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1 Accueil et conduite à tenir face aux personnes avec un syndrome d’Ehlers- Danlos en situation d’urgence. Risques et incompréhensions. Professeur Claude Hamonet, consultation Ehlers-Danlos Service de médecine physique et de Réadaptation. Hôtel-Dieu de Paris Avec le soutien de la Fondation de France Introduction Dans notre expérience du syndrome d’Ehlers-Danlos, nous avons constaté que très souvent les situations d’urgence sont mal vécues ou à risque compte-tenu du fait que la quasi- totalité des médecins ignorent l’existence du syndrome d’Ehlers-Danlos et les manifestations cliniques qui le caractérisent. Pire ! La fragilité de ces personnes face à certains actes diagnostics (ponction lombaire) ou thérapeutiques (manipulation cervicale, chirurgie orthopédique) étant ignorée ou niée, malgré les dires des patients dans certains cas les expose à des accidents graves sur le plan vital comme sur le plan fonctionnel. Ce qui est le plus traumatisant pour ces patients est de ne pas être crus, de s’entendre dire « c’est dans la tête », voire d’être pris pour des simulateurs. Ce syndrome qui porte le nom de deux descripteurs dermatologues (Ehlers, Copenhague, 1900, et Danlos, Paris 1908) reste quasiment inconnu aujourd’hui des professions de santé et pourtant sa symptomatologie est riche et parfois inquiétante, à l’origine de nombreuses situations vécues de façon dramatique et conflictuelles parce qu’incomprises et, pour les personnes concernées et leurs proches, frustrantes voire humiliantes. Le syndrome d’Ehlers-Danlos se caractérise par une altération d’origine génétique, du tissu conjonctif, particulièrement des collagènes (ils sont aujourd’hui, au nombre de trente) qui assurent la cohésion des fibres de ce tissu. Le conjonctif qui constitue 75% au moins du corps humain est mince, donc fragile, et a perdu ses capacités physiques de réactivité aux sollicitations mécaniques, principalement par manque d’élasticité. De ce fait les capteurs qui sont placés dans ces tissus et renseignent sur les sensations corporelles, ne rempliront pas ou mal leur rôle. La perception de leur propre corps par ceux qui sont atteints sera modifiée : déformée, absente ou exagérée (dans le sens de la douleur surtout). On a alors affaire à un gigantesque syndrome proprioceptif qui conduit les patients à dire que : « leur esprit et leur corps sont séparés » ou bien qu’ils « voudraient se débarrasser de leur corps », ou encore que « leur corps ne leur obéit pas », « qu’ils ne sont pas maître chez eux. » Les altérations des sensations, les dérèglements du contrôle moteur, des sensations et du système neurovégétatif qui s’ensuivent sont à l’origine d’une symptomatologie, pouvant être spectaculaire et angoissante et, du fait de l’ignorance du syndrome par le corps de santé, sont à l’origine de situations d’incompréhensions et d’erreurs psychologiques et thérapeutiques parfois graves. L’intensité des symptômes et l’allure dramatique du tableau clinique (sensation de mort imminente parfois), contrastent, heureusement, avec l’absence habituelle d’issue dramatique. Ce contexte doit être d’autant mieux connu que ce syndrome, classé à tort parmi les maladies rares donc rarement évoquées est en fait fréquent puisqu’on estime sa prévalence- incidence, en France, à 500.000 personnes au moins. Par contre, il est rarement diagnostiqué et constamment confondu avec d’autres tableaux cliniques plus familiers aux médecins.

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Accueil et conduite à tenir face aux personnes avec un syndrome d’Ehlers-Danlos en situation d’urgence. Risques et incompréhensions. Professeur Claude Hamonet, consultation Ehlers-Danlos Service de médecine physique et de Réadaptation. Hôtel-Dieu de Paris Avec le soutien de la Fondation de France Introduction Dans notre expérience du syndrome d’Ehlers-Danlos, nous avons constaté que très souvent les situations d’urgence sont mal vécues ou à risque compte-tenu du fait que la quasi-totalité des médecins ignorent l’existence du syndrome d’Ehlers-Danlos et les manifestations cliniques qui le caractérisent. Pire ! La fragilité de ces personnes face à certains actes diagnostics (ponction lombaire) ou thérapeutiques (manipulation cervicale, chirurgie orthopédique) étant ignorée ou niée, malgré les dires des patients dans certains cas les expose à des accidents graves sur le plan vital comme sur le plan fonctionnel. Ce qui est le plus traumatisant pour ces patients est de ne pas être crus, de s’entendre dire « c’est dans la tête », voire d’être pris pour des simulateurs. Ce syndrome qui porte le nom de deux descripteurs dermatologues (Ehlers, Copenhague, 1900, et Danlos, Paris 1908) reste quasiment inconnu aujourd’hui des professions de santé et pourtant sa symptomatologie est riche et parfois inquiétante, à l’origine de nombreuses situations vécues de façon dramatique et conflictuelles parce qu’incomprises et, pour les personnes concernées et leurs proches, frustrantes voire humiliantes. Le syndrome d’Ehlers-Danlos se caractérise par une altération d’origine génétique, du tissu conjonctif, particulièrement des collagènes (ils sont aujourd’hui, au nombre de trente) qui assurent la cohésion des fibres de ce tissu. Le conjonctif qui constitue 75% au moins du corps humain est mince, donc fragile, et a perdu ses capacités physiques de réactivité aux sollicitations mécaniques, principalement par manque d’élasticité. De ce fait les capteurs qui sont placés dans ces tissus et renseignent sur les sensations corporelles, ne rempliront pas ou mal leur rôle. La perception de leur propre corps par ceux qui sont atteints sera modifiée : déformée, absente ou exagérée (dans le sens de la douleur surtout). On a alors affaire à un gigantesque syndrome proprioceptif qui conduit les patients à dire que : « leur esprit et leur corps sont séparés » ou bien qu’ils « voudraient se débarrasser de leur corps », ou encore que « leur corps ne leur obéit pas », « qu’ils ne sont pas maître chez eux. » Les altérations des sensations, les dérèglements du contrôle moteur, des sensations et du système neurovégétatif qui s’ensuivent sont à l’origine d’une symptomatologie, pouvant être spectaculaire et angoissante et, du fait de l’ignorance du syndrome par le corps de santé, sont à l’origine de situations d’incompréhensions et d’erreurs psychologiques et thérapeutiques parfois graves. L’intensité des symptômes et l’allure dramatique du tableau clinique (sensation de mort imminente parfois), contrastent, heureusement, avec l’absence habituelle d’issue dramatique. Ce contexte doit être d’autant mieux connu que ce syndrome, classé à tort parmi les maladies rares donc rarement évoquées est en fait fréquent puisqu’on estime sa prévalence- incidence, en France, à 500.000 personnes au moins. Par contre, il est rarement diagnostiqué et constamment confondu avec d’autres tableaux cliniques plus familiers aux médecins.

