8/14/2019 Droit communautaire institutionnel - Cours IPAG
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DROIT COMMUNAUTAIRE INSTITUTIONNEL
INTRODUCTION
Le droit constitutionnel de l'Union europenne ne rsulte pas d'un instrument juridique
unique. La cration de la premire Communaut, la CECA, a marqu le point de dpart d'un
mouvement qui reste encore inachev et qui a entran l'addition de couches successives aux
textes originaux.
Cette accumulation de traits imposait de raliser un effort de simplification. Le trait
tablissant une Constitution pour lEurope poursuivait cette ambition puisquil entendait
abroger les traits antrieurs pour mieux les refondre dans un texte unique. Sur ce point, le trait
simplifi qui est actuellement en cours de ngociation apparatra comme une rgression
puisquil devrait laisser coexister 2 traits.
Lautre facteur de complexification tient llargissement impressionnant de lUnion
europenne. Conue lorigine pour 6 Etats, la construction europenne en "fdre"
aujourdhui 27 et lextension nest toujours pas acheve !
La construction communautaire est porte par une dynamique dextension continue (R.Mehdi), dynamique qui nous prsenterons dans un premier temps (I).
Nous verrons ensuite, dans un deuxime temps de lintroduction, quaprs plus de 50 ans de
construction communautaire il est toujours impossible de qualifier, de dterminer la nature
juridique de lUnion europenne (II).
Enfin, nous dirons quelques mots de la mthode qui a permis le dveloppement de la
Communaut europenne. Ce sera loccasion de souligner le dynamisme communautaire (III).
I. Une dynamique dextension continue
Ce phnomne dexpansion est autant qualitatif, travers lapprofondissement de luvre
commune (A), cest--dire la mise en commun de toujours plus de comptences, que
quantitatif, compte tenu de limpressionnant largissement qua connu lEurope des 6 (B).
A. De la Communaut lUnion : lapprofondissement de la constructioneuropenne
1. Les prmices : la cration de la Communaut europenne du charbon etde lacier
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Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la construction europenne sest impose afin :
- dassurer la reconstruction conomique et de gommer les terribles traces laisses par le
conflit dun point de vue matriel ou conomique ;
- daffirmer lattachement des Etats europens, au moins de lEurope occidentale, la
dmocratie et den proclamer les valeurs ;
- et, enfin, dinstitutionnaliser une solidarit militaire dans le contexte de la Guerre froide.
Lappel lanc en faveur dune Union librement consentie des Etats europens par le Congrs de
La Haye en 1948 portera ses fruits. En effet, on voit apparatre nombre dorganisations ayant
pour but de pacifier le continent europen et dassurer la relance conomique :
- lOECE (organisation europenne pour la coopration conomique) est la premireorganisation voir le jour. Elle est devenue lOCDE en 1962 (organisation pour la
coopration et le dveloppement conomique). Elle nest donc plus une organisation
strictement europenne puisquelle stend galement aux Etats-Unis, au Canada et au
Japon ;
- afin de garantir la scurit du continent, deux organisations militaires voient le jour :
lUnion de lEurope occidentale en 1948, suivie en 1949 par lOTAN qui sera beaucoup
plus fructueuse.
Ds lorigine, la construction europenne sest dmarque des organisations internationales
classiques. Compare lOTAN ou lOECE, la CECA repose indniablement sur une logique
diffrente. La CECA poursuit des objectifs apparemment beaucoup plus modestes que les
autres organisations internationales. Elle tend en effet uniquement mettre en commun les
productions franaises et allemandes de charbon et dacier. On pourrait presque reprocher aux
concepteurs de cette communaut de manquer dambition ! Oui mais voil, Jean Monnet a vu
juste en choisissant, dans un premier temps, de consacrer tous ses efforts ces matriauxextrmement sensibles que sont le charbon et lacier. Noublions pas qu lpoque le charbon
reprsentait encore la principale source dnergie. Dans ces conditions, la mise en commun des
ressources de charbon et dacier doit permettre aux deux parties de connatre en
permanence ltat de la production de ses partenaires. La CECA doit, en quelque sorte,
jouer le rle dun mcanisme dalerte prcoce. Lacier tant indispensable la fabrication
darmement, les mcanismes envisags sont censs permettre la France de suivre en
permanence ltat de la production allemande. La France sera donc avertie en casdaugmentation importante de la production dacier. En dpit de son caractre dorganisation
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sectorielle, de son caractre trs cibl, la CECA atteint, par consquent, bien le "nerf de la
guerre".
Jean Monnet a su convaincre Robert Schuman du bien-fond de sa dmarche. Pour la petite
histoire, ce nest pas un hasard si Monnet sest tourn vers Schuman. Ce dernier prsentait
lincomparable avantage dtre ministre des affaires trangres et surtout dtre strasbourgeois
dorigine. Il tait donc, plus que tout autre, concern par la rsolution du "problme allemand".
La dmarche de Monnet est empreinte de ce que les politistes (cest--dire les spcialistes de
science politique) ont qualifi de fonctionnalisme. Pour prendre une image plus parlante, il
sagit de la fameuse "politique des petits pas". Celle-ci sera exprime par Robert Schuman lors
de la clbre dclaration du 9 mai 1950 : lEurope ne se fera pas d'un coup, ni dans une
construction d'ensemble : elle se fera des ralisations concrtes crant d'abord une solidaritde fait. Le rassemblement des nations europennes exige que l'opposition sculaire de la France
et de l'Allemagne soit limine. L'action entreprise doit toucher au premier chef la France et
l'Allemagne. Dans ce but, le gouvernement franais propose immdiatement l'action sur un
point limit mais dcisif. Le gouvernement franais propose de placer l'ensemble de la
production franco-allemande du charbon et de l'acier sous une Haute Autorit commune,
dans une organisation ouverte la participation des autres pays d'Europe . Notons
que le 9 mai, date o cette dclaration cruciale a t prononce, a t rig en fte de lEurope.
La CECA nest donc pas une fin en soi. Elle nest que le dbut dun engrenage que les Pres de
lEurope esprent infernal ! La mise en commun du charbon et de lacier constitue les prmices
dune union beaucoup plus vaste, appele s'tendre progressivement d'autres domaines. La
CECA na dautre but que de poser les jalons dune union politique. Le professeur Lontin-Jean
Constantinesco a ainsi pu dire que L'intgration europenne n'est pas un tre mais un
devenir ; elle n'est pas une situation acquise, mais un processus ; elle n'est pas un rsultat,
mais l'action devant mener ce rsultat.
Cette ambition leve contraste donc avec un champ dapplication pour le moins restreint. Pour
y parvenir, les concepteurs de la CECA ont tabli une structure profondment originale. En
effet, la diffrence des organisations classiques, lessentiel du pouvoir appartient, dans la
CECA, une Haute autorit indpendante des tats. Aux cts de cette Haute Autorit,
interviennent galement un Conseil spcial des ministres, compos de reprsentants des tats
membres, une Cour de justice et une assemble, compose de reprsentants des Parlementsnationaux. Avec la CECA, est cre la premire organisation supranationale. Ce
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qualificatif signifie que laction de la Communaut peut tre impose un Etat membre grce
lintroduction du vote la majorit qualifie.
Le trait CECA est entr en vigueur entre six tats (Allemagne, Belgique, France, Italie,
Luxembourg, Pays-Bas), le Royaume-Uni ayant choisi de demeurer l'cart. Conclu pour une
dure de cinquante ans, le trait CECA a expir le 23 juillet 2002. Le charbon et l'acier ont alors
t soumis aux dispositions gnrales du trait instituant la Communaut europenne.
2. Lchec de la Communaut europenne de dfense et la cration de laCEE et de la CEEA
Un excs de prcipitation est lorigine du premier et certainement du plus retentissant chec
de la construction communautaire : la Communaut europenne de dfense (CED) et lacoopration politique europenne (CPE). Ce trait ft sign Paris le 27 mai 1952.
Lobjet de cette Communaut europenne de dfense tait videmment de rarmer lAllemagne.
Le contexte tait ultra sensible, et ce pour deux raisons :
- tout dabord, le souvenir des atrocits commises par larme allemande pendant la
Seconde Guerre mondiale marque encore les esprits ;
- en outre, la guerre de Core qui a dbut le 25 juin 1950 place le monde sous tension.
Dans ce contexte de Guerre froide exacerbe, il devient crucial que lEurope de
lOuest parvienne assurer seule sa dfense. Les Etats-Unis se sont, en effet,
fortement impliqus en Core et dsirent puiser dans les contingents stationns en
Europe. La diplomatie amricaine sest alors vertue convaincre ses partenaires
europens de limprieuse ncessit dautoriser le rarmement de l'Allemagne de
l'Ouest.
La France tait franchement hostile la reconstitution d'une arme allemande indpendante.
Rappelons-nous qu cette poque une grande partie de l'arme franaise tait engage enIndochine. Le risque de voir lAllemagne profiter de linstitution de la Communaut
europenne de dfense pour rtablir sa mainmise militaire sur lEurope tait trs prsent dans
les esprits franais.
Devant le caractre inluctable du rarmement allemand, lide a t avance de procder
au rarmement allemand dans un cadre europen. Tel est lobjet du Plan Pleven qui
consiste autoriser la participation allemande la dfense atlantique, sans pour autant permettre
la renaissance de la Wehrmacht. En dautres termes, les franais sont prts accepter laprsence de rgiments allemands dans une arme europenne, mais refusent catgoriquement
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la renaissance de larme allemande. Cette arme commune serait place sous l'autorit d'un
ministre europen de la dfense, nomm par les gouvernements des tats adhrents, sous le
contrle d'une assemble europenne et dote d'un budget commun.
