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À Georges Bourdallé
Statéco N° 113, 2019
Insee
Département Coordination Statistique
et Internationale
Timbre L301
88 avenue Verdier
CS 70058 92541 Montrouge cedex
Téléphone : (33) 1 87 69 55 38
IRD DIAL, 4, rue d’Enghien 75010 Paris
Téléphone : (33) 1 53 24 14 50
AFRISTAT BPE 1600 Bamako République du Mali
Téléphone : (223) 20 21 55 00
Directeur de la publication Jean-Luc Tavernier
Co-rédacteurs en chef Emilie Laffiteau, consultante Pierre Muller, Insee Constance Torelli, Insee
Relectrice Véronique Alexandre, Insee
Comité de rédaction Madior Fall, Afristat Christophe Jalil Nordman, IRD, DIAL Mireille Razafindrakoto, IRD, DIAL Anne-Sophie Robilliard, IRD, DIAL François Roubaud, IRD, DIAL Camille Saint-Macary, IRD, DIAL
Tirage à 300 exemplaires
© Insee 2019 ISSN
Sommaire Avant-propos
J.-P. Cling 1
Édito
E. Laffiteau, P. Muller, C. Torelli
5
Dossier spécial Jumelage
Le changement de base des comptes nationaux de la Tunisie : un
projet ambitieux mais exigeant
M. Frigui et P. Muller
9
Vers une meilleure mesure du secteur informel en Tunisie
M. Hammami, Y. Helel et C. Torelli
33
La mesure des inégalités régionales : un nouveau défi pour le
système statistique national
B. Morel et S. Ouadday
41
Élaboration des premiers PIB régionaux en Tunisie
B. Hurpeau, S. Khedhaouria et K. Salah
55
La réforme juridique de l’activité statistique en Tunisie
M. Zgoulli
63
Les enjeux de la formation à Statistiques Tunisie
X. Helfenstein, E. Laffiteau et M. Zgoulli
73
INS integrated architecture: pilot application in external trade
statistics and methodological improvements in data processing
M. Bruno, M. S. Causo, A. Najjar, G. Sindoni, T. Tkitek, C. Vaccari
81
Hors dossier
Les effets du Ramadan sur les prix : une analyse comparative sur
3 pays
M. N. Faye, D. Ladiray, A. Lassoued, B. Maghrebi, A. Mansouri
93
Migration patterns and labour market outcomes
A. David and M.-A. Marouani
107
The impact of exchange rate shocks on trade in times of
uncertainties: evidence from three oil-importing countries in the
MENA region
B. Guizani
119
Appel à contributions
Les statistiques de Gouvernance, Paix et Sécurité :
quelles mesures pour quels résultats ?
137
1
Statéco n°113, 2019
Avant-propos
En publiant ce numéro spécial consacré à la Tunisie – coordonné par Emilie Laffiteau, Pierre Muller et
Constance Torelli, Statéco participe, à sa façon, à la célébration du 50e anniversaire de l’Institut national
de la statistique (INS) créé en 19691.
Ce numéro est donc publié à un moment particulièrement important pour la statistique publique
tunisienne, qui est fortement sollicitée depuis la révolution de 2011. Jusqu’alors, les statistiques
produites par l’INS étaient soumises à de nombreuses contraintes et les publications étaient extrêmement
limitées. Dans le nouveau contexte politique, la statistique est considérée comme un instrument essentiel
du développement économique et du débat démocratique. Les attentes vis-à-vis de l’INS et du système
statistique public sont donc considérables. Les fréquentes réactions et les nombreux débats au Parlement,
dans la presse et dans la société civile sur les statistiques les plus sensibles (pauvreté, chômage, inflation,
etc.), qui ne sont pas propres à la Tunisie mais caractéristiques de tous les pays démocratiques,
témoignent de ces attentes.
La Commission européenne a rapidement pris la mesure des nouveaux besoins de la Tunisie en matière
statistique. A la demande de l’INS, Eurostat a lancé une « Évaluation globale adaptée du système
statistique national de la Tunisie » coordonnée par Jean-François Divay (ancien chef de la division des
programmes de coopération à l’Insee), dont le rapport a été remis en 2014. Ce rapport considérait que
« le système national de la statistique tunisien dispose de bases solides mais qu’une profonde réforme
sera nécessaire pour qu’il atteigne les trois objectifs essentiels d’efficacité, de qualité et de respect des
principes fondamentaux ».
Dans le prolongement direct de ce rapport, la Commission européenne a préparé, en coordination avec
les autorités tunisiennes, un projet de jumelage statistique. Les projets européens de jumelage sont une
forme originale de coopération conduits dans tous les pays du « voisinage », associant sur une durée
courte (2-3 ans maximum) une administration d’un pays de l’Union européenne à son homologue d’un
pays partenaire. En Tunisie, qui est un des pays les plus actifs dans ce domaine, une vingtaine de
jumelages ont ainsi été conduits dans les années 2010 ou sont en cours dans des domaines très divers
(agriculture, transports, justice, assemblée nationale, etc.).
L’Insee, pour qui c’était une première, a accepté de piloter ce projet de jumelage ayant pour objectif la
modernisation de l’INS et du système statistique public tunisien. Ce projet, dont les principaux résultats
sont présentés ici, est le plus important jamais conduit par l’Insee. Il a été mené de février 2016 à avril
2018, soit une durée d’un peu plus de deux ans, avec une gestion assurée par Expertise France, l’agence
française d’expertise technique internationale. Sa mise en œuvre a requis une mobilisation très forte de
l’Insee et de son partenaire italien l’Istat (avec une participation plus ponctuelle de l’INS de Lituanie).
Du côté de l’Insee, il faut mentionner, d’une part, la mise en place d’une équipe de projet2 et, d’autre
part, la participation d’une centaine de cadres à des missions d’assistance technique ainsi qu’à l’accueil
de visites de collègues de l’INS, dont trois en directions régionales. Ce projet a renforcé le partenariat
déjà très riche avec l’INS, sachant que la Tunisie est, avec le Maroc, le principal partenaire de la
coopération de l’Insee. Il a également permis de nouer une collaboration fructueuse avec l’Istat. Par
1 À noter qu’à l’occasion de ce 50e anniversaire, l’Insee a remis une copie numérisée de 101 rapports statistiques venant de la
bibliothèque de l’Insee, qui constituent les archives de la période du protectorat (1881-1956), ainsi qu’un fac-similé d’un
annuaire statistique de la Tunisie datant de 1947. 2 Cf. la participation à temps partiel de Dominique Francoz (cheffe de projet pour l’Insee), cheffe de la division Appui technique
international et de Georges Bourdallé, responsable Maghreb dans cette division à qui ce numéro est dédié, ainsi que la mise
à disposition par l’Insee d’un agent accueilli à plein temps par l’INS en tant que conseiller résident de jumelage (Jean-Pierre
Cling puis Carla Saglietti).
2
Statéco n°113, 2019
ailleurs, le service statistique du ministère de l’Environnement et de la transition écologique (SDES) a
participé au projet, ainsi que la Banque de France (tous deux sur le volet comptes nationaux).
L’INS de Tunisie a reçu près de 110 missions pendant la durée du projet, soit une mission d’experts
étrangers chaque semaine en moyenne, tout en continuant son travail courant. Il est indispensable de
rendre hommage à cet égard à Hedi Saidi, ancien Directeur général de l’INS, qui a apporté un appui
constant à ce projet et a rencontré systématiquement toutes les équipes de missionnaires pour se tenir au
courant des avancées de leurs activités et des problèmes éventuellement rencontrés, ainsi qu’à Mouna
Zgoulli, Directrice centrale de l'informatique, de la diffusion et de la coordination, pour sa mobilisation
sans relâche pour accueillir ces missionnaires, dynamiser les équipes de l’INS et faciliter le travail du
conseiller résident de jumelage. Du côté des partenaires locaux, il convient également de mentionner
l’appui permanent de la délégation de l’Union européenne en Tunisie (Francis Lemoine) et de l’unité de
gestion du programme d’appui à l’accord d’association et à la transition (Leila Rmadi).
Ce numéro n’a pas pour prétention de présenter l’ensemble des résultats du projet de jumelage, mais
seulement une sélection des résultats qui nous semblent les plus tangibles et les plus significatifs.
- Trois articles portent ainsi sur les activités menées en matière de comptabilité nationale, un thème
clairement prioritaire compte tenu de l’ancienneté de l’année de base (1997) et du besoin de prendre en
compte les changements de la structure économique intervenus depuis une vingtaine d’années ainsi que
le nouveau système de comptabilité nationale (SCN 2008), en particulier en matière de mesure de
l’activité du secteur informel.
- Parmi ces articles sur la comptabilité nationale figure un article portant sur la décomposition régionale
du produit intérieur brut, un domaine lié aussi aux statistiques régionales, qui constituent le deuxième
thème sur lequel l’investissement a été le plus lourd dans le jumelage, et auxquelles est consacré un
article.
- Trois autres articles portent sur des sujets qui étaient au cœur de l’évaluation de 2014 ainsi que du
projet de jumelage : un article sur la révision de la loi statistique, dont la mise en œuvre est une condition
incontournable pour améliorer le fonctionnement de l’INS et du système statistique public3 ; un article
sur la formation permanente et le projet de création d’un centre de formation ; enfin, un article sur
l’organisation du système d’information, activité conduite par l’Istat qui a abouti à des avancées
importantes.
Outre les sept articles consacrés au jumelage, ce numéro spécial comprend aussi trois articles
scientifiques portant sur la Tunisie. Au total, la diversité des articles rassemblés dans ce numéro spécial
reflète pleinement la vocation de Statéco, qui combine la publication d’articles de méthodologie
statistique et d’économie appliquée sur le développement.
Plusieurs activités importantes menées dans le cadre du jumelage ne sont donc pas évoquées ici, que ce
soit faute de disponibilité de leurs responsables pour rédiger un article ou de leur manque de résultats
tangibles cohérent avec leurs objectifs initiaux. Il est important de souligner à cet égard que, compte
tenu de la situation de départ et des contraintes évoquées ci-dessus, certaines activités n’ont pu avancer
que marginalement et se sont inscrites avant tout dans une optique de sensibilisation de l’INS à des
nouvelles démarches en matière d’organisation interne, de communication et de diffusion, etc.
L’importance de l’apport du projet en matière d’informations et de bonnes pratiques ne peut être sous-
estimée. Il reviendra, dans la durée, à l’INS de se saisir et d’approfondir ces thématiques. Ainsi, les
formations conduites par l’Istat sur SDMX (Statistical Data and Metadata eXchange)4 sont encore en
cours de mise en œuvre à l’INS, mais lui ont d’ores et déjà permis de devenir un des leaders, au niveau
africain, dans ce domaine. Un atelier a ainsi été co-organisé par l’INS et par l’Insee en 2019 avec l’appui
de la Banque africaine de développement à destination des pays africains et du Maghreb pour
promouvoir l’expérience tunisienne dans ce domaine.
3 Cette loi révisée n’est pas encore adoptée par le Parlement au moment de l’écriture de ces lignes. 4 SDMX est une initiative internationale qui vise à normaliser et à moderniser les mécanismes et les processus d’échange de
données et de métadonnées statistiques.
3
Statéco n°113, 2019
Une difficulté majeure du projet de jumelage consistait dans la contradiction entre l’objectif ambitieux
qui lui était assigné, à savoir d’aider au lancement d’une réforme systémique du système statistique
public, dont la préparation et la mise en œuvre requéraient incontournablement des moyens
supplémentaires, et un contexte de contraintes financières et en ressources humaines aiguës qui
empêchait précisément l’allocation de ces moyens (ainsi, l’INS n’a eu aucune autorisation de
recrutement entre 2013 et 2019), résultant de la crise budgétaire que subit la Tunisie depuis plusieurs
années. Malgré ces difficultés intrinsèques, outre la qualité des équipes déjà mentionnée, trois principaux
facteurs ont contribué, à notre avis, aux résultats obtenus, qui tiennent à la spécificité des projets de
jumelage par rapport à la plupart des projets habituels de coopération.
- Le premier et principal atout du projet provient du fait qu’il n’était pas greffé de manière artificielle
sur une institution tunisienne, mais qu’il s’est inscrit dans un processus en cours de modernisation de
l’INS, qu’il visait à appuyer et renforcer. Ce projet a été pleinement approprié par l’INS qui en était à
l’origine et qui en a défini les termes de référence avec la Commission européenne, selon le mode de
fonctionnement habituel des projets de jumelage.
- Ensuite, malgré la lourdeur de ce projet pour l’INS, l’intérêt des projets de jumelage est d’éviter une
coopération de « substitution » en privilégiant un véritable partenariat orienté vers l’obtention
d’objectifs clairement définis à l’avance selon un calendrier et des méthodes de travail décidés d’un
commun accord. Le fait que tous les dix articles de ce numéro soient co-écrits par des auteurs français
et tunisiens, parmi lesquels le Directeur général de l’INS Adnen Lassoued, témoigne de cette approche.
- Enfin, même si ce projet a permis de donner un coup d’accélérateur à cette coopération dans plusieurs
domaines, elle a souvent commencé avant le jumelage et s’est poursuivie ensuite ; ainsi, l’Insee et l’INS
entretiennent des relations étroites de longue date et la coopération technique entre les deux instituts
s’inscrit dans la durée, comme le montre l’exemple de la comptabilité nationale où l’Insee va continuer,
sous la direction de Pierre Muller, à assister l’INS jusqu’à la finalisation du changement de base.
Pour conclure cet avant-propos, je souhaite rendre hommage à Pierre Muller, qui a joué un rôle clé dans
ce jumelage et qui est un des trois co-éditeurs scientifiques de ce numéro spécial. Avec André Vanoli,
Pierre Muller avait déjà aidé à mettre en place la première version de la comptabilité nationale tunisienne
dans la seconde moitié des années 1980, soit il y a une trentaine d’années ! Un article qu’il avait publié
dans la revue Statéco en 1986 (mentionné dans la bibliographie de l’article sur la comptabilité nationale),
qui rendait compte de ces travaux, a d’ailleurs servi de référence pour la mise en œuvre de cette activité
dans le cadre du jumelage.
Quelle meilleure preuve peut-on trouver de l’utilité de la revue Statéco, qui a pour mission de
promouvoir les méthodologies statistiques dans les pays en développement, que de découvrir que des
articles de la revue peuvent encore être utiles trente ans après leur publication ? Nous espérons que ce
numéro spécial pourra être utile de la même manière aux comptables nationaux tunisiens mais aussi plus
généralement aux statisticiens de l’INS, s’ils souhaitent se pencher en l’an 2050 sur le travail de leurs
lointains prédécesseurs !
Jean-Pierre Cling,
Chef du département de la Coordination statistique et internationale à l’Insee
4
Statéco n°113, 2019
5
* Emilie Laffiteau est macroéconomiste, consultante dans le secteur des statistiques en Afrique
[email protected], Pierre Muller est inspecteur général honoraire de l’Insee [email protected] et
Constance Torelli est chargée des programmes au service de coopération de l’Insee [email protected]
Éditorial E. Laffiteau
P. Muller
C. Torelli*
Ce numéro spécial de la revue Statéco rend compte des
travaux réalisés dans le cadre du jumelage européen entre
l’Institut national de la statistique tunisien1 (INS), l’Insee
et l’Istat (INS italien), l’Institut de Lituanie ayant
également apporté son concours2. Il propose également
des articles qui traitent de la Tunisie sur des thèmes
connexes, à savoir la migration, les prix et les chocs de
taux de change.
Le jumelage a été mis en place en février 2016 et s’est
terminé en avril 2018, après 27 mois de travaux. Il a
mobilisé de nombreux experts français, italiens et
lituaniens. Au total, 700 jours d’expertise ont été apportés
à l’INS, principalement sous la forme de missions mais
également de visites de cadres tunisiens, notamment en
France et en Italie. L’objectif fondamental du jumelage
était la modernisation de l’appareil statistique de Tunisie,
avec trois enjeux principaux : renforcer la gouvernance du
Système statistique public, améliorer la qualité et
l’étendue de la production statistique, assurer une
meilleure communication et diffusion des données. Dans
ce cadre, les travaux ont été répartis en cinq grands volets,
à savoir la loi statistique (volet A), la modernisation de
l’INS (volet B), la comptabilité nationale (volet C), les
statistiques régionales (volet D) et la diffusion-
communication (volet E). Les articles présentés dans ce
numéro spécial portent sur l’ensemble des volets. Chacun
de ces volets a été subdivisé en sous-activités distinctes.
Ainsi par exemple, le volet C sur la comptabilité nationale
comprenait-il six activités : changement de base des
comptes tunisiens et intégration des recommandations du
Système de comptabilité nationale (SCN) 2008, comptes
1Dans l’ensemble du numéro spécial, l’institut de statistique de
Tunisie est désigné Institut national de la statistique (INS) et non
pas Statistiques Tunisie, terme pourtant utilisé dans certains
textes officiels, en particulier la loi statistique. Le choix du sigle
INS permet, en particulier, de mieux distinguer l’Institut en tant
que tel du Système statistique public (SSP) dans son ensemble,
qui comprend, outre l’INS, les services statistiques mis en place
dans certains ministères et organismes publics. Le système
statistique public est quant à lui désigné par Système statistique
national (SSN), qui est d’ailleurs le terme officiel. 2 Ce projet de jumelage a été dirigé par Hedi Saidi (alors DG
de l’INS de Tunisie), Dominique Francoz (Insee) et Tiziana
Pellicciotti (Istat), Jean-Pierre Cling puis Carla Saglietti
exerçant les fonctions de conseiller résident de jumelage, et
Mouna Zgoulli (INS) celles d’homologue du conseiller résident
de jumelage.
trimestriels, répartition régionale du PIB, secteur
informel, comptes et patrimoines financiers, statistiques et
comptes de l’environnement.
Le jumelage s’était donné un certain nombre d’objectifs
ambitieux à atteindre, qu’il s’agisse de l’adoption d’une
nouvelle loi statistique et du renforcement de la
gouvernance du système statistique national (SSN), de la
mise en place d’une unité « qualité » et d’un centre de
formation au sein de l’INS, de l’expérimentation d’une
nouvelle organisation des directions régionales (DR) de
l’INS, du développement d’un dispositif ambitieux de
statistiques régionales et locales, de l’engagement de
l’INS dans une nouvelle base de comptes nationaux
devant permettre, en particulier, d’adopter les
recommandations du SCN 2008, des formations mises en
place afin de permettre l’utilisation de la norme SDMX
pour la diffusion des données et métadonnées… Le
constat est que les résultats attendus à l’issue du jumelage
ont été atteints, pour la plupart. Ces réalisations n’ont été
possibles que grâce à la forte implication conjuguée des
experts européens et des cadres et personnels de l’INS.
Elles sont d’autant plus remarquables que les moyens de
l’INS sont limités et que les travaux au titre du jumelage
entraient en concurrence, dans une large mesure, avec les
travaux courants de l’Institut.
Il n’en reste pas moins que les travaux sont appelés à se
poursuivre après la fin du jumelage pour que l’objectif de
modernisation de l’appareil statistique tunisien, dans ses
différents aspects, soit parachevé en totalité. Un tel
constat, qui vaut d’ailleurs pour l’ensemble des volets,
était attendu dès le démarrage du jumelage tant l’ambition
était forte en regard de la durée même de l’opération, de
même que des moyens et ressources de l’INS.
Les articles de ce numéro spécial s’articulent ainsi autour
d’une double perspective. Ils cherchent en effet à décrire
les résultats obtenus au cours du jumelage pour les
différents volets et activités tout en proposant des pistes
de développement et d’approfondissement pour « l’après
jumelage ».
L’article de Mohamed Frigui et Pierre Muller, « Le
changement de base des comptes nationaux de la Tunisie :
un projet ambitieux mais exigeant », analyse en détail le
processus de changement de base des comptes nationaux
tunisiens mis en place dans le cadre du volet C du
jumelage. Après avoir rappelé les caractéristiques des
comptes nationaux actuels de la Tunisie, qui reposent sur
6
Statéco n°113, 2019
la version 1993 du SCN, l’article présente les principales
caractéristiques d’une nouvelle génération de comptes
nationaux pour la Tunisie. Celle-ci s’appuiera sur deux
années de base (2015 et 2016) et non plus une seule année
(1997) comme dans la génération actuelle de comptes.
Outre une remise à niveau indispensable et la prise en
compte de nouvelles sources statistiques (ou de sources
fortement renouvelées), la nouvelle génération de
comptes doit permettre la mise en œuvre des
recommandations de la nouvelle version du SCN (SCN
2008) et l’amélioration, très attendue, de la mesure par la
Comptabilité nationale des activités de l’économie
informelle. En ce sens, le processus de changement de
base est ambitieux, cela d’autant plus que l’année de base
de la génération actuelle est ancienne, mais aussi exigeant
en termes de mobilisation de ressources et de
compétences, aussi bien à la direction de la Comptabilité
nationale de l’INS que dans les autres directions
statistiques. Sont présentées ensuite les principales
évolutions au niveau des comptes des secteurs et sous-
secteurs institutionnels et des comptes de biens et
services, de même que les principales conséquences à
attendre de cette nouvelle génération de comptes
nationaux sur l’évaluation du produit intérieur brut (PIB)
de la Tunisie. L’article comprend par ailleurs trois
annexes, respectivement sur les comptes trimestriels, les
comptes financiers et les statistiques et comptes de
l’environnement en Tunisie.
L’article de Mohamed Hammami, Yamen Helel et
Constance Torelli, « Vers une meilleure mesure du
secteur informel en Tunisie », traite du dispositif
statistique mis en place, dans le cadre du changement de
base des comptes nationaux tunisiens, pour mieux
appréhender et mesurer les activités de l’économie
informelle. Comme dans nombre de pays, cette forme de
production connaît un développement rapide en Tunisie,
par exemple dans des secteurs d’activité comme le
bâtiment (second œuvre), les commerces ou encore
certains secteurs des services (réparation automobile). Les
estimations, souvent évoquées, notamment dans les
médias, de la part de l’informel dans le PIB, ne s’appuient
pas réellement sur une base statistique solide. Par ailleurs,
la définition de la notion d’économie informelle est loin
de faire consensus entre les économistes. Dans ce
contexte, le changement de base a été l’occasion, en
premier lieu, de proposer une définition précise de
l’économie informelle, conforme aux principes du SCN
2008 et pouvant constituer une référence pour d’autres
types de travaux statistiques. Quant à lui, le dispositif
statistique doit être en mesure de couvrir l’ensemble des
unités de production de l’économie informelle tunisienne,
que celles-ci soient connues ou non de l’administration
fiscale ou sociale. Ce dispositif s’inspire directement de la
méthodologie des « enquêtes 1-2-3 », conçue par l’Institut
de recherche pour le développement (IRD-DIAL) au
début des années 1990 et qui a fait ses preuves sur
différents continents : Afrique, Asie, Amérique latine.
L’article de Bernard Morel et Samira Ouaddey, « La
mesure des inégalités régionales : un nouveau défi pour le
système statistique national», traite d’un enjeu central
pour la statistique publique tunisienne, en particulier
l’INS, à savoir la mise en place d’un système efficient de
statistiques régionales et locales (volet D du jumelage).
En effet, la demande sociale de statistiques publiques
pour rendre compte des fortes inégalités territoriales en
Tunisie s’élargit d’année en année, renforcée en 2018 par
le lancement d’un processus de décentralisation. Pour
relever ce défi, le SSN s’est engagé dans une série
d’opérations impliquant différentes composantes : l’INS,
qui en assure la coordination technique, mais également
les services statistiques présents au sein des ministères et
des principaux opérateurs publics. À court terme, ces
opérations visent à la production d’une base de données
régionales, ensemble limité de résultats annuels essentiels,
cohérents sur l’ensemble du territoire et sélectionnés avec
les principaux utilisateurs régionaux. À plus long terme,
les statistiques régionales constituent une composante
déterminante de la stratégie de modernisation de
l’appareil statistique, conformément à l’évolution des
standards de qualité internationaux : mobilisation des
données administratives à des fins statistiques, montée en
puissance de nouvelles technologies de collecte, de
diffusion et d’analyse intégrant l’information
géographique, attribution de nouvelles missions pour les
établissements régionaux de l’INS en matière de diffusion
et de communication de statistiques régionales et locales.
L’article comprend également un encadré sur la
réorganisation des DR de l’INS, processus engagé au
cours du jumelage sous la forme d’une expérimentation à
7 établissements régionaux. Cette expérimentation a
constitué une dimension essentielle du volet D.
L’article de Benoît Hurpeau, Samia Khedhaouria et
Karim Salah, « Élaboration des premiers PIB régionaux
en Tunisie », traite d’une opération importante engagée au
cours du jumelage (volet C), à savoir la mesure du PIB de
l’économie tunisienne au niveau régional. C’est la
première fois que l’INS se lançait dans un projet de cette
nature, qui s’inscrit par ailleurs dans le cadre de la mise
en place d’un dispositif ambitieux de statistiques
régionales et locales (voir l’article de Bernard Morel et
Samira Ouaddey) afin d’appuyer la définition, la mise en
œuvre et l’évaluation des politiques régionales,
notamment dans le domaine économique. Après avoir
rappelé un certain nombre de concepts de base qui sous-
tendent tout processus de régionalisation de la mesure du
PIB (notion de territoire économique régional, unité de
référence….) et les différentes méthodes pouvant être
utilisées (méthodes ascendante, descendante et mixte), qui
s’inspirent directement des préconisations européennes en
matière de comptes régionaux, l’article analyse les outils,
données et méthodes pouvant être mobilisés, dans le
contexte statistique tunisien, pour les différentes activités.
Le PIB représentant, pour l’essentiel, la somme des
valeurs ajoutées de ces activités, sa mesure au niveau
régional s’appuie en effet sur une opération préalable, à
savoir la répartition par région des valeurs ajoutées
mesurées au niveau national pour les activités composant
l’économie tunisienne, que celles-ci appartiennent à la
sphère marchande, non financière comme financière, ou à
la sphère non marchande. L’article présente enfin certains
des principaux résultats obtenus.
L’article de Mouna Zgoulli « La réforme juridique de
l’activité statistique en Tunisie », analyse un aspect
particulièrement important des travaux conduits au titre
7
Statéco n°113, 2019
du volet A du jumelage relatif au cadre juridique et
institutionnel des missions du SSN de Tunisie. Il s’agit en
effet de la définition et de la mise en place d’une nouvelle
loi statistique, prenant la suite de la loi statistique de
1999. Une évaluation globale du SSN avait déjà été
menée en 2014 dans le cadre d’une coopération avec
Eurostat. Cette évaluation avait conclu que le SSN
disposait certes de bases juridiques solides mais qu’une
profonde réforme était nécessaire pour qu’il atteigne
pleinement les objectifs d’efficacité, de qualité et de
respect des principes fondamentaux. Une révision de la
loi statistique est alors apparue comme prioritaire, devant
permettre de renforcer et de consolider les dispositions
législatives garantissant, en particulier, le respect de
l’indépendance professionnelle des statisticiens. Le
jumelage a d’ailleurs permis d’élargir la perspective en
intégrant explicitement les objectifs de mise en place d’un
cadre législatif et institutionnel propice à une meilleure
gouvernance de la Statistique publique, de même que
celui d’une consolidation du rôle de l’INS en tant
qu’acteur principal du SSN. Dans ce contexte, l’article
revient sur les raisons qui ont poussé à la révision de la loi
statistique, puis sur les enjeux de cette révision et la
démarche d’élaboration du projet de loi. Il souligne en
outre les principales nouveautés de la loi en regard de la
version antérieure et propose un ensemble de
perspectives. Le nouveau texte a été approuvé au niveau
gouvernemental mais il est encore en attente d’examen
par l’assemblée des représentants du peuple.
L’article de Xavier Helfenstein, Emilie Laffiteau et
Mouna Zgoulli, « Les enjeux de la formation à
Statistiques Tunisie », présente les actions entreprises
dans le cadre du jumelage (volets B et D) afin de
renforcer les capacités de l’INS en matière de formation
des personnels, cadres et non-cadres. Ce renforcement
s’imposait d’autant plus que l’INS a été conduit à intégrer
dans ses effectifs, à compter de 2012, les personnels
mobilisés par ses établissements régionaux pour la
réalisation des programmes d’enquêtes. Ceux-ci
représentent désormais près de 70 % de l’ensemble des
effectifs de l’INS mais n’ont, le plus souvent, pas
bénéficié des formations professionnelles adéquates, ni en
matière de règles et déontologie statistiques, ni de
conduite d’entretiens ou encore de connaissances
statistiques de base. Dans ce contexte, après avoir dressé
l’état des lieux de la situation de l’INS en termes de
ressources humaines et d’actions de formation, ainsi que
ses besoins en la matière, une démarche par étapes a été
proposée dans le cadre du jumelage et mise en place par
les experts, que l’article décrit en détail : construction
d’un plan de formations pour l’année 2017, à destination
en particulier des personnels des établissements régionaux
de l’INS, mise en place d’une équipe au sein de l’Institut
dédiée à la formation et des conditions permettant de la
rendre autonome en matière d’ingénierie de formation,
enfin établissement d’une feuille de route en vue de la
création à terme d’un centre de formation plus ambitieux.
La démarche s’est appuyée sur plusieurs types de
formations assurés par les experts au profit de cadres
tunisiens, notamment dans les domaines du management
et de la conception d’une formation.
L’article de Mauro Bruno, Maria Serena Causo, Anissa
Najjar, Giuseppe Sindoni, Tarek Tkitek et Carlo Vaccari,
« INS integrated architecture: pilot application in external
trade statistics and methodological improvements in data
processing », décrit le processus de mise en place, au sein
de l’INS, d’une nouvelle architecture informatique
conforme aux normes internationales à utiliser pour toutes
les opérations statistiques, en particulier les enquêtes. Il
s’agit d’une dimension essentielle des volets B et E du
jumelage. Les objectifs recherchés avec cette architecture
sont ambitieux : développement de l’utilisation de
métadonnées, de la collecte à la diffusion, normalisation
des processus et des méthodes statistiques, centralisation
des données dans des bases relationnelles, utilisation de la
norme SDMX pour les échanges et la diffusion… Elle
implique de mettre en place une description des processus
de production statistique selon un modèle standard,
pouvant s’appliquer à tous les domaines. Ainsi, le
jumelage a-t-il été l’occasion de former les statisticiens de
l’INS au « modèle générique du processus de production
statistique » (ou GSBPM selon le sigle anglais). Dans ce
contexte, la nouvelle architecture a été testée dans un
domaine particulier, celui des statistiques du commerce
extérieur. Pour cela, les différentes phases de ce processus
statistique ont été analysées selon le modèle GSBPM, de
la collecte des informations de base jusqu’à la diffusion
finale. L’article décrit en détail cette expérimentation, de
même que les conditions de son élargissement à d’autres
domaines. Il revient également sur les problèmes
rencontrés pour mener à bien le projet, similaires à ceux
qui se posent dans la plupart des Instituts statistiques :
choix des nomenclatures à utiliser, sélection et
développement d’outils informatiques adaptés, définition
des données agrégées à publier et protocoles à utiliser
pour la diffusion aux parties prenantes et aux utilisateurs
finaux.
À la suite des enjeux de la modernisation de l’appareil
statistique de Tunisie, une série d’articles sont proposés
sur des thèmes connexes.
L’article de Modou Ndour Faye, Dominique Ladiray,
Adnen Lassoued, Béchir Maghrebi et Amal Mansouri,
« Les effets du Ramadan sur les prix : une analyse
comparative sur 3 pays », réalise une analyse comparative
des effets du Ramadan sur les prix à la consommation au
Maroc, au Sénégal et en Tunisie. Leur étude montre un
impact relativement limité en termes réels : la hausse des
prix varie entre 5 % et 10 % au Maroc et entre 2 % et 3 %
en Tunisie et au Sénégal.
L’article de Anda David et Mohamed Ali Marouani,
« Migration patterns and labour market outcomes »,
étudie les effets externes de l’émigration sur les non-
migrants, en particulier sur le marché du travail, avant et
après la révolution. La Tunisie a connu un regain de
migration juste après le soulèvement tunisien en raison de
l’absence de contrôles aux frontières provoquée par le
vide sécuritaire au lendemain de la révolution. Leur
analyse confirme le rôle de l’émigration comme soupape
de sécurité pour le marché du travail tunisien. Les auteurs
montrent ainsi que les ménages d’origine des migrants ont
des niveaux de vie nettement plus élevés et que les
transferts de fonds jouent un rôle important au niveau
8
Statéco n°113, 2019
macroéconomique (économie tunisienne) et au niveau
microéconomique (ménages). Leur analyse tend aussi à
confirmer les effets des transferts de fonds sur l’offre de
travail des non-migrants, ce qui peut avoir un impact
négatif sur le taux de chômage de la Tunisie lorsqu’une
crise dans les pays de destination affecte négativement le
taux de transferts de fonds.
L’article de Brahim Guizani, « The impact of exchange
rate shocks on trade in times of uncertainties: evidence
from three oil-importing countries in the MENA region »,
étudie le rôle du taux de change réel sur les flux
commerciaux de trois pays importateurs de pétrole de la
région MENA, en particulier pendant la période de
transition post-printemps arabe. L’auteur met en évidence
une faible efficacité des politiques de change, notamment
la politique monétaire expansionniste pendant la période
de transition, pour accroître leurs exportations et contenir
leur déficit commercial. L’amélioration des performances
commerciales semble davantage liée à des progrès en
termes de compétitivité non tarifaire des produits. Les
résultats montrent également une forte dépendance des
importations aux variations des exportations. Cette
dépendance explique, dans une certaine mesure,
l’incapacité des politiques de dévaluation à atténuer
l’aggravation des déficits commerciaux pendant la
période d’incertitude qui a suivi le printemps arabe.
9
* Mohamed Frigui est directeur central de la comptabilité nationale à Statistiques Tunisie [email protected],
Pierre Muller est inspecteur général honoraire de l’Insee [email protected]
Le changement de base des comptes
nationaux de la Tunisie : un projet
ambitieux mais exigeant M. Frigui et P. Muller*
Après avoir rappelé les principales caractéristiques de la génération actuelle des comptes nationaux de la Tunisie, qui s’appuie sur la version 1993 du Système de comptabilité nationale des Nations unies (SCN 93) et qui mobilise un volume important de sources de données annuelles, l’article décrit les principaux aspects du processus devant conduire à une nouvelle génération de comptes nationaux pour la Tunisie. Celle-ci s’appuiera sur deux années de base (2015 et 2016) et non plus une seule année (1997) comme dans la génération actuelle de comptes. Outre une « remise à niveau » indispensable compte tenu de l’ancienneté de l’année de base des comptes actuels et la prise en compte de nouvelles sources statistiques (ou de sources fortement renouvelées), elle doit permettre, en particulier, de mettre en œuvre les changements introduits par la nouvelle version du SCN (SCN 2008), qui font l’objet d’une analyse détaillée dans l’article, et d’améliorer la mesure par la Comptabilité nationale des activités de l’économie informelle, dont le développement aurait été rapide en Tunisie au cours des dernières décennies, voire de l’économie illégale. Sont présentées ensuite les évolutions à attendre au niveau des comptes des secteurs et sous-secteurs institutionnels et des comptes de biens et services, de même que les principales conséquences sur l’évaluation du PIB de l’économie tunisienne.
Introduction
Les comptes nationaux de la Tunisie (CNT) reposent
actuellement sur une année de base ancienne, à savoir
l’année 1997 (encadré 1). Cette caractéristique pose
plusieurs types de problèmes, en rendant plus délicate
en particulier la bonne prise en compte des sources
statistiques les plus récentes, de même que des
phénomènes économiques ayant pris de l’ampleur au
cours de la décennie 2000. De fait, les comptes
nationaux tunisiens actuels présentent un certain
nombre de fragilités.
Une partie conséquente de l’élaboration des CNT
actuels repose sur un travail « en évolution » et non pas
en « niveau ». C’est le cas notamment pour les comptes
des entreprises non financières (Sociétés non
financières et Entreprises individuelles des ménages) et
les comptes de biens et services. Les évaluations
1De même, les comptes des entreprises publiques (non
financières), en partie du moins, s’appuient sur des
directement « en niveau » sont relatives à l’année de
base 1997, les niveaux en année courante s’obtenant
ainsi en appliquant des indices d’évolution, calculés le
plus souvent à partir d’échantillons reposant sur un
champ partiel, aux niveaux de l’année de base. Il est
vrai qu’une partie des CNT en année courante s’appuie
sur des évaluations faites en niveau. C’est le cas par
exemple des comptes des secteurs institutionnels des
Administrations publiques et des Sociétés financières,
de même que des comptes des relations avec le Reste
du monde à partir des données douanières et de la
Balance de paiements1. S’ils sont loin de représenter
une part négligeable du PIB, s’agissant par exemple de
la production de services financiers, de la production
non marchande des Administrations publiques et des
flux de commerce extérieur de biens et services, les flux
correspondants ne représentent pas, pour autant, une
composante majoritaire du PIB de la Tunisie.
évaluations directement en « niveau » sur la base des états
financiers annuels de ces entreprises.
10
Statéco n°113, 2019
Encadré 1 : Principales caractéristiques des comptes nationaux tunisiens actuels
La génération actuelle de CNT est la deuxième génération de comptes nationaux tunisiens, après une première génération
développée au cours des années 1980 grâce, notamment, à une assistance technique d’envergure apportée par l’Insee et la
Banque de France. L’année de base (ou année de référence) de la deuxième génération de comptes est ancienne puisqu’elle
remonte à 1997. Le système comprend des comptes complets pour les secteurs et sous-secteurs institutionnels (à l’exception
des comptes de patrimoine), qui permettent en particulier de mettre en évidence la distinction entre répartition primaire et
répartition secondaire des revenus, des comptes de biens et services, avec des équilibres « ressources-emplois » à un niveau
détaillé (niveau 400) et des comptes de production et d’exploitation par sous-secteur d’activité (niveau 100), et des tableaux de
synthèse (synthèse des biens et services-TRE, comptes économiques intégrés-TEE, tableau des opérations financière-TOF).
Les comptes de biens et services sont élaborés aux prix de l’année en cours (prix courants) et aux prix de l’année précédente.
Le PIB est déterminé selon les trois approches « production », « demande » et « revenus ». Des comptes trimestriels et des
comptes dérivés ou satellites (environnement, tourisme) complètent le dispositif. Les CNT de la base 1997 reposent sur le SCN de 1993 (SCN 93). En particulier, les productions de biens et services et les
valeurs ajoutées sont évaluées au prix de base, deux approches de consommation finale sont intégrées dans les comptes (dépense
de consommation finale d’une part, consommation finale effective d’autre part) et une notion de service d’intermédiation
financière indirectement mesuré (SIFIM) est évaluée et répartie par secteur utilisateur. Par ailleurs, la FBCF comprend les
dépenses d’exploration minière et pétrolière, de même que les dépenses en logiciels. Enfin, les tableaux de synthèse s’inspirent
directement de ceux prévus par le SCN 93, même si la notion de sous-secteur d’activité utilisé dans le TRE tunisien s’éloigne
quelque peu de celle de branche d’activité retenue par le SCN.
Comme le prévoit le SCN 93, les comptes des relations avec le Reste du monde des CNT sont étroitement articulés avec la
Balance des paiements de la Tunisie. En fait, ces comptes procèdent avant tout d’une transposition en termes d’opérations de
comptabilité nationale des flux repris par la Balance.
Le processus de fabrication des Comptes nationaux tunisiens mobilise un volume très conséquent de sources statistiques, qu’il
s’agisse des sources sur les entreprises non financières (enquête nationale annuelle sur les activités économiques, enquête sur
les micro-entreprises réalisée tous les cinq ans depuis 1997, répertoire national des entreprises, documents comptables des
entreprises publiques, données sur certains secteurs particuliers), des statistiques spécifiques concernant les productions
agricoles et de la pêche, des états financiers des unités composant les Sociétés financières, des enquêtes « ménages » (enquêtes
budget-consommation…), des statistiques douanières, des sources budgétaires, administratives et comptables pour les
administrations publiques (administrations centrales, collectivités locales, sécurité sociale), de sources conjoncturelles (indices
de prix et indices de production, nuitées, autorisations de construire, dépenses des touristes non-résidents…). In fine, une large
partie du dispositif statistique tunisien est mis à contribution mais on notera l’absence, en particulier, d’utilisation des résultats
de la principale enquête réalisée par l’INS, à savoir l’enquête « emploi ».
Trois versions de comptes annuels, à savoir le compte provisoire (septembre n+1), le compte semi-définitif (septembre n+2) et
le compte définitif (septembre n+3) sont élaborées chaque année. Les comptes font l’objet d’une publication annuelle complète
et bien documentée quant à la méthodologie mise en œuvre, de même que d’une mise en ligne sur le site de l’INS.
Ainsi, une première conséquence de l’ancienneté de
l’année de base des CNT actuels est que la structure du
PIB de la Tunisie est fonction, de façon déterminante,
des niveaux de productions et de valeurs ajoutées d’une
année assez reculée. Certes, l’utilisation des indices
d’évolution permet d’atténuer les conséquences de cet
état de fait mais sans intégrer pleinement les évolutions
structurelles intervenues entre l’année de base et les
années courantes. Or, celles-ci ont été importantes
depuis la fin des années 1990, avec, par exemple, le
développement des activités de l’économie informelle,
voire des activités illégales ou les évolutions
contrastées qu’ont connues plusieurs branches
d’activités de l’économie tunisienne… Cette difficulté
est accentuée par le fait que les comptes actuels
s’appuient sur des nomenclatures d’activités et de
produits elles-mêmes assez anciennes.
Une deuxième conséquence de l’ancienneté de l’année
de base a trait au système statistique. En effet, le
système statistique tunisien s’est fortement enrichi et
renouvelé depuis la fin des années 1990, aussi bien pour
les ménages que pour les entreprises. Certes, le travail
« en évolution » n’est pas antinomique avec la prise en
compte de nouvelles sources ou de sources modifiées
mais celle-ci ne peut être qu’assez circonscrite, sinon à
remettre en cause la cohérence nécessaire entre les
niveaux (1997), déterminés à partir d’un spectre défini
de sources statistiques, et les évolutions, ces dernières
devant être calculées à partir de sources identiques ou
proches de celles mobilisées dans le cadre des
évaluations pour l’année de base. Ce faisant, la prise en
compte des sources statistiques nouvelles ou ayant
connu des évolutions marquantes ne peut être
pleinement envisagée que dans le cadre d’un
changement en profondeur des comptes nationaux. De
même, les changements importants des sources
statistiques directement mobilisées en niveau dans le
cadre de l’élaboration des comptes en année courante
ne peuvent être intégrés qu’à l’occasion du changement
de l’année de base. Un exemple significatif (mais pas
unique) est constitué par le passage de la Balance des
paiements de la Tunisie de la 5e à la 6e version du
manuel du FMI.
11
Statéco n°113, 2019
Tableau n°1 :
Présentation synthétique
Thématique Comptes
des SNF
Comptes
des SF
Comptes
des APU
Comptes des
relations avec
RdM
Comptes des
Ménages
Comptes des
biens et
services
1. « Remise à niveau » des comptes
des années de base
X
X
X
2. Intégration de nouvelles sources
statistiques
X
X
X
X
3. Mise en œuvre des
recommandations du SCN 2008
X
X
X
X
X
X
4. Amélioration de la prise en compte
de l’économie informelle
X
X
5. Estimation de l’économie illégale
X
X
X
6. Redressement pour fraude à la TVA
sans entente
X
X
X
7. Amélioration des processus
techniques d’élaboration des comptes
X
X
X
X
X
Les deux raisons majeures du
changement de base des comptes
nationaux tunisiens Outre une « remise à niveau » indispensable compte
tenu de la forte ancienneté de l’année de base actuelle,
l’opération de changement de base des comptes
nationaux tunisiens trouve sa justification dans deux
raisons majeures : d’une part la mise en œuvre des
recommandations de la nouvelle norme de comptabilité
nationale au niveau mondial (SCN 2008), d’autre part
la nécessité d’améliorer la prise en compte en
Comptabilité nationale des activités de l’économie dite
« informelle »2. Ces deux raisons sont analysées
successivement.
Mettre en œuvre les recommandations du
SCN 2008
La mise en place d’une nouvelle génération de comptes
nationaux doit être l’occasion de mettre la comptabilité
nationale tunisienne en conformité avec les normes et
principes définis dans la version révisée du SCN (SCN
2008). Les impacts sur les comptes nationaux du
passage de la version 1993 du SCN à la version 2008
sont assez ciblés, et cela pour deux raisons essentielles,
directement liées entre elles. D’une part, les
changements entre les deux dernières versions du SCN
sont circonscrits à un nombre limité de points, certes
importants mais sans commune mesure avec les
évolutions introduites par le SCN 1993 par rapport aux
normes antérieures de comptabilité nationale3. En ce
sens, la véritable rupture a été introduite par le SCN
1993. D’autre part, les CNT de deuxième génération
(base 1997) ont été établis en conformité avec les
principes du SCN 1993, si l’on excepte l’absence de
comptes de patrimoine des secteurs institutionnels. Ce
faisant, les CNT intègrent déjà une large partie des
évolutions liées à la modernisation des normes
internationales de comptabilité nationale depuis le
début des années 904.
In fine, une analyse précise au cours du jumelage a
permis de montrer que les impacts pour les comptes
nationaux tunisiens de la nouvelle norme internationale
de comptabilité nationale (SCN 2008) peuvent être
classés en huit points principaux (tableau 2), que l’on
présente ici de façon résumée. Cinq d’entre eux font
l’objet d’une analyse détaillée dans la deuxième partie
de cet article5.
2 Cet article ne traite que de la comptabilité nationale
annuelle des CNT. Les comptes trimestriels font pour leur
part l’objet de l’annexe 1. 3 On fait référence ici au SCN de 1968 mais également à la
première version du Système européen de comptabilité
nationale (SEC1970). 4 Situation qui n’est pas si fréquente que cela, nombre de
pays en développement n’ayant pas encore franchi l’étape de
l’intégration du SCN 1993. 5 Un autre point mériterait d’être noté s’agissant des impacts
du SCN 2008 pour les comptes nationaux tunisiens, à savoir
le traitement des dividendes exceptionnels versés par les
entreprises publiques. De tels dividendes doivent en effet être
appréhendés désormais comme une opération financière et
non plus comme une distribution de revenu primaire.
Toutefois, ce point n’a pas été pris en compte dans le cadre
du jumelage, faute d’investigation suffisante. Par ailleurs, le
SCN 2008 entraîne une modification de champ quant au
calcul de la notion de consommation de capital fixe (CCF),
notamment (mais pas uniquement) avec la prise en compte
d’une CCF pour les actifs en R-D et en système d’armement.
12
Statéco n°113, 2019
Tableau n°2 :
Mise en œuvre des recommandations du SCN 2008
Recommandation Impacts pour les CNT Modalités de mise en œuvre
1. Élargissement de
la FBCF aux
dépenses de R-D
Comptes des APU (production, valeur
ajoutée, FBCF)
Comptes des SNF (production, valeur
ajoutée, FBCF)
TRE et ERE
Pour les APU, l’évaluation passe par l’identification préalable
des unités productrices de recherche. La production et la FBCF
sont évaluées par la somme des coûts. Pour les SNF, la
production et la FBCF de R-D est obtenue comme solde entre la
dépense intérieure de R-D de la Tunisie et la production de R-D
des APU.
2.Classement des
achats de systèmes
d’armement en FBCF
Comptes des APU (production, valeur
ajoutée, FBCF)
TRE et ERE
Pour les APU, le nouveau classement entraîne un transfert de
consommations intermédiaires en FBCF.
3.Prise en compte du
critère du
changement de
propriété
Comptes des relations avec le Reste du
monde
TRE et ERE
Ce critère concerne en particulier les échanges de marchandises
liés au travail à façon réalisé par des entreprises résidentes en
Tunisie pour le compte de donneurs d’ordre non-résidents. Une
présentation originale est retenue pour les CNT, cherchant à
concilier le critère du changement de propriété avec
l’enregistrement des échanges physiques de marchandises.
4.Nouvelle approche
de la notion de
production de service
d’assurance de
dommage
Comptes des Sociétés d’assurance
(production, valeur ajoutée, primes
nettes d’assurance de dommage reçues)
Comptes des secteurs utilisateurs
(primes nettes d’assurance versées,
consommations intermédiaires,
consommation finale...)
TRE et ERE
Une notion d’indemnités d’assurance de dommage « corrigées
et ajustées » (évènements exceptionnels, lissage temporel) est
prise en compte, ce qui permet d’améliorer de façon sensible
l’évaluation de la production et de la valeur ajoutée des sociétés
d’assurance
5.Modification du
calcul de la
production de la BCT
Comptes des Institutions financières
monétaires ou IFM (production, valeur
ajoutée, transfert courant « versé »)
Comptes des APU (dépense de
consommation finale, transfert courant
« reçu »)
TRE et ERE
La modification permet d’évaluer explicitement une production
au titre de l’action de contrôle et régulation monétaires de la part
de la Banque centrale. Cette production est considérée comme
faisant l’objet d’une dépense de consommation finale de la part
de l’État tunisien.
6.Amélioration de la
prise en compte des
activités de
l’économie
informelle
Comptes des Ménages (production,
valeur ajoutée, revenus primaires)
TRE et ERE
L’économie informelle est désormais définie en lien direct avec
les principes du SCN 2008. Par ailleurs, un dispositif statistique
a été mis en place pour les années de base, s’appuyant sur
l’enquête « micro-entreprises » et sur l’enquête « emploi ». Le
dispositif devra ensuite être adapté afin d’être pérennisé.
7.Calcul de la SIFIM
globale
Comptes des IFM autres que la BCT
(production, valeur ajoutée, revenus
primaires)
Comptes des secteurs utilisateurs
(revenus primaires, consommations
intermédiaires, consommation finale…)
Le calcul de la SIFIM globale est désormais réalisé comme
somme des écarts entre intérêts reçus sur les prêts et intérêts de
référence d’une part, intérêts de référence et intérêts versés sur
les dépôts d’autre part. Cette formule permet d’assurer la
cohérence avec le mode de calcul mis en œuvre pour la
répartition de la SIFIM entre emplois.
8.Autres
recommandations
(reclassement des
holdings en SF, mise
en évidence d’un
secteur institutionnel
à part entière pour les
ISBLSM,
décomposition des
SNF en sous-
secteurs …)
Comptes des SNF, des Ménages, des
SF
13
Statéco n°113, 2019
- Élargissement de la notion de FBCF aux dépenses de
recherche-développement (R-D), qu’il s’agisse des
dépenses internes de R-D (production pour compte
propre de recherche) ou de dépenses externes (achats
de recherche à d’autres unités)6. Pour la Tunisie, le
nouveau traitement concerne les Administrations
publiques, à un degré moindre les Sociétés non
financières.
- Classement des achats de système d’armement en
FBCF et non plus en consommations intermédiaires. Le
nouveau traitement ne concerne que les
Administrations publiques. A noter que les dépenses
militaires en génie civil et bâtiments sont déjà classées
en FBCF dans les CNT actuels, suivant en cela la
recommandation du SCN 1993. Ainsi, c’est désormais
l’ensemble des dépenses au titre des budgets militaires
(autres que les achats de petits matériels) qui est classé
en FBCF dans la nouvelle génération de CNT.
- Prise en compte du critère de changement de propriété
pour les échanges extérieurs de biens et services, en
accord avec la 6e version du manuel de Balance des
paiements du FMI. Pour les comptes nationaux
tunisiens, le principal impact concerne le travail à façon
réalisé par des entreprises tunisiennes pour le compte
de donneurs d’ordre étrangers, qui doit être traité
comme un échange extérieur de service et non plus de
marchandise comme dans le SCN 1993.
- Définition d’un nouveau calcul de la notion de
production de service d’assurance de dommage. Ce
nouveau calcul permet une mesure nettement plus
satisfaisante de la production et de la valeur ajoutée du
sous-secteur des Sociétés d’assurance.
- Modification de l’évaluation de la production de la
Banque centrale de Tunisie (BCT). Cette évaluation est
désormais réalisée par la somme des coûts de
production et d’exploitation, à l’instar des unités des
Administrations publiques7. La mesure de la valeur
ajoutée de la BCT est également modifiée.
- Révision du calcul de la production globale de service
d’intermédiation financière indirectement mesurée
(SIFIM). Cette modification permet d’assurer la
cohérence entre le calcul de la SIFIM au niveau global
et sa répartition entre emplois (consommations
intermédiaires, consommation finale, exportations).
- Changements dans la décomposition en sous-secteurs
(institutionnels) de certains secteurs institutionnels8 :
distinction de trois sous-secteurs (entreprises
publiques, entreprises privées sous contrôle étranger,
autres entreprises privées) pour les Sociétés non
financières, amélioration du classement des
établissements publics (non administratifs) entre
6 Comme on le verra plus loin, les dépenses externes de R-D
(achats de R-D à d’autres unités) semblent négligeables en
Tunisie. 7 Dans les CNT actuels, la BCT se voit attribuer une
production de SIFIM, en plus d’une production de services
facturés.
administrations centrales et administrations locales,
reclassement de l’ensemble des holdings en Sociétés
financières... Par ailleurs, il est envisagé un secteur
institutionnel à part entière pour les Institutions sans but
lucratif au service des Ménages (ISBLSM).
- Amélioration de la prise en compte de l’économie
informelle dans les comptes nationaux. La dimension
méthodologique de ce chantier (définition de
l’économie informelle, appréhension du secteur
informel comme une composante du secteur des
ménages…) peut être considérée comme une
conséquence de la mise en œuvre des recommandations
du SCN 2008. Ce chantier comprend toutefois
également une dimension statistique essentielle : mise
en place d’un dispositif statistique performant, articulé
autour de plusieurs enquêtes, en particulier l’enquête
« emploi »... En tant que telle, cette dimension n’est pas
directement liée à la mise en œuvre du SCN 2008 mais
elle n’en constitue pas moins une raison majeure du
changement de base.
Un enjeu déterminant : améliorer la prise
en compte de l’économie informelle
Comme dans beaucoup de pays, l’économie informelle
connaît un développement en Tunisie, par exemple
dans des secteurs d’activité comme le bâtiment (second
œuvre), les commerces ou encore certains secteurs des
services (réparation automobile). Cette forme de
production représente désormais une part significative
du PIB (environ 30% dans l’actuelle génération des
comptes nationaux) mais les estimations souvent
évoquées, notamment dans les médias, ne s’appuient
pas réellement sur une base statistique solide. Par
ailleurs, la définition de la notion d’économie
informelle est loin de faire consensus entre les
économistes9.
Les CNT actuels prennent bien en compte les activités
de l’économie informelle, notamment grâce à l’enquête
« micro-entreprises » réalisée tous les 5 ans auprès des
petites entreprises (moins de 6 salariés). Toutefois, ces
unités correspondent à celles connues de
l’administration fiscale ou sociale. Les estimations de
la production des unités de production non connues de
l’administration et qui représentent pourtant une part
importante de l’économie informelle sont fondées
principalement sur les travaux de l’année 1997. Or, il
est probable que cette configuration des sources de
données conduit à une sous-estimation du poids de
l’économie informelle dans le PIB.
Ainsi, la mise en place d’une nouvelle génération de
CNT est-elle l’occasion d’améliorer sensiblement cette
situation. Pour cela, il convient de proposer au
8 En fait, une large partie de ces changements est déjà prévue
par le SCN 1993, si l’on excepte le classement des holdings. 9 Un article de ce numéro spécial de Statéco est
spécifiquement consacré à l’économie informelle, s’agissant
en particulier de la dimension statistique de cette
problématique.
14
Statéco n°113, 2019
préalable une définition précise de l’économie
informelle, en conformité avec les principes de
Comptabilité nationale tout en constituant la référence
dans le cadre d’autres types de travaux statistiques. La
définition adoptée est ainsi la suivante :
« Le secteur informel est constitué des unités
économiques, quel que soit leur statut (employeur,
indépendant, compte propre…) et leur type d’activité
(y compris agriculture), produisant des biens et services
pour le marché et ne disposant, de fait ou de droit,
d’aucune comptabilité complète (de flux). Ces unités
seront considérées dans les comptes nationaux comme
des entreprises individuelles du secteur des Ménages ».
Ne faisant pas référence directement à la relation avec
l’administration fiscale et sociale, cette définition
permet de regrouper les deux types d’entreprises
individuelles du secteur informel : celles connues de
l’administration fiscale ou sociale d’une part, celles qui
ne le sont pas d’autre part. Elle permet également de
tracer une distinction claire avec les entreprises
individuelles du secteur formel, qui disposent en
général d’une comptabilité, du moins en matière de
flux.
En deuxième lieu, il convient de se doter d’un dispositif
statistique durable en mesure de couvrir l’ensemble des
unités de production de l’économie informelle
tunisienne, que celles-ci soient connues ou non de
l’administration. Le dispositif retenu par l’INS de
Tunisie s’inspire de la méthodologie des « enquêtes 1-
2-3 », conçue par l’Institut de recherche pour le
développement (IRD-DIAL) au début des années 1990
et qui a fait ses preuves sur différents continents
(Afrique, Asie, Amérique latine).
Le principe est basé sur une approche mixte
ménages/entreprises afin d’identifier les unités de
production qui échappent à l’appareil statistique, en
raison de leur absence dans les répertoires
administratifs et/ou d’absence de comptabilité, puis de
mesurer de manière détaillée l’activité de ces unités de
production à travers une enquête spécifique.
Concrètement dans le cas de la Tunisie, les données sur
l’économie informelle seront appréhendées (années de
base) grâce, principalement, à deux enquêtes, à savoir
l’enquête « micro-entreprises », qui collecte les
données économiques sur un échantillon d’unités
informelles connues de l’administration et l’enquête
« emploi », qui permet d’appréhender les employeurs
des unités de production de l’ensemble de l’économie
informelle, qu’elles soient connues ou non de
l’administration10. Il était prévu qu’une seconde
enquête « micro-entreprises » soit réalisée à la rentrée
2018 pour les entreprises informelles non connues de
l’administration mais cette opération n’a pas pu être
mise en place par l’INS. Seule une enquête « pilote » a
10 Pour cela, le questionnaire de l’enquête « emploi » a été
modifié de façon significative. 11 L’emploi doit être mesuré ici par le volume de travail
(emplois x durée effective de travail) afin de permettre des
été réalisée mais compte tenu de la taille très réduite de
son échantillon, les résultats ne pourront pas être
utilisées directement pour l’élaboration des comptes
des deux années de base.
Les données sur l’économie informelle tirées du
dispositif statistique doivent être analysées avec soin
avant d’être intégrées dans les comptes. Une des
difficultés tient en effet à la taille réduite des
échantillons des enquêtes « micro-entreprises » en
regard des univers correspondants. Une confrontation,
destinée à corriger, redresser et conforter les données
des enquêtes, avec les autres formes de production sur
plusieurs indicateurs (productivité du travail, taux de
valeur ajoutée, etc.), apparaît ainsi indispensable grâce
à la mise en place d’un nouvel outil de synthèse dans le
processus d’élaboration des comptes nationaux,
articulant emplois, productions et valeurs ajoutées11.
Un tel outil s’inspire de celui proposé par le logiciel
ERETES tout en étant beaucoup plus large ; il s’appuie
fortement sur les données de l’enquête « emploi » qui
jouent un rôle déterminant.
Outre les besoins de comptabilité nationale, le
dispositif statistique doit permettre également à l’INS
de Tunisie de disposer d’une base solide afin de fournir
régulièrement des informations fiables sur l’économie
informelle afin d’aider à l’élaboration de politiques
sectorielles dans ce domaine.
Analyse détaillée de la mise en œuvre
des recommandations du SCN 2008
Cette partie présente les modalités de mise en œuvre
des recommandations du SCN 2008 dans la nouvelle
génération de CNT, aussi bien sur le plan
méthodologique que sur le plan statistique. Cinq
recommandations sont analysées ici : l’élargissement
de la FBCF aux dépenses de recherche-développement,
l’intégration des achats de système d’armement dans la
FBCF des Administrations publiques, la nouvelle
méthode d’évaluation de la production de service
d’assurance de dommage, les modifications concernant
le calcul de la production de la Banque centrale de
Tunisie (BCT) et la nouvelle approche du travail à
façon pour le compte d’entreprises non-résidentes.
L’élargissement de la FBCF aux dépenses
de recherche-développement
L’élargissement de la FBCF aux dépenses de
recherche-développement (FBCF en R-D) concerne a
priori tous les secteurs institutionnels mais la décision
a été prise de limiter ce changement aux secteurs des
comparaisons pertinentes sur la productivité du travail entre
formes de production.
15
Statéco n°113, 2019
Administrations publiques (APU) et des Sociétés non
financières (SNF)12.
La méthode d’évaluation de la FBCF en R-D des APU
repose sur l’identification préalable des unités
productrices de service de R-D. Ces unités constituent
pour la plupart des entités dépendant du Ministère
tunisien de la recherche et de l’enseignement supérieur.
Il s’agit d’établissements publics pouvant avoir, à côté
de leur activité de R-D, une activité d’enseignement. La
production (non-marchande) de R-D des APU est alors
évaluée par la somme des coûts : consommations
intermédiaires, rémunération des salariés, impôts liés à
la production, consommation de capital fixe des actifs
de l’activité de R-D. Elle constitue une production pour
compte propre des APU en R-D13.
La FBCF en R-D des APU est égale à leur production
de recherche, les ventes de R-D à des unités
n’appartenant pas au secteur des Administrations
publiques apparaissant négligeables en Tunisie. On
notera qu’une faible partie de la R-D des
administrations tunisiennes bénéficie de financements
dans le cadre de la coopération internationale. Dans les
comptes nationaux, ces financements ne doivent pas
être analysés comme une recherche vendue par
l’administration tunisienne à une unité non-résidente
mais comme un transfert (en capital), à inscrire en
ressources du compte de capital des APU et en emplois
des comptes des relations avec le Reste du monde.
En revanche, la FBCF en R-D des SNF ne peut pas être
évaluée directement à partir des données tirées des
comptabilités élémentaires, les dépenses de recherche
ne faisant généralement pas, ou pour des montants
faibles, l’objet d’une inscription à l’actif du bilan dans
la comptabilité d’entreprise tunisienne. Par ailleurs, les
enquêtes « entreprises » ne prévoient pas d’identifier
les coûts relatifs aux dépenses de recherche pour
compte propre, ce type de questionnement devant faire
l’objet d’une enquête spécifique.
Une approche originale a donc été mise en place pour
l’évaluation de la production et de la FBCF en R-D des
SNF, s’appuyant sur l’évaluation globale des dépenses
en R-D de la Tunisie proposée par l’Unesco. Les
dépenses en R-D à attribuer aux SNF sont ainsi
obtenues comme différence entre le total des dépenses
intérieures de R-D de la Tunisie (un peu moins de 1 %
du PIB tunisien) et le montant estimé de la production
de R-D des APU, celle-ci étant considérée comme étant
identique à leur dépense intérieure de recherche14. La
FBCF en R-D des SNF est alors égale à leur dépense
12 On n’a pas trouvé trace de dépenses de R-D dans les
comptabilités élémentaires des Sociétés financières, point qui
reste toutefois à confirmer. 13 Une séparation entre production de R-D et production de
service d’enseignement devrait être faite mais par souci de
simplification, la production d’enseignement étant nettement
plus réduite que celle de R-D, la totalité de la production est
reprise en R-D.
intérieure de R-D ainsi estimée, sous l’hypothèse que
les entreprises tunisiennes ne sous-traitent pas de
recherche à d’autres unités, par exemple des APU15 .
Il convient de noter que la source Unesco est fondée sur
des données gérées par le ministère de l’Enseignement
supérieur et de la Recherche de Tunisie, qui s’appuient
sur des données budgétaires pour la recherche publique
et l’actualisation, à partir de rapports d’activité, des
résultats de l’enquête (enquête type « Frascati »)
réalisée en 2008 pour la R-D des entreprises, enquête
non renouvelée depuis. C’est pourquoi d’ailleurs le
Ministère souhaite améliorer et rendre plus régulier le
dispositif statistique sur l’évaluation des dépenses de
R-D, aussi bien des entreprises (privées et publiques)
que des Administrations publiques. Ce dispositif
pourrait s’appuyer par exemple sur une enquête portant
d’une part sur les dépenses de recherche des entreprises
(enquête tous les 3 ans), d’autre part sur les dépenses
de recherche de l’ensemble des unités, que celles-ci
appartiennent aux entreprises ou à l’administration
publique (enquête tous les 5 ou 6 ans). De telles
enquêtes devraient d’ailleurs être réalisées en
partenariat avec l’INS16.
L’élargissement de la FBCF aux dépenses de R-D
entraîne la mise en évidence d’un actif spécifique, à
savoir un actif de propriété intellectuelle de R-D, et
d’une consommation de capital fixe (CCF)
correspondante. C’est le cas en particulier pour le
secteur des Administrations publiques. Dans ce dernier
cas, la CCF sur les actifs en propriété intellectuelle de
R-D vient augmenter, toutes choses étant égales par
ailleurs, la valeur de la production non-marchande
globale.
