparue dans les années 1960, a été beaucoup employée au Vietnam par les troupes américaines. Elle est devenue la munition standard des fusils d'assaut occidentaux. Citons enfin une nouvelle munition utilisée tant par les militaires que certains autres services officiels : la 5.7 x 28 mm. Cette petite balle rapide (de 650 à 710 m/s) est très légère (2,2 g), très perforante (noyau d'acier à l'avant) et instable (noyau d'aluminium à l'arrière). Propulsée par un pistolet automatique (Five-seven) ou une arme longue (P 90), elle est réputée ne pas pouvoir traverser facilement un corps en raison de sa très forte capacité à basculer en milieu hydrique et à y abandonner très vite son potentiel énergétique. Les risques (théoriques) de « dommages collatéraux » en arrière de la cible seraient donc réduits. Trop récente, il n'y a pas encore d'observation clinique la concernant.

Fragmentation

Les Déclarations internationales de La Haye qui datent de la fin du XIXe siècle interdisent l'usage des projectiles capables de se fragmenter à l'impact. Elles imposent que la partie antérieure des projectiles soit obligatoirement chemisée par un blindage les rendant ni fragmentables ni déformables Mais cette norme ne concerne que les tireurs impliqués dans les conflits déclarés entre nations signataires. Et pourtant ! Après collision avec la surface cutanée ou une structure rigide comme un os, le projectile se sépare en multiples fragments qui vont connaître des trajets propres pour réaliser un véritable « polycriblage interne » et faire se sommer aussi les effets des différentes sinusoïdes générées (figure   2) . Les lois physiques nous indiquent qu'en cas de parfaite synchronisation temporelle et spatiale des ventres des courbes obtenues, les pressions atteintes pourront être encore plus élevées. D'autres munitions sont dites « frangibles », parce que leur fragmentation amène une dispersion immédiate d'une nuée de micro-particules très peu pénétrantes. Cela est rendu possible car la partie antérieure de l'ogive est compactée à l'aide d'un mélange de nylon et d'un composite de cuivre. Montées en 5.56, 7.62 ou 9 mm, elles ont pour but de ne pas risquer de transfixier le corps et de ne pas perforer l'environnement extérieur.

Figure 1. L'instabilité balistique.  

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Champignonnage

Dans le même ordre d'idée, les projectiles sont soit chemisés soit non chemisés mais la partie antérieure de l'ogive a été modifiée (pointe creuse, nez coupé, pointe molle, pré-fragmentée, etc.). Ils vont, à l'impact, modifier la taille de leur surface frontale de progression, la tête du missile prenant alors la forme (approximative) d'un champignon. La cavité temporaire est, dans ce cas, très précoce, très proche du point d'entrée et le cône d'attrition est plus large.

Figure 2. Le phénomène de la fragmentation.  

Interposition d'obstacles

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Diverses structures sont parfois rencontrées, voire entraînées par la balle, avant la pénétration cutanée (fenêtre, protections balistiques inappropriées, obstacles divers, etc.) ou après celle-ci (os). Dans cette éventualité et si elle n'est pas arrêtée ou suffisamment amputée de son énergie, elle peut se fragmenter en plusieurs projectiles secondaires, en créer éventuellement d'autres (esquilles osseuses) ou connaître des trajectoires complexes liées à des réflexions à l'intérieur de l'organisme. À la gravité d'un traumatisme balistique vient alors s'ajouter la souillure d'une plaie profonde par des corps étrangers divers. Ces mécanismes ont été objectivés par des études expérimentales récentes [16]. Les traumatismes maxillo-faciaux sont de bonnes illustrations des possibles intrications de ces différents mécanismes lésionnels [17].

Multi-impacts

Là encore, des phénomènes de sommation de plusieurs projectiles atteignant leur cible successivement majorent autant les lésions directes que les phénomènes pulsatiles. Dans ce cadre, les armes de chasse sont particulières. De calibre 12, elles sont génératrices d'un grand nombre d'accidents ou de crimes. Les projectiles des cartouches de chasse comprennent soit des projectiles de gros calibre mais de formes différentes (dont la célèbre Brenneke dite « balle à sanglier » particulièrement délabrante sur son axe de pénétration), soit un ensemble de petites sphères communément appelées plombs (ou chevrotine selon leur nombre dans la cartouche) qui, à une distance moyenne de tir, réalise un véritable arrosage projectilaire de la zone. À bout portant, les tissus proximaux sont broyés par ces multi-impacts. Des localisations profondes de certains plombs, éloignées du point d'impact, sont possibles. Il faut donc penser à les rechercher.

