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Objectif qualité de vie La quête pour la qualité de vie des patients atteints d’un cancer est une action de tous les instants. C’est dans cette logique que les équipes soignantes trouvent un rôle essentiel. L a prise en charge palliative en oncologie n’est pas une prise en charge de la fin de vie. Elle peut intervenir dès l’annonce du dia- gnostic ou, pour certains patients, après un long parcours de rémis- sions et de rechutes. Les soins qui sont prodigués ont pour objectif es- sentiel de préserver la qualité de vie, ce qui signifie bien davantage que prolonger la durée de vie. Ces soins médicaux et infirmiers revêtent quatre spécificités. Ils sont : adaptés au corps trahi par la maladie ; – donnés à une personne considérée comme un “tout” bio-psycho- social et spirituel ; toujours en relation avec la famille ; – donnés par une équipe pluridisciplinaire de professionnels. Compte-rendu Les Rencontres Scientifiques et Techniques Infirmières (RSTI) se sont déroulées les 6 et 7 novembre 2001 à La Villette, à Paris. Compte-rendu de ces journées de formation qui s’adressent aux infirmières travaillant aussi bien en établissements hospitaliers qu’au domicile du patient. 19 ●●● Professions Santé Infirmier Infirmière - N o 33-34 - janvier-février 2002 Sommaire • Ur 11 es Rencontres Scientifiques et Techniques Infirmières Cancérologie Cancérologie Sommaire Cancérologie Diabète Vasculaire Neurologie Hygiène Chirurgie 11 es Rencontres Scientifiques et Techniques Infirmières

11èmes Rencontres Scientifiques et Techniques Infirmières · sabeth Viault, nous recevons et apprenons de ceux que nous aidons, pour que d’autres puissent bénéfi-cier d’une

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  • Objectif qualité de vieLa quête pour la qualité de vie des patients atteints d’un cancer est une action de tous les instants.C’est dans cette logique que les équipes soignantestrouvent un rôle essentiel.

    L a prise en charge palliative en oncologie n’est pas une prise encharge de la fin de vie. Elle peut intervenir dès l’annonce du dia-gnostic ou, pour certains patients, après un long parcours de rémis-sions et de rechutes. Les soins qui sont prodigués ont pour objectif es-sentiel de préserver la qualité de vie, ce qui signifie bien davantage queprolonger la durée de vie. Ces soins médicaux et infirmiers revêtentquatre spécificités. Ils sont : – adaptés au corps trahi par la maladie ; – donnés à une personne considérée comme un “tout” bio-psycho-social et spirituel ; – toujours en relation avec la famille ; – donnés par une équipe pluridisciplinaire de professionnels.

    Compte-renduLes Rencontres Scientifiques et Techniques Infirmières (RSTI) se sont déroulées les 6 et 7 novembre 2001 à La Villette, à Paris. Compte-rendu de ces journées de formation qui s’adressentaux infirmières travaillant aussi bien en établissementshospitaliers qu’au domicile du patient.

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    Professions Santé Infirmier Infirmière - No 33-34 - janvier-février 2002

    Sommaire

    • Ur

    11es Rencontres Scientifiqueset Techniques Infirmières

    CancérologieCancérologieSommaire• Cancérologie• Diabète• Vasculaire• Neurologie• Hygiène• Chirurgie

    11es Rencontres Scientifiqueset Techniques Infirmières

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    Bien-être et espoir« Tous les soins apportés à ces patients ne peuventêtre donnés que si le corps malmené par la maladieest calme et apaisé, soulignent Agnès Chauveau etÉlisabeth Viault, infirmières au CHU de Poitiers.Dans ce contexte, l’évaluation des douleurs et leurstraitements sont donc nécessairement la clé de voûted’une prise en charge adaptée et personnalisée. »Les soins de nursing, base de la relation qui vase tisser entre le malade, les soignants et la fa-mille, devront être un moment de bien-être etd’espoir, tout comme l’approche humaine apai-sante, rassurante et relaxante du toucher. Le massage, lui, permet la conscience corpo-relle, et favorise l’émergence des émotions etdes sensations. « C’est une communication nonverbale, donc une écoute présente, qui autorise lapersonne massée à exprimer son ressenti et ses angoisses, à valoriser cette personne dans son inté-gralité corporelle et physique », précisent les deuxinfirmières.