L’intégration des achats de système
d’armement dans la FBCF des
Administrations publiques
Le SCN 2008 recommande de comptabiliser en FBCF
les achats de système d’armement des Administrations
publiques17, à l’exception des dépenses de faible
montant qui restent classées en consommations
intermédiaires. Ces achats sont inscrits dans le budget
de l’État tunisien, y compris fonds spéciaux et fonds de
concours. Le nouveau traitement défini par le SCN
2008 se traduit ainsi par un transfert de consommations
intermédiaires (approche retenue dans les CNT actuels,
suivant en cela le SCN 1993) en FBCF (solution
retenue par le SCN 2008). Ce faisant, une notion
d’actifs en système d’armement doit être évaluée dans
14 On notera que d’après les chiffres du Ministère, les APU
réalisent près de 80 % de la R-D en Tunisie. 15 C’est la contrepartie de l’hypothèse faite plus haut pour les
APU, à savoir l’absence de ventes de R-D des administrations
publiques à des unités externes au secteur des APU.
Toutefois, cette hypothèse reste à confirmer au stade actuel. 16 L’INS devrait en effet se mettre en situation de répondre
positivement à cette demande. 17Cette approche est d’ailleurs assez contestable sur le fond.
16
Statéco n°113, 2019
la nouvelle génération de CNT, en plus des actifs en
bâtiments militaires et génie-civil déjà pris en compte
dans les CNT actuels. Un nouveau flux de
consommation de capital fixe doit être calculé pour les
actifs en système d’armement, qui vient augmenter, ici
aussi, la valeur de la production non-marchande
globale.
La notion de production de service
d’assurance de dommage : une approche
renouvelée
La mise en évidence en comptabilité nationale de la
notion de production de service d’assurance de
dommage se heurte à plusieurs difficultés. En effet, ce
service n’est pas directement évalué dans les comptes
des entreprises d’assurance si bien que les comptables
nationaux doivent procéder par « imputation ».
Traditionnellement dans les systèmes de comptabilité
nationale, le service d’assurance est mesuré par la
différence entre les primes (primes acquises) et les
indemnités dues18. Le SCN 1993 a introduit une
première évolution, prévoyant la prise en compte des
revenus du placement des réserves en considérant que
ces revenus sont à appréhender comme un complément
implicite de primes. C’est cette approche qui est reprise
dans les CNT actuels. Toutefois, elle ne permet pas de
traiter les situations de variabilité des indemnités, par
exemple en cas d’évènements exceptionnels. Conscient
de cette difficulté, le SCN 2008 recommande d’utiliser
une notion d’indemnités (dues) ajustées pour le calcul
de la production, sans formuler pour autant de façon
précise une méthode pratique d’estimation. En
revanche, la version européenne du système révisé
(SEC 2010) donne des indications plus opérationnelles
et sur lesquelles on peut s’appuyer.
Or, on observe en Tunisie des fluctuations souvent très
marquées du rythme de versement des indemnités
d’assurance de dommage, fluctuations qui perturbent,
sans raison économique réelle, la mesure de la
production et de la valeur ajoutée des Sociétés
d’assurance. Après des réflexions approfondies,
s’inspirant également de plusieurs expériences
étrangères, la nouvelle méthode d’estimation de la
production de service d’assurance de dommage
comprend ainsi deux étapes dans la nouvelle génération
de CNT.
Dans un premier temps, on détermine les années pour
lesquelles une correction importante des indemnités
d’assurance de dommage doit être prise en compte pour
le calcul de la production. Ces points, dits « aberrants »,
résultent d’évènements exceptionnels et se traduisent le
plus souvent par une très forte augmentation des
18 Les primes acquises représentent les primes relatives à
l’année en cours. Les indemnités dues sont les indemnités
relatives à des sinistres intervenus au cours de l’exercice. Ce
mode de calcul vaut aussi bien pour l’assurance vie que
l’assurance de dommage.
indemnités. Au stade actuel, seule l’année 2011 serait
dans ce cas en Tunisie. Les indemnités subissent ainsi
une première correction, très importante pour l’année
2011 mais avec des répercussions sur les années
suivantes19.
Cependant, la correction pour point « aberrant » ne
suffit pas à lisser complétement la série des indemnités.
Celles-ci font donc l’objet, dans un deuxième temps,
d’un lissage complémentaire destiné à corriger les
variations conjoncturelles grâce à un travail adéquat sur
série temporelle.
Au total, pour une année n, la production de service
d’assurance de dommage (P) résulte du calcul
suivant dans la nouvelle génération de CNT :
P (n) = primes acquises + supplément de
primes (revenus du placement des réserves) -
indemnités « corrigées et ajustées »
Les indemnités « corrigées et ajustées » s’entendent
comme les indemnités d’assurance après correction
pour « point aberrant » (année 2011 et répercussions
sur les années suivantes) et après lissage temporel.
Il convient de noter que les indemnités d’assurance de
dommage à inscrire comme transfert courant au compte
de distribution secondaire du revenu s’entendent
comme les indemnités « ajustées » (après lissage
temporel) définies précédemment et non pas
simplement comme les indemnités dues telles que
déclarées dans les comptabilités des Sociétés
d’assurance. Par ailleurs, pour l’année 2011 (avec les
répercussions sur les années suivantes), la correction
pour passer aux indemnités « corrigées » est traitée
comme transfert en capital au titre d’un évènement
exceptionnel. Ainsi, dans ce cas, les indemnités
d’assurance reprises en emplois du compte de
distribution secondaire du revenu des Sociétés
d’assurance sont-elles identiques aux indemnités
« corrigées et ajustées » définies plus haut. On notera
que ce traitement permet de conserver l’égalité entre les
opérations « primes nettes » et « indemnités
d’assurance de dommage » du compte de distribution
secondaire du revenu des Sociétés d’assurance.
19 Concrètement, les indemnités sont ramenées à un niveau
« normal » pour 2011 mais elles sont ensuite rehaussées pour
les années suivantes.
17
Statéco n°113, 2019
Une nouvelle méthode de calcul de la
production de la Banque centrale de
Tunisie (BCT)
Le SCN 2008 recommande de revoir le mode
d’évaluation de la production et de la valeur ajoutée des
Banques centrales. Cette recommandation a des
conséquences importantes pour la nouvelle génération
de CNT. Sur un plan technique, l’évaluation de la
production de la BCT est désormais réalisée sur la base
du total des coûts de production et d’exploitation
(consommations intermédiaires, salaires et traitements,
cotisations sociales, impôts liés à la production,
consommation de capital fixe), à l’instar des unités des
APU20. Toutefois, suivant ici aussi le SCN 2008, la
BCT reste classée dans le secteur des Sociétés
financières.
La production globale de la BCT est ensuite
décomposée en deux parties, une production
marchande, d’une part, mesurée par les services
facturés par la BCT, en particulier aux banques et aux
autres organismes financiers, une production non-
marchande, d’autre part, mesurée par la différence entre
la production globale et la production marchande. Dans
les CNT actuels, outre la production marchande, la
BCT se voit attribuer un service d’intermédiation
financière indirectement mesuré (SIFIM), qui fait
ensuite l’objet d’une consommation intermédiaire des
établissements de crédit (monétaires). Cette SIFIM
disparaît donc dans la nouvelle génération de CNT.
Cette méthode permet d’attribuer une valeur explicite à
l’action de contrôle et de régulation de la politique
monétaire de la Banque centrale. En effet, cette action
ne fait pas l’objet de facturation explicite alors qu’elle
représente la partie de loin la plus importante de
l’activité et des coûts correspondants de la BCT. La
question qui se pose est de déterminer l’entité qui
« utilise » cette production. En fait, c’est l’État tunisien
qui en est l’utilisateur, sous la forme d’une dépense de
consommation finale (collective). Un transfert courant
de la Banque centrale vers l’État permet
« d’équilibrer » l’inscription de cette dépense de
consommation finale.
L’application du critère de changement de
propriété aux échanges extérieurs de biens
et services
Le SCN 2008, suivant en cela les préconisations de la
6e version du manuel FMI de Balance des paiements,
recommande la prise en compte du critère de
changement de propriété pour la mesure des échanges
extérieurs de biens et services. Pour les CNT, la
20 En faisant l’hypothèse par ailleurs d’un excédent net
d’exploitation nul. 21 Il convient de distinguer travail à façon de réparation et
entretien. Par exemple, la compagnie TunisAir fait réparer
les moteurs d’avion à l’étranger. Cela étant, en accord avec
le SCN 93, les CNT appliquent déjà le critère du changement
principale conséquence de cette recommandation
concerne le traitement du travail à façon réalisé par des
entreprises tunisiennes, dans le cadre de contrats de
sous-traitance pour le compte de donneurs d’ordre
étrangers, le travail à façon réalisé à l’étranger pour le
compte d’entreprises tunisiennes semblant négligeable
a priori21.
Sur un plan technique, en considérant le cas d’une
entreprise tunisienne effectuant un travail à façon pour
le compte d’un donneur d’ordre non-résident, seule une
exportation de service sera décrite dans les comptes
nationaux, mesurant la « valeur ajoutée » résultant de
l’opération de sous-traitance. Ni importations, ni
(ré)exportations de biens ne sont à faire apparaître dans
les comptes et il en est de même pour la Balance des
paiements.
L’approche retenue par le SCN 2008 n’apparaît pas
entièrement satisfaisante. Ne plus faire apparaître dans
les comptes nationaux une part très importante des
exportations de produits manufacturés de la Tunisie et
couvrant une large gamme de produits (construction
mécanique, textile-habillement, cuirs et chaussures,
industries mécaniques et électriques…), poserait un
sérieux problème quant à la représentativité et à la
pertinence des comptes nationaux. C’est d’autant plus
le cas que les statistiques douanières continuent à
décrire les flux de marchandises liées aux opérations de
sous-traitance pour le compte de non-résidents.
C’est pourquoi une présentation originale a été retenue
pour la nouvelle génération de CNT, à mettre en œuvre
dans les comptes de biens et services mais aussi les
comptes du Reste du monde, et cherchant à concilier le
critère du changement de propriété avec le maintien de
l’enregistrement des flux physiques de biens. Ainsi,
cette présentation prévoit-elle de conserver
l’enregistrement des flux d’importation et
d’exportation de marchandises afférents aux opérations
de sous-traitance pour le compte de non-résidents dans
les équilibres détaillés de produits des CNT, ce qui
permet de conserver la cohérence avec les statistiques
douanières. Ce faisant toutefois, le total des
importations et des exportations de biens et services ne
serait plus identique aux montants repris en Balance des
paiements (6e version FMI), celle-ci appliquant en effet
rigoureusement le critère du changement de propriété.
Ainsi, la cohérence avec la Balance des paiements est-
elle rétablie en intégrant dans les CNT de la nouvelle
génération (TES et comptes du Reste du monde) deux
lignes d’ajustement, respectivement sur le total des
importations et le total des exportations, soit
respectivement22 :
de propriété à la réparation et l’entretien. A noter également
que le critère du changement de propriété devrait s’appliquer
également au négoce (courtage) international mais celui-ci
semble avoir une portée limitée pour la Tunisie. 22Pour les importations, cette ligne d’ajustement s’ajoute à
celle déjà existante permettant de passer du total des
18
Statéco n°113, 2019
Poste de calage (diminution) sur le total des
importations = IM
Poste de calage (diminution) sur le total des
exportations = EX
Le poste IM représente la valeur des importations de
produits entrés au cours de l’exercice en Tunisie pour
travail à façon. Le poste EX représente quant à lui la
valeur des (ré)exportations au cours de l’exercice de
produits entrés pour sous-traitance en Tunisie, non
compris la valeur ajoutée par l’opération de sous-
traitance. En l’absence de décalage temporel entre
exportations et importations, les deux postes IM et EX
sont égaux. Une autre variante peut d’ailleurs être
retenue, qui consiste à inscrire en produit « service
industriel », en plus des flux de marchandises, une
exportation de service correspondant au « service
ajouté » par la sous-traitance. Ce faisant, le poste
d’ajustement sur les exportations (EX) est égal à la
valeur totale des exportations et non plus à la valeur
déduction faite du service de sous-traitance, le poste
d’ajustement sur les importations (IM) restant
inchangé. Les deux variantes, bien qu’assez proches,
présentent des avantages et inconvénients respectifs.
La difficulté technique que soulève la présentation
retenue est le traitement des décalages temporels
éventuels entre importations et (ré)exportations. De tels
décalages peuvent en effet créer un écart entre les
postes IM et EX pour un exercice donné, écart se
résorbant normalement sur l’exercice (ou les exercices)
suivant(s). Toutefois, en règle générale, les décalages
temporels devraient être faibles sous l’hypothèse que
les rythmes d’entrée et de sortie des produits pour
travail à façon sont suffisamment réguliers d’une année
sur l’autre. Dans le cas où cette hypothèse se trouverait
remise en cause, l’écart entre les postes d’ajustement
IM et EX devrait être traité sous la forme d’un
ajustement des variations de stocks.
La présentation proposée s’écarte du traitement retenu
dans le SCN 2008 (qui prévoit seulement un
enregistrement en exportation de service, s’agissant de
la sous-traitance réalisée pour le compte de donneurs
d’ordre non-résidents) mais elle est porteuse de
plusieurs avantages : cohérence avec les statistiques
douanières d’exportations et d’importations, évaluation
de la production en conformité avec le mode
d’enregistrement généralement retenu dans les comptes
des entreprises, préservation d’une cohérence globale
avec la Balance des paiements (6e version FMI) grâce
aux postes de calage.
importations CAF (statistiques douanières) au total des
importations FAB (Balance des paiements). 23 Cette partie n’aborde pas les questions spécifiques liées
à l’élaboration des comptes financiers des secteurs et sous-
secteurs institutionnels. Elles sont abordées dans l’annexe 2. 24 C’est dès la première génération de CNT que cette
approche a été mise en place, en s’inspirant fortement de la
Les changements au niveau des
comptes des secteurs institutionnels
et des comptes de biens et services
Dans cette troisième partie sont analysés les principaux
changements introduits par la nouvelle génération de
CNT au niveau des comptes des secteurs (et sous-
secteurs) institutionnels et des comptes de biens et
services23. Une large partie des évolutions découle
directement des points traités dans les deux premières
parties, s’agissant en particulier du processus de
« remise à niveau » lié à l’opération de changement de
base, de l’amélioration de la prise en compte de
l’économie informelle, de la mise en œuvre des
recommandations du SCN 2008... Toutefois, certaines
évolutions tiennent à des facteurs qui n’ont pas été
abordés précédemment. Cette partie se termine par
l’analyse des conséquences de ces changements, telles
que l’on peut les cerner au stade actuel, pour
l’évaluation du PIB de la Tunisie.
Les comptes des Sociétés non financières
Dans la nouvelle génération de CNT, les comptes des
Sociétés non financières (SNF) sont établis en
s’appuyant sur une méthode proche de celle mise en
œuvre pour les CNT actuels. La méthode s’articule
autour de trois étapes principales24 : collecte, traitement
et apurement des données élémentaires, celles en
particulier provenant de l’enquête nationale sur les
activités économiques (ENAE), constitution du
Système intermédiaire « entreprises » (SIE), passage de
ce dernier aux opérations des comptes des SNF. Il
convient de souligner que l’ENAE n’est pas la seule
source mobilisée pour l’élaboration des comptes
nationaux des SNF. Pour une partie des entreprises en
effet, les comptables nationaux utilisent directement les
rapports d’activité publiés, s’agissant en particulier des
entreprises publiques. Par ailleurs, les états financiers
récupérés dans les liasses fiscales peuvent être utilisés
en complément ou même en substitut des données de
l’enquête. Reste que l’ENAE constitue « encore » la
source principale permettant l’élaboration des comptes
des SNF25. C’est le cas en particulier pour les comptes
des deux années de base 2015 et 2016 (voir l’encadré 2
explicitant les raisons ayant conduit au choix de ces
deux années comme années de base).
Dans ce contexte, le SIE joue un rôle essentiel. Comme
son nom l’indique, il s’agit d’un niveau intermédiaire
(méso-économique) entre les données individuelles et
le système de comptes nationaux. Ce niveau s’impose
pour plusieurs raisons, qui tiennent toutes à la
démarche suivie alors par la comptabilité nationale
française. 25 Le terme « encore » renvoie au projet, très important pour
la statistique d’entreprise de la Tunisie, d’utilisation
généralisée des liasses fiscales des entreprises en lieu et
place, du moins en partie, des ENAE.
19
Statéco n°113, 2019
complexité du passage « micro-macro ». En ce sens, le
SIE assure trois fonctions essentielles dans le processus
de passage des données comptables aux données de
comptabilité nationale : constituer une première phase
pour le traitement des écarts entre Comptabilité
d’entreprise et Comptabilité nationale, réorganiser les
données avec un cadre comptable s’inspirant
directement de celui de la comptabilité nationale,
surmonter les difficultés créées par l’hétérogénéité des
types de recueil des informations élémentaires
(enquête, rapports d’activité, états financiers des liasses
fiscales…). In fine, le SIE constitue la première étape
dans le processus de mise au format « comptabilité
nationale » des données élémentaires relatives aux
entreprises non financières26.
Encadré 2 : Pourquoi deux années de base ?
Le choix de retenir deux années de base pour la nouvelle
génération de CNT, à savoir les années 2015 et 2016, s’est
rapidement imposé pour trois raisons majeures, liées entre
elles.
En premier lieu, retenir deux années de base et non une seule
année comme pour les CNT actuels permet de renforcer la
qualité des évaluations fournies par les comptes. C’est en
effet à l’occasion de l’établissement des comptes des années
de base que les évaluations sont faites, de façon systématique,
directement en « niveau ». Les travaux sont également
conduits de manière plus détaillée et approfondie que pour les
années courantes, en mobilisant le spectre le plus large
possible de sources statistiques. Dans ce contexte, élargir les
travaux sur les années de base à deux années présente à
l’évidence plusieurs avantages, celui en particulier de mieux
articuler la construction des comptes des années de base avec
les évolutions à mettre en place dans les systèmes statistiques,
qui s’avèrent souvent lourdes et complexes. Ce faisant,
l’intégration dans le processus d’élaboration des comptes de
nouvelles données statistiques (ou de données renouvelées)
peut être contrôlée au niveau de deux années et non plus une
seule, ce qui permet en retour de renforcer et consolider la
qualité de cette intégration. En sens inverse, compte tenu
notamment de la lourdeur que revêtent les travaux
d’élaboration des comptes des années de base en regard des
ressources disponibles de l’INS, il était illusoire d’allonger de
façon excessive la série des années de base. En ce sens, le
choix de retenir deux années de base apparaît bien comme un
compromis satisfaisant.
En deuxième lieu, le choix des années 2015 et 2016 permet
de mieux « capitaliser » l’apport pour les CNT d’un large
ensemble de sources et de données statistiques : recensement
général de la population et de l’habitat (RGPH, 2014),
enquête « budget-consommation » (2015-2016), enquête
« micro-entreprises » (2017), données détaillées sur les
collectivités locales, données issues des liasses fiscales des
entreprises… Ces années sont également en phase avec la
prise en compte, par l’enquête nationale sur les activités
économiques (ENAE), de modifications de questionnaire
pour mieux répondre aux besoins d’élaboration des comptes
26 C’est une première étape en ce sens où elle ne mobilise pas
les informations en provenance des autres secteurs
institutionnels mais seulement les informations que l’on peut
inférer des statistiques d’entreprises. 27 Dans le cas des SNF, la principale forme d’économie non
enregistrée ou souterraine est constituée de la fraude fiscale,
de deux types : fraude sur le niveau de chiffre d’affaires et de
des années de base. Enfin, les années 2015 et 2016 font partie
de la série sur laquelle il est prévu d’opérer le basculement de
la Balance des paiements de la Tunisie à la 6e version du
manuel FMI, qui doit couvrir (au moins) les années 2013 à
2017.
Enfin, retenir les deux années 2015 et 2016 permet de profiter
de l’expérience acquise à l’occasion de l’élaboration des
comptes dans le cadre des CNT actuels. Si on laisse de côté
la version provisoire, c’est en effet à compter de 2017 puis de
2018 que les comptes des deux années 2015 et 2016 sont
disponibles.
Cela étant, le passage aux comptes nationaux ne
s’arrête pas à l’élaboration du SIE. Il faut en effet
ensuite formaliser le passage entre ce dernier et les
comptes nationaux. Complexe, un tel passage doit
permettre de traiter complètement les écarts de contenu,
de moment d’enregistrement et de valorisation entre
Comptabilité d’entreprise et Comptabilité nationale,
d’introduire la cohérence entre comptes des SNF et
comptes des autres secteurs institutionnels (principe dit
de la partie quadruple) et de prendre en compte, dans la
mesure du possible, des redressements pour l’économie
non enregistrée concernant le secteur des SNF27. C’est
également à partir du SIE que l’articulation entre
comptes des SNF et comptes des biens et services
(compte de production, FBCF, variation de stocks) est
mise en œuvre.
Le passage du SIE aux comptes doit également
permettre d’établir ces comptes en distinguant les trois
sous-secteurs institutionnels des SNF retenus en
nouvelle base : entreprises publiques, sociétés privées
sous contrôle étranger, autres sociétés privées. De
même, le SIE étant établi par sous-secteur d’activité, le
passage aux comptes nationaux peut être réalisé à ce
niveau de détail, ce qui permet une désagrégation des
comptes des SNF (en partie) par sous-secteur d’activité.
Si le schéma d’ensemble du processus d’élaboration
des CNT de nouvelle génération ne devrait pas
connaître de changement majeur par rapport aux CNT
actuels, plusieurs évolutions importantes méritent
cependant d’être mises en exergue :
• Pour les deux années de base (2015 et 2016) de la
nouvelle génération de CNT, le questionnaire de
l’ENAE a été aménagé afin de mieux prendre en
compte les besoins liés à l’élaboration des comptes
nationaux des entreprises, s’agissant par exemple du
détail des charges et produits d’exploitation, de la
répartition du chiffre d’affaires et des achats par
produit.
• Le cadre comptable du SIE est mieux structuré que
dans les CNT actuels. Surtout, le mode de calcul des
résultat d’une part, fraude sur la TVA d’autre part. Faute de
pouvoir mobiliser les données de contrôle fiscal, il a été
décidé de ne pas prendre en compte de redressement pour le
premier type de fraude. En revanche, il est envisagé d’évaluer
dans la nouvelle génération de CNT les redressements au titre
de la fraude à la TVA.
20
Statéco n°113, 2019
postes du SIE à partir des données de l’ENAE, en
particulier les données tirées des documents de
synthèse (état de résultat et bilan) des comptabilités
élémentaires, a été revu en profondeur. C’est le cas
notamment des opérations des comptes de production
(productions, consommations intermédiaires) et
d’exploitation (rémunération des salariés, impôts liés à
la production, subventions d’exploitation). Des
données de bilan sont également introduites en
perspective de l’utilisation du SIE pour l’établissement
des comptes financiers des SNF.
• Pour les deux années de base de la nouvelle
génération de CNT (2015 et 2016), les données en
provenance de l’ENAE doivent être utilisées « en
niveau », ces niveaux résultant, une fois réalisées les
corrections et apurements des données individuelles,
d’un processus d’extrapolation des données d’enquête.
Ceci concrétise la dimension « remise à niveau » du
changement de base des CNT, qui prend un relief
particulier dans le cas des comptes des SNF.
• Dans ce contexte, deux facteurs sont déterminants
afin d’obtenir des niveaux ayant la qualité statistique
requise. D’une part, les données individuelles des
enquêtes doivent être contrôlées, apurées et corrigées
avec soin. D’autre part, la méthode d’extrapolation doit
être la plus rigoureuse possible et adaptée aux
particularités des différentes variables. Ces deux
facteurs sont liés en ce sens où l’analyse des résultats
extrapolés doit s’appuyer, en retour, sur les données
individuelles, en particulier au niveau des grandes
entreprises. La réalisation de ces deux conditions
implique une collaboration active entre statisticiens
d’entreprises et comptables nationaux de l’INS.
La troisième étape du processus d’élaboration des
comptes des SNF consiste à transformer les données du
SIE en données de comptabilité nationale. Si la
structure d’ensemble de cette transformation ne devrait
pas être sensiblement différente, elle-aussi, de celle
mise en œuvre pour les CNT actuels (valorisation de la
production au prix de base, introduction des avantages
en nature, prise en compte de la consommation
intermédiaire en service d’assurance et en SIFIM, mise
en cohérence des comptes des SNF avec les comptes
des autres secteurs et les comptes de biens et
services...), elle comprend cependant une nouvelle
étape, à savoir la prise en compte d’une production et
d’une FBCF en R-D des SNF. De même, il est prévu
qu’un redressement soit intégré lors du passage du SIE
aux comptes nationaux afin de tenir compte de la fraude
à la TVA (fraude sans entente entre commerçants et
consommateurs) pouvant être attribuée aux SNF.
Les comptes des Sociétés financières
Les comptes des Sociétés financières (SF) de la
nouvelle génération de CNT ne devraient pas connaître
de changement majeur en ce qui concerne leur
processus d’élaboration. Les sources statistiques
mobilisées restent identiques, de même que le mode de
construction des comptes à partir des données
comptables des unités constituant le secteur des SF :
états comptables sur les banques, comptabilité de la
BCT, données comptables sur les sociétés d’assurance.
En revanche, le secteur institutionnel des SF est
fortement concerné par la mise en œuvre des
recommandations du SCN 2008, avec quatre évolutions
importantes :
• La décomposition des SF en sous-secteurs
institutionnels est plus détaillée que dans les CNT
actuels et établie en relation directe avec la notion de
services financiers proposée dans le SCN 2008. Elle est
par ailleurs cohérente avec les systèmes de statistiques
monétaires et financières. On retient ainsi trois sous-
secteurs institutionnels : les Institutions financières
monétaires (IFM), les Sociétés financières à l’exclusion
des IFM et des sociétés d’assurance et fonds de
pension, les sociétés d’assurance et fonds de pension.
Les IFM comprennent la BCT et les autres institutions
financières monétaires, les sociétés financières autres
qu’IFM et assurances comprennent les auxiliaires
financiers et d’assurance, les sociétés de leasing et les
holdings, ces derniers étant désormais classés dans le
secteur des SF même si l’activité dominante du groupe
est non financière. Quant à elles, les sociétés
d’assurance comprennent les entreprises d’assurance
au sens strict mais également les mutuelles et des
sociétés d’assurance sociale (régime privé d’assurance
sociale), intervenant dans la couverture collective de
certains risques sociaux, en complément ou en substitut
des régimes de Sécurité sociale.
• Comme montré précédemment, la production de la
Banque centrale de Tunisie (BCT) est désormais
évaluée par la somme des coûts de production et
d’exploitation (consommations intermédiaires,
rémunération des salariés, consommation de capital
fixe…), et non plus sous forme de SIFIM. Cette
production est ensuite décomposée en deux parties :
une production marchande (commissions, services
facturés par la BCT…) et une production non
marchande (service de politique monétaire). Cette
production non marchande fait ensuite l’objet d’une
dépense de consommation finale de la part des APU.
• Dans la nouvelle génération de CNT, la notion de
production de service d’intermédiation financière
indirectement mesuré (SIFIM) ne concerne plus que le
sous-secteur « autres institutions financières
monétaires » des IFM, sur la base d’un nouveau calcul.
En effet, la production de SIFIM est désormais évaluée
comme somme, d’une part des écarts entre intérêts
reçus et intérêts de référence (pour les prêts accordés),
d’autre part des écarts entre intérêts de référence et
intérêts versés (pour les dépôts détenus). Elle est
ensuite répartie (compte tenu d’un SIFIM importé)
entre secteurs utilisateurs, sous forme de
consommation intermédiaire, dépense de
consommation finale et exportations, sur la base de la
21
Statéco n°113, 2019
même formule de calcul que celle utilisée pour
l’évaluation globale de la SIFIM.
• L’évaluation de la production (et de la valeur
ajoutée) du sous-secteur « Sociétés d’assurance » est
modifiée en raison de la nouvelle méthode de calcul de
la production de service d’assurance de dommage. Ce
faisant, les évaluations de la production, de la valeur
ajoutée et de l’excédent d’exploitation du sous-secteur
des Sociétés d’assurance devraient être nettement
améliorées en regard des CNT actuels.
Les comptes des Administrations publiques
Comme pour les SF, les comptes des Administrations
publiques (APU) ne connaissent pas d’évolution
importante quant à leur processus d’élaboration, à
l’exception toutefois des comptes des collectivités
locales qui peuvent profiter d’une nouvelle source
statistique beaucoup plus détaillée que dans les CNT
actuels. En revanche, certaines recommandations
importantes du SCN 2008 concernent directement ce
secteur institutionnel, s’agissant en particulier de
l’élargissement de la notion de FBCF aux dépenses de
R-D et aux achats de système d’armement.
Plusieurs points méritent ainsi d’être soulignés :
• Comme dans les CNT actuels, les APU sont
décomposés en trois sous-secteurs institutionnels dans
la nouvelle génération de CNT : les Administrations
centrales, les Administrations locales et les
Administrations de sécurité sociale. Les
Administrations centrales comprennent l’État (au sens
de la Comptabilité nationale) et les établissements
publics non administratifs (EPNA) à compétence
nationale, en particulier les hôpitaux publics. Les
Administrations locales comprennent les collectivités
locales (communes et conseils des gouvernorats) et les
EPNA à compétence locale28. Les Administrations de
sécurité sociale correspondent aux trois caisses de
Sécurité sociale tunisiennes : CNRPS, CNSS, CNAM.
• Deux recommandations majeures du SCN 2008
concernent directement les comptes des APU, et plus
précisément des administrations centrales, à savoir
l’élargissement de la notion de FBCF aux dépenses de
R-D et le classement en FBCF des achats de systèmes
d’armement. La première recommandation se traduit
par la mise en évidence d’une production de R-D des
Administrations publiques29, avec comme contrepartie
une FBCF en R-D. Quant à elle, la seconde
recommandation entraîne un reclassement en FBCF de
dépenses classées en consommation intermédiaire dans
les CNT actuels30. Suite à ces deux nouveaux
traitements, une nouvelle consommation de capital fixe
28 Ces EPNA étaient classés en administrations centrales
dans les CNT actuels. A noter que les données relatives aux
EPNA sont tirées en large partie de l’ENAE. 29 En fait, cette production est bien décrite dans les CNT
actuels, non comme une production de R-D mais comme une
production de service d’enseignement.
(CCF) doit être calculée, respectivement pour les actifs
en propriété intellectuelle de R-D et pour les actifs en
systèmes d’armement. Elle vient augmenter d’autant la
valeur de la production non-marchande globale.
• Une autre recommandation du SCN 2008 concerne
les comptes des APU, à savoir la mise en évidence
d’une dépense de consommation finale en service de
politique monétaire.
• Dans la nouvelle génération de CNT, les comptes
des collectivités locales (communes et conseils de
gouvernorats) sont établis à partir d’une source plus
détaillée que celle mise en œuvre dans le cadre des
CNT actuels. La nouvelle source fournit un détail
nettement plus marqué pour plusieurs types de
dépenses, qu’il s’agisse des dépenses de gestion et de
matériel, des dépenses d’interventions publiques
locales, des dépenses en capital et même des opérations
financières. Les conséquences quantitatives pour les
comptes des collectivités locales restent toutefois
limitées, à une exception toutefois : la nouvelle source
se traduit par une baisse sensible des consommations
intermédiaires des collectivités locales, qui se traduit
donc, toutes choses étant égales par ailleurs, par une
diminution de leur production (non-marchande).
Les comptes des relations avec le Reste du
monde
Comme dans les CNT actuels, les comptes des relations
avec le Reste du monde (que l’on désigne par
« comptes du Reste du monde » ou CRM) de la
nouvelle génération de CNT seront étroitement
articulés avec la Balance des paiements de la Tunisie.
Celle-ci constitue en effet la principale source pour
mesurer les flux (non financiers comme financiers)
entre unités résidentes et unités non-résidentes, mais
elle n’est pas la seule. D’une part, les statistiques
douanières fournissent des données détaillées sur les
échanges de marchandises avec le Reste du monde, y
compris dans le cadre de travail à façon. D’autre part,
le calage sur la Balance n’est pas systématique, le
processus de synthèse entre secteurs institutionnels
pouvant privilégier, pour certaines opérations, les
évaluations reprises dans les comptes des APU ou des
SF.
Le principal enjeu pour l’INS est de disposer à temps
d’une Balance des paiements de la Tunisie conforme à
la 6e version du manuel FMI, compte tenu de l’ampleur
de la charge de travail, pour le service de la Balance des
paiements de la BCT, que représente le passage de la 5e
version à la 6e version du manuel du FMI. Le terme « à
temps » signifie simplement : compatible avec le
calendrier d’établissement des comptes (non financiers
30 En fait, la situation est un peu plus complexe que cela dans
les CNT actuels, les comptables nationaux ayant tendance à
reprendre en FBCF les montants importants d’achats
d’armement qui figurent quelquefois dans le budget de l’État
tunisien (sans pour autant calculer une consommation de
capital fixe).
22
Statéco n°113, 2019
et financiers) des deux années de base de la nouvelle
génération de CNT. Cependant, les informations
actuellement disponibles tendent à montrer que ce n’est
pas avant 2020, au mieux, qu’un passage de la Balance
des paiements de la Tunisie à la 6e version du manuel
FMI est envisagé, passage couvrant notamment les
années 2015 et 2016.
Dans ce contexte, quatre conclusions s’imposent pour
l’INS quant à l’établissement des CRM des années de
base (2015 et 2016) de la nouvelle génération de CNT.
Qu’il s’agisse de 2015 ou 2016, il paraît impossible de
prévoir l’établissement des CRM des années de base à
partir d’une Balance des paiements en 6e version du
manuel FMI, sinon à obérer fortement le respect du
calendrier du changement de base. Dans ces conditions,
les CRM des années de base devront être établis à partir
des Balances des Paiements en 5e version du manuel
FMI, tout en prenant en compte les recommandations
du SCN 2008 concernant les relations avec le Reste du
monde. Il s’agit en particulier du nouveau traitement du
travail à façon (sous-traitance) entre résidents et non-
résidents ou encore les conséquences de la nouvelle
évaluation du service d’assurance de dommage. Par
ailleurs, un nouveau taux de correction « CAF-FAB »
des données douanières est à prévoir dans le cadre de la
nouvelle génération de CNT. Ces modifications ont
vocation à être intégrées par la Balance des paiements
dans le cadre de son passage à la 6e version du manuel
FMI.
Au vu du point précédent, le processus de calage sur la
Balance des paiements en 6e version ne devrait
intervenir que sur des années postérieures aux années
de base, ce qui pourrait générer un certain nombre de
difficultés pour les CRM des années de base elles-
mêmes si les écarts entre les deux versions de Balance
des paiements, en sus de ceux pris en compte par les
comptables nationaux à l’occasion du changement de
base, étaient importants. On peut toutefois supposer
que dans le contexte tunisien, la plus grande partie des
modifications liées au nouveau manuel de Balance des
paiements devrait être intégrée par les comptables
nationaux dès l’établissement des comptes 2015 et
201631.
Le processus doit s’adosser à une collaboration active
entre l’INS et la BCT, s’inscrivant dans le cadre de
l’élaboration des CRM de la nouvelle génération de
CNT (côté INS) et dans celui du passage à la 6e version
FMI (côté BCT), le tout dans le respect des contraintes
(secret statistique, confidentialité, responsabilités
respectives en matière de diffusion…) de chaque
partenaire. Pour cela, l’INS doit être en mesure de
proposer à la BCT un chiffrage précis des impacts des
recommandations du SCN 2008, en particulier les
31 C’est d’autant plus le cas que la nouvelle Balance devra
également prendre en compte des notions déjà intégrées dans
les CNT de la génération actuelle, par exemple la notion de
SIFIM (exportée et importée). Dans ce cadre, l’INS pourra
lui apporter un appui précieux.
conséquences du nouveau traitement du travail à façon,
plus largement de l’adoption du critère du changement
de propriété pour les échanges internationaux de biens
et services, ou encore la nouvelle évaluation du taux
global de correction CAF-FAB.
Quelle que soit la version utilisée de Balance des
paiements (5e puis 6e versions), les CRM de la nouvelle
génération de CNT ne devraient plus se « caler » de
façon aussi systématique sur le solde des opérations
courantes de la Balance des paiements. Dit autrement,
le besoin de financement des CRM ne doit plus être
ajusté mécaniquement sur le solde des opérations
courantes de la Balance des paiements. Toutefois, pour
une majorité d’opérations (biens et services, revenus de
facteurs et autres revenus primaires, transferts), les
montants de la Balance des paiements continueront à
être la référence pour les évaluations des CRM, si bien
que l’écart entre besoin de financement et solde des
opérations courantes devrait rester limité en règle
générale.
Les comptes du secteur « Ménages »
En Comptabilité nationale, les « Ménages » constituent
un secteur institutionnel complexe parce que très
hétérogène, nettement plus en tout cas que les autres
secteurs institutionnels. En effet, ce secteur comprend
des unités pouvant exercer plusieurs types de fonctions
même si la fonction principale des unités de ce secteur
est celle de consommation finale.
En règle générale, trois catégories de fonctions des
unités « ménages » sont distinguées :
• Une fonction de consommation finale de biens et
services, sous-tendue par le fait que les « Ménages »
sont les destinataires finals d’une large partie de la
distribution primaire des revenus et de la redistribution
secondaire, sous forme en particulier de transferts.
• Une fonction de production marchande (non
financière32), soit dans le cadre d’activités d’entreprises
individuelles (y compris agricoles), soit encore au titre
de la location immobilière. On notera ici que la plus
grande partie de l’économie souterraine et/ou de
l’économie illégale fait partie de la fonction de
production marchande des Ménages. On notera
également que les flux correspondants ne se limitent
pas à la production de biens et services. Ils
comprennent également les revenus primaires
découlant directement de la production marchande des
Ménages, dans le cadre en particulier d’une activité
d’entreprise individuelle : rémunération des salariés,
revenu mixte, revenus de la propriété versés.
• Une fonction de production non marchande, soit au
titre de l’occupation des logements par leurs
32 Au demeurant, les ménages (entreprises individuelles)
peuvent exercer dans certains cas une activité financière
(marchande), par exemple sous la forme d’une activité de
micro-crédit. Ce cas n’a pas été retenu pour la Tunisie.
23
Statéco n°113, 2019
propriétaires (loyers imputés), soit de production pour
compte propre, en particulier de produits agricoles ou
agro-alimentaires, soit encore de production de services
domestique.
On retrouve ces trois fonctions dans les comptes du
secteur « Ménages » des CNT actuels. Toutefois, une
quatrième fonction est prise en compte, à savoir la
production dans le cadre d’activités des Institutions
sans but lucratif au service des Ménages (ISBLSM). On
y revient plus loin.
S’agissant de la fonction de consommation finale, la
principale évolution liée à la nouvelle génération de
CNT tient au processus de « remise à niveau » de
l’évaluation des flux de consommation finale. Dans ce
cadre, l’enquête « budget-consommation » réalisée en
2015-2016 joue un rôle déterminant. L’évaluation des
revenus primaires et des transferts au titre de la
redistribution des revenus continuera à être réalisée,
pour l’essentiel, à partir des secteurs « contrepartie »
dans le cadre du processus de synthèse des opérations
de répartition. En effet, l’appareil statistique tunisien ne
dispose pas de source statistique directe, par exemple
grâce à la source fiscale, sur les revenus perçus par les
Ménages.
Les évolutions à attendre sont plus marquées s’agissant
de la fonction de production marchande et des flux
correspondants, celle en particulier réalisée dans le
cadre des activités d’entreprises individuelles. Ces
évolutions prennent en compte les progrès importants
prévus quant à l’appréhension de l’économie
informelle. Ainsi, quatre catégories d’activités
d’entreprises individuelles sont désormais distinguées
dans les CNT, à savoir :
Les entreprises individuelles (non agricoles) relevant
du secteur formel
Les entreprises individuelles des secteurs d’activité de
l’agriculture (formelles et informelles)
Les entreprises individuelles (non agricoles) relevant
de l’économie informelle mais connues de
l’administration fiscale et sociale, que l’on désigne par
économie informelle « patentée »
Les entreprises individuelles (non agricoles) relevant
de l’économie informelle mais inconnues de
l’administration fiscale et sociale, que l’on désigne par
économie informelle « non patentée ».
Nous avons présenté la définition désormais retenue en
Comptabilité nationale pour la notion d’économie
informelle. Cette définition permet de tracer une
distinction nette avec les entreprises individuelles du
secteur formel, le critère discriminant étant l’existence
d’une comptabilité (complète) en termes de flux et non
la taille des unités ou encore leur statut juridique. Quant
33 L’enquête « micro-entreprises » porte en effet sur les
entreprises de moins de 6 salariés alors que l’ENAE interroge
celles de plus de 6 salariés. La majorité des petites
à elles, les entreprises individuelles des activités
agricoles, qu’elles relèvent de l’économie formelle ou
de l’économie informelle, sont classées dans une
catégorie à part dans la mesure où les sources
statistiques pour cette catégorie d’entreprise
individuelle sont spécifiques.
L’évaluation de la fonction de production (et des
revenus primaires associés) pour chacune de ces
catégories d’entreprises individuelles fait appel à des
sources statistiques précises dans le cadre des CNT de
nouvelle génération.
Ainsi, les flux concernant les activités d’entreprises
individuelles de l’économie formelle (entreprises
disposant d’une comptabilité des flux) sont-ils évalués
à partir de l’ENAE (enquête nationale annuelle sur les
activités économiques) et de l’enquête « micro-
entreprises » (entreprises individuelles de moins de 6
salariés)33. Pour les entreprises individuelles relevant
de l’économie informelle « patentée », la source
statistique utilisée est l’enquête « micro-entreprises »,
dont la dernière version a été réalisée en 2017 sur
l’exercice 2016 (les résultats de l’enquête doivent
également faire l’objet d’une rétropolation sur l’année
2015). Quant à lui, le dispositif statistique mis en place
pour les entreprises individuelles de l’économie
informelle « non-patentée » dans le cadre des CNT de
la nouvelle génération (années de base) s’articule
autour de l’enquête « emploi », qui permet de
déterminer le nombre d’unités de production pour ce
segment de l’économie informelle, et de l’enquête
« micro-entreprises », qui fournit un ensemble de ratios
économiques permettant d’estimer la production et la
valeur ajoutée de ces unités. Enfin, les flux concernant
les entreprises individuelles des secteurs agricoles sont
déterminés à partir de sources statistiques sur les
productions agricoles gérées par le ministère de
l’Agriculture de Tunisie.
Les flux (production, consommations intermédiaires,
revenus primaires) des quatre catégories d’entreprises
individuelles sont regroupés et mis en forme dans le
cadre d’un Système intermédiaire d’entreprises (SIE),
comparable à celui utilisé pour les comptes des SNF
mais compte tenu d’un certain nombre d’allègements et
simplifications. Outre l’évaluation directe des flux de
production et de consommations intermédiaires au titre
des activités d’entreprises individuelles des Ménages,
ce SIE permet d’intégrer les données concernant les
entreprises individuelles dans le processus de synthèse
des opérations de répartition (il s’agit ici des revenus
primaires) alimentant les comptes des Ménages au titre
de la fonction de consommation finale.
Toutefois, les entreprises individuelles ne représentent
pas la totalité de la fonction de production marchande
des Ménages (hors location immobilière). Il convient
entreprises ne tient pas de comptabilité (de flux) mais un
certain nombre disposent d’une telle comptabilité.
24
Statéco n°113, 2019
en effet de prendre en compte également les activités
relevant de l’économie illégale, s’agissant en
particulier de contrebande de produits pétroliers ou
encore de produits alimentaires. Il est prévu en effet que
la nouvelle génération de CNT prenne en compte
explicitement ce type d’activités, si du moins les
sources statistiques disponibles le permettent34.
On pourrait s’étonner ici de l’absence de mention
explicite de l’économie souterraine, sous la forme
notamment de travail au noir. En fait, on considère que
l’économie informelle, celle notamment non connue de
l’administration fiscale ou sociale, recouvre le travail
au noir à partir du moment où il porte sur des activités
légales. Par ailleurs, nous verrons plus loin qu’il est
prévu d’intégrer explicitement dans la nouvelle
génération de CNT un redressement pour tenir compte
du phénomène de la fraude à la TVA sans entente entre
producteur ou commerçant et consommateur. Ce
redressement concerne en priorité certaines des
activités des entreprises individuelles.
L’évaluation de la production au titre de la location
immobilière ne devrait pas connaître de changement
majeur par rapport aux CNT actuels, si ce n’est
l’utilisation, pour la détermination du parc de logement,
de données tirées du dernier recensement général de la
population et de l’habitat (RGPH 2014). Il en est de
même pour l’évaluation de la production non
marchande au titre des loyers imputés. Les autres types
de production non marchande (services domestiques,
production pour compte propre de produits agricoles et
agro-alimentaires) ne devraient pas non plus connaître
de modification significative.
Reste la question posée par l’intégration des
Institutions sans but lucratif au service des Ménages
(ISBLSM). Ces entités comprennent trois types
principaux d’unités : les associations sans but lucratif
au service des ménages, les partis politiques et les
syndicats de salariés, les institutions religieuses,
organismes de charité… En ce sens une nette
distinction doit être établie avec la notion, par exemple,
d’économie sociale et solidaire, beaucoup plus large
que celle d’ISBLSM et qui intègre des unités faisant
partie des SNF, des SF et même des APU. Le SCN
(SCN 1993 comme SCN 2008) prévoit que les
ISBLSM constituent un secteur institutionnel distinct
de celui des Ménages à partir du moment où leur
importance est significative.
La comptabilité nationale tunisienne n’a pas suivi cette
approche dans les CNT actuels, les ISBLSM étant
intégrés au secteur « Ménages » en raison de leur faible
importance. Toutefois, le développement rapide de la
34La prise en compte de ces activités ne devrait pas se faire
par l’intermédiaire du SIE des entreprises individuelles mais
sous la forme d’un redressement lors du passage du SIE aux
comptes nationaux. A noter que cette prise en compte aura
également des incidences sur l’évaluation des flux de
commerce extérieur de marchandises repris dans les CNT.
première catégorie d’ISBLSM, à savoir les associations
sans but lucratif au service des ménages, pourrait
modifier cette situation. Un premier travail mérite ainsi
d’être réalisé, consistant à (ré)estimer sur les années
récentes l’évolution du nombre d’associations et à
corriger en conséquence les niveaux des CNT actuels.
La correction devrait également permettre de prendre
en compte explicitement les deux autres catégories
d’ISBLSM, qui semblent n’avoir pas été intégrées dans
les évaluations des CNT actuels. Si le montant obtenu
pour la production des ISBLSM est significativement
plus élevé que celui des CNT actuels, on peut envisager
de « sortir » les ISBLSM du secteur « Ménages » et ce
faisant, d’en faire un secteur institutionnel à part
entière.
Ce travail se heurte toutefois à une difficulté
importante, à savoir celle des sources d’informations
mobilisables à cette fin. En effet, hormis les
informations reprises dans le Répertoire national
« Entreprises » (RNE), qui ne couvrent que les
associations sans but lucratif connues de la Caisse
nationale de Sécurité sociale, l’INS ne dispose
actuellement d’aucune source statistique spécifique sur
les associations35.
Les comptes de biens et services
Les comptes de biens et services comprennent les
équilibres « ressources-emplois » de biens et services
(ERE) et le tableau des entrées-sorties (TES ou TRE)36.
Les ERE décrivent, à un niveau détaillé de produits,
l’équilibre entre ressources en biens et services
(productions, importations, marges commerciales et de
transport) et les emplois correspondants
(consommations intermédiaires, consommation finale,
FBCF, variation des stocks, exportations).
Le TES réalise la synthèse entre les ERE et les comptes
de production et d’exploitation de branches d’activité,
ce qui implique pour les CNT de construire des
matrices « branches-produits » concernant les
productions et les consommations intermédiaires. Si la
matrice relative aux productions peut être élaborée à
partir des informations statistiques produites par l’INS,
il n’en va pas de même pour celle concernant les
consommations intermédiaires. Dans ce cas, c’est la
mécanique d’élaboration du TES (coefficients
techniques, calages sur marges, informations diverses
sur les CI par produit…) qui permet la répartition par
produit des consommations intermédiaires des
activités, étant entendu que les deux marges sont
fixées : le total de la consommation intermédiaire par
produit est donné par les ERE, le total des
35 Une enquête sur les associations a bien été réalisée en
2002 mais son renouvellement ne semble pas à l’ordre du
jour. 36 ERE et TES sont directement articulés aux comptes des
secteurs institutionnels, qu’il s’agisse de l’évaluation des
productions et des consommations intermédiaires de biens et
services ou encore de celle des emplois.
25
Statéco n°113, 2019
consommations intermédiaires par activité l’est par le
SIE (SNF et entreprises individuelles) et les comptes
des secteurs institutionnels.
Le processus d’élaboration des ERE de la nouvelle
génération de CNT n’est pas sensiblement modifié par
rapport à celui des CNT actuels, sinon qu’il devrait
s’inspirer de l’outil ERE-TES. Les ERE continuent à
être établis à un niveau détaillé de produits,
correspondant au niveau 3 de la nomenclature de
produits (400 produits environ). Leur élaboration
mobilise une large gamme d’informations statistiques :
enquêtes « entreprises » et SIE, enquête « budget-
consommation », rapports d’activité, comptes des
secteurs institutionnels (APU, SF), données douanières,
Balance des paiements, données détaillées sur les
impôts par produit… En ce sens, l’élaboration des ERE
constitue un véritable travail de synthèse, d’importance
capitale pour le TES lui-même mais également pour
l’ensemble des comptes.
Cela étant, les ERE de la nouvelle génération de CNT
« capitalisent » une bonne partie des changements
afférents à la nouvelle base des comptes nationaux :
« remise à niveau » des opérations sur biens et services
concernant les entreprises non financières (productions,
consommations intermédiaires, FBCF…) et la
consommation finale des ménages, amélioration de la
prise en compte de l’économie informelle, mise en
œuvre des recommandations du SCN 2008
(élargissement de la FBCF aux dépenses de R-D et aux
achats d’armement, modification de l’évaluation de la
production d’assurance de dommage, nouvelle
méthode d’estimation de la production de la BCT…),
nouvelle estimation de la production des ISBLSM,
intégration (si possible) des flux relatifs à l’économie
illégale (importations, marges commerciales,
consommation finale)
Par ailleurs, compte tenu du mode de valorisation des
productions de biens et services (prix de base), des
importations (CAF, hors droits de douane) et des
emplois sur biens et services (hors impôts sur les
produits déductibles, notamment la TVA), les ERE
comprennent un poste mesurant les impôts sur les
produits inclus dans le prix d’acquisition. Il s’agit en
particulier de la TVA à la charge des acquéreurs à partir
du moment où ces derniers ne peuvent la déduire (TVA
non déductible). Cette TVA peut être calculée sous
deux formes. La première résulte de l’application des
taux légaux de TVA (non déductible) aux emplois de
chaque produit, en particulier la consommation finale
des ménages. La seconde forme mesure la TVA
effectivement encaissée par l’administration fiscale. In
fine, c’est cette dernière TVA qu’il convient de
reprendre dans les ERE, en cohérence avec les comptes
des APU, mais l’écart entre les deux formes de TVA
37 En ce sens, on peut considérer que la prise en compte de la
fraude TVA (sans entente) constitue une conséquence de la
mise en œuvre des recommandations du SCN 2008 (ou même
doit être analysé afin de faire l’objet d’un traitement
spécifique dans les comptes nationaux.
En effet, l’écart résulte de plusieurs phénomènes. Outre
l’existence de décalages temporels, de même que de
régimes particuliers (franchise ou décotes) en matière
de TVA s’appliquant, par exemple, aux petites
entreprises, il s’explique par le non-reversement d’une
partie de la TVA à l’administration fiscale (« fraude
TVA »), avec deux modalités possibles : une fraude
avec entente entre le producteur ou le commerçant et le
consommateur final, une fraude sans entente entre ces
différentes parties. La TVA est alors conservée par le
producteur ou le commerçant.
Les deux formes de fraude à la TVA ont des
conséquences différentes dans les comptes nationaux.
La contrepartie de la fraude avec entente est une
diminution de la valeur des emplois finals, sans impact
sur la valeur de la production ou des marges
commerciales. En revanche, la fraude sans entente doit
venir augmenter la valeur des productions ou des
marges commerciales. En ce sens, la fraude à la TVA
sans entente constitue une forme d’économie
souterraine37. Il est prévu de conduire un travail
spécifique dans le cadre de la nouvelle génération de
CNT afin de l’évaluer et d’intégrer explicitement ce
redressement dans les comptes nationaux (ERE,
comptes des SNF, comptes des activités d’entreprises
individuelles).
Le processus d’élaboration du TES ne devrait pas, lui
non plus, connaître de changement majeur par rapport
aux CNT actuels38. Il s’appuie sur un niveau de détail
de produits et d’activités plus réduit que celui des ERE,
soit une centaine de produits en lignes et une
soixantaine d’activités pour les comptes des activités.
Ces derniers continuent à être établis, comme dans les
CNT actuels, en utilisant la notion de sous-secteur
d’activité et non celle de branche d’activité, ce qui
complique l’articulation entre branches et produits mais
correspond mieux à l’information statistique
disponible. Les évolutions mentionnées au niveau des
ERE se retrouvent mécaniquement dans le TES. On
rappelle par ailleurs que le TES devrait comprendre
deux postes d’ajustement supplémentaires,
respectivement sur le total des importations et sur le
total des exportations, permettant de rétablir la
cohérence globale avec les évaluations de la Balance
des paiements dans le cas de travail à façon pour le
compte d’entreprises non-résidentes.
Premier aperçu de l’impact sur
l’évaluation du PIB de la Tunisie
Quelles seront les conséquences sur le niveau du PIB
de la Tunisie des évolutions générées par la nouvelle
génération de CNT ? Ce chapitre cherche à en donner
du SCN 93, qui prévoyait déjà la prise en compte explicite de
l’économie souterraine dans les comptes nationaux). 38 Comme pour les ERE, l’élaboration du TES reposera sur
l’utilisation de l’outil ERE-TES.
26
Statéco n°113, 2019
un premier aperçu (tableau 3), étant entendu qu’elles ne
pourront être cernées de façon rigoureuse qu’à partir du
moment où l’on disposera effectivement des comptes
des deux années de base (2015 et 2016).
Le PIB est appréhendé ici dans le cadre de l’optique
« production », soit la somme des valeurs ajoutées des
activités marchandes (aux prix de base) et des valeurs
ajoutées des activités non marchandes des APU,
Ménages et ISBLSM. Cette somme doit être majorée
des impôts, nets des subventions, sur les produits du fait
de la valorisation des valeurs ajoutées marchandes aux
prix de base.
Tableau n°3 :
Impacts des évolutions sur le niveau du PIB de la Tunisie
Fait générateur
des évolutions Valeurs
ajoutées
impactées
Remarques
1. « Remise à
niveau » des
comptes des
années de base
SNF
Entreprises
individuelles
(Ménages)
Le processus de « remise à niveau » (années de base) concerne avant tout les
secteurs institutionnels dont les comptes en année courante sont élaborés, dans le
cadre des CNT actuels, grâce à une méthode « en évolution ». Il s’agit des Sociétés
non financières (en partie) et des Entreprises individuelles. Pour les autres secteurs
institutionnels, les comptes en année courante (CNT actuels) sont directement
établis en niveau.
2. Mise en œuvre
des
recommandations
du SCN 2008
Tous secteurs
institutionnels
Tous les secteurs institutionnels sont concernés par la mise en œuvre des
recommandations du SCN 2008, à des degrés divers toutefois. L’impact est
important sur les valeurs ajoutées des APU et des SF, à un moindre degré des SNF.
Pour les Ménages, l’impact direct de la nouvelle version du SCN est faible, si l’on
excepte la question de l’économie informelle, traitée à part.
3. Amélioration
de la prise en
compte de
l’économie
informelle
Entreprises
individuelles
(Ménages)
Il s’agit d’une dimension essentielle du changement de base des CNT, s’appuyant
sur un dispositif statistique articulé autour de l’enquête « emploi » et de l’enquête
« micro-entreprises ». C’est la valeur ajoutée des entreprises individuelles qui est
directement impactée, certainement à la hausse mais sans qu’il soit possible au
stade actuel de déterminer l’ampleur du relèvement.
4. Estimation de
l’économie
illégale (en
partie)
Ménages Cette estimation porterait en particulier sur la contrebande de produits pétroliers
entre la Tunisie et la Libye. Cette contrebande est susceptible de générer des
marges commerciales sur produits importés, se traduisant dans les comptes par une
valeur ajoutée supplémentaire attribuée au secteur Ménages. Il n’est pas certain
toutefois que cette estimation puisse être réalisée compte tenu de la disponibilité
limitée des sources statistiques.
5. Redressement
de la production
pour fraude à la
TVA sans entente
SNF
Entreprises
individuelles
(Ménages)
Ce redressement pourrait (ce n’est pas encore certain au stade actuel) être évalué
de façon indirecte, à partir d’une analyse des écarts entre la TVA « théorique »
(fondée sur les taux légaux de TVA non déductible grevant les produits) et la TVA
effectivement encaissée par l’État tunisien. La TVA encaissée par les producteurs
ou les commerçants mais non reversée à l’État, sans qu’il y ait entente avec les
consommateurs finals, doit venir augmenter la production et la valeur ajoutée des
entreprises (SNF mais surtout entreprises individuelles).
6. Nouvelles
sources
statistiques et/ou
utilisation de
versions plus
récentes de
sources
statistiques
APU
(administrations
publiques
locales)
ISBLSM
On mentionne ici seulement les cas des comptes des administrations publiques
locales (mobilisation d’une source statistique nettement plus détaillée) et des
Institutions sans but lucratif au service des Ménages, qui pourrait faire l’objet d’une
réestimation par rapport aux CNT actuels à partir des données récentes issues du
Répertoire national des entreprises. D’autres sources statistiques récentes
pourraient être citées mais une partie d’entre elles aurait pu être utilisée dans le
cadre de l’élaboration des CNT actuels.
On peut distinguer six raisons principales de
modifications du PIB en raison des changements
introduits par la nouvelle génération de CNT, en
39 On ne prend pas en compte ici les conséquences des
améliorations apportées aux processus techniques
d’élaboration des CNT, s’agissant en particulier du passage
prenant comme référence temporelle les deux années de
base 2015 et 201639.
des données élémentaires aux données des comptes nationaux
pour les différents secteurs et sous-secteurs institutionnels,
notamment pour les entreprises non financières. Certaines
27
Statéco n°113, 2019
• Le processus de « remise à niveau » des valeurs
ajoutées des entreprises non financières, qu’il s’agisse
des Sociétés non financières ou des activités
d’entreprises individuelles des Ménages. Dit
autrement, les niveaux dans les comptes actuels pour
les années 2015 et 2016, issus (en partie) de
l’application d’indices d’évolution aux niveaux de
l’année de base 1997, sont remplacés par une
évaluation directement en niveau. Cela étant, l’impact
sur le niveau du PIB est difficile à cerner à ce stade (à
la hausse ou à la baisse) mais il risque d’être important,
bien qu’inégal selon les secteurs d’activité.
• Les conséquences de la mise en œuvre des
recommandations du SCN 2008. Ainsi, l’élargissement
de la notion de FBCF aux dépenses de R-D se traduit
par une augmentation du PIB, avec deux effets
combinés : d’une part une augmentation de la valeur
ajoutée non marchande des APU en raison de la
consommation de capital fixe des (nouveaux) actifs en
propriété intellectuelle de R-D40, d’autre part une
augmentation de la valeur ajoutée des SNF, qui se
voient attribuer une production pour compte propre de
R-D. De même, l’intégration des achats de systèmes
d’armement à la FBCF des APU augmente leur valeur
ajoutée en raison, là aussi, de la consommation de
capital fixe des nouveaux actifs. Deux autres
recommandations du SCN 2008 ont des conséquences
directes sur le niveau du PIB (à la hausse), d’une part
la nouvelle méthode d’évaluation de la production de la
Banque centrale de Tunisie, d’autre part le calcul de la
production de services d’assurance de dommage. Elles
se traduisent en effet par un rehaussement de la valeur
ajoutée du secteur institutionnel des Sociétés
financières, et par-là du niveau du PIB41. S’agissant de
la seconde recommandation, on fait l’hypothèse ici que
les indemnités d’assurance « corrigées et ajustées »
sont plus faibles, en règle générale, que les indemnités
effectivement payées par les Sociétés d’assurance.
Toutefois, l’impact sur le niveau du PIB en raison du
relèvement de la production de service d’assurance de
dommage doit tenir compte également de la diminution
de valeur ajoutée (SNF, entreprises individuelles,
SF…) due à l’augmentation des consommations
intermédiaires en services d’assurance de dommage
découlant de la modification du niveau de la
production.
• L’amélioration de la prise en compte de l’économie
informelle, en particulier celle non connue de
pourraient avoir des effets importants sur les niveaux des
valeurs ajoutées. De même, on n’intègre pas les
conséquences, par exemple, du projet de prise en compte,
dans les CNT de nouvelle génération, d’un processus de
synthèse entre emplois, productions de biens et services et
valeurs ajoutées. 40 On ne présente ici que la résultante finale sur la valeur
ajoutée des APU de l’élargissement de la FBCF aux dépenses
de R-D. En fait, l’impact est plus complexe que cela, avec une
nouvelle production pour compte propre (R-D), qui se
substitue à une production de services non marchands (celle
l’administration fiscale et sociale. Elle devrait venir
augmenter la valeur ajoutée des entreprises
individuelles, donc le niveau du PIB. Si le sens de
l’impact paraît clair (rehaussement du PIB), son
ampleur est difficile à anticiper à ce stade dans la
mesure où les CNT actuels prennent également en
compte, certes de façon indirecte et certainement
partielle, la partie de l’économie informelle non connue
de l’administration fiscale ou sociale.
• L’intégration (si possible) d’une estimation de
l’économie illégale, en particulier sous la forme de
contrebande de produits pétroliers importés. La valeur
ajoutée résulte ici des marges commerciales sur les
produits correspondants. Techniquement, elle est
intégrée aux CNT grâce à un redressement de la
production et de la valeur ajoutée des entreprises
individuelles (secteur d’activité « commerce de
détail ») lors du passage du SIE aux comptes nationaux.
Cette intégration se traduit par un rehaussement du PIB,
dont il est impossible de mesurer l’importance au stade
actuel.
• L’évaluation (si possible) d’un redressement de la
production afin de tenir compte de la TVA non reversée
à l’administration fiscale sans qu’il y ait entente entre
le producteur ou le commerçant et le consommateur
final, ce que l’on désigne par « fraude à la TVA sans
entente ». Il s’agit d’une forme d’économie souterraine.
Ce redressement n’est pas évalué explicitement dans
les CNT actuels (base 1997). Il viendrait augmenter la
valeur ajoutée des SNF et des entreprises individuelles
et se traduirait donc par une augmentation du PIB.
• La mobilisation de sources statistiques nouvelles ou
encore de versions plus récentes ou actualisées. Par
exemple, les comptes des collectivités locales sont
établis dans la nouvelle génération de comptes en
utilisant des données beaucoup plus détaillées que dans
le cadre des CNT actuels. En résulte une diminution de
la valeur ajoutée (non-marchande) des APU, donc du
niveau du PIB. De même, les travaux statistiques
envisagés pour les comptes des ISBLSM pourraient se
traduire par un relèvement significatif de la valeur
ajoutée (non-marchande) de ces unités, donc du niveau
du PIB. Toutefois, les conséquences sur les valeurs
ajoutées et le PIB ne sont pas toujours aussi explicites,
s’agissant en particulier de l’utilisation de versions
récentes de sources statistiques (enquête « micro-
entreprises », enquête « budget-consommation »,
sources du ministère de l’Agriculture…). En effet,
des unités produisant la R-D, reprise probablement en
services d’éducation dans les CNT actuels), et un
rehaussement de la production de services « régaliens » des
APU en raison de la consommation de capital fixe sur les
actifs en R-D. 41 En fait, c’est la valeur ajoutée de trois composantes des SF
qui est augmentée : celle de la Banque centrale, celle des
(autres) Institutions financières monétaires (suppression des
anciennes consommations intermédiaires en SIFIM produite
par la BCT) et celle des Sociétés d’assurance.
28
Statéco n°113, 2019
certaines d’entre elles (mais pas toutes) auraient été
mobilisées en tout état de cause dans le cadre de
l’élaboration des CNT actuels (base 1997).
Conclusion
La nouvelle génération de CNT repose sur deux années
de base (2015 et 2016) et non plus une seule comme
dans la génération actuelle des comptes nationaux
tunisiens. Ce choix doit permettre d’élargir l’apport des
sources statistiques au processus d’élaboration des
comptes des années de base et d’en renforcer la qualité,
dimension fondamentale pour assurer en retour une
plus grande crédibilité des évaluations en année
courante.
Les comptes des années de base devraient être
disponibles en 2020, après plus de trois ans de travaux
ayant mobilisé non seulement la Direction centrale de
la comptabilité nationale de l’INS mais aussi une bonne
partie de ses Directions statistiques (le calendrier
d’élaboration des comptes des années de base est
précisé dans l’encadré 3). Cette opération représente
une lourde charge de travail pour l’INS, d’autant plus
qu’elle doit être conduite tout en continuant à produire
les comptes en année courante dans le cadre de la base
actuelle (base 1997) et alors que les ressources de
l’INS, en particulier en cadres compétents et
expérimentés, sont de plus en plus contraintes. En tout
état de cause, il est illusoire d’espérer terminer plus
rapidement un changement de base aussi ambitieux et
prenant la suite d’une génération de comptes dont
l’année de base remonte à plus de 20 ans !
