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    ETVS-JZSEF-COLLEGIUMELTE

    ANTIQUITASBYZANTIUMRENASCENTIAXII.

    (BIBLIOTHECABYZANTINAII)

    BYZANZ

    UND DAS ABENDLAND II.

    StudiaByzantino-Occidentalia

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    BYZANZ UND DAS ABENDLAND II.

    STUDIA BYZANTINOOCCIDENTALIA

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    Antiquitas Byzantium Renascentia XII.

    Bibliotheca Byzantina II

    Herausgegeben von

    Zoltn FarkasLszl HorvthTams Mszros

    Etvs-Jzsef-Collegium2014

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    Byzanz und das Abendland II.

    Studia Byzantino-Occidentalia

    Herausgegeben von

    Erika Juhsz

    Etvs-Jzsef-CollegiumBudapest 2014

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    Herausgegeben im Rahmen des vom

    Nationalen Forschungsfonds Ungarn gefrderten ProjektsOTKA Nr. 104456

    Verantwortlicher Herausgeber:Lszl Horvth, Direktor des Etvs-Jzsef-Collegiums

    Anschrift: ELTE Etvs-Jzsef-Collegium

    H-1118 Budapest, Mnesi t 11-13

    Etvs-Jzsef-Collegium und die einzelnen VerfasserInnen, 2014Alle Rechte vorbehalten

    ISBN 978-615-5371-36-3ISSN 2064-2369

    Druck: Ptria Nyomda Zrt.H-1117 Budapest, Hunyadi Jnos t 7

    Generaldirektor: Katalin Orgovn

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    Pour la datation de la Bibliothquede PhotiusLaMyriobiblos, le Patriarche et Rome*

    I - P

    Dans le manuscrit le plus ancien de la Bibliothque, louvrage est prcddune lettre de Photius son frre Taraise. Au dbut de cette ptre, le savantaffirme quil a compos louvrage aprs avoir t choisi pour [] 1:

    Photii Ep. ad Tarasium(d. H I, 1)

    . , , , , , , []2.

    * Je remercie Guglielmo Cavallo, Paolo Odorico et Oronzo Pecere pour leurs observations.1 La lettre est en effet transmise par le seul manuscrit Marc. Gr. 450 (sur lequel je me limite

    renvoyer R, F., La Bibliothque de Photios et le Marc. gr. 450. Recherches prlimi-naires, Segno e Testo10 (2012) 249278 et R, F., Lautomne du Patriarche. Photios, laBibliotheque et le Marc. Gr. 450. In: Proceedings of the Madrid Workshop The Transmission ofByzantine Texts: Between Textual Criticism and Quellenforschung. Philosophy, Historiography,Law, Rhetoric. Thursday, 2 February 2012 Saturday, 4 February 2012, Centro de CienciasHumanas y Sociales. Madrid 2014. 95132). Ltat de conservation du feuil let qui la contientest dsesprant : en tant que premier feuillet rectodu livre, il est trs abm et mutil danssa partie suprieure droite (qui a t restaure), avec perte d une partie du texte. En outre,lcriture a t repasse cause de la dgradation de lencre. Quoi quon en dise, i l est doncimpossible de reconnatre la main qui a crit la lettre et surtout il faut user de la plus grandeprudence en valuant les lectionesde lcriture sous-jacente.

    2 Ici et pour le passage suivant (ch. 280 de la Bibliothque), jimprime le texte du Thesaurus

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    La est galement voque la fin du dernier chapitre de la

    Bibliothque, qui contient une sorte dpilogue :

    Photii Bibliotheca, ch. 280 (d. Henry VIII, 214)

    , , , [...].

    A lpoque de Photius, il est clair que les Assyriens avaient disparu du panoramagopolitique. Leur mention par le savant constitue, de toute vidence, uneallusion quelque chose dautre. Les Byzantins cultivs dsignaient souventles populations contemporaines par les ethnonymes correspondants auxpeuples qui, selon la Bibleou dautres textes anciens, avaient habit les mmesaires. Cest pourquoi, les chercheurs ont gnralement identifi les Assyriensde la lettre Taraise comme des Arabes3. Cette identification avait djt propose en 1788, lorsque, dans The History of the Decline and Fall ofthe Roman Empire,Edward Gibbon crivait : E [sic] can only

    mean Bagdad. Lhistorien ajoutait que whilst he exercised the office ofprotospathaire or captain of the guards, Photius was sent ambassador tothe caliph of Bagdad. The tedious hours of exile, perhaps of confinement,were beguiled by the hasty composition of his Library, a living monumentof erudition and criticism4. Lide de lambassade Bagdad devint vitecanonique5. Ainsi, quelques dcennies aprs Gibbon, elle fut reprise par

    Linguae Graecae(TLG), University of California, Irvine (consult en ligne via le site de laBibliothque interuniversitaire de la Sorbonne le 17/10/2013), qui est celui de ldition de

    R. Henry, P,Biblothque, I-VIII. Paris 19591977.3 Une exception intressante est celle de M, S., La gographie dans la Bibliothque de Photios

    : le cas dAgatharchide. La geografia nella Biblioteca di Fozio : il caso di Agatarchide(thse doctoraleindite, Universit de Reims Champagne-Ardenne Universit degli studi di San Marino) 2008,qui a propos didentifier les Assyriens de la lettre comme des Armniens : cf. infra. Une autreexception est celle de S, J. P., Ctesias' Persian History.I. Dsseldorf 2010. 140141.

    4 G, E., The History of the Decline and Fall of the Roman Empire. V. London 1788. 513 etn. 108. Sur ce passage cf. linterprtation de C, L., Libri e biblioteche. In: Lo spazioletterario della Grecia antica, II, La ricezione e lattualizzazione del testo. Roma 1995. 11243,34 et n. 29, selon laquelle Gibbon ferait rfrence, pour la composition de la Bibliothque, la priode suivant le premier patriarcat.

    5 Cf., pour une reconstruction dtaille de la question, C, L., La Biblioteca di Fozio.In: Cristianit dOccidente e cristianit dOriente. I. Spoleto 2004. 93125. 97 et ss.