    Mettre en œuvre le projet de vie« La qualité de vie passe aussi, ajoutent-elles, parla possibilité de se “recréer”, de réaliser ses “envies”.Quoi de plus motivant, pour la personne dont lecorps et l’énergie sont aspirés par la maladie, qued’avoir une équipe pluridisciplinaire qui met en har-monie, avec l’aide de sa famille, son projet de vie ? ».Ce dernier peut prendre diverses formes : per-mettre au malade, pour le temps qui reste, de re-vivre encore une fois avec les siens dans un en-

    vironnement familier, d’entretenir son corps pardes soins esthétiques, de reprendre confiance eneffectuant quelques pas dans le couloir, de conti-nuer à déguster ses petits plats favoris, ou en-core d’agir selon ses croyances et ses valeurs.« Chaque jour, concluent Agnès Chauveau et Éli-sabeth Viault, nous recevons et apprenons de ceuxque nous aidons, pour que d’autres puissent bénéfi-cier d’une prise en charge personnalisée et que, jus-qu’au bout, ils réalisent leurs “envies” avec leurs fa-milles et leurs amis. »

    Stéphane HenriD’après les propos tenus

    lors de la conférence organisée

    avec le soutien des laboratoires GlaxoSmithKline

    Le malade isoléL’isolement du patient immunodépriméest une tendance qui se généralise. La 4e Réunion du GRIOH*, consacrée à ce thème, en a abordédeux aspects : le vécu psychologique,d’une part, et l’aide alimentaire,d’autre part.

    I nitialement réservé aux patients greffés ouen attente d’allogreffe, l’isolement du patientest, depuis une dizaine d’années, une techniquede plus en plus utilisée pour des autogreffes etdes chimiothérapies lourdes. « Dans le mêmetemps, indique Frédérique Topall-Rabanes, psy-chologue-psychanalyste au service de greffe demoelle de l’hôpital Saint-Louis (AP-HP), on ob-serve aussi le mouvement inverse puisque, auxÉtats-Unis, le dispositif utilisé pour les allogreffesse simplifie, les greffes s’effectuant le plus sou-vent en chambre banale, sans flux laminaire, etmême sans surchaussure et surblouse. Il y a donclieu de s’interroger sur l’impact des mesures d’iso-lement, sur le plan psychique comme sur le plan somatique ». Selon des travaux anglo-saxons, les effets psy-chiques de l’isolement sont très proches de ladétresse émotionnelle suscitée par la greffe. Onpeut donc effectivement questionner la spéci-ficité de l’impact de l’isolement. « Notre hypo-

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    Professions Santé Infirmier Infirmière - No 33-34 - janvier-février 2002

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    * Groupe de Recherche des Infirmières en Oncologie et

    Hématologie.©D

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    oult

    Aux 11es RSTI, visite des stands

    après une conférence...

  • thèse, reprend Frédérique Topall-Rabanes, estque, dans le contexte d’une maladie à pronostic réservé, les angoisses exprimées à propos de l’iso-lement sont en fait un déplacement de l’angoissede mort ».

    Des manifestations stéréotypéesDans ce même contexte, une étude déjà an-cienne, effectuée au moyen d’enregistrements vi-déo des réactions de jeunes enfants à leur entréeen bulle, pendant leur séjour sous bulle et à lasortie de la bulle, permet d’expliquer les réac-tions spécifiques à l’isolement. Cette étudemontre que, chez le très jeune enfant, on ob-serve, dans la période qui suit l’entrée en bulle,un état de sédation et de calme qui précède unepériode d’exploration des acquisitions. Au mo-ment de la sortie, tous les enfants présentent desexpressions d’angoisse et refusent de sortir de labulle. Ces manifestations, variables en intensité,sont stéréotypées en durée. Elles sont indépen-dantes de l’âge de l’enfant et de la durée du confi-nement. « Selon notre expérience clinique auprès depatients adultes et enfants greffés sous flux laminaire,on peut observer des comportements comparables,explique Frédérique Topall-Rabanes. Ainsi, alorsque l’angoisse des patients s’exprime de manière pri-vilégiée à propos de l’isolement avant l’hospitalisa-tion, cette période est paradoxalement une périodede calme, de récupération, où l’angoisse de mort estcomme suspendue. L’isolement et le soutien émotion-nel apporté par l’équipe soignante ont donc une fonc-tion de contenant psychique facilitant la prise encharge du patient ».

