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EDUCATIONAL EXPANSION AND LABOUR MARKET DEVELOPPEMENT DE LA FORMATION ET MARCHE DU TRAVAIL Rapport final de la première phase (WP1) Analyse des structures éducatives face à la hausse d’éducation EDEX Générations et hausse d’éducation Catherine Béduwé et Bernard Fourcade Rapport français Juin 1999 Rapport français Wittenberg, Septembre 1999 1

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EDUCATIONAL EXPANSION AND LABOUR MARKET

DEVELOPPEMENT DE LA FORMATION ET MARCHE DU TRAVAIL

Rapport final de la première phase (WP1)

Analyse des structures éducativesface à la hausse d’éducation

EDEX

Générations et hausse d’éducation

Catherine Béduwé et Bernard Fourcade

Rapport françaisJuin 1999

Rapport françaisWittenberg, Septembre 1999

LIRHEUniversité de Toulouse, CNRSPlace Anatole FranceF 31042 Toulouse CEDEX

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PARTIE 1 - HAUSSE D’EDUCATION, APPROCHE GENERATIONNELLE...............6

I-1. Elévation du niveau d’éducation de la population française : faits et mesures..........................................6I-1.1 l’évolution démographique en France.........................................................................................................7I-1.2 Mesure de la hausse d’éducation : approche par le niveau de diplôme.......................................................7I-1.3 Approche en termes de KH moyen............................................................................................................11

I -2 La question soulevée.......................................................................................................................................12I-2.1 Suivre le processus d’acquisition de diplôme de chaque génération.........................................................12I-2.2 Hypothèse de stabilité de la structure de diplôme acquise........................................................................13

I-3 Premiers tests empiriques...............................................................................................................................15I-3.1 Construction de la base de données permettant le suivi des générations..................................................15I-3.2 Evolution du KH intra et inter générations................................................................................................16I-3.3 Estimation empirique de l’âge de sortie du système éducatif pour les générations 56 à 68......................17I-3.4 Structure de diplôme et activité d’une génération.....................................................................................18

PARTIE 2 - GENERATIONS ET POLITIQUES EDUCATIVES.................................19

II.1. hausse d’éducation : trois grandes périodes...............................................................................................19II.1.1. le choix d’une structure de diplômes en quatre niveaux..........................................................................19II.1.3. l’évolution de la structure par diplôme des générations : trois périodes.................................................20

II.2. politiques éducatives et transformations institutionnelles du système éducatif français depuis 1950. .22

II.3. les trois périodes de hausse d’éducation et les politiques éducatives.......................................................23II.3.1. groupes de générations, hausse de l’éducation et politiques éducatives.................................................23II.3.2. des liens d’une grande complexité...........................................................................................................27

II.4. UNE LECTURE « GENERATIONNELLE » DES TRANSFORMATIONS DU SYSTEME EDUCATIF............................................................................................................................................................30

II.4.1. générations et structure des diplômes acquis..........................................................................................31

II.4.2. générations 1942 à 1980 : la dynamique des transformations du système éducatif : flux et noeuds d’orientations.........................................................................................................................................................41

II.5. Conclusion......................................................................................................................................................43

PARTIE IV : DU SYSTEME EDUCATIF A LA POPULATION ACTIVE....................46

IV-1 Evolution des effectifs des populations totale et active.............................................................................46

IV-2 Education d’une génération et diplôme des actifs correspondants.........................................................52IV-3.2.1 Le passage à l’activité d’une génération..............................................................................................52IV-2.2 L’acquisition des diplômes par la formation continue............................................................................55

V – ANNEXES...........................................................................................................61

V-1 Bibliographie..................................................................................................................................................61

V-2 Principaux repères sur l’évolution du système éducatif français depuis 1950 (annexe).........................63

V-3 Quelques compléments sur le genre.............................................................................................................76

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Ce rapport constitue la contribution française à la première phase (WP1) du projet de recherches européen, programme TSER, intitulé « Développement de la formation et marchés du travail (EDEX) 1 » dont le Lirhe a la responsabilité.

Ce projet qui s’étendra de novembre 1998 à juin 2001, est fondé sur les résultats de travaux précédents2 qui ont montré l’impact essentiel de l’offre de formation dans l’évolution des structures de compétences des différentes catégories d’emploi : c’est à dire que la manière dont les différentes professions3 absorbent les nouveaux diplômés de chacune des générations entrant sur le marché du travail mais aussi, plus généralement, les diplômés de toutes les générations présentes sur le marché du travail, suit de très prêt l’évolution de l’offre de formation. Autrement dit, l’allocation des compétences présentes sur le marché du travail par l’économie serait, suivant ces résultats, soumise à un fort effet d’offre éducative.

L’objectif général du projet est d’approfondir ces résultats et d’en proposer une interprétation économique qui puisse être utile dans la mise en place des politiques de formation européenne. Dans cette perspective, la première phase doit permettre de mieux comprendre les liens qui relient successivement l’offre de formation éducative à un moment donné et la structure de diplôme acquise par les générations présentes au sein du système à cet instant, puis, dans un second temps, les liens entre la structure de diplôme initiale d’une génération et celle qu’auront les actifs de cette génération tout au long de leur vie active. C’est à dire tenter de mieux comprendre les liens de cause à effet entre structure de l’offre de formation et structure de diplôme de l’offre de travail.

1 Projet collectif finançé par la DGXII – UE (4ème PCRD, programme TSER, 3rd Call) intitulé Educational Expansion and Labour Market (EDEX, http://edex.univ-tlse1.fr/edex/) et dont les participants sont les suivants : Coordinator: LIRHE Université des Sciences Sociales de Toulouse (C. Béduwé & J. Planas) ;Partner Institutions: Universitat Autònoma de Barcelona (UAB) Grup de Recerca Educació i Treball (GRET) - Institut de Ciències de l’Educació (ICE) ; London School of Economics Centre for Economic Performance ; Zentrum für Sozialforschung Halle (ZSH) ; Centro di Recherche Economiche e Sociali (CERES) Roma ; C.R.I.S. International Center for Research On Innovation and Society. Le projet EDEX est construit autour de la question de l’élévation générale des niveaux d’éducation en Europe et de ses conséquences économiques sur le fonctionnement des marchés du travail. Le projet est divisé en quatre phases, qui aborderont successivement 1- L’évolution sur longue période des structures éducatives, 2- La diffusion des compétences dans les systèmes d’emploi, 3- Le comportement des employeurs face à la hausse des niveaux d’éducation, 4- La question de la poursuite de cette élévation et de ses conséquences dans les années à venir. Les travaux sont menés conjointement en Allemagne, Espagne, France, Grande Bretagne, Italie et, ponctuellement, aux USA de façon à disposer d’un point de référence avec un pays où l’éducation est, plus qu’en Europe, régulée par le coût des études.2 Cf. [Mallet 97] ou [Béduwé Giret 99]3 La profession étant entendue ici comme un acteur du marché du travail : il s’agit de travaux macro statistique sur la structure âge*diplôme des catégories d’emploi au sens de la nomenclature PCS del’Insee. Ces structures par âge et diplôme des actifs déclarant une catégorie d’emploi sont alors appelées structures de compétence d’une profession, l’âge étant considéré comme un proxy de l’expérience professionnelle .

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L’hypothèse sous-jacente aux travaux réalisés jusqu’à présent est que la structure de diplôme initiale d’une génération « au moment4 » où elle sort du système éducatif est très voisine de celle qu’elle possède tout on long de sa période d’activité, c’est à dire sa carrière professionnelle. En considérant la succession des générations actives un moment donné, cela revient à supposer que la formation dispensée au sein du système de formation initiale, et donc aux jeunes « avant » leur entrée dans la vie active, va très fortement contraindre la structure des compétences disponibles sur le marché du travail.

Cette hypothèse conduit à supposer que l’élévation du niveau d’éducation de la population active est, avant toute chose, une conséquence des changements survenus ans la formation des jeunes ; Ainsi toute mesure de politique éducative ou tout changement structurel dans l’organisation de la formation aura, à plus ou moins long terme et pendant la durée de vie active des générations qui l’ont connu, des répercussions sur la qualification de la main d’œuvre du fait des poids relatifs des différents niveaux de diplômes présents dans l’offre de travail.

Nous avons choisi, pour traiter ces questions, une approche générationnelle qui va nous amener à suivre le parcours de formation d’une génération depuis son entrée à l’école primaire jusqu’au moment de la retraite pour ceux d’entre eux qui sont actifs. C’est en effet la seule manière d’introduire la dynamique du temps nécessaire à la fabrication des « compétences » présentes à un moment donné sur le marché du travail . C’est la seule manière de comprendre d’une part comment se forment les strates successives qui constituent la population active mais également à quel moment elles se sont formées. On peut évoquer l’image d’un pont sur un fleuve à partir duquel on surveille le débit : si le niveau du fleuve monte, on en tirera la conséquence qu’il a plu en amont. Mais pour savoir combien de jours auparavant il a plu, et sur quel affluent, il faut remonter le cours du fleuve et analyser ses différents affluents. C’est ce que nous proposons de faire avec les diplômés présents dans la population active : à quelle époque ont ils été diplômés et par quelle branche du système éducatif. La première partie de ce travail sera consacrée au constat que chaque nouvelle génération est plus formée, c‘est à dire formée plus longtemps et détentrice de diplômes de niveau plus élevé que la précédente. Chaque nouvelle génération se présente sur le marché du travail avec une structure de diplôme acquise au sein du système éducatif et qui ne sera modifiée que par les apports de la formation continue diplômante. Les diplômés de cette génération entrante vont ainsi se propager au sein de la population active et renouveler progressivement ceux de la génération précédente (en fait des générations précédentes, cf. note 4). La population active se construit à partir de ces mouvements de propagation, d’empilement et de renouvellement de générations sans cesse plus diplômées.

L’idée générale présentée dans cette première partie est de suivre quelques générations « témoin » depuis leur entrée dans le système éducatif jusqu’à leur départ en retraite. Cela permet de comprendre comment se construit la structure de diplôme de la population active et

4 Le « moment » où une génération sort du système éducatif est en fait une période qui peut prendre plus de dix ans entre ceux qui sortent à 16 ans, sans diplôme, et ceux qui suivront les études supérieures les plus longues. La structure de diplôme initiale d’une génération, c’est à dire celle acquise dans le système de formation initiale, est donc un concept dont on voit parfaitement le contenu mais qui ne peut être que très approximativement évalué. A l’inverse, les sortants du système de formation initiale une année donnée appartiennent à plusieurs générations, espacées d’une dizaine d’années. Leur structure est connue grâce aux statistiques administratives des Bilans Formation Emploi. Mais la logique d’EDEX repose sur le concept de suivi des générations repérrées par leur année de naissance [CHAUVEL 98].

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donc de l’offre de travail, comment se propage la hausse d’éducation et, plus en amont, comment le système éducatif gère et finalement produit cette hausse. La construction d’une base de données permettant de suivre quelques générations pendant 20 ans (Enquêtes Emploi de L’Insee de 1978 à 1998), nous proposerons quelques démonstrations empiriques de ces suivis.

La deuxième partie de ce rapport est centrée sur le choix de ces quelques groupes de générations « témoin » espacés d’une dizaine d’années et le suivi de leur parcours au sein du système éducatif tel qu’il était quand ils l’ont « traversé ». Ceci permet de visualiser les changements structurels survenus entre plusieurs « états » du système éducatif, eux même séparés d’une dizaine d’années et de les relier aux politiques éducatives qui les ont - éventuellement - permis. Politique éducative et produits du système éducatif sont ainsi, par le biais de l’analyse générationnelle, rapprochés même si, comme on le verra, il est extrêmement difficile d’établir aucun lien direct. La troisième partie sera consacrée au passage à l’activité des générations successives. Notre hypothèse de départ revient à supposer que chaque génération conserve tout au long de sa vie active, une structure de diplôme très proche de celle qu’elle a acquise au sein du système de formation initiale. Nous proposerons un test empirique de cette hypothèse en suivant les générations par une méthode de « faux panel » appliquée aux données des enquêtes 76-98 sur l’emploi de l’INSEE.

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PARTIE 1 - HAUSSE D’EDUCATION, APPROCHE GENERATIONNELLE

I-1. Elévation du niveau d’éducation de la population française : faits et mesures

La hausse du niveau d’éducation de la population totale française (et donc de la population active) correspond au fait que de plus en plus de gens sont de plus en plus diplômés. Nous savons que cela se fait essentiellement par l’allongement des durées de scolarisation initiale : de plus en plus de jeunes sortent de plus en plus tard du système éducatif munis de diplômes de niveau de plus en plus élevé. Mais la formation continue diplômante contribue également à augmenter le nombre de diplômés à tout moment.

Cela signifie que chaque nouvelle génération reste, en moyenne, un peu plus longtemps au sein du système de formation initiale et en sort un peu plus diplômée, c’est à dire avec un niveau de diplôme moyen légèrement supérieur ou une structure éducative légèrement plus élevée que la génération précédente. Elle peut ensuite continuer à acquérir des diplômes par le biais de la formation continue diplômante.

La population active d’une génération est – en France comme dans la plupart des pays d’Europe de l’ouest – une fraction importante de sa population totale, née en France et passée par le système éducatif français. L’éducation dispensée à l’ensemble de la génération se retrouve donc – aux taux d’activité, de mortalité et d’immigration près – dans la population active. La hausse d’éducation de la population totale entraîne celle de la population active, par simple renouvellement des générations entrantes. L’évolution du niveau d’éducation sur longue période peut se mesurer de deux façons : en observant le flux de formés entrant sur le marché du travail d’une part, en analysant la structure de diplôme des actifs en fonction de leur âge d’autre part. Chacune a sa logique. La première, la plus couramment utilisée, donnera une mesure de la production du système de formation initiale une année donnée, sachant que les sortants de cette année là appartiennent à plusieurs générations. La mesure de l’apport de la formation continue s’effectue en parallèle avec d’autres sources. La seconde montre, par le biais des classes d’âge, la montée d’éducation, initiale et continue, en fonction de l’année de naissance. Le problème est qu’on sous estime les diplômes des plus jeunes qui n’ont pas encore eu droit à la formation continue. C’est malgré tout la seule méthode qui permette de situer sur longue période la hausse d’éducation des générations successives.

Une troisième méthode consiste à suivre chaque génération depuis sa naissance jusqu’à la fin de période d’activité. Seul ce suivi longitudinal sur longue période permet d’évaluer le moment où la génération acquière des diplômes et le niveau de ceux ci. Encore faut il disposer de telles données longitudinales : nous proposerons un suivi de la structure de diplôme des générations qui avaient entre 18 et 30 ans au moment des enquêtes emploi de 1976 à 1998.

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I-1.1 l’évolution démographique en France

Avant d’observer l’évolution de la structure de diplômes acquise par les générations nées depuis les années 30, il est utile de rappeler l’allure de la courbe des naissances, qui indique quelle a été la dynamique démographique des générations actives en 1998.

naissances de 1920 à 1997

0

100000

200000

300000

400000

500000

600000

700000

800000

900000

1920

1923

1926

1929

1932

1935

1938

1941

1944

1947

1950

1953

1956

1959

1962

1965

1968

1971

1974

1977

1980

1983

1986

1989

1992

1995

La France a connu une forte diminution du nombre des naissances à partir de 1920, qui est passé de plus de 833000 en 1920 à un creux de 520000 en 1941, soit une baisse d’un tiers des naissances en 20 ans. Puis la remontée a été spectaculaire, et à partir de 1946, le nombre des naissances a atteint 850000 et s’est maintenu à ce niveau sans fléchir pendant près de 30 ans, jusqu’en 1973, constituant ainsi le baby-boom d’après-guerre, qui a perduré pendant les « trente glorieuses ». A partir de 1974, le nombre des naissances est descendu aux environs de 750000, et demeure à ce niveau jusqu’aux années récentes (1997), en dehors d’une courte période de trois ans où il est remonté à 800000 (1980/81/82).

Le système scolaire a donc enregistré une forte croissance de la demande de scolarisation en primaire, puis en secondaire, à compter des années 50. Mais si la poussée démographique a eu des effets « mécaniques » sur la scolarisation obligatoire dans les établissements primaires (écoles communales et petites classes de lycées), elle n’est pas le seul facteur d’explication de la hausse de la scolarisation dans le secondaire, court et long, qui résulte aussi de la hausse de la demande d’éducation venant des familles, et des politiques d’éducation adoptées.

I-1.2 Mesure de la hausse d’éducation : approche par le niveau de diplôme

La nomenclature des niveaux de diplôme

La mesure du niveau d’éducation des individus se fait, dans les enquêtes auprès des ménages, par une question portant sur le diplôme le plus élevé qu’ils ont obtenu. Ces diplômes sanctionnent la fin de formations classées en niveaux [Affichard 1983]. Par extension les diplômes déclarés dans les enquêtes de population ont alors été classés dans une nomenclature en niveau de diplôme, dans la mesure où ils sanctionnaient la fin des formations

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correspondantes. Nous utiliserons cette nomenclature, plus ou moins agrégée suivant les cas, dans tout le reste de ce document : Niv VI SD, Sans diplôme ou Diplôme non déclaréNiv Vbis CEP, Certificat d’études primairesNiv V gen BEPC, Brevet de fin des années collège Niv V tech CAP ou BEP, Diplômes de l’enseignement professionnel de niveau inférieur au

BaccalauréatNiv IV Bac, Baccalauréat général, technique ou professionnelNivIII Bac+2, Diplômes de niveau BAC+2ans, DUT, BTS, DEUG, …NivI, II Sup., Diplômes de l’enseignement supérieur

Plusieurs indicateurs rendent compte de la hausse du niveau de diplôme des générations successives :

Structure par âge de la population totale en 1998

La structure de diplôme de la population totale actuelle (1998 pour la France) par classe d’âge renseigne sur l’évolution des diplômes possédés par chaque génération. Chaque classe d’âge, chaque génération, a une structure de diplôme propre (tab1 en annexe). Ainsi les 20-25 ans en 1998 (générations 1973-1978) ne sont que 13% à ne déclarer aucun diplôme ou le CEP alors que les 60-65 ans (générations 1933-1938) sont 58%. Inversement 17% des 25-30 ans sont diplômés du supérieur et seulement 5.5% des 60-65 ans. Les générations les plus anciennes sont donc d’un niveau de diplôme global bien inférieur à celui des générations récentes de plus de 15 ans.

La structure par âge détaillé est donnée dans le graphe suivant :

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Les personnes qui ont 65 ans en 1998 sont nées en 1933 ; prés de 40% d'entre elles n'avaient aucun diplôme, 30% environ n'avaient que le Certificat d'études primaires, 12% avaient un diplôme du niveau du baccalauréat ou un diplôme supérieur et 10 à 12% avaient un diplôme d'enseignement professionnel court. Il y avait aussi 4à6% de titulaires du BEPC, diplôme de fin du premier cycle d'enseignement secondaire, passé à la fin de la classe de 3ème.

Moins de dix ans plus tard, pour la génération qui a 55ans en 1998, la structure est fortement modifiée ; les quatre grands groupes représentent chacun environ 23% de la population, la baisse des CEP et des sans diplôme permettant la hausse des diplômes professionnels courts et des formations du niveau bac ou au-dessus. Cette évolution va se poursuivre encore pendant sept à huit ans (personnes ayant 48 ans en 1998, nées en 1950) ; ensuite la baisse du pourcentage de sans diplômes se ralentit, ou même fait place à une légère remontée et la hausse du niveau d'éducation se fait désormais par la baisse rapide de la place du CEP qui finit par ne plus représenter qu'une part très faible. La baisse des sans diplômes reprend à un rythme lent mais le fait majeur concerne les générations qui ont 32 ans ou moins en 1997, c'est-à-dire qui sont nées à partir de 1965 ; la part de diplômés ayant un niveau au moins égal au baccalauréat augmente très rapidement et dépasse 60% pour les générations nées après 1975 ; cela n'a pu se faire que par une baisse de la part de ceux dont le plus haut diplôme était le CAP-BEP ; cette part retombe à moins de 20% de la génération, c'est-à-dire au niveau atteint 40 ans plus tôt.

