14
© journée de la Fondation Père Favron / 10 juin 2013 / Jean-Louis DESHAIES « omerta » 1 « BIENTRAITANCE DANS LES ÉTABLISSEMENTS MÉDICO-SOCIAUX : ENTRE MYTHE, ILLUSION ET RÉALITÉ » Conférence donnée à l’Université du Tampon, Ile de la Réunion le 10 juin 2013 dans le cadre des Journées de la Fondation Père Favron Jean Louis DESHAIES Directeur d’Efficio Conseils. Formateur conseil en management, en stratégie et en méthodologie de projets. Auteur de nombreux ouvrages : « Mettre en œuvre les projets : l’approche socio-économique des OSSMS » (L’harmattan - 2000), « Réussir l’amélioration continue de la qualité en action sociale et médico-sociale » (Dunod Editeur - 2006) et de nombreux articles dans les revues spécialisées Je remercie Philippe BOYER, DGA de la Fondation Père Favron, de m’accueillir, ainsi que Pascal JACQUOT, directeur du Pôle Handicap Dépendance de la FPF, pour l’ouverture de cette journée, à la fois clairvoyante et pertinente… Je lui suis particulièrement reconnaissant d’avoir contribué en amont, au cheminement que je vais maintenant vous présenter… Merci aussi à mon ami Max CÉLIMON qui fut le premier directeur réunionnais à me faire appel et qui m’a ouvert beaucoup de portes dans cette « île intense » où je passe maintenant la moitié de mon temps… sans oublier Bernard DELÂTRE, mon ami de la Plaine des Cafres, qui assure avec conviction le relais pour EFFICIO sur la zone Océan Indien. la responsabilité et l’engagement partagés pour en finir avec l’omerta ! –plaidoyer pour l’effectivité de l’éthique dans les ESSMS– « peu de gens sont assez sages pour préférer la critique qui leur est utile, à la louange qui les trahit » François de la ROCHEFOUCAULT Plus de 40 années passées dans le secteur social et médico-social 1 m’ont convaincu de l’importance capitale des compétences managériales dans les ESSMS : celles des dirigeants qui exercent la gouvernance (administrateurs des organismes gestionnaires) mais aussi celles des directeurs généraux, des directeurs et cadres de proximité, qui ont à assurer la difficile transition des orientations politiques, philosophiques et stratégiques de leurs employeurs en projets opérationnels. Durant toutes ces années, j’ai été témoin de postures parfois autoritaristes, souvent laxistes –héritage endémique du paternalisme et des baronnies qui sévissaient dans cette branche d’activités, qui en garde encore quelques séquelles–. Et, aujourd’hui, à l’instar de ce qui se vit dans le monde de l’entreprise en changement, cela n’a bien sûr pas été atténué par les mutations culturelles liées au retour du Droit de l’usager, à la réaffirmation du « fait associatif », de la Loi, au détriment des toutes puissances individuelles et collectives. 1 le premier quart en tant qu’éducateur spécialisé, le deuxième comme cadre intermédiaire (chef de service puis directeur-adjoint), le troisième en exerçant la fonction de directeur, et le quatrième en tant que consultant- formateur auprès des ESSMS

« BIENTRAITANCE DANS LES ÉTABLISSEMENTS … · « Réussir l’amélioration continue de la qualité en action sociale et médico-sociale » (Dunod Editeur - 2006) et de nombreux

Embed Size (px)

Citation preview

© journée de la Fondation Père Favron / 10 juin 2013 / Jean-Louis DESHAIES « omerta »

1

« BIENTRAITANCE DANS LES ÉTABLISSEMENTS MÉDICO-SOCIAUX : ENTRE MYTHE, ILLUSION ET RÉALITÉ »

Conférence donnée à l’Université du Tampon, Ile de la Réunion

le 10 juin 2013 dans le cadre des

Journées de la Fondation Père Favron

Jean Louis DESHAIES Directeur d’Efficio Conseils. Formateur conseil en management, en stratégie et en méthodologie de projets. Auteur de

nombreux ouvrages : « Mettre en œuvre les projets : l’approche socio-économique des OSSMS » (L’harmattan - 2000),

« Réussir l’amélioration continue de la qualité en action sociale et médico-sociale » (Dunod Editeur - 2006) et de nombreux

articles dans les revues spécialisées

Je remercie Philippe BOYER, DGA de la Fondation Père Favron, de m’accueillir, ainsi que Pascal JACQUOT, directeur du Pôle Handicap Dépendance de la FPF, pour l’ouverture de cette journée, à la fois clairvoyante et pertinente…

Je lui suis particulièrement reconnaissant d’avoir contribué en amont, au cheminement que je vais maintenant vous présenter… Merci aussi à mon ami Max CÉLIMON qui fut le premier directeur réunionnais à me faire appel et qui m’a ouvert beaucoup de portes dans cette « île intense » où je passe maintenant la moitié de mon temps… sans oublier Bernard DELÂTRE, mon ami de la Plaine des Cafres, qui assure avec conviction le relais pour EFFICIO sur la zone Océan Indien.

la responsabilité et l’engagement partagés pour en finir avec l’omerta !