Projectiles explosifs

Très rarement, certaines munitions contiennent dans l'ogive un explosif qui est activé dès l'impact. Seules les grosses munitions sont concernées, encore que de plus petites puissent l'être, de façon anecdotique. Les dégâts sont ici fonction de la profondeur à laquelle se fait la mise à feu. Il faut savoir que « l'explosivité » interne de ces projectiles, parfois conçus de manière très artisanale, est assez capricieuse, surtout si l'impact n'est pas strictement perpendiculaire à la surface touchée (ce point a probablement contribué à l'échec de la tentative d'assassinat du Président Reagan en 1981). Au cours de la prise en charge de ces victimes, il est à noter que les ultrasons (échographie) ou les rayons X (radiographie) ne majorent pas le risque d'explosion secondaire interne [18].

Localisation des impacts et trajet

Le type de structure anatomique rencontrée, ses caractéristiques, son degré de résistance à l'étirement, son rôle structurel vont naturellement entraîner des conséquences physiopathologiques d'importance variable. À ce propos, une équipe texane a proposé en 2002 un outil performant d'intelligence artificielle utilisant la trajectoire de la balle comme critère prédictif de prise en charge des plaies abdominales [19]. Mais attention, le trait virtuel qui lie le point d'entrée au point de sortie n'est qu'indicatif. Les trajets en « ligne brisée » par la rencontre avec des surfaces de réflexion (souvent osseuse) sont classiques pour toutes les munitions.

CLASSIFICATION COMPLEXE

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À l'intérieur d'une catégorie de munition, il existe des sous-catégories qui rendent encore plus complexe la question de la connaissance de l'armement pour des non-spécialistes. Citons à titre d'exemple, la cartouche de calibre .22 à percussion annulaire, née il y a plus d'une centaine d'années aux Etats-Unis. Ce calibre est certainement l'un des plus populaires (classé en septième catégorie en arme d'épaule mais en quatrième catégorie en arme de poing selon la législation française). Ses nombreux chargements possibles autorisent des emplois adaptés à une grande variété de situations.

Il existe tout d'abord les cartouches inertes de manipulation, qui se différencient par une finition non conforme (couleurs, perçage de l'étui, matériaux inhabituels, etc.), les cartouches à blanc, à gaz ou industrielles qui ne sont munies d'aucun projectile (étui fermé par des plis ou obturé par un opercule, indication des chargement par un code de couleur). Il existe aussi les cartouches à grenaille, destinées à la défense ou à l'élimination des petits animaux nuisibles, qui renferment de petits plombs retenus par un plissement en étoile du collet (1er type) ou disposés dans un container de carton ou de plastique (2e type).

Outre les cartouches de tir réduit (.22 Long Z), il existe également les munitions standard ou d'entraînement qui sont les plus répandues et que l'on utilise couramment au stand de tir.

Viennent ensuite les cartouches de compétition, qui bénéficient d'une excellente régularité grâce à des composants de meilleure qualité et à des contrôles plus soignés. Enfin, plus récentes, les cartouches haute vélocité, avec une ogive souvent cuivrée, se caractérisent par une énergie cinétique plus élevée.

D'autres munitions spéciales en .22 LR ont également été produites comme les expansives (Hollow Point ou pointe creuse), les traçantes, les subsoniques (pour usage avec un silencieux), ou encore les munitions d'épreuve.

Le .22 LR est donc un calibre pour lequel il existe un grand choix de projectiles. Fabriqué dans tous les pays industrialisés ou presque grâce à ses faibles coûts de production, son approvisionnement est aisé et fait de lui le plus utilisé à travers le monde. L'exploitation concrète en balistique appliquée est donc difficile car la notion de TB par calibre .22 recouvre une série de situations bien différentes pouvant aller de la simple plaie tangentielle au possible délabrement profond d'une balle expansive.

AUTRES PROJECTILES

D'autres munitions et d'autres armes présentent des caractéristiques spécifiques. Le pistolet à grenaille, arme de poing facile à se procurer, est chargé avec des cartouches permettant la projection sur une courte distance (quelques mètres) d'une gerbe de 50 à 100 particules de plomb. Ces corps métalliques sont classiquement arrêtés par l'os en particulier au niveau de la boîte crânienne (quoique certaines observations non publiées le contestent en cas de tir à bout touchant) mais pénètrent facilement les tissus mous. Il peut s'agir de la peau et surtout de l'œil fréquemment atteint au cours d'accidents ou d'agressions par ces armes [20].

