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Quelques éléments de réflexion sur les bonifications de pension pour enfants

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Quelques éléments de réflexionsur les bonifications de pension pour enfants

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Alors que des réflexions sont conduites au seindu Conseil d’orientation des retraites sur les

droits familiaux et conjugaux, il semble utile deresituer celles-ci dans le cadre plus général de lapolitique familiale : quel supplément de revenudisponible convient-il de verser aux parents toutau long du cycle de vie, par le biais des pres-tations familiales, des prestations logement, del’impôt et du système de retraite ? Il existe unlarge consensus pour compenser, au moins enpartie, le coût de l’enfant durant la période ducycle de vie où les enfants sont à charge. Il estégalement possible de justifier des avantages liésaux enfants qui seraient accordés tout au long ducycle de vie, même lorsque les enfants ne sontplus à charge : compenser la moindre accumula-tion de patrimoine, encourager la fécondité (cequi contribue notamment à assurer l’équilibrefutur du système de retraite)… Néanmoins, il peutsembler logique que les avantages accordés autitre des enfants soient plus importants durant lapériode du cycle de vie où les enfants sont àcharge. L’objet de cet article est de livrer une ana-lyse du dispositif des majorations de pension pourtrois enfants en éclairant tout particulièrement ladimension intertemporelle des transferts sur uncycle de vie.

Un dispositif variablesuivant les régimes

Institué en 1945 à la création du Régime général,le dispositif de bonifications de pension pourenfants existait déjà dans les régimes spéciaux. Enraison du contexte démographique après laSeconde Guerre mondiale, cette mesure avaitpour objectif principal d’encourager la natalité. Ils’agit d’une majoration de pension, attribuée auxassurés (aux hommes comme aux femmes) qui ontélevé au moins trois enfants. Cette majoration estproportionnelle au montant de la pension et nonimposable. Ses modalités sont variables selon les

régimes. Dans la Fonction publique, la majorationest progressive en fonction du nombre d’enfants.Elle est de 10 % pour trois enfants et 5 % en suspour tout enfant supplémentaire sans limitationautre que celle du dernier traitement de base brut.Les dispositions pour le secteur privé sont diffé-rentes. Dans le régime de base, la majoration estde 10 % mais ne varie pas avec le nombred’enfants. Les régimes complémentaires ont desprestations encore différentes : pour l’Associationgénérale des institutions de retraite des cadres(AGIRC), la majoration est désormais de 8 % avecune augmentation de 4 % par enfant supplémen-taire dans la limite de 24 %. Pour l’Associationdes régimes de retraite complémentaire (ARRCO),la majoration est de 5 % pour trois enfants ou plusélevés. Ces différences de réglementation, appli-quées à des niveaux différents de pensions, setraduisent par des montants et donc des coûtsglobaux pour les régimes qui ne sont pas toujoursen proportion avec les effectifs.

Cette bonification, auparavant supportée directe-ment par chaque régime de retraite, est financéedepuis 1994 par le fonds de solidarité vieillesse(FSV) pour l’avantage accordé aux retraités durégime général et ceux des régimes alignés. LeFSV a dépensé à ce titre 3,8 milliards d’euros en2007. La loi de financement de la Sécurité socialepour 2001 a posé le principe d’une prise encharge progressive par la Caisse nationale desallocations familiales (CNAF) de la majorationpour enfants telle qu’elle est supportée par le FSV.Le choix de l’imputation financière de cet avan-tage à la CNAF a été motivé en loi de finance-ment de la Sécurité sociale par le fait qu’il relèvede la politique familiale. Il a ainsi été considéréqu’il s’agissait d’allocations familiales différées,venant compenser un manque d’épargne lié à lacharge d’enfants. La participation de la CNAF àcette dépense du FSV a été de 15 % en 2001,30 % en 2002 et de 60 % entre 2003 et 2008. En2007, la participation de la CNAF à ce titre était de

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Quelques éléments de réflexionsur les bonifications de pension pour enfants

Hélène Paris CNAF – Directrice des statistiques, des étudeset de la recherche.