La poursuite de cette évolution conduit à étudier de manière plus détaillée la fraction de la génération qui obtient le baccalauréat (graphe suivant).

Les diplômés Bac et + se divisent en trois parts égales : diplômés du supérieur, diplômés BAC+2 ans, et diplômés du Bac seul. Leur croissance est similaire, sauf dans les années récentes qui voient le « décolage » des Bacheliers.Dans les enquêtes de population active comme l’enquête Emploi en France, les jeunes qui sont encore en formation initiale ne déclarent pas toujours leur niveau de diplôme. Ils ne le

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feront que lorsqu’ils auront achevé leur scolarité, ce qui va prendre plusieurs années comme le montre le graphe suivant : les échanges diplômés-non diplômés sont très importants avant 25 ans. L’information sur la hausse du niveau d’éducation des générations les plus récentes est donc manquante.

Cette méthode a l’avantage de ne nécessiter qu’une seule enquête. Mais chaque génération est observée à des âges différents, ce qui rend la question des diplômes acquis en formation continue délicate.

Structure de diplôme des ’30 ans ‘ entre 76 et 98

Une autre méthode consiste à regarder l’évolution de la structure de diplôme d’une classe d’âge à travers le temps (graphe suivant). En choisissant par exemple les 30 ans de chaque génération, pour lesquels on suppose que l’essentiel de la certification initiale ou post initiale est acquis, on obtient l’évolution des déclarations concernant le plus haut niveau de diplôme possédé ces quarante dernières années5.

Entre 1961 et 1998, les ‘30 ans’ ont multiplié par 4 leur taux de diplômés BAC et plus, passant de 10 à 40% de la population totale. Dans le même temps, les titulaires du seul CEP ont pratiquement disparu après avoir représenté 30% de la population en 1961. Les Non diplômés ont vu leur part divisée par deux. L’extrapolation sur quelques années que permettent ces données est intéressante : l’accélération de la montée des diplômés du supérieur est probante puisque ceux ci représenteraient 55% de la population en 2002. Or ces jeunes sont encore, pour la plupart du moins au sein du système éducatif …. La diffusion de ces diplômés dans le système d’emploi est à venir. Par ailleurs la baisse des diplômés de l’enseignement professionnel de niveau V se confirme.

5 Grâce aux enquêtes sur l’emploi de l’Insee de 1976 à 1998, voir paragraphe I.3 pour la construction des données. Pour les années 61-75, respectivement 98-2001, il s’agit du pourcentage de diplômés de ceux qui ont eu, respectivement qui auront 30 ans ces années là pris dans l’enquête emploi de 76, respectivement 98.

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I-1.3 Approche en termes de KH moyen

Une manière synthétique de voir la progression du niveau d’éducation de la population consiste à calculer un indicateur de « Capital Humain moyen » fondé sur la durée théorique des études. A la nomenclature de plus haut niveau de diplôme est alors associé un indicateur de durée théorique d’étude après l’entrée au collège (12 ans) calculé comme suit :

Nombre d’annéesd’étudesaprès la 6ème (KH) Plus haut niveau de diplôme

0an Sans diplôme ou Diplôme non déclaré1an CEP, Certificat d’études primaires4ans BEPC, Brevet de fin des années collège 5ans CAP ou BEP, Diplômes de l’enseignement professionnel et niveau

inférieur au BAC7ans Bac, Baccalauréat général, technique ou professionnel9ans Bac+2, Diplômes de niveau BAC+2ans11ans Sup., Diplômes de l’enseignement supérieur

Cet indicateur calculé pour chaque classe d’âge traduit l’évolution du niveau d’éducation moyen des générations qui composent la population (graphe suivant) : chaque génération dispose d’un KH moyen plus élevé que la précédente (lecture horizontale) et cette différence se maintient dans le temps. La population totale est donc de plus en plus diplômée (lecture verticale)6 au fil du temps (ici 77, 87 et 97).

Le KH moyen des ’30 ans’ est ainsi passé de 4 à 5.5 années entre 78 et 98, et de 4.5 à 5.5 entre 88 et 98. L’élévation du niveau d’éducation s’est fortement accélérée depuis la fin des années 1980.

6 L’aspect spectaculaire de l’accroissement du KH pour les plus jeunes dans l’enquête 98 vient de la déclaration du BEPC comme diplôme pour les scolaires à partir de 1982.

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I -2 La question soulevée

Quelle que soit la méthode retenue, les statistiques montrent clairement que la hausse du niveau d’éducation de la population française est produite par l’arrivée de nouvelles générations plus formées. Le stock de compétences que constitue l’offre de travail à un moment donné est ainsi composé de strates successives, correspondant à des générations différentes, chacune portant la marque de son histoire éducative.

Notre ambition est de relier, à tout moment, le stock de compétences disponibles sur le marché du travail, à l’histoire éducative des générations composant ce stock. De manière à établir un lien, éventuellement causal, entre tel ou tel événement survenu au sein du système éducatif et l’allocation actuelle des compétences sur le marché du travail.

I-2.1 Suivre le processus d’acquisition de diplôme de chaque génération

La population active est la somme des actifs de chaque génération présente sur le territoire français. La structure de compétence de la population active est la somme des structures de diplômes des générations qui la composent. L’idée est donc de suivre le « parcours éducatif » de chaque génération encore en âge de travailler aujourd’hui depuis sa naissance pour comprendre, par quels sédiments successifs dus à l’arrivée de nouvelles générations, s’est construite la hausse d’éducation des actifs.

Le schéma ci dessous résume les principales étapes significatives pour notre objectif : scolarité obligatoire jusqu’à 16 ans en France, période de transition qui voit l’entrée dans l’enseignement secondaire puis supérieur pour certains et dans la vie active pour les autres, période de pleine activité de la cohorte et enfin sorties d’activités progressives à partir de 50 ans. A 60 ans la majorité de la cohorte ne travaille plus.

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Facteurs influençant l’effectif initial de la Génération Gt-a

Mortalité MortalitéImmigration Immigration

Taux d’activité

Gt-a Gt-a+16 Xt-a+16+j,dt-a+16+j Xa,dt

Activité Scolarité obligatoire

Etudes ou inactivité

0 16 16+j a 60ans

Naissance Age de travailler Age où le taux d’activité Observation en t de la génération est à sontaux d’équilibre

Effectif initial Variation d’effectif

Tous les individus d’une même génération7 ne deviennent pas actifs au même moment : le taux d’activité de la génération connaît un extrema qui correspond, grosso modo avec le moment où la génération est considérée comme sortie du système de formation initiale ou du moins post-initiale et où son taux d’activité se stabilise autour d’une valeur momentanément la plus haute. Cet extrema correspond à un âge moyen 16+j de la cohorte. L’allongement de la durée de scolarité des cohortes fait que la valeur de j augmente au cours du temps.

Mortalité et immigration vont influer sur l’effectif initial de la cohorte et donc sur l’effectif global de la population à l’instant t. Les taux d’activité entre 16 et 60 ans de chaque génération vont également influer sur l’effectif de la population active.

I-2.2 Hypothèse de stabilité de la structure de diplôme acquise

Nous nous intéressons à la structure par diplôme des actifs à l’instant t (à l’âge a) et à sa construction dans le temps. Notre hypothèse consiste à dire qu’elle est identique ou tout au moins très proche de celle qu’avait la génération au moment où s’est stabilisé son taux d’activité. On suppose que ce moment correspond également à celui où la génération a acquis sa «structure de diplôme  initiale ou juste post initiale», c’est à dire l’instant où elle est considérée comme « sortie du système de formation initiale ». On suppose donc que 16+j

7 Les générations sont repérées, par convention, par rapport à la date t d’observation. Ayant l’âge a en t elles sont donc nées en t-a.

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correspond à l’extrema de la courbe d’activité et à l’extrema de la courbe d’acquisition de diplômes en formation initiale, ou juste post initiale.

Dire que la structure de diplôme de la population active à l’instant t est le reflet du niveau d’éducation acquis au sein du système de formation initiale par les générations qui la composent revient à supposer que la structure par diplôme de chaque génération Gt-a à l’âge 16+j (c’est à dire calculée sur les individus présents dans la bande « rouge » du schéma précédent) est très proche de celle qu’elle aura par la suite, quel que soit a, a étant supérieur à 16+j (c’est à dire calculée sur les individus présents dans la bande « bleue », celle ci pouvant être dessinée à tout instant t).

Formellement cela revient à postuler que :

(1) Xt-a+16+j,dt-a+16+j ~= Xa,dt en structure 

C’est à dire que l’on est face à un phénomène de propagation du flux (Xt-a+16+j,d t-a+16+j) qui ne fait que vieillir entre t-a+16+j et t.

En reprenant la formalisation générale issue de nos travaux précédents, on peut également écrire :

(2) aKadtGtXadt , pour tout a et tout t.

où représente l’effectif d’actifs diplômés de niveau d et d’âge a à l’instant t représente l’effectif initial de la génération correspondante née en t-a et le coefficient de transformation de la génération Gt-a entre t-a et t, c’est à dire son taux de participation à la vie active à l’âge a et pour chaque niveau de diplôme d.

La formalisation (2) permet de relier une génération et son effectif d’actifs t années plus tard. Toutes les transformations en matière d’effectif et de certification qui vont affecter Gt-a pendant ces t années sont résumées par le coefficient Kadt.

peut s’écrire comme une fonction de tous les paramètres qui vont influer sur l’effectif initial de Gt-a entre t-a et t pour aboutir à Xadt :

Kadt = f(mortalité, taux d’activité, solde migratoire, taux de certification « d » acquis en formation initiale ou continue) de Gt-a

Formellement l’hypothèse selon laquelle les diplômes s’acquièrent en début de vie active, au sein du système de formation initiale, revient à montrer que la variation dans le temps, pour t>16+j, des dérivées partielles de K sont nulles ou tout au moins négligeables.  Ce modèle sera testé au chapitre IV, après que l’on ait suivi les générations au sein du système éducatif. Nous chercherons à montrer, de manière empirique, que la structure de diplôme d’une génération évolue très peu après 16+j, et ceci malgré des soldes migratoires ou de mortalité non nuls.

Pour ce faire il faut construire une base de données permettant de suivre les générations sur plusieurs années. Aucune donnée longitudinale assez longue et remontant suffisamment loin dans le temps n’existant, nous allons construire une base de données permettant de suivre les générations par une méthode de « faux panel ». Ceci sera l’occasion de revenir sur la hausse d’éducation intra générationnelle et de proposer une estimation de 16+j.

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I-3 Premiers tests empiriques

I-3.1 Construction de la base de données permettant le suivi des générations

Nous avons utilisé les Enquêtes Emploi réalisées annuellement entre 1976 et 1998 par l’Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques (INSEE) français, soit 23 enquêtes au total. Il s’agit d’enquêtes nationales portant sur un échantillon aréolaire de logements tiré dans toute la France. Tous les ménages de la zone aréolaire sondée sont interrogés. Les zones sont elles mêmes tirées au hasard à partir des résultats de chaque nouveau recensement de la population. Nous utiliserons ainsi trois séries d’enquêtes emploi, 75-81, 82-89 et 90-98.

L’échantillon de chaque enquête est renouvelé au tiers chaque année. Le taux de sondage est d’1/300ème ce qui correspond environ à 150000 questionnaires individuels pour la population totale de plus de 15 ans par enquête.

Ces 23 enquêtes mises « bout à bout » nous permettent de reconstruire des données longitudinales de la population française entre 76 et 98 sous la forme de « faux panel ». Elles permettent de disposer d’une « fenêtre d’observation » de 23 ans de chaque génération et des individus qui la composent. La base ainsi construite contient au total 3 450 000 questionnaires.

Bien que les séries d’enquêtes et les nomenclatures aient évolué entre 1975 et 1998, nous avons pu reconstituer la continuité des variables nécessaires à l’objectif de WP1, à savoir le genre, l’âge, l’activité et le niveau de diplôme des individus. Cette dernière variable étant bien sur la plus fragile, notamment pour les enquêtes de 1976 et 1977 où le nombre de déclarations manquantes est tellement élevé que l’on fera partir les comparaisons de 1978. La fenêtre d’observation des générations en fonction des enquêtes disponibles est la suivante :

Enquêtes76 78 80 82 84 86 88 90 92 94 96 98

Générations

G33 43ans 45 47 49 51 53 55 57 59 61 63 65

G35 41ans 43ans 45 47 49 51 53 55 57 59 61 63 …

G46 30ans 32 34 36 38 40 42 44 46 48 50 52

G60 16ans 18 20 22 24 26 28 30 32 34 36 38

G66 - - - 16ans 18 20 22 24 26 28 30 32

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Nous pouvons définir les générations « utiles », c’est à dire observables sur leur période d’activité (16-65 ans), en fonction de la fenêtre de 23 ans dont on dispose. La génération 1933 est alors la plus ancienne dont la période d’activité puisse être observée jusqu’à 65 ans, celle de 1960 la plus récente puisqu’elle avait 16 ans lors de la première enquête en 76. Au delà de 1960 les générations ne sont plus observables sur les 23 ans. Mais les générations 1961-1966 sont observables « autour de 25 ans » ce qui permettra de tester la montée de leur niveau d’éducation acquis en formation initiale et leurs acquis en formation continue en début de vie active.

I-3.2 Evolution du KH intra et inter générations

La montée d’éducation se fait à l’intérieur de la génération au fur et à mesure que celle ci vieillit et acquière des diplômes. En reprenant l’indicateur synthétique de KH précédent, on montre que chacune des 12 générations représentées sur le graphe ci-dessous part d’un KH voisin de 0 à 16 ans et atteint un point extremum autour de 25-26 ans.

La comparaison des générations entre elles indique la montée générale d’éducation qui fait que de plus en plus d’individus d’une même génération sont de plus en plus diplômés. Le point extremum de chaque courbe se déplace vers le haut (montée du KH moyen) et vers la droite (allongement de la durée des études), les courbes sont de plus en plus « exponentielles » au début de la vie active de chaque génération.

I-3.3 Estimation empirique de l’âge de sortie du système éducatif pour les générations 56 à 68

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On peut également, grâce à des données de ce type, donner une estimation empirique de l’âge 16+j auquel les générations sont sorties du système éducatif. Ainsi le taux d’activité des générations 56 à 68, les seules observables en début de vie active avec les données dont on dispose, connaît une croissance forte à partir de 16 ans et atteint un extrema autour de 26 ans environ.

Ainsi la durée « maximale » des études au delà de la scolarité obligatoire pour le groupe de générations nées entre 56 et 68 semble être de 10 ans. A 26 ans l’entrée en activité de tous ceux qui cherchaient à travailler après leurs études s’est réalisée.

La confrontation de ce graphique et du précédent montre que l’hypothèse selon laquelle l’âge où l’essentiel de la cohorte est entrée en activité n’est pas très différent de l’âge où l’essentiel de la certification initiale ou post initiale est acquise est fondée. 26 ans correspond, empiriquement à l’âge où ces deux entités présentent des extremum.

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I-3.4 Structure de diplôme et activité d’une génération

Les deux constats empiriques précédents nous amènent à vérifier, toujours de façon empirique nos hypothèses de départ : comment évolue - en structure – la composition par diplôme d’une génération entre sa sortie du système de formation initiale ou juste post initiale (i.e. 16+j) et son observation en t , soit quelques années plus tard ?

Le graphe suivant montre l’évolution du KH moyen de 4 générations dans le temps en comparant population totale et population active.

L’observation de ce graphe fait ressortir deux choses :

La progression du KH à l’intérieur d’une génération suit une courbe « logistique » : le nombre de diplômés s’accroît fortement entre 16 et 26 ans environ, connaît effectivement un extremum vers 26 ans et continue de croître doucement ensuite pour se stabiliser à un taux (droite asymptote) qui correspond au KH maximum auquel parviendra la génération.

Le KH moyen de la population totale d’une génération à 26 ans est inférieur à celui des actifs au même âge et inférieur également à celui qu’auront les actifs à tout âge. La structure de diplôme de la population totale d’une génération à « l’âge moyen » où elle entre en activité est donc inférieure à celle de la fraction active quel que soit l’âge de celle ci. La structure de diplôme de la génération quand elle traverse la bande rouge est inférieure à celle qu’elle a lorsqu’elle arrive à la bande bleue.

Ces tous premiers résultats montrent que l’identité (1) ne peut être acceptée telle quelle puisqu’il existe une différence manifeste entre les deux termes, mais que cette différence n’est pas énorme et qu’elle paraît relativement stable une fois passées les fameuses années de transition entre inactivité et activité. Il nous faut étudier les facteurs qui en sont à l’origine.

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PARTIE 2 - GENERATIONS ET POLITIQUES EDUCATIVES

La hausse d’éducation étant établie comme phénomène général ayant affecté les générations nées depuis les années trente, il reste à en préciser les modalités, et à comprendre comment cette hausse peut être reliée aux politiques éducatives mises en œuvre au cours des cinquante dernières années.

Cette approche demande un premier détour méthodologique qui consiste à rechercher la nomenclature des niveaux de diplômes qui permette de mettre à jour d’éventuelles phases ou périodes de la hausse de la structure par diplômes, et de les relier aux politiques éducatives.

Le second détour est celui de la connaissance historique de ce qu’ont été les grands moments et les grands traits de ces politiques éducatives.

Un élément de cette approche est celui de la construction d’un outil adapté au « suivi éducatif » des générations, c’est à dire de la manière dont elles ont traversé ce système. La notion de graphe permet de remplir cet objectif, en indiquant comment certaines générations témoins ont été progressivement différenciées à leur passage aux différents noeuds du système. La hausse d’éducation est alors visible comme l’effet de politiques éducatives qui visent à modifier le fonctionnement de certaines vannes ou noeuds.

II.1. hausse d’éducation : trois grandes périodes

Si la hausse d’éducation est bien établie par le graphique (voir plus haut page 8 et 9) à partir d’une nomenclature habituelle en 7 niveaux, une éventuelle périodisation de cette hausse n’apparaît pas spontanément. Une périodisation se dégage avec plus d’évidence si l’on adopte une structure en quatre niveaux. Elle apparaît de plus aisément articulable avec ce que l’on sait par ailleurs de l’histoire du système éducatif et des aspects essentiels des politiques éducatives.

II.1.1. le choix d’une structure de diplômes en quatre niveaux

La structuration par diplômes retenue pour tracer le graphique de l’évolution de la structure par diplômes est constituée de quatre niveaux, obtenus par regroupements à partir d’une nomenclature des diplômes détaillée qui en comprend onze8. Le niveau inférieur « sans diplôme ou CEP » est celui atteint par ceux qui n’ont obtenu aucun diplôme d’aucune sorte (ni général, ni professionnel), ou qui ont au mieux obtenu le diplôme sanctionnant les études primaires9. Ce niveau correspond à un minimum de 5 ans d’enseignement primaire, et peut aller jusqu'à 7 ans et même plus, pour des élèves qui auraient poursuivi un enseignement secondaire sans aller jusqu’au BEPC, et sans faire d’études techniques ou professionnelles. Le « bagage » est fondamentalement celui de l’école primaire.Le second niveau retenu « CAP/BEP/BEPC » est celui des diplômés de l’ « école moyenne ». Il est composite en ce qu’il regroupe les titulaires de diplômes professionnels de niveau 8 Dans la base de données des enquêtes emploi de l’INSEE constituée par le LIRHE.9 Le Certificat d’Etudes Primaires - CEP - a été délivré jusque dans les années 60 en France.

