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TPTTS I. Définition de la traduction C’est la retransmission d’un message formulé initialement dans une langue de départ (langue A) dans une langue d’arrivée (langue B) ; c’est principalement le processus par lequel s’effectue la transmission du message. Par le terme « message » nous voulons ici désigner aussi bien le contenu que l’intention de l’énonciateur, par opposition au contenant, à la forme. Le message est donc ce que le traducteur cherche à transmettre. Définition de la traductologie C’est l’ensemble des efforts de recherche qui s’appliquent à la traduction. C’est une discipline scientifique, une discipline de recherche qui se donne pour objectif d’étudier la traduction de façon scientifique. Dire scientifique, c’est dire la présence indispensable d’un certain nombre d’éléments, d’outils et méthodes qui permettent de mesurer des faits, des résultats, de passer des causes aux conséquences par des opérations de déductions, d’inductions, etc. L’intérêt d’une théorie de la traduction Avant de souligner les éléments qui jouent en faveur de la théorisation, de l’élaboration de recherches théoriques dans le domaine de la traduction, nous commencerons par donner une définition du concept même de théorie. Qu’est-ce qu’une théorie? Nous pouvons dire qu’une théorie est un ensemble de concepts, d’hypothèses sur des régularités; ils sont liés l’un à l’autre de différentes manières et s’appliquent à un domaine particulier. On commence par élaborer une hypothèse, suivie d’une deuxième et d’une troisième hypothèses qui se tiennent et qui veulent expliquer tel phénomène, tel comportement, etc. Nous voyons donc que, par opposition à une hypothèse qui est peut- être une théorie minimale, une vraie théorie est un énoncé qui se compose de deux, trois hypothèses formant une unité globale. Mais une question importante se pose ici: en quoi la théorie peut-elle nous aider? Pourquoi la théorie donne au traducteur un avantage quelconque par rapport à l’absence de théorie? 1

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I-1- Quest-ce que la traduction

TPTTS I. Dfinition de la traduction Cest la retransmission dun message formul initialement dans une langue de dpart (langue A) dans une langue darrive (langue B); cest principalement le processus par lequel seffectue la transmission du message. Par le terme message nous voulons ici dsigner aussi bien le contenu que lintention de lnonciateur, par opposition au contenant, la forme. Le message est donc ce que le traducteur cherche transmettre.

Dfinition de la traductologie Cest lensemble des efforts de recherche qui sappliquent la traduction. Cest une discipline scientifique, une discipline de recherche qui se donne pour objectif dtudier la traduction de faon scientifique. Dire scientifique, cest dire la prsence indispensable dun certain nombre dlments, doutils et mthodes qui permettent de mesurer des faits, des rsultats, de passer des causes aux consquences par des oprations de dductions, dinductions, etc. Lintrt dune thorie de la traduction

Avant de souligner les lments qui jouent en faveur de la thorisation, de llaboration de recherches thoriques dans le domaine de la traduction, nous commencerons par donner une dfinition du concept mme de thorie.

Quest-ce quune thorie?

Nous pouvons dire quune thorie est un ensemble de concepts, dhypothses sur des rgularits; ils sont lis lun lautre de diffrentes manires et sappliquent un domaine particulier. On commence par laborer une hypothse, suivie dune deuxime et dune troisime hypothses qui se tiennent et qui veulent expliquer tel phnomne, tel comportement, etc. Nous voyons donc que, par opposition une hypothse qui est peut-tre une thorie minimale, une vraie thorie est un nonc qui se compose de deux, trois hypothses formant une unit globale.

Mais une question importante se pose ici: en quoi la thorie peut-elle nous aider? Pourquoi la thorie donne au traducteur un avantage quelconque par rapport labsence de thorie?

Rle dune thorie de la traduction

Jean Delisle, qui estime que la connaissance des thories de la traduction nest pas essentielle la pratique de la traduction, insiste cependant sur la ncessit dlaborer une thorie de la traduction, une thorie qui prsente un ensemble cohrent et juste de rgles qui soient systmatises. Des rgles qui ne sont pas bien videmment absolues: celles qui sont bonnes pour un genre de discours peuvent ne pas ltre pour un autre genre, sans parler des exceptions qui pourraient se prsenter lintrieur dun mme genre. En fait, cette ncessit est due, dune part, laugmentation de la quantit des informations traduire et, dautre part, au fait que le nombre de traducteurs pouvant se passer dune formation thorique est assez limit; ce qui ne va pas de pair avec le besoin de former mthodiquement et systmatiquement des traducteurs professionnels. Nous observons que cette ncessit de former des traducteurs sest faite plus fortement sentir au vingtime sicle.

Ainsi, Charles Bouton qui reconnat lexistence de lcole dinterprtes de Tolde au XIIme sicle estime que cest lpoque moderne que les grandes institutions universitaires se sont plus spcialement intresses la formation des traducteurs et des interprtes sans doute pour rpondre ce besoin augmentant de traduction et dinterprtation au vingtime sicle.

La rflexion thorique peut jeter des claircissements sur les problmes de la traduction, lopration traduisante, le processus de la traduction, etc. des claircissements qui pourraient tre dune grande utilit pour le praticien, dans la mesure o elle constitue la materia prima dans laquelle peut puiser le praticien pour trouver un remde qui laide dpasser les obstacles de la traduction.

Ainsi J.R. Ladmiral, dans un article intitul La traduction philosophique essaie-t-il de montrer lutilit de la rflexion thorique sur les problmes et les obstacles que rencontre le traducteur en donnant lexemple pratique dune mauvaise traduction due, selon lui, au manque de connaissances thoriques et non pas une mauvaise connaissance des deux langues en question. On saperoit que les thoriciens nassignent pas tous les mmes rles la thorie de la traduction. Pour les uns, thorie de la traduction doit donner une srie de rgles et de recettes applicables tous les genres de textes; pour les autres, comme J. R. Ladmiral, le rle dune thorie de la traduction nest pas de donner des solutions toutes faites mais daider le traducteur laborer des concepts partir des difficults rencontres dans son travail : ce quil est permis dattendre dune thorie de la traduction, dit-il, cest prcisment une aide la conceptualisation, la problmatisation et la formulation des difficults que rencontre le traducteur dans son travail; cela ne peut pas tre ce quon appelle parfois tort des techniques de traduction, qui puissent tre dduites de faon linaire partir de la thorie vraie ou scientifique.... Ladmiral, qui slve contre lide de prsenter une thorie de la traduction qui soit la seule et vraie thorie, se propose dlaborer plusieurs thormes juxtaposs,isols qui prsenteraient de toutes petites thories qui auraient besoin dtre relies et compltes. Aussi propose-t-il comme premier et principal thorme laborer: la thmatisation du concept de connotations et de leur polarit smiotico-smantique tout en insistant sur le fait que ce ne sont pas des applications techniques, qui seraient dduites de faon linaire ou monologique de ce thorme [mais qu] il sagit plutt dune mise en oeuvre dialectique . En effet, Ladmiral, considre que cest cette dialectique de la thorie et de la pratique qui va permettre dinduire dautres thormes partir de ses applications pratiques.

Danica Seleskovitch, pour sa part, relie le thorique au pratique duquel il doit dcouler. Ainsi estime-t-elle que la thorisation consiste le plus souvent observer ses succs [de lopration de la traduction] dcouvrir intuitivement ce qui les implique puis gnraliser les modalits de russite de lacte en liminant peu peu les causes dchec .

Et de continuer que le thoricien doit formuler une hypothse de dpart puis essayer de la vrifier en la soumettant aussi bien au contrle du raisonnement et de la critique exprimentale qu la vrification exprimentale. Nous pouvons soulever ici une question importante cest que dans la plupart des cas les traducteurs professionnels nont ni loccasion, ni le temps ncessaire pour entreprendre des tudes thoriques, des recherches thoriques sur la traduction. Do llaboration de thories souvent par des linguistes ayant peu pratiqu la traduction, des chercheurs venant de lextrieur pour tudier lopration de traduction. En rcapitulant ces diffrents points nous constatons dans les diffrentes positions un certain va et vient entre thoriciens et praticiens, entre pratique de la traduction et recherches thoriques sur la traduction.

De la thorie de la traduction la pratique quotidienne?

Jean Ren Ladmiral estime, sans doute avec raison, quon fait toujours appel une quelconque thorie, du moins une quelconque hypothse, mme si lon refuse lide mme de thorie:

DAristote Sartre, dit-il, tous le savent: ne pas faire de thorie, cest encore en faire, et de la mauvaise!. Il sagit en fait, ici au moins, dune hypothse de travail adopte par le praticien et qui a par consquent besoin dtre explicite.

Dans la pratique quotidienne du traducteur, il y a des thories mais ces thories sont moins systmatiques et moins dveloppes: on traduit et a marche. Ce sont plutt des hypothses parfois implicites parce quon ne les a pas explicites. Par consquent une vritable thorie aura pour tche de les expliciter, de chercher les relier les unes aux autres afin quelles forment un ensemble cohrent qui aidera le traducteur et notamment lapprenti traducteur dans laccomplissement de sa tche.

La science, la recherche, se donne comme lun des objectifs justement la constitution de thories orientes pour rendre compte de situations donnes. Autrement dit, dans le domaine de la traductologie, chacune des diffrentes thories de la traduction va sappliquer des domaines prcis: la thorie sociolinguistique par exemple vise la traduction de la Bible, la thorie smiotique a pour objectif la traduction automatique, etc. Mais en quoi est-ce que les praticiens, les traducteurs professionnels, eux, savent des choses que les chercheurs dans le domaine de la traduction ne savent pas? O se situe lavantage des traducteurs professionnels par rapport des thoriciens, des chercheurs qui ont peu pratiqu la traduction?

Les praticiens ont lexprience personnelle. Les expriences vcues, il faut le reconnatre, sont suprieures celles des chercheurs parce qu travers leurs expriences personnelles les traducteurs professionnels ont une quantit dinformations bien suprieure la quantit dinformations dont dispose le chercheur, le scientifique.