Alors mme que le Plan Pleven correspondait une initiative franaise, lAssemble nationale
franaise refusera de le ratifier le 30 aot 1954. A lhostilit de principe, sajoute, en 1954,
une profonde mutation du contexte international. La guerre de Core a pris fin, Staline est
mort. Ces deux vnements laissaient auguraient lavnement dune re de dtente. Lurgence du
rarmement allemand ne parut plus alors aussi prgnante. Ainsi que la fort bien crit M. Gerbet,
sagissant non plus de charbon et d'acier, mais de ce qui reprsente l'essence mme de la
souverainet nationale, c'est--dire la dfense et l'arme , le dbat a eu tendance se placer
de plus en plus sur un terrain motionnel, or le sentiment national tait plus fort que le
sentiment europen .
Ce refus franais de ratifier le plan Pleven est regrettable pour deux raisons :
- en premier lieu, lopposition au rarmement allemand est demeure vaine, ce
rarmement ayant eu lieu dans le cadre de lOTAN.
- en second lieu, ce rejet a eu pour effet de renvoyer aux calendes grecques la ralisation
dune Union politique et l'laboration d'une politique extrieure commune.
Alors que la construction communautaire tait bien moribonde en 1954, la relance est
intervenue loccasion de la confrence de Messine en 1955. Lide est lance de rflchir
la cration de deux nouvelles communauts :
- lune sectorielle, linstar de la CECA, concernerait latome, autrement dit le
nuclaire civil : EURATOM ou CEEA ;
- lautre est cense couvrir l'ensemble du domaine conomique : la Communaut co-
nomique europenne.
Ces traits furent signs Rome le 25 mars 1957 et entrrent en vigueur le 14 janvier 1958.
Ils ont t conclus pour une dure illimite. La finalit assigne la CEE tait
l'tablissement d'un march intrieur sans frontires dans lequel la libre circulation des
personnes, des marchandises, des services et des capitaux devait tre garantie. Cet objectif
central tait complt par la mise en place de certaines politiques communes, dont la plus
importante pour la France tait la politique agricole commune.
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Ces deux communauts sinspirent du modle fourni par la CECA. On retrouve certes les quatre
institutions principales. Ces deux communauts paraissent nanmoins quelque peu en retrait
par rapport la CECA. La Commission, qui succde la Haute Autorit, perd lexclusivit du
pouvoir de dcision. On observe ainsi un retour de l'intergouvernementalisme.
3. LActe unique europen
Ce trait est qualifi d'unique parce quil est le premier aborder tout la fois la rforme des
institutions et l'extension des comptences communautaires mais aussi la coopration politique
europenne (CPE).
La ratification de lActe unique europen marque indiscutablement lun des temps
forts de la construction communautaire. Progressivement, la ncessit d'une nouvellerelance stait faite sentir. Lachvement du march intrieur sur la base des traits existants
paraissait chaque jour moins probable en raison du recours lunanimit au sein du Conseil.
Cette mode de votation ralentissait, en effet, considrablement lharmonisation des lgislations
nationales. En outre, alors que les dysfonctionnements du Conseil devenaient criants, le
Parlement europen a adopt en 1984 un projet de trait sur l'Union europenne. Ce projet,
baptis "projet Spinelli" du nom de son principal inspirateur, soulignait la ncessit d'une rvi-
sion fondamentale du dispositif institutionnel et en proposait les moyens.
L'Acte unique europen a t un succs parce qu'il se rapportait un objectif concret :
la ralisation du march intrieur pour le 1er janvier 1993. La priode qui suivit l'entre en
vigueur de l'Acte unique sera marque par un intense travail lgislatif afin de venir bout
des barrires physiques et des obstacles non tarifaires cloisonnant l'espace europen (adoption
de centaines de directives).
LAUE a sensiblement tendu les comptences de la Communaut. Celle-ci peut
dsormais intervenir en matire sociale, de protection de lenvironnement, de recherche et
de dveloppement technologique. Le trait instaure galement une politique de cohsion qui
est destine permettre aux nouveaux Etats membres de rattraper leur retard dans les
domaines conomiques et sociaux (Irlande, Grce, Espagne et Portugal).
Enfin, sur le plan institutionnel, lActe unique accentue le recours au vote la majorit
qualifie au sein du Conseil et renforce limplication du Parlement europen dans le
processus dcisionnel. Ce faisant, le trait dynamise le processus dcisionnel tout en
augmentant simultanment le lgitimit dmocratique de la construction europenne.
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LActe unique consacre galement la pratique de la coopration politique et reconnat
officiellement l'existence du Conseil europen. C'est le premier pas vers une construction qui
ne soit pas exclusivement conomique.
4. Le trait sur lUnion europenne
Le trait de Maastricht sefforce de tirer les consquences de la runification allemande
conscutive la chute du Mur de Berlin. Ce trait ralise un nouvel approfondissement de la
construction europenne. Il dote galement lUnion europenne dune structure originale.
a. La structure de lUnion europenne
Le trait sur l'Union europenne a t sign le 7 fvrier 1992. Il est entr en vigueur le 1er
novembre 1993. Ce trait introduit ce que certains auteurs qualifient parfois de "pillarisation"
de lUnion. Lide est simple. Elle consiste comparer lUnion europenne un difice qui
reposerait sur trois piliers dingale importance :
- les trois communauts ;
- la PESC ;
- et enfin, la coopration dans le domaine de la justice et des affaires intrieures.
Le socle commun rassemble les dispositions qui sont applicables la fois aux domainesrelevant du droit communautaire classique tel quil sest dvelopp depuis le trait de Paris
instituant la CECA, dune part, et les domaines couverts par le trait sur lUnion europenne.
La politique trangre et de scurit commune et la coopration policire et judiciaire en
matire pnale se singularisent en effet du droit communautaire par la place importante
quelles laissent au vote lunanimit. Le Parlement europen est pratiquement court-
circuit, la Commission est amoindrie. Quant la Cour de justice, son rle est pour le moins
limit.
La construction europenne perd alors une partie de son originalit. Alors quelle sappuyait
jusque-l sur des institutions supranationales, elle fait dsormais place des institutions
intergouvernementales.
b. Le renforcement de laction communautaire
La Communaut conomique europenne devient la Communaut europenne tout court.
Cette nouvelle dnomination est cense exprimer le passage dun projet purement
conomique un projet dont la dimension politique est enfin assume.
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Laction communautaire sort renforce du trait de Maastricht grce plusieurs
innovations :
- de nouvelles politiques sont mises en uvre dans les domaines de lducation, de la
culture, de la coopration au dveloppement), dautres sont amplifies, telle que la
politique de cohsion ;
- le principe de subsidiarit est consacr ;
- lintroduction dune procdure de codcision qui a pratiquement pour effet de placer
le Parlement europen sur un pied dgalit avec le Conseil accrot indniablement la
lgitimit dmocratique de la Communaut ;
- le Parlement europen acquiert galement un droit de regard dans la dsignation de
la Commission ;
- enfin, un protocole tend les comptences communautaires en matire sociale.
Le Royaume-Uni obtient de ne pas participer la politique sociale (opting out). Il choisit
galement de rester en marge de la politique conomique et montaire.
Quelle que soit limportance des points dj mentionns, les deux principales innovations
du trait de Maastricht sont le lancement dune vritable politique conomique et montaire
et lintroduction de la citoyennet europenne.
1). LUnion conomique et montaire
Cration la plus visible de la construction europenne, lUnion conomique et montaire se
concrtise par la dcision prise, en mai 1998, d'instaurer une monnaie unique (l'Euro).
LUnion montaire regroupe aujourdhui 13 des 27 Etats membres de lUnion
europenne, certains Etats ayant refus dadopter leuro (Royaume-Uni et Sude). Pour les
autres Etats, labsence de participation la monnaie unique sexplique plus prosaquement par
le fait quils ne remplissent pas les fameux critres de convergence. A cet gard, bien que letrait prvoie un contrle des dficits publics excessifs, cette procdure a t largement
neutralise par la Cour de justice.
2). La citoyennet europenne
Lapparition dune citoyennet europenne constitue lune des avances les plus
spectaculaires de la construction europenne. La citoyennet europenne confre
lindividu un statut politique et conduit ne plus lapprhender uniquement en tantquagent conomique.
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) La notion de citoyen europenConformment larticle 17 CE, Est citoyen de lUnion toute personne ayant la
nationalit dun tat membre. La citoyennet de lUnion complte la citoyennet nationale
et ne la remplace pas . Linstauration dune citoyennet europenne naffecte donc en rien
les prrogatives des Etats membres en matire dattribution de la nationalit. La citoyennet
europenne nest quune citoyennet de superposition qui bnficie automatiquement au
national dun Etat membre.
La citoyennet europenne sinscrit parfaitement dans la dmarche fonctionnaliste chre
Jean Monnet. On peut, en effet, soutenir que la citoyennet europenne recle le ferment
dune citoyennet europenne fdrale. Bien sr, une telle issue demanderait beaucoup de
temps. Cependant, lexemple de la Suisse montre que la citoyennet de lEtat fdral peut se
construire partir de la citoyennet des Etats fdrs. La Constitution helvtique de 1848
indiquait ainsi que tout citoyen dun canton avait la qualit de citoyen suisse.
) Les droits du citoyen de lUnionLes droits du citoyen europen sont noncs aux articles 18 21 du trait CE. Prcisons
demble que ltendue de ces droits nest pas fige. En outre, les droits mentionns dansces dispositions ne sont pas tous lapanage des citoyens europens.
Le premier droit du citoyen europen peut paratre redondant dans la mesure o il sagit
du droit de circulation et de sjour. Or, ce droit rsultait dj dautres dispositions du trait
pour les travailleurs et de directives communautaires de 1990 pour les inactifs (tudiants,
retraits, touristes). Ce droit nest pas absolu puisquil doit sexercer dans les limites et
conditions prvues par le trait et le droit driv. Alors que ce droit paraissait largement
redondant, la Cour de justice lui fait produire des consquences importantes notamment en le
reliant au principe de non-discrimination. Dans un arrt au nom absolument imprononable
Grzelczyk du 20 septembre 2001, la Cour a ainsi indiqu que le statut de citoyen de
lUnion a vocation tre le statut fondamental des ressortissants des Etats membres
permettant ceux parmi ces derniers qui se trouvent dans la mme situation dobtenir,
indpendamment de leur nationalit et sans prjudice des exceptions expressment prvues cet
gard, le mme traitement juridique .