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élémentaire ou de premier niveau (CAP et BEP), largement majoritaires, et les titulaires du BEPC, c’est à dire du Brevet qui sanctionne la fin de l’enseignement secondaire général de premier cycle. Mais cet aspect composite n’enlève pas la forte homogénéité de ce second niveau, qui possède un caractère professionnel bien marqué, puisqu’il caractérise ceux qui, à l’enseignement primaire et un début d’enseignement secondaire général, ont ajouté deux à trois ans d’enseignement professionnel spécialisé. L’intégration des titulaires de BEPC, diplôme qui sanctionne un enseignement secondaire général de premier cycle complet, est légitimé par le fait que cette formation a une valeur professionnelle sur le marché du travail, pour l’accès à de nombreux emplois d’employés.

Le troisième niveau « bac » est celui du secondaire long, dont le diplôme phare est le baccalauréat, qu’il soit général, de technicien ou depuis peu professionnel, et tous les diplômes à caractère professionnel qui lui sont comparables, notamment les anciens brevets industriels et commerciaux (disparus au cours des années 60), les brevets de technicien, les brevets professionnels (acquis uniquement par la voie de la formation continue). Parmi les personnes déclarant posséder ce niveau de diplôme, les titulaires d’un diplôme à caractère professionnel ou technique l’emportent largement sur les titulaires d’un bac général. Ce niveau correspond à une formation technicienne, et se trouve fortement lié à l’accès aux emplois de niveau intermédiaire.

Le niveau « supérieur » comprend tous les diplômes au-dessus du baccalauréat, depuis les diplômes obtenus à bac + 2 (supérieur court correspondant aux formations de techniciens supérieurs par la voie des universités ou des lycées, ainsi qu’aux formations spécialisées comme celles d’infirmier, assimilées à ce niveau), jusqu’aux formations à bac+7, doctorats des diverses disciplines.

II.1.3. l’évolution de la structure par diplôme des générations : trois périodes

Le graphique obtenu pour les générations en âge de travailler en 1998 est le suivant.

% de diplômés dans chaque tranche d'âge en 1998

0

0,1

0,2

0,3

0,4

0,5

0,6

0,7

0,8

16182022242628303234363840424446485052545658606264666870

Age en 1998

% d

e di

plôm

és

SUPBACCAP,BEP,BEPCCEP ou SD

On doit considérer que la partie la plus intéressante du graphique se situe entre 60 et 26 ans, du fait qu’en deçà de 26 ans, la totalité des diplômes n’est pas encore acquise par la

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génération, qui est « en cours de diplômisation », ou en cours de processus d’acquisition des diplômes, et qu’au-delà de 60 ans, on peut craindre quelques déformations de la structure au profit des plus diplômés10. On peut donc « lire » sur ce graphique les transformations de la structure des diplômes pour une trentaine de générations (de 1938 à 1972, soit 34 générations).

Le premier enseignement du graphique est qu’il existe deux grandes phases, nettement distinctes, dans l’évolution de la structure par diplômes : la première concerne les générations de 1938 à 1962, la seconde celles de 1963 à 1972, le point d’inflexion des tendances étant situé en réalité entre les générations 1963 et 1965. Mais la première phase peut être elle-même divisée en deux périodes, de telle sorte que trois périodes au total peuvent être considérées comme significatives. Il serait plus exact au demeurant de parler non de période mais de groupes de générations : en effet, le graphique ci-dessus ne relie pas directement la hausse de la structure éducative à des dates d’une chronologie événementielle, mais aux générations nées entre 1938 et 1972. Cependant, parce qu’il s’agit de générations qui traversent le système éducatif à des moments différents (une génération a une histoire éducative qui lui est propre, et qui est située à des dates bien déterminées), l’assimilation à des périodes de temps est commode.

première période

Jusqu’aux générations nées entre 1965 et 1970, la structure par diplômes s’est modifiée d’une manière bien uniforme, caractérisée par la diminution constante (de 70% à 20%) de la part des « sans diplôme », la hausse sensible des diplômés de l’école moyenne (de 15 à 40%), la hausse à un taux moins élevé de la part des diplômés du supérieur (de 12% à 20%), et une hausse également à peu près constante mais à un taux plus modéré des diplômés de niveau bac (de 7% à 12%). En d’autres termes, en 24 ans, on est passé de générations où plus de la moitié était sans diplôme, plus d’un quart sortait de l’école moyenne, tandis que moins de 20% avait atteint le bac ou obtenu un diplôme supérieur, à des générations dans lesquelles 40% sont diplômés de l’école moyenne, 35% ont le bac ou un diplôme supérieur, et la minorité, soit 25%, sont sortis sans diplôme. Dans les générations nées dans les années 50 et jusqu’au tout début des années 60, les diplômés sont devenus majoritaires, mais aller jusqu’au bac et au-dessus reste l’apanage d’une minorité (environ un tiers). Il y a désormais presqu’autant de diplômés du supérieur que de sans diplôme. Il demeure que le fait majeur pour les générations nées dans les années 40 et 50, c’est la poussée de l’école moyenne : la norme de scolarisation minimum se déplace de l’école primaire vers l’école moyenne, c’est à dire le secondaire « court », avec ou sans formation professionnelle, cette dernière l’emportant dans les flux de diplômés.

Seconde période

On peut affiner l’observation en distinguant deux périodes dans cette longue période de plus de vingt ans. Un point d’inflexion des évolutions est perceptible pour les générations 1950/1951 : la croissance de l’école moyenne se ralentit, ainsi que celle des diplômés du supérieur, alors que tendantiellement, la décroissance des sans diplôme connaît un léger ralentissement. Cette seconde période, concernant les générations de 1951 à 1962, conserve les grandes tendances apparues depuis 10 et même 20 ans, mais en marquant une moindre rapidité d’évolution.

10 rôle des effets de « coquetterie », qui revient avec le temps à s’attribuer le diplôme dont on estime avoir atteint le niveau.

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Troisième période

Il se produit une rupture très nette dans les tendances d’évolution à partir des générations nées dans les années 63-64. Alors que les sans diplôme conservent sensiblement le même rythme de décroissance, les diplômés de l’école moyenne connaissent un déclin qui va en s’accentuant, au profit des diplômés du supérieur et plus brutalement pour les dernières générations de la période, du niveau bac. De plus, la nouvelle transformation de la structure de diplômes est rapide : en moins de dix ans, il y a désormais plus de diplômés du supérieur (35%) que de l’école moyenne (30%), et autant de bacheliers (18%) que de sans diplôme (17%). Avoir le bac ou plus est devenu le fait de la majorité. L’école moyenne est en passe d’être « rattrapée » par le secondaire long : le secondaire court n’est plus qu’un passage, s’arrêter à ce niveau est devenu le fait d’une minorité.

II.2. politiques éducatives et transformations institutionnelles du système éducatif français depuis 1950

Avant de tenter de relier les phases de hausse de l’éducation observées pour les générations de 1938 à 1972 et les politiques éducatives qui ont été menées dans les années 50 à 90, il est nécessaire d’avoir les principaux repères sur l’évolution du système éducatif au cours de ces années.

Il n’existe pas d’histoire de l’éducation qui couvre à la fois cette longue période, et notamment les années les plus récentes, et l’ensemble des types et des niveaux d’enseignement. Aussi n’est-il pas aisé de retracer la chronologie complète des principales décisions de politiques éducatives ayant eu une incidence sur les structures et le fonctionnement du système et une influence sur la hausse d’éducation. On se trouve contraint de séparer dans la présentation de l’histoire éducative des cinquante dernières années ce qui relève de l’enseignement primaire et secondaire, sur lequel il existe une relative abondance de matériaux, de l’enseignement technique, technologique et professionnel, sur lequel de récents travaux apportent un éclairage nouveau et bienvenu, et ce qui relève de l’enseignement supérieur, pour lequel la connaissance des évolutions structurelles reste relativement peu développée. Ces repères sur l’évolution du système éducatif et ses évolutions majeures sont présentés en annexe.

Par ailleurs, parler de politique éducative demande de fournir sinon une définition, qu’il paraît difficile de donner d’une manière vraiment satisfaisante, du moins quelques précisions sur le champ couvert par cette notion. Un ouvrage de sociologie de l’école récemment réédité (Duru-Bellat, Van Zanten, 1999) tente une réflexion à ce sujet, dont il ressort plusieurs éléments essentiels. D’abord, il faut sans doute différencier conception des politiques, telles qu’elles s’inscrivent dans des textes (législatifs, etc...) proposant des réformes (d’ampleur variable), et mise en œuvre, traduction dans les faits de ces réformes. Ainsi, les auteurs rappellent l’échec du plan Langevin-Wallon et les réformes avortées de la quatrième république en matière d’enseignement secondaire. Il est donc clair que l’histoire récente du système français d’enseignement est ponctuée d’un nombre impressionnant de réformes et de décisions de politique éducative, mais que l’étude de leurs effets réels est un complément nécessaire qui est loin aujourd’hui d’être mené à son terme.

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La problématique de la présente étude est bien de tenter de jeter un pont entre « l’histoire éducative des générations » et l’histoire des décisions de politique éducative et de leurs effets sur les structures et le fonctionnement du système.

Il est possible de rejoindre les propositions de cet ouvrage concernant le champ de la politique éducative, comme comprenant « l’analyse de l’élaboration et de la diffusion de théories sur l’être ou devoir être de l’institution scolaire ou d’une de ses parties, celle de la prise de décisions de tous ordres (lois, réglementations, recommandations, attributions de crédits...), et celle, enfin, des réinterprétations immédiates et à plus long terme de ces décisions par les agents de l’institution ». Toutefois, dans les repères historiques proposés en annexe, l’ambition est limitée par le matériau disponible, et réduite à retracer sélectivement ce qui relève des principales décisions de l’Etat central, en n’accordant qu’une faible place aux actions correctrices des divers agents agissant dans ou hors de l’institution.

II.3. les trois périodes de hausse d’éducation et les politiques éducatives

La « périodisation » (voir note supra) qui ressort de l’examen de l’évolution de la structure par diplômes des générations d’âge actif en 1998 doit être confrontée à la transformation du système éducatif qui résulte pour une bonne partie des politiques éducatives qui ont été menées dans cette période qui va des années 50 aux années 90. C’est au cours de ces quarante à cinquante années que les générations nées de 1938 à 1972 ont traversé le système éducatif, dans les différents « états »11 qu’il a connu sur le plan de ses structures et de son fonctionnement.

II.3.1. groupes de générations, hausse de l’éducation et politiques éducatives

période 1 : générations 1938 à 1950: la hausse de la demande d’éducation se manifeste dans un système éducatif structurellement inchangé.

Il est frappant de noter en premier lieu que la période de scolarisation de ces générations 38 à 50, qui connaissent les évolutions de structure de diplômes les plus rapides, avec les tendances les mieux marquées à la hausse de l’école moyenne et à la baisse des sans diplôme, correspond à une phase (les années 50) dans laquelle n’intervient aucune réforme notable de l’appareil éducatif secondaire. En effet, les générations de 1938 à 1950 sont entrées dans l’enseignement secondaire entre 1949 et 1961, et dans cette période, le système éducatif français n’a pas connu de bouleversements de structure, quoique le mouvement d’unification de l’enseignement primaire soit en train. La réforme fondamentale du secondaire qui s’ouvre avec les textes adoptés en 1959 (réforme Berthoin, suivie des réformes Fouchet-Capelle des années 62 et 63, et d’une vague de mesures concernant les établissements, les diplômes, et les programmes) ne concernera véritablement que les générations nées après 1950.

11 La notion d’« état du système éducatif traversé par une génération » est assez malaisée à saisir, dans la mesure où il ne s’agit pas exactement d’état, notion strictement instantanée (qui décrit une situation à l’instant t), mais de configuration de la partie (une classe, un niveau, un « noeud ») du système qu’aborde une génération à la date (année) où elle aborde cette partie. Or la totalité d’une génération n’aborde pas la même partie strictement au même moment, du fait des redoublements. Du fait de son cheminement au sein du système, «  l’état du système éducatif traversé par une génération » est une notion « pluri-instantanéiste » (succession d’instants t), incluant la dynamique et les transformations du système.

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En d’autres termes, la préférence pour l’école moyenne (il faudrait conserver le pluriel, tant cette époque correspond encore à un état du « système » divisé en établissements bien distincts) est manifestée par les familles alors même que les politiques éducatives n’ont pas encore pris nettement position en faveur d’une réelle promotion de l’école moyenne. C’est peut-être la tentative de constitution d’un enseignement technique scolaire structuré qui en est la première manifestation, relativement peu spectaculaire (les débats sur l’enseignement professionnel et technique restent confinés aux seuls milieux directement concernés, ils ne parviennent jamais au rang de débat national), mais positivement sanctionnée par les familles et par les instances scolaires qui pèsent sur les orientations.

Il apparaît donc que l’essentiel des transformations de la structure de diplômes des générations 38-50 est due à la modification de la demande d’éducation des familles, sans doute relayée, acceptée, parfois guidée, par le comportement des enseignants. Il faudrait pouvoir suivre l’accroissement sans doute progressif des taux de passage du primaire au primaire supérieur, du primaire au secondaire, du primaire supérieur au secondaire long.

Le travail présenté par Duru/Kieffer dans leur article (1998) est ici tout à fait complémentaire de notre approche et les résultats s’accordent précisément aux données du graphique ci-dessus. Il est parfaitement éclairant de cette progression des taux d’accès en sixième pour les générations 38-50, qui semble inexorable12. Il montre également la poussée vers le haut (passage de 30 à 50% en 12 ans) qui s’exerce au sein d’un système dont les règles et les structures restent globalement inchangées : forte séparation des « ordres » d’enseignement (Prost, 1993), liés à des types d’établissement bien distincts, recrutant sur une base sociale, ou des réseaux de scolarisation primaire/professionnel et secondaire/supérieur (Baudelot, Establet). Poussée qui se manifeste aussi dans les taux d’accès en fin de troisième, mais avec une moindre vigueur et à un bien moindre niveau (passage de 20 à 35%). Cette poussée en faveur de l’école moyenne a bien eu pour effet prioritaire de modifier fortement le taux de diplômes à ce niveau.

Si cette période des années 50 est vide de grande réforme touchant aux structures générales de l’enseignement secondaire, elle est cependant caractérisée par le fait qu’elle bénéficie des apports essentiels de la période précédente en ce qui concerne l’enseignement technique. En effet, en 1952 s’achève le temps de l’organisation de l’enseignement technique : désormais, il dispose d’une gamme complète de diplômes correspondant à tous les niveaux repérés de qualification, et tous sont préparés dans des établissements scolaires d’Etat (Brucy, 1998). La constitution d’un véritable enseignement technique national, s’appuyant sur des établissements nouveaux, a d’une certaine manière porté parfaitement ses fruits dans la mesure où ces générations, qui sont entrées davantage que par le passé en sixième, et après un, deux ou trois ans dans le secondaire ou dans les cours complémentaires, entre 1951 et 1963, se sont dirigées de plus en plus vers les centres d’apprentissage préparant au CAP. En même temps se mettaient en place des formations « techniciennes » mieux organisées, débouchant sur de nouveaux diplômes (le brevet de technicien en 1952, le BEI), qui vont connaître un succès croissant.

La seconde tendance très marquée, pour ces générations, est la progression de la part des diplômés du supérieur. Ces générations qui entrent dans l’enseignement supérieur entre 1956 et 1968, ont obtenu le bac entre ces mêmes dates, c’est à dire à une époque où le nombre des bacheliers continue sa progression, mais où le taux d’accès de la génération au bac stagne, sauf pour les trois dernières générations de cette période. Pourtant, on assiste à un changement

12 en dehors de quelques « accidents » négligeables, et sans doute dus à des défauts des séries statistiques

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de comportement : on enregistre la tendance des bacheliers de ces générations à se diriger de façon de plus en plus marquée vers l’enseignement supérieur. Le nombre des étudiants progresse très fortement durant les années 60, accompagné en cela par les politiques éducatives. En effet, cette croissance n’était pas que le fait de la demande sociale, car l’Etat estimait que le développement des enseignements supérieurs était nécessaire à la croissance économique, pour combler le retard de la France en la matière, et il mettait en place une ambitieuse politique de développement universitaire : création de nouvelles universités, recrutement massif d’enseignants (Prost, 1992). Mais le cadre institutionnel et pédagogique n’entre en modification que pour les toutes dernières générations de cette période, avec les dispositions de la réforme Fouchet de 1966: réforme radicale des études, imposant une organisation en trois cycles, et spécialisation en filières précises. De plus, les générations qui ont obtenu leur bac après 1966 se voient offrir des enseignements supérieurs nouveaux, notamment avec la création des filières techniciennes supérieures courtes (BTS en 1962, DUT en 1966).

Au total, on peut considérer que les générations 38 à 50 ont bien traversé le système éducatif français avant qu’il n’entre dans ses grandes réformes, qu’elles concernent le secondaire ou le supérieur. Et c’est le changement de la demande d’éducation des familles qui a été le moteur de la transformation de la structure des diplômes de ces générations.

Période 2 : générations 1951 à 1962 : la hausse des niveaux d’éducation se ralentit alors que le système français est soumis à de profondes réformes, de l’enseignement secondaire à l’enseignement supérieur.

Les générations nées de 1951 à 1962 sont entrées dans le secondaire entre 1962 et 1973, et ont obtenu le bac entre 1969 et 1980 : elles ont donc été directement concernées par la vague de réformes intervenue entre 1959 et 1969, qui a conduit à opérer une transformation radicale du système éducatif français, en passant en dix ans de la juxtaposition de réseaux à la constitution d’un système en niveaux, cherchant à scolariser dans les mêmes types d’établissements l’ensemble d’une classe d’âge, en la faisant passer dans sa totalité de l’école primaire au collège. De plus, l’enseignement technique connaît dans cette période « le plus profond bouleversement de son histoire: il ne constitue plus un ordre d’enseignement autonome » (Brucy, 1998).

Or on assiste à un ralentissement de la transformation de la structure des diplômes acquis par les générations de cette période. Les tendances de long terme dessinées 10 ans plus tôt perdurent, mais les effets s’amoindrissent. Dès le moment où la vague démographique du baby-boom atteint le secondaire (fin des années 50), les effectifs dans tous les types d’établissements du secondaire, collèges généraux (CES et CEG) et techniques (CET), progressent de façon spectaculaire (on construit un CES par jour pendant 10 ans, soit 2350 entre 1965 et 1975, et les effectifs en CET ne sont pas loin de doubler), mais l’acquisition de ce niveau de diplômes ne progresse pas structurellement aussi vite que dans la période précédente, bien que les générations concernées fassent de grands progrès de scolarisation.

Les graphiques publiés par Duru/Kieffer montrent d’abord que ces générations 51 à 62 ont connu une très forte et très rapide hausse du taux d’accès en sixième (telle que la génération 1962 dépasse les 90% d’accès en secondaire), mais également que les taux d’accès en troisième sont loin d’avoir progressé au même rythme. Si bien que le taux d’accès en troisième pour ceux qui ont atteint la sixième a baissé pour ces générations, traduisant le

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« bon » fonctionnement de l’orientation au palier de fin de cinquième vers l’enseignement technique. Ceci s’accorde bien avec l’idée, développée par les concepteurs des réformes des années 60, que l’accès de toute une classe d’âge en sixième13 devait s’accompagner d’une orientation précoce de la plupart vers les écoles techniques moyennes, réservant aux meilleurs élèves la poursuite vers le secondaire long, le baccalauréat et l’enseignement supérieur (Lelièvre, Nique, 1995).