Et par consquent ils sont conscients de nombreuses subtilits, et de phnomnes rares. En revanche, les thoriciens, les chercheurs ont tendance mesurer la ralit dune manire systmatique et par consquent ils sont censs savoir que ce quils connaissent, ce quils explorent est une partie de la ralit seulement.

Dans la vie pratique, le traducteur effectue des choix, prend des positions, recourt des mthodes et des procds et la thorie de la traduction aura justement pour rle dexpliciter les choix et les prises de position du traducteur, les principes selon lesquels il agit, et de donner une explication aussi complte et cohrente que possible de cette pratique quotidienne.

En effet une pratique systmatique de la traduction pourra dboucher sur les fondements dune thorie et cest la thorie qui devra les formuler en les explicitant dune manire claire et cohrente.

Pour conclure, nous insistons sur certains avantages que prsentent les recherches thoriques, une thorie de la traduction: elle donne au traducteur un support matriel qui laide dans son travail; elle peut galement prsenter une certaine mthode cest--dire des procdures suivre pour lenseignement de la traduction; elle nous aide liminer les prjugs dvidence qui auraient besoin dtre vrifis dans la mesure o la recherche scientifique est en principe suppose observer des faits, tester les hypothses, les vrifier, etc., le tout en faisant abstraction de ses propres prjugs, de ses propres idologies; elle sert mettre en relief les vrais problmes que rencontre le traducteur et les choix quil effectue.

Les recherches thoriques sur le processus mental de traduction, par exemple, sont dune grande utilit dans la mesure o elles ont pour tche de nous prsenter au mieux les dtails des dmarches intellectuelles que suit le traducteur; ce qui peut nous aider mieux traduire en nous traant des phases suivre pour mieux russir lopration de traduction.

La thorie est une tentative dexplication, un essai dexplicitation de nos prsupposs, qui instaure des liens entre diffrents phnomnes et qui nous aide progresser. Et partir de l nous prenons la thorie et nous essayons de voir si elle fonctionne ou non. En cas de problmes nous essayons de corriger, de remplacer et ventuellement de formuler une thorie compltement diffrente.

Effectivement la thorie a, notre sens, cela dutile quelle nous guide dans la recherche, dans la slection de certains lments dinformation qui sont disponibles et davancer pour comprendre quelque chose, quelque phnomne, etc. Donc les thories, sont des outils, des outils intellectuels. Et dans nos recherches, nous avons besoin doutils, quils soient physiques ou intellectuels.

En effet chaque outil doit correspondre au but pour lequel il a t conu. Autrement dit, lintrt dune thorie de la traduction est difficilement sparable de son but.

But dune thorie de la traduction

Dans la recherche dune thorie de traduction il faut donc commencer tout dabord par prciser quoi va servir cette thorie: est-ce quelle est prvue pour tre utilise par lhomme ou par la machine (sagit-il dune traduction humaine ou automatique?) car les deux noprent pas de la mme manire. Il faut voir si elle va servir des traducteurs professionnels ou bien tre utilise par des professeurs de traduction, cest--dire si elle a un rle pdagogique.

Reste souligner que, dans le domaine pdagogique, on peut poser la question suivante: est-ce quelle a pour but de former des interprtes ou bien des traducteurs? Car la tche de linterprte est bien diffrente de celle du traducteur, do la ncessit de parler de deux mthodes diffrentes de formation.

Danica Seleskovitch prcise, juste titre, que la traduction crite ne senseigne pas comme linterprtation, et celle-ci senseigne diffremment selon quelle seffectue sur le mode conscutif ou simultan . Nous posons galement la question si elle a pour but de former des traducteurs duvres littraires ou bien de textes pragmatiques, de textes techniques, spcialiss. Ce qui pourrait influencer le choix du genre de la traduction: traduction smantique ou bien traduction communicative? Car, en effet, bien que la traduction smantique et la traduction communicative puissent coexister dans certains textes, la plupart des textes sont favorables lune ou lautre. Paralllement, nous pouvons nous interroger sur la fonction dominante dans le texte, fonction laquelle le traducteur doit accorder plus dimportance, etc. Dire traduction professionnelle cest dire ncessit de rpondre aux exigences de la situation cre entre le traducteur et son client. Par consquent il peut modifier les finalits du texte quil traduit par rapport celles du texte original. Une telle modification pourrait tre implique par le changement de destinataire. Il reste signaler que la traduction, lopration qui consiste transmettre un message dune langue de dpart dans une langue darrive, englobe les diffrentes manires avec lesquelles seffectue un tel transfert: traduction proprement dite, interprtation simultane, conscutive, etc. Ce qui peut avoir une certaine incidence et pourrait par consquent ncessiter la spcification de chaque processus.

II- Diffrents types de traductionLes diffrents types de traductions renvoient aux deux moyens de communication: loral et lcrit et galement leur croisement. Un premier type de traduction est la traduction de lcrit lcrit, la traduction proprement parler. Ici le traducteur part dun texte crit dans une langue A pour crer un autre texte crit qui lui est plus ou moins quivalent dans une langue B.

Un deuxime type de traduction est celui de lcrit loral, appel en gnral traduction vue. En effet ce type de traduction pourrait poser dautres problmes au traducteur et par consquent soulever dautres phnomnes tudier, des phnomnes diffrents du premier type sur le plan cognitif parce que, tout simplement, improviser, produire un discours oral nest pas la mme chose que de prendre son temps et dcrire, davoir la possibilit de revenir en arrire et de reformuler. Il y a un ensemble dlments qui ne sont pas du tout les mmes: les exigences stylistiques, les processus dans le cerveau, la vitesse de comprhension et de production, etc.

Un troisime type de traduction est celui de loral loral, cest linterprtation conscutive ou simultane. L les problmes, en partie, sont trs diffrents par rapport la traduction proprement dite car interviennent des lments cognitifs trs diffrents.

Le processus de linterprtation conscutive son tour est diffrent de celui de linterprtation simultane car les contraintes cognitives ne sont pas les mmes; les cots cognitifs ici sont plus importants par rapport la traduction proprement dite; ce qui ncessite dorganiser ses efforts cognitifs, dattribuer tel ou tel autre effort telle ou telle autre phase de lopration de traduction. Le dernier type est celui de loral lcrit, dans le sous titrage des films. Ce type de traduction a galement ses propres problmes: des contraintes matrielles car la ligne ne doit pas dpasser telle limite et doit rester un minimum de temps, etc. Il a donc ses problmes prcis parce que lon ne peut pas transcrire exactement une traduction littrale, des choix simposent. L aussi cest un type de traduction assez diffrent avec ses rgles rgies de diffrentes manires : quest-ce que le traducteur va couper? Comment va-t-il traduire? Quest-ce quil va transformer? etc. Il sagit ici bien videmment dlments qui font partie de la traduction, dlments relevant de son domaine.

La traduction de lcrit lcritLactivit traductive est une opration complexe de mdiation entre deux communauts de lecteurs et entre deux ensembles de systmes exploits par ces communauts. Il sagit dune mdiation entre deux textes dont lun est le premier et lautre est le second du point de vue chronologique:

La mdiation est de type linguistique - rhtorique mais aussi de type culturel -exprientiel. Ses mcanismes ne peuvent tre compris sans analyse pralable de sa nature, de ses objectifs ou finalits, de ses critres dadquation, de ses ventuelles limites et, enfin, de ses niveaux

Dans lactivit de traduction, le transfert du contenu culturel du texte premier vers le texte second (en langue cible) est une source de difficults pour le traducteur. Les traductologues reconnaissent que la linguistique ne russit pas, elle seule, couvrir laire de lactivit de traduction. Cest pour cela que les thoriciens de la traduction se sont orients vers dautres disciplines pour pouvoir expliquer le mcanisme de fonctionnement de lopration traduisante. Traditionnellement, la traduction tait conue comme une opration par laquelle un texte, crit dans une langue appartenant une culture, est transmis vers une autre langue / culture.

Lhomme ne communique pas seulement par la langue et le couple signifiant / signifi ou structure de surface/structure(s) profonde(s) narrivent pas expliquer les oprations de lactivit traduisante. La traduction dun texte est possible parce que chaque texte est dfini en premier lieu par son appartenance un espace national-culturel-linguistique. La traduction permet la reproduction et la rpartition de cette appartenance dans un espace symtrique. Autrement dit, la structure fondamentale de l'altrit, encadre par la langue. Une place particulire en traductologie occupe lapproche de la thorie du sens (dveloppe par D. Seleskovitch) qui est considre comme plus proche de la ralit professionnelle parce quelle dfinitle processus de traduction laide des trois concepts de comprhension, dverbalisation et rexpression du message en tant que contenu de communication sous une forme linguistique.

Conformment la thorie du sens le traducteur doit, tout dabord, comprendre le message, saisir le fait que les diverses modalits dexpression en langue base et en langue cible imposent une re-expression et non pas une transposition. la suite de lapplication des pratiques de traduction, un signal est dclench chez le traducteur et celui-ci se rend compte que pour lui, le message est devenu transparent (tout se passe dune manire non-verbale). Lactivit de dverbalisation est celle qui dclenche le signal et qui constitue un pont entre la comprhension et la re-expression.

Dans ltape de la dverbalisation on met en vidence la logique du discours. La cohrence logique est toujours prsente dans le processus de traduction: soit quil sagisse de la traduction dune notice de montage, dun horoscope ou dune tude concernant la globalisation du march financier, le traducteur pourra passer effectivement, de la comprhension la rexpression, seulement au moment o il matrise la cohrence logique du discours transmettre.

Les spcialistes en traduction affirment que lorsquon se heurte un problme de comprhension dun texte (en langue trangre), on ne peut le rsoudre par un traitement linaire des tapes du problme mais par une recherche des donnes la lumire des connaissances linguistiques et thmatiques acquises, par lanalyse du contexte, par linterprtation des informations reues de nimporte o et de nimporte qui, par une documentation dans des dictionnaires terminologiques et phrasologiques.

Les recherches actuelles en thorie de la traduction sont centres sur la dimension message qui sajoute aux autres dimensions: la langue, le traducteur lui-mme et le destinataire de la traduction. J. Cl. Gmar affirme que dans une traduction, la ralit extrieure aux considrations sur la langue est probablement aussi importante que la dimension linguistique.