–plaidoyer pour l’effectivité de l’éthique dans les ESSMS–

« peu de gens sont assez sages pour préférer

la critique qui leur est utile, à la louange qui les trahit »

François de la ROCHEFOUCAULT

Plus de 40 années passées dans le secteur social et médico-social1 m’ont convaincu de l’importance capitale des compétences managériales dans les ESSMS : celles des dirigeants qui exercent la gouvernance (administrateurs des organismes gestionnaires) mais aussi celles des directeurs généraux, des directeurs et cadres de proximité, qui ont à assurer la difficile transition des orientations politiques, philosophiques et stratégiques de leurs employeurs en projets opérationnels.

Durant toutes ces années, j’ai été témoin de postures parfois autoritaristes, souvent laxistes –héritage endémique du paternalisme et des baronnies qui sévissaient dans cette branche d’activités, qui en garde encore quelques séquelles–.

Et, aujourd’hui, à l’instar de ce qui se vit dans le monde de l’entreprise en changement, cela n’a bien sûr pas été atténué par les mutations culturelles liées au retour du Droit de l’usager, à la réaffirmation du « fait associatif », de la Loi, au détriment des toutes puissances individuelles et collectives.

1 le premier quart en tant qu’éducateur spécialisé, le deuxième comme cadre intermédiaire (chef de service puis

directeur-adjoint), le troisième en exerçant la fonction de directeur, et le quatrième en tant que consultant-

formateur auprès des ESSMS

© journée de la Fondation Père Favron / 10 juin 2013 / Jean-Louis DESHAIES « omerta »

2

Un tel contexte génère souvent de l’insécurité pour les professionnels enclins à promouvoir la qualité de leurs prestations mais constitue aussi un terreau pour les abus en tous genres, quels que soient les niveaux d’interventions.

Nous avons tous bien sûr observé la part d’influence de ces « fricoteurs » dans la dégradation de l’ambiance de travail et dans la détérioration du climat social. Mais je dois admettre ne pas avoir toujours su et pu faire la part des choses en n’attribuant la responsabilité des dysfonctionnements qu’à ceux qui exercent des fonctions hiérarchiques, sans forcément évoquer l’imputabilité de certaines situations désastreuses à ceux qui alimentent la mascarade, l’hypocrisie, le désordre… face à une indifférence et/ou une impuissance générales.

Les derniers accompagnements réalisés en France métropolitaine et en outre-mer me conduisent donc aujourd’hui à cette réflexion… pour qu’une responsabilité et un engagement soient enfin partagés face à ce qu’il convient bien de considérer comme une espèce d’omerta institutionnelle. Avant d’évoquer certains faits qui me permettent de l’affirmer ainsi, il me paraît important de rappeler d’abord ce qui devrait guider toute démarche participative de projet, pour peu que l’on soit résolu à mettre en lien les intentions –le projet– et les actes –afin d’assurer la qualité de service escomptée–.

Il ne devrait s’agir, finalement que de toujours veiller, comme l’illustre le schéma suivant, à l’évidente connexion, qui ne demande –dans le cadre d’une démarche-projet-qualité2– qu’à se traduire dans les faits, entre :

- des valeurs à poser et à partager, qui s’ancrent dans les projets des organismes gestionnaires –chargés par les pouvoirs publics de missions d’intérêt général et d’utilité sociale3– à l’appui des orientations philosophiques et stratégiques qu’ils promeuvent, ainsi que du cadre législatif dont sont garantes les Autorités de Contrôle et de Tarification,

- le fonctionnement à préciser dans les projets d’établissements ou de services, qui permettent de fédérer tous les acteurs, en interne, et de rendre lisibles leurs intentions, en externe, en précisant tout autant les modalités nécessaires à leur mise en œuvre que leurs finalités,

- les prestations qui répondent d’autant mieux, via les réponses personnalisées, aux besoins, aux souhaits et aux demandes des bénéficiaires que les directions des organisations –sans frilosité et sans retenue– mettent tout en œuvre pour rendre les acteurs… auteurs à part entière de la conduite des évolutions, dans un réel management participatif et proactif des projets,

- le management, qui s’attache, entre autres points, à favoriser la communication, la coordination et la concertation à tous les niveaux de l’organisation, tout en optimisant les rôles et les fonctions ainsi que la montée en compétences, de chacun et de tous, sur chaque secteur d’activités.

2 concept développé dans « Mettre en œuvre les projets : l’approche socio-économique des E.S.S.M.S. »/

J-Louis DESHAIES / L’Harmattan – 2000 3 voir les articles 4 et 5 de la loi 2002.2 du 2 janvier 2002, rénovant l’action sociale et médico-sociale

© journée de la Fondation Père Favron / 10 juin 2013 / Jean-Louis DESHAIES « omerta »

3

© EFFICIO (référence I.S.E.O.R.) / la Démarche-Projet-Qualité

Cette logique du bon sens ne va pourtant pas de soi et il me faut revenir sur les chausse-trapes dans lesquels peuvent s’enferrer certains ESSMS… adeptes, plus ou moins artificieux, du grand écart entre le discours et les actes.

Un constat : un écart parfois abyssal entre les discours et les actes

Avant de décrire quelques situations scabreuses qui me conduisent à parler d’omerta, je vais rappeler préalablement ce qui caractérise les personnes accueillies au sein des structures résidentielles du secteur social ou médico-social.