Il apparaît donc que cette période de grandes réformes structurelles, dont on aurait pu croire qu’elle serait porteuse de grands changements de la structure des diplômes acquis, ait été en fait conduite dans des formes telles (rôle de l’orientation) que le résultat global final ait été le ralentissement (toutefois assez léger) de la hausse de l’éducation.

La situation est différente pour l’enseignement supérieur, parce que pour ces générations, la période de réformes structurelles est passée, et il n’y a plus que des aménagements (création des DEUG), mais elles sont les premières à faire entièrement leurs études supérieures dans le cadre de la « nouvelle université » qui se met en place à partir de 1969, après la réforme Faure de 1968. Les effectifs du supérieur connaissent dans les années 70 un ralentissement de leur progression14, qui débouche sur un tassement de la progression des sorties avec un diplôme du supérieur, qui s’échelonnent pour ces générations entre les années 73 et 83.

Période 3 : générations 1963 à 1972 : la demande d’éducation précède puis soutient la nouvelle politique éducative qui se donne pour objectif la hausse d’éducation

Ces générations 63 à 72 connaissent un brusque changement de régime concernant la hausse d’éducation: la croissance des diplômés du supérieur s’accentue nettement, celle du niveau bac également mais pour les dernières générations seulement, tandis que s’amorce une décroissance de la part des diplômés de l’école moyenne, qui va en s’accélérant. Seule la baisse des sans diplôme continue comme auparavant.

La génération 1963 parvient aux portes de l’enseignement supérieur vers 1981-82, alors que la France connaît un changement de majorité politique important, avec l’arrivée de la gauche au pouvoir, porteuse d’un courant d’idées favorables à l’éducation : on peut imaginer que quelques vannes s’ouvrent alors plus franchement, ou que certains verrous plus ou moins occultes sautent progressivement à différents étages du système (passage du technique court au technique long, admission en seconde générale, passage du supérieur court au supérieur long, etc...). L’inflexion politique adoptée en 1982, et la reprise de la montée du chômage, et notamment de celui des jeunes, ont pu influer notablement sur les choix de poursuite d’études de la part des familles, encouragées par les politiques publiques.

En début de période, la hausse du niveau bac s’essouffle, et la part des bacheliers dans la structure des diplômes baisse même pour deux générations - 1966 et 1967- qui ont eu le bac autour des années 1984 et 1985 : l’année 1984 marque effectivement une légère baisse du taux d’accès de la génération au baccalauréat (selon les données de la DPD 1998), mais on peut aussi supposer que ces générations ont connu un meilleur succès dans la poursuite d’études en supérieur court (BTS et IUT).

13 c’est à dire dans le secondaire, ce qui était loin d’être la règle jusque là.14 la démographie joue aussi son rôle car ces générations sont un peu moins nombreuses que les 5 précédentes, plus proches de 800000 que de 850000.

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C’est alors que la politique éducative adoptée dès le milieu des années 80, visant l’objectif de conduire 80% d’une classe d’âge au niveau du baccalauréat, entre en jeu et entraîne des effets presque immédiats sur les structures par diplômes des générations concernées. Le taux d’accès des générations au baccalauréat s’élève alors très rapidement, avec la contribution du tout nouveau baccalauréat professionnel : le taux de bacheliers (qui sont surtout des titulaires de baccalauréats de technicien, auxquels s’ajoutent bientôt les bacheliers professionnels, dont le nombre croît très vite) dans la structure de diplôme des générations se relève rapidement, puis contribue par la suite au relèvement du taux de diplômés supérieurs, à la fois par l’intermédiaire des diplômes du supérieur court et de ceux du supérieur long (ce qu’indique le graphique donnant les structures par diplômes détaillé. Voir en annexe).

Cette politique volontariste de hausse de l’éducation a pour corollaire des effets « mécaniques » en amont sur l’enseignement professionnel court : la baisse du taux de diplômes de niveau moyen acquis qui est nécessaire pour que le niveau bac monte à 80% de la classe d’âge se réalise par deux voies. La première est que le désenclavement des formations professionnelles courtes par la création du baccalauréat professionnel implique évidemment la diminution du nombre et de la proportion de diplômés de BEP qui partent vers le marché du travail, afin d’alimenter la filière du baccalauréat professionnel. La seconde est que la politique de développement des baccalauréats professionnels étant décidée et imposée aux lycées professionnels à moyens constants, la diminution rapide, puis la disparition totale des CAP dans ces établissements était inévitable. Dès lors, l’évolution des courbes constatée sur le graphique est parfaitement cohérente avec la politique adoptée, et en est la traduction «fidèle ».

II.3.2. des liens d’une grande complexité

Les liens entre politiques éducatives et évolution dans le sens de la hausse de la structure des diplômes acquis par les générations successives sont patents tout au long de la période, mais ils présentent des modalités différentes et manifestent une certaine complexité.

Les politiques éducatives combinent des actions sur la structure et sur le fonctionnement du système mais leur résultante sur la hausse des diplômes n’est sans doute ni mécanique, ni immédiatement prévisible, du fait que la réaction des agents et des usagers, ou si l’on préfère des acteurs, vient introduire des inflexions spécifiques et possède une force propre. En effet, l’acquisition des diplômes, dans le cadre d’une structure donnée, peut se modifier si les acteurs interviennent sur les parcours scolaires, c’est à dire sur les aiguillages qui se produisent de classe en classe.

Les transformations les plus lourdes, tant sur le plan de l’architecture que du fonctionnement du système, ont eu lieu au cours des années 60 et ont principalement concerné l’enseignement secondaire, général et technique, ce qu’on a appelé ici l’école moyenne, et elles ont touché également l’enseignement supérieur. On attendrait donc que les générations qui ont été scolarisées dans le secondaire au cours des années 60 aient été marquées par des transformations importantes de la structure des diplômes. Or elles ont été moindres que dans la période précédente, au cours de laquelle les politiques éducatives consistaient plutôt à gérer le système pour l’essentiel dans l’état où les années 40 l’avaient structuré. Il n’y a guère que l’enseignement technique qui connaissait de plus grandes transformations, car il cherchait à construire son organisation propre dans le cadre d’une forte autonomie. Mais il restait un système à part, et plutôt l’affaire d’une poignée de spécialistes.

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Les politiques éducatives des années 60 ont donc eu un rôle d’accompagnement et d’ « encadrement » de la hausse de la demande d’éducation, mais elles n’ont pas créé le mouvement : elles avaient certes pour objectif de viser une hausse de l’éducation en renforçant la démocratisation de l’enseignement, mais en modifiant les modalités de formation, notamment en assurant une plus forte place aux formations professionnelles. L’intérêt des familles pour une meilleure éducation de leurs enfants ne s’est probablement pas démentie, mais les politiques mises en place ont eu finalement pour résultat plus de canaliser ou même de freiner le mouvement de hausse que de l’amplifier.

Avec les années 80, donc pour les générations nées au cours des années 60, il en va bien différemment, car la politique éducative, en se déterminant plus directement et plus explicitement en faveur de la hausse du niveau moyen d’éducation, en choisissant de définir un objectif exprimé en terme de proportion de classe d’âge devant atteindre un niveau donné, et en modifiant en conséquence les structures et les parcours, a imprimé un changement très puissant au sein du système qui a eu des répercussions immédiates sur la structure des diplômes.

D’une autre manière, on pourrait en réalité convenir que tout au long des ces 50 années, la demande d’éducation a été orientée à la hausse et que les politiques éducatives n’ont également pas cessé de soutenir un effort à la hausse, pour des raisons à la fois politiques (l’objectif de démocratisation était indispensable après la seconde guerre mondiale, le « système » d’alors étant par trop cloisonné sur des bases sociales devenues inacceptables) et économiques (les « besoins » en qualifications de l’appareil productif en pleine restructuration et en plein développement dans la période de reconstruction, puis ensuite au cours du reste des trente glorieuses, sont tels que les formations techniques et professionnelles d’abord, puis finalement tout le système secondaire et supérieur se trouve invalidé par pans entiers), sous des modalités qui ont bien entendu varié. Pourtant, malgré ces deux éléments clés pour expliquer la hausse d’éducation, celle-ci n’a pas été tout à fait uniforme, et on peut discerner l’existence de paliers et d’inflexion dans la croissance.

Les politiques menées ont connu une certaine continuité dans la mesure où la politique Chevènement de 1985 est la prolongement logique des politiques Berthoin/Fouchet/Capelle des années 59-63-66 : on pouvait décider de mener une classe d’âge au niveau du bac dès lors que l’on avait d’abord amené cette classe d’âge en fin de premier cycle de secondaire : ceci était la condition de possibilité de cela. Les politiques éducatives en France depuis 1950 ont bien consisté à canaliser la totalité d’une classe d’âge vers un tronc commun toujours de plus en plus long, à retarder ainsi la différenciation, en réalisant d’abord l’unification du primaire (années 50 et 60), puis du secondaire court (années 60 et 70), pour s’attaquer enfin au secondaire long (années 80-90), qui demeure à la fin des années 90 un lieu de différenciation (en deux catégories de lycées) mais avec un objectif unifié (le baccalauréat, sous quelque forme que ce soit). Mais à certains égards, on pourrait soutenir que la réforme Chevènement vient relancer une hausse d’éducation en train de s’essouffler. Du reste, la réforme du collège n’a pas donné totale satisfaction, et on peut considérer que le système français a de la peine à réussir la politique qui consiste à conduire la totalité de la classe d’âge en fin de collège pour ne la différencier qu’ensuite.

Les liens entre politiques éducatives et hausse des diplômes supérieurs sont plus faciles à mettre en évidence. Toutefois, il faut convenir que s’agissant d’enseignement supérieur, la politique éducative a été moins structurelle que fonctionnelle : on a davantage changé les contenus, les programmes, les méthodes pédagogiques, qu’on n’a transformé les niveaux. On

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peut considérer que les réformes qui ont concerné l’école et le collège à partir des années 50 n’ont été engagées que dans le but de mieux assurer le recrutement des élites et le fonctionnement de l’enseignement supérieur. La nécessité de développer ce dernier et d’en relever le niveau est en effet affirmée dès la fin des années 50. Les historiens de l’éducation l’établissent formellement pour la politique menée par le Général de Gaulle dans les années 60. Cette politique et les structures qui ont été mises en place ont fondé les bases du système qui a perduré jusqu'à la politique Chevènement-Jospin (85-89). Le sens des réformes du secondaire est à chercher dans la volonté de fournir à l’enseignement supérieur les meilleurs élèves, donc en assurant un recrutement sur la base la plus large, et en filtrant la totalité de la classe d’âge.

Dans cette conception, le collège était alors considéré comme le filtre essentiel, le lieu de la sélection/orientation, dont l’Etat aurait la maîtrise : tous les élèves devaient entrer dans ce type d’établissement, puis être orientés par paliers successifs suivant leurs résultats scolaires vers les différentes branches des enseignements professionnels, et dans des proportions décidées en fonction des besoins de l’économie (la planification en était l’outil technique), l’important étant de réserver les meilleurs élèves à la poursuite d’études en lycée classique, ou en lycée technique qui offre un débouché important vers l’enseignement technologique court, scolaire ou universitaire.

Au cours des années 70 puis 80, le collège a graduellement changé de fonction, du fait de la progression du chômage des jeunes, notamment après le lycée professionnel : la perte de crédibilité de l’enseignement professionnel court a précipité sa « revalorisation » par le moyen de la poursuite d’études vers le baccalauréat. Le collège n’a plus la même utilité d’orientation lorsqu’il devient néfaste d’envoyer des jeunes préparer des diplômes (le CAP est alors visé) que le marché du travail semble rejeter, et qu’il paraît préférer les formations et les diplômes « techniciens » (niveau bac). La suppression du palier fin de cinquième vient confirmer que le collège n’est plus un lieu d’orientation, bien qu’il continue à maintenir des classes technologiques et des classes d’insertion15, qui alimentent ensuite les lycées professionnels ou à défaut les centres de formation d’apprentis, mais après la classe de troisième.

15 on pourrait peut-être parler d’orientation à la marge

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II.4. UNE LECTURE « GENERATIONNELLE » DES TRANSFORMATIONS DU SYSTEME EDUCATIF

Pour suivre plus précisément la manière dont le système éducatif a été remodelé dans son architecture et son fonctionnement au cours des 50 dernières années pour permettre la hausse d’éducation, il est possible d’utiliser une approche générationnelle appuyée sur une représentation par graphes.

Peut être qualifié de graphe un schéma qui cherche à reconstituer la façon dont une génération chemine dans le système éducatif, c’est à dire la manière dont elle se différencie progressivement en avançant dans le système, aboutissant à l’acquisition d’une certaine structure de diplômes. Le graphe montre, plutôt qu’il n’explique, comment une génération acquiert ses diplômes, à partir de l’« état » du système aux différentes dates où elle le traverse.

Le choix d’une représentation sous forme de graphe arborescent de la traversée du système éducatif par une génération repose sur le constat que l’organisation de ce système peut être assimilée à un processus de distillation fractionnée (image d’une raffinerie), qui partant d’un produit brut (la totalité d’une génération entrant à l’école), le différencie progressivement en l’aiguillant (l’orientant) vers des types d’enseignement différents, débouchant sur des diplômes de différents niveaux, après des parcours scolaires de longueurs différentes.

Le graphe est une reconstitution comportant un certain nombre d’approximations et d’imprécisions. En effet, une véritable analyse de cohorte, dans sa traversée singulière du système éducatif, n’est pas réalisable dans le cadre des appareils statistiques actuels. Il existe des observations longitudinales spécifiques, notamment des études de panel réalisées par le ministère de l’éducation, mais qui restent partielles car elles ne s’appliquent qu’à une fraction du parcours scolaire d’une génération.

La reconstitution du parcours scolaire complet de la génération repose sur la notion d’âge théorique, c’est à dire l’âge auquel la génération devrait se trouver dans une classe si elle ne redoublait pas. La méthode de reconstitution implique des approximations tenant à plusieurs facteurs, qu’on ne détaillera pas ici (se reporter à la note méthodologique concernant la construction des graphes), mais qui ont pour l’essentiel une double origine : les individus de la cohorte ne commencent pas tous l’école exactement au même âge, et n’avancent pas tous à la même vitesse (redoublements répartis sur des classes différentes), les effectifs dans les classes à chaque date comportent des élèves de générations différentes.

On a choisi de tracer les graphes pour des générations situées dans chacune des périodes repérées précédemment, et qui se veulent représentatives de l’« état » du système éducatif pour cette génération, au fur et à mesure qu’elle avance dans le système.

Nous proposons deux lectures des graphes : la première est une lecture graphe par graphe pour les cinq générations témoins retenues, qui permet de relier le parcours de chaque génération aux transformations intervenues dans le système éducatif, la seconde est une lecture transversale des graphes, pour mettre l’accent sur la dynamique de la modification des flux et des aiguillages.

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II.4.1. générations et structure des diplômes acquis

En considérant les différentes périodes dégagées plus haut, cinq générations témoins ont été choisies pour illustrer la manière dont la hausse d’éducation s’est inscrite, au cours de chaque période, dans les parcours des générations.

Graphe 1. Génération 1942

Ce graphe permet de visualiser la structure du système qui a « formé » cette classe d’âge creuse, mais le chiffrage des différentes classes n’est pas possible pour le début des années 50. pour cette génération, les deux réseaux de scolarisation primaire-professionnel et secondaire-supérieur sont en fonctionnement, et le premier draine sans doute la majorité des effectifs. Le passage par les classes de fin d’études primaires et encore très important, et ceci débouche principalement directement sur la vie active (presque 50% de la génération n’a acquis aucun diplôme supérieur à la fin du primaire), ou sur l’entrée dans un Centre d’Apprentissage ou un apprentissage en entreprise artisanale, permettant dans le meilleur cas l’obtention d’un CAP (30% de la génération déclare avoir un diplôme de ce type en 1998).

Le côté minoritaire, sélectif et élitiste du réseau secondaire se traduit par un nombre limité de bacheliers : les 60000 bacheliers de 1960 donnent un taux d’accès de la génération au bac à peine supérieur à 10%. Ce taux va rester stable durant les six années suivantes, jusqu’au bac 1966, qui inaugure le nouveau baccalauréat en une seule partie passée à la fin de la classe de terminale. C’est à partir du bac 1967 que les effectifs augmentant plus fortement, le taux d’accès des générations au bac reprend sa croissance. Et à partir de 1969, ce taux est « dopé » par l’apparition des baccalauréats de technicien. Mais la génération 1942 a également pu obtenir des diplômes professionnels de niveau « technicien », divers brevets qui destinent directement au marché du travail, ou ne permettent qu’à une toute petite minorité de poursuivre des études supérieures. Au total, et compte tenu du fait qu’une proportion non négligeable de bacheliers sortent directement sur le marché du travail sans entamer d’études supérieures, c’est 10% de cette classe d’âge qui déclare en 1998 posséder comme diplôme le plus élevé un diplôme de niveau bac.

La génération 1942 parvient à 33000 diplômés du supérieur environ, entre ingénieurs et licences, soit à peu près 6%, auxquels il faudrait rajouter les doctorats et les divers diplômes supérieurs au bac délivrés par d’autres ministères. Cependant, la génération 1942 « déclare » un taux de diplômés du supérieur de plus de 12%, proportion qui paraît un peu élevée, mais qui peut s’expliquer en partie par l’acquisition de diplômes en cours de vie active, ou par des effets d’assimilation (ceux qui ont arrêté après deux ans d’enseignement supérieur alors qu’il n’existait pas encore de DEUG déclarent l’avoir en 1998).

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Graphe 1. génération 1942 573000 naissances

Age 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 24année 1952 1953 1954 1955 1956 1957 1958 1959 1960 1961 1962 1963 1964 1966classe CM2 6ème 5ème 4ème 3ème 2de 1re Term bac sup1 sup2 sup3 sup4 sup6

32

BAC

CAPCAP

59300

FE1 FE2

7400

CPGE

UNIV

25300

licence

ingénieur

brevets

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Graphe 2. Génération 1952

Cette génération appartient au deuxième groupe de générations (51 à 61), qui ont connu une poursuite de la montée de la structure d’éducation, mais à un rythme ralenti par rapport à la précédente, tandis que les transformations de structure allaient bon train. Ces changements structurels sont bien entendu progressifs : la mise en place des nouveaux établissements, des nouvelles filières se fait d’année en année, au rythme des constructions et des substitutions.

C’est ainsi que cette génération, pourtant dix ans après celle de 1942, trouve encore des classes de fin d’études primaires quand elle aborde le premier cycle du secondaire, qui est en pleine mutation (les grands axes de la politique éducative ayant été adoptés), et loin d’être unifié. Même si ces classes appelées à disparaître par la réforme ont perdu de leur importance, elles scolarisent encore 33% de la génération 1952, ce qui permet à 20% de la classe d’âge d’entrer dans un CET et d’y suivre la filière technique scolaire pour y préparer un CAP, filière en pleine expansion et réorganisation. La génération 1952 est une des premières pour lesquelles le taux de « CAP ou équivalent » déclaré en 1998 est supérieur au taux de non diplômés, et dépasse 35%. Pourtant, on évalue sur la base des données du graphe qu’à l’âge « normal » d’obtention du CAP, seulement 20% environ de la génération avait obtenu son CAP. A trente ans (en 1982), la génération 1952 atteignait un taux de 35% de diplômes de ce niveau : l’acquisition entre 17 et 30 ans de diplômes de type CAP a donc été importante.

Le premier cycle du secondaire prend beaucoup plus d’importance pour cette génération, dont 40% parviennent en fin de classe de troisième, et 75% continuent en classe de seconde vers le baccalauréat. Le nombre des bacheliers dans cette génération commence à bénéficier de l’apport des tous nouveaux bacs de technicien, si bien que le taux d’accès au bac de la génération est de 17% (chiffre estimé avec les données du graphe, alors qu’il est de 18% d’après la méthode de calcul du ministère de l’éducation).