Dailleurs les spcialistes considrent la traduction comme le rsultat de laction conjointe des trois facteurs: le Texte (auteur), le Traducteur (relais) et le Lecteur (destinataire).

Il en rsulte que la traduction est un phnomne complexe et dynamique qui se montre comme tel selon le model culturel auquel elle participe et que le traducteur accomplit le rle du mdiateur entre les normes de la culture source et les normes de la culture cible.

Le concept de seuil de confort dans la traduction. Le seuil de confort reprsente cet tat du traducteur apprenant qui a la fausse impression quil a parfaitement compris le texte traduire. Le jeune traducteur croit que sil a compris le lexique du texte de dpart (TD), il comprend automatiquement ce que lauteur du texte avait voulu dire. Cest un grand risque car la comprhension du sens du texte de dpart est essentielle dans lopration traduisante. Les lments appartenant lextralinguistique dun texte peuvent entraver la comprhension et linterprtation de ce texte. Se contenter dun seuil de confort minimal reprsente un danger pour le bon droulement de lapprentissage de la traduction par les futurs traducteurs.

Anthony Pym affirme quil y a des mots, des expressions, etc. quon connat depuis toujours dans sa langue maternelle et que le traducteur ne russit pas les expliciter et les transposer dans la langue du texte darrive (TA).Cest parce que ces mots, expressions, etc. font partie du substrat culturel du traducteur. Mme les tabous reprsentent des spcificits pour les diverses cultures. La culture contextuelle du texte traduire est touche par ces spcificits qui dterminent la comprhension et linterprtation du texte en question.

La manire de sexprimer dans la production du texte traduire est, donc, influence par les normes culturelles de la langue darrive:

Connotations, registres stylistiques, rhtorique, limplicite dun texte, tout cela fait partie de la culture contextuelle dont le traducteur doit prendre conscience. Peu importe la nature du texte, lauteur est un tre vivant qui a t influenc par toutes sortes de choses, cest dire dabord et avant tout par lenvironnement o il a vcu, o il vit, bref sa culture.Lors du processus de traduction, le traducteur doit se mettre la place du destinataire, savoir du lecteur du texte darrive car le traducteur doit avoir une comprhension du texte semblable son destinataire. Suite ce que nous avons dit jusquici, il est vident que, connaitre sa culture est lune des conditions sine qua non de la russite dune traduction.

Pour dpasser le seuil de confort de comprhension, les futurs traducteurs ont lobligation dapprofondir la connaissance du vocabulaire et des possibilits des deux langues, de dpart et darrive. Selon Franois Michaud, il faut briser le seuil de confort, tant donn quignorer lexistence de ce phnomne constituerait une grave erreur de la part du traducteur enseignant.

Aperu sur les domaines de la traduction

Durant de longues annes la traduction tait considre, dans lhistoire occidentale de la traduction, comme une branche de ltude littraire, savoir quelle servait, en grande partie, traduire les oeuvres littraires et rendre les expriences des peuples dun pays dans un autre - ce qui nexclut pas bien videmment la prsence de traductions duvres non littraires -.

Elle relevait essentiellement du domaine des crivains, potes et dramaturges tels: Cicron, Horace, saint Jrme, Joachim du Bellay, Montesquieu, Goethe, Mallarm, Gide, etc. qui ont traduit un certain nombre duvres dune faon plus moins empirique. Il sagit ici, selon Mounin, dun empirisme que lon pourrait considrer comme un empirisme naf : on traduit et a marche donc on ne soccupe pas de construire des thories. Dans le cadre historique, il est clair que la traduction a apport une contribution trs importante la littrature dans beaucoup de pays. Michel Remy, dans un article intitul Vers une problmatique de la traduction des textes surralistes, estime que les traductions des textes surralistes franais en anglais ont jou un rle capital dans le passage du surralisme en Angleterre.

Dune manire gnrale, il suffit tout simplement de penser toutes les interrelations entre les diffrentes socits, tout ce qui est connu pour la premire fois travers une oeuvre traduite et qui a donn lieu par la suite autre chose, commencer par la Bible. Lincidence de la traduction crite sur le transfert culturel, dit Daniel Gile, est capitale, puisque la traduction a permis limportation et lexportation dune importante partie de la production de connaissances et dides travers le monde entier. La traduction a galement contribu dune faon importante la diffusion des religions. La traduction, par exemple, de la Bible a eu un rle important dans la diffusion du Christianisme dans certains pays. Il y a en ralit une importante littrature sur ce sujet. Parmi les premiers apports importants la thorie de la traduction figurent les apports des traducteurs de la Bible dont le plus connu est Nida. Il est clair aussi que la traduction a eu un effet trs important sur lvolution des langues. La traduction est galement un lment qui nest pas tout fait ngligeable dans lvolution de lhistoire. On peut voir les influences de la traduction dans le droulement des vnements quand il sagit doccupants qui arrivent dans un pays.

Il y a le cadre culturel en dehors de lhistoire. Cela intresse beaucoup les traductologues dtudier la traduction en partant de la communication entre les groupes ethniques. Entre ces diffrents groupes la traduction peut reflter les structures du pouvoir et donner lieu dimportantes consquences. Un tel point se manifeste de diffrentes manires: par exemple dans le choix mme des textes quon va traduire dans tel ou tel pays, dans la manire mme de traduire, dans certains mots, certaines expressions choisies pour relater lactualit, etc.

Dans le cadre linguistique, notamment la stylistique compare et les problmes dus lallomorphisme des langues, la traduction est un lment important. La comparaison du franais et de langlais que nous venons de faire, disent Vinay et Darbelnet, a permis de dgager du franais, et par voie de contraste, de langlais, des caractres qui resteraient invisibles au linguiste travaillant sur une seule langue. En effet, nous soulignons bien que sur le plan linguistique, la traduction est un vritable rvlateur.

Nous observons que dans le cadre pdagogique de la traduction les chercheurs essaient de voir comment former les futurs traducteurs mais aussi comment les former le plus rapidement pour arriver un haut niveau; ce qui peut rpondre des critres dordre conomique qui peuvent tre assez importants dans le cadre actuel de nos socits cherchant la productivit.

Dans le cadre cognitif, il y a une partie de la psychologie qui sappelle la psychologie cognitive. Elle comprend lensemble des tudes qui cherchent dterminer comment fonctionne le cerveau non pas sur le plan anatomique mais sur le plan des actions, des infrences, des conclusions, des raisonnements, etc. Il sagit bien videmment dune manire indirecte daccs au fonctionnement du cerveau.

La psychologie cognitive sintresse en fait de trs prs ce qui se fait en traduction et surtout ce qui se fait en interprtation dans la mesure o elle a pour objectif danalyser les processus mentaux qui nous permettent dengendrer et dinterprter des noncs verbaux. Les premires tentatives de recherche proprement dite sur linterprtation, estime Daniel Gile, viennent de la psychologie et de la psycholinguistique., recherches qui commencrent faire leur chemin au milieu des annes 60.

Il y a galement la psycholinguistique qui sintresse au domaine de la traduction et qui est dun grand secours pour les recherches sur le processus de traduction dans la mesure o elle sintresse tudier, analyser les procdures de comprhension et de production langagires chez lhomme. Lobjet dinvestigation propre la psycholinguistique, dit Georges Noizet, est le fonctionnement de ltre humain dans les divers actes de communication par la parole: perception, comprhension, production, stockage des messages verbaux., ce qui prsente des apports non ngligeables pour les recherches sur le processus de traduction.

Il y a enfin le cadre informatique, cest la traduction dite automatique (T.A.) et la traduction assiste par ordinateur (T.A.O.) o les chercheurs essaient de voir comment donner lordinateur des instructions qui permettent de prendre un texte dans une langue donne (langue A) puis le transformer dans une autre langue (langue B) en un texte plus ou moins quivalent.

Nous relevons que les recherches sur la traduction automatique, qui ont commenc aprs la deuxime guerre mondiale, cdent de plus en plus la place aux recherches sur la traduction assiste par ordinateur. Ces recherches tendent mettre en place un arsenal doutils qui servent aider le traducteur tels les dictionnaires lectroniques, les listes terminologiques, etc.

Pour conclure nous retenons donc que la traduction en tant quobjet dtude scientifique, la traduction sous le nom de traductologie intresse beaucoup de chercheurs appartenant des domaines diffrents. Elle intresse les traducteurs professionnels parce que si les chercheurs et thoriciens arrivent leur donner des outils, des concepts pour quils traduisent mieux ils sont gagnants. Elle intresse les professeurs de traduction dans la mesure o elle peut leur donner une mthode de formation. Elle intresse aussi, sans aucun doute, les utilisateurs de la traduction parce quils ont envie davoir de la bonne qualit, ils veulent savoir quoi ils peuvent sattendre. Elle intresse les terminologues et les lexicologues simplement parce quil y a normment de problmes de terminologie et de lexicologie dans la traduction. La traductologie intresse galement les historiens, en tout cas ceux qui veulent voir quel rle a jou la traduction dans lhistoire. Elle intresse les chercheurs en littrature, les sociologues, les linguistes, les thologiens, les psychologues cogniticiens, les psycholinguistes, les neurolinguistes, les chercheurs en science de la communication dans la mesure o ils essayent de voir quel est limpact de la traduction des textes sur la communication du message.

III. Jakobson et sa conception de la traduction

Avec Jakobson, pour qui le sens dun mot nest rien dautre que sa traduction par un autre signe qui peut lui tre substitu, la conception de la traduction nest plus limite au passage dune langue dans une autre, do llargissement de la notion de traduction. Ainsi peut-on traduire le signe linguistique, selon la division de Jakobson, de trois manires:

1- En le remplaant par dautres signes linguistiques de la mme langue, cest ce que Jakobson dsigne par traduction intralinguale ou reformulation, ce qui soulve la question de la synonymie. En effet nous estimons que toute langue naturelle, la diffrence des langues artificielles telle lEspranto, dispose de ressources synonymiques pour exprimer les mmes ides.