    Deux types de contaminationLes patients isolés, très immunodéprimés dufait de leur maladie ou des traitements qu’ils re-çoivent, nécessitent aussi que des mesures d’hy-giène alimentaire stricte soient prises. En effet,certains aliments comportent un risque decontamination, soit en raison du produit lui-même, soit en raison des manipulations qu’ilsont subies. Une étude menée par le laboratoirede microbiologie de l’hôpital Saint-Louis a per-mis d’évaluer la “contamination initiale” des ali-ments, cette contamination pouvant être dedeux types : bactérienne (pour les aliments quipeuvent avoir été contaminés par contact ma-nuel, par du matériel de cuisine souillé, etc.) oufongique, en particulier à Aspergillus. Cette der-nière, qui peut s’avérer particulièrement dan-gereuse pour les patients, a été plus spéciale-ment étudiée afin de déterminer précisémentles aliments à risque. Des procédures de dé-contamination des aliments ou de leurs embal-

    lages ont ensuite été testées et mises en place. Sur le plan des indications médicales, il existedeux types de prescription alimentaire selon ledegré d’immunodépression du patient. « Le pre-mier, décrit Françoise Funel, diététicienne, estl’alimentation protégée, dont le but est de n’appor-ter au patient aucun germe pathogène tout en ré-duisant l’apport en germes non pathogènes. Elle doitêtre proposée aux patients en aplasie (PN inférieurà 500/mm3) consécutive à une chimiothérapie. Ledeuxième est l’alimentation décontaminée, dont lebut est de n’apporter aucun germe pathogène et delimiter au maximum l’apport en germes non patho-gènes (flore microbienne totale non pathogène infé-rieure à 10 bactéries par gramme d’aliment). Elleconcerne les patients en aplasie profonde après in-tensification pour allogreffe ou autogreffe de moelleosseuse ou de cellules souches, après chimiothérapietrès hématotoxique (leucémie aiguë myéloïde del’enfant) ou porteurs d’une aplasie médullaire idio-pathique grave. Ces patients reçoivent une déconta-mination contrôlée du tube digestif ».

    Éduquer et informer le patientÉvidemment, l’hygiène du personnel doit êtrestrictement respectée pendant la préparation etla distribution des aliments : lavage des mains,port de masque, charlotte, tablier, manipulationssous flux laminaire pour les patients en alimen-tation décontaminée. « Il est aussi possible, ajouteFrançoise Funel, d’améliorer l’alimentation de cespatients en autorisant les familles à apporter des ali-ments ou préparations “maison”. Mais, pour évitertout risque, il est indispensable de leur fournir la listedes aliments autorisés et de préciser leurs conditionsde préparation et de transport ». De la même façon, après la sortie de l’hôpital, desconseils écrits, comportant des listes d’aliments,des méthodes de préparation et des procéduresd’hygiène et de nettoyage sont remis aux patientsqui doivent continuer à appliquer les principesd’une alimentation “protégée”. Sont notammentconcernés les patients allogreffés (pendant lescent jours qui suivent la réinjection), les patientsautogreffés (pendant le mois suivant la sortie del’hôpital) et les patients qui restent chez eux pen-dant une période d’aplasie. « Cette éducation etcette information du patient sortant d’une périoded’isolement sont indispensables pour que le retour àdomicile se fasse dans les meilleures conditions »,conclut Françoise Funel.

    Stéphane HenriD’après les propos tenus

    lors de la conférence organisée

    avec le soutien des laboratoires GlaxoSmithKline.