La progression de l’accès au bac pour cette génération se traduit également par un plus fort taux de diplômes supérieurs, d’autant plus que les filières technologiques courtes apparues depuis quelques années (1964 pour les premiers BTS diplômés, et 1968 pour les premiers DUT) commencent à représenter un pôle important. Ainsi, cette génération obtient 87000 diplômes du supérieur de tous niveaux, soit un taux proche de 10%, alors que le taux déclaré en 1998 atteint 20%, et qu’il est de 15% à trente ans. La technique du graphe introduit ici certainement de trop grandes simplifications par rapport à la complexité du processus réel d’acquisition des diplômes dans l’enseignement supérieur.

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Graphe 2. génération 1952 818500 naissances

Age 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 24année 1962 1963 1964 1965 1966 1967 1968 1969 1970 1971 1972 1973 1974 1976classe CM2 6ème 5ème 4ème 3ème 2de 1re Term bac sup1 sup2 sup3 sup4 sup6

34

963800

BAC

CAPCAP

482400 468300

50 40

17

391600

30

314500 342200 196700

292000

11900

20

18400

FE1

184200

FE2

167300

IUT DUT

BTS

maîtrise doctorat

ingénieur

commerce

3750015200

10200

14100

BTS

166100

UNIV

241200

CPGE

33

10900

12800

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Graphe 3. Génération 1961

Cette troisième génération appartient à la même phase que la précédente, mais elle se situe à la fin de cette phase, juste avant que ne se manifeste la nouvelle politique éducative en faveur du baccalauréat.

Sur le plan structurel, cette génération traverse un système éducatif qui a changé sur deux points importants : les classes de fin d’études primaire ont complètement disparu, une nouvelle filière d’enseignement professionnel court a vu le jour après la classe de troisième. Les éliminations précoces, sitôt fini l’enseignement primaire, se raréfient, si bien que le taux de sans diplôme dans la génération descend à 25%. Une autre face de ce nouveau fonctionnement du système est que 80% de la génération entre maintenant en sixième (ce taux paraît un peu faible, d’autres sources indiquent plus de 90%) et parcourt 2 ans dans le secondaire général de premier cycle. Mais tandis qu’à ce stade, 20% de la génération est orientée vers les scolarités techniques courtes préparatoires au CAP, comme pour la génération 1952, désormais la grande majorité (les deux tiers environ) continue vers la fin du premier cycle, jusqu'à la classe de troisième, après laquelle existent depuis 1969 deux filières : filière courte vers l’enseignement professionnel (BEP), qui absorbe 27% des orientations post troisième, filière longue vers le baccalauréat, où se dirige 63% des élèves.

Cette génération marque l’apogée, dans la structure des diplômes acquis, du taux de diplômes de l’école moyenne (où les diplômes professionnels dominent), car pour les générations suivantes, l’orientation après la classe de cinquième va connaître un déclin, qui ne sera pas compensé par l’accroissement de la filière BEP, celle-ci devant ensuite alimenter le baccalauréat professionnel. Au total, les diplômes professionnels moyens des filières courtes, en tant que plus haut diplôme atteint, vont connaître une diminution de leur part dans la structure des diplômes des générations nées après 1962.

Le baccalauréat continue sa progression, puisque les filières longues gagnent en effectifs, du fait de l’accroissement de la part de la génération qui parvient en fin de collège, et non en raison d’une amélioration du taux d’orientation vers les filières longues après le collège : au contraire, ce taux est passé de 75 à 63% en 10 ans, mais s’applique à un flux beaucoup plus important (passé de 390000 à 580000 élèves). Le taux d’accès au bac de cette génération atteint 23% d’après le graphe (les calculs plus précis du ministère de l’éducation donnent un taux identique). Mais en tant que plus haut niveau de diplôme atteint, le bac ou ses équivalents représente moins de 15% de la génération 61, et n’a pas beaucoup progressé depuis la génération 52.

Pour les diplômes du supérieur, le calcul du taux d’obtention de diplômes terminaux n’est pas directement possible. Il existe une progression sensible (de 25 à 30% suivant le type de diplôme) du nombre de diplômes d’ingénieurs et de doctorats, ainsi que de DUT et surtout de BTS, mais on ne peut déterminer qu’avec beaucoup d’approximation le nombre de diplômes de plus haut niveau atteints dans le supérieur, du fait des poursuites d’études d’un type de diplôme à l’autre. Le taux de diplômes supérieur déclaré en 1998 par la génération 61 n’est guère plus élevé que celui de la génération 52 (20% contre 18% environ), ce qui paraît faible par rapport à la croissance du nombre de diplômes délivrés : la cohérence entre les deux types de données ne paraît pas ici très satisfaisante. Elle est mieux assurée avec la mesure du taux de diplômes supérieurs déclarés par les générations à trente ans : entre les générations 52 et 61, la progression du taux est de 15 à 20%, ce qui s’accorde mieux avec la croissance des diplômes délivrés.

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graphe 3. génération 1961 835200 naissances

Age 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 24année 1971 1972 1973 1974 1975 1976 1977 1978 1979 1980 1981 1982 1983 1985classe CM2 6ème 5ème 4ème 3ème 2de 1re Term bac sup1 sup2 sup3 sup4 sup6

36

910900

BAC

CAPCAP

743100 699500

81 64

23

580400

40

171000

367800214800

333300

19

BEPBEP

157000

CPGE

DEUG

DUTIUT

BTS

BTS

228500

75400

16600

36500

158000

27200

25

maîtrise

8

doctorats

17

ingénieur

commerce

32000

13600

7500

21100

20100

21400

licence

44500

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Graphe 4. Génération 1970

Cette génération a eu 28 ans en 1998, et vient donc d’achever son processus d’acquisition de diplômes de formation initiale.

Elle est une des premières à avoir atteint le lycée après l’instauration de la politique Chevènement, et elle en porte les traces. Avant d’atteindre le lycée, cette génération est massivement entrée en sixième, et son taux de départ vers l’enseignement professionnel court dès la classe de cinquième a diminué par rapport à la génération 61. C’est donc plus de 70% (78% d’après la source FQP exploitée par Duru/Kieffer) qui continue jusqu'à la fin du collège (qui fonctionne sous le régime du « collège unique » depuis 1977) et qu’elle atteint à partir de 1984. C’est maintenant près de 50% de la classe d’âge qui entre en seconde pour y suivre la voie dite longue jusqu’au baccalauréat, bien que le taux d’orientation vers la seconde n’ait pas augmenté. Mais la nouveauté pour cette génération vient de ce que la filière courte vers le BEP se prolonge désormais vers le baccalauréat professionnel. Si bien qu’aux 34% qui accèdent aux baccalauréats général et technologique, s’ajoutent 2% pour cette génération de baccalauréats professionnels. Cette génération est au début de la phase de forte croissance du taux d’accès au bac des générations. En quelques années, donc pour les générations nées dans les années 70, on va passer à un taux supérieur à 60%.S’il y a encore beaucoup de jeunes de cette génération 70 qui passent des CAP et des BEP, le BEP est de moins en moins un diplôme terminal, et le CAP de moins en moins un diplôme acquis après une formation scolaire.

La délivrance de diplômes supérieurs fait un bon en avant . Avec le même mode de comptage que précédemment, le nombre de diplôme d’ingénieurs augmente de 50%, le nombre de maîtrises double, ainsi que celui des BTS. On dénombre ainsi près du double de diplômes supérieurs que pour la génération 61. Le taux de diplômés du supérieur de cette génération à 28 ans est déjà de 30% : il a augmenté de 10 points en moins de dix ans.

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graphe 4. génération 1970 847800 naissances

Age 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 24année 1980 1981 1982 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992 1995classe CM2 6ème 5ème 4ème 3ème 2de 1re Term bac sup1 sup2 sup3 sup4 sup6

38

910500

BAC

CAPCAP

? 877100

93 70

34

642600

47

159500

432200312600

422500

17

BEPBEP

200600

CPGE

DEUG

DUTIUT

BTSBTS

BAC PRO

maîtrise doctorat

121100 14500

22

ingénieur

273200

commerce

13

30

2

29600

40000

106000

28900

57100

80400

9100016600

21800

n.d

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Graphe 5. Génération 1980

En 1998, cette génération n’a pas terminé son processus d’acquisition de diplômes, elle n’est parvenue qu’aux portes de l’enseignement supérieur. Pour les parcours scolaires déjà effectués, la caractéristique forte à noter est que c’est une des premières générations à parvenir dans sa quasi-totalité à la fin du collège, car il n’y a plus d’orientation vers le professionnel court à partir de la classe de cinquième (un examen plus détaillé montrerait l’existence de quelques « fuites », mais elles tendent à devenir négligeables).

L’orientation après la classe de troisième reste partagée comme par le passé pour les générations précédentes entre 2/3 pour les secondes de détermination qui conduisent au baccalauréats général ou technologique et 1/3 pour les secondes professionnelles qui amènent les élèves au baccalauréat professionnel via le BEP qui devient un simple diplôme de « transit » et non plus un diplôme terminal. Tous types de bac confondus, c’est 61% de la génération qui atteint ce niveau. Ceci devrait conduire à une nouvelle hausse de la part de diplômés supérieurs pour cette génération par rapport à celle de 1970, mais le processus d’acquisition de ces diplômes s’étalera sur les années 2000 à 2008. On débouche donc avec cette génération sur les questions de prospective réservées à la phase 4.

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graphe 5. génération 1980 800400 naissances

Age 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 24année 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2005classe CM2 6ème 5ème 4ème 3ème 2de 1re Term bac sup1 sup2 sup3 sup4 sup6

40

803700

BAC

875700

109 96

52

778000

64

513200418400

497900

BEPBEP

255700

CPGE

DEUG

DUTIUT

BTSBTS

BAC PRO

maîtrise doctorats

253600 77000

31

ingénieur

31

commerce

9

38000

250900

115000

47500?

? ?

?

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II.4.2. générations 1942 à 1980 : la dynamique des transformations du système éducatif : flux et noeuds d’orientations

L’enchaînement des 5 graphes16 fournit l’image dynamique de la manière dont se sont opérées les modifications progressives du processus de « distillation éducative » des générations.

On est passé en 50 ans d’un système morcelé, prédéterminant dès la première classe de l’école primaire les types de parcours, réservant à une minorité d’une génération l’accès aux plus hauts diplômes, via le baccalauréat, à un système unifié jusqu'à l’âge de 15-16 ans, qui conduit la totalité de la génération jusqu'à la fin du collège, pour la différencier ensuite suivant le type de baccalauréat, système qui porte en germe de conduire à terme la totalité de la classe d’âge à l’entrée dans l’enseignement supérieur.

Cette transformation s’est opérée par étapes successives. La logique qui a fonctionné est celle du développement d’un tronc commun de formation générale toujours plus long pour l’ensemble de la génération. Les réformes successives ont contribué à repousser toujours plus tard le moment où la génération est différenciée par des formations bien distinctes débouchant sur des diplômes différents. Le mouvement d’homogénéisation a coïncidé avec la décision de reporter la scolarité obligatoire de 14 à 16 ans, mais cette coïncidence n’était pas inévitable : elle a résulté d’un choix, une option l’emportant sur l’autre : c’est la victoire des tenants de l’école secondaire classique contre les partisans de la concurrence entre deux types d’école secondaire. Au cours des années 50, c’est plutôt le second « modèle » qui fonctionnait, comme héritage du passé. Il a eu pour effet, de façon assez paradoxale, de renforcer la démocratisation de l’accès au bac : la proportion d’enfants d’ouvriers a augmenté dans les classes terminales et dans les classes de seconde d’enseignement général des lycées, de la seconde guerre mondiale au milieu des années soixante, mais elle n’a cessé de régresser depuis (Prost, 1992).

L’âge de 14 ans pouvait s’accorder avec un départ direct vers la vie active après une scolarité primaire complète, comprenant même pour le meilleurs élèves d’origine populaire deux ans de cours complémentaires. L’âge de 16 ans rendait cette issue moins aisée : l’idée qu’il fallait continuer l’enseignement général au-delà du primaire s’accordait avec la nécessité de se spécialiser par une formation professionnelle, elle-même déterminée par les besoins de l’économie fixés dans le cadre de la planification. La promotion de l’école moyenne technique se trouvait contenue dans cette conception.

L’homogénéisation est formellement réalisée aujourd’hui en France au niveau du collège, mais le fonctionnement réel des collèges dément en partie cette affirmation, et les projets de réforme se font sur le thème du « collège pour tous » en remplacement du « collège unique » mis en place en 1977. Il n’en reste pas moins que la quasi totalité des générations reçoivent désormais un enseignement général de niveau moyen. Et un certain mouvement d’homogénéisation est en cours dans les lycées, si l’on considère que dans les filières à vocation professionnelle, celle du bac technologique et celle du bac professionnel, la majorité des élèves suit des formations tertiaires dont les contenus ne cessent de se rapprocher, mais en en constituant une version dégradée, des bacs généraux.

16 à la place des 38 graphes qu’il aurait fallu tracer pour suivre le « film » complet des transformations du système.

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En définitive, l’indicateur majeur de l’évolution de la hausse d’éducation des générations depuis 50 ans est le taux d’accès en fin de troisième. Jusque dans les années 80, ce taux n’a cessé de monter parce qu’on supprimait en amont les occasions de fuite vers l’enseignement professionnel, ou vers la vie active. L’orientation en fin de classe de troisième constitue ainsi une vanne fondamentale pour comprendre la croissance du système français d’éducation. Or cette vanne a fonctionné de deux manières différentes : quand on était sous le régime des deux ordres ou des deux réseaux, les trois quarts des élèves parvenus en troisième entraient en seconde. Quand les deux réseaux ont été supprimés (ceci concerne les générations des années 60), ce taux est passé à deux tiers, et s’est maintenu à peu près constant à ce chiffre depuis lors.

On pourrait affiner l’analyse en considérant les données d’orientation collectées par le ministère de l’éducation. Ces données ne portent pas sur des générations, mais sur des années scolaires (de 1976 à 1998). Mais elles tendent à confirmer le même mouvement : en fin de troisième, les redoublements ont tendance, après avoir monté, à redescendre au profit de l’orientation vers la voie longue générale et technologique (qui atteint jusqu'à 64% puis semble se stabiliser autour de 60% pour les générations nées dans les débuts des années 80), ceci sur un flux qui n’a cessé de s’amplifier jusqu’en 1995, et qui commence à connaître un reflux depuis que les classes un peu moins nombreuses nées après 1983 atteignent ce palier d’orientation. Pour la même période, le taux d’accès à la voie courte vers le BEP est resté pratiquement stable, entre 20 et 24%. Le reste des orientations est constitué d’entrées dans des classes diverses de l’enseignement professionnel, et pour la plus grosse partie d’un « solde », c’est à dire d’orientations hors du contrôle du ministère (apprentissage, établissements privés non conventionnés, vie active).

Si le nombre de bacheliers a été en augmentation constante depuis la suppression des réseaux, c’est d’abord parce qu’une fraction de plus en plus importante de la génération est parvenue en classe de troisième, puis que le rendement de la filière générale et technologique s’est amélioré nettement (le nombre de bacheliers rapporté au nombre de jeunes en seconde générale et technologique s’élève fortement, passant de 58% pour la génération 52 à 58% pour la génération 1961, puis 72% pour la génération 1970 et enfin 81% pour la génération 1980). Il est vrai que la filière courte vers le BEP n’a cessé d’alimenter de plus en plus au cours des années 80 et 90 la filière générale et technologique à partir de la classe de première (plus de 20% des BEP continuent vers le bac général et technologique au lieu d’aller vers le bac professionnel).

L’augmentation des bacheliers s’est répercutée vers les entrées dans l’enseignement supérieur, mais de façon plus que proportionnelle. Le taux d’inscription dans l’enseignement supérieur des bacheliers a augmenté avec le temps. Par exemple, le taux de poursuite d’études vers le supérieur a progressé, entre 1973 et 1984 de 84 à 91% pour le bac général, et de 75 à 83% pour le bac de technicien (Ourliac, 1986). Depuis ces dates, on peut estimer que le taux de poursuite a atteint 98 ou 99% pour les bacheliers généraux et 90 à 95% pour les bacheliers technologiques. Un phénomène similaire est observable dans les années 90 pour les bacheliers professionnels, dont la part qui s’inscrit dans le supérieur est croissante. L’apparition des filières d’enseignement supérieur court à caractère technologique (BTS et IUT) a favorisé ce mouvement.

Un second élément qui transforme les modes d’inscription dans l’enseignement supérieur et les trajectoires étudiantes est la féminisation du baccalauréat (Ourliac, 1986). C’est un des aspects de transformation du système qui n’a pas été exploré dans ce travail, bien qu’il soit

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certain que la démocratisation de l’enseignement secondaire se soit accompagnée de sa féminisation. Du reste, l’accès au bac s’est beaucoup plus féminisé qu’il ne s’est démocratisé.

II.5. Conclusion

Toutes les politiques éducatives adoptées en France depuis les années 50 ont eu pour objectif d’améliorer le niveau d’éducation, dans des contextes économiques différents (reconstruction des années 50, années de croissance économique et de plein emploi des années 60, années de crise et d’émergence du chômage des années 70, années de croissance modérée et de montée du chômage des années 80, ...). Ces politiques ont incontestablement favorisé la hausse des niveaux d’éducation, bien qu’elles ne soient pas le seul facteur qui l’explique, mais on peut distinguer des paliers dans cette hausse. Il n’y a jamais eu de retour en arrière, mais il y a eu des périodes où cette hausse a été plus rapide qu’à d’autres.

Cette conclusion rencontre celle d’autres travaux (Chauvel, 1998) qui ont étudié le phénomène en s’appuyant sur d’autres indicateurs (en privilégiant notamment le taux d’accès à l’enseignement supérieur, ou la durée moyenne des études). Mais le fait est-il si solidement établi ? Si on reprend la question de la hausse de la structure de diplômes en utilisant les données des 22 enquêtes emplois disponibles pour suivre l’évolution de cette structure pour les différentes générations successives au moment où elles ont trente ans, le palier de croissance n’est plus aussi aisément perceptible, comme on peut le constater sur le graphique ci-dessous.

% de diplômés parmi les 30 ans nés en ....

0

0,1

0,2

0,3

0,4

0,5

0,6

0,7

1931

1933

1935

1937

1939

1941

1943

1945

1947

1949

1951

1953

1955

1957

1959

1961

1963

1965

1967

1969

1971

1973

Année de naissance

% d

e di

plôm

és SUPBacCAP,BEP,BEPCSD ou CEP

Il faut ajouter que ces politiques n’ont pas eu le même impact sur les transformations de la structure des diplômes acquis par les générations. La structure des diplômes s’est beaucoup transformée lorsque les politiques des années cinquante n’opéraient que des retouches

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structurelles. Au moment où les politiques se sont engagées dans une vaste réforme structurelle de l’enseignement secondaire dans les collèges, le résultat a été plutôt le ralentissement des évolutions de structure de diplômes. Enfin, une fois acquis le fait de conduire presque toute la classe d’âge au niveau de la fin du collège, la politique formulée en faveur du baccalauréat a eu un impact rapide et fort.

Les dernières politiques vis à vis de la généralisation du baccalauréat dans les générations sont évidemment déterminantes pour l’avenir. Quelques questions sont importantes.

On observe depuis trois ans une diminution du taux d’accès des générations au baccalauréat (de 67% à 63%). Assiste-t-on à l’entrée dans un palier, en raison de butoirs situés en amont du baccalauréat (difficultés au niveau des collèges, modifications du fonctionnement de la filière professionnelle BEP-Bac pro, avec plafonnement des taux de poursuite des BEP) ? Ces butoirs seront-ils levés pour reprendre la croissance du taux d’accès jusqu’au 80% prévus pour l’an 2000, mais qui ne seront pas atteints avant plusieurs années ?