Ici nous prcisons quil ne sagit pas dune simple synonymie au niveau du lexique, des termes - qui nont presque pas dexistence- mais au niveau des procds et des ressources dont disposent les langues vivantes : des significations qui pourraient tre exprimes de manires diffrentes grce diffrents signes linguistiques, diffrents procds stylistiques.

Autrement dit, pour communiquer une mme information, une mme exprience, diffrents moyens linguistiques peuvent tre utiliss. Il sagit l, notre sens, de lune des proprits des langues naturelles, cest sa capacit de rexprimer ce qui est dj dit avec dautres signes linguistiques appartenant au mme systme en faisant appel dautres structures, dautres procds, etc.

Une telle ide pourrait tre importante dans le domaine de la traduction, notamment quand il sagit de textes littraires et surtout potiques... Bref, de textes dont le contenu informatif pourrait prsenter des difficults de comprhension, do la possibilit dcrire un texte parallle au texte traduire dans la langue du texte de dpart pour bien cerner le contenu, de chercher tablir des paraphrases interprtatives des noncs originaux avant de passer ltape de la traduction proprement dite.

En effet, nous estimons que cette ide de traduction intralinguale est importante dans le domaine de la traduction et quelle pourrait tre dune grande utilit dans la mesure o elle peut oprer dans la premire et la deuxime tapes du processus de traduction savoir celles de comprhension (dcomposition) et de rexpression (recomposition).

Elle peut aider le traducteur dans sa dmarche smasiologique : de forme vers le sens, cest--dire extraire le vouloir dire en paraphrasant le texte, en trouvant une quivalence; et galement dans sa dmarche onomasiologique: de sens vers la forme, cest--dire rexprimer le vouloir dire, le message, lnonc dans la langue darrive. Cest en apportant des modifications sa traduction, en donnant dautres quivalences allant mieux avec le texte.

Avec lide de traduction intralinguistique nous pouvons dire quil ny a pas de traduction unique pour un texte donn et non plus une manire unique de reconstruire un texte vhiculant la mme information, ce qui montre une bonne part de libert dont dispose le traducteur dans la phase de reformulation du sens quil a extrait du texte de dpart;

- en le remplaant par des signes linguistiques appartenant une autre langue, cest la traduction interlinguale ou traduction proprement dite;

- en le remplaant par des signes non linguistiques, des symboles, cest linterprtation dun systme linguistique au moyen dun systme non linguistique, cest la traduction intersmiotique ou transmutation.

Par ailleurs, nous ne pouvons pas oublier les apports non ngligeables de la thorie de la communication et de linformation pour le domaine de la traduction tels lanalyse linguistique du discours en une srie dunits dinformation, le rle de lmetteur et du rcepteur, la fonction du message, lencodage et le dcodage, etc.

A ct de lencodage et du dcodage, dit Jakobson, la procdure du recodage aussi, le passage dun code lautre [...], bref les aspects varis de la traduction, commencent proccuper srieusement les linguistes et les thoriciens de la communication.En parlant des rapports entre linguistique et traduction nous observons une certaine tendance - qui ne fait pas dailleurs lunanimit chez les thoriciens- introduire la traduction au sein de la linguistique, des sciences du langage.

Jakobson et les fonctions du langage

Dans son tude du fonctionnement du langage, Jakobson labore une classification des fonctions du langage en attribuant une fonction spcifique chacun des six lments constituant le schma de communication et permettant son fonctionnement. En effet pour quil y ait une communication un ensemble dlments doivent tre satisfaits: tout dabord, il faut quil y ait un message envoyer.

Le destinateur transmet ce message au destinataire. Ce qui ncessite la prsence dun code commun entre les deux interlocuteurs et galement dun contact qui est le support physique qui permet la transmission du message. Enfin le message doit renvoyer un contexte extralinguistique.

Le schma de communication:

Le schma des fonctions du langage:

Avec un tel modle des fonctions du langage relevant de la thorie de lnonciation on ouvre les champs de la linguistique. Ainsi assiste-t-on avec la thorie de lnonciation une tentative non ngligeable douverture dans les champs de la linguistique pour crer ce que lon pourrait appeler une linguistique du discours. La plus importante tentative pour dpasser les limites de la linguistique de la langue est sans conteste le champ ouvert par ce quil est convenu dappeler lnonciation .

Avec de telles perspectives: la linguistique de la parole, le contexte situationnel, etc. nous voyons une ouverture de la linguistique moderne vers des thories des actes du langage. Des apports non ngligeables pour llaboration dune thorie de la traduction.

Au demeurant, il faut bien attirer lattention sur le problme que pose la mise en place dune hirarchie de ces fonctions vu limportance que peut occuper chacune de ces fonctions selon lutilisation du langage qui va de pair avec le type de discours. En effet chaque type de discours peut se baser prioritairement sur telle fonction ou telle autre.

Conclusion

Pour parler objectivement des apports de la linguistique la traduction, il ne faut pas se limiter au structuralisme labor par Saussure ou la grammaire gnrative et transformationnelle de Chomsky mais quil faut voir galement lvolution de la linguistique qui largit son champ de travail en introduisant dans le centre de ses intrts la smantique et la pragmatique.

Les linguistes de lcole de Prague ont, en fait, pu hriter de Ferdinand de Saussure une linguistique ayant un statut de science, un hritage quils ont tent denrichir. La thorie de lnonciation vient complter le structuralisme en comblant des points qui taient dlaisss par celui-ci.

Elle sintresse non seulement des structures syntaxiques mais galement au sens qui dpend de facteurs changeant dune nonciation lautre tels les pronoms personnels je et tu et les adverbes pouvant leur tre lis, comme ici, maintenant, etc. Ainsi, la linguistique moderne traite la langue non plus comme un objet mais comme un acte, un acte de parole.

Par ailleurs, il reste signaler que, malgr leffort entrepris pour aborder la traduction dun point de vue qui se veut scientifique, les anciennes mthodes de recherche dans le domaine de la traduction ont continu survivre.

Ainsi a -t- il fallu attendre la deuxime moiti du vingtime sicle, avec A. F. Fedorov, Vinay et Darbelnet, et dautres encore pour essayer de dcrire le processus de traduction - bien quils se soient placs au niveau des deux langues en contact et les incidences quil a eu sur leurs tudes - pour assister la naissance de diffrents courants de traduction, courants qui pourraient reprsenter certaines coles de pense et certaines thories de la traduction; des recherches qui avaient le grand espoir dattribuer la traduction le statut de science.

Deux grands courants ont marqu le vingtime sicle: le courant littraire et le courant linguistique. Un troisime courant plus rcent se frayant son chemin partir des annes 70, et qui est dailleurs toujours prsent, est la traductologie, qui veut faire de la traduction une discipline part entire, une discipline ayant pour objectif ltude scientifique de la traductionLe courant littraire de la traduction

Ce courant est en quelque sorte une continuit des ides anciennes reues dans lhistoire occidentale de la rflexion sur la traduction. Elles considrent la traduction comme une branche de la littrature. Le courant littraire de la traduction au vingtime sicle est reprsent principalement par des praticiens jouissant dune grande exprience dans le domaine de la traduction, des traducteurs duvres littraires de tous genres, qui continuent considrer la traduction comme un art, un talent, un don et non pas comme une science, et continuent, de la sorte, attribuer la traduction un caractre subjectif.

Il sagit principalement dartisans de la traduction qui se contentent de tirer de leur pratique un certain nombre de remarques, de rflexions personnelles, dopinions disperses sans essayer de les systmatiser.

Edmond Cary, en parlant de la nature de la traduction littraire, la dfinit non pas comme une opration linguistique mais comme une opration littraire qui demande un effort de cration continuelle de la part du traducteur; car, pour lui, les connaissances linguistiques sont un pralable lopration de traduction, dont tout traducteur doit tre le matre. Sil ne sagissait, dit-il, que dune simple opration linguistique, la perfection relative serait vite atteinte. Comme il sagit dune opration dordre littraire, la cration demeure continue... .

Ainsi minimise-t-il, sans doute avec raison, le rle de la linguistique et des clairages quelle pourrait jeter sur des problmes dordre linguistique, cest--dire relatifs aux diffrences entre les systmes de langues en contact dans la traduction des uvres littraires dans la mesure o il considre quil est indispensable de connatre les diffrences entre les moyens linguistiques des langues avant de commencer parler dopration de traduction. Le traducteur de ce genre de texte doit par consquent plus soccuper rendre loriginalit de luvre do la ncessit de souligner le don du traducteur.

Etant donn que les uvres littraires ont la grande ambition dtre universelles et ternelles par leur originalit et leur crativit, cela constitue un obstacle supplmentaire qui surajoute aux difficults poses par les diffrences entre les systmes des langues, ce qui rend de la sorte la tche du traducteur plus difficile; car dans ce cas sa tche consiste tout dabord, en plus du transfert du vouloir dire de lcrivain, rendre compte de la cration originale tout en gardant laspect esthtique, les images, etc. qui pourraient tre parfois propres tel ou tel autre crivain do la ncessit dtre capable soi-mme dun effort de crativit.

De ce qui prcde nous voyons lavantage dtre spcialiste dans la traduction des uvres littraires car chaque genre a ses propres caractristiques, ses propres lois, ses propres rgles, ce qui soulve la question de spcialit dans le domaine de la traduction en gnral.

Dans le cas des uvres littraires le transfert dun vouloir dire passe souvent mme au deuxime degr dimportance dans la mesure o les uvres littraires et notamment la posie, la diffrences des textes pragmatiques, nont pas pour tche en principe de donner une information - mme si dans certaines uvres on prsente par exemple la vie et les habitudes des gens une poque donne- mais de prsenter une vision personnelle du monde, une exprience du monde, etc. do la prdominance de la fonction potique, de la fonction expressive et la minimisation de la fonction rfrentielle qui sera considre comme une fonction accessoire.