Comme pour toute opération de ce type, le changement
de base des CNT se traduit en premier lieu par une
« remise à niveau » d’une partie importante des
données. Cette « remise à niveau » concerne en
particulier les comptes des Sociétés non financières et
des Ménages (entreprises individuelles). Ce faisant, les
niveaux de valeurs ajoutées, de revenus primaires et de
FBCF au sein de la sphère marchande (non financière)
devraient être largement revus en regard des CNT
actuels. Le processus de « remise à niveau » concerne
aussi les comptes de biens et services, qu’il s’agisse des
ressources (productions, marges commerciales et de
transport…) ou des emplois, en particulier la
consommation finale des Ménages.
La nouvelle génération de CNT intègre également les
recommandations découlant du SCN 2008, qu’il
s’agisse de l’élargissement de la notion de FBCF aux
dépenses de recherche-développement et aux achats de
systèmes d’armement, d’une approche renouvelée
quant à l’évaluation de la notion de production de
service d’assurance de dommage, de mise en évidence
d’une production au titre de l’activité de contrôle et de
régulation de la politique monétaire de la part de la
BCT… Par ailleurs, en accord avec la 6e version du
manuel du FMI sur l’établissement des Balances de
Paiements, les échanges extérieurs de biens et services
sont désormais fondés sur le critère du changement de
propriété. Pour les CNT, le principal impact concerne
l’enregistrement des échanges liés au travail à façon
d’entreprises tunisiennes pour le compte de donneurs
d’ordre étrangers. Toutefois, une présentation originale
a été retenue pour la Comptabilité nationale tunisienne,
cherchant à concilier le critère du changement de
propriété avec l’enregistrement des flux physiques de
marchandises, tel que repris dans les statistiques
douanières.
Encadré 3 : Le calendrier d’élaboration des comptes des
années de base
Les travaux d’élaboration des comptes (années de base) de la
nouvelle génération des CNT ont démarré au premier
trimestre 2016, au moment du lancement du jumelage. Une
première phase (2016-2017) a consisté à cerner les
conséquences de la mise en œuvre des recommandations du
SCN 2008. D’autres dossiers ont été traités au cours de cette
première phase, notamment la définition du dispositif
statistique nécessaire à l’objectif d’amélioration de la prise en
compte de l’économie informelle ou encore les modifications
à apporter au questionnaire de l’enquête nationale sur les
activités économiques. Toutefois, il est apparu rapidement que les comptes des deux
années de base, même sans prendre en compte les
particularités quant à l’élaboration des comptes financiers,
qui a pris du retard, ne pouvaient pas être terminés d’ici la fin
du jumelage, et cela pour plusieurs raisons : incertitudes sur
la mise en place du dispositif statistique concernant
l’appréhension de l’économie informelle, celle notamment
non connue de l’administration, problèmes rencontrés dans
l’obtention des résultats extrapolés de l’ENAE 2015,
décalage important du côté de la BCT quant au passage en 6e
version du manuel FMI de la Balance des paiements de la
Tunisie.
Les travaux d’élaboration des comptes des années de base se
sont donc poursuivis après la fin du jumelage (mars 2018). Il
était alors prévu qu’une première version complète des
comptes de l’année 2015 soit disponible avant la fin de
l’année 2018 mais l’INS n’a pu atteindre cet objectif. In fine,
c’est en 2020 que les comptes des deux années de base (2015
et 2016) devraient être finalement disponibles (comptes non
financiers et financiers des secteurs institutionnels, comptes
de biens et services à prix courants et prix constants, tableaux
de synthèse, évaluation des agrégats), étant entendu que les
comptes des relations avec le Reste du monde seront établis à
partir d’une Balance des paiements conforme à la 5e version
du manuel FMI et non à la 6e version.
Toutefois, les évolutions résultant des
recommandations du SCN 2008 sont d’une ampleur
plus limitée que les changements introduits par le SCN
1993, que la comptabilité nationale tunisienne a intégré
dès la deuxième génération de comptes (base 1997).
La nouvelle génération de CNT a une autre ambition
fondamentale, à savoir marquer un progrès décisif
quant à la prise en compte, dans le système de
comptabilité nationale, des activités de l’économie
informelle. Cette ambition implique la mise en place
d’un dispositif statistique performant, s’appuyant sur
les données recueillies grâce à l’enquête « emploi » et
l’enquête économique auprès des petites entreprises
(enquête « micro-entreprises »). Ce dispositif s’inspire
directement des expériences étrangères fondées sur les
29
Statéco n°113, 2019
enquêtes dites « 1-2-3 », combinant enquêtes auprès
des entreprises et enquêtes auprès des ménages. Cela
dit, avant d’être intégrées dans les comptes, les données
statistiques, compte tenu en particulier de la taille
réduite des échantillons des enquêtes « micro-
entreprises » en regard des univers correspondants,
méritent d’être confrontées avec celles concernant les
autres formes de production grâce à la mise en place,
au sein du processus d’élaboration des comptes
nationaux, d’un nouvel outil de synthèse, articulant
emplois, productions et valeurs ajoutées.
L’INS devra s’atteler à mettre en place une action de
communication à la hauteur de l’enjeu que représente
la nouvelle génération de CNT pour l’ensemble de la
statistique tunisienne. S’appuyant sur la diffusion des
comptes des deux années de base 2015 et 2016, cette
communication devrait pouvoir se tenir en 2020 et
mettre en exergue les éléments suivants : raisons
motivant le changement de base, méthodes utilisées
pour l’élaboration des comptes des années de base,
apports de la nouvelle génération de CNT mais
également continuité avec les comptes de la base
actuelle en raison de la forte articulation prévalant entre
le SCN 1993 et le SCN 2008, sources statistiques
mobilisées dans le cadre du changement de base,
notamment dans le cadre de l’appréhension des
activités de l’économie informelle, cohérence avec la
Balance des paiements, principaux changements
concernant les différentes parties des comptes (secteurs
institutionnels, biens et services), y compris les
comptes financiers et même les comptes de patrimoine
financier si les travaux correspondants ont
suffisamment progressé d’ici là. Les impacts sur
l’évaluation du niveau du PIB de la Tunisie devront être
analysés et mis en évidence de façon rigoureuse. Les
méthodes utilisées pour les comptes en année courante
et les comptes rétropolés ont également vocation à faire
partie de cette communication, de même que les
évolutions en matière de comptes trimestriels.
Enfin, cette action de communication devrait être mise
à profit pour mettre en exergue l’élargissement
progressif du système de Comptabilité nationale de la
Tunisie, sous la forme en particulier de comptes et
analyses satellites dans deux domaines privilégiés : le
tourisme d’une part, l’environnement d’autre part.
Références bibliographiques
Banque mondiale, Commission européenne, Fonds monétaire international, Organisation de coopération et
de développement économique, Organisation des nations unies (2013), « Système de comptabilité nationale
2008 », 751p.
Muller P. (1986), « Les comptes des entreprises non financières en comptabilité nationale. Eléments
méthodologiques à partir de l’expérience tunisienne », Statéco n°46, Ministère de la coopération, Insee.
Razafindrakoto M., Roubaud F. et Torelli C. (2009), « La mesure de l’emploi et du secteur informels : leçons
des enquêtes 1-2-3 en Afrique », Statéco n°104, pp.11-34.
Roubaud F. (2009), « La production statistique sur le secteur informel en Afrique : quels enseignements et quelles
perspectives ? », Statéco n°104, pp. 115-126.
Statistiques Tunisie (2018), Les comptes de la Nation, Rapport annuel, n°22, 157p.
Union Européenne (2013), « Système européen des comptes, SEC 2010 », Eurostat, Commission européenne,
762p.
Annexes
Les comptes nationaux trimestriels
Au cours des années 2000, les comptables nationaux tunisiens ont mis en place un système de comptes trimestriels,
calés sur les comptes annuels dès le compte provisoire établi pour chaque année n au second semestre de l’année
n+1. Les comptes trimestriels sont publiés chaque trimestre, la première version étant disponible 45 jours après la
fin du trimestre, et disponibles sur le site de l’INS. Des séries longues des principaux agrégats issues des comptes
trimestriels sont également publiées sur le site de l’INS.
L’élaboration des comptes trimestriels s’appuie sur un ensemble de sources et de données conjoncturelles (indices,
commerce extérieur…) et un modèle d’ étalonnage-calage. Les comptes font l’objet par ailleurs de corrections
pour variations saisonnières et jours ouvrables. Seule une optique «production» est prise en compte, productions
et valeurs ajoutées étant évaluées par sous-secteur d’activité à un niveau assez détaillé (niveau 60 de la
nomenclature), avec trois systèmes de prix : prix courants, prix de l’année précédente et prix constants 2010.
30
Statéco n°113, 2019
Le jumelage entre l’INS, l’INSEE et l’ISTAT a permis de faire évoluer ce dispositif. Au départ, l’ambition du
jumelage était de mettre en place, en plus de l’optique « production », une véritable optique « demande » devant
permettre une mesure de l’évolution du PIB à partir de la trimestrialisation des postes de la demande finale.
Toutefois, il est apparu rapidement que cet objectif était hors d’atteinte compte tenu de l’insuffisance des sources
conjoncturelles, notamment en matière de consommation finale des ménages.
Ainsi, si la mise en place d’une optique « demande » complète n’est-elle pas réaliste, au stade actuel, dans le cadre
de la comptabilité nationale tunisienne, et notamment une mesure des variations trimestrielles du PIB à partir de
cette optique, il est parfaitement possible en revanche de chercher à « dériver » la trimestrialisation de la demande
finale intérieure (DFI) à partir de la trimestrialisation des productions et des flux du commerce extérieur de biens
et services, selon une formule du type suivant :
DFI(t) = P(t) + (IMP – EXP)(t) – CI(t)
Le poste P(t) représente la production de biens et services du trimestre t. Ce poste est calculé à partir de l’optique
« production », de même que le poste CI(t), à savoir les consommations intermédiaires pour le trimestre t. Le calcul
est réalisé en distinguant plusieurs grands produits (niveau 1 de la nomenclature), ce qui implique la construction,
à partir des comptes annuels, de matrices « secteurs-produits ». La « trimestrialisation » des flux du commerce
extérieur (différence entre importations et exportations) est réalisée à partir des statistiques douanières et des
statistiques de Balance des paiements. Il faut également intégrer dans la formule une « trimestrialisation » des
impôts, nets de subventions, sur les produits, et traiter par ailleurs le cas des marges de transport et de commerce.
On peut également décomposer le poste DFI(t) entre d’une part la FBCF (et les variations de stocks), d’autre part
la consommation finale des ménages et des administrations publiques. Dans ce cadre, la trimestrialisation de la
FBCF est réalisée grâce à l’établissement d’une corrélation avec les productions correspondantes. La
trimestrialisation de la consommation finale des APU est directement liée à celle des productions non marchandes
issues de l’optique « production ». Ce faisant, la trimestrialisation de la consommation finale des ménages est-elle
obtenue par solde.
Ces travaux ont pu être menés à bien dans le cadre du jumelage, si bien que les comptables nationaux tunisiens
publient désormais, en même temps que l’évolution trimestrielle du PIB et des valeurs ajoutées, les évolutions
trimestrielles des postes de la demande finale.
Les comptes financiers des CNT
C’est dès la première génération des comptes nationaux tunisiens (base 1983) que des comptes financiers ont été
construits pour tous les secteurs et sous-secteurs institutionnels, en mobilisant des sources diverses : bilans
(banques, assurances, collectivités locales, administrations de sécurité sociale…), statistiques du marché monétaire
et financier (émissions d’actions et d’obligations, titres du marché monétaire…), données budgétaires, Balance
des paiements… Pour les SNF et les Ménages, la plus grande partie des opérations financières est évaluée de façon
indirecte, grâce à la construction de tableaux « qui à qui » des opérations financières et du processus de synthèse
de ces opérations. Les comptes financiers sont ensuite rassemblés dans un tableau de synthèse particulier (TOF),
composante du tableau économique d’ensemble (TEE). L’acquis fondamental que représente la construction de
comptes financiers articulés aux comptes non financiers des secteurs institutionnels a été préservé dans la deuxième
génération de CNT (base 1997), en prenant en compte également les évolutions introduites par le SCN 1993, au
demeurant assez limitées en matière de comptes financiers si l’on excepte, toutefois, l’introduction de comptes de
patrimoine financier (voir plus loin).
Pour l’essentiel, le changement de base en cours (base 2015-2016) a trois conséquences majeures pour les comptes
financiers des secteurs institutionnels. Il s’agit en premier lieu de la mise en œuvre des recommandations du SCN
2008. Pour les CNT, l’impact est limité, avec simplement une mise à jour de la classification des opérations
financières. Le SCN 2008 prévoit bien la prise en compte d’une nouvelle opération financière, à savoir les
«produits dérivés», mais celle-ci semble très circonscrite, voire négligeable, en Tunisie. Toutefois, l’application
éventuelle d’une autre recommandation du SCN 2008 méritera d’être examinée dans le cadre de la nouvelle
génération de CNT, à savoir celle concernant les garanties de prêts standards, en particulier à l’exportation,
désormais reconnues comme des opérations financières à part entière. En deuxième lieu, plusieurs évolutions
concernant les fournisseurs de données statistiques (données sur les IFM, Conseil des Marchés financiers,
Comptabilité publique, Collectivités locales…) pourraient avoir des conséquences notables sur la construction des
comptes financiers des secteurs institutionnels dits à « comptabilité complète » (SF et APU), de même que les
comptes financiers des relations avec le Reste du monde. Par ailleurs, les données du SIE (système intermédiaire
entreprises) pourraient être mobilisées pour l’évaluation de certaines opérations financières des SNF. En troisième
lieu enfin, se pose la question de l’ajustement entre comptes non financiers et comptes financiers des secteurs
institutionnels. La nouvelle génération de CNT pourrait être l’occasion de corriger un certain nombre
d’insuffisances quant à la présentation et au calcul de l’ajustement, notamment pour les SNF et les Ménages.
31
Statéco n°113, 2019
Les comptes financiers des deux années de base (2015 et 2016) devraient être élaborés et diffusés selon le même
calendrier que celui relatif aux comptes non financiers des secteurs institutionnels.
Contrairement à ce qui est prévu par le SCN (SCN 1993 et SCN 2008), la Comptabilité Nationale tunisienne
n’intègre pas actuellement de comptes de patrimoine financier. Le jumelage entre l’INS, l’INSEE et l’ISTAT
prévoyait ainsi de remédier à cette situation mais, pour des raisons diverses, ce projet n’a pu être mené à bien à
l’issue du jumelage. Cela étant, compte tenu de l’expérience acquise par les comptables nationaux de l’INS dans
la construction des comptes financiers, l’objectif d’intégrer des comptes de patrimoine (et de variation de
patrimoine) financier à la comptabilité nationale tunisienne reste pertinent et parfaitement réalisable.
Les statistiques et comptes de l’environnement
La Statistique tunisienne s’est engagée dans le domaine de l’environnement suite à la mise en place du projet
MEDSTAT de collaboration entre l’Union européenne et un certain nombre de pays méditerranéens. Ce projet a
démarré en 1996 mais c’est à partir de 1999 qu’il intègre une composante sur l’environnement (MEDSTAT-ENV).
Dans ce contexte, une unité « Statistiques et comptes de l’environnement » a été créée en 2004 au sein de la
Direction centrale des comptes nationaux de l’INS. Les domaines environnementaux couverts par l’INS dans le
cadre de MEDSTAT-ENV, directement fonction des sources disponibles, ont été les déchets, l’air, la biodiversité,
les sols, les forêts et l’eau. Deux rapports sur les statistiques et les données environnementales ont été publiés par
l’INS en 2003 puis en 2006. Par ailleurs, les résultats de ces travaux ont fait l’objet d’une valorisation dans une
publication commune à l’ensemble des pays méditerranéens ayant participé au projet MEDSTAT. Toutefois,
l’implication de l’INS dans le domaine de l’environnement s’est maintenue après la fin (2009) du projet
MEDSTAT-ENV et l’INS publie régulièrement des statistiques sur l’environnement dans son « Annuaire
statistique » annuel, ainsi que sur son site internet. Cette publication ne permet pas cependant de donner une
visibilité suffisante aux statistiques rassemblées par l’INS pour les différents domaines de l’environnement.
L’INS collecte les données sur l’environnement auprès de nombreux fournisseurs de données : Agence nationale
pour la protection de l’environnement, ministère de l’Agriculture, de l’Energie, des Mines et des énergies
renouvelables, de la Santé, Institut national de la météorologie, Office national de l’assainissement… Cette
décentralisation, inévitable compte tenu de la diversité des domaines environnementaux, génère un certain nombre
de difficultés pour l’INS, qu’il s’agisse du respect des délais, de la qualité et du niveau de complétude des
informations, de la terminologie… En ce sens, les producteurs de données ne sont pas toujours en mesure d’intégrer
les contraintes de la production statistique dans leur programme de travail, compte tenu de leurs priorités et
contraintes internes.
L’un des domaines environnementaux revêtant une importance cruciale pour la Tunisie est celui de l’utilisation
des ressources en eau. Le pays est en effet en situation de stress hydrique. La pression sur les ressources tend
d’ailleurs à s’accroître avec la croissance démographique et économique, le tout dans un contexte de changement
climatique marqué. En outre, la Tunisie connaît une situation climatique très hétérogène en fonction de ses
territoires. Dans ce contexte, un compte pilote des disponibilités et utilisations de la ressource en eau (année 2003)
a été développé par l’INS en 2009 avec l’appui du programme MEDSTAT. Ce compte a constitué une première
expérience d’un compte de ressources naturelles, en termes de flux et de stocks, au sens du manuel des Nations-
Unies sur les comptes de l’environnement (SEEA). Toutefois, cette expérience n’a pas été renouvelée avant le
démarrage du jumelage entre l’INS, l’INSEE et l’ISTAT (voir plus loin).
In fine, le jumelage (2016-2018) a cherché avant tout à répondre à deux des principales insuffisances mentionnées
précédemment en matière de statistiques et comptes de l’environnement, d’une part une visibilité trop faible
accordée aux statistiques environnementales dans les publications de l’INS, d’autre part la reprise et l’amélioration
des travaux sur les comptes de la ressource en eau.
Le premier objectif (meilleure valorisation des statistiques et données environnementales) devrait se traduire par
la mise en place d’un dispositif régulier et autonome de publication des statistiques environnementales, en
privilégiant au départ les domaines faisant l’objet de politiques publiques en matière d’environnement : eau, air,
traitement des déchets, sols et occupation des sols, biodiversité. Ce processus de publication et de diffusion devra
s’appuyer sur un ensemble de dispositions afin d’en garantir la pérennité. Il s’agit en particulier d’assurer, grâce à
des conventions ad-hoc avec les producteurs de données, la régularité et la qualité de la transmission des
informations. Ce faisant, cette publication est susceptible de mieux structurer et d’améliorer le processus
d’échanges et de discussions avec les fournisseurs mais aussi les utilisateurs des informations environnementales.
Elle permettra enfin de construire une vision d’ensemble partagée sur l’environnement, avec notamment la
présentation d’indicateurs visant à dresser une analyse du type « forces motrices-états-pressions » pour des
domaines d’importance stratégique.
La construction d’un compte des disponibilités et utilisations de la ressource en eau a été relancée dans le cadre
du jumelage sur les années 2010 et 2015. Ces travaux ont permis d’élargir l’expérience précédente (compte pilote
32
Statéco n°113, 2019
sur l’année 2003), en intégrant notamment un champ plus riche de données, en modifiant certaines définitions et
nomenclatures afin de les rendre plus cohérentes avec les normes internationales en la matière et en prévoyant le
calcul d’indicateurs, y compris au niveau territorial, en vue de suivre les effets des politiques publiques. Enfin, il
est prévu que les comptes de l’eau fassent l’objet d’une publication régulière de la part de l’INS.
En revanche, le jumelage 2016-2018 n’a pas permis de progresser en matière de compte de dépenses de protection
de l’environnement. Cela reste un chantier à développer, de même que pour les comptes de patrimoine naturel au-
delà de ceux de la ressource en eau.
33
*Mohamed Hammami est directeur du répertoire national d’entreprises à Statistiques Tunisie
[email protected], Yamen Helel est directeur des statistiques de l’emploi à Statistiques Tunisie
[email protected] et Constance Torelli est chargée des programmes de coopération à l’Insee
Vers une meilleure mesure du secteur
informel en Tunisie M. Hammami, Y. Helel et C. Torelli *
Dans le cadre de ses travaux pour la confection d’une nouvelle base (2015-2016) des comptes nationaux, l’Institut national de la statistique (INS) tunisien a adapté le questionnaire de l’enquête emploi en 2017 afin de mieux évaluer l’emploi dans le secteur informel, et pouvoir à terme quantifier le poids de ce secteur dans l’économie tunisienne. L’approche retenue par l’INS, inspirée de la méthodologie des enquêtes 1-2-3, a permis de produire de premiers éléments fiables et conformes aux définitions de l’Organisation internationale du travail (OIT) sur le secteur informel en Tunisie, qui sont présentés dans cet article.
Introduction
En l’absence de chiffres officiels, de nombreuses
estimations divergentes circulent quant au poids du
secteur informel dans l’économie tunisienne. La
confusion est accentuée par le flou qui règne à propos
de la définition du secteur informel, aucune définition
officielle n’ayant été adoptée jusque récemment par la
Tunisie. Selon les sources, le secteur informel
comprend les entreprises échappant en totalité ou en
partie au paiement de l’impôt, les vendeurs ambulants,
l’économie illégale (contrebande d’essence libyenne et
algérienne), etc.
Dans ce contexte, il est indispensable de savoir ce que
la comptabilité nationale est en mesure d’apporter à la
connaissance du secteur informel, afin de fournir une
évaluation la plus exhaustive possible de l’économie
tunisienne. Pour les autorités, l’enjeu de la mesure du
secteur informel s’inscrit dans la problématique plus
globale du diagnostic sur l’emploi et le chômage en
Tunisie et sur les politiques publiques à mettre en place
dans ce domaine.
Comme c’est le cas dans les pays en développement
(PED) d’une manière générale, le taux de chômage, qui
dépasse les 15 %, frappe le plus sévèrement les jeunes,
surtout les plus diplômés, qui sont peut-être plus
enclins à migrer. N’oublions pas enfin que l’auto-
1 L’INS a bénéficié d’un programme de jumelage financé sur
un fonds européen (2016-2018). Portant sur la
« Modernisation de l’appareil statistique tunisien », ce
immolation d’un jeune vendeur ambulant (Mohamed
Bouazizi) en décembre 2010, ne supportant plus la
précarité et la confiscation de sa marchandise par la
police, a été l’étincelle qui a déclenché la Révolution
tunisienne.
L’Institut national de la statistique tunisien est donc
confronté à une demande sociale pour arriver à mieux
cerner le secteur informel. Il apparaît également évident
qu’il existe, tant pour le comptable national que pour le
statisticien, un intérêt commun pour parvenir à une
mesure intégrée du secteur informel. Le changement de
base de la comptabilité nationale (mise en conformité
avec le système de comptabilité nationale (SCN 2008)),
qui va être l’occasion d’une remise à plat des comptes
économiques, offre une excellente opportunité à cet
égard. Il s’agit, d’une part, d’arriver à une définition de
l’informel opérationnelle et conforme au SCN 2008,
d’autre part, de mettre à jour les outils statistiques de
mesure de l’informel à intégrer dans le calcul du PIB.
Bien que la Tunisie ait développé une certaine
expérience dans l’appréhension de l’économie
informelle au cours des dernières décennies, celle-ci se
cantonne essentiellement à une approche
approximative de l’emploi informel (voir annexe). Cet
article a pour objectif de mettre en lumière les
principales avancées réalisées tout récemment dans ce
domaine dans le cadre du jumelage1 en Tunisie.
programme a été mené en partenariat avec l’Insee et l’Institut
de la statistique d’Italie (Istat), et avec l’appui de Statistiques
Lituanie.
34
Statéco n°113, 2019
L’article est organisé comme suit. La première section
aborde les concepts et définitions du secteur informel,
à la fois conformes aux recommandations
internationales du SCN et adaptés aux spécificités
tunisiennes. La deuxième section présente une
cartographie des principales sources d’informations
statistiques en Tunisie mettant en évidence le fait que
l’INS mesure le poids du secteur informel dans
l’économie de manière imparfaite. Compte-tenu de ce
diagnostic partagé, pour satisfaire l’objectif affiché de
l’INS d’atteindre une meilleure couverture de l’activité
économique, notamment dans la perspective du
changement de base des comptes nationaux, la
troisième section décrit la mise en œuvre d’une
méthodologie améliorée pour la mesure du secteur
informel s’inspirant du dispositif d’enquêtes 1-2-3
développé par l’Institut de recherche pour le
développement (Roubaud, 1992) au début des années
1990 et qui a fait ses preuves sur différents continents.
Quelques exemples significatifs de résultats obtenus à
partir du nouveau dispositif sont présentés en avant-
dernière section. La dernière section conclut et trace
quelques perspectives, pour consolider et pérenniser la
méthodologie, ainsi que pour l’utilisation par les
comptables nationaux, notamment en termes d’outil
d’estimation pour le calcul de la productivité.
Les concepts et définitions
En 1993, l’Organisation internationale du travail (OIT)
et la Division de statistique des Nations unies sont
parvenues à un accord sur la définition du secteur
informel (Hussmanns, 2004), également retenu par le
manuel sur l’économie non observée (OCDE et al.,
2002). Cette convergence offre un cadre unique pour
mesurer et analyser le secteur informel en termes de
statistiques du travail (emploi) et de comptabilité
nationale (production). Ce secteur est défini comme
l’ensemble des entreprises individuelles de petite taille
ou non enregistrées. L’OIT (17e CIST, 2003) élabore
un concept plus large d’emploi informel en fonction du
type d’emploi, afin de tenir compte des formes
atypiques de travail et de saisir ce qu’on appelle
l’informalisation de l’emploi qui accompagne le
processus de mondialisation. De fait, l’emploi informel
se compose de deux éléments principaux : l’emploi
dans le secteur informel et les emplois non protégés
dans le secteur formel. Même si de nombreux
problèmes restent à résoudre pour adapter la définition
à l’environnement spécifique de chaque pays (s’il y a
lieu d’inclure l’agriculture ou non, la taille de
l’entreprise par rapport à des critères d’enregistrement,
etc.), le statisticien d’enquête peut trouver dans sa
« boîte à outils » des instruments de mesure éprouvés
(Razafindrakoto, Roubaud et Torelli, 2009).
Pour le comptable national, la préoccupation première
est de présenter des données chiffrées de l’ensemble de
l’économie nationale. Le cadre central du SCN est un
cadre très contraignant, qui n’ouvre pas d’espace
spécifique pour le secteur informel. Aussi la mise en
œuvre d’enquêtes statistiques sur l’économie
informelle permet, d’une part, de la situer au sein de
l’économie nationale, d’autre part, de prendre en
compte ses différentes caractéristiques pour une
meilleure connaissance de ce secteur (Séruzier, 2009).
L’adaptation au cas tunisien
Les travaux et discussions menés au sein de l’Institut
national de la statistique entre comptables nationaux et
statisticiens d’enquête ont conduit à éclairer la situation
actuelle sur les entreprises. Procéder par classement
par type de sociétés (privées), en fonction de leur statut
juridique, de leur régime d’imposition, du type de
comptabilité, de l’affiliation à la patente, de leur statut
en comptabilité nationale, et enfin du type d’enquête
statistique nécessaire à leur mesure, permet d’assurer
l’exhaustivité du champ de la production (tableau 1).
Tableau 1
Types d’impôts sur les bénéfices, comptabilité, secteur institutionnel (comptes nationaux) et mode de
mesure statistique (enquête)
Statut juridique
Caractéristiques
Régime
d’imposition
bénéfices
Type de
comptabilité Patente Statut CN Type d’enquête
Sociétés IS Plan comptable oui SQS Enquête structure (ENAE)
Non constituées IRPP régime réel Plan comptable oui EI formelle Enquête structure (ENAE)
Non constituées
(taille< 6)
IRPP régime
forfaitaire
Plan comptable oui EI formelle Enquête Micro (1ère page
du questionnaire puis hors
champ de l’enquête)
Non constituées
(taille<6)
IRPP régime
forfaitaire
Rien d’officiel oui EI informelle Enquête Micro
Non constituées Pas d’impôt Rien d’officiel oui EI informelle Enquête Micro
Non constituées Pas d’impôt Rien d’officiel non EI informelle
Note : IS : impôt sur les sociétés ; IRPP : impôt sur le revenu des personnes physiques ; SQS : sociétés quasi-comptables non
financières ; Non constituées : unités de production non enregistrées + entreprises individuelles (enregistrées ou non)
35
Statéco n°113, 2019
L’absence de comptabilité, qui est liée au statut
juridique de l’entreprise et à la déclaration fiscale liée
aux impôts sur les bénéfices, semble déterminante pour
caractériser le secteur informel. Ce critère est cohérent
avec les normes de la comptabilité nationale (manuel
SCN 2008, chapitre 25). L’exercice met en évidence les
difficultés à prendre en compte, à la fois les spécificités
tunisiennes et les recommandations du SCN 2008 pour
tous les cas de figure, et statuer ainsi sur leur caractère
formel ou informel.
L’adoption d’une définition tunisienne du secteur
informel conforme au nouveau cadre comptable
international qui a été retenue par l’INS dans le cadre
du jumelage est la suivante : « Le secteur informel est
constitué des unités économiques, quel que soit leur
statut (employeur, indépendant, compte propre…) et
leur type d’activité (y compris agriculture), produisant
des biens et services pour le marché et ne disposant, de
fait ou de droit, d’aucune comptabilité complète (de
flux). Ces unités seront considérées dans les comptes
nationaux comme des entreprises individuelles du
secteur des ménages » (Frigui et Muller, 2019).
Cartographie des principales
sources disponibles sur l’emploi
et les unités de production (UP)
et mise en regard de leurs
résultats
En Tunisie, il existe cinq principales sources
statistiques sur les entreprises et l’emploi : le répertoire
national d’entreprises, l’enquête nationale sur les
activités économiques, l’enquête sur les micro-
entreprises, le recensement général de la population et
de l’habitat, et l’enquête nationale sur la population et
l’emploi (encadré 1).
Cette partie présente quelques résultats issus de ces
différentes sources, sur lesquels nous nous sommes
appuyés dans le cadre du jumelage pour améliorer la
mesure du secteur informel.
Encadré 1 : les principales sources statistiques sur les entreprises et l’emploi en Tunisie
1. Les statistiques d’entreprises
Le répertoire national des entreprises (RNE) comprend toutes les entreprises ou unités de production (UP) du secteur privé
marchand non agricole (employeurs et indépendants) inscrits auprès de l’administration fiscale, quel que soit le régime d’impôt
auquel elles sont soumises (forfait/réel). Ce répertoire est le résultat d’un appariement de deux sources administratives
provenant de la Direction générale des impôts (DGI) et de la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS). Les entreprises sont
caractérisées par de nombreuses variables démographiques et économiques, le statut juridique, etc. Ainsi les entreprises privées
tenues par des personnes physiques, ou constituées en société anonyme, en SARL, connues par les services fiscaux sont toutes
répertoriées. Il contient environ 700 000 entreprises dont plus de 80 % d’entre elles sont des entreprises individuelles.
L’enquête nationale sur les activités économiques (ENAE) vise la collecte des données comptables des entreprises de 6 salariés
et plus, afin de mesurer le poids des diverses branches dans l’activité économique globale, et de mieux cerner les contributions
respectives des secteurs modernes au sein de chaque branche. L’enquête qui permet de répondre aux divers besoins de la
comptabilité nationale est réalisée chaque année auprès d’un échantillon représentatif issu du répertoire national des entreprises.
L’enquête micro-entreprises s’intéresse aux entreprises du secteur marchand non agricole de moins de 6 salariés qui
représentent la majorité des entreprises du répertoire national des entreprises. L’enquête est réalisée depuis 1997 tous les cinq
ans auprès d’un échantillon tiré du répertoire national d’entreprises. Malgré le taux de non-réponse élevé, le dispositif permet
de faire une mise à jour l’année de l’enquête, et de déterminer les unités de production en activité. L’estimation du nombre de
faux actifs est utile pour faire évoluer cet indicateur entre deux enquêtes micro-entreprises. La quasi-totalité des UP répondantes
sont patentées mais ne tiennent pas de comptabilité écrite, et suivant les recommandations internationales (SCN93, SCN2008,
ILO, 1993 et 2002), elles sont considérées comme relevant du secteur informel. La dernière enquête auprès d’un échantillon
de 15 600 entreprises réalisée au 1er trimestre 2017, a porté sur l’exercice comptable 2016. 2. Les statistiques ménages
Le recensement général de la population et de l’habitat (RGPH) réalisé en 2014 dénombre près de 11 millions d’habitants.
Outre les caractéristiques socio-démographiques des individus, le questionnaire aborde différentes thématiques : migrations,
santé, emploi, ainsi que les conditions de vie et de logement. Le RGPH a l’avantage d’être exhaustif sur le territoire. Il sert
ainsi de base de sondage pour toutes les enquêtes auprès des ménages qui sont réalisées à partir de 2015, comme l’enquête
nationale sur le budget, la consommation et le niveau de vie des ménages (EBCNV, 2015) et l’enquête sur la population et
l’emploi.
L’enquête emploi (EE) est au cœur du système statistique de l’INS. Elle permet d’apprécier régulièrement la situation des
individus sur le marché du travail, d’étudier les caractéristiques de l’emploi (principal et secondaire) et du chômage suivant les
normes internationales de l’Organisation internationale du travail (OIT). Elle est réalisée auprès d’un échantillon représentatif
de la population tunisienne, de 280 000 ménages sur l’année, répartis par trimestre avec 45 000 ménages sur les 1er, 3e et 4e
trimestre (en 2018 et 2019, l’échantillon trimestrielle a été révisé à la baisse pour atteindre 27 000 ménages). Le 2e trimestre
qui comprend un échantillon plus important avec 140 000 ménages, permet d’assurer une représentativité au niveau des
gouvernorats, et donne lieu principalement à la publication du taux de chômage. L’enquête enregistre un taux de réponse
individuelle très satisfaisant (92 %), confirmant ainsi sa robustesse et sa qualité statistique.
36
Statéco n°113, 2019
Une première estimation partielle du
secteur informel à partir de l’enquête
micro-entreprises
L’enquête micro-entreprises, dont le champ couvre les
entreprises de moins de 6 salariés, permet d’évaluer la
taille du secteur informel pour sa partie enregistrée. Au
moment de la rédaction de cet article, la dernière
enquête dont les résultats étaient disponibles remontait
à 2017, portant sur l’exercice comptable des entreprises
sur l’année 2016 (tableau 2). Elle portait sur un
échantillon initial de 15 579 entreprises, dont 60,3 %
d’entre elles avaient répondu à l’enquête (76,4 %
d’entre elles ne disposant pas de comptabilité).
Compte tenu de la définition du secteur informel
retenue (qui correspond aux unités économiques ne
disposant pas de comptabilité), nous pouvons donc
estimer qu’en 2016 la partie enregistrée du secteur
informel (non agricole) était composée de 455 600
entreprises employant au total 718 250 actifs, soit près
du quart de l’emploi total non agricole2. Ces actifs
étaient employés à 83 % dans le commerce-services
(soit 39 % dans le commerce et 44 % dans les services).
Tableau 2
Échantillon de l’enquête auprès des micro-
entreprises
Nombre
d’entreprises
Nombre total des entreprises enregistrées
dans le répertoire au 31 décembre 2016
(hors agriculture)
740 054
Nombre d’entreprises intégrées dans le
champ de l’enquête 704 241
Échantillon initial d’entreprises 15 579
Nombre d’entreprises répondantes : 9 395
- Sans comptabilité 7 179
- Avec comptabilité 2 216
Nombre d’entreprises répondantes
extrapolées sans comptabilité 455 611
Source : Résultats de l’enquête sur les activités économiques
des micro-entreprises en 2016 en Tunisie, 2018, INS Tunisie
Toutefois le répertoire qui sert de base de sondage à
l’enquête micro-entreprises, ne couvre pas l’ensemble
des entreprises du secteur privé en Tunisie, puisque de
nombreuses unités de production non enregistrées ne
sont pas prises en compte dans le répertoire. Par
conséquent, l’enquête quinquennale sur les micro-
entreprises n’appréhende que de façon partielle le
secteur informel. Les premières analyses issues du
diagnostic montrent par exemple que l’emploi dans les
secteurs du bâtiment et du commerce relève en partie
de l’informel.
Dans la suite de cette partie, nous procédons à une
analyse comparée de la structure de l’emploi en Tunisie
2 Le ratio de 1,5 actif par unité économique qu’on observe
pour le secteur informel enregistré correspond à un ratio
habituel pour le secteur informel au plan international.
(par secteur et statut professionnel) à partir des deux
principales sources dans ce domaine, constituées par
l’enquête emploi et le recensement de population.
Comparaison des actifs occupés selon les
sources
L’enquête emploi de 2015 (emploi principal) et le
recensement de la population 2014 estiment tous les
deux le nombre total d’actifs occupés autour de 3,3
millions (environ 2,9 millions hors agriculture), et
présentent une répartition assez semblable par secteur
d’activité (tableau 3). Hors agriculture, plus de 60 %
des emplois sont exercés dans le secteur du commerce
et des services (environ 45 % pour les services
seulement), près d’un quart dans l’industrie et le reste
dans la construction (16 %).
Tableau 3
Répartition de la population active occupée (PAO)
par secteur d’activité (%)
Secteur d’activité
Structure de la population active
occupée
Y compris
agriculture
Hors
agriculture
EE RGPH EE RGPH
Agriculture 14,7 10,6
Industries 19,7 20,0 23,0 22,3
BTP 13,4 14,5 15,8 16,2
Commerce 14,0 13,1 16,4 14,7
Services 38,2 41,8 44,8 46,8
Total (%) 100 100 100 100
Total (milliers) 3 386 3 294
Total hors agri.
(milliers) 2 887 2 949
Sources : Enquête sur la population et l’emploi, EE 2015.
Recensement de la population, RGPH 2014, INS Tunisie
Champ : Population active occupée âgée de 15 ans et plus
Hors agriculture, l’enquête sur la population et l’emploi
et le RGPH fournissent des résultats cohérents sur la
répartition de l’emploi par statut professionnel. Près de
huit travailleurs sur dix sont salariés, les indépendants
et employeurs représentant moins d’un cinquième de
l’ensemble des actifs occupés au niveau sectoriel
(tableau 4).
Au total, par rapport à d’autres PED plus pauvres, la
Tunisie se caractérise par une faible part de l’emploi
agricole, et par un taux de salarisation très élevé (près
de 80 % de l’emploi). Par ailleurs, et ceci est commun
à tous les PED, le poids des services et du petit
commerce est très important ainsi que celui du BTP. Or
la littérature sur l’économie informelle montre que
37
Statéco n°113, 2019
l’informel est généralement répandu dans ces secteurs
d’activité (Cling, Lagrée, Razafindrakoto, Roubaud,
2012). Étape par étape, cette mise en regard de
différentes sources d’information est nécessaire pour
effectuer un diagnostic sur la mesure et la classification
des emplois selon l’approche statistique.
Tableau 4
Répartition des actifs occupés selon le statut et le
secteur d’activité (%)
Secteur
d’activité
Salariés Indépendants
et employeurs
Apprentis,
aides
familiaux
EE RG
PH EE
RG
PH EE
RG
PH
Agri. 41,7 76,2 45,7 20,8 12,6 3,0
Industries 86,9 78,4 12,1 18,2 1,0 3,4
BTP 91,5 78,5 8,2 18,7 0,3 2,8
Com. 40,0 78,2 49,8 19,1 10,2 2,7
Services 82,7 78,2 16,6 18,8 0,7 3,0
Total 72,7 78,1 23,5 18,9 3,8 3,0
Total
hors agri. 78,0 78,3 19,7 18,7 2,3 3,0
Sources : Enquête sur la population et l’emploi, EE 2015.
Recensement de la population, RGPH 2014, INS Tunisie
Champ : Population active occupée âgée de 15 ans et plus
Lecture : pour l’EE, tous secteurs confondus hors
agriculture, 78 % des actifs occupés sont des salariés (contre
78,3 % dans le RGPH), 19,7 % sont des employeurs et
indépendants (chefs d’UP) et 2,3 % sont des aides familiaux
ou apprentis; dans le BTP, 8,2 % des actifs occupés du
secteur sont des chefs d’unité de production (UP) dans l’EE
contre 18,7 % dans le RGPH.
Pour aller plus loin, la partie suivante va fournir de
premiers éléments sur le secteur informel en Tunisie.
Mise en œuvre d’une méthodologie améliorée pour la mesure de l’informel et premiers résultats
Après l’adoption d’une définition du secteur informel
selon les spécificités tunisiennes, la méthodologie
proposée dans le cadre du jumelage et adoptée par
l’INS a conduit à la modification à la marge du
questionnaire de l’enquête emploi afin d’identifier les
unités de production informelles.
Modification du questionnaire de l’enquête
emploi
La mobilisation de l’enquête emploi est nécessaire pour
produire des statistiques robustes sur le secteur
informel (encadré 2). La stratégie mise en place a
consisté à modifier le questionnaire de l’enquête
emploi afin de servir de filtre pour identifier les chefs
des unités de production informelles (UPI), qui feront
ensuite l’objet d’une interrogation identique à celles
concernées par l’enquête quinquennale micro-
entreprises.
Encadré 2 :
Principes du dispositif d’enquêtes 1-2-3
Basée sur le principe de la greffe d’enquêtes, l’enquête 1-
2-3 dont la méthodologie a été développée au début des
années 90 par un chercheur de l’Institut de recherche pour
le développement, IRD-DIAL (Roubaud, 1992) est un
système de trois enquêtes imbriquées, visant différentes
populations statistiques : les individus, les ménages et les
unités de production informelles (UPI).
La première phase de l’enquête 1-2-3 est une enquête sur
l’emploi, le chômage et les conditions de travail des
ménages et des individus. Elle permet de documenter et
d’analyser le fonctionnement du marché du travail et est
utilisée comme filtre pour la deuxième phase, où un
échantillon représentatif des UPI est enquêté. Ainsi, dans
la deuxième phase de l’enquête, les chefs des UPI
identifiés lors de la première phase sont interrogés :
l’enquête cherche à mesurer les principales
caractéristiques économiques et productives des unités de
production (production, valeur ajoutée, investissement,
financement), les principales difficultés rencontrées dans
le développement de l’activité, et quel type de soutien les
entrepreneurs du secteur informel attendent des pouvoirs
publics. Enfin, dans la troisième phase, une enquête
spécifique sur les revenus et dépenses est administrée à un
sous-échantillon de ménages sélectionnés lors de la
phase 1, pour estimer le poids des secteurs formel et
informel dans la consommation des ménages, par produit
et par type de ménage.
En Tunisie, le questionnaire utilisé dans l’enquête micro-
entreprises est largement inspiré de cette méthodologie. Il
s’agit plus précisément de la phase 2 du dispositif 1-2-3
sur le secteur informel portant sur le volet comptable de
l’unité de production informelle (UPI) interrogée. Le
questionnaire administré renseigne sur les caractéristiques
de l’UP, la main d’œuvre employée (la taille moyenne
dans les UP = 1,5 personne y compris le chef de l’UP) et
les performances économiques par secteur d’activité
(chiffre d’affaires, production, VA, etc.). Il s’agit d’un
univers qui s’apparente au secteur institutionnel des
ménages selon le vocabulaire des comptables nationaux.
Comme pour toute enquête statistique, elle reste
perfectible. Une enquête micro-entreprises élargie aux UP
non enregistrées identifiées par l’enquête emploi
permettra donc une mesure du nombre total d’UP
informelles, qu’elles soient enregistrées ou non.
Les deux critères sur l’enregistrement administratif et
la tenue d’une comptabilité ont été appliqués pour
l’activité principale exercée mais aussi dans le cas
d’une activité secondaire déclarée. Seuls les
employeurs et ceux exerçant à compte propre sont
concernés par ces questions.
38
Statéco n°113, 2019
Suite au test effectué en décembre 2016 afin de rectifier
si besoin la séquence de questions nouvelles, le
questionnaire ainsi amélioré a été mis en application
dès la première vague trimestrielle de 2017.
L’enquête du 1er trimestre 2017 a permis d’avoir une
première évaluation du poids de l’informel dans la
population active, à prendre avec précaution compte-
tenu de la taille de l’échantillon, et du temps nécessaire
aux enquêteurs pour acquérir une expérience plus
affirmée sur ces nouvelles questions. En effet, les futurs
passages de l’enquête emploi seront utilisés pour
constituer la base de sondage des unités de production
informelles (UPI) dans la perspective d’une
interrogation identique à celles concernées par
l’enquête quinquennale micro-entreprises (opération
qui n’a pas encore été réalisée par l’INS).
Premiers résultats
Les résultats présentés ici sont basés sur des données
encore provisoires issues de l’enquête emploi 2019.
L’enquête emploi via le questionnaire augmenté des
deux critères (possession d’une patente et tenue d’une
comptabilité) a permis de distinguer de façon plus
précise les unités de production hors agriculture,
considérées comme informelles selon la définition
adoptée par l’INS, c’est-à-dire celles qui n’ont pas de
comptabilité. En 2019, près de 84 % des unités de
production repérées par l’enquête emploi ne tiennent
pas de comptabilité écrite (selon la norme du plan
comptable national) et peuvent donc être considérées
comme informelles. Notons que, compte tenu de la
faible productivité de ces unités, leur nombre important
ne préjuge en rien de la taille de l’économie informelle
en Tunisie et de son poids dans le PIB. Par ailleurs, ceci
confirme les résultats de l’enquête micro-entreprises,
basée sur le répertoire national des entreprises (RNE
dont on rappelle qu’il est constitué à 97 % d’entreprises
du secteur privé de moins de six salariés), à savoir
l’absence d’une comptabilité. Ces unités de production
sont dans leur quasi-totalité dans le commerce (44,9 %)
et les services (33,1 %) ; la part de l’industrie (14,3 %)
et du BTP (7,7 %) est beaucoup plus réduite.
Près de la moitié des unités de production qui ne
tiennent pas de comptabilité (48,4 %) ne possède pas
non plus de patente (elles représentent 40,9 % du total
des unités de production). Ce taux est très variable
selon le secteur d’activité (graphique 1). Comme
attendu, la construction demeure le secteur où l’on
s’enregistre le moins auprès des services fiscaux
(80,9 %), ce qui signifie aussi que moins de 20 % des
entreprises de ce secteur étaient prises en compte
jusqu’à présent. Dans le secteur des services le taux est
deux fois moins important (40,6 %), l’absence de
patente s’observe notamment pour les activités de
transport, de communication et de réparation. Le
commerce, où de nombreuses activités sont exercées de
façon ambulante, est propice à l’informalité. Dans
l’industrie, les chefs d’unités de production du secteur
de l’habillement et du textile (par exemple les tailleurs
à domicile) sont également moins enclins à
s’enregistrer auprès des services fiscaux. Quel que soit
le secteur d’activité, l’absence d’une patente à tendance
à augmenter depuis 2017 (première année pour laquelle
les résultats sont disponibles).
Graphique 1
Taux d’UPI n’ayant pas de patente selon le secteur
d’activité parmi celles n’ayant pas de comptabilité
(activité principale)
Source : Enquête sur la population et l’emploi, 2019, INS
Tunisie (chiffres provisoires)
Conclusion
La confrontation de différentes sources d’information
statistique pour analyser un sujet est toujours un
exercice intéressant, délicat et riche d’enseignements.
Pour la thématique de l’informel abordée ici, en
premier lieu, il n’y a pas de source bonne ou mauvaise,
chacune d’elle apportant un éclairage sur le sujet étudié.
En second lieu, l’unité d’observation principale et le
calendrier sont différents d’une source à l’autre et la
manière de collecter les informations est propre à
chacune d’elle. Le nombre d’entreprises peut être
obtenu grâce au répertoire national des entreprises, ou
d’un recensement économique, ou bien être déduit par
une approche ménage/individu grâce à l’enquête
emploi.
L’introduction dans le questionnaire emploi de deux
critères (enregistrement auprès des services fiscaux et
tenue d’une comptabilité) a permis de réaliser des
progrès significatifs dans la compréhension de la
mesure de l’informel. Il reste à consolider ces données
avec les prochaines éditions de l’enquête emploi pour
avoir un suivi régulier de la problématique. Concernant
la prochaine enquête micro-entreprises, le plan de
sondage devra impérativement tenir compte également
des unités de production informelles (non enregistrées
auprès des services fiscaux) identifiées par l’enquête
emploi afin d’assurer une plus grande représentativité
du secteur informel. Ce faisant, l’enquête deviendrait
une enquête phase 2 à part entière.
Des travaux méthodologiques et un dialogue entre les
statisticiens d’enquête et les comptables nationaux
doivent être poursuivis, afin d’approfondir ces premiers
éléments pour les besoins de la comptabilité nationale.
En particulier, la dernière étape, qui n’a pas encore
démarré au moment de la rédaction de cet article,
consistera à élaborer un outil de synthèse d’arbitrage
49,9
80,9
48,240,6
48,4
0
20
40
60
80
100
Industrie BTP Commerce Services Ensemble
39
Statéco n°113, 2019
pour les comptables nationaux. Il s’agit d’une matrice
d’emplois qui permettra une meilleure articulation
entre l’emploi et la production-valeur ajoutée. En effet,
à partir d’une mesure du nombre d’emplois et du
volume d’heures travaillées (source : enquête emploi)
et de la production (sources : enquête annuelle auprès
des entreprises, enquête micro-entreprises, etc.),
déclinés par branche d’activité et secteur institutionnel
(formel/informel), cet exercice permettra de mettre en
regard les informations disponibles, de comprendre et
d’expliquer dans la mesure du possible les écarts. Il
s’agit là de se donner un moyen supplémentaire
d’arbitrage des valeurs ajoutées et de la production pour
conforter la mesure de la part de l’informel dans les
comptes nationaux.
Références bibliographiques Charmes J. (1982), « Le secteur non structuré dans les comptes nationaux : l’expérience tunisienne », Statéco
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Statistiques Tunisie (2018), Résultats de l’enquête sur les activités économiques des micro-entreprises en 2016
en Tunisie.
40
Statéco n°113, 2019
Annexe : expérience tunisienne en matière d’emploi et de secteur informels,
une brève revue de la littérature
L’observation du secteur non structuré (ancienne acception du secteur informel) date de la fin des années 70 en
Tunisie à travers plusieurs méthodes d’investigation expérimentées par l’Institut national de la statistique, basées
sur le recensement général des établissements, des monographies socio-économiques de métiers et des approches
par sondages sectoriels des activités économiques (Charmes, 1982).
La distinction entre secteur non structuré et secteur moderne (informel versus formel) en faisant intervenir un
critère de taille et de comptabilité est rendu possible avec le recensement des établissements de 1981. Sur la base
de ce recensement, l’enquête nationale sur les activités économiques (ENAE, 1981) portant à la fois sur
l’exhaustivité des entreprises du secteur moderne et un échantillon pour le secteur non structuré a contribué à la
connaissance du phénomène lors de la première génération des comptes nationaux tunisiens (Muller, 1985).
Depuis, la statistique d’entreprises a évolué grâce à la mise en place d’un répertoire et d’un dispositif d’enquêtes
(ENAE et enquête quinquennale auprès des micro-entreprises).
L’article de Saafi S., Haj Mohamed M. et Fahrat A. (2015) teste la causalité entre chômage et économie informelle
sur la période 1980-2008 en Tunisie. Le cas tunisien représente un cas intéressant car il cumule des taux élevés à
la fois au niveau du chômage et de l’informel. Dans l’étude, la part de l’économie informelle est exprimée en
pourcentage du PIB et les données, qui n’existent pas en séries longues, sont estimées à partir d’un modèle
d’équilibre général calculable. Ainsi la contribution moyenne de l’informel sur la période considérée est estimée
à 36,8 % du PIB.
Afin de mesurer l’économie informelle, Charmes et Ben Cheick (2016) réalisent un travail statistique poussé en
croisant des données statistiques provenant de l’INS de Tunisie, à savoir les résultats des enquêtes annuelles puis
trimestrielles sur l’emploi et les enquêtes quinquennales sur les micro-entreprises, les statistiques
d’immatriculation à la sécurité sociale ainsi que la base de données du Centre de recherche et d’études sociales
(Cres). À partir de ces données brutes qui couvrent la période 2005-2015 (les statistiques pour 2015 sont des
estimations) les auteurs génèrent ainsi les différents indicateurs sur l’emploi dans le secteur informel, l’emploi
informel ou encore l’emploi dans l’économie informelle. Ainsi l’emploi informel représenterait 32,2 % de la
population active occupée en 2015 en Tunisie. L’informel aurait connu une tendance baissière sur la période 2005-
2011 puis haussière de 2012 à 2015. Le phénomène est concentré chez les jeunes puisque 60 % des hommes et
83 % des femmes dans l’emploi informel ont moins de 40 ans.
L’étude de Larbi et Dridi (2018) sur la croissance inclusive en Tunisie aborde la problématique de l’emploi
informel. Les chiffres de la part de l’informel dans l’emploi total cités par l’étude qui proviennent de la Banque
mondiale (2014), et du Centre de recherche et d’études sociales (Cres) de la Banque africaine de développement
(2016), s’élèvent respectivement à 30 % et 45 %. Selon l’étude, l’économie informelle touche plus particulièrement
les femmes, les travailleurs peu qualifiés et les jeunes. On estime que 50 % des jeunes occupent des emplois
informels. Concernant les déterminants de l’informel, l’étude pointe l’inadéquation de compétences ainsi qu’un
déficit d’information, expliquant ainsi que peu de travailleurs passent du secteur informel au secteur formel. Elle
souligne également qu’en raison d’une fiscalité élevée sur le travail, un grand nombre de travailleurs tunisiens est
maintenu dans l’informel.
41
*Bernard Morel est ancien inspecteur général de l’Insee [email protected], Samira Ouadday est directrice
centrale des statistiques régionales à Statistiques Tunisie, [email protected]
La mesure des inégalités régionales :
un nouveau défi pour le système
statistique national B. Morel et S. Ouadday*
Depuis des décennies, la Tunisie est confrontée à des inégalités régionales persistantes, comme l’ont encore montré les évènements intervenus depuis 2011. La demande sociale de statistiques publiques pour en rendre compte s’accroît d’année en année, renforcée en 2018 par le lancement d’un processus de décentralisation. Pour relever ce défi, le système statistique national tunisien s’est engagé dans une série d’opérations impliquant ses différentes composantes : l’Institut national de la statistique (INS), qui en assure la coordination technique, et les services statistiques présents au sein des ministères et des principaux opérateurs publics. Ces opérations visent, à court terme, la production d’une première base de données régionales, ensemble limité de résultats annuels essentiels, cohérents sur l’ensemble du territoire, sélectionnés en collaboration avec les principaux utilisateurs régionaux. À plus long terme, les statistiques régionales constituent une composante essentielle de la stratégie de modernisation de l’appareil statistique, conformément à l’évolution des standards de qualité internationaux : le développement dans tous les secteurs de l’usage des données administratives à des fins statistiques, la montée en puissance de nouvelles technologies de collecte, de diffusion et d’analyse intégrant l’information géographique, l’attribution de nouvelles missions pour les établissements régionaux tournées vers la diffusion et la communication au plus près des utilisateurs.
Introduction
Le système statistique national (SSN) tunisien dispose
déjà en 2015 d’un acquis important de statistiques
régionales produites et diffusées, mais de façon très
inégale selon les domaines et encore souvent sous-
utilisées (voir encadré 1). Les différentes consultations1
organisées au cours des dernières années auprès des
principaux utilisateurs, tant au niveau national que
régional, ont toutes souligné que cette thématique restait
insuffisamment couverte par rapport à la demande. La
question des inégalités sociales et économiques entre
territoires occupe en effet depuis longtemps une place
importante au sein du débat public.
Malgré la taille relativement réduite de son territoire, la
Tunisie est confrontée à des oppositions structurelles très
1En 2013, par le Conseil national de la statistique et, en 2015,
dans le cadre de l’assistance technique de l’Union européenne
ADE. 2Notes et analyses de l’ITCEQ, « Indicateur de développement
régional. Méthodologie et résultats », n°1-2018, mai 2018.
fortes entre régions. Ces oppositions régionales
entretiennent au sein des populations un profond
sentiment d’injustice : d’une façon très schématique, on
oppose souvent, d’un côté, les zones côtières les plus
dynamiques surtout au Nord-Est et, de l’autre, les régions
isolées de l’intérieur ou du Sud où se cumulent des
difficultés économiques et sociales. Depuis des
décennies, le littoral tunisien a attiré l’essentiel des
investissements créateurs d’activités orientées vers
l’économie mondiale, tandis que les régions intérieures
se sont retrouvées de plus en plus dépendantes des
politiques de transferts. Les écarts considérables entre les
marchés de l’emploi des régions de l’intérieur et des
régions littorales ressortent aujourd’hui comme un des
facteurs principaux du creusement de ces inégalités
régionales2. Ainsi en 2014, alors que le taux de chômage
se situait à 14,8 % pour l’ensemble du pays3, il dépassait
3 Au sens du eecensement général de la population et de
l’habitat de l’INS.
42
Statéco n°113, 2019
20 % dans les gouvernorats de l’intérieur, voire 30 % à
une échelle plus locale de certaines délégations, du Nord-
ouest et du Centre-Ouest (comme à Kasserine, Gafsa ou
Jendouba) et du Sud (comme à Tataouine). À l’opposé,
les régions littorales du Centre-Est (comme à Monastir,
Sousse ou Sfax) et du Nord-Est (comme Tunis)
bénéficiaient toutes de taux très inférieurs à la moyenne
nationale (cf. carte 1). Ce sont aussi ces mêmes régions
littorales, et en premier lieu celle de la capitale, qui
attirent le plus de migrations internes, majoritairement
des jeunes en provenance de l’intérieur du pays (cf.
graphique 1).
Les évènements intervenus depuis 2011 déclenchés dans
une de ces régions de l’intérieur, et la permanence de ces
écarts au cours des années récentes ont encore renforcé
ce sentiment d’injustice régionale au sein de la
population et la nécessité de nouvelles réponses : ainsi, la
constitution adoptée en janvier 2014 fait de l’équilibre
entre les régions une priorité (article 12) ; elle institue
également une décentralisation (article 13), voulue
d’abord comme moyen d’émancipation des citoyens,
acteurs publics et société civile, afin de développer
progressivement une approche territoriale des politiques
sectorielles. Un plan quinquennal stratégique de
développement dont l’un des objectifs est de réduire les
inégalités régionales a été élaboré en 2015 par le
gouvernement4.
Carte n°1 :
Taux de chômage par gouvernorat
Source : INS, eGPH 2014.
4 European Center for Development Policy Management,
« eéduire les inégalités régionales en Tunisie », note
d’information n°84, avril 2016.
Graphique n°1 :
Solde migratoire par région (avril 2009 - avril 2014)
Source : INS, eGPH 2014, flash n°3, 2016.
Dans ce contexte, la demande sociale de statistiques sur
les inégalités entre territoires se trouve considérablement
renforcée, qu’il s’agisse d’informer l’ensemble des
publics ou d’aider à la définition et à la mise en œuvre de
politiques régionales. D’ores et déjà, les nouveaux
acteurs issus du processus de décentralisation - désignés
à l’occasion des élections de 2018 - ont exprimé des
demandes d’informations sur leur territoire, à laquelle la
statistique publique doit se préparer dès maintenant à
répondre. Ainsi, le développement de statistiques
régionales s’impose aujourd’hui comme une composante
essentielle de la stratégie de modernisation de l’appareil
statistique au cours des prochaines années.
Objectifs et enjeux de la
modernisation du système
Définir avec les utilisateurs une cible réaliste
à court terme par niveau géographique
Afin de commencer à combler le déficit de données
annuelles entre deux recensements, le premier objectif est
de définir le contenu d’une première version d’une base
annuelle de données régionales. Cette dernière doit être
conçue comme une cible réaliste à court terme de
statistiques et d’indicateurs susceptibles d’être produits,
actualisés et mis à disposition chaque année à des
niveaux géographiques adaptés : districts, gouvernorats
ou délégations. Cette sélection a priori a porté sur les
domaines démographiques, sociaux, économiques et
sectoriels, et a pris en compte en priorité la demande déjà
exprimée par les principaux utilisateurs actuels de
données régionales. Elle a également volontairement été
limitée par la capacité effective du SSN à les produire et
les diffuser à court terme, c’est-à-dire avant 2020.
Ultérieurement, dans une seconde étape, une fois
stabilisés les données et les processus de production et de
transmission par les différents producteurs, cette base
bien visible et accessible sur le portail de l’INS
43
Statéco n°113, 2019
constituera le socle d’une offre annuelle plus complète de
statistiques régionales portée par l’ensemble du SSN à
destination de tous les publics. Dans chaque domaine les
liens seront proposés vers les sites producteurs pour tous
compléments.
Encadré 1 : Le système actuel de statistiques régionales et locales de la Tunisie
Dans le domaine démographique et social
Le Recensement général de la population et de l’habitat (RGPH), réalisé tous les dix ans par l’INS, constitue la principale source
de données régionales et locales sur la population en couvrant à cette occasion plusieurs champs : démographie, éducation, emploi-
chômage, mobilité et migrations, logements, conditions de vie-TIC. Pour la dernière édition, le RGPH 2014, la qualité de collecte et l’amélioration des supports de diffusion et de communication ont
fait l’objet d’une attention toute particulière. Conformément à un plan de diffusion défini dès 2014, les premiers dénombrements
ont été mis à disposition dès le 3ème trimestre 2014, suivis d’une série de publications et de mises en ligne de bases de données
qui se sont échelonnées jusqu’en 2017. Différents supports ont été mobilisés qui ont permis de mieux rendre accessibles les données
régionales : (i) publication pour la première fois d’une série de 6 numéros d’un 4 pages « flash », présentant les données nationales
essentielles sur un thème, ainsi que leur déclinaison régionale par gouvernorat ; (ii) les données détaillées par gouvernorat et
délégation ont aussi fait l’objet de volumes spécifiques par gouvernorat5 ; (iii) un site internet a été consacré au RGPH sur le portail
de l’Institut, à la fois pour relayer les opérations de communication, en particulier les conférences de presse, et pour mettre à
disposition les publications et bases de données détaillées téléchargeables. Cependant, en période intercensitaire, l’offre de données régionales démographiques ou sociales apparaît inévitablement beaucoup
plus limitée en particulier pour rendre compte d’évolutions annuelles à différents niveaux géographiques par grands domaines.
Les principaux indicateurs démographiques par gouvernorat et délégation font l’objet d’estimations annuelles par l’INS grâce à
l’exploitation des données issues de l’état-civil, dont les formulaires ont été en revus en 2015 et 2016 afin d’en améliorer la qualité
à des fins d’exploitation statistique. Dans le domaine de l’emploi, la taille plus importante chaque second trimestre de l’échantillon de l’enquête trimestrielle sur
l’emploi et le chômage en Tunisie, associée à de bons taux de réponse, de l’ordre de 90 %, permettent théoriquement d’estimer des
indicateurs d’emploi et de chômage par grande région voire par gouvernorat avec une périodicité annuelle. Toutefois la signification
des écarts interrégionaux et des évolutions temporelles observées doit toujours être interprétée avec prudence au regard des
intervalles de confiance d’un gouvernorat à un autre, compte-tenu des différences importantes des échantillons interrogés selon la
population des gouvernorats. De même, dans le domaine de la mesure de la pauvreté, la taille de l’échantillon retenu pour l’enquête nationale réalisée en 2015
sur le budget, la consommation et le niveau de vie des ménages, a permis d’estimer des ordres de grandeur indicatifs des écarts de
taux de pauvreté entre grandes régions qui sont très attendus.
Dans le domaine économique Les statistiques régionales dans le domaine économique sont nettement plus difficiles à établir. Les enquêtes statistiques auprès des
entreprises ne sont représentatives qu’au niveau national. Les principaux indicateurs économiques sur la conjoncture, l’évolution
des prix, l’activité des entreprises ou le PIB ne sont disponibles qu’à l’échelle nationale6. La demande est souvent exprimée de
mieux identifier et suivre les spécificités économiques au niveau régional. Les solutions consistant à exploiter plus
systématiquement, au niveau infranational, les données comptables ou administratives transmises par les entreprises et les ménages,
n’en étaient encore en 2015 qu’au stade expérimental. Au sein de l’INS, le répertoire national des entreprises (RNE) diffuse chaque année, au niveau des gouvernorats et délégations, les
principaux dénombrements par catégorie d’entreprise et secteur d’activité, ainsi qu’avec un recul de 5 ans, des données sur la
démographie des entreprises (entrées, sorties, survie) par gouvernorat. Il s’appuie pour cela sur la centralisation par l’INS des
bordereaux collectés par la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS), mais la robustesse des estimations de variables
économiques au niveau régional reste encore à améliorer en raison notamment de la difficulté à distinguer la localisation des
établissements d’une même entreprise implantés dans différentes régions. Données sectorielles La capacité du SSN à établir des statistiques sectorielles de qualité au niveau régional est étroitement liée à l’activité des structures
statistiques publiques (SSP) existantes au sein des différents ministères, ainsi que des grands opérateurs publics, au plus près des
systèmes d’information gérés par leurs directions opérationnelles. La situation actuelle s’avère encore très hétérogène d’un secteur
à l’autre. En fait, seuls les services statistiques des ministères de l’Agriculture, de l’Éducation, de l’Enseignement supérieur et de
la formation professionnelle sont en mesure de produire et diffuser des données régionales annuelles centralisées et validées. D’une façon générale cet examen confirme bien l’existence d’une offre non négligeable de données régionales par le SSN,
notamment dans le domaine social au cours de cette période décisive grâce à la réussite du recensement de population de 2014. Il
met aussi en lumière les difficultés rencontrées pour compléter cet existant par un ensemble de statistiques régionales actualisables
chaque année, en particulier dans le domaine économique, indispensables pour venir en appui aux politiques de développement
régional et de lutte contre les inégalités territoriales actuellement mises en œuvre ou en projet.