    21Professions Santé Infirmier Infirmière - No 33-34 - janvier-février 2002

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    Ne pas nier la fatigue« La fatigue existe,insiste Pascale Dielenseger, présidente de l’Association françaisedes infirmières de cancérologie (AFIC).Ce n’est pas une plainte incongrue ».Il reste à bien intégrer cette dimensiondans toute démarche clinique.

    L a fatigue est devenue le premier sujet de plaintepour 58 à 80 % des patients cancéreux, selonles études américaines », précise le Dr MarioDi Palma, de l’Institut Gustave-Roussy (IGR), àVillejuif. Les patients se plaignent bien plus dela fatigue que de l’alopécie, de la douleur oudes nausées.

    L’approche clinique Toute démarche clinique implique de recon-naître la fatigue. Le soignant peut faire appel àl’observation. « On observe la lenteur des gesteset des déplacements, précise Pascale Witz, infir-mière à l’IGR et membre de l’AFIC. On observeles essoufflements, la pâleur, une voix faible, un vi-sage éteint... Les patients peuvent utiliser des motssusceptibles de nous guider comme “démotivé”,“épuisé”, “manque d’énergie”, “ennui”, “faible” ou“coup de pompe”...».

    Les grilles d’évaluationIl existe des questionnaires visant à évaluer la fatigue. « Le questionnaire de Piper, créé en 1987,a été traduit en français par l’IGR, explique leDr Di Palma. Il comporte 27 questions sous formed’échelles visuelles analogiques. Il explore quatre dimensions : l’intensité de la fatigue et son impactphysique et social, son ressenti dans la vie person-nelle, ses caractéristiques physiques ou mentales,son impact psychologique. » Mais ce question-naire, précis, complet, constitue avant tout unoutil de recherche. « En revanche, le Brief FatigueInventory ne comporte que 10 questions simples,souligne le Dr Di Palma. On y répond par “oui”ou “non”, par exemple, à la question “Êtes-vous fa-tigué ?” » C’est un outil moins précis, mais pluspratique. La règle demeure de toujours utiliserun questionnaire validé de manière scientifique,dans la langue utilisée.

    Ni réponses toutes faites, ni déni« Nous ne pouvons pas toujours mener des ac-tions criantes d’efficacité en matière de fatigue,concède le Dr Di Palma. Mais il est normal d’en parler. D’autant que ce n’est pas une fatalité.On peut agir dans certains cas. » La rechercheaide à mieux aborder ce mal jadis ignoré. « Audébut, l’industrie pharmaceutique a financé beau-coup d’études sur l’anémie, poursuit-il. On a pu commencer à tirer le fil de la pelote. Ces tra-vaux ont conduit à d’autres facteurs liés à lafatigue : l’alimentation, l’hydratation, les troublesdu sommeil, le manque d’activité, les effets des traitements, etc. »

    Spécial RSTI

    Professions Santé Infirmier Infirmière - No 33-34 - janvier-février 2002

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    oult

    Une assistancenombreuse et concentrée

    écoute les intervenantsd’une conférenceen cancérologie.

  • Outre la qualité de leur approche clinique, deséquipes qui peuvent proposer au patient l’inter-vention d’un psychologue, d’un psychanalyste oud’un psychiatre pourront mieux aider le patient. Il ne faut pas oublier le rôle de l’alimentation.« Mais, trop souvent, on fait appel à nous quand le pa-tient a atteint un état général très dégradé. » La dié-téticienne propose in extremis au patient des pré-parations ou des compléments alimentaires qu’ilrefuse. S’ils avaient été proposés plus tôt, le patientles aurait trouvés meilleurs, et, quand il en auraitvraiment eu besoin, il en aurait connu les mérites.

    Marc BlinD’après les propos tenus

    lors de la conférence organisée en collaboration avec l’AFIC

    (Association française des infirmiers en cancérologie)

    et le soutien de Ortho Biotech (division de Janssen-Cilag).

    Saga de la lutte anti-douleur à l’hôpitalGeneviève Borde-Muller se veut une “soixante-huitardede la douleur”. Elle a vu la créationde la première consultation douleuren 1983 à l’Institut Curie (Paris). Elle y est aujourd’hui cadre supérieur infirmier.