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Le deuxime droit dcoulant de la citoyennet europenne prend la forme dun droit de
vote et dligibilit des citoyens europens aux lections municipales et aux lections
europennes dans lEtat daccueil. Le droit de vote aux lections europennes est une
illustration clatante de la citoyennet europenne ds lors quil permet tout citoyen de
lUnion de participer aux lections au Parlement europen. Cest ainsi que lancien pilote
automobile finlandais, Ari Vatanen, a t lu eurodput dans la rgion Provence Alpes
Ct dAzur ; de mme Daniel Cohn-Bendit, figure emblmatique du Parlement europen, est
lu en France.
La porte symbolique du droit de vote et dligibilit aux lections municipales est, en
revanche, plus limite. Il sagit davantage de parfaire lintgration du citoyen europen dans
son Etat daccueil.
Le droit de vote et dligibilit aux lections municipales parat avoir vocation tre
tendu aux ressortissants de pays tiers ainsi que cela existe dores et dj dans un certain
nombre dEtats membres. Au sein de lUnion europenne les voix qui rclament un
remplacement de la condition de nationalit par un critre fond sur la rsidence stable
sont de plus en plus nombreuses1.
La citoyennet europenne confre encore :
- un droit de ptition devant le Parlement europen ;- le droit de saisirle mdiateur europen ;
- le droit de sadresser aux institutions ou organes de lUnion dans la langue
officielle de son choix et dobtenir une rponse dans la mme langue.
Ces trois droits ont en commun de ne pas bnficier exclusivement aux citoyens europens.
Enfin, la citoyennet europenne comporte le droit une protection diplomatique et
consulaire dans tout Etat tiers o lEtat membre dont le citoyen a la nationalit nest pas
reprsent. Mentionner le livre vert sur la protection diplomatique .
La citoyennet europenne a favoris le dveloppement de la protection des droits
fondamentaux de la personne (cf. CJCE, 2003, Chen, propos du droit la libre circulation).
D'abord au profit des citoyens europens. Mais, galement, par effet de contagion, au
bnfice des ressortissants des pays tiers car il s'avre de plus en plus difficile de justifier1 C. B L U M A N N , C i toyenne t eu ropenne e t d ro i t s fondamentaux de l Union europenne :e n t r e c o n c u r r e n ce e t c o m p l m e n t a ri t , i n Liberts, Justice, Tolrance. Mlanges en hommage au
Doyen Grard Cohen-Jonathan, Bruxelles, Bruylant, 2004, p. 265 ; L. DUBOUIS, Citoyennet europenne etdroit fondamentaux de la personne, in Lintgration europenne au XXIe sicle. En hommage JacquesBourrinet, Paris, La documentation franaise, 2004, p. 87.
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certaines discriminations entre ces deux catgories de non nationaux mme si la solidarit
spcifique qui lie les tats membres de l'Union rend difficile leur complte assimilation2.
5. Le trait dAmsterdam
Sign le 2 octobre 1997, le trait d'Amsterdam est entr en vigueur le 1er mai 1999.
Conues l'origine pour six tats, les institutions de lUnion ntaient plus adaptes pour une
Union Quinze qui tait de surcrot encore appele slargir. La volont de faire taire la
critique rcurrente du dficit dmocratique mais aussi de garantir l'efficacit du systme
imposait une rvision denvergure.
Le trait d'Amsterdam a du parce que les ngociateurs ne sont pas parvenus tablir les
conditions de fonctionnement efficace dune Union voue sagrandir. Aussi a-t-on d avoir
recours une "clause de rendez-vous". Un protocole prvoit la convocation dune nouvelle
confrence intergouvernementale laquelle est laiss le soin de rgler les questions restes
en suspens. Le rglement des questions les plus sensibles, telles que la composition de la
Commission et la pondration des votes au sein du Conseil, est ainsi diffr .
Les progrs introduits par le trait dAmsterdam sont nanmoins tangibles. On mentionnera
notamment :
- la cration d'une politique communautaire de l'emploi ;- la "communautarisation", cest--dire le transfert du troisime au premier pilier des
questions relatives limmigration, la politique des visas et au franchissement des
frontires. Seule la coopration policire et judiciaire en matire pnale demeure dans
le champ de la coopration intergouvernementale ;
- lintroduction les cooprations renforces ;
- laccroissement des pouvoirs du Parlement ;
- llargissement des cas de vote la majorit qualifie au Conseil ;- la cration de la fonction de haut reprsentant de l'Union pour la PESC ;
- enfin, le trait renvoie, pour la premire fois, de manire expresse aux principes de la
libert, de la dmocratie, du respect des droits de l'homme et des liberts fondamentales,
ainsi que de l'tat de droit (art. 6 1 TUE3). L'adhsion de nouveaux membres est
2 L. DUBOUIS, Citoyennet europenne et droit fondamentaux de la personne, in Lintgration europenne auXXIe sicle. En hommage Jacques Bourrinet, Paris, La documentation franaise, 2004, p. 87.3 1. L'Union est fonde sur les principes de la libert, de la dmocratie, du respect des droits de l'homme etdes liberts fondamentales, ainsi que de l'tat de droit, principes qui sont communs aux tats membres.
2. L'Union respecte les droits fondamentaux, tels qu'ils sont garantis par la convention europenne desauvegarde des droits de l'homme et des liberts fondamentales, signe Rome le 4 novembre 1950, et tels qu'ilsrsultent des traditions constitutionnelles communes aux tats membres, en tant que principes gnraux du droit
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elle-mme subordonne au respect de ces valeurs tandis qu'un mcanisme de
sanction est instaur contre les tats membres qui ne les respecteraient pas (art. 7
TUE, art. 309 CE).
Comme Maastricht, certains de ces progrs n'ont pu tre atteints qu'au prix d'exemptions
au profit du Royaume-Uni, de l'Irlande et du Danemark.
6. Le trait de Nice
Sign le 26 fvrier 2001, le trait de Nice est entr en vigueur le 1 erfvrier 2003.
Initialement, le trait de Nice navait dautre ambition que de rgler le reliquat
dAmsterdam, cest--dire les trois questions cruciales qui navaient pas pu trouver de
rponses Amsterdam. Il sagit de la composition de la Commission, de la pondration desvoix au sein du Conseil et de llargissement des cas de vote la majorit qualifie .
Dautres questions se sont cependant invites dans les ngociations, telles que la rforme du
systme de coopration renforce ou celle de la juridiction communautaire. Le trait
de Nice facilite (encore insuffisamment toutefois) le recours aux cooprations renforces et
leur champ dapplication. Le trait de Nice modifie la pondration des voix au Conseil afin de
garantir que toute dcision recueille l'appui d'tats membres qui reprsentent une large
majorit de la population. Il dtermine la composition future de la Commission. Le trait fixe lenombre maximum de parlementaires 732 et rpartit les siges entre les tats membres. Enfin, il
largit les cas de recours la majorit qualifie. Il largit le champ de la procdure de
codcision.
Le trait de Nice a t trs dnigr. Cela tient lpret des dbats et aux rsultats
modestes obtenus. Ce bilan ngatif sexplique galement pour partie par lirruption
paradoxale du dbat sur la Constitution europenne pendant ds le dbut de la
ngociation du trait de Nice.
Enfin, pendant les ngociations du trait de Nice, la Charte des droits fondamentaux de
l'Union europenne a t adopte par une convention compose de reprsentants des
chefs dEtat ou de gouvernement, de parlementaires europens et nationaux et d'un membre
de la Commission. La charte a t signe Nice, le 7 dcembre 2000, par les prsidents du
Parlement europen, du Conseil et de la Commission.
communautaire .
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7. Le trait tablissant une Constitution pour lEurope
La confrence intergouvernementale runie pour ngocier le trait de Nice a adopt une dclaration
sur l'avenir de l'Union dans laquelle elle envisageait les progrs ultrieurs et notamment la
tenue d'une nouvelle confrence intergouvernementale en 2004. Un dbat large et approfondidevait tre engag en 2001 sur l'avenir de l'Union avec le concours de toutes les parties
intresses au premier rang desquelles la socit civile et en consultation avec les pays
candidats.
Le Conseil europen de Laeken des 14 et 15 dcembre 2001 invitait apporter une solution aux
problmes lancinants tenant la rpartition des comptences entre l'Union et ses tats
membres, la simplification des instruments, la rforme des institutions. Les
conclusions de ce Conseil europen fixaient galement la voie suivre pour tablir uneconstitution.
La procdure choisie pour poursuivre les travaux s'inspire de celle qui avait t retenue pour
l'laboration de la Charte des droits fondamentaux des citoyens de l'Union europenne, c'est-
-dire la mise en place d'une convention spciale. Cette convention sur l'avenir de
l'Europe tait compose de quinze reprsentants des chefs d'tat ou de gouvernements, de
trente parlementaires nationaux (deux par tat membre), de seize membres du Parlement
europen et de deux membres de la Commission. Des reprsentants des pays candidats
participaient aux discussions, mais ils ne pouvaient empcher la formation du consensus. Un
prsidium compos du prsident de la convention, M. Valry Giscard d'Estaing assurait la
direction des travaux.
Le Conseil europen de Thessalonique a qualifi le projet de trait constitutionnel de
bonne base de dpart pour la confrence intergouvernementale. Les discussions ont
une nouvelle fois achopp sur les points de friction qui staient manifests Nice. Le
rsultat n'est toutefois pas trs loign de celui atteint par la convention. La fusion des
traits ainsi que de la Communaut et de l'Union, la simplification des comptences
et des actes, l'intgration de la Charte des droits fondamentaux ont t retenues . La
procdure budgtaire a t rquilibre dans un sens plus favorable au Conseil. La
rduction du nombre de membres de la Commission a t reporte en 2014 . La
philosophie du systme de vote au Conseil, fonde sur une majorit d'tats et de la
population a t reprise, mais les seuils ont t ports 55 % des tats et 65 % de la
population. L'unanimit a t conserve pour la fiscalit et la scurit sociale, mais des
clauses passerelles prvoient la possibilit de passer la majorit qualifie sur dcision
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unanime du Conseil europen sans rvision des traits. La constitution se substitue au trait
sur l'Union europenne et au trait instituant la Communaut europenne qu'elle
abroge.
