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- 1 - Pourquoi l'agriculture biodynamique plutôt que la culture transgénique ? L'appellation « biodynamie » provient des mots grecs ''Bios'' (Vie) et ''Dunamis'' (Force.) Rudolf Steiner, philosophe, naturaliste, spiritualiste, écrivain, conférencier et scientifique autrichien, fonda le mouvement biodynamique en 1924. Quelques agriculteurs qui côtoyaient M.Steiner, lui avaient demandés s'il ne voyait pas une solution pour contrer la baisse de la qualité des aliments et des semences. Selon lui, le problème était entre autre que '' les substances de synthèse chimiques épuisaient les sols et détruisaient la vie microbiotique nécessaire à la transmission aux plantes des éléments fertilisants contenus dans l'air et la terre.'' C'est après mûres réflexions que Rudolf Steiner, le père de l'anthroposophie (science de l'esprit), donna lors d'une série de huit conférences (1924), les fondements de ''l'agriculture astrologique'' biodynamique. Certains qualifient cette agriculture de ''médecine pour la terre'' ou '' d'agriculture cosmique''. La certification Biodynamique Pour pratiquer la biodynamie, on a besoin de deux outils essentiels ; des préparations homéopathiques pour la terre à cultiver et un calendrier astronomique biodynamique. Tout d'abord, nous allons faire un bref survol de ce calendrier ''astro-biologique'' assez complexe que les cultivateurs biodynamiques doivent suivre à la lettre ou plutôt, à la date et heure. Les végétaux sont influencés par les rythmes et les positions planétaires. Par exemple, de la même façon qu'elle influence les marées, la lune exerce une force qui influence l'eau et la sève que contiennent les végétaux, dépendamment si elle est ascendante ou descendante, croissante ou décroissante, pleine ou non etc. Si c'est la pleine lune par exemple, les végétaux contiendront une plus grande proportion d’eau, une meilleure absorption de l'eau, ainsi qu'une augmentation de la germination et de la croissance. Le calendrier biodynamique suggère donc de semer 2 jours avant la pleine Lune. Les douze constellations de notre zodiaque sont divisées selon les quatre éléments ; Air (Verseau, Gémeaux ou Balance), Terre (Taureau, Vierge ou Capricorne), Eau (Poissons, Cancer ou Scorpion) et Feu (Bélier, Lion ou Sagittaire). Bref, les études biodynamiques démontrent que quand la lune est dans une constellation ''air'' c'est une période de floraison, dans une constellation ''terre'', c'est les racines qui poussent principalement, dans la constellation ''eau'' la force vitale est concentrée dans la tige et le feuillage et finalement, quand l'astre lunaire est dans une constellation ''Feu'' il y a fructification, les fruits de la plante sont énergisés ou apparaissent. Selon la culture biodynamique, il y a donc des moments précis pour récolter des fruits (feu, tomates), d'autres pour semer, planter, s'il s'agit d'une salade, elle doit être récoltée dans la période ''feuillage'' (eau), les carottes sont plus volumineuses si elles ont étés plantées dans une journée ''terre'' (racines). Un légume dont on mange que la fleur (brocoli) est plus savoureux et volumineux si ce dernier a été planté et récolté dans une période ''air'' etc. Les agriculteurs qui pratiquent la biodynamie ne poinçonnent pas en arrivant et en quittant le boulot, ils ne se limitent pas à un quart de travail de 8h-4h comme la plupart des manufactures agricoles. Le ciel, les éléments et le calendrier biodynamique sont les seuls patrons qui décident de leurs horaires. Il y a plusieurs autres complexités, principes et précisions en rapport avec le calendrier biodynamique, ceci n'était qu'un survol. Voir les liens au bas de la page pour commander ou consulter des exemples de ces calendriers. L'autre outil indispensable des agriculteurs biodynamiques est la panoplie de préparations d'herbes médicinales et de médicaments homéopathiques pour que le sol soit équilibré, durable et énergisé. On mélange ces préparations au compost avant de l'étendre sur les champs. Chaque type de sol a une préparation homéopathique qui lui convient. Les agriculteurs biodynamiques pratiquent parfois même des rituels naturels ''quasi-magiques''. La préparation 500 par exemple, on l'obtient en remplissant des cornes de vaches qui ont déjà eu un veau avec de la ''bouse de vache'', et on les enterre à l'automne. Au printemps, quand on les déterre, on mélange la ''terre noire'' des cornes à 12 litres d'eau de pluie, (en tournant 1 heure à l'aide d'un bâton dans le sens horaire, puis anti-horaire), pour ensuite arroser les champs avec l'eau devenu biodynamique. Rudolf Steiner expliqua que cette

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Pourquoi l'agriculture biodynamique

plutôt que la culture transgénique ? L'appellation « biodynamie » provient des mots grecs ''Bios'' (Vie) et ''Dunamis'' (Force.) Rudolf Steiner, philosophe, naturaliste, spiritualiste, écrivain, conférencier et scientifique autrichien, fonda le mouvement biodynamique en 1924. Quelques agriculteurs qui côtoyaient M.Steiner, lui avaient demandés s'il ne voyait pas une solution pour contrer la baisse de la qualité des aliments et des semences. Selon lui, le problème était entre autre que '' les substances de synthèse chimiques épuisaient les sols et détruisaient la vie microbiotique nécessaire à la transmission aux plantes des éléments fertilisants contenus dans l'air et la terre.'' C'est après mûres réflexions que Rudolf Steiner, le père de l'anthroposophie (science de l'esprit), donna lors d'une série de huit conférences (1924), les fondements de ''l'agriculture astrologique'' biodynamique. Certains qualifient cette agriculture de ''médecine pour la terre'' ou '' d'agriculture cosmique''.

La certification Biodynamique

Pour pratiquer la biodynamie, on a besoin de deux outils essentiels ; des préparations homéopathiques pour la terre à cultiver et un calendrier astronomique biodynamique. Tout d'abord, nous allons faire un bref survol de ce calendrier ''astro-biologique'' assez complexe que les cultivateurs biodynamiques doivent suivre à la lettre ou plutôt, à la date et heure. Les végétaux sont influencés par les rythmes et les positions planétaires. Par exemple, de la même façon qu'elle influence les marées, la lune exerce une force qui influence l'eau et la sève que contiennent les végétaux, dépendamment si elle est ascendante ou descendante, croissante ou décroissante, pleine ou non etc. Si c'est la pleine lune par exemple, les végétaux contiendront une plus grande proportion d’eau, une meilleure absorption de l'eau, ainsi qu'une augmentation de la germination et de la croissance. Le calendrier biodynamique suggère donc de semer 2 jours avant la pleine Lune.

Les douze constellations de notre zodiaque sont divisées selon les quatre éléments ; Air (Verseau, Gémeaux ou Balance), Terre (Taureau, Vierge ou Capricorne), Eau (Poissons, Cancer ou Scorpion) et Feu (Bélier, Lion ou Sagittaire). Bref, les études biodynamiques démontrent que quand la lune est dans une constellation ''air'' c'est une période de floraison, dans une constellation ''terre'', c'est les racines qui poussent principalement, dans la constellation ''eau'' la force vitale est concentrée dans la tige et le feuillage et finalement, quand l'astre lunaire est dans une constellation ''Feu'' il y a fructification, les fruits de la plante sont énergisés ou apparaissent. Selon la culture biodynamique, il y a donc des moments précis pour récolter des fruits (feu, tomates), d'autres pour semer, planter, s'il s'agit d'une salade, elle doit être récoltée dans la période ''feuillage'' (eau), les carottes sont plus volumineuses si elles ont étés plantées dans une journée ''terre'' (racines). Un légume dont on mange que la fleur (brocoli) est plus savoureux et volumineux si ce dernier a été planté et récolté dans une période ''air'' etc. Les agriculteurs qui pratiquent la biodynamie ne poinçonnent pas en arrivant et en quittant le boulot, ils ne se limitent pas à un quart de travail de 8h-4h comme la plupart des manufactures agricoles. Le ciel, les éléments et le calendrier biodynamique sont les seuls patrons qui décident de leurs horaires. Il y a plusieurs autres complexités, principes et précisions en rapport avec le calendrier biodynamique, ceci n'était qu'un survol. Voir les liens au bas de la page pour commander ou consulter des exemples de ces calendriers.

L'autre outil indispensable des agriculteurs biodynamiques est la panoplie de préparations d'herbes médicinales et de médicaments homéopathiques pour que le sol soit équilibré, durable et énergisé. On mélange ces préparations au compost avant de l'étendre sur les champs. Chaque type de sol a une préparation homéopathique qui lui convient. Les agriculteurs biodynamiques pratiquent parfois même des rituels naturels ''quasi-magiques''. La préparation 500 par exemple, on l'obtient en remplissant des cornes de vaches qui ont déjà eu un veau avec de la ''bouse de vache'', et on les enterre à l'automne. Au printemps, quand on les déterre, on mélange la ''terre noire'' des cornes à 12 litres d'eau de pluie, (en tournant 1 heure à l'aide d'un bâton dans le sens horaire, puis anti-horaire), pour ensuite arroser les champs avec l'eau devenu biodynamique. Rudolf Steiner expliqua que cette

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préparation ramena la vie à la terre au printemps et créait un humus fertile et vivifiant pour la période des semences, puisque la corne était restée en contact avec l'énergie subtil du sol pendant tout l'hiver. Les autres préparations sont des plantes médicinales que l'on mélange au compost. Quelques exemples; Achillée millefeuille (préparation 502) joue un rôle particulier dans la mobilité du soufre et de la potasse. Camomille (503) liée au métabolisme du calcium, elle régularise les processus de l'azote. Ortie (504) en rapport avec l'azote et le fer, elle renforce l'influence des deux premières préparations, donne au compost et au sol une sensibilité, une sorte de "raison" et favorise une bonne humification. Écorce de chêne (505) elle a un rapport avec le calcium et régularise les maladies des plantes dues a des phénomènes de prolifération et d'exubérance. Pissenlit (506) joue, un rôle important au niveau de l'acide silicique. Valériane (préparation 507) aide à la mobilité du phosphore dans les sols et forme une sorte de manteau de chaleur protecteur autour du compost. Voir les liens au bas de la page pour commander ces préparations (Europe), ou au Québec, contactez Diane Gauthier ou Maude Morin, co-propriétaires de la ferme biodynamique ''la Butte magique'' située à St-Faustin. Plusieurs autres techniques composent l'agriculture biodynamique tel l'introduction volontaire mais contrôlée d'organismes et insectes spécifiques dans les champs, ces derniers ayant le rôle naturel de maîtriser les ravageurs nuisibles. Les autres techniques ressemblent à ceux utilisées en agriculture ''biologique''. (Énoncées plus bas.)