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    Simon Chardon de la Rochette selon qui, Photius, au cours de sa mission,

    navait pas seulement compos la Bibliothque, mais avait aussi lu les livresqui y sont recenss6. Cette reconstruction fut encore propose en 1928 parEmil Orth7et plus tard par Alphonse Dain dans son ouvrage Les manuscrits,notamment lorsquil traite de translittrations de la majuscule la minuscule,et crit : il est prsumer que les deux cent quatre-vingts ouvrages dontPhotius et ses amis firent la lecture haute voix sur la route qui les conduisait Bagdad taient dj translittrs 8. Quelques annes plus tard, HlneAhrweiler nuana cette reconstruction, affirmant que, lors de lambassade(quelle date 838), Photius aurait ml aux [] papiers officiels [], des noteset des livres personnels, afin de rdiger la Bibliothque pendant le voyage9.Entre le XVIIIe et le XXe s.10, en somme, les livres de Photius commencrent sloigner de Constantinople et se rapprocher de Bagdad. Mais jusqualors,quon les et considrs comme lus avant le dpart ou on the road, nul navaitmis en doute leur origine constantinopolitaine. En 1956 toutefois, sous la

    6 La Bibliothque de Photius ne serait que lanalyse de deux cent soixante-dix-neuf ouvra-ges quil avoit lus dans son ambassade (cf. C R, S., Mlanges de

    critique et de philologie. I. Paris 1812. 12 : avant que son ambition let port sur le sigepatriarchal de Constantinople, il avoit associ Tarasius ses lectures, et lorsquil partit pourson ambassade dAssyrie, ce frre chri exigea de son amiti, quil lui fit part de celles quilferoit pendant son absence. Photius lui envoya donc lanalyse de deux cent soixante-dix-neufouvrages quil avoit lus dans son ambassade; et ces extraits, plus ou moins longs, comme ille dit lui-mme dans sa lettre denvoi, selon que son frre toit plus ou moins familier avecles matires qui y sont traites, composent ce que nous appelons la Bibliothque de Photius). Sur Chardon de la Rochette cf. C, L., Vita di Chardon de la Rochette commissarioalle biblioteche. Messina 2003.

    7 O, E., Photiana. Leipzig 1928. 911.8 D, A., Les manuscrits. Paris 1949. 113. Dans la deuxime dition de louvrage (Paris 1964

    [= D, A., Les manuscrits. Paris 19753]), ce passage devient : il est prsumer que les deuxcent quatre-vingts ouvrages dont Photius et ses amis firent la lecture haute voix au cours deleur ambassade en Orient (dautres disent avant) ntaient pas encore translittrs (p. 127).Les changements concernant lambassade et les lectures dcoulent des dbats qui eurent lieuaux annes Cinquante et Soixante du XXe s (cf. infra). Pour ce qui est des livres translitt-rs ou pas encore translittrs cf. R, F., La traslitterazione dei testi greci. Spoleto2003. 27 et ss. Cf. aussi D, A., La transmission des textes littraires classiques de Photius Constantin Porphyrognte. Dumbarton Oaks Papers8 (1954) 3347, 40 et n. 18.

    9 A, H., Sur la carriere de Photius avant son patriarcat. Byzantinische Zeitschrift58(1965) 348363, 360 et s.

    10

    Pour dautres interprtations du rapport entre la lettre et la composition de la Bibliothquecf. S, J., Photios historien des lettres. La Bibliothque et ses notices biographiques. Paris1987. 37 et s.

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    plume de Bertrand Hemmerdinger11, les de Photius deviennent les

    livres du calife, des tomes que lauteur de la Bibliothque aurait trouvs Bagdad. Dailleurs, selon le chercheur, les traductions du grec en arabe de cettemme priode impliquent la prsence de nombreux manuscrits grecs dansla ville abbasside. En outre, la Bibliothquecontient les recensions dcritsnestoriens et monophysites, dont lexistence, normale Bagdad, aurait t,selon Hemmerdinger, surprenante Constantinople. La reconstruction duchercheur changea donc radicalement le cadre : ces crits recenss par Photiusne seraient pas des livres byzantins, mais des manuscrits en langue grecqueconservs Bagdad. Le fait de transfrer dans cette ville non seulement lacomposition de la Bibliothque (louvrage symbole du premier humanismebyzantin), mais aussi les lectures quelle prsuppose, induit un dplacementde linspiration humaniste du IXe s., de lempire des Romaioiau califat.Cette reconstruction, qui a donc des consquences majeures dun point de vuehistorico-culturel, fut reue avec prudence par Ren Henry et Hans-GeorgBeck12. Cependant, les trois points sur lesquels elle se base furent dmolis enquelques dcennies. Lide selon laquelle la Bibliothque avait t critependantlambassade fut dmentie par Jean Irigoin en 196213et par Paul Lemerle en

    197114

    , sur la base de la lecture critique de la lettre-prface et de lpiloguede louvrage : ces deux textes surtout le premier, vrai dire montrentque Photius a crit la Bibliothqueavantlambassade (ce qui avait dailleursdj t not, en 1840, dans un article publi dans The British Magazine15).Quant au deuxime point, concernant la mention dans la Bibliothquedetextes hrtiques jugs par Hemmerdinger introuvables Constantinople,Cyril Mango nota en 1975 que ce ntait que dans la capitale byzantine quele patriarche pouvait les lire16. En effet, le IXe canon du septime concilecumnique (Nice II, de 787) atteste que dans la bibliothque patriarcale

    11 H, B., Les notices et extraits des bibliothques grecques de Bagdad parPhotius. Rvue des Etudes Grecques69 (1956) 101103, 102103.

    12 P,Bibliotheque, I, Paris 1959, LI-LII ; B, H.-G., berlieferungsgeschichte der by-zantinischen Literatur. In: Geschichte der Textberlieferung der antiken und mittelalterlichenLiteratur. I. berlieferungsgeschichte der antiken Literatur. Zrich 1961. 423510, 429.

    13 I, J., Survie et renouveau de la littrature antique Constantinople (IXe sicle). Cahiersde civilisation mdivale5 (1962) 287302, 292293.

    14 L, P., Le premier humanisme byzantin : notes et remarques sur enseignement et culture Byzance des origines au 10e sicle. Paris 1971. 179.

    15 Photius N. III, dansThe British Magazine, 17 (1840) 258267, 260 et ss.16 M, C., The Availability of Books in the Byzantine Empire, A.D. 750850. In: Byzantine

    Books and Bookmen. A Dumbarton Oaks Colloquium, 1971. Washington, D.C. 1975. 2945, 43.

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    tait conserve une copie de chaque texte hrtique destin la destruction17.

    Enfin, limpossibilit dune superposition des lectures de Photius et desouvrages traduits du grec en syriaque et en arabe Bagdad au cours du IXe s.a t remarque par Dimitri Gutas sur la base dune vaste documentation18.