Pour Edmond Cary La traduction littraire relve de la littrature, la traduction potique de la posie, le doublage du cinma et ainsi de suite, sans que, pour autant le linguiste puisse se dsintresser daucun de ces genres .Nous voyons que Cary, qui estime quil faut tre romancier pour traduire les romans, dramaturge pour traduire les pices de thtre, pote pour traduire les pomes, etc., considre cette activit comme relevant du domaine littraire, de la cration littraire et non pas de celui de la traduction proprement dite:

La traduction potique, dit-il, est avant tout une affaire de posie, la traduction littraire affaire de littrature, le doublage de films affaire de cinma.

Par ailleurs, nous signalons que ces diffrents genres de textes traduire ne posent pas les mmes problmes au traducteur mais quil y a des degrs de difficult poss par chacun de ces genres, difficults dues la nature mme de chaque genre littraire. .

Nous exposons assez brivement les diffrents genres littraires en les classant, en regard de la traduction, par ordre croissant de difficult. Ainsi respectons-nous la classification faite par Edmond Cary.

1- les uvres littraires:

En plus des connaissances dordre linguistique et culturel dans les deux langues, connaissances indispensables lopration de la traduction, le facteur primordial pour la transposition des oeuvres littraires est celui du choix du style dans la langue darrive, un style qui pourrait correspondre celui de la langue de dpart..

Si lon traduit, dit Cary, un roman daventures passionnant en une langue fidle mais dune illisible lourdeur, si lon rend Proust en une prose sautillante on aura fait de mauvaises traductions . Le style - qui est distinguer de la stylistique, qui a pour rle de dresser linventaire des dmarches qui soffrent au locuteur pour exprimer tel effet particulier (y compris leffet zro) - relve essentiellement de lart de la traduction. Il est propre chaque crivain. Pierre Dumayet, pour sa part, dans un article intitul: La traduction littraire: qui juge?, attire galement lattention sur le rle du style. Aussi raconte-t-il une exprience personnelle: il a lu avec grand plaisir un livre traduit de Naguib Mahfouz. En lisant un deuxime livre du mme crivain traduit par un autre traducteur, il a t du. Une dception due lapathie, la froideur, la nonchalance du style.

Or, dit-il, je ne me suis pas du tout rgal, et surtout, jai t frapp de la diffrence dcriture, comme sil lui tait arriv une maladie qui na de nom en aucune langue. Alors que dans le premier livre, lu avec dlices, il y avait une vivacit, un entrain patent, dans le second, le style avait subi une mtamorphose trange . Et de tirer pour conclusion que, lorsque le texte de dpart est plein de vivacit il ny a aucune raison valable pour que le texte darrive devienne froid, nonchalant. Une critique qui peut apparatre assez svre dans la mesure o elle minimise bien les difficults qua le traducteur rendre le style des grands crivains, rdiger avec un style ressemblant celui des grands romanciers.

A la lumire des fonctions du langage de Jakobson, nous considrons que le traducteur doit accorder une place primordiale la fonction principale dans le texte. Dans le cas de lexemple cit ci-dessus, le traducteur naurait pas d se contenter de sintresser uniquement la fonction informative, cest--dire rendre le contenu mais il aurait d sintresser galement, voire prioritairement la fonction expressive, cest--dire rendre le style de lauteur, son originalit, la faon avec laquelle il exprime ses ides. Mais est-il si ais de rendre la fois la fonction expressive et la fonction informative?

Lidal serait, sans aucun doute, de rendre ces deux fonctions. Dans limpossibilit daccomplir une telle tche le traducteur est amen faire un choix: celui daccorder la priorit lune ou lautre de ces deux fonctions. Dans le cas du texte littraire, tel lexemple du texte cit ci-dessus, o la fonction expressive est dominante, le traducteur devrait peut-tre la rendre mme parfois aux dpens de la fonction informative. Il sagit dans ce cas de chercher plus crer le mme effet chez son propre lecteur qu donner tout prix la mme information.

2- Les pomes:

La traduction des pomes pose un obstacle supplmentaire au traducteur celui des procds stylistiques, des structures mtriques propres la langue de dpart, des structures ayant parfois des connotations lies cette langue. Ainsi, pour traduire un pome il ne suffit pas de rendre le sens mais il faut galement rendre lessence, la valeur potico-stylistique: Si, dun pome, dit Cary, on rend soit le sens littral, soit la forme prosodique mais que la valeur potique de ce pome soit justement situe ailleurs on aura fait une mauvaise traduction . Mais quest-ce que la valeur potique? et comment la rendre?

En effet, Cary ne dfinit pas cette valeur rendre et ce qui est, pour nous, le plus important cest quil ne montre pas comment la rendre.

En se basant sur la classification des fonctions du langage de Jakobson, nous retenons la fonction potique qui devrait tre la fonction principale dans un pome - ce qui nexclut pas dailleurs la prsence dautres fonctions qui seraient secondaires. Il sagit ici essentiellement dune hirarchie entre les fonctions. En effet, une tude linguistique du discours potique ne doit pas se limiter la fonction potique car

Les particularits des divers genres potiques, dit Jakobson, impliquent la participation, ct de la fonction potique prdominante, des autres fonctions verbales, dans un ordre hirarchique variable .

Et de donner lui-mme certains exemples:

La posie pique, centre sur la troisime personne, met fortement contribution la fonction rfrentielle; la posie lyrique, oriente vers la premire personne, est intimement lie la fonction motive; la posie de la seconde personne est marque par la fonction conative, et se caractrise comme supplicatoire ou exhortative, selon que la premire personne y est subordonne la seconde ou la seconde la premire. Nous estimons, par consquent, que le traducteur de pomes ne doit pas les traiter de la mme manire mais dabord dgager la fonction dominante dans le pome qui doit tre rendue principalement puis voir les autres fonctions quil essayerait de rendre galement. Ainsi dans le cas de la posie pique, le traducteur doit accorder la priorit la fonction conative cest--dire sintresser au destinataire, le toucher et non pas uniquement linformer; alors que dans la posie lyrique, le traducteur doit accorder la place primordiale la fonction motive, cest--dire au pote, son style, son originalit, etc.

Avec la fonction potique, qui est centre sur le message en tant que tel et pour son propre compte, on remet en cause la coupure entre le signifiant et le signifi implique par larbitraire du signe. Ainsi le signe linguistique est-il ressenti non pas comme un simple substitut de lobjet dsign mais comme ayant une relation avec cet objet. Une question dimportance primordiale pour le traducteur dans la mesure o le signifiant a du moins un rle aussi important que le signifi dans un pome; cest le signifiant qui retient plus le lecteur et qui le touche.

Par ailleurs, avec la thorie de lnonciation, qui opre sur les diffrents types de discours et galement sur des pomes tout particulirement et des oeuvres littraires gnralement, nous voyons slargir le champ de la linguistique pour atteindre mme des textes littraires.

Car partir du moment o la linguistique se considre comme une science cherchant tudier les structures linguistiques des langues humaines, les textes littraires, potiques, etc., bien quils constituent des langages spcifiques, seraient considrs comme relevant de la linguistique et entrant par consquent dans le centre dintrt des linguistes.

En effet, nous pensons que cet obstacle relevant du rapport existant entre le signifiant et le signifi, la forme et le sens nest pas propre uniquement la traduction des pomes car il pourrait se poser, de toute vidence, beaucoup moins frquemment, heureusement pour le traducteur, mme dans la traduction des textes journalistiques.

Cest lorsquil sagit de rendre un effet spcifique d lassociation du son et du sens. Car la fonction potique ne se limiterait pas aux textes littraires, aux pomes mais pourrait apparatre dans dautres types de discours, du moins, en tant quune fonction accessoire. Pour parler dune faon plus concrte nous citons le cas de lassonance, du contraste, du calembour, des rptitions, des jeux de mots, des images, des mtaphores, etc. que lon pourrait trouver dans les articles des journaux et notamment dans leurs titres cherchant capter lattention du lecteur. 3- les pices de thtre:

Gnralement on tablit une distinction entre dune part les pices de thtre qui sont traduites pour tre lues (la traduction de ce genre de pice de thtre pose moins de problmes au traducteur dans la mesure o il peut ajouter une explication, introduire des notes de bas de page, etc.) et dautre part celles qui sont destines tre joues sur scne. En effet, cest ce genre de traduction qui intresse le plus le traducteur.

La majorit des pices de thtre sont, en principe, faites pour tre joues sur scne et non pas pour tre lues. Selon Cary la traduction russie dune pice de thtre est celle qui produit sur le public leffet mme que lauteur a voulu produire:

pour un traducteur de pices de thtre, qui veut donner dun succs tranger une version parfaitement fidle, le souci est de ne pas trahir lauteur quant leffet produit sur le public . Car la traduction thtrale na pas pour objet uniquement de communiquer un sens mais aussi de reproduire un effet, une impression, une certaine sensation, etc. sur le public. Par consquent, on peut dire quelle est plus une activit dramaturgique que linguistique. Elle sintresse plus la forme, au rythme quau sens.

4- le doublage des films:

Cary considre le doublage des films comme le genre littraire le plus difficile traduire car il rassemble toutes les contraintes de traduction qui existent dans la traduction des romans, des pomes et des pices de thtre. Ainsi, voit-on un obstacle supplmentaire venant compliquer la tche du traducteur, celui des mouvements de lvres. Cary montre la diffrence entre le doublage dun film et la traduction dune pice de thtre: Le spectateur, en entendant le texte traduit voit nanmoins des acteurs dont la bouche continue darticuler des mots dune langue diffrente [...]. Alors quau thtre le dialoguiste est libre de son texte, libre de fixer souverainement les correspondances entre son texte et loriginal, dans le film doubl cette libert est troitement bride par les ncessits de ce quon appelle le synchronisme . Ces obstacles sont lis aux contraintes dordre matriel extrieur au domaine de la traduction proprement dit - qui viennent dailleurs sajouter celles relevant du domaine de la traduction - tel le cas dun journaliste, dun traducteur dune dpche qui doit rendre un texte en fonction de la place disponible dans le journal. Ce qui pourrait avoir des incidences sur le processus mme de traduction. Le courant linguistique de la traduction:

Cest le courant qui considre la traduction non pas comme un art mais comme une science relevant essentiellement de la linguistique. Cest Nida qui aurait t le premier raliser la conjonction entre linguistique et traduction sur le plan thorique, en 1945, dans son article dans Word.

