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1 Benchmark et leçons apprises sur la gestion stratégique dans un organisme de contrôle d’Etat – Nous avons lu pour vous ! GAO répond à la question: Qu’est-ce qu’il y a derrière un nom ? David M. Walker, Contrôleur général des États-Unis. Source: site web du General Accountability Office Le texte originel est accessible sur la page du General Accountability Office à l’adresse http://www.gao.gov/about/rollcall07192004.pdf ) J’ai bien aimé ce texte qui me rappelle le droit de créer, d’inventer, d’adapter, cette liberté qui manque tant encore dans ce continent. Par ce texte, David Walker met en relief qu’après 83 années d’existence, l’ex-General Accounting Office décidait de changer de nom et les innovateurs lui donnèrent le nom de Government Accountability Office. C’est alors intéressant de se rendre compte que même ceux qui firent ce virement osèrent se poser la question : « Certains pourraient se demander pourquoi le GAO a ressenti le besoin de remettre une identité institutionnelle si fortement associée l’efficacité, à l’efficience et à l’économie de la gestion gouvernementale. Mais notre ancien nom, aussi familier et rassurant qu’il fut, ... n'avait pas suivi l’évolution en matière de gestion gouvernementale. La vérité, c’est que la "comptabilité" n'a jamais été notre principale mission. » Ce revirement traduit un peu le rôle d’un Top management ou d’un leadership catalyseur: la pensée stratégique qui sait dire oui, on bouge, on va au-delà de ce qui fut : « Les stéréotypes, cependant, peuvent être difficile à ébranler, ont la vie dure », dira-t-il. Par la plume de Walker, ces innovateurs rappellent leur chevauchée et attirent notre attention sur le fait que « certains étudiants que le GAO tentait de recruter supposaient, en ces temps, à tort, que l’on a besoin d'un diplôme en comptabilité pour travailler au niveau du GAO. Les nouveaux membres du Congrès, des fonctionnaires et des journalistes de renom, à cause de notre nom, ont pensé que le travail principal au niveau du GAO était de veiller sur les livres du gouvernement. Par exemple, signalera-t-il que « récemment, lors d’un jeu de mots croisés, organisé au niveau du journal « Washington Post », l’on avait demandé quels étaient les trois lettre qui décrivaient le mieux le travail au sein du GAO ; la réponse dans ce cas fut «CPA» (Comptable agrée ou Expert comptable dans le système américain et anglo-saxon). Honnêtement, originellement, le GAO examinait les factures de dépenses et les recettes de l’Etat. Ces temps sont révolus, depuis longtemps. Bien que le GAO serve encore d’auditeur en chef des états financiers consolidés du gouvernement américain, les audits financiers y afférents ne constituent seulement qu’environ 15 pour cent du volume de son travail actuel. C’est intéressant de découvrir ces précisions de la plume même des pères fondateurs au moment où dans la partie francophone, on explique cet organisme autrement, in se fige sur les modèles du passé… Alors, ceux qui transformé cet organisme nous précisent ce qu’ils font, depuis qu’ils ont décidé de changer de nom, de changer la portée et l’étendue de leur activité. « La plupart des

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Benchmark et leçons apprises sur la gestion stratégique dans un organisme de contrôle d’Etat – Nous avons lu pour vous !

GAO répond à la question: Qu’est-ce qu’il y a derrière un nom ?

David M. Walker, Contrôleur général des États-Unis.

Source: site web du General Accountability Office Le texte originel est accessible sur la page du General Accountability Office à

l’adresse http://www.gao.gov/about/rollcall07192004.pdf ) J’ai bien aimé ce texte qui me rappelle le droit de créer, d’inventer, d’adapter, cette liberté qui manque tant encore dans ce continent. Par ce texte, David Walker met en relief qu’après 83 années d’existence, l’ex-General Accounting Office décidait de changer de nom et les innovateurs lui donnèrent le nom de Government Accountability Office. C’est alors intéressant de se rendre compte que même ceux qui firent ce virement osèrent se poser la question : « Certains pourraient se demander pourquoi le GAO a ressenti le besoin de remettre une identité institutionnelle si fortement associée l’efficacité, à l’efficience et à l’économie de la gestion gouvernementale. Mais notre ancien nom, aussi familier et rassurant qu’il fut, ... n'avait pas suivi l’évolution en matière de gestion gouvernementale. La vérité, c’est que la "comptabilité" n'a jamais été notre principale mission. »

Ce revirement traduit un peu le rôle d’un Top management ou d’un leadership catalyseur: la pensée stratégique qui sait dire oui, on bouge, on va au-delà de ce qui fut : « Les stéréotypes, cependant, peuvent être difficile à ébranler, ont la vie dure », dira-t-il.