Des bacheliers de plus en plus nombreux favoriseront-ils le développement des diplômes supérieurs les moins élevés (bac+2) ou les plus élevés (bac+3 et plus)? La question de l’acquisition des diplômes supérieurs devient déterminante, dès lors qu’on évolue vers une structure où les diplômes inférieurs au baccalauréat descendent en dessous des 30% et que les diplômes supérieurs deviennent majoritaires, tandis que le baccalauréat comme plus haut diplôme déclaré correspond de plus en plus à une année ou deux d’enseignement supérieur, sans parvenir au diplôme minimum du supérieur.

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Encart 1 - Méthode de construction des graphes en arborescence des 5 générations témoinsdes transformations du système éducatif (1942, 1952, 1961, 1970, 1980)

valeurs affichées dans les différents noeuds des graphes

Les graphes inclus dans le texte se veulent la reconstitution du suivi de diverses générations dans leur progression au sein du système éducatif. Il s’agit évidemment d’un faux suivi de cohorte, les données nécessaires pour effectuer un véritable suivi n’existant pas. La méthode utilisée est la suivante.

Les chiffres indiqués dans les cercles correspondent aux effectifs d’élèves inscrits dans la classe indiquée pour l’année civile indiquée, classe où devrait se trouver la totalité de la génération considérée si elle progressait dans le système sans redoublement, c’est à dire si elle respectait les âges théoriques pour la progression dans le système. Bien entendu, il n’en est pas ainsi, et les chiffres indiquées comportent en réalité des élèves de générations différentes, du fait que toutes les générations ne commencent pas leur scolarité rigoureusement à l’heure, et qu’une partie des élèves prennent du retard. Ainsi, en CM2, classe qui termine la scolarité primaire, le nombre d’élèves inscrits est supérieur aux naissances de la génération considérée. Ceci peut provenir : des redoublants, de la croissance des effectifs des générations du fait d’un solde migratoire positif.

Le nombre d’élèves en CM2 est la base de calcul pour les proportions de la génération ayant atteint un niveau ultérieur quelconque. Exemple : pour la génération 1952, la part de la génération parvenue en 3ème est : 391600/963800= 40%, chiffre qui figure en gras dans le petit carré placé au-dessus du cercle « classe de 3ème ».

Ces valeurs ont été confrontées à d’autres sources, notamment les travaux de Duru-Bellat/Kieffer (1998), donnant les taux d’accès des générations à différents niveaux du système (6 ème, 3ème, seconde, baccalauréat), à partir des données des enquêtes FQP. La concordance des résultats confère une bonne validité aux graphes présentés ci-après.

De la même manière, on peut constater la bonne concordance des valeurs entre le total des diplômes acquis dans l’enseignement supérieur, et les taux de diplômés du supérieur calculés à partir des enquêtes emploi (voir graphiques sur le % des diplômés parmi les trente ans, ou le % de diplômés dans chaque tranche d’âge en 1998).

On peut considérer qu’au total, on aboutit à une reconstitution vraisemblable et fiable dans les grandes lignes, du cheminement d’une génération. On peut alors suivre pour cinq générations espacées d’une dizaine d’années la progression des taux d’accès aux divers points clés du système français d’éducation initiale, ce qui permet de comprendre par quelles voies s’est réalisée la hausse d’éducation constatée dans la structure par diplôme des générations qui se sont succédé dans le système de 1950 à 1998.

Les principaux manques dans les graphes sont : les formations par apprentissage, qui font partie de la formation initiale et concourent incontestablement à la structuration par diplôme des générations observée dans les enquêtes emploi, et les formations des autres ministères, agriculture, santé, travail, qui délivrent également des diplômes intervenant dans la structure par diplôme des générations. Mais à l’exception des préparations du CAP par apprentissage, qui a joué un rôle important pour les générations considérées dans ces graphes, et des formations de la santé post baccalauréat, qui représentent des flux non négligeables au niveau bac+2, les autres formations participent à l’acquisition de diplômes pour des flux non déterminants compte tenu des imprécisions de mesure dues à la méthode employée.

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PARTIE IV : DU SYSTEME EDUCATIF A LA POPULATION ACTIVE

Reprenons la formule (2) proposée au chapitre I.

(2) aKadtGtXadt , pour tout a et tout t.

où représente l’effectif d’actifs diplômés de niveau d et d’âge a à l’instant t représente l’effectif initial de la génération correspondante née en t-a et le coefficient de transformation de la génération Gt-a entre t-a et t, c’est à dire son taux de participation à la vie active à l’âge a et pour chaque niveau de diplôme d.

Kadt = f(mortalité, taux d’activité, solde migratoire, taux de certification « d » acquis en formation initiale ou continue) de Gt-a

Quelle est l’incidence de la mortalité, des soldes migratoires, des taux d’activité par niveau de diplôme sur la structure de diplôme initiale de Gt-a ? Quelle est l’apport des diplômes acquis en formation continue (c’est à dire après 16+j) par rapport à ceux acquis au sein du système de formation initiale (ou post initiale) ? Nous proposons de procéder en deux étapes :

1 – Etudier la variation des populations totale et active des différentes générations en activité aujourd’hui dans le temps. Ceci permettra de connaître l’influence des soldes migratoires et de la mortalité sur l’effectif d’une génération. 2 – Etudier l’évolution de la composition par diplôme de la population active en fonction des générations qui la composent. Ceci demande de traiter deux aspects : le passage population totale/population active d’une part et l’impact de la formation continue d’autre part.

IV-1 Evolution des effectifs des populations totale et active

Les graphes suivants montrent l’évolution de l’effectif total des générations 1933-1960 entre 76 et 98. Tris grandes phases démographiques se détachent : les générations nées avant la guerre dont l’effectif, plus faible, baisse sérieusement (graphe2) entre 76 et 98 du fait de la mortalité, la chute des naissances pendant la seconde guerre mondiale, l’explosion démographique qui l’a suivie avec les générations du «baby boom » nées entre 46 et 74 environ et qui correspondent aux générations nombreuses, et enfin la baisse démographique qui amènera des générations moins nombreuses à partir de 1976.

Sur le deuxième graphe ont été portés, pour chaque génération, l’effectif en 1976 et 1998, aux deux bornes de la fenêtre, ainsi que la valeur moyenne de l’effectif de la génération dans les 23 enquêtes et l’intervalle de confiance autour de cette moyenne. L’effectif des générations les plus anciennes (avant 1940) baisse entre 77 et 97, d’autant plus que l’âge augmente, ce qui s’explique par la mortalité.

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L'influence de l'immigration nette n'est pas négligeable, mais elle n'est pas suffisante pour modifier sensiblement l'effectif des générations successives qui composent aujourd'hui la population française ; la migration nette, tous âges confondus, atteignait 180000 personnes en 1970, mais elle se réduisait à une centaine de mille jusqu'en 1974 ; après cette date la migration nette est tombée à des montants inférieurs à 50000. Après 1990, la migration nette remonte un peu.

Les mêmes observations sur la population active (graphes 3 et 4) montrent clairement que la population active est le fruit de recompositions de générations en 23 ans : les générations nées avant 1945 et qui ont plus de 50 ans en 1998 commencent à partir en retraite tandis que les générations nées après 1960 et qui arrivaient en âge de travailler en 1977 sont maintenant totalement actives.

Taux d’activité

L'évolution générale des taux d’activité est bien connue. Le taux d'activité global des personnes de 16 à 65 ans a peu changé en 30 ans, passant de 56, 7% en 1975 à 54,4% en 1997. Mais la structure par âge s'est fortement modifiée, les taux ayant baissé en-dessous de 25 ans et au-dessus de 50 ans et ayant augmenté entre 30 et 49 ans.

Cette augmentation pour les tranches d’âge centrales est due uniquement à la croissance de l'activité féminine ; c'est ainsi que le taux d'activité des femmes entre 25 et 49 ans est passé de 58,6% en 1975 à 78,2 en 1997.

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En suivant les tranches d'âge quinquennales, les deux mécanismes de l'accroissement ressortent clairement : d'abord le taux des 20-24 ans diminue du fait du développement de l'éducation mais celui des 25-29ans augmente du fait de l’activité féminine. Les entrées nettes en activité entre 29 et 49 ans sont ensuite fréquentes. C'est ainsi que le taux d'activité des femmes ayant 25 à 29 ans en 1975 passe de 64,2% en 1975 à 79,4% en 95 lorsqu'elles ont 45 à 49 ans.

Mais cet accroissement, considérable si on étudie l'activité féminine en soi, a moins d'impact quand on s'intéresse à la population active totale. L’ordre de grandeur de l'accroissement des taux d'activité entre 30 et 50 ans, pour une génération donnée, est de 4à 5%.

Il faut souligner aussi que ce phénomène perd de son importance puisque le taux des 25-29 ans atteint aujourd’hui un niveau très élevé, réduisant par conséquent la marge d'accroissement ultérieur dans les années à venir. Le taux d’activité des 30 ans (graphe suivant, ligne total) croit, certes, mais est passé de 79% à 86% en 23 ans. L’augmentation d’effectif d’actifs de chaque génération, probante sur le graphe précédent, est donc due aux influences conjointes de l’activité féminine qui évolue en cours de vie et d’un solde migratoire légèrement positif montré sur la population totale.

L’évolution différenciée des taux d’activité va également avoir pour conséquence de modifier à tout instant la composition par genre de la population active et donc celle de l’offre de travail. Mais ce qui nous intéresse ici est surtout la composition par niveau de diplôme de l’offre de travail.

IV-2 Education d’une génération et diplôme des actifs correspondants

Comment ces variations dans le volume des actifs de chaque génération au fil du temps vont elles influer sur leur structure de diplôme ?

Le système éducatif distribue des diplômes à l’ensemble des individus d’une génération. L’offre de formation s’adresse donc à la population totale. L’offre de travail elle est formée des seuls actifs. La structure par diplôme de l’offre de travail est différente de celle des formés produits par le système éducatif parce que les taux d’activité par diplôme sont variables d’une part et parce que la formation continue délivre des diplômes par ailleurs.

Quelle est l’importance de ces deux phénomènes ?

IV-3.2.1 Le passage à l’activité d’une génération

Il existe une différence d’activité entre les diplômés, quel que soit le niveau, et les non diplômés (graphe des taux d’activité suivant). Ces derniers travaillent moins. C’est ce qui explique que la population totale soit moins diplômée que la population active.

Cependant les écarts entre taux sont minimes et l’activité globale très élevée : les sans diplôme ont un taux d’activité qui oscille suivant les années entre 70% et 80 %, les diplômés autour de 90%. La population active représente donc une part totalement majoritaire de la population totale.

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Les différences de structure engendrées par la variabilité des taux d’activité par diplôme sont, du coup, également minimes (graphes suivants pour les 30 ans).

Nous avons choisi 30 ans pour comparer les structures de diplôme entre actifs et population totale. Soit trois ans de plus que l’estimation de 16+j, âge où l’on peut considérer que le taux d’activité de la génération d’une part et les taux de diplômés de la formation initiale d’autre part se sont stabilisés. A cet âge, les données disponibles montrent que les structures de diplôme des actifs et de la population totale sont très proches. La différence la plus marquée vient effectivement du taux de diplômés du supérieur chez les actifs et, inversement, du taux plus faible de non diplômés.

Le passage de la génération de l’état « inactif » pour la totalité à l’état « actif » pour l’écrasante majorité ne bouleverse pas les structures par niveau de diplôme.

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IV-2.2 L’acquisition des diplômes par la formation continue.

Revenons sur le rythme d’acquisition de diplômes par une génération donnée au fur et à mesure qu’elle vieillit.

Le rythme est d’abord très lent puisque la scolarité obligatoire ne délivre pas de diplômes si ce n’est le CEP aujourd’hui tombé en désuétude. Le rythme augmente brusquement après 15 ans quand les jeunes entrent dans l’enseignement secondaire et puis supérieur et commencent à acquérir les diplômes qu’ils délivrent. Ceci va prendre quelques années, variables suivant les individus, fonction de la durée de leurs études. La courbe d’acquisition de diplômes va alors connaître un point d’extrema correspondant au moment où l’essentiel des diplômes de la génération est acquis et où, progressivement, tous les jeunes sont sortis du système de formation initiale.

Par la suite, la croissance du nombre de diplômes possédés par la génération ne sera plus alimentée que par la formation continue.

Nous voulons tester le fait que le taux d’acquisition de diplômes par la formation continue d’une cohorte est faible par rapport à celui du à la formation initiale.

L’idée est de tracer l’évolution du nombre de diplômés dans chaque génération, dans le temps et de montrer que ces courbes sont en fait des fonctions logistiques. Ce sont des courbes à croissance exponentielle au départ et qui ralentissent brusquement après le passage par un extrema pour tendre ensuite doucement vers une asymptote.

Courbe d’acquisition des diplômes par une génération

Nombre de diplômés

Gt-a

âge~= 26 ans

Ces courbes sont de la forme :

r est l’asymptote de la fonction logistique 

L’asymptote est donnée par le taux de diplômés de la génération en fin de vie active. La valeur de l’asymptote va donc s’élever au fil des générations. extrema est donné par le moment où le rythme d’acquisition des diplômes par la génération change brusquement : c’est le moment correspondant à la fin de formation initiale ou post initiale pour la majorité de la cohorte ou encore celui où son taux d’activité a atteint son niveau d’équilibre. La connaissance que l’on a du système éducatif et de la montée d’éducation nous permet de

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prévoir que le point d’inflexion sera amené à croître lui aussi dans le temps du fait de l’allongement des durées de scolarisation.

Si toutes les courbes d’acquisition de diplômes suivent ce modèle, c’est bien que l’essentiel de la certification est acquis en début de vie active et que les diplômes délivrés par la formation continue sont en quantité marginale par rapport à ceux de la formation initiale.

Le graphe suivant donne le rythme d’acquisition de diplômes par la génération née en 1960.

Sur ce graphe, l’âge où se stabilise la structure de diplôme se situe autour de 26-27 ans. L’hypothèse selon laquelle l’extrema de la courbe du taux d’activité générationnel est aussi celui de la courbe d’acquisition de diplôme semble donc, sur cette génération, confirmée.

La courbe logistique estimée pour la génération 1960 est présentée sur le graphe suivant. Elle est très bonne (R2 = 99.5%). Ce type de courbe peut être estimée pour toutes les générations pour lesquelles nous avons des données empiriques en début de vie active. Nos hypothèses semblent donc fondées.

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1.0e+011.5e+012.0e+012.5e+013.0e+013.5e+014.0e+014.5e+015.0e+013.0e+00

6.0e+00

9.0e+00

1.2e+01

1.5e+01

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Une autre manière de constater l’effet de la formation continue est d’observer le % de diplômés pour une génération à plusieurs dates. Une superposition des courbes indique que le % de diplômés n’a pas évolué entre les différentes dates.

Diplômés du supérieur

% de diplômés du supérieur par génération, observé à différentes dates

0

0.02

0.04

0.06

0.08

0.1

0.12

0.14

0.16

1946 1947 1948 1949 1950 1951 1952 1953 1954 1955 1956 1957 1958 1959 1960

Année de naissance

% d

e di

plôm

és d

u su

périe

ur

889298

Diplômés du Baccalauréat

% de diplômés du Bac par génération, observé à plusieurs dates

0

0.02

0.04

0.06

0.08

0.1

0.12

0.14

0.16

1946 1947 1948 1949 1950 1951 1952 1953 1954 1955 1956 1957 1958 1959 1960

Année de naissance

% d

e di

plôm

és d

u B

ac

82 88

92 98

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Diplômes professionnels de niveau V

% de diplômés de niveau 5 par génération, observé à plusieurs dates

0

0.05

0.1

0.15

0.2

0.25

0.3

0.35

1947 1948 1949 1950 1951 1952 1953 1954 1955 1956 1957 1958 1959 1960

Année de naissance

% d

e di

plôm

és d

u ni

veau

5

82889298

Diplômés du Certificat d’Etudes Primaires

% de diplômés du CEP par génération, observé à plusieurs dates

0

0.05

0.1

0.15

0.2

0.25

1946 1947 1948 1949 1950 1951 1952 1953 1954 1955 1956 1957 1958 1959 1960

Année de naissance

% d

e di

plôm

és d

u C

EP

7882889298

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Non diplômés

% de non diplômés par génération, observé à plusieurs dates

0

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

1946 1947 1948 1949 1950 1951 1952 1953 1954 1955 1956 1957 1958 1959 1960 1961 1962

Année de naissance

% d

e no

n di

plôm

és

82889298

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V – Annexes

V-1 Bibliographie

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GUILLON R. (1979). « Enseignement et organisation du travail du XIXème siècle à nos jours ». Dossier n°21.CEREQ. Paris.

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V-2 Principaux repères sur l’évolution du système éducatif français depuis 1950 (annexe)

Les transformations du système éducatif depuis 1950 ont été très importantes, relativement à la question de la hausse d’éducation, tout particulièrement à deux moments charnières : les années 59 à 65 d’une part, les années 85 à 89 d’autre part. On s’intéressera principalement aux changements intervenus dans l’architecture générale du système d’éducation, qui se traduisent de façon privilégiée dans le cas français par des changements de nature et d’appellation des établissements de formation, et par la transformation des diplômes préparés.

On peut considérer qu’en France, depuis 1950, s’est produit un changement complet et radical de système éducatif. Les étapes en ont été nombreuses, et la mise en place parfois difficile, donc étalée sur de longues périodes, mais la logique générale de fonctionnement de l’éducation a profondément changé.

On séparera l’analyse de l’évolution du SE français en trois grandes strates: l’enseignement primaire et secondaire, les enseignements techniques et professionnels, l’enseignement supérieur. Cette séparation est commode mais présente l’inconvénient de minimiser les fortes liaisons qui existent en France entre l’enseignement général et les enseignements à caractère professionnel depuis les réformes des années 60, à quelques niveaux qu’ils se trouvent.

1. L’ENSEIGNEMENT GÉNÉRAL SCOLAIRE PRIMAIRE ET SECONDAIRE

Les transformations de l’architecture générale des enseignements primaire et secondaire s’étalent sur plus de quarante ans. Elles vont dans le sens d’une unification dans le primaire d’abord (années 50), puis dans le secondaire premier cycle (années 60 et 70), alors que la diversification tend à s’accroître dans le secondaire second cycle (années 80 et 90). La logique générale de développement du système éducatif depuis 50 ans est de conduire la totalité d’une classe d’âge jusqu'à la fin du collège (à 15 ans), puis d’amener 80% au niveau du baccalauréat (à 18 ans).

Cette tendance lourde, largement consensuelle, se réalise alors que la dualité entre enseignement public et enseignement privé se maintient, leur affrontement traduisant un des clivages politiques majeurs au sein de la République. S’il faut y faire allusion ici, c’est en raison du rôle que tend à jouer le secteur privé dans les stratégies familiales de contournement de l’orientation, donc en faveur de la hausse de l’éducation.

1.1. transformations du système et allongement des cursus

années 50Au début des années cinquante, le système scolaire français est encore fortement cloisonné, c’est à dire organisé en deux réseaux bien distincts de scolarisation, sur une base essentiellement sociale : le réseau primaire et le réseau secondaire, relevant d’administration différentes, de corps professoraux différents, et utilisant des établissements différents (écoles communales et lycées ayant des « petites classes » pour le niveau primaire), le premier

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scolarisant les enfants des classes populaires, le second les enfants des classes moyennes et supérieures.

