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- L’auteur : Hugo est un écrivain romantique mais aussi un homme politique. C’est donc un écrivain engagé qui défend les opprimés et les victimes des injustices sociales. Ex. Le Dernier Jour d’un condamné (contre la peine de mort), des parties des Contemplations (comme « Melancholia 1 ») - Contexte : il est député à la nouvelle Assemblée de la IIe République (1849), issue d’une révolution ; il prononce ce discours pour soutenir un projet de loi : création d’institutions pour l’assistance publique 2 . Avant le début de notre extrait, il vient de décrire en détails des exemples de situation de pauvreté particulièrement odieux. - Lecture - Problématique : on va étudier les procédés employés par Hugo pour persuader les députés de faire quelque chose pour venir en aide aux démunis. - Plan : dans ce texte, VH poursuit trois buts conjointement : I. émouvoir, II. accuser, III. galvaniser. I. Faire ressentir l’indignation face à la misère a. Un tableau pathétique de la condition des pauvres Champ lexical de la faim : l. 20, 21, 22 ; « souffre », « torts envers l’homme », « désespère » ; représentation du peuple sous un jour idéalisé car ne souligne que le positif (24-25) ; répétition de « sans » (20-21) = privés du nécessaire ; des victimes d’un monstre « usure qui dévore nos campagnes » ; « œuvre de destruction et de ténèbres » = il évoque le mal à la merci duquel est le peuple et utilise le mot « fatal » (28) = registre tragique. b. L’auteur se met en scène pour servir de modèle Nombreuses occurrences de la 1 re personne « je dis que... » répété ; « moi, qui parle » (l. 5) = il insiste lourdement ; se donne en exemple « je m’en sens… complice et solidaire » = s’accuse, fait son mea culpa (les invite ainsi à faire comme lui). + Un discours très enflammé : exclamations, nombreuses répétitions et procédés d’insistance. Sa colère est à la hauteur de son indignation → un lyrisme très romantique. 1 Notez l’orthographe transcrite du grec. Pas d’accent. 2 Pour votre information : équivalent ancien des aides sociales.

file · Web viewL’auteur : Hugo est un écrivain romantique mais aussi un homme politique. C’est donc un écrivain engagé qui défend les opprimés et les victimes

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Page 1: file · Web viewL’auteur : Hugo est un écrivain romantique mais aussi un homme politique. C’est donc un écrivain engagé qui défend les opprimés et les victimes

- L’auteur : Hugo est un écrivain romantique mais aussi un homme politique. C’est donc un écrivain engagé qui défend les opprimés et les victimes des injustices sociales. Ex. Le Dernier Jour d’un condamné (contre la peine de mort), des parties des Contemplations (comme « Melancholia1 »)

- Contexte : il est député à la nouvelle Assemblée de la IIe République (1849), issue d’une révolution ; il prononce ce discours pour soutenir un projet de loi : création d’institutions pour l’assistance publique2. Avant le début de notre extrait, il vient de décrire en détails des exemples de situation de pauvreté particulièrement odieux.

- Lecture- Problématique : on va étudier les procédés employés par Hugo pour persuader les

députés de faire quelque chose pour venir en aide aux démunis.- Plan : dans ce texte, VH poursuit trois buts conjointement : I. émouvoir, II. accuser, III.

galvaniser.

I. Faire ressentir l’indignation face à la misère

a. Un tableau pathétique de la condition des pauvresChamp lexical de la faim : l. 20, 21, 22 ; « souffre », « torts envers l’homme », « désespère » ; représentation du peuple sous un jour idéalisé car ne souligne que le positif (24-25) ; répétition de « sans » (20-21) = privés du nécessaire ; des victimes d’un monstre « usure qui dévore nos campagnes » ; « œuvre de destruction et de ténèbres » = il évoque le mal à la merci duquel est le peuple et utilise le mot « fatal » (28) = registre tragique.

b. L’auteur se met en scène pour servir de modèleNombreuses occurrences de la 1re personne « je dis que... » répété ; « moi, qui parle » (l. 5) = il insiste lourdement ; se donne en exemple « je m’en sens… complice et solidaire » = s’accuse, fait son mea culpa (les invite ainsi à faire comme lui). + Un discours très enflammé : exclamations, nombreuses répétitions et procédés d’insistance. Sa colère est à la hauteur de son indignation → un lyrisme très romantique.

c. Une indignation qui se veut contagieuse « des choses » (2 fois) = répugnance + « de tels faits » (2 fois) = intensif qui souligne l’énormité du scandale → exagération, excès pour faire un maximum d’effet. Passe de « Je suis pénétré » à « je voudrais pénétrer » (8) = répétition du même mot montre le désir de transmettre sa conviction aux autres. « pénétré » = renvoie à la conviction la plus profonde.

