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1,00 € Numéros précédents 2,00 € L’O S S E RVATORE ROMANO EDITION HEBDOMADAIRE Unicuique suum EN LANGUE FRANÇAISE Non praevalebunt LXXI e année, numéro 42 (3.654) Cité du Vatican mardi 20 octobre 2020 Rencontre de prière Rome capitale de la paix Avec la participation du Pape François, dans l’après-midi du mardi 20 octobre, Rome deviendra la «capitale de la paix» lors de la rencontre internationale: «Person- ne ne se sauve tout seul - Fraterni- té et Paix», la trente-quatrième or- ganisée par la communauté de Sant’Egidio dans le sillage de l’«esprit d’Assise» né à la suite de la journée historique du 27 octo- bre 1986 voulue par saint Jean- Paul II . L’événement qui se déroulera à partir de 16h00 en présence du Pape — comme l’a communiqué hier la préfecture de la maison pontificale verra réunies les grandes religions mondiales, avec les représentants des institutions. Dans un moment difficile de Un pacte mondial contre la catastrophe éducative La disparité des opportunités scolai- res, aggravée par la pandémie, impo- se de «souscrire un pacte éducatif mondial pour et avec les jeunes gé- nérations» visant à combattre la «réalité dramatique» d’une véritable «catastrophe éducative». C’est avec cet appel pressant que le Pape Fran- çois a relancé le «Global Compact on Education» dont il s’était fait le promoteur en septembre 2019. Il l’a fait à travers un message vidéo transmis dans l’après-midi du jeudi 15 octobre, au cours d’une rencontre en direct streaming organisée par la Congrégation pour l’éducation ca- tholique à l’université pontificale du Latran. Message vidéo pour la relance du Pacte éducatif mondial page 6 DANS CE NUMÉRO Page 2: Audience générale du 14 octobre. Page 3: An- gelus du 18 octobre. Page 4: Message à l’Académie pontificale des sciences. Créances du Nicaragua. Pa- ge 5: Message vidéo à l’initiative «Countdown» sur le changement climatique. Page 7: Audience à l’occasion du VII e centenaire de la mort de Dante Alighieri. Pa- ges 8 et 9: Le Caravage dans les églises romaines, par Andrea Lonardo. Page 10: Intervention du cardinal Pa- rolin sur l’accord avec la Chine. Page 11: Informations. Page 12: Message à la FAO. Fratelli tutti, même ceux «de trop», par Andrea Monda. Le nouveau Conseil des cardinaux. SUITE À LA PAGE 3

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L’O S S E RVATOR E ROMANOEDITION HEBDOMADAIRE

Unicuique suum

EN LANGUE FRANÇAISENon praevalebunt

LXXIe année, numéro 42 (3.654) Cité du Vatican mardi 20 octobre 2020

Rencontre de prière

Rome capitalede la paix

Avec la participation du PapeFrançois, dans l’après-midi dumardi 20 octobre, Rome deviendrala «capitale de la paix» lors de larencontre internationale: «Person-ne ne se sauve tout seul - Fraterni-té et Paix», la trente-quatrième or-ganisée par la communauté deSant’Egidio dans le sillage del’«esprit d’Assise» né à la suite dela journée historique du 27 octo-bre 1986 voulue par saint Jean-Paul II .

L’événement qui se déroulera àpartir de 16h00 en présence duPape — comme l’a communiquéhier la préfecture de la maisonpontificale — verra réunies lesgrandes religions mondiales, avecles représentants des institutions.Dans un moment difficile de

Un pacte mondialcontre la catastrophe éducative

La disparité des opportunités scolai-res, aggravée par la pandémie, impo-se de «souscrire un pacte éducatifmondial pour et avec les jeunes gé-nérations» visant à combattre la«réalité dramatique» d’une véritable«catastrophe éducative». C’est aveccet appel pressant que le Pape Fran-çois a relancé le «Global Compacton Education» dont il s’était fait lepromoteur en septembre 2019. Il l’afait à travers un message vidéotransmis dans l’après-midi du jeudi15 octobre, au cours d’une rencontreen direct streaming organisée par laCongrégation pour l’éducation ca-tholique à l’université pontificale duLatran.

Message vidéo pour la relancedu Pacte éducatif mondial

page 6

DANS CE NUMÉROPage 2: Audience générale du 14 octobre. Page 3: An-gelus du 18 octobre. Page 4: Message à l’Académiepontificale des sciences. Créances du Nicaragua. Pa-ge 5: Message vidéo à l’initiative «Countdown» sur lechangement climatique. Page 7: Audience à l’o ccasiondu VIIe centenaire de la mort de Dante Alighieri. Pa-ges 8 et 9: Le Caravage dans les églises romaines, parAndrea Lonardo. Page 10: Intervention du cardinal Pa-rolin sur l’accord avec la Chine. Page 11: Informations.Page 12: Message à la FA O. Fratelli tutti, même ceux«de trop», par Andrea Monda. Le nouveau Conseildes cardinaux.

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page 2 L’OSSERVATORE ROMANO mardi 20 octobre 2020, numéro 42

Audience générale du 14 octobre

Le cri de l’homme trouvela porte de Dieu toujours ouverteChers frères et sœurs, bonjour!En lisant la Bible, on trouve sans cesse desprières de divers genres. Mais on trouve égale-ment un livre composé seulement de prières,un livre qui est devenu la patrie, le terraind’exercice et la maison d’innombrables orants.Il s’agit du Livre des Psaumes. Il y a 150 psau-mes pour prier.

Il fait partie des livres sapientiels, car ilcommunique le «savoir prier» à travers l’exp é-rience du dialogue avec Dieu. Dans les psau-mes, nous trouvons tous les sentiments hu-mains: les joies, les douleurs, les doutes, lesespérances, les amertumes qui colorent notrevie. Le Catéchisme affirme que chaque psaume«est d’une sobriété telle qu’il peut être prié envérité par les hommes de toute condition etde tout temps» (CEC, n. 2588). En lisant eten relisant les psaumes, nous apprenons lelangage de la prière. Dieu le Père, en effet, lesa inspirés avec son Esprit dans le cœur du roiDavid et d’autres orants, pour enseigner àchaque homme et femme comment le louer,comment le remercier et le supplier, commentl’invoquer dans la joie et dans la douleur,comment raconter les merveilles de ses œu v re set de sa Loi. En synthèse, les psaumes sont laparole de Dieu que nous, les humains, nousutilisons pour parler avec Lui.

Dans ce livre, nous ne rencontrons pas depersonnes éthérées, des personnes abstraites,des gens qui confondent la prière avec uneexpérience esthétique ou aliénante. Les psau-mes ne sont pas des textes nés à un bureau;ce sont des invocations, souvent dramatiques,qui jaillissent du vif de l’existence. Pour lesprier, il suffit d’être ce que nous sommes.Nous ne devons pas oublier que pour bienprier, nous devons prier tels que nous som-mes, sans maquillage. Il ne faut pas maquillerson âme pour prier. «Seigneur, je suis ainsi»,et se présenter devant le Seigneur tels quenous sommes, avec les belles choses et aussiavec les choses laides que personne ne con-naît, mais que nous, à l’intérieur, nous con-naissons. Dans les psaumes, nous entendonsles voix d’orants en chair et en os, dont la vie,comme celle de tous, est remplie de pro-blèmes, de difficultés, d’incertitudes. Le psal-miste ne conteste pas de manière radicale cet-te souffrance: il sait qu’elle appartient à la vie.Dans les psaumes, cependant, la souffrance setransforme en question. De la souffrance à laquestion.

Et parmi les nombreuses questions, il y en aune qui reste suspendue, comme un cri inces-sant qui traverse tout le livre de part en part.Une question, que nous répétons tant de fois:«Jusqu’à quand, Seigneur? Jusqu’à quand?».Chaque douleur réclame une libération,chaque larme invoque une consolation,chaque blessure attend une guérison, chaquecalomnie une sentence d’absolution. «Jusqu’àquand, Seigneur, devrais-je endurer cela?Ecoute-moi, Seigneur!»: combien de foisavons-nous prié ainsi, avec «Jusqu’à quand?»,cela suffit Seigneur!

En posant sans cesse des questions de cegenre, les psaumes nous enseignent à ne pasnous habituer à la douleur, et ils nous rappel-lent que la vie n’est pas sauvée si elle n’estpas guérie. L’existence de l’homme est unsouffle, son histoire est fugace, mais l’orantsait qu’il est précieux aux yeux de Dieu, c’estpourquoi crier a un sens. Et cela est impor-tant. Quand nous prions, nous le faisons par-ce que nous savons que nous sommes pré-cieux aux yeux de Dieu. C’est la grâce del’Esprit Saint qui, de l’intérieur, suscite ennous cette conscience: d’être précieux auxyeux de Dieu. Et pour cette raison, nous som-mes poussés à prier.

La prière des psaumes est le témoignage dece cri: un cri multiple, car dans la vie la dou-leur a mille forme, et prend le nom de mala-die, haine, guerre, persécution, méfiance…Jusqu’au «scandale» suprême, celui de lamort. La mort apparaît dans le Psautier com-me l’ennemie la plus déraisonnable de l’hom-me: quel délit mérite une punition aussi cruel-le, qui comporte l’anéantissement et la fin?L’orant des psaumes demande à Dieu d’inter-venir là où tous les efforts humains sont vains.Voilà pourquoi la prière, déjà en elle-même,est une chemin de salut et un début de salut.

Tous souffrent dans ce monde: aussi biencelui qui croit en Dieu que celui qui le re-pousse. Mais dans le Psautier, la douleur de-vient relation, rapport: un cri d’aide qui attendd’intercepter une oreille attentive. Elle ne peutpas rester sans sens, sans but. Même les dou-leurs que nous subissons ne peuvent pas êtreseulement des cas spécifiques d’une loi uni-verselle: ce sont toujours «mes» larmes. Pen-sez à cela: les larmes ne sont pas universelles,ce sont «mes» larmes. Chacun a les siennes.«Mes» larmes et «ma» douleur me poussent àaller de l’avant avec la prière. Ce sont «mes»larmes, que personne n’a jamais versées avant

moi. Oui, beaucoup de personnes ont pleuré,beaucoup. Mais «mes» larmes sont les mien-nes, «ma» douleur est la mienne, «ma» souf-france est la mienne.

Avant d’entrer dans la salle, j’ai rencontréles parents de ce prêtre du diocèse de Cômequi a été tué; il a précisément été tué dansson service pour aider. Les larmes de ces pa-rents sont «leurs» larmes et chacun d’eux saitcombien il a souffert en voyant ce fils qui adonné sa vie dans le service aux pauvres.Quand nous voulons consoler quelqu’un,nous ne trouvons pas les mots. Pourquoi?Parce que nous ne pouvons pas arriver à sadouleur, parce que «sa» douleur est la sienne,«ses» larmes sont les siennes. C’est la mêmechose pour nous: les larmes, «ma» douleur estla mienne, les larmes sont «les miennes» etavec ces larmes, avec cette douleur, jem’adresse au Seigneur.

Pour Dieu, toutes les douleurs des hommessont sacrées. C’est ainsi que prie l’orant dupsaume 56: «Toi, tu tiens le compte de chacundes pas de ma vie errante, et mes larmes mê-me tu les gardes dans ton outre. Leur compteest inscrit dans ton livre» (v. 9). Devant Dieu,nous ne sommes pas des inconnus, ou des nu-méros. Nous sommes des visages et descœurs, connus un par un, par leur nom.

Dans les psaumes, le croyant trouve une ré-ponse, Il sait que, même si toutes les porteshumaines étaient fermées, la porte de Dieu estouverte. Même si tout le monde avait pronon-cé un verdict de condamnation, en Dieu setrouve le salut.

«Le Seigneur écoute»: quelquefois dans laprière, il suffit de savoir. Les problèmes ne serésolvent pas toujours. Celui qui prie n’est pasun naïf: il sait que de nombreuses questionsde la vie d’ici-bas restent sans solution, sansissue; la souffrance nous accompagnera etaprès une bataille gagnée, il y en aura d’a u t re squi nous attendent. Mais si nous sommesécoutés, tout devient plus supportable.