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Ayant créé, depuis 15 ans une consultation dédiée à ce syndrome qui a accueilli plus de 1400 personnes dont une majorité a été suivie avec des épisodes aigus, conduisant à consulter les urgences. Nous avons recensé, ici, les tableaux cliniques les plus souvent observés en indiquant les modalités de réponses qui nous semblent les plus appropriées compte-tenu de notre expérience d’un syndrome qui est bien mal placé entre sa diversité d’expression et la méconnaissance du corps médical de son existence. Les situations d’urgence et Le Syndrome d’Ehlers-Danlos Chacun des nombreux symptômes qui font partie du syndrome peuvent réaliser une situation d’allure dramatique qui conduit, tout naturellement, aux services d’urgences médicales ou chirurgicales. Parmi les situations cliniques que nous avons identifiées par l’interrogatoire et le suivi de nos patients figurent : les crises douloureuses, les malaises avec ou sans perte de connaissance, les détresses respiratoires, les subocclusions, les accidents hémorragiques, les troubles aigus de la vision, les crises vertigineuses, les pseudos paralysies, les crises dystoniques, les dystocies, les urgences stomatologiques. La première étape est de savoir reconnaître le syndrome diagnostiquer le syndrome, de ne pas « passer à côté. » Ceci est aujourd'hui facile par quelqu’un qui est averti. Les patients qui en sont atteints savent d’ailleurs très bien les dépister dans leur propre famille devant un regroupement de signes cliniques dans les formes les plus expressives d’Ehlers-Danlos. Faire rapidement le diagnostic de syndrome dans un contexte d’urgence. « Écoutez votre patient, il vous fera le diagnostic » (Osler) C’est possible par la seule clinique. La symptomatologie qui conduit aux urgences est déjà un élément d’orientation puisqu’elle s’intègre dans le tableau clinique de ce syndrome qui doit être systématiquement discuté concurremment avec les diagnostics plus familiers aux urgentistes. La négativité des examens paracliniques est, en soi, un facteur d’orientation. Les signes d’orientation. Trois signes simples font suspecter le SED: -le signe de la porte (se heurter à l’encadrement des portes) qui exprime les troubles proprioceptifs. -Le signe de la portière (ressentir une décharge électrique lorsqu’on saisit le portière d’une voiture ou d’un caddy) qui exprime la minceur de la peau très conductrice. -Le signe de la chaussette (mettre des chaussettes ou une bouillotte pour dormir au niveau des pieds qui sont froids). Il exprime le faux syndrome de Raynaud habituel du fait de la dysautonomie importante avec troubles de la thermorégulation. Les signes de certitude Six signes permettent de l’affirmer de façon formelle, en l’absence de test biogénétique parce que ce regroupement de symptômes est caractéristique, parce qu’il n’y a pas d’autre tableau clinique pouvant donner le même ensemble de manifestations, enfin il y a un ou plusieurs cas familiaux, qui peuvent être moins évocateurs (surtout chez les hommes),signant le caractère génétique. Tous ces symptômes sont variables avec des renforcements lors de « crises » qui conduisent, précisément aux urgences. L’absence d’un ou même de plusieurs de ces signes ne permet pas d’éliminer le diagnostic comme on le voit trop souvent faire. Les formes incomplètes sont nombreuses. L’existence d’autres symptômes (digestifs, respiratoires, ORL, ophtalmo, neurovégétatifs (dysautonomie) prend alors une signification importante surtout si d’autres cas familiaux sont identifiés, souvent porteurs de diagnostics erronés fibromyalgie, sclérose en plaques, PSR, PR, Gougerot-

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Sjögren, myopathie, myasthénie, endométrioses, maladie caeliaque ou de Crohn, asthme etc. 1- Les douleurs. Elles sont multiples et variables dans leurs localisations (périarticulaires, cutanées, musculaires, abdominales, thoraciques, crânio-encéphaliques, génitales…) tout le corps est ou peut être douloureux. Elles sont souvent difficiles à décrire, souvent très intenses (dépassant le score 10 sur les échelles analogiques où ils ne sont jamais à 0, disent-ils), toujours sous-estimées, souvent rebelles aux traitements antalgiques usuels même puissants. 2- La fatigue et la somnolence. C’est le symptôme considéré comme le plus handicapant. Remarquable par son intensité, allant jusqu’à l’endormissement brutal en pleine activité. Il freine toutes les activités y compris la marche et l’idéation. Il contraste fréquemment avec un état insomniaque. 3- Les troubles proprioceptifs. Sous ce terme se regroupent toutes les difficultés du contrôle des mouvements et des gestes des membres, du cou et du tronc : pseudo entorses, luxations et subluxations, maladresses, déséquilibre, heurt d’objets, pseudo paralysies. 4- Les signes cutanés : finesse, fragilité, vergetures, troubles de cicatrisation, étirabilité (inconstante et modérée contrairement à une idée fausse solidement ancrée dans l’esprit les croyances des médecins). 5-Une tendance hémorragique : elle est due à la fragilité des petits vaisseaux (peau et muqueuses) et se traduit par des ecchymoses, des hématomes, des gingivorragies, des épistaxis, des hémorragies digestives et urinaires. 6-L’hypermobilité articulaire est un signe classique fréquent mais qui peut manquer, d’autant que le test de Beighton, habituellement utilisé pour la mesurer, s’avère peu fiable et que certains prônent son abandon. Bon nombre d’autres symptômes sont à rattacher au SED (digestifs, respiratoires, vésico-sphinctériens, bucco-dentaires, ORL, ophtalmologiques, neuro-végétatifs, cognitifs), ils ne doivent pas égarer le clinicien vers d’autres pathologies mais, au contraire, apporter leur contribution au diagnostic, du fait même de leur diversité témoin de l’étendue des lésions du conjonctif.