La biodynamie ne s'arrête pas à ces outils, il faudrait lire le livre '' Agriculture Fondements spirit uels de la méthode Bio-dynamique'' (Cours aux agriculteurs) par Rudolf Steiner, 320 pages, 7 planches en couleurs. Éditions Anthroposophiques Romandes. Ce livre clé, qui regroupe les huit conférences de Steiner dont je parlais au début de l'article, est malheureusement difficile à trouver. Dans plus de 50 pays maintenant, des groupes d'agriculteurs biodynamiques ont adhérés aux règles et principes stricts de la ''méthode Steiner.'' Ces règles permettent aux agriculteurs qui pratiquent biodynamie de voir leurs récoltes ''certifiés'', avant qu'elles puissent être commercialisées sous forme de produits authentiques biodynamiques. Ces règles de certification sont régies par la certification biodynamique ''DEMETER''. Le mot DEMETER est le nom de la déesse grecque de l'agriculture et a été emprunté vers la fin des années 20 par un groupe d'agriculteurs biodynamiques européens pour représenter leurs produits au marché. La mythologie de DEMETER remonte à l'ancienne Égypte. La racine du mot DEMETER est "Da Meter" (La Mère, Terre, GAIA.) L'Association de biodynamie du Québec, compte près de 300 membres actuellement, mais seulement qu'une vingtaine d'entre eux sont des agriculteurs certifiés DEMETER. Les agriculteurs biodynamiques optent pour la qualité et non la quantité. La plupart ont déjà vendus leurs récoltes avant de les récolter à des amis et des particuliers, ou ils exportent de petites quantités dans le nord des États-Unis, là ou plusieurs amateurs d'aliments biodynamiques paient de bons prix.

La certification Biologique

Les aliments ''Bio'' ne sont pas une nouvelle tendance, ils existent depuis les débuts de l'agriculture, soit il y a quelques 10 000 ans. En fait, les termes ''agriculture biologique'' ou ''manger Bio'' sont apparus avec l'ère industrielle, à l'époque où l'agriculture a pris un virage en faveur de l'utilisation de produits synthétiques (engrais et pesticides chimiques.) Selon des statistiques de l'OCIA (Organic Crop Improvement Association), l'une des plus importantes agences de certification biologique au monde; ''Depuis une dizaine d'années le bio connaît un essor spectaculaire, soit une croissance de la demande d'environ 20% par année.'' Quelques chiffres pour quelques pays (Source: ProNatura Magazine) :

-Ventes mondiales d'aliments bio (approximatif) : États-Unis : 8 milliards$, Allemagne : 2,1 milliards$, Royaume-Uni : 1 milliard$, Italie : 1 milliard$, France : 850 millions$ et la Suisse : 450 millions$.

-Nombres d'hectares bio cultivés (approximatif) : Turquie : 18 000, Russie : 9 860, Chine : 8 500, Tunisie : 8 000, Ouganda : 5250, Japon : 5 100, Israël : 4 200, Égypte : 2 700, Inde : 1 700 et le Cameroun : 700.

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La culture biologique, malheureusement plus pratiquée et consommée que la biodynamique, reste néanmoins une méthode de culture conforme au développement durable qui a beaucoup de points en commun avec l’agriculture biodynamique ; Absence totale d'OGM, d’engrais ou de pesticides chimiques, le contrôle des parasites nuisible par l'ajout de prédateurs naturels dans les champs, la rotation des cultures, le recours à des tracteurs légers ou à des chevaux pour ne pas tasser la terre et l'utilisation de composts de fumier et de purins végétaux. Les aliments bio sont aussi très concentrés en nutriments. Au Québec, la plupart des véritables agriculteurs bio sont certifiés par soit OCIA ou Québec Vrai, exigez ces étiquettes!

''OGM'' ; l'antonyme de ''BIO''

Cet article fait suite à l'article sur Upperworld ' 'La mafia médicale et son ''assurance maladie'' ne nous assure pas la santé mais la maladie.'' Une médecine efficace est une médecine de prévention et l'un des meilleurs moyens de rester en santé parfaite, de prévenir la maladie, est une bonne nutrition. Évidemment, la nutrition végétalienne est fondamentale mais cela ne suffit plus aujourd'hui. Ceux qui ont adoptés une diète à base de végétal, doivent faire face au problème contemporain des OGM (Organismes Génétiquement Modifiés.) Monsanto et Novartis, les auteurs de la semence transgénique, ont crés celle-ci pour ''remédier'' aux dommages qu'ont causés les pesticides, les insecticides et les engrais chimiques, à la santé et à l'environnement, enrayant du même coup l'invasion des insectes nuisibles dans les cultures. Et ce, sans savoir (ou en sachant) que ses ''super semences'' génétiquement croisées avec des gènes de poissons, scorpions, grenouilles, méduses etc, engendrerait :

-L'apparition de super mauvaises herbes qui vont nécessiter l'utilisation de produits chimiques encore plus toxiques pour les maîtriser.

-La disparition des abeilles, coccinelles, papillons monarques, oiseaux, amphibiens et autres insectes et micro-organismes utiles qui ont le rôle de maîtriser les ravageurs tout en réduisant le recours aux produits chimiques.

-L'apparition de nouvelles espèces nuisibles.

-La contamination des cultures biologiques par la pollenisation croisée avec les plantes transgéniques compromettant la certification des produits biologiques, voir même leurs survies.

-La monoculture et la perte de la biodiversité.

-Risque pour notre santé (Les effets secondaires ne sont pas encore connus.)

-De nouvelles allergies (incident du maïs Starlink.)

-La résistance des maladies aux antibiotiques. (Il y a des gènes résistants aux antibiotiques dans les semences transgéniques.) Donc patients encore plus dépendants de la ''mafia médicale''.

-Une alimentation ''vide'' et faible en nutriments.

-Etcetera?

Voir les liens au bas de la page pour évaluer plus en détail les dangers des OGM pour la santé et l'environnement. Vous pouvez aussi consulter un guide des produits avec ou sans OGM via ces liens. Jusqu'à aujourd'hui, les quelques tests ''légaux'' concernant les dangers des OGM pour la santé humaine ont étés effectués sur des animaux en laboratoires, même s'il est prouvé que la plupart des résultats provenant de la vivisection ne veulent rien dire pour les humains. Même pour ceux qui croient en la barbare expérimentation animale, les résultats ne sont pas plus en votre faveur. Rappelez-vous la controverse du 14 Août 1998, jour où le biochimiste hongrois Arpad Pusztai a été congédié par l'institut Rowett. En 1995, Arpad Pusztai obtint une subvention de 1.6 millions de livres pour conduire à l'Institut Rowett en Ecosse , une recherche sur les dangers des OGM pour la santé humaine. Quelques années plus tard il a noté que 125 rats nourris avec des pommes de terres

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transgéniques avaient une dizaine de jours après l'ingestion, une stimulation anormale du pancréas, de la prostate, des testicules, des troubles intestinaux, une atrophie du foie et un retard dans le développement du cerveau, Il a aussi observé un affaiblissement du système immunitaire et de plusieurs organes internes. Le jour suivant l'entrevue télévisée dans laquelle Arpad Pusztai divulgua les informations compromettantes pour la sécurité des géants du transgénique (Novartis et Monsanto), l'institut Rowett congédia le Dr. Pusztai. Ils lui interdire de divulguer quelconques résultats provenant des recherches de Rowett. Ils ont détruits tout le matériel de laboratoire et les données informatiques en lien avec ses recherches. Même le Prince Charles avait fait une déclaration qui condamnait les OGM suite à cet incident.

La méga-industrie de la manipulation génétique a tout fait depuis 1985, année de la découverte des OGM , et continue à déployer toutes leurs ressources pour non seulement garder les documents et résultats de recherches secrets , mais aussi pour empêcher les recherches scientifiques sur les effets néfastes à court ou long termes des OGM sur la santé et l'environnement. En 2001 seulement, plus de 50 millions d'hectares de plants transgéniques ont étés cultivés. Plus de 50 végétaux sont déjà homologués. Le tour s'est joué en secret, sous nos yeux, et en une quinzaine d'années seulement. On tente actuellement de privatiser les fermes biologiques pour en faire eux aussi des ''champs industriels'', mais jamais on ne réussira à privatiser la culture biodynamique. ''L'agriculture industrielle a été basée sur une science matérialiste qui s'est souciée d'une sphère très mince d'activité, il est impossible d'aborder adéquatement le monde des organismes en interdépendance à partir d'une perspective si étroite'' Rudolf Steiner.

De la Théosophie à l'Anthroposophie

La profession de foi que fut cette « Théosophie » telle que Rudolf Steiner voulait qu'elle fut conçue, ne détruisit d'aucune façon les rapports qu'il avait avec les différents cercles berlinois au sein desquels il avait exercé son activité. Si certaines personnes entraient en rapport avec lui, avec une réserve accrue, il était cependant très souvent convié à faire des conférences et même des séries de conférences. Dans le cercle de « Ceux qui viennent » (« Die Kommenden »), il fit jusqu'en avril 1903, vingt-sept conférences sur le thème : « De Zarathoustra à Nietzsche — Histoire de l'évolution de l'humanité — Les conceptions du monde depuis les premières époques orientales, jusqu'à présent — ou l'Anthroposophie ». C'est là que, pour la première fois, il employa le mot qui, plus tard, résuma toutes les connaissances spirituelles qu'il enseigna : Anthroposophie.

Emmanuel Hermann Fichte, fils de Jean Fichte, avait déjà employé ce mot et décrit son contenu. Robert Zimmermann, le sévère et systématique théoricien de la beauté. le professeur de Rudolf Steiner à l'Université de Vienne, avait choisi le mot anthroposophie comme titre de son œuvre fondamentale sur l'esthétique. Mais il appartenait à Rudolf Steiner de donner à ce mot sa véritable signification. Cependant, Rudolf Steiner passa tout d'abord par la Société théosophique. Son chemin spirituel avait commencé dans le silence peu de temps auparavant. Après la parution du Magazine de Littérature et celle de son livre sur Nietzsche, il reçut une invitation à se rendre en septembre 1900 à la Bibliothèque théosophique du comte et de la comtesse Brockdorff, pour prendre la parole à deux des soirées hebdomadaires réservées aux conférences. Quelques semaines auparavant, le 25 août, Frédéric Nietzsche avait été délivré de ses souffrances. La première conférence lui fut dédiée; huit jours plus tard, il traita de « la révélation secrète de Gœthe». Ces deux conférences le firent pénétrer au cœur du cercle d'auditeurs qui, pour la plupart, étaient des théosophes. Rudolf Steiner avait trouvé un forum où, dans sa ligne personnelle, il pouvait construire les bases de son œuvre future. Pendant l'hiver 1900-1901, il fit vingt-sept conférences qui, finalement, aboutirent à l'impression du livre « La Mystique à l'aurore des temps nouveaux et son rapport avec la conception moderne du monde » (Édition française sous le titre : Mystique et esprit moderne. (Fischbacher, éd.) Au même endroit, devant les même auditeurs, pendant l'hiver 1901-1902, il fait vingt-cinq conférences qui furent éditées sous le titre « Le christianisme et les mystères de l'Antiquité ». Ces deux œuvres appartiennent aujourd'hui encore à ce que l'on peut appeler « l'introduction à l'anthroposophie », mais elles montrent également à quel point Rudolf Steiner s'appliqua à placer son étude à l'opposé de la

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théosophie orientale, et bien dans la ligne de la vie spirituelle de l' Europe en mettant en relief l'apport de l' Occident, savoir : le christianisme.