La ngociation ultime a t marque par le complexe de Lilliput (J.-P. Jacqu), c'est-
-dire les craintes des petits tats qui craignaient que leur place ne soit rduite tant dans
les institutions que dans le processus de dcision. Cette crainte surprend tant lexprience
prouve que la prtendue opposition entre grands et petits ne joue pas dans la vie
quotidienne de l'Union. On comprend nanmoins que les petits tats, qui venaient tout
juste de recouvrer, grand-peine, leur souverainet, aient souhait contrebalancer une
infriorit dmographique par certaines garanties juridiques.
8. Le projet de trait simplifi
Les rfrendums ngatifs franais et hollandais ont embarrass toutes les autorits politiques
de lUnion europenne. Diffrentes thses ont alors t prsentes pour surmonter la crise.
a. Les errements relatifs lavenir du trait tablissant une Constitution pourlEurope
Position du Parlement europen
Le Parlement tait partisan du statu quo. Il considrait que les votes ngatifs franais etnerlandais ne condamnaient pas le trait tablissant une Constitution pour lEurope. Le
Parlement europen estime que les rfrendums nont pas sign son acte de dcs .
Vision bien trop nave, politiquement inacceptable.
Position exprime par le Parlement europen en sance (le Parlement europen a procd unvote au sujet de la question du devenir du trait tablissant une Constitution pour lEurope) :Le Parlement refuse denterrer le trait constitutionnel.
Tous les amendements proposant de rengocier ce texte ont t massivement rejets.La proposition allemande tendant annexer la Constitution un protocole social pour
les Franais et un protocole sur la subsidiarit pour les Nerlandais est [juge] simpliste :
linquitude de ces peuples [tant] bien plus profonde que cela .
Les eurodputs des 13 Etats membres qui ont dj ratifi la Constitution sopposent
la rouverture dun compromis difficilement obtenu. Surtout, ils jugent que leur oui
vaut autant que le non franco-nerlandais.
Position de la prsidence autrichienne exprime par le Chancelier Wolfang Schssel enjanvier 2006 :
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Le chancelier autrichien, prsident en exercice de lUnion europenne, a dclar que La
Constitution nest pas morte [] . Il estime quil faut poursuivre le processus de
ratification du trait tablissant une Constitution pour lEurope. Lintrt est de savoir
combien dEtats sopposent finalement ce trait. La solution apporter ne sera pas la
mme selon que la France et les Pays-Bas restent isols ou selon quils sont rejoints par
dautres Etats.
Problme : le Premier ministre conservateur polonais Kazimierz Marcinkiewicz et le
Prsident tchque Vaclav Klaus avaient estim inutile de ranimer le dbat sur la
Constitution.
Position allemande
LAllemagne, lAutriche et la Finlande sopposent une rengociation de la Constitution .Elle considre, linstar du prsident de la Commission europenne, quil faut amliorer le
contexte davantage que le texte lui-mme de la Constitution.
Pour Jo Lainen (eurodput SPD) : Rengocier, cest ouvrir la bote de Pandore et
autoriser chaque Etat faire valoir ses revendications. La situation risque dempirer.
LAllemagne suggre dannexer la Constitution un protocole social pour les Franais et
un protocole sur la subsidiarit pour les Nerlandais .
Position de la France
La position franaise consiste rester dans le cadre des traits existants et tenter
dappliquer les meilleures parties du trait tablissant une Constitution pour lEurope.
J. Chirac plaide contre un statu quo institutionnel pour lUE. Pour sortir de la crise, le
prsident franais a relanc lide de "groupes pionniers", laquelle pourrait se concrtiser par
une coopration renforce entre les 12 Etats membres de lUE4. Pour rconcilier les citoyens
avec lEurope, il faut lancer des projets concrets dans lnergie, la recherche ou la dfense.
A court terme, M. Chirac voudrait mettre en uvre les dispositions de la Constitution
qui peuvent ltre trait constant. Il se heurte, sur ce point lAllemagne, qui craint
quune mise en uvre partielle du texte ne conduise labandon de ses autres
dispositions. Nous ne souhaitons pas entrer dans un dbat sur le texte. Nous souhaitons
pour linstant le conserver dans son intgralit. Il y a des raisons beaucoup plus profondes
que les problmes institutionnels qui ont conduit au non franais et nerlandais.
Amliorons le contexte avant de revenir sur le trait (Angela Merkel).
4 Position exprime par le Prsident Chirac lors des crmonies de vux dbut janvier 2006.
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Position exprime par VGE, fin fvrier 2006 :
VGE rclame une deuxime chance pour le trait tablissant une Constitution pour
lEurope. Il faudrait un nouveau referendum qui ne porterait que sur les premire et deuxime
partie de la Constitution. Celui-ci serait organis aprs les lections prsidentielles en 2007.
La troisime partie du trait, la plus dcrie, passerait par la voie parlementaire.
Positions plus radicales : pour Robert Badinter, Le projet de Constitution en sa versionactuelle est mort ; pour Pierre Lequillier, prsident de la dlgation de lAssemblenationale pour lUnion europenne, Il est impensable de revenir devant les franais avec lemme texte .
Position britannique
Les rgles actuelles issues du trait de Nice ne sont pas adaptes. Tony Blair est partisandune modification du trait constitutionnel.
Le processus de ratification a t report dans 6 Etats (Danemark, Irlande, Pologne,
Portugal, Rpublique tchque et Sude) tandis quil est suspendu au Royaume-Uni.
Position de la Commission europenne : la Commission demande du temps pour rgler
le problme et estime, comme lAllemagne, quil est plus important damliorer le
contexte plutt que dtre obsd par le texte. Autrement dit, il faut que lUnion
europenne cre de la croissance et de lemploi.
b. La substance du trait simplifi5
Le succdan de relance que constitue le trait simplifi est mettre au crdit de la
chancelire allemande Angela Merkel et du nouveau prsident franais. La diplomatie de
l"homme press" a indiscutablement secou les chancelleries (D. Simon). Cette union des
forces, ce regain du couple franco-allemand a permis de dbloquer la situation dans laquellese trouvait l'Europe depuis les rfrendums ngatifs franais et nerlandais.
Le sommet europen s'est en effet accord sur un document de travail - le mandat- pour une
future confrence intergouvernementale. On relvera que la formule de la convention na pas
t retenue. La CIG a dbut ses travaux le 23 juillet et devrait les achever dici octobre.
Lobjectif est que le prochain trait soit ratifi avant les lections au Parlement europen de
juin 2009.
5 C. BLUMANN, La relance de l'Europe : le trait simplifi,JCP G 11 juillet 2007, act. 317.
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Le rsultat attendu parat trs modeste par rapport au trait tablissant une Constitution pour
l'Europe. Lobjectif consistant refonder les traits dans un texte unique est abandonn.
Le trait simplifi procdera seulement une rvision des traits existants.
Ce nouveau texte, qui nest encore qu ltat de projet, sest dores et dj attir les foudres
de nombres observateurs. Certains ont parl d'un trait des trois R (recycler, renommer,
reprendre). Le Prsident luxembourgeois Jean-Claude Juncker la qualifi de trait simplifi
trs compliqu . Le futur trait se borne rviser point par point les traits existants
sans en changer ou presque la structure d'ensemble. Sur le fond le mandat imparti par le
Conseil europen la CIG 2007 vise principalement abandonner la texture
constitutionnelle (1), tout en prservant nanmoins certaines avances de ce projet (2). Il
contient cependant des germes d'importants reculs (3).
1). Labandon de la perspective constitutionnelle
Le processus constitutionnel semble devoir tre la victime expiatoire du nouveau projet .
On peut tre surpris de labandon aussi brutal de toute rfrence la dimension
constitutionnelle. En effet, en France comme aux Pays-Bas, les causes de l'chec tiennent
beaucoup plus des questions de droit matriel (social, concurrence, march intrieur,
immigration) qu' la rfrence constitutionnelle. Cest donc avec une rapidit stupfiante que
les rfrences aux symboles constitutionnels (drapeau, hymne, devise et mention selon
laquelle la monnaie de l'Union est l'euro) ont t condamnes. Le professeur Simon condamne
fermement cette attitude : une fois de plus, crit-il, les responsables politiques prfrent
lEurope qui aurait honte delle-mme une Europe fire de saffirmer. On doit cependant
mentionner que cette rfrence constitutionnelle navait pas les faveurs de certains Etats
membres qui ne staient pas encore prononcs sur le TECE.
Exit galement les termes lois et lois-cadres europennes, remplacs par les classiques
rglements et directives. Le ministre des Affaires trangres redevient "Haut-reprsentant del'Union pour les affaires trangres et la politique de scurit". Il devrait toutefois conserver
ses nouvelles fonctions de vice-prsident de la Commission.
La rfrence la primaut du droit de lUnion disparatra du nouveau trait. Seule une
dclaration annexe au futur mentionnera la primaut du droit de lUnion6. Son utilit parat
proche du nant dans la mesure o ce type de dclaration na pas de valeur juridique.
6 Selon une jurisprudence constante de la Cour de justice de l'UE, les traits et le droit adopt par l'Union surla base des traits priment le droit des tats membres, dans les conditions dfinies par cette jurisprudence .
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Le dfaut majeur rside dans l'abandon de lobjectif de fusion des traits. Deux traits
subsisteront en effet. Le trait sur l'Union europenne conservera son appellation. Quant au
trait instituant la Communaut europenne, il sera rebaptis trait sur le fonctionnement de
l'Union europenne. La Communaut europenne disparatra et l'Union s'y substituera
intgralement.
2). Les avances prserves
La structure en piliers s'efface, ce qui n'est pas ngligeable. La nouvelle Union possdera,
seule, la personnalit juridique.