Mais on va voir que ce discours est si véhément que VH a l’air d’adopter le ton d’un avocat qui prononce un réquisitoire.

II. Un réquisitoire contre les députés

a. Il accuse son auditoireNombreux appellatifs qui donnent un ton accusateur à son discours (« messieurs », « vous »). Il établit une distinction entre « le peuple » (17-18) et « la société tout entière » (4) puis avec « dans un pays civilisé » = sous-entend que l’indifférence aux plus indigents = barbarie ; possessifs dans « nos campagnes » et « nos villes » = un nous inclusif pour que les auditeurs se 1 Notez l’orthographe transcrite du grec. Pas d’accent.2 Pour votre information : équivalent ancien des aides sociales.

Page 2: file · Web viewL’auteur : Hugo est un écrivain romantique mais aussi un homme politique. C’est donc un écrivain engagé qui défend les opprimés et les victimes

sentent impliqués ; invoque la religion « Dieu » (6) et « des lois fraternelles, des lois évangéliques » (23) pour mieux les convaincre de l’enjeu moral du problème → les traite quasiment de pécheurs.

b. Il les attaque en tant qu’hommes politiques« au-dessous de vous » (18) + « vous avez des fait des lois contre l’anarchie » = les renvoie à leur responsabilité de décideurs ; l. 11 « je ne connais pas, moi » = dédain pour les différences de partis, càd pr les querelles politiciennes ; VH présente la cause de la pauvreté comme devant être au-dessus des vaines disputes partisanes : « qu’une seule âme » (13).

c. Il les attaque en tant que révolutionnairesIl en appelle à « l’esprit de la révolution » (25) (ce sont tous des révolutionnaires) et le met en équilibre avec « la souffrance publique » = expression qui sous-entend que l’Etat a un rôle à jouer dans le malheur des habitants. « Vous n’avez rien fait tant que… » = anaphore (6 fois) = l’œuvre révolutionnaire inspirée par le désir de justice sociale n’est pas encore accompli, la tâche est encore à faire. Dernière phrase : il conclut en opposant passé composé et impératif présent : « vous avez fait des lois » et « faites maintenant des lois » pour les enjoindre à poursuivre leurs efforts. Tout est fait pour les culpabiliser. Cependant, s’il ne faisait que les accuser, l’orateur ne

pourrait pas complètement obtenir leur adhésion. Il faut aussi qu’ils aient envie de réagir.

III. Donner envie de réagir = galvaniser le public

a. Une prière« je voudrais » 3 fois 8, 10, 12 ; « je vous conjure » 30 ; impératifs 31, 32 et subjonctif l. 3

b. Il les met en gardeIl s’adresse pour finir à l’argument rationnel : « songez », « réfléchir » et « sagesse » : fait appel à leur prudence, à leur capacité d’analyser les causes du mal (« c’est la misère qui les creuse »)

c. Mais surtout, il cherche à galvaniser le publicL’extrait est construit en quatre paragraphes qui utilisent une anaphore différente à chaque fois. « je dis que… » est répété dans le 1er, « je voudrais que… » pour le 2e, « Vous n’avez rien fait » 3e, trois balancements binaires pour le 4e paragraphe + Chaque paragraphe se termine par un point d’exclam°→ les propositions subordonnées sont nombreuses et parfois de plus en plus longues (ex. étudier en particulier rythme de la ligne 13 et gradat° des adjectifs grand/magnifique/sublime) → intensité qui s’accroît sans cesse ; envolée rhétorique qui énergise l’auditoire (on voit d’ailleurs que les réactions ponctuent les temps forts du discours grâce aux indications en italiques)→ de fait, son enthousiasme aussi est contagieux

Ce discours est resté très célèbre pour grande éloquence. On remarque son lyrisme pathétique, sa véhémence envers l’injustice et son énergie qui agit avec une grande puissance persuasive. C’est un texte typique de la rhétorique romantique avec ses envolées sublimes et son désir généreux de changer le monde.