« Personne ne pouvait douter que ce que j'apportais à la Société théosophique faisait partie de mes expériences de recherche clairvoyante personnelle. Car je le disais à tous en toute occasion. Et lorsque, à Berlin, aux côtés d' Annie Besant, la section allemande de la Société théosophique fut fondée, et que je fus choisi comme secrétaire général, je dus quitter les réunions de fondation, parce que j'avais à faire des conférences devant un public non théosophe, auquel je parlais du devenir spirituel de l'humanité, sous le titre « Une anthroposophie ». Annie Besant elle-même, savait que ce que j'avais à dire sur le monde spirituel porterait ce titre. Lorsque j'allai à Londres pour assister à un Congrès théosophique, l'une des personnalités dirigeantes me dit que dans mon livre « Mystique et esprit moderne », la vraie théosophie était exprimée. Cela me fit plaisir. Je n'avais, en effet, donné que les résultats de ma vision spirituelle. Ces résultats furent admis par la Société théosophique. A partir de cet instant, il n'y avait plus de raison pour qu'à rna manière je n'apporte au public théosophique — qui était alors le seul à accepter la connaissance spirituelle cette connaissance elle-même. Je ne me soumis à aucun dogmatisme de secte. Je demeurai un homme qui expliquait ce qu'il croyait pouvoir expliquer d'après ce qu'il expérimentait lui-même du monde de l'esprit. Un jour, lors d'une conférence, une auditrice se fit connaître. C'était Marie de Sivers. Le destin voulut qu'elle prit en main, peu de temps après le début de mes conférences, la direction de la section allemande de la Société théosophique ».

Dès le premier jour de cette activité, il exista une différence de principe entre la « théosophie » représentée par Helena Petrovna Blavatsky et Annie Besant, et les enseignements de Rudolf Steiner, tenant tant à la méthode qu'au contenu même de l'enseignement. Rudolf Steiner ne faisait rien valoir, absolument rien, de ce qui provenait de la seule tradition occulte et qui n'ait été redécouvert par sa propre recherche. Dans cette investigation, il ne laissa pas la place à la moindre inexactitude. Il exigea au contraire, la même sévère discipline que celle qui était de mise dans tous les autres domaines de la science occidentale. Pour se faire comprendre, Steiner se servit cependant, au cours des années postérieures à 1902, bien qu'avec retenue, de la terminologie théosophique orientale, tout en cherchant par la suite à la remplacer par les mots plus expressifs, plus représentatifs de la conscience moderne. La différence essentielle qui, en 1912-1913, conduisit à sa séparation définitive d'avec la Société théosophique indo-anglo-saxonne, était due à la position de Steiner par rapport au christianisme. Malgré son refus, parfois radical, des formes historiques et dogmatiques de l' Église (souvenons-nous des entretiens de Vienne avec le professeur. Père Guillaume Neumann, en 1886), il a, tout au long de sa vie, considéré Jésus-Christ et l'événement du Golgotha comme le centre du devenir de la Terre et de l'histoire de l'humanité. Cet aspect était totalement étranger à des théosophes comme Helena Petrovna Blavatsky, Annie Besant et H.S. Olscott. Ils voyaient, dans une synthèse générale de toutes les religions avec leurs vérités justifiées, un idéal suprême qu'ils espéraient atteindre par une tolérante compréhension. Le caractère unique de l'apparition sur Terre du Fils de Dieu, du Christ, en l'homme Jésus de Nazareth, ne signifiait rien pour eux et ils ne le reconnurent pas. Au contraire, Annie Besant proclama que le jeune Krishnamurti était le Christ réincarné.

« Depuis 1906, des manifestations se produisirent au sein de la Société, à la direction de laquelle je n'avais pas la moindre influence, qui rappelaient les aberrations du spiritisme, et m'obligèrent à insister toujours plus sur le fait que la section de cette Société, qui était sous ma direction, n'avait strictement rien à voir avec ces choses. Ces manifestations atteignirent leur point culminant, lorsqu'on prétendit qu'un jeune garçon hindou était la personnalité en laquelle le Christ était redescendu vivre sur Terre. Une société spéciale fut même créée au sein de la Société théosophique, pour répandre cette absurdité. Elle s'appela « L'Étoile d'Orient »... Il me fut absolument impossible, ainsi qu'à mes amis, d'accepter les membres de cette « Étoile d'Orient » dans la section allemande, comme ils le désiraient et comme Annie Besant surtout, en qualité de présidente de la Société théosophique, l'avait envisagé. Ce refus nous fit rejeter de la Société théosophique en 1913. Il était devenu nécessaire de fonder une Société anthroposophique indépendante

Nous voyons donc que la séparation d'avec la Société théosophique est provoquée par un certain événement. Mais en réalité, elle eut lieu dès le premier instant d'activité commune. Cependant, la

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véritable séparation intervint au moment « juste » : quand il fallut prendre parti pour ou contre le devenir de l'événement christique et sa signification unique pour l'humanité. D'autre part, il faut di re que Rudolf Steiner respectait au plus haut point la vérité contenue dans la sagesse originelle de l' Orient. Mais il était pénétré de l'idée que les trésors de la tradition asiatique n'ont pas le pouvoir, aujourd'hui, de vaincre une civilisation où l'esprit du matérialisme scientifique donne le ton, alors qu'une force épanouie en Occident peut y parvenir. La science moderne n'a pas le caractère d'une aberration de l'évolution de l'humanité, ainsi que l'enseigne actuellement le physicien atomiste Jordan, mais représente le chemin du calvaire pour l'intellect humain, qui doit trouver sa résurrection, vivre sa Pâque par la spiritualisation de la pensée. Pour atteindre ce but, ni la force ni la substance des œuvres principales d' Helena Petrovna Blavatsky : « Isis dévoilée » et « l' Enseignement secret » ne suffisent. Pour son époque, elle a déjà indiqué certaines choses, et les chercheurs de ce siècle matérialiste ont été attirés vers ses voies. Mais dans l'ensemble, la sagesse orientale présente un danger pour l' Européen, une tentation de ne pas poursuivre jusqu'au but final le chemin qui lui est dévolu. Que l'on songe à tous les systèmes de Yoga qui déferlent aujourd'hui sur l' Occident. Nous, « Occidentaux », nous avons les meilleures raisons de reconnaître et de priser les écrits sacrés de l ' Inde, d'une profondeur, d'une élévation indéniables, tels que la Bhagavad-Gîtâ, les Upanishads, le Vedanta et bien d'autres. Mais ces œuvres n'apportent pas davantage de solutions à nos problèmes que ne le font celles de Confucius, Lao Tseu, Ramakrishna, Sri Aurobindo ou Sarvepalli Radhakrishnan. A ce point de vue, il faut bien réaliser que le Mouvement Théosophique avait son centre principal à Adyar, près de Madras (Inde) et que ses sources d'enseignement étaient uniquement orientales. Rudolf Steiner respectait l' Orient, mais n'en attendait pas la solution des problèmes de l' Occident.

« L' Oriental a, jadis, fait l'expérience en lui du monde, et aujourd'hui, dans sa vie spirituelle, il en perçoit l'écho. L' Occidental, lui, est au début de son expérience, donc sur la voie de se trouver dans le monde. Si l' Occidental voulait devenir Yogi, il faudrait qu'il développe un égoïsme raffiné, car la nature lui a déjà octroyé le sentiment personnel que l' Oriental ne possédait que comme en rêve. Si le Yogi avait voulu, comme l' Occidental, se chercher dans le monde, il aurait transformé sa connaissance de rêve en sommeil inconscient et se serait ainsi psychiquement enivré. L' Oriental parla du monde sensible comme d'une apparence, en laquelle vit à l'étroit l'esprit qu'il perçoit dans sa réalité pleine et entière en son âme. L' Occidental parle du monde des idées comme d'une apparence en laquelle vit comme une ombre ce qu'il perçoit dans sa réalité pleine et entière, par ses sens, dans la nature. Ce qui fut pour l' Oriental la Maya sensible, est pour l' Occidental réalité en soi. L'idéologie animique formulée par l' Occidental est pour l' Oriental vérité créatrice. Si l' Oriental des temps modernes trouve en sa vérité spirituelle la force de donner à la Maya (le monde des sens) une existence réelle, et si l' Occidental trouve la vie en sa nature-vérité, et contemple l'esprit actif dans son idéologie - alors la compréhension complète naîtra entre l' Est et l' Ouest. L' Oriental n'a pas le sens de la « preuve » ou de la « démonstration ». Il contemple le contenu de ses vérités et par cette contemplation, les connaît. Ce que l'on sait, on ne le « prouve » pas. L' Occidental exige partout des preuves. Il lutte avec le contenu de ses vérités, pensant à partir du reflet extérieur et les expliquant par lui. Mais ce que l'on « explique », il faut le « prouver ». Si l' Occidental délivre la vérité vivante de la nécessité d'une « démonstration », l' Oriental alors le comprendra. Si l' Oriental trouve, au bout du besoin de démonstration de l' Occidental, les rêves et ses vérités non démontrées, mais qu'il les considère pleinement et réellement éveillé, l' Occidental alors sera obligé de le saluer bien bas, comme membre participant au travail d'élaboration des progrès de l'humanité. Car l' Oriental pourra alors accomplir des choses qui seraient impossibles à l' Occidental ».

L'Anthroposophie

« Il sera difficile par la suite , de séparer le récit de ma vie, de l'histoire du mouvement anthroposophique ».Ce fut en effet le cas, durant les vingt années qui suivirent, c'est-à-dire de 1905 jusqu'à sa mort, en 1925. Sans relâche, actif spirituellement et physiquement, il élabore l'anthroposophie, science de l'esprit, impulsion pour l'art et les sciences sociales, et cherche à les ancrer dans les âmes et les groupements humains. Cette activité se développe selon quatre phases successives. L'une prépare la suivante, elles s'entrecoupent dans le temps, mais il est facile de les discerner :

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1. Élaboration de l'anthroposophie (1902-1909). 2. L' art (1910-1916). 3. Les fondations (1917-1923). 4. De la semaine de Noël 1923 à sa mort (1924-1925).