AUTRES DISPOSITIFS

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La poudre n'est pas toujours l'unique moteur potentiel d'un projectile balistique. Un gaz comprimé peut efficacement la remplacer. Il peut s'agir d'air ou de CO2. Il est facile de se procurer ces armes (septième catégorie) qui servent d'ailleurs souvent pour le tir de compétition car elles sont très précises. Vécues comme peu dangereuses par le grand public, elles sont souvent les premières armes que l'on touche, les premières avec lesquelles on joue... Ceci explique sans doute pourquoi les enfants en sont souvent les premières victimes [21]. Apparues en Allemagne au XVe siècle, elles ont été largement utilisées par les armées prussiennes pendant les guerres napoléoniennes. Ces armes sont ensuite devenues obsolètes en usage militaire avec l'arrivée des cartouches à poudre. Certaines études évoquent la nécessité qu'un projectile ait une vitesse minimale à l'impact de 120 m/s pour pouvoir pénétrer la peau et rompre une corticale osseuse et de seulement 44 m/s pour pénétrer un œil [22]. Ces projectiles sont dotés, selon les armes utilisées, d'une vitesse initiale qui varie de 130 à 300 m/s. Ils perdent ensuite très rapidement de la vitesse en raison de leur très faible masse. Au-delà d'une quinzaine de mètres, ils n'auraient donc plus beaucoup de capacité de pénétration. La dangerosité de ces projectiles est pourtant bien réelle. Il s'agit toujours de lésions directes sans effet de souffle objectivé. À titre d'exemples, on retrouve dans des séries récentes concernant des enfants : plaies de l'aorte abdominale [23], perforations digestives, plaie cranio-encéphalique, plaie du ventricule gauche [24], plaie péricardique [25]. Une spécificité de ces plaies par armes pneumatiques est la possibilité d'insertion endoveineuse suivie d'une migration dans le flux vasculaire du projectile lui-même [26] [27]. Est-ce bien un jouet d'enfants ?

ARMES DITES « NON-LÉTALES »

D'autres projectiles n'ont aucune vocation à être pénétrants. En effet, certaines situations particulières de maintien de l'ordre ont conduit à rechercher des techniques permettant de proportionner la réponse à l'agression. Faire cesser immédiatement la menace, tout en étant incapable de donner la mort participe au concept plus que flou de la « neutralisation ». Si le projectile ne semble pas pouvoir être pénétrant, alors on parle de munitions « non-létales ». Un raccourci existe donc pour les armuriers : pénétrant = létal, non pénétrant = non-létal. L'usage de ces armes est aussi préconisé dans des lieux où il convient de ne pas risquer de transpercer des matières ou des structures essentielles à la sécurité ambiante (zones explosives, les lieux où se trouvent des containers de produits dangereux, aéronefs, etc.). Des munitions et des dispositifs de natures diverses sont rencontrés.

Projectiles de mousse (Flashball)

Ils sont tirés par des fusils à canon basculant de très gros calibre, légers et assez souples. Leur dangerosité est classiquement faible. La possibilité de générer un traumatisme fermé grave reste toujours possible en particulier en cas de non-respect des distances tactiques d'engagement recommandées (> 10 mètres).

Projectiles plastiques

Ils peuvent être des cylindres de grande dimension (longueur 10 cm/diamètre 3,7 cm), fermés à leurs deux extrémités et constitués d'une matière synthétique, le chlorure de polyvinyle. Ils sont tirés par une arme semi-automatique spécifique rentrant dans la catégorie (bien nommée) des

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« Riot-Gun » car ils ont vocation à être utilisés par les forces anti-émeutes. La vitesse de sortie à la bouche du canon est faible (12 m/s). Le projectile reste sur son axe pendant la première partie de son trajet intermédiaire (< 10 m) et frappe alors sa cible longitudinalement. Les recommandations du constructeur sont de ne pas en faire usage à moins de 20 mètres (trop dangereux...) et à plus de 50 mètres (pas assez précis). Déjà étudiées au début des années 1980 [28], leur large utilisation, en juillet 1996 en Irlande du Nord au cours d'émeutes particulièrement violentes, prouve la réelle dangerosité de cette balle en caoutchouc, certes non-pénétrante, mais capable d'entraîner des traumatismes fermés graves (craniofaciaux, thoraciques, abdominaux, etc.) [29]. Précisons que dans ce cas précis les tirs ont probablement été effectués à courte distance (moins de 10 mètres).