Cet exercice est aussi l’occasion de préciser les apports
et les limites d’un système de statistiques régionales.
Contrairement à une opinion encore rencontrée, il ne peut
s’agir de reproduire dans tous les domaines et à tous les
5 http://census.ins.tn/fr/resultats.
niveaux le maximum de données déjà disponibles au
niveau national, cela aussi bien pour des raisons de
pertinence que de coûts. C’est en particulier le cas dans
le domaine économique, où l’opportunité de décliner à
6 Une des activités du jumelage est consacrée à la
régionalisation du PIB.
44
Statéco n°113, 2019
l’échelle régionale tel ou tel indicateur national mérite
d’être systématiquement questionnée.
Ainsi dans le domaine de l’observation des prix, il
apparaît à la fois illusoire et très coûteux de chercher à
mettre en place au niveau régional la production d’un
indicateur d’évolution mensuelle des prix à la
consommation identique à celui du niveau national,
comme cela a été parfois demandé. En revanche, des
études statistiques menées sur ce point, notamment en
France, ont souligné l’intérêt de méthodes
économétriques exploitant a posteriori la localisation des
relevés existants et sur de plus longues périodes. Ainsi
Chauvet-Peyrard (2013) a mis en évidence des écarts
significatifs d’évolution ou de niveau de prix sur certains
ensembles de produits, directement en lien avec la
géographie, par exemple entre régions (Paris/Province en
France) ou catégories de communes (urbain/rural ;
littoral/arrière-pays).
De même, la régionalisation d’indicateurs synthétiques
issus de méthodes de comptabilité nationale, comme la
valeur ajoutée ou le PIB, n’a de sens qu’à l’échelle de
territoires suffisamment vastes et cohérents du point de
vue de leur dynamique économique, notamment pour
regrouper à la fois des lieux de production et de résidence.
C’est la pratique aujourd’hui en Europe, à l’échelle des
Länder allemands, des régions en Espagne, en France ou
en Italie, soit a priori l’équivalent des districts en Tunisie
plutôt que des gouvernorats. En revanche, toujours en
matière économique, la localisation fine des entreprises
actives avec leurs caractéristiques essentielles de taille et
secteur d’activité est à la fois utile et envisageable pour
suivre les évolutions du tissu économique d’un territoire
donné. Le répertoire national des entreprises, produit déjà
chaque année des dénombrements d’entreprises à
l’échelle des gouvernorats et des délégations mais qui
sont encore largement sous-exploités.
Dans le champ démographique, seules les données issues
de l’état-civil font l’objet d’une actualisation annuelle
systématique au niveau le plus fin. Il se confirme ainsi
essentiel de produire et diffuser à l’échelle locale les
indicateurs démographiques de base (natalité, mortalité)
directement issus de cette collecte, en veillant à garantir
et améliorer l’enregistrement de leur localisation par les
agents locaux. Mais il faut également admettre que la
plupart des autres indicateurs démographiques
(migration, estimation de population, taux de fécondité,
espérance de vie) font appel à des méthodes d’estimation
dont la précision ne permet pas des estimations fiables à
tous les niveaux, et cela d’autant moins que la mobilité
résidentielle a tendance à s’accroître.
Dans le domaine social, la mise en place d’un système
pertinent de statistiques régionales annuelles constitue un
défi propre à ce domaine : contrairement au domaine
économique, c’est souvent à un niveau local fin que les
inégalités au sein de la population liées aux territoires se
révèlent, entre quartiers urbains et entre zones rurales. En
dehors des recensements, les enquêtes statistiques par
sondage de population n’observent ces inégalités qu’à
l’échelle de grands territoires, pays entier ou grandes
régions. Les échantillons ne sont en général représentatifs
qu’au niveau national en raison de leurs coûts de collecte
unitaires très élevés. Dans ce domaine également, le
développement de statistiques régionales à l’échelle
pertinente passe nécessairement par la possibilité
d’utiliser les sources de données administratives en
complément des enquêtes par sondage et des
recensements décennaux.
Développer en priorité l’usage de sources
administratives
À moyen et long terme, comme le recommandent
désormais les organismes internationaux, c’est
principalement le développement de l’usage statistique
des sources administratives qui permettra d’enrichir le
système de statistiques régionales dans les différents
domaines économiques et sociaux. C’est aujourd’hui la
principale orientation susceptible d’enrichir
significativement le système de statistiques régionales
tunisien. Mais cette évolution qui passe par le
changement de pratiques de nombreux agents prendra
nécessairement du temps, et se présente dans des
conditions très variables selon les domaines.
Dans le domaine économique, des progrès significatifs
peuvent être obtenus à moyen terme grâce à la
systématisation de l’exploitation à des fins statistiques
des documents transmis par les entreprises aux caisses de
sécurité sociale et désormais aux services fiscaux. Les
services de l’INS collaborent depuis plusieurs années
avec ceux de la CNSS pour tenir le répertoire national des
entreprises, et ont engagé plus récemment des
expérimentations prometteuses afin d’exploiter les
liasses fiscales collectées par les services des impôts en
région.
Dans le domaine social, la mobilisation de données
administratives s’annonce plus problématique pour les
prochaines années. Elle dépend de la capacité des
services des administrations et organismes sociaux en
charge des politiques sociales à développer et stabiliser
des systèmes d’information sur la population pérennes et
cohérents. Ces derniers sont actuellement encore à l’état
de projets. Par ailleurs, la taille des échantillons des
principales enquêtes statistiques de population est
relativement importante en Tunisie ; en particulier, celle
de l’enquête trimestrielle sur l’emploi et le chômage de
l’INS, qui a été récemment réduite en 2018, reste
augmentée au second trimestre afin de produire entre
deux recensements des indicateurs au niveau régional
(districts voire gouvernorats). Dans ce contexte, il ne
saurait raisonnablement être envisagé d’accroître encore
la taille de ces échantillons, les bénéfices escomptés étant
sans commune mesure avec l’ampleur des surcoûts
correspondants.
Dans les domaines sectoriels, il revient aux services
ministériels en charge des statistiques de mettre en place
les processus de collecte et d’exploitation à des fins
statistiques des données administratives générées par les
45
Statéco n°113, 2019
politiques menées dans leur ministère. Mais la situation
reste très inégale selon les secteurs concernés.
Les services statistiques de certains ministères ont
aujourd’hui pu mettre en place des processus stabilisés
d’exploitation statistique des données internes sur
l’activité et parfois sur les résultats des établissements de
leur compétence, comme pour l’éducation et
l’enseignement supérieur. D’autres, comme au ministère
de l’Agriculture, gèrent depuis de nombreuses années
directement des collectes de données et des enquêtes
statistiques auprès des exploitations. Dans les deux cas,
ces processus aujourd’hui intégrés permettent de
centraliser, valider, et mettre à disposition chaque année
des bases de données cohérentes sur l’ensemble du
territoire, aux niveaux géographiques des gouvernorats et
des délégations.
Dans d’autres ministères comme ceux en charge de la
santé ou des affaires sociales, les conditions pour mettre
en place de tels systèmes d’information internes n’ont pas
encore pu être réunies, en raison de nombreux obstacles
dont l’analyse dépasserait le cadre de cet article. De façon
très schématique, ce sont des domaines (santé, conditions
de vie, pauvreté) où les données collectées par les
administrations sont à la fois encore peu harmonisées et
produites par de nombreux acteurs et organismes de
statuts différents. Des projets sont en cours, notamment
en liaison avec les caisses d’assurance maladie ou des
centres de recherches pour définir et mettre en œuvre un
cadre cohérent de concepts, de nomenclatures et
procédures de gestion de ces données : volets statistiques
standardisés annexés aux rapports d’activité transmis
chaque année par les établissements sous tutelle,
intégration des nomenclatures officielles dans les
questionnaires remplis par les individus bénéficiaires de
ces politiques, etc.
Cet effort d’harmonisation concerne également les
grands opérateurs de service public (Société tunisienne
d’électricité et de gaz - STEG, Office national de
l’assainissement - ONAS, Société nationale
d’exploitation et de distribution des eaux - SONEDE,
Tunisie Telecom, etc.). Ces opérateurs gèrent également
de nombreuses données sur les équipements et services à
la population, essentiels pour l’observation des
conditions de vie à l’échelle locale. Les collaborations
déjà établies avec les services de l’INS devraient
permettre d’améliorer et de systématiser à court terme la
production d’une sélection d’indicateurs essentiels.
D’une façon plus générale, cette orientation passe aussi
par un renforcement des actions de coordination
interministérielle au nom du SSN par l’INS. Il est
impératif d’achever en priorité l’harmonisation des
nomenclatures, dont les standards, la plupart
internationaux, doivent être systématiquement adoptés et
intégrés aux systèmes d’information de l’ensemble des
administrations : code géographique, nomenclatures de
secteurs activité, de profession, de diplômes, etc. Ce
chantier reste un enjeu important à moyen terme. Les
contacts pris avec certains grands services nationaux
(Agence nationale pour l’emploi et le travail indépendant,
etc.) ou avec de grands opérateurs publics (STEG, ONAS,
SONEDE, etc.) n’ont pas encore complètement abouti,
même si des avancées importantes ont pu être
enregistrées au cours des dernières années en particulier
avec l’adoption progressive par la CNSS des dernières
versions des nomenclatures officielles d’activité (NAT)
pour les entreprises.
Rechercher un meilleur équilibre entre
opérations d’initiative nationale et régionale
Mettre en place des statistiques régionales ne signifie pas
nécessairement que ce système sera alimenté au niveau
de chaque région. Pour toutes les données destinées à être
collectées sur l’ensemble du territoire, mieux vaut mettre
en place un système géré et coordonné centralement.
L’expérience de nombreux pays a prouvé que seul ce type
de processus permettait d’assurer une cohérence
minimale et une meilleure comparabilité interrégionale
pour un socle commun national de données régionales.
Cette stratégie est aujourd’hui d’autant plus indiquée que
la mise à disposition vers les acteurs régionaux de
l’ensemble des données, une fois validées, peut
s’effectuer sans délai via les supports internet.
Par ailleurs, en complément de ce volet centralisé, des
collectes de données et des analyses spécifiques au
niveau régional gardent tout leur intérêt dans un tel
schéma, d’autant qu’elles relèvent davantage
d’initiatives régionales afin de mieux rendre compte de
thèmes d’intérêt ou de priorités propres à chaque région.
Cette orientation, nous l’avons constaté, se heurte parfois
à l’idée encore présente d’un système de statistiques
régionales qui reposerait sur des établissements
régionaux, organisés comme autant d’instituts nationaux
assurant, chacun pour son territoire, l’ensemble du
processus.
Un travail de conviction reste souvent nécessaire auprès
des responsables de données en région, afin d’obtenir
leur adhésion à cette recherche d’un meilleur équilibre
entre opérations d’initiative nationale et régionale. C’est
pourtant la condition pour répondre au mieux aux besoins
souvent contradictoires de tous les utilisateurs, qui
souhaitent pouvoir établir des comparaisons et, en même
temps, rendre compte des spécificités de chaque territoire.
Le SSN dans ses différentes composantes (INS et SSP)
se trouve aujourd’hui en première ligne pour porter cette
évolution au sein des différents ministères. Le résultat
n’est pas donné d’avance et dépendra beaucoup d’une
volonté commune de partager avec les services en charge
des statistiques l’information collectée initialement à des
fins de gestion, de placer certains SSP à un niveau
hiérarchique mieux reconnu dans les organigrammes, et
de leur affecter des ressources matérielles et humaines
suffisantes.
46
Statéco n°113, 2019
Donner de nouvelles missions aux
établissements régionaux de l’INS
Les établissements régionaux de l’INS, directions
régionales au niveau des districts ou bureaux locaux par
gouvernorats, n’ont aujourd’hui pas d’autres missions
que d’assurer la collecte et la saisie des données à
transmettre aux services centraux. Cette organisation
constitue désormais une exception parmi les instituts de
statistique dotés d’implantation régionale. Tous ont en
effet confié à leurs établissements des missions tournées
vers les utilisateurs potentiels de statistiques présents
dans leur région, en particulier les acteurs en charge de la
mise en place et du suivi des politiques publiques au sein
de ces territoires. Cette orientation vers la réponse à la
demande régionale et locale peut prendre des formes plus
ou moins élaborées selon les contextes institutionnels et
les compétences disponibles : de simple relais de la
communication et de la diffusion des données nationales
et régionales telle qu’elle est réalisée par le niveau
national à la constitution d’une offre de services
spécifiques en réponse à la demande des utilisateurs en
région.
Dans le cas présent, on sait combien, en Tunisie, les
résultats et les méthodes de la statistique publique restent
méconnus par l’ensemble des publics potentiellement
intéressés en région. L’objectif prioritaire de cette
évolution majeure, mais qui prendra nécessairement du
temps, est ainsi d’abord de relayer auprès des différents
publics et responsables publics de chaque gouvernorat les
actions de communication et de diffusion de résultats
nationaux et régionaux produits ou coordonnés par l’INS.
Il conviendra en outre de veiller à ce que cette fonction
ne se développe pas au détriment des travaux de collecte,
qui doivent rester au cœur des missions de l’Institut (cf.
encadré 2).
Encadré 2 : Mise en place d’une nouvelle organisation des DR de l’INS
Jusqu'en 2016, les établissements régionaux de l'INS étaient organisés à deux niveaux. Chaque « grande région » (district) de
Tunisie était dotée d'une direction régionale (DR), soit au total 8 DR en tenant compte des cas particuliers du gouvernorat de Sfax
d'une part, du « grand Tunis » d'autre part. Par ailleurs, des bureaux locaux étaient installés au niveau de chaque gouvernorat,
dépendant directement de la DR de leur district. Il n'existait pas d'organisation fonctionnelle type pour les établissements régionaux,
qu'il s'agisse des DR ou des bureaux locaux. Leur mission principale était l'organisation et la réalisation des enquêtes statistiques,
aussi bien enquêtes auprès des ménages et des entreprises ou encore enquêtes conjoncturelles. C'est pourquoi la plus grande partie
des personnels des établissements régionaux était (et est toujours) constituée d'enquêteurs. Le reste des personnels est composé de
cadres en charge de la direction des DR ou des bureaux locaux, d'agents chargés du contrôle et de la supervision des enquêtes ou
encore d'agents pour les tâches logistiques et administratives.
Cette « organisation » présentait un certain nombre d'insuffisances et de fragilités. Outre l'absence d'une organisation fonctionnelle
commune, notamment en matière de collecte, les établissements régionaux ne jouaient aucun rôle (ou presque) dans le cadre de la
mission générale de diffusion et communication de l'INS, y compris en matière d'informations statistiques d'intérêt régional ou
local. Par ailleurs, les relations avec le niveau central posaient également plusieurs types de problèmes.
C'est pourquoi il a été décidé, début 2016, de mettre en place une nouvelle organisation des établissements régionaux de l'INS,
projet s'inscrivant dans le cadre du jumelage entre l'INS et l'Insee. Toutefois, avant de pouvoir être généralisée à l'ensemble du
territoire tunisien, la nouvelle organisation a fait l'objet d'une expérimentation préalable dans un certain nombre de régions. Cette
expérimentation a été actée par le comité de direction de l'INS le 16 septembre 2016 et lancée officiellement début novembre 2016.
Elle s'est déroulée dans 7 établissements régionaux de l'INS, tous anciennement bureaux locaux de gouvernorat et à raison d'un
bureau local par district. Le temps de l'expérimentation, ces établissements ont acquis de fait le statut de DR, mais avec une
implantation territoriale au niveau gouvernorat et non plus district.
Chacune de ces « nouvelles » DR dans le cadre de l'expérimentation a été organisée en trois pôles, à savoir le pôle « collecte », le
pôle « gestion des ressources » et le pôle « diffusion-communication ». En fait, les missions assurées par les deux premiers pôles
sont déjà présentes, peu ou prou, dans les « anciennes » DR et leurs bureaux locaux. En revanche, la mise en place du troisième
pôle traduit la volonté de faire des DR un acteur à part entière des missions de l'INS en matière de diffusion et communication de
l'information, et même à terme de coordination statistique au niveau local. In fine, l'expérimentation s'est donné quatre objectifs
fondamentaux, liés entre eux : tester une nouvelle organisation fonctionnelle pour les DR de l'INS, engager la mise en place de
l'élargissement des missions des établissements régionaux, mettre en œuvre une implantation territoriale reconfigurée (on passe du
district au gouvernorat), améliorer les relations avec le niveau central. Ainsi, loin de ne concerner que le niveau local,
l'expérimentation a-t-elle également impliqué les directions centrales de l'INS et leurs équipes.
L'expérimentation a duré un peu plus d'une année. Elle a fait l'objet d'une évaluation assez complète au cours du premier semestre
2018, aussi bien au niveau régional qu'au niveau local, en s'appuyant sur des enquêtes auprès de plusieurs publics : comités de
direction des sites expérimentateurs, ensemble des agents de ces sites, responsables des « anciennes » DR et des bureaux locaux ne
participant pas à l'expérimentation, directions centrales chargées des travaux impliquant les établissements régionaux… Ces
enquêtes ont fait apparaître les résultats positifs de l'expérimentation même si les avis sont plus mitigés du côté des directions
centrales. En particulier, il a été reconnu par l'ensemble des acteurs que l'organisation en pôles permet une meilleure efficience de
la collecte et une amélioration de sa qualité, de même que des progrès en matière de gestion administrative. Quant à lui, le pôle
« diffusion-communication » entraîne une insertion positive des établissements régionaux de l'INS au sein des gouvernorats,
s'agissant notamment de leurs organes de direction (conseils de gouvernorats). Au cours de cette période, la direction centrale des
statistiques régionales a également testé la mise en place d'un appui technique aux pôles de diffusion-communication, sous forme
d'ateliers conduisant à la production d'un support type pour présenter des résultats commentés du recensement de la population.
Cette action s'est avérée très utile, à la fois pour assurer la qualité et la cohérence de ces communications, mais aussi pour motiver
et professionnaliser les agents dans cette fonction nouvelle.
Alors qu'il était prévu, à l'issue du jumelage, que la généralisation à l'ensemble des établissements régionaux de l'INS d'une nouvelle
organisation démarre au premier semestre 2019, cette deuxième phase n'a pas encore été engagée. En fait, le processus de
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Statéco n°113, 2019
généralisation est désormais considéré par la direction de l'INS comme une des options possibles, mais pas la seule compte tenu de
l'évolution du contexte interne et externe de l'Institut. En outre, si les conclusions tirées de l'expérimentation en matière
d'organisation fonctionnelle des DR sont largement acceptées, il n'en va pas de même pour l'organisation territoriale. Ainsi, l'INS
a-t-il le choix, a priori, entre plusieurs scénarios, en particulier : implantation des DR au niveau de chaque gouvernorat,
implantation au niveau du district, chaque gouvernorat du district étant doté d'un bureau local dépendant de la DR ou encore
scénario « mixte », les DR de l'INS étant alors, en fonction des caractéristiques des territoires, implantées au niveau du district ou
au niveau du gouvernorat. Chacun de ces scénarios présente des avantages et inconvénients respectifs, qu'il s'agisse de coût
budgétaire, des moyens humains à mobiliser, du niveau de conformité à l'évolution du contexte de décentralisation en Tunisie…
Se pose par ailleurs le problème du district Nord-Est, qui comprend en particulier le « grand Tunis », et qui devra faire l'objet en
tout état de cause d'une organisation adaptée à ses caractéristiques et à son poids prééminent en Tunisie. En l'état actuel, l'INS n'a
pas encore déterminé quel scénario d'organisation il entend privilégier en matière d'implantation territoriale.
Quelle que soit la décision finalement retenue par l'INS, il paraît indispensable à l'avenir de développer toute une série de
mutualisations entre les établissements régionaux, permettant notamment d'économiser les ressources, par exemple en matière de
collecte et de saisie ou encore d'utilisation des moyens matériels et logistiques. De même en matière de diffusion et de
communication, des opérations régulières de mutualisation de supports de communication portant sur des thèmes d'intérêt commun
pourront constituer un levier déterminant pour la montée en compétence des missions qui pourraient finalement être attribuées en
la matière aux établissements régionaux, plus généralement pour une meilleure visibilité de l'INS sur l'ensemble du territoire
tunisien.
Trois principaux défis pour
l’avenir : aller vers les
utilisateurs en région, mettre en
place une nouvelle ingénierie,
renforcer les coopérations entre
administrations
L’activité du jumelage en matière de statistiques
régionales a été centrée sur 3 chantiers prioritaires.
La modernisation du processus de
production de statistiques des Gouvernorats
en chiffres
Pour des raisons historiques, l’utilisation régulière de
statistiques au niveau régional bénéficie en Tunisie de
l’expérience remarquable acquise depuis de nombreuses
années par le Commissariat général au développement
régional (CGDR) et par les directions régionales des
offices de développement placés auprès des gouverneurs.
Ces offices ont pour mission d’aider les gouverneurs et
leurs services à la mise en place et au suivi des politiques
de développement régional. Chaque année, ils produisent
pour chacun des 24 gouvernorats, une publication dite
Gouvernorats en chiffres, qui rassemble une sélection de
données régionales collectées le plus souvent
directement auprès des services producteurs en régions.
Paradoxalement, cet exercice ne mobilise encore que très
peu les statistiques régionales produites au niveau central
par les services du SSN décrites ci-dessus, avec pour
conséquences, la multiplication des ressaisies des mêmes
données au sein de l’administration ainsi qu’une
hétérogénéité croissante dans le choix des indicateurs
retenus d’une région à une autre, cela au détriment des
possibilités de comparaisons interrégionales. Il a donc été
convenu que, dans le cadre du jumelage, l’objectif
principal de la première version du projet de base
annuelle de données régionales du SSN serait orienté par
les besoins du CGDR et des offices pour la production
des Gouvernorats en chiffres.
L’examen détaillé du dispositif de production des
statistiques diffusées dans les Gouvernorats en chiffres a
montré que l’essentiel du travail des agents en région
consistait à mettre en place une collecte spécifique de
tableaux de données statistiques directement auprès des
administrations régionales qui les produisent : services
régionaux des différents ministères (éducation, santé,
culture...), des grands opérateurs déjà cités (STEG,
ONAS, SONEDE) ou encore d’organismes comme
L’Agence de promotion de l’investissement pour les
entreprises, alors que les données issues du répertoire
national des entreprises ne sont pas reprises.
Cette pratique, le plus souvent, ne prend pas en compte
les corrections et les contrôles de qualité effectués par les
services statistiques centraux, dans le cas où ils réalisent
effectivement une centralisation et une validation des
données produites par les services régionaux. L’objectif
durant le jumelage était d’amorcer cette centralisation
progressive côté producteurs et côté utilisateurs, de façon
à disposer d’une première version d’une base annuelle de
données régionales susceptible d’être ensuite enrichie au
fur et à mesure des progrès réalisés par les services
statistiques dans la centralisation de leurs données
régionales.
L’objectif à l’horizon rapproché de 2020, est que la
statistique publique fournisse environ 60 % des données
diffusées par les Gouvernorats en chiffres. Les bénéfices
escomptés sont, pour les utilisateurs, un allègement des
tâches de collecte par les agents en région, une
amélioration de la qualité et de la comparabilité
interrégionale, ainsi que des marges de manœuvre en
région pour compléter le dispositif central par des
compléments d’initiative régionale en fonction des
priorités propres à chaque région ; pour la statistique
publique, une meilleure visibilité en région et un
partenariat utile avec des utilisateurs au plus près des
gouverneurs.
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Statéco n°113, 2019
Pour mettre en place ce nouveau processus de mise à
disposition des données statistiques issues de la
statistique publique, la méthode a consisté d’abord à
sélectionner avec les utilisateurs un ensemble
volontairement limité de données régionales devant
satisfaire aux conditions suivantes : être actualisées
chaque année, disponibles par gouvernorats ou
délégations et surtout en mesure d’être centralisées par
les services de la statistique publique.
Pour les premières versions de cette base, sept domaines
ont été retenus en privilégiant des données déjà publiées
ou disponibles soit à l’INS (démographie, emploi-
chômage, entreprises, infrastructures), soit dans les
services statistiques des ministères (éducation,
agriculture, enseignement supérieur).
Une fois rassemblées et validées par ces services eux-
mêmes, ces données sont mises à disposition des
utilisateurs via un accès direct à des bases téléchargeables
sur le portail de l’INS, en tant que nouvelle offre de la
statistique publique. Elles doivent être accompagnées des
métadonnées nécessaires à leur compréhension (cf., en
annexe 2, le contenu de la version 2018 de la base et le
tableau 1, comme exemple de présentation d’un
indicateur : le taux de branchement des ménages en eau
potable par gouvernorat ).
La montée en puissance du système
d’information géographique
La montée en puissance au cours des prochaines années
du système d’information géographique (SIG) de l’INS
comme référentiel géographique unique est un facteur de
cohérence, d’innovation et de progrès majeur pour
l’Institut et l’ensemble du SSN. Celui-ci bénéficie de
l’appui du réseau des responsables géographiques
présents dans chaque DR. Les objectifs sont d’abord
d’améliorer l’efficacité des processus de collecte
(échantillonnage, gestion des tournées des enquêteurs,
localisation des ménages et des locaux), puis dans un
second temps de constituer des bases de diffusion
d’informations statistiques localisées : base
interministérielle des équipements dès 2020 à partir de la
couche « équipements locaux », et au fur et à mesure des
collectes sur le terrain, la localisation progressive des
données des ménages (25 % en 2020, 100 % en 2024 lors
du prochain recensement de population). En tant qu’outil
interministériel de référence, intégrant les périmètres des
différentes circonscriptions administratives selon une
codification commune standard (le code géographique),
c’est aussi un élément de cohérence de l’ensemble du
SSN et de la composante géographique des systèmes
d’information de l’administration. Il sera déterminant
pour permettre de répondre efficacement aux demandes
de données locales générées par la décentralisation
actuellement en cours. Ce fut d’ailleurs déjà le cas lors de
la phase préparatoire de cette décentralisation, lorsque le
service SIG de l’INS a été sollicité pour la délimitation et
l’intégration des périmètres des nouvelles collectivités.
Encadré 3 : Le système d’information géographique et
statistiques Un SIG est constitué par un ensemble de données
géoréférencées d’une part, de logiciels d’autre part, en vue de
localiser des entités (population, entreprises, infrastructures et
équipements), de visualiser leur implantation sur le territoire
(grâce à des fonctions cartographiques de plus en plus souvent
interactives) et de les analyser dans leurs dimensions à la fois
statistiques et géographiques. Les progrès techniques réalisés
ces dernières années permettent aujourd’hui d’accéder à
moindre coût à des outils de géolocalisation par affectation
automatique de coordonnées XY en tout point du territoire. Ils
sont constitués de plusieurs couches (infrastructures et réseaux,
périmètres administratifs, ménages, locaux...) dont la cohérence
spatiale est assurée par un référentiel commun de projection de
coordonnées géographiques. Cette situation constitue une
opportunité pour les instituts statistiques qui de plus en plus
développent des SIG et de nouvelles méthodes de
représentation et d’analyse de statistiques spatiales. Le
développement de ces SIG s’accompagne de la mise en place
de nouvelles compétences et de nouveaux métiers au sein des
instituts statistiques, condition pour garantir la qualité de cette
information nouvelle ainsi que l’adoption des référentiels
communs indispensables à la cohérence d’ensemble de ces
systèmes.
Enfin, la généralisation à l’horizon 2024, échéance du
prochain recensement de population, de la
géolocalisation de l’ensemble des unités enquêtées
(ménages, entreprises, équipements) permettra le
développement progressif de méthodes statistiques
innovantes d’analyse spatiale des disparités locales et
régionales, comme l’exploitation de données carroyées,
conformément aux pratiques qui se généralisent et
s’harmonisent désormais au sein des instituts nationaux
de statistique et des organisations internationales.
Pour donner suite à la fin du jumelage en avril 2018,
l’INS doit à court terme achever l’intégration du SIG
dans ses opérations de collecte. Parallèlement la
constitution progressive d’une couche dite locaux sera
engagée, en priorité dans les domaines dont les
ministères compétents se sont déclarés intéressés à une
coopération qui devra associer l’échelon central et les
services régionaux. Enfin le management de ces
opérations devra veiller à conforter les missions et la
professionnalisation du réseau technique de la dizaine
des responsables SIG en région, nouveau métier au sein
du système statistique, en précisant leurs missions, leur
plan de charge annuel, leur programme de formation.
La constitution d’une base interministérielle
des équipements
L’objectif de cette opération est de s’appuyer sur les
avancées récentes du SIG à l’occasion du dernier
recensement (RGPH de 2014) afin de mettre au point une
base de données localisées sur les établissements
délivrant des services au public dans les différents
secteurs ministériels (éducation, formation et
enseignement, santé, affaires sociales, culture, sport, etc.),
et sur les équipements gérés par les grands opérateurs
publics (assainissement, eau potable, distribution
d’électricité et de gaz, télécommunications, etc.). Cette
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Statéco n°113, 2019
base interministérielle constituera à terme l’outil de
référence du SSN pour la mesure de l’accessibilité de la
population aux principaux services sur l’ensemble du
territoire.
La première étape consiste à renseigner la couche
« locaux » prévue dans le nouveau SIG, en partant d’une
part, de la base de données existante à l’INS qui a été
constituée lors de la préparation du RGPH 2014 et
d’autre part, des données administratives tenues par les
services régionaux des ministères. Ces variables doivent
faire l’objet de relevés de terrain afin de vérifier et
corriger si nécessaire les éléments d’identification, et
dans le même temps d’y ajouter une géolocalisation
attribuée par les GPS inclus dans les tablettes attribuées
aux responsables SIG des directions régionales. Cette
opération s’inscrit dans le cadre de leur mission générale
de préparation des opérations de collecte pour les
enquêteurs. Des tests préalables sont prévus dans
certaines régions en liaison avec les services régionaux
des ministères concernés.
La seconde étape consiste à établir des collaborations
avec les services des ministères en charge de ces
établissements, en vue d’actualiser périodiquement,
domaine par domaine, une base plus complète couvrant
progressivement tous les services essentiels. Le ministère
de la Culture (direction organisation et méthodes
informatiques), qui projette de constituer dans son
système d’information une base géoréférencée de ses
équipements culturels, a pris contact avec l’Institut afin
de confronter ses propres données avec celles des
statisticiens. L’objectif est d’associer progressivement
chaque ministère à la tenue, la mise à jour régulière et
l’utilisation de cette base, en s’appuyant le cas échéant
sur des collaborations entre services à l’échelon régional.
La base ainsi complétée et régulièrement mise à jour
selon un protocole homogène pour tous les secteurs
observés, pourra être utilisée avec une double finalité :
d’une part, une aide à la collecte, en tant que couche du
SIG mise à disposition des enquêteurs sur leurs tablettes,
elle permettra un meilleur repérage lors des tournées
d’enquêtes (fonction remplie jusqu’à présent par les
anciens points d’intérêt cartographiés sur papier pour le
RGPH de 2014) ; d’autre part, en tant que source
statistique interministérielle du SSN, pour la mesure
d’indicateurs régionaux et locaux d’accessibilité de la
population aux différents types de services et
d’équipements. Afin d’assurer à la fois la pérennité et les
évolutions de ce nouvel outil, des conventions devront
être établies entre l’INS et chaque ministère partenaire,
précisant pour chacun la nature des données produites et
les conditions de leur production, de leur utilisation et de
leur protection.
Organisation des travaux et éléments de
bilan
Ces différents chantiers du jumelage ont été conduits au
sein de L’INS par une équipe de projet composée de la
directrice centrale des statistiques régionales assistée
d’un directeur régional. Six missions d’un ou deux
experts d’environ trois à cinq jours ont été menées entre
2016 et 2018, qui ont permis de suivre l’avancement des
travaux et de rencontrer l’ensemble des acteurs au sein de
l’INS comme des principaux ministères ou organismes
impliqués (Commissariat général au développement
régional – CGDR, offices, services des ministères de
l’éducation, de l’agriculture, de la santé, de la culture).
Pour l’opération Gouvernorats en chiffres, un comité de
suivi a été réuni à chaque campagne sur initiative de
l’équipe de projet, composé de représentants du CGDR
et des offices. Ces réunions ont confirmé l’intérêt des
utilisateurs pour ce projet. Il ressort néanmoins de ces
contacts que la substitution de cette centralisation de
données aux opérations de collecte qui se poursuivent en
région prendra plus de temps que prévu, dans la mesure
où elle suppose l’évolution de tâches et de routines
réalisées depuis plusieurs années par les agents de ces
offices à laquelle ils ne sont pas préparés.
La contribution du jumelage à la montée en charge du
SIG s’inscrit plus directement dans les activités de
l’équipe qui en est chargée et de ce fait ne s’est pas
trouvée confrontée au même type de difficulté : ainsi les
échéances fixées pour l’intégration des nouveaux outils
de collecte dans le programme existant d’enquêtes
commandent à très court terme le rythme des différentes
étapes de cette activité. Enfin, le chantier de la
constitution progressive d’une base interministérielle des
équipements intervient plutôt comme une activité
directement dérivée du programme précédent mais avec
un horizon plus lointain, défini par la préparation du
prochain recensement de 2024.
Au cours du jumelage, l’impossibilité de dégager des
ressources nouvelles spécialement affectées à ces
opérations a inévitablement limité l’avancement des
travaux, en particulier pour la constitution des premières
versions de la base de données pour Gouvernorats en
chiffres. Ce surcroît d’activité a essentiellement pesé sur
des cadres de l’Institut en plus d’un plan de charge
courant déjà souvent saturé. De ce fait, toutes les tâches
supplémentaires impliquées par la production d’une base
de données régionales, souvent sous-estimées au départ,
n’ont pu être pleinement assurées, comme la mise en
œuvre effective d’un format commun, la documentation
des métadonnées, l’animation des échanges entre
utilisateurs et producteurs... Une telle opération nécessite
en effet des règles précises de partage des tâches entre
d’une part, celles qui relèvent des producteurs par
domaine déjà en place, et d’autre part, les activités qui
relèvent d’une équipe nouvelle chargée de
l’administration de cette base, à constituer pour exercer
pleinement cette fonction essentielle et garantir la
pérennité et l’évolutivité de toute l’opération.
À l’issue de ce jumelage, il importe donc de mettre en
place, au sein de l’INS, une équipe nouvelle et pérenne
de suivi et de pilotage de la production des données
régionales, clairement identifiée dans l’organigramme :
un cadre A, responsable du programme, assisté d’un
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Statéco n°113, 2019
technicien statistique, administrateur des données de la
base.
Une autre condition essentielle de pérennisation de cette
opération sera de mieux formaliser les relations avec les
services statistiques des différents ministères producteurs
des données régionales sous la forme de conventions
précisant en premier lieu la nature des données
transmises à l’INS, les conditions de leur usage et
rediffusion, les garanties de leur confidentialité.
Conclusion
Le contexte des années qui viennent s’annonce comme
particulièrement exigeant en matière de statistiques
régionales : en même temps que les inégalités entre
territoires se maintiennent et sont perçues comme autant
d’injustices par la population, chacun peut désormais
accéder directement via internet à des données chiffrées
de toutes sortes, dont les sources et les conditions de
validité sont le plus souvent très peu documentées. Le
risque est grand que cette conjonction ne desserve la
qualité du débat public, à un moment où, avec le
processus de décentralisation, se mettent en place sur
l’ensemble du territoire de nouvelles institutions et de
nouveaux responsables de l’action publique. En
l’absence d’un système de statistiques publiques
régionales de référence, cette situation pourrait conduire
à voir se multiplier des systèmes d’observations
spécifiques d’initiative locale sans cohérence nationale,
mobilisant des ressources locales elles-mêmes très
inégalement réparties selon les régions. Les réflexions
qui précèdent illustrent quelques-uns des atouts et des
obstacles pour une stratégie du système statistique
national tunisien face à ce nouveau défi, en distinguant
clairement deux échéances principales.
À court terme, dès 2020, des progrès significatifs sont à
la portée des services en place, sous forme de produits
nouveaux, simples et reconnus comme utiles par les
principaux acteurs en région. D’abord, une première
version d’une base de données régionales, pivot du
dispositif en tant que socle commun à toutes les régions,
peut être mise en ligne. Élaborée en liaison avec les
principaux utilisateurs en région, cet ensemble de
données nationales-régionales sera constitué d’un
nombre volontairement limité de données essentielles,
cohérentes, validées, actualisées chaque année selon un
calendrier annoncé et tenu. Cette base clairement
identifiée comme issue de l’ensemble du SSN sera
accessible à tous depuis le site internet de L’INS. En
complément de cette offre de base, et sans attendre
davantage, la présence nouvelle dans chaque région, de
statisticiens de l’INS, tournés vers les utilisateurs et
progressivement formés à ce nouveau métier, permettra
de mieux faire connaître aux différents utilisateurs les
activités et surtout les résultats produits par l’ensemble
de la statistique publique.
À l’horizon 2024, notamment à l’occasion du prochain
recensement de population, une autre étape pourra être
franchie grâce aux investissements et aux méthodes
innovantes qui conduiront à un renouvellement profond
de l’ingénierie et des métiers de production et de
diffusion des données statistiques, en particulier,
régionales et locales : (i) la mobilisation systématique des
sources de données administratives à des fins statistiques
aussi bien dans les domaines économiques que sociaux ;
(ii) l’intégration du SIG de l’INS dans les processus de
collecte, de diffusion et d’analyse des données
statistiques ; (iii) la mise en place de méthodes plus
interactives d’accès aux données régionales et locales via
internet.
Enfin, les premières actions engagées au cours du
jumelage ont mis en évidence combien la qualité du
service rendu à l’échelle régionale passe par le
renforcement de la coordination interministérielle entre
services nationaux producteurs des données, pour
concourir à une offre cohérente de la statistique publique
en région, qui soit réellement utile au débat et à l’action
publique sur l’ensemble du territoire.
51
Statéco n°113, 2019
Références bibliographiques
Chauvet-Peyrard A. (2013), « Indices des prix à la consommation 1998- 2012 selon la région d’habitation et selon
la taille de la commune de résidence », Document de Travail n° F1306, Institut national de la statistique et des études
économiques, septembre 2013.
European Center for Development Policy Management (2016), « Réduire les inégalités régionales en Tunisie »,
Note d’information n°84, avril 2016.
Institut tunisien de la compétitivité et des études quantitatives (2018), « Indicateur de développement régional.
Méthodologie et résultats », Notes et analyses, 2018-1, mai.
Annexe 1
Organisation territoriale administrative de la Tunisie et des implantations de l’INS en région
L’organisation territoriale administrative de la Tunisie
6 districts ou grandes régions
24 gouvernorats
264 délégations
2084 secteurs
L’implantation régionale de l’INS est aujourd’hui organisée à deux niveaux :
6 directions régionales à l’échelle des districts :
o Tunis pour le Nord-est (7 gouvernorats)
o Beja pour le Nord-ouest (4 gouvernorats)
o Sousse pour le Centre-est (4 gouvernorats)
o Kasserine pour le Centre-ouest (3 gouvernorats)
o Médenine pour le Sud-est (3 gouvernorats),
o Gafsa pour le Sud-ouest (3 gouvernorats)
18 bureaux locaux dans chaque gouvernorat non chef-lieu de district, en relation directe avec la DR de leur district.
52
Statéco n°113, 2019
En fait, dans certains cas, des modes de fonctionnement particuliers ont été mis en place :
Dans le district du Nord-est, le bureau de Nabeul fonctionne comme un mini-district pour les bureaux des gouvernorats
de Nabeul, Zaghouan et Ben Arous, la DR de Tunis restant en relation directe avec les bureaux de Bizerte, Ariana et
Manouba.
Le bureau de Sfax fonctionne comme une DR de district, en raison de l’importance de la population.
Annexe 2
Version 2018 de la base de données annuelle de données régionales pour Gouvernorats en chiffres
Démographie (source INS : estimations de population et état-civil pour l’année 2016)
o Par gouvernorats :
▪ Population par genre, âge quinquennal
▪ Naissances par genre
▪ Décès
▪ Accroissement naturel
▪ Taux de natalité
▪ Taux de mortalité
o Par délégations : estimations de population
Emploi chômage (source INS : enquête emploi T2-2017)
o Par gouvernorats
▪ Population en âge de travailler par genre, milieu et niveau d’instruction
▪ Population active totale, occupée, non occupée (chômeurs), selon le genre, le milieu, le niveau
d’instruction
▪ Taux de chômage selon le genre, le milieu, le niveau d’instruction
▪ Taux d’activité selon le genre, le milieu, le niveau d’instruction
Entreprises (source INS : RNE au 31-12-2016)
o Par gouvernorats :
▪ Dénombrement d’entreprises privées selon l’activité (14 postes), la tranche de salariés (6 postes), la
forme juridique (5 postes), la nationalité (2 postes)
o Par délégations :
▪ Dénombrement d’entreprises privées selon l’activité (4 postes)
Infrastructures (source INS-ministères et opérateurs publics, 2017 prévisionnel- 2016 provisoire, 2015 semi-définitif)
o Par gouvernorats :
▪ Assainissement, adduction d’eau, électricité, postes et télécommunications : dénombrements et
ratios par habitant ou par ménage
▪ Équipements pour la culture, l’enfance, la jeunesse et sports, le tourisme
Éducation (source : direction générale des Etudes, de la planification et des systèmes d’information, Ministère de
l’éducation)
o Par gouvernorats et délégations : ensemble des tableaux sur l’année scolaire 2016-2017 établis par le ministère
de l’éducation sur les établissements, les enseignants et les élèves.
Agriculture (source : Direction des statistiques et de la conjoncture économique agricoles, Direction générale des
études et du développement agricole, Ministère de l’agriculture)
o Par gouvernorats et délégations : ensemble des tableaux constitués par le service
Enseignement supérieur (source : Ministère de l’enseignement supérieur. Année universitaire 2016-2017 pour les
inscrits, 2015-2016 pour les diplômés)
o Par gouvernorats :
▪ Nombre d’établissement (public, privé)
▪ Répartition des étudiants inscrits par établissement (public, privé), par domaine d’études, par type
de diplômes
▪ Évolution des diplômés par établissement (public, privé), par type de diplômes, par domaine
d’études,
▪ Évolution des étudiants résidents, des restaurants et des repas servis par jour
▪ Répartition des enseignants du secteur public par grade
53
Statéco n°113, 2019
Tableau n°1 :
Taux de branchement des ménages en eau potable (1) par gouvernorat, Milieu non communal (en %)
Gouvernorat 2017(***) 2016(**) 2015(*) 2014 2013 2004 1994
TUNIS
ARIANA 97,2 96,6 96,6 95,2 94,4 95,0 61,5
BEN AROUS 97,8 97,9 94,0 94,4 94,8 80,3 63,2
MANOUBA 94,0 91,8 89,0 88,1 87,3 81,4 _
D.TUNIS 96,0 95,0 92,7 92,0 91,5 84,1 62,0
NABEUL 84,8 83,0 79,3 78,3 78,0 66,0 38,2
ZAGHOUAN 72,3 72,9 63,8 63,9 58,0 53,8 28,8
BIZERTE 69,0 68,5 68,2 67,5 67,8 56,8 24,5
N.EST 77,0 76,1 72,7 71,9 70,9 56,6 31,0
BEJA 69,1 67,4 61,7 61,9 60,6 41,9 24,9
JENDOUBA 47,4 45,7 44,1 43,6 42,4 37,5 18,4
LE KEF 64,6 62,6 58,2 56,2 51,0 27,2 15,0
SILIANA 49,0 48,5 39,1 37,9 37,4 30,6 14,2
N.OUEST 55,7 54,2 49,7 49,0 47,3 35,5 18,5
SOUSSE 83,9 83,8 81,9 81,8 81,8 93,5 64,7
MONASTIR -- -- -- -- -- _ _
MAHDIA 84,1 83,6 81,0 81,2 78,4 72,8 26,5
SFAX 72,2 72,1 69,5 69,2 65,3 53,8 18,9
C.EST 78,0 77,8 75,3 75,1 72,3 67,0 29,8
KAIROUAN 52,2 51,9 51,1 51,3 51,5 52,6 16,1
KASSERINE 42,2 41,0 39,7 38,4 28,9 27,4 6,8
SIDI BOUZID 48,2 47,5 47,9 47,8 48,0 37,3 10,3
C.OUEST 48,3 47,6 47,1 46,8 44,5 40,9 11,7
GABES 83,9 83,4 81,5 81,2 81,5 66,5 39,7
MEDENINE 86,8 86,2 86,2 68,1 72,4 48,2 28,5
TATAOUINE 97,2 97,4 89,9 96,2 89,4 74,3 30,9
S.EST 87,6 87,2 85,0 78,9 79,5 61,1 32,9
GAFSA 65,8 64,9 62,1 61,4 59,9 39,7 18,7
TOZEUR 93,3 92,9 92,8 92,7 92,6 90,5 82,3
KEBILI 95,4 95,4 95,3 94,9 94,6 93,0 77,5
S.OUEST 81,9 81,4 80,0 79,4 78,5 66,3 47,4
TOTAL 68,0 67,2 64,7 63,7 62,0 52,0 25,1
Avant le recensement 2004 les taux de branchements concernaient seulement les branchements de la SONEDE et à partir de 2004
les taux de branchement concernent les branchements de la SONEDE et du génie rural.
(*) Les taux de branchement de l’année 2015 sont des taux semi-définitifs.
(**) 2016 des taux probables, (***) 2017 des taux prévisionnels.
54
Statéco n°113, 2019
55
*Benoit Hurpeau est chef de la section "Observation territoriale du système productif et des ménages" à l’Insee
[email protected], Samia Khedhaouria est sous directrice des comptes trimestriels à Statistiques Tunisie
[email protected] et Karim Salah est chef du service des statistiques et comptes de l’environnement à Statistiques
Tunisie [email protected]
Élaboration des premiers PIB
régionaux en Tunisie B. Hurpeau, S. Khedhaouria et K. Salah*
Pour répondre aux besoins de plus en plus pressants en matière de données statistiques ayant trait à l’activité économique dans les régions, l’Institut national de la statistique (INS) a entrepris des travaux visant la régionalisation du PIB tunisien. Les travaux qui sont décrits dans cet article ont débuté en 2016 et se sont achevés en 2018. Ce projet s’inscrit dans la politique de l’INS qui consiste à développer les statistiques régionales permettant d’aider à la formulation, la mise en œuvre et l’évaluation des politiques régionales. Dans ce cadre, l’INS a produit, dans une première étape, des valeurs ajoutées par secteur d’activité et des produits intérieurs bruts (PIB) pour les grandes régions pour l’année 2013 (année pour laquelle les comptes annuels étaient définitifs au démarrage de ce projet). L’approche utilisée pour la régionalisation des valeurs ajoutées (VA) et du PIB tunisien est inspirée des recommandations européennes en matière de régionalisation du PIB. Dans ce cadre, l’élaboration de PIB aux niveaux des grandes régions tunisiennes avait un grand intérêt pour mesurer le poids économique relatif de ces régions ainsi que les différences de développement entre ces territoires.
Concepts et méthodes pour l’élabo-
ration de PIB régionaux
La définition du territoire
En comptabilité nationale, en préalable à toute autre étape,
il est nécessaire de déterminer le territoire sur lequel le
comptable travaille. Au niveau national par « territoire
économique » d’un pays, il faut entendre :
1. La zone (territoire géographique) sous administration et
contrôle économique effectifs d’une administration
publique unique ;
2. Les enceintes des zones franches, entrepôts et usines
sous contrôle douanier ;
3. L’espace aérien national, les eaux territoriales et la plate-
forme continentale située dans les eaux internationales
sur laquelle le pays dispose de droits exclusifs ;
4. Les enclaves territoriales, c’est-à-dire les territoires
géographiques situés dans le reste du monde et utilisés,
en vertu de traités internationaux ou d’accords entre
États, par des administrations publiques du pays
(ambassades, consulats, bases militaires, bases
scientifiques, etc.) ;
5. Les gisements (pétrole, gaz naturel, etc.) situés dans les
eaux internationales en dehors de la plate-forme
continentale du pays et exploités par des unités résidant
sur le territoire tel qu’il est défini aux points 1 à 4.
En Tunisie, le choix a été fait de découper le territoire en
sept grandes régions (figure 1) :
• Grand Tunis : Tunis, Ariana, Ben Arous et Mannouba ;
• Nord-Est : Nabeul, Bizerte et Zaghouan ;
• Nord-Ouest : Beja, Jendouba, Kef et Siliana ;
• Centre-Est : Sousse, Monastir, Mahdia et Sfax ;
• Centre-Ouest : Kairouan, Kasserine et Sidi bouzid ;
• Sud-Est : Gabes, Medenine et Tataouine ;
• Sud-Ouest : Gafsa, Tozeur et Kébili.
56
Statéco°113, 2019
Figure 1
Carte des 7 régions
Note : La répartition du PIB régional est faite seulement pour les 7 grandes régions en l’absence de
données pour estimer la partie qui concerne les enclaves territoriales
Les unités statistiques retenues pour
l’élaboration du PIB régional
L’aspect géographique, qui est utile pour la régionalisation,
d’un lieu unique, ressort des définitions des unités
statistiques suivantes :
• L’unité d’activité économique (UAE) est une entreprise
ou une subdivision d’une entreprise qui exerce un seul
type d’activité productrice ou la production principale
représente la majorité de la valeur ajoutée. Le lieu n’est
pas défini dans ce cas ;
• L’unité d’activité économique locale (UAEL) ou
établissement : il est défini comme « une entreprise, ou
une partie d’entreprise située en un lieu unique et qui
exerce une seule activité de production dans laquelle,
l’essentiel de la valeur ajoutée revient de l’activité de
production principale ». De fait un établissement peut
comprendre plusieurs activités secondaires en plus de sa
production principale. Il en découle également, qu’une
entreprise peut être constituée par un ou plusieurs
établissements exerçant une ou plusieurs activités en un
ou plusieurs endroits différents. Dans le cas des petites
et moyennes entreprises, l’entreprise et l’établissement
sont identiques. Dans le cas des grandes et complexes
entreprises, qui exercent différents types d’activités
économiques en différents lieux, on doit diviser ces
entreprises en un ou plusieurs établissements ;
• L’unité locale (UL) : elle est définie comme étant une
entreprise, ou une partie d’une entreprise, qui exerce une
activité productrice en un seul lieu. La précision du lieu
permet de compiler et d’analyser les données
géographiquement.
Les méthodes
Il existe 3 types de méthode pour le calcul de la valeur
ajoutée et du PIB au niveau régional.
La méthode ascendante employée pour estimer un agrégat
régional consiste à collecter les données au niveau d’unité
d’activité économique au niveau local, puis à progresser par
addition jusqu’à l’établissement de la valeur régionale de
l’agrégat. Cette méthode est qualifiée d’ascendante, car les
éléments de calcul de l’agrégat sont directement recueillis
au niveau de cette unité d’activité économique au niveau
local. Une méthode pseudo-ascendante peut être suivie en
l’absence de données pour l’unité d’activité économique au
niveau local. Les données pour l’unité d’activité
économique au niveau local peuvent être estimées d’après
les données de l’entreprise, de l’unité d’activité économique
au niveau local ou de l’unité locale. On peut ensuite agréger
les estimations pour obtenir des totaux régionaux, comme
dans la méthode ascendante pure. De nombreuses
entreprises n’ont qu’une unité d’activité économique au
niveau local, et cette méthode d’estimation ne s’impose que
pour les entreprises multirégionales et hétérogènes.
57
Statéco n°113, 2019
La méthode descendante employée pour estimer un agrégat
régional consiste à répartir un chiffre national entre les
régions sans essayer d’isoler l’unité d’activité économique
au niveau local ou l’unité locale. Le chiffre national est
réparti à l’aide d’un indicateur aussi proche que possible de
la variable à estimer.
La méthode ascendante se rencontre rarement sous sa forme
pure. Les données présentent toujours des lacunes, qui
doivent être comblées par une méthode descendante. De
même, nombre de méthodes descendantes font souvent
appel à des données fournies par des sources exhaustives,
de la même manière que les estimations ascendantes. Les
méthodes mixtes sont donc la norme.
Le processus de régionalisation consiste à calculer les
valeurs ajoutées à un niveau détaillé (107 secteurs d’activité)
et d’en déduire le PIB dans chaque région. Pour y parvenir,
il est important de définir la valeur ajoutée et ses
composantes, et la base de choix des indicateurs qui
serviront de clé de répartition (dans la méthode descendante
et pseudo-descendante).
La valeur ajoutée et ses composantes
La valeur ajoutée sert à désigner le supplément de valeur
qu’une entité économique, grâce à son activité, est capable
d’apporter à un bien ou à un service provenant d’un tiers.
La valeur ajoutée se présente donc comme un indicateur
économique de la création de richesse de cette entité. Elle
sert notamment de base à la mesure du PIB d’un pays ou
d’une région.
La valeur ajoutée aux prix de base est calculée en utilisant
l’une des deux définitions suivantes :
VA (prix de base) = production (prix de base) –
consommation intermédiaire (prix d’acquisition)
VA (prix de base) = rémunération des salariés + excédent
brut d’exploitation (EBE)[ou revenu mixte] + autres taxes
moins subventions sur la production
Les différentes composantes de la valeur ajoutée servent au
choix des indicateurs pour la répartition.
Le choix des indicateurs
L’adoption des méthodes descendantes ou pseudo-
ascendantes et le recours aux indicateurs pour répartir la
valeur ajoutée pour certains secteurs est tributaire de la
disponibilité des données.
L’indicateur choisi doit être le plus proche possible de la
variable à répartir. En effet la répartition de la valeur ajoutée
s’effectue à l’aide d’indicateurs directs et indirects :
- Les indicateurs directs concernent les variables des
comptes de production (production, consommation
intermédiaire) et d’exploitation (EBE, salaires). Ces
indicateurs sont les plus adéquats dans la répartition ;
- Les indicateurs indirects concernent les variables ayant un
lien indirect avec la VA comme l’emploi, avec l’hypothèse
que certaines variables sont identiques dans toutes les
régions (exemple la productivité).
Les données sur les dépenses et les acquisitions peuvent
aussi servir comme indicateurs mais dans des conditions
particulières.
Dans tous les cas et pour s’assurer de la qualité, le choix des
indicateurs doit respecter les règles suivantes :
• Avoir une corrélation statistique significative entre
l’agrégat et l’indicateur à l’échelle nationale ;
• Avoir une relation économiquement significative entre
l’agrégat et l’indicateur ;
• Affiner la répartition de la valeur ajoutée : un indicateur
pour chaque composante (EBE, salaires).
Élaboration des comptes
Nous décrivons dans cette partie la méthodologie utilisée
pour régionaliser la valeur ajoutée de chacun des principaux
secteurs d’activité. Les méthodes employées sont très
diverses selon les secteurs, avec une méthode ascendante
pour l’agriculture et pêche, une méthode mixte pour
l’industrie manufacturière, etc.
L’agriculture
Le secteur agriculture et pêche représente 10,5 % de la
valeur ajoutée en 2017. Cette activité est localisée surtout
dans les régions du nord et du centre du pays.
Ce secteur est subdivisé en 3 sous-secteurs :
• La culture et l’élevage ;
• La sylviculture ;
• La pêche, la pisciculture et l’aquaculture.
Les données régionales disponibles concernent
essentiellement la production par produit. Ces données ont
permis d’estimer la valeur ajoutée agricole de chaque région
en utilisant la méthode ascendante.
1. Produits de la culture et de l’élevage pour lesquels les
données disponibles concernent essentiellement :
• La production régionale par produit pour les sous
branches (céréales, olives, dattes, tabac, agrumes
volailles et œufs) ;
• Pour les autres sous-branches, les superficies cultivées
par région et par produit sont utilisées pour estimer la
répartition de la production végétale et le cheptel en
nombre pour estimer la répartition de la production
animale.
2. Sylviculture, pour laquelle avec quatre produits
caractéristiques de ce secteur, les données utilisées sont
celles du dernier inventaire forestier et pastoral de 2010.
La répartition est faite par le biais de la production ou la
superficie régionale pour chaque produit.
3. La pêche : trois produits sont caractéristiques de ce
secteur à savoir les poissons, les crustacés et mollusques
ainsi que les produits aquatiques divers. Les données
disponibles sont la production par port et par type de
produit.
58
Statéco°113, 2019
L’industrie manufacturière (hors tabac)
Ce secteur représente environ 16 % de l’économie
tunisienne. En dehors de la comptabilité nationale, trois
sources sont mobilisées pour ce pan de l’économie.
Le répertoire national des établissements est un appendice
du répertoire national des entreprises. Le répertoire national
des entreprises est basé sur le rapprochement de sources
administratives, la Direction générale des impôts (DGI) et
la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS). Il résulte
d’un appariement statistique entre la donnée entreprise
(DGI) et la donnée salariés (CNSS). Il couvre le champ du
secteur marchand non agricole. Il constitue une des
principales sources d’information sur le tissu productif
tunisien et permet notamment de suivre la démographie des
entreprises. Le répertoire met à la disposition des
informations sur l’activité, le nombre de salariés et les
masses salariales notamment. Enfin, il sert de base de
sondage pour réaliser des enquêtes auprès des entreprises,
notamment l’enquête nationale sur les activités
économiques (ENAE) et l’enquête Micro-entreprises.
Le répertoire national des établissements a été mis en place
pour les années 2012 et 2013 à partir du répertoire national
des entreprises en se basant sur les données de la CNSS. Le
répertoire des établissements fournit des données sur les
emplois et les salaires par secteur et par région, il est utilisé
pour le calcul des valeurs ajoutées régionales pour plusieurs
secteurs.
L’ENAE est réalisée annuellement auprès des entreprises
non financières hors agriculture. Elle sert à fournir des
informations économiques sur ces entreprises qu’elles
soient publiques ou privées.
L’enquête Micro-entreprises réalisée tous les cinq ans,
s’intéresse aux entreprises de moins de 6 salariés. L’édition
de 2012 auprès d’un échantillon de 14 000 entreprises a
servi à évaluer le poids des entreprises sans salarié dans
chaque secteur d’activité.
La régionalisation de la valeur ajoutée des industries
manufacturières hors tabac est réalisée à un niveau détaillé
pour les sous-secteurs suivants :
• Industries agro-alimentaires ;
• Textile, habillement et cuir ;
• Industries diverses ;
• Produits pétroliers raffinés et de la cokéfaction ;
• Industries chimiques ;
• Matériaux de construction, céramique et verre ;
• Industries mécaniques et électriques.
Le calcul s’effectue en trois étapes :
À partir de l’enquête Micro-entreprises, le poids des
entreprises sans salarié est déterminé dans la valeur ajoutée
du secteur. On retire cette partie de la valeur ajoutée totale
du secteur et on la ventile au niveau régional. Pour les
salariés, les données reçues à partir du répertoire
d’établissements couvrent uniquement le domaine privé,
cette partie est ventilée selon les masses salariales.
Pour le secteur public, un travail complémentaire de
recherche par entreprise était nécessaire.
Le schéma ci-dessous résume la méthode d’affectation :
L’affectation de la valeur ajoutée par unité d’activité
économique locale pour toutes les entreprises publiques
ainsi que pour certaines entreprises privées (qui
représentent une part considérable de la VA) permet de
qualifier la méthode de régionalisation de mixte à
l’exception du secteur textile où elle est purement
descendante.
59
Statéco n°113, 2019
L’industrie non manufacturière
L’industrie non manufacturière représente 9 % de la valeur
ajoutée. La méthode de régionalisation de la valeur ajoutée
employée est différente selon les sous-secteurs.
Pour l’extraction de pétrole et du gaz naturel, la valeur
ajoutée est répartie selon la production dans chaque région
pour les deux produits caractéristiques du secteur. La
méthode utilisée est donc une méthode descendante.
Pour le secteur de l’eau, la répartition est scindée en deux,
l’eau potable et l’eau agricole. Pour l’eau potable,
l’indicateur utilisé est le volume d’eau traité prêt à la
distribution (m3) dans les stations de traitement ainsi que
les ressources propres à chaque région. Pour l’eau agricole,
l’unique information régionale disponible est la recette des
ventes par région pour l’entreprise chargée de la
distribution de l’eau agricole. Cette information a été
utilisée comme indicateur pour répartir la production de
cette branche.
Pour le bâtiment et travaux publics (BTP), dans un premier
temps, l’évaluation des poids des entreprises de moins de
6 salariés et des indépendants dans le secteur comme pour
le cas de l’industrie manufacturière a été indispensable.
Néanmoins, pour les indépendants, la seule source
disponible permettant d’évaluer leur poids est l’enquête
emploi. Ainsi, la valeur ajoutée du BTP est répartie pour
chacune des composantes comme suit :
• VA des indépendants : elle est répartie selon le nombre
des non-salariés du secteur dans l’enquête emploi ;
• VA des unités de production qui emploient moins de
6 salariés : elle est répartie selon le nombre des salariés
du secteur dans l’enquête emploi ;
• VA des unités de production qui emploient plus de
6 salariés : elle est répartie selon la masse salariale
fournie par le répertoire des établissements.
Les services marchands
Les services marchands contribuent à près de la moitié de
la valeur ajoutée : 45 % (dont 10 % pour le commerce).
Leur régionalisation suit des méthodes spécifiques à
chacun d’entre eux compte tenu de la diversité de ces
secteurs.
Le commerce est un secteur essentiellement informel en
Tunisie aussi l’opération de répartition régionale de
l’activité commerciale a été articulée avec les données de
l’enquête emploi pour la régionalisation de la valeur
ajoutée du secteur.
Pour le transport, le secteur a été découpé en six sous-
secteurs. Nous ne détaillerons ici que le sous-secteur du
transport urbain et routier, à titre d’exemple. La répartition
a été faite pour les trois produits caractéristiques de ce
sous-secteur.
Pour le transport régulier de voyageurs, cette activité est
assurée par des équipements mobiles qui ne peuvent pas
être considérés comme unités de production. Ils devraient
être attachés à l’unité locale où ils sont basés (ou à partir
desquels ils sont exploités). Ainsi, le travail consiste à
identifier les sociétés de transports publiques ainsi que
leurs champs d’activité géographiques, certaines sociétés
étant multirégionales. Dans ce cas, l’affectation a été faite
par société par le biais du nombre de bus alloués à chaque
gouvernorat.
Pour le transport de voyageurs par taxis et par louages, la
répartition pour ce service a été faite par le biais du nombre
total par régions de taxis, louages, transports ruraux et
transports terrestres des personnes.
Enfin pour le transport routier de marchandises, nous
disposons des données sur le parc de transport de
marchandises ainsi que sur la capacité théorique moyenne,
la charge utile totale par région a été estimée et a servi
comme indicateur de répartition.
La valeur ajoutée des institutions financières (sous-secteur
des institutions financières monétaires) est régionalisée
selon plusieurs méthodes en fonction de la disponibilité des
informations. Compte tenu du fait que la VA du secteur est
déterminée selon l’égalité (VA = EBE + autres impôts sur
la production + salaires), l’EBE et autres impôts sur la
production sont attribués à la capitale qui abrite tous les
sièges sociaux de ces institutions. Les salaires de la Banque
centrale (BCT) et des banques publiques sont répartis en
fonction du nombre d’agences par gouvernorat. Les
salaires des banques privées sont répartis en fonction de la
décomposition régionale de la masse salariale tirée du
répertoire des établissements. Concernant le sous-secteur
des assurances, il s'agit de l'activité des institutions mères
qui sont toutes localisées dans la région du Grand Tunis et
la valeur ajoutée est donc attribuée à cette région. Enfin,
pour les auxiliaires financiers la régionalisation est
effectuée par société et pour les auxiliaires d’assurance le
nombre des intermédiaires par région a été utilisé comme
indicateur de régionalisation.
Les services non marchands
Ce secteur représente 21 % de la valeur ajoutée totale en
2017. Il couvre les activités de l’administration centrale, de
la sécurité sociale et des collectivités locales. Le calcul de
la valeur ajoutée régionale a été fait pour chacun des sous-
secteurs comme suit :
- Administration centrale : les données administratives sur
le nombre de fonctionnaires au niveau régional n’étant pas
disponible, l’indicateur utilisé était le nombre d’employés
du secteur « éducation santé et services administratifs » de
l’enquête emploi, duquel on a enlevé le nombre des
employés de la santé et de l’enseignement public ;
- Collectivités locales : l’indicateur utilisé est leur masse
salariale (l’information est exhaustive et issue du fichier du
ministère des finances) ;
- Sécurité sociale obligatoire : l’indicateur utilisé pour
répartir la valeur ajoutée du secteur est le nombre des
affiliés aux caisses de sécurité sociale par région ;
- Éducation publique : l’indicateur utilisé pour répartir la
valeur ajoutée du secteur est la masse salariale par région.