C’est, bien souvent, leur dépendance physique ou/et psychique, leur difficulté à communiquer, leur vulnérabilité qui témoignent d’un besoin de mise en œuvre de mesures de compensation pour vivre comme membres à part entière de la cité ! Cette dépendance, cette vulnérabilité imposent, comme Pascal JACQUOT l’a souligné il y a quelques instants, un devoir de vigilance permanente, exigent la nécessité d’affirmer une position éthique pour un accompagnement de qualité, adapté, spécifique.

Il est tout aussi capital de mettre en avant la problématique éthique de l’accompagnement des personnes en situation de grande dépendance ou/et de profonde détresse qui, selon moi, peut être posée à partir de trois principes fondamentaux :

les personnes accueillies et accompagnées, sont des citoyens, des personnes singulières, en devenir, qui appartiennent à notre communauté humaine,

leur dépendance ou leur détresse supposent que leurs droits soient sans cesse réaffirmés, car « il n’y a ni vie minuscule, ni vie majuscule4 »,

il n'est pas suffisant de déclarer vouloir promouvoir la bientraitance, encore faut-il que les établissements baignent dans une véritable culture de la bienveillance, de la vigilance.

4 cf. Charles GARDOU « la société inclusive, parlons-en ! »/ Editions ERES – 2012

Satisfaction des personnes accueillies

(réponses effectives à leurs besoins,

attentes et demandes)

Satisfaction des personnels

(adéquation des conditions

et des moyens aux exigences

de la mise en œuvre des projets)

Satisfaction des dirigeants

Détermination des Autorités

de Contrôle et de Tarification

Levier

(leadership de la direction

et rôle moteur des cadres)

Qualité

des

Prestations

_________________

Qualité

du Fonctionnement

___________________________

Qualité

du Management

VALEURS – PHILOSOPHIE

ÉTHIQUE – DÉONTOLOGIE

orientations politiques et stratégiques

- Projets Personnalisés

aux bénéficiaires

- Projets de l'établissement

et de tous ses secteurs d'activités

- Projets professionnels

des personnels

- Projets de l’organisme

gestionnaire

- Politique territoriale

(ARS / Département)

Recherche

de Qualité

Intégrale

nécessitant

l'adéquation

des moyens

aux finalités

des projets

Fondement

CADRE LÉGISLATIF

ET RÉGLEMENTAIRE

d’une approche à dominante administrative

à une logique de service

pour réussir l’amélioration de la qualité

Cadre

© journée de la Fondation Père Favron / 10 juin 2013 / Jean-Louis DESHAIES « omerta »

4

Mais c’est loin d’être toujours le cas… et ces illustrations, parmi d’autres, témoignent de ces inconcevables silences –de cette omerta, insistons bien sur ce terme !– qui polluent subrepticement l’ambiance de travail et l’environnement des usagers :

la banalisation de toilettes et de soins assurés dans une M.A.S.5, MP 3 sur les oreilles, « pour éviter une trop grande proximité avec les résidents » (sic !), ou dans un E.H.P.A.D.6, devant des personnes âgées atteintes de la maladie d’Alzheimer, « bruyantes et parfois répugnantes » (sic !),

le positionnement d’experts refusant le rattachement hiérarchique direct à un cadre de direction voire à un directeur, au prétexte que ces derniers ont un niveau d’études inférieur au leur, ce qui nécessiterait, selon eux, leur lien de subordination au seul directeur général... ou à eux-mêmes,

les moqueries caustiques de personnels devant d’autres personnes en situation de handicap, en évoquant les relations affectives ou amoureuses, naissantes ou avérées, de deux usagers,

la non inscription d’élus des I.R.P.7 dans un rapport partenarial constructif avec la direction, lorsqu’ils sont davantage préoccupés par des considérations corporatistes et/ou égotistes, au détriment plus ou moins conscient de l’intérêt général et collectif,

des professionnels envoyant leurs SMS personnels pendant « l’accompagnement », à la même table qu’eux, de jeunes enfants ayant des troubles envahissants du développement,

les recours abusifs sur de longues périodes à des CDD successifs, dans un système qui ne préserve pas, alors, la continuité d’accompagnement des usagers et qui entretient la précarité des remplaçants,

l’ingratitude de personnes se traduisant par une hostilité tout aussi violente

qu’incompréhensible, bien que leurs situations aient été reconsidérées, par une reconversion après la reconnaissance d’une inaptitude au travail ou par une complaisante proposition d’embauche d’un nouvel employeur après une longue période de chômage,

des éducateurs techniques spécialisés utilisant le week-end, à des fins lucratives et clandestines, les pelles mécaniques de leur atelier pour quelques menus travaux avec le matériel

5 Maison d’Accueil Spécialisée

6 Etablissement d’Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes

7 Instances Représentatives des Personnels

« qui veut faire quelque chose

trouve un moyen…

qui ne veut rien faire

trouve une excuse »

Proverbe Arabe

© journée de la Fondation Père Favron / 10 juin 2013 / Jean-Louis DESHAIES « omerta »

5

et le carburant du centre de formation professionnelle : « vous ne saviez pas, Monsieur le Directeur, on se rend beaucoup service dans la région » (sic !)

nombre d’arrêts de travail de courte durée dommageables, les personnes concernées déclarant, par exemple, tout de go « si elle me fait chier celle-là, je m’arrête 3 semaines » (sic !) et qui, de fait, le font. Ce qui nécessite un remplacement au pied levé qui entrave la continuité et la sécurité des prestations et ce qui en fait aussi supporter les conséquences à leurs collègues,

la confirmation dans l’emploi, à l’issue des périodes d’essai de postulants, n’ayant manifestement pas les prérequis pour la fonction proposée, selon les observations des professionnels… pourtant dans l’incapacité totale de le signaler… car croyant « se mettre alors dans le camp du patron » (sic !) ou « être dans la sphère de la délation » (sic !).