« Dès la fondation de la Section allemande de la Société théosophique, il me parut nécessaire d'avoir un journal. C'est pourquoi, Marie de Sivers et moi, nous créâmes le journal mensuel Lucifer. Ce nom, à cette époque, n'avait naturellement aucun lien avec la puissance spirituelle que je décrivis plus tard sous le nom de Lucifer, le pôle opposé d' Ahriman. Le titre signifiait tout simplement " porteur de lumière" ».

Ce périodique, dont le nombre d'abonnés augmentait rapidement, fut étoffé par l'adjonction du journal viennois Gnosis. Le titre fut donc changé en Lucifer-Gnosis. Marie de Sivers était associée à ce travail :

« Tout cela a été possible parce que Marie de Sivers n'a pas seulement fait le sacrifice matériel de ses forces, mais a dirigé toute sa puissance de travail vers un seul but : l' Anthroposophie. Au début, nous ne pouvions travailler que dans les conditions les plus primitives. J'écrivais la plus importante partie de Lucifer, tandis que Marie de Sivers s'occupait de la correspondance. Lorsqu'un numéro était terminé, nous finissions nous-mêmes les emballages, les adresses, le collage des timbres et portions tous deux ensemble les numéros à la poste, dans une corbeille à linge ».

Lucifer-Gnosis devint florissant. Le nombre des abonnés s'accrut. C'est en 1908 qu'il parut. Le surcroît de travail, et surtout l'activité grandissante du conférencier, d'abord en Allemagne, puis dans toute l' Europe, firent qu'il devint impossible à Steiner d'assurer régulièrement et en temps voulu la rédaction de ce périodique. Et il arriva ce fait curieux, qu'un journal qui à chaque numéro recrutait de nouveaux abonnés, ne put plus paraître, parce que le rédacteur avait tout simplement trop de travail. Le centre de son activité demeura à Berlin. C'est là, 17 Motzstrasse, qu'il résida jusqu'après la Première Guerre mondiale. C'est de là qu'il entreprit ses innombrables voyages. A Berlin, il fonda les Éditions Philosophiques-Théosophiques (plus tard Philosophiques-Anthroposophiques). La direction des Éditions était entre les mains de Marie de Sivers. En 1918, la maison de Motzstrasse fut abandonnée pour Dornach. Dans Lucifer et dans Lucifer-Gnosis, comme dans les cycles de conférences, il expliquait pour la première fois, ce qui fut ensuite exposé dans les œuvres anthroposophiques.

Le premier ouvrage que Rudolf Steiner destina au grand public se rattache à Fichte. « Cet enseignement suppose un sens intérieur entièrement nouveau qui nous révèle un monde inexistant pour les hommes ordinaires. Pensons à un monde d'aveugles-nés, pour lesquels n'existent que les objets que leur toucher leur permet de connaître. Allez parmi eux et parlez-leur de couleurs et autres phénomènes qui n'existent que grâce à la lumière, et que l'on ne connaît que par la vue. Vous leur parlez de quelque chose qui, pour eux, équivaut au néant, et ce qui peut arriver de mieux, est qu'ils vous en fassent part. Vous prendrez conscience alors de votre faute et puisque vous n'avez pas le pouvoir de leur ouvrir les yeux, vous cesserez votre vain discours ».

Rudolf Steiner sent l'aveuglement spirituel de son époque et croit profondément à la possibilité de la « guérison de l'aveugle ». Il n'arrête pas son discours. Par tous les moyens, il cherche à « ouvrir les yeux » aux hommes de son époque. Sa Théosophie est son premier essai direct, non seulement par le discours, la conférence, ou l'aide personnelle, mais par le livre, d'éveiller chez l'homme moderne le pouvoir de voyance de son esprit. La première édition est « dédiée à l'esprit de Giordano Bruno » que l' Église condamna à mort en 1600 à cause de sa conception spirituelle du monde, trop « avancée » semblait-il pour son temps. Bien des pensées exprimées par Steiner dans son livre, sont déjà plus ou moins distinctes dans l'œuvre de Bruno, telle l'idée des vies répétées. La Théosophie contient une explication de l'homme et du monde d'après la clé de la triade. Corps, âme et esprit de l'homme sont formés à partir des trois règnes fondamentaux du monde. L'homme sain se conçoit comme une personnalité enfermée en elle-même. Cela ne l'empêche pas d'appartenir à trois formes d'existence :

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1. Le corps, au monde des corps ou monde sensible. 2. L' âme au monde des âmes. 3. L' esprit au monde des esprits.

Pour « l'aveugle en esprit » seul est réel, seul compte le monde des sens. Il ressent le monde des âmes comme un monde d'ombres, et le monde des esprits lui paraît irréel. C'est pourquoi Rudolf Steiner décrit les trois domaines, chacun avec ses particularités et les activités différentes qui les caractérisent. On ne peut penser le corps de l'homme isolément, sans le monde physique qui l'entoure, de même l'âme subjective ne peut être pensée sans un monde animique objectif qui l'entoure, et l'esprit individuel sans un monde spirituel. Les trois mondes sont dans et autour de l'homme, différenciés et nuancés. Cette Théosophie est écrite comme Introduction à la connaissance du monde suprasensible et à la définition de l'homme. Sa composition permet un aperçu de son contenu :

— « L'essence de l'homme » . — « La réincarnation de l'esprit et la destinée (réincarnation et karma) ». — « Les trois mondes (le physique, l'animique et le spirituel) ». — « Le chemin de la connaissance » .

« On ne peut lire ce livre à la façon dont on lit habituellement à notre époque. D'une certaine manière, chaque page, oui, même chaque phrase, doit être élaborée par le lecteur (extrait de la Préface). La description de certaines parties du monde suprasensible doit être faite dans ce livre. Celui qui n'a d'intérêt que pour le monde sensible, tiendra cette description pour une fantasmagorie. Celui, au contraire, qui cherche à sortir du monde des sens, comprendra bientôt que la vie gagne en valeur et en signification réelles grâce au regard jeté dans un autre monde ».

Le programme spirituel est résumé en ces phrases : La connaissance du monde et la définition de l'homme au sens steinerien sont associées. La connaissance du monde vue comme une activité de la curiosité intellectuelle est sans intérêt pour l'acquisition de la notion essentielle de la définition de l'homme. « Hypothèse » signifie, selon Steiner, qu'il n'est rien indiqué qui ne soit réalité vécue. Un « réalisme spirituel », c'est ainsi qu'on pourrait appeler le but de cette conception du monde : «L'auteur de ce livre ne décrit rien dont il ne puisse fournir une preuve tirée de l'expérience, mais de celle que l'on peut faire dans ce domaine. C'est seulement dans ce sens de l'expérience personnelle que les descriptions sont faites ».

Qui a rencontré Steiner de son vivant a eu l'impression que la déclaration suivante était profondément et intimement justifiée : « Je ne parlerai jamais d'un phénomène spirituel que je ne le connaisse de la façon la plus directe, et par une expérience spirituelle. Ceci est mon étoile polaire (guide) et m'a aidé à dépasser et à me détourner de toutes les illusions ». Le thème central du livre est le chapitre abordant « la réincarnation de l'esprit et la destinée » . En quelques pages, l'enseignement le plus ancien de l'humanité qui règne encore largement sur tout l' Orient, est exprimé selon les formes de la pensée occidentale, et sans faire appel au passé. Même Lessing qui, le premier du monde moderne, dans son ouvrage L' Éducation du genre humain, a posé le problème sous forme de question, n'est pas cité comme témoin. Rudolf Steiner dit son expérience personnelle, sans s'appuyer sur aucune autorité historique

« L'esprit de l'homme doit toujours et toujours se réincarner; cette loi veut qu'il transporte les fruits d'une vie précédente, dans la vie suivante. L'âme vit dans l'actualité. Mais cette vie dans le présent n'est pas indépendante de la vie précédente. L'esprit qui se réincarne ramène son destin de ses incarnations précédentes. Ce destin détermine la vie. Les impressions de l'âme, les désirs qu'elle aura, les joies, les peines qu'elle éprouvera, tout cela dépend de ce que furent les actions de l'esprit lors de ses précédentes incarnations... Le corps est soumis à la loi de l'hérédité, l'âme est soumise au destin qu'elle s'est forgée. Ce destin, qui est l' œuvre propre de l'homme, c'est le karma. Et l'esprit est éternel — la naissance et la mort règnent selon les lois du monde physique, du monde des corps; la vie de l'âme, déterminée par le destin, représente le lien entre les deux, pendant le cours d'une vie humaine ».

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Tout au long de son action, Rudolf Steiner a donné, à l'appui de cet enseignement, une multitude d'exemples. Pendant la seule année 1924, la dernière où son état de santé lui permit de faire encore des conférences, il a plus de soixante fois tenu ses « considérations sur le karma ». Ces exposés contiennent souvent l'affirmation qu'il ne voulait pas baser les rapports entre les vies successives, sur des subtilités intellectuelles. C'est avec ironie et gravité tout ensemble, qu'il stigmatise les subtilités trop faciles sur les rapports entre les vies terrestres successives. Il n'accepta que les expériences spirituelles sérieuses pour la recherche de certains aspects de vies terrestres antérieures — et même ceux-là ne furent transposés d'une existence à l'autre qu'avec la plus grande circonspection. Mais il existe certaines lois fondamentales pour ces expériences : « Celui qui ment beaucoup ou a un penchant, une tendance à la légèreté d'esprit, devient dans une vie suivante, étourdi et frivole, car ce que nous pensons, la façon dont nous pensons, donc tout ce qui est intérieur et caché dans notre être, formera notre comportement extérieur dans une prochaine incarnation ».

Au cours de sa vie, Rudolf Steiner donna beaucoup de ces exemples montrant que ce qui est germe dans une vie, deviendra nécessairement fruit dans la vie suivante. D'un amour altruiste naît la joie, et celle-ci se transforme dans la troisième incarnation, en penchant naturel d'un cœur ouvert; à l'opposé, de la haine et de l'antipathie, naît la souffrance qui, de son côté, crée une disposition naturelle à la folie et à une vie animique en sommeil dans la troisième incarnation. Dans ce sens, le karma est soumis à des nécessités d'airain. Mais, il est possible par l'éducation et l'éducation de soi-même, de régulariser, de soigner. De même qu'un fleuve a son lit naturel, que l'homme peut régulariser en prenant les mesures adéquates, ainsi, l'homme a la possibilité et la liberté de régulariser le torrent des nécessités de son destin. Cet enseignement relatif à la réincarnation et au karma, est en rapport avec la christologie, centre de l'anthroposophie. Rudolf Steiner est convaincu que cette idée peut donner un sens et un but à la vie de l' Occidental, donc à l'humanité. « Une certaine époque a mûri suffisamment pour admettre la conception du monde de Copernic, de même notre époque est mûre pour apporter à la conscience humaine, l'enseignement de la réincarnation et du karma ».