L'article du trait relatif aux droits fondamentaux fera rfrence la Charte en lui
reconnaissant une valeur juridiquement contraignante . Le Royaume-Uni a toutefois
obtenu un "opting out" en ce domaine. Selon un protocole additionnel, le Royaume-Uni sera
thoriquement tenu par les dispositions de la charte. Cependant, ni les juridictions
britanniques ni la Cour de justice ne pourront confronter le droit britannique aux dispositions
de la Charte. Cette obligation pourrait, par consquent, fort bien demeurer purement
thorique. La Charte ne sera donc daucune utilit pour les justiciables britanniques.
Sur le terrain de la garantie des droits de lhomme, le trait simplifi confirme le principe
d'une adhsion obligatoire la Convention europenne des droits de l'homme. Cette
adhsion devra s'oprer l'unanimit du Conseil.
Sur le terrain institutionnel, les principales innovations du trait constitutionnel
demeurent inchanges :
- un prsident du Conseil europen lu pour une dure de deux ans et demi renouvelable
une fois ;
- Commission resserre (les deux tiers des tats membres) ; les pouvoirs de son
Prsident tant renforcs ;
- le systme de la double majorit au Conseil, qui avait provoqu la fronde de laPologne, est maintenu. Son application est toutefois reporte 2014.
En outre, entre 2014 et 2017, un tat pourra encore demander le vote selon le systme actuel depondration issu du trait de Nice. De plus, un systme proche de l'ancien compromis de Ioannina envertu duquel si, au cours d'un vote une minorit importante se dgage, le Conseil devra continuer ngocier de faon rallier le maximum d'opposants.
Les innovations de la Constitution en ce qui concerne l'nergie et les services d'intrt conomique gnralsembles prserves.
3). Le risque de rgression
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On sent poindre une volont de s'opposer toute avance nouvelle, voire denvisager des
reculs sous forme de renationalisation. Le principe de la comptence d'attribution se voit
raffirm avec force plusieurs endroits. En matire de comptence partage, le futur trait
consacrera un principe de rversibilit. Ce principe permettra le retour dans le giron tatique
dune comptence jusqu'alors exerce par l'Union. Il pourra en aller ainsi en cas d'abrogation
d'un acte lgislatif de l'Union, mais aussi afin de mieux garantir l'application des principes de
subsidiarit et de proportionnalit. Des tats membres pourront mme prendre l'initiative
d'une saisine du Conseil en vue de l'abrogation d'un acte lgislatif de l'Union.
Sagissant du mcanisme de contrle politique du principe de subsidiarit, le trait
constitutionnel avait mis en place un mcanisme dit d'alerte prcoce en vertu duquel si un
tiers des parlements nationaux s'opposaient un projet lgislatif, la Commission se devait de
le rexaminer. Le trait simplifi va plus loin et offre, dans certaines conditions, aux
parlements nationaux la possibilit dinterrompre la procdure lgislative, donc de neutraliser
une initiative de la Commission. La Commission ne sera donc plus seulement tenue de
rexaminer sa copie ; elle pourra ventuellement tre contrainte dabandonner un projet7.
Dans le mme sens, une rvision des traits pourra intervenir afin de rduire les
comptences de lUnion. L'hypothse dun retour en arrire est donc clairement envisage.
Jusqu prsent, jamais une telle hypothse n'avait t officiellement prsente.En outre, le droit de retrait est maintenu. Quant aux revendications tendant durcir les
conditions de l'largissement de lUnion, elles nont pas t satisfaites. Selon le professeur
Blumann, force est de reconnatre que les vingt-sept tats membres ont pris acte d'un
certain dsenchantement actuel et fait la part belle aux sirnes du renoncement. Le trait
simplifi marquera ainsi la prfrence pour une Europe de la modestie [au dtriment d]
une Europe de l'ambition . Pour le professeur Simon, Le plus trange est sans doute que
ce repltrage minimaliste ait pu tre prsent comme un succs
8
.
B. Llargissement de lUnion europenne : de lEurope des 6 uneEurope plus de 30
7 Si une majorit simple de parlements nationaux fait objection, et dans l'hypothse o la commission maintientson projet initial, le lgislateur communautaire se verra saisi tant des objections nationales que des motifs de laCommission. Aprs un premier examen du texte, si une majorit de 55 % des membres du Conseil ou unemajorit des voix exprimes au Parlement europen, estime que le projet enfreint le principe de subsidiarit, la
procdure lgislative sera interrompue.8 D. SIMON, Mini-trait , trait simplifi ou trait mutil : l'Europe entre le possible et le souhaitable,Europe juillet 2007, repre 7.
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Dun strict point de vue juridique, un largissement sanalyse comme une adhsion de
nouveaux Etats membres. Or, la concrtisation de cette adhsion suppose une rvision des
traits. Il convient donc de sintresser, dans un premier temps, aux conditions de la rvision
des traits. Celles-ci sont nonces larticle 48 TUE : Le gouvernement de tout tat
membre, ou la Commission, peut soumettre au Conseil des projets tendant la rvision des
traits sur lesquels est fonde l'Union.
Si le Conseil, aprs avoir consult le Parlement europen et, le cas chant, la Commission,
met un avis favorable la runion d'une confrence des reprsentants des gouvernements
des tats membres, celle-ci est convoque par le prsident du Conseil en vue d'arrter d'un
commun accord les modifications apporter auxdits traits. Dans le cas de modifications
institutionnelles dans le domaine montaire, le conseil de la Banque centrale europenne est
galement consult.
Les amendements entreront en vigueur aprs avoir t ratifis par tous les tats membres
conformment leurs rgles constitutionnelles respectives . Evoquer ici larticle 88-5 dela Constitution franaise issu de la rvision constitutionnelle de mars 2005.
Les conditions de la rvision des traits ayant t mentionnes, on peut dsormais en venir
aux conditions requises par ladhsion proprement dite.
1. Les conditions de ladhsion
Llargissement considrable, certains diront inconsidr, que vient de connatre rcemment
lUnion europenne conduit sinterroger sur la nature de lUnion : sagit-il dune Union
runissant des Etats unis par un lien dordre gographique ou territorial ou dun ensemble qui
rassemble des Etats qui partagent un ensemble de valeurs communes (1).
Ces dveloppements se diviseront donc en trois temps :
- les enjeux de llargissement ;
- les critres de llargissement ;
- la question de savoir si lUnion est un communaut de valeurs ou une communaut de
territoriale.
a. Les enjeux de llargissement
Llargissement de lUnion europenne prsente deux avantages et saccompagne dun risque.
1er avantage : la runification pacifique du continent
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La force symbolique de llargissement de lUnion europenne aux pays dEurope centrale et
orientale explique la volont des "anciens" membres de mener bien ce processus.
Lirrversibilit du processus dlargissement9 atteste du souci de refermer une des pages
les plus sombres de lhistoire europenne, celle de la Seconde Guerre mondiale et du partage
artificiel de lEurope qui la suivie. LEurope va enfin, sans effusion de sang, devenir une
grande famille (dclaration de Laeken sur lavenir de lUnion europenne, 14 et 15
dcembre 2001). Cette mutation dmocratique doit permettre tout le continent de profiter de
lapport majeur de la construction europenne : linstauration dune paix durable.
Cette perspective de stabilisation du continent conduit rechercher un largissement continu
de lUnion et donc en tendre au maximum les frontires (cf. leffet de modle qui conduit
reproduire lexpression dans les Balkans).
2me avantage : ladhsion, une rcompense politique
Admettre que les PECO deviennent membres de lUnion revient leur dcerner un satisfecit
en matire de respect des droits de lhomme, de la dmocratie et de protection des minorits.
Ils sont galement rputs disposer dinstitutions stables, dune conomie de march viable
ainsi que de la capacit de faire face la pression concurrentielle.
Le retard de dveloppement des PECO est tel que les avis de la Commission les dclarant aptes adhrer lUnion semblent irralistes. Comment peut-on concevoir que les rformes suffisantes ont t accomplies et que
les mentalits ont radicalement chang en lespace de dix ans peine ? Lhritage communiste y est si prgnantque lon peut, tout le moins, douter de leffectivit des rformes rcemment adoptes. Le Conseil europen deLaeken a pourtant approuv lanalyse de la Commission.Lenthousiasme suscit par la perspective dunification du continent pacifi a
probablement incit les dirigeants des Quinze ne pas se montrer trop stricts quant au
respect des critres de Copenhague.Pour la premire fois, lUnion accueillera des pays
qui taient situs de lautre ct du rideau de fer. Llargissement tout crin de lUnion
europenne nest cependant pas sans risques.
Il est indniable que la symbolique prdomine dans ce processus dlargissement. Il ny a
qu voquer llargissement la Bulgarie et la Roumanie. Ces deux Etats ont intgr
lUnion avec lobligation de faire leur preuve, notamment dans le domaine de la rforme de la
justice et de ladministration (ncessit de lutter contre la corruption).
A trop privilgier la symbolique au dtriment de la ralit conomique et politique, le
risque est dassister une dilution de lintgration. LUnion europenne compte dsormais
trop de membres pour quils puissent continuer avancer ensemble au mme rythme.
Llargissement augure dune amplification trs importante de la diffrenciation. De
9 Dj souligne lors du Conseil europen de Luxembourg en dcembre 1997.
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plus en plus, lUnion europenne deviendra une Europe la carte dans laquelle chaque Etat
participera aux politiques de son choix en fonction non pas de ses capacits mais de sa
volont et de ses intrts propres. Cette volution existe depuis dj une dizaine dannes, un
exemple tant le refus de certains Etats membres dadopter la monnaie unique alors quils
remplissent les critres de convergence, comme le Royaume-Uni, le Danemark ou plus
rcemment la Sude. On soriente alors inluctablement vers lavnement dune avant-
garde europenne, rassemblant les Etats les plus dynamiques et ouverte ceux qui
dsireraient les rejoindre. Cette attitude pourrait nanmoins susciter chez les nouveaux
membres un sentiment dexclusion puisque, sitt admis, ils seraient relgus au rang de
membres secondaires.
b. Les critres de llargissement
1) Les critres classiques
Les critres de Copenhague (Conseil europen de 1993) sont :
- les critres politiques qui ont t repris larticle 6 1 UE : prsence dinstitutions
stables garantissant la dmocratie, la primaut du droit, les droits de lhomme, le
respect des minorits et leur protection) ;
- les critres conomiques : lexistence dune conomie de march viable et la capacit
de faire face la pression concurrentielle et aux forces du march l'intrieur de
l'Union ;
- le critre de la reprise de lacquis communautaire (capacit des pays candidats
assumer les obligations de lUE et notamment souscrire aux objectifs de lUnion
politique, conomique et montaire).