Ce qui n’est pas rare et pourtant si significatif, c’est que, le plus souvent, ce sont des nouveaux salariés, des remplaçants voire des stagiaires qui tentent de rompre avec l’omerta par le signalement légitime de maltraitances ou d’abus en tous genres.

Leurs réactions sont d’autant plus louables qu’elles s’exposent, au risque de compromettre leur avenir dans la structure voire dans leur métier… car les raisons de leur désapprobation sont le plus souvent soutenues, stimulées, confortées :

par la paralysie de familles qui ont dû à ce point se battre pour « avoir une place » qu’elles en acceptent les propos et les agissements humiliants de certains professionnels à leur égard et/ou à l’encontre de leur parent/usager,

par des positions despotiques d’acteurs, invités à davantage de coopération, mais pourtant repliés et concentrés sur leurs propres intérêts, ce qui les conduit à une bienveillance de façade tout en développant des stratégies individualistes,

par la lenteur voire le mutisme de certaines autorités de tarification et de contrôle face à des conditions de soins et d’accompagnement indignes, et non respectueuses de la réglementation…

Valérie SCELO, de l’ARS Réunion/Mayotte, nous confirmera tout à l’heure que l’approche des financeurs n’est pas seulement budgétaire mais qu’elle peut et doit s’inscrire dans une démarche partenariale de qualité avec les ESSMS, pour promouvoir avec eux les logiques de parcours de vie des usagers. Il n’en reste pas moins que les faits que je viens d’évoquer sont tout aussi sévères que réels. Et je rejoins Jean-René LOUBAT8 lorsqu’il indique que penser la qualité, c’est repenser l’organisation, mettre à bas les organisations informelles, les territoires corporatistes ou les pré-carrés. Et il ajoute que c’est sans doute ce qui peut effrayer un certain nombre d’organismes ou de professionnels peu soucieux de transparence et d’adaptation.

A cet égard, il me paraît utile, à l’appui de la diapo suivante, de présenter la typologie des acteurs qui, je le crois, parlera à chacun d’entre vous.

Les 4 premières ont été énoncées par Jean-Pierre BOUTINET, sans doute plus optimiste que moi. J’en ai en effet rajouté une bonne dizaine, comme l’illustre cette liste non exhaustive factualisée au fur et à mesure de mes interventions, souvent d’ailleurs sur les suggestions des personnes que je rencontre.

8 cf. « élaborer un projet d’établissement ou de service en action sociale et médico-sociale » / Editions DUNOD –

2012

© journée de la Fondation Père Favron / 10 juin 2013 / Jean-Louis DESHAIES « omerta »

6

les acteurs centraux du projet, de sa conception à sa mise en œuvre

les acteurs périphériques facilitants, engagés partiellement dans le projet

les acteurs indifférents, positionnés en extériorité au projet

les acteurs confrontants, critiques vis-à-vis du projet mais pouvant avoir une fonction d'élucidation de ce projet

les acteurs démotivés (« burn-outés »), en raison d'une usure professionnelle ou/et d'un manque de reconnaissance, de considération (absence de « feed-back »)

les acteurs retenus, étouffés, contenus, neutralisés, paralysés, ou/et muselés, en raison de difficultés personnelles d'expression ou de la présence d'autres personnes

les acteurs « logorrhéiques », adeptes des bavardages intarissables et oiseux (souvent sans intérêt réel, vides de sens ou superflus), ayant le besoin irrésistible de parler et de monopoliser la parole

les acteurs indépendants (« free lance »), travaillant comme des « électrons libres »

les acteurs opposants, systématiquement en désaccord avec toutes les propositions

les acteurs de mauvaise foi, adeptes de l’entretien des bruits de couloirs et de la déloyauté, du ladi lafé…

les acteurs complaisants (« béni oui-oui »), toujours empressés à approuver les initiatives d'une autorité établie, ou/et acceptant de toujours s'abaisser au niveau de quelqu'un

les acteurs condescendants, distants voire hautains ou dédaigneux à l’égard « d’un inférieur » ou d’une personne qu’ils considèrent comme telle

les acteurs assujettis ou inféodés, à une logique clanique, se soutenant mutuellement, en cherchant la lutte ou l’intrigue, pour faire prévaloir leur(s) intérêt(s) commun(s) en étant en rupture avec l’intérêt général

les acteurs suffisants, ayant une très (trop) haute idée d'eux-mêmes, donnant leur opinion sur tout sans jamais douter de rien, ni d'eux-mêmes

les acteurs pervers, enclins à nuire, à faire le (du) mal ou/et à l'encourager.