    En somme, au bout dune quarantaine dannes, lide fascinante mais aven-tureuse dun Photius lisant et recensant les livres de sa Bibliothque Bagdadsemble compltement discrdite. Nanmoins, cette reconstruction a connurcemment une relance surprenante dans le cadre des tudes arabes : en 2007,dans un livre consacr aux origines du droit islamique, Benjamin Jokisch estall au-del de la reconstruction dHemmerdinger19. Selon le chercheur, bienavant daller Bagdad en mission diplomatique, Photius y avait pass une longuepriode concidant avec son enfance et son adolescence : le chercheur nexclutpas la possibilit que lexil dont parle Photius lui-mme20cache la ralit dunchoix prcis fait par la famille du futur patriarche, laquelle attribuait une grandeimportance lducation : it is highly possible that they preferred to settle inBaghdad, which belonged to the most outstanding places of learning at thetime21. Dans cette ville, le jeune Photius aurait donc accompli sa formation,guid par des savants arabes22: de plus, il serait identifier ce Fathyun qui

    17 Des rserves sur la disponibilit de la bibliothque patriarca le lpoque de Photius ont texprimes par C (n. 4) 30 et s. et C (n. 5) 107 et ss. (avec lide de la prove-nance gyptienne et syro-palestinienne de certains des ouvrages recenss).

    18 G, D., Greek Thought, Arabic Culture. The Graeco-Arabic Translation Movement in Baghdadand Early Abbasid Society. (2nd-4th / 8th-10th centuries). London New York 1998. 186: onemay make the observation and ask whether it is merely fortuitous that there is almost no over-lap (only some Galen, Dioscurides, and Anatolius) between the inventory of secular works inPhotiuss Bibliothecaand those works that were translated into Arabic [] .

    19 J, B., Islamic Imperial Law. Harun-Al-Rashids Codification Project. Berlin 2007.

    Cf. T, M., Compte-rendu de B. Jokisch, Islamic Imperial Law. Harun-Al-RashidsCodification Project. Berlin 2007, Revue des mondes musulmans et de la Mditerrane125(2009), en ligne ladresse http://remmm.revues.org/6111 : force de se voir assner quetous les concepts essentiels de lIslam proviennent de Byzance, le lecteur finit par ne plus ycroire, dautant que de nombreux arguments reposent sur des hypothses fragiles. Ainsi, leslongs dveloppements visant montrer que Jbir b. ayyn fut peut-tre le mme hommeque Lon le Mathmaticien peinent convaincre : lauteur prouve simplement que l identitdes deux hommes nest pas impossible (p. 347 sq).

    20 Mais le chercheur nexclut pas non plus la possibilit dun exil effectif : [] some of theiconophiles refugees settled in the Caliphate [], it can be conjectured that Photios and hisfamily belonged to these refugees (J (n. 19) 365).

    21 J (n. 19) 370.22 J (n. 19) 365.

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    vcut au IXe s., dans le quartier grec de Bagdad, le Dar al-Rum23. Lidentification

    du savant byzantin ce personnage, qui est mentionn dans le FihristdIbnal-Nadim24, ferait de Photius un matre dIbn Kullab et, par consquent, unidologue du mouvement sunnite25. Mais revenons-en la Bibliothque: Photiusaurait lu les livres Bagdad, pendant sa jeunesse. Lorsque son frre Taraiserentra Constantinople avant lui, linvitant to transfer as much knowledge aspossible to Byzantium26, le savant aurait rpondu justement par laMyriobiblos,accompagnant cet ouvrage de la lettre-prface. La rdaction dfinitive de laBibliothqueremonterait toutefois des annes postrieures, lorsque, aprs unepriode Constantinople, Photius serait revenu Bagdad dans le cadre duneambassade qui eut lieu en 84527. Certes, les sources disent que cette ambassadeavait pour destination Samarra qui tait lpoque la capitale abbasside etnon Bagdad, mais selon Jokisch, pendant les ngociations, Photius aurait dis-pos dun laps de temps de trente-quatre jours pour aller Bagdad, consulterventuellement quelques livres grecs et rdiger la Bibliothque28.

    Centrale ou secondaire, inspiratrice ou non, la mission de Photius Bagdadreste, en somme, un lment fondamental dans le dbat sur la vie du savantet sur la gense de son ouvrage le plus connu29.

    II - U -

    Si comme on le croit gnralement, la formule se rapporte une ambassade chez les Arabes30, un tel acte diploma-tique ne peut qutre antrieur llvation de Photius au patriarcat, qui eutlieu le jour de Nol en 858 : il est invraisemblable quau IXe s., un patriarchede Constantinople ait pu participer personnellement une lgation chez lesArabes (et sans en laisser aucune trace !). Les chercheurs ont donc mis envidence les missions connues grce dautres sources, qui sont compatibles

    23 J (n. 19) 361 et 370.24 Ibn al-Nadim Fihrist 1/448 (d. D) : cf. J (n. 19) 361.25 J (n. 19) 361, 365.26 J (n. 19) 370.27 Sur cette ambassade cf. infra.28 J (n. 19) 369370.29 J (n. 19) 365 : this is corroborated by the fact that Photios, like Leo and John, is as-

    sociated with occultism and, no less importantly, that he indeed moved at least once to theCaliphate.

    30 A la seule exception, me semble-t-il, de M (n. 3) et de S (n. 3) 140141 :cf. infra.

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    avec celle que pourrait concerner la lettre Taraise : il sagit dexpditions

    dates des annes 838, 845, 851 et 85585631.Cependant, aucune source arabe, byzantine ou occidentale ne fait la moindre

    mention de la participation de Photius lune ou lautre de telles lgations32.Ce qui est surprenant si lon considre quil aurait bien pu y prendre part commemembre minent de la chancellerie impriale. Selon nous, cest surtout le silencedes ennemis du patriarche qui est suspect, compte tenu de la vhmence desdbats lis sa figure et du fait quune telle circonstance et bien pu servirde prtexte pour lattaquer. Nictas David Paphlagon et le ps.-Symon (quimentionne un fantomatique sorcier juif comme le matre du savant33), deuxfarouches dtracteurs de Photius, auraient-ils manqu loccasion de soulignerque, pendant sa jeunesse ou sa premire maturit, il avait eu des contactsavec les Arabes ? Les relations arabes de Jean le Grammairien et de Lon leMathmaticien sont amplement traites par les sources byzantines34: pourquoine se serait-il rien produit de semblable concernant un personnage ha commePhotius, une poque o lon composait des traits contre le Coran35?