    L e patient hospitalisé pour des douleurs souffredepuis plusieurs jours ou semaines, dit Gene-viève Borde-Muller, cadre supérieur infirmierd’une unité spécialisée dans les cancers du seinet les cancers gynécologiques, à l’Institut Curie,à Paris. Leur souffrance peut être telle que certainssont prêts à attenter à leur vie ! S’ils ont enfin trouvéle sommeil, soulagés par les traitements, je ne veuxpas qu’on les réveille s’ils dorment à six heures dumatin, afin de faire le ménage dans la chambre. Ilest possible d’être charitable : faire cet effort d’or-ganisation pour trois patients sur vingt-cinq resteréalisable.»Pour favoriser une meilleure approche clinique,Geneviève Borde-Muller participe à la créationd’un questionnaire d’auto- et hétéro-évaluationde la douleur. « Il est fiable et simple d’utilisation,dit-elle. Il faut dix à quinze minutes pour le rem-plir. » Ce questionnaire comporte quatre axes :l’évaluation de la douleur, sa traduction dans le

    langage, dans l’activité, ainsi que dans le som-meil. La graduation obtenue dans chaque do-maine permet de dessiner un losange, dont lataille se trouvera réduite si le malade souffremoins, augmentée s’il souffre plus. « Pour le lan-gage, par exemple, l’envahissement complet de ce-lui-ci par la douleur correspond à la graduation 5,explique Geneviève Borde-Muller. L’envahisse-ment partiel correspond à la note 4. Dans ce cas, lepatient parle à tout le monde de sa douleur, maisreste capable de parler d’autre chose. La plaintespontanée, mais peu fréquente, correspond à lanote 3. Nous notons 2 la plainte émise uniquementà l’interrogatoire, et 1 l’absence de plainte même àl’interrogatoire. Pour le sommeil, la graduation va-riera selon que le patient dort, se réveille une ou plu-sieurs fois par nuit, ou ne parvient pas à dormir .»D’autres critères que ceux de cette représenta-tion graphique entrent en jeu. « C’est pourquoi lesinfirmières relèvent aussi la présence ou non de nausées, de vomissements, de constipation, de som-nolence, de désorientation, de troubles respiratoiresou urinaires. »Ainsi, l’évaluation comme les traitements de ladouleur évoluent. Geneviève Borde-Muller a vul’essor et le développement des progrès en ma-tière de prise en charge de la douleur et de soinspalliatifs. « Mais j’en veux tout de même un peu auxmédias, dit-elle. Ils ont un peu trop dit que l’on pou-vait soigner toutes les douleurs. Or, même si nousavons 98 % de réussite, il nous reste tout de même2 % d’échecs. »

    Marc BlinD’après les propos tenus lors de la conférence

    organisée avec le soutien des laboratoires Janssen-Cilag.

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    L’occasion d’une prise de contact avec les publicationsspécialisées à destination des infirmières.

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    Douleur et rôlede l’infirmière libéraleCertains patients de cancérologienécessitent une prise en chargede la douleur à domicile. Quelle estalors la place de l’infirmière libérale ? C’est à cette question qu’a tentéde répondre Annie Naille, infirmière libérale et membre du réseau Quiétude, à Paris.