EFFICIO (d’après Jean-Pierre BOUTINET - Anthropologie du Projet - PUF 1999 pour les 4 premières

catégories et EFFICIO pour toutes les autres) / mai 2013

Vos réactions le démontrent : ce n’est pas de la fiction et je pense, avec mon ami Jean-René LOUBAT, que les « pré carrés », sont fréquemment investis, habités :

- par des organismes qui relient davantage les corporatismes que les usagers et les associations qui les représentent,

- par des Présidents, des Directeurs Généraux, des Directeurs, des Élus des IRP, des salariés propriétaires de leurs postes, qui s’approprient les espaces professionnels et les territoires alors que les associations, institutions et services ne sont que des plateaux techniques évolutifs au service des parcours de vie des usagers.

Quelques questions se posent alors :

- quand et comment parle-t-on de toutes ces situations qui offusquent certains témoins et endiguent néanmoins leurs intentions de s’insurger contre leurs auteurs ?

- est-on autorisé ou s’autorise-t-on à évoquer ces ignominies ?

© journée de la Fondation Père Favron / 10 juin 2013 / Jean-Louis DESHAIES « omerta »

7

- qu’en est-il alors du questionnement éthique au niveau institutionnel ?... Les réponses à ces énigmes doivent nous convier à une détermination collective inébranlable, à un véritable combat de toutes les parties prenantes de la bientraitance institutionnelle.

Un point d’ancrage : le pacte d’engagement collectif

Cela ne sert à rien de proclamer l'importance de « prendre soin », si l'on ne voit pas que cela suppose de prendre soin de ceux qui prennent soin...

Cette exhortation de Yann ROLLIER (Care2), relayée par Roland JANVIER9, s’inscrit dans les avancées majeures inhérentes aux démarches-qualité entreprises au sein des associations et des établissements de la branche d’activités sociale et médico-sociale, qui ont la volonté concomitante du bien-être des usagers et d’une gestion humaine des ressources10.

Des approches méthodologiques audacieuses et participatives visent, de facto, à interroger sans complaisance les pratiques et à élaborer un plan d'actions –formalisées alors dans un véritable pacte d’engagement collectif– pour améliorer la qualité des accompagnements, pour créer une culture d'entreprise dont la personne accueillie, –appréhendée comme Sujet Singulier–, est au centre des préoccupations de tous les professionnels.

Cela conduit, en ce cas, à mettre en exergue les bienfaits des bonnes pratiques institutionnelles mais aussi leurs limites. Je pense là à celles, citées précédemment, inquiétantes, parfois préjudiciables, résultant de comportements tout aussi indésirables qu'inacceptables, de la part de certains « professionnels »… Et il n’est malheureusement pas si rare de rencontrer, parmi eux, les plus prompts à vilipender les cadres de direction, coupables à leurs yeux de tous leurs maux et de tous les dysfonctionnements.

Bien entendu –rappelons-le–, il ne s’agit pas de nier le rôle primordial de l’encadrement hiérarchique, tant nos constats, ici et là11, démontrent les dommages voire les ravages que causent des postures managériales inadaptées, qui se traduisent, le plus souvent, par un mépris des professionnels et donc, par effets, des personnes accompagnées.

Alice CASAGRANDE ne dit d’ailleurs pas autre chose lorsqu’elle indique12 que « c’est la permissivité de l’encadrement, son incapacité à assumer de s’opposer aux professionnels pour faire appliquer certaines règles élémentaires du travail, qui est, aujourd’hui, le facteur le plus récurrent de maltraitance dans les institutions. Et elle ajoute que toute la mobilisation des professionnels ne saurait pallier à des défaillances d’encadrement, lorsque manquent la méthode ou la résolution de faire bouger les lignes ».

Il nous faut donc bien affirmer, ici et sans concession, qu’une démarche-projet-qualité ne peut opérer que si elle s’appuie impérativement sur l’ENGAGEMENT de TOUS –autorités de contrôle, associations, bénéficiaires, environnement familial et personnel, directions générales, équipes de direction, professionnels de toutes les fonctions, partenaires...–, afin d’assurer la qualité de service attendue dans le respect de toutes les catégories d’acteurs.

C’est ce qu’illustre le schéma suivant qui nous aide à comprendre les deux hypothèses possibles dans cette relation triangulaire, où nous privilégions :

- celle qui reconnaît l’expertise des professionnels et la valorise, plutôt que de les enfermer dans des rôles d’exécutants,

- celle qui encourage les organismes gestionnaires à l’innovation, en prévenant tout risque de mépris des valeurs promues,

9 cf. Roland JANVIER « éthique de direction en institution sociale et médico-sociale » / ESF Editeur – 2011

10 selon la pertinente formulation de Sabrina PALAMA, Directrice de la MECS Les Filaos (Maison d’Enfants à

Caractère Social), gérée à Saint-Gilles-les-Bains (Réunion) par la Croix-Rouge-Française. 11

cf. Jean-Louis DESHAIES « réussir l’amélioration continue de la qualité en action sociale et médico-sociale »

Editions DUNOD – 2006 12

cf. « ce que la maltraitance nous enseigne / difficile bientraitance » / Editions DUNOD - 2012

© journée de la Fondation Père Favron / 10 juin 2013 / Jean-Louis DESHAIES « omerta »

8

- celle qui s’appuie sur des autorités de contrôle et de tarification partageant la même représentation de la qualité, comme Valérie SCELO l’a bien mentionnée, en n’étant pas seulement guidé par leur règle à calcul.