Par la plume de Walker, ces innovateurs rappellent leur chevauchée et attirent notre attention sur le fait que « certains étudiants que le GAO tentait de recruter supposaient, en ces temps, à tort, que l’on a besoin d'un diplôme en comptabilité pour travailler au niveau du GAO. Les nouveaux membres du Congrès, des fonctionnaires et des journalistes de renom, à cause de notre nom, ont pensé que le travail principal au niveau du GAO était de veiller sur les livres du gouvernement. Par exemple, signalera-t-il que « récemment, lors d’un jeu de mots croisés, organisé au niveau du journal « Washington Post », l’on avait demandé quels étaient les trois lettre qui décrivaient le mieux le travail au sein du GAO ; la réponse dans ce cas fut «CPA» (Comptable agrée ou Expert comptable dans le système américain et anglo-saxon).

Honnêtement, originellement, le GAO examinait les factures de dépenses et les recettes de l’Etat. Ces temps sont révolus, depuis longtemps. Bien que le GAO serve encore d’auditeur en chef des états financiers consolidés du gouvernement américain, les audits financiers y afférents ne constituent seulement qu’environ 15 pour cent du volume de son travail actuel. C’est intéressant de découvrir ces précisions de la plume même des pères fondateurs au moment où dans la partie francophone, on explique cet organisme autrement, in se fige sur les modèles du passé… Alors, ceux qui transformé cet organisme nous précisent ce qu’ils font, depuis qu’ils ont décidé de changer de nom, de changer la portée et l’étendue de leur activité. « La plupart des

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travaux de l'Agence comprend désormais des évaluations de programme, des analyses de politiques et des opinions juridiques et des décisions sur une vaste gamme de programmes et d’activités du gouvernement tant au niveau du pays qu'à l'étranger. » Aujourd’hui, la portée des travaux du GAO inclut potentiellement et pratiquement tout ce que le gouvernement fédéral met en œuvre ou envisage de le faire et ceci n'importe où dans le monde. Par exemple, récemment, le personnel du GAO a été en Irak, pour y ausculter toute chose pertinente, de la logistique militaire aux coûts des contrats conclus, jusqu’à la gestion du programme des Nations Unies dit "Pétrole contre nourriture".

Le General Accountability Office est ainsi devenu une organisation professionnelle moderne, multidisciplinaire dont les 32001 employés sont des économistes, des sociologues, des ingénieurs, des avocats, des actuaires et des experts en informatique, ainsi que des spécialistes dans les domaines de la santé, de la sécurité intérieure.

L’article, « GAO répond à la question: Qu’est-ce qu’il y a derrière un nom ? » de David M. Walker, ancien Contrôleur général des États-Unis, est intéressant à plus d’un titre en ce qu’il renseigne sur le fait que « la plupart des rapports du GAO (Rapports à couverture bleue ; les rapports et manuels du GAO sont parfois identifiés par des couleurs, vertes, grises, etc.) vont au-delà de la question de savoir si les fonds fédéraux sont dépensés de manière appropriée pour s’interroger si les programmes fédéraux et les politiques répondent à leurs objectifs et aux besoins de la société. L’on y découvre que le GAO examine ainsi les résultats que les ministères et les organismes doivent atteindre en contrepartie des dollars qu’ils reçoivent des contribuables. En outre, il a un important rôle de vigie prospective, par exemple qu’en tant que fervent acteur de plaidoyer de la sincérité et de la transparence dans les opérations gouvernementales, le GAO s'est engagé à veiller à ce que la responsabilité des échecs récents, comme ceux qu’ont connus Enron et Worldcom, ne se produisent pas au niveau du secteur public. Aussi, l’auteur insiste-t-il sur le fait qu’à cette fin, le caractère public des rapports et des résultats résultant des travaux du GAO est vital; car pratiquement, chaque rapport du GAO, ainsi que les témoignages du Congrès, sont mis en ligne sur Internet le jour où ils sont disponibles. Le credo, selon le texte, c’est que le GAO moderne croit qu'il est important d'offrir au public une image précise, juste et équilibrée de la gouvernance aujourd'hui.