    C es patients nous sont adressés par l’hôpital dans30 % des cas, précise Annie Naille, par des mé-decins de ville dans 10 % des cas, et par des presta-taires de service dans 60 % des cas. » (1)L’infirmière libérale est payée à l’acte : entretiende cathéters centraux, surveillance et remplis-sage de PCA (analgésie contrôlée par le patient),soins de nursing, injections, pansements, etc.« Comme documents, je dispose d’une ordonnanceet de renseignements administratifs, plus rarementd’un protocole, dit Annie Naille. Enfin, je ne dis-pose que dans 2 % des cas d’un réel compte-rendud’hospitalisation. »Plusieurs missions lui incombent alors. « Notretravail, c’est d’organiser et de prévoir, poursuit-elle. Quand le patient sort de l’hôpital, parexemple, il faut vérifier que nous disposons detoutes les ordonnances et de tout le matériel. C’estaussi de coordonner et de transmettre. Il fautcontacter son médecin traitant de ville. En outre,notre tâche consiste à évaluer et réévaluer les be-soins à chaque fois. » Annie Naille travaille avecun plan de soins. Elle estime jouer un rôle de“sonnette d’alarme”. « Il faut veiller à ce que cer-tains médicaments, comme la morphine, soient bienpris aux heures indiquées, explique-t-elle. Le pa-tient ne doit pas non plus dépasser les doses pré-vues. » Les entretiens avec le patient et l’entou-rage doivent relever tous les éventuels signesd’alerte sur la fatigue, l’appétit ou l’élimination,qui seront transmis au médecin traitant.Reste la relation d’aide et l’écoute. Se rendant àdomicile pour remplir une pompe, Annie Nailleécoute le patient et rencontre souvent lesproches. Il faut trouver, pour chacun, les expli-cations appropriées sur ce qu’elle va faire. Il

    faut expliquer et réexpliquer le traitement. « Larelation d’aide, ajoute l’infirmière libérale, c’estparfois laisser son numéro de téléphone à un malade qui ne l’utilisera pas, mais qui se sentiramieux en l’ayant. »

    Marc BlinD’après les propos tenus

    lors de la conférence organisée

    avec le soutien des laboratoires Janssen-Cilag.

    Cancers de l’enfantA côté des progrès thérapeutiques,les équipes en cancérologie pédiatrique se préoccupent de la qualité de vie de l’enfant,en prenant en compte les effetssecondaires des traitements lourds ainsi que les conséquencesde la maladie sur la famille.

    C hez le jeune enfant, on observe des réti-noblastomes (tumeurs qui touchent les cellules de la rétine), des leucémies et des lym-phomes, alors que, chez les adolescents, ap-paraissent les carcinomes. Actuellement, on estime que, dans 35 % des cas (maladie deHodgkin, lymphosarcomes), les enfants onttoutes les chances de guérir avec des traite-ments de courte durée, lesquels ne sont pas gé-nérateurs de graves séquelles. Dans 30 % descas (ostéosarcomes, sarcomes d’Ewing, rhabdo-myosarcomes), la guérison est obtenue dans en-viron 60 % des cas, au prix de traitementslourds et de séquelles fréquentes, bien qu’uneamputation pour une tumeur osseuse soit de-venue exceptionnelle. Enfin, dans le tiers descas de cancer chez l’enfant, la survie n’a pasprogressé, cela malgré les nouveaux protocolesde la chimiothérapie : le taux de guérison desneuroblastomes est de 20 à 40 % et celui destumeurs cérébrales est d’environ 50 %, mais auprix de graves séquelles intellectuelles.Les oncologues espèrent disposer de nouvellesstratégies permettant de diminuer les doses deradiothérapie, dont les conséquences tardivessont très lourdes pour le devenir de l’enfant,tels les troubles de croissance des os et des cartilages, les complications viscérales et endo-criniennes, et les altérations au niveau des fonc-tions cognitives. Cela impose un suivi

    Spécial RSTI

    Professions Santé Infirmier Infirmière - No 33-34 - janvier-février 2002

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    (1) Pour mieux comprendre le rôle des prestataires de service

    dans les réseaux, voir l’article “Les réseaux”, page 26. ●●●

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    neuropsychologique prolongé afin d’anti-ciper les difficultés scolaires de l’enfant.En France, il existe 32 centres spécialisés (SFOP)dans lesquels l’enfant bénéficie d’une prise encharge multidisciplinaire par une équipe qui luipropose des activités et des animations visant àatténuer les effets délétères des traitements et àaméliorer l’image de soi. Comme l’ont soulignéles intervenants, il faut obtenir la confiance del’enfant et de sa famille, notamment en donnanttoutes les explications sur le diagnostic, le trai-tement et les complications attendues, toujoursavec une note d’espoir. Les infirmières, commetous les autres soignants, ne doivent pas oublierqu’elles sont souvent amenées à répéter des ex-plications avec un vocabulaire simple et adapté,les parents étant souvent trop choqués et désta-bilisés pour pouvoir mémoriser normalementtout ce que leur a dit l’oncologue.