Mots clés : Retraite – Pensions de retraite – Droit de lafamille

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2,3 milliards d’euros. La loi de financement de laSécurité sociale de 2009 a prévu d’augmenter pro-gressivement la participation de la CNAF pour laporter à 100 % en 2011.

Selon le rapport d’activité du FSV de 2007, oncompte, fin 2006, 7,6 millions de bénéficiaires dela majoration de pension pour enfant parmi lesassurés du régime général et des régimes alignés.Parmi l’ensemble des retraites versées, la part desbénéficiaires de la majoration pour enfants estainsi de l’ordre de 43 %. Les montants annuelsmoyens versés par personne font apparaître entreles régimes, après intégration des majorationsservies aux agents des industries électriques etgazières (IEG), des sommes qui s’échelonnentde un à près de six : 191 euros pour les salariésagricoles, 585 euros pour le régime général enMétropole et 1 088 euros pour les agents des IEG.Ces différences s’expliquent par les écarts exis-tants entre les montants moyens des pensions desrégimes concernés, le montant de la majorationpour enfants étant proportionnel au montant de lapension de base. Le montant annuel moyen globalpar personne par régime est de 483 euros en2006.

Les informations fournies par la Caisse nationaled’Assurance vieillesse (CNAV) (1) apportent quelquesprécisions sur le dispositif : au sein du régimegénéral, on compte parmi les bénéficiaires d’undroit propre 43 % d’assurés qui ont une bonifi-cation de pension, pour un montant moyen annuelde 538 euros en 2004. Ce montant moyen annuelest de 652 euros pour les hommes et de 427 eurospour les femmes : cet écart de 53 % ne fait querefléter la différence de pension entre les deuxpopulations bénéficiaires, dans la mesure où labonification est proportionnelle à la pension. LaCNAV relève, par ailleurs, que le taux de béné-ficiaires de la bonification au sein de chaque géné-ration est relativement stable pour les hommescomme pour les femmes, de l’ordre de 45 %. Onnote cependant que la part des bénéficiaires de labonification est plus faible chez les femmes desplus anciennes générations (naissances de 1915 à1930), en raison d’un taux d’activité moindre pourcelles ayant au moins trois enfants. À partir de lagénération 1940, les taux sont plus faibles – hommeset femmes – mais cela tient avant tout au fait queces générations ne sont pas complètes en termes deretraités. Pour les droits dérivés, on compte 51 %des retraités au sein du régime général qui ont unebonification de pension. Le montant annuel moyendu droit dérivé au titre de la bonification depension est de 289 euros en 2004 : 161 euros pourles hommes et 294 euros pour les femmes.

Compenser un déficit d’épargneou gratifier le fait d’avoir élevédes enfants ?

Les dispositifs de droits familiaux dans le systèmede retraite français, au sein desquels figure la boni-fication de pension pour enfant, visent générale-ment l’un ou l’autre des objectifs suivants, voireparfois les trois :

• encourager la natalité ;• gratifier sous forme de droits supplémentaires àla retraite les parents ayant eu des enfants, futurscotisants des régimes de retraite et contribuantainsi au renouvellement des générations. La boni-fication de pension de 10 % pour trois enfantsnotamment peut relever de cette logique ;• jouer un rôle de compensation. On suppose quela présence des enfants peut ralentir l’accumula-tion d’actifs en vue de la retraite, en ayant un effetsur la carrière professionnelle (et donc sur lesdroits dans le régime) et/ou sur la constitutiond’un patrimoine : la bonification de pension de10 % pour trois enfants et plus, accordée auxdeux parents, peut viser à corriger globalement ceteffet.

Quelle est la justification première aujourd’huipour les bonifications de pensions, plus desoixante ans après leur conception ? L’examendans le détail des particularités du dispositif peutrendre assez perplexe en raison des nombreusesquestions qu’elles soulèvent :

1 - Pourquoi ce soutien pour les familles d’aumoins trois enfants seulement ?Si l’objectif principal est de gratifier les parentsd’avoir eu des enfants, futurs cotisants du système,on comprend mal pourquoi les parents de deuxou un enfant(s) ne seraient pas également prisen compte… quitte à valider le principe d’un« bonus » par enfant. L’objectif de compensationpour déficit d’épargne ne justifie guère mieuxl’exclusion des familles de moins de trois enfants,à moins de considérer que seules les famillesnombreuses sont affectées par ce déficit d’épargne.