On a retrouvé dans un carnet de notes de 1911, appartenant à Christian Morgenstern, élève de Rudolf Steiner, quelques phrases dont l'écho est le même : « L'enseignement de la réincarnation (...) existe depuis fort longtemps mais a dû être, pendant un certain temps, abandonné. Toute la civilisation européenne revient à ce « laissé-pour-compte ». Ce livre a maintenant redonné l'enseignement antique. Il peut donc rentrer dans le cycle évolutif de l' Occident, et c'est un bienfait sans égal. Cet enseignement va à nouveau féconder l'humanité, l'éclairer, la délivrer. Deux mille ans après le Christ, le voici présenté d'une autre manière et avec un sens tout différent, acceptable pour la conscience moderne. »

Dans son livre Théosophie, Rudolf Steiner décrit pour la première fois, l'entité de l'homme et ses quatre membres, que nous aimerions résumer ici. Trois degrés conduisent de la nature à l'homme :

minéral végétal animal

Ces trois règnes naturels sont les trois aspects visibles des trois sphères d'existence auxquelles l'homme appartient. Pensons maintenant en même temps, et en les plaçant l'un à côté de l'autre, à :

un cristal de roche une rose épanouie un cerf effarouché

Laissons ces trois êtres naturels agir sur nous comme des phénomènes purs. Le cristal représente le monde minéral et, d'après sa substance, c'est un corps mort. II est constitué de parties qui existent « les unes à côté des autres » . Leur substance forme relation entre les éléments chimiques de la silice et de l'oxygène; elle est organisée selon les lois de la physique (hexagone à six arêtes). La rose

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représente le règne végétal, et possède également un corps spatial bien que de forme changeante. D'après son essence, c'est un être vivant dans le temps qui se développe selon un processus à phases « successives » : germe, tige, fleur, fruit. Le cerf appartient comme tout animal aux trois sphères. Comme le minéral, il possède un corps spatial, qui à la fin de sa vie est rejeté sous forme de cadavre. Comme la plante, il se développe dans le temps : embryon. faon, biche, et sa vie est limitée par la conception et la mort. En troisième lieu, il possède une faculté étrangère à la plante et au minéral : le désir, la sensation du plaisir et de la douleur, les instincts.

Chez l'homme, il existe un quatrième membre, c'est le Moi, qui peut agir en pensant, sentant, voulant. Étant donné que l'homme possède un corps qui, à la mort, devient cadavre, il appartient au monde minéral. Ce membre, R. Steiner l'appelle le « corps physique ». Étant un être vivant dans le temps, susceptible de croissance, de reproduction, de digestion, d'assimilation, il ressemble à la plante. Ce deuxième membre qui est ce qu' Aristote nomme « l'âme végétative », ce système de forces formatrices, organisatrices, est appelé « corps éthérique ». Comme être de convoitise, qui ressent plaisir et douleur, l'homme est apparenté à l'animal. Cette âme, plus « animale » au sens d' Aristote, est le « corps astral ». Le quatrième membre grâce auquel l'homme devient homme, dont la possession le distingue des autres règnes naturels et lui permet de se sentir un « esprit parmi les esprits », est le Moi.

On remarque que l'organisation de l'être de l'homme selon quatre membres ne contredit pas la trinité du corps, de l'âme et de l'esprit. C'est une différenciation du corps composé d'une partie prise au règne minéral terrestre et qui y retourne par la mort, et d'une partie vivante qui, selon son essence même, est non sensible, mais suprasensible, c'est-à-dire éthérique. L'expression corps astral est sans doute inhabituelle pour désigner l'âme, en tout cas, pour qui ignore les œuvres d'un Paracelse, ou d'un Jacob Boehme, etc. C'est pour tenir compte du rapport qui existe entre la vie animique humaine et animale et les influences astrales (la partie justifiée de l'astrologie) que Steiner a maintenu cette appellation qui vient de la « mystique ». Car un corps astral, c'est, stricto sensu, un corps soumis aux astres. Dans son livre Théosophie, Rudolf Steiner donne à ce sujet une description plus complète des aspects de l'âme humaine au sein du corps astral. II propose la gradation suivante :

— « Corps astral inférieur (lié aux désirs de nourriture et de reproduction) » — « Âme de sensation ». — « Âme d'entendement (ou de raison) ». — « Âme de conscience ».

Le Moi humain, travaillant à purifier les membres inférieurs de sa nature les transforme, et trois nouveaux états ou degrés sont franchis, sur le chemin des membres supérieurs, qui conduisent au-delà du Moi et nous relient au divin. La dernière partie de Théosophie est intitulée « Chemin de la connaissance ». Ce chemin constitue un début, un point de départ sans la connaissance duquel tout le reste s'évapore en fumées... Lorsque l'on veut fonder sa propre conception du monde sur des perceptions spirituelles, il faut être certain que ces perceptions n'ont pas seulement un caractère subjectif. Il faut acquérir la faculté de différencier de la même manière les illusions, les hallucinations, les images fallacieuses de toutes sortes issues de la réalité, aussi bien que le ferait un homme qui ne croit qu'au monde des sens et n'a besoin que de lui, dans la sphère où se déroule son existence, pour rester sain d'esprit. Le savant qui veut arriver à avoir, dans son domaine, des expériences objectives, doit déjà s'y être préparé en se soumettant avec discipline aux méthodes de base, mais combien plus encore, un savant au sens ou R. Steiner l'entend, doit-il se plier à une discipline et pratiquer une méthode, pour acquérir l'objectivité spirituelle. Penchants aux illusions sur soi-même, autosuggestion, utopies et rêveries extatiques de toutes sortes doivent être tirées au clair et dominées. C'est pourquoi, dans toutes les véritables écoles « occultes » du passé, le sentier de la connaissance passait par la « purification », la « transfiguration » de l'âme humaine, avant qu'il puisse être question d'une « illumination » .

Immédiatement après la parution du livre Théosophie, Rudolf Steiner se tourna vers un autre thème important. Dans des essais, dont le premier parut en 1904, il publie le contenu du livre qui ne fut édité sous cette forme qu'en 1909 et porta le titre l 'Initiation .

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La Philosophie de la Liberté

La « Philosophie de la liberté » contient déjà, quant à la pensée pure, tout ce que Rudolf Steiner a, par la suite, publié et développé sous le nom d'« anthroposophie » . C'est pourquoi, essayer d'expliquer le contenu de cet ouvrage dépasse, de loin, le cadre d'une monographie.

Malgré tout, il faut risquer cette entreprise et esquisser les lignes principales de cette théorie de la connaissance, œuvre qui occupa le centre de la vie de Rudolf Steiner. La philosophie de la Liberté porte le sous-titre : « Résultats d'une observation de l'âme d'après une méthode scientifique ». Par cet additif, le premier désir de Rudolf Steiner est clairement exprimé. Il s'agit pour lui, d'édifier une science de l'esprit qui se sert des méthodes strictement scientifiques mais en choisissant comme objet d'étude et de connaissance, d'une part, le monde sensible, et d'autre part, le monde suprasensible, les soumettant à la même méthode d'observation. Le monde des sens, partie d'un monde, accessible aux sens physiques et à leurs « prolongements » comme le microscope, télescope et autres appareils, demeure Maya, monde d'apparences, d'illusions aussi longtemps qu'on ne le pénètre pas par une conscience pensante. Le monde sensible n'exprime jamais toute la vérité. L'activité de la pensée déliée, indépendante de la perception sensorielle, se développant sous forme d'activité spirituelle, et apparaissant comme « pensée libérée des sens » a seule le pouvoir d'élever cette moitié du monde des sens, par l'acte de connaissance, jusqu'à la totalité de la vérité.

Par cette pensée « libérée des sens » l'homme dépasse en esprit les limites qui, depuis Kant et la théorie de la connaissance du XIXè siècle, avaient été décrétées à jamais infranchissables.

Le premier combat de R. Steiner fut mené contre le dogme de la limitation de la connaissance humaine. Il fit en effet l'expérience en sa propre pensée, du dépassement de cette limite que l'intellect a élevée lui-même par son lien volontaire avec tout ce qui est accessible grâce à « la mesure, au nombre et au poids ». L'âme qui possède la pensée libérée des sens vit dans l'essence même du monde et y déploie son activité. La pensée libérée des sens, comme phénomène spirituel, est un processus organique du monde spirituel. Plus cette pensée est intense, plus elle est créatrice, plus elle est spirituellement puissante et plus elle se perçoit elle-même consciemment, enracinée dans les profondeurs spirituelles de l'existence. C'est pourquoi :

Parler des limites de la connaissance n'avait pas de sens pour moi. Retrouver le contenu de l'esprit dans le monde perçu par l'expérience de l'âme était pour moi connaissance. Lorsque quelqu'un parlait des limites de la connaissance, j'y voyais la confirmation du fait qu'il ne pouvait pas éprouver en lui la vérité réelle, et donc, ne pouvait pas la retrouver dans le monde perçu. La réfutation de la théorie de la limitation de la connaissance par l'exposé de mon point de vue personnel fut mon souci primordial.

Il est concevable que toute individualité, à certains moments, dans sa recherche, se heurte à des limites. Les limites de la connaissance, chez un enfant, reculent au cours de sa vie, au fur et à mesure que sa personnalité se développe. Elles ne sont pas posées une fois pour toutes, mais suivent l'évolution de l'individualité. Celle-ci se développe sur deux plans : celui de la perception et celui de la pensée. La connaissance résulte de l'interprétation de ce qui a été perçu par l'activité pensante formatrice de notions et d'idées.

Le fait que les objets soient donnés sans les notions qui les expliquent tient à notre organisation spirituelle et non aux objets. Notre entité, en sa totalité, fonctionne de manière que, pour chaque objet, les éléments de la vérité viennent des deux côtés nécessaires à l'observation : perception et pensée.

Rudolf Steiner n'emploie pas le mot perception pour la seule perception sensible. Les expériences de l'âme, du sentiment, de la sensibilité, de la sensation, participent de la perception, servent d'organes de perception comme l'œil ou l'oreille. Le chercheur doit réagir aux expériences de perception réalisées dans le champ de la subjectivité, avec autant d'objectivité que devant les rapports et les résultats des expériences scientifiques faites grâce aux appareils de laboratoire. Donc le progrès de la connaissance est lié à la discipline, essentiellement, ainsi qu'à l'amélioration, à l'élargissement, à

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l'affinement du pouvoir de perception. Mais cette perception du monde selon toutes les nuances de l'existence corporelle animique, spirituelle, n'apporte encore aucune connaissance. Celle-ci n'apparaît que si, en même temps, de l'autre côté, la pensée purifiée de tous les éléments non spirituels vient à sa rencontre. Comment faut-il comprendre, pensée purifiée?