La pire chose qui puisse arriver est de souf-frir dans l’abandon, sans qu’on se souviennede nous. La prière nous sauve de cela. Car ilpeut arriver, et même souvent, de ne pas com-prendre les desseins de Dieu. Mais nos cris nestagnent pas ici-bas: ils montent jusqu’à Lui,qui a un cœur de Père, et qui pleure Lui-mê-me pour chaque fils et fille qui souffre et quimeurt. Je vais vous dire quelque chose: celame fait du bien, dans les mauvais moments,de penser aux pleurs de Jésus, quand il pleuraen regardant Jérusalem, quand il pleura de-vant la tombe de Lazare. Dieu a pleuré pourmoi, Dieu pleure, il pleure pour nos douleurs.Car Dieu a voulu se faire homme — disait unauteur spirituel — pour pouvoir pleurer. Pen-ser que Jésus pleure avec moi dans la douleurest une consolation: il nous aide à aller del’avant. Si nous restons dans la relation avecLui, la vie ne nous épargne pas les souffran-ces, mais elle s’ouvre à un grand horizon debien et se met en marche vers son accomplis-sement. Courage, allons de l’avant avec laprière. Jésus est toujours à nos côtés.

A l’issue de l’audience générale, le Saint-Père asalué les pèlerins francophones:

Je salue cordialement les personnes de languefrançaise. Alors que l’humanité souffre encorede la pandémie, je vous invite à lire et à prierles psaumes, assurés que Dieu nous écoute etqu’il n’abandonne jamais ceux qui mettentleur confiance en lui. En ce mois du Rosaire,que la Vierge Marie vous garde et vous pro-tège!

Le Pape a rencontré les parents du père Roberto Malgesini,le prêtre italien tué à Côme le 15 septembre dernier

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numéro 42, mardi 20 octobre 2020 L’OSSERVATORE ROMANO page 3

Angelus du 18 octobre

Un avenir de paix pour la LibyeChers frères et sœurs, bonjour!L’Evangile de ce dimanche (cf. Mt 22, 15-21)nous montre Jésus aux prises avec l’hyp o crisiede ses adversaires. Ils lui font beaucoup decompliments — au début, beaucoup de com-pliments —, mais ils posent ensuite une ques-tion insidieuse pour le mettre en difficulté etle discréditer auprès du peuple. Ils lui deman-dent: «Est-il ou non légal de payer l’impôt àCésar?» (v. 17), c’est-à-dire payer les taxes àCésar. A cette époque-là, en Palestine, la do-mination de l’empire romain était mal tolérée— et on le comprend, c’étaient des envahis-seurs —, également pour des raisons religieu-ses. Pour la population, le culte de l’emp ereurégalement souligné par son effigie sur lespièces de monnaie, était une injure au Dieud’Israël. Les interlocuteurs de Jésus sont con-vaincus qu’il n’y a pas d’alternative à leurquestion: soit un «oui», soit un «non». Ils at-tendaient, parce que précisément avec cettequestion ils étaient certains de mettre Jésus endifficulté et de le faire tomber dans leur piè-ge. Mais Il connaît leur malice et il se libèredu piège. Il leur demande de lui montrer unepièce de monnaie, la monnaie des taxes, lamonnaie de l’impôt, il la prend dans sesmains et il demande de qui est l’effigie impri-mée. Ils répondent que c’est celle de César,c’est-à-dire de l’empereur. Alors, Jésus ré-pond: «Rendez donc à César ce qui est à Cé-sar et à Dieu ce qui est à Dieu» (v. 21).

A travers cette réponse, Jésus se place au-dessus de la polémique, Jésus est toujours au-dessus. D’une part, il reconnaît que l’on doitpayer l’impôt à César — cela vaut pour nousaussi, on doit payer les impôts —, car l’imagesur la pièce est la sienne; mais surtout il rap-pelle que toute personne porte en elle une au-tre image — nous la portons dans notre cœu r,dans notre âme —: celle de Dieu, et c’est doncenvers lui, et envers lui seul, que chacun denous est débiteur de sa propre existence, de savie.

Dans cette sentence de Jésus, on ne trouvepas seulement le critère de la distinction entrela sphère politique et la sphère religieuse,mais des directives claires apparaissent égale-ment pour la mission des croyants de tous lestemps, également pour nous aujourd’hui.Payer les impôts est un devoir des citoyens,tout comme le respect des lois justes de l’Etat.Dans le même temps, il est nécessaire d’affir-mer la primauté de Dieu dans la vie humaine

et dans l’histoire, en respectant le droit deDieu sur ce qui lui appartient.

C’est de là que découle la mission de l’Egli-se et des chrétiens: parler de Dieu et témoi-gner de lui auprès des hommes et des femmesde notre temps. Chacun de nous, en vertu dubaptême, est appelé à être une présence vivan-te dans la société, en l’animant par l’Evangileet grâce à la sève vitale de l’Esprit Saint. Ils’agit de s’engager avec humilité, et en mêmetemps avec courage, en apportant sa contribu-tion à l’édification de la civilisation del’amour, où règnent la justice et la fraternité.

Que la Très Sainte Vierge Marie aide cha-cun à fuir toute hypocrisie et à être des ci-toyens honnêtes et constructifs. Et qu’ellenous soutienne, nous, les disciples du Christ,dans la mission de témoigner que Dieu est lecentre et le sens de la vie.

A l’issue de l’Angelus, le Pape a ajouté lesparoles suivantes:

Chers frères et sœurs!Nous célébrons aujourd’hui la journée mis-sionnaire mondiale, qui a pour thème: «Mevoici, envoie-moi. Tisserands de fraternité». Lemot «tisserands», est un beau terme: chaquechrétien est appelé à être un tisserand de fra-ternité. Les missionnaires hommes et femmes— prêtres, personnes consacrées, laïcs — quisèment l’Evangile dans le grand champ dumonde le sont de manière particulière. Dansce contexte, je désire rendre grâce à Dieupour la libération tant attendue du père PierLuigi Maccalli... — nous le saluons par ces ap-plaudissements! — qui avait été enlevé il y adeux ans au Niger. Nous nous réjouissonségalement, car trois autres otages ont été libé-rés avec lui. Nous continuons à prier pour lesmissionnaires et les catéchistes et égalementpour ceux qui sont persécutés ou qui sont sé-questrés dans de nombreuses parties dumonde.

Je désire adresser une parole d’encourage-ment et de soutien aux pêcheurs arrêtés de-puis plus d’un mois en Libye et à leurs famil-les. En se confiant à Marie Etoile de la Mer,ils conservent vivante l’espérance de pouvoirbientôt embrasser leurs proches. Je prie égale-ment pour les divers colloques en cours au ni-veau international, afin qu’ils soient construc-tifs pour l’avenir de la Libye. Frères et sœurs,l’heure est venue d’arrêter toute forme d’hosti-lité, en favorisant le dialogue qui conduit à lapaix, à la stabilité et à l’unité du pays. Prionsensemble pour les pêcheurs et pour la Libye,en silence.

Je vous salue tous, Romains et pèlerins ve-nus de divers pays. Je salue et je bénis en par-ticulier avec affection la communauté péru-vienne de Rome, ici rassemblée avec l’imagevénérée du Señor de los Milagros. Un applau-dissement à la communauté péruvienne! Je sa-lue également les bénévoles de l’o rg a n i s a t i o nitalienne pour la protection des animaux et dud ro i t .

Et je souhaite à tous un bon dimanche. S’ilvous plaît, n’oubliez pas de prier pour moi.Bon déjeuner et au revoir!

l’histoire, à cause de la pandémie, mais égale-ment des guerres anciennes et nouvelles encours, du cœur de l’Europe sera offert aumonde un moment solennel de réflexion, deprière, de rencontre. Un message d’esp érancepour l’avenir au nom du bien le plus grand:la paix.

Les représentants des religions prierontdans des lieux distincts. Les chrétiens se réu-niront dans la basilique de l’Ara Cœli en pré-sence du Pape, du patriarche orthodoxe deCostantinople, Bartholomée 1e r, et des diversesEglises orthodoxes et protestantes. Les juifs seretrouveront dans la synagogue, alors que lesmusulmans, les bouddhistes et les fidèles desreligions orientales dans les locaux des Mu-sées du Capitole. Les responsables religieux se

retrouveront ensuite ensemble, sur la place duCapitole, pour la cérémonie finale. A la suitedu président de la République italienne, Ser-gio Mattarella, interviendront le fondateur dela Communauté de Sant’Egidio, Andrea Ric-cardi et, dans un message vidéo, la présidentede la Commission européenne, Ursula vonder Leyen. Les représentants des religionsprendront ensuite la parole et, en conclusion,le Pape François.

Une minute de silence suivra, en mémoiredes victimes de la pandémie et de toutes lesguerres, ainsi que la lecture de l’Appel à lapaix 2020 qui sera remis par plusieurs enfantsaux ambassadeurs et aux représentants de lapolitique nationale et internationale. A la finde la rencontre, le Pape François, avec tousles responsables religieux, allumera le candéla-bre de la paix.

SUITE DE LA PA G E 1

Rome, capitale de la paix

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page 4 L’OSSERVATORE ROMANO mardi 20 octobre 2020, numéro 42

Message à l’Académie pontificale des sciences

Des solutions équitables et inclusives pour sortir de la criseDes solutions équitables et inclusives pour sortir dela crise provoquée par la pandémie du covid-19 ontété souhaitées par le Pape François dans le messagesuivant, envoyé aux participants à l’assembléeplénière virtuelle de l’Académie pontificale des sciences,qui s’est déroulée du 7 au 9 octobre.

Aux membresde l’Académie pontificale

des sciencesréunis en session plénière

Je vous salue cordialement et j’exprime ma grati-tude à l’Académie pontificale des sciences pouravoir consacré la session plénière de cette année àplacer la recherche scientifique de base au servicede la santé de notre planète et de ses habitants,en particulier les plus pauvres et les plus défavori-sés. Je salue également les experts et les dirigeantsinvités, qui ont tous d’importantes lourdes res-ponsabilités internationales, et j’attends avec plai-sir leur contribution.

Avant toute chose, j’exprime mon soutien pourle travail de l’Académie, activement encouragé parson président, le professeur Joachim von Braun,et par le Conseil. En ces jours, mon intérêt pourvos travaux est encore plus grand, car vous avezconsacré cette session plénière à ce qui est à justetitre un sujet de profonde préoccupation pourl’humanité tout entière. Vous vous concentrez surla notion de science au service des personnespour la survie de l’humanité, à la lumière de lapandémie de Sras-CoV-2/Covid-19 et d’a u t re sproblèmes mondiaux.

En effet, la pandémie a mis en lumière nonseulement nos fausses certitudes, mais aussi l’inca-pacité des pays du monde à travailler ensemble.Malgré toute notre hyper-connectivité, nousavons assisté à une fragmentation qui a renduplus difficile la résolution de problèmes qui noustouchent tous (cf. Fratelli tutti, n. 7). Il est doncsignificatif que cette session plénière virtuelle del’Académie rassemble un certain nombre de disci-plines scientifiques différentes; dans ce sens, elleoffre un exemple de la manière dont les défis dela crise due au covid-19 devraient être affrontés àtravers un engagement coordonné au service de lafamille humaine tout entière.

Vos efforts se concentrent largement sur l’étudede nouvelles voies immunologiques et immuno-

chimiques pour activer les mé-canismes de défense de l’o rg a -nisme ou arrêter la proliféra-tion des cellules infectées.Vous étudiez également d’au-tres traitements spécifiques,parmi lesquels des vaccins ac-tuellement testés dans le cadred’essais cliniques. Commenous le savons, en affectant lasanté des personnes, le virus aégalement touché l’ensembledu tissu social, économique etspirituel de la société, paraly-sant les relations humaines, letravail, la fabrication, le com-merce et même de nombreusesactivités spirituelles. Il a unimpact énorme sur l’éduca-tion. Dans de nombreuses ré-gions du monde, un grandnombre d’enfants ne peuvent pas retourner àl’école et cette situation risque d’entraîner uneaugmentation du travail des enfants, de l’exploita-tion, des abus et de la malnutrition. En bref, lefait de ne pas pouvoir voir le visage d’une person-ne et de considérer d’autres personnes comme desporteurs potentiels du virus est une terrible méta-phore d’une crise sociale mondiale qui doit préoc-cuper tous ceux qui ont à cœur l’avenir de l’hu-manité.