2 - Comment gérer la plus grande instabilité ausein des familles ? Pourquoi ne pas conditionnerce soutien à la prise en charge effective desenfants par les parents ?La notion de « parents qui ont eu ou élevé aumoins trois enfants » peut en pratique devenir deplus en plus complexe… Aujourd’hui, les enfantsrecueillis ouvrent droit à la majoration s’ils ont étéélevés pendant au moins neuf ans avant l’âge de16 ans par l’intéressé et à sa charge ou à celle de

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(1) Voir Contribution de la CNAV pour le Conseil d’orientation des retraites du 25 janvier 2008 « Masses globales attribuéesen 2004 par le régime général au titre de la bonification de pension », document de travail n° 5, étude n° 2008-010.

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son conjoint. Que doit-il en être pour les famillesrecomposées dont certaines pratiquent la gardealternée ? Comment faut-il considérer les famillesqui ont gardé trois enfants « à mi-temps » ? Est-ilvraiment justifié d’ouvrir le droit à la majoration àdes personnes qui ont eu trois enfants sans enavoir assumé la charge ?

3 - Pourquoi accorder un soutien proportionnel aurevenu des bénéficiaires ?Le dispositif de la majoration de pension se voitassigner un rôle de redistribution horizontale endirection des familles nombreuses… Mais celamérite d’être bien étudié : car des mécanismes deredistribution horizontale existent égalementlorsque les enfants sont encore à la charge deleurs parents, le plus souvent durant leur vieactive. Quelle est la cohérence globale de toutcela ? S’il s’agit de rétribuer les parents qui ont eudes enfants, comment justifier une « gratifi-cation » croissante en fonction des revenus d’ori-gine ? S’il s’agit de compenser les familles pourdéficit d’épargne en vue de la retraite, est-il logi-que d’apporter les soutiens les plus importantspour les plus hauts revenus, pour lesquels lestaux d’épargne sont globalement plus élevés ?D’aider tout spécialement les couples qui ont étébiactifs ?

4 - Pourquoi la majoration de pension n’est-ellepas soumise à l’impôt sur le revenu ?Cette majoration constitue clairement un supplé-ment de pension. Pourquoi dès lors adopter unrégime fiscal différent suivant différentes portionsd’un même revenu de remplacement ? Cettedisposition paraît d’autant plus discutable qu’ellene fait qu’accroître la nature anti-redistributive dela mesure.

On l’a vu : le choix de l’imputation financière decet avantage à la CNAF a été motivé par le faitqu’il est censé relever de la politique familiale. Ila ainsi été considéré qu’il s’agissait là d’allo-cations familiales différées, venant compenser unmanque d’épargne lié à la charge d’enfants.Cependant la croissance de cette « allocation »avec le revenu est en contradiction avec le prin-cipe fondamental de versement forfaitaire desallocations familiales. En effet, la bonification depension est fonction croissante de la pension,différenciée selon le régime, et favorise les cou-ples biactifs à hauts revenus. On peut rappeler icila vocation des prestations familiales qui appor-tent un soutien aux familles, d’autant plus marquéque ces dernières comportent au moins troisenfants. L’objectif poursuivi est précisément deréduire, dans une logique de compensation, lecoût des enfants au moment où ils sont à la chargede leurs parents, c’est-à-dire en principe durant lavie active de ces derniers.

Un mécanisme puissant de redistribution hori-zontale est par ailleurs à l’œuvre pendant lapériode au cours de laquelle les enfants sont àcharge des parents : c’est l’effet du quotient fami-lial, spécialement renforcé à partir du troisièmeenfant. Celui-ci devrait en principe contribuer àcompenser les éventuels défauts d’épargne aucours de la vie active. Quelle logique y-a-t-il àajouter un nouvel élément de redistribution hori-zontale ex-post, une fois les enfants devenusadultes et autonomes ? Il s’agit finalement de biens’interroger sur le moment, au cours du cycle devie, le plus adapté pour le versement d’aidesfamiliales : lorsque les enfants sont à la chargedes parents ou bien après ?