La purification de tous les facteurs négatifs, impurs, non pragmatiques que sont désirs, penchants, émotions, passions et illusions de toutes sortes. On doit exiger de tout chercheur, et surtout de l'investigateur suprasensible, qu'il fasse régner en son âme, au cours du processus de connaissance, la même objectivité que celle qui est demandée au savant lors de ses expériences

La perception n'a rien de définitif, d'exclusif, mais elle est l'une des faces de la vérité totale. L'autre face est l'idée. Perception et notion d'un objet font tout l'objet.

La synthèse de la perception et de la notion ne se réalise pas automatiquement, mais est amenée par l'activité pensante de la personnalité en laquelle se joue ce processus de pensée. Tant que cette pensée n'est pas troublée par les nécessités des voeux, instincts, désirs, passions, cette synthèse se fait dans la liberté. Mais, si l'homme agit sous l'action d'impulsions qu'il laisse se glisser en lui, sans discerner sa pensée, bien que celle-ci soit à la base même de son acte, il n'est pas libre. Non seulement lui, en tant qu'individu n'est pas libre, mais aussi, « ce » qui provoque en lui certaines émotions.

Il laisse agir le non-spirituel. Ce qui est spirituel en lui n'agit que lorsqu'il trouve l'impulsion de son action dans le domaine de la pensée libérée des sens, sous forme d'intuition morale. C'est alors qu'il agit par lui-même, rien d'autre n'agit à sa place. C'est alors qu'il est un être libre, tirant son action et les mobiles de son action de sa libre entité.

On voit là le devoir qui incomba à Steiner, devoir de vaincre les limites de la connaissance, lié de la manière la plus étroite avec le problème de la liberté humaine.

Je voulais démontrer comment celui qui refuse à la pensée libérée des sens, la réalité d'une pure spiritualité en l'homme, ne peut d'aucune manière arriver à la notion de liberté; comment d'autre part, cette même notion est immédiatement accessible à qui admet la réalité de la pensée libérée des sens.

Le degré de liberté auquel l'homme peut atteindre, dépend par conséquent de la qualité de sa pensée. Celui qui ne peut s'observer lui-même à l'aide de la pensée telle que l'a caractérisée R. Steiner, et en ressentir l'activité intérieure, ne peut même pas se représenter cette activité intérieure totalement libérée des sens, et il peut encore moins suivre sa « philosophie de la liberté » . Steiner part du domaine de la pensée libérée des sens comme donnée d'expérience. Par cette pensée, l'homme atteint le domaine moral/idéal qui est aussi concret quant aux pensées et aux idées, que le monde physique avec ses tables et ses chaises. L'homme est spirituellement actif lorsqu'il s'anime intérieurement par l'observation dans le royaume de l'esprit déployant ainsi la fantaisie morale qu'il a créée lui-même.

Être libre signifie : pouvoir déterminer par soi-même, grâce à la fantaisie morale, les représentations, bases de l'action. La liberté est impossible si quelque chose qui m'est totalement extérieur - soit un processus mécanique, soit un dieu extraterrestre exclusif - détermine mes représentations morales. Je ne deviens libre que si je produis moi-même ces représentations, et non si j'accomplis les mouvements, si je saisis les représentations qu'un autre a introduits en mon être. Un être libre doit pouvoir vouloir ce que lui-même tient pour juste.

Le rang d'un homme est déterminé par l'élévation et la puissance de cette qualité que Rudolf Steiner appelle la « fantaisie morale » .

C'est la source de toute action de l'esprit libre. C'est pourquoi il n'y a que les hommes qui possèdent la fantaisie morale, qui sont moralement productifs. Par contre, ceux qui prêchent la morale, et ceux qui fabriquent des règles de morale sans pouvoir les renforcer par des représentations concrètes, sont moralement improductifs.

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En ce qui concerne cette œuvre fondamentale, dont nous n'avons pu ici donner que de bien insuffisantes indications, ne pouvant aucunement remplacer l'étude de ce livre, Rudolf Steiner écrit dans son autobiographie :

Ma philosophie de la liberté est basée sur une expérience résultant du travail de la conscience humaine sur elle-même. La liberté s'exerce dans la Volonté. Elle est vécue dans le Sentiment. On la reconnaît dans la Pensée. Mais pour atteindre ce triple aspect de la liberté, il ne faut pas que la vie se perde dans la pensée.

On comprendra peut-être pourquoi, toute sa vie, Rudolf Steiner exigea comme postulat à la compréhension de son « anthroposophie », une pensée vivante et non une pensée morte. Cette période de la vie de Rudolf Steiner se termina par le livre : Gœthe et sa conception du monde. l écrivit au même moment L'Introduction aux œuvres de Schopenhauer (1894-1895) et de Jean-Paul (1897) qui furent éditées dans « La bibliothèque de la Littérature mondiale de Cotta » . Lorsqu'en 1897, il quitta Weimar, l'annuaire de la Société Gœthe condensa la reconnaissance officielle de son activité aux archives de Gœthe et Schiller, par ces mots :

« Ce qui a été fait ici, par un travail en commun utile et une activité critique positive et productive, a suscité l'accord de tous les connaisseurs. II faut le remercier de ses efforts dénués d'égoïsme. Il a donné, sous la forme ordonnée d'une construction unitive, une foule d'indications originales, qui assurent à Gœthe, homme de science, une valeur plus grande et plus universelle. »

Rudolf Steiner, avec ses trente-six ans, aurait dû être satisfait de cet « écho » bien que sa position personnelle dans le cercle des « officiels » de Weimar n'ait été ni remarquée ni comprise.

A la fin de l'époque de Weimar, j'avais plus de trente-six ans. Depuis un an déjà, un changement profond avait commencé en moi. Avec mon départ de Weimar, je sentis que ce changement n'était pas affecté par la transformation de ma vie extérieure qui, pourtant, fut grande. Il en demeurait indépendant.

Tout au long de son enfance, et de son adolescence, aussi bien que pendant le temps passé à Vienne et à Weimar, Steiner éprouva toujours la même difficulté à faire, dans le monde sensible, des expériences aussi intenses que celles qu'il pouvait faire dans le monde des idées et dans le monde spirituel; vivre dans le monde de l'esprit lui était tout à fait naturel et il y possédait une conscience parfaitement éveillée, mais il avait l'impression d'un rêve lorsqu'il pénétrait le monde sensible, le monde des formes, des couleurs, des sons. Ce que possède aujourd'hui un jeune homme « moderne » qui a grandi dans le mouvement assourdissant d'une grande ville : le contrôle des sens, c'est cela justement, qui manqua tout d'abord à R. Steiner.

Le contact avec le monde sensible par la perception, me créa les plus grandes difficultés. C'était comme si je n'avais pu insuffler l'expérience psychique assez profondément dans les organes sensibles pour pouvoir établir une relation entre ce que ceux-ci éprouvaient et le contenu de mon âme. Mais cela commença à changer complètement dès le début de ma trente-sixième année. Mon pouvoir d'observation des choses, des êtres et des phénomènes du monde physique s'organisa, devint exact et pénétrant... Une attention pour le sensible/perceptible qui n'existait pas auparavant, s'éveilla en moi. »

Il savait que ce « revirement » se passait de façon naturelle, lentement et organiquement en chaque être humain pendant l'adolescence. Ce qui fut particulier à R. Steiner, c'est que ce phénomène se produisit beaucoup plus tard. Il demeura « longtemps en enfance » pour ce qui est de ses rapports avec le monde extérieur. Le fait d'éprouver cette profonde transformation beaucoup plus tard qu'il n'est normal, eut un aspect positif dont il fut pleinement conscient : Je compris que les hommes passant précocement d'un certain état d'âme existant pour eux dans le monde spirituel à un autre état de vie dans le physique, ne pouvaient parvenir à aucune conception, ni du monde spirituel ni du monde physique. Ils mêlent instinctivement et continuellement, tout ce que les choses disent à leurs sens et ce que l'âme ressent grâce à l'esprit dont elle se sert ensuite pour se faire une « représentation des choses ».

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Il est difficile de s'imaginer cet état d'âme en pleine « transformation ». Dans un temps relativement court, le monde sensible qui se déployait devant R. Steiner, comme un paysage voilé de brumes, lui apparut clair et compréhensible comme jamais encore il ne l'avait été. Les voiles se déchirèrent et le monde extérieur se révéla avec tous ses contours et ses couleurs enluminées de soleil. L'exactitude et la pénétration par l'observation de ce qui tombait sous les sens furent, pour moi, expérience aussi nouvelle que de fouler un monde inconnu.

Le rapport nouveau, que R. Steiner établissait avec le monde eut bien évidemment une répercussion sur son monde intérieur. La vie de son âme en fut intensifiée et réagit sur les relations qu'il entretenait avec son prochain. Je me proposais d'observer tout à fait objectivement et de concevoir purement et librement ce qu'un être humain pouvait vivre. J'évitais scrupuleusement de critiquer les actions des hommes ou de les juger selon ma sympathie ou mon antipathie; je voulais simplement laisser agir sur moi l'homme tel qu'il est. Il me sembla bientôt que cette manière d'observer le monde conduisait réellement vers le spirituel.

II se sent maintenant, et pour la première fois, impliqué dans l'univers tout entier, sachant qu'il va et vient avec une liberté souveraine entre le monde intérieur et le monde extérieur. La réelle « compréhension de la vie », il la trouve dans l'expérience de la polarité et de l'équilibre de l'intérieur et de l'extérieur conçus selon le même état de conscience. Il décrit ainsi ce nouvel état : Là est le monde et son énigme. (...) La connaissance voudrait s'en approcher; mais elle veut en général donner à la solution de l'énigme un contenu de pensée. Mais les énigmes (...) ne se résolvent pas par des pensées. Les pensées amènent l'âme sur le chemin de la solution mais elles ne contiennent pas la solution. Je me disais aussi : le monde, en dehors de l'homme, est une énigme, l'énigme cosmique, et l'homme est lui-même la solution de cette énigme.

L'Agriculture Bio-Dynamique

Tous ceux qui avaient suivi de loin la vie de Rudolf Steiner, ressentirent un immense étonnement lorsqu'en juin 1924, immédiatement avant le cours qu'il faisait aux pédagogues-soignants, il en fit également un aux agriculteurs.