Un indicateur est développé en utilisant les données des
salaires moyens et le nombre des enseignants par cycle ;
- Santé publique : l’indicateur utilisé est la masse salariale
pour les corps médicaux et paramédicaux (infirmiers,
60
Statéco°113, 2019
techniciens supérieurs, et médecins) par région. Cet
indicateur a été synthétisé à partir des données sur l’effectif
du corps médical par région (nombre de médecins,
infirmiers et techniciens supérieurs (ministère de la Santé))
et le salaire moyen des médecins et des techniciens de la
santé publique selon la publication de l’INS
« Caractéristiques des agents de la fonction publique ».
Résultats
L’exercice de régionalisation du PIB confirme, en le
quantifiant, le constat de concentration de l’activité
productive sur le littoral oriental de la Tunisie, où le
PIB/habitant est le plus élevé et le taux de pauvreté le plus
bas ; en sens inverse, les régions intérieures sont des
régions agricoles pauvres et peu développées.
▪ Deux régions, qui sont les plus riches de la Tunisie,
concentrent plus de 60 % de la richesse générée dans le
pays, le Grand Tunis (34,3 %) et la région Centre-Est
(26,1 %). Ces deux régions, qui sont aussi les plus peuplées
rassemblent près de la moitié de la population totale de la
Tunisie respectivement 24,1 % et 23,6 % du total en 2014.
Leur profil productif est très différent.
- Le Grand Tunis concentre une partie importante de sa
valeur ajoutée dans les activités des services marchands
(55 %). Par exemple, le secteur des services financiers est
très concentré dans le Grand Tunis (83 %). L’activité de
l’industrie manufacturière est également importante (20 %
de la valeur ajoutée) ;
- La région Centre-Est concentre quant à elle 56 % de
l’industrie pétrolière et gazière nationale (15 % de la valeur
ajoutée régionale) ; l’industrie manufacturière est
également importante (19 % de la valeur ajoutée) pour
cette région côtière.
▪ Les deux régions suivantes représentent à elles deux un
peu moins du quart du PIB :
- La région Nord-Est est celle où la part de l’activité de
l’industrie manufacturière est la plus importante (25 % du
total), avec de nombreuses industries du textile-
habillement et mécanique d’exportation ; l’agriculture est
aussi très active (Cap Bon en particulier) ;
- Une autre région crée de la richesse grâce au secteur de
l’extraction du pétrole et du gaz naturel. Ce secteur génère
27 % de la valeur ajoutée de la région Sud-Est. Les autres
secteurs sont, en proportion, assez proches de ce qui est
observé au niveau national.
▪ Les trois régions restantes, qui sont aussi les plus
pauvres de la Tunisie, sont par ordre décroissant de PIB :
le Nord-Ouest, le Centre Ouest et le Sud-Ouest (région la
moins peuplée de Tunisie, avec à peine plus de 500 000
habitants). Leurs caractéristiques sectorielles sont assez
similaires, en particulier en ce qui concerne le poids de
l’agriculture et de celui des services d’administration
publique. Pour les trois régions, la valeur ajoutée de
l’agriculture dépasse le cinquième du total et va jusqu’à 26 %
pour la région Nord-Ouest alors que la moyenne nationale
est proche de 10 %. Pour les services d’administration
publique la part dans la valeur ajoutée est de 30 %, ce qui
est le double de ce qui est observé ailleurs.
Ces différences dans le tissu productif de l’ensemble des
régions se ressentent lorsque l’on compare leur PIB par
habitant. Le PIB par habitant de la Tunisie est d’environ
6900 dinars par personne (2013). Seules trois régions
dépassent ce seuil avec dans l’ordre : Grand Tunis (9900
DT), Centre-Est (7700 DT) et Sud-Est (7100 DT).
Pour les autres, seule la région Nord Est est proche de la
moyenne nationale (6500 DT). En plus de sa propre
dynamique, cette région périphérique du Grand Tunis
bénéficie des effets d’entraînement de l’activité dans et
autour de la capitale. Dans les régions intérieures, le PIB
par habitant est très inférieur : il s’élève à 5000 DT dans le
Sud-Ouest, à 4400 DT dans le Nord-Ouest et enfin et à
seulement 3300 DT dans la région Centre-Ouest, soit la
moitié de la moyenne nationale.
Les régions au plus fort PIB/habitant sont aussi celles avec
le plus bas taux de pauvreté (graphique 1), même si la
relation n’est pas totalement linéaire. Par exemple, malgré
un PIB/habitant très inférieur à celui de la région Centre-
Est, le taux de pauvreté de la région Nord-Est est également
bas (11,6 % contre 11,5 %, pour un taux national de
15,2 %). En sens inverse, malgré son PIB/habitant
supérieur à la moyenne nationale du fait de l’exploitation
du pétrole-gaz, la région Sud-Est a un taux de pauvreté très
élevé (18,6 %) dans la mesure où les revenus pétroliers
génèrent peu d’emplois et de revenus localement.
Graphique 1
PIB/habitant (milliards de dinars) et pauvreté par région (%)
Source : Enquête nationale sur le budget, la consommation et le niveau de vie
des ménages, 2015, INS Tunisie
Échelle de gauche : PIB/habitant . Échelle de droite : taux de pauvreté.
0
5
10
15
20
25
30
35
0
2000
4000
6000
8000
10000
12000
GrandTunis
CentreEst
Sud Est Total Nord Est SudOuest
NordOuest
CentreOuest
PIB/H (dinars) Taux de pauvreté (%)
61
Statéco n°113, 2019
Références bibliographiques
Statistiques Tunisie (à paraitre), « Valeurs ajoutées et PIB par région : concepts, sources de données et méthodes »,
document méthodologique.
Union Européenne (2013), « Système européen des comptes, SEC 2010 », Eurostat, Commission européenne, Chapitre
13, 762p.
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Statéco n°113, 2019
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Mouna Zgoulli est directrice centrale de l’informatique, la diffusion et la coordination à Statistiques Tunisie,
La réforme juridique de l’activité
statistique en Tunisie M. Zgoulli*
La révision de la loi statistique en Tunisie vise à pallier les insuffisances du système statistique national (SSN) dans un nouveau contexte socio-politique afin d’améliorer l’efficacité, la qualité et le respect des principes fondamentaux de la statistique publique. Le renforcement du dispositif législatif dans le domaine de la statistique publique concerne particulièrement, d’une part, la garantie de l’indépendance professionnelle et, d’autre part, l’amélioration de la répartition des responsabilités de coordination et de gestion du SSN entre le Conseil national de la statistique (CNS) et l’Institut national de la statistique (INS). L’article décrit ensuite la démarche d’élaboration du nouveau projet de loi en détaillant les principales nouveautés. Enfin il dresse les perspectives liées à la mise en œuvre de la nouvelle loi et la réorganisation de l’INS et du CNS qu’elle implique.
Introduction
L’expérience tunisienne en matière de réforme de son
système statistique national (SSN) a démarré en 1999
par la promulgation de la loi n° 99-32 du 13 avril 1999
relative au SSN et par la publication d’un certain
nombre de décrets d’application.
Une nouvelle réforme du SSN est devenue
indispensable afin de pallier des insuffisances et
difficultés constatées pour répondre aux attentes des
utilisateurs et fournir à la société tunisienne les
informations nécessaires à son développement dans un
nouveau contexte démocratique. Pour bien mener cette
réforme, une évaluation globale a été menée en 2014
dans le cadre de la coopération avec Eurostat. Cette
évaluation a conclu que le système statistique tunisien,
disposait de bases solides mais qu’une profonde
réforme était nécessaire pour qu’il atteigne les trois
objectifs essentiels d’efficacité, de qualité et de respect
des principes fondamentaux. Cette réforme nécessite
essentiellement une révision de la loi statistique via le
renforcement des dispositions législatives garantissant
le respect des principes fondamentaux des statistiques
officielles, en particulier l’indépendance
professionnelle des statisticiens.
Cette réforme, importante pour l’accompagnement du
processus de transition et le renforcement des aspects
de gouvernance démocratique en Tunisie, a été intégrée
dans le programme d’appui à la relance financé par
l’Union européenne. Un projet de jumelage a été lancé
fin 2015 avec pour objectifs la mise en place d’un cadre
législatif et institutionnel propice à une meilleure
gouvernance en matière de statistique publique
(encadré 1) et la consolidation du rôle de l’Institut
national de la statistique (INS) comme acteur principal
du SSN.
Le projet de nouvelle loi est actuellement articulé
autour de six sections qui couvrent l’ensemble des
questions juridiques portant sur l’organisation et la
gestion de l’activité statistique à savoir, (1) l’objectif et
la portée de la loi, (2) le SSN, (3) la production
statistique, (4) l’accès aux données, (5) les infractions et
pénalités, (6) les dispositions transitoires et l’entrée en
vigueur. Les travaux autour de la nouvelle loi
statistique ont débuté en 2016 et le texte est
actuellement au niveau de la Présidence du
gouvernement où il a été approuvé par le Conseil des
ministres. Il sera soumis prochainement à l’assemblée
des représentants du peuple tunisien.
Ainsi, afin de présenter la réforme juridique de
l’activité statistique en Tunisie, cet article s’interroge
sur les raisons qui ont poussé à la révision de la loi
statistique (partie 1), sur les enjeux d’une telle révision
(partie 2) et sur la démarche d’élaboration du nouveau
projet de loi (partie 3). Il souligne en outre les
principales nouveautés de la loi statistique et discute
des perspectives.
64
Statéco n°113, 2019
Encadré 1 : la gouvernance statistique
Il existe plusieurs définitions du mot « gouvernance ».
Communément on en donne la définition suivante : « La
gouvernance est, de façon générale, un concept représentant
la manière dont un domaine d’activités est gouverné. La
gouvernance renvoie à un système d’entités décisionnelles
qui dirige un certain domaine d’activités, autrement dit à un
« système de gouvernance », impliquant notamment une
structure de gouvernance et un dynamisme de système
(processus de gouvernance, activités de gestion, etc.) ».
Dans le domaine de la statistique publique, on peut définir le
concept de « gouvernance statistique » comme la manière
dont le système statistique public d’un pays est organisé et
géré pour remplir sa mission, à savoir « fournir aux
administrations publiques, aux institutions régionales et
internationales, aux entreprises et organisations non
gouvernementales, aux médias, aux chercheurs et au public
des informations statistiques à jour se rapportant à
l’ensemble des domaines de la vie du pays notamment
économique, social, démographique, culturel et
environnemental ».
La gouvernance statistique englobe donc un ensemble
d’institutions, de structures, de valeurs, de règles et de
mécanismes qui tous concourent au bon fonctionnement de la
statistique publique. Elle concerne notamment les éléments
suivants :
- Le cadre juridique : la loi statistique et ses textes
d’application (décrets, arrêtés, décisions, règlements, etc.) ;
- L’organisation du système statistique qui dépend en grande
partie de son caractère centralisé ou décentralisé avec
différentes variantes possibles ;
- Les organes de régulation du système ;
- La coordination et la concertation entre les acteurs du
système : producteurs et utilisateurs de statistiques
officielles ;
- La programmation des activités statistiques ;
- La gestion des ressources humaines ;
- Le financement de la statistique publique.
Pourquoi faut-il réviser la loi
statistique ?
La loi de 19991 rassemblait pour la première fois dans
le même texte des dispositions relatives à plusieurs
aspects de l’activité statistique : la structure du SSN, sa
mission et le rôle de chacune de ses composantes, ainsi
que les principes fondamentaux qui régissent l’activité
statistique dans le pays.
La loi est exhaustive en matière de missions du SSN.
Certaines sont communes à toutes les structures
statistiques publiques (SSP), à savoir la collecte des
données, leur stockage, leur traitement, leur analyse et
leur diffusion. D’autres ne concernent que le Conseil
national de la statistique (CNS) et l’Institut national de
la statistique (INS). Le premier est notamment chargé
de la coordination institutionnelle et fonctionnelle, de
la programmation de l’activité statistique et de la
concertation entre les producteurs et les utilisateurs de
l’information statistique. Le second, en tant que
1 Loi n°99-32 du 13 avril 1999 relative au système national
de la statistique.
structure statistique centrale, est chargé de la
coordination technique des activités statistiques. Enfin,
parmi les missions du système national de la statistique,
la loi tunisienne inclut celle d’assurer la formation
initiale et continue du personnel exerçant dans le
domaine de la statistique, principalement assurée par
l’École nationale de la statistique.
Cependant la loi de 1999 a montré ses limites sur deux
aspects importants. D’une part, elle ne garantit pas
totalement le respect des principes fondamentaux de la
statistique publique, notamment en ce qui concerne
l’indépendance professionnelle. D’autre part, en
répartissant la responsabilité de la coordination et de la
gestion du SSN entre le CNS et l’INS sans établir une
hiérarchie claire entre eux, elle crée des conditions de
dysfonctionnement qui restreignent l’efficacité du SSN
et la qualité de ses productions. Ainsi l’INS n’est pas
en mesure d’assurer pleinement son rôle de
coordination technique en prenant les initiatives
nécessaires vis-à-vis des SSP. Le CNS peine également
à coordonner toutes les productions statistiques des
structures statistiques publiques trop nombreuses par
ailleurs. Ces difficultés ont été amplifiées du fait du
bouleversement politique de 2011 au cours duquel le
système statistique a fait l’objet de critiques virulentes
de la part des médias et de certains utilisateurs. Ces
dysfonctionnements rendent nécessaire un important
effort d’ajustement et de révision des textes pour une
réforme en profondeur touchant plusieurs aspects,
notamment législatifs, de processus de production et de
ressources humaines.
Au tournant d’une nouvelle étape de l’histoire de la
Tunisie, l’appareil statistique tunisien est confronté à
une demande forte et accrue d’information statistique
émanant de plusieurs opérateurs et acteurs publics, des
médias et du grand public. Cela montre la prise de
conscience du rôle important joué par les données
chiffrées dans le débat public. Parallèlement à cette
évolution, les doutes sur la pertinence et la crédibilité
des statistiques publiques sont de plus en plus
manifestes, comme le montrent les interrogations
autour des chiffres de la pauvreté, du chômage et de
l’inflation.
Encadré 2 : les expériences maghrébines en matière de
révision de loi statistique
Au cours des dernières années, l’environnement de la
statistique officielle a connu des changements importants
caractérisés par de nouvelles méthodes de production des
données, l’utilisation de technologies avancées dans les
travaux statistiques, des sources de données de plus en plus
variées et une demande des utilisateurs plus pressante et plus
exigeante. Ces changements doivent être reflétés dans les
législations statistiques de tous les pays.
Depuis l’adoption des principes fondamentaux de la
statistique officielle en 1994 et de la Charte africaine de la
statistique en 2009, les pays du Maghreb ont entrepris la
réflexion pour la révision de leurs législations statistiques
65
Statéco n°113, 2019
pour se conformer aux dispositions de ces deux textes.
L’expérience des deux autres pays du Maghreb (Algérie et
Maroc) est résumée ci-après.
La loi statistique algérienne a été promulguée en janvier 1994.
Elle était avant-gardiste par rapport aux principes
fondamentaux de la statistique des Nations unies (avril 1994).
Elle couvre bien l’ensemble du SSN, avec un CNS et des
représentants de la société civile. Pour le Maroc, la loi
statistique en vigueur est plus ancienne : elle date de 1968 et
s’aligne avec les principes fondamentaux de la statistique
officielle au niveau du principe 1 (indépendance
professionnelle), du principe 2 (mandat pour la collecte des
données) et du principe 5 portant sur la confidentialité et le
secret statistique.
Les cadres juridiques régissant les systèmes statistiques
algérien et marocain ne répondent plus aux évolutions qu’ont
connues les structures produisant l’information statistique, ni
aux nouveaux besoins informationnels, ni aux défis que
devrait relever le système statistique national que ce soit sur
le plan méthodologique, organisationnel, thématique ou
technologique.
Des réflexions sont en cours en Algérie mais le processus de
révision est beaucoup plus avancé au Maroc où il a été entamé
depuis les années 2000 et a connu plusieurs mises à jour dont
la dernière est soumise à examen par un comité
interministériel.
Le nouveau projet de loi marocain a pour objet de définir les
principes fondamentaux régissant les statistiques officielles,
de fixer le cadre juridique applicable à leur collecte,
traitement, diffusion et archivage et à définir la mission
dévolue au système statistique national et sa composition.
Pour améliorer la gouvernance du SSN, le projet de loi
institue la création du CNS qui a pour mission de coordonner
les programmes et activités statistiques et d’en évaluer la
qualité et le respect des principes et normes en vigueur au
niveau national et international. Le maintien de l’octroi de
visa/label pour toute opération statistique mené par le SSN
permettrait à l’autorité statistique (HCP) de jouer son rôle de
garant du respect de la qualité et des normes internationales.
Quels sont les enjeux de cette
révision ?
L’évolution du système statistique tunisien ne peut se
faire que par l’alignement de la gouvernance statistique
sur les standards internationaux.
Une véritable indépendance
professionnelle de la statistique publique
La statistique publique est une activité confiée à la
sphère administrative ce qui fait naître un certain
scepticisme sur la crédibilité des statistiques,
notamment sur le risque de manipulation par les
autorités politiques. La gouvernance des services
statistiques est de ce fait essentielle pour éviter les
interférences, d’où l’importance de l’indépendance
scientifique et de l’autonomie professionnelle de
l’activité statistique pour garantir l’impartialité du
système, l’objectivité des statistiques publiées et
obtenir la confiance du public dans la fiabilité de ces
statistiques (encadré 3).
Encadré 3 : le concept d’indépendance dans la statistique
publique
Dans la littérature sur la statistique officielle, on trouve deux
concepts étroitement liés mais qu’il convient de distinguer :
« l’indépendance scientifique » et « l’indépendance
professionnelle ».
Le principe 2 de la Résolution de la Commission de
statistique des Nations unies d’avril 1994 sur les « Principes
fondamentaux de la statistique publique » (PFSO) peut être
considéré comme une définition de l’indépendance
scientifique. Il est libellé comme suit : « Pour que se
maintienne la confiance dans l’information statistique
officielle, les organismes responsables de la statistique
doivent déterminer, en fonction de considérations purement
professionnelles, notamment de principes scientifiques et de
règles déontologiques, les méthodes et les procédures de
collecte, de traitement, de stockage et de présentation des
données statistiques ».
La Charte africaine sur la statistique adoptée en 2009 reprend
la définition très voisine suivante, en son article 3, sous la
rubrique « Indépendance professionnelle » :
« Indépendance scientifique » : les autorités statistiques
doivent pouvoir exercer leurs activités selon le principe de
l’indépendance scientifique, en particulier vis-à-vis du
pouvoir politique et de tout groupe d’intérêt ; cela signifie
que les méthodes, concepts et nomenclatures utilisés pour
l’exécution d’une opération statistique ne doivent être choisis
que par les autorités statistiques sans aucune influence de
quelque forme que ce soit et dans le respect des règles
d’éthique et de bonne conduite ».
Pour la Charte africaine de la statistique, l’indépendance
scientifique est un aspect de l’indépendance professionnelle
qui englobe les trois autres aspects suivants :
« l’impartialité », « la responsabilité » et « la transparence ».
L’impartialité signifie que « les autorités statistiques doivent
produire, analyser, diffuser et commenter les statistiques
publiques dans le respect de l’indépendance scientifique et de
manière objective, professionnelle et transparente, plaçant
tous les utilisateurs sur un pied d’égalité » (Cf. le Principe 6
du Code de bonnes pratiques de la statistique européenne qui
met ensemble l’impartialité et l’objectivité). Ces exigences se
retrouvent pour l’essentiel dans le principe 1 des PFSO.
La transparence signifie que « les autorités statistiques
doivent fournir, en fonction de normes scientifiques, des
informations sur les sources, les méthodes et les procédures
qu’elles utilisent pour faciliter une interprétation correcte
des données. De plus, les textes législatifs et réglementaires
et toutes dispositions régissant le fonctionnement des
systèmes statistiques doivent être portés à la connaissance du
public » En fait, il s’agit d’une combinaison des principes 3
et 7 des PFSO.
La responsabilité signifie que « les autorités statistiques
doivent recourir à des méthodes de collecte, de traitement,
d’analyse et de présentation des données statistiques claires
et pertinentes. De plus, les autorités statistiques ont le droit
de faire des observations sur les interprétations erronées et
les usages abusifs de l’information statistique qu’elles
diffusent ». Cette définition donnée par la Charte africaine sur
la statistique reprend des éléments des principes 1 et 4 des
PFSO.
Le Code de bonnes pratiques de la statistique européenne a
identifié des indicateurs pour juger du respect de
l’indépendance professionnelle (Principe 1 du Code) et des
15 autres Principes du Code.
66
Statéco n°113, 2019
Une consolidation de l’INS
Un plan de modernisation de l’INS constitue l’axe
fondamental autour duquel se fera l’évolution du
système global. Il est important de s’engager dans une
démarche de certification en se focalisant davantage sur
la qualité du processus de production et en s’appuyant
sur les possibilités offertes par les nouvelles
technologies.
La réforme implique aussi une consolidation des outils
de la coordination statistique en mettant en place une
politique proactive vis-à-vis des SSP visant à
harmoniser les nomenclatures, définitions, concepts et
méthodologies utilisées et formaliser les canaux
susceptibles de garantir une meilleure fluidité dans la
circulation de l’information et des fichiers entre les
différentes sources.
Une revalorisation de l’INS
La composante « ressources humaines » figure parmi
les principales faiblesses du système. Elle mérite une
attention particulière et une revalorisation pour
accompagner la réforme par un renforcement des
ressources humaines et une utilisation plus judicieuse
des compétences et de leur maillage.
La consolidation du rôle de l’INS en tant que
responsable de la coordination technique et garant de la
qualité de la production statistique ne sera renforcée
que par la création d’un centre de formation pour
l’ensemble des ressources humaines du système
statistique. Ce centre pourra assurer des formations sur
mesure, des formations continues sur la pratique
statistique et s’ouvrir à d’autres catégories
d’utilisateurs, comme celle des médias, afin de
promouvoir la culture statistique. Cette structure pourra
également évoluer vers un centre de recherche en
statistique moyennant des partenariats avec le milieu
universitaire.
La démarche d’élaboration du
nouveau projet de loi
Afin d’initier le processus de révision de la loi, une
Commission de la réforme créée début 2016 au sein du
CNS a regroupé des représentants du CNS, de l’INS,
des principales SSP et différentes catégories
d’utilisateurs. Sa mission a consisté à livrer des
propositions concernant la réforme et les améliorations
à apporter à la loi statistique afin de pouvoir honorer les
engagements pris par la Tunisie dans le cadre du
Programme d’appui à la relance (PAR IV) financé par
l’Union européenne.
Cette réforme vient appuyer le processus de transition
démocratique de la Tunisie inscrit dans le programme
PAR IV dont l’objectif est le renforcement
institutionnel de la Tunisie à travers celui du système
statistique et de la gouvernance démocratique. À cet
effet, un appui a été sollicité via le mécanisme de
jumelage proposé par l’UE dans le cadre du Programme
d’appui à l’accord d’association et à la transition
(P3AT), avec pour objectif le développement des
capacités de l’administration tunisienne, tant au niveau
central que régional. Cet appui a permis à l’INS de
conduire un jumelage intitulé « Modernisation de
l’appareil statistique tunisien » en partenariat avec
l’Institut national de la statistique et des études
économiques français (Insee) et l’Institut de la
statistique italien (Istat), et avec l’appui de Statistiques
Lituanie.
Ce jumelage visait à instaurer un système d’information
statistique publique cohérent, performant et permanent
à travers deux objectifs spécifiques :
▪ Proposer un cadre législatif et institutionnel propice
à une meilleure gouvernance en matière de
statistique publique qui jouerait pleinement et
efficacement son rôle ;
▪ Consolider le rôle de l’INS comme acteur principal
du SSN.
Le volet du jumelage dédié au cadre législatif et
institutionnel du système statistique tunisien a permis à
la commission de la réforme de bénéficier de
l’expertise de l’Insee et de l’Istat en termes de
gouvernance statistique des systèmes français et italien
et des recommandations européennes sur le sujet afin
d’en tirer les enseignements qui pourraient être utiles
pour ce type de réformes.
État des lieux
Une première mission d’identification a permis aux
experts du jumelage de prendre connaissance de
l’organisation institutionnelle du système statistique
tunisien et de discuter avec les membres de la
commission, et particulièrement l’INS, des objectifs
principaux de la révision qui ont été formulés par le
parties prenantes tunisiennes se basant sur les
recommandations formulées par l’évaluation
d’Eurostat. Les experts du jumelage ont soutenu sans
réserve ces objectifs généraux qui ont été identifiés
comme des pistes d’amélioration de la loi statistique
Tunisienne, à savoir :
- Garantir l’indépendance professionnelle des
statistiques publiques ;
- Garantir une production de statistiques dont la
qualité puisse faire consensus dans la société
tunisienne ;
- Définir de façon plus adaptée le périmètre du SSN
et ses composantes ;
- Redéfinir les attributions en matière de
coordination ;
- Donner un cadre légal à l’accès aux données
individuelles à des fins de recherche ;
- Améliorer le mode d’élaboration du programme
statistique ;
67
Statéco n°113, 2019
- Renforcer le droit d’accès des statisticiens aux
données administratives.
Une visite d’étude d’une délégation de la commission a
ensuite été organisée en Italie à l’Istat puis en France à
l’Insee afin de s’inspirer de l’expérience européenne et
du rôle tenu par Eurostat, notamment en matière de
codes de bonnes pratiques.
Les leçons tirées de cette visite se rapportent
principalement aux aspects suivants :
▪ Le rôle primordial du cadre législatif pour le
développement des systèmes statistiques qui doit
obligatoirement garantir le respect total des
principes fondamentaux de la statistique et le
renforcement du principe de l’indépendance du
système statistique dans la loi afin de garantir sa
crédibilité et conserver la confiance des utilisateurs
et des déclarants ;
▪ La définition fondamentale des statistiques
officielles basées sur les principes fondamentaux de
la statistique officielle de l’Organisation des
Nations unies et les critères permettant de désigner
les producteurs de statistiques officielles ;
▪ Le rôle primordial de l’INS dans la coordination
entre les producteurs de statistiques officielles et la
distinction avec les fournisseurs de données ;
▪ Le conseil de la statistique comme représentant
essentiellement les utilisateurs et les communautés
d’utilisateurs, et non les producteurs ;
▪ L’importance du programme statistique qui doit
être établi par l’INS à l’aide des contributions des
autres producteurs de statistiques officielles ;
▪ La nécessité d’une réorganisation de l’INS afin de
garantir une meilleure gouvernance.
Mise en œuvre
À la lumière des enseignements tirés lors de ces visites
et des présentations des parties prenantes des systèmes
statistiques français et italiens et des logiques de
l’organisation de la gouvernance de ces systèmes selon
les directives d’Eurostat et le code de bonnes pratiques
européen, la Commission de la réforme a engagé une
réflexion autour d’une loi générique de la statistique
officielle. Le projet a été élaboré conjointement avec
l’Association européenne de libre-échange et Eurostat
dans le cadre d’un projet plus vaste de la CEE relatif au
renforcement des capacités statistiques, financé par le
Compte de l’ONU pour le développement. L’objet de la
loi générique est de fournir une solide référence pour
mettre en place les bases juridiques nécessaires au
fonctionnement du système statistique et à la
production de statistiques officielles de qualité. Les
principaux éléments pris en considération dans la loi
générique sont les suivants :
▪ Définition des statistiques officielles, à distinguer
des informations administratives ;
▪ Définition et description des producteurs de
statistiques officielles ;
▪ Principe de l’indépendance professionnelle des
organisations et entités produisant des statistiques
officielles ;
▪ Rôle de l’organisme national de statistique en tant
que producteur principal de statistiques officielles et
coordonnateur du système de statistiques officielles
dans le pays ;
▪ Programmation opérationnelle et stratégique, axée
sur les besoins actuels et futurs des utilisateurs ;
▪ Mandat à prévoir pour la collecte de données et
l’accès aux données administratives et autres
sources de données ;
▪ Principes et procédures de traitement de données
statistiques confidentielles ;
▪ Gestion de la qualité, eu égard au point de vue des
utilisateurs ;
▪ Principes relatifs à la diffusion des statistiques
officielles auprès de tous les groupes d’utilisateurs
concernés.
À ce stade de la réflexion, deux options se présentent à
la commission :
- Suivre la logique de la loi générique et extraire ce
qui relève du niveau de la loi, du niveau des autres
textes légaux (décrets, arrêtés) et du niveau de la
charte en proposant des adaptations ;
- Procéder en proposant des amendements aux textes
tunisiens existants (loi statistique de 1999, décrets
et arrêtés, charte tunisienne) en conformité avec les
principes fondamentaux de la statistique.
Chacune des approches présente des avantages et des
inconvénients : le premier choix qui consiste à procéder
à partir du texte de la loi générique a l’avantage de
proposer des textes qui sont plus cohérents et plus
homogènes en harmonie avec les recommandations des
Nations unies. Le deuxième choix qui consiste à
modifier des textes existants montre qu’il existe une
situation de départ déjà fort appréciable, et que les
amendements qui seraient proposés sont davantage des
évolutions plutôt qu’une rupture radicale.
68
Statéco n°113, 2019
Encadré 4 : la Charte africaine de la statistique
La Charte africaine de la statistique, ci-après dénommée la
Charte, a été adoptée par la douzième session de la
Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement de l’Union
africaine tenue à Addis Abéba (Éthiopie) le 4 février 2009.
L’Afrique est ainsi le premier et le seul continent qui dispose
d’un instrument juridique international contraignant ayant
pour objectif de fixer les règles qui doivent régir la statistique
publique dans tous ses États membres.
La Charte vise dix objectifs :
1. Servir de cadre d’orientation pour le développement de la
statistique africaine, notamment la production, la gestion et la
diffusion des données et de l’information statistique aux
niveaux national régional et continental ;
2. Servir d’instrument et d’outil de plaidoyer pour le
développement de la statistique sur le continent ;
3. Contribuer à l’amélioration de la qualité et à la
comparabilité des données statistiques nécessaires pour le
suivi du processus d’intégration économique et sociale de
l’Afrique ;
4. Promouvoir le respect des principes fondamentaux de la
production, du stockage, de la gestion, de l’analyse, de la
diffusion et de l’utilisation de l’information statistique sur le
continent africain ;
5. Contribuer au renforcement de la coordination des activités
statistiques et des institutions statistiques en Afrique y
compris la coordination des interventions des partenaires aux
niveaux national, régional et continental ;
6. Renforcer les capacités institutionnelles des structures
statistiques aux niveaux national, régional et continental en
assurant leur autonomie de fonctionnement et en veillant
particulièrement à ce qu’elles disposent des ressources
humaines, matérielles et financières adéquates ;
7. Servir de référence pour l’exercice du métier de statisticien
africain, de code d’éthique professionnelle et de bonnes
pratiques ;
8. Promouvoir une culture faisant de l’observation des faits la
base de la formulation, du suivi et de l’évaluation des
politiques ;
9. Contribuer à l’amélioration et au fonctionnement effectif
du système statistique africain ainsi qu’au partage
d’expériences ;
10. Éviter les duplications dans la mise en œuvre des
programmes statistiques.
S’inspirant des Principes fondamentaux de la statistique
officielle des Nations unies adoptés en 1994, la Charte a
retenu six principes ainsi libellés : l’indépendance
professionnelle (Principe 1) ; la qualité (Principe 2) ; le
mandat pour la collecte des données et des ressources
(Principe 3) ; la diffusion (Principe 4) ; la protection des
données individuelles, des sources d’information et des
répondants (Principe 5) ; la coordination et la coopération
(Principe 6).
La Charte est entrée en vigueur le 8 février 2015. Plusieurs
lois statistiques récentes de pays africains ont pris la Charte
comme référence pour leur élaboration.
Les experts ont soutenu le choix de la Commission
d’adopter une forme de gouvernance sur un modèle
internationalement partagé, permettant de renforcer la
qualité des statistiques produites :
• Instaurer un conseil principalement tourné vers
l’ensemble des utilisateurs (ministères, autres
administrations, associations d’entreprises, de salariés,
chercheurs, médias) fera progresser la pertinence des
statistiques produites ;
• Transférer à l’INS le soin de proposer un programme
statistique cohérent et compatible avec les ressources
disponibles, en fonction des conditions de production
qui sont requises pour des raisons techniques s’impose
car l’INS est le seul à disposer des compétences et de la
masse critique requises ;
• Confronter le programme statistique ainsi proposé par
l’administration statistique aux usagers de cette
administration (qu’ils soient internes ou externes à
l’administration publique) est un principe de bonne
gouvernance très largement reconnu.
Sur la base du manuel d’organisation statistique des
Nations unies de 2005 décrivant les principes et mesures
recommandées pour le fonctionnement et l’organisation
d’un système statistique officiel, une première version
de projet de loi a été élaborée par la Commission.
Discuté, amendé et validé au sein du CNS, le texte a été
soumis au ministère de tutelle, le ministère du
développement et de la coopération internationale. Ce
dernier a créé un groupe de travail formé de
représentants juridiques du ministère avec l’INS et le
CNS pour étudier les aspects juridiques du projet de loi
et l’ajuster selon les particularités du pays, son histoire
et ses traditions statistiques. Ces ajustements ont
concerné principalement la structuration du modèle de
gouvernance, les missions et prérogatives des
composantes du système statistique et les mécanismes
de coordination.
Après la finalisation du projet de loi, un séminaire a été
organisé afin d’avoir une concertation plus large
regroupant des représentants de l’administration
publique, du secteur privé, des universitaires, de la
société civile et des médias. Différentes présentations
ont été partagées concernant la démarche entreprise
pour l’élaboration du nouveau projet de loi en se basant
sur une étude comparée des différents systèmes
statistiques reconnus à l’échelle mondiale et du choix
de la loi générique comme base de travail.
Les principales nouveautés de la
loi statistique
Objectif et portée de la loi
La loi établit le cadre juridique applicable à
l’élaboration, à la production et à la diffusion des
statistiques officielles qui ont été définies clairement
comme étant :
- Des statistiques décrivant de manière
représentative les phénomènes économiques,
démographiques, sociaux et environnementaux ;
- Élaborées, produites et diffusées conformément
aux dispositions de la loi et aux principes
fondamentaux de la statistique officielle de
l’Organisation des Nations unies ;
69
Statéco n°113, 2019
- Désignées comme des statistiques officielles dans
les programmes statistiques.
Les dispositions de la loi s’appliquent à tous les
producteurs de statistiques selon les principes
fondamentaux de la statistique officielle. Notamment
selon le principe de l’indépendance professionnelle qui
signifie que les producteurs décident, en toute
indépendance et hors de toute pression et ingérence de
la part de sources politiques ou autres sources
extérieures, de l’élaboration, de la production et de la
diffusion des statistiques.
Système statistique national
Cette section est consacrée à l’organisation structurelle
des composantes du SSN. Le CNS y tient un rôle
stratégique tandis que l’INS est le principal producteur
de statistiques officielles et le responsable de la
coordination technique avec une définition des
structures publiques productrices de statistiques et des
structures de formation en statistique.
Les principales nouveautés de la loi visent à :
Renforcer le rôle du CNS
Le projet de loi renforce le rôle du CNS en tant que
principal organe de concertation, de suivi et
d’évaluation de l’activité statistique dans le pays. Il
assure une dynamique de concertation entre les
utilisateurs et les producteurs de l’information
statistique, ce qui incitera en permanence à
l’amélioration du système. Ainsi, le CNS donne son
avis sur la politique de développement de l’information
statistique et sur les mesures susceptibles d’orienter et
de promouvoir les activités statistiques. Il est également
consulté sur les projets des textes juridiques et
réglementaires relatifs à la statistique.
Afin de mener à bien ses tâches en toute indépendance,
il a été proposé que le CNS devienne un établissement
public à caractère non administratif jouissant d’une
indépendance financière, à la différence de la situation
actuelle du Conseil, où son budget est rattaché au
budget de l’INS.
Assurer l’indépendance de l’INS
Cette section de la loi inclut l’activation des principes
de base de la statistique officielle en attribuant au
gestionnaire de l’INS le rôle de « statisticien en chef »
selon le système des Nations unies en raison de son
importance morale en tant que superviseur des activités
de coordination et de programmation des statistiques
officielles en respectant les principes fondamentaux de
la statistique officielle dans la production statistique.
Afin de garantir l’application du principe fondamental
de la statistique officielle, le principe d’indépendance,
le mandat du « statisticien en chef » est fixé à 5 ans
renouvelable une seule fois et il ne peut être mis fin au
mandat du statisticien en chef avant sa date d’expiration
uniquement pour un motif qui serait contraire aux
principes fondamentaux de la statistique.
Le projet de loi renforce également les fonctions de
l’INS en tant que principal producteur des statistiques
officielles et responsable de la coordination technique
du SSN. Il coordonne ainsi la préparation, le suivi et
l’évaluation des programmes statistiques. Il assure
également la gestion des registres statistiques, la
coopération technique internationale et le
développement des statistiques officielles par la
consolidation des méthodologies et des classifications
harmonisées et le développement des compétences des
statisticiens.
Attribuer un label aux autres producteurs de
statistiques officielles
Le projet de loi prévoit également l’attribution du label
« Structure statistique publique » pour les structures
publiques exerçant des fonctions de production
statistique exclusivement ou partiellement, avec une
indépendance professionnelle, dans le respect des
principes fondamentaux et des dispositions légales en
vigueur.
Production statistique
Cette section de la loi traite du processus statistique afin
de clarifier les divers principes sur lesquels le système
statistique est basé.
Ce processus est basé sur les règles suivantes :
L’importance de la programmation et de la qualité
statistique
La programmation est définie comme principal outil de
coordination de l’activité statistique au sein du SSN.
Elle garantit la comparabilité et la qualité des
statistiques officielles en suivant les meilleures
pratiques universellement reconnues lors de la sélection
des sources, des méthodologies et des classifications,
ainsi que le respect des principes fondamentaux.
Les processus de coordination sont assurés par la
préparation d’un programme national statistique dans le
cadre du plan de développement qui est décliné en
programmes statistiques annuels. Par ailleurs des
rapports de suivi et d’évaluation sont réalisés par l’INS,
en coordination avec les différents producteurs et sous
la supervision du CNS.
Le projet de loi stipule également que la qualité est un
fondement important de la crédibilité de l’activité
statistique. Il s’appuie notamment sur les principes de
base de la statistique en harmonisant la production
statistique, en utilisant le plus grand nombre de normes,
définitions et classifications nationales et internationales
et en évaluant périodiquement la qualité.
L’amélioration de la collecte de données
Le projet de loi adopte plusieurs dispositions relatives à
l’organisation de la collecte de données et à
l’amélioration de l’efficacité. Ces dispositions sont
prises en fonction de considérations professionnelles,
d’éléments de qualité et de coûts, ainsi que de la charge
70
Statéco n°113, 2019
imposée aux répondants et visant à établir des contrôles
pour l’échange de données statistiques entre les
producteurs de statistiques officielles.
Compte tenu de l’importance de renforcer la confiance
avec les répondants, il est nécessaire de les informer du
contenu des recensements, des enquêtes et de leurs
objectifs, ainsi que des procédures garantissant la
confidentialité des données. L’obligation de réponse
ainsi que sa gratuité est confirmée par la loi.
Le respect des règles de diffusion
Le projet de loi stipule que les statistiques officielles
sont diffusées selon les principes énoncés, en particulier
la protection du secret statistique et l’accès égal et
simultané à ces statistiques selon le principe de
l’impartialité. Chaque producteur de statistiques
officielles établit et rend public un calendrier annonçant
à l’avance des publications des statistiques officielles.
Accès aux données
Le projet de loi régit la question de l’accès aux données
dans le contexte de la conciliation du droit d’accès aux
données en tant que droit constitutionnel et réglementé
en vertu de la Loi organique d’accès à l’information et
de la protection des données à caractère personnel, ainsi
que du maintien du secret statistique en tant que principe
de base de la statistique. Cette section comprend des
dispositions permettant aux producteurs de statistiques
officielles d’accorder l’accès aux données individuelles
soumises au secret statistique pour des projets de
recherche.
Infractions et pénalités
Afin de garantir la crédibilité des statistiques officielles
et le respect des dispositions légales en matière de
confidentialité des données individuelles, le projet
comporte une section sur les sanctions pénales.
Dispositions transitoires et entrée en
vigueur
Dans la mesure où le projet de loi contient de nouvelles
dispositions, il inclut des phases transitoires, notamment
en accordant aux SSP qui produisent des statistiques
officielles deux ans pour régler leurs positions et les
rendre conformes aux dispositions de la nouvelle loi
après sa publication.
Perspectives
Après finalisation du projet de loi et en tenant compte
des remarques et propositions formulées par les
différents intervenants dans le SSN, une note explicative
détaillant les principes de cette réforme a été annexée à
la loi et envoyée à la présidence du gouvernement. Cette
dernière a finalisé la concertation avec les instances
indépendantes qui ont appuyé le projet de loi (l’instance
de protection des données personnelles et l’instance
d’accès à l’information) et garanti l’indépendance de
l’INS.
La prochaine étape concerne l’approbation du projet de
loi par l’assemblée des représentants du peuple afin de
le rendre opérationnel. En parallèle un travail a été initié
en termes de préparation des textes d’application
organisant le fonctionnement de l’INS et du CNS, en
conformité avec les prérogatives de la nouvelle loi.
Cette réforme de la loi doit s’accompagner de
dispositions visant à consolider le rôle de l’INS en tant
que responsable de la coordination technique et garant
de la qualité de la production statistique. À cet effet,
différentes activités ont été initiées dans le cadre du
projet de jumelage visant la modernisation de l’INS
comme la mise en place d’une unité de formation qui
est la structure pré-configuratrice d’un centre de
formation pour l’ensemble des ressources humaines du
système statistique. Ce centre pourra assurer des
formations sur mesure, des formations continues sur la
pratique statistique et s’ouvrir à d’autres catégories
d’utilisateurs comme celle des médias afin de
promouvoir la culture statistique. Cette structure pourra
également évoluer vers un centre de recherche en
statistique moyennant des partenariats avec le milieu
universitaire.
D’autres travaux techniques ont démarré pour appuyer
le rôle de l’INS comme coordinateur des activités
statistiques du SSN. Il s’agit principalement des
mécanismes qui permettent d’améliorer la
programmation statistique pluriannuelle et annuelle,
instruments essentiels pour la gestion stratégique et
opérationnelle et la coordination des activités dans le
cadre du SSN. Le second aspect très important concerne
la gestion de la qualité et la mise en œuvre des cadres
d’assurance qualité afin d’obtenir de meilleurs résultats
statistiques et d’améliorer le niveau de satisfaction des
utilisateurs. À cet effet, des travaux ont été initiés lors
du jumelage par l’introduction à la certification du
système de gestion de la qualité de l’INS selon la norme
ISO 9001 mais étant donné que les principaux objets
nécessaires pour la certification ISO font défaut,
comme l’identification des processus et des groupes
d’utilisateurs, des procédures documentées, notamment
des modèles pour décrire les méthodes et la qualité des
rapports, l’identification des principaux indicateurs de
qualité et des risques, il a été convenu de mettre en
place une unité qualité et de choisir deux pilotes une
enquête (l’enquête emploi salaires auprès des
entreprises) et une source administrative (le répertoire
national d’entreprises).
Après la formation des membres de l’unité qualité sur
la conduite d’un projet ISO 9001, des ateliers ont
permis l’implémentation du répertoire selon le standard
GSBPM (Generic Statistical Business Process Model)
avec identification des fournisseurs de données, des
acteurs, des utilisateurs et analyse des risques. Un
système de management de la qualité a été mis en place
71
Statéco n°113, 2019
et une cartographie des processus de l’enquête emploi
salaire a été réalisée.
D’un autre côté, l’équipe a travaillé sur l’élaboration
d’une version détaillée de la charte de la statistique
Tunisienne avec proposition d’indicateurs de suivi qui
permettront d’évaluer sa mise en œuvre. L’adoption de
la charte et sa diffusion à travers des cours organisés
pour les cadres de l’INS et les autres structures
statistiques publiques seraient sans doute un appui au
processus d’amélioration de la qualité des statistiques et
contribueraient à la préservation de sa crédibilité.
Schéma 1 : Organisation du SSN
Schéma 2 : Implémentation du standard GSBPM au Répertoire National d’Entreprises
72
Statéco n°113, 2019
Schéma 3 : Cartographie des processus de l’enquête emploi salaire
73
Xavier Helfenstein était responsable pédagogique au centre de formation de l'Insee à Libourne (CEFIL),
[email protected], Emilie Laffiteau est consultante dans le secteur des statistiques publiques en Afrique,
[email protected], Mouna Zgoulli est directrice centrale de l’informatique, la diffusion et la coordination à
Statistiques Tunisie, [email protected]
Les enjeux de la formation à
Statistiques Tunisie X. Helfenstein, E. Laffiteau et M. Zgoulli*
Un enjeu majeur de la révision de la loi statistique vise la création d’un centre de formation au sein de l’INS. Cette volonté découle notamment d’une demande accrue de la société tunisienne, depuis la révolution de jasmin de 2011, en statistiques publiques, en particulier régionales. L’Institut a alors été confronté à un double objectif, à savoir assurer le niveau de qualité de ses statistiques dans le cadre de ses nouvelles missions et, dans le même temps, professionnaliser ses nouvelles recrues, souvent sans culture statistique. Dans ce contexte, le comité de direction de l’INS a bénéficié de l’expertise de l’Insee dans le cadre du jumelage pour mettre en œuvre un dispositif visant la création d’un centre de formation autonome. Cet article dresse tout d’abord un état des lieux des ressources humaines de l’INS et identifie les besoins en formation de l’Institut, compte tenu des fortes contraintes budgétaires qu’il rencontre. Il présente également les réalisations, au cours du jumelage, en termes de mise en place de l’unité formation. Ensuite la vision des experts français et de leurs homologues tunisiens, visant à concilier les besoins et contraintes à court terme de l’Institut avec la dynamique souhaitée par le comité de direction, est décrite. Dans sa version la plus aboutie, les objectifs du centre de formation, ses missions, son mode de fonctionnement et ses moyens sont enfin présentés.
Introduction
Le jumelage européen « Modernisation de l’appareil
statistique tunisien » a démarré en février 2016 et s’est
achevé en avril 2018. Son objectif principal était de
mettre en place un système statistique public plus
cohérent et plus performant. Parmi les nombreux travaux
et missions réalisés dans ce cadre, certains ont porté sur
le dispositif de formation et le renforcement des capacités
de l’Institut national de la statistique (INS). Mis en
perspective, ce projet a pris la suite d’initiatives
antérieures à travers notamment l’évaluation globale
avancée de l’Union européenne qui préconisait déjà de
renforcer la formation et de créer une unité ainsi qu’une
étude du cabinet Aide à la décision économique (ADE)
avec un volet formation pour les directions régionales.
Le jumelage s’est déroulé dans un contexte particulier au
niveau des ressources humaines de l’INS tunisien suite à
la titularisation massive, en 2012, dans les directions
régionales, des agents enquêteurs qui étaient jusqu’alors
contractualisés ponctuellement par l’INS dans le cadre
d’enquêtes spécifiques. Ceci a entrainé une augmentation
drastique des effectifs régionaux qui ont plus que doublé.
Cette configuration singulière a donc engendré de
nouveaux besoins, notamment en termes de formation, en
sus de ceux intrinsèques aux ressources humaines d’un
INS d’un pays émergent.
Parmi les réalisations du jumelage, un plan de formation
permettant de renforcer les capacités du personnel des
directions régionales a été élaboré (voir en annexe). Des
cycles de formation ont également été réalisés ; ils ont
porté sur le cadre institutionnel, les statistiques
descriptives, les indicateurs statistiques, etc. Une feuille
de route a enfin pu être établie pour aboutir à la mise en
place d’un centre de formation autonome aux missions
élargies.
L’objectif de cet article, est tout d’abord de dresser un état
des lieux du dispositif de formation au sein de l’INS
tunisien à travers la présentation des enjeux inhérents à
l’afflux massif de personnels, l’identification des besoins
de formation des personnels et les conditions de mise en
place de l’unité formation dans le cadre du jumelage. Il
s’agira ensuite de décrire la structure cible du projet à
savoir un centre de formation autonome en détaillant les
acteurs, les objectifs, les missions et les moyens de cette
structure.
74
Statéco n°113, 2019
Dispositif de formation : enjeux,
besoins et mise en place de l’unité
formation
Le jumelage a d’abord permis de dresser un état des lieux
du personnel de l’INS tunisien, dans un contexte
particulier à savoir la titularisation et le recrutement
massif de nouvelles recrues au sein des directions
régionales (DR) lors de leur réorganisation. Ce chapitre
vise à analyser les enjeux de cet afflux de personnel en
termes de dispositif de formation, à identifier les besoins
réels en formation de l’INS et à présenter les actions
réalisées au cours du jumelage autour de l’unité de
formation ad-hoc.
Les enjeux pour l’INS de l’afflux massif de
personnels en 2012
L’afflux, à la fois massif et soudain, de personnels au sein
des DR offre des opportunités pour l’INS tunisien de se
transformer en interne et d’élargir ses missions. Les
nouvelles missions attribuées aux DR dans le cadre du
développement des statistiques régionales représentent
une opportunité pour le personnel d’exercer des missions
valorisantes et d’augmenter la motivation et le rendement
au sein de l’INS. Mais des contraintes y sont
inévitablement associées, au niveau financier mais
également en termes d’identification à l’Institut.
La titularisation en masse de personnels en région
À partir de 2012, sur la lancée de la révolution de jasmin
et dans le cadre des nouvelles missions attribuées aux DR,
500 enquêteurs ont été titularisés en région et 120 autres
recrues ont été affectées dans des services dépendant du
ministère de tutelle. Le personnel de l’INS1, qui comptait
jusque-là environ 400 agents, a subitement augmenté :
les agents nouvellement recrutés représentent plus de 80 %
du total du personnel des DR.
La qualification des titularisés - enquêteurs et personnel
de terrain travaillant pour l’Institut sous contrat à durée
déterminée depuis plusieurs années - est très hétérogène
tant par le niveau d’études qui varie du CAP au master,
que par la spécialité des études qui couvrent l’histoire, les
arts, la géographie, la chimie, la philosophie, etc. On y
trouve très peu de diplômés en statistiques et en
informatique qui sont pourtant les profils recherchés par
l’Institut ; les techniciens (bac+2/3) représentent 40 %
des effectifs des DR, les cadres supérieurs (bac+4/5)
environ 30 %.
Des compétences renforcées par le nouveau personnel
dans les régions
Les DR disposent d’un personnel qui possède une grande
connaissance des métiers de la collecte statistique. Les
enquêteurs titularisés sont la cheville ouvrière des
enquêtes de l’Institut et les avoir intégrés est une force
1 Sur l’ensemble des personnels de l’INS, 280 sont des cadres
et les DR comptent 745 agents. 2 Des appuis aux directeurs régionaux, par exemple par des
formations en management et en communication, peuvent être
indéniable. Ce personnel des régions connaît le terrain et
ses particularités. Il connaît également les spécificités de
chaque enquête et a développé une expérience dans le
travail de collecte des informations par questionnaire
auprès des ménages et des entreprises. Le niveau de
formation initiale des nouvelles recrues est en moyenne
plus élevé que le niveau des missions qu’elles ont à
exercer (enquêteurs) : la majorité d’entre elles détient un
diplôme supérieur (du bac+2 jusqu’au master). Ce niveau
académique permet de former plus aisément une partie
du personnel pour d’éventuelles nouvelles attributions et
missions.
Les nouvelles missions attribuées aux directions
régionales dans le cadre du développement des
statistiques régionales représentent une opportunité pour
le personnel d’exercer de nouvelles missions,
d’améliorer leurs savoir-faire et d’élargir leurs champs de
compétence. Le jumelage entre l’INS tunisien et les
instituts français (Insee), italien (Istat) et lithuanien
(Statistics Lithuania) a permis d’expliciter ces missions,
qu'il s'agisse des travaux en matière de collecte, de
gestion des ressources ou encore de missions de diffusion
et communication.
Les enjeux liés à l’intégration des nouveaux agents
La majorité des nouvelles recrues a une culture statistique
assez faible. En effet, ces agents travaillaient auparavant
dans le cadre de contrats à court terme, chaque contrat
étant conclu pour la durée d’une enquête. Ils ont par
conséquent des compétences indéniables en matière de
statistique d’enquête mais manquent, d’une part, de
compétences en matière de terminologie statistique, de
calculs d’indicateurs et d’indices et, d’autre part, de
connaissance du système statistique national (SSN) et sur
la déontologie du statisticien.
En outre, l’esprit d’appartenance à l’INS, qui représente
un élément important de motivation du personnel, est à
renforcer pour les nouvelles recrues. L’offre par l’INS,
d’un contrat permanent est d’ores-et-déjà une étape
importante pour intégrer ces personnels et leur proposer
une reconnaissance professionnelle. Des actions
d’intégration ou de communication peuvent également
être entreprises pour consolider cette reconnaissance. Le
système de management régional2 et l’organisation des
équipes doivent ainsi veiller à prendre en compte leurs
attentes afin d’assurer leur rendement et d’encourager les
agents à évoluer au sein de l’INS durant leur carrière.
Dans cet esprit, il est prévu que la gestion des ressources
humaines soit organisée au sein des DR dans une
proximité réelle, afin d’apporter notamment des réponses
aux questions de procédures administratives sur place.
Les besoins internes en formation de l’INS
L’état des lieux au début du jumelage a permis de clarifier
un point : les besoins internes de formation à l’INS ne
envisagés pour accompagner le système de management
régional.
75
Statéco n°113, 2019
portent pas sur la formation initiale mais plutôt sur la
formation continue.
Concernant la formation initiale, les cadres en statistique
de l’Institut sont issus de l'École supérieure de la
statistique et de l’analyse de d’information (ESSAI) 3
pour les ingénieurs et du réseau des Instituts supérieurs
des études technologiques (ISET) 4 pour les cadres
intermédiaires et les techniciens. Ces institutions assurent
jusqu’alors la formation initiale en statistique publique en
Tunisie. Cependant, depuis 2012, l’Institut ne recrute pas
ou peu de statisticiens issus de ces écoles et les départs
d’agents ne sont pas systématiquement remplacés. En
outre, il n’existe pas de recrutement spécifique à l’INS,
notamment par concours. La politique actuelle de
recrutement obéit donc aux contraintes budgétaires de la
fonction publique qui sont devenues particulièrement
fortes après la vague de titularisation en région de 2012.
Au niveau de la formation continue, l’INS ne propose pas
de dispenser aux nouvelles recrues des formations
théoriques et pratiques avant leur prise de poste. Quant
au personnel déjà en poste, les mobilités au sein de
l’Institut sont peu fréquentes, et celles avec les structures
statistiques publiques (SSP) le sont encore moins. Ces
mouvements, très réduits, n’incitent donc pas l’INS à
proposer à son personnel des formations
professionnalisantes. Les besoins s’orientent vers des
formations professionnelles pointues pour les agents en
poste qui sont généralement assurées par des prestataires
ou organismes extérieurs.
Les besoins de formation se font également ressentir au
niveau des personnels régionaux nouvellement recrutés.
Ces personnels, massivement titularisés en région en
2012, maîtrisent déjà les travaux d’enquêtes sur le terrain
qu’ils pratiquent de longue date. Le développement d’un
dispositif de formation souhaité par l’INS vise donc à
leur apporter des connaissances complémentaires
favorisant leur intégration et leur implication, par
exemple sur l’environnement juridique et statistique,
l’organisation du SSN ou sur la déontologie du
statisticien. La stratégie est de former d’abord des agents
de l’Institut qui, à leur tour, peuvent former les agents en
région. À court terme, le centre de formation doit donc
assurer la formation continue de publics hétérogènes :
principalement les cadres de la direction générale et les
formateurs des personnels en région.
À moyen terme, l’INS envisage un élargissement de son
champ d’action (voir encadré 1). La loi statistique
conforte l’Institut dans une vision plus large de son
dispositif de formation. Ainsi, l’INS peut intervenir non
seulement en appui technique aux SSP, mais également
au niveau de la programmation de leurs travaux
statistiques. Dans ce cadre, la programmation des
formations est ainsi légitimée. Dès lors, le périmètre du
3 L’ESSAI est rattachée à l’Université de Carthage. Une
convention cadre existe entre l’ESSAI et le Genes (Groupe des
écoles nationales d’économie et de statistique) en France,
permettant le suivi par des étudiants tunisiens d’un cursus
donnant à la fois le diplôme de l’ESSAI et de l’ENSAI (École
nationale de la statistique et de l’analyse de l’information) en
centre de formation inclurait dans sa version la plus
extensive :
- La formation continue de l'ensemble des agents de
l’Institut ;
- La formation continue des services extérieurs (SSP,
administrations, autres publics) ;
- La formation professionnelle certifiante des
statisticiens ;
- La formation initiale en partenariat avec l'ESSAI, des
ISET, l’université virtuelle de Tunis et des universités
tunisiennes ;
- L’organisation de séminaires régionaux et
internationaux.
Encadré 1 : les quatre étapes de l’évolution du centre de
formation
L’INS s’est fixé pour cible la création d’un centre de formation
autonome dont la montée en charge se fera progressivement,
par paliers. Quatre étapes ont été identifiées :
Étape 1 : unité formation en mode projet
Cette unité a été créé lors du jumelage. Elle est composée de 3
personnes à temps partiel, aux compétences complémentaires,
dont les premières missions étaient de préparer le plan de
formation de 2017.
Étape 2 : unité formation opérationnelle
L’unité devient une entité officielle bénéficiant d’une légitimité
et d’une meilleure visibilité. Elle dispose d’une équipe dédiée,
formée à l’ingénierie de formation. Elle enrichit son offre de
formation.
Étape 3 : unité formation consolidée
Lorsque la nouvelle loi statistique entre en vigueur, l’INS
supervise la programmation de toutes les activités statistiques
du SSN en garantissant la qualité de production et en estimant
les besoins de formation pour chaque SSP. L’unité formation
monte en charge, ses missions sont élargies et ses moyens
consolidés. Elle travaille en partenariat avec les SSP.
Étape 4 : centre de formation autonome.
Le centre de formation dispose en propre de moyens humains,
logistiques et financiers. Il élargit son champ d’action à la
formation initiale et aux séminaires, en visant un public plus
large dans les secteurs public et privé. Il propose des modules
de formation numériques sur la plateforme digitale.
Le passage d’une étape à l’autre nécessite l’évaluation de
l’étape en cours ainsi que des modifications au niveau de
l’organigramme et des décisions stratégiques pour la création
du centre de formation autonome.
La mise en place d’une unité préfiguratrice
du centre de formation
Selon la démarche entreprise, l’INS a commencé en 2017,
lors du jumelage, par créer l’unité formation rattachée à
la direction de la coordination. Cette unité est composée
d’une équipe de trois personnes à temps partiel, aux
compétences différentes mais complémentaires. Ses
missions consistent à élaborer le plan de formation
annuel de l’Institut, à dresser le bilan des formations en
France, ainsi que des appuis pédagogiques et des échanges
d’enseignants. 4 Le réseau se compose de 24 ISET répartis sur toute la Tunisie.
Ce sont des établissements universitaires qui proposent une
offre de formation initiale diplômante diversifiée et
complémentaire. Deux d'entre eux, localisés à Sousse et Sfax,
proposent une offre de formation en statistique.
76
Statéco n°113, 2019
fin d’année, à organiser les formations et à répondre aux
demandes éventuelles des SSP.
À son actif, cette unité, préfiguratrice du centre de
formation, a déjà produit le plan de formation 2017, le
bilan des formations réalisées en 2017 et la conception
d’une formation, sur l’exemple de la nomenclature
d’activités tunisienne de 2009 (NAT 2009). En ce qui
concerne le plan de formation 2017, la méthode a
préconisé le recueil des besoins de formation auprès des
différentes directions centrales en lien avec les travaux.
L’arbitrage a été réalisé au niveau du comité de direction
en fonction des moyens humains et financiers. Le bilan
des formations réalisées en 2017 a été établi avec l’appui
des directions centrales et du jumelage, et a rassemblé les
informations de base, à savoir le nombre de stagiaires et
la durée de la formation. Des éléments de coût ont
également été produits.
L’unité a elle-même suivi une formation-action sur la
conception d’une formation, appliquée à un cas réel.
L’exemple choisi par l’Institut a été particulièrement
intéressant puisqu’il portait sur une formation dispensée
dans le cadre des enquêtes NAT 2009. La formation-
action, animée par deux experts, a permis à l’équipe de
l’unité formation d’« apprendre en faisant », c’est-à-dire
d’être capable à l’issue de la formation de mener elle-
même un groupe de conception. C’est en effet dans cette
phase de conception que l’unité formation peut apporter
une plus-value importante, en mettant en relation les
différents acteurs (commanditaire, experts, formateurs,
utilisateurs), en les guidant et en étant le garant de la
qualité des contenus et des méthodes pédagogiques.
Un guide pédagogique a été rédigé à l’issue de ce groupe
de conception. Le guide pédagogique permet de
capitaliser les travaux : il explique comment dispenser la
formation et sur quels supports elle s’appuie (supports
stagiaires et supports formateurs). Il permet de dupliquer
la formation à l’identique si elle doit être dispensée par
plusieurs formateurs. Il permet de la faire évoluer dans le
temps ou pour des publics différents, à-travers des
adaptations à la marge.
À l’issue du jumelage, l’unité formation dispose
également d’une description des processus, faisant
apparaître les acteurs, les tâches, les moyens et les délais
des activités suivantes : l’élaboration du plan de
formation (voie en annexe), la conception d’une nouvelle
formation, la mise en place d’une formation existante,
l’achat d’une prestation à un prestataire extérieur (appel
d’offre, procédure simplifiée), le bilan de l’année écoulée.
L’unité formation peut s’appuyer sur ce canevas et
compléter les processus en fonction des spécificités de
l’Institut.
Des documents types ont été mis au point avec l’unité
préfiguratrice sur toutes les étapes de l’ingénierie de
formation : annonce, fiche d’inscription, convocation,
questionnaire d’évaluation, lettre de mission d’un groupe
de conception, guide pédagogique. Une fiche-type de
commande de formation a été produite avec la
participation des directeurs centraux. Chaque fiche de
commande, remplie par un directeur central dans la phase
de constitution du plan, doit apporter un maximum
d’information à l’unité formation chargée de la mise en
œuvre. Lorsque le plan est arbitré et définitif, les
différentes fiches peuvent être rassemblées pour
constituer le catalogue des formations que l’Institut
diffuse. L’unité formation dispose également d’une note
type à l’attention des commanditaires et d’une grille
d’entretien pour leur faire préciser leur demande de
formation. Enfin l’unité formation a apporté des éléments
de coûts unitaires permettant de chiffrer un budget
prévisionnel.
L’unité formation a donc été sensibilisée à la
professionnalisation des responsables formation : elle
connaît les enjeux de la formation ; elle a en main les
processus, les outils et les savoir-faire. Par la pratique,
elle a déjà acquis une expérience concrète par
l’implémentation du plan de formation de l’année 2017
et son évaluation.
Ce bilan recense 41 formations dispensées en 2017, au
bénéfice des agents de l’INS. Elles représentent 1 697
jours de formation, soit presque 2 jours par agent. Pour
mesurer l’effort de formation de l’INS, il conviendrait
d’ajouter les formations dans le cadre des travaux de
collecte et de saisie, d’autant que le personnel en région
représente 70 % des effectifs de l’INS.
La structure cible : un centre de
formation autonome
À partir de l’état des lieux, des préconisations ont été
formulées, lors du jumelage, pour la création du centre de
formation. Elles portent sur la mise en place d’un système
de gouvernance du futur dispositif de formation et
proposent les missions, les champs d’actions et les modes
de fonctionnement des différents acteurs.
Les acteurs de la gouvernance du dispositif
de formation
Un préalable important à la mise en place d’un centre de
formation autonome est la définition et l’instauration
d’un système de gouvernance. Cette dernière est ici
entendue comme un système d’acteurs formant le
dispositif de formation. Chaque acteur est clairement
identifié et a un rôle bien déterminé. C'est l’interaction
entre ces différents acteurs qui assure le bon
fonctionnement du système et assure sa pérennité.
Le premier acteur est le comité de direction de l’INS. Cet
acteur, légitime dans le dispositif de formation, a un rôle
crucial. S'agissant de la formation, ses missions
consistent à :
- Définir les orientations stratégiques de l’Institut ; de
ces orientations, pouvant être pluriannuelles,
découlent les objectifs annuels du centre de
formation ;
- Arbitrer sur les moyens, humains et financiers du
centre de formation ;
- Évaluer l’activité du centre de formation.
77
Statéco n°113, 2019
Le deuxième acteur est le comité de pilotage de la
formation. Il est chargé de piloter le dispositif de
formation de l'Institut, avec pour missions de :
- Fixer les objectifs annuels du centre de formation,
découlant des orientations stratégiques de l'Institut ;
- Valider le plan de formation pour l'année à venir,
proposé par le centre de formation ;
- Évaluer et valider le bilan des formations de l’année
écoulée.
Le troisième acteur de la gouvernance est constitué des
utilisateurs du centre de formation. Dans la structure
cible, le centre de formation continue à former le
personnel de l'Institut pour le faire monter en compétence
et répondre aux nouvelles demandes du corps social vis-
à-vis de l’Institut (par exemple, la diffusion de résultats
statistiques au niveau de chaque gouvernorat). Mais il
apparaît aussi comme un acteur naturel pour proposer et
dispenser des formations à l’ensemble des agents des
services statistiques publics de Tunisie, de
l’administration, mais aussi aux étudiants, et au secteur
privé. Dans la perspective d’une participation aux
relations internationales de l’Institut, des représentants
d’organismes internationaux peuvent également
participer aux formations de l’INS, présentées dans le
cadre de séminaires.