    Ludmila Couturier

    Les réseauxSoins à domicile et réseauxen oncologie se développent. Voici deux exemples différents, autour de centres de luttecontre le cancer : le réseau de l’IGR,à Villejuif, et le réseau Oncora, à Lyon.

    D e plus en plus de patients souhaitent bénéficierde soins à domicile, affirme Fatima Bellal,surveillante du service d’hématologie adulte et degreffes de cellules souches périphériques à l’Ins-titut Gustave-Roussy (IGR), à Villejuif. Leur miseen œuvre remet en cause bien des pratiques médi-cales et paramédicales. »

    Un partenariat avec une entreprise privée« Notre réseau nécessite des partenariats avec les in-firmières libérales, l’HAD, l’hôpital de jour, poursuitFatima Bellal. Nous travaillons avec les hôtels. » Parailleurs, l’IGR “externalise” une partie des tâches decoordination des soins en travaillant avec un pres-tataire de services, qui propose le matériel néces-saire à domicile en tarif tips. « Il assure un service degarde 24 heures sur 24, et 7 jours sur 7, explique-t-elle. L’extension de ses missions se trouve précisée parcontrat : coordination des soins en hospitalisation à do-micile, recherche d’infirmière si besoin, explication des

    procédures, aide à la mise en place des dossiers de soinsville-hôpital, conception d’ordonnances préformatées,récupération des déchets septiques, mise à dispositionde conteneurs d’évacuation en fin de traitement. »Mais le retour à domicile se prépare à l’hôpital.« Nous simulons des traitements ambulatoires dansl’unité, dit Fatima Bellal. Nous évaluons le degréd’adaptation des patients et des familles. L’infirmièrelibérale est invitée dans l’unité pour se familiariseravec les traitements. Un suivi téléphonique est assurépar le cadre infirmier hospitalier. »Le patient a tout de même son mot à dire. « Ilfaut qu’il accepte cette proposition pour que des soinsà domicile soient mis en place, dit-elle. Il faut ajou-ter à cela des critères d’exclusion médicaux de cetteorganisation ou d’autres critères liés au cadre de vie,évalués lors de la consultation infirmière. »

    Le réseau Oncologie Rhône-Alpes (Oncora)Le réseau Oncora est le réseau de cancérologiede la région Rhône-Alpes. Il regroupe autourdu centre anticancéreux de Lyon, l’hôpital Léon-Bérard, plus de quarante établissements ou struc-tures. Il compte ainsi la plupart des centres hos-pitaliers publics, un hôpital des Armées, desétablissements privés PSPH (participants du ser-vice public hospitalier), une dizaine de cliniquesprivées et des membres associés.« Fin 1996, le réseau comptait 50 malades par jour,et représentait une file active de 150 à 200 malades,explique le Dr Devaux, oncologue à l’hôpitalLéon Bérard. Fin 1998, il comptait 80 malades parjour. Le 6 juin 2000, il comptait 148 malades pris encharge dans 32 HAD et 116 SAS. »Le réseau Oncora ne travaille pas avec un pres-tataire de services comme le fait l’IGR. « Une tellesociété de services présente l’inconvénient de ne pasêtre reconnue par les tutelles, dit-il. Elle constitue unintermédiaire supplémentaire. Enfin, son statut àbut lucratif me gêne un peu. »Autre danger, les réseaux et soins à domicile, faitspour “désengorger” l’hôpital et coûter, théori-quement, moins cher, peuvent présenter des ef-fets inattendus. Les malades atteints moins gra-vement sont davantage pris en charge dans lesréseaux ville-hôpital. « Les malades les plus lourdsrestent donc à l’hôpital, souligne le Dr Devaux,concentrant les traitements les plus onéreux au seinde ce dernier. Cela fait monter la valeur du point ISA,issu du PMSI. L’hôpital se trouve alors dans le colli-mateur de la tutelle pour ce qui apparaît comme unmauvais indice de rentabilité. »

    Marc BlinD’après les propos tenus lors de la conférence

    organisée avec le soutien des laboratoires Janssen-Cilag.

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