    31 Pour lan 838 se sont prononcs A (n. 9) 356361 et L (n. 14) 179180; pour

    lan 845 T, W. T., The Preface of the Bibliotheca of Photius: Text, Translation, andCommentary. Dumbarton Oaks Papers31 (1977) 343349, 346347; T, W. T.,TheNature of theBibliotheca of Photius. Washington, D.C. 1980. 12 et ss., 25 et ss., 35 et s., 111;T, W. T., Photius and the Reading Public for Classical Philology in Byzantium. In:M, M. S, R., (eds.), Byzantium and the Classical Tradition. Birmingham 1981.123126, 123 et T, W. T., Photius Before His Patriarchate,Journal of EcclesiasticalHistory53 (2002) 117, 11 ; pour lan 851 S, J., Le projet pdagogique de Photios. In:V D P. M, C., Encyclopedic Trends in Byzantium ?Proceedings of the InternationalConference held in Leuven, 6-8 May 2009. Leuven Paris Walpole 2011. 5775, 67 (mais,pour une interprtation diffrente propose par le mme chercheur cf. infra); pour lan855/856 B, H.-B., Kirche und theologische Literatur im byzantinischen Reich. Mnchen

    1959. 526; D, F., The Embassies of Constantine-Cyri l and Photius to the Arabs. In:To Honor Roman Jakobson: Essays on the Occasion of His Seventieth Birthday. La Hague1967. 569576, 575. Cf., pour un cadre exhaustif sur le sujet, C (n. 4) 3133.

    32 S, J., Du verbe au Verbe. Considrations sur le renouveau de lenseignement Byzanceau IXe sicle, Rursus7 (2012 : version en ligne : http://rursus.revues.org/813) 9 ; C (n. 4)31 et s. La seule exception est bien videmment le dernier chapitre de la Bibliothque, dansla conclusion duquel on revient sur lambassade : [] : cf. supra.

    33 B, I., Theophanes Continuatus, Ioannes Cameniata, Symeon Magister, GeorgiusMonachus. Bonn 1838. 603760, 670.

    34 Je me limite renvoyer I S Synopsis historiarum, Thophile, 9 (p. 56 et ss.d. T) etMichel II, 15 (p. 101 et ss. d. T).

    35 Quon pense la Rfutation du Coranpar Nictas de Byzance.

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    En somme, il nexiste aucun indice de la participation de Photius une

    ambassade en Orient, en dehors de la premire phrase de lptre Taraise.Cet indice fut jug trop faible par Karl Krumbacher, qui proposa une solutiondraconienne : la chez les Assyriens ne serait quune fiction littraire etla Bibliothque constituerait un Lebenswerkcrit par Photius durant sa vie enti-re36. Cette ide a t dveloppe, par exemple, par Franois Halkin37, AthanasiosMarkopoulos38et, avec quelque prudence, par Luciano Canfora39.

    Nous sommes donc, actuellement, en prsence de deux reconstructions: selon lune, lambassade a bien eu lieu ; selon lautre, il ne sagit que dunefiction. Mais lune et lautre interprtent le passage comme lallusion une mission, relle ou fictive,auprs des Arabes. Dans le cadre de cette diatribe, Jacques Schamp a proposrcemment de donner au mot le sens dintercession, ce qui est eneffet compatible avec lusus scribendi de Photius40. Par consquent, selon soninterprtation, lambassade cite dans la prface ne serait pas une vritablemission diplomatique mais une sorte dimpratif pastoral : une fois patriar-che, Photios sengageait intercder () pour tout le monde chrtienauprs des Assyriens [ lire Arabes] pour obtenir leur conversion41.

    Quelle que soit linterprtation quon prfre, il reste que les Assyriens de lalettre, identifis comme Arabes, auraient jou un rle central rel ou fictif,politique ou religieux dans la conception de la Bibliothque. Louvrage leplus reprsentatif du premier humanisme byzantin serait donc n l ombredu califat et de la culture abbasside.

    III - U

    Dans un article rcent, jai prsent des circonstances permettant mon avisde penser que lambassade auprs des Assyriens cite dans la lettre Taraise nefait pas allusion une lgation chez les Arabes, mais plutt au concile orchestr

    36 K, K., Geschichte der byzantinischen Literatur von Justinian bis zum Ende desOstroemischen Reiches. I. Mnchen 1897. 519.

    37 H, F., La date de composition de la Bibliothque de Photius remise en question.Analecta Bollandiana81 (1963) 414417, 417.

    38 M, A., New Evidence on the Date of Photios Bibliotheca. In: M,A., History and Literature of Byzantium in the 9th-10th Centuries. Aldershot 2004. n XII.

    39 C (n. 4) 3334 (avec bibliographie) ; 3841 (critiqu par S (n. 31), 71 n. 59) ;C (n. 5) 97 et s.

    40 Cf. par exemple lp. 185 (d. W 1984).41 S (n. 32) 7.

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    143Pour la datation de la Bibliothquede Photius. La Myriobiblos, le Patriarche et Rome

    contre Photius Constantinople en 86987042: il sagirait, en somme, non pas

    de la mention dun acte diplomatique, mais dune rfrence cryptique sonexcommunication et son exil. Dans les pages qui suivent, aprs avoir appro-fondi les conclusions auxquelles je suis parvenu dans mon travail prcdent,jessayerai de produire des documents supplmentaires, qui me semblent allerdans la mme direction ( IV et V).

    * * *

    A ma connaissance, lquation Assyriens = Arabes nest pas atteste

    dans les sources byzantines de lpoque de Photius43: si elle est vraie44, cettecirconstance affaiblit linterprtation traditionnelle. Or, il est noter que lesmots-cls de la premire phrase de la lettre Taraise45(/et ) figurent dans un passage du prophte Ose :

    Ose 5,13 ,

    Une interrogation auprs du TLGde luniversit dIrvine (Californie) a d-montr que ce passage, parmi les rares cas de combinaison de ces deux racines

    verbales dans une mme phrase, est celui qui se rapproche le plus du passageen question de la lettre Taraise46. Cette circonstance permet de formuler

    42 R, F., The Patriarch and the Assyrians: New Evidence for the Date of Photios Library.Segno e Testo11 (2013) 387395.

    43 Selon T (n. 31), 346347 Photius seems to have borrowed the phrase from Procopius. Compare , which Photius quotes in his epitomeof Procopius Wars, where it means the land east of the Tigris. Cf. M (n. 3) 406 etn. 125.

    44 Des recherches systmatiques pourront peut-tre dmontrer le contraire.45

    .46 La recherche des deux racines verbales dans tous les textes compris dans le TLGdepuis

    les origines jusquau IXe s. met en vidence un fragment de Ctesias de Cnide (d. J,IIIc, n 688, 1b) des passages de Flavius Joseph (Antiquitates Judaicae, IX.288-290 et X.11,

    concernant respectivement les Samaritains qui envoient une ambassade chez les Assyriens,et Ezchias) et dIsae (XXVII.6), ainsi que plusieurs passages qui commentent ce dernier(par ps.-Jean Chrysostome, Jean Malalas et Thodoret de Cyr).