Le critre politique a acquis ultrieurement un statut part en ce quil est devenu un
pralable louverture de ngociations, alors que les critres conomiques et de reprise
de lacquis sont des pralables ladhsion.
Le critre politique est donc un pralable louverture des ngociations dadhsion tandis que
le critre conomique et celui tir de la reprise de lacquis communautaire sont, quant eux,
les pralables ladhsion. Ces deux derniers critres font prcisment lobjet de ces
ngociations.
1. Conclusion dun accord de stabilisation et dassociation (ASA) (envisag comme le
point de dpart dun processus devant conduire ladhsion) ;
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2. Contrle politique (cest--dire le respect de la dmocratie, des droits de lhomme et
de lEtat de droit) ; Les deux premiers critres sont interchangeables.3. Dcision du Conseil europen douvrir les ngociations ;
4. Contrle conomique et reprise de lacquis (screening et monitoring) ;5. Adhsion.
2) La rsurrection (ou la ractivation) du critre tir de la capacit dintgration delUnion europenne
Jusqu ladhsion rcente de la Bulgarie et de la Roumanie, nul na tenu compte du prtendu
critre tir de la capacit dabsorption ou dintgration de lUnion europenne. Cependant,
afin de rfrner lardeur des pays candidats ladhsion, de nombreuses dclarations des
institutions de lUnion europenne insistent sur deux points : tout dabord, le principefondamental selon lequel chaque pays doit progresser sur la voie de ladhsion en fonction de
ses propres mrites ; ensuite, lide selon laquelle llargissement ne doit pas enrayer le
dynamisme de lUnion europenne.
La capacit dintgration se mesure la facult de lUE daccueillir de nouveaux
membres un moment donn ou dans un priode donne, sans mettre en pril les
objectifs politiques tablis par les traits. C'est donc avant tout une notion fonctionnelle.
L'UE a finalement refus driger la capacit dintgration en un nouveau critre dadhsion.
Mme si elle ne constituera donc pas, lavenir, un critre indpendant, la capacit
dintgration de lUnion devra nanmoins tre prise en considration. Or, ce critre recle
deux inconvnients, si lon se place du ct des pays candidats :
- en premier lieu, il sagit dun critre fonctionnel. Autrement dit, les institutions de
lUnion europenne pourra le manipuler leur guise et en tirer les consquences
quelles souhaitent ;
- en second lieu et surtout, ce critre introduit pour la premire fois un paramtre
indpendant de la performance des pays candidats. Mme si le pays en question arrive
conclure les ngociations d'adhsion et appliquer avec vigueur tout l'acquis
communautaire, la perspective d'adhsion devient alatoire. Le processus d'adhsion
change donc de nature. L'introduction de ce critre d'absorption sera certainement
nuisible au lien entre les rformes domestiques et la perspective d'adhsion. Aussi
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sera-t-il beaucoup plus difficile pour la classe politique des pays candidats de former
une coalition nationale autour d'un projet d'adhsion devenu bien plus incertain10.
c. LUnion europenne : communaut territoriale ou communaut de valeurs ?
Une lecture du trait parat fournir un lment de rponse cette pineuse question. Lancien
article 237 CEE disposait que Tout Etat europen peut demander devenir membre de la
Communaut .
Lactuel article 49 TUE prvoit, quant lui, que Tout Etat europen qui respecte les
principes noncs larticle 6, paragraphe 1, peut demander devenir membre de lUnion .
Il faut donc en dernier lieu se tourner vers larticle 6, 1, UE. Selon cette disposition,
LUnion est fonde sur les principes de la libert, de la dmocratie, du respect des droits de
lhomme et des liberts fondamentales, ainsi que de lEtat de droit, principes qui sont
communs aux Etats membres .
La comparaison de ces dispositions suggre que la Communaut europenne tait une
communaut territoriale tandis que lUnion serait une union dEtats partageant les mmes
valeurs. Cette vision manichenne cadre mal avec la ralit dans la mesure notamment o les
articles 237 CEE et 49 TUE se rfrent, lun comme lautre, la notion d Etat europen .
Il est donc crucial de dfinir cette notion d Etat europen . Pour cela, il faut se demander
ce quest lEurope ou, plus exactement, quelles sont les frontires de lEurope.
Les frontires gographiques de lEurope sont malaises et fluctuantes . Cest un fait
indiscutable. Lembarras prouv par les gographes dsireux de dlimiter lEurope tient ce
quil nexiste pas de continent europen proprement parler. Un continent tant une vaste
tendue de terre quon peut parcourir sans traverser la mer, lEurope ne correspond pas
cette dfinition. Il ne sagit donc pas dun continent mais dune presqule. Cette donne
gographique complique singulirement la dlimitation du territoire europen lest. Les
10Dans ce cas-l, ce n'est qu'aprs la clture des ngociations techniques, l'tape de la conclusion du Traitd'adhsion que le critre d'absorption entrera en jeu.Ce n'est qu' ce stade que l'Union sera en mesure de dire si elle est prte pour un autre largissement ou non ;alors que le pays candidat a dj fait le travail ncessaire pour s'aligner dans tous les domaines avec l'UE.Comment dire non a un pays qui a su remplir toutes les conditions qui lui sont imposes par le processusd'adhsion ? Quel sera le cot politique d'un non si tardif tant pour le pays en question que pour l'Europe ?Il est par consquent opportun de se demander si le moment choisi pour l'application de ce critre n'est pasquelque peu erron. Ne serait-il pas plus facile, plus commode et certainement plus correct que d'appliquer cecritre avant le dbut au lieu de la fin des ngociations, et de ne dbuter les ngociations qu'aprs avoir eu la
certitude que le critre d'absorption ne posera pas problme ? Aprs tout, n'est-ce pas le cas pour les critres politiques de Copenhague que les pays candidats sont tenus de remplir avant mme l'ouverture desngociations ?
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difficults se focalisent sur les limites orientales de lEurope en labsence de frontire
"naturelle".
Cest lhistorien et gographe de lempereur Pierre Le Grand, Vassili Tatichtchev, qui a
propos lOural comme limite de lEurope. Ce choix est loin dtre dict par la gographie
puisque le franchissement de lOural ne pose aucune difficult. Ce projet lgitime cependant
la volont politique de Pierre Le Grand deuropaniser lEmpire. En repoussant plus lest les
frontires de lEurope, Moscou cesse dtre la priphrie de cet espace. La cration de Saint-
Ptersbourg en 1703 et sa conscration lorsquelle devient capitale de lEmpire illustrent cette
volont affirme deuropaniser la Russie. Bien que factice ou arbitraire, cette frontire de
lEurope est encore admise et continue tre enseigne.
Les dfaillances de la gographie conduisent apprhender lUnioneuropenne comme un espace politique. Llargissement de lUnion europenne replace au
premier plan la question de la dfinition des frontires de lEurope et rvle le caractre
politique du choix de cette frontire. Il est vident que la gographie ne dtermine rien
de faon absolue (J.-B. Duroselle). Les critres dadhsion lUnion, dgags lors du
Conseil europen de Copenhague en juin 1993, insistent dailleurs davantage sur des
conditions dordre politique et idologique, telle que lobligation de respecter les droits de
lhomme et la dmocratie, que sur des donnes gographiques. On en oublierait presque queladhsion suppose aussi davoir la qualit dEtat europen ! Evoquer le rejet de la
candidature du Maroc en 1987.
LUE apparat ainsi comme le club des dmocraties europennes garantes de la paix
perptuelle. Cest la raison pour laquelle, forte de son exprience, elle souhaite slargir
de nouveaux Etats. Le problme est que les candidatures manent dsormais de pays dont
lappartenance lEurope est de plus en plus sujette caution.
Le Conseil europen de Helsinki de dcembre 1999 a ainsi reconnu la Turquie le statutofficiel de candidat bien que 97 % de son territoire se situe en Asie . La Turquie est
cependant prsente depuis le milieu du 14me sicle en Europe et occupa les Balkans pendant
plus de quatre sicles. En prenant cette dcision, les Quinze confirmaient la perspective
ouverte par laccord dassociation de 1963 aux termes duquel lappui accord par la
Communaut conomique europenne aux efforts du peuple turc pour amliorer son niveau
de vie facilitera ultrieurement ladhsion de la Turquie la Communaut .
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LUnion europenne : une organisation vocation universelle ? Ds lors que lon considre que le but, oudu moins lune des vertus principales, de lUnion europenne est de garantir la paix du continent, il est lgitimede chercher en repousser le plus loin possible les frontires.LUnion europenne a dj mis en place un processus de stabilisation et dassociation dans les Balkans. Ceprocessus est la fois bilatral et rgional. Il sagit de crer un climat de confiance entre les Rpubliques de lex-Yougoslavie qui sera seul mme de stabiliser la rgion et de leur apporter la croissance conomique. La
perspective de rejoindre terme la grande famille des dmocraties europennes est une source de motivationsupplmentaire.
2. La dlicate question du retrait de lUnion europenne
a. La suspension des droits dun Etat membre
Le respect des droits fondamentaux est dsormais une condition, expressment prvue par le
trait, ladmission dans lUnion europenne. Il est galement devenu une condition
dappartenance lUnion. La violation des engagements pris par les Etats en la matire est
en effet susceptible dtre sanctionne.