Une analyse à partir de cas typessur cycle de vie

Les questions qui précèdent montrent qu’il estutile d’avoir une vision globale des aides verséesaux familles tout au long du cycle de vie : celapermet en effet de mieux apprécier les effets desdifférents dispositifs et leurs cohérences entreeux. Pour contribuer à la réflexion, une analyse àpartir de cas types est ici proposée sur cycle devie. Ce type d’étude est naturellement nécessaire-ment simplificateur, car on n’étudie que des caspurement théoriques et en nombre limité, et onentretient par ailleurs la « fiction » selon laquellela législation actuelle en vigueur est celle qui aprévalu pendant les 40 dernières années. Le butpremier de cette étude est en fait d’offrir unelecture plus globale de notre système de pres-tations et de donner des éléments pour mieuxévaluer sa cohérence générale en 2008. Le prin-cipe retenu est celui d’étudier la trajectoire dequelques couples biactifs tout au long de la vie,du début de la vie active à la fin de la période dela retraite (décès). Certains couples n’ont pasd’enfants et serviront de référence pour êtrecomparés avec ceux qui ont des enfants (en parti-culier trois enfants). Plusieurs hypothèses sontretenues pour la construction de ces cas types(encadré ci-contre).

Schématiquement, le profil des carrières est ainsiretracé dans le graphique 1 p. 80 : la variable pré-sentée est, en euros 2008, le revenu net [aprèscontribution sociale généralisée (CSG), contribu-tion pour le remboursement de la dette sociale(CRDS) et impôt sur le revenu] tout au long de lavie active. On présente ici la situation des couplessans enfant pour mieux étudier ensuite les effetsdes transferts aux familles de trois enfants.

Les graphiques 2, 3 et 4 pp. 80-81 illustrent lesaides pour les familles de trois enfants (en tant quesupplément de revenu versé à ces familles par

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Afin de rendre compte de la dimension inter-temporelle des aides octroyées aux familles et leurévolution au cours du cycle de vie de la famille, ona recours à des cas types sur cycle de vie. On retracepour cela une histoire théorique de la vie de quel-ques familles types sur une période de soixante ans.Pour rendre les comparaisons possibles tout au longde la période, les calculs sont tous effectués eneuros constants (euros 2008). Les dates retenuespour situer les événements familiaux sont utilespour « déclencher » les aides à la famille, mais neconstituent pas des références pour retracer la légis-lation de l’époque. Ces cas types sont construits àlégislation constante, correspondant à celle de2008.Les hypothèses de construction sont les suivantes :• naissance des deux membres du couple en 1945 ;• début de la vie active en 1969 : carrière continuedans le secteur privé (statut salarié) ;• départ à la retraite : début 2009 (*) ;• décès : fin de l’année 2028 (on suppose une duréede vie moyenne de vingt ans pendant la période dela retraite égale, même si cette hypothèse est dis-cutable, pour les deux membres des couples destrois familles types) ;• trois types de carrières sont étudiés pour les cou-ples biactifs, nécessairement contrastés :– une famille composée de deux salariés à tempsplein au SMIC,– une famille composée de deux salariés en situa-tion intermédiaire : le début de carrière commenceà 0,5 plafond de la Sécurité sociale et s’achève à 1,5plafond pour les deux membres du couple,– une famille composée de deux salariés cadres

supérieurs : le début de carrière commence à 1 pla-fond de la Sécurité sociale et s’achève à 3 plafondspour la femme et 4 plafonds pour le mari. Ce profilcorrespond à de très hauts cadres supérieurs, pasnécessairement représentatifs de la carrière moyennedes cadres au regard de la très forte progression decarrière ici retenue et des salaires très élevés en finde période. Ce cas de figure a été choisi à desseinpour pouvoir bien illustrer le mécanisme du plafonddu quotient familial ;

• de manière totalement conventionnelle, on sup-pose le calendrier suivant pour les naissances desenfants : le premier enfant en 1971, le deuxième en1974 et le troisième en 1977 ;• les enfants restent à charge au sens des allocationsfamiliales jusqu’à l’âge de 20 ans (21 ans pour lecomplément familial) et jusqu’à l’âge de 25 ans ausens de la législation fiscale (pour les étudiants) ;• tous les revenus sont retracés en euros constants,euros 2008 : on rétropole ou extrapole les transfertsà législation constante, qui correspond à celle de2008 ;• pour la prise en compte des prestations, on selimite à l’allocation de base de la prestationd’accueil du jeune enfant, aux allocations fami-liales, au complément familial, et à la majoration depension ;• pour la prise en compte des aides fiscales, onretrace les effets du quotient familial et les effets del’exonération de la majoration de pension.