Projectiles en caoutchouc

Ils sont, eux aussi, de plusieurs sortes. À titre d'exemple, ceux utilisés par les forces de l'ordre israéliennes sont de deux types. Les RCC 95 sont des cylindres fermés contenant trois billes métalliques recouvertes de caoutchouc. Tirés par une arme comme un fusil d'assaut M 16, ces projectiles de 48 grammes ont une vitesse en sortie de canon de 130 m/s. Les recommandations du constructeur sont de les utiliser entre 40 et 70 mètres de la cible, spécialement pour la neutralisation d'individus au cours d'émeutes. Les MA/RA-88 sont des munitions composées de 15 petites billes en caoutchouc de 17 grammes et contenant chacune un noyau métallique. Tirées, elles aussi par un fusil d'assaut, la vitesse au canon est de 78 m/s. La distance recommandée est comprise entre 30 et 80 mètres. À 50 mètres, les impacts des petites billes sont situés dans un cercle de 7 mètres. Ces deux munitions ont été utilisées au cours du conflit israélo-palestinien d'octobre 2000. Une étude récente israélienne en fait état [30]. Sur 152 blessés, 201 impacts ont été retrouvés (13 % avaient plus d'un seul impact). On retrouve 100 % d'hommes, majoritairement jeunes (16 à 25 ans). Les zones touchées sont les membres inférieurs (n = 73), la tête et le cou (n = 61), le thorax (n = 39), le dos (n = 16) et l'abdomen (n = 12). Dans 61 % des cas, les impacts n'étaient pas pénétrants mais 45 % des blessés ont été hospitalisés, 11 ont bénéficié d'une chirurgie. Au total, 3 victimes sont décédées dans les suites immédiates. La munition la plus fréquemment retrouvée chez les blessés de gravité moyenne ou sévère était la RCC-95. De nombreux arguments permettent de penser que certains tirs, concernant une quarantaine de patients, ont probablement été effectués de près (gravité, fractures, hématomes, traumatismes pénétrants, etc.). Signalons que les impacts situés au niveau de la face (en particulier oculaires) ont été plus sévères et pénétrants qu'ailleurs et qu'au niveau thoracique il y avait 50 % de traumatismes pénétrants. Parmi les traumatismes abdominaux fermés, un seul a subi une laparotomie pour atteintes splénique et digestive. Encore plus paradoxal, des tentatives de « suicide » sont possibles avec des munitions « non-létales » [31]. En conclusion, ces munitions induisent morbidité et létalité car elles sont beaucoup plus pénétrantes qu'attendu !

Bean Bag

Il s'agit de petits sachets de 2 cm sur 2 cm, remplis de plomb et pesant 40 grammes. Tirés par une arme de chasse de calibre 12 et animés d'une vitesse moyenne de sortie du canon de 80 m/s, ces projectiles ont vocation à n'induire que des traumatismes fermés. Des cas de graves traumatismes pénétrants ont pourtant déjà été décrits [32] [33].

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Air Taser

Cette arme doit être citée ici, car il s'agit d'une arme de poing d'un genre très particulier. La percussion d'une cartouche d'air comprimé projette à une distance maximale de 5 mètres deux fils conducteurs au bout desquels se trouvent deux « crochets ». La vitesse de sortie du canon est de 45 m/s. Grâce à une pile qui reste au bout de l'arme, un courant électrique est immédiatement appliqué entre les deux contacts qu'ils soient fichés dans la peau ou sur des vêtements. Cette décharge électrique est douloureuse et induirait des contractions musculaires suffisamment importantes pour permettre la neutralisation manuelle d'un individu dangereux. Selon le concepteur, 50 000 volts circulent dans le circuit mais pendant une durée de 7 secondes. Compatible avec le port d'un pacemaker, elle ne modifierait pas l'automaticité cardiaque. Aucun décès ne lui serait attribué depuis son développement dans les années 70 en Amérique du nord.