Faire face aux situations d’urgences dans le syndrome d’Ehlers-Danlos. Six tableaux cliniques sont habituellement rencontrés : Douleurs, détresse respiratoire, luxations et entorses, pseudo paralysies, pertes de connaissance, occlusion intestinale. Ce qu’il ne faut pas faire -Ne pas écouter le patient et son entourage et ne pas le croire (« écoutez votre malade, il vous fera le diagnostic », Osler). -Manipuler le cou (risque de lésions des vaisseaux du cou (artère vertébrale surtout) ou ostéo-articulaires (hypermobilité). -Donner des anticoagulants ou antiagrégants plaquettaires (risque majeur d’accident hémorragique), -Faite une coloscopie (risque hémorragique et/ou de perforation intestinale), -Faire une ponction lombaire (risque de plaie méningée) sauf contexte impératif (c’est le cas de la péridurale lors d’un accouchement). Etre alors très prudent d’autant que le rachis est très mobile et le passage de l’aiguille à PL pas toujours aisé. -Opérer une articulation (épaules, genoux surtout), les échecs sont la règle même après 17 tentatives sur un même genou comme nous l’avons vu!

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-Donner des anti-inflammatoires (risque d’hémorragies digestives) et des corticoïdes (mêmes risques et prises de poids, ostéoporose sur os ostéopénique, prise de poids facile dans le syndrome). Ce qu’il faut faire, une fois le SED identifié. 1-Devant une crise douloureuse « Sur une échelle de 10, mes douleurs ne sont jamais inférieures à 2 et, lors de crises, elles sont à 15 plutôt qu’à 10! » (Paroles de patientes avec un SED. Ces crises sont de deux sortes : localisées ou diffuses, généralisées Les crises localisées peuvent être trompeuses: Les douleurs sterno-costales sont très fréquentes (71% de nos 644 cas) )dans ce syndrome, évoquant une douleur d’origine cardiaque, si elle prédomine à gauche et comporte (comme nous l’avons observé) une irradiation au membre supérieur vers les deux derniers doigts. Elles sont facilement identifiées par la douleur provoquée à le pression des articulations sternocostales. Elles sont soulagées par un traitement local (stimulations électriques antidouleurs par TENS, patch antidouleurs, injections anesthésiques sternocostales) ou par voie générale. Surtout pas d’anticoagulant ou d’antiagrégant. Les gilets proprioceptifs, compressifs mis au pour ce syndrome peuvent être d’un très bon appoint et ont un rôle préventif pur le futur. Les douleurs pseudo-phlébitiques d’un membre inférieur. La phlébite n’est pas, dans la cohorte importante (700 environ) de patients que nous suivons, un motif d’appel fréquent. Par contre des faux tableaux de phlébite sont assez fréquents associant des douleurs musculaires, un œdème, des changements de couleur des téguments. En l’absence de signe d’Homans, il faut être très prudent sur le diagnostic de thrombose en sachant que les échographies sont difficiles à interpréter, du fait de la structure des tissus dans le syndrome,. En pratique, il faut préférer les bas de contention ou les bandes Biflex (contention « moyenne » à l’héparine, le risque est moindre. Les migraines accompagnées peuvent être particulièrement violentes dans ce contexte. Les antalgiques et antimigraineux sont souvent impuissants, l’oxygénothérapie (3l/minute) par périodes de 10 à 60 minutes est très souvent efficace. -Les douleurs abdominales et pelviennes Elles peuvent être très violentes, pseudo-chirurgicales, brèves (mais pas toujours), à type de coup de couteau. Ailleurs, elles sont plus diffuses. L’examen est difficile avec une paroi abdominale molle qui ne révèle pas la contracture et un abdomen douloureux dans son ensemble. Si elles prédominent à droite avec ou sous irradiation scapulaire, il faut soupçonner un syndrome vésiculaire. Les lithiases sont fréquentes sur ces vésicules atones mais fines qui peuvent se rompre sous le double effet de l’action traumatisante des calculs et de l’infection. L’échographie s’impose suivie de l’ablation des calculs s’ils sont présents et de la vésicule. Certains calculs peuvent migrer et conduire à un tableau de pancréatite aigue. Les appendicites peuvent avoir une évolution rapide vers une péritonite même en l’absence de fièvre apparente chez une personne avec une température de base basse (35), comme nous l’avons observé chez une de nos patients. Ailleurs, c’est l’estomac qui est en cause dans le cadre de reflux gastro-oesophagiens responsables de brûlures pouvant être violentes. Ils sont accessibles aux inhibiteurs de la pompe à protons (Oméprazole à fortes doses) et aux pansements gastriques. Si

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malencontreusement un anneau gastrique a été mis en place, il peut s’agir d’un volvulus gastrique comme nous l’avons observé. L’intestin, distensible, ballonné, peu contractile, est lui aussi à l’origine de douleurs avec des tableaux clinques qui vont du ballonnement douloureux et « encombrant » à la subocclusions parfois sanctionnée par un acte chirurgical mutilant qu’il faut s’efforcer d’éviter à l’aide de toutes les techniques médicales d’évacuation accessibles. Les massages abdominaux, la chaleur, les stimulations électriques abdominales peuvent être utilisées conjointement avec les traitements usuels des ralentissements du transit. L’effet néfaste des opiacés et de la codéine est à rendre en compte. Un étranglement herniaire, malgré la distensibilité des tissus est possible, comme nous l’avons observé récemment. Les douleurs pelviennes sont fréquentes. L’origine génitale est habituelle, les règles sont très douloureuses. L’échographie peut montrer des images pseudo kystiques qui régressent habituellement spontanément ou sous traitement hormonal et qu’il faut s’abstenir d’opérer. Des tableaux simulant l’endométriose peuvent aussi être réalisés. Ailleurs, il s’agit de douleurs pelviennes très intenses, décrites comme transfixiantes, sans substratum anatomique évident. Le vagin peut aussi être très douloureux en permanence ou lors des rapports sexuels, des gels locaux et la Xylocaïne visqueuse sont indiqués. Lors d’un accouchement, les contractions utérines peuvent coexister avec un