(*) Pour simplifier et ne tenir compte que du mécanisme dela majoration de pension, on ne prend pas en compte ici laMDA pour les femmes, ou le service militaire pour leshommes.

encadré

Cas types sur cycle de vie : encadré méthodologique

rapport à celles qui n’ont pas d’enfants). Ondistingue deux grandes catégories d’aides :

• les prestations : allocation de base de la presta-tion d’accueil du jeune enfant (PAJE), allocationsfamiliales et complément familial, majoration depension (Caisse nationale d’assurance vieillesse[CNAV], Arrco et Agirc) ;• les aides fiscales : quotient familial et exonéra-tion de la majoration de pension de l’impôt sur lerevenu.

Suivant les trois types de carrières retenues pources familles, il ressort que :

• les trois familles bénéficient de l’allocation debase de la PAJE (y compris les cadres supérieursqui se trouvent encore en dessous du plafond deressources de la prestation en début de carrière) ;

• les trois familles bénéficient de la même façondes allocations familiales ;• seules les deux premières catégories de famillessont éligibles au complément familial ;• les effets du quotient familial sont quasimentnuls pour les familles à deux SMIC et en revanchetrès importants pour les familles de cadres supé-rieurs (qui sont au plafond du quotient familialpendant quatorze années) dépassant très large-ment l’importance des prestations familiales.

Lorsque l’on examine en regard les aidesapportées au moment de la retraite, il apparaîtque :

• la « hiérarchie » de la majoration de pensionest, sans surprise, à l’image de celle du quotientfamilial : 1 pour la famille à deux SMIC, 2 pour lafamille à revenus intermédiaires et 4,1 pour la

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Graphique 1 – Revenu net annuel après impôts : couples sans enfant (euros 2008)

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Graphique 3 – Montant annuel des aides pour les familles en situation intermédiaires avec trois enfants (euros 2008)

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Graphique 2 – Montant annuel des aides pour les familles à deux SMIC et trois enfants (euros 2008)

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Graphique 4 – Montant annuel des aides pour les familles cadres supérieurs avec trois enfants (euros 2008)

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famille de cadres supérieurs (2). Ceci est encoreplus fort lorsque l’on tient compte de l’exonéra-tion fiscale de la majoration. L’effet est alors lesuivant : 1 pour la famille à deux SMIC, 2,1 pourla famille à revenus intermédiaires et 5,1 pour lafamille de cadres supérieurs ;• l’imposition de la majoration corrigerait en partieseulement ces écarts ; ceux-ci seraient dans les casétudiés : 1 pour la famille à deux SMIC, 1,8 pour lafamille à revenus intermédiaires et 2,9 pour lafamille de cadres supérieurs ;• dans le cas de la famille de cadres supérieurs, lesparents peuvent être davantage aidés après ledépart de leurs enfants, lorsque l’on tient comptedes prestations reçues. Dans ce cas, on note en effetque le niveau de la majoration est plus de deux foissupérieur au montant moyen des prestations fami-liales reçues quand les enfants sont âgés de moinsde 20 ans, à la charge effective de leurs parents.Cette situation pose clairement question, d’autantque cette famille aura bénéficié « à plein » du jeudu quotient familial durant la période de la vieactive des parents.