Article 7 TUE
1. Sur proposition motive d'un tiers des tats membres, du Parlement europen ou de la Commission,le Conseil, statuant la majorit des quatre cinquimes de ses membres aprs avis conforme duParlement europen, peut constater qu'il existe un risque clair de violation grave par un tat membrede principes noncs l'article 6, paragraphe 1, et lui adresser des recommandations appropries.Avant de procder cette constatation, le Conseil entend l'tat membre en question et peut, statuantselon la mme procdure, demander des personnalits indpendantes de prsenter dans un dlai
raisonnable un rapport sur la situation dans l'tat membre en question.Le Conseil vrifie rgulirement si les motifs qui ont conduit une telle constatation restent valables.2. Le Conseil, runi au niveau des chefs d'tat ou de gouvernement et statuant l'unanimit sur
proposition d'un tiers des tats membres ou de la Commission et aprs avis conforme du Parlementeuropen, peut constater l'existence d'une violation grave et persistante par un tat membre de
principes noncs l'article 6, paragraphe 1, aprs avoir invit le gouvernement de cet tat membre prsenter toute observation en la matire.3. Lorsque la constatation vise au paragraphe 2 a t faite, le Conseil, statuant la majoritqualifie, peut dcider de suspendre certains des droits dcoulant de l'application du prsent trait l'tat membre en question, y compris les droits de vote du reprsentant du gouvernement de cet tatmembre au sein du Conseil. Ce faisant, le Conseil tient compte des consquences ventuelles d'unetelle suspension sur les droits et obligations des personnes physiques et morales.
Les obligations qui incombent l'tat membre en question au titre du prsent trait restent en tout tatde cause contraignantes pour cet tat.4. Le Conseil, statuant la majorit qualifie, peut dcider par la suite de modifier les mesures qu'il a
prises au titre du paragraphe 3 ou d'y mettre fin pour rpondre des changements de la situation qui l'aconduit imposer ces mesures.5. Aux fins du prsent article, le Conseil statue sans tenir compte du vote du reprsentant dugouvernement de l'tat membre en question. Les abstentions des membres prsents ou reprsents nefont pas obstacle l'adoption des dcisions vises au paragraphe 2. La majorit qualifie est dfiniecomme la mme proportion des voix pondres des membres du Conseil concerns que celle fixe l'article 205, paragraphe 2, du trait instituant la Communaut europenne.Le prsent paragraphe est galement applicable en cas de suspension des droits de vote conformmentau paragraphe 3.
6. Aux fins des paragraphes 1 et 2, le Parlement europen statue la majorit des deux tiers des voixexprimes, reprsentant une majorit de ses membres.
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Larticle 7 TUE prvoit la possibilit de suspendre certains des droits qui dcoulent pour
un Etat membre de sa participation lorganisation en cas de violation grave et
persistante des principes noncs larticle 6, paragraphe 1, TUE. Ces principes sont
ceux de la libert, de la dmocratie, du respect des droits de lhomme et des liberts
fondamentales, ainsi que de lEtat de droit.
Larticle 7 TUE na donc vocation tre mis en uvre quen prsence de crises
"constitutionnelles" graves, de drapages importants au niveau des principes
dmocratiques. A priori, ce dispositif ne devrait pas sappliquer des cas isols de
violations de droits individuels.
Cest pour cette raison que lenclenchement de la procdure est soumis un triple verrouillage :
- le Conseil doit tre saisi dune proposition manant dun tiers au moins des Etats membres ou de laCommission ;- le Conseil, exceptionnellement compos des chefs dEtat ou de gouvernement, se prononce,
lunanimit, sur lexistence dune violation grave et persistante ;- le Parlement europen doit ensuite mettre un avis conforme, adopt la majorit des deux tiers des
voix exprimes reprsentant une majorit de ses membres.
Lexigence dune violation grave et persistante est tonnante. La persistance de la
violation renvoie son caractre rptitif, son inscription dans le temps. Or, une
violation grave mriterait dtre sanctionne rapidement, sans quil soit ncessaire dobserver une
rcidive et une certaine dure.Le trait prvoit la suspension du droit de vote du reprsentant du gouvernement dun
Etat membre au Conseil. Il sagit l indniablement dun instrument de dissuasion, voire
de sanction. La formulation employe exclut que lEtat soit priv de sa reprsentation
dans les autres institutions. LEtat ne perd pas son commissaire au sein de la
Commission, ni ses eurodputs au Parlement europen. Cette suspension de droits devra
viter des sanctions qui pnaliseraient davantage la population concerne que ltat
coupable de violations. Le Conseil doit imprativement tenir compte des consquencesventuelles dune telle suspension sur les droits et obligations des personnes physiques et
morales.
Dans une analyse optimiste, ce mcanisme peut tre considr comme un progrs sur la
voie de la Communaut de droit. Il est en effet la preuve du caractre volu de
lorganisation, capable de se doter des moyens de faire respecter les valeurs fondamentales
sur lesquelles elle repose.
Dans une vision plus pessimiste, la clause de suspension des droits, du simple fait de soninsertion dans les traits, est un motif dinquitude. Il nexistait pas, dans les traits
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originaires, de clause de suspension des droits en cas de violation par un Etat partie des
liberts fondamentales. Cela tient, au moins en partie, ce quune telle disposition na pas
t juge ncessaire ce moment-l. Linsertion dune clause de suspension des droits dun
Etat membre signifie que lhypothse dune violation massive des droits fondamentaux par
un Etat membre est dsormais envisage. Introduit l'aube de l'entre dans l'organisation
de nouveaux Etats membres, issus majoritairement d'Europe de lEst, larticle 7 TUE est un
signal clair leur intention.
Le trait de Nice a innov en introduisant un mcanisme dalerte prcoce. Les institutions de
lUnion disposent dsormais dun outil permettant expressment une intervention rapide et
prcoce, la fois prventive et dissuasive. Il est louable quune raction collective puisse
sorganiser en amont, ds la survenance du risque clair de violation grave par un tatmembre .
b. Le retrait dun Etat membre
1) Le droit positif
Peut-on dduire de la clause de non-limitation de la dure des traits l'absence de droit de
retrait ? Certainement pas car ce serait confondre deux questions bien distinctes qui sont, d'une
part, la prdtermination ou non d'une dure de fonctionnement et, d'autre part, le droit pour un
tat de mettre fin sa participation. Ainsi, le fait qu'on choisisse de ne pas limiter la dure de
fonctionnement d'un trait ne signifie pas l'impossibilit de s'en retirer pendant cette priode de
fonctionnement. Il y a l diffrence entre la volont de crer des institutions permanentes et
l'obligation d'y rester.
Par consquent, le droit de retrait ne peut en aucun cas tre considr comme incompatible avec un
trait dure illimite.
En ce qui concerne les pratiques d'un droit de retrait, les lments sont encore plus significatifs
car ces pratiques, actives ou d'abstention, rvlent la conviction de chacun des membres
lorsqu'est revendiqu un tel droit. La premire fois qu'un tat membre amorce une procdure de
retrait intervient en 1975. Le parti travailliste britannique btit son succs aux lections
lgislatives de 1974 sur une dnonciation des conditions d'adhsion du Royaume-Uni
l'Europe communautaire. Pris au pige des promesses de rengociation faites aux lecteurs et se
heurtant, une fois les lections gagnes, au refus catgorique de ses partenaires europens, le
gouvernement travailliste dcide d'organiser un rfrendum offrant aux lecteurs soit de confirmer
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l'adhsion, soit de l'abroger et de dcider le retrait du Royaume-Uni. Le 5 juin 1975, 67,2 % des
votants se prononcent positivement et le Royaume-Uni reste membre de l'Europe
communautaire. Il n'y a donc pas de retrait britannique.
Sur le plan juridique, le seul fait d'organiser un tel rfrendum, offrant un choix de retrait
implique ncessairement la conviction de la part du Royaume-Uni qu'il lui est possible de dcider
de se retirer. De mme, il nest pas ngligeable qu'aucun des autres tats membres ni
aucun des organes communautaires nait contest lexercice rfrendaire britannique. Pas une
voix ne slve pour affirmer que le retrait est interdit du point de vue du droit communautaire.
En coulisse, chaque administration se prpare aux deux issues. []La pratique de l'ensemble des
acteurs de l'Europe communautaire rvle donc une acceptation du processus de retrait entrepris
par un tat membre. Chacun reconnat ainsi qu'il existe un droit unilatral de dcider de rvoquer
son appartenance l'ensemble communautaire mme si aucune disposition n'y fait explicitement
rfrence dans les traits communautaires.
Le retrait dun Etat est voqu une seconde fois dans l'histoire de l'Europe communautaire lorsque
le Danemark, en 1992, tire les consquences de l'chec du premier rfrendum relatif la
ratification du Trait de Maastricht. Est publi le 9 octobre un Livre blanc dans lequel le
gouvernement danois prsente les huit options qu'il envisage la suite du rfrendum ngatif
. Or, l'une de ces options est le retrait du Danemark, sans qu'il soit prcis que cette solution
ncessite l'accord des autres tats membres. Il est en effet envisag que le Danemark quitte la
Communaut et adhre au Trait instituant l'EEE pour permettre au Trait sur l'Union europenne
d'entrer en vigueur entre les onze autres tats membres.
Face cette position, et comme en 1975, il est significatif qu'aucun tat membre ni aucun
organe de l'Europe communautaire n'ait exclu cette option de retrait. Elle intervient certes dans
un contexte particulier mais signifie une fois de plus que la sortie unilatrale de l'Europe
communautaire n'est pas perue comme interdite.
2) Le dispositif prvu par le trait tablissant une Constitution pour lEurope
Article I-60Le retrait volontaire de l'Union
1. Tout tat membre peut dcider, conformment ses rgles constitutionnelles, de se retirer de l'Union.2. L'tat membre qui dcide de se retirer notifie son intention au Conseil europen. la lumire desorientations du Conseil europen, l'Union ngocie et conclut avec cet tat un accord fixant les modalitsde son retrait, en tenant compte du cadre de ses relations futures avec l'Union. Cet accord est ngociconformment l'article III-325, paragraphe 3. Il est conclu au nom de l'Union par le Conseil, statuant lamajorit qualifie, aprs approbation du Parlement europen.