col qui ne s’ouvre pas, donnant faussement l’indication que le travail n’est pas commencé et créant une situation douloureuse et épuisante pour la mère. Les techniques de dilatation du col sont à effectuer. Il faut savoir aussi que les péridurales peuvent ne pas être efficaces ou ne l’être que partiellement. Les Douleurs articulaires. Elles sont très fréquentes, liées à des positions de sommeil (réalisation d’un syndrome de défilé par distension musculaire des scalènes), à des phénomènes de tendinite, d’algodystrophie, d’ébranlement des tissus après une pseudo entorses, une luxation ou une activité répétée repassage, Kinésithérapie isotonique trop « vigoureuse ». L’usage d’orthèses légères, d’injections locales de corticoïdes et de Xylocaïne, les emplâtres antidouleurs, le TENS contribuent au soulagement. Les douleurs musculaires sont souvent intenses venant juste après les douleurs articulaires pour leur intensité aux dires des patients. Elles peuvent s’accompagner de crampes, de secousses musculaires, faisant évoquer une note dystonique et incitant à utiliser (avec une efficacité fréquente) le Mantadix. L a Carnitine (Lévocarnil) per os apporte aussi ne amélioration sur ces douleurs. Les syndromes douloureux diffus. Il s’agit de crises douloureuses qui concernent l’ensemble des articulations (rachis compris), les muscles, la peau qui s’associent plus ou moins aux autres douleurs déjà décrites. Ils sont souvent un élément d’une crise plus globale avec accentuation de la fatigue, des désordres proprioceptifs et des difficultés cognitives. Les supports proprioceptifs (coussins, matelas, oreillers), les vêtements proprioceptifs et les autres orthèses (lombaires en particulier mais aussi des bandes élastiques Biflex placées aux membres inférieurs si les douleurs prédominent à cet endroit, la balnéothérapie chaude, les exercices proprioceptifs et les massages, la relaxation, l’hypnose peuvent aider. En effet ,les médications antalgiques même puissantes sont peu efficaces dans ce syndrome et se singularisent surtout par l’importance de leurs effets secondaires. Il y a deux exceptions dans la pratique quotidienne pour les fortes douleurs: le Tramadol et l’Acupan. Dans ces douleurs diffuses, le rôle de la dystonie, souvent retrouvée dans ce syndrome, peut justifier un traitement par un dopaminergique tel que le Mantadix.

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Plusieurs patients se disent soulagés de leurs douleurs, (en sus des migraines) par l’oxygénothérapie. Chez l’enfant, la mise en pace d’une coque moulée a des effets habituellement très positifs, notamment pour la scolarisation. 2-Devant une urgence respiratoire. Après les douleurs, les crises respiratoires aiguës sont l’un des motifs de consultation aux urgences le plus fréquent dans ce syndrome. Les difficultés respiratoires trouvent principalement leur origine dans le fait que les capteurs incitatifs pur les centres respiratoires ne remplissent pas leur rôle. Ceci est très bien perçu par les patients qui disent volontiers que lors d’un effort (ou même sans), « leur respiration s’arrête ». La dyspnée est très fréquente (85%) et s’associe souvent (65%) à des sensations de « blocage » respiratoire avec une difficulté inspiratoire, malgré ce dernier trait clinique, ce symptôme est usuellement confondu avec de l’asthme. Son intensité, le caractère angoissant avec sensation de mort imminente par étouffement crée une situation d’angoisse et conduit à l’Hôpital. Le traitement est avant tout l’oxygène couplé dans la mesure du possible avec un respirateur Impulsator (percussionnaire). Cette prescription systématique avec un usage quotidien préventif chez nos patients a quasiment fait disparaître ce type d’incident en restaurant la proprioception respiratoire et lutte très efficacement contre la fatigue. L’usage des vêtements proprio-compressifs (thoraciques et aux membres inférieurs contribue efficacement à cette restauration du contrôle respiratoire. Les exercices actifs respiratoires (réappropriation) sont également bénéfiques. Aucune issue dramatique n’a été portée à notre connaissance dans ce contexte. Un cas particulier est représenté par une toux irritative persistante pour laquelle les traitements locaux et l’hypnose ont pu apporter une solution dans les rares cas que nos avons rencontrés. En dehors des crises, il n’y a pas de syndrome déficitaire (restrictif ou obstructif) aux épreuves fonctionnelles respiratoires. Un cas particulier, rare, est la possibilité d’un pneumothorax qui peut être l’occasion de découverte du syndrome. 3 Devant une urgence orthopédique. Elles sont également fréquentes et sont l’expression du grand désordre proprioceptif qui existe dans ce syndrome. Les luxations. Elles concernent les épaules, les genoux (rotule s surtout), les hanches, mais aussi, les coudes, les poignets, les doigts, le péroné, les tendons péroniers latéraux (à l’occasion d’un mouvement d’adduction du pied). Elles peuvent se manifester la nuit, principalement pour les épaules, à l’occasion du relâchement musculaire nocturne qui diminue les sensations proprioceptives au niveau de cette articulation. Ailleurs c’est à l’occasion d’un changement de position lors du lever, par exemple, le lever pour les hanches. Les dystonies, à l’occasion de mouvements cloniques peut être à l’origine du mouvement luxant, notamment pour l’épaule, et de sa récidive après une réduction suivie d’une immobilisation qui fait, parfois injustement accuser la patiente de « l’avoir fait exprès ». Ces luxations peuvent être très douloureuses. Ces douleurs sont habituellement d’origine tendineuse et l’injection de Xylocaïne au niveau des insertions douloureuses facilite grandement la réintégration de la tête fémorale ou humérale. En cas d’échec des tentatives répétées et douloureuses, le mieux est de savoir patienter en mettant en place un e écharpe

