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12 13 # RÉACTIVITÉ ET AGILITÉ Qu’en est-il du marché, est-il de plus en plus tendu? Je dirais surtout qu’il est en effervescence. L’avènement du digital, qui contrairement à ce que beaucoup prétendent n’est pas du tout en phase de maturité, nous a ouvert un monde d’opportunités en matière de business. En multipliant les acteurs et les intervenants il a aussi complexifié notre marché et la lisibilité de notre métier, mais il a contribué à faire évoluer ce dernier. Loin de la centrale d’achat d’espace, nous sommes aujourd’hui un métier de conseil où la réacti- vité et l’agilité sont indispensables pour rester à la pointe dans un monde qui change toutes les deux semaines. # TEMPS... Le temps était pour la deuxième fois le thème des dernières rencontres de l’Udecam. Pourquoi le sujet est-il si important dans votre milieu ? Nous vivons une situation comparable à celle des chaînes d’informa- tion qui subissent la tyrannie de l’instant exercée par les réseaux sociaux et le digital. Les médias traditionnels se sont lancés dans cette course à l’instantanéité alors qu’on voit bien qu’elle est parfois plus un facteur d’erreur que de pertinence. Plus on va vers l’instantanéité, plus on ressent le besoin de poser le pied de l’autre côté de la chaise pour prendre du recul, reprendre le temps d’analyser et de décrypter. La vitesse n’a de pertinence que si elle est couplée à une capacité d’analyse et de recul. Nous sommes obligés de réaliser un exercice de grand écart entre ces deux approches. Nous devons continuer à prendre le temps nécessaire et assumer de ne pas être toujours être les premiers à dire ou à faire. # ...RÉEL Concrètement, comment ce temps influence-t-il la demande des annonceurs ? Ils sont demandeurs d’outils de pilotage en temps réel pour leur per- mettre d’être le plus souvent au plus près de leurs publics, d’en com- prendre les usages, mais aussi de corriger instantanément leurs cam- pagnes, d’essayer autre chose. Le pilotage et le reporting en temps réel permettent de limiter les risques d’erreur, mais ils n’ont d’intérêt que s’ils reposent sur une vraie relation partenariale avec l’annonceur. Ils ne sont utiles que si chaque partie accepte malgré tout le droit à l’erreur, mais tout le monde n’a pas encore assimilé cette culture. # SERVANT MANAGEMENT Les agences ont-elles intégré cette culture de l’erreur ? Nous y travaillons. La moyenne d’âge de notre équipe est de 30 ans, elle se compose donc de collaborateurs de la génération Y, qui n’a pas peur de se lancer, et celle d’avant qui s’est construite sur l’idée qu’il ne faut pas se tromper et doit apprendre à se décom- plexer. Chez Starcom, nous avons pris ce sujet à bras-le-corps. Nous nous sommes appuyés sur Emmanuelle Duez et le cabinet Boson pour remettre à plat notre façon de fonctionner, que ce soit en termes d’agencement autour du client ou en termes d’organisation du travail que nous abordons aujourd’hui en mode projet. Nous avons aban- donné la logique pyramidale et hiérarchique, il n’y a plus vraiment de services, mais des expertises qui travaillent ensemble… Nous avons profité de notre déménagement à Bastille pour revoir et décloisonner nos locaux, y compris pour les membres du comité de direction. Nous appliquons le « servant management » pour lequel le manager n’est plus le sachant qui donne la direction à l’équipe et impose sa stature. Il est celui qui met son expérience et son réseau au service de l’équipe. # FORMATION Un tel changement ne peut pas se faire naturellement. Comment vous y prenez vous ? Chez Starcom, nous avons la conviction que la formation est un élé- ment clé de notre métier. Notre valeur ajoutée c’est l’homme, pas les outils, même s’ils ont leur importance. Mais nous ne concevons pas la formation de manière classique. Nous croyons plus au concept de reverse classroom et au micro learning qu’à la formation classique d’un ou plusieurs jours hors de l’entreprise qui n’est rien d’autre que du bachotage. Notre fonctionnement est à l’image de la société d’au- jourd’hui, qui n’attend plus le JT de 20 h pour avoir l’information ! Propos recueillis parValéry Pothain Paul Boulangé, Le directeur général de Starcom France a répondu à nos questions sur l'incidence de l'accélération du temps sur le marché, le métier et l'organisation des agences conseil en stratégie média. # INTERVIEW Paul Boulangé est directeur général de Starcom France. À l’exception d’un passage à la direction de l’Axa Digital Academy, Paul Boulangé a réalisé l’essentiel de sa carrière dans le conseil : chez Novedia Group, chez Fullsix, mais aussi chez DDB Paris comme directeur associé, puis chez Havas Paris comme directeur du digital. Il a quitté ses fonctions en 2016 pour prendre la direction générale de Starcom France. Mini BIO TOP agence

Paul Boulangé dans Top/Com Expression

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#RÉACTIVITÉ ET AGILITÉ Qu’en est-il du marché, est-il de plus en plus tendu?Je dirais surtout qu’il est en effervescence. L’avènement du digital, qui contrairement à ce que beaucoup prétendent n’est pas du tout en phase de maturité, nous a ouvert un monde d’opportunités en matière de business. En multipliant les acteurs et les intervenants il a aussi complexifié notre marché et la lisibilité de notre métier, mais il a contribué à faire évoluer ce dernier. Loin de la centrale d’achat d’espace, nous sommes aujourd’hui un métier de conseil où la réacti-vité et l’agilité sont indispensables pour rester à la pointe dans un monde qui change toutes les deux semaines.