Quant A. F. Fedorov, il serait le premier avoir labor une thorie scientifique de la traduction fonde sur la linguistique. Fedorov, loppos des adeptes du courant littraire, les artisans de la traduction, considre que toute thorie de la traduction doit tre incorpore dans lensemble des disciplines linguistiques.

Ainsi estime-t-il que la traduction est mme une branche de la linguistique dont elle tire ses bases scientifiques. Dans son Introduction la thorie de la traduction publi en 1953 A. F. Fedorov proclame la primaut du facteur linguistique et [affirme] que la thorie de la traduction ne pouvait relever que de la linguistique, seule capable de fournir des bases scientifiques objectives pareille tude .

Ainsi cherche-t-il prsenter un ensemble cohrent de principes et de techniques pour les diffrents types de traduction en prenant un clairage plus rsolument linguistique que stylistique et littraire. Il est connu que Fedorov ne fut pas le seul revendiquer que ltude de la traduction devienne une branche de la linguistique. Dautres linguistes tels Catford, Mounin, Vinay et Darbelnet, etc. lont galement fait. Une telle position a t conteste ds le dpart non pas par des linguistes mais par des traducteurs de textes littraires tels Edmond Cary et dautres, qui considrent la traduction surtout comme un art.

En effet, face la rsistance acharne des traducteurs littraires contre le courant linguistique de la traduction, les linguistes, notamment dans les annes 50 et 60, ont reproch aux traducteurs littraires de stre contents de leur exprience empirique et personnelle de la traduction en tant quart et de navoir pas essay de dgager des rgles objectives ayant des bases scientifiques et applicables dans le domaine de la traduction. Mounin, pour sa part, voit, sans doute avec raison, que Cary en considrant la traduction comme un art, un don soutient par l une sorte de paradoxe car en faisant de la traduction une activit sui generis irrductible quoi que ce soit dautre, Cary contribuait paradoxalement justifier lartisanat des traducteurs contre lequel il luttait dautre part en leur demandant dlargir leur formation et leur culture thorique .

En effet, le problme de savoir si le succs de la traduction est d un don ou sil relve dune mthode systmatique peut poser un srieux problme qui mrite dtre clairci. Nous sommes ici face phnomne, savoir le succs de lopration de traduction, dans lequel existe une tendance ne voir quun seul facteur entrant en jeu: soit un don, soit une mthode.

Mais en ralit lopration de traduction est plus complexe. Plusieurs facteurs peuvent par consquent tre sources daction sur ce phnomne: le don, la mthode, linteraction entre les deux, etc.

Nous estimons, pour notre part, quune tude qui se veut scientifique peut apporter des claircissements cette question en sappuyant sur des recherches exprimentales, en essayant de voir, dapprcier le rle du don, dune mthode donne, ou bien de ces deux facteurs la fois, et dessayer de distinguer quel moment une mthode peut venir en aide au don, au talent et peut tre par consquent efficace, etc.

Plus tard et dans le cadre de ce que nous appelons le courant traductologique, Delisle reprend la critique des traducteurs littraires qui nont pas su tirer profit de leur grande exprience pratique dans le domaine de traduction afin dlaborer une thorie, du moins certaines hypothses thoriques qui pourraient constituer la base pour une thorie: ils ont cherch, dit-il avec raison, justifier leur conception personnelle de lart de traduire au lieu dessayer de dgager, par un examen attentif de la pratique, des hypothses thoriques, des lois et des rgles dune porte gnrale .Au demeurant il faut attirer lattention sur le fait que certains linguistes considrent que mme les traducteurs littraires reconnaissent implicitement lexistence des procds linguistiques. Aussi Vinay et Darbelnet, dans leur Stylistique compare du franais et de langlais, aprs avoir labor leurs sept procds de traduction, affirment-ils que Toutes les grandes traductions littraires ont reconnu implicitement lexistence des procds dont nous venons de faire le recensement... .Ainsi pouvons-nous dduire que tout traducteur suit, en gnral, un certain nombre de mthodes sous-jacentes, des procdures quand il entreprend la traduction de nimporte quel type de discours. Par consquent, une tude et une analyse profondes dun texte traduit pourraient rvler les mthodes sur lesquelles sest bas le traducteur pour faire son choix des solutions.

Cest cet ensemble quil faut mettre au jour tout en le conceptualisant et le thorisant pour en tirer des principes qui pourraient prsenter des solutions possibles pour les ventuelles difficults et problmes que pourrait rencontrer le traducteur dans son travail.

Avec le courant linguistique, qui embrasse dailleurs plusieurs thories diffrentes de traduction, nous constatons un certain effort, une certaine recherche pour attribuer la traduction le caractre scientifique.

Units de traduction

Michel Ballard, dans son article Concepts mthodologiques pour la mesure de lquivalence, souligne limportance du concept dunit dans le domaine de la traductologie dans la mesure o chaque science doit dfinir son objet dtude. Mais quelle dfinition Vinay et Darbelnet donnent-ils ce concept?

Nos units de traduction, disent-ils, sont des units lexicologiques dans lesquelles les lments du lexique concourent lexpression dun seul lment de pense. On pourrait encore dire que lunit de traduction est le plus petit segment de lnonc dont la cohsion des signes est telle quils ne doivent pas tre traduits sparment .Partant dune telle dfinition, nous voyons quil y a trois termes qui apparaissent comme tant quivalents: unit de traduction, unit lexicologique et unit de pense.

Nous relevons ici lun des mrites de Vinay et Darbelnet, celui davoir dplac le centre dintrt du travail du traducteur dans sa recherche dquivalence de lunit formelle une unit smantique, une unit de sens. Nanmoins, nous estimons que le concept des units de traduction tel quil est prsent par Vinay et Darbelnet, sur le plan scientifique, ne peut pas avoir de grande valeur car il ne prsente pas de dfinition bien limite. Ballard sinterroge, juste titre, sur la notion quenglobe la dfinition de lunit de traduction.

Il sagit en fait dune sorte de critique induisant les auteurs en erreur : les units lexicologiques sont-elles les seules units de pense? Ny a-t-il pas unit de pense dans une unit grammaticale? dans un rapport interpropositionnel? Le temps dun verbe nest-il pas une unit? Et de conclure que la dfinition de lunit de traduction chez Vinay et Darbelnet tend donner une image de lunit de traduction axe sur le lexique, sur des expressions et en particulier des expressions idiomatiques. En effet nous pensons que lune des principales utilits de leur unit de traduction - malgr les difficults que pose son application aux tudiants - se trouve dans le cadre didactique dans la mesure o elle servirait faire reprer les collocations, les expressions figes et les idiotismes surtout sils sont scinds. Car dans le cas contraire ltudiant, en donnant lquivalent de chaque mot de lexpression part, aboutira en gnral un non-sens, un faux sens... Bref une mauvaise traduction.

Dans le cadre pdagogique de la traduction, Delisle, pour sa part, prfre parler dunits textuelles et non dunits de traduction. Pour lui lunit textuelle offre un contexte suffisant et indispensable pour clairer le texte, ce qui permet au traducteur de trouver lquivalence de traduction. Nanmoins, les limites de ces units textuelles, et en attendant quil y ait des progrs dans la textologie, ne peuvent tre dfinies quempiriquement, il sagit donc dune sorte dintuition:

Il est impossible, dit-il, den fixer in abstracto et a priori les limites matrielles. Tant que les conditions minimales ncessaires pour traduire un concept nauront pas t tablies objectivement par la textologie, cest empiriquement quil faudra juger de la pertinence dun mini-contexte. Dans des tudes postrieures la Stylistique compare du franais et de langlais, des chercheurs tels Lederer, Seleskovitch et dautres reprennent le terme dunit de traduction, unit de sens auquel ils cherchent donner une dfinition qui est plutt pragmatique.

Lunit de sens, dit Lederer, est la fois plus grande et plus petite que lunit grammaticale classique, la phrase ou la proposition. Sa face linguistique est compose du signifiant/signifi de la phrase, mais sa face idique ne se constitue quavec la fusion des signifis et dun savoir non verbal mobilis en mme temps queux par les signifiants. Ces signifiants, vecteurs du signifi et mobilisateurs du savoir pertinent, chargent la mmoire immdiate ( raison de six sept mots la fois) pour disparatre au fur et mesure que la fusion des signifis et du savoir non verbal aboutit la constitution des ides. Pour simplifier nous pouvons dire que lunit de sens, est ce que le traducteur comprend la fois en lisant quelques mots. Cette limite est due la capacit de sa mmoire immdiate, sa capacit mmoriser des informations Les sept procds de traduction

Dans leur passage dune langue une autre les traducteurs ont recours diffrents procds que Vinay et Darbelnet essaient de dgager. Il sagit pour eux de sept solutions pratiques adapts aux difficults de la traduction quils classent en deux sous-catgories: la traduction directe ou littrale (les trois premiers procds) et la traduction oblique (les quatre derniers procds):

Les traductions directes

Lemprunt direct est le procd par lequel on transplante en langue cible un mot ou une lexie complexe de la langue source, soit pour combler une lacune lexicale, soit pour conserver la couleur locale: mmliga mamaliga.

Lemprunt direct. Lemprunt consiste ne pas traduire le mot de la langue de dpart mais lintgrer la langue darrive. Il sert combler une lacune extralinguistique: une technique nouvelle, un nouveau concept inconnu, etc. En effet, lemprunt nest pas un vrai procd de traduction mais faute dautres solutions il prsente quand mme une solution qui nest pas, dailleurs, accepte par tous les traducteurs.

En ce qui concerne lemprunt direct, la traduction directe se prsente sous la forme dune ressemblance phonmatique. Cest le procd auquel le traducteur fait appel:

-si un terme quivalent qui recouvre dune manire exacte la ralit voque nexiste pas dans la langue cible;

-si le traducteur veut replacer le texte darrive dans le contexte caractristique du texte du dpart.