A cet égard, personne parmi nous ne peutmanquer de se préoccuper de l’impact de la crisesur les pauvres dans le monde. Pour beaucoupd’entre eux, c’est en effet une question de survie.Avec la contribution des sciences, les besoins desmembres les plus pauvres de notre famille humai-ne exigent des solutions équitables de la part desgouvernements et de tous les décideurs. Les sys-tèmes d’assistance médicale, par exemple, doiventdevenir beaucoup plus inclusifs et accessibles auxpersonnes défavorisées et à celles qui vivent dansles pays à faible revenu. Si quelqu’un doit êtreprivilégié, que ce soit les personnes les plus dé-munies et les plus vulnérables parmi nous. Demême, lorsque des vaccins seront disponibles, ilfaudra en assurer un accès équitable, indépen-damment des revenus, en commençant toujourspar les derniers. Les problèmes mondiaux aux-quels nous sommes confrontés exigent des répon-ses de coopération et multilatérales. Les organisa-

tions internationales telles que l’O N U, l’OMS, laFA O et d’autres, qui ont été créées pour favoriserla coopération et la coordination au niveau mon-dial, doivent être respectées et soutenues pourpouvoir atteindre leurs objectifs au nom du biencommun universel.

L’apparition de la pandémie, dans le contexteplus vaste du réchauffement climatique, de la cri-se écologique et de la perte dramatique de biodi-versité, représente un appel à notre famille humai-ne à repenser sa trajectoire, à se repentir et à en-treprendre une conversion écologique (cf. Laudatosi’, nn. 216-221). Une conversion qui fait appel àtous les dons et talents que Dieu nous a donnésafin de promouvoir une «écologie humaine» di-gne de notre dignité innée et de notre destincommun. C’est l’espoir que j’ai exprimé dans marécente encyclique Fratelli tutti sur la fraternité etl’amitié sociale. «Comme ce serait merveilleux sila croissance de l’innovation scientifique et tech-nologique créait plus d’égalité et de cohésion so-ciale! Comme ce serait merveilleux, alors qu’ondécouvre de nouvelles planètes, de redécouvrir lesbesoins de nos frères et sœurs qui tournent en or-bite autour de nous!» (n. 31).

Les réflexions de votre session plénière sur lessciences et la survie de l’humanité soulèvent éga-lement la question de scénarios similaires quipourraient provenir des laboratoires les plus avan-cés des sciences physiques et biologiques. Pou-vons-nous rester tranquilles face à de telles pers-pectives? Aussi grande que soit la responsabilitédes hommes politiques, elle ne dispense pas lesscientifiques de reconnaître leurs propres respon-sabilités éthiques dans leur effort pour mettre finnon seulement à la fabrication, à la possession età l’utilisation d’armes nucléaires, mais aussi au dé-veloppement d’armes biologiques, avec leur po-tentiel de dévastation de civils innocents et, defait, de peuples entiers.

Chers amis, je vous remercie une fois de pluspour vos recherches et vos efforts afin de faire fa-ce à ces graves problèmes dans un esprit de co-opération et de responsabilité partagée pour l’ave-nir de nos sociétés. Au cours de ces derniers mois,le monde entier a dépendu de vous et de vos col-lègues pour fournir des informations, insuffler del’espoir et, dans le cas d’innombrables profession-nels de la santé, pour soigner les malades et lespersonnes souffrantes, souvent au risque de leurpropre vie. En vous renouvelant ma propre grati-tude et en offrant mes meilleurs vœux dans laprière pour les délibérations de votre session plé-nière, j’invoque sur vous, vos familles et vos col-lègues, les bénédictions divines de sagesse, de for-ce et de paix. Et je vous demande, s’il vous plaît,de vous souvenir de moi dans vos prières.

Fait à Rome, à Saint-Jean-de-Latran,le 7 octobre 2020

FRANÇOIS

Lettres de Créancede l’ambassadeur du Nicaragua

Dans la matinée du lundi 12 octobre, lePape François a reçu en audienceS.E. M. Francisco Javier Bautista Lara,nouvel ambassadeur du Nicaragua prèsle Saint-Siège, à l’occasion de la présen-tation de ses Lettres de Créance. Né le31 mai 1960 à Managua, il est marié et aquatre enfants. Il est titulaire d’un mas-ter en administration et gestion d’e n t re -prise de l’université d’Amérique centraleet a participé au programme de hautegestion INCAE, au Costa Rica. Il a suivides spécialisations dans le secteur de lapolice en Bulgarie, Espagne, Taïwan,France et Etats-Unis d’Amérique et aparticipé en 1979 à la fondation de la «Policía Nacional de Nicaragua». Il a exercé les fonctionssuivantes: coordinateur du premier programme de modernisation et de développement de la «Po-licía Nacional de Nicaragua» (1999-2005); vice-directeur général et commissaire général de la«Policía Nacional» (2001-2005); consultant auprès de diverses agences de coopération internatio-nales gouvernementales et non-gouvernementales, en matière de sécurité des citoyens et réformede la police en Amérique latine (depuis 2005). Professeur et conférencier dans diverses universitésd’Amérique latine, il est membre du Centre des écrivains du Nicaragua (CNE), du Forum culturelde l’Institut de culture hispanique du Nicaragua (INCH) et du Centre des études pour le dévelop-pement «Miguel d’Escoto Brockmann» de l’université nationale autonome du Nicaragua.

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numéro 42, mardi 20 octobre 2020 L’OSSERVATORE ROMANO page 5

Message vidéo du Pape aux participants à l’initiative «Countdown» sur le changement climatique

Prendre soin de la terre est un droit de l’hommeA l’occasion du rendez-vous numérique«Countdown» sur le changement climatique —organisé au niveau mondial par TED ,organisation née il y a 25 ans en Californie — lePape François a envoyé, le samedi 10 octobre, unmessage vidéo aux participants. Nous en publionsci-dessous le texte, dans lequel le Pape suggèrecertaines solutions immédiates en réponse à lacrise environnementale.

Bonjour! Nous vivons un moment historiquemarqué par des défis difficiles. Le monde estébranlé par la crise provoquée par la pandé-mie de Covid-19, qui met encore plus en évi-dence un autre défi mondial: la crise socio-en-v i ro n n e m e n t a l e .

Cela nous place, tous, face à la nécessitéd’un choix.

Le choix entre ce qui compte et ce qui necompte pas. Le choix entre continuer à igno-rer les souffrances des plus pauvres et à mal-traiter notre maison commune, la Terre, oubien nous engager à tous les niveaux pourtransformer notre façon d’a g i r.

La science nous dit, chaque jour avec plusde précision, qu’il est nécessaire d’agir d’ur-gence — et je n’exagère pas, c’est la sciencequi le dit — si nous voulons avoir une espé-rance d’éviter des changements climatiques ra-dicaux et catastrophiques. Et pour cela, il fautagir de toute urgence. C’est un fait scienti-fique.

La conscience nous dit que nous ne pou-vons pas être indifférents à la souffrance desplus pauvres, aux inégalités économiquescroissantes et aux injustices sociales. Et l’éco-nomie elle-même ne peut pas se limiter à laproduction et à la distribution. Elle doit né-cessairement tenir compte de son impact surl’environnement et de la dignité de la person-ne. On pourrait dire que l’économie doit êtrec ré a t i v e en elle-même, dans ses méthodes, danssa manière d’agir. Créativité.

Je voudrais vous inviter à faire, ensemble,un voyage. Un voyage de t ra n s f o r m a t i o n etd’action. Qui ne soit pas tant fait de paroles,mais surtout d’actions concrètes et impossibleà repousser.

J’appelle cela un «voyage», car il nécessiteun «déplacement», un changement! De cettecrise, aucun de nous ne doit sortir pareil — nepourra en sortir pareil: on ne sort jamais pa-reil d’une crise, — ; et il faudra du temps etdes efforts pour en sortir. Il faudra avancerpas à pas, aider les faibles, persuader les scep-tiques, imaginer de nouvelles solutions et s’en-gager à les mettre en œu v re .

Mais l’objectif est clair: construire, au coursde la prochaine décennie, un monde où nouspourrons répondre aux besoins des généra-tions présentes, en incluant tout le monde,sans compromettre les possibilités des généra-tions futures.

Je voudrais inviter toutes les personnes defoi, chrétiennes ou non, et toutes les person-nes de bonne volonté, à entreprendre ce voya-ge, [à partir] de leur foi ou, si elles n’ont pasla foi, à partir de leur volonté, de leur bonnevolonté. Chacune et chacun de nous, en tantqu’individus et en tant que membres de grou-pes — familles, communautés de foi, entrepri-ses, associations, institutions — peut apporterune contribution significative.

Il y a cinq ans, j’ai écrit l’encyclique Lauda-to si’, consacrée au soin de notre maison commu-ne. Elle propose le concept d’«écologie inté-grale», pour répondre ensemble au cri de laterre, mais également au cri des pauvres.L’écologie intégrale est une invitation à une

vision intégrale de la vie, à partir de la convic-tion que dans le monde tout est lié et que,comme la pandémie nous l’a rappelé, noussommes interdépendants les uns des autres, etaussi dépendants de notre terre-mère. De cettevision découle l’exigence de rechercher d’au-tres manières de comprendre le progrès et dele mesurer, sans se limiter aux seules dimen-sions économique, technologique, financièreet au produit [intérieur] brut, mais en accor-dant une importance centrale aux dimensionséthique, sociale et éducative.

A u j o u rd ’hui, je voudrais proposer trois pis-tes d’action.

Comme je l’ai écrit dans Laudato si’, lechangement et la bonne orientation pour levoyage de l’écologie intégrale demande de faire

travailler dans ce sens. En fait, la terre doitêtre travaillée et soignée, cultivée et protégée;nous ne pouvons pas continuer à la pressercomme un citron. Et nous pouvons dire quecela, prendre soin de la terre, c’est un droit del’homme.

Ces trois propositions doivent être compri-ses comme faisant partie d’un vaste ensembled’actions que nous devons mener de manièreintégrée pour parvenir à une solution durabledes problèmes.

Le système économique actuel n’est pas via-ble. Nous sommes face à l’impératif moral, età l’urgence pratique, de repenser beaucoup dechoses: comment nous produisons, commentnous consommons, penser à notre culture dugaspillage, à la vision à court terme, à l’ex-

l’objectif fondamental de tout le cycle de pro-duction et de distribution de la nourriture.

La troisième proposition est celle de la t ra n -sition énergétique: un remplacement progressif,mais sans tarder, des énergies fossiles par dessources d’énergie propres. Nous n’avons quequelques années, les scientifiques calculentmoins de trente environ — nous n’avons quepeu d’années, moins de trente ans — pour ré-duire drastiquement les émissions de gaz àeffet de serre dans l’atmosphère. Cette transi-tion doit non seulement être rapide et capablede répondre aux besoins énergétiques présentset futurs, mais elle doit aussi être attentiveaux impacts sur les pauvres, les populationslocales et sur ceux qui travaillent dans les sec-teurs de la production d’é n e rg i e .

Une façon d’encourager ce changement estde conduire les entreprises vers l’exigence in-contournable de s’engager dans le soin inté-gral de la maison commune, en excluant desinvestissements des entreprises qui ne répon-dent pas aux paramètres de l’écologie intégra-le et en récompensant celles qui font un effortconcret dans cette phase de transition pourplacer au centre de leurs activités des para-mètres tels que la durabilité, la justice socialeet la promotion du bien commun. De nom-breuses organisations catholiques et d’a u t re sconfessions ont déjà pris la responsabilité de

ploitation des pauvres, à l’indifférence à leurégard, aux inégalités croissantes et à la dépen-dance vis-à-vis des sources d’énergie nocives.Autant de défis.

Nous devons y réfléchir. L’écologie intégra-le suggère une nouvelle conception de la rela-tion entre la nature et nous.

Cela conduit à une nouvelle économie,dans laquelle la production de richesse estorientée vers le bien-être intégral de l’être hu-main et vers l’amélioration — et non la des-truction — de notre maison commune. Cela si-gnifie également une politique renouvelée,conçue comme l’une des formes les plus éle-vées de la charité. Oui, l’amour est interper-sonnel, mais l’amour est aussi politique. Ilimplique tous les peuples et il implique la na-t u re .