#TEMPS...Le temps était pour la deuxième fois le thème des dernières rencontres de l’Udecam. Pourquoi le sujet est-il si important dans votre milieu ?Nous vivons une situation comparable à celle des chaînes d’informa-tion qui subissent la tyrannie de l’instant exercée par les réseaux sociaux et le digital. Les médias traditionnels se sont lancés dans cette course à l’instantanéité alors qu’on voit bien qu’elle est parfois plus un facteur d’erreur que de pertinence. Plus on va vers l’instantanéité, plus on ressent le besoin de poser le pied de l’autre côté de la chaise pour prendre du recul, reprendre le temps d’analyser et de décrypter. La vitesse n’a de pertinence que si elle est couplée à une capacité d’analyse et de recul. Nous sommes obligés de réaliser un exercice de grand écart entre ces deux approches. Nous devons continuer à prendre le temps nécessaire et assumer de ne pas être toujours être les premiers à dire ou à faire.

#...RÉEL Concrètement, comment ce temps influence-t-il la demande des annonceurs ?Ils sont demandeurs d’outils de pilotage en temps réel pour leur per-mettre d’être le plus souvent au plus près de leurs publics, d’en com-prendre les usages, mais aussi de corriger instantanément leurs cam-pagnes, d’essayer autre chose. Le pilotage et le reporting en temps réel permettent de limiter les risques d’erreur, mais ils n’ont d’intérêt que s’ils reposent sur une vraie relation partenariale avec l’annonceur. Ils ne sont utiles que si chaque partie accepte malgré tout le droit à l’erreur, mais tout le monde n’a pas encore assimilé cette culture. #SERVANT MANAGEMENT Les agences ont-elles intégré cette culture de l’erreur ?Nous y travaillons. La moyenne d’âge de notre équipe est de 30 ans, elle se compose donc de collaborateurs de la génération Y, qui n’a pas peur de se lancer, et celle d’avant qui s’est construite sur l’idée qu’il ne faut pas se tromper et doit apprendre à se décom-plexer. Chez Starcom, nous avons pris ce sujet à bras-le-corps. Nous nous sommes appuyés sur Emmanuelle Duez et le cabinet Boson pour remettre à plat notre façon de fonctionner, que ce soit en termes d’agencement autour du client ou en termes d’organisation du travail que nous abordons aujourd’hui en mode projet. Nous avons aban-donné la logique pyramidale et hiérarchique, il n’y a plus vraiment de services, mais des expertises qui travaillent ensemble… Nous avons profité de notre déménagement à Bastille pour revoir et décloisonner nos locaux, y compris pour les membres du comité de direction. Nous appliquons le « servant management » pour lequel le manager n’est plus le sachant qui donne la direction à l’équipe et impose sa stature. Il est celui qui met son expérience et son réseau au service de l’équipe.

#FORMATION Un tel changement ne peut pas se faire naturellement. Comment vous y prenez vous ?Chez Starcom, nous avons la conviction que la formation est un élé-ment clé de notre métier. Notre valeur ajoutée c’est l’homme, pas les outils, même s’ils ont leur importance. Mais nous ne concevons pas la formation de manière classique. Nous croyons plus au concept de reverse classroom et au micro learning qu’à la formation classique d’un ou plusieurs jours hors de l’entreprise qui n’est rien d’autre que du bachotage. Notre fonctionnement est à l’image de la société d’au-jourd’hui, qui n’attend plus le JT de 20 h pour avoir l’information !

Propos recueillis parValéry Pothain

Paul Boulangé,

Le directeur général de Starcom France a répondu à nos questions sur l'incidence de l'accélération du temps sur le marché, le métier et l'organisation des agences conseil en stratégie média.

#INTERVIEW

Paul Boulangé est directeur

général de Starcom France. À l’exception d’un

passage à la direction de l’Axa Digital Academy, Paul

Boulangé a réalisé l’essentiel de sa carrière dans le

conseil : chez Novedia Group, chez Fullsix,

mais aussi chez DDB Paris comme

directeur associé, puis chez Havas Paris

comme directeur du digital. Il a quitté

ses fonctions en 2016 pour prendre

la direction générale de Starcom France.

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