BIOMÉCANIQUE BALISTIQUE : APPLICATIONS CONCRÈTES

Les différentes notions de balistique terminale ne peuvent qu'être indicatives. Seule l'évaluation clinique et paraclinique, au cas par cas, compte. En matière d'investigations, on peut d'ailleurs signaler que l'imagerie par résonance magnétique (IRM) est très rarement utilisée dans le cadre du bilan lésionnel des TB, en raison du risque d'aggravation potentielle liée à la mobilisation secondaire du projectile métallique par le champ magnétique auquel il est soumis [34]. Pourtant, l'IRM permettrait d'obtenir des informations extrêmement précises sur les dégâts occasionnés. Une étude expérimentale allemande a consisté à analyser plus de cinquante munitions tirées soit par des armes à air comprimé de tout type, soit par des armes de poing ou encore des armes longues [35]. Pour savoir tout d'abord si la munition contenait ou non du fer (seul métal à être influencé par un champ magnétique), chaque projectile étudié a été inséré dans un bloc de 250 grammes de beurre puis soumis à deux séances d'IRM de champs d'intensités différentes afin de rechercher une éventuelle mobilisation. Cette ingénieuse technique a montré que tous les projectiles tirés par les armes à air comprimé étaient dépourvus de fer, ceux tirés par des armes de poing en contenaient dans 22 % des cas et que 86,7 % des projectiles tirés par des armes longues présentaient des caractéristiques ferromagnétiques (en particulier les chemisés ou semi-chemisés).

Des tirs ont ensuite été effectués sur des carcasses de porc avec les munitions non ferreuses identifiées puis le corps de l'animal a été exposé à une IRM. Les résultats montrent que les images avaient une excellente résolution spatiale et ne présentaient que très peu d'artéfacts quelle que soit l'intensité du champ magnétique imposé. La visualisation du trajet direct, des éventuelles lésions à distance et des débris balistiques en cas de fragmentation, était particulièrement précise.

L'idée proposée pour son éventuelle application en clinique humaine est de tester préalablement, si possible, le projectile concerné (en demandant par exemple aux forces de l'ordre d'en fournir un si cela est possible). Il s'agit simplement de rechercher, préalablement à la réalisation de l'IRM chez le blessé, une éventuelle mobilisation par l'application du champ magnétique sur le projectile posé dans la main de l'examinateur ou fiché dans une plaque de beurre. Si le projectile bouge, pas d'IRM ! Précisons tout de même que tous les métaux (ferreux ou pas) s'échauffent quand ils sont soumis à un champ magnétique. Certains organes comme les yeux étant

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particulièrement sensibles à une élévation de la température, il convient alors de limiter le nombre de coupes afin de diminuer la durée d'exposition lors de l'examen.

RECUL DES INDICATIONS CHIRURGICALES ?

Les concepts de cavitation, l'usage des munitions à haute vélocité et les contraintes de la chirurgie de l'avant (flux massif de victimes, peu d'investigations possibles) ont contraint depuis longtemps les équipes militaires à privilégier l'acte chirurgical. Aujourd'hui, en pratique civile, il existe une nette tendance à poser les indications non pas en fonction de notions de balistique terminale mais plutôt selon les tableaux cliniques observés. La plupart des articles retrouvés dans la littérature internationale font d'ailleurs que rarement référence au type exact d'arme et de munition utilisées. Il semble toutefois que les armes de poing et les munitions à faible vélocité soient les plus fréquemment citées.

Même dans un contexte de conflit armé comme celui ayant opposé l'Iran à l'Irak dans les années 1980, certains gestes opératoires limités ont été aussi préférés aux grandes excisions jugées inutilement délabrantes en particulier en neurochirurgie [36].

En ce qui concerne les TB rachidiens, en l'absence de signes déficitaires, certains proposent une simple surveillance et de n'intervenir secondairement qu'en cas de fistule de liquide céphalorachidien, de méningite, de signes compressifs manifestes [37]. Les plaies balistiques du cou sont d'une réelle gravité [38]. Malgré cela, certains ont revu à la baisse leurs indications opératoires dans ce cadre [39]. Il en est de même pour les plaies médiastinales [40] [41] [42] ou même abdominales [43]. En pratique civile, la TDM à haute résolution, grâce à ses qualités d'acquisition rapide de données et de reconstruction en trois dimensions, peut ici participer à limiter la stratégie du « tout-chirurgical ».

CONCLUSION

Même si on affirme volontiers que l'on traite un blessé, non une arme ou un projectile, la biomécanique balistique scientifique est d'un réel intérêt pour la pratique clinique. Elle a déjà, de façon paradoxale, permis de constater qu'il était parfois plus dangereux, pour une victime potentielle, de porter certaines protections que de ne pas en avoir du tout. Surtout, elle confirme ce que l'on était en droit de penser : une petite munition placée « pleine cible » peut se révéler nettement plus pathogène qu'une plus grosse située « juste à côté » !

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