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de soutien de Montréal. Après réduction ce type d’écharpe suffira pendant les jours qui suivent Il faut, en effet, éviter les immobilisations prolongées pour éviter d’accentuer les troubles proprioceptifs existants. La luxation des articulations temporo-mandibulaires peut nécessiter une réduction en plaçant les doigts derrière l’angle de la mâchoire et en l’attirant vers le bas. L’utilisation locale du TENS, des emplâtres antidouleurs, des techniques de « contracté-relâché » des muscles des masséters peuvent suffire à sortir d’une situation pénible. Les pseudos entorses sont fréquentes. Elles intéressent principalement les chevilles, les genoux, les doigts de la main. Elles sont la conséquence d’un manquement proprioceptif lors d’un mouvement et non pas de l’hyperlaxité. Cette hyperlaxité, par contre, évite les ruptures des ligaments qui s’étirent mais ne rompent pas! Le fait qu’il y ait une ecchymose ne doit pas donner le change. Le fait de saigner fait partie du quotidien des personnes avec un syndrome d’Ehlers-Danlos. Elles sont souvent très douloureuses avec hyperesthésie cutanée. et l’examen clinique doit être très doux. L’objectif thérapeutique est de soulager et de permettre la remise en activité rapidement pour ne pas aggraver le syndrome proprioceptif. Ce qu’il ne faut pas faire : mettre en place un « strapping » qui va arracher une peau qui est fragile, ne pas immobiliser avec des orthèses rigides plâtre ou thermoplastiques très mal tolérées par les tissus cutanés, mettre sous anticoagulants ou antiagrégants à cause du risque majeur d’hémorragies. Ce qu’il est conseillé de faire : soulager les douleurs par les traitements locaux (utilisation du stimulateur antidouleur-TENS, application d’emplâtres de Versatis ou de flector plutôt que le froid souvent mal toléré. Injections locales de Xylocaïne) et/ou généraux. Les plus actifs dans ce syndrome sont le Tramadol, associé ou non au paracétamol et l’Acupan. Il faut éviter, sauf absolue nécessité, le recours aux morphiniques classe I, souvent mal tolérés, peu efficaces et générateurs d’addictions problématiques. Les bandes Biflex (contention moyenne) ont un effet antalgique certain. 4-Devant une urgence à caractère neurologique. Les migraines accompagnées peuvent être particulièrement violentes dans ce contexte. Les antalgiques et antimigraineux sont souvent impuissants, l’oxygénothérapie (3 l./minute) par périodes de 10 à 60 minutes est souvent efficace. Les pseudo-paralysies Ce terme désigne la survenue d’impossibilités de commander les mouvements d’une partie du corps associée ou non à la perte ou la diminution des sensations dans le même territoire. Elles surviennent parfois après un traumatisme brutal mais pas nécessairement très important (choc arrière à l’arrêt en voiture par exemple) faisant évoquer devant un tableau d’hémiplégie, de para ou de tétraplégie, une lésion neurologique. La négativité de l’imagerie cérébrale conduit, à tort, le plus souvent à une interprétation psychiatrique erronée source de conflits et de souffrances pour le patient et sa famille. L’évolution est variable et se fait, le plus souvent vers la récupération dans des délais variables. Ces récupérations sont facilitées par la mise en œuvre de traitements proprioceptifs dans lesquels figurent les orthèses des membres et du tronc : vêtements compressifs, orthèses plantaires et/ou orthèses cruro-pédieuses. Rappelons les accidents de brèche méningée, lors d’une ponction lombaire. C’est dire qu’il faut s’abstenir de ce geste quand il n’est pas nécessaire et, dans ce cas, il doit être réalisé

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avec une grande prudence. Elle n’est pas à exclure lors d’un accouchement en sachant que la péridurale ou la rachianesthésie peuvent ne pas être efficaces. 4-Devant une urgence cardio-vasculaire. Les faux syndromes cardiologiques Les douleurs sterno-costales évoquant une douleur d’origine cardiaque, surtout si elle prédomine à gauche et comporte une irradiation au membre supérieur vers les deux derniers doigts. Elles sont facilement identifiées par la douleur provoquée à la pression des articulations sterno-costales. Elles sont soulagées par un traitement local (stimulations électriques antidouleurs par TENS, patch antidouleurs, injections anesthésiques sterno-costales) ou par voie générale. Surtout pas d’anticoagulant ou d’antiagrégant. Les gilets proprioceptifs, compressifs mis au pour ce syndrome peuvent être d’un très bon appoint et ont un rôle préventif pur le futur. Les douleurs pseudo-phlébitiques d’un membre inférieur. La phlébite n’est pas un motif d’appel fréquent. Par contre des faux tableaux de phlébite sont assez fréquents En l’absence de signe d’Homans, il faut être très prudent sur le diagnostic de thrombose veineuse en sachant que les échographies sont difficiles à interpréter, du fait de la structure particulière des tissus dans le syndrome. En pratique, il faut préférer les bas de contention anti phlébite ou les bandes Biflex (contention « moyenne ») à l’héparine, le risque est moindre. Les vraies urgences cardiovasculaires L’hypotension est fréquente, à l’origine de malaises avec parfois des pertes de connaissances soudaines et inquiétantes. Les crises de tachycardie sont très fréquentes, avec des sensations, parfois, de mort imminente, accompagnées, parfois, d’extrasystoles, elles impliquent un traitement par les béta bloquants. Les dissections et ruptures artérielles sont possibles dans toutes formes de Syndrome d’Ehlers-Danlos notamment lors de manœuvre de réduction forcée d’une luxation d’épaule par la méthode dite d’Hippocrate et aussi lors d’une manipulation cervicale (lésion des artères vertébrales surtout). 5-Devant une urgence orthopédique Elles sont également fréquentes et sont l’expression du grand désordre proprioceptif qui existe dans ce syndrome. Les luxations. Elles concernent les épaules, les genoux (rotule s surtout), les hanches, mais aussi, les coudes, les poignets, les doigts, le péroné, les tendons péroniers latéraux (à l’occasion d’un mouvement d’adduction du pied). Elles peuvent se manifester la nuit, principalement pour les épaules, à l’occasion du relâchement musculaire nocturne qui diminue les sensations proprioceptives au niveau de cette articulation. Ailleurs c’est à l’occasion d’un changement de position lors du lever, par exemple, le lever pour les hanches. Les dystonies, à l’occasion de mouvements cloniques peut être à l’origine du mouvement luxant, notamment pour l’épaule, et de sa récidive après une réduction suivie d’une immobilisation qui fait, parfois injustement accuser la patiente de « l’avoir fait exprès ». Ces luxations peuvent être très douloureuses. Ces douleurs sont habituellement d’origine tendineuse et l’injection de Xylocaïne au niveau des insertions douloureuses facilite grandement la réintégration de la tête fémorale ou humérale. En cas d’échec des tentatives répétées et douloureuses, le mieux est de savoir patienter en mettant en place un e écharpe de soutien de Montréal. Après réduction ce type d’écharpe suffira pendant les jours qui