En fait les tournants et réajustements accomplis par cet organisme au cours de son existence ont convaincu les différents types de leadership qui se sont succédés, comme nous le rappelle l’auteur, qu’au-delà du simple fait de mettre en évidence ce qui ne marche pas au niveau de l’exécutif, le General Accountability Office fait également rapport sur les programmes fédéraux et les politiques qui fonctionnent bien et reconnaît à leur juste valeur des progrès et des améliorations qui existent. En fait, en explorant son immense site web, on se rend compte à quel point le GAO a partir du présent, a été un explorateur du futur, des évolutions du management public, de l’évaluation des politiques et des programmes publics aux Etats Unis. Il est vrai que d’énormes moyens, comparés à ceux qu’on peut trouver ailleurs, ont été mis à sa

                                                            1 Il faut considérer ce chiffre comme étant un paramètre qui valait au moment de la rédaction de ce papier par leurs auteurs…

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disposition. C’est dans cette perspective que l’auteur précise que GAO entre régulièrement en consultation avec les législateurs et les dirigeants d'organismes publics (agences) pour discuter des moyens qui peuvent permettre d’améliorer la gouvernance exécutive et la rendre plus efficace, grâce à l’adoption de meilleures pratiques permettant de consolider ou d’éliminer les programmes fédéraux redondants. Il est intéressant d’ailleurs d’examiner sa rubrique « Ressources » de son site web qui vulgarise les bonnes pratiques dans plusieurs domaines de management public en tirant les leçons de ses missions d’évaluation.

L’une des leçons de cet article, c’est que dans une société où coexistent des groupes d'intérêts aux programmes concurrents, la force du GAO demeure sa capacité à fournir une information professionnelle, objective, basée sur des faits précis, non partisane, sans connotation idéologique. Au niveau du General Accountability Office, comme David Walker le précise, l’indépendance et l'intégrité sont essentielles, tout d’abord, compte tenu de la position et de la distance de l’organisme par rapport aux agences et au pouvoir exécutif.

Une originalité du système américain, à la lecture de cet article, c’est un chef du GAO en fonction pour une durée de 15 ans, mesure retenue pour assurer la continuité du leadership, ce qui est rare au niveau du gouvernement fédéral. En conséquence, le General Accountability Office et son chef, le Contrôleur général, peuvent se permettre de consolider une vision à long terme et prendre en charge un vaste éventail d’enjeux complexes, parfois controversés. L'indépendance du General Accountability Office est en outre préservée par le fait que son effectif se compose de fonctionnaires de carrière recrutés sur la base de leurs connaissances, de leurs compétences et de leurs habiletés, complétés par une énorme armée d’experts et de consultants dans des domaines les plus variés.

David Walker détaille aussi certains aspects de la mission, de la vision, car explique-t-il « Bien qu'une grande partie de notre travail consiste à examiner l'efficacité des opérations gouvernementales, au jour le jour, il s’agit aussi de jouer un rôle d’alerte au profit des décideurs et du public sur les problèmes émergents qui ont de graves conséquences au plan national avant que ceux-ci ne se traduisent en crises importantes. En explorant les travaux du GAO, on est frappé par l’impressionnant modèle d’analyse des risques de la Nation qu’il a développé et qui est au cœur de son système de planification stratégique. Au vu de ce qui précède, une telle orientation n’est donc pas surprenante. Aussi, l’article précise-t-il que le General Accountability Office veille attentivement sur plusieurs défis à long terme dont l'impact ne s’est pas encore pleinement fait sentir, y compris la situation financière gouvernementale en aggravation, les défis croissants auxquels sont confrontés la sécurité sociale, les soins de santé et la guerre contre le terrorisme, en assumant sérieusement la responsabilité qui consiste à s’exprimer sur de telles questions.

C’est ce qui est aussi intéressant dans cet article, c’est cette volonté exprimée de prêcher par l’exemple, car l’auteur le précise : « Aujourd'hui, le General Accountability Office est déterminé à gérer par l'exemple, et alors à considérer comme essentiel, qu’à son propre niveau, il soit assujetti à l’obligation de rendre compte de ses propres résultats. Aussi, depuis 2000, le GAO publie-t-il un rapport annuel qui met en relief :

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ce qu’il a réalisé avec ses ressources et de ce qu'il compte réaliser au cours de l'année à venir ;

par exemple, les impacts/outcomes comme le fait d’avoir généré 35,4 milliards de dollars, mesurables en termes de profits et retour sur investissements équivalent à 78 $ pour chaque dollar qui a été mis à la disposition du GAO ;

le fait d’avoir signalé des manquements importants de non-réalisation des objectifs financiers arrêtés, destinés à renforcer la sécurité dans les bâtiments fédéraux, à améliorer la qualité des soins à domicile au niveau de la nation ;

la réalisation de plus de 2000 recommandations spécifiques pour améliorer les opérations gouvernementales et que pendant cette période, sur une plage de temps de quatre ans, sur cinq recommandations effectuées par le GAO, quatre ont été mises en œuvre.