Je vous invite donc tous à entreprendre cevoyage. Je l’ai donc proposé dans Laudato si’et aussi dans la nouvelle encyclique Fra t e l l itutti. Comme le suggère le terme «Count-down», nous devons agir de toute urgence.Chacun de nous peut jouer un rôle précieuxsi nous nous mettons tous en route, au-j o u rd ’hui. Pas demain, aujourd’hui. Parce quel’avenir se construit aujourd’hui, et il ne seconstruit pas seul, mais en communauté et enharmonie. Merci!

tout d’abord un pas de type éduca-tif(cf. n. 202). La première proposi-tion est donc de promouvoir, à tousles niveaux, une éducation au soinde la maison commune, en dévelop-pant la compréhension que les pro-blèmes environnementaux sont liésaux besoins humains — il faut lecomprendre dès le début: les pro-blèmes environnementaux sont liésaux besoins humains —; une éduca-tion basée sur des données scienti-fiques et sur une approche éthique.C’est important: les deux. Je suisencouragé par le fait que de nom-breux jeunes ont déjà une nouvellesensibilité écologique et sociale, etcertains d’entre eux se battent gé-néreusement pour la défense del’environnement et pour la justice.

Comme deuxième proposition, ilfaut ensuite mettre l’accent sur l’eauet l’alimentation. L’accès à l’eau po-table et sûre est un droit humainessentiel et universel. C’est incon-tournable, car cela détermine lasurvie des personnes et, pour cetteraison, c’est la condition à l’e x e rc i -ce de tous les autres droits et res-ponsabilités. Assurer une alimenta-tion adaptée pour tous grâce à desméthodes d’agriculture non des-tructrice, devrait ensuite devenir

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page 6 L’OSSERVATORE ROMANO mardi 20 octobre 2020, numéro 42

Dans un message vidéo le Pape invite à adhérer au Pacte éducatif mondial

Un pacte mondialcontre la catastrophe éducative

Le jeudi 15 octobre, a eu lieu en modalité virtuelle larencontre promue par François afin que le mondes’engage «pour et avec» les jeunes. Le Pape aintroduit la rencontre par le message vidéo suivant,au terme duquel il a invité à adhérer au «Pacteéducatif mondial» qui vise à engendrer unchangement au niveau mondial pour que l’éducationsoit créatrice de fraternité, de justice et de paix.

Chers frères et sœurs,Quand je vous ai invités à commencer ce proces-sus de préparation, de participation et de concep-tion d’un pacte éducatif mondial, nous ne pou-vions certes pas imaginer la situation dans laquel-le il se serait développé. La Covid a accéléré etamplifié bon nombre des urgences et des émer-gences que nous rencontrons et elle en a révélébeaucoup d’autres. Aux difficultés sanitaires ontfait suite les difficultés économiques et sociales.Les systèmes éducatifs du monde entier ont souf-fert de la pandémie aussi bien au niveau scolairequ’académique.

On a cherché partout à mettre en route une ré-ponse rapide par des plates-formes pédagogiquesinformatisées; celles-ci ont révélé non seulementune forte disparité des opportunités éducatives ettechnologiques, mais aussi que, à cause du confi-nement et de beaucoup d’autres lacunes déjà exis-tantes, de nombreux enfants et adolescents sontrestés en arrière dans le processus naturel du dé-

manière mondiale que ce qui est en crise, c’est no-tre façon de percevoir la réalité et d’entrer en rela-tion entre nous.

Dans ce contexte, nous voyons que ni les recet-tes simplistes, ni les vains optimismes ne suffisent.Nous connaissons le pouvoir transformant del’éducation: éduquer, c’est faire un pari et donnerau présent l’espérance qui brise les déterminismeset les fatalismes par lesquels l’égoïsme du fort, leconformisme du faible et l’idéologie de l’utopisteveulent s’imposer souvent comme unique voiepossible (cf. M. de Certeau, L’étranger ou l'uniondans la différence, Paris, Seuil, 2005).

Eduquer est toujours un acte d’espérance quiinvite à la co-participation et à la transformationde la logique stérile et paralysante de l’i n d i f f é re n -ce en une logique différente, qui soit en mesured’accueillir notre appartenance commune. Si lesespaces éducatifs se conformaient aujourd’hui à lalogique de la substitution et de la répétition etétaient incapables de générer et de montrer denouveaux horizons dans lesquels l’hospitalité, lasolidarité intergénérationnelle et la valeur de latranscendance fondent une nouvelle culture, neserions-nous pas en train de manquer le rendez-vous avec ce moment historique?

Nous sommes aussi conscients qu’un chemin devie a besoin d’une espérance fondée sur la solida-rité, et que tout changement nécessite un parcourséducatif pour construire de nouveaux paradigmes

tourne pas le regard en favorisant de lourdes in-justices sociales, des violations des droits, de pro-fondes pauvretés et des rejets humains.

Il s’agit d’un parcours intégral dans lequel onva à la rencontre de ces situations de solitude etde méfiance vis-à-vis de l’avenir qui génèrent par-mi les jeunes dépression, dépendances, agressivi-tés, haine verbale, phénomènes de harcèlement.Un cheminement partagé, dans lequel on ne restepas indifférent face à la plaie des violences et desabus sur mineurs, aux phénomènes des épouses-enfants et des enfants-soldats, au drame des mi-neurs vendus et réduits en esclavage. A celas’ajoute la douleur pour les «souffrances» de no-tre planète, causées par l’exploitation sans tête etsans cœur, qui a générée une grave crise environ-nementale et climatique.

Dans l’histoire, il existe des moments où il estnécessaire de prendre des décisions fondamentalesqui laissent non seulement une empreinte sur no-tre mode de vivre, mais spécialement une positiondéterminée face aux futurs scénarios possibles.Dans la situation présente de crise sanitaire — trèslourde de découragement et de désarroi —, nouspensons que le temps est venu de conclure unpacte éducatif mondial pour et avec les jeunes gé-nérations, qui engage les familles, les communau-tés, les écoles et les universités, les institutions, lesreligions, les gouvernants, l’humanité entière,dans la formation de personnes matures.

A u j o u rd ’hui nous est demandée l’audace néces-saire pour aller au-delà des visions extrinsèquesdes processus éducatifs, pour surmonter les sim-plifications excessives plaquées sur l’utilité, le ré-sultat (standardisé), la fonctionnalité et la bureau-cratie qui confondent éducation et instruction etfinissent par atomiser nos cultures; il nous estplutôt demandé de poursuivre une culture inté-grale, participative et aux multiples facettes. Ilnous faut avoir le courage de générer des proces-sus qui assument consciemment la fragmentationexistante et les contradictions que de fait nousportons en nous; le courage de recréer le tissu desrelations en faveur d’une humanité capable deparler la langue de la fraternité. La valeur de nospratiques éducatives ne sera pas mesurée simple-ment par la réussite d’évaluations standardisés,mais plutôt par la capacité d’influer sur le cœurd’une société et de donner vie à une nouvelle cul-ture. Un monde différent est possible et exigeque nous apprenions à le construire, et cela im-plique toute notre humanité, tant personnelle quec o m m u n a u t a i re .

Faisons appel de façon particulière, danschaque partie du monde, aux hommes et auxfemmes de la culture, de la science et du sport,aux artistes, aux opérateurs des médias, afinqu’eux aussi souscrivent à ce pacte et, par leur té-moignage et leur travail, qu’ils se fassent promo-teurs des valeurs de soin, de paix, de justice, debien, de beauté, d’accueil de l’autre et de fraterni-té. «Nous ne devons pas tout attendre de nosgouvernants; ce serait puéril. Nous disposonsd’un espace de coresponsabilité pour pouvoircommencer et générer de nouveaux processus ettransformations. Soyons parties prenantes de laréhabilitation et de l’aide aux sociétés blessées.A u j o u rd ’hui, nous nous trouvons face à la grandeopportunité de montrer que, par essence, noussommes frères, l’opportunité d’être d’autres bonssamaritains qui prennent sur eux-mêmes la dou-leur des échecs, au lieu d’accentuer les haines etles ressentiments» (Enc. Fratelli tutti, n. 77). Unprocessus pluriel et polyédrique capable de nousimpliquer tous en des réponses significatives, oùles diversités et les approches savent s’harmoniseren vue de la recherche du bien commun. Une ca-pacité de faire l’harmonie: il la faut, aujourd’hui.

SUITE À LA PA G E 7

veloppement pédagogique. Selon certaines don-nées récentes des agences internationales, on parlede «catastrophe éducative» — c’est un peu fort,mais on parle de «catastrophe éducative» —, faceà environ dix millions d’enfants qui pourraientêtre obligés d’abandonner l’école à cause de lacrise économique générée par le coronavirus, aug-mentant ainsi un écart éducatif déjà alarmant(avec plus de 250 millions d’enfants en âge descolarité exclus de toute activité de formation).

Devant cette réalité dramatique, nous savonsque les mesures sanitaires nécessaires seront insuf-fisantes si elles ne sont pas accompagnées par unnouveau modèle culturel. Cette situation a faitgrandir la prise de conscience qu’il faut faireprendre un virage au développement. Afin qu’ilrespecte et protège la dignité de la personne hu-maine, il devra partir des opportunités que l’inter-dépendance planétaire offre à la communauté etaux peuples, en soignant notre maison communeet en protégeant la paix. La crise que nous traver-sons est une crise globale, qui ne peut se réduireou se limiter à un seul domaine ou secteur. Elleest globale. La Covid a permis de reconnaître de

capables de répondre aux défis et aux urgencesdu monde contemporain, de comprendre et detrouver les solutions aux exigences de chaque gé-nération et de faire fleurir l’humanité d’au-j o u rd ’hui et de demain.

Nous considérons que l’éducation est l’une desvoies les plus efficaces pour humaniser le mondeet l’histoire. L’éducation est surtout une questiond’amour et de responsabilité qui se transmet dansle temps, de génération en génération.

L’éducation se propose comme l’antidote natu-rel à la culture individualiste, qui quelquefois dé-génère en un véritable culte du «moi» et dans leprimat de l’indifférence. Notre avenir ne peut pasêtre la division, l’appauvrissement des facultés depensée et d’imagination, d’écoute, de dialogue etde compréhension mutuelle. Notre avenir ne peutpas être cela.

A u j o u rd ’hui, est nécessaire une nouvelleépoque d’engagement éducatif qui implique tou-tes les composantes de la société. Ecoutons le crides nouvelles générations qui met en lumièrel’exigence et, à la fois, l’opportunité stimulanted’un cheminement éducatif renouvelé, qui ne dé-

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numéro 42, mardi 20 octobre 2020 L’OSSERVATORE ROMANO page 7

Audience à une délégation du diocèse de Ravenne à l’occasion du VIIe centenaire de la mort du poète

Dante prophète d’esp éranceQue les célébrations du septième centenaire de lamort de Dante Alighieri puissent «être uneinvitation à cette espérance dont Dante est leprophète»: c’est ce qu’a souhaité le Pape Françoisdans le discours adressé à une délégation del’archidiocèse de Ravenna-Cervia (Italie) reçueen audience dans la matinée du samedi 10octobre, dans la salle Clémentine, à l’occasion del’Année Dante.

Chers frères et sœurs!Je vous souhaite la bienvenue et je vous re-mercie d’être venus partager avec moi la joieet l’engagement d’ouvrir les célébrations du 7e

centenaire de la mort de Dante Alighieri. Jeremercie en particulier l’archevêque, MgrGhizzoni, pour ses paroles d’intro duction.

Ravenne, pour Dante, est la ville du «der-nier refuge» (cf. C. Ricci, L’ultimo rifugio diDante Alighieri, Hoepli, Milan 1891) — le pre-mier avait été Vérone —; en effet, c’est dansvotre ville que le poète a passé ses dernièresannées et a achevé son œuvre: selon la tradi-tion, les derniers chants du P a ra d i s y ont étécomp osées.

Par conséquent, à Ravenne, il a conclu saroute terrestre; et il a conclu cet exil qui a tel-lement marqué son existence et a aussi inspiréson écriture. Le poète Mario Luzi a soulignéla valeur du bouleversement et de la décou-verte supérieure que l’expérience de l’exil a ré-servée à Dante. Cela nous fait immédiatementpenser à la Bible, à l’Exil du peuple d’Israël àBabylone, qui constitue, pour ainsi dire, l’unedes «matrices» de la révélation biblique. Dela même manière, l’exil a été tellement signifi-catif pour Dante qu’il est devenu une clé pourinterpréter non seulement sa vie, mais le«voyage» de chaque homme et de chaquefemme dans l’histoire et au-delà de l’h i s t o i re .