En parlant de deux réseaux, l’un « primaire-professionnel » et l’autre « secondaire-supérieur », Baudelot et Establet (1972) expriment de façon simplifiée les destins professionnels et sociaux de ces deux réseaux : aux élèves scolarisés dans les écoles primaires communales, l’accès dans le secondaire est improbable, même avec une bonne réussite scolaire, le passage du primaire au secondaire n’étant délibérément pas organisé : ni en termes d’âge, ni en termes de programmes (Terrail, 1997). La seule voie intermédiaire est offerte aux meilleurs élèves du primaire autorisés, après les classes de fin d’études, à poursuivre quelques années dans l’enseignement professionnel du commerce et de l’industrie (EPCI) et dans l’enseignement primaire supérieur (EPS, cours complémentaires).

Pour la classe d’âge 1921 qui a terminé sa scolarité essentiellement dans les années trente, et qui est bien représentative de ce mode de fonctionnement en réseaux, la répartition fut la suivante (Briand et Chapoulie):- 80% : scolarisation obligatoire en école primaire, avec débouché sur les emplois d’exécution- 14% : prolongation du primaire vers EPCI et EPS, avec débouché sur les emplois

intermédiaires- 6% : enseignement secondaire, avec pour les meilleurs allant jusqu’au bout ouverture sur les

emplois de l’élite économique, politique et culturelle.

Ce schéma de partition en deux réseaux a perduré pour l’essentiel pendant les années cinquante, en subissant progressivement divers aménagements, notamment l’accueil en lycée des élèves issus des cours complémentaires, la volonté de supprimer les petites classes des lycées (mais jusqu’en 1963 persiste la coexistence des écoles primaires et des petites classes, ou « classes élémentaires » des lycées - les petits lycées), pour aller dans le sens d’une unification de la scolarisation en primaire. Mais c’est la réforme Berthoin, adoptée en 1959, qui va apporter des changements essentiels, qui prendront corps au cours des années soixante. En simplifiant, on peut dire que les années 50 sont celles de l’unification du niveau primaire, débouchant sur un seul type d’établissement - l’école primaire -, alors que les années 60 et 70 seront celles de l’unification du secondaire, pour parvenir au collège unique. Les années cinquante et soixante voient le passage d’un système éducatif éclaté en « ordres » à un système éducatif organisé en « degrés ».

Années 60C’est à partir de la nouvelle configuration du système éducatif, qui est dessinée en 1959, et qui se met en place pendant les années soixante, pour être parachevée au milieu des années soixante dix, avec la création par étapes du collège unique, que l’on peut véritablement parler d’un système éducatif qui fonctionne selon un schéma qui peut être représenté par un graphe, c’est à dire comme un système qui scolarise la totalité d’une classe d’âge selon un tronc commun, de plus en plus long, pour la différencier par la suite en l’orientant vers des types d’enseignement, et donc des parcours scolaires et des destinations professionnelles nettement distincts. Il n’est pas surprenant que les statistiques scolaires apparaissent au cours des années soixante (sous la forme des « tableaux statistiques » en 1966, suivis en 1984 des « repères et statistiques de l’éducation nationale »), alors que la réforme Berthoin, mise en œuvre par la 5ème République (avec l’appui personnel du Général de Gaulle), revient précisément à promouvoir un élargissement de la base de sélection des élites.

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En effet, le dualisme institutionnel scolaire caractéristique de l’école de la IIIème et de la IVème République (les deux ordres « verticaux » du primaire et du secondaire) est abandonné au profit d’une nouvelle conception du système éducatif. Le principe d’une structuration en trois niveaux fondamentaux est posé: l’élémentaire, le secondaire de premier cycle, le secondaire de second cycle. A la structuration du dispositif scolaire par les types d’établissements se substitue l’organisation en filières à chaque niveau du secondaire (Lelièvre, Nique, 1995).

Mais en contrepartie, si le CES, collège d’enseignement secondaire, et le CEG, collège d’enseignement général créé en remplacement des cours complémentaires, donc en héritage des classes de fin d’études du primaire supérieur (tous deux créés en 1963 par la réforme Fouchet) ouvrent la voie du secondaire à l’ensemble de chaque génération d’élèves (avec la suppression de l’examen d’entrée en 6ème), il est instauré une orientation pour que chacun puisse se diriger vers des études diversifiées. La logique de la réforme de 1959, c’est que la démocratisation implique l’orientation sélective : la totalité d’une génération doit accéder au collège, mais seuls les meilleurs pourront poursuivre jusqu’au bac et au-delà. Car « le fleuve qui, dès lors, coule entre les rives du secondaire, il faut le canaliser » (De Gaulle, 1972). Il n’est donc pas prévu à ce moment là que la totalité d’une classe d’âge puisse aller jusqu’au bout des études secondaires en collège.

Il s’agit de démocratiser l’accès à l’enseignement traditionnel, mais en évitant la submersion par le nombre, c’est à dire en s’attachant à diversifier le système par une politique volontaire d’adéquation entre formations et besoins de main-d’œuvre, tels qu’ils peuvent résulter des travaux du Plan. L’importance des effectifs scolaires à admettre dans chaque catégorie d’enseignement aux principaux niveaux d’orientation doit donc être fixée, l’enjeu est national et la responsabilité de l’Etat est engagée, et la décision d’orientation doit être confiée à une autorité soustraite aux pressions des familles (Lelièvre, Nique, 1995). Ce dernier point ne sera pas suivi dans les faits, les familles conservant un pouvoir de faire appel des décisions prises par le conseil de classe.

Ces années sont marquées par la coexistence dans le secondaire de trois types d’établissements qui se distinguent par la composition sociale et par la destination (scolaire ou professionnelle) de leurs publics d’élèves.- le CEG (collège d’enseignement général) envoie beaucoup de ses élèves vers l’enseignement technique dès la classe de cinquième- le CES (collège d’enseignement secondaire, créé en 1963) est la nouvelle structure destinée à scolariser les élèves dans le secondaire premier cycle, mais en les orientant de façon privilégiée vers l’enseignement technique court ou long après la classe de troisième- le lycée (qui a perdu en 1963 ses petites classes de primaire) continue de scolariser dans le premier cycle les élèves qui se destinent surtout vers l’enseignement secondaire du second cycle, vers le baccalauréat.

Le tableau ci-dessous montre l’extinction progressive du rôle des CEG et des lycées dans la scolarisation secondaire premier cycle au profit des CES, qui disparaît lui-même en 1978 pour laisser la place au collège unique.

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Années 70 et 80Ces années sont marquées par la fin de la réforme du secondaire avec l’instauration du collège unique, décidée en 1975 et appliquée en 1977. Les CES et CEG, ainsi que les premiers cycles des lycées, deviennent des collèges à partir de 1977. Ainsi, à partir des générations nées en 1966, la totalité de la classe d’âge entre en 6ème dans une structure unifiée. Et elle en sort de moins en moins en cours de route : dans les années 80 puis 90, le taux d’accès en 3ème

(générale uniquement) pour les élèves entrés en 6ème passe de 68% (élèves entrés en 6ème en 1980) à 80% (élèves entrés en 6ème en 1989).

Au cours de ces années, le palier de fin de 5ème perd progressivement de son importance, de 1980 à 1986, puis beaucoup plus rapidement à partir de 1987. Plus précisément, la création des 4èmes et 3èmes technologiques prend le relais des classes préparatoires au CAP en 3 ans dans les orientations en fin de 5ème, et cette substitution n’est pas négligeable pour la hausse d’éducation, puisque ces classes débouchent majoritairement sur le cycle professionnel court en deux ans (CAP ou surtout BEP), c’est à dire après la classe de troisième. L’unification du collège n’est donc pas totale, il subsiste des classes technologiques, sorte de filière spécifique qui scolarise environ 10% du flux.

C’est au milieu des années 80 que le secondaire second cycle (les lycées) prend une importance fondamentale dans les réformes, dès lors que l’objectif de scolarisation de la totalité d’une classe d’âge est atteint en fin de collège. La réorganisation des lycées professionnels à partir de 1985, qui accueillent les classes préparatoires au nouveau baccalauréat professionnel, marque l’apparition d’une nouvelle voie longue dans le second cycle, la voie professionnelle. A partir de 1986, il existe deux sortes de lycées et trois sortes de baccalauréats : les lycées d’enseignement général et technologique (préparant en trois ans au baccalauréat général ou au baccalauréat technologique), les lycées professionnels (préparant en quatre ans au baccalauréat professionnel). Mais la priorité donnée dès 1985 à

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l’objectif de mener 80% d’une classe d’âge au niveau du baccalauréat va beaucoup profiter au baccalauréat général.

Années 90Dans les années 90, c’est le niveau du secondaire second cycle qui revient sur le devant de la scène et devient prioritaire dans les réformes ou les aménagements. Cependant, il s’agit essentiellement de changements dans les filières de baccalauréat général, qui conduisent à des modifications du système d’options de la seconde à la terminale, ces changements accompagnant la hausse considérable à partir de 1985 de la part de la classe d’âge qui accède au baccalauréat.

Ainsi, contrairement au collège qui a connu une politique d’unification, le lycée se caractérise par une diversification croissante de ses filières, qui demeurent cloisonnées et hiérarchisées, et une hétérogénéité forte des performances scolaires de ses publics, de ses aspirations et de ses attentes.

1.2. le rôle du secteur privé dans les stratégies de poursuites d’études

Les conflits entre public et privé marquent en France l’histoire de l’éducation, et reviennent au premier plan de l’actualité politique régulièrement depuis 50 ans. La « guerre scolaire » a souvent fait rage, autour du financement du secteur privé, rallumée ou combattue par les divers présidents de la république (Lelièvre, Nique).

Si l’existence d’un double secteur est une particularité française tenace (il scolarise encore en 1996-97 moins de 15% des élèves dans le primaire, mais plus de 20% dans le second degré du secondaire), on observe une transformation depuis une vingtaine d’année, dans le sens d’une plus grande complémentarité des deux secteurs, et dont les principales caractéristiques sont les suivantes :- les taux de scolarisation augmentent dans le privé au fur et à mesure du déroulement de la scolarité, ce qui laisse supposer des transferts importants d’un secteur à l’autre, notamment ceux des élèves âgés vers le privé- les écarts entre les compositions sociales des deux secteurs se réduisent- la scolarisation dans le privé tend à s’accroître dans les académies où elle était la plus faible, et s’explique donc par d’autres facteurs que l’attachement à l’éducation religieuse.

La complémentarité se manifeste par la croissance du « zapping », de plus en plus de familles recourant à l’un ou l’autre secteur suivant les difficultés qu’éprouvent leurs enfants dans leur scolarité. Ainsi, on constate que les enfants de « passage » sont plus nombreux que les « clients fidèles ». Le passage par le secteur privé est de plus en plus le moyen de refuser une éviction trop précoce vers l’enseignement professionnel (CAP ou apprentissage), et on observe qu’il a joué un rôle de réduction des inégalités sociales de réussite entre ouvriers et cadres supérieurs.

C’est la sélectivité accrue de l’enseignement public, notamment au cours des années 70 durant lesquelles ont été renforcés les mécanismes d’orientation dans les collèges et les lycées (procédures contraignantes mises en place en 1973), avec un objectif non ouvertement affiché de freiner le développement des enseignements généraux au profit des enseignements techniques et professionnels, qui a modifié la place du privé dans l’ensemble scolaire, comme moyen d’échapper aux contraintes de l’orientation. Ainsi, en 1980, plus de 10% des élèves de

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seconde du privé sont des transfuges de l’enseignement public, et 37% des élèves passent à un moment donné ou à un autre de leur scolarité par l’enseignement privé.

L’observation des données de flux d’élèves ou des données d’orientation ne confirme pas la réalisation de l’objectif de développement du secondaire professionnel, et il est probable que c’est bien l’existence du secteur privé a joué un rôle important dans l’échec de cette stratégie. L’exemple du palier de 5ème, dans le graphique ci-dessous, montre que dans les années 70, les structures d’orientation des flux en fin de 5ème sont restées très stables (il en est de même du palier de fin de 3ème).

2. DE L’ENSEIGNEMENT TECHNIQUE À L’ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL ET TECHNOLOGIQUE

Les transformations de l’enseignement technique et professionnel en France de 1950 à 1997 se déroulent sur plusieurs plans et dimensions mais concernent surtout les types d’établissements, les types d’approvisionnement en élèves, les types et les niveaux de diplômes, les programmes et les parcours scolaires.

Alors que le secteur privé joue un rôle important par rapport au déroulement des parcours scolaires dans l’enseignement général, rôle d’évitement d’une orientation précoce vers l’enseignement technique, l’apprentissage, moyen important d’acquérir un diplôme professionnel, concurrentiel du mode de formation scolaire, a joué pendant longtemps un rôle non négligeable de dernier refuge pour les élèves qui ont subi une éviction précoce. Le rôle de l’apprentissage s’est toutefois transformé depuis une douzaine d’années, mais il permet de poser la question importante dans le système français, de l’acquisition de diplômes par la voie de la formation post-initiale ou de la formation continue, c’est à dire en dehors du cadre scolaire.

2.1. le développement de l’enseignement technique et professionnel de type scolaire

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Dans les années 30, l’enseignement professionnel public comporte trois « étages », qui demeurent l’architecture de base pour de longues années, notamment jusque dans les années 60, malgré les changements d’appellation des établissements.

Au niveau élémentaire, on trouve surtout les cours professionnels permettant de préparer le CAP par apprentissage.

Au niveau moyen, on a d’une part le primaire supérieur, avec les sections professionnelles des écoles primaires supérieures (créées en 1880), qui préparent aux Brevets, et le secondaire technique (avec un examen d’entrée au niveau de la classe de quatrième), avec les EPCI et les ENP, qui préparent les CAP et les Brevets.

Au niveau supérieur, on trouve les Arts et Métiers et les écoles d’ingénieurs.

Au cours des années 40, au niveau élémentaire, les centres de formation professionnelle (CFP) créés en 1939 pour accueillir les fils de soldats et destinés à former de manière rapide des professionnels qualifiés, deviennent en 1944 les centres d’apprentissage (Grignon, 1971). Entre 1941 et 1943, 850 CFP sont ouverts et constituent un dispositif relativement puissant : ils regroupent en 1944 entre 40000 et 60000 jeunes, accueillis après 14 ans et ils sont gérés par des établissements publics (125), des institutions confessionnelles, des écoles privées, des entreprises ou des associations professionnelles (Bouyx, 1997).

Au niveau moyen, les EPS comportant des sections professionnelles et les écoles pratiques de commerce et d’industrie (EPCI) ont été transformées en collèges techniques (en 1941).

Les diplômes préparés demeurent le CAP au niveau élémentaire (pour les cours professionnels surtout, majoritaires en flux), les divers brevets (BEI, BEC, BEH) correspondant aux diplômes moyen du secondaire technique, dont l’accès est sélectif. Mais en 1946 apparaît le premier baccalauréat technique, préparé en collège technique (section TM).

Dans les années cinquante, plusieurs réaménagements interviennent, et c’est au cours de ces années que se met en place un véritable enseignement technique, « un système de formation professionnelle de type scolaire » (Bouyx, 1997), qui se rapproche de l’enseignement scolaire et va progressivement s’intégrer au « système éducatif » contrôlé par le ministère de l’éducation nationale.

Au niveau élémentaire, peu de changements, mais les centres d’apprentissage deviennent en 1959 des collèges d’enseignement technique (CET). Les CET recrutent principalement après les classes de fin d’études primaires, les classes de 6ème à 3ème des CEG, avec un examen d’entrée, et préparent au CAP en trois ans (âge théorique de sortie 17 ans, en fait c’est un âge minimum).

Au niveau de l’enseignement moyen, les transformations concernent d’abord l’apparition du Brevet de Technicien en 1952, préparé en 7 ans après la 5ème, soit 5 ans en ENP plus deux années supplémentaires, soit une année de plus qu’un baccalauréat général. En 1959, les ENP deviennent des lycées techniques.

Mais dans l’ensemble, au cours des années 50, l’enseignement technique, qui ne possède pas encore cette dénomination, reste relativement complexe car éclaté en établissements divers, préparant à une multiplicité de diplômes (dont encore beaucoup de CAP départementaux)

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(Brucy), et scolarisant en définitive de faibles effectifs, si l’on excepte les cours professionnels. Il reste cependant une branche d’excellence relative pour les meilleurs élèves de la filière primaire, c’est à dire pour les meilleurs élèves parmi ceux qui n’entrent pas dans les différentes branches de l’enseignement secondaire.

La tendance à l’unification du système d’enseignement technique et à son intégration dans l’éducation nationale s’accélère dans les années 60, et son importance numérique s’accroît alors fortement.

Dans les années 60, s’enclenche un mouvement de réorganisation de l’enseignement technique qui va entrer dans le processus de hausse de l’éducation par un rallongement des parcours, aux différents étages où il existe.

D’abord, la création du BEP (brevet d’études professionnelles) en 1966, qui suit une tentative peu réussie de création de CAP en deux ans après la classe de 3ème (ces CAP très spécifiques ne scolariseront au cours du temps qu’un flux maximum de 20000 élèves), participe à un glissement vers le haut des formations techniques courtes, puisque désormais l’enseignement technique court se trouve offert à deux niveaux différents : la préparation des CAP en 3 ans après la classe de 5ème, la préparation au BEP en deux ans après la classe de 3ème (ou de quelques CAP). La création du nouveau diplôme apparaît au moment où non seulement les générations nombreuses déferlent depuis 1957 dans les établissements secondaires, mais aussi au moment où l’enseignement secondaire a été pleinement ouvert à tous, et où tous les élèves doivent désormais rester scolarisés jusqu'à 16 ans. Dès 1969, les BEP peuvent poursuivre vers l’enseignement technique long, avec la création des classes de première d’adaptation. Ces flux de passage vers le technique long resteront très faibles (5 à 8%) jusqu’en 1980.

Les entrées en CAP3 vont connaître une forte croissance au cours des années 60, en doublant en moins de dix ans, mais par la suite, l’augmentation des BEP va provoquer la stagnation puis le reflux des CAP3, avant que la création du bac pro n’en provoque l’effondrement et la disparition complète dans les établissements scolaires.

La seconde nouveauté importante concerne l’enseignement technique moyen, qui devient l’enseignement technique long, enseigné dans les lycées techniques (qui remplacent en 1959

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les collèges techniques), et qui prépare aux brevets de techniciens depuis 1952 et aux baccalauréats de techniciens à partir de 1966, en même temps que disparaissent les divers anciens brevets spécialisés (BEI, BEC, BEH). Le lycée technique consacre d’ailleurs l’intégration de l’enseignement technique dans le système scolaire général, en délivrant désormais un titre équivalent aux baccalauréats généraux des lycées classiques, puisqu’il autorise la poursuite d’études dans l’enseignement supérieur, contrairement au brevet de technicien.

La dernière nouveauté importante concerne la création en 1962 des brevets de techniciens supérieurs (BTS), qui sont préparés en deux ans après le baccalauréat de technicien dans les lycées techniques : l’enseignement technique comporte désormais un segment dans l’enseignement supérieur. Les BTS connaissent d’emblée un véritable succès.

A la fin des années 60, l’essentiel du paysage institutionnel de l’enseignement technique français est fixé pour 15 ans, jusqu’en 1985 : enseignement court divisé en deux branches alimentées par des élèves de niveaux scolaires différents, enseignement long préparant à des baccalauréats de techniciens et de plus en plus accessoirement à des brevets de techniciens, enseignement supérieur préparant à des brevets de techniciens supérieurs.

Au cours des années 70, il n’y a pas de changement structurel majeur, et on assiste simplement au remplacement des collèges d’enseignement technique par les lycées d’enseignement professionnel (LEP) (1976), modification terminologique qui consacre le vocable d’enseignement professionnel en lieu et place d’enseignement technique, mais qui traduit plus fondamentalement la place éminente reconnue au BEP par rapport au CAP, et donc la tendance à l’allongement des cursus d’enseignement technique, et qui est un élément à rapprocher de la création du collège unique : le collège doit désormais déboucher soit sur le lycée d’enseignement général, soit vers le lycée technique, soit vers le lycée d’enseignement professionnel.