Les objectifs du centre de formation
Le centre de formation deviendrait l’acteur central de la
gouvernance de la formation. Il ressort des discussions
engagées lors du jumelage que ses objectifs, assignés par
l’Institut, sont de :
- Diffuser la culture professionnelle de l’INS ;
- Développer les compétences des stagiaires et ainsi
participer à l’amélioration de la qualité des
processus de production et de diffusion des
données ;
- Permettre une adéquation des compétences et des
métiers face aux évolutions des environnements de
travail ;
- Donner des perspectives aux agents de l’Institut.
Dans la perspective croisée d'un élargissement des
activités du centre et de la mise en place du futur statut
particulier des agents de l’Institut, le centre de formation
pourra dispenser des formations certifiantes, voire des
parcours de formation certifiants. Les certificats délivrés
par le centre pourront être intégrés aux dossiers des
agents pour la promotion dans certains grades. Cela
nécessitera une homologation du centre de formation afin
de permettre une reconnaissance des certificats dans les
critères de décision pour ces promotions.
Les missions du centre de formation
5 « Rapport de l’assistance technique pour le compte de «
Statistiques Tunisie » pour l'élaboration d'une stratégie de
Le périmètre d'actions et les attributions du centre de
formation sont multiples. Ses missions se déclinent à
travers les points suivants :
1/ Porter l’identité de l’Institut, diffuser une culture
commune, les valeurs de l’Institut dont la rigueur et la
déontologie. La diffusion de cette identité a déjà été
amorcée depuis 2016, à la suite des préconisations du
rapport ADE 5 pour intégrer les personnels régionaux
récemment titularisés. Des formations, sur des thèmes
tels que l’environnement institutionnel et juridique de
l’INS, ou encore les droits et devoirs des agents, ont été
mises en œuvre. Ces formations peuvent être réutilisées
et adaptées à d’autres publics.
2/ Former les personnels de l'Institut, des SSP, de
l’administration, voire des salariés du secteur privé et des
étudiants, sur les savoirs, savoir-faire et savoirs
comportementaux relatifs aux métiers exercés. Les
domaines couverts par les formations sont multiples :
environnement institutionnel de la statistique, techniques
statistiques, communication écrite ou orale, logiciels,
management, langues, etc.
3/ Collecter les besoins en formation. Au sein de l’Institut,
une démarche pour collecter les besoins auprès des
maîtrises d’ouvrage de l’Institut (les directions centrales)
a été mise en œuvre fin 2016. Cette démarche a conduit
à un plan de formation à actualiser chaque année. Cette
démarche peut être étendue au recueil des besoins en
formation de l’ensemble des services statistiques publics.
4/ Concevoir des prestations de formation. Pour répondre
aux besoins exprimés par les commanditaires, le centre
de formation pourra mettre en place des groupes de
conception chargés d’élaborer les formations qui seront
dispensées par des agents de l’Institut. Dans le cas des
formations métiers, une conception en interne garantit
une bonne adéquation aux besoins des agents. De plus,
elle permet de valoriser les compétences des experts et
des formateurs. Le recours aux prestations externes est
limité aux formations généralistes pour lesquelles
l’Institut ne peut pas mobiliser de compétences en interne
(anglais, management, media training, etc.).
5/ Élaborer les cahiers des charges des formations pour
lesquelles un prestataire extérieur est sollicité. Le centre
de formation est en effet l'acteur le plus indiqué pour
renseigner la partie pédagogique du cahier des charges :
les enjeux de la formation, le contexte, les objectifs
pédagogiques, les modes de réalisation attendus, les
évaluations prévues, etc. Il est souhaitable que le cahier
des charges comporte des critères de choix faisant
intervenir les aspects pédagogiques, en sus des critères de
coût, ce qui permet de choisir le « mieux disant » plutôt
que le « moins disant ».
6/ Être le centre documentaire de l’Institut, pour toutes
les ressources documentaires relatives à la formation.
Pour l’ensemble des formations dispensées, y compris
celles intégrées dans les processus de collecte (RGPH,
enquêtes thématiques, etc.), le centre de formation
développement des statistiques régionales », ADE-GENES-
DEVSTAT, juillet 2015.
78
Statéco n°113, 2019
centralise tous les supports de formation (guides
pédagogiques, supports formateurs et stagiaires, résultats
des évaluations, etc.). Le centre de formation a l’avantage
d’être un acteur facilement identifiable pour accéder aux
ressources documentaires relatives à la formation. Les
ressources existantes sont ainsi capitalisées et réutilisées
selon les besoins ultérieurs.
7/ Assurer un rôle de veille sur l’offre extérieure de
formation, que ce soient des formations proposées en
Tunisie dans le secteur public ou privé, ou dans des pays
étrangers, ou encore dans le cadre de collaborations
internationales.
8/ Proposer des offres de formations alternatives aux
formations en présentiel. Les formations numériques
telles que les formations ouvertes à distance (FOAD), le
« rapid learning », les e-formations, etc. peuvent être
proposées en complément des formations en présentiel.
Elles ont l’avantage de permettre aux stagiaires de
prolonger leur apprentissage de manière individualisée,
tout en minimisant les coûts. Le rôle de veille décrit dans
le point précédent rejoint aussi ce champ d’investigation.
9/ Former à la préparation des concours internes. Dans la
perspective des futurs statuts particuliers des agents,
l’Institut dispense un parcours de formation certifiant
ouvrant des possibilités de promotion pour les agents.
10/ Accueillir des séminaires internationaux. Le centre de
formation met à disposition ses locaux et sa logistique
pour organiser des séminaires thématiques à destination
d'organismes externes. Le centre de formation participe
ainsi à la coordination statistique et aux relations
internationales de l'Institut.
Les moyens du centre de formation
Pour répondre aux objectifs et aux missions énoncés
précédemment, le centre de formation doit disposer de
moyens suffisants et d'une organisation efficiente. Des
préconisations sur les fonctions nécessaires à la bonne
marche d'un centre de formation ont été formulées lors
du jumelage. Elles portent sur les moyens matériels et les
fonctions nécessaires : direction, assistance de gestion,
responsabilité des projets de formation, responsabilité
informatique. Pour chaque fonction (ou métier)
nécessaire à un fonctionnement pérenne du centre, les
activités principales et les compétences requises ont été
listées.
Dans son fonctionnement, il est préconisé que le centre
de formation recoure au vivier des formateurs internes de
l’Institut. En effet, une grande partie des formations
demandées par les commanditaires (les directions
centrales de l’'Institut) peuvent être conduites par des
groupes de conception et animées par des agents de
l’Institut, spécialistes du sujet. La cellule de formation
créée en 2017 a déjà recensé un certain nombre de
formateurs potentiels. Dans le cadre du jumelage, des
formations à la pédagogie pour adultes ont été dispensées,
notamment aux directeurs régionaux et chefs des bureaux
locaux qui forment les personnels en local. Le centre de
formation poursuivra ces actions. Il lancera un appel à
candidature auprès de l’Institut pour maintenir un réseau
de formateurs en adéquation avec le plan, les dispositifs
de déploiement et la volumétrie (nombre de stagiaires,
nombre de sessions). Il veillera à ce que les nouveaux
formateurs bénéficient d’une formation à la pédagogie,
dans leur intérêt propre comme dans celui des stagiaires.
Conclusion et perspectives
Un résultat du jumelage, concernant la formation, est la
création dès 2017 de l’unité formation, immédiatement
opérationnelle, rattachée à la Direction centrale de
l’informatique la diffusion et la coordination à l’INS.
Cette unité, par son fonctionnement en mode projet
notamment, a permis des réalisations concrètes à travers
l’élaboration du plan de formation 2017, le renforcement
des capacités de son personnel en termes de méthodes
d’ingénierie de formation et de méthodes pédagogiques
pour la formation continue et la formations des agents de
l’INS dans les régions. Les cycles de formation ont porté
principalement sur le cadre institutionnel et les
statistiques descriptives (750 personnes formées dans ces
deux cas). D’autres formations ont eu pour thème les
principaux indicateurs diffusés par l’INS et les processus
de production associés, la communication des enquêteurs
avec les ménages et les entreprises, la pédagogie, les
différents types de management et les droits et devoirs
des statisticiens.
En 2019, cette équipe est toujours opérationnelle avec
une équipe dédiée. Elle fonctionne encore en mode projet,
mais a un positionnement officiel dans l’organigramme.
Le jumelage a également permis de proposer une
stratégie à moyen terme de montée en charge progressive
de l’unité formation afin d’aboutir à un centre de
formation autonome de l’INS tunisien avec des missions
élargies (cible). Pour cela une feuille de route a été
définie lors du jumelage selon une évolution par palier du
dispositif de formation. En parallèle de la feuille de route,
les experts ont conseillé de mettre en place une
évaluation annuelle ou biannuelle des résultats, par le
comité de direction, afin de permettre de décider des
suites à donner à chaque étape pour atteindre la cible.
Outre ces réalisations, il convient enfin de mettre en
perspective, les objectifs du volet formation dans un
contexte élargi à savoir :
- La modernisation de l’INS : la formation doit être
un des éléments de valorisation de ses ressources
humaines ;
- Le renforcement de la visibilité de l’INS dans le
SSN : au travers de la formation des cadres des
structures statistiques publiques, l’INS peut
renforcer son rôle de coordination du SSN tunisien
et être le leader dans un processus d’amélioration de
la qualité des statistiques produites ;
- Le renforcement de la cohésion au sein de l’INS,
notamment entre les DR et la direction centrale, et
l’instauration d’une culture d’entreprise favorable à
l’amélioration du fonctionnement des DR par la
qualification, le renforcement de capacité et la
création d’un esprit d’appartenance à un institut
statistique des personnels des DR.
79
Statéco n°113, 2019
Annexe
Tableau 1
Liste des formations effectuées au cours du jumelage
Activité Date Nombre
de jours Thème
A : Implémentation de la charte
nationale de la statistique Décembre 2016 3 Formation à la démarche qualité : C. Cuvier
B : Réorganisation de Statistiques
Tunisie Septembre 2016 3 Formation au management : S. Nardon
B : Certification de Statistiques
Tunisie
Décembre 2016 3 Formation à la certification ISO 9001 : R. Séon
Mars 2017 4 Formation à la certification ISO 9001 : R. Séon
Janvier 2018 4 Formation GSBPM : K. Zaari
Mars 2018 3 Formation sur la revue des processus : R. Séon
B : Système d’information intégré Mars 2018 3 Méta-données : C. Vaccari et M. Bruno
B : Centre de formation
opérationnel
Avril 2016 4 Centre de formation opérationnel : X. Helfenstein et V.
Guihard
Février 2017 3,5 Centre de formation opérationnel : G. Techer,
X. Helfenstein et F. Courtois
Février 2018 3 Centre de formation opérationnel : X. Helfenstein et V.
Guihard
C : Basculement au nouveau
système SCN2008 et changement
de l'année de base de comptes
Septembre 2017 5 Formation ERETES : S. Bourrel
D : Formation du personnel (en
particulier des Directions
Régionales)
Septembre 2016 6,5 Formation de formateurs à la pédagogie : S. Nardon
Septembre 2016 3
Mise en place d’un plan de formation
Définir le rôle du responsable de formation : V. Guihard et
MF. Tajan
Décembre 2016 6 Analyse des besoins en formation à la communication : S.
Nardon
Décembre 2016 3 Finalisation du plan prévisionnel de formation 2017 : V.
Guihard et MF. Tajan
Janvier 2017 6 Communication dans le cadre des enquêtes ménages : S.
Nardon
Février 2017 7 Communication dans le cadre des enquêtes entreprises : S.
Nardon
Novembre 2017 4 Formation sur les techniques rédactionnelles : S. Darriné
Décembre 2017 5 Plan de formation de l’INS, conception d’une formation
type : V. Guihard et MF. Tajan
Janvier 2018 4 Formation sur les techniques rédactionnelles : S. Darriné
Janvier 2018 1,5 Formation CPOS : Y. Hantala
Février 2018 5 Méthodologies enquêtes : T. Deroyon
Février 2018 3 Communication orale sur travaux statistiques : JW. Angel
Mars 2018 3 Ingénierie de l’information : S. Nardon et MF. Tajan
E : Normes d’échanges de données
(SDMX)
Mars 2016 4 Formation SDMX : F. Rizzo
Mai 2016 4,5 Formation SDMX : A. Cardacino
Octobre 2016 4,5 Formation SDMX : A. Cardacino et F. Rizzo
Septembre 2016 5 Formation SDMX : A. Cardacino et F. Rizzo
Mai 2017 4 Formation SDMX : A. Cardacino et F. Rizzo
Août 2017 2,5 Formation SDMX : F. Rizzo et A. Santilli
Mai 2016 2
Politique d’accès aux micro-données en termes législatif et
technique : M. Attias
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Statéco n°113, 2019
E : Politique d’accès aux données
Novembre 2016 2,5 Politique d’accès aux micro-données en termes législatif et
technique : M. Attias
Décembre 2016 3 Traitement des micro-données : L. Virgili
Février 2017 2 Traitement des micro-données : L. Virgili
Octobre 2017 4 Formation sur « R » : L. Virgili et M. Caputi
Décembre 2017 2 Formation Tau Argus : L. Virgili et M. Caputi
Février 2018 3 SDC- micro : L. Virgili et M. Caputi
E : Communication et relation
avec les utilisateurs
Avril 2016 3 Communication et relation avec les utilisateurs: F. Dussert
et S. Vittozzi
Novembre 2016 4 Communication et relation avec les utilisateurs: F. Dussert
et S. Vittozzi
Novembre 2017 2 Communication et relation avec les utilisateurs : F.Dussert
et S. Vittozzi
Février 2018 4 (une
partie)
Utilisation de Service Desk Plus pour la gestion des
demandes des utilisateurs
Conception d’un plan de formation
etc.
année n+1
année n
Objectifs
stratégiques
de l'INS
Objectifs
d'évolution
des DC
Objectifs
des formations
des DC
Evaluation Mise en oeuvre recueil des besoins
des formations des formations de formation des DC
E1 F1
E2 F2
E3 F3 Plan prévisionnel
... ... Plan de formation Liste
Ex Fx Liste arbitrage + Fiches
+ Fiches
Bilan quantitatif
Bilan qualitatif
+
81
* Mauro Bruno, technologist, Istat, [email protected], Maria Serena Causo, researcher, Istat, [email protected], Anissa
Najjar, statistician, Statistiques Tunisie, [email protected], Giuseppe Sindoni, senior technologist, Istat,
[email protected], Tarek Tkitek, technologist, Statistiques Tunisie, [email protected], Carlo Vaccari, first level
technologist, Istat, [email protected]
INS integrated architecture: pilot
application in external trade statistics
and methodological improvements in
data processing M. Bruno, M. S. Causo, A. Najjar, G. Sindoni, T. Tkitek, C. Vaccari*
This paper describes one of the actions implemented in the framework of the twinning project “Modernisation de l’appareil statistique tunisien”, namely the introduction of a standard IT architecture for statistical processes and its application in the external trade statistical pilot domain. The architecture covered all the Generic Statistical Business Process Model macro-phases, offering an opportunity to introduce methodological improvements in the INS external trade GSBPM Metadata and Quality Management phases. The new integrated IT architecture was designed with INS experts and focuses on the “core” production process, with the aim of standardizing and streamlining the data production phases by (i) enhancing the adoption of standardized metadata in the collection, processing and dissemination phases (ii) introducing a new methodological approach for selective data editing and automatic imputation based on robust statistical methods (iii) minimizing the need for manual intervention in data editing (iv) developing new IT procedures for outlier selection and imputation fully scalable to other statistical domains. The suggested methodological and architectural solutions are compliant with the standards adopted in the context of official statistics and scalable to different domains.
Introduction
The work described in this paper was performed in the
context of the twinning project “Modernisation de
l’appareil statistique tunisien” in which Insee, Istat and
INS were involved for more than two years (2016-
2018). The project was originally designed to respond
to the need for reliable data, following three main lines
of action:
1. Strengthen the governance of the statistical system;
- Improve the coordination of public statistical
organizations;
- Establish a new legal and institutional framework;
- Adapt the regional organization of the statistical
system to the new framework.
2. Reinforce data production by improving the quality
of official statistics to meet international standards.
3. Ensure better data collection/dissemination by INS
to support and monitor development policies.
To face these challenges, it is necessary to model the
statistical processes according to official statistics
international standards, such as Generic Statistical
Business Process Model (GSBPM), Generic Statistical
Information Model (GSIM) and Common Statistical
Production Architecture (CSPA). Within the project
Istituto nazionale di statistica (Istat) experts have
designed a target architecture to support process
standardization.
The proposed model has been tested in external trade
statistics in order to harmonize scope, principles,
concepts and definitions to the European framework
(Eurostat, 2017).
Harmonization and standardization are the key
elements for efficient production processes and allow
82
Statéco n°113, 2019
international comparability and coherence over time. In
this project, specific actions have been carried out, such
as:
1. Enhancing an effective inter-institutional
cooperation with Customs Agency, in charge of
external trade data collection;
2. Setting a system of standard commodity and geo-
economic classification, to be reconciled as much as
possible with the national Customs classifications;
3. Introducing standard metadata-driven processes
based on standard IT tools;
4. Enriching the set of referential metadata,
introducing editing parameters useful to streamline
and automate data production;
5. Adopting procedures for automatic data imputation
based on robust statistical methods.
More specifically, the first section provides an
assessment of the current situation (AS-IS) at INS in
relation to IT organization, software development and
dissemination systems. The second one describes the
proposed architecture (TO-BE) for each GSBPM
macro-phase (Collect, Process and Disseminate) and a
set of general principles and guidelines supporting INS
in the transition towards the new architecture.
The next sections analyses in detail the External Trade
use case, describing the improvements achieved in the
external trade data production process and some open
issues.
Finally, the roadmap for a complete implementation of
the architecture is described. Short-term activities
concern the extension of the pilot external trade system
to other domains, while medium-term activities pertain
to the following systems: i) metadata; ii) data
collection; iii) data processing.
Towards an integrated
architecture for statistical
processes
State of the art at INS
To design an integrated architecture that fulfils the
requirements of INS, a preliminary assessment of the
current (AS-IS) scenario was performed. The
technology scenario is quite heterogeneous, spanning
from web development technologies like PHP and Java
to .NET environments. Applications are based both on
flat files and on relational databases. Different software
technologies are used for statistical tasks such as data
collection, classification, dissemination, etc.
Concerning the External Trade statistical domain, the
process was managed by a workflow engine, namely
SQL Server Integration Services (SSIS). Important
parts of the process, such as outlier detection and data
editing, were performed offline by statisticians.
The main problems reported by the IT department are
the short development cycles, lack of exhaustive
definitions of requirements and lack of scope
statements. Together with the above-mentioned
heterogeneity, these challenges affect the quality and
timeliness of the production processes. There are also
planning issues in relation to software development,
which is often disrupted by unforeseen but urgent
activities. The heterogeneity of the software in use and
the patchy IT skills of the staff concerned are additional
concerns. There is currently no clear definition of user
needs, and this leads to delays in software delivery and
acceptance. The use of database technology in INS is
generally low and the IT sector is not always involved
in process analysis, in part due to the lack of an IT
“culture” in the statistical domains.
Data dissemination is aimed at maximizing the quality
and accessibility of the outputs. The global strategy is
based on a web portal, built on top of data warehouses,
which offers applications, services and open data to end
users and international organizations. Data can be
accessed by multiple devices and by machine to
machine applications.
The various systems currently use different tools
(Prognoz, Knoema, PHP), and clear strategic choices
are needed in relation to dissemination tools and data
warehouse technologies. There is also a need for
standardized ETL (Extraction, Transformation &
Loading) tools to manage the data flows, which are
currently mainly managed by manual procedures.
Technical architecture for statistical
production processes
The main objective of the new architecture is to
standardize and improve the overall quality of data
production processes by:
- Enhancing the set of indicators needed to guide and
automatize the data editing phase;
- Minimizing the need for manual intervention in data
editing;
- Introducing new IT procedures for editing and
imputation that are fully extensible to other
statistical domains.
To implement a generalized architecture that fulfils
the requirements of the different domains at INS, the
following data repositories are needed:
- Raw data repository contains data provided to INS,
whether through use of data collection capabilities
or from external sources, such as administrative
data;
- Working data repository: staging area needed for
data processing;
83
Statéco n°113, 2019
- Metadata repository: metadata are the central
element of the proposed integrated architecture and
should be used in all phases of the production chain,
from collection to dissemination (Signore and al.
(2015) and Scanu and al. (2013));
- Dissemination repository: it was decided to use
Statistical data and metadata exchange (SDMX) as
the dissemination standard and T.STAT as the main
dissemination portal, so the dissemination
repository will be SDMX compliant by design.
A simplified model of the proposed architecture is
shown below (figure 1). This framework covers three
of the main phases of the statistical process, according
to the standard GSBPM.
Figure 1:
Proposed integrated architecture
Collect [GSBPM Collect]
In the data collection phase different types of data are
acquired. Depending on the data provider, data sources
can be classified as:
- Internal data sources (e.g. direct survey collected
using electronic questionnaires);
- External data sources (e.g. data from administrative
sources, customs data for external trade).
Data can then be further divided, according to their
treatment, into:
- Data for ‘dissemination phase’ (e.g. administrative
data ready to be disseminated);
- Data for ‘process phase’ (e.g. customs data for
external trade).
For each subset of data sources, the related building
block can be identified1. Within this framework, the
proposed building blocks are:
- Primary Data Storage: at a conceptual level this
building block should store and manage raw data
from different types of source. For example, data
can be stored in relational databases to ensure
consistency, efficiency and flexibility. The building
1 According to the Enterprise Architecture Reference
Framework (EARF), a building block is a potentially re-
usable component that can be combined to build the
block should also provide ETL functionalities to
manage data transfer and capture from different
channels. Preliminary treatments such as filtering,
transcoding, normalization, translation and
codification can be applied to facilitate data
integration.
- External Data Storage: this building block should
store data ingested from external sources and ready
to be disseminated. It should also provide
functionalities to integrate the ingested data with
corporate INS metadata.
The described building blocks are closely related to the
metadata building block (described below). In this
stage, it is important for both elementary and
aggregated data to capture metadata about the
internal/external data sources (data provider, reference
contact, data format, etc.).
Process [GSBPM Process & Analyse]
This phase includes all types of data treatment (e.g.
cleansing, harmonization, validation) to transform the
raw data stored in INS into statistical output for
information systems needed in ESS. Examples include:
Metadata Management, Process Orchestrator, Primary Data
Storage.
84
Statéco n°113, 2019
statistical dissemination. The suggested building blocks
in the proposed architecture are:
- Working Data Storage: at a conceptual level this
building block should store and manage all the data
transformations resulting from data treatment. It
should also contain all auxiliary information
(administrative data, benchmark data from other
surveys, sample, etc.) needed to produce statistical
outputs.
- Clean Data Storage: this building block should store
and manage the ‘final’ clean microdata resulting
from statistical operations performed in Working
Data Storage.
- Aggregated Data Storage: this building block
contains the data (e.g. indicators or
multidimensional data) resulting from the
aggregation of clean microdata.
- Workflow management: each operation performed
in this phase is tied to a specific process step. This
building block should therefore specify the
sequence and the routing of the different process
steps. The use of workflow management will ensure
easy replication of statistical production across
domains and hence minimize the cost of adjusting
or expanding statistical production.
- Service catalogue: data treatment can be performed
through the invocation of statistical services -
programs implementing one or more statistical
methods (extract sample, calculate weights,
perform error checking, etc.) that can be invoked as
a service. The service catalogue is the global
repository that allows users to manage (search,
insert, update) the available statistical services.
This framework covers three of the main phases of the
statistical process, according to the standard GSBPM.
In Figure 1 the cog represents a statistical service,
while the arrow symbolizes the process steps managed
by the workflow management building block. In
general terms, statistical services are available in the
Service catalogue.
Disseminate [GSBPM Disseminate]
This phase is managed with the SDMX architecture and
tools used to feed the “.STAT” dissemination portal.
All data to be published, whether provided by external
sources or produced as an output of the process phase,
should be modeled in such a way to facilitate
processing by the SDMX tools.
Architectural principles & guidelines
The following architectural principles should guide
future activities according to Bruno and al. (2018) and
Scannapieco and Vaccari (2011):
1. Metadata-driven approach: metadata are a key
element in the proposed architecture. Standardized
metadata should be used in questionnaire
development, sampling, editing and imputation, etc.
Whenever possible, codes should be dynamically
generated from metadata;
2. Process and method standardization: harmonization
of statistical methodology and IT components
increases data quality;
3. Data storage: all data should be stored and managed
in relational databases;
4. Data processing: data manipulation and flow
control should be implemented using generalized
software based on web applications working on
databases;
5. Governance: shared governance across subject
matter divisions ensures harmonization of concepts
and minimizes survey-specific code.
Specific guidelines for each of the previously described
building blocks and for metadata are provided below.
Data Storage
The building blocks used in relation to storage of the
various types of data (primary/external/working data)
should abide by the following guidelines:
- Each object stored in a data repository should be
described in terms of structural/referential
metadata;
- All the changes that have occurred to a data object
over its lifecycle should be documented (data
lineage).
Workflow management
The building blocks in the process and management
standardization phase should be built to support the
standardization and reuse of statistical methodologies
(reduction of survey-specific procedures). They should:
- Permit scheduling of different process instances;
- Avoid overlapping of different user revisions;
- Provide a graphical user interface to (at least): (i)
pass parameters to services; (ii) invoke services;
(iii) monitor process execution; (iv) handle
exceptions; (v) access (read/write) and visualize
available data.
Service catalogue
The service catalogue should provide references to
technical/ methodological guidelines and a link to IT
services. Services in the catalogue should be Common
Statistical Production Architecture (CSPA) compliant,
meaning that they can be used as basic components in
the production chain.
Metadata
The different phases of a statistical process should be
described in terms of standardized metadata
85
Statéco n°113, 2019
(structural/referential)2. This cross-cutting building
block should provide functionalities to model the inputs
and outputs of the different services involved in
statistical processes. Further metadata should be
modelled according to the GSIM standard. This should
facilitate the harmonization of the concepts and
contents of the different statistical domains.
External trade statistical
process in the INS Integrated
Information System:
methodological improvements
in data processing
INS External trade statistics are based on Customs
administrative data monthly transmitted by Customs
Agency to INS. Raw data undergo different processing
phases from data acquisition until dissemination of
trade indicators. In the new data processing system
developed during the twinning project, each process
phase is metadata driven.
Structural metadata, such as variable definitions,
identifiers, standard classifications, are exploited
during each phase, from data acquisition until data
dissemination, while referential metadata such as
editing parameters are essential in data editing and error
imputation phase.
The structural metadata classification scheme adopts,
as much as possible, international harmonised
classification systems, such as the Harmonized
Commodity Description and Coding Systems (HS), the
UN Central Product Classification (CPC) for products
and Standard International Trade Classification (SITC),
standard Geonomenclature based on ISO 3166 coding
system for countries (Eurostat, 2017). However, a limit
to the full adoption of international classifications is
given by the administrative nature of trade data which
serve both statistical and national Customs needs. For
this reason, a strict cooperation between INS and
Customs is needed to reconcile specific national
definitions with international concepts and
classifications, through appropriate correspondence
relations.
Another important dimension which was proposed to
be introduced as structural metadata is a trader register
with traders’ identifiers, to be matched with statistical
business register. This is the key element to enlarge the
scope of traditional trade statistics by enabling
production of trade by enterprise characteristics
(Eurostat, 2018). Such feature, not yet implemented,
would require close collaboration with Customs and
fiscal Authorities in order to enable appropriate linking
of Customs traders tax identifiers to INS Business
Register. The proposed structural classification
metadata are represented in the figure 2.
Figure 2:
External trade structural classification metadata
Structural metadata undergo revisions in time.
Therefore, the metadata repository requires both start
and end date of validity defined for any classification
2 Structural metadata describe the meaning of the data used,
including the definition of a data element and a data set,
variable names, variable types, unit identifier, classification
identifier, etc. Referential metadata are the information
modality, in order to easily apply appropriate metadata
to trade flow time series.
objects necessary to run the process. These metadata contain
the process flow and all parameters, rules and auxiliary data
sets needed for the process steps involved.
86
Statéco n°113, 2019
While structural metadata are updated with low
frequency (standard classifications are typically revised
every few years), referential metadata such as editing
parameters need to be monthly updated, since they
closely follow changes in trade characteristics. The way
of calculating and updating these referential metadata
is described in the section below.
Data acquisition phase
This is a metadata-driven process phase. Data received
from Customs Authorities are stored in the INS Primary
Data Storage. A preliminary treatment, consisting in
formal validity checks, is performed while loading data
in the Working Data Storage. Each variable is checked
against the code list and format which is appropriate for
the specific data field. The applied validation rules are
based on a metadata system. Each concept type
(dimension, attribute, measure) is required to be
compliant with the expected trade data structure
according to the external trade structural classification
metadata repository.
Therefore, during the acquisition phase:
- Records which are not compliant with the structural
metadata are not uploaded into the working
database. They are eventually retrieved, after
correction of the fields which failed to satisfy the
validity rules. In case data rejection appears to be
due to unexpected structural changes in Customs
data (i.e. revision of Customs classifications for
products or countries, or modifications in field
formats), Customs are contacted and, eventually,
the INS system of structural metadata is updated;
- Records are further filtered in order to process only
statistically relevant Customs micro-data having
statistically relevant regimes;
- Micro-data are connected with structural metadata
needed to classify trade flows.
Preparation for data processing:
referential metadata for data editing
In this sub-phase, parameters needed for the new outlier
selection and error imputation are computed for the first
time or refreshed considering the new uploaded data.
Three sets of editing parameters are computed:
- Editing parameters-based unit values “uv”, i.e.
ratios between traded value, expressed in Tunisian
dinar, and net mass, in kg;
- Editing parameters for unit price “px”, i.e. ratios
between traded value, expressed in Tunisian dinar,
and supplementary unit, defined for specific
commodities (i.e. pieces, TJ, etc.);
- Editing parameters for unit weight “uw”, i.e. ratios
between net mass, expressed in kg, and
3 Robustness is associated with high breakdown points, 50%
for the median and 25% for quartiles. Such features make the
supplementary unit, for commodities for which
supplementary unit is required.
For each set of parameters, the same methodology is
applied, based on a robust method for asymmetric, right
skewed, distributions. The proposed methodology for
outlier detection is based on a non-parametric method
for asymmetric distributions (Tukey (1977), Thompson
(1999) and Hubert and Van der Veeken (2008)), largely
applied in several fields, and in external trade data
editing (Narilli and Nuccitelli, 2018).
In the INS application, trade transactions micro-data
over a set of 24 months from the current reference
period are stratified by product and flow. For such
strata, unit values, prices and weights distributions are
considered. As several economic data distributions, the
observed distributions are skewed to the right and need
to be symmetrized by a logarithmic transformation
before applying outlier detection methods. On the log-
transformed distributions, robust position indicators are
computed, namely median (𝑞2), first (𝑞1) and third (𝑞3)
quartile3. The position indicators are used to compute
editing parameters on the log-transformed distribution.
After final exponential transformation, editing
parameters are suitable to be used on the original
asymmetric distribution of trade data.
For each commodity and flow stratum, minimum T1
and maximum T2 editing parameters are computed as:
𝑇1 = 𝑒𝑥𝑝[𝑞1 − 𝑘(𝑞3 − 𝑞1)]
𝑇2 = 𝑒𝑥𝑝[𝑞3 + 𝑘(𝑞3 − 𝑞1)]
“k” is a parameter which can be tuned appropriately by
INS experts (typical values range from 1 to 3). Current
setting is k=1.5.
At the end of this step, editing parameters for unit
values (𝑇1𝑢𝑣, 𝑇2
𝑢𝑣), unit prices (𝑇1𝑝𝑥
, 𝑇2𝑝𝑥
), and for unit
weight (𝑇1𝑢𝑤, 𝑇2
𝑢𝑤), are used to update referential
metadata related to each traded product, together with
the exponential of the corresponding medians 𝑞2, to be
used for outlier imputation as described in the
following section.
Data processing: outlier detection and
imputation
Editing parameters computed as described in the
previous section are used for detecting outliers in the
appropriate product and flow strata of the current
reference month, while the knowledge of the median of
the distribution gives the possibility for automatic
imputation for wrong variables.
Few outliers with large impact in value and quantity
will be corrected manually, but the IT system provides
outlier detection method robust even in presence of 25%
outlier data.
87
Statéco n°113, 2019
the possibility of simply accepting the correction
automatically proposed or manually performing a
different correction.
The outlier detection and imputation phase is
performed in three steps: at first the statistical value
variable is inspected and corrected, then the net mass,
and finally the supplementary unit. Since the three
variables are correlated by unit values, unit prices and
unit weights, the lack of coherence among them can be
a reason not to allow automatic imputation for some
records.
Check and imputation of statistical values
Even if statistical value is a variable which is checked
at Customs level, there can be few cases of
misreporting.
The selection of potential outliers is performed only on
records with potential high positive impact, namely the
ones satisfying the following conditions:
𝑣𝑎𝑙𝑢𝑒 > 500 000 𝐷𝐼𝑁,
and
𝑢𝑣 > 𝑇2𝑢𝑣
The above condition is not sufficient to state that the
wrong variable is the statistical value, while the net
mass is correct. The needed additional information is
provided by supplementary unit, if available. In that
case, potential errors for records with supplementary
unit will be automatically corrected if both unit value
and unit price are outliers, while unit weight is not an
outlier, namely if all the following relations hold:
𝑢𝑣 > 𝑇2𝑢𝑣,
𝑝𝑥 > 𝑇2𝑝𝑥
,
(1 − 𝑡)𝑇1𝑢𝑤 < 𝑢𝑤 < (1 + 𝑡)𝑇2
𝑢𝑤,
𝑇1𝑢𝑤 ≠ 𝑇2
𝑢𝑤,
where t is a tolerance parameter set to 0.3.
If the above condition is satisfied, the correction
proposed for automatic correction by the system is:
𝑣𝑎𝑙𝑢𝑒𝑐𝑜𝑟𝑟𝑒𝑐𝑡𝑒𝑑 = 𝑁𝑒𝑡𝑀𝑎𝑠𝑠 ∙ 𝑇2𝑢𝑣.
If the conditions for automatic correction are not
satisfied, the records are sent to manual revision,
together with the above proposal for correction
provided by the system, 𝑣𝑎𝑙𝑢𝑒𝑐𝑜𝑟𝑟𝑒𝑐𝑡𝑒𝑑 .
For all outlier records sent to manual revision, the
system provides statisticians with editing parameters
and potential impact of the error in DIN
(impact=proposed value – original value), useful to
prioritize editing of records with very high impact.
The workflow for statistical value editing is
summarized in Table 1.
Table 1:
Editing scheme for statistical value
By applying the new methodology to a typical
reference month, about 0.04% of outlier records in
statistical value were imputed for export and 0.02% for
import.
Check and imputation for net mass and
supplementary unit
In this editing phase are selected as outliers:
- Records having unit value exceeding the maximum
editing parameter or lower than the minimum
editing parameter;
- Records having unit price exceeding the maximum
editing parameter or lower than the minimum
editing parameter.
Given the different potential impact on the aggregate
figures of the different potential errors, the correction
actions to be performed are differentiated as explained
below (see diagram 1).
All potential errors in the “blue area”, i.e. having value
> 500.000 dn or net mass > 10.000 kg are sent to
manual revision, but the system provides the proposal
for correction. Manual revision should be performed
also on records having value < 500.000 dn or net mass
< 10.000 kg for which there were less than 10
observations available for computing editing
parameters. Indeed, for such records computed
parameters are not robust enough;
88
Statéco n°113, 2019
Diagram 1:
External trade data revisions domains
All potential errors in the “orange area”, i.e. having
value between 10.000 dn and 500.000 dn and net mass
between 1.000 kg and 10.000 kg are submitted to
automatic revision. The automatic correction is not
performed in case there were less than 10 records
available to compute editing parameters;
Potential errors with low impact at micro-level in the
“white area” are left uncorrected. Indeed, even if their
impact can become relevant after aggregation, a further
macro-editing performed at the end of the micro-editing
process will detect potential residual anomalies.
For the proposals for correction or imputation, four
different situations can be found.
1) The record has no supplementary unit: the system
proposes a correction for net mass, according with
the formula
𝑁𝑒𝑡𝑀𝑎𝑠𝑠𝑐𝑜𝑟𝑟𝑒𝑐𝑡𝑒𝑑 = 𝑣𝑎𝑙𝑢𝑒Median(𝑢𝑣)⁄
2) The record has supplementary unit and both px and
uw are outliers: the system proposes a correction for
both net mass, as in point 1, and supplementary unit
as follows
𝑆𝑢𝑝𝑝𝑈𝑛𝑖𝑡𝑐𝑜𝑟𝑟𝑒𝑐𝑡𝑒𝑑 = 𝑣𝑎𝑙𝑢𝑒Median(𝑝𝑥)⁄
if (𝑇2𝑢𝑤 − 𝑇1
𝑢𝑤) > (𝑇2𝑝𝑥
− 𝑇1𝑝𝑥
)
or
𝑆𝑢𝑝𝑝𝑈𝑛𝑖𝑡𝑐𝑜𝑟𝑟𝑒𝑐𝑡𝑒𝑑 =𝑁𝑒𝑡𝑀𝑎𝑠𝑠𝑐𝑜𝑟𝑟𝑒𝑐𝑡𝑒𝑑
Median(𝑢𝑤)⁄
if (𝑇2𝑢𝑤 − 𝑇1
𝑢𝑤) ≤ (𝑇2𝑝𝑥
− 𝑇1𝑝𝑥
)
Indeed, the median of less broad distribution variable is
chosen for imputation.
3) The record has supplementary unit, px is not an
outlier, but both uv and uw are outliers: the system
proposes a correction only for net mass
𝑁𝑒𝑡𝑀𝑎𝑠𝑠𝑐𝑜𝑟𝑟𝑒𝑐𝑡𝑒𝑑 = 𝑣𝑎𝑙𝑢𝑒Median(𝑢𝑣)⁄
if (𝑇2𝑢𝑤 − 𝑇1
𝑢𝑤) > (𝑇2𝑢𝑣 − 𝑇1
𝑢𝑣)
or
𝑁𝑒𝑡𝑀𝑎𝑠𝑠𝑐𝑜𝑟𝑟𝑒𝑐𝑡𝑒𝑑 = 𝑆𝑢𝑝𝑝𝑈𝑛𝑖𝑡 ∙ 𝑀𝑒𝑑𝑖𝑎𝑛(𝑢𝑤)
if (𝑇2𝑢𝑤 − 𝑇1
𝑢𝑤) ≤ (𝑇2𝑢𝑣 − 𝑇1
𝑢𝑣)
4) The record has supplementary unit, uv is not an
outlier, but both px and uw are outliers: the system
proposes a correction for supplementary unit
𝑆𝑢𝑝𝑝𝑈𝑛𝑖𝑡𝑐𝑜𝑟𝑟𝑒𝑐𝑡𝑒𝑑 = 𝑣𝑎𝑙𝑢𝑒Median(𝑝𝑥)⁄
if (𝑇2𝑢𝑤 − 𝑇1
𝑢𝑤) > (𝑇2𝑝𝑥
− 𝑇1𝑝𝑥
)
or
𝑆𝑢𝑝𝑝𝑈𝑛𝑖𝑡𝑐𝑜𝑟𝑟𝑒𝑐𝑡𝑒𝑑 = 𝑁𝑒𝑡𝑀𝑎𝑠𝑠 /𝑀𝑒𝑑𝑖𝑎𝑛(𝑢𝑤)
if (𝑇2𝑢𝑤 − 𝑇1
𝑢𝑤) ≤ (𝑇2𝑝𝑥
− 𝑇1𝑝𝑥
)
In case only uw is an outlier, the system cannot propose
an automatic correction. The editing scheme is
summarised in Table 2.
Table 2:
Editing scheme for net mass and supplementary unit
89
Statéco n°113, 2019
By applying the new methodology to a typical
reference month, about 0.5% of outlier quantity records
were imputed for export, and 0.4% for import.
Finally, a macro-editing test is performed, looking for
evidence of residual outliers present in the system. The
year-to-year total growth rate (i.e. the percentage
growth rate of the reference month “m” and year “y”
with respect to the same month of the previous year) is
decomposed in contributions associated to (product,
partner country) cells, as follows:
𝑐𝑜𝑛𝑡𝑟𝑖𝑏(𝑐𝑒𝑙𝑙 = 𝑝𝑟𝑜𝑑𝑢𝑐𝑡, 𝑐𝑜𝑢𝑛𝑡𝑟𝑦)
= 100 ∗𝑣𝑎𝑙𝑢𝑒𝑐𝑒𝑙𝑙(𝑚, 𝑦) − 𝑣𝑎𝑙𝑢𝑒𝑐𝑒𝑙𝑙(𝑚, 𝑦 − 1)
∑ 𝑣𝑎𝑙𝑢𝑒𝑐𝑒𝑙𝑙𝑐𝑒𝑙𝑙 (𝑚, 𝑦 − 1)
Note that the sum of such contributions corresponds to
the total year-to-year total growth rate.
Contribution are then sorted: the higher and lower ones
are often associated to incorrect records to be further
investigated.
However, many cells giving high positive or negative
contributions can be associated to true economic
phenomena. Therefore, the final macro-editing is also a
tool for statisticians to have a final overview on the
important trade components in data to be disseminated.
The same decomposition can be then performed for
growth rate contributions in net mass and in
supplementary unit.
Indicators for dissemination: trade
balances and indices
After moving final edited micro-data in the final
database, trade indicators are computed. At first, trade
balances both at product and partner country
breakdown are computed and moved to the
dissemination Macro Database.
Finally, unit value and volume indices are computed.
Concerning unit value and volume indices calculation,
first steps for introducing a new methodology of
calculation in the new system were made. The proposed
methodology has the advantage of producing robust
indicators less sensitive to outliers (Anotori and Causo,
2008).
The proposed process consists in:
- No “a priory” selection of a specific basket of
products4;
- Production of chained indices where the base year
is yearly refreshed;
4 However, specific products which have “unique” quality
content, so that they cannot be compared with any equivalent
product traded in the base period, are excluded from the
- Exclusion from unit value calculation of
transactions with outlier unit value;
- Imputation of outlier elementary indices;
- Estimation of base unit value and Laspeyres
weights for products not traded in the previous year;
- Aggregation of Laspeyres, Paasche and Fisher
indices;
- Chaining moving base indices to the fixed reference
year.
In a hopefully future collaboration, the proposed
methodology will be implemented and tested.
Results and perspectives in the
pilot domain
The improvements achieved with the new system put in
place in 2018 concern both statistical and IT
management of the process. On the statistical side,
streamlining the process gave the following
advantages:
- The new integrated system is entirely managed by
statisticians;
- The new integrated system allows to have an
organized metadata repository and facilitate the
update of his different files;
- The statistician has the possibility to define the
parameter of control to be applied in the process and
can also validate the correction proposed by the new
system both manually and in automatic way;
- The proposed process offers more controls on data
at elementary level which will improve the quality
of data value, net mass and the supplementary unit;
- The automatization of all the controls steps can
reduce the time to validate the data, so the new
process is more efficient for quality and timeliness.
On the IT management side, the improvements
involved several aspects:
- User Authentication and permissions: The
application is designed with a built-in security
system, which ensures a high level of data security
and confidentiality, against unauthorized access or
unintentional usage. System profiles are set for
managing user accounts and roles to assign
permissions that control access;
- Parametrizable application for data quality
assurance: The system is based on several
parameters requested and managed by the external
calculation (for example, Aircraft, Ships, Works of art,
Jewellery).
90
Statéco n°113, 2019
trade administrators. The management system of
these parameters allows easy and fluid navigation to
users in order to ensure the verification and
correction of data;
- Data consistency, standardization, and user-friendly
management system: The system is designed for
non-IT specialist users as the subject unit users can
easily access the system according to their special
requests and generate the final reports. The
centralized information system increases data
integrity, security, support and storage capacity and
it helps to improve the quality of data by ensuring
consistency and traceability of corrections
throughout the various processing steps.
Further future developments in the pilot domains are
foreseen after the end of the project. An important
aspect to be introduced in every statistical domain
dealing with economic variables is linking data with
business registers. At European level, External Trade
data production divisions are in charge of the statistical
production of trade data by enterprise characteristics
(TEC data). TEC statistics are based on integration of
International Trade in Goods Statistics data with
Business Registers and allow reading trade data under
business statistics perspective. The indicators produced
in such relatively new statistical domain shed light on
businesses behind trade flows, defining their
characteristics in terms of business activity and
enterprise size. These indicators are very useful for
users and policy makers.
Moreover, having access to the national Business
Register, can improve the quality of External Trade
data production, by allowing to:
- Assess the coherence of traded values in data
received by Customs with the size and economic
activity of traders;
- Monitor on a monthly base the coherence in the
time series of traded values at enterprise level;
- Assess coherence between traded products and
economic activity of trader enterprises.
During the twinning project it was advised to take
advantage from the integrated architecture for
statistical process for integrating data from different
statistical INS domain, both for data validation
purposes and for producing innovative statistical
products, such as TEC (Eurostat, 2018).
5 Detailed documentation on IST project can be found at:
http://webrzs.stat.gov.rs/ISTSite/IST_Home.aspx
Implementation roadmap for an
extension of the solutions
developed for the External
Trade pilot application to other
domains
Short term roadmap
The first activities to be performed in the short term
pertain to the extension of the solutions developed for
the External Trade pilot application to other domains.
The main principles in this pilot are:
- Data stored in relational database;
- Workflow management to implement
transformation procedures for data processing;
- Simplified interface to help the statisticians to
manage the statistical process independently of IT
staff.
Medium term roadmap
While the pilot experience is being applied to other
statistical domains, the following medium-term
activities should be carried out:
Metadata
GSIM training: INS technicians should familiarize
themselves with the GSIM standard. They could, for
example, read the documentation and/or organize some
training or study visits at national statistical institutes
that are more advanced in GSIM use.
Analysis of case studies: The CSPro integration
implemented in the ISTAT-Ethiopia cooperation
project and the Serbian IST5 solution must be studied
to understand the pros and cons of both solutions.
Decision: after the above activity, INS should decide
whether to use one existing solution (possibly with
some modifications or adaptations) or to develop in-
house solutions, which must however be compliant
with the analysed alternatives.
Implementation: INS will develop or adapt the
metadata system according to the following principles:
- GSIM-compliant statistical concepts, valid for
every statistical domain and designed to be used as
active metadata;
- Integration with the data collection system,
including process controls and editing rules;
- Coherence with. STAT for dissemination.
91
Statéco n°113, 2019
Data collection:
INS should develop/choose one or two metadata-
compliant collection system(s) with the following
characteristics:
- Metadata-driven: the structure of the data to be
collected should be stored in the metadata system;
- Questionnaire design: the data collection system
should provide an interface to design the
questionnaire, starting from the contents (e.g. units,
variables, classifications) available in the metadata
system;
- Questionnaire microdata: the output should be
stored in a relational database coherent with
metadata.
Processing system
The processing system is implemented after the data
collection system. It will have the following
characteristics:
- Metadata-driven: deriving data flows from
metadata;
- Apply editing rules: rules should also be stored in
the Metadata system using SQL or VTL6 format;
- Manage workflows: the workflow should provide
the following features: pass parameters to services,
service invocation, process execution monitoring,
exception handling, access and visualization of
available data;
- Service catalogue: statistical services to be used in
the workflow will be chosen from a catalogue where
all services (CSPA compliant?) will be stored.
References
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92
Statéco n°113, 2019
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*Modou Ndour Faye, Agence nationale de la statistique et de la démographie (Sénégal), Bureau des comptes
trimestriels et des études analytiques, [email protected], Dominique Ladiray, Institut national de la
statistique et des études économiques (France), Département des méthodes statistiques, [email protected],
Adnen Lassoued, Institut national de la statistique (Tunisie), Direction générale, [email protected], Béchir
Maghrebi, Institut national de la statistique (Tunisie), Direction de la conjoncture, [email protected] ; Amal
Mansouri, Haut-Commissariat au Plan (Maroc), Institut national d’analyse de la conjoncture, [email protected]
Les effets du Ramadan sur les prix :
une analyse comparative sur 3 pays M. N. Faye, D. Ladiray, A. Lassoued, B. Maghrebi, A. Mansouri*
Le mois du Ramadan, 9e mois du calendrier de l’Hégire, est certainement l’un des moments les plus importants de l’année musulmane. Mois de jeûne et de prières, il peut se traduire par un changement assez fort du rythme de l’activité économique. Les effets du Ramadan sur les prix à la consommation sont aussi statistiquement réels et plus importants au Maroc qu’au Sénégal et en Tunisie. Ils se concentrent dans quelques secteurs : les produits alimentaires, l’habillement, quelques postes de l’aménagement de la maison, la restauration et les services d’hébergements. Leur impact en termes réels est cependant relativement limité : le mois du Ramadan serait ainsi à l’origine d’une hausse pouvant atteindre 10 % des prix de certains produits alimentaires au Maroc, contre un maximum de 2 % et 3 % pour la Tunisie et le Sénégal. Ces évolutions sont dues à la dynamique de la demande alimentaire des ménages liée aux pratiques culturelles mais traduisent aussi les disparités en termes de réglementation publique des prix au niveau des 3 pays. Ces estimations économétriques sont obtenues à l’aide de modèles Reg-ARIMA qui prennent en compte les spécificités calendaires des trois pays et une attention toute particulière a été portée à la stabilité des résultats. La faiblesse relative des effets prix, par rapport notamment au ressenti personnel des gens, peut en partie s’expliquer par le souhait de faire une comparaison internationale : les analyses ne peuvent alors se faire qu’à des niveaux relativement agrégés qui peuvent mélanger des produits à prix libre et des produits à prix régulés par l’État. L’analyse statistique montre aussi que les effets du Ramadan de certains produits évoluent avec le temps, évolution qui n’est pas prise en compte dans les modèles utilisés.
Introduction
Le mois du Ramadan, 9ème mois du calendrier de
l’Hégire, est certainement l’un des moments les plus
importants de l’année musulmane. Mois de jeûne et de
prières, la période du Ramadan s’accompagne
habituellement d’une modification du comportement
culturel, social et économique des gens dans la plupart
des pays musulmans. Le plus souvent la rupture du jeûne
se fait en famille, autour de plats traditionnels ; c’est aussi
l’occasion d’achats spécifiques en habillement, en
équipements ménagers etc. Le rythme même de l’activité
économique est affecté comme cela a été montré dans
plusieurs études.
Ainsi pour la Tunisie, Fournier et Nemsia (1997)
montrent l’impact du calendrier lunaire et du Ramadan
sur l’indice de la production industrielle (IPI) des
brasseries, du textile habillement et du cuir ainsi que sur
le nombre de mariages. Bessa et al. (2008) confirment
l’impact négatif du Ramadan sur l’IPI et montrent son
effet très positif sur la série des billets et monnaie en
circulation, au moment de la préparation des principales
fêtes musulmanes (Aïd el-Adha, Aïd el-Fitr, Ras el-Am).
94
Statéco n°113, 2019
Les effets sur l’activité réelle sont tout aussi clairs dans
d’autre pays :
• En Malaisie, Norhayati et al. (2007) montrent que les
différentes fêtes mobiles célébrées dans le pays (Aïd
el-Fitr, nouvel an chinois, Deepvali) ont un effet
significatif sur de nombreuses séries : importations,
exportations, production d’huile de palme,
immatriculations de véhicules, consommation
d’électricité etc. ;
• Au Maroc, ElGuellab et al. (2013), comme Amrani et
Skalli (2009), montrent que le transport ferroviaire
baisse pendant le mois du Ramadan mais augmente
significativement pendant les autres fêtes
musulmanes (Aïd el-Adha, Aïd el-Fitr, Ras el-Am,
Mawlid). Sarhani et Afia (2014) constatent aussi
l’impact de ces fêtes d’une part sur le transport aérien
et d’autre part sur la production et les ventes de sucre ;
• Au Pakistan, Riazuddin et Khan (2002) et Bukhari et
al. (2011) montrent que la demande de monnaie est
plus forte pendant le mois du Ramadan, et au
contraire plus faible pendant les mois de Mouharram
et Chawwal ;
• Au Sénégal, Faye (2019) évalue l’impact de la fête du
Magal de Touba sur les indices de chiffre d’affaires
et les prix à la consommation.
Les effets sur les prix à la consommation sont plus
contrastés. Ainsi, ElGuellab et al. (2013) montrent que
l’indice des prix à la consommation des produits
alimentaires tend à augmenter au Maroc pendant l’Aïd
el-Adha et le mois du Ramadan, conclusions partagées
par Yucel (2005) pour la Turquie, et Kazi Abrar et al.
(2017) mettent en évidence une hausse du prix du sucre
au Bengladesh pendant le Ramadan. Mais Bukhari et al.
(2011) ne détectent pas d’effet significatifs sur les prix à
la consommation au Pakistan.
Quelle que soit la méthode utilisée - régression sur
indicatrices, modèles Reg-ARIMA, modèles à
composantes inobservables - et quelles que soient les
fêtes mobiles considérées (musulmanes, chinoises,
hindoues, chrétiennes), toutes ces études concluent sur la
nécessité de prendre en compte ces évènements
spécifiques au risque de mal spécifier le modèle de la
série et d’obtenir des prévisions et des décompositions
sous-optimales.
Ce travail se concentre sur les effets du Ramadan sur les
prix à la consommation et compare les résultats pour 3
pays fortement musulmans : le Maroc (99,9 %), le
Sénégal (95,9 %) et la Tunisie (99,8 %).
La partie 2 présente les différents calendriers utilisés,
grégorien et hégirien, pour construire les régresseurs
modélisant les effets Ramadan. Dans une troisième
partie, nous détaillons la méthodologie : les données, leur
nécessaire harmonisation pour permettre une
comparaison, le modèle économétrique utilisé et les
limites de cet exercice. La partie 4 présente les résultats
et une cinquième partie conclut et propose quelques
pistes d’amélioration.
Les effets de calendrier
La plupart des indicateurs économiques sont de nos jours
calculés et publiés selon le calendrier grégorien, dont les
caractéristiques expliquent et génèrent les effets de
calendrier.
Quelques mots sur les calendriers
Les calendriers utilisés de par le monde sont basés sur les
mouvements relatifs de la Terre, de la Lune et du Soleil.
Ces calendriers se divisent en trois catégories
principales :
• Les calendriers solaires, comme les calendriers
grégorien et julien, sont basés sur le mouvement de la
terre autour du soleil. Dans ces calendriers l’année est
une approximation de l’année tropicale, durée que la
terre prend pour aller d’un point fixe, comme un
équinoxe ou un solstice, au suivant ;
• Les calendriers lunaires, comme le calendrier
islamique (ou calendrier de l’Hégire), sont quant à
eux basés sur la rotation de la lune autour de la terre.
Dans ces calendriers, le mois est une approximation
du “mois synodique”, le temps qui sépare deux
nouvelles lunes ;
• Les calendriers luni-solaires, comme le calendrier
chinois ou le calendrier hébraïque, sont
principalement basés sur la lune et les mois reflètent
le cycle lunaire. Mais de temps à autre, de nouveaux
mois (le second mois d’Adar par exemple dans le
calendrier hébraïque) sont ajoutés pour synchroniser
l'année calendaire et l’année solaire sur un cycle (le
cycle de Méton de 19 ans dans le cas du calendrier
hébraïque).
Même si le calendrier grégorien est utilisé à travers le
monde entier, d’autres calendriers - solaires, lunaires ou
luni-solaires - restent employés pour déterminer la date
de fêtes religieuses dans de nombreux pays. Parmi ces
fêtes, on peut citer : Pâques, le Ramadan, le nouvel an
chinois, Roch Hachana, Diwali, etc.
Le calendrier grégorien
Dans le calendrier grégorien, une année normale est faite
de 12 mois - janvier, février, mars, avril, mai, juin, juillet,
août, septembre, octobre, novembre et décembre - qui
contiennent un nombre de jours égal respectivement à 31,
28, 31, 30, 31, 30, 31, 31, 30, 31, 30 et 31. Une année
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Statéco°113, 2019
normale contient donc 365 jours, ce qui est de fait un peu
trop court dans la mesure où la terre met environ 365
jours et 6 heures pour accomplir une révolution autour du
soleil. Une meilleure approximation de l’année solaire est
obtenue en ajoutant 1 jour à certaines années, les années
bissextiles, pour lesquelles le mois de février aura 29
jours. Une année bissextile est une année divisible par 4
mais pas par 100, sauf si elle est divisible par 400. Ainsi,
1900 ne fut pas une année bissextile, 2000 en était une et
2100 ne sera pas bissextile. On a donc in fine 97 années
bissextiles sur une période de 400 ans. Il reste cependant
une petite erreur d’approximation d’environ 1 jour tous
les 4000 ans que le calendrier grégorien ne prend pas en
compte.
Toute période de 400 ans contient donc 400 * 365 + 97 =
146 097 jours, soit exactement 20 871 semaines. Le
calendrier grégorien est donc périodique de période 400
ans. La longueur moyenne d’une année sur ce cycle est
de 146 097/400 = 365,2425 jours et la longueur moyenne
d’un mois est de 365,2425/12 = 30,436875 jours.
Le calendrier de l’Hégire
Le calendrier musulman ou calendrier de l’Hégire (hijri)
est un calendrier lunaire, fondé sur une année de 12 mois
lunaire de 29 à 30 jours chacun. L’an 1 de ce calendrier a
débuté le premier jour de l’Hégire, le 1er Mouharram (le
15 ou le 16 juillet 622 de l’ère chrétienne).
Il existe une variation du calendrier musulman, connue
sous le nom de calendrier musulman tabulaire ou
calendrier fatimide, dans laquelle la longueur des mois
est déterminée par des règles de calcul et non par
observation ou calcul astronomique.
L’année de ce calendrier comporte 354 ou 355 jours,
répartis en 12 mois de 30 et 29 jours alternativement, dont
seul le douzième et dernier (dhou al-hijja) compte un
nombre variable de jours (29 ou 30). Sont dites
communes les années où ce mois compte 29 jours, et où
l’année compte par conséquent 354 jours. Sont dites
abondantes les années où ce mois compte 30 jours, et où
l’année compte 355 jours.
Les années communes ou abondantes s’intercalent selon
un cycle de 30 années comptant 19 années communes et
11 années abondantes. Il existe 4 versions principales de
ce cycle trentenaire basées sur les contributions
d’astronomes de pays de tradition musulmane. Selon la
version, sont abondantes les années :
• 2, 5, 7, 10, 13, 15, 18, 21, 24, 26, et 29 - Algorithme
koweïtien ; Kushyar Ibn Labban (X-XIe siècle) ;
• 2, 5, 7, 10, 13, 16, 18, 21, 24, 26, et 29 - Version la
plus commune ;
• 2, 5, 8, 10, 13, 16, 19, 21, 24, 27, et 29 - Tables de
conversion d’origine indienne ;
• 2, 5, 8, 11, 13, 16, 19, 21, 24, 27, et 30 - Habash al-
Hasib (IXe siècle), Al-Biruni (X-XIe siècle).
L’année moyenne au cours de ce cycle de 30 ans est donc
de (19 * 354 + 11 * 355)/30 = 354,36667 jours, valeur
qui ne diffère que de 0,0004 jour (moins de 35 secondes)
de l’année lunaire astronomique et permet ainsi de garder
le calendrier synchronisé sur les lunaisons pour les 2 500
prochaines années. L’année musulmane ayant 10 à 12
jours de moins que l’année grégorienne (selon que celle-
ci est bissextile ou non, et que l’année musulmane est
abondante ou commune), le nouvel an musulman
survient chaque année civile en avance de ce même
nombre de jours par rapport à l’année solaire, et chaque
date du calendrier musulman (dont notamment les fêtes
religieuses et le jeûne du mois du Ramadan) « transite »
donc progressivement par toutes les saisons.
Dans la pratique, c’est l’observation à l’œil nu de la
nouvelle lune qui signale le début du mois, et non le
calcul astronomique, ce qui explique que les dates
puissent varier d’un pays à l’autre. À titre d’illustration,
le 1er Chawwal 1426, jour de célébration de l’Aïd el-Fitr,
correspondait au mercredi 2 novembre 2005 en Libye et
au Nigéria, au jeudi 3 novembre dans 30 pays dont
l’Algérie, la Tunisie, l'Egypte, l’Arabie saoudite et une
partie des´ Etats-Unis, au vendredi 4 novembre dans 13
pays dont le Maroc, l’Iran, le Bangladesh, l’Afrique du
Sud, le Canada, une partie de l’Inde et une partie des
États-Unis, et au samedi 5 novembre dans une partie de
l’Inde.
Les différents effets de calendrier
Fondé sur la rotation de la Terre autour du Soleil, notre
calendrier est directement lié aux saisons et la
« saisonnalité » est par nature l’effet de calendrier le plus
important et le plus connu.
L’effet jours ouvrables
Mais dans le calendrier, les mois, ou les trimestres, ne
sont pas directement comparables. Ils n’ont pas le même
nombre de jours, ce qui constitue essentiellement un effet
saisonnier, et la composition des mois en jours varie d’un
mois à l’autre et d’une année à l’autre. Ainsi, mai 2015
avait 5 samedis, un de plus que mai 2014, avril 2015 et
juin 2015. Dans le secteur du commerce de détail, ce
samedi de plus ou de moins peut rendre les comparaisons
annuelles et mensuelles plus difficiles.
Cet effet, directement lié à la composition en jours du
mois ou du trimestre, est appelé « effet de jours
ouvrables ».
Par ailleurs, les fêtes nationales sont souvent liées à une
date, pas à un jour spécifique. Ainsi, dans les pays
catholiques, Noël est toujours le 25 décembre mais pas
toujours un dimanche. Comme ces fêtes sont le plus
96
Statéco n°113, 2019
souvent associées à des jours fériés, elles peuvent avoir
un impact sur certains secteurs de l’économie et il est
recommandé de les prendre en compte dans l’effet jours
ouvrables.
Les fêtes mobiles
Certaines fêtes nationales commémorent des événements
religieux dont les dates sont souvent liées à d’autres
calendriers et, exprimées dans le calendrier grégorien,
bougent dans notre année solaire. C’est le cas pour
Pâques dont la date, liée à la pleine lune, est
habituellement exprimée dans le calendrier grégorien
pour les pays catholiques et dans le calendrier julien pour
les pays orthodoxes. C’est encore le cas pour le Ramadan
dont la date est aussi liée à la lune et exprimée dans le
calendrier de l’Hégire.
Ces événements ont parfois un impact sur certains
secteurs de l’économie. Ainsi, Bessa et al. (2008) ont mis
en évidence l’effet du Ramadan sur l’économie
tunisienne et ont montré que la fête de Pâques catholique
avait un impact significatif dans le secteur du tourisme
lié aux vacances prises à ce moment en France et en
Allemagne notamment.
La datation de ces événements dans le calendrier
grégorien peut s’avérer assez complexe et des
algorithmes ont été établis pour convertir une date d’un
calendrier spécifique dans un autre1.
Les fêtes mobiles peuvent avoir deux effets distincts :
• D’abord, des jours fériés sont souvent accordés pour
célébrer l’événement, qui sont généralement inclus
dans l’effet jours ouvrables. On peut cependant
vouloir estimer l’effet « immédiat » de telle ou telle
fête comme dans Bessa et al. (2008) ;
• Ensuite on peut parfois observer un changement de
l’activité dans les jours qui précèdent ou suivent
l’événement. Ainsi, les ventes du commerce de détail
ont tendance à augmenter les jours qui précèdent
Pâques ou le nouvel an chinois, ou bien les derniers
jours du mois du Ramadan.
Des modèles à impact ont été développés pour estimer
cet « effet avant-après » sur l’activité. Le même type
d’effet peut bien entendu être observé sur les fêtes
nationales fixes comme Noël, la fête du Travail, etc. Mais
dans le cas des fêtes mobiles, l’effet peut avoir un
caractère non saisonnier significatif et il est alors
souhaitable de corriger les séries présentant ce type
d’effet.
1 Voir par exemple l’ouvrage de Dershowitz et Reingold (2008).
Méthodologie
Les données
Les données sur les indices de prix à la consommation
(IPC) des trois pays proviennent des bases de données du
Haut-commissariat au plan (Maroc), de l’Agence
nationale de la statistique et de la démographie (Sénégal)
et de l’Institut national de la statistique (Tunisie).
L’année de base de l’IHPC du Sénégal est 2008, 2006
pour celle du Maroc et 2010 pour la Tunisie.
Les périodes retenues de l’IPC pour les trois pays dans le
cadre de cet exercice sont :
• IPC Maroc (base 100 : 2006), janvier 2007 à
septembre 2018 ;
• IHPC Sénégal (base 100 : 2008), janvier 2009 à
décembre 2018 ;
• IPC Tunisie (base 100 : 2010), janvier 2000 à
septembre 2018.
Du fait des différences de cultures et des diversités des
trois pays, un important travail d’harmonisation a été
réalisé dans le but de disposer d’une nomenclature
commune pour une meilleure comparaison des effets du
Ramadan entre les trois pays. Un regroupement en 104
postes a été fait, qui est présenté en annexe.