3. La Constitution cesse d'tre applicable l'tat concern partir de la date d'entre en vigueur del'accord de retrait ou, dfaut, deux ans aprs la notification vise au paragraphe 2, sauf si le Conseil
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europen, en accord avec l'tat membre concern, dcide l'unanimit de proroger ce dlai.4. Aux fins des paragraphes 2 et 3, le membre du Conseil europen et du Conseil reprsentant l'tatmembre qui se retire ne participe ni aux dlibrations ni aux dcisions europennes du Conseil europen etdu Conseil qui le concernent.La majorit qualifie se dfinit comme tant gale au moins 72 % des membres du Conseil reprsentantles tats membres participants, runissant au moins 65 % de la population de ces tats.5. Si l'tat qui s'est retir de l'Union demande adhrer nouveau, sa demande est soumise la procdurevise l'article I-58.
Au moment o l'on opre un saut qualitatif vers une Constitution, on organise les
scessions ! .
La clause de retrait a t dfendue la fois par des europhiles et des eurosceptiques. Dans le
premier camp, l'un des objectifs poursuivis par l'insertion de cette clause tait de contrer les
seconds en affirmant que l'Union europenne n'est pas une prison. Pour les europhiles, cette
clause ne constituait qu'une reconnaissance formelle, qui ntait pas destine recevoir
dapplication, d'o les propositions visant entourer le droit de retrait de conditions strictes. Les
eurosceptiques taient, en revanche, attachs cette clause dans l'espoir de pouvoir la faire jouer le
moment venu. Enfin, dautres dfenseurs de la clause estimaient quil ne s'agissait que de la
formalisation d'un droit existant dj.
S'ils souhaitaient majoritairement permettre un droit de retrait, les conventionnels
entendaient empcher tout retrait unilatral. Ce souhait est toutefois quelque peu battu en
brche par l'article 60, alina 3, du trait tablissant une Constitution pour lEurope : La
Constitution cesse d'tre applicable l'Etat concern partir de la date d'entre en vigueur
de l'accord de retrait ou, dfaut, deux ans aprs la notification vise au paragraphe 2 .
Autrement dit, un retrait mme en cas d'chec des ngociations entre l'Etat qui souhaite se
retirer de l'Union, ce qui ressemble donc fort un retrait unilatral, semble possible.
Le droit de retrait est inhrent la nature de l'intgration communautaire. la fois Europe des
tats et Europe des peuples, l'Union europenne ne peut se transformer en union force et ses
organes auraient bien du mal dnier ce droit.
Les retraits sont donc possibles mais ni probables ni souhaitables.
II. LUnion europenne en qute de qualification
A. La nature des traits11
11 Marianne DONY, De Rome Rome : du trait la Constitution ?, in E. Bribosia et M. Dony (d.),Commentaire de la Constitution de lUnion europenne, 2005, p. 431, spc. p. 440 444.
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Les traits instituant les Communauts europennes sont demeurs dauthentiques traits. Ils
ne sauraient tre assimils une vritable constitution, et ce quelle que soit leur
dnomination. Le trait tablissant une Constitution pour lEurope continuait donc, lui aussi,
dtre un simple trait international.
La rfrence constitutionnelle entendait cependant associer la construction europenne un
vocable traditionnellement rserv lEtat. Cette rfrence visait galement souligner le
degr lev d'intgration auquel parvient lUnion europenne. Dordinaire, on considre, en
effet, quun trait rgit une organisation internationale tandis quune Constitution organise une
communaut politique. La formule "trait tablissant une Constitution pour l'Europe" tait ainsi
cense reflter l'originalit de l'entreprise europenne.
Lide a t avance que le trait pourrait tre le procd technique permettant de passer
un systme dot dune vritable constitution. Une fois conclu, le trait se serait effac pour
faire place la constitution qu'il vhiculait. Bien que sduisante, cette proposition doit
nanmoins tre carte dans la mesure o le trait ne peut pas tre assimil une vritable
constitution. Il est, en effet, incontestable que les Etats demeurent les matres du trait. Leur
ratification unanime continue dtre exige pour qu'une rvision devienne effective.
LUnion ne dispose par consquent toujours pas dune procdure de rvision autonome,
cest--dire dune possibilit de rvision des traits qui ne requerrait pas laccord unanime
des Etats. Or, une entit disposant dune constitution digne de ce nom a la facult de
modifier sa loi fondamentale par ses propres moyens. Cette capacit fait actuellement
dfaut lUnion europenne.
Le trait tablissant une Constitution pour lEurope restait un projet hybride, car ce
texte tait le fruit d'un compromis entre des visions opposes de la finalit de la
construction europenne.
B. Linsaisissabilit de la nature juridique de lUnion europenne
12
La question de la nature juridique de lUnion est un des ponts aux nes du droit
communautaire, une sorte de puits sans fond pour la doctrine. Cette recherche de qualification
de la nature de lUnion nest cependant pas dnue dintrt. En effet, si lon tait capable de
rpondre cette question, on disposerait dun modle de rfrence pour lanalyse et il serait
possible de lutiliser pour faire voluer le systme et en combler les lacunes.
Jusqu prsent, la dfinition de la nature juridique de lUnion est obscurcie par le fait que
12 J.-P. JACQU, Back to Philadelphia,Revue du March commun et de lUnion europenne, n 463, dcembre2002, p. 661 ;Droit institutionnel de lUnion europenne, Paris, Dalloz, 3me d., 2004, p. 92-99.
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lUnion est un ensemble qui comporte la fois un pilier communautaire ou intgr et deux
piliers intergouvernementaux. Or, si les Communauts ont une personnalit propre, lUnion,
en tant que telle, parat en tre prive. La fusion de lUnion et de la Communaut opre par
la constitution apportait cet gard une clarification utile. Cette avance sera dailleurs
conserve par le trait simplifi.
Depuis les dbuts du processus dintgration europenne, le dbat sur lavenir de celle-ci a
oppos fdralistes et anti-fdralistes. Le succs de la dnomination dUnion europenne
tient prcisment son caractre neutre. Lexpression est suffisamment vague pour permettre
dobtenir un consensus sans trancher au fond le dbat sur la nature de lUnion. On peut
dailleurs se demander sil ny a pas ici un problme de mthode. Faut-il demeurer dans le
flou pour que le projet europen conserve les faveurs de tous ? Ne vaudrait-il pas mieux
sentendre une bonne fois pour toute sur le rsultat auquel on souhaite parvenir afin den
dduire notamment les consquences institutionnelles qui simposent. Une fois de plus, on a
limpression que lUnion europenne ne procde pas de faon rationnelle, comme cela a dj
t le cas lorsque llargissement a prcd lapprofondissement.
Les responsables politiques vitent autant que possible dutiliser les termes de fdration et
confdration. Cela leur permet de retarder lchance, cest--dire le moment o il faudra
dterminer o doit se situer le point dancrage de la souverainet dans lUnion. Les Etatsmembres demeureront-ils souverains ou bien transfreront-ils leur souverainet un pouvoir
central ? Ce dbat trouve sa source dans une vision traditionnelle, selon laquelle la
souverainet serait une et indivisible et ne pourrait se situer quau niveau central ou au sein
des tats membres. Il en rsulte quune dcision sur lavenir de lUnion devrait oprer un
choix entre fdration et confdration puisquil nexisterait pas de position intermdiaire. Or
la ralit semble contredire largement cette vue. LUnion nest certes pas un tat fdral, mais
elle prsente nanmoins des caractristiques qui vont bien au-del de la confdration. Laralit a donc dpass les constructions doctrinales qui refusent toute formule autre que la
fdration et la confdration.
Cette vision doctrinale classique de la souverainet une et indivisible parat dsormais
inadapte. Les analyses contemporaines reposent sur des formes acheves de construction
fdrale, cest--dire sur des Etats fdraux parvenus maturit. Or, ces formes ont t
prcdes de priodes de ttonnement et ont volu au gr de lhistoire de chaque peuple. La
construction de lUnion se situe prcisment, lheure actuelle, dans une phase volutive.
Elle est en mouvement constant, ainsi quen attestent la rcurrence des rvisions des traits. Il
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est donc maladroit de comparer lUnion aux tats fdraux actuels. La comparaison prend, en
revanche, tout son sens en amont. Il faut donc comparer le stade actuel de dveloppement de
lUnion avec les Etats fdraux tels quils taient au moment de llaboration des
constitutions fdrales. On serait surpris de constater quau moment de la constitution de
lAllemagne ou des Etats-Unis, des thses favorables des formules intermdiaires ont t
dveloppes. Ces thses se focalisaient sur lide du partage de souverainet. Dans son oeuvre
de construction de concepts abstraits, la doctrine a parfois tendance purer la ralit quelle
tudie et oublier que les situations juridiques se construisent et se consolident lentement. Or,
aujourdhui, limpossibilit de trouver un accord, sur un plan politique, sur une solution
fdrale ou confdrale a conduit certains se prononcer en faveur dune formule interm-
diaire sous la forme dun nouveau concept, celui de fdration dtats-nations.
On peut se montrer sceptique lgard dune telle qualification en estimant quelle ne fait que
contourner la difficult sans rgler le problme de fonc. On peut cependant essayer de voir si
cette terminologie permet de traduire fidlement lune des visions possibles du futur de
lUnion.
Si lon se rapporte aux travaux de la Convention de Philadelphie, on constate que le problme
auquel avaient faire face les pres fondateurs est le mme que celui qui se trouve
aujourdhui au cour du dbat sur lavenir de lUnion. Comment construire un systme qui
prserve la souverainet des tats tout en instituant un gouvernement central efficace ?
Si les Etats-Unis constituent aujourdhui un Etat fdral, le compromis fondateur tait bien
plus ambigu et laissait une large place des volutions. A lorigine, les tats-Unis taient
conus comme un rgime mixte reposant sur un partage de souverainet entre les tats
membres et le gouvernement national. La Constitution ne fait dailleurs pas rfrence la
notion dtat pour qualifier lensem