En développant les thèses ci-dessus, Walker insiste sur ce rôle d’agent de changement, « d’influenceur », pour préciser que « de son point de vue, ce modèle de mesure de performance d’une agence et de rapport sur les coûts / bénéfices doit devenir la norme au niveau de la gestion gouvernementale. »

Au total, à mon sens, l’article dénote de la capacité d’ajustement stratégique d’un organisme, si courant en Amérique du Nord, avec sa puissante recherche; en ce sens il peut être un véritable cas pratique de management stratégique, de gestion du changement. En effet, Walker explique que le fait de procéder à un changement de nom peut être considéré comme un petit pas, mais en réalité il englobait des enjeux plus larges: « la nécessité de transformer ce que le gouvernement fédéral met en œuvre et la manière dont il met en œuvre ses activités, pour en assurer la pertinence par rapport aux enjeux et défis du 21e siècle. »

Les conclusions du texte sont à méditer pour les managers publics africains, singulièrement francophones :

pour le GAO, mesurer la performance du gouvernement et consolider son obligation de rendre compte des résultats sont au cœur de sa raison d’être (ce qu’il est) et de ses activités (ce qui est fait) ;

le GAO continue croire que le public (citoyens américains) mérite une telle orientation qui concerne tous les opérations gouvernementales allant des dépenses publiques à l'élaboration (la mise en œuvre) des politiques. Après tout, rappelle Walker, un gouvernement représentatif suppose un électorat informé.

Il est intéressant de constater les remarques de Walker lorsqu’il écrit que son intention n’est pas de suggérer que les organismes ont besoin de changer leurs noms - mais la plupart d'entre eux ont besoin, à un certain moment, de comprendre que certains de leurs politiques, de leurs processus et procédures, les plus élémentaires, appartiennent à des temps révolus.

Certaines conclusions sont, à mon sens belles, profondes : « Nous, au niveau du General Accountability Office, avons une histoire qui mérite la fierté, mais nous ne définissons pas uniquement par rapport à notre passé. Nous serons encore connus sous le nom GAO, mais notre nouveau nom indiquera clairement que notre première

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priorité est d'améliorer la performance du gouvernement fédéral et de consolider sa responsabilité devant le Congrès et le peuple américain.

Cet éditorial paru dans le Roll Call, le 19 Juillet, 2004. Le texte originel est, à cette date, encore accessible sur la page du General Accountability Office à l’adresse http://www.gao.gov/about/rollcall07192004.pdf - NB : en annexe à la présente traduction la version anglaise.

Notes sur l’exégèse

En vulgarisant ce texte dans la langue française, je me suis efforcé d’être le plus précis et de surmonter un certain nombre de difficultés dues au fait des nuances qui peuvent exister entre les concepts manipulés dans deux langues différentes ; il a tenu compte de la manière dont parlent les francophones en général, de l’évolution du lexique de management et de la science administrative. Certains termes dans le langage anglais (government, agency) ne peuvent pas, par rapport aux progrès de la science administrative et du management, au contexte des différents pays, être traduits de façon littérale par gouvernement, agence. Parfois l’auteur de la traduction a préféré les termes gouvernance, exécutif, organismes selon le contexte de la phrase. Les termes Accountability a pu, selon les circonstances, signifier « responsabilité, obligation de rendre compte ». Certains termes anglais, comme notamment « issue » ont de multiples sens, selon le contexte de la phrase, nous avons parfois traduit par enjeux, résultats, question, etc.

Certains paragraphes du texte originel ont été éclatés en plusieurs autres pour être restitués, ceci pour mettre en relief les idées de l’auteur du texte, attirer l’attention sur des concepts importants ou des idées particulières qui méritent un examen attentif, voire un débat.

Très probablement l’esprit de l’auteur du texte originel, en anglais, annexé la présente traduction, a été respecté, non seulement dans ses grandes lignes, mais par rapport à l’évolution du « Comprehensive audit » (audit intégré) en cours, depuis bien longtemps, aux Etats-Unis…

Abdou Karim GUEYE, Inspecteur général d’Etat. Ancien Secrétaire exécutif du Forum des Inspections générales d’Etat d’Afrique et Institutions assimilées (FIGE) – expert en Gouvernance et Management public, Audits, Investigations et Evaluation des politiques et Programmes publics. http://www.softhinking.net http://www.slideshare.net/softhinking M. GUEYE publie pour les sites suivants : www.eia.sn/blog http://eia.sn/tipsoftheday/ et pour plusieurs pateformes électroniques de recherche et de formation.