On doit prendre en considration deux cas particuliers:

Lemprunt direct est insr dans le texte original pour lune des raisons invoques plus haut et la traduction le laisse intact:

le ruissellement paradoxal des oueds scurgerea paradoxal a uedurilor (CI. Lvi-Strauss, 110-136).

Il y a plusieurs faons de boire le mat. Mat-ul se bea n mai multe feluri.

(CI. Lvi-Strauss, 144-173).

Dans certains autres cas, lemprunt saccompagne dune glose priphrastique qui a le rle dexpliciter le terme, priphrase qui est traduit:

Un soir nous nous sommes arrts non loin dun garimpo, colonie de chercheurs de diamants.

ntr-o sear m-am oprit nu departe de o garimpo, colonie de cuttori de diamante.

(CI. Lvi-Strauss,178-213).

Le mot est transmis tel quel dans la traduction:

Mncau n tcere mmlig plin de bouri.

Ils mangeaient en silence de la mamaliga pleine de grumeaux.

(T. Popovici,521-619).

Il sagit dans la majorit des cas de termes de civilisation conservs dans le texte darrive pour la prcision de lindication rfrentielle ou pour la couleur locale. Ainsi, luvre de Panait Istrati abonde en mots roumains qui se rapportent la civilisation matrielle, lorganisation socio-politique etc):

acareturi, camara, coliba, pridvor, prispa, tinda etc.

cotiuga, coviltir etc.

clondir, cobilitza etc.

basma, caciula, toulpan etc.

Borche, caltabosh etc.

Argat, baciu, crciumar etc.

L encore, le mot roumain insr dans le texte franais est souvent glos par une priphrase explicative:

Sima Caranfil possdait Braila de belles acareturi, comme on nomme l-bas tout immeuble; mais immeuble ne dsigne pas aussi bien que acareturi tout ce quun Sima possdait Braila.

(P. Istrati, apud V. Covaci).

Pour des raisons stylistiques, on peut trouver des mots dans le texte de dpart dans une langue trangre qui sont retransmis sous cette forme dans le texte darrive, ce qui annule leffet obtenu par leur insertion dans le texte source:

Topazul e absolut veritabil, bate n roz fiindc a fost expus la cldur. E un aa-zis rubin brazilian sau topaze brle. La topaze est parfaitement vritable; si elle prsente des reflets roses, cest quelle a t expose la chaleur. Cest ce quon appelle un rubis brsilien ou topaze brle. (G. Clinescu, 40-36).

Lemprunt direct qui na pas t compltement assimil peut donner naissance des interfrences de nature diaphrastique (utilisation de termes spcifiques dun discours dans un autre type de discours):

le sable beige et le limon violet. nisipul bej i nmolul violet.

(CI. Lvi-Strauss, 110-136).

Le calque rsulte de la traduction littrale des lments constitutifs dune lexie complexe: tir quatre pingles tras la patru ace.Le calque est une forme demprunt dun genre particulier. Il consiste non pas intgrer lunit lexicale de la langue de dpart mais traduire littralement les lments qui la composent. Vinay et Darbelnet distinguent entre le calque dexpression ou ce que lon peut galement appeler calque smantique et dans lequel on respecte les structures syntaxiques de la [langue darrive], en introduisant un mode expressif nouveau et le calque de structure, o lon introduit dans la langue darrive une structure nouvelle.

En effet, ce genre de calque pourrait dformer la langue rceptrice, car il introduit des structures nexistant pas dans cette langue crant ainsi une rupture avec son systme, do la critique pure et dure de ce procd notamment par des puristes.

Ce procd consiste en une traduction littrale des lments constitutifs dune squence de mots ou en un transfert smantique opr sous la dominance dune relation htronymique.

Plusieurs critres peuvent servir de base une typologie des calques:

le niveau impliqu: lexpression ou le contenu

En vertu de ce critre on distingue:

a. des calques structurels

Ces calques sont de traduction htronymiques conformes aux rgles de structuration de la langue source: a se termina n coada de pete (fr. finir en queue de poisson),

tras la patru ace (fr. tir quatre pingles),

drum n ac de pr (fr. route en pingles cheveux),

mn curent (fr. main courante).

b. des calques smantiques

Ce type de calques rsulte de lextension du sens dun mot sous linfluence du smantisme de lhtronyme direct. Ainsi, le mot roumain abtut a acquis le sens dprim sur le modle du mot franais abattu:

la rcurrence

Certains calques sont figs et enregistrs dans les dictionnaires: a fi la fonduri (fr. tre en fonds). Dautres ont un caractre accidentel:

En Afrique, la marchande propose au client les menus excdents de son activit domestique. Deux ufs, une poigne de piments, une botte de lgumes, une autre de fleurs, deux ou trois rangs de perles faites de graines sauvages il de chvre rouges pointills de noir, larmes de la vierge grises et lustres rcoltes et enfiles pendant les instants de loisirs.

n Africa de pild, negustoreasa i propune clientului prisosul mrunt rezultat din activitatea ei casnic: dou ou, un pumn de ardei, o legtur de zarzavaturi, un buchet de flori, dou sau trei coliere de semine slbatice ochi de capr roii cu mici puncte negre, lacrimile fecioarei cenuii i nirate n clipe de rgaz.

( CI. Lvi-Strauss, 123-148).

De acolo plecam s ncercm alt vnat: i-aducea el aminte de nite ravac nebun, la prispa nalt sau de nite snge-de-iepure, s dai cu cciula-n cini.

De l, nous partirons la recherche dautre pinard, car il se souvenait soudain dun fameux petit vin, des hautes collines, ou dun sang de lapin perdre son bonnet.

(M. Caragiale, 127-48).

Dans certains autres cas, le calque apparat dans la langue de dpart et il est retransmis tel quel dans la langue cible emprunteuse:

n clipa n care ai aprea la fereastra dormitorului ca s v cltii ochii cu privelitea plantaiilor, garda ar cabra caii.

A linstant o vous apparatriez la fentre de votre chambre pour vous rincer la vue devant le paysage des plantations, la garde devrait cabrer les chevaux.

(P. Pardu, 108-14).

Eram amndoi pe marginea mrii. Eu ca s-mi fac coiful cu nisip, el ca s-i fac mna, nvrtind crile de joc.

Nous nous trouvions tous les deux au bord de la mer. Moi pour astiquer mon casque avec du sable, lui pour se faire la main en manipulant des cartes jouer.

(P. Pardu, 119-23).

Le calque peut aussi apparatre comme une faute de langue si lhtronymie et/ou la structure indirecte est obligatoire: ver luisant vierme lucitor au lieu de licurici. Le casseur dassiettes sprgtorul de farfurii au lieu de scandalagiul. La paraphrase littrale consiste en un transfert htronymique dun nonc; les htronymes directs assurent les mmes fonctions syntaxiques et sont placs dans le mme ordre:

Evenimentul zilei strnise oarecare interes.

Lvnement du jour avait soulev un certain intrt.(J. Bart, 26-22)

Comme on le voit par les exemples ci-dessus des deux premiers types affectent des units de rang infrieur: mots ou lexies complexes, tandis que la paraphrase littrale est un nonc quivalent.

La paraphrase littraleLa paraphrase littrale est un transfert terme terme de la phrase de dpart qui rsulte dune convergence lexico-grammaticale: htronomie directe, rgles dagencement identiques, ordre squentiel des htronymes identique:

Penelopa l privi cu admiraie.

Pnlope le regarda avec admiration.

(P. Pardu, 141-41).

Cette retransmission dunits est souvent inoprante du point de vue de lefficacit de la traduction, car le traducteur doit se librer des traductions-calque et reconstituer le message partir des ides et des intentions vhicules par le texte de dpart.

On connat le problme des faux amis; le calque est leur proche parent et si le traducteur expriment ne tombe pas dans le pige du faux sens grossier, il lui arrive dappliquer une rgle trs simple: toujours douter de la stricte identit conceptuelle de formes semblables dans deux langues .

Il arrive nanmoins que le traducteur fasse appel la traduction directe en connaissance de cause.

En linguistique contrastive, la correspondance terme terme joue le rle dun axe partir duquel on calcule les divergences entre les deux langues. Soit la phrase:

Toi ofierii i reluar locurile pe punte.

Tous les officiers occuprent leurs places habituelles sur le pont.

(J. Bart, 46-47).

Cette version de la phrase roumaine qui suit dassez prs le texte de dpart, fait pourtant ressortir des divergences de structuration importantes qui interdisent une traduction dans le sens strict du terme:

Une position diffrente de larticle dfini: toi ofierii tous les officiers; Un rgime diffrent de larticle dfini en combinaison avec la prposition: pe punte sur le pont; Une restructuration des moyens par lesquels on exprime la possession dans les deux langues: datif possessif en roumain prdterminant possessif en franais: i reluar locurile Ils occuprent leurs places.

La traduction littrale proprement dite aurait donn:

Tous les officiers les se prirent les places sur pont.

Dans la plupart des cas, la traduction littrale nest quune illusion, car mme l o elle est correcte, les divergences structurelles sont notables.

La traduction littrale ou le mot mot, cest le passage dune langue dans une autre en respectant uniquement les servitudes linguistiques. Cest un procd qui aboutit parfois une traduction inacceptable. Vinay et Darbelnet montrent eux-mmes les inconvnients de ce procd:

par inacceptable, nous entendons que le message tel quil se laisse rdiger littralement, (a) donne un autre sens, (b) na pas de sens, (c) est impossible pour des raisons structurales, (d) ne correspond rien dans la mtalinguistique de [la langue darrive], (e) correspond bien quelque chose, mais non pas au mme niveau de langue proposent une autre alternative : le recours la traduction oblique.

La paraphrase directe par permutation

La paraphrase par permutation consiste en un changement de lordre squentiel sans incidence sur le sens de lnonc. Le choix de lordre des mots est non seulement le rsultat dune option du traducteur, mais il est soumis aussi des contraintes relevant de la squence caractristique de chacune des langues implique dans la traduction. Dans le domaine de traductions il est dusage de distinguer entre ce qui est impos par le systme de la langue cible et ce qui reprsente lexploitation de certaines prfrences Ordre squentiel

SHAPE \* MERGEFORMAT

Obligatoire non obligatoire

(contraintes statistique optionnel

squentielles) (usage)

Il existe en roumain comme en franais des lments qui ne peuvent pas ouvrir la phrase. Ainsi, en franais la ngation ne peut pas tre place en tte dune phrase assertive, ce qui entrane une rorganisation de la squence:

Nu s-a putut afla cine-i trimitea.