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suivent Il faut, en effet, éviter les immobilisations prolongées pour éviter d’accentuer les troubles proprioceptifs existants. La luxation des articulations temporo-mandibulaires peut nécessiter une réduction en plaçant les doigts derrière l’angle de la mâchoire et en l’attirant vers le bas. Les pseudos entorses sont fréquentes. Elles intéressent principalement les chevilles, les genoux, les doigts de la main. Elles sont la conséquence d’un manquement proprioceptif lors d’un mouvement et non pas de l’hyperlaxité. Cette hyperlaxité, par contre, évite les ruptures des ligaments qui s’étirent mais ne rompent pas! Le fait qu’il y ait une ecchymose ne doit pas donner le change. Le fait de saigner fait partie du quotidien des personnes avec un syndrome d’Ehlers-Danlos. Elles sont souvent très douloureuses avec hyperesthésie cutanée. L’examen clinique doit être très doux et prudent. L’objectif thérapeutique est de soulager et de permettre la remise en activité rapidement pour ne pas aggraver le syndrome proprioceptif. Ce qu’il ne faut pas faire : mettre en place un strapping qui va arracher une peau qui est fragile, ne pas immobiliser avec des orthèses rigides plâtre ou thermoplastiques très mal tolérées par les tissus cutanés, mettre sous anticoagulants ou antiagrégants à cause du risque majeur d’hémorragies. La chirurgie est également contrindiquée du fait de la trop grande fragilité des tissus qui neutralisent les tentatives de stabilisation. Ce qu’il est conseillé de faire : soulager les douleurs par les traitements locaux (utilisation du stimulateur antidouleur-TENS, application d’emplâtres de Versatis ou de flector plutôt que le froid souvent mal toléré. Injections locales de Xylocaïne) et/ou généraux. Les plus actifs dans ce syndrome sont le Tramadol, associé ou non au paracétamol et l’Acupan. Il faut éviter, sauf absolue nécessité, le recours aux morphiniques classe I, souvent mal tolérés, peu efficaces et générateurs d’addictions problématiques. Les bandes Biflex (contention moyenne) ont un effet à la fois antalgique et proprioceptif qui contribuent à la restauration fonctionnelle. Les orthèses de marche usuellement utilisées pour le traitement des entorses sont indiquées pour une reprise rapide de la marche aidée par l’usage de cannes qui ont souvent mal tolérées du fait des subluxations douloureuses des épaules, des coudes et des poignets. Le port des vêtements compressifs de proprioception, une kinésithérapie proprioceptive isométrique douce, au mieux en balnéothérapie complètera la récupération qui peut être très rapide. Inversement, ce traumatisme put déclencher une accentuation régionale ou plus diffuse des symptômes du SED. Les fractures. Elles sont rares, malgré les chutes fréquences, probablement parce que la souplesse des tissus permet de réduire l’impact sur les structures osseuses. Les douleurs peuvent être particulièrement intenses ou, à l’inverse, ne pas entraîner de plainte importante chez un enfant dont la douleur est la compagne habituelle. Il convient d’être particulièrement attentif lors d’une immobilisation par contention rigide à cause de la fragilité cutanée. En cas de chirurgie, la tendance hémorragique et les difficultés de cicatrisation sont à prendre en compte. Les anticoagulants sont à éviter ce qui justifie une rééducation précoce avec contractions sous plâtre et reprise rapide de l’activité. 6-Devant une urgence digestive. Occlusions et subocclusions. Le ralentissement intestinal est très fréquent accompagné d’un météorisme parfois très gênant sur le plan vestimentaire. Des tableaux sub-occlusifs sont fréquents, souvent favorisés par les antalgiques, notamment morphiniques ou contenant de la codéine. Là encore, il faut éviter d’opérer et utiliser tous les moyens d’évacuation intestinale. Les massages abdominaux, la chaleur, les électrostimulations peuvent aussi

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aider, les parois abdominales sont minces et déformables, ce qui peut faciliter l’action de ces moyens physiques. Cholécystites lithiasiques. Du fait de la stase vésiculaire, les formations de calculs sont fréquents dans le SED. Ils peuvent être responsables de cholécystites avec effraction de la paroi vésiculaire qui est fine, comme le montrent les échographies. L’examen clinique peut être trompeur car la défense abdominale peut manquer de même que les irradiations vers l’épaule droite. La présence habituelle de douleurs abdominales diffuse peut égarer le clinicien. L’ échographie permet d’objectiver la présence des calculs dont la présence (même en dehors de l’urgence) doit conduire à leur ablation étant donné le risque de péritonite et de migration des calculs vers les voies biliaires ou pancréatiques. Ceci justifie l’échographie abdominale systématique chez toute personne qui a été diagnostiquée SED. Pancréatites. Elles peuvent survenir, y compris chez l’enfant, difficiles à différencier des crises abdominales aiguës qui sont fréquentes pour lesquelles, l’hypothèse de torsions itératives du mésentère peut être soulevée. Ailleurs, il faut évoquer la migration d’un calcul d’origine vésiculaire. Reflux gastro-oesophagiens et fausses routes. Ils sont très fréquents (…) à tel point qu’ils sont un des éléments en faveur du diagnostic. Ils sont à l’origine de fausses routes. Ces fausses routes peuvent s’observer en