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    lhypothse quil existe un rapport entre les mots dOse et la missive, un

    rapport consistant non pas en une citation en bonne et due forme, mais plutten une allusion. Or, le passage dOse porte sur Ephram, second fils dAsnathet de Joseph, qui abandonna son peuple pour partir en exil volontaire chezles Assyriens, organisant une ambassade auprs de leur souverain. Le livredu prophte cite continuellement ce personnage (Ose 4-14) qui, selon laGense, fonda une tribu et fut bni par son grand-pre Jacob 47. Il devintainsi le vice-roi dgypte : personnage ambigu dans la Gense, Ephram estune figure tout fait ngative dans le livre dOse, qui en fait lponyme duroyaume dIsral. La figure dEphram ne semble pas largement atteste dansla littrature byzantine48. Parmi les auteurs qui la mentionnent, il ny a pasPhotius, ce qui semble affaiblir notre hypothse. Toutefois, Ephram a uneplace centrale dans un document qui concerne directement notre savant :les actes du concile anti-photien de 869870. Ces actes ne sont parvenus quedans la version latine dAnastase le Bibliothcaire et dans un rsum en grec49.Ils consistent en la verbalisation des dix sances (praxeisou actiones) quieurent lieu entre le 5 octobre 869 et le 28 fvrier 870 et qui ont constitu lestravaux du synode constantinopolitain cens pouvoir rsoudre un problme

    ecclsiastique majeur : Basile I, nouvellement install sur le trne imprial,venait de dposer Photius du trne patriarcal, en raison, entre autres, de safidlit Michel III50, le prdcesseur que Basile avait assassin. Aprs avoirrelgu lex-patriarche dans un monastre dit Skp51, il convoqua un concile Sainte-Sophie, comptant sur le soutien du pape Nicholas I (858867)52. MaisAdrien II (867872), qui, entre-temps, avait succd Nicholas, entendait

    47 Gen., XLVIII, 21.48 Ephram est cit, en passant, dans les commentaires aux prophtes dus Basile de Csare,

    ps.-Jean Chrysostome, Thodoret de Cyr, Cyrille d Alexandrie, Thodore de Mopsueste :je me limite renvoyer au TLG.49 Sur ce rsum cf. au moins A, G., Les Conciles cumniques. Les Dcrets, II-1.

    De Nice I Latran V. Paris 1994. 158 (avec bibliogr.).50 Photius avait t dpos formellement par le synode permanent, en 867, la Synodos endmousa:

    cf. C J.-C. (d.), Le Monde byzantin. II. LEmpire byzantin (641-1204). Paris 2006.96, 102103 ; J S, Empereurs de Constantinople (trad. B. F et annot. J.-Cl. C). Paris 2003, 115 n. 53 et Histoire du christianisme des origines nos jours, IV,vques, moines et empereurs (610-1054), sous la responsabilit de Gilbert D, PierreR et Andr V. Paris 1993. 176177.

    51 N D, Vita Ignati(d. S 2013) 78.2224.52 P, L., Le concile de Constantinople IV (869870). In: A, G., Les conciles

    oecumniques, I, Lhistoire. Paris 1994. 145169, 154155.

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    exploiter cette occasion pour rsoudre laffaire bulgare et voir reconnue,

    dans ce contexte de faiblesse constantinopolitaine, la primaut romaine.Ces arrire-plans expliquent lattitude outrageuse des lgats pontificaux lediacre Marinus et les cardinaux Donatus et Stephanus qui, louverturedu concile, refusrent de montrer leurs rfrences au patrikioset secrtaireimprial Baanes prsidant le synode au nom de lempereur53. Les trois Romainsprsentrent, en outre, aux Pres orientaux le Libellus satisfactionis, un texterdig Rome54, qui proclamait [] lautorit doctrinale du sige romain,reconnue comme linstance suprme en matire de foi, de discipline et decommunion ecclsiale 55. La lecture de ce document souleva des protesta-tions56mais les ambassadeurs exigrent lapposition sans contredit, par tousles Pres, de leurs signatures, sous peine de la non-admission aux travauxconciliaires. Les Pres byzantins signrent mais la menace constitue parun tel texte nchappait personne : le document dtruisait le principe dela pentarchie, minimisant le rle du sige constantinopolitain57. En outre,chaque fois quil fut question de Photius durant le concile, les ambassadeurssoulignrent quils ntaient pas l pour dbattre, mais pour faire souscrireune sentence crite pralablement Rome : Baanes nobtint qu grand-peine

    la convocation de lex-patriarche, que les lgats nauraient mme pas voulucouter58.Dans cette atmosphre, Photius fut excommuni formellement au cours de

    la Xe actio, le 28 fvrier 87059. Dans la transcription de cette actio, la suitedes , qui contiennent, entre autres, les pnalits pour Photius et sespartisans60, se trouvent des annexa61, qui, loin de constituer un simple rajout,

    53 L, C. P, A.,Gesta sanct ac universalis octav synodi qu Constantinopolicongregata est Anastasio bibliothecario interprete. Firenze 2012, 37 = M, G. D., Sacrorum con-ciliorum nova et amplissima collectio. 13. Florence 1767. Col. 1920. Cf. P (n. 52) 156.

    54 Le texte du Libellusest prservdans les actes du synode : L P (n. 53)5156 = M (n. 53) col. 2729.

    55 P (n. 52) 155.56 L P (n. 53) 56 = M (n. 53) col. 30 : et post completionem libelli,

    silentio facto[] .57 Selon le compte-rendu dAnastase le Bibliothcaire, Basile aurait essay de soustraire aux

    Romains, aprs coup, lexemplaire avec les signatures des prlats. Sur toute la question cf.au moins P (n. 52) 148.

    58 P (n. 52) 156.59 L P (n. 53) 304 et ss. = M (n. 53) col. 157 et ss.60 L P (n. 53) 309335 = M (n. 53) col. 160179.61 A (n. 49) 165. Cf. L P (n. 53) 335347 = M (n. 53) col. 179184.