La mort de Dante à Ravenne a eu lieu —comme l’écrit Boccace — «le jour où l’exalta-tion de la Sainte Croix est célébrée par l’Eglise»(Trattatello in laude di Dante, Garzanti 1995,p. XIV). Mes pensées se tournent vers cettecroix d’or que le poète a certainement vuedans la petite coupole couleur bleu nuit, par-semée de neuf cents étoiles, du mausolée de

Galla Placidia; ou vers celledu Christ ornée de gemmeset «scintillante» — pour re-prendre l’image du Paradis —(cf. X I V, 104), de la coupolede l’abside de Sant’Ap ollinarein Classe.

En 1965, à l’occasion duVIIe centenaire de sa naissan-ce, saint Paul VI fit don à Ra-venne d’une croix en or poursa tombe, restée jusque-là —comme il le dit — «dép ourvued’un tel signe de religion etd’espérance» (Discours au Sa-cré Collège et à la prélature ro-maine, 23 décembre 1965).Cette même croix, à l’o cca-

accessible, aperçoivent inévitablement, d’unepart, tout l’éloignement de l’auteur et de sonmonde; mais pourtant, d’un autre côté, ils res-sentent un écho surprenant. Cela se produitsurtout là où l’allégorie laisse place au symbo-le, où l’humain apparaît plus évident et nu,où la passion civile vibre plus intensément, làoù la fascination du vrai, du beau et du bienet, pour finir, la fascination de Dieu fait res-sentir sa puissante attraction.

Alors, profitant de cet écho qui franchit lessiècles, nous aussi — comme saint Paul VInous a invités à le faire — nous pourrons nousenrichir de l’expérience de Dante pour traver-ser les nombreuses forêts sombres de notreterre et accomplir avec bonheur notre pèleri-nage à travers l’histoire, pour parvenir au butrêvé et désiré par tout homme: «L’amour quianime le soleil et les autres étoiles» (Par.XXXIII, 145) (cf. Message pour le 750e anniver-saire de la naissance de Dante Alighieri, 4 mai2015).

Merci encore de cette visite et mes meilleursvœux pour les célébrations du centenaire.Avec l’aide de Dieu, j’ai l’intention de propo-ser l’année prochaine une réflexion plus déve-voppée à ce propos. Je bénis de tout cœurchacun de vous, vos collaborateurs et toute lacommunauté de Ravenne. Et s’il vous plaît,n’oubliez pas de prier pour moi.

sion de ce centenaire, brillera à nouveau dansle lieu qui conserve la dépouille mortelle dupoète. Puisse-t-elle être une invitation à l’es-pérance, cette espérance dont Dante est leprophète (cf. Message à l’occasion du 750e an-niversaire de la naissance de Dante Alighieri, 4mai 2015).

Je souhaite donc que les célébrations duVIIe centenaire de la mort du souverain poètenous incitent à reparcourir sa Comédie p ourque, devenus conscients de notre conditiond’exilés, nous nous laissions interpeller par cechemin de conversion «du désordre à la sa-gesse, du péché à la sainteté, de la misère aubonheur, de la contemplation terrifiante del’enfer à la contemplation béatifiante du ciel»(Saint Paul VI, Lettre apostolique m.p. Al t i s s i -mi cantus, 7 décembre 1965). Dante, en effet,nous invite une fois de plus à redécouvrir lesens perdu ou obscurci de notre parcours hu-main.

Parfois, il pourrait sembler que ces septsiècles ont creusé une distance infranchissableentre nous, hommes et femmes de l’ép o quepost-moderne et sécularisée, et lui, extraordi-naire représentant d’une époque dorée de lacivilisation européenne. Pourtant, quelquechose nous dit qu’il n’en est pas ainsi. Lesadolescents, par exemple — même ceux d’au-j o u rd ’hui —, s’ils ont la possibilité d’ab orderla poésie de Dante d’une manière qui leur soit

SUITE DE LA PA G E 6

Message vidéo pour l’adhésion au Pacte éducatif mondial

Pour toutes ces raisons nous nous engageonspersonnellement et ensemble:

— à mettre au centre de chaque processus édu-catif formel ou informel la personne, sa valeur, sadignité, afin de faire émerger sa spécificité, sabeauté, son unicité et, en même temps, sa capaci-té d’être en relation avec les autres et avec la réali-té qui l’entoure, en repoussant les styles de viequi favorisent la diffusion de la culture du rejet.

— Deuxièmement: à écouter la voix des enfantset des jeunes à qui nous transmettons des valeurset des connaissances, afin de construire ensembleun avenir de justice et de paix, une vie dignepour chaque personne.

— Troisièmement: à favoriser la pleine participa-tion des fillettes et des jeunes filles à l’i n s t ru c t i o n .

— Quatrièmement: à voir dans la famille le pre-mier et l’indispensable sujet éducateur.

— Cinquièmement: à éduquer et à nous éduquerà l’accueil, en nous ouvrant aux plus vulnérableset aux plus marginalisés.

— Sixièmement: à nous engager à chercher àtrouver d’autres manières de comprendre l’écono-mie, de comprendre la politique, de comprendrela croissance et le progrès, pour qu’ils soient vrai-ment au service de l’homme et de la famille hu-maine tout entière dans la perspective d’une éco-logie intégrale.

— Septièmement: à garder et à cultiver notremaison commune, en la protégeant du pillage deses ressources, en adoptant des styles de vie plussobres et visant à l’utilisation complète des éner-gies renouvelables, respectueuses de l’e n v i ro n n e -ment humain et naturel selon les principes desubsidiarité et de solidarité et de l’économie circu-l a i re .

Chers frères et sœurs, nous nous engageronsavec courage, enfin, à donner vie, dans nos paysde provenance, à un projet éducatif en investis-sant nos meilleures énergies ainsi qu’en lançantdes processus créatifs et transformants en collabo-ration avec la société civile. Dans ce processus, unpoint de référence est la doctrine sociale qui, ins-pirée des enseignements de la Révélation et del’humanisme chrétien, se présente comme une ba-

se solide et une source vive pour trouver les voiesà parcourir dans la situation d’urgence actuelle.

Un tel investissement formateur, basé sur un ré-seau de relations humaines et ouvertes, devra as-surer à tous l’accès à une éducation de qualité, àla hauteur de la dignité de la personne humaineet de sa vocation à la fraternité. Il est temps deregarder de l’avant avec courage et espérance. Parconséquent, que la conviction que dans l’éduca-tion habite la semence de l’espérance nous sou-tienne: une espérance de paix et de justice. Uneespérance de beauté, de bonté; une espéranced’harmonie sociale.

Rappelons-nous, frères et sœurs, que les gran-des transformations ne se construisent pas au bu-reau, non! Il y a une «architecture» de la paixdans laquelle interviennent les diverses institu-tions et personnes d’une société, chacune selon sacompétence mais sans exclure personne (cf. ibid.,n. 231). Ainsi nous devons aller de l’avant: tousensemble, chacun comme il est, mais toujours enregardant en avant ensemble, vers cette construc-tion d’une civilisation de l’harmonie, de l’unité,où il n’y a pas de place pour cette mauvaise pan-démie de la culture du rejet. Merci.

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numéro 42, mardi 20 octobre 2020 L’OSSERVATORE ROMANO pages 8/9

Avec les pieds nus (et sales) sur la toileLe Caravage dans les églises romaines. Une clé de lecture à partir des nouvelles études

ANDREA LONARD O

Dans la Madone de Lorette [basilique Sant’Agostino]la créativité iconographique de Michelangelo Merisiest évidente. La Vierge avait toujours été peinte envol sur la Sainte Maison, transportée par les angesde Bethléem à Lorette, elle est à prése nt représen-tée au moment où elle atterrit devant deux pèlerinsqui viennent d’arriver. Les pieds sales des personnesâgées apparaissent au premier plan, ceux de la Vier-ge qui apparaît à la porte de la Sainte Maison,alors qu’elle descend du ciel exprès pour eux, sonttout aussi nus, mais très propres.

avait participé juste aupa-ravant à un pèlerinage àLorette organisé par laConfraternité des Pèle-rins, avec trois cents par-ticipants: selon l’usage,ces derniers se déchaussè-rent une fois arrivés de-vant l’enceinte de laSainte Maison et ils ef-fectuèrent pieds nus, pré-cisément comme les deuxreprésentants de Miche-langelo Merisi, la der-nière partie du chemin.Tout est nouveau dansl’œuvre, car Michelange-lo Merisi réussit àexprimer l’événement demanière très originale.Mais l’objectif éternel dela foi catholique est là: laVierge avec son Enfant,

Mais l’image apparut trop crue re-présentée de cette manière, avec Mariesur une table mortuaire. Le Caravageavait poussé encore une fois à l’ex-trême le désir de toucher les cordes ducœur des Romains, mais là aussi il nes’était pas éloigné du dogme catho-lique. Dans aucune des sources ancien-nes ne se trouve la plus petite mentionqu’il soit soupçonné d’hérésie. Les re-gistres de la paroisse San Nicola deiPrefetti contiennent même l’indicationqu’il se confessa et communia pourPâques, de même que les archives del’Accademia dei Virtuosi rappellent saparticipation à l’adoration eucharis-tique des Quarante Heures, probable-ment pour la fête de la Vierge de SanLuca.

L’exposition Les bas fonds du ba-ro q u e a amplement montré qu’un trèsgrand nombre des peintres de l’ép o quen’avaient pas des mœurs très honnêtes,rappelant que le Chevalier d’Arpin futaccusé d’avoir attenté à la vie du Po-marancio et qu’on trouva chez luideux «pistole prohibite», alors queGiovanni Baglione eut une fille avecune courtisane, qu’Annibale Carraccimourut sans doute à la suite d’«excès»amoureux et qu’Artemisia Gentileschifut violée par un peintre ami de sonpère, le Tassi. Par ailleurs, les célèbressonnets vulgaires contre Baglionefurent diffusés par Gentileschi, Longhiet Trisegni.

Les sources démentent la visiond’un Caravage moralement ou théolo-giquement différent de ses contempo-rains: ce qu’elles soulignent, en revan-

Nous les retrouvons pourtant qui travaillent tousensemble, comme à la Chiesa Nuova, voulue parsan Filippo Neri, dans la forme qu’elle conserve en-core. La Déposition fut assignée à Caravage et il pei-gnit le Christ, sculpté par la lumière: alors qu’àdroite une plante rappelle sa mort réelle, à gauchele suaire touche une plante vivante, luxuriante pourindiquer, avec la lumière qui illumine le corps duSeigneur, la vérité de la résurrection. La pierre tom-bale fait probablement allusion, en revanche, à latable de l’autel qui est située immédiatement endessous, comme cela ressort de manière évidente dela vision de l’œuvre dans son contexte original,pour indiquer que cette victoire est maintenant pré-sente dans la célébration eucharistique.

Le Caravage peignit la Déposition dans la sériedes «mystères» du Christ que les disciples de saintFilippo Neri confièrent à Barocci, au chevalierd’Arpin, au Pulzone et à d’autres. Le Caravage etles autres peintres de l’époque priaient ensemble àl’Académie de Saint-Luc, ils se battaient en duelensemble, mais ils peignaient aussi ensemble. Lacritique isole Michelangelo Merisi de son contexte,alors que ses œuvres l’y inscrivent pleinement, étantdonné qu’ils étaient un groupe uni et collaboratif.Entre autres, la Chiesa Nuova nous rappelle préci-sément par sa majesté à quel point le prétendu pau-périsme que le Caravage aurait respiré de saint Fi-lippo Neri est peu scientifique, étant donné que lesaint excluait même le vœu de pauvreté pour lessiens, justement pour qu’ils puissent posséder dansle but de la prédication: chez Caravage, les piedsnus du Christ et des saints sont, en revanche, lamanière typique de représenter les personnages duNouveau Testament à l’ép o que.

Cela apparaît évident dans la Vocation de saintMa t t h i e u où, alors que Matthieu-Levi et les percep-teurs des impôts sont habillés avec des vêtementsdu XVIIe siècle, Jésus et Pierre, sur la droite, les ren-contrent pieds nus. L’œuvre désire susciter l’émer-veillement pour le fait que le Christ, qui vécut dessiècles auparavant, a encore aujourd’hui la puissan-ce d’appeler les siens.

Dans cette toile également, l’in-novation de Michelangelo Merisiest bouleversante si on la compareavec la fresque du chevalier d’Arpinen haut, sur la voûte de la chapelle.Dans cette dernière, une porte s’ou-vre et la lumière symbolique, quiest en même temps naturelle, at-teint la tête du fils du roi, qui estressuscité par saint Matthieu. Dansla Vocation, Caravage renverse leschamps du clair et de l’obscur et lalumière perd toute connotation réa-liste, devenant seulement symbo-lique. Dans la Madeleine pénitente,Caravage avait déjà expérimentél’apparition de la lumière dans l’ob-scurité du fond pour indiquer la ve-nue de la grâce: ce contraste declair et d’obscur deviendra sa carac-téristique picturale la plus évidente.