Les années 80 sont porteuses d’un nouveau changement structurel important, qui a des répercussions fortes sur les parcours éducatifs des élèves scolarisés dans l’enseignement professionnel : avec la création du baccalauréat professionnel, les élèves de BEP se voient ouvrir l’accès au niveau du baccalauréat, mais il leur faut 4 ans d’études après la troisième pour y parvenir, soit un âge de sortie théorique minimum de 19 ans. Les BEP sortent de moins en moins une fois diplômés, et poursuivent de plus en plus leurs études vers les baccalauréats, technologiques ou professionnels.

Les baccalauréats de technicien deviennent des baccalauréats technologiques, mais leur place dans le système reste inchangée, et les lycées d’enseignement professionnel deviennent des lycées professionnels (LP).

Dans les années 90, on n’enregistre plus de modifications structurelles, mais on assiste à l’atrophie des CAP3 dans les LP, alors que leur suppression n’a été ni décidée ni programmée. En effet, la nécessité, dans un contexte d’austérité budgétaire, d’ouvrir des classes de baccalauréat professionnel à moyens constants, a conduit les proviseurs de LP à fermer les classes de CAP3 pour dégager les moyens indispensables au succès de la réforme (Prost, 1998). Le graphique ci-dessous témoigne de cette disparition rapide des CAP3 dans les lycées professionnels (publics et privés) au profit du baccalauréat professionnel.

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La suppression du pallier d’orientation en fin de 5ème qui en résulte, consacre l’allongement définitif de l’enseignement professionnel court, lequel débouche désormais sur des cursus qui ne prennent fin que vers 19 ou 20 ans.

2.2. l’apprentissage, la formation continue, et l’acquisition de diplômes

L’apprentissage constitue le premier et le plus important mode de formation professionnelle en France jusque dans les années 50. Les cours professionnels, qui débouchent depuis 1919 sur le CAP, représentent 178000 élèves en 1938, alors que le total des élèves des écoles professionnelles diverses, dispensant une formation à temps plein, mais pas encore de type scolaire, ne dépasse pas 60000.

C’est au cours des années 40 et 50 que se met en place le système scolaire technique, qui entre dès lors en concurrence avec les cours professionnels (on parlera plus tard d’apprentissage) pour la formation des ouvriers, des employés et des artisans, avec d’abord les centres d’apprentissage (CA), puis les CET à partir des années 60.

La concurrence se traduira assez vite par un recrutement bien différencié (les CET dans leurs débuts contribuent à former l’ « aristocratie ouvrière » (Grignon) ) alors que les enfants qui entrent dans les cours professionnels sont beaucoup moins sélectionnés, et par une spécialisation relative, les CET prenant en charge les formations ouvrières de l’industrie (mécanique et électricité) et les formations administratives (secrétariat, comptabilité et une partie du commerce), tandis que les cours professionnels se concentrent sur les formations de l’artisanat, dans les métiers du bâtiment, les métiers de bouche, et les commerces et services. Les deux modes de formation sont surtout très différenciés en matière d’acquisition des diplômes, puisque les résultats au CAP sont très nettement en faveur des élèves de CET (autour de 60% contre 25% pour les apprentis).

La loi de 1971 renforce la législation sur les apprentis, en créant les CFA (centres de formation d’apprentis) et en garantissant un statut d’apprenti et un minimum de formation

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théorique. L’apprenti bénéficie d’un contrat de travail de nature particulière, mais il est classable parmi les actifs. L’apprentissage représente un mode d’acquisition de diplômes par le passage en activité. Il reste que la plupart des apprentis sont des jeunes de moins de 20 ans, et que l’apprentissage est une voie de formation initiale, ou post-initiale, qui se situe presqu’exclusivement en tout début de vie active. Compte tenu de l’évolution récente de l’enseignement professionnel scolaire, un diplôme comme le CAP n’est pratiquement plus préparé en milieu scolaire, et se trouve actuellement de plus en plus réservé aux apprentis et aux stagiaires de formation continue, c’est à dire aux actifs, bien qu’un tiers du flux de lauréats du CAP soit encore le fait de jeunes scolarisés en BEP, qui tentent le double diplôme.

Les flux d’inscription en apprentissage ont une tendance inexorable à la diminution, mais des mesures politiques successives tentent régulièrement, notamment dans le cadre des politiques d’aide à l’insertion des jeunes, de promouvoir et de redonner vigueur à l’apprentissage, souvent sans grand résultat durable. En 1980, l’apprentissage accueillait environ 100000 jeunes, soit 12% d’une classe d’âge. Une série de lois modifient l’apprentissage entre 1983 et 1993 :

- 1983 : la loi de décentralisation transfère la compétence de l’Etat en matière d’apprentissage aux régions et offre la possibilité de bénéficier de nouvelles ressources fiscales- 1987 : la loi sur l’apprentissage a une portée nouvelle, en décidant d’ouvrir tous les diplômes de l’enseignement technologique à la préparation par la voie de l’apprentissage. Ainsi, les BEP, les baccalauréats professionnels, les BTS sont-ils désormais accessibles en dehors du système scolaire. Les flux concernés sont encore très limités, mais ils progressent. Il existe un découplage croissant entre diplôme, et mode de formation ou de préparation des diplômes.- 1992 : la loi vise à rendre l’apprentissage plus attractif, et autorise l’expérimentation de l’apprentissage dans le secteur public- 1993 : la loi quinquennale sur le travail, l’emploi et la formation professionnelle donne de nouveaux pouvoirs aux régions, et autorise l’Education Nationale à développer des sections d’apprentissage. Cette loi renforce la possibilité d’accéder aux diplômes professionnels à partir de parcours de formation très divers : Le baccalauréat professionnel par exemple peut être préparé par des jeunes ayant échoué dans les premiers cycles universitaires. De plus, le CAP préparé par apprentissage n’est plus un « cul-de-sac » : il permet la poursuite vers le baccalauréat professionnel ou le brevet professionnel.

Il faut évoquer enfin un diplôme spécifiquement réservé aux actifs. Le brevet professionnel (BP) existe depuis 1931. Il est ouvert à des personnes sans diplôme pouvant justifier de 5 ans d’expérience professionnelle, ou de titulaires de CAP justifiant de deux ans d’expérience, dans des métiers précis (dont la coiffure, la banque, la pharmacie, etc...), et il nécessite 400 heures de formation. En 1980, on dénombrait 35000 candidats et 15000 reçus. Classé au même niveau que la baccalauréat, c’est un diplôme qui a permis à beaucoup d’accéder aux emplois d’ouvriers hautement qualifié dans la métallurgie et le bâtiment. Il a également permis à des ouvriers de devenir enseignant.

La formation continue en France s’est beaucoup développée depuis la loi de 1971, mais elle demeure encore peu qualifiante et peu diplômante. Par exemple, de nombreux techniciens, titulaires de BTS ou de DUT, aspirent à devenir ingénieurs. Beaucoup s’engagent dans des formations de type CNAM, mais les flux annuels de diplômés ne dépassent pas le millier.

3. UNIVERSITÉS ET GRANDES ÉCOLES

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L’enseignement supérieur français se présente, en France plus que dans les autres pays euiropéens, sous la forme d’un système diversifié, comportant des filières fortement structurées, avec des fonctions déterminées et des caractéristiques institutionnelles, pédagogiques, organisationnelles, bien définies. Il existe notamment deux secteurs d’importance numérique et de prestige différents, l’un « ouvert » et l’autre « fermé » : l’université, et les écoles d’ingénieurs et de commerce, auxquels s’ajoutent les IUT et les STS (les formations de techniciens supérieurs). Le second est caractérisé par un accès sélectif reposant sur un numerus clausus (gestion restrictive de l’offre de places), le premier étant ouvert à tous les titulaires d’un baccalauréat ou un équivalent, sauf les études de médecine où une sélection est organisée depuis 1970.

années 60Jusqu’au milieu des années 60, l’enseignement supérieur est resté structurellement stable, bien partagé entre les facultés, orientées vers la culture, l’enseignement et la recherche, et les grandes écoles, qui préparaient les cadres à l’exercice de leur métier. C’est le système universitaire qui est le premier ébranlé par la croissance des étudiants, qui survient avant même l’arrivée des classes d’âges nombreuses de l’après-guerre.

En 1966, apparaissent les « premiers cycles » universitaires (sanctionnés par un DUEL en lettres et un DUES en sciences après deux années d’études, tandis que les filières de droit et d’économie gardent une organisation spécifique). La réforme se met en place au moment et à cause de l’explosion des effectifs universitaires (doublement en 5 ans : 215000 en 1960 à 414000 en 1965).

En 1967, la création des IUT, suivant de peu celle des BTS dans l’enseignement technique (1962), représente un changement notable dans l’architecture de l’Enseignement supérieur, en introduisant pour la première fois une filière sélective et professionnalisée.

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A la fin des années 60, et suite aux mouvements de 1968, une loi d’orientation instaure l’autonomie des universités.

années 70 et 80Les années 70 et 80 sont marquées par la problématique de la professionnalisation, qui est une manière de tenter de lutter contre l’échec à l’université, en ménageant des sorties possibles à divers niveaux de la hiérarchie des diplômes universitaires, modifiée et enrichie. La professionnalisation prend ainsi plusieurs aspects : réorganisation des premiers cycles, apparition de nouvelles maîtrises (3 ans d’études) et de diplômes à bac+5 se succèdent durant 15 ans (1970-1985), alors que la croissance des effectifs continue de croître fortement. Mais le mouvement s’est réalisé progressivement du haut vers le bas de la pyramide universitaire.

En 1973, les diplômes de fin de premier cycle sont unifiés et deviennent des DEUG.Dès le début des années 70, sont créées de nouvelles licences et maîtrises « finalisées » : Administration Economique et Sociale (AES), Langues Etrangères Appliquées (LEA), Mathématiques Appliquées aux Sciences Sociales (MASS) en particulier. Mais aussi les MST, les MSG et les MIAGE, associant études théoriques et appliquées, et encore aujourd’hui considérées comme « vraiment finalisées, originales et de qualité », d’après le CNE. Le recrutement est sélectif et se fait à Bac+2.La professionnalisation atteint même le troisième cycle, avec la création en 1975 des DESS qui sanctionnent une formation d’un an après la maîtrise, puis la création en 1985 des magistères, diplôme à bac+5 avec un recrutement très sélectif et une ambition avouée : concurrencer les diplômes des grandes écoles.

En 1984 (loi Savary), la professionnalisation concerne le premier cycle, avec la création des DEUST (diplômes d’études supérieures scientifiques et techniques), recrutant 2 ans après le bac.

Au total, on peut considérer que la transformation qui s’est opérée dans les années 70 puis 80 manifeste la sortie de l’université de son pré carré traditionnel pour se préoccuper de préparation à des métiers. Du coup, le partage ancien entre deux institutions distinctes (universités et écoles) a cessé d’être le principe organisateur du système : les uns et les autres participent désormais aux deux fonctions de l’enseignement supérieur : la recherche et l’apprentissage d’un métier.

Cependant, ce nouveau partage confirme l’opposition entre secteur ouvert et secteur fermé, qui induit une série de distorsions, car la coexistence de filières délivrant des diplômes généralistes et de filières sélectives délivrant des diplômes qualifiants au sein de l’université entraîne des dysfonctionnements du système universitaire, comme l’entrée dans des filières courtes sélectives avec l’intention de continuer les études. Pourtant la question de la sélection à l’entrée de l’université reste une des pierres d’achoppement récurrentes dans le système français. Elle a provoqué à plusieurs reprises des crises fortes. La règle selon laquelle l’entrée à l’université n’est pas sélective est pourtant fréquemment contournée par les établissements universitaires.

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années 90Les années 90 n’ont pas apporté de modifications de structure aux filières et diplômes de l’enseignement supérieur. La réforme Bayrou de 1997 est surtout orientée vers la lutte contre l’échec en premier cycle, et instaure pour cela la semestrialisation du DEUG, le tutorat pour la première année et la validation par unités capitalisables.

V-3 Quelques compléments sur le genre

1 – La structure de diplôme des femmes est différente de celle des hommes (graphes 1 et 2 suivants) 17 .

Les hommes sont plus souvent diplômés de l’enseignement professionnel (diplômes de Niveau5), et ceci depuis toujours. En 1958 (génération 1928) 15% des hommes de 30 ans déclaraient un tel diplôme pour 10% des femmes. Cette proportion a cru rapidement chez les hommes, passant la barre des 25% dès la fin des années 60 pour atteindre 40% au début des années 90.

La croissance est plus modeste chez les femmes puisqu’elles ne passeront la barre des 25% de diplômées du niveau 5 qu’à la fin des années 80, soit 20 ans plus tard que les hommes. C’est également au début des années 90 qu’elles connaîtront un taux maximum pour ce type de diplôme, mais de 30% seulement, soit 10 points de moins que les hommes.

La proportion de diplômés de niveau 5 est aujourd’hui en baisse chez les hommes comme chez les femmes. Ces diplômes professionnels (CAP, BEP) ont représenté, depuis 70 chez les hommes et 80 chez les femmes, le diplôme dominant. S’il le reste encore chez les hommes, les femmes sont depuis peu aussi souvent diplômées du BAC, d’un BAC+2 ou d’un diplôme du supérieur (environ 20% de diplômées de chacun de ces niveaux parmi celles qui auront 30 ans au début des années 2000).

L’accroissement du nombre et de la part de diplômés BAC et plus est continu depuis 50 ans, Les femmes sont plus souvent diplômées du BAC ou d’un Bac+2 ans (diplômes d’infirmière). Elles franchissent la barre des 10% de bachelières au début des années 70, comme les hommes mais vont continuer à progresser pour atteindre 20% aujourd’hui tandis que ces derniers ne décolleront du 10% que ces toutes dernières années. De la même manière, les diplômées BAC+2 passeront le cap des 10% au début des années 70 soit 10 ans avant les hommes. Elles atteignent 20% aujourd’hui contre seulement 15% des hommes.

En revanche les hommes ont longtemps été légèrement plus diplômés que les femmes du supérieur mais tous ont franchi la barre des 10% au début des années 90 (générations 60 et au-delà). La progression est, depuis, plus forte chez les femmes que chez les hommes ce qui explique qu’elles soient maintenant aussi plus souvent qu’eux diplômées de l’enseignement supérieur.

Cette évolution à la hausse des niveaux de diplôme s’accompagne d’une chute de la proportion des non diplômés qui passe, en gros, de 40 à 20% pour tout le monde. Mais cette baisse connaît des paliers : continue jusqu’en 1980, elle a ensuite fluctué pour ne réellement

17 Les données concernant les 30 ans entre 1978 à 1998 proviennent directement des enquêtes emploi. Avant et après il s’agit d’estimations tirées des enquêtes 78 et 98.

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reprendre que ces toutes dernières années. Les diplômes de CEP, certificat de fin d’études primaires, sont tombés en désuétude pour les jeunes générations, alors qu’il a longtemps été, avant le niveau 5, le diplôme dominant.

Le graphe 3 résume ces principale évolutions en montrant l’accélération forte de la proportion de diplômés Bac et + à partir du début des années 90, c’est à dire pour les générations nées après 1960.

2 – Les taux d’activité des femmes et des hommes sont différents du fait de la moindre activité féminine et des arrêts momentanés pour élever les enfants.

Mais on constate facilement (graphe4) que pour les générations d’après 1956, la courbe d’activité, bien que plafonnant à 80%, soit moins haut que pour les hommes, ne connaît plus l’allure de « dos de chameau » des générations anciennes. Les femmes s’arrêtent de moins en moins souvent pour élever leurs enfants. Le graphe suivant montre les taux d’activité générationnels pour les femmes nées entre 45 et 56 : le taux s’élève régulièrement de génération en génération de même qu’il s’élève au fur et à mesure que la génération vieillit.

L’entrée en activité des femmes semble donc, au fur et à mesure des générations, rejoindre le modèle masculin, tout en conservant un taux globalement plus faible.

3 - Quelle incidence ces taux ont-ils sur la composition par diplôme de la population active   féminine?

Nous ferons ici la même analyse que pour l’ensemble de la population, à l’aide de l’indicateur de KH moyen dont on trace la valeur pour quelques générations, en distinguant les actives. (graphe 6). On note, de façon empirique, que, bien que les femmes actives soient plus diplômées, l’écart entre population totale et population active demeure lorsque la génération vieillit. L’entrée en activité des femmes ne vient donc pas chambouler la structure de KH de la population active, la différence se faisant, comme pour l’ensemble de la population, en tout début de vie active.

Et sur la population active globale   ?

En croisant le genre et l’activité, on peut résumer les différences hommes/femmes en matière de hausse d’éducation par les grands traits suivants (pour la génération 56 sur le graphe 7) :

Les femmes actives ont le KH moyen le plus élevé, et ceci tout au long de leur vie. La différence s’atténue avec le temps, sans doute parce que les hommes ont plus souvent accès à la FC diplômante (ne serait ce que parce qu’ils partent d’un niveau de diplôme moyen plus bas) mais elle est importante en début de vie active : on retrouve là le fait que les filles sont globalement plus diplômées que les garçons.

Avant 26-27 ans les femmes sont généralement plus diplômées que les hommes (courbe verte au dessus de la bleue) mais ceux ci acquièrent du capital humain plus tard en cours de vie active ce qui amènera les actifs d’une génération à être plus diplômés que les actives.

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Structure de diplôme des hommes de 30 ans

0

0.05

0.1

0.15

0.2

0.25

0.3

0.35

0.4

0.45

58 60 62 64 66 68 70 72 74 76 78 80 82 84 86 88 90 92 94 96 9820

0020

02

Enquêtes Emploi 78-98

SUPBAC+2BACNiv5BEPCCEPSans Dip ou NR

78

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Structure de diplôme des femmes de 30 ans

0

0.05

0.1

0.15

0.2

0.25

0.3

0.35

0.4

0.45

58 60 62 64 66 68 70 72 74 76 78 80 82 84 86 88 90 92 94 96 9820

0020

02

Enquêtes Emploi 78-98

SUPBAC+2BACNiv5BEPCCEPSans Dip ou NR

79

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% de diplômés chez les hommes et les femmes de 30 ans

0

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7

58 60 62 64 66 68 70 72 74 76 78 80 82 84 86 88 90 92 94 96 9820

0020

02

Année d'observation des 30 ans

% d

e di

plôm

és d

ans

la p

opul

atio

n to

tale

H-Bac et +H-Niv5H_Non diplômeF-Bac et +F-Niv5F_Non diplôme

80

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Taux d'activité des femmes des générations 56à68 autour de "16+j"

0

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7

0.8

0.9

1

16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42

Age de la génération

1956195719581959196019611962196319641965196619671968

81

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Taux d'activité des femmes des générations nées de 1945 à 1956

0

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7

0.8

0.9

20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49 50 51 52 53

Age

Taux

d'a

ctiv

ité

1945194619481950195219541956

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Progression du KH chez les actives et les femmes de 3 générations

0

1

2

3

4

5

6

16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49 50

Age de la génération

Indi

cate

ur d

e K

H m

oyen

: nb

re d

'ann

ées

d'ét

udes

apr

ès la

6èm

e

1948 PA1948 PT1952 PA1952 PT1956 PA1956 PT1960 PA1960 PT

83

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Progression du KH moyen pour la génération 1956 ; comparaisons H/F et actif/total

0

1

2

3

4

5

6

20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42

Age de la génération 1956

Indi

cate

ur d

e K

H m

oyen

HommesHommes actifsFemmes activesFemmes

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