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    jouent un rle essentiel dans lconomie du synode : ils contiennent en effet

    les prsupposs idologiques qui fondent la lgitimit des dlibrations prisescontre lex-patriarche. On y lit un vritable entassement de citations bibliquesqui sont toujours rapportes au prsent au moyen de parallles et de mtapho-res. Pour souligner le fait que Photius a usurp le trne dIgnace, par exem-ple, les Pres le qualifient dun ct dadultre, car, tant devenu patriarchedune manire illgitime, il sest uni illgitimement lglise, lpouse de sonprdcesseur62; mais on le dfinit aussi alterum quendam Madianitam 63,avec une allusion cet pisode du Livre des Nombreso les Juifs, arrivs auroyaume de Moab, commencrent se livrer la dbauche avec les fillesde Moab qui les poussrent adorer Belphgor64. Quelques lignes plus bas,Photius est implicitement considr comme un nouvel Ananias, lhommequi, selon lesActes des Aptres, essaya de cacher ses propres richesses lapremire communaut chrtienne en accord avec son pouse Sapphira : ilsfurent foudroys par saint Pierre comme des ennemis de la foi65. Mais, danscette partie-cl desActes, le personnage biblique choisi par les pres commealter ego prfrentiel du patriarche dpos est justement Ephram. Au filscadet de Joseph, ils consacrent un bon nombre de longues citations bibliques :

    ils lvoquent dabord, par les mots mmes dOse, comme lexemple parfaitdun individu indigne, exclu par Dieu de son Peuple66. Une autre citationdu mme prophte porte galement sur limmoralit dEphram, dvou sa propre richesse et non la Justice67. Aprs une nouvelle citation tirecette fois du prophte Obadia et portant sur la ruine des maisons de Jacob,Joseph et Esau68 les Pres en viennent ce qui nous intresse directement,la juxtaposition explicite dEphram et de Photius :

    62 Cf. ce propos N D, Vita Ignati(d. S 2013) 149, n. 115.63 L P (n. 53) 344 = M (n. 53) col. 183.64 Nombres, 25.4-8 : inspir par Yahweh, Mose rassembla les juges dIsral, leur ordonnant de

    mettre mort ceux qui staient attachs Belphgor. Pendant lassemble, un certain Zamrise montre en compagnie dune femme madianite et le jeune Phines (cit, lui aussi, dans lepassage en question desActesdu concile), fils dlazar, transperce les deux individus de salance.

    65 L P (n. 53) 344 = M (n. 53) col. 183. Cf.Actes des Aptres, 5.66 Ose 9. 15-16.67 Ose, 12.7-8.68 Obadia 18.

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    Miser namque Photius erat veraciter ut homo, qui non posuit Deum adiutorem

    suum, sed speravit in multitudine versutiarum suarum, et praevaluit invanitate malitiarum suarum, secundum veterem illum Ephrem, discedensa divinis iustificationibus 69.

    Mais, ne se contentant pas de cela, ils clairent ultrieurement leur penseau moyen dune nouvelle citation dOse, une citation qui nous intresseparticulirement car elle fait mention de la mission de cet alter egode Photiuschez les Assyriens :

    Ephrem factus est subcinericius panis, qui non reversatur, et manducaveruntalieni fortitudinem eius. Ipse autem non agnovit et cani effloruerunt ei et ipsenon cognovit, et humiliabitur iniuria Israhel in faciem ipsius et in omnibushis non est conversus ad Dominum Deum suum. Ephrem columba amensAegyptum invocabat et in Assyrios ibat : cum profecti fuerint, immittamsuper eos rete meum sicut volatilia caeli, et attraham et corripiam eos inauditionem tribulationis eorum 70.

    Les membres du concile continuent en revenant explicitement Photius :il a atteint le comble de larrogance en excommuniant le pape et il a falsif i desdocuments, conduisant ainsi lglise la catastrophe71. Aprs quelques autrescitations bibliques, gnralement tires dIsae (citations qui ne concernentpas des figures spcifiques de lAncien Testamentmais constituent pluttdes sentences adaptes aux circonstances), lanathme dfinitif contre lex-patriarche et ses partisans est prononc72.

    En somme, les Pres du concile de 869870 ont mis Photius en relationexplicite avec Ephram, le personnage biblique qui, trahissant son peuple,

    sen est loign, organisant une ambassade auprs des Assyriens, tout commePhotius qui, ayant abandonn la vraie foi et lglise, est devenu hrtique.Nous avons donc l une circonstance quil serait difficile de considrer commele fruit du hasard : dans lptre Taraise, Photius utilise une tournure quitrouve un parallle dans un passage du prophte Ose concernant Ephram. ce mme personnage, et en utilisant les mots mmes du prophte, renvoient

    69 L P (n. 53) 345 = M (n. 53) col. 183.70 L P (n. 53) 345 = M (n. 53) col. 183184 : cf. Ose 7.8-12.71 L P (n. 53) 345346 = M (n. 53) col. 184.72 L P (n. 53) 346347 = M (n. 53) col. 184.

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    explicitement les Actesdu concile qui a excommuni Photius en 869870.

    moins quon ne veuille croire une improbable concordance fortuite, ilfaut admettre la possibilit que Photius, au dbut de lptre Taraise, aitfait rfrence au dispositif conciliaire dcrtant son exil. Si cela est vrai, ilest permis de penser que, dans la lettre son frre, cest dun ton sarcastiqueque le patriarche dpos fit allusion au passage biblique utilis par les Pres Sainte-Sophie ce jour de fvrier 870 : il entendait videmment soulignerlabsurdit du paralllisme tabli entre sa personne et Ephram.

    La formule nauraitdonc rien voir avec les Arabes : elle indiquerait, dans le filigrane de lallu-sion biblique, le premier exil du patriarche, en rfrence la sentence inoueprononce dans le cadre du concile de 86987073. Un concile que Photius necessa jamais de considrer comme illgitime.

    IV - L

    Dans loptique de Photius, le concile qui le dposa fut caractris par de tellesanomalies et irrgularits que, plus quun synode, il fut un tribunal spcial,domin par une ambassade trangre. La pense du patriarche dpos peut

    tre reconstruite laide de quelques-unes des lettres quil envoya, au cours deces mois dramatiques, ses partisans, lettres qui savrent de la plus grandeimportance pour nous.

    Cest probablement dans le courant de novembre 869, peu avant lanathmedfinitif, que Photius crit au diacre Grgoire74: le concile en cours, dit-il,lui rappelle les qui,

    73 Il sagit dune allusion au premier et non au deuxime exil, comme le croit M (n. 3)407408 (qui, il faut bien le souligner, a propos une lecture mtaphorique ou, comme ille dit, cryptographique de la lettre, sapprochant beaucoup de ce qui est, notre avis, lasolution de lnigme) : nell886 limperatore Leone VI [] depose Fozio [] e lo esilionel monastero di Bordon in Armenia. Lindicazione nella lettera a Tarasio dessere statoinviato avrebbe senso in questa lettura [...] e la scelta delletnonimo non pare fuori luogo, innanzitutto perch lArmenia si trovava effettivamente aiconfini dellAssiria. Ma non bisogna trascurare nemmeno che associare la situazione perso-nale dellesilio con il riferimento allAssiria poteva derivare a Fozio dalla frequentazione deitesti sacri : dal secondo libro dei Re apprendiamo che Saragon II dAssiria invase la Samariadando inizio di fatto al la diaspora e alla distruzione del regno di Israele ; gli Israeliti furonoesiliati in Assiria[...] . La thse doctorale de Micunco (do nous tirons la citation) est indite notre connaissance. Une lecture mtaphorique, notre avis correcte, a t esquisse aussipar S (n. 3) 140141, qui na toutefois pas dveloppe son intuition.