La Vo c a t i o n est accompagnée parle Ma r t y re de l’apôtre, la premièreœuvre de Michelangelo Merisipour une église. C’est une toile àthème catéchuménal: Matthieuvient de célébrer la Messe avec les

narroti la torsion du visage de Pierre qui, avant demourir, se tourne non pour regarder qui entre dansla chapelle, mais dans la direction opposée, vers letabernacle et l’autel de la célébration, afin de con-templer pour la dernière fois ce Christ pour lequelil est en train d’offrir sa vie.

En 1610, le Caravage était en train de revenir àRome, car il sentait la Rome de la Contre-Réforme,celle des Papes, comme la ville où il aurait pu lemieux s’exprimer. Le Pape et les cardinaux — enparticulier le cardinal Borghese — avaient tout faitpour rendre son retour possible. Le sort voulut, enrevanche, qu’il n’y eut pas de deuxième période ro-maine pour Michelangelo Merisi, qui aurait rempliles yeux et le cœur de ses nouvelles toiles dans leséglises.

le pèlerinage aux lieux de la foi, s’agenouiller, lagrâce divine qui ne craint pas de rencontrer la cras-se de l’homme.

Dans la Vierge au serpent, la nouveauté iconogra-phique saute également aux yeux. L’Enfant est unhomme véritable, avec ses organes sexuels au toutpremier plan. La toile des Palefreniers fut comman-dée par la confraternité qui était chargée de la pré-paration du cheval pour les processions du Pape.Saint Anne était leur patronne, mais la mère de laVierge appartient encore à l’Ancien Testament etelle est donc représentée sur le côté et non en plei-ne lumière, alors que c’est la Vierge avec son Filsqui sont illuminés.

Marie et Jésus écrasent le serpent, c’est-à-dire lediable et son péché: c’est la victoire sur le péchéoriginel qui a lieu grâce à l’Enfant, mais qui toucheaussi la Mère, qui est représentée comme l’Immacu-lée Conception dans la toile du Caravage. Dansl’Eglise catholique de l’époque, le Pape avait de-mandé de suspendre la discussion sur les modalitésselon lesquelles Marie avait été préservée du péchéoriginel, mais il n’avait pas empêché de représenterMarie sans péché, car dans le contexte de la Con-tre-Réforme, il existait un grand désir de réaffirmerle rôle unique de la Vierge.

Les études récentes montrent que l’œuvre ne putpas rester à Saint-Pierre, car on enleva aux Palefre-niers la chapelle pour laquelle elle avait été com-mandée. En effet, c’est précisément au cours de cesannées que Paul V Borghese décida d’abattre la nefconstantinienne qui était encore debout: deux corpsarchitectoniques d’âge différent coexistaient alorsdans un hybride qu’il est aujourd’hui difficiled’imaginer. Dans le projet de la nouvelle nef deCarlo Maderno il n’y eut plus de place pour laChapelle des Palefreniers, qui durent donc y renon-cer en 1605.

Le Pape prit la décision historique d’abattre cetédifice, qui était en place depuis l’époque de Cons-tantin, et la toile de Michelangelo Merisi ne futqu’un détail dans l’immense projet qui vit cettetransformation colossale. Peu de personnes s’ap er-çoivent, entre autres, que Carlo Maderno, baroque,était plus âgé que Michelangelo Merisi et que latoile fut réalisée alors que prenait forme l’idée de lanef baroque.

La Mort de la Vierge est ainsi l’unique tableaumarial de Michelangelo Merisi qui fut refusé, c’estmême le seul qui fut refusé parmi toutes ses œu v re spour les églises romaines. Il le peignit pour l’églisecarmélite Santa Maria della Scala, mais l’œuvre futjugée trop «spropositata di lascivia e di decoro». Ilfaut cependant bien remarquer que l’accusation nefut pas celle d’hérésie. Au contraire, Caravage souli-gna la sainteté de la Vierge en illuminant son corpsde lumière, la représentant avec le signe de sa ma-ternité bénie et en faisant allusion à son assomptionau ciel avec le drap rouge qui «ouvre» le tableau enhaut.

che, est qu’il faut modifier l’idée que l’on a sur laRome de la Contre-Réforme car celle-ci était, enréalité, beaucoup plus variée par rapport à l’imagi-naire moderne. Il est certain que tous les peintresde l’époque étaient en lutte entre eux, avec desmoyens licites et illicites, non parce qu’ils soute-naient différentes visions religieuses, mais plutôtpour l’emporter sur la concurrence et apparaîtrecomme les meilleurs.

nouveaux baptisés et il porte les vêtements d’unprêtre tridentin, avec la chasuble, alors qu’un clercs’enfuit, saisi d’horreur. L’autel situé en haut n’apas encore de cierge allumé, alors que l’un des deuxbaptisés à une jambe qui pend dans la vasque bap-tismale.

Le retable d’autel avec Saint Matthieu et l’ange futcommandé à Michelangelo Merisi après le refus dela statue de Cobaert — qui fut le vrai refus de lachapelle Contarelli [église Saint-Louis-des-Fran-çais].

La première version ne pouvait être l’originale,car trop petite et absolument inadaptée pour soute-nir la comparaison avec les deux toiles latérales. Onpeut l’imaginer comme une esquisse qui conduisitMichelangelo Merisi à la toile définitive, qui estvraiment belle et digne , avec l’ange ma-gnifique qui lui rappelle la généalogie deJésus en comptant sur ses doigts: «Abra-ham engendra Isaac, Isaac engendra Ja-cob». Matthieu est toujours pieds nus,mais la version définitive est ô combienplus caravagesque que la première quin’est pas très réussie.

On parle donc à tort d’un refus, alorsqu’on devrait insister sur le fait que lachapelle Contarelli représente plutôt laconsécration de Michelangelo Merisi etde sa renommée.

Le même discours vaut également dansle cas de la chapelle Cerasi [basiliqueSanta Maria del Popolo]. Les données etune chronologie précise manquent, enraison du petit nombre de sources, pourcomprendre exactement pourquoi l’onpassa de la première à la deuxième ver-sion, mais ce qui est certain est que, alorsque la première Conversion de saint Paulest encore maniériste, c’est la version dé-finitive qui est pleinement caravagesque,avec l’isolement des figures et la pleinevalorisation de la lumière: saint Paul,tombant de cheval, sort de la toile et,aveugle, se jette presque entre les bras duv i s i t e u r.

Michelangelo Merisi, en dialoguantavec l’As s o m p t i o n de Carrache qui est si-tuée au centre, répète l’iconographie queMichelangelo Buonarroti avait inventéepour la chapelle Pauline [du Palais apos-tolique] — signe évident qu’il était telle-ment accepté au Vatican qu’il pouvait ac-céder à la chapelle du Pape pour en étu-dier les œu v re s .

Il est en particulier extraordinaire —telles sont les conclusions des recherchesde celui qui écrit cet article — que Cara-vage ait repris chez Michelangelo Buo-

Jamais les sources caravagesques anciennes neparlent du visage de Marie à la manière du gossip àscandale inventé par la critique d’amateurs, commesi le problème était la modèle utilisée pour ce visa-ge. Non! Ce qui fit parler était la saleté des deuxpèlerins, à côté de la beauté absolue de la Vierge etde son Fils, qui n’ont pas crainte de se présenter àeux.

Marco Pupillo a récemment mis en lumière le faitqu’Ermes Cavalletti, celui qui commanda l’œu v re ,

«Saint Jérôme écrivant» (1605-1606)

«La déposition» (1600-1604)

«La Madonne des pèlerins»ou «Madone de Lorette» (1604-1605)

«Saint Matthieu et l’ange» (1602)

«La Vocation de saint Matthieu» (1600)

«La Madonne des palefreniers» ou «Vierge au serpent» (1605-1606)

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page 10 L’OSSERVATORE ROMANO mardi 20 octobre 2020, numéro 42

Intervention du cardinal-secrétaire d’Etat au PIME de Milan

L’accord avec la Chine a été recherchépar tous les derniers Papes

L’accord provisoire que le Saint-Siège a si-gné avec la République populaire de Chi-ne et qui concerne la nomination des évê-

ques «n’est qu’un point de départ», qui a conduità quelques résultats: afin que «le dialogue puissedonner des fruits plus consistants, il est nécessairede le poursuivre». C’est ce qu’a déclaré le cardi-nal Pietro Parolin, secrétaire d’Etat, dans son dis-cours d’ouverture au Congrès organisé à Milanpar le Centre missionnaire PIME sur le thème«Une autre Chine. Temps de crise, temps dechangement». Le congrès célèbre les 150 ans deprésence des missionnaires de l’Institut pontificaldes missions étrangères en Chine. Le cardinal Pa-

fite ni aux autorités chinoises, ni à l’Eglise catho-lique en Chine». En citant son prédécesseur Jean-Paul II, Benoît XVI avait écrit en 2007: «Ce n’estun mystère pour personne que le Saint-Siège, aunom de toute l’Eglise catholique et — je crois —pour le bien de toute l’humanité, espère l’ouvertu-re d’un espace de dialogue avec les autorités de laRépublique populaire de Chine, dans lequel,ayant surmonté les incompréhensions du passé,nous puissions travailler ensemble pour le bien dupeuple chinois et pour la paix dans le monde».C’est précisément dans ces années-là, comme l’aécrit le cardinal Giovanni Battista Re au coursdes derniers mois, que le Pape Benoît XVI a p p ro u -

n’étaient pas en pleine communion avec le Papeau cours des décennies passées ont été formés parles missionnaires, qui connaissaient bien leurcœur et leur foi». Beaucoup de ces évêques con-sacrés illégitimement «ont demandé le pardon duPape et la pleine réconciliation. Cela montrequ’au fond, leur cœur n’avait pas changé et leurfoi n’avait pas failli». Cependant, jusqu’à il y adeux ans, la possibilité de nouvelles ordinationsillégitimes est toujours restée ouverte. C’est pour-quoi il était nécessaire, a répété le secrétaired’Etat, «d’affronter et de résoudre définitivementce problème délicat. Mais l’expérience de nom-breuses décennies a montré (et montre) qu’une

«Le 17 janvier 1951 — a déclaré le secrétaire d’Etat—, les autorités invitèrent des évêques et prêtrescatholiques à une rencontre à laquelle participè-rent également le premier ministre et le ministredes affaires étrangères, Zhou Enlai. Ce dernier as-sura que les catholiques pouvaient continuer àsuivre l’autorité religieuse du Saint-Père, maisqu’ils devaient garantir la pleine loyauté patrio-tique envers leur pays. C’est alors que commençala tentative de rédiger un document contenant cesdeux principes, à laquelle participèrent non seule-ment les évêques et les prêtres, mais aussi le secré-taire de l’internonce Antonio Riberi: ce dernierl’envoya en effet à Pékin précisément pour qu’ilpuisse participer à cette tentative. Cela montreque dès l’époque de Pie XII, le Saint-Siège a res-senti l’exigence de dialogue, même si les circons-tances de l’époque le rendaient très difficile». Aucours des premiers mois de 1951, pas moins dequatre projets d’éventuel accord furent rédigés,mais malheureusement, ils ne furent pas jugés sa-tisfaisants. «Je pense que l’échec de cette tentativea notamment été dû — outre les tensions interna-tionales: c’étaient les années de la guerre de Corée—, également aux incompréhensions entre lesdeux parties et à la méfiance réciproque. C’est unéchec qui a marqué toute l’histoire qui a suivi».

La reprise du dialogueAprès cette tentative, près de trente ans se sont

écoulés avant que la voie du dialogue ne puisseêtre rouverte. «Je me souviens en particulier duvoyage effectué par le cardinal Echegaray en 1980— a dit le cardinal Parolin — quand la Chine com-mençait à peine à sortir de la douloureuse expé-rience de la Révolution culturelle. Depuis lors, aété initié un parcours qui — avec des hauts et desbas — a conduit jusqu’à aujourd’hui». Le cardinala expliqué que tous les Papes, de Paul VI à Fran-çois, ont recherché ce que Benoît XVI a indiquécomme le dépassement d’une «situation lourde demalentendus et d’incompréhensions» qui «ne pro-

va «le projet d’accord sur la nomination des évê-ques en Chine, qui n’a pu être signé qu’en 2018».