l’absence de reflux , du fait des difficultés de contrôle proprioceptif du carrefour aérodigestif. Elles peuvent nécessiter une bronchoscopie pour extraire un débris alimentaire. Elle sera prudente, compte-tenu du risque hémorragique. Accident d’anneau gastrique. La surcharge pondérale est relativement fréquente dans le SED. Elle est parfois liée à la perte de la sensation de satiété, ailleurs, certains morphiniques sont à l’origine d’une prise rapide de poids. Il est difficile de faire le départ entre la surcharge hydrique, fréquente sous la forme d’oedèmes variables, chez ces personnes équipées d’un tissu conjonctif particulièrement lâche. La pose d’un anneau présente un risque, notamment de volvulus comme nous l’avons observé. Les crises hémorroïdaires peuvent être un motif d’accès aux urgences avec saignements, douleurs, prolapsus. Les traitements locaux et généraux contre les douleurs sont à tenter ainsi qu’une action sur la constipation pour éviter le recours à la chirurgie qui est décevante. 7-Les accidents hémorragiques Ils figurent parmi les complications les plus redoutables. La tendance hémorragique est quasi constante dans toutes les formes du syndrome d’Ehlers-Danlos et pas seulement dans les formes vasculaires. Elle s’exprime par des saignements de nez, des gingivorragies, des ecchymoses ou des hématomes, des ménorragies, des saignements prolongés lors de plaies accidentelles ou chirurgicales ou bien à l’occasion d’un accouchement. Elles sont dues à la fragilité des petits vaisseaux et à leur faible capacité de se rétracter en cas d’effraction. Le rôle des plaquettes a pu aussi être incriminé. Ces accidents peuvent menacer la vie comme cela nous a été relaté par deux patientes. L’une a fait un saignement post-partum et a du son salut à la visite amicale de son obstétricien venu la saluer avant de quitter la maternité. Ses appels à l’infirmière n’ayant pas été suivis d’effet. Deux litres de sang ont été nécessaires pour compenser cette hémorragie cataclysmique. Dans un autre cas la même quantité de sang a été nécessaire à l’occasion d’une coloscopie. Dans un troisième cas c’est un syndrome des loges du bras et de l’avant-bras lors d’une prise de sang après mise sous antivitamine K pour un suspicion de phlébite. L’amputation a pu être évitée par un débridement du creux axillaire jusqu’au canal carpien avec pour séquelle une cicatrice très large mais pas de syndrome de Volkman du fait de l’étirabilité des tissus.

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Tous les anticoagulants et les antiagrégants plaquettaires sont donc à proscrire sauf absolue nécessité. Il faut savoir aussi ne pas confondre la présence d’ecchymoses multiples du fait d’un syndrome d’Ehlers-Danlos avec un syndrome des enfants (ou des femmes) battus, comme nous l’avons observé à plusieurs reprises allant jusqu’à la mise en examen. Le cas de la rupture d’anévrysme aortique ou d’une autre localisation est particulièrement fréquent dans les formes qui ont été identifiées comme « vasculaires » et reliées à une anomalie du collagène COL3A. Elles peuvent aussi mais beaucoup plus rarement, s’observer dans toutes les formes du syndrome d’Ehlers-Danlos. Ce dernier doit être évoqué devant tout anévrysme et conduire à des dispositions de prudence pour les interventions chirurgicales; en tenant compte de la fragilité des tissus. 8-Les urgences vésico-sphinctériennes La vessie est souvent concernée par le SED. Deux comportements vésicaux peuvent conduire à consulter en urgence. Le premier est la rétention vésicale complète, expression majeure de la Dysurie habituelle (…%), souvent accompagnée d’épisodes d’infections urinaires, dans le syndrome d’Ehlers-Danlos. La solution est la mise en place d’un sondage intermittent suivi de la prescription de parasympathomimétiques et une éducation-rééducation vésicale avec acidification des urines et traitement de l’infection. Là encore, le manque de transmission des informations de réplétion et d’excitation de l’urètre par le débordement urinaire est responsable. Inversement, ce peut être une pollakiurie avec urgenturies marquées et fuites (toux, efforts). Les modérateurs des contractions du détrusor, la rééducation proprioceptive périnéo-sphinctérienne sont indiquées. 9-Dysautonomie : malaises, fièvres, crises vasomotrices… Il y a dans le SED un syndrome dysautonomique, déjà décrit par Ehlers (…) et pratiquement ignoré dans ce contexte, qui est responsable d’un certain nombre de manifestations qui peuvent inciter à se rendre aux urgences. L’origine est une anarchie des contrôles végétatifs, très probablement par absence de signaux depuis les capteurs du fait de manque de réactivité des tissus (glomi carotidiens par exemple) et de la faible efficacité de la vasoconstriction. La tension artérielle est habituellement basse mais instable avec, par période des élévations transitoires qui conduisent à des traitements dont l’opportunité doit être évaluée. Les malaises impressionnants avec perte de connaissance surviennent de façon brutale et peuvent entraîner une chute. Ils sont parfois accompagnés d’autres manifestations neurovégétatives : changement de coloration et de température de la peau, frissons… Le retour à la conscience est habituellement rapide, facilité par la position déclive, jambes surélevées et l’oxygénothérapie à 3 l./min. Les poussées thermiques, parfois importantes, peuvent survenir en dehors de tout contexte infectieux et donner le change, surtout si la vitesse de sédimentation est augmentée, ce qui est fréquent dans le SED. Les crises vasomotrices. Elles peuvent prendre divers aspects : sensation de froid intense des extrémités simulant un syndrome de Raynaud avec parfois des pâleurs ou aspects violacés inquiétants. Ils sont très désagréables, douloureux, mais sans conséquence grave. On peut en rapprocher les crises de sueurs abondantes, souvent froides, surtout au niveau de la tête, de la partie haute du thorax et aux aisselles, parfois nocturnes, souvent socialement gênantes. Font partie de ce registre les variations du pouls, parfois lent, plus souvent accélérés lors de crises pénibles et inquiétantes.