    74 Ep. 114 (d. W 1983).

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    lexcommuniant autrefois avec sa famille, lui avaient ouvert la voie au pa-

    triarcat. Le fait dtre anathmatis nouveau ne le dcourage donc pas dutout : grce aux hrtiques qui grent le concile illgitime et qui, leur tour,ressemblent beaucoup aux iconoclastes ( ), ilcompte parvenir, cette fois-ci, directement la saintet. Dans une autre ptre,adresse environ la mme poque au mtropolite de Mytilne, Michel75, ilnomme les Pres du concile , car leur synode est enpasse de condamner ses partisans tout comme avait condamn les disciples du Christ (sic). Des mots semblablesse trouvent dans une autre lettre, particulirement longue76et crite au moineet anachorte Thodose au lendemain de lexcommunication77: une lettrefondamentale, de notre point de vue, conue sous forme de consolatiopour sonami, boulevers par tout ce qui se passait, mais dans laquelle lex-patriarchedverse toute son amertume et toute son agressivit dhomme vaincu maispas rsign. Photius commence par y dcrire l ambiance du synode en ayantrecours des exemplatirs de lAncienet du NouveauTestament. quoi bon,se demande-t-il, se scandaliser de ce qui vient de se passer ? Ce furent Annas,Caphe et Pilate qui condamnrent Jsus ; tienne, le glorieux premier martyr,

    fut lapid la suite dune sentence mise par un ;Jacques, , fut lui aussi condamn dune manire ill-gitime78 ; Ananias tait la tte dun tribunal qui mettait des sentencescomportant lassassinat dhommes de valeur, et mme saint Paul dut en subirles violences. Dans ces cas, affirme le patriarche dpos, des hommes dignesdtre condamns, usurpant les noms de juge et de lgislateur ( ), condamnrent des saints. Certes, admetPhotius, son concile est all bien au-del de tous les cas cits, car il na t,depuis le dbut, quun tribunal et une runion de barbares (

    ), peupl, comme il le fut, dambassadeursIsmalites, accueillis comme des vques ( ), daptres des hasseursdu Christ ( ),qui sont devenus les vritables chefs

    75 Ep. 117 (d. W 1983).76 Ep. 118 (d. W 1983). Dans la PG 104, col. 889892, i l sagit de deux lettres au mme

    destinataire, mais, selon W, il ne sagit que dune seule missive.77 A propos de Thodose cf. PMBZ online, 27886, consulte le 18 Juin 2014. Cf. aussi D, F.,

    The Photian Schism: History and Legend. Cambridge 1970. 149 n. 1.78 Photius na pas tort de se scandaliser : il sagit en effet du seul concile prtendu cumnique,

    qui ne parvint qu des conclusions purement disciplinaires : P (n. 52) 148.

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    ( ) de la runion. Dans ce contexte, comme dans une

    vritable mise en scne ( ), les tmoins ont tmenacs et des ont t lus (les lettresdes diffrentes lgations trangres, mais surtout celles du pape et le libellussatisfactionis). Dailleurs, la sentence avait t crite pralablement et apportepar la venant de lancienne Rome. Il sagit videmment dun aspectcentral pour Photius, qui cite la lettre les mots des ambassadeurs papaux : nous ne sommes pas venus juger ni nous vous jugeons, car nous avons dj

    jug et il faut accepter la sentence ( , , ).En somme, le patriarche fut condamn, selon ses dires, par une sentence criteailleurs, ou plutt, par une . Nous reviendrons sur cet aspect.

    * * *

    tout cela suivit la honte de la dlibration impriale, par laquelle la condam-nation de Photius lexil et toutes les dcisions du concile furent rendues ex-cutoires : du point de vue de lhistoire ecclsiastique, ce synode fut dailleursen pleine continuit avec ceux qui l avaient prcd, notamment pour lim-

    portante implication directe des autorits civiles dans la convocation, ledroulement et les conclusions des travaux []79. Dans la traduction de ladixime actio, due Anastase le Bibliothcaire, la responsabilit imprialeest souligne avec une force particulire, notamment au dbut : Sancta,magna et universalis synodus, quae per divinam voluntatem et gratiam etsanctionem amicorum Christi a Deo confirmatorum imperatorum nostrorumBasilii et Constantini congregata est []80. En outre, les actes se terminent,avant les signatures des prsents81 parmi lesquels lempereur Basile et sesfils Constantin et Lon82 par la promulgation formelle de la sentence parlautorit impriale : conformment la tradition, Basile se chargea en effetde faire respecter83les dlibrations du concile par un 84.

    Deux lments remarquables se dgagent donc de notre analyse : le pre-mier consiste en limage photienne dun synode dont les dlibrations ont

    79 P (n. 52) 147.80 L P (n. 53) 335336 = M (n. 53) col. 179.81 L P (n. 53) 356368 = M (n. 53) col. 189196.82 L P (n. 53) 357 = M (n. 53) col. 190.83 C (50) 98.84 C (50) 103.

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    t dictes par une et qui domin, comme il le fut, par des lgats

    trangers ressemblait une sorte de grosse ambassade. Le second l-ment est la responsabilit impriale, puisque cest lautorit du souverainqui, selon une pratique traditionnelle, a donn aux dlibrations du concilela force excutoire. Or, compte tenu de ces circonstances ainsi que du rap-port de ressemblance que les Pres du concile avaient tabli entre Photius etEphram en utilisant les mots mmes dOse, le prophte qui semble faireallusion le passage initial de lptre Taraise, il parat possible de dvoilerle sens profond de ce passage nigmatique ([] 85 86 []) :[] nous qui avons t choisi par lensemble de l ambassade [cest--dire lalgation romaine qui a soumis le concile son influence, et donc le concilelui-mme, qui ressemblait une grosse ambassade] et par le dcret imprial[qui a rendu les dlibrations du concile excutoires] pour tre envoy enmission chez les Assyriens [cest--dire en exil, en vertu de notre identifica-tion Ephram] .