Malentendus sur l’a c c o rdLe cardinal Pietro Parolin a donc voulu encore

une fois clarifier les choses, en réfutant les lectu-res politiques d’un accord authentiquement pasto-ral. «Certains malentendus sont apparus. Ungrand nombre d’entre eux découlent de l’attribu-tion à l’Accord provisoire entre le Saint-Siège etla République populaire de Chine d’objectifs quecet Accord n’a pas. Ou d’un prétendu lien entrel’accord et des événements concernant la vie del’Eglise catholique en Chine qui lui sont étran-gers. Ou encore des liens avec des questions poli-tiques qui n’ont rien à voir avec cet Accord. Jerappelle une fois de plus — et sur ce point leSaint-Siège n’a jamais laissé place à des équivo-ques ou à des confusions — que l’Accord du 22septembre 2018 concerne exclusivement la nomi-nation des évêques». Le secrétaire d’Etat s’est dit«conscient de l’existence de nombreux autres pro-blèmes concernant la vie de l’Eglise catholique enChine. Mais il n’a pas été possible de les affrontertous ensemble et nous savons que le chemin versune pleine normalisation sera encore long, commel’avait déjà prévu Benoît XVI en 2007. Toutefois,la question de la nomination des évêques revêtune importance particulière. C’est en fait le pro-blème qui a fait le plus souffrir l’Eglise catholiqueen Chine au cours des soixante dernières an-nées».

Un premier objectif atteint«Pour la première fois après de nombreuses dé-

cennies — a encore affirmé le cardinal Parolin —a u j o u rd ’hui, tous les évêques de Chine sont encommunion avec l’Evêque de Rome». Ceux quiconnaissent l’histoire de l’Eglise en Chine «saventcombien il est important que tous les évêques chi-nois soient en pleine communion avec l’Egliseuniverselle. Un grand nombre de ceux qui

qu’elles jouissent de conditions de plus grande li-berté, autonomie et organisation, de façon à pou-voir se consacrer à la mission d’annoncer l’Evan-gile et de contribuer au développement intégralde la personne et de la société».

Des signes positifs parmi les catholiques chinoisLe cardinal Parolin a conclu en se disant «cons-

cient que l’Accord provisoire entre le Saint-Siègeet la République populaire de Chine du 22 sep-tembre 2018 n’est qu’un point de départ. Deuxans est une période très courte pour évaluer lesrésultats d’un accord». Aux difficultés de démar-rer un processus si nouveau se sont ajoutées cellescréées par le covid-19. Certains résultats «ont étéobtenus, mais pour que le dialogue porte desfruits plus consistants, il est nécessaire de le pour-suivre. C’est pourquoi, pour sa part, le Saint-Siège souhaite que l’Accord soit prolongé, adexperimentum comme il l’a été jusqu’à présent, afinde vérifier son utilité». Le cardinal a affirmé avoirremarqué «au cours de ces deux années, des si-gnes de rapprochement entre les catholiques chi-nois qui ont longtemps été divisés sur de nom-breuses questions». Un signe important car à lacommunauté catholique en Chine «le Pape confiede manière particulière l’engagement de vivre unauthentique esprit de réconciliation entre frères,en accomplissant des gestes concrets qui aident àsurmonter les incompréhensions du passé, notam-ment du passé récent. Ainsi, les fidèles, les catho-liques en Chine pourront témoigner de leur foi,d’un amour authentique et s’ouvrir aussi au dialo-gue entre tous les peuples et à la promotion de lapaix». Enfin, a conclu le secrétaire d’Etat, «unautre objectif très actuel que nous nous sommesfixés avec la signature de l’Accord provisoire entrele Saint-Siège et la République populaire de Chi-ne sur la nomination des évêques: la consolida-tion d’un horizon international de paix, en cetemps où nous assistons à de nombreuses tensionsau niveau mondial».

rolin a rappelé ce que le car-dinal Giovanni Battista Reavait déjà écrit, c’e s t - à - d i reque Benoît XVI avait approu-vé le projet d’accord sur lanomination des évêques qu’iln’a été possible de signerqu’en 2018.

La tentative de Pie XII

L’intervention du cardinals’est articulée à travers l’his-toire, en commençant par laprésence inoubliable du jé-suite Matteo Ricci en Chineà la fin du XVIe siècle, pourrappeler ensuite l’arrivée desmissionnaires du PIME il y aun siècle et demi dans leHenan. Le cardinal Parolin aensuite cité les tentatives dedialogue qui ont eu lieuaprès le début de l’instaura-tion de la République popu-laire de Chine avec l’acces-sion au pouvoir de Mao.

telle solution passait (et pas-se) nécessairement par unaccord entre le Saint-Siège etles autorités de la Répu-blique populaire de Chine.C’est pour cette raison quele Saint-Siège a souligné àplusieurs reprises que l’ob-jectif de l’Accord est avanttout ecclésial et pastoral».De sa mise en œuvre, a ajou-té le cardinal Pietro Parolin,«dépend en effet la possibili-té d’éviter — définitivementnous l’espérons — l’éventua-lité d’autres ordinations illé-gitimes. En d’autres termes,on a voulu œuvrer afind’éviter à l’Eglise en Chinede vivre d’autres expériencessimilaires à celles qui ont étédouloureusement vécues cessoixante dernières années».L’objectif du Saint-Siège estdonc pastoral, «c’e s t - à - d i reaider les Eglises locales afin

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numéro 42, mardi 20 octobre 2020 L’OSSERVATORE ROMANO page 11

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Collège épiscopalNominations

Le Saint-Père a nommé:

6 octobre

S.Exc. Mgr MARIO IC E TA GAV I C A -GO GEASCOA: archevêque métropoli-tain de Burgos (Espagne), le transfé-rant du diocèse de Bilbao.

Né le 21 mars 1965 à Gernika, dio-cèse de Bilbao (Espagne), il a été or-donné prêtre le 16 juillet 1994 pourle diocèse de Cordoue. Le 5 février2008 il a été nommé évêque titulaired’Alava et auxiliaire de Bilbao. Il areçu l’ordination épiscopale le 12avril suivant. Le 24 août 2010 il a ététransféré au siège résidentiel de Bil-bao. Au sein de la conférence épis-copale espagnole, il est membre dela commission exécutive et de lacommission permanente depuis le 3mars 2020.

S.Exc. Mgr CARLOS MANUEL ESCRI-BANO SUBÍAS: archevêque métropoli-tain de Saragosse (Espagne), letransférant du diocèse de Calahorray La Calzada - Logroño.

Né à Carballo (La Coruña), archi-diocèse de Saint-Jacques de Com-postelle (Espagne), le 15 août 1964, ila été ordonné prêtre pour Saragossele 14 juillet 1996. Nommé évêque deTeruel y Albarracín le 20 juillet 2010,il a reçu l’ordination épiscopale le 26septembre suivant. Le 13 mai 2016 ila été transféré à Calahorra y La Cal-zada-Logroño. Au sein de la confé-rence épiscopale, il est depuis 2020président de la commission pour leslaïcs, la famille et la vie et est mem-bre de la commission permanente.Depuis 2015, il est conseiller de Ma-nos unidas.

le père JAV I E R VI L A N O VA PELLISA,du clergé du diocèse de Tortosa etrecteur du grand séminaire interdio-césain de Catalogne (Espagne):évêque titulaire d’Empúries et auxi-liaire de l’archidiocèse métropolitainde Barcelone (Espagne).

Né à La Fatarella, province deTarragona et diocèse de Tortosa (Es-pagne), le 23 septembre 1973, il a étéordonné prêtre le 22 novembre 1998.

7 octobre

S.Exc. Mgr RO S A LV O CORDEIRO DELIMA, jusqu’à présent évêque titulai-re de Castello di Tatroporto et auxi-liaire de Fortaleza (Brésil): évêquedu diocèse d’Itapipoca (Brésil).

Né le 25 janvier 1962 à União dosPalmares, Alagoas (Brésil), il a étéordonné prêtre le 1er novembre 1992,à Arujá, diocèse de Mogi das Cru-zes. Le 2 février 2011 il a été nomméévêque titulaire de Castello di Tatro-porto et auxiliaire de l’archidio cèsemétropolitain de Fortaleza. Au sein

de la conférence épiscopale du regio-nal nordeste 1, il est membre de lacommission pour le service de lacharité, justice et paix.

10 octobre

le père ROBERTO FERRARI, du clergédu diocèse de Villa de la Concep-ción del Río Cuarto (Argentine) etrecteur du grand séminaire JesúsBuen Pastor: évêque auxiliaire del’archidiocèse métropolitain de Tucu-mán (Argentine), lui assignant lesiège titulaire de Pinhel.

Né le 29 novembre 1965 à Ucacha,diocèse argentin de Villa de la Con-cepción del Río Cuarto, il a été or-donné prêtre le 19 septembre 1993.

Mgr JUSTO RODRÍGUEZ GA L L E G O,du clergé de l’archidiocèse métropo-litain de Tolède (Espagne) et vicairegénéral du diocèse de Zárate-Cam-pana (Argentine): évêque auxiliairedu diocèse de Zárate-Campana (Ar-gentine), lui assignant le siège titu-laire de Nomento.

Né le 29 novembre 1954 à DonBenito, archidiocèse métropolitainde Mérida-Badajoz, en Espagne, il aété ordonné prêtre pour l’a rc h i d i o -cèse de Tolède le 6 juillet 1980.

12 octobre

S.Exc. Mgr OMAR ALBERTO SÁN-CHEZ CUBILLOS, O.P., jusqu’à pré-dent évêque de Tibú (Colombie): ar-chevêque métropolitain de Popayán(Colombie).

Né le 20 septembre 1963 à Cogua,diocèse de Zipaquirá (Colombie), ila émis sa profession religieuse solen-nelle chez les frères prédicateurs le 2février 1989 et a été ordonné prêtredominicain le 17 février 1990. Le 8juin 2011 il a été nommé évêque deTibú et a reçu l’ordination épiscopa-le le 8 août de la même année.

Démissions

Le Saint-Père a accepté la démissionde:

6 octobre

S.Exc. Mgr FIDEL HERRÁEZ VEGAS,qui avait demandé à être relevé de lacharge pastorale de l’archidio cèsemétropolitain de Burgos (Espagne).S.Exc. Mgr VICENTE JIMÉNEZ ZA-MORA, qui avait demandé à être rele-vé de la charge pastorale de l’a rc h i -diocèse métropolitain de Saragosse(Espagne).

7 octobre

S.Exc. Mgr ROBERTO CAV U T O,O.F.M.C A P., qui avait demandé à êtrerelevé de la charge pastorale du dio-cèse d’Itapipoca (Brésil).

Audiencesp ontificales

Le Saint-Père a reçu en au-dience:

8 octobre

S.Em. le cardinal LUISFRANCISCO LADARIA FER-RER, préfet de la Congréga-tion pour la doctrine de lafoi;Leurs Excellences NN.SS.:

— PIERGIORGIO BERTOL-DI, archevêque titulaire deSpello, nonce apostoliqueau Mozambique;

— GIUSEPPE SCIACCA,évêque titulaire de Fondi,secrétaire du Tribunal su-prême de la Signature apos-tolique.

S.E. M. NICOLAS CH. PATA -KIAS, ambassadeur deGrèce, en visite de congé.

9 octobre

S.Exc. Mgr SA LVAT O R E FI-SICHELLA, archevêque titu-laire de Voghenza, présidentdu Conseil pontifical pourla promotion de la nouvelleévangélisation;M. VINCENZO BU O N O M O,recteur magnifique de l’uni-versité pontificale du La-tran;M. JULIO CÉSAR CABALLE-RO MO R E N O, chef de bu-reau de la Commission pon-tificale pour l’Amérique lati-ne.

10 octobre

S.Em. le cardinal MARCOU E L L E T, préfet de la Con-grégation pour les évêques.Mme BE AT R I Z GUTIÉRREZMÜLLER, épouse du prési-dent de la République duMexique.

12 octobre

S.E. M. FRANCISCO JAV I E RBAU T I S TA LARA, ambassa-deur du Nicaragua, à l’o cca-sion de la présentation deses Lettres de Créance.Leurs Excellences NN.SS.:

— VITO RA L L O, arche-vêque titulaire d’Alba, non-ce apostolique au Maroc;

— HEINER WILMER,évêque de Hildesheim (Ré-publique fédérale d’Allema-gne);

S.Em. le cardinal GEORGEPELL, préfet émérite du se-crétariat pour l’économie.