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10-Les urgences ORL (otites, hyperacousie, hypoacousie, vertiges, hyperosmie,) Les otites répétées, chez le jeune enfant doivent faire évoquer ce diagnostic, probablement parce que la trompe d’Eustache est davantage perméable au passage des germes depuis l’arrière gorge. L’hyperacousie est habituelle. Déclenchée par une source sonore aigüe et intense, elle peut entraîner une souffrance auditive intolérable comme nous l’avons observée avec une patiente à notre consultation lors du déclanchement inopiné de l’alerte incendie de l’Hôpital. La personne a du se réfugier, la tête recouverte d’un vêtement, au fond d’un placard. L’Hypoacousie favorisée par le Brouhaha ambiant est un facteur de situations de handicap qui sont le plus souvent rapidement régressives. Il peut s’agir aussi de surdité brusque qui, elle, n’est pas toujours régressive, comme nous l’avons observé chez quelques-unsde nos patients. Les vertiges. Secondaires à la grande excitabilité des cils vibratoires des canaux semi-circulaires, ce sont des vertiges positionnels qui surviennent lors de mouvements de la tête, à l’occasion du lever d’un lit par exemple. Ils doivent être traités comme tels au besoin mais prudemment par les manœuvres de déplacement inverse de la tête. Les antivertigineux sont généralement mal supportés 11-Les urgences ophtalmologiques Elles ont pour origine, dans la très grande majorité des cas, les difficultés de convergence et d’adaptation d’une vision binoculaire performante pour appréhender correctement l’environnement de proximité. Il s’agit de visions floues parfois de façon très marquée, de fatigabilité importante, même avec les verres correcteurs (majoritairement pour une myopie qui peut varier), d’amputation du champ visuel. Ces symptômes sont habituellement régressifs en quelques heures ou quelques jours sans traitement particulier. Les complications graves (luxations du cristallin ?) sont exceptionnelles. Le repos visuel et, secondairement l’orthoptie, sont indiqués. Des luxations du cristallin, d’autres altérations des tissus de l’œil peuvent rarement s’observer. 12-Les urgences bucco-dentaires Luxations et blocages des articulations temporo-mandibulaires. Les ATM sont très souvent (…%), le siège de douleurs, de d’accrochages avec ou sans blocage, de limitation d’ouverture de la bouche entravant les soins dentaires. Le plus souvent Les luxations se réduisent spontanément, ailleurs, il faut recourir à la manœuvre suivante : placer les pouces au niveau de l’angle des mâchoires et tirer vers le bas et en avant. L’utilisation d’un appareillage permet de limiter ces incidents surtout la nuit. Il faut être très prudent dans les indications chirurgicales, là aussi. La chirurgie dentaire est délicate : les muqueuses saignent facilement, les dents sont fragiles et peuvent se briser, leur implantation est parfois anarchique, les anesthésies dentaires sont souvent inopérantes et impliquent des doses importantes d’anesthésique associée éventuellement à de l’adrénaline. 13-Accidents et incidents lors des accouchements Ils sont présents dans les formes communes du SED dans ….% des cas. Il s’ait de prématurité, de difficultés lors du travail avec des contractions sans dilatation du col, de risque de luxation de hanche, de risques hémorragiques, de fragilité des sutures en cas de césarienne

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ou de déchirure du col. La connaissance du Sed et des particularités de l’accouchement permettent de mettre en place les mesures qui s’imposent. 14-Les urgences dermatologiques Un certain nombre de manifestations cutanées posent des problèmes dans le cadre de l’urgence. Ce sont les hématomes sous-cutanés, surtout dans les formes avec prédominance des signes cutanés (formes dites classiques). Les décollements, surtout chez l’enfant, peuvent laisser des cicatrices très apparentes et justifient une ponction évacuatrice. Des problèmes de cicatrisation, après une effraction cutanée peuvent se poser dans ce même type de Syndrome. Ailleurs ce sont des éruptions pseudo eczémateuses ou psoriasiformes, des prurits intenses… 15-Urgences psychiatriques. Vivre avec le syndrome n’est pas facile et est générateur d’anxiétés et moments de découragement et de désespoir. Ceci est particulièrement sensible chez les adolescents, alors que les manifestations handicapantes du syndrome commencent souvent à cette période. Des passages à l’acte sont à craindre. Ceci implique un suivi, notamment après l’annonce du diagnostic psychologique et/psychiatrique par des professionnels connaissant suffisamment le SED pour interpréter le ressenti et le vécu des personnes concernées.