On na pu savoir qui les envoyait.

(P. Pardu, 147-45).

Il y a des cas quand une contrainte de la langue source se rsout en un ordre squentiel non obligatoire de la langue cible:

Nimeni nu va descoperi vreodat adevrul.

Jamais personne ne dcouvrira la vrit.

(P. Pardu, 155-52).

A la diffrence du terme ngatif niciodat, le correspondent positif vreodat ne peut pas ouvrir la phrase; en franais jamais peut occuper une place libre.

Il nest pas possible non plus en franais de commencer la phrase par le prdicat verbal, tandis quen roumain cest lordre le plus normal:

Moare regina!

La reine se meurt!

(P. Pardu, 106-12).

Ensuite, les inondations commencent.

Apoi ncep inundaiile.

(CI. Lvi-Strauss, 111-138).

De mme, le complment dobjet direct nouvre pas, normalement, la phrase assertive franaise:

Amnunte n-am voie s dau.

Je nai pas le droit de vous donner des dtails.

(P. Pardu, 101-8).

La paraphrase par rorganisation du schma actanciel

Si la structure actancielle sous-jacente de la phrase est considre comme une plate-forme commune des langues, les rgles par lesquelles un nominal est choisi en position privilgie de sujet ou en position dobjet (direct ou indirect) peuvent tre diffrentes dune langue lautre. Elles se trouvent sous la dominance du microsystme verbal ou du thme du verbe.

Les voies dapproche qui peuvent tre adoptes dans lanalyse de la structure actancielle et de son transfert en langue cible sont:

Une voie qui prend comme point de dpart la relation htronymique qui stablit entre les verbes, partir de la constatation gnrale que cest le verbe pivot de la phrase qui conditionne la ralisation superficielle, le type de marqueur casuel impliqu (prposition-position, prposition a prposition b).

Ainsi, le complment dobjet de lieu scnique (M. Gross) du franais correspond une structure prpositionnelle du roumain:

Toute vie avait quitt la mer. Orice via dispruse de pe mare. (CI. Lvi-Strauss, 111-138).

Dispruse din ora fr s lase vreun semn.

Celui-ci avait quitt la ville sans laisser de trace.

(A. Buzura, 18-16)

De mme, lobjet direct du roumain peut revtir la forme dun complment prpositionnel valeur locative:

n loc de orice rspuns plsese tcut, poate propriile nfrgeri. La jeune femme avait pleur sans mot dire, sans doute sur ses propres insuccs. (A. Buzura, 14-13).

Un actant locatif ralis par un datif peut avoir comme correspondant un objet prpositionnel:

Nu tiu cum s mi-l apropii.

Je ne sais comment my prendre pour le rapprocher de moi. (A. Buzura, 15-14)

Dautres rorganisations actancielles reprsentent des modulations actancielles:

Plicul mirosea a pin siberian.

De lenveloppe manait une senteur de pin de Sibrie.

(P. Pardu, 103-9).

Une voie qui prend comme point de dpart la relation casuelle sous-jacente pour examiner ensuite les ralisateurs dans les deux langues impliques dans la traduction.

Lexemple le plus rvlateur est celui de lExprimentateur, cas spcifique des verbes dexprience subjective. Ce cas est ralis dans les deux langues par des formes casuelles (marqueurs) divergent(e)s:

Exp

L L

Objet indirect Sujet actif

Lui Costache nu-i plcea uica, nici rece nici cald.

Costache naimait pas la tzouica, ni frache, ni chaude.

(D.R. Popescu, 49-361).

Biata femeie cum mai plngea. Mi se rupea inima.

Pauvre femme, comme elle pleurait. Jen avais le cur serr.

(L. Rebreanu, II, 377-505)

I- a fost dor de dnsul.

Elle avait envie de le voir.

(L. Rebreanu, II,442-590).

Exp

L L

Objet direct Objet indirect

Cela lui cote de lui parler ainsi.

l cost c trebuie s-i vorbeasc astfel.

La mme divergence est signale dans le cas des verbes directionnels locutoires:

Nu nelesei, avui o clip de ezitare, vrusei s-o ntreb de ce dar renunai, m ntorsei n rezerv

Je ne comprenais pas, cest pourquoi jeus un moment dhsitation; jaurais voulu lui demander pourquoi mais y renonant, je rentrai dans la pice

(M. Preda, II, 223-114).

Exp

L L

Objet indirect Objet direct

i veni s rd.

Lenvie de rire le prit.

(A. Buzura).

Une conclusion simpose: lhypothse fondamentale de toute traduction est que la possibilit de transmettre des donnes informationnelles, affectives et cognitives dune langue lautre est fonde sur les mmes proprits gnrales. Si ces proprits gnrales rencontrent des proprits particulires, le transfert peut revtir la forme dune traduction directe.

La traduction directe se place des niveaux fonctionnels diffrents:

Lemprunt direct affecte le niveau lexical (lexie simple ou complexe);

Le calque relve de lagencement des mots ou des latitudes combinatoires dun lexme dans le cas du calque smantique;

Le niveau phrastique est impliqu dans la paraphrase directe, littrale ou non littrale.

Les deux premiers procds contribuent lenrichissement de la langue emprunteuse, mais tandis que lemprunt direct rvle une lacune dnotative ou connotative de la langue cible, le calque, en tant que procd plus complexe, se situe sur le terrain de rencontre des moyens internes denrichissement du lexique avec les moyens externes.

Quant la paraphrase directe littrale, elle a toujours t considre comme une solution inadquate que le traducteur chevronn se doit dviter. Ce discrdit qui frappe la traduction dite littraire nest pourtant quen partie justifi, car il existe des cas o elle simpose comme une solution naturelle.

Dans le passage de la langue source la langue cible, les phrases sont le plus souvent restructures syntaxiquement. Cest le cas des paraphrases directes non littrales. On peut considrer que deux units phrastiques interlinguales fondes sur lhtronymie et principalement sur lhtronymie des verbes pivot sont des paraphrases directes si elles ne diffrent que par lordre de leurs constituants respectifs. Mais en mme temps il faut reconnatre la modification squentielle le statut dune composante qui peut avoir, si elle est facultative, des rpercussions sur le sens de lnonc.

Il va de mme des restructurations actancielles. Si elles ont un caractre obligatoire on peut parler de paraphrases directes non littrales car elles nont pas dincidence sur le sens de lnonc. Sil sagit dune option du traducteur, ces modifications trahissent une perspective smantique diffrente, une modulation par topicalisation.

Dans la traduction, qui implique une invariance informationnelle, affective et cognitive, des difficults surgissent qui mettent en cause la notion mme de paraphrase interlinguale.

Les traductions indirectes La transposition est un procd indirect qui consiste en un changement de la structuration grammaticale du texte de dpart engageant soit un changement de la classe de lunit soit une rorganisation des moyens lexico-grammaticaux qui nentrane pas une rorganisation des moyens smantiques:

Incearc s citeasca adevrul in ochii lui.

Il essaya de lire la vrit dans les yeux de Puiu.

(L. Rebreanu, II, 11-9)

La transposition est un procd par lequel on remplace une partie du discours (nom, verbe, adjectif, etc.) par une autre sans quil ny ait ni gain ni perte au niveau smantique. Lide exprime dans un texte par un nom peut par exemple tre rexprime dans lautre langue par un verbe, et vice versa. Vinay et Darbelnet font la distinction entre deux sortes de transposition: transposition obligatoire et transposition facultative.

Rorganisation grammaticale et constante smantique

En tant que procd de traduction indirecte, la transposition consiste en une rorganisation grammaticale qui laisse intacte la structure de signification. Il existe dans la transposition une constante smantique qui se ralise par une mise en relation htronymique entre les units lexicales constitutives du texte source et du texte cible.

La transposition est une paraphrase syntaxique et elle peut tre releve lintrieur dune mme et unique langue (paraphrase intralinguale) ou, dans le cas de la traduction, entre deux langues diffrentes (paraphrase interlinguale).

La transposition pourrait tre dfinie comme une mise en relation dune unit source avec une unit cible qui prsente une diffrence de structuration grammaticale (unit transpos):

U source U cible transpose

Soit schmatiquement:

L L

Se ndreapt fr grab Il se dirigea sans hte vers la

spre u. porte.

SHAPE \* MERGEFORMAT

Se ndreapt spre u Il se dirigea vers la porte

fr s se grbeasc. Sans se hter.

Comme on le voit par les exemples ci-dessus, la transposition consiste en une transformation de la classe grammaticale laquelle appartient lunit source qui se place au niveau sous-phrastique ou phrastique.

La transposition peut tre obligatoire ou facultative:

Il y a des transpositions obligatoires dues des incompatibilits de structure et des transpositions facultatives quand les mmes structures existent dans les deux langues.

Il arrive pourtant quil y ait une disparit dordre statistique mme dans le cas de la transposition facultative, lune des solutions tant prfrentielle.

Ltude des transpositions obligatoires relve de la contrastivit, car cest travers le transcodage indirect que lon peut saisir les divergences structurelles qui sparent les deux langues.

Types et sous-types de transpositions

Il existe plusieurs critres en fonctions desquels on peut tablir les diffrents types et sous-types de transpositions:

1) La complexit: le nombre dunits de signification transposes;

2) Le niveau fonctionnel impliqu dans la transposition (phrastique ou sous-phrastique);

3) La nature morphosyntaxique des units engages dans cette opration paraphrastique.

Le critre primordial adopt ici est celui de la complexit, les autres critres combins servant distinguer les sous-types des transpositions.

Le schma qui suit rend compte de cette disposition par ordre de complexit croissant:

Transpositions

Simples complexes

ponctuelles par incidencielles incidencielles inverses globales

expansion corrlatives

1 2 3 4