Curiero m a i n e

Nominations

Le Saint-Père a nommé:

7 octobre

le père PIETRO ANGELO MURONI, do-yen de la faculté de théologie de l’uni-versité pontificale urbanienne à Rome;sœur KAT I A DE SIMONE, E.F., officialede la secrétairerie d’Etat et experte enliturgie: consulteurs du bureau des cé-lébrations liturgiques du SouverainPontife.

9 octobre

le professeur ST E FA N O PI C C O L O, profes-seur de biologie moléculaire à l’univer-sité des études de Padoue (Italie):membre ordinaire de l’Académie ponti-ficale des Sciences.

Né à Padoue (Italie) le 19 mai 1967,il a été chercheur aux Etats-Unis avantd’être professeur de biologie moléculai-re à l’université de Padoue. Il a reçu di-vers prix dans le domaine de la sciencemoléculaire et est l’auteur de nombreu-ses recherches scientifiques dans ce do-maine.

10 octobre

Les professeures ROSSANA MARTORELLIet MARIA CARLA SOMMA: membres dela Commission pontificale d’a rc h é o l o -gie sacrée.

12 octobre

la professeure MA R YA N N E WO L F, pro-fesseure de sciences neurologiques àl’«University of California» (Etats-Unisd’Amérique): membre ordinaire del’Académie pontificale des sciences.

Née le 25 octobre 1947 à SouthBend, Indiana, Etats-Unis d’Améro que,elle dirige actuellement le «Center forDyslexia, Divers Learners and SocialJustice» de l’université de Californie àLos Angeles. Elle s’occupe en particu-lier du rapport entre sciences neurolo-giques et éducation, thèmes qu’elle adéveloppés dans de nombreuses publi-cations scientifiques.

15 octobre

S.Exc. Mgr MARCELLO SE M E R A R O, jus-qu’à présent évêque d’Albano et secré-taire du «Conseil des cardinaux pouraider le Saint-Père dans le gouverne-ment de l’Eglise universelle et pourétudier un projet de révision de laConstitution apostolique “Pastor Bo-nus” sur la Curie romaine»: préfet de laCongrégation pour les causes dessaints.le professeur REINHARD GENZEL,directeur du «Max Plank Institute forExtra terrestrial Physics», à Garching(République fédérale d’Allemagne):membre ordinaire de l’Académie ponti-ficale des sciences.

Page 11: 1,00 € Numéros précédents 2,00 € OL’ S S E RVATOR E ......Dans les psaumes, cependant, la souffrance se transforme enquestion. De la souffrance à la question. Et parmi les

page 12 L’OSSERVATORE ROMANO mardi 20 octobre 2020, numéro 42

Message à la FA O

La faim, tragédie et hontepour l’humanité

«Pour l’humanité, la faim n’est pas seulement unetragédie mais aussi une honte». La dénonciation duPape François a retenti dans le Message vidéo enlangue espagnole avec lequel il est intervenu à lacérémonie qui s’est déroulée le vendredi 16 octobre àRome, au siège de l’Organisation des Nations uniespour l’alimentation et l’agriculture (Fao), à l’occasionde la journée mondiale de l’alimentation, cette année,75e anniversaire de la création de l’o rg a n i s a t i o n :

A S.E. M. Qu DonguyDirecteur général de la FA O

Le jour où la FA O célèbre le 75e anniversaire de sacréation, je désire vous saluer, ainsi que tous lesmembres qui composent celle-ci. Votre mission estbelle et importante, car vous travaillez avec l’ob-jectif de vaincre la faim, l’insécurité alimentaire etla malnutrition.

Le thème proposé cette année pour la journéemondiale de l’alimentation est significatif: «Culti-ver, nourrir, préserver», et cela «Ensemble. Nosactions sont notre avenir». Ce thème souligne lanécessité d’agir ensemble et avec une ferme volon-

té pour pouvoir engendrer des initiatives qui amé-liorent l’environnement autour de nous et pro-meuvent l’espérance de nombreuses personnes etde nombreux peuples.

Au cours de ces 75 ans, la FA O a appris qu’il nesuffit pas de produire de la nourriture, mais qu’ilest également important de garantir que les sys-tèmes alimentaires soient durables et offrent desrégimes salutaires et accessibles à tous. Il s’agitd’adopter des solutions innovatrices qui puissenttransformer notre mode de production et deconsommation des aliments pour le bien-être denos communautés et de notre planète, en renfor-çant ainsi la capacité de récupération et la durabi-lité à long terme.

C’est pourquoi, en cette période de grande dif-ficulté cause par la pandémie de Covid-19, il estencore plus important de soutenir les initiativesmises en œuvre par des organisations comme laFA O, le Programme alimentaire mondial (PA M ) etle Fonds international pour le développementagricole (FIDA) dans le but de promouvoir uneagriculture durable et diversifiée, soutenir les peti-tes communautés agricoles et coopérer au déve-loppement rural des pays les plus pauvres.

Nous sommes conscients qu’il faut répondre àce défi à une époque qui est pleine de contradic-tions: d’un côté, nous sommes les témoins d’unprogrès sans précédents dans les divers domainesde la science; de l’autre, le monde est confronté àde multiples crises humanitaires. Nous constatonsmalheureusement que, selon les statistiques lesplus récentes de la FA O, malgré les efforts accom-plis pendant les dernières décennies, le nombre depersonnes qui luttent contre la faim et l’insécuritéalimentaire augmente, et la pandémie actuelle ag-gravera encore davantage ces chiffres.

Pour l’humanité, la faim n’est pas seulementune tragédie mais aussi une honte. Elle est provo-quée, en grande partie, par une distribution iné-gale des fruits de la terre, à laquelle s’ajoutent lemanque d’investissements dans le secteur agricole,par les conséquences du changement climatiqueet par l’augmentation des conflits dans diverseszones de la planète. D’autre part, des tonnesd’aliments sont mises au rebut. Face à cette réali-té, nous ne pouvons pas rester insensibles ou de-meurer paralysés. Nous sommes tous responsa-bles.

La crise actuelle nous démontre que des politi-ques et des actions concrètes pour éradiquer lafaim dans le monde sont nécessaires. Parfois, lesdiscussions dialectiques ou idéologiques nouséloignent de la réussite de notre objectif et nouspermettons que nos frères et sœurs continuent àmourir par manque de nourriture. Une décisioncourageuse serait de constituer avec l’argent quel’on emploie pour les armes et pour les autres dé-penses militaires, «un Fonds mondial» pour pou-voir éliminer définitivement la faim et contribuerau développement des pays les plus pauvres. Decette manière, on éviterait de nombreuses guerreset l’immigration de tant de nos frères et de leursfamilles, qui sont contraints d’abandonner leurmaison et leur pays pour chercher une vie plusdigne (cf. Fratelli tutti, n. 189 et 262).

Monsieur le directeur général, en exprimantmon souhait que l’activité de la FA O soit toujoursplus incisive et féconde, j’invoque la Bénédictionde Dieu sur vous et sur ceux qui coopèrent à cet-te mission fondamentale de cultiver la terre, nour-rir les affamés et sauvegarder les ressources natu-relles, de manière à ce que tous puissent vivre di-gnement dans le respect et l’amour. Merci.

Fratelli tutti, même ceux «de trop»ANDREA MONDA

Le texte de la lettre encyclique Fratelli tutti, latroisième du Pape François, publiée le 4 octo-bre, a suscité, comme cela était prévisible, unesérie de réactions différentes, très variées. Il y aégalement une nouvelle, qui arrive de l’a u t recôté de l’océan, que l’on ne peut pas définircomme une «réaction» mais plutôt comme lesymptôme de combien il est nécessaire au-j o u rd ’hui de redécouvrir le sens même de lafraternité, également dans son acception laplus stricte, littérale. Il s’agit d’une campagnepublicitaire qui en cette période s’affiche dansles rues et sur les murs des immeubles au Ca-nada et aux Etats-Unis et qui souligne unementalité, une vision du monde, marquée parla fermeture qui est engendrée par la peur del’altérité et par le manque de confiance que letexte du Pape invite à surmonter avec «uncœur ouvert au monde entier», comme le dit letitre du quatrième chapitre de Fratelli tutti. Lethème affronté par la campagne promue parl’association OnePlanetOneChild est précisémentcelui de la fraternité, vue dans des termes trèssimples (du reste, c’est la fin de la publicité quifrappe avec un seul message). L’affiche enquestion montre un visage, celui d’un enfantde couleur avec la bouche et les grands yeuxouverts, et en dessous s’étale en grand unephrase claire et simple: «Le don d’amour leplus grand que tu peux faire à ton premier en-fant est de ne pas en avoir un autre». Il nepeut pas y avoir d’opposition plus forte quecelle-là: si le Pape dit «f ra t e l l i » «fratelli tutti»,l’association «Une planère-Un enfant» répondpar «aucun frère» car deux sont déjà trop.Caïn a gagné.

Au numéro 19 de l’encyclique, le Pape affir-me que: «La baisse de la natalité, qui pro-voque le vieillissement des populations, asso-ciée à l’abandon des personnes âgées à une so-litude douloureuse, est une manière subtile designifier que tout se réduit à nous, que seulscomptent nos intérêts individuels» et il citeensuite une réflexion amère prononcée dans lediscours au Corps diplomatique accrédité prèsle Saint-Siège du 13 janvier 2014: «Ce ne sontpas seulement la nourriture ou les biens super-flus qui sont objet de déchets, mais souvent lesêtres humains eux-mêmes». Il existe donc des

«enfants déchets», ceux qui sont différents etmoins chanceux que les «enfants program-més»: une autre affiche de la même associationmontre un couple d’époux joyeusement assispar terre, appuyés contre un mur de leur mai-son, portant encore leurs habits de cérémonie,et l’inscription placée à côté, en lettres capita-les, qui dit «We’re planning ONE!», «Nous enprogrammons UN». L’enfant comme un pro-duit de laboratoire selon la logique du «le pre-mier est le bon!», qui est aussi le dernier. Deuxvisions de l’homme et de la vie diamétralementopposées sont en jeux, celle du produit et celledu don, qui tournent toutes les deux autour duthème, qui devient alors glissant, de l’a m o u r,en posant la question de savoir quel estl’amour le plus grand. Pour les créatifs de lapublicité, le message à transmettre est quel’amour le plus grand s’exprime en termes né-gatifs, en Ne faisant pas quelque chose, enn’engendrant pas un (autre) enfant, parce qu’ilserait précisément un «autre» et donc «detrop». Pour les chrétiens, c’est le contraire quiest vrai, l’amour est positif, effusif, inclusif etgénératif et il a un lien étroit avec la vie enten-due non comme un «risque» à éviter, mais àcourir, poussés par la force d’un don en excé-dent à faire circuler: «Il n’est pas de plusgrand amour que de donner sa vie pour sesamis» (Jn 15, 13).

Conseil des cardinaux

15 octobre

Sa Sainteté le Pape François a confirmé coordi-nateur du «Conseil des cardinaux pour aider leSaint-Père dans le gouvernement de l’Egliseuniverselle et pour étudier un projet de révisionde la Constitution “Pastor Bonus” sur la Curieromaine», S.Em. le card. OSCAR ANDRÉS RO-DRÍGUEZ MARADIAGA, archevêque de Tegucigal-pa (Honduras). Le Saint-Père a en outre confir-mé membres du Conseil susmentionné, LeursEminences MM. les cardinaux: PIETRO PARO-LIN, secrétaire d’Etat; SEÁN PAT R I C K O’MA L L E Y,archevêque de Boston (Etats-Unis d’Amérique);

OS WA L D GRACIAS, archevêque de Bombay (In-de); REINHARD MARX, archevêque de Munich etFreising (République fédérale d’Allemagne); etGIUSEPPE BE R T E L L O, président du gouvernoratde l’Etat de la Cité du Vatican.

Le Souverain Pontife a également nommémembre du même Conseil, S.Em. le card.FRID OLIN AMBONGO BE S U N G U, archevêque deKinshasa (République démocratique duCongo); et il a nommé secrétaire du mêmeConseil, S.Exc. Mgr MARCO ME L L I N O, évêquetitulaire de Cresima, jusqu’à présent secrétaire-adjoint.