    Une dernire remarque dordre lexical est peut-tre utile dans ce contexte :dans la phrase initiale de lptre Taraise, Photius utilise le participe aoriste

    passif , le rfrant sa personne : certes, dans la tournure, le verbe est employ dans son sens technique dj attest par Aristote87 indi-quant le choix des ambassadeurs ( = nous qui avons t choisi pour tre envoy en ambassade chez lesAssyriens ). Mais il est difficile de ne pas noter que ce mme verbe indiqueaussi, dans sa forme moyenne, ce choix quest lhrsie. Dans plusieurs

    85 Sur linterprtation des mots , je me limite pour linstant renvoyer T (n. 31), p. 344, qui traduit : When we were chosen by the members of theembassy and by imperial appointment to go on an embassy to the Assyrians,. Une tournure

    semblable celle de ce passage, mais base sur une construction syntactique diffrente,se trouve au ch. 265 de la Bibliothque: , et une iunctura qui voque la ntreest au ch. 230 : . En tout tat de cause, la formule vise un istitutonon altrimenti noto (C (n. 4) 43).

    86 La formule / / est employe par Photius, entre autres,dans les ch. 180 ( , , , ) ; 243 ( ) ; 256 ( ).

    87 A., Pol., 1299a19 : [] .

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    passages des actes du concile de 869870, et notamment dans les Canons, le

    verbe et le mot sont en effet employs pour indiquer lhrsiedont Photius fut accus : un terme () quAnastase le Bibliothcairerend gnralement au moyen dune simple translittration (haeresiset formesdrives). Cest, par exemple, le cas du canon XI, qui est lun de ceux dontest parvenu un rsum en grec outre la traduction latine88. En effet, dansce rsum, on trouve correspondant dans le texte latinpropriam haeresim89. En somme, en utilisant, dans le contexte de la lettre Taraise, le mot , le patriarche dpos fait peut-tre allusion, parun jeu de mots subtil, lune des accusations portes contre lui. Allusion queTaraise et, avec lui, tous les membres de lestablishmentconstantinopolitain,pouvaient saisir sans peine.

    V - C :

    Si la phrase initiale de la lettre Taraise constitue vraiment une allusionsarcastique au dispositif conciliaire qui loigna Photius de Constantinopleen 870, de nouvelles perspectives souvrent notre rflexion. Une premireet immdiate considration concerne la biographie du savant-patriarche : si

    notre interprtation est fonde, aucun document nexiste, notre connais-sance, qui soit rapportable la participation de Photius une ambassadechez les Arabes. Et sil nest jamais all en mission Bagdad ou Samarra, ilfaudra bien que les reconstructions historiographiques dcoulant de linter-prtation traditionnelle soient rvises : lunivers intellectuel de Photius napas t inf luenc du moins pas directement par la culture califale, et seslectures extraordinairement riches et prcieuses ne sont pas rattacher laconsultation sur place douvrages conservs dans des bibliothques abbassi-des. Le savoir complexe de ce champion du premier humanisme est le fruitdun parcours humain et intellectuel tout fait byzantin, plus prcismentconstantinopolitain. Une deuxime consquence, plus spcifique, concerne ladatation de la Bibliothque. La rfrence au passage biblique cit dans les actesdu concile de 869870 constitue un terminus chronologique contraignant :si lon considre le temps qui sest coul entre la sentence et l application dela peine, la lettre Taraise ne peut tre rapporte quaux annes 870871.Cette proposition est compatible avec les donnes palographiques relatives

    88 Cf. supra.89 A (n. 49) 175.

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    153Pour la datation de la Bibliothquede Photius. La Myriobiblos, le Patriarche et Rome

    au manuscrit le plus ancien de la Bibliothque90et se prte la solution de

    tous les problmes gntiques de cet ouvrage, qui a donc t conu aprs lepremier patriarcat.

    Enfin, et cest laspect qui intresse directement ce colloque, il faut renverserla perspective qui a vu, jusqu aujourdhui, dans la Bibliothque un produitoccasionn par les contacts avec le monde et la culture arabe. Considrecomme un ouvrage qui regardait, depuis Constantinople, vers lOrient et la

    jeune puissance des Abbassides, la Bibliothque semble tre, au contraire, sinotre reconstruction est correcte, un texte quon a conu le regard tourn

    vers lOccident, vers lancienne Rome et cette papaut qui, avec la complicitde lempereur et dun concile domin par une ambassade de Latins, inf lua silourdement sur la vie de Photius et de lglise orientale.

    90 Pour ce manuscrit je me limite renvoyer R 2012 (n. 1) et R 2014 (n. 1),avec bibliographie.

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    Inhaltsverzeichnis

    Vorwort ......................................................................................................................... 9

    Peter SchreinerIsidor von Kiev und Ungarn .................................................................................... 11

    Christian GastgeberDie manipulative Macht der bersetzung:Die Auseinandersetzung zwischen Patriarch Michael Kerullarius und KardinalHumbert von 1054 im Spiegel der bewussten Inhaltsverflschung .................... 29

    Erika JuhszDie Abschriften des Chronicon Paschale................................................................45

    Zsuzsanna tvsNB Suppl. Gr. 45 and I 12: A Distinct Branch

    in the Lexicographical Tradition of Greek-Latin Dictionaries?.......................53

    Peter SoustalTabula Imperii Byzantini 11: Makedonien, sdlicher Teil:Projektbericht und Fallbeispiel Kastoria im 15. Jahrhundert .............................. 71

    Vratislav ZervanSzenen aus dem Leben Josephs auf der Maximianskathedrain Ravenna und das Problem ihrer Interpretation ................................................ 85

    Bojana PavloviDer serbische Alexanderroman zwischen Byzanz und dem Abendland:

    Die Frage der kulturellen Einflsse ......................................................................... 97Vlastimil DrbalDie christliche und pagane Pilgerfahrt in der Zeit Konstantins des Groen:die heilige Helena vs. Nikagoras von Athen ........................................................ 119

    Filippo RonconiPour la datation de la Bibliothquede Photius LaMyriobiblos,le Patriarche et Rome ..............................................................................................135

    Zoltn Farkas

    Michael Psellos on Symeon Metaphrastes ...........................................................155

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    8 Inhaltsverzeichnis

    Tams Mszros

    Remarques sur les histoires perses de Procope (De bellisI, 26) ................ 161

    Ivn TthSome Suggestions on the Interpretation of the First Speechof Mehemet II in Kritobulos Histories.................................................................179

    Lajos BerkesGriechisch und Koptisch in der Verwaltung des frharabischen gypten:Ein neues ..................................................................................................187

    Dora E. Solti

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