D'une manière générale –soulignons-le–, on constate que de nombreux professionnels s'engagent résolument dans des fonctionnements que nous qualifions d’innovants –en désespoir de cause tant ils devraient être naturels et inaltérables–… et Philippe CHAVAROCHE13 reviendra plus tard sur ce que la quotidienneté enseigne dans ce domaine, en mettant en évidence le délicat et admirable travail assuré par la majorité des personnels de proximité. En conséquence, il convient d’autant plus de mettre en exergue les attitudes exemplaires de ceux qui se positionnent sans complaisance, pour combattre, notamment, les acteurs qui gangrènent le dispositif et l'environnement institutionnels, par des conduites récusables :

peu ou prou fomentées par une minorité sans scrupules jamais contrariée,

consciemment ou inconsciemment éludées ou masquées par une majorité silencieuse, car muselée ou affidée,

plus ou moins supportées par de nombreux acteurs (salariés mais aussi usagers) qui, impuissants, subissent ces méfaits, directement ou indirectement...

Mais pour reconnaître la vertu d’un engagement collectif au service du SENS, il est primordial de réaffirmer des notions que certains pourraient juger ringardes mais qu’il faudrait bien remettre résolument au goût du jour : l’exemplarité et la loyauté.

Les nécessaires attitudes de loyauté et d’exemplarité à adopter face à l’intolérable

13 cf. « Travailler en MAS, l’éducatif et le thérapeutique au quotidien » / Editions ERES – Mars 2002

© EFFICIO (d'après J.P. HARDY / DAS / ENSP – 27 - 11 - 1998 / intervention conduite à l'initiative de Paul ROSE pour l'ADC / ENSP Bretagne - Pays - de - la - Loire)

© journée de la Fondation Père Favron / 10 juin 2013 / Jean-Louis DESHAIES « omerta »

9

L’engagement de ceux qui s’y emploient est d'autant plus REMARQUABLE que tous prennent conscience que le changement radical, qui bien souvent s'impose, dépend tout autant (voire plus) d'eux-mêmes que de l’association, de la direction générale, des cadres de proximité et du directeur (bien sûr également conviés à agir, à réagir), pour s'interposer lors d'actes de maltraitance active ou passive, d'attitudes méprisantes voire discriminatoires.

Dans certaines associations et certains ESSMS, le processus est indéniablement en marche vers l’application d’une responsabilité partagée, où tous se convainquent de la nécessité absolue et incontournable :

de « mettre à bas » les pactes de non agression14, les pratiques et postures tyranniques à partir desquels l'insupportable se banalise,

de rompre avec les pratiques clandestines11 qui transgressent les obligations contractuelles des uns et des autres,

de dévoiler et de réprimer les actes des auteurs de trop fréquentes maltraitances et souvent à l’origine d’évènements dits indésirables.

Cependant ce mouvement, vers la loyauté et l’exemplarité, ne peut s’amplifier que par ce « pouvoir », de fait délégué et porté par l’ensemble des acteurs, afin de nommer et de traiter l'insoutenable, pour que les bénéficiaires des prestations mais aussi toutes les catégories professionnelles soient reconnus et respectés.

Il faut d’abord se convaincre ou/et convaincre :

- que naître ou devenir handicapé (mental, physique, sensoriel, social…) n’est pas n’être qu’handicapé et que les différences de tout citoyen sont à positiver sans retenue15,

- qu’il n’y a pas de noblesse de fonction16 et que l’arrogance, la domination ou la perversité doivent être examinées de près…

En ce sens, je pense que les Recommandations des Bonnes Pratiques Professionnelles17 peuvent et doivent servir de supports, pour faire évoluer les mentalités en encourageant une saine et sereine confrontation dialectique entre les différentes catégories professionnelles.

14

selon les expressions d’Henri SAVALL et Véronique ZARDET / Ingénierie stratégique du roseau, souple et

enraciné / Éditions Économica – 1999 15

cf. Michel GODET / la France des bonnes nouvelles / Éditions d’Organisation – 2012 16

introduction de Jean-Marie FAUCHER, directeur général de l’A.R.A.P.E.J. (Association Réflexion Action

Prison et Justice), lors du lancement de l’évaluation interne des ESSMS de cet organisme gestionnaire

qu’EFFICIO a accompagné en 2009 17

particulièrement les RBPP relatives au questionnement éthique et à la bientraitance

© journée de la Fondation Père Favron / 10 juin 2013 / Jean-Louis DESHAIES « omerta »

10

Une telle impulsion collective invite également les antagonistes de la bientraitance (ces acteurs que nous avons évoqués précédemment : indifférents ou/et suffisants, électrons libres, systématiquement opposants voire saboteurs)... à changer de catégories ! ... Il faut bien entendu croire en l'évolution de chacun et aux effets « boules de neige » qui peuvent aider à remettre sur les bons rails les plus rétifs. Ti pa ti pa nou va arrivé18. Il faut aussi savoir que l'on ne se débarrasse pas d'une habitude en la flanquant par la fenêtre, mais en lui faisant descendre l'escalier marche par marche (Mark TWAIN).

C’est sans doute ce que nous démontrera l’équipe de l’IMS Charles Isautier de SAINT-LOUIS en évoquant l’évolution qu’ont pu permettre les nouvelles exigences législatives (loi 2002-2 et loi 2005-102).