Un occultiste, un initié, parla devant des paysans et des propriétaires terriens, du travail des champs, de l'élevage du bétail, de l'amendement des terres, par engrais ou fumage, de l'assolement, de l'exploitation forestière et du paysannat. Ce fut vraiment une nouveauté; car rien de comparable ne lui était arrivé jusqu'alors. Comme dans tous les autres domaines, Rudolf Steiner ici aussi, s'appliqua à ne jamais parler en « théoricien » . Les auditeurs écoutaient un « initié » qui connaissait beaucoup plus sûrement les « réalités terrestres » qu'eux-mêmes, qui avaient passé leur vie dans les champs, avec le bétail. Les connaissances paysannes de Rudolf Steiner remontent à sa première enfance, alors qu'il aidait ses parents à cultiver leur petit jardin. Il répondait un jour à un auditeur enthousiaste qui, à la fin d'une conférence, lui faisait ainsi compliment : « Oui, c'est à vos profondes connaissances philosophiques que vous devez tout cela, et surtout de pouvoir nous faire des révélations aussi grandioses!

— Je pense que ce que je peux faire, je le dois davantage, au fait que lorsque j'étais enfant, j'ai appris à toujours nettoyer mes chaussures moi-même... »

Pareil propos était vraiment caractéristique de Rudolf Steiner.

Ce Steiner « rustique »sut aussi gagner la confiance des paysans qui sollicitaient ses conseils. Ils formèrent un « cercle d'essais » pour traduire en actes, les impulsions reçues. Ils travaillèrent énormément les premières années. mais le national-socialisme, puis la Deuxième Guerre mondiale et ses suites, les contraignirent à abandonner de telles recherches, principalement en Allemagne. Bien des propriétés et des fermes d' Allemagne de l' Est, qui avaient été entièrement transformées et adaptées à la nouvelle méthode de culture, furent perdues. Aujourd'hui, le mouvement est à nouveau très connu et se nomme « Méthode de culture biologique-dynamique » et ses produits portent le label « Demeter ». Il ne faudrait pas confondre cet aspect de l'anthroposophie, avec divers essais de réforme, notamment celle qui vise l'agriculture par exemple, et exige l'interdiction des engrais chimiques. Les

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conseils pratiques de Rudolf Steiner n'ont rien de négatif. Ils ont en vue le but final : la guérison du sol et de ses fruits. Les aspects spirituels de la nature et les connaissances des rapports entre la Terre et le cosmos représentent, pour cette agriculture, les préalables indispensables à qui veut soigner et guérir les maladies du sol, des plantes, des animaux, donc également des hommes. Steiner, grâce à un grand nombre d'indications concrètes, conduisit certains horticulteurs et certains paysans sur une voie qu'ils suivent depuis lors.

La Médecine (1920-1924)

Peu de temps après la fondation de l'école Waldorf, Rudolf Steiner fut prié d'apporter son concours pour une amélioration et une extension de la thérapeutique. Cette demande fut motivée par la crise de la médecine, perceptible en tous lieux et sur tous les plans. C'est alors que les anthroposophes apprirent que Rudolf Steiner avait déjà fait un cycle de conférences à Prague. en 1911, sur la Physiologie occulte. Rudolf Steiner s'éleva avec force, dès le premier instant, contre le danger de dilettantisme qu'un intérêt grandissant pour les questions médicales pouvait faire naître chez les profanes. A de rares exceptions près, et pour des raisons sérieuses, il n'admit à ses cours, de 1920 à 1924, que des médecins et des étudiants en médecine. L'humanisme qu'il avait élaboré depuis près de vingt ans comme professeur d'anthroposophie en constitua la base.

Dans son livre « Les Énigmes de l'âme » (1917), il avait fait un exposé fondamental sur le rapport existant entre les fonctions de l'âme et les processus de la vie. Cet exposé trouva son application dans le domaine physiologique. Il y était dit que la dynamique de l'organisme humain en bonne santé doit être comprise par l'étude de l'activité commune des trois systèmes organiques plus ou moins « autonomes » :

1. — Le système neurosensoriel, principal agent des perceptions sensibles et des facultés de représentation. 2. — Le système métabolique (échanges nutrition-digestion-assimilation-excrétion...), la génération et le système des membres qui sont la base physiologique de la vie volontaire. 3. — Le système respiratoire-circulatoire (circulation sang-cœur-poumons), entre ces deux pôles qu'il équilibre, il est par ailleurs le porteur de la vie des sentiments.

L'accélération ou la décélération (le fonctionnement pléthorique ou le fonctionnement insuffisant) de l'un de ces systèmes provoque la maladie. On ne comprend pas le « corps humain », ses organes, et leur fonctionnement, si on ne le considère en même temps comme l'expression de l' homme suprasensible. Parler en général de l'âme et de l'esprit ne mène pas bien loin, mais il faut avoir une connaissance nuancée de la façon dont les différents organes et les systèmes organiques participent à la vie de l'âme et à celle de l'esprit. Ces aspects généraux furent expliqués à l'aide de nombreux exemples et d'indications concrètes. Rudolf Steiner donna aux médecins qui l'avaient sollicité, la possibilité d'établir un diagnostic anthroposophique des maladies et aussi des directives sur les méthodes thérapeutiques à utiliser. Après sa mort, parut son livre « Diagnostic et thérapeutique d'après les connaissances de la science spirituelle » (1925) qu'il avait écrit en collaboration avec la doctoresse Ita Wegman, première directrice de la section médicale au Gœtheanum et fondatrice de la clinique d' Arlesheim.

« Il ne s'agit pas de s'opposer aux méthodes scientifiques reconnues de la médecine actuelle. Nous admettons celle-ci dans ses principes et nous pensons que ce que nous avons donné ne peut être utilisé dans la pratique médicale que par des hommes possédant toutes les connaissances médicales et les diplômes reconnus. Nous ajoutons seulement à ce que l'on peut savoir aujourd'hui sur l'homme par les méthodes scientifiques, des connaissances plus vastes découvertes par d'autres méthodes et c'est pourquoi nous avons le devoir de travailler à partir de ce monde et de cette connaissance élargis, à un élargissement simultané de l'art de guérir ».

Les impulsions données par ce livre et les cours d'enseignement médical, se sont tellement développés que depuis quarante ans que Rudolf Steiner est mort, plus de mille médecins appliquent

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une « médecine anthroposophique » et un grand nombre de cliniques et de sanatoriums lui sont réservés. La clinique d' Arlesheim fut la « mère » de ce mouvement médical. Depuis quelques années, la section médicale du Gœtheanum s'est également transformée. Chaque année à Pâques, en Allemagne, un congrès médical se réunit à Combourg (Schwäbish Hall) où deux cents médecins se rencontrent. Pour les malades mentaux, le Dr Friedrich Huseman fonda une clinique spéciale, « Wiesneck », à Buchenbach, près de Fribourg-en-Brisgau. Les cours de médecine contenaient également de nombreuses indications sur une nouvelle fabrication et utilisation des remèdes. Il faut citer ici le nom du Dr Schmiedel, pharmacien, à qui nous devons la création, d'après ces données, des fabriques de médicaments à Arlesheim et à Schwäbish-Gmünd (Weleda), qui ont aujourd'hui un important réseau international. Pour des raisons semblables, le Dr Hauschka créa à Eckwâlden près de Stuttgart la firme « Wala » où sont fabriqués à partir des sucs végétaux des produits diététiques fortifiants.

Un programme d'études médicales spéciales est régulièrement poursuivi par les docteurs Kaelin et Leroi au sein de la « Société de recherche pour le cancer ». Le but de la société, c'est l'étude d'un remède indiqué par Rudolf Steiner contre le cancer et le perfectionnement des méthodes d'utilisation et d'application. Ce médicament porte le nom d' iscador. Il est fabriqué à partir de différentes sortes de gui (viscum album). La Société est dirigée par des médecins qui, comme tous les autres médecins, ont à lutter jour après jour, parmi leur clientèle, avec le cancer... » Rudolf Steiner n'a jamais été un « guérisseur ». Cependant, bien des malades doivent leur guérison à son action. Tous ceux qui le connurent pendant les dernières années de sa vie, étaient étonnés de la masse de connaissances détaillées qu'il possédait dans le domaine médical.

« Avant de faire des déclarations et d'émettre des affirmations sur ce qui concerne l'esprit, l'anthroposophie crée les méthodes qui le lui permettent ».

La Pédagogie Curative (1924)

L'augmentation du nombre des enfants psychopathes à notre époque est indéniable et constitue un fait extrêmement grave. Rudolf Steiner créa le mouvement de « pédagogie curative ». C'est à nouveau une impulsion extérieure qui lui en donna la possibilité. Trois jeunes étudiants qui soignaient les déficients mentaux demandèrent des conseils à Rudolf Steiner, qui les leur donna. Ils fondèrent par la suite, près de Iéna, le premier Institut de pédagogie curative, le « Lauenstein » (1924). Peu de temps après, des enfants « psychiquement malades » furent conduits, par le destin. à la clinique d' Arlesheim. De cette expérience naquit, toujours à Arlesheim, l'institut « Sonnenhof » dirigé par la doctoresse Ita Wegman. Qui aurait pu supposer alors, que de ces deux germes, et de façon aussi simple, un mouvement allait prendre naissance dont dépendent aujourd'hui plus de cent instituts qui soignent des milliers d'enfants?

L'idée fondamentale de ce travail exigeant le plus grand sacrifice personnel, naît directement et naturellement de l'anthroposophie. Le destin (karma) a conduit les âmes de ces enfants vers des corps maladifs et malformés. Des incarnations comme celles-là ne sont en aucun cas inutiles. Elles permettent des expériences et des épreuves élaborées par l'individualité éternelle de l'homme, pendant la vie post mortem; elles le font mûrir et lui apportent des forces neuves qu'il utilisera au cours d'une prochaine incarnation. C'est pourquoi il faut s'approcher de ces enfants malades avec un immense amour et une grande compréhension. En juin 1924, dans l'un de ses cours, Rudolf Steiner, s'adressant au groupe des premiers pédagogues soignants, qui avaient appris dans le détail tout ce qui concernait les maladies infantiles, mit en relief la volonté de sacrifice que nécessite la profession de pédagogue-soignant.