Une autre manière d’apprécier les résultats de cescas types est de faire le cumul des prestations et

des aides fiscales durant la vie active (au cours delaquelle les enfants sont à charge des parents),d’une part, et pendant la période de la retraite,d’autre part. Le tableau ci-dessous présente ceci :tout d’abord en valeur absolue en euros 2008,puis en indice base 100 correspondant au cumuldes aides reçues par la famille à deux SMIC ayanttrois enfants, durant la vie active. Les aidesapportées à la famille de trois enfants pendant saretraite par rapport à celles reçues pendant la vieactive sont ainsi de l’ordre de : un tiers pour lafamille à deux SMIC, un peu plus de la moitiépour la famille à revenus intermédiaires et prèsde 80 % pour la famille de cadres supérieurs. Laréférence proposée pour la famille à deux SMICpendant sa vie active (indice base 100 dans letableau) illustre globalement la très forte propor-tionnalité des aides familiales (prestations et aidesfiscales confondues) avec le revenu, tant pendantla vie active que pendant la période de la retraite.

Quelques pistes d’évolution

Ces différents éléments plaident finalement pourexplorer quelques pistes d’évolution de ce dispo-

sitif : elles seront simple-ment rapidement expo-sées ici. La premièreoption, la plus radicale,consisterait à supprimerune telle majoration, aubénéfice d’une plus granderedistribution lorsque lesenfants sont encore audomicile parental, effec-

Cumul des prestations et des aides fiscales

Familles à deux SMIC

Vie active Période retraite

Euros 2008 Indicebase 100*

Euros 2008 Indicebase 100*

101 126 100 34 094 34

Familles à revenus intermédiaires 138 364 137 73 032 72

Familles de cadres supérieures 221 426 219 173 942 172* : indice base 100 familles à deux SMIC vie active.

(2) Plus précisément, les montants respectifs annuels des majorations de pensions (nets de CSG et CRDS) sont de : 1 620 euros2008 pour la famille à deux SMIC, 3 175 euros 2008 pour la famille à revenus intermédiaires et 6 560 euros 2008 pour lafamille de cadres supérieurs, soit les rapports cités supra : 1 ; 2 et 4,1.

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tivement à charge. Une deuxième option moinstranchée conduirait à aménager le dispositifactuel. Plusieurs voies pourraient être étudiées.Tout d’abord, il pourrait être envisagé de suppri-mer l’exonération fiscale afin d’atténuer le carac-tère anti-redistributif de la mesure : mais on a vuqu’elle ne corrigerait qu’en partie les défautsidentifiés. Ensuite, il pourrait être fondé des’orienter vers la forfaitisation de la majoration,sur le même principe que les allocations fami-liales : cette mesure contribuerait à mieux sou-tenir les petites pensions, dont notamment cellesdes femmes, qui sont en moyenne moins élevées.Suivant ce principe de forfaitisation, ce seraitalors l’enfant qui ouvrirait droit à la majorationforfaitaire, à partager entre le ou les parents à laretraite qui ont effectivement assumé leur chargedes enfants. Enfin, le principe de forfaitisationdevrait naturellement poser la question del’ouverture du droit pour les familles de moins detrois enfants.

Pour finir, il semble utile de rappeler que la majo-ration de pension pour enfant est un des troisgrands dispositifs actuels constituant les droits

familiaux à la retraite, les deux autres étant lamajoration de durée d’assurance et l’assurancevieillesse des parents au foyer. Au-delà de la seulemajoration de pension pour enfants, il convien-drait de réexaminer plus généralement la perti-nence et la cohérence de ces trois dispositifs,plusieurs décennies après leurs conceptions,alors que les comportements ont évolué (déve-loppement de l’activité féminine, instabilité desstructures familiales…) et qu’une grande part deces dispositifs est financée désormais par labranche Famille de la Sécurité sociale. On nepeut guère faire l’économie, à cette occasion,d’une réflexion plus ambitieuse sur l’évolution dusystème de protection sociale en France, dans unsens plus favorable à l’emploi. En d’autres termes :faut-il prévenir ou guérir à l’avenir ? Prévenir,c’est-à-dire encourager la biactivité, les carrièrescomplètes grâce à un soutien actif à la conci-liation vie familiale-vie professionnelle ? Oubien guérir en cherchant à compenser ex-post,au moment de la retraite, les personnes quin’auraient pas effectué de carrières complètes ?Voilà un beau sujet d’arbitrage intertemporelpour les politiques publiques.

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