Cette détermination sereine est sans doute la clef de la réussite de toute démarche-projet-qualité. Elle permet effectivement d’assainir puis d’optimiser durablement le cadre de vie des personnes accompagnées ainsi que le contexte de travail de ceux qui les accompagnent. C’est ce que nous indique Roland JANVIER19 lorsqu’il nous invite à ouvrir la chaine vertueuse de bienveillances des uns sur les autres qu’il décline ainsi :

- bien veiller les uns SUR les autres, c’est développer le travail d’équipe indispensable à la réussite du projet,

- bien veiller les uns POUR les autres, c’est porter la qualité des relations humaines au premier rang des préoccupations,

- bien veiller les uns AVEC les autres, c’est affirmer qu’ensemble les acteurs peuvent faire plus et mieux que chacun dans son coin,

- bien veiller les uns ET les autres, c’est prendre les moyens d’être suffisamment bien collectivement pour concentrer les actions sur ceux dont les professionnels ont à « prendre soin ».

C’est pourquoi plutôt que de croire comme MOLIÈRE que contre la médisance il n'y a guère de rempart, je préfère penser, avec Hervé SÉRIEYX, que l’on peut et que l'on doit parvenir, par son propre enthousiasme, à amorcer l'enthousiasme des autres puis à déclencher une dynamique qui trouvera sa propre autonomie20.

18

pas à pas, petit à petit, marche par marche, on parvient au but, comme l’on dit en créole 19

cf. « éthique de direction en institution sociale et médico-sociale » déjà cité 20

cf. Hervé SÉRIEYX « ce que je crois : est-ce que le manage… ment ! » / Editions d’Organisation – 2003

© journée de la Fondation Père Favron / 10 juin 2013 / Jean-Louis DESHAIES « omerta »

11

C’est à ce point de mon exposé que je souhaite marteler que la responsabilité individuelle relève autant du champ professionnel que du champ éthique...

Et lors de pareilles situations inadmissibles, il ne s'agit certes pas de délation (sauf à admettre que dans le cas contraire on se fait complices de l’inacceptable), mais bien d'une obligation contractuelle et déontologique imposant une application sans failles des droits et des devoirs des professionnels et des usagers... pour un respect absolu de la dignité humaine à tous les niveaux.

C’est donc une dynamique de l’éthique que l’on doit faire basculer dans le fonctionnement naturel des ESSMS.

La dynamique de l’éthique : un postulat primordial pour la mise en œuvre efficiente des projets des ESSMS

Dans notre secteur, de plus en plus, on définit un projet associatif et des orientations qui se convertissent en prescriptions pour la mise en œuvre efficiente des projets des ESSMS.

En résultent alors une organisation et un positionnement des emplois dans une logique :

- où de la créativité des uns et des autres doit se dégager de saines confrontations et des compromis sereins –ce qui fait le projet vivant–,

- où la dualité entre les gestionnaires (ceux qui orientent) et les professionnels (ceux qui mettent en œuvre) doit prévenir et contrecarrer la logique et les positions de « experts », des « gens de métier » qui, malheureusement, trouvent trop souvent comme solutions, l’évitement et le repli au détriment de la mission à assurer.

C’est bien à tort, en effet, que des acteurs ressentent ce risque de négation de leur identité professionnelle, alors que la « gouvernance » (l’organisme gestionnaire) promeut une orientation et la « dirigeance » (la direction générale et les équipes de direction) donne un cadre ainsi que des marges de délégation et d’autonomie.

© journée de la Fondation Père Favron / 10 juin 2013 / Jean-Louis DESHAIES « omerta »

12

C’est vraisemblablement ce que Michel LAFORCADE21 ressortira cet après-midi de son intervention, en évoquant la gouvernance associative et trois de ses attributs essentiels : l’assurance d’un cap et d’une stratégie, les bases d’un fonctionnement démocratique, la référence continue à l’Ethique.

Il me semble, à moi aussi, essentiel d’être particulièrement pragmatique sur ces points. Et je ne peux qu’inviter tous les ESSMS à adhérer à l’approche de Guy Le Boterf22 relevant la nécessité d’un savoir agir individuel et collectif (la compétence), qui doit résulter d’une articulation et d’une interaction adéquates entre :

la Légitimité garantie par la qualification, l’expérience, les parcours professionnels…

le Sujet dont la posture s’exprime à partir de sa personnalité, de l’adaptation de ses comportements aux situations rencontrées, tant dans les relations avec les usagers et les familles, qu’avec les autres professionnels, les partenaires…

le Cadre contextuel précisant l’organisation, le fonctionnement, la liaison entre les différents niveaux de projets, la lisibilité et l’harmonisation des rôles et fonctions, la fluidité de la communication verticale et horizontale, interne et externe, ascendante et descendante…

Ce postulat implique l’engagement et la responsabilité partagés, au-delà de la seule fonction de direction :

pour que tous se sentent concernés et valorisés par ce qui se déroule au mieux,

mais, aussi pour que tous s’impliquent pour repérer, énoncer et traiter les situations inadaptées, qu’elles génèrent des actes de maltraitance ou des événements indésirables.