Le modèle de base
Le modèle de base utilisé pour analyser les séries de prix
est un modèle de régression avec erreurs ARIMA dont on
trouvera une présentation détaillée dans Ladiray (2018).
Le modèle global de décomposition d’une série
temporelle s’écrit, sous sa forme additive :
𝑋𝑡 = 𝑇𝐶𝑡 + 𝑆𝑡 + 𝑇𝐷𝑡 + 𝑀𝐻𝑡 + 𝑂𝑡 + 𝐼𝑡 (1)
Où :
• 𝑋𝑡 est la variable brute (les indices de prix) ;
• 𝑇𝐶𝑡 est la tendance-cycle ;
• 𝑆𝑡 est la saisonnalité ;
• 𝑇𝐷𝑡 est l’effet jours ouvrables ;
• 𝑀𝐻𝑡 est l’effet lié aux fêtes mobiles ;
• 𝑂𝑡 représente les points atypiques et les ruptures de
la série ;
• et 𝐼𝑡 est la composante irrégulière.
Dans les principales méthodes de désaisonnalisation, X-
13ARIMA-SEATS (U.S. Census Bureau, 2017) et
97
Statéco°113, 2019
TRAMO-SEATS (Gomez and Maravall, 1997), ce
modèle est repensé sous forme Reg-ARIMA (modèle de
régression avec erreurs ARIMA) :
{𝑋𝑡 = 𝑇𝐷𝑡 + 𝑀𝐻𝑡 + 𝑂𝑡 + 𝑍𝑡
𝑍𝑡 = 𝑇𝐶𝑡 + 𝑆𝑡 + 𝐼𝑡
où 𝑍𝑡 suit un modèle ARIMA (𝑝, 𝑑, 𝑞)(𝑃, 𝐷, 𝑄)𝑠
La modélisation des effets de jours ouvrables
Les versions actuelles de X-13ARIMA-SEATS et de
TRAMO-SEATS utilisent le modèle suivant pour
estimer les effets de jours ouvrables :
𝑋𝑡 = 𝛽0𝐿𝑌𝑡 + ∑ 𝛽𝑗(𝑁𝑗𝑡 − 𝑁7𝑡)
𝑗=6
𝑗=1
+ 𝑍𝑡 (2)
où :
• 𝑋𝑡 est la variable brute à décomposer ;
• 𝑍𝑡 est un résidu qui suit un modèle ARIMA (𝑝, 𝑑, 𝑞)(𝑃, 𝐷, 𝑄)𝑠 ;
• 𝐿𝑌𝑡 est le régresseur relatif aux années bissextiles ;
• 𝑁𝑗𝑡 est le nombre de jours j dans le mois
correspondant à la date t, où j = 1 désigne le lundi, j =
2 le mardi, ..., et j = 7 le dimanche ;
• 𝛽𝑗 est le coefficient (qui ne dépend pas du temps) du
contraste (𝑁𝑗𝑡 − 𝑁7𝑡), pour 1 ≤ 𝑗 ≤ 6,
• avec 𝛽7 = − ∑ 𝛽𝑗𝑗=6𝑗=1
Ce modèle peut être généralisé pour tenir compte des
jours fériés civils ou religieux du pays. Dans ce cas, un
jour férié sera considéré comme un dimanche (et donc
rajouté à 𝑁7𝑡) et, s’il tombe par exemple un lundi, retiré
du nombre de lundi 𝑁1𝑡.
Les fêtes liées au calendrier de l’Hégire
Les fêtes mobiles célébrées dans nos trois pays dépendent
du pays (Tableau 1).
• Le Ras el-Am el-Hijri commémore le jour où le
Prophète Mohammed est arrivé à Médine après avoir
quitté La Mecque. C’est le premier jour du calendrier
musulman.
• L’Achoura (Tamkharit au Sénégal) commémore pour
les musulmans sunnites le jour où Dieu a sauvé Moïse
du Pharaon et, pour les musulmans chiites, le
massacre de l’imam Hossein et de 72 membres de sa
famille et partisans par le califat omeyyade à Kerbala
en Irak. Cette fête est célébrée le 10 du mois de
Mouharram.
• Le Magal de Touba est l’une des fêtes musulmanes
les plus importantes au Sénégal (Faye, 2019).
Célébrée le 18 du mois de Safar, elle commémore le
départ en exil de Cheikh Ahmadou Bamba, fondateur
de la confrérie musulmane des Mourides (Al
mouridiyya).
Tableau 1
Les fêtes musulmanes célébrées au Maroc, au Sénégal et en Tunisie et leur durée
Événements Date Maroc Sénégal Tunisie
Ras El Am 01 Mouharram 1 1
Achoura 10 Mouharram 1 (Tamkharit)
Magal de Touba 18 Safar 1
Mawlid 12 Rabia al awal 2 1 (Gamou) 1
Mawlid (Baptême) 18 Rabia al awal 0
Ramadan 01 Ramadan (29) (29) (29)
Aid el-Fitr 01 Chawwal 2 1 (Korité) 2-3
Aid el-Adha 10 Dhou al-hijja 2 1 (Tabaski) 2
• Le Mawlid (Gamou au Sénégal) est la fête
musulmane qui célèbre la naissance du Prophète
Mohammed. Elle se commémore généralement le 12
du premier mois de Rabi, troisième mois de l’année
musulmane.
• L’Aïd el-Fitr (Aïd signifie fête et Fitr la rupture),
Korité au Sénégal, est une fête musulmane marquant
la rupture du Ramadan. Elle est célébrée le premier
jour du mois de Chawwal. Elle est aussi parfois
appelée Aïd es-Seghir (la petite fête) par opposition à
l’Aïd el-Kebir, la grande fête.
• L’Aïd el-Adha (signifiant littéralement « la fête du
sacrifice »), Tabaski au Sénégal, est l’une des fêtes
musulmanes les plus importantes. Elle marque
98
Statéco n°113, 2019
chaque année la fin du pèlerinage à La Mecque et a
lieu le 10 du mois de Dhou al Hijja, dernier mois du
calendrier musulman. Cette fête commémore la
soumission d’Abraham à Dieu, lorsque le patriarche
était prêt à sacrifier son fils aîné sur son ordre. Elle
est aussi parfois appelée Aïd el-Kebir (la grande fête).
Chaque fête peut être modélisée simplement, soit en
incluant son effet dans les régresseurs pour jours
ouvrables au même titre que les jours fériés civils, soit en
construisant un régresseur spécifique égal à zéro si la fête
n’affecte pas le mois, et au nombre de jours de la fête
dans le cas contraire.
Les régresseurs liés au mois du Ramadan
L’idée de base est de construire pour chaque évènement
un régresseur modélisant l’impact de la fête,
proportionnel au nombre de jours de l’évènement dans le
mois m, comme l’illustre la figure 1.
Nous utilisons dans cette étude 3 régresseurs : un
régresseur pour l’ensemble du mois du Ramadan
(Ramadan) et deux autres régresseurs pour la première et
la deuxième quinzaine du mois (Ramadan1 et
Ramadan2). Le tableau 2 montre la valeur des
régresseurs pour le Maroc en 2008 et 2009.
Figure 1
Modèle à effet constant
• En 2008 le Ramadan a commencé le 2 septembre et
s’est terminé le 30 septembre. Il a donc duré 29 jours,
tous en septembre (régresseur Ramadan). La première
quinzaine (Ramadan1) et la seconde quinzaine
(Ramadan2) étaient donc aussi en septembre.
• En 2009 le Ramadan a commencé le 22 août et s’est
terminé le 20 septembre. Il a donc duré 30 jours dont
10 en août et 20 en septembre (régresseur Ramadan).
La première quinzaine (Ramadan1) était donc à
cheval sur les deux mois (10 jours en août et 5 jours
en septembre) et la seconde quinzaine était en
septembre.
L’estimation du modèle
Le logiciel JDemetra+ version 2.2.2 a été utilisé pour les
calculs. Ce logiciel peut mettre en œuvre un algorithme
de modélisation automatique (AMI) qui permet de :
• déterminer le modèle de composition de la série
(additif ou multiplicatif) ;
• détecter et corriger les ruptures dans la série ;
• détecter et corriger les éventuels effets de calendrier
(effets de jours ouvrables et effets de fêtes mobiles
comme Pâques) ;
• prendre en compte des régresseurs spécifiés ;
• ajuster aux « résidus » de la régression un modèle
ARIMA ;
• estimer les éventuelles valeurs manquantes ;
• prévoir et de rétropoler la série étudiée.
On trouvera une description très détaillée de l’algorithme
dans Gómez et Maravall (1998).
Dans un premier temps, c’est le modèle général de
l’équation 1 qui a été estimé avec 7 régresseurs
modélisant les effets de jours ouvrables et un régresseur
spécifique modélisant l’effet global du Ramadan :
𝑋𝑡 = 𝛽0𝐿𝑌𝑡 + ∑ 𝛽𝑗(𝑁𝑗𝑡 − 𝑁7𝑡)
𝑗=6
𝑗=1
+ 𝛼Ramadan𝑡 + 𝑂𝑡
+ 𝑍𝑡 (3)
où 𝑍𝑡 suit un modèle ARIMA (𝑝, 𝑑, 𝑞)(𝑃, 𝐷, 𝑄)𝑠.
Les effets de jours ouvrables, modélisés en tenant compte
des spécificités des calendriers nationaux, se sont révélés
non significatifs et la grande majorité des séries se sont
avérées multiplicatives.
Pour les estimations finales, le modèle a donc été
simplifié en supprimant les effets de jours ouvrables. La
stabilité des régresseurs a été testée sur le passé de la série
en la tronquant, par exemple en s’arrêtant en janvier 2013
et en ré-estimant les coefficients en rajoutant un point à
chaque fois.
99
Statéco°113, 2019
Tableau 2
Les régresseurs utilisés pour mesurer l’effet du Ramadan au Maroc pour 2008 et 2009
Année Mois Début du
Ramadan
Fin du
Ramadan
Ramadan Ramadan1 Ramadan2
2008 1 0 0 0
2008 2 0 0 0
2008 3 0 0 0
2008 4 0 0 0
2008 5 0 0 0
2008 6 0 0 0
2008 7 0 0 0
2008 8 0 0 0
2008 9 02/09/2008 30/09/2008 29 15 14
2008 10 0 0 0
2008 11 0 0 0
2008 12 0 0 0
2009 1 0 0 0
2009 2 0 0 0
2009 3 0 0 0
2009 4 0 0 0
2009 5 0 0 0
2009 6 0 0 0
2009 7 0 0 0
2009 8 22/08/2009 10 10 0
2009 9 21/09/2009 20 5 15
2009 10 0 0 0
2009 11 0 0 0
2009 12 0 0 0
Les principales limites de l’étude
Dans chaque pays, l’État peut fixer ou réguler certains
prix et des importations « préventives » permettent
d’assurer la disponibilité de produits de base pour éviter
une certaine pénurie et une flambée des prix. Cela peut
expliquer certains résultats a priori surprenants2. Par
ailleurs, la présence dans un poste de la nomenclature
d’un produit dont le prix est fixé par l’État peut lisser les
évolutions de l’indice du poste. Descendre au niveau le
plus fin de la nomenclature se heurte à deux difficultés
majeures. La première est que, en particulier dans
l’alimentation, certains produits peuvent exister dans un
pays et non dans l’autre. La seconde est que, à un niveau
trop fin, les séries deviennent plus difficiles à traiter
statistiquement (trop volatiles, présence de valeurs
manquantes ou atypiques, etc.).
Dans le calendrier de l’Hégire, c’est l’observation à l’œil
nu de la nouvelle lune qui signale le début du mois, les
dates des différentes fêtes peuvent changer d’un pays à
l’autre. Il a donc fallu retrouver pour chacun des 3 pays
2 Comme l’évolution des prix de l’hébergement en Tunisie.
les dates réelles de chaque événement pour calculer les
régresseurs sur la période d’analyse. C’est un travail
fastidieux et difficile mais nécessaire : l’algorithme
présenté précédemment ne doit être utilisé que
lorsqu’une date est manquante ou lorsqu’on veut faire des
prévisions.
Le modèle Reg-ARIMA utilisé dans cette étude peut
s’avérer très instable (voir Ladiray et Quartier-la-tente,
2018), ce qui rend plus difficile les comparaisons. A titre
d’exemple, les figures 2 et 3 montrent l’évolution du T
de Student pour deux postes de la nomenclature de l’IPC
du Maroc. Ainsi, le poste « 006 - Pâtisseries, gâteaux,
biscuits, viennoiseries » montre un T de Student très
significatif avec une évolution relativement stable alors
que le poste « 024 - Légumes en conserve » montre une
grande instabilité et un T de Student significatif jusqu’en
2016 et non significatif après.
Enfin, les coefficients du modèle 3 sont supposés
constants dans le temps, hypothèse qui pourrait être
remise en cause.
100
Statéco n°113, 2019
Figure 2
Poste « 006 - Pâtisseries, gâteaux, biscuits,
viennoiseries » (Maroc) : une évolution assez stable
de l’effet du Ramadan
Note : L’effet est jugé significatif dès que la valeur de
T_Ramadan (T de Student de la variable Ramadan) est située
en dehors de la bande limitée par les lignes rouges en pointillé
Figure 3
Poste « 024 - Légumes en conserve » (Maroc) : une
évolution très instable de l’effet du Ramadan
Note : L’effet est jugé significatif dès que la valeur de
T_Ramadan (T de Student de la variable Ramadan) est située
en dehors de la bande limitée par les lignes rouges en pointillé.
Principaux résultats
L’analyse statistique montre que les effets du Ramadan
sur les prix se concentrent dans quelques secteurs : les
produits alimentaires, l’habillement, quelques postes de
l’aménagement de la maison, la restauration et les
services d’hébergements.
Analyse comparative des effets
Les effets du Ramadan sur les prix à la consommation
sont statistiquement réels (tableaux 3 et 4) et plus
importants au Maroc qu’au Sénégal et en Tunisie. Le
mois du Ramadan serait ainsi à l’origine d’une hausse
variant entre 0,24 % et 10,7 % des prix de certains
produits alimentaires, au lieu d’un maximum de 2,1 % et
3,3 % respectivement pour la Tunisie et le Sénégal. Ces
évolutions sont dues à la dynamique de la demande
alimentaire des ménages et traduisent, en partie, les
disparités en termes de réglementation publique des prix
au niveau des 3 pays.
En effet, si globalement les prix administrés par l’État
marocain ne dépassent pas 19 produits et services, dont
deux seulement sont de type alimentaire, la liste des prix
soumis à l’encadrement ou à l’homologation au stade de
la production ou de la vente porte sur 55 produits en
Tunisie, dont 24 sont alimentaires. Au Sénégal, et bien
que les prix des produits alimentaires soient libéralisés
– à l’exception de ceux du pain, de la farine de blé, du
sucre cristallisé et de l’huile alimentaire - les pouvoirs
publics interviennent très souvent pour replacer certains
produits qui connaissent une forte demande
conjoncturelle sous régime de fixation administrative
temporaire.
Les effets du Ramadan sur les prix au Maroc
Pendant le mois du Ramadan, les habitudes alimentaires
et culinaires des Marocains changent avec la préparation
de plats spécifiques aux festivités qui marquent la période
de la rupture du jeûne (du coucher du soleil à la levée).
La composition des repas est orientée vers des aliments
plus riches en glucides, en protéines et en lipides. Les
dépenses liées à la consommation alimentaire
augmentent significativement par rapport aux autres mois
de l’année, au détriment de certaines dépenses non
alimentaires, comme l’ameublement et le tourisme.
Selon l’enquête du niveau de vie réalisée par le HCP en
2007, les dépenses alimentaires des ménages urbains et
des ruraux enregistrent des progressions de 13,2 % et
19,3 %, respectivement, en comparaison avec la
moyenne mensuelle. Ces hausses s’accompagnent
d’augmentations des prix à la consommation de certains
produits alimentaires comme en attestent les résultats des
tableaux 3 et 4. En particulier, ce sont principalement les
prix de la pâtisserie et gâteaux, de la viande bovine, des
poissons frais, du fromage, des œufs, des dattes et des
fruits frais qui affichent les hausses les plus
significatives.
101
Statéco°113, 2019
Tableau 3
Effet global du Ramadan et effets par quinzaine. Produits dont la variation de prix est significative pendant le
Ramadan (T de Student)
Produits MarocR SénégalR TunisieR MarocR1 SénégalR1 TunisieR1 MarocR2 SénégalR2 TunisieR2
Farine, semoules et
autres -1.48 0.92 2.85 -0.68 1.94 -1.17 -1.06 -1.09 4.22
Pâtisseries, gâteaux,
biscuits, viennoiseries 8.29 1.53 1.79 4.51 -0.56 -1.09 5.62 2.36 3.27
Viande bovine 3.96 2.79 1.06 1.05 0.62 1.93 3.98 2.44 -0.23
Agneau, mouton et
chèvre 0.29 1.96 -0.02 -1.16 0.41 0.15 1.60 1.79 -0.17
Volailles -1.15 2.26 0.21 -1.21 -2.79 0.77 0.15 4.32 -0.30
Poissons frais et fruits de mer
7.75 -0.83 3.84 2.11 -1.56 -0.21 7.46 0.61 4.30
Fromages 3.44 0.27 4.10 1.17 2.43 2.22 2.96 -2.69 2.70
Œufs 5.77 -0.27 2.57 4.07 -0.00 2.28 4.41 -0.96 0.92
Fruits frais 3.12 2.30 4.45 0.37 1.72 1.63 3.47 0.61 3.36
Dattes 6.64 1.33 2.13 6.04 1.35 1.31 2.62 1.81 1.33
Sucre -0.91 -1.34 2.37 -0.38 0.88 1.18 -0.75 -2.50 2.63
Vêtements pour hommes
2.20 -0.41 0.57 -0.36 -2.14 -0.87 3.46 1.38 1.72
Vêtements pour femmes 2.31 0.80 0.04 -1.16 -0.63 0.44 4.84 -0.22 -0.27
Vêtements pour enfant 1.91 -0.22 2.21 1.91 -1.17 1.10 0.38 -0.23 1.86
Chaussures pour hommes
1.19 1.76 -0.07 0.95 2.94 -2.55 0.45 -1.28 2.78
Chaussures pour
femmes 1.47 0.26 0.25 -1.14 -7.00 -0.02 3.43 7.14 1.37
Chaussures pour enfants
et bébés 2.42 6.14 1.38 0.66 2.19 0.50 2.32 -0.72 1.30
Meubles et articles d'ameublement
-2.11 -0.15 -0.41 -3.56 0.54 -0.20 0.97 -0.28 -0.30
Articles de ménage en
textiles -2.48 -0.53 0.26 -3.00 0.70 -0.60 -0.10 2.62 2.14
Restaurants, cafés et établissements
similaires
0.15 -0.37 -3.43 -0.32 5.94 -2.04 0.50 -8.35 -1.97
Services d'hébergement -4.63 0.18 4.00 -0.41 3.12 -2.01 -5.64 -7.87 3.99
Note : En vert les effets significatifs au seuil de 95 %, en jaune ceux significatifs au niveau 90 %
En revanche, les prix des légumineuses et des légumes
frais qui constituent la base des soupes préparées à
l’occasion de la rupture du jeûne ne connaissent pas
d’augmentation sensible, du fait notamment de
l’abondance de l’offre locale. Les prix de volaille et des
produits laitiers ne subissent pas non plus d’amples
changements, en raison en particulier de l’engagement
des pouvoirs publics d’assurer un approvisionnement en
quantité suffisante du marché local. C’est ainsi que les
importations des produits laitiers et du lait connaissent
une inflexion à la hausse au cours du dernier mois qui
précède le Ramadan.
Hors alimentaire, les effets du Ramadan sur les prix
restent contrastés. Si les prix des vêtements des femmes
et des hommes enregistrent une hausse significative au
cours de la deuxième quinzaine du Ramadan, en réponse
à une demande plus soutenue à la veille de la fête de l’Aïd
el-Fitr, ceux des articles de l’ameublement s’orientent à
la baisse, traduisant, en partie, les ajustements des
dépenses des ménages en faveur des produits
alimentaires. Les prix du tourisme et des autres services
d’hébergement enregistrent également une diminution au
cours du mois du Ramadan qui coïncide avec la baisse
observée des nuitées touristiques. Ce phénomène peut
s’expliquer par la fermeture de la plupart des restaurants
et activités de loisir pendant la journée.
Les effets du Ramadan sur les prix au
Sénégal
Pendant le mois du Ramadan au Sénégal, les habitudes
de consommation sont légèrement modifiées avec une
amélioration des plats et l’introduction d’un nouveau plat
avant l’aube. Ce plat est généralement fait à base de
farine et de semoule ce qui explique l’effet noté sur le
102
Statéco n°113, 2019
prix de ce poste pendant la première quinzaine du mois
du Ramadan. Ndoye et al. (2001) montrent que la
consommation des plats à base de farine comme le
« fonde », le « caakry » et le « ngalakk » est très
importante durant le mois du Ramadan par rapport aux
autres mois de l’année.
Les prix du poste « volaille » augmentent pendant la
deuxième quinzaine du mois du Ramadan. Cette
augmentation s’explique là encore par des phénomènes
culturels. Ces produits sont en effet très prisés durant le
mois du Ramadan et surtout le jour de la fête de fin du
Ramadan (Aïd el-Fitr). Ainsi, le poulet qui avait connu
un tassement de son prix avant le Ramadan affiche à
nouveau une augmentation à l’approche de la fête de
Korité.
Au Sénégal, la rupture du jeûne favorise aussi
l’engouement pour certains produits comme les dattes,
les gâteaux et biscuits, suivis de jus traditionnels. Ce
mois incite l’augmentation des prix des « gâteaux-
biscuits » et des jus frais suite à la hausse de la demande
de ces derniers. En revanche, les prix des fromages
enregistrent une baisse durant la deuxième quinzaine du
mois du Ramadan.
Les autres produits alimentaires ne subissent pas de
modifications de leurs prix durant le mois du Ramadan
grâce à l’effort du gouvernement sénégalais qui veille à
l’approvisionnement suffisant de certains produits
alimentaires et denrées de première nécessité afin de
garder une stabilité des prix durant le mois du Ramadan.
Tableau 4
Variations maximales de prix pendant le Ramadan et par quinzaine
Produits MarocR SénégalR TunisieR MarocR1 SénégalR1 TunisieR1 MarocR2 SénégalR2 TunisieR2
Farine, semoules et
autres
-0.08 1.41 0.05 -0.03 3.19 -0.02 -0.05 -1.69 0.07
Pâtisseries, gâteaux,
biscuits, viennoiseries
0.61 1.71 0.11 0.28 -0.54 -0.06 0.34 2.26 0.18
Viande bovine 0.68 1.73 0.19 0.15 0.38 0.28 0.57 1.26 -0.03
Agneau, mouton et chèvre
0.08 1.61 -0.00 -0.23 0.31 0.03 0.32 1.29 -0.04
Volailles -1.35 0.73 0.15 -1.15 -1.59 0.41 0.15 2.56 -0.17
Poissons frais et fruits
de mer
10.69 -2.70 0.65 2.19 -4.48 -0.04 8.22 1.70 0.82
Fromages 0.24 0.02 0.17 0.07 0.15 0.08 0.18 -0.17 0.10
Œufs 5.51 -0.01 1.78 2.46 0.00 1.21 2.82 -0.10 0.52
Fruits frais 4.32 3.31 2.13 0.42 1.60 0.68 4.12 0.53 1.45
Dattes 2.40 0.76 1.69 1.69 0.37 0.81 0.76 0.50 0.87
Sucre -0.03 -0.14 0.01 -0.01 0.05 0.00 -0.02 -0.12 0.01
Vêtements pour
hommes
0.18 -0.03 0.12 -0.02 -0.14 -0.13 0.22 0.08 0.27
Vêtements pour femmes
0.24 0.02 0.01 -0.08 -0.02 0.06 0.35 -0.01 -0.05
Vêtements pour enfant 0.12 -0.02 0.40 0.11 -0.03 0.14 0.02 -0.01 0.27
Chaussures
pour hommes
0.10 0.02 -0.03 0.07 0.13 -0.68 0.03 -0.06 0.85
Chaussures pour femmes
0.18 0.01 0.06 -0.11 -0.10 -0.00 0.35 0.14 0.43
Chaussures pour
enfants et bébés
0.30 0.06 0.34 0.07 0.09 0.05 0.25 -0.03 0.15
Meubles et articles
d'ameublement
-0.11 0.00 -0.02 -0.16 0.00 -0.01 0.05 -0.00 -0.01
Articles de ménage en textiles
-0.10 -0.05 0.02 -0.10 0.01 -0.03 -0.00 0.02 0.13
Restaurants, cafés et
établissements
similaires
0.01 -0.16 -0.18 -0.02 0.10 -0.09 0.03 -0.18 -0.09
Services d'hébergement -0.67 0.01 0.22 -0.03 0.06 -0.06 -0.49 -0.17 0.18
Note : En vert les variations supérieures ou égales à 2 % (en valeur absolue)
103
Statéco°113, 2019
Hors alimentaire, les effets du Ramadan sur les prix
restent particuliers au Sénégal. Les prix des chaussures
des enfants et des femmes enregistrent une hausse
significative respectivement durant le mois du Ramadan
et la deuxième quinzaine du mois du Ramadan.
Cependant, une baisse des prix des services de
restauration, cafés et des services d’hébergement est
notée durant la deuxième quinzaine du mois du
Ramadan.
Les effets du Ramadan sur les prix en
Tunisie
Les habitudes alimentaires tunisiennes changent pendant
le mois du Ramadan et la consommation de certains
produits augmente de manière significative, ce qui
impacte leurs prix. Pour la plupart des Tunisiens, les
dattes et le lait frais sont les produits préférés pour la
rupture du jeûne. En outre la majorité des plats
consommés (tajine, brik, salade) tout au long du mois
sont composés d’œufs et fromages.
La soirée est toujours animée par des fruits et des
pâtisseries. En conséquence la première quinzaine est
marquée par la hausse des prix de produits alimentaires
essentiels pour la table tunisienne comme les œufs, les
fromages, la viandes bovine et les légumes salés. En
revanche pendant la deuxième quinzaine du Ramadan, ce
sont les prix des produits nécessaires pour les préparatifs
à l’Aïd el-Fitr qui s’accroissent, notamment les prix des
pâtisseries traditionnelles comme Makroudh ou
Baklawa. De plus, les plats à base du poisson sont
souvent préférés pendant l’Aïd el-Fitr d’autant que les
familles tunisiennes préparent traditionnellement le
salage du poisson. Et vers la fin du mois, les achats des
vêtements s’intensifient. Bien que la hausse des prix ne
soit pas notable sur l’ensemble « du poste vêtements »
elle reste significative sur des sous-postes de prix comme
les pantalons pour fille ou les costumes pour homme.
Le mois du Ramadan n’a pas seulement d’effet positif sur
les prix, en effet les prix de services d’hébergement,
restaurant et autre établissement semblable enregistrent
un recul à la suite de la baisse de la demande, les nuitées
enregistrent un recul et plusieurs établissements ferment
dans ce mois. L’impact du mois du Ramadan et de l’Aïd
el-Fitr sur les prix est réel bien que le prix de plusieurs
produits soit administré par l’état qui veille à la
constitution de stocks régulateurs qui empêcheront un
dérapage des prix.
Conclusions et perspectives
Les effets du Ramadan sur les prix à la consommation
sont statistiquement réels et plus importants au Maroc
qu’au Sénégal et en Tunisie. Ils se concentrent dans
quelques secteurs : les produits alimentaires,
l’habillement, quelques postes de l’aménagement de la
maison, la restauration et les services d’hébergements.
Leur impact en termes réels est cependant relativement
limité : le mois du Ramadan serait ainsi à l’origine d’une
hausse atteignant 10 % des prix de certains produits
alimentaires au Maroc, au lieu d’un maximum de 2 % -
3 % pour la Tunisie et le Sénégal. Ces évolutions sont
dues à la dynamique de la demande alimentaire des
ménages liée aux pratiques culturelles mais traduisent
aussi les disparités en termes de réglementation publique
des prix au niveau des 3 pays.
Ces estimations économétriques sont obtenues à l’aide de
modèles Reg-ARIMA qui prennent en compte les
spécificités calendaires des 3 pays et une attention toute
particulière a été portée à la stabilité des résultats. La
faiblesse relative des effets prix, par rapport notamment
au ressenti personnel des gens, peut en partie s’expliquer
par le souhait de faire une comparaison internationale.
Les analyses ne peuvent alors se faire qu’à des niveaux
relativement agrégés qui peuvent mélanger des produits
à prix libre et des produits régulés par l’état.
L’étude de stabilité des coefficients du modèle,
systématiquement menée dans notre étude pour tous les
produits, montre que les effets du Ramadan de certains
produits évoluent avec le temps. C’est par exemple le cas
au Maroc, pour les postes « 010 - Autres viandes et
abats » et « 020 - Fruits frais » dont l’effet est de plus en
plus fort comme le montrent les figures 4 et 5.
104
Statéco n°113, 2019
Figure 4
Poste « 010-Autres viandes » (Maroc), évolution de la
significativité de l’effet du Ramadan
Note : L’effet est jugé significatif dès que la valeur de
T_Ramadan (T de Student de la variable Ramadan) est située
en dehors de la bande limitée par les lignes rouges en pointillé.
Figure 5
Poste « 020 - Fruits frais » (Maroc), évolution de la
significativité de l’effet du Ramadan
Note : L’effet est jugé significatif dès que la valeur de
T_Ramadan (T de Student de la variable Ramadan) est située
en dehors de la bande limitée par les lignes rouges en pointillé.
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Annexes
Nomenclature de l’IPC retenue pour l’étude
001 - Riz
002 - Céréales non transformés (blé, orge, maïs)
003 - Farine, semoules et autres
004 - Pain
005 - Pâtes alimentaires
006 - Pâtisseries, gâteaux, biscuits, viennoiseries
007 - Viande bovine
008 - Agneau, mouton et chèvre
009 - Volailles
010 - Autres viandes et abats
011 - Charcuterie et autres préparations de viandes
012 - Poissons frais, réfrigérés ou congelés et fruits de mer
013 - Poisson en conserve ou transformés
014 - Lait frais
015 - Laits conservés et autres produits laitiers
016 - Fromages
017 - Œufs
018 - Beurre et margarine
019 - Huiles Alimentaires
020 - Fruits frais
021 - Dattes
022 - Fruits séchés
023 - Légumes frais
024 - Légumes en conserve
025 - Légumes secs et oléagineux
026 - Sucre
027 - Confiture, miel, chocolat et confiserie
028 - Sels et condiments et autres
029 - Café, thé et cacao
030 - Jus de fruits
031 - Boissons gazeuses et eau minérale
032 - Spiritueux
033 - Vin et boissons fermentées
034 - Bière
035 - Tabac
036 - Tissus d'habillement
037 - Vêtements pour hommes
038 - Vêtements pour femmes
039 - Vêtements pour enfant
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Statéco n°113, 2019
040 - Autres articles vestimentaires et accessoires du
vêtement
041 - Nettoyage, réparation et location de vêtements
042 - Chaussures pour hommes
043 - Chaussures pour femmes
044 - Chaussures pour enfants et bébés
045 - Réparation de chaussures
046 - Loyers effectivement payés par les locataires
047 - Fournitures pour travaux d'entretien et de réparation
des logements
048 - Services concernant l'entretien et les réparations du
logement
049 - Alimentation en eau
050 - Électricité
051 - Gaz
052 - Combustibles solides
053 - Meubles et articles d'ameublement
054 - Articles de ménage en textiles
055 - Gros appareils ménagers, électriques ou non
056 - Petits appareils électroménagers
057 - Verrerie, vaisselle et ustensiles de ménage
058 - Outillage, matériel et accessoires divers
059 - Biens d'équipement ménager non durables
060 - Services domestiques et services ménagers
061 - Produits pharmaceutiques
062 - Produits médicaux divers
063 - Appareils et matériel thérapeutiques
064 - Services médicaux et dentaires
065 - Services paramédicaux
066 - Services hospitaliers
067 - Voitures automobiles
068 - Motocycle et bicyclette
069 - Pièces de rechange et accessoires pour véhicules de
tourisme
070 - Entretien et réparation de véhicules particuliers
071 - Carburants et lubrifiants pour véhicules de tourisme
072 - Services divers liés aux véhicules particuliers
073 - Transport routier de passagers
074 - Transport aérien de passagers
075 - Transport maritime , fluvial , ferroviaire passager
076 - Services postaux
077 - Téléphone et télécopie
078 - Services de téléphonie et de télécopie
079 - Matériel de réception, d'enregistrement et de
reproduction du son et de l'image
080 - Matériel photographique et cinématographique et
appareils optiques
081 - Ordinateurs personnels et périphériques
082 - Supports d'enregistrement
083 - Réparation de matériel audiovisuel, photographique et
de traitement de l'information
084 - Jeux, jouets et passe
085 - Articles de sport, matériel de camping et matériel pour
activités de plein air
086 - Livres
087 - Journaux et publications périodiques
088 - Services récréatifs et sportifs
089 - Produits pour jardins, plantes et fleurs
090 - Services culturels
091 - Fournitures et livres scolaires
092 - Enseignement préélémentaire et primaire
093 - Enseignement secondaire
094 - Enseignement non défini par niveau
095 - Cantines
096 - Restaurants, cafés et établissements similaires
097 - Services d'hébergement
098 - Salons de coiffure et esthétique corporelle
099 - Appareils électriques pour soins corporels
100 - Autres appareils, articles et produits pour soins
corporels
101 - Articles de bijouterie et horlogerie
102 - Autres effets personnels
103 - Assurances liées au transport
104 - Autres services financiers n.c.a.
107
*Anda David est économiste à l’Agence française de développement [email protected] et Mohamed Ali
Marouani est chercheur à l’Institut de recherche pour le développement et à l’université Paris 1,
Migration patterns and labour
market outcomes1 A. David and M.-A. Marouani*
This article focuses on the external effects of emigration on non-migrants and particularly on the interactions with labour market outcomes in Tunisia before and after the revolution. Using the Tunisia Labour Market Panel Survey (TLMPS) we conduct an in-depth analysis of the structure and dynamics of recent migration in Tunisia including the profile of migrants and their origin households, mainly in terms of skills and spatial composition. We also investigate transition matrices, employment status, and the evolution of remittances. Our analysis confirms the role of emigration as a security valve for the Tunisian labour market. Moreover, origin households of migrants have a significantly higher wealth index. Remittances play a significant role for the Tunisian economy and at the household level. Our analysis also tends to confirm the effects of remittances on labour supply of non-migrants which can have a negative impact on Tunisia’s unemployment rate when a crisis in destination countries affects negatively the remittance rate.
Introduction
From anecdotal stories to macroeconomic analyses,
migration shapes the socioeconomic environment in
Tunisia. Natter (2015) sketches a historical fresco
of Tunisian migration from French colonization to
the Revolution focusing on the Tunisian policies
towards emigration and the Diaspora. Since
Independence these policies were mainly
encouraging migration to secure an “economic
safety valve”. The Ben Ali regime pursued this
policy, reinforced the political control on the
diaspora and adopted a cooperative approach with
destination countries, mainly EU countries, to
consolidate and legitimise the authoritarian nature
of the regime. In his proposed research agenda on
migration, Clemens (2011) proposes to focus on the
external effects of emigration on non-migrants. We
propose to deal mainly with this issue in this article,
and particularly on the interactions with labour
market outcomes. David and Marouani (2015) have
dealt with the interactions between migration and
labour markets outcomes in Tunisia following a
1 A longer version of this article was published as a chapter in Assaad, R., & Boughzala, M. (Eds.), (2018).
The Tunisian Labor Market in an Era of Transition. Oxford University Press, USA.
macroeconomic approach. One of their main
findings is that migration matters significantly for
labour market outcomes, especially during crisis
time. The main link variable is the evolution of the
level of remittances.
The second issue tackled here is the evolution of
migrants’ profile, mainly in terms of skills.
Although there is no agreement on the net effect of
skilled migration as the literature review of
Clemens (2011) shows, there is no doubt that the
skill composition of migration is central in the
debate on migration external effects on origin
countries. Similarly, the spatial composition of
migration has certainly a significant impact,
particularly in a country where regional inequalities
are one of the main characteristics and have been
highlighted as one of the main concerns since the
2011 revolution.
Microeconomic research on migration in Tunisia is
still limited due to the scarcity of data. The Tunisia
Labour Market Panel Survey (TLMPS) allows an
in-depth analysis of the structure and dynamics of
108
Statéco n°113, 2019
recent migration in Tunisia and allows us to sketch
the profile of migrants and their origin households.
This profile would allow a better knowledge of the
evolution of recent migration in terms of
geographical origin, destination countries, age,
marital and educational statuses and labour market
characteristics. We also investigate transition
matrices, employment status and income abroad by
education level, how migration occurred and the
socio-economic background of migrants’ families.
The characteristics of returnees are also analysed
and compared to those of non-migrants. Finally, we
analyse the evolution of remittances levels, country
of origin, channels and the characteristics of its
recipient households.
Previous research on the issues linked to migration
in Tunisia mainly use administrative data or specific
small-scale surveys. Kriaa et al. (2013) draw a
profile of labour migration from Tunisia over the
period 2002-2012 using data from various
administrative sources2. They conclude on the
absence of a unique and coherent information
database on emigration from Tunisia and the need
of a better information system. Looking specifically
at migration to OECD countries, Gubert and
Nordman (2009) use macro level data from the
OECD, the World Bank and the Euro-Med
Consortium for Applied Research on International
Migrations (CARIM) and highlight the match
between excess labour supply in Middle East and
North Africa (MENA) countries and the labour
shortages in Europe. Boubakri (2010) describes the
weaknesses and strengths of the Tunisian labour
market, linking it with migration and stresses the
country’s experience in managing the exports of its
professional labour force through specialised
agencies. In a more recent paper, he focuses on
international migration and the Tunisian revolution
and offers an in-depth analysis on the links between
the two (Boubakri, 2013).
Another strand of the microeconomic literature on
the Tunisian migration focuses on returnees.
Menard (2004) uses a survey conducted by the
Office des Tunisiens à l’Etranger (OTE) in 1986 on
return migrants and data from the Central Bank and
analyses the drivers of self-employment for
returnees and non-migrants. She finds little
evidence of human capital accumulation through
temporary migration, but strong evidence that the
repatriation of savings from migration allows poor
workers to overcome credit constraints for
investment into small projects. David and Nordman
(2014) use data from a survey conducted by the
European Training Foundation and the World Bank
on returnees and non-migrants and study the skills
that migrants acquire before and during migration
2 The National Statistics Institute (INS), the Office for
Tunisians Abroad (OTE), the Agency for Cooperation
and the way these skills are used upon return. They
find evidence of skill mismatch in Tunisia, where
the under-education phenomenon is more prevalent
among return migrants.
The TLMPS study offers a new and complete
perspective on recent Tunisian migration and
allows a comparison between the migrant cohorts
before and after the revolution. The survey is
nationally representative and covers 16,200
individuals, in over 4,600 households. But there are
several limitations to using TLMPS in order to
study migration. First of all, due to the fact that
information on the current migrants is reported by
their origin households, this only gives a limited and
biased view of the diaspora and our results should
be read with this observation in mind. Also, while
there are specific questions allowing capturing the
emigration of entire households, we do not have
specific information about the characteristics of
those households, such as education for instance.
Finally, due to recall biases, we only capture the
relatively recent migration.
The rest of the article is organised as follows:
section 2 deals with emigration trends and patterns,
section 3 is focused on return migration, section 4
deals with remittances’ characteristics and section 5
concludes.
Recent international
migration trends and patterns
The total stock of Tunisian migrants abroad was
estimated at 1,223,000 in 2012 according to the
National Statistical Institute (INS) from
registrations in Tunisian consulates abroad. This
represented more than 10% of the resident
population in Tunisia. However, this figure includes
the second generation of the diaspora, whereas in
this section we will focus our analysis on recent
migration, therefore on current migrants as defined
in the survey, which implies that the households
interviewed still consider them as part of the
household. In practice, this means that our analysis
of current migrants is restricted (with very few
exceptions) to migrations which occurred during
around 15 years before our survey was conducted,
that is the 1997-2013 period.
For our analysis we will be using the Tunisia
Labour Market Panel Survey (TLMPS) of 2014,
which is part of broader series of labour market
panel surveys run under the initiative of the
Economic Research Forum (ERF). The TLMPS,
collected in partnership between ERF and the
Tunisian National Institute of Statistics (INS) is the
first wave of a longitudinal survey of the Tunisian
and Technical Assistance (ATCT), the Ministry of
Labour, the Ministry of Interior etc.
109
Statéco n°113, 2019
labour market and is a nationally representative
survey featuring information on households and
individuals3. The survey, representative also at the
governorate level, is based on a sample of 4,521
households and 11,738 individuals aged 15 or more.
The questions cover household characteristics,
detailed labour market outcomes and job history, as
well as migration trajectories and financial
transfers. Data is weighed in order to account for
representativity and non-response.
Using the survey, we see that migrants represent
slightly more than 2% of the total population,
which, as expected, is significantly lower than the
figure for the extended diaspora computed by the
INS. We also observe that 4% of households have
at least one migrant.
Natter (2015) retraces the main historical patterns
of Tunisian migration so we focus here on the
information that is given by the TLMPS 2014. If we
exclude those for whom the households answered
that they did not know in which year they migrated4,
we notice that almost 42% of the sample has left the
country between 2011 and 2013. Almost all the
others (the remaining two thirds of migrants for
which the date of migration is known) emigrated
between 1997 and 2010. The information on current
migrants provided by the survey thus mainly refers
to information on recent migrants, while the
analysis of the profile of returned migrants gives us
a better picture on earlier migrants.
This boost in migration just after the Tunisian
uprising is due to the absence of border controls
entailed by the security void in the aftermath of the
revolution. According to Frontex data, between
January and March 2011, 20.258 Tunisians arrived
in Lampedusa. Boubakri (2013) describes the
intensity of migrations in the aftermath of the events
of January 2011, highlighting the factors that
facilitated and spurred the outflows. Although it is
expected to be a temporary hike in outflows, in our
analysis we distinguish between those who have
migrated before and after the Tunisian revolution.
This choice is not straightforward as the revolution
will not necessarily entail a structural break in the
profile of Tunisian migrants. A robust assessment
of this hypothesis could only be done after a few
years. However, given that the economic situation
has been stagnating in Tunisia since 2011,
migration patterns can be affected. Given that the
signs of recovery are not visible yet, it is useful to
distinguish the new features of Tunisian migrants (if
any) that appear from the survey analysis.
3 For detailed information on the survey, see Assaad et al.
(2016). 4 For 23% of the migrant sample, the households
answered that they did not know in which year the
individuals had migrated.
In terms of destination countries, Tunisians mainly
emigrate to Europe (70%) and, more precisely to
France (38%). Germany and Italy come second and
third as European destinations. Although Libya was
already a major destination for Tunisians before the
uprising (due to the high labour demand in oil-
related activities), we notice a spike in emigration
to this specific destination in the aftermath of the
revolution, mainly in 2013.
In terms of origin, Tunisian migrants mainly come
from urban areas, although we observe a shift after
the revolution (Table 1)5. Before the revolution,
only slightly more than 20% of Tunisian migrants
were coming from rural areas, while after the
revolution, the percentage went up to almost 50%.
This confirms further our assumption that pattern of
the recent migration is different from the one before
the revolution.
Table 1
Origin of migrants (%) Before
revolution
After
revolution Total
Urban 79.2 50.8 70.3
Rural 20.8 49.2 29.7
Total 65.2 34.8 100
Sample size 121 83 204
Source: Authors’ computation using TLMPS 2014
At a closer look, we see that even the distribution of
governorates of origin has changed after the
revolution. Before the uprising, Tunis surroundings
(Ariana, Ben Arous), Cap Bon (Nabeul
governorate) and the area bordering Lybia
(Medenine governorate) provided around half of
Tunisian emigrants according to the survey. After
2011, this is not the case anymore and share of
migrant outflows from especially Mahdia, and Sidi
Bouzid (the latter being the governorate where
uprisings started) increased.
In Table 2 we compute some descriptive statistics
on the current migrants and distinguish between
those that have migrated before and after the
revolution. We see that while the average age at the
time of migration of Tunisians is 25 years old, those
that have migrated after the revolution were slightly
older when they left the country compared to those
that have migrated before. This is probably due to a
decrease of the share of tertiary educated workers
who generally migrate younger for their studies.
As expected, the migrants are predominantly males
(85%), although a slight decrease in this proportion
5 In 2014, the urban share is 66% of the total population
according to the World Bank.
110
Statéco n°113, 2019
is observed in the very recent outflows. More than
half of the emigrants are married, but this
proportion is lower if we restrict the sample to those
that have migrated recently (38.6%). In terms of
education, almost a quarter of Tunisian emigrants
are highly educated, with those having migrated
before the revolution being slightly more educated.
Table 2
Current migrants’ basic characteristics
Before
revolution
After
revolution Total
Age at the time
of migration 24.4 27.0 25.5
Male (%) 87.9 79.5 85.0
Married (%) 59.3 41.7 53.7
Single (%) 38.6 58.3 44.8
Education (%)
Primary 39.4 44.5 41.0
Secondary 34.7 33.8 34.4
Tertiary 26.0 21.8 24.6
Source: Authors’ computation using TLMPS 2014
Despite the drop in education levels in the very
recent emigration flows, Figure 1 shows an increase
in the education levels over the last decades, with
the share of migrants holding a tertiary education
level diplomas increasing considerably. When we
compare the acquired education levels of emigrants
to those of returnees and of non-migrants (Figure 2)
we find that emigrants are more educated than the
non-migrants and returnees, suggesting a positive
selection into migration, often pointed out in the
literature (Wahba, 2015a, McKenzie et al. 2010).
Indeed, a higher expected return to human capital is
one of the key drivers of emigration as shown by
Gibson and McKenzie (2011), but education also
impacts the migration decision through the
aspirations channel as highlighted by Docquier et
al. (2014), who argue that less educated (poorer)
people are only somewhat less likely to want to be
migrants than more educated individuals. Although
we do not have information about the reasons of
migration, we see that almost 35% of the tertiary
educated emigrants have entered the destination
countries with a student visa, indicating the
importance of student migration in the case of
Tunisia.
Using the MIREM6 database, Boughzala and Kouni
(2010) argue that the more migrants acquire skills,
the lower their probability of return to Tunisia. In
the case of students, scholarships are usually
granted to those who get the best ranks in the
6 MIREM stands for MIgration de REtour au Maghreb
and it was collective research programme was launched
in December 2005 and ended in December 2008. f
country. This raises a serious concern about the
risks of losing “talents”. According to the
TLMPS2014 database, only 6.5% of returnees had
emigrated from Tunisia with a student visa, while
the share of current migrants having emigrated with
a student visa is of 13%, suggesting low return rates
of Tunisian students abroad. But these students with
high capacities may not reach their maximal
potential if they stay at home. The policy issue then
is how to use these talents through cooperation with
the highly skilled members of the diaspora or by
attracting them back when their skills are needed at
home7.
Figure 1
Educational level of current migrants over time,
15+
Source: Authors’ computation using TLMPS 2014
Figure 2
Educational level of migrants, returnees and
non-migrants
Source: Authors’ computation using TLMPS 2014
In terms of labour market outcomes, we notice that
more than half of migrants (55.4%) were
unemployed before leaving Tunisia and close to a
7 Malaysia for example created an institution in charge of
attracting talent (Talentcorp).
0%
20%
40%
60%
80%
100%
1990s 2000s After 2010
Primary Secondary Tertiary
0%
10%
20%
30%
40%
50%
60%
70%
Primary Secondary Tertiary
Migrants Returnees Never-migrants
111
Statéco n°113, 2019
third were working (Table 3). This tends to suggest
that emigration can alleviate part of the pressure on
the labour market created by job seekers. Indeed,
as shown by David and Marouani (2015) in a
general equilibrium framework, the outflow of
Tunisian labour force can contribute to
unemployment reduction through the decline in the
active population8.
Table 3:
Transition matrix for the work status before and
during migration9 (in %)
Source: Authors’ computation using TLMPS 2014
In terms of informality, we see that almost 69% of
the migrants were not covered by social security (a
proxy for being an informal worker) before their
departure and there is no significant difference
between those that have left before and after the
Tunisian uprising. Once abroad, almost 71% of
migrants are working and 14% are unemployed.
Even though the percentage of unemployed is
higher for those that have migrated after the
revolution, this is likely to be a temporary situation
since, on the one hand, migrants need a certain time
laps in order to adjust and integrate the host
country’s labour market, and, on the other hand, the
recent economic downturn in Europe limits job
opportunities for new incomers. We notice
nevertheless that once individuals migrate, they
experience a positive transition, for most of them,
with 65% of the unemployed in the origin country
becoming employed in the destination country.
To sum up, what precedes confirms the safety valve
emigration has played for the Tunisian labour
market and for emigrants themselves.
The migrants’ situation abroad also affects the
origin country’s labour market. Having a stable and
well-paying employment status abroad does not
8 However, this implies that downturns in destination
countries can result in massive returns that can create
temporary disequilibria in the local labour market, as
was the case with the return of Tunisian migrants in the
aftermath of the Libyan uprising (AfDB, 2012).
only entail higher remittances, but also more
significant financial and human capital
accumulation if the migrant returns (Dustmann and
Görlach, 2016). Unfortunately, we do not have
sufficient data to analyse the implications for the
Tunisian case, but the outcomes of Tunisian
migrants can give us a glimpse of the possible
fallouts on the home country.
As expected, the TLMPS2014 data shows a
correlation between the education level and the
employment status abroad, with the share of regular
wage workers increasing with the education level
(Figure 3). Thus, more educated migrants have
better outcomes in destination labour markets, but
since their return rates are lower as we previously
observed, their positive impact on the origin
country might be limited.
The survey also gives information about whether
the individual migrated alone or with family and we
see that the share of individuals that migrate alone
increased over time (Figure 4). This can be due
either to more and more migrants joining family
already abroad, or to growingly restrictive
immigration policies that lead to more risk-taking
behaviour.
Finally, we can take a glimpse at the impact that
migration has on the origin country by looking at
the welfare of remaining households. If we look at
the situation of the origin households of migrants in
the TLMPS2014 data, we notice that they have a
significantly higher wealth index (Table 4).
However, we do not have enough elements that
could indicate whether the households with
migrants are richer because they have migrants
abroad that send them remittances or whether the
wealthier households were the ones that could
afford to send migrants abroad.
However, if we look at the education level of the
head of households differentiating between
households with and without, the distributions are
relatively similar (Figure 5).
9 Households were asked which is the “current work
status abroad” of the migrant and this is the information
used for the “work status during migration”.
Work status
during
migration
Work status before
migration
Total
Work-
ing
Unem-
ployed
Not
working
and not
seeking
Working 92.4 65.2 28.7 69.0
Unemployed 7.6 20.8 6.1 14.7
Not working
and not
seeking
0.0 6.7 62.6 11.8
Don't know 0.0 7.4 2.6 4.4
Total 31.6 55.4 13.0 100
112
Statéco n°113, 2019
Figure 3
Employment status abroad by education level, current migrants
Source: Authors’ computation using TLMPS 2014
Figure 4
Type of migration across decades
Source: Authors’ computation using TLMPS 2014
Table 4
Households’ wealth score
Wealth score
HH with migrants 0,4007
HH without migrants 0,1016
Difference -0,2992
Significance level ***
Source: Authors’ computation using TLMPS 2014
Note: *** p<0.01, ** p<0.05, * p<0.1, - no significant
difference
Figure 5
Education of the head of household
Source: Authors’ computation using TLMPS 2014
0%
20%
40%
60%
80%
100%
Primary Secondar Tertiary Total
Unpaid Family Worker
Self-Employed not employingothersEmployer
Irregular Wage Worker
0%
20%
40%
60%
80%
100%
1990s 2000s After 2010Alone With others
0% 20% 40% 60% 80% 100%
HH
wit
hm
igra
nt
HH
wit
ho
ut
mig
ran
tTo
tal
Illiterate
Read and write
Less than Int.
Intermediate
Above Intermediate
University & above
113
Statéco n°113, 2019
Return migration
Return migrants represent slightly more than 1.2%
of the Tunisian population according to the
TLMPS2014 survey, which is the only nationally
representative source of data on returnees to date.
By analyzing this population, we can better
understand the impact of migration on the local
labour market through the return of human capital.
The impact of return migration depends on the
timing and the conditions of the return as
highlighted by Wahba (2015b). Thus we start by
looking at the distribution of return migrants by year
of emigration and return. The distribution of
migrants by year of final return shows a spike in
2013-2014. This is due to the massive return of
Tunisian emigrants from Libya when the civil war
broke. As highlighted by Natter (2015), this
unexpected inflow of returnees resulted in
significant challenges in terms of accommodation,
health care and food provision. This also had a
negative impact on the Tunisian labour market,
aggravating the already very high unemployment
rate. A specific study of the African Development
Bank and the International Organization for
Migration (AfDB, 2012) draws the attention on the
difficulties faced by the Tunisians returning from
Libya and their eagerness to go back to their jobs
when faced with a lacking framework of return
assistance in their home country.
On average, returnees are 53 years old, thus
marking a significant difference with the non-
migrants, understandably due to the different life-
cycle at which they are observed (Table 5). They are
also more likely to live in urban areas and this is in
line with the results from the previous section
showing that the earlier migration cohorts were
mainly urban, insofar we make the assumption that
they returned to the same area from which they have
left. Interestingly, a simple means test shows that
returnees have significantly higher wealth scores
compared to non-migrants. Nevertheless, just like
for the interpretation of a similar result for current
migrants, we cannot exclude that the higher levels
of wealth are due to higher welfare levels prior to
migration that enabled them to go abroad.
As an illustrative exercise, we can also compare the
characteristics of our sample of returnees to the
characteristics of the returnees from two other
surveys on return migration in Tunisia, MIREM
(conducted in 2006-2007) and CRIS10 (conducted in
2012). Still, given that these last two surveys were
conducted using snowball sampling, they suffer
from an important selection bias that limits the
generalization of the results and, consequently the
10 The Cross-Regional Information System on the
Reintegration of Migrants in their Countries of Origin
(CRIS) was launched in 2012.
validity of the comparison. In terms of age,
returnees in MIREM and CRIS are younger than the
ones in TLMPS and slightly more urban.
Table 5
Basic characteristics of return migrants Returnees Non-
migrants
Signi-
ficance
Age 52.7 33.7 ***
Urban 73.6% 68.0% **
Wealth
score 0.52 0.14 ***
Source: Authors’ computation using TLMPS 2014
Note: *** p<0.01, ** p<0.05, * p<0.1, - no significant
difference
Since we only have information about the year of
the first migration and the year for the final return,
we cannot compute with precision the average
migration duration, especially when, as Table 6
shows, we do not have information about the
number of migration episodes for more than half of
the sample of returnees. For those who declared
having migrated only once (38.6% of the sample),
we observe an average migration duration of 10
years. While two European countries rank first as
destinations of current migrants, Libya appears as
the main destination for the first migration of
returnees. Again, a striking difference appears with
regards to the existing data on return migration with
the previously mentioned surveys ranking France
and Italy as main destination countries for returnees
and Libya ranking third only in the 2012 CRIS
survey. This could confirm that the return migration
from Libya is a relatively recent phenomenon
linked to the deteriorating security conditions and
the civil war. Nevertheless, we need to mention that,
given that re-emigration to France is more difficult
than to Libya, it is reasonable to think that there is a
selection bias into return, with individuals being
more prone to return after having migrated to Libya.
Nevertheless, we cannot draw any conclusion
because we only have the information about the
country of the first migration and we do not know
where migrants return from.
Labour market factors such as unemployment and
low-quality jobs are the main reasons that caused
individuals to emigrate, with slightly more than
80% having declared that they went abroad because
they were unemployed or because they had found
better jobs. Interestingly, the reasons related to
having emigrated in order to pursue education are
not very frequent in the answers of the returnees
interviewed in 2014, while this was one of the main
three reasons mentioned by returnees in previous
114
Statéco n°113, 2019
surveys (and even the first one in CRIS 2012). This
supports the hypothesis that student-migrants might
increasingly choose to stay abroad, creating a
potential loss of skills. Nevertheless, for more than
more than half of the sample (63%), the financial
situation prior to migration was sufficient or more
than sufficient to cover basic needs, in line with the
theory according to which migrants do not come
from the poorest segment of the population. In order
to be able to cover the costs of migration, families
need to be relatively well off. This could increase
inequality and the gap between the socioeconomic
segments.
Table 6
Characteristics of return migrants (in %)
Number of migration episodes
Country of first destination
1 38.6 Libya 34.3
2 6.2 France 27.1
3 0.9 Italy 20.1
4 to 10 3.20 Other Arab countries 7.7
More than 10 0.6 Saudi Arabia 5.7
Does not know 50.6 Other countries 2.7
Main reason for migration Germany 2.4
Unemployed and seeking work 39.3 Reason to return
Found a better job 41.1 Contract ended 17.1
Higher wages 4.9 Sudden termination by employer 3.7
To help the family 1.3 Retired 14.4
To accompany spouse 5.4 Had health problems 1.5
Other 8.0 To get married 15.5
Financial situation prior to migration To start up business at home country 10.3
More than sufficient to buy the basic
needs 12.2 To look after family business or farm 3.3
Sufficient 51.1 Left work due to poor working condition 11.5
Not sufficient 36.0 Other 22.8
Source: Authors’ computation using TLMPS 2014
In terms of reasons to return, one fifth of the sample
declared having returned after the end of a contract
(either expected or a sudden termination), while
14% returned after retirement. Although 10% of
returnees declared returning to start a business in the
home country, a significantly higher share of
returnees is self-employed or employer on the
domestic labour market compared to non-migrants
(Figure 6). As pointed out by Wahba (2015b), a
differentiation should be made between the status of
“employer “and that of “self-employed”, with the
latter being often a default choice when individuals
have difficulties integrating the labour market and
thus entailing a higher level of vulnerability. The
considerable percentage of business owners and
investors among returnees is also confirmed in the
MIREM and CRIS surveys, revealing the high job-
creation potential of return migration in Tunisia.
In terms of remitting behaviour, close to half of the
sample of returnees (47%) declared that they were
not sending any remittances to their family while
they were abroad (Table 7). Interestingly, this
percentage does not significantly fall if we
distinguish between those that have migrated alone
or with family or between those that had saved
while abroad or not.
Figure 6
Current employment status in primary job (ref.1
week) for non-migrant and returnees
66%
45%
66%
5%
22%
6%
16% 32%17%
12%1%
12%
0%
20%
40%
60%
80%
100%
Non-migrants Returnees Total
Waged employee Employer
Self-employed Unpaid family worker
115
Statéco n°113, 2019
Table 7
Remitting behaviour, returnees
Frequency of remitting
Yes, regularly 18.5%
Yes, irregularly 33.2%
Yes, regularly & irregularly 1.3%
No 47.0%
Average amount per year 624.3
Source: Authors’ computation using TLMPS 2014
Although we do not observe a straight correlation
between remitting behaviour and saving or having
migrated alone, almost 38% of migrants that had the
intention of staying permanently abroad answered
not having remitted.
Remittances
Remittances play a significant role for the Tunisian
economy accounting for around 4% of GDP over
the last decades (Figure 7) and having considerably
increased in volume over the last years.
Therefore, it is expected that remittances also play
a significant role in determining household labour
market behaviour, as also highlighted in David and
Marouani (2015).
According to the TLMPS survey, around 2.5% of
Tunisian households have received remittances
from abroad over the last year. For the households
receiving remittances, they represent up to 82% of
their non-labour income, highlighting their
importance for the Tunisian economy.
In terms of origin of remittances received from
current migrants, almost half of them come from
France and Libya. Interestingly, although the other
Arab countries rank 5th in terms of destination
country of current migrants, they rank third in terms
of origin of remittances. This further confirms that
migration to Arab countries is mainly labour
migration, as migrants might tend to remit their
incomes than invest in the host country.
The most used means to send remittances is through
mail, followed by friends or relatives. The large
share of migrants who declared bringing themselves
the money or sending it through friends or relatives
suggests that a significant part of remittances arrive
to Tunisia through informal channels. Interestingly,
despite the Government’s initiative of allowing
expatriates to open bank accounts in convertible
Tunisian dinars in order to attract investments, only
5% of remittances are sent through the banking
system.
With 78% of remittances being sent to a specific
member within a household, the main recipients are
mainly the sons and daughters of the donor
(Figure 8).
Figure 7
Official remittances received in Tunisia, 1976-
2014
Source: World Bank, “World Development Indicators”
Figure 8:
Recipient of remittances, with respect to the
donor
Source: Authors’ computation using TLMPS 2014
Although only 20% of remittances are sent
specifically to the spouses, we observe a
significantly higher incidence of female-headed
households among the remittance receiving
households compared to non-receiving ones
(Table 8). We also find that the heads of households
that receive remittances are slightly less educated,
with only 3.2% of them having tertiary education,
while this percentage is of 7.7% for the heads of
households who do not receive remittances.
Interestingly, we also find a significant difference
in terms of labour market participation, with the
heads of households receiving remittances being
more often inactive than those receiving
remittances. This result was also highlighted from
macroeconomic perspective by David and
Marouani (2015) who find a significant increase in
labour participation due to the decrease of
remittances in the aftermath of the economic crisis
in Europe.
0%
1%
2%
3%
4%
5%
6%
0
500
1000
1500
2000
2500
19
76
19
79
19
82
19
85
19
88
19
91
19
94
19
97
20
00
20
03
20
06
20
09
20
12
Remittances in millions, received (currentUS$)Remittances received (% of GDP)
son/daughter40%
spouse20%
parent18%
brother/sister12%
Other10%
116
Statéco n°113, 2019
Table 8:
Characteristics of the head of household, according to whether the household receives remittances (%)
HH with remittances HH without
remittances
Significance level
of the difference
Female HoH 34.4 18.0 ***
Education
Primary 79.3 71.4 *
Secondary 17.4 20.9
Tertiary 3.2 7.7 **
Urban 67.2 69.4
In labour force (ref. 3 months, extended
definition) 56.5 77.8 ***
Source: Authors’ computation using TLMPS 2014
Note: *** p<0.01, ** p<0.05, * p<0.1, - no significant difference
Conclusion and policy insights
Tunisia has witnessed a boost in migration just after the
Tunisian uprising due to the absence of border controls
entailed by the security void in the aftermath of the
revolution. In terms of origin, we observe a shift after
the revolution with a significant increase of rural
migrants and those from some regions such as Sidi
Bouzid.
In terms of education, almost a quarter of Tunisian
emigrants are highly educated, with those having
migrated before the revolution being more educated
and having left the country at a younger age. On the
long run, the share of migrants holding a tertiary
education level diploma increased considerably over
time. Moreover, emigrants are more educated than the
non-migrants and returnees, suggesting a positive
selection into migration. This raises the issue of the
impact of migration on the country’s productivity as the
probability of return of the highly skilled is low and
there are no mechanisms ensuring their contribution to
the country’s development as is the case in other
countries such as India. A higher degree of engagement
with the high skilled diaspora should be one of
government’s priorities in terms of migration policy.
Forums, mentoring programs or broad knowledge
exchange programs would be relevant policy option for
enhancing the benefits in a country where migration is
more often permanent and the probability of return of
the high skilled is low. In terms of labour market
outcomes, unemployed, irregular and informal workers
constitute the bulk of the migrant population. The
vulnerability of migrants on the domestic labour market
prior to emigration is even more striking when we look
at the subsample of those who have left after the
revolution. Once individuals migrate, they experience a
positive transition, for most of them. As expected, we
find a correlation between the education level and the
employment status abroad, with the share of regular
wage workers increasing with the education level. This
confirms the role of emigration as a security valve for
the Tunisian labour market.
If we look at the situation of the origin households of
migrants, we notice that they have a significantly higher
wealth index, but we cannot make any assumption
whether this is a cause or a consequence.
Similarly, we observe that returnees have significantly
higher wealth scores compared to non-migrants. They
are mainly self-employed or employers on the domestic
labour market compared to non-migrants. They also
have significantly higher wages than non-migrants.
Nevertheless, we cannot exclude that the higher levels
of wealth are due to higher welfare levels prior to
migration that enabled them to go abroad. The
financial situation prior to migration for two thirds of
them was sufficient or more than sufficient to cover
basic needs. This supports the theory according to
which migrants do not come from the poorest segment
of the population and that, in order to be able to cover
the costs of migration, families need to be relatively
well off.
Remittances play a significant role for the Tunisian
economy accounting for around 4% of GDP over the
last decades. At the household level, they represent also
up to 82% of their non-labour income of remittances
recipient families. In terms of remitting behaviour, a
significant share of migrants that had the intention of
staying permanently abroad answered not having
remitted. Given that migration to Arab countries is
mainly labour migration, migrants to these countries
tend to remit their income rather than invest it in the
host country.
The large share of migrants who declared bringing
themselves the money or sending it through friends or
relatives suggests that a significant part of remittances
arrive to Tunisia through informal channels. The
Government’s initiative to increase remittances
through the banking system seems to have largely
failed.
Moreover, we observe a significantly higher incidence
of female-headed households among the remittance
receiving households compared to non-receiving ones.
We also find that the heads of households that receive
117
Statéco n°113, 2019
remittances are slightly less educated. Interestingly, we
observe a significant difference in terms of labour
market participation, with the heads of households
receiving remittances being more often inactive than
those receiving remittances. This would tend to confirm
the effects of remittances on labour supply of non-
migrants which can have a negative impact on
Tunisia’s unemployment rate when a crisis in
destination countries affects negatively the remittance
rate, but, again, we cannot infer any causality at this
stage of the analysis.
At the Mediterranean level, negotiations could be set to
take into account the economic situation of both
sending and host countries. Moreover, labour mobility
through trade in services should be promoted within the
region and in the negotiations with European countries
as this has positive effect on skilled jobs and could be a
partial substitute to migration.
A future research agenda on the impact of emigration
on Tunisia could address more specifically some
pending issues highlighted in this article such as the
causal relationship between remittances recipient
families’ incomes and emigration. A survey on the
Tunisian high skilled diaspora could also be useful to
understand better its aspirations and how it could
contribute to raising productivity, growth and jobs
creations in the country.
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119
* Brahim Guizani is assistant professor at Université de Jendouba, associate researcher at WTO Chair of Université
de Tunis and researcher at MASE unit of Université de Carthage in Tunisia. [email protected]
The author wishes to thank the WTO Chair at Université de Tunis for sponsoring this research.
The impact of exchange rate shocks
on trade in times of uncertainties:
evidence from three oil-importing
countries in the MENA region B. Guizani*
In this paper, a VAR methodology is run on monthly data from 2000 to 2017 in order to investigate the impact of the real exchange rate on trade flows of three oil-importing countries in the MENA region, especially during the tremendous and transitional post-Arab Spring period. Impulse response functions and variance decomposition analyses highlight a weak effectiveness of the exchange rate policies of these countries, notably the expanding currency flexibility process of the transition period, in enhancing their exports and containing their trade deficit balances. The improvements in trade performances are more related to important ameliorations of non-price competitiveness of the products rather than solely on currency devaluation. The results show also a strong dependence and attachment of the imports of these countries to the variations of their exports. This dependence explains to a certain extent the failure of the devaluation policies in alleviating the widening trade deficits during the post Arab Spring times of uncertainties.
Introduction
In January 2011, a popular uprising broke out in Tunisia
and ended up by ousting the then country’s president
Ben Ali who ruled the country with a rod of iron for
more than twenty-three years. This event has escalated
and spread as a ripple effect in several other countries
in the Middle East & North Africa (MENA) region,
such as Egypt, Morocco, Libya, Syria and Yemen
which, likewise, experienced popular unrests and
political instability that are continuing up to this time.
This process that was coined by some observers as the
Arab Spring has, in an environment of considerable
uncertainties, put several MENA countries in a track of
transition toward not only more democracy and
freedom but also to new economic and social schemes.
Recall that the principal trigger of the uprisings was
economic; namely youth unemployment.
1 IMF, International Financial Statistics.
For the time being, it is however too early to say that
the economies of these countries are back to their
normal; rather they are still passing through a transition
stage with all its uncertainties and risks. In fact, since
2011, the inflation rate has soared in Tunisia (from 3.24
percent in 2011 to 7.3 percent in 2018) and Egypt (from
10 percent in 2011 to 29.5 percent in 2017). 1 In the
same year 2011, the real economy has also incurred
severe shocks in Tunisia, Egypt and to a lesser extent
Morocco, and whose negative effects are still occurring
at the time of writing this paper; in fact, throughout the
post-Arab Spring period the real GDP growth rates in
these countries are lower than those recorded in the
course of the earlier period. During the aftermath of the
Arab Spring, these three countries have been
experiencing remarkable deteriorations of their trade
balances (figure 1). In the same time, the exchange rates
of their national currencies have experienced huge
depreciations with respect to the main trade partners’
120
Statéco n°113, 2019
currencies; in fact during the post-Arab Spring period
the real effective exchange rate of Tunisia, Egypt and
Morocco incurred significant depreciations reaching
sometimes 15.4, 34 and 4 percentage points,
respectively (the base year is 2010).2 The increasing
pressures on their foreign currency reserves, in addition
to the underlying requests of the IMF financial
assistance programs, have forced Tunisia, Egypt and, to
a lesser extent, Morocco to introduce more flexibility to
their exchange rate setting.
The purpose of this paper is to provide evidence on the
extent to which the exchange rate policy in three oil-
importing countries in the MENA region (I will refer to
as the OICs) has affected their foreign trade with a
focus on the uncertain and risky post Arab Spring
periods. The three selected countries are: Tunisia,
Egypt, and Morocco. Unlike other MENA countries,
these countries’ economies are relatively diversified
and have experienced all the uncertainties of the Arab
Spring episode.
I will compare between two periods; namely the more
stable pre-Arab Spring period (I will refer to this period
as the normal period 3 ) and the more troubled and
confusing post- Arab Spring period (I will refer to this
period as the transition period4)
The rest of the paper is organized as follows. Section 1
presents a literature review. Section 2 exhibits a brief
review of the exchange rate policy frameworks in the
sample countries. Section 3 presents the model and the
empirical methodology. Section 4 describes the data.
Then section 5 presents the results of the empirical
analysis and then I conclude.
Literature review
Since the breakdown of the Bretton-Woods agreement
and the gradual adoption by many world major trading
nations of floating exchange rate regimes, the economic
theory has started to examine the relationship between
the exchange rate, on the one hand, and trade on the
other hand. Economists agree that the uncertainties
related to this change in the exchange rate
determination can affect trade between nations; indeed,
the impact of the exchange rate on the economic
activity, in general, and trade remains to this date a
subject of debate. The traditional economic theory as
represented by the Mundell-Fleming model argues that
a depreciation of the local currency stimulates the
economy. A large part of the literature has focused on
the impact of the exchange rate volatility on trade
flows; namely exports and imports. Early studies
suggested that unexpected changes in exchange rates
could reduce trade flows (Artus, 1983 and Brodsky,
1984). However, Taglioni (2012) pointed out that since
the mid-2000s researchers started to study the
2 IMF, International Financial Statistics. 3 The expressions normal period and pre-Arab Spring period
will be used interchangeably in this text.
relationship between the level of the exchange rate
(misalignment) and trade. The economic theory
suggests that when markets are free of distortions, the
level of the exchange rate has no effect on trade in the
long run but in the short run, and because of the price
stickiness, movements in the exchange rate can affect
the international trade flows. However, the empirical
literature is not decisive about the nature of this
relationship. As argued in many empirical papers,
notably Auboin and Ruta (2011), and WTO (2011), the
relationship between these two variables is multi-
faceted, complex and not definitive. Taglioni (2012)
argues that even when prices are sticky and the
necessary market conditions hold, the effect of a change
in the level of the exchange rate on trade flows stays
ambiguous in sign, statistical significance and intensity.
Taglioni points out that the reason of this indeterminacy
is attributed to the characteristics of the economy, in
general, and the individual firms operating in it. The
same author explains this indeterminacy by the
following two opposite effects: on the one hand, an
appreciation of the domestic currency tends to reduce
the sales and the profit margins of the exporter due to a
loss in competitiveness. On the other hand, such an
appreciation of the exchange rate triggers pro-
competitive effects by reallocating resources toward
the most dynamic and creative domestic producers.
Those are quicker to adapt to the new challenges by
implementing new strategies and introducing the best
practices techniques to put in place faster product
cycles and improve product quality.
Based on micro French data covering the period (1995-
2005) Berman and al. (2012) argue that high-
performance firms react to a depreciation by increasing
significantly their markup and by increasing less their
export volume. This heterogeneous pricing-to-market
may partly explain the weak impact of exchange rate
movements on aggregate exports. According to Rodrik
(2008), a sustained real depreciation of the currency has
a positive impact on growth in developing countries
since it increases the relative profitability of investing
in tradable goods and alleviates the institutional and
market failures distortions in these economies.
Nevertheless, on the empirical side, this positive effect
is still a subject of controversy in developing and
emerging economies. The huge economic contraction
in Latin American economies in the aftermath of a
process of currency devaluation has led to more
examination of the negative effects of this policy in
developing and emerging economies. The low demand
elasticities of the exports and imports can explain the
weak effectiveness of currency devaluation on trade
(Edwards, 1986). Nonetheless, since the 1950s the IMF
stabilization programs still require developing
4 The expressions transition period and post-Arab Spring
period will be used interchangeably in this text.
121
Statéco n°113, 2019
countries to devalue their currencies in order to
stabilize their trade balances (Hutchison, 2003).
Using a dataset of 100 countries through a period
between 2000 and 2009, Nicita (2013) study shows the
importance of exchange rate misalignment (level) in a
country’s trade performance while disregarding that of
exchange rate volatility. Based on a large countries’
dataset Clark and al. (2004) doesn’t find robust results
confirming that the volatility of the exchange rate can
hurt international trade even for developing countries.
Nabli and Veganzones-Varoudakis (2004) show that
the MENA countries’ exports have been seriously
affected by the overvaluation of their currencies despite
the exchange rate policy reforms of the 1990s. They
point out that the countries with more diversified
economies and exports benefited more from the above-
mentioned reforms-by-devaluation than the others. Rey
(2006), based on quarterly data between 1970 and
2002, finds that for Tunisia and Egypt there is a
negative relationship between the exchange rate
volatility and their exports to the European Union. On
the other hand, this relationship becomes positive for
Morocco. Based on monthly data from 2000 to 2011
Sabri and al. (2012) use a VAR model with exogenous
variables to study the impact of exchange rate volatility
on trade between three MENA countries ( namely
Egypt, Morocco and Jordan) and the EU. They show
that the effect on trade of an appreciation of the national
currencies is quite high.
Achy and Sekkat (2003) study the effect of exchange
rate policy on the exports of 11 sectors over the period
1970-1997 in a sample of countries that include
Tunisia, Egypt and Morocco. They find that the
exchange rate management plays a crucial role in
providing incentives for manufactured exports toward
Europe. They suggest also that policymakers should be
more concerned with misalignment than with volatility.
Using a large sample of countries including several
MENA countries over the period 1980-2002, Lahrèche-
Révil and Milgram (2006) find that the exchange rate
volatility has no or a positive impact on the exports of
the MENA countries over the following periods (1980-
2002 and 1992-2002). However, the region’s imports
are much more sensitive to exchange rate volatility over
the entire period of study. Kandil and Dincer (2008) use
a sample from 1980 to 2005 to study the impact of
changes in the exchange rate on output in Egypt and
Turkey. They show that an unanticipated depreciation
has more pervasive impact than an unanticipated
appreciation in Egypt because exports appear to be
more inelastic to currency changes while import prices
are highly affected. Shokry and Bouaddi (2018) use a
sectorial sample from 1982 to 2014 and investigate the
impact of changes in the exchange rate on sectoral GDP
in Egypt and find that in highly exporting sectors the
effect of a devaluation in the real exchange rate is
positive.
Gaysset and al. (2019) use data from 1977 to 2016 and
show that a fiscal consolidation in the EMU countries
negatively affects the GDP growth rates and the current
accounts in MENA countries.
Unlike most related literature that focused mainly on
the effects of the exchange rate volatility on the
region’s commerce, this research, using a VAR
methodology, will investigate rather the impact of the
level of the exchange rate on trade in three OICs in
MENA region employing the real effective exchange
rate instead of the bilateral rate to reflect better the
competitiveness of these countries in foreign markets.
To the best of my knowledge, this paper is the first to
try to assess the effectiveness of the exchange rate
policies implemented in some OICs in MENA region
during the unstable, full of pressure and uncertain post-
Arab Spring period.
Exchange rate policy frameworks
Tunisia
Tunisia had pegged the dinar to a basket of currencies
until 1994. Between 1992 and 2000 it targeted the real
exchange rate in order to protect its competitiveness in
foreign markets (Dropsy and Grand, 2004). Though the
de jure exchange rate regime is a managed float, the
IMF has classified Tunisia’s de facto exchange rate
regime differently across time; between 2010 and 2012
the IMF classified it as stabilized arrangement, between
2012 and 2016 as a crawl-like arrangement and since
2017 the classification shifted Tunisia to the floating
arrangement (IMF, 2016 and 2017).
Egypt
In January 2001, the Central Bank of Egypt (the CBE)
announced the adoption of a de jure crawling peg
exchange rate regime that was followed by several
devaluations of the Egyptian pound. In January 2003
the CBE adopted a new de jure floating exchange rate
regime. However, the IMF has reclassified the de facto
exchange rate regime of Egypt several times in the last
few years. In fact, until 2012 the IMF has classified the
Egyptian regime as crawl-like arrangement, from 2012
to 2016 as stabilized arrangement, from 2016 to 2017
as other managed arrangement. Since 2017 the IMF
reclassified Egypt to floating arrangement (IMF, 2016
and 2017).
Morocco
Morocco adopts a fixed intermediate exchange rate
regime, in which the national currency is pegged to a
basket of currencies that reflects the structure of
Morocco’s foreign trade. The purpose of the quotation
basket is to ensure the stability of the dirham in terms
of the nominal effective exchange rate and to mitigate
the impact of fluctuations in major currencies on the
Moroccan dirham. In April 2001, the basket was
restructured to include only the euro and the U.S. dollar
with respective weights of 80 percent and 20 percent.
This measure aimed to further reduce fluctuations of
122
Statéco n°113, 2019
the dirham against the currency of Morocco’s main
trading partners. In April 2015, and in order to facilitate
the transition to a more flexible exchange rate regime
the weights of both currencies in the quotation basket
were revised; the new weights were then set at 60
percent for the euro and 40 percent for the U.S. dollar.5
The IMF classifies the de facto Moroccan foreign
exchange regime as conventional exchange rate peg
regime (IMF, 2016 and 2017).
Model and empirical methodology
Since the seminal work of Sims (1980 and 1992),
Vector Autoregressive (VAR) models have been
broadly employed by many researchers to address the
relationship between monetary and exchange rate
policies and macroeconomic variables. Though VAR
models are a-theoretical in the sense that their structure
does not depend on precise economic relationships,
they are very useful for the analysis of the historical
data dynamics in any given economy. VAR
methodology is very suitable for data analysis because
it comes with several useful tools such as the impulse
response functions and the variance decomposition that
are very convenient in studying the effects of economic
shocks and their magnitudes in specific historical
periods.
As emphasized by Bini-Smaghi (1991) VAR
methodology has two important advantages over other
times series frameworks. First, it can present dynamic
relationship between variables. Second, it does not
impose explicit theoretical restrictions on the system
variables.
The structural VAR model can be written as follows
𝑌𝑡 = 𝐴(𝐿)𝑌𝑡−1 + 𝐵(𝐿)𝑋𝑡 + 𝜉𝑡 (1)
Where:
A(L) and B(L) are the matrix lag polynomials.
Y is the vector of endogenous variables.
X is the vector of exogenous variables.
ξ is the residuals vector.
t is a subscript indexing time.
The structural VAR model (1) can be rewritten as
follows: 𝑌𝑡 = 𝐶(𝐿)𝑒𝑡
Where:
C(L) is the matrix lag polynomial.
et is the vector of the underlying structural shocks. I
assume that these individual shocks are orthogonal; i.e.,
that their variance covariance V(𝑒𝑡) is diagonal.
I select for this model the following endogenous
variables: the values of exports, ex, imports, im, the
industrial production index, ind, the consumer price
5 Source : http://www.bkam.ma/en/Monetary-
policy/Strategic-framework/Presentation
index, p, the short-term interest rate, r, and the real
effective exchange rate, reer.
Y’t = [ext, imt, indt, pt, rt, reert]
The real effective exchange rate is chosen over the
bilateral exchange rate since it has more explanatory
powers as it is by nature calculated in a way to be more
comprehensive and more representative of the value of
the national currencies and all the currencies of the
trade partners of the selected sample countries.
The ordering of the endogenous variables is important
in this VAR methodology. Kim and Roubini (2008)
point out that a country’s trade is determined by
economic cycles. In fact, in times of recessions trade
balance improves due to a lower demand for imports.
The implicit assumptions related to the variable
ordering in the model above are the following. First, the
exports and the imports do not respond simultaneously
to the economic activity, as represented by the
industrial production index, the consumer price index
and the short run interest rate. Second, the reer variable
is put last in the ordering since exchange rate shocks are
assumed to not influence the exports, the imports, the
industrial production and the interest rate
instantaneously.
On the other hand, following several empirical studies
such as Gaysset and al. (2019) the endogenous
variables in the model are completed by a vector Xt of
exogenous variables. These variables are added on the
basis of the standard economic theory. Based on
Chailloux and al. (2009), and in order to control for the
economic dynamics of the global and the E.U.
economies (the main trade partner of my sample-
countries) the vector Xt includes: the commodity price,
oil, the European Union’s industrial production index,
indeur, and the current and lagged short-term interest
rates in the E.U., reur.
X’t = [oilt, indeurt, reur
t, reurt-1]
As suggested by Gaysset and al. (2019) I control for the
events of the Arab Spring that broke out in December
2010 and have tremendously affected Tunisia, Egypt
and to a lesser degree Morocco. For this purpose, I test
for structural breaks in the data that have most likely
occurred after this date and divide accordingly the
sample period into two sub-periods.
Data
The data I use in the analysis are of a monthly
frequency. Each country’s U.S. dollars values of
exports 6 and imports, 7 real effective exchange rate,
consumer price index (CPI), domestic industrial
production index, and the euro area’s industrial
production index data come from the IMF IFS database.
Interest rate data come from various sources. For
6 Exports F.O.B. 7 Imports C.I.F.
123
Statéco n°113, 2019
Egypt, Overnight Interbank Interest Rate from
DataStream is used. Morocco’s money market rate is
taken from the IMF IFS database. For Tunisia, the
money market rate (TMM) comes from the Central
Bank of Tunisia. The euro area’s short-term interest
rate data come from the European Central Bank’s
statistics. The oil prices per barrel are collected from
FRED Economic Data.8
The data was expressed in natural logarithms and
seasonally adjusted except for both domestic and
foreign short-term interest rates, which were expressed
solely in terms of levels and not seasonally adjusted.9
Sample periods depend on data availability and begin
in January 2007 for Egypt and in January 2000 for
Tunisia and Morocco. Samples end in September 2015
for Egypt and in December 2017 for Tunisia and
Morocco.
As mentioned earlier and in order to investigate how
uncertainty has influenced the relationship between
trade and the exchange rate, a Chow test of structural
break at an unknown break point is run on each
country’s data in order to determine the date of a
structural break. This test reveals structural break
points in the datasets in the aftermath of the Arab
Spring outbreak in December 2010; namely, August
2011, November 2011 and March 2012 in the datasets
of Tunisia, Egypt and Morocco, respectively. Hence,
the sample period of each country is divided into two
sub-periods; namely the more stable pre-Arab Spring
period (the normal period) and the more uncertain and
volatile post-Arab Spring period (the transition period).
By comparing the two sub-periods I can assess the
impact of the growing uncertainty in the OICs on the
relationship between their trade and the exchange rate.
As mentioned earlier, during the transition period, each
country has experienced a profound depreciation of its
national currency with respect to the major foreign
currencies; i.e., the U.S. dollar and the euro and the
trade balances have incurred expanding deficits (see
figure 1).
Results
Lag selection and Granger causality
analysis
The optimal lag lengths for each series in the VAR
models have been chosen in accordance with the
Akaike and Schwartz Information Criteria (AIC),
which suggested a two-lag VAR (2) for Tunisia, a one-
8 FRED Economic Data by the Federal Reserve Bank of St.
Louis. 9 The X11 method was employed to convert the gross time
series into seasonally adjusted series. 10 The results are not shown for space-saving consideration
but are available upon request.
lag VAR (1) for Egypt and a five lag VAR (5) for
Morocco.10
Based on the entire period samples, tables 1, 2 and 3
show for each country the Granger causality tests
between the selected endogenous variables. I find that
the level of the real effective exchange rate Granger
causes the exports and the imports in Tunisia. The
Egyptian data, however, show that the exports and the
imports Granger cause the real exchange rate. The
Moroccan data indicate that the imports Granger cause
the exchange rate but no evidence of a direct Granger
causality between the exports and the exchange rate.
Another interesting finding is revealed by these tables,
that is: in all sample countries there is strong evidence
that the exports Granger cause the imports. These
results highlight certain dependence of the imports to
the exports in the three studied MENA countries. The
following section will examine further this point.
Impulse response functions and forecast
error variance decomposition analyses
This section will present the Impulse Response
Functions (the IRFs) analysis depicting the responses
of trade flows; i.e., the exports and the imports, to a
positive shock in the real effective exchange rate,
reer,11 and the variance decomposition of the exports
and the imports of each sample country across different
periods. Note that a positive reer shock means an
appreciation of the national currency with respect to a
basket of trade partners’ currencies.
Tunisia
Figure 2 displays the IRFs of Tunisia within a +/-2
standard errors (SEs) confidence interval. Based on the
entire period data the IRFs show that a positive shock
of the real exchange rate rapidly triggers a decrease of
the volume of the exports and a momentary increase of
the volume of the imports, in accordance with the
theory. Nevertheless, these impacts of a change in the
exchange rate are not statistically significant at the level
of five percent. The IRFs of each sub-period reveal to
certain extent different shapes with respect to the entire
period’s responses; in fact, during the normal period, in
accordance with the theory, a positive shock (or
innovation) of one standard deviation in the exchange
rate induces a rapid decrease in the volume of the
exports of 0.8 percent after just four months. This
impact on the exports starts to be statistically
significant two months after the shock and continues
for more than thirty months long before it fades away.
On the part of the imports, a positive shock of the
exchange rate induces, in contradiction with the theory,
11 In this paper, a positive shock (interchangeably used with
the term “innovation”) of the exchange rate denotes an
appreciation of the real effective exchange rate (reer) by one
standard deviation.
124
Statéco n°113, 2019
a reduction of their volume that starts to be statistically
significant by the fourth month following the shock. By
this time the volume of imports decreases by almost 0.4
percent and remains at this new level for more than
twenty-five months before it gains back its pre-shock
level. On the other hand, the IRFs of the transition
period show that a shock in the exchange rate
(appreciation) has a minor and non-significant impact
on the exports. This shock, however, lifts temporarily
the volume of imports, as suggested by the economic
theory, but as with the exports, this impact remains
statistically insignificant.
Turning to the variance decomposition analysis (table
4), I find that, based on the entire period data, the
variation of the exports is mostly impacted by shocks to
its own lags (more than to 92 percent of the explained
variance). This is followed by the industrial production
index (up to 4 percent), and slightly by shocks to the
real exchange rate (up to 1.9 percent). The variation of
the imports is driven mainly by shocks in the exports
(up to 54 percent), its own shocks (up to 63 percent)
then the industrial production index (up to 4 percent).
The data of the normal period show that the variation
of the exports is mostly impacted by its own shocks
(more than 90 percent). However, the shocks in the real
exchange rate explain at maximum 6 percent of this
variation. The variation of the imports is almost
explained by the same major forces as in the entire
period; namely the exports and own shocks.
The transition period data reveal that besides its own
shocks, the variation in the exports is driven by shocks
in the industrial production index (up to 6 percent) and
to a lesser degree the shocks in the exchange rate (only
0.6 percent). The variation of the imports is driven by
mainly its own shocks (up to 67 percent), followed by
the exports (up to 35 percent) and then the industrial
production (up to 3.2 percent).
These findings highlight the low impact of the
exchange rate on Tunisian foreign trade, though the
existence of a mild impact on the exports is observed
during the pre-Arab Spring period. This result points
out the low effectiveness of exchange rate policies,
especially the devaluation policy of the dinar (highly
recommended by the IMF stabilization programs)
during the transition period, in enhancing Tunisian
exports and reducing the trade deficit. Another
important result given by this empirical analysis is the
relatively stronger dependence and attachment of
Tunisian imports to the exports rather than to the
exchange rate. The Granger causality and the variance
decomposition analyses point out this strong
relationship that explains the co-movement in the same
direction of both the exports and the imports.
Egypt
Figure 3 shows the IRFs of Egypt within a +/-2 SEs
confidence interval. Based on the entire period data, the
IRFs show that a positive shock of the real exchange
rate increases quickly and significantly the exports for
about 2 percent by the fifth month. This impact remains
for almost fifteen months before it fades away and loses
its strength. Note that this result is in contradiction with
the theory that suggests a shrink in the exports after a
positive change of the reer rather than an expansion. As
for the Egyptian imports, the response to a shock in the
exchange rate is, in accordance with the theory,
positive, quick and statistically significant; in fact, four
months after the shock the volume of the imports
increases by more than 1.5 percent. This upward effect
on the imports remains statistically significant for nine
months and then disappears.
During the normal and the transition periods the
responses of Egyptian exports and imports are almost
like their responses given by entire period’s IRFs; i.e.,
a positive shock in the exchange rate triggers a rapid
surge in the exports and the imports. Nevertheless,
these upward responses of the trade to a reer shock are
not statistically significant.
Table 5 describes the variance decomposition analysis.
Based on the entire period data, the variation of the
exports is mainly explained by its own shocks (up to 97
percent), followed by the shocks in the real exchange
rate (up to 19 percent). The variation of the imports is
principally driven by their own shocks (up to 98
percent), the exports (up to 13 percent), then, the shocks
of the exchange rate (up to 9 only percent). Though
their participation in the import’s variation is lower
than in Tunisia, this finding upholds the assertion of the
dependence of the Egyptian imports to the exports
during the entire period of study.
The variance decomposition analysis run on the normal
period data confirms the importance of own shocks in
explaining the exports variation in Egypt (up to 93
percent of the variance). This is followed by the imports
and the interest rate (more than 6 percent, each). The
variation of the imports is, however, mainly driven by
own and export shocks.
The data of the transition period show that besides the
importance of their own shocks, Egyptian exports
variation is driven by the industrial production index
(up to 12 percent). About the imports variation, the
main explaining force is its own shocks (up to 97
percent) followed by the CPI (up to 8.2 percent) and,
almost equally, the exchange rate and the industrial
production index shocks (more than 5 percent, each).
These findings show the weak effectiveness of the
Egyptian exchange rate policy in influencing trade and
containing the increasing trade deficit, especially
during the tumultuous post-Arab Spring period.
Overall, the results also reveal a strong dependence of
the imports to the exports.
Morocco
Figure 4 illustrates the IRFs of Morocco within a +/-2
SEs confidence interval. The entire period data show
that an unanticipated increase in the real exchange rate
125
Statéco n°113, 2019
triggers, first, a temporary increase in Moroccan
exports followed, in accordance with the theory, by a
long decrease that start to be statistically significant
from the sixth month following the shock. By the tenth
month the exports decline by about 1 percent and their
volume remains around this new lower level for a
relatively long time before it regains their pre-shock
level. The response of the imports to an exchange rate
shock is similar in sign and nearly in intensity to the
response of the exports, which is naturally in
contradiction with the theory. After a temporary surge,
an exchange rate shock triggers a reduction in the
imports that becomes statistically significant from the
tenth month following the shock. The volume of
imports hits the bottom by the thirteenth month (-0.7
percent) and remains at this lower level for a relatively
long period before it returns to its pre-shock level.
The responses of Moroccan exports and imports to a
positive shock in the real exchange rate during the
normal period are almost like their responses illustrated
by the entire period-based-data-IRFs. The only
difference is that the significantly reducing impact of
the exchange rate shock lasts for shorter times before it
fades away and the volumes of the exports and the
imports return to their pre-shock level. The transition
period’s IRFs show a different behavior of Moroccan
trade resulting from an unanticipated innovation in the
reer. In fact, the responses of the exports and the
imports are similarly fluctuating but remains mute and
not statistically significant.
The variance decomposition of the exports during the
entire period (table 6) is mostly impacted by their own
shock (up to 93 percent of the explained variance),
followed by the exchange rate (up to 6.4 percent) then
shocks of the imports (up to 5.7 percent). On the other
hand, the variation of the imports is mostly driven by
their own shocks (up to 89 percent) and the shocks of
the exports (up to almost 15 percent). The shocks in the
exchange rate explain, however, this variance to a lesser
degree; i.e., less than 3 percent.
During the normal period, the variations of the exports
are principally explained by their own shocks (up to 93
percent). This is followed by the shocks in the exchange
rate (up to 12 percent of explained variance). The
imports variance is mostly explained by own and
exports shocks (up to 86 and 15.7 percent,
respectively). The exchange rate shock represents only
up to 5 percent of the explained variance. On the other
hand, the transition period data reveal that the exports
variation is mainly explained by their own shocks but
at a lesser degree than the normal period. This is
followed by the interest rate (up to 30 percent), the
12 To check the robustness of my results several IRFs
depicting the impact of an exchange rate shock on the trade
balances of the sample countries are estimated. In general,
the results highlight the weak impact of the exchange rate on
the balance of trade of the OICs, especially during the
transition period. This result confirms my finding; namely the
imports (up to 17 percent). The shocks in the exchange
rate explain only a small part of the exports variation
(up to only 3 percent). The variation of the imports is
highly explained by their own shocks (up to 98 percent
of the total variation). This is followed by the shocks in
the interest rate and the exchange rate (up to 9 percent
and 4 percent respectively). Unlike the entire and
normal periods, the shocks in Moroccan exports during
the transition period weakly explain the imports
variations. This finding highlights a significant
reduction of the dependence of Moroccan imports to
the exports during this period.
Overall, the empirical findings show that during the
periods of study the Moroccan exchange rate policy is
weakly effective in impacting the trade. They highlight
also a strong dependence of the imports to the exports
despite the decline of this dependence during the
transition period. This is most likely one of the factors
behind the significant improvement in Moroccan trade
deficit during the period of transition as shown by
figure 1.
The low effectiveness of exchange rate policies in
impacting trade in Tunisia, Egypt and Morocco,
notably during the transition periods, upholds the
literature suggestion that emerging economies’ trade,
particularly the exports, are weakly elastic to the
changes in the exchange rates12. Indeed, the literature
points out that MENA’s trade is highly dependent on
foreign demand fluctuations and product specialization
(European Investment Bank, 2016). The global
financial crisis that hit advanced economies in 2008 and
remained for several years afterwards has hampered
world demand and consequently emerging economies
exports. This decrease in external demand seems to
have eliminated the already weak effect of the exchange
rate on MENA’s trade, particularly the exports. This
assertion is demonstrated by the statistically non-
significant IRFs observed for all three countries during
the post-Arab Spring periods.
Overall, the IRFs of these MENA OICs endorse the
findings of Taglioni (2012) on the ambiguity in sign
and statistical significance of the relationship between
trade and the level of the exchange rate. It is obvious,
therefore, that the improvement in the exports, and
containing the widening trade deficits depend on the
improvement in the non-price competitiveness in
foreign markets of the goods and services produced in
these countries. This challenge would likely favor a
reallocation of resources towards the more dynamic and
creative domestic producers and exporters (Marin,
1985 and Ekholm and al, 2012).
low effectiveness of the exchange rate policies in these
countries on their exports and imports. The IRFs are not
shown for space-saving considerations but are available
upon request.
126
Statéco n°113, 2019
Another no less important finding of this research is the
reliable evidence of a strong dependence and
attachment of the imports in Tunisia, Egypt and
Morocco to their exports, especially during the more
stable pre-Arab Spring period. The increase (decrease)
in the internal demand for foreign goods triggered by
export-induced increases (decreases) in national
revenues is likely one of the reasons behind this strong
bond that ties the imports of these countries to their
exports.
Conclusion
In this paper I examined the impact of exchange rate
shocks on trade flows during the pre- and post- Arab
Spring periods in three oil-importing countries in the
MENA region; namely, Tunisia, Egypt and Morocco.
The Impulse-Response Functions and the variance
decomposition analyses demonstrate a weak impact of
the exchange rate on the exports and the imports of
these three countries. This impact becomes very weak
and statistically not significant during the uncertain and
unstable transitions periods. This weak effect has
clearly made the exchange rate policies of these
countries, especially Tunisia and Egypt, very
ineffective in containing and improving their trade
deficits. The improvement in the exports and
accordingly the containment of the trade deficits
depends most likely on other factors such as the
external demand and non-price competitiveness of the
product, as suggested by the literature, rather than
counting solely on an exchange rate-induced-price
competitiveness.
The results provided by the Granger causality, the IRFs,
and the variance decomposition analyses provide
strong evidence in favor of a significant attachment and
dependence of the imports in these three MENA OICs
to their exports. This relation is very likely behind the
unsuccessful exchange rate devaluation policy,
especially in Egypt and Tunisia, in controlling and
improving their trade deficits.
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Annex :
Table 1 – Granger Causality Analysis: Tunisia
Variable F – statistic P. value
H0 : Exports does not Granger cause
Imports 9.70079 0.000***
Industrial production index 9.70704 0.000***
CPI 0.86888 0.420
Interest rate 1.29842 0.275
REER 1.21038 0.300
H0 : Imports does not Granger cause
Exports 0.77124 0.463
Industrial production index 8.51721 0.000***
CPI 1.11951 0.328
Interest rate 0.59441 0.552
REER 1.85525 0.159
H0 : Industrial production index does not Granger cause
Exports 0.50620 0.603
Imports 2.73200 0.067*
CPI 1.41122 0.246
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Interest rate 0.67323 0.511
REER 1.12518 0.326
H0 : CPI does not Granger cause
Exports 0.32213 0.725
Imports 0.94837 0.389
Industrial production index 0.77231 0.463
Interest rate 0.89457 0.410
REER 1.29051 0.277
H0 : Interest rate does not Granger cause
Exports 1.06032 0.348
Imports 2.13324 0.121
Industrial production index 1.91315 0.150
CPI 2.47925 0.086
REER 0.24754 0.780
H0 : REER does not Granger cause
Exports 2.87121 0.058*
Imports 4.94658 0.008***
Industrial production index 4.42471 0.013**
CPI 5.31872 0.005***
Interest rate 0.57581 0.563
Table 2 – Granger Causality Analysis: Egypt
Variable F – statistic P. value
H0 : Exports does not Granger cause
Imports 16.018 0.000***
Industrial production index 12.3058 0.000***
CPI 17.8652 0.000***
Interest rate 6.59038 0.011**
REER 17.2344 0.000***
H0 : Imports does not Granger cause
Exports 1.60196 0.207
Industrial production index 6.96304 0.009***
CPI 3.88945 0.049**
Interest rate 1.22752 0.270
REER 3.97796 0.047**
H0 : Industrial production index does not Granger cause
Exports 4.75167 0.031**
Imports 2.15853 0.143
CPI 0.21677 0.642
Interest rate 0.69476 0.406
REER 0.21643 0.642
H0 : CPI does not Granger cause
Exports 0.77753 0.379
Imports 5.39488 0.021**
Industrial production index 3.82966 0.052*
Interest rate 3.98232 0.048**
REER 0.61281 0.434
H0 : Interest rate does not Granger cause
Exports 1.84571 0.177
Imports 0.00979 0.921
Industrial production index 3.89084 0.050*
CPI 0.70772 0.401
REER 1.98285 0.161
H0 : REER does not Granger cause
Exports 0.82222 0.365
Imports 0.79208 0.374
Industrial production index 1.57169 0.211
CPI 9.33358 0.002**
Interest rate 0.89695 0.345
129
Statéco n°113, 2019
Table 3 – Granger Causality Analysis: Morocco
H0 : Variable F – statistic P. value
Exports does not Granger cause
Imports 5.16901 0.000***
Industrial production index 0.84373 0.520
CPI 2.13092 0.063*
Interest rate 0.27136 0.928
REER 0.78661 0.560
H0 : Imports does not Granger cause
Exports 3.35970 0.006***
Industrial production index 0.53765 0.747
CPI 1.50424 0.190
Interest rate 1.46701 0.202
REER 1.93854 0.089*
H0 : Industrial production index does not Granger cause
Exports 6.55205 0.000***
Imports 4.93882 0.000***
CPI 3.45252 0.005***
Interest rate 0.40684 0.843
REER 2.19553 0.056*
H0 : CPI does not Granger cause
Exports 2.73727 0.020**
Imports 2.36045 0.041**
Industrial production index 0.39595 0.851
Interest rate 1.11013 0.356
REER 1.71026 0.133
H0 : Interest rate does not Granger cause
Exports 1.68251 0.140
Imports 1.26061 0.282
Industrial production index 1.00399 0.416
CPI 1.74038 0.126
REER 0.94876 0.450
H0 : REER does not Granger cause
Exports 1.69391 0.137
Imports 2.05756 0.072*
Industrial production index 0.65227 0.660
CPI 1.54075 0.178
Interest rate 3.03121 0.011**
Table 4 – Variance Decomposition Analysis: Tunisia
Period S.E. log Exports log Imports log Ind.index log CPI Interest rate log REER
Response: (log) Exports (2000 - 2017)
1 0.080717 100.0000 0.000000 0.000000 0.000000 0.000000 0.000000
2 0.085217 98.66494 0.431652 0.006159 0.000796 0.129630 0.766823
3 0.095852 97.60253 0.349805 1.121578 0.004318 0.139234 0.782540
4 0.099700 96.58401 0.458501 1.684530 0.009962 0.203916 1.059081
5 0.104153 95.66501 0.426142 2.463936 0.016024 0.251472 1.177415
6 0.106854 94.83104 0.430196 3.017733 0.023491 0.334886 1.362658
7 0.109312 94.14719 0.413869 3.484249 0.031246 0.424571 1.498874
8 0.111121 93.55265 0.404036 3.816749 0.039765 0.537262 1.649535
9 0.112661 93.05262 0.393331 4.059863 0.048610 0.661006 1.784572
10 0.113893 92.61232 0.384914 4.224548 0.057910 0.799113 1.921194
Response: (log) Imports (2000 - 2017)
1 0.075418 36.76669 63.23331 0.000000 0.000000 0.000000 0.000000
2 0.080298 42.41163 55.88516 1.298320 0.130129 0.017341 0.257419
3 0.085107 47.12012 50.18182 1.994185 0.158459 0.255558 0.289849
130
Statéco n°113, 2019
4 0.087702 49.58637 47.34575 2.142207 0.184051 0.468119 0.273503
5 0.090147 51.46445 44.83079 2.558898 0.198788 0.683551 0.263522
6 0.091950 52.58823 43.11257 2.918196 0.211648 0.909838 0.259512
7 0.093520 53.46435 41.68476 3.243645 0.223082 1.128830 0.255339
8 0.094791 54.06913 40.58078 3.510035 0.234082 1.352340 0.253631
9 0.095884 54.54145 39.66370 3.724200 0.244709 1.573738 0.252204
10 0.096807 54.89408 38.91300 3.890797 0.255184 1.795200 0.251743
Period S.E. log Exports log Imports log Ind.index log CPI Interest rate log REER
Response: (log) Exports (2000 - 2011 M7)
1 0.083142 100.0000 0.000000 0.000000 0.000000 0.000000 0.000000
2 0.087821 95.63694 1.251399 0.638581 0.044058 0.009680 2.419342
3 0.092283 95.40651 1.136769 0.699751 0.092575 0.042929 2.621468
4 0.093482 94.36100 1.387831 0.732285 0.104693 0.045592 3.368598
5 0.094312 93.83555 1.363938 0.800370 0.107539 0.059764 3.832841
6 0.094772 93.19636 1.369709 0.868148 0.107142 0.059387 4.399251
7 0.095122 92.66102 1.359896 0.919082 0.106370 0.059290 4.894340
8 0.095419 92.12908 1.351833 0.955966 0.105853 0.059031 5.398241
9 0.095688 91.63018 1.344326 0.982123 0.105697 0.058799 5.878870
10 0.095944 91.14660 1.337312 1.000605 0.105910 0.058571 6.350998
Response: (log) Imports (2000 - 2011 M7)
1 0.078093 35.69829 64.30171 0.000000 0.000000 0.000000 0.000000
2 0.085862 39.76223 53.33225 5.463796 0.173491 0.902674 0.365551
3 0.088504 41.90863 50.43136 5.243157 0.438164 1.313300 0.665386
4 0.089447 42.49919 49.52725 5.133360 0.647189 1.386408 0.806608
5 0.090042 42.83145 48.87446 5.073224 0.803333 1.469543 0.947985
6 0.090386 42.81329 48.50863 5.054113 0.933055 1.582929 1.107988
7 0.090630 42.74793 48.24699 5.040548 1.044702 1.666744 1.253091
8 0.090825 42.63535 48.04053 5.030959 1.143647 1.742748 1.406775
9 0.090992 42.51489 47.86531 5.022448 1.233992 1.803774 1.559590
10 0.091142 42.39190 47.70863 5.014238 1.317470 1.852409 1.715349
Period S.E. log Exports log Imports log Ind.index log CPI Interest rate log REER
Response: (log) Exports (2011 M8 - 2017)
1 0.066075 100.0000 0.000000 0.000000 0.000000 0.000000 0.000000
2 0.067350 96.67629 0.111018 1.344914 1.030983 0.718686 0.118113
3 0.071737 93.60007 0.447745 4.018597 0.908837 0.918394 0.106358
4 0.072405 92.22830 0.443669 4.893250 0.933398 1.396178 0.105204
5 0.073758 91.58226 0.458256 5.356673 0.907211 1.593806 0.101791
6 0.074161 91.11411 0.469780 5.609976 0.926974 1.778398 0.100760
7 0.074633 90.83259 0.490013 5.782490 0.923583 1.870772 0.100548
8 0.074850 90.62546 0.498160 5.898665 0.926657 1.949398 0.101658
9 0.075043 90.49013 0.504982 5.978668 0.924905 1.998121 0.103194
10 0.075155 90.39383 0.508798 6.031798 0.924405 2.035803 0.105363
Response: (log) Imports (2011 M8 - 2017)
1 0.067743 33.17066 66.82934 0.000000 0.000000 0.000000 0.000000
2 0.069050 32.54352 65.42798 0.236389 0.147251 0.051482 1.593379
3 0.070527 33.74560 62.81418 1.587123 0.145409 0.161385 1.546301
4 0.071033 33.70483 61.92427 2.405830 0.150851 0.277801 1.536413
5 0.071620 34.26318 60.93912 2.763367 0.148717 0.356522 1.529089
6 0.071900 34.45707 60.47284 2.939720 0.151667 0.426823 1.551878
7 0.072152 34.66159 60.06304 3.066240 0.151867 0.477517 1.579745
8 0.072313 34.75146 59.80378 3.154702 0.151764 0.521556 1.616742
9 0.072450 34.83252 59.58476 3.217693 0.151195 0.556858 1.656972
10 0.072552 34.87920 59.42160 3.261011 0.150854 0.586844 1.700493
131
Statéco n°113, 2019
Table 5 – Variance Decomposition Analysis: Egypt
Period S.E. log Exports log Imports log Ind.index log CPI Interest rate log REER
Response: (log) Exports (2007 - 2015 M9)
1 0.082379 100.0000 0.000000 0.000000 0.000000 0.000000 0.000000
2 0.089650 96.72644 1.258030 0.130420 5.77E-05 0.038311 1.846738
3 0.093232 91.83915 2.787693 0.468926 0.008675 0.050855 4.844699
4 0.096388 86.77343 4.084339 1.040944 0.049129 0.047584 8.004573
5 0.099494 81.96454 5.085563 1.857807 0.135634 0.059079 10.89738
6 0.102621 77.48929 5.830246 2.917203 0.271954 0.101279 13.39003
7 0.105799 73.33618 6.365060 4.203136 0.455439 0.175287 15.46490
8 0.109038 69.47946 6.729949 5.688825 0.680185 0.274332 17.14725
9 0.112344 65.89526 6.958229 7.340694 0.938975 0.389154 18.47769
10 0.115717 62.56354 7.077901 9.122142 1.224410 0.510936 19.50107
Response: (log) Imports (2007 - 2015 M9)
1 0.096299 12.02650 87.97350 0.000000 0.000000 0.000000 0.000000
2 0.109183 12.85678 85.72943 0.000973 0.372533 0.020745 1.019536
3 0.115048 13.07414 83.12778 0.017621 1.092248 0.022738 2.665476
4 0.119262 13.06688 80.36802 0.128451 2.028106 0.024969 4.383581
5 0.122969 12.99223 77.54491 0.409968 3.088280 0.054677 5.909933
6 0.126509 12.90698 74.68943 0.908989 4.212397 0.122374 7.159825
7 0.130005 12.82918 71.81790 1.641289 5.358452 0.224087 8.129086
8 0.133510 12.76241 68.94950 2.598442 6.495824 0.349029 8.844803
9 0.137048 12.70530 66.10771 3.755787 7.602075 0.485228 9.343900
10 0.140625 12.65536 63.31737 5.079403 8.661295 0.622403 9.664169
Period S.E. log Exports log Imports log Ind.index log CPI Interest rate log REER
Response: (log) Exports (2007 - 2011 M10)
1 0.077852 100.0000 0.000000 0.000000 0.000000 0.000000 0.000000
2 0.081667 93.18545 5.101402 0.000199 0.003909 1.623977 0.085064
3 0.083249 91.39044 5.307943 0.002538 0.060565 2.936592 0.301919
4 0.084371 89.81632 5.367145 0.005439 0.141375 4.001922 0.667802
5 0.085386 88.40047 5.415125 0.011477 0.233856 4.784478 1.154592
6 0.086383 87.05599 5.510927 0.025887 0.331289 5.349804 1.726102
7 0.087400 85.74406 5.661269 0.057077 0.431621 5.756418 2.349553
8 0.088451 84.44223 5.859042 0.115642 0.534380 6.048425 3.000281
9 0.089543 83.13745 6.092188 0.212880 0.639617 6.256371 3.661493
10 0.090682 81.82053 6.349042 0.359502 0.747463 6.400961 4.322502
Response: (log) Imports (2007 - 2011 M10)
1 0.097875 19.58863 80.41137 0.000000 0.000000 0.000000 0.000000
2 0.106940 25.50797 73.81066 0.091790 0.266054 0.322535 0.000996
3 0.109865 26.52814 71.57638 0.207336 0.650081 1.013416 0.024650
4 0.111650 26.92880 69.86623 0.318877 1.067697 1.722491 0.095907
5 0.113138 27.12970 68.40411 0.423132 1.468873 2.348500 0.225678
6 0.114544 27.27945 67.07002 0.526635 1.838217 2.872914 0.412759
7 0.115941 27.41617 65.81555 0.637212 2.173205 3.307298 0.650568
8 0.117358 27.54850 64.61420 0.762195 2.475983 3.667798 0.931327
9 0.118809 27.67587 63.44952 0.908189 2.749969 3.968456 1.247993
10 0.120302 27.79550 62.30990 1.081110 2.998608 4.220056 1.594823
Period S.E. log Exports log Imports log Ind.index log CPI Interest rate log REER
Response: (log) Exports (2011 M11 - 2015 M9)
1 0.075373 100.0000 0.000000 0.000000 0.000000 0.000000 0.000000
132
Statéco n°113, 2019
2 0.080230 91.03749 0.211261 7.242099 0.056287 0.049552 1.403308
3 0.082564 87.67571 0.281888 9.679604 0.111973 0.062213 2.188615
4 0.083869 85.55226 0.524929 10.89923 0.185430 0.064867 2.773283
5 0.084666 84.16043 0.815223 11.51572 0.272789 0.063798 3.172042
6 0.085167 83.24989 1.055391 11.84191 0.368029 0.064250 3.420532
7 0.085478 82.67217 1.213305 12.02291 0.464772 0.068577 3.558269
8 0.085668 82.31729 1.296880 12.12867 0.557774 0.076554 3.622833
9 0.085784 82.10212 1.329805 12.19315 0.643429 0.086564 3.644931
10 0.085858 81.96718 1.336413 12.23311 0.719752 0.096751 3.646790
Response: (log) Imports (2011 M11 - 2015 M9
1 0.094559 2.809200 97.19080 0.000000 0.000000 0.000000 0.000000
2 0.108558 2.516826 91.43490 2.293473 0.715017 0.475086 2.564703
3 0.115659 2.221946 88.09569 3.231120 1.705662 0.618581 4.126996
4 0.119783 2.071693 85.68781 3.920001 2.803744 0.612359 4.904394
5 0.122229 1.991888 83.87910 4.450141 3.918123 0.588097 5.172654
6 0.123738 1.956320 82.41842 4.864130 4.990800 0.587508 5.182826
7 0.124782 1.957376 81.16811 5.180572 5.977974 0.608900 5.107066
8 0.125648 1.994242 80.05423 5.412758 6.850344 0.638669 5.049759
9 0.126490 2.066646 79.03772 5.573891 7.594578 0.664978 5.062183
10 0.127374 2.172096 78.09853 5.677950 8.211907 0.681711 5.157807
Table 6 – Variance Decomposition Analysis: Morocco
Period S.E. log Exports log Imports log Ind.index log CPI Interest rate log REER
Response: (log) Exports (2000 - 2017)
1 0.069246 100.0000 0.000000 0.000000 0.000000 0.000000 0.000000
2 0.075707 93.05817 3.522024 1.834194 0.428321 0.883201 0.274092
3 0.078988 92.20437 3.262128 1.746891 0.556284 1.168596 1.061732
4 0.081444 88.87747 5.121713 2.029246 1.608202 1.250811 1.112561
5 0.082662 87.96435 5.129327 2.047750 2.392082 1.214235 1.252258
6 0.083351 86.60980 5.222954 2.696661 2.436093 1.713874 1.320622
7 0.084416 84.57213 5.607077 2.644365 2.610532 2.311365 2.254531
8 0.085702 82.30452 5.792772 2.828078 2.763657 2.648971 3.662000
9 0.087056 80.00841 5.762689 2.844828 3.165034 3.110951 5.108090
10 0.088564 77.45155 5.739426 3.026989 3.414655 3.933271 6.434113
Response: (log) Imports (2000 - 2017)
1 0.064129 10.62546 89.37454 0.000000 0.000000 0.000000 0.000000
2 0.067741 13.09919 83.89020 1.375036 1.625162 0.006408 0.004004
3 0.070762 14.51307 79.51483 2.737055 1.569035 0.489000 1.177015
4 0.075792 14.78842 78.86930 2.549997 1.764799 0.899008 1.128474
5 0.077530 14.24478 76.18032 3.745448 3.589890 1.083890 1.155670
6 0.079545 13.53418 76.41335 4.164931 3.710066 1.079295 1.098178
7 0.081362 12.95581 76.16084 4.952245 3.597597 1.044942 1.288568
8 0.082358 13.05465 75.21021 5.648879 3.535939 1.020003 1.530312
9 0.083751 12.91123 74.19394 6.001184 3.776649 1.102711 2.014285
10 0.085116 12.88906 72.86039 6.599298 3.805710 1.136902 2.708648
Period S.E. log Exports log Imports log Ind.index log CPI Interest rate log REER
Response: (log) Exports (2000 - 2012 M2)
1 0.075006 100.0000 0.000000 0.000000 0.000000 0.000000 0.000000
2 0.080657 93.17253 3.992219 0.600582 1.144077 0.214558 0.876030
3 0.084982 89.17512 4.383926 0.764307 1.403747 2.028291 2.244605
4 0.087211 85.78371 5.404015 0.728925 3.310358 1.974611 2.798383
5 0.089744 82.59997 5.152289 0.988044 5.165816 2.193538 3.900339
6 0.090423 81.53325 5.084476 1.003859 5.668563 2.180273 4.529583
7 0.092331 78.20767 4.939677 2.028865 5.467459 2.243553 7.112771
133
Statéco n°113, 2019
8 0.093616 76.07659 4.987859 2.063940 5.326045 2.244971 9.300595
9 0.094635 74.45017 4.882277 2.169882 5.342768 2.293387 10.86152
10 0.095714 72.80911 4.772893 2.134066 5.286039 2.759400 12.23850
Response: (log) Imports (2000 - 2012 M2)
1 0.067909 13.44545 86.55455 0.000000 0.000000 0.000000 0.000000
2 0.070660 15.10832 82.52898 0.213131 1.732572 0.405898 0.011096
3 0.073146 15.57842 78.51925 0.808184 1.770559 0.434892 2.888697
4 0.077802 15.76721 76.53818 2.639480 1.901929 0.592486 2.560717
5 0.079959 15.08607 72.58791 2.650054 5.317770 1.684610 2.673577
6 0.081313 14.61873 72.51184 2.571335 5.764081 1.879886 2.654128
7 0.082732 14.28327 72.36997 2.487622 5.586012 1.959870 3.313258
8 0.083187 14.14493 72.07487 2.463062 5.539827 2.041814 3.735492
9 0.083843 13.93507 71.61128 2.425881 5.777820 2.094332 4.155616
10 0.084575 13.71275 70.95814 2.529295 5.704500 2.111480 4.983833
Period S.E. log Exports log Imports log Ind.index log CPI Interest rate log REER
Response: (log) Exports (2012 M3 - 2017)
1 0.043256 100.0000 0.000000 0.000000 0.000000 0.000000 0.000000
2 0.051639 71.83034 1.865236 13.02976 0.032761 12.92930 0.312600
3 0.057627 57.68110 6.437505 12.25547 0.056953 23.25766 0.311305
4 0.064853 45.65391 13.10945 10.65924 0.546729 28.55827 1.472401
5 0.067889 41.66112 16.28360 10.02676 0.849744 28.57588 2.602908
6 0.069553 40.47805 16.54018 9.717889 0.873032 29.90321 2.487639
7 0.069778 40.24747 16.57289 9.978674 0.883979 29.80269 2.514290
8 0.069952 40.23951 16.54320 9.970399 0.893033 29.75551 2.598345
9 0.070192 39.97571 16.96712 9.965253 0.905279 29.56300 2.623648
10 0.070582 39.55089 17.14772 9.877400 0.923503 29.48681 3.013672
Response: (log) Imports (2012 M3 - 2017)
1 0.062014 1.647739 98.35226 0.000000 0.000000 0.000000 0.000000
2 0.064476 2.616702 92.53362 0.066806 0.175226 1.730915 2.876727
3 0.068177 2.701848 83.77651 0.696032 0.509073 8.987635 3.328898
4 0.072794 2.517380 83.81027 0.811498 1.972605 7.952387 2.935859
5 0.073340 2.592332 82.65850 0.905465 2.018842 8.928254 2.896608
6 0.075051 2.484056 81.71877 0.865689 1.927831 8.935927 4.067725
7 0.076698 3.204305 79.41017 1.322866 3.221637 8.762285 4.078739
8 0.077091 3.286139 78.61469 1.585936 3.706332 8.687772 4.119136
9 0.077457 3.259091 78.28300 1.691196 3.710527 8.975627 4.080558
10 0.077765 3.251989 77.78518 1.696086 4.050828 9.075749 4.140167
Figure 1: External balance on goods and services (% of GDP), World Bank
-20
-15
-10
-5
02000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017
Tunisia Egypt Morocco
134
Statéco n°113, 2019
Figure 2: IRFs, Tunisia
-.020
-.015
-.010
-.005
.000
.005
5 10 15 20 25 30
Response of (log) Exports to a (log) real exchange
rate shock
(2000 - 2017)
-.010
-.005
.000
.005
.010
.015
5 10 15 20 25 30
Response of (log) Imports to a (log) real exchange
rate shock
(2000 - 2017)
Response to Cholesky One S.D. Innovations ± 2 S.E.
-.03
-.02
-.01
.00
5 10 15 20 25 30
Response of (log) Exports to a (log) real exchange
rate shock
(2000 - 2011 M7)
-.02
-.01
.00
.01
5 10 15 20 25 30
Response of (log) Imports to a (log) real exchange
rate shock
(2000 - 2011 M7)
Response to Cholesky One S.D. Innovations ± 2 S.E.
-.02
-.01
.00
.01
.02
5 10 15 20 25 30
Response of (log) Exports to a (log) real exchange
rate shock
(2011 M8 - 2017)
-.01
.00
.01
.02
.03
5 10 15 20 25 30
Response of (log) Imports to a (log) real exchange
rate shock
(2011 M8 - 2017)
Response to Cholesky One S.D. Innovations ± 2 S.E.
135
Statéco n°113, 2019
Figure 3: IRFs, Egypt
-.02
-.01
.00
.01
.02
.03
.04
.05
5 10 15 20 25 30
Response of (log) Exports to a (log) real exchange
rate shock
(2007 - 2015 M9)
-.03
-.02
-.01
.00
.01
.02
.03
.04
5 10 15 20 25 30
Response of (log) Imports to a (log) real exchange
rate shock
(2007 - 2015 M9)
Response to Cholesky One S.D. Innovations ± 2 S.E.
-.04
-.02
.00
.02
.04
.06
5 10 15 20 25 30
Response of (log) Exports to a (log) real exchange
rate shock
(2007 - 2011 M10)
-.04
.00
.04
.08
5 10 15 20 25 30
Response of (log) Imports to a (log) real exchange
rate shock
(2007 - 2011 M10)
Response to Cholesky One S.D. Innovations ± 2 S.E.
-.01
.00
.01
.02
.03
5 10 15 20 25 30
Response of (log) Exports to a (log) real exchange
rate shock
(2011 M11 - 2015 M9)
-.04
-.02
.00
.02
.04
.06
5 10 15 20 25 30
Response of (log) Imports to a (log) real exchange
rate shock
(2011 M11 - 2015 M9)
Response to Cholesky One S.D. Innovations ± 2 S.E.
136
Statéco n°113, 2019
Figure 4: IRFs, Morocco
-.02
-.01
.00
.01
.02
5 10 15 20 25 30
Response of (log) Exports to a (log) real exchange
rate shock
(2000 - 2017)
-.02
-.01
.00
.01
.02
5 10 15 20 25 30
Response of (log) Imports to a (log) real exchange
rate shock
(2000 - 2017)
Response to Cholesky One S.D. Innovations ± 2 S.E.
-.03
-.02
-.01
.00
.01
.02
.03
5 10 15 20 25 30
Response of (log) Exports to a (log) real exchange
rate shock
(2000 - 2012 M2)
-.02
-.01
.00
.01
.02
.03
5 10 15 20 25 30
Response of (log) Imports to a (log) real exchange
rate shock
(2000 - 2012 M2)
Response to Cholesky One S.D. Innovations ± 2 S.E.
-.02
-.01
.00
.01
.02
.03
5 10 15 20 25 30
Response of (log) Exports to a (log) real exchange
rate shock
(2012 M3 - 2017)
-.02
-.01
.00
.01
.02
.03
5 10 15 20 25 30
Response of (log) Imports to a (log) real exchange
rate shock
(2012 M3 - 2017)
Response to Cholesky One S.D. Innovations ± 2 S.E.
137
Statéco n°113, 2019
Appel à contributions
Les statistiques de Gouvernance, Paix et Sécurité :
quelles mesures pour quels résultats ?
Mireille Razafindrakoto (IRD-DIAL), François Roubaud (IRD-DIAL) et Arouna Sougané (INSTAT)
Longtemps considérées comme un hors champ de l’économie dominante (mainstream) et des politiques publiques,
les questions de gouvernance, de paix et de sécurité (GPS) sont progressivement, depuis une vingtaine d’années,
entrées au cœur de la discipline, et plus largement de l’agenda de la communauté internationale du développement,
où elles se retrouvent de plain-pied aujourd’hui. L’accent mis sur la notion de gouvernance suscite souvent des
interrogations en raison du paradigme qu’elle peut véhiculer, notamment quand elle est utilisée pour remettre en
question le rôle de l’État. Toutefois, malgré la distance critique qu’il convient de garder par rapport à l’usage de
cette notion, l’intérêt accordé à la qualité des institutions, aux questions de participation ou de redevabilité
(accountability) dans les politiques de développement marque un tournant. L’adoption d’un ODD sur ce thème
consacre cette évolution. Le fait qu’un des 17 Objectifs de développement durable (ODD) adoptés en 2015 par les
Nations Unies soit centré sur la gouvernance (ODD16) constitue donc de ce point de vue une avancée majeure,
d’autant plus que les ODD sont universels et engagent tous les pays du monde, alors que les OMD ne couvraient
que les PED. En Afrique, la gouvernance, la paix et la sécurité font également partie des aspirations soulignées
par l’agenda 20631.
L’adoption des ODD s’est accompagnée en parallèle de l’appel à une révolution des données (Data Revolution)
par le Secrétaire général des Nations unies (GCEU, 2014). Le rapport sur la révolution des données prend acte du
besoin croissant de statistiques dans le monde et du fossé de plus en plus large entre pays développés et en
développement en matière d’accès à l’information. Il formule plusieurs recommandations pour mobiliser
l’innovation technologique et les ressources financières en faveur des statistiques dans le cadre d’un partenariat
entre tous les acteurs (Bédécarrats et alii, 2016). Pourtant, malgré ce contexte porteur, la situation en termes de
statistiques reste critique, notamment en Afrique comme en atteste le dernier Rapport sur la Gouvernance en
Afrique (Mo Ibrahim Foundation, 2019).2 Cette alerte quant au « Data gap » sur le continent montre que les bilans
alarmistes tirés dans la première moitié des années 2000 sont toujours d’actualité (Jerven, 2013 ; Devarajan, 2013,
dont l’article s’intitulait : Africa’s statistical tragedy).
Malgré les lacunes, la demande croissante a créé un formidable appel d’air en matière de statistiques GPS, avec
l’émergence d’une floraison de sources statistiques (enquêtes ménages, enquêtes experts, données administratives,
big data…). La statistique publique a pris la balle au bond, avec la création en 2015 d’un City Group sur les
statistiques de gouvernance, qui doit publier début 2020 un Manuel sur le sujet (Praia Group et UNSD, 2020).
L’UNODC publiait dans le même temps un Manuel sur la mesure de la corruption (UNODC et alii, 2018).
L’Afrique quant à elle, sous l’égide de l’Union africaine, a développé sa propre méthodologie GPS, dans le cadre
de sa Stratégie d’Harmonisation de la Statistique en Afrique (SHaSA ; Razafindrakoto et Roubaud, 2015 et 2019),
conférant au continent une avance sur le reste du monde dans ce domaine (Cling et alii, 2016). Ce leadership n’est
pas nouveau, puisque les premières mesures de la gouvernance dans le dispositif de statistiques officielles, initiées
à Madagascar dès 1995, ont été étendues et consolidées au cours des années 2000, en Afrique d’abord, mais
également en Amérique latine et en Asie et dont Statéco s’est largement fait l’écho (Razafindrakoto et Roubaud,
2005 ; Herrera et alii, 2007).
Ce numéro spécial, dont la publication est programmée en 2020, se donne pour objectif d’actualiser l’état des lieux
sur la thématique GPS : conceptualisation, expériences, avancées et perspectives. Il accueille des contributions
originales, aussi bien de type méthodologique (comment « mesurer » la gouvernance ?) qu’analytique (quels
1 Aspiration 3 : « Une Afrique où règnent la bonne gouvernance, la démocratie, le respect des droits de l’homme, la justice et
l’état de droit ») ; et Aspiration 4 (« Une Afrique pacifique et sécurisée »). 2 Le jour même de la finalisation de cet appel à contributions (20/12/2019), le quotidien Le Monde titrait sa chronique :
« L’Afrique dans le brouillard statistique ».
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résultats peuvent être tirés des statistiques GPS ?). Une large palette de disciplines est convoquée : statistique, data
analysis, économie, sciences politiques, sociologie, anthropologie, etc. Les terrains d’application sont multiples :
l’Afrique bien sûr, mais également d’autres pays en développement voire des pays développés, pour une mise en
perspective ; la question GPS n’étant l’apanage d’aucune région particulière. Si les propositions centrées sur la
statistique publique sont au cœur de ce numéro spécial, les approches pilotées par d’autres acteurs (recherche,
société civile, etc.) sont également les bienvenues. Enfin, le profil des contributeurs est ouvert, en privilégiant les
auteurs du Sud.
Références
Bédécarrats F., Cling J.-P., Roubaud F. (éds) (2016), Gouverner par les nombres en Afrique, Afrique
Contemporaine, No. 258, numéro spécial, 2016/2.
Cling J.-P., Razafindrakoto M., Roubaud F. (2016), « L’ODD 16 sur la gouvernance et sa mesure. L’Afrique
en tête », Afrique Contemporaine, 2016/2, 258, pp. 73-93.
Devarajan S. (2013), « Africa's statistical tragedy », Review of Income and Wealth, 59 (S1), pp. S9–S15.
GCEU (2014), Un monde qui compte : Mobiliser la révolution des données pour le développement durable,
Groupe consultatif d’experts indépendants sur la révolution des données pour le développement durable.
Jerven (2013), Poor Numbers. How We Are Misled by African Development Statistics and What to Do about It,
Cornell University Press, Ithaca et Londres.
Herrera J., Razafindrakoto M., Roubaud F. (2007), “Governance, Democracy and Poverty Reduction: Lessons
drawn from household surveys in sub-Saharan Africa and Latin America”, International Statistical Review, 75(1),
pp.70-95.
Mo Ibrahim Foundation (2019), African governance report. Agenda 2063 & 2030: Is Africa on track? Mo
Ibrahim Foundation.
Razafindrakoto M., Roubaud F. (2015), « Les modules Gouvernance, Paix et Sécurité dans un cadre harmonisé
au niveau de l’Afrique (GPS-SHaSA) : développement d’une méthodologie d’enquête statistique innovante »,
Statéco No. 109, pp.122-158.
Razafindrakoto M., Roubaud F. (2005), « Gouvernance, Démocratie et Lutte contre la Pauvreté : Enseignements
tirés des enquêtes 1-2-3 en Afrique francophone », Statéco No. 99, pp.117-141
Union Africaine (2014), Agenda 2063 : l’Afrique que nous voulons, Union Africaine, Addis Abeba.
UNODC, UNDP, UNODC-INEGI Center of Excellence in Statistical Information on Government,
Victimization and Justice (2018), Manual on Corruption Surveys. Methodological guidelines on the
measurement of bribery and other forms of corruption through sample surveys, UNODC Research, UNODC,
Vienne.
UNSD et Praia Group (2020), Handbook on Governance Statistics, UNSD: New York (à paraître).
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