De surcroît, cette approche permet de pleinement répondre, en en garantissant le Sens, à la RBPP de l’ANESM sur le questionnement éthique qui invite à une réflexion visant à déterminer « le bien agir » en tenant compte des contraintes relatives à des situations déterminées, comme l’illustre le schéma ci-après :

© EFFICIO / d’après G. LE BORTEF « de la compétence : essai sur un attracteur étrange » /

Editions d’Organisation / 1994 et RBPP – ANESM « le questionnement éthique »

21

cf. « penser la qualité dans les institutions sanitaires et sociales / Sens – Enjeux – Méthodes » / Editions Séli

Arslan – 2008 22

cf. « de la compétence : essai sur un attracteur étrange » / Editions d’organisation – 1994

© journée de la Fondation Père Favron / 10 juin 2013 / Jean-Louis DESHAIES « omerta »

13

Ce questionnement doit être développé en visant donc un maillage efficient entre :

les composantes professionnelles23 qui renvoient à la Légitimité,

les composantes personnelles23 qui se réfèrent au Sujet et à ses postures,

les composantes institutionnelles23 qui doivent permettre, à partir d’un Cadre contextuel adapté, d’assurer les conditions :

- d’une qualité de vie et d’accompagnement des usagers,

- d’une qualité de travail en termes de conditions adaptées et d’organisation sécurisée pour les professionnels.

« Tout professionnel bientraitant est un professionnel bien traité » nous dit Michel LEMAY24.

Fondées sur des rapports de confiance, c’est cet état de Droit qui cautionne et protège le « savoir et pouvoir agir »25, dont l’expression est garante du renforcement du plaisir au travail, et, par effets, de l’amélioration continue de la qualité des services rendus aux usagers.

L’arrivée en force de la parole des bénéficiaires doit bien alors constituer un levier majeur pour étayer une dynamique de projets et, partant, l’implication valorisante des professionnels.

Il nous faut donc être optimistes, car les salariés s’impliquent ou s’impliqueront de plus en plus dans un univers de moins en moins verrouillé, en raison de cette place réaffirmée de l’usager et de la détermination des professionnels... pour peu que les employeurs soient des employeurs sur la base de projets concertés et d’une organisation congruente, stimulante et surtout non complaisante...

Il s’agit bien alors de soutenir les structures les plus aptes au changement qui exigent, comme le souligne Eugène ENRIQUEZ26, des êtres de doutes et non de certitudes, montrant un haut degré de tolérance à l’ambiguïté et à l’anxiété... ce qui ne peut être le cas des acteurs, quels que soient leurs statuts, qui sont dans des logiques de suffisance et/ou de toute puissance. Dans cette perspective d’une évolution vitale pour la branche d’activités sanitaire, sociale et médico-sociale, je suggère que tous se retrouvent dans la combinaison de la règle des 3 P :

23

cf. formulations utilisées dans la RBPP « le questionnement éthique dans les ESSMS » 24

cf. « la bientraitance à l’égard des professionnels » dans « Bientraitances, mieux traiter familles et

professionnels » / Editions FLEURUS - 2000 25

cf. formulation de G. LE BOTERF / ouvrage déjà cité 26

cf. « les jeux du pouvoir et du désir dans l’entreprise » / Édition Desclée de Brouver – 1999

© journée de la Fondation Père Favron / 10 juin 2013 / Jean-Louis DESHAIES « omerta »

14

Ne sommes nous pas là dans le champ du possible et de l’évidence…

Alors comment ne pas citer pour conclure :

- Antoine de ST-EXUPÉRY qui nous dit que « l’avenir n’est que du présent à mettre en ordre. A quoi bon discuter cet héritage. L’avenir tu n’as pas à le prévoir, mais à le permettre »

- et Hervé SÉRIEYX qui ajoute que « dans un monde où l’on a de moins en moins de certitudes, il faut veiller à conserver quelques convictions et à ne pas tricher avec elles ».

Je vous remercie de votre attention, en espérant que mon propos permette d’engager un échange avec vous.

Jean-Louis DESHAIES Consultant-formateur EFFICIO Conseil

[email protected]

© réf . « oser la confiance, propos sur l’engagement des dirigeants » – B. MARTIN - V. LENHARDT - B. JARROSON – INSEP Editions – 1997

VOULOIR (POLITIQU

E ET STRATÉGIE

) DES

ORGANISMES

GESTIONNAIRES

(Associations,

Fondations…)

« SAVOIR-AGIR » ET

« BIEN-AGIR »

DES PROFESSIONNELS DES

ESSMS

POUVOIR (CONTRÔL

E ET CONSEIL)

DES AUTORITÉS

DE TARIFICATI

ON

PRISE EN COMPTE

DE LEURS SINGULARI

TÉS OU

UNIFORMITÉ

DES PRESTATIO

NS ?

ENCOURAGEMENT A

L’INNOVATION

OU MÉPRIS DES

VALEURS PROMUES ?

RECONNAI

SSANCE DE LEUR

CONNAISSANCE DU «

TERRAIN » OU

ENFERMEMENT

DANS DES RÔLES

D'EXÉCUTANTS ?

PARTAGE

DE LA MÊME

REPRÉSENTATION DE

LA QUALITÉ

OU RIGORISME

?

« Évaluons la non-

qualité : Chasser la

non-qualité chercher

le zéro défaut »

AMÉLIORATION

CONTINUE DE LA

QUALITÉ DES

SERVICES RENDUS

AUX BENEFICIAI

RES