Qu'est-ce qui est surtout nécessaire à l'éducation de ces enfants? Pas une lourdeur de plomb, mais au contraire, un humour léger, un véritable humour, l'humour de la vie! Le travail de pédagogie curative, qui va de pair avec l'eurythmie curative, relève ainsi de la section médicale. Trente-sept ans plus tard, le Pr Jacob Lutz de l' Université de Zurich (1961), traitant de la pédagogie curative anthroposophique dans son cours sur la « psychiatrie infantile », écrivait :

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« J'ai pu examiner, depuis des années, en relation avec le traitement des enfants profondément déficients et des enfants atteints de traumatisme du cerveau, ce qui était fait dans les homes dont l'activité est basée sur l' anthroposophie de Rudolf Steiner. L'aide que les enfants malades reçoivent là est si grande et le traitement produit des résultats si spectaculaires et si significatifs, que vous serez obligés, sous peu, de vous y référer. (...) Je dois à l'étude de l'humanisme, de la pédagogie curative de Rudolf Steiner, des idées décisives et fondamentales sur les problèmes posés par ces enfants... »

L' Anthroposophie et les Sciences

L'esprit de Rudolf Steiner avait une telle ampleur universelle que beaucoup de domaines ont été abordés dans ses écrits et ses nombreuses conférences et notamment les Sciences. Rudolf Steiner reprochait à juste titre aux sciences d'être matérialistes et d'avoir oublier les impulsions spirituelles qui sont à l'origine de tout. La clairvoyance atavique s'étant éteinte progressivement, les hommes oubliaient les mondes spirituels et sombraient dans le matérialisme le plus total. Nous voyons à l'heure actuelle, les conséquences de tout ceci dans tous les domaines de l'existence, non seulement de l'existence humaine, mais de celle de tous les êtres composant notre monde, sans oublier notre planète elle-même. Et bien-sûr (ceux qui ont les principes de bases de la science spirituelle seront d'accord avec moi) des implications dans l'évolution universelle et divine. Pour donner une petite idée du rapport de Rudolf Steiner avec les sciences, je citerais des extraits de la première des conférences faites à Stuttgart du 1er au 18 janvier 1921 et tirés du livre «Science du Ciel - Science de l'Homme» aux Éditions Anthroposophique Romandes. Puis d'extraits d'une allocution donnée le 8 août 1921 à Dornach et tirée du livre «Lumière et Matière» aux Éditions Anthroposophiques Romandes.

Stuttgart, 1er janvier 1921 :

.../...La situation est telle que beaucoup de choses auront à changer dans un avenir relativement proche au sein de la dite vie scientifique, si celle-ci ne veut pas aboutir à une complète décadence. Et notamment certaines matières scientifiques que l'on range actuellement sous certaines appellations, et que l'on fait pratiquer sous ces appellations par nos écoles habituelles, devront être sorties de leur structure et seront à répartir selon d'autres critères afin que, en quelque sorte, se fasse une vaste redistribution de nos disciplines scientifiques. Car la répartition que l'on a maintenant n'est absolument pas suffisante pour accéder à une vision du monde qui soit conforme à la réalité. De l'autre côté, notre monde actuel adhère de façon si forte à cette répartition que les chaires d'enseignement sont tout simplement pourvues d'après cette répartition traditionnelle. On se limite tout au plus à rediviser en spécialités les disciplines scientifiques existantes ainsi délimitées et à chercher pour ces spécialités différents «spécialistes», comme on les nomme. Mais un changement devra intervenir dans toute cette vie scientifique, dans le sens où de tout autres catégories devront apparaître, et dans ces catégories on trouvera réunies dans une discipline inédite des choses diverses qui sont actuellement traitées en zoologie, disons aussi en physiologie, et ensuite encore en épistémologie... Par contre les anciennes disciplines scientifiques, qui travaillent beaucoup dans les abstractions, devront disparaître. II faudra aussi qu’aient lieu des synthèses scientifiques tout à fait nouvelles. Cela rencontrera tout d'abord des difficultés, dans le sens où les gens sont aujourd'hui «dressés» aux catégories scientifiques en vigueur et qu'ils ne trouvent que très difficilement le pont dont ils ont besoin pour arriver à une organisation de la matière scientifique qui soit conforme à la réalité.

Si je devais m'exprimer de façon schématique, je dirais: aujourd'hui nous avons une astronomie, nous avons une physique, nous avons une chimie, nous avons une philosophie, nous avons une biologie, disons, nous avons une mathématique, etc. Là-dedans on a créé des spécialités, plutôt, dirais-je, afin que les spécialistes n'aient pas trop à faire pour s'y retrouver, et pour qu'ils n'aient pas non plus trop à faire pour maîtriser la littérature spécialisée qui s'étend à l'infini. Mais il s'agira de créer de nouvelles disciplines qui recouvrent quelque chose de tout autre, une discipline qui par exemple recouvre quelque chose de l'astronomie, quelque chose de la biologie, etc. Pour cela sera bien sûr nécessaire une transformation de toute notre vie scientifique. C'est là que doit agir, dans cette direction justement, ce que nous appelons la science de l'esprit, laquelle veut être quelque chose ayant un caractère d'universalité. Elle doit se donner comme une tâche particulière d'agir dans cette

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direction. Car, avec simplement les anciennes répartitions, nous n'avançons plus. Nos universités se situent aujourd'hui face au monde de façon vraiment tout à fait étrangère à la vie. Elles nous forment des mathématiciens, des physiologistes, elles nous forment des philosophes, mais en fait tous sont sans aucun rapport avec le monde. Ils ne savent rien faire d'autre que de travailler justement dans leurs disciplines étroitement limitées. Ils nous rendent le monde sans cesse plus abstrait, sans cesse plus inadapté à la réalité. Et je voudrais, dans ces conférences précisément, prendre en compte ce fait qui est comme une nécessité pour notre époque. Je voudrais vous montrer comment, à terme, il sera impossible d'en rester aux vieilles répartitions. Et c'est pourquoi je voudrais montrer comment les disciplines les plus diverses, qui aujourd'hui ne se soucient pas de l'astronomie, ont en fait certains rapports avec une connaissance à caractère universel, au sens spatial ici, avec l'astronomie, de sorte que, tout simplement, certaines connaissances astronomiques devront apparaître dans d'autres disciplines pour que l'on apprenne à maîtriser ces autres disciplines d'une manière adaptée à la réalité.

Voyez-vous, ce que nous appelons aujourd'hui « astronomie », y compris le domaine de l'astrophysique, ce n'est au fond qu'une création de l'époque moderne. Avant l'époque de Copernic, de Galilée, on a pensé les choses de l'astronomie vraiment tout autrement qu'on le fait aujourd'hui. I l est même extraordinairement difficile aujourd'hui d'indiquer la façon particulière dont on a pensé en astronomie, je dirais aux 13è, 14è siècles encore, parce que cela est devenu totalement étranger à l'homme actuel. Nous vivons seulement plus dans les représentations — et, d'un certain point de vue, cela est tout à fait justifié — qui ont été créées depuis le temps des Galilée, Kepler, Copernic, et ce sont des représentations qui fondamentalement traitent des vastes phénomènes de l'espace universel d'une manière mathématique-mécanique, dans la mesure où ils entrent en considération pour l'astronomie. On pense ces phénomènes de façon mathématique-mécanique. Dans la considération de ces phénomènes, on prend comme base ce qu'on obtient à partir d'une science mathématique abstraite ou d'une science abstraite de la mécanique. On calcule avec des distances, des mouvements et des forces, mais la manière qualitative de considérer les choses, laquelle était tout à fait présente aux 13è, 14è siècles encore, et d'après laquelle on distinguait des individualités dans les astres, on distinguait une individualité de Jupiter, une individualité de Saturne, cette manière, l'humanité actuelle en a tout à fait perdu la clef. Je ne veux pas maintenant me répandre en critiques sur ces choses, mais je veux seulement indiquer que la manière mécanique et mathématique de traiter de ces choses est devenue exclusive dans ce que nous appelons le domaine de l'astronomie. Même si nous nous procurons aujourd'hui des connaissances de vulgarisation sur le ciel et les astres, sans comprendre les mathématiques ou la mécanique, cela se fait toutefois, même si c'est de façon profane, selon des concepts purement spatio-temporels, donc selon des représentations mathématiques-mécaniques. Et il ne fait aucun doute chez nos contemporains, qui croient pouvoir juger convenablement de ces choses, que ce n'est qu'ainsi que l'on peut considérer le ciel et les astres, et que toute autre manière de faire serait du dilettantisme.

Si l'on se demande maintenant comment en fait il est advenu que cette considération du ciel et des astres soit apparue dans l'évolution de notre civilisation, alors on recevra certes, auprès de ceux qui considèrent la façon de penser scientifique actuelle comme quelque chose d'absolu, une autre réponse que celle que nous pouvons donner. Celui qui considère l'évolution scientifique telle qu'elle est habituelle aujourd'hui comme quelque chose de valable de façon absolue dira: voilà, dans l'humanité ancienne il n'y avait pas encore de représentations élaborées de façon strictement scientifique; on a dû d'abord parvenir à celles-ci. Et ce à quoi on a accédé, le mode d'observation mathématique-mécanique des phénomènes célestes, cela correspond vraiment à l'objectivité, cela est fondé dans la réalité. En d'autres terme, on dira : les gens de jadis introduisaient quelque chose de subjectif dans les phénomènes de l'universel; l'humanité moderne s'est frayé un chemin jusqu'à une compréhension strictement scientifique de ce qui correspond maintenant vraiment à la réalité.

Nous ne pouvons donner une telle réponse, mais nous devons nous placer du point de vue de l'évolution de l'humanité, laquelle a fait entrer dans la conscience, au cours de son existence, des forces intérieures différentes. Nous devons nous dire: pour la façon de regarder les phénomènes célestes telle qu'elle a existé chez les anciens Babyloniens, chez les Égyptiens, peut-être aussi chez les

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Indiens, c'est une certaine forme de développement des forces de l'âme humaine qui était déterminante. Ces forces de l'âme de l'humanité devaient alors être développées avec la même nécessité intérieure que celle qui fait qu'un enfant doit développer certaines forces précises de l'âme entre la 10è et la 15è année, tandis qu'à une autre période il développe d'autres forces de l'âme. De façon analogue, l'humanité aboutit à des investigations différentes selon les époques. Ensuite est venu le système du monde de Ptolémées. Il provenait à son tour d'autres forces de l'âme. Ensuite, est venu notre système copernicien. Il est issu à son tour d'autres forces de l'âme. Celles-ci ne se sont pas développées du fait que, en tant qu'humanité, nous aurions eu maintenant tellement de chance que nous serions parvenus à l'objectivité, alors que les autres auraient tous été des enfants auparavant, mais parce que l'humanité a besoin, depuis le milieu du 15è siècle, du développement des facultés mathématiques-mécaniques précisément, lesquelles n'étaient pas présentes auparavant. L'humanité a besoin d'aller puiser ces facultés mathématiques-mécaniques, et c'est pour cela que l'humanité regarde aujourd'hui les phénomènes célestes dans l'image née des facultés mathématiques-mécaniques. Et elle regardera à nouveau différemment un jour, lorsqu'elle aura puisé d'autres forces aux profondeurs de l'âme, pour sa propre évolution, pour son propre salut et son bénéfice. Cela dépend donc de l'humanité, que la vision du monde prenne telle ou telle forme, et il ne s'agit pas de regarder avec orgueil des époques passées où les hommes auraient été dans l'enfance, et de considérer l'époque actuelle comme celle où l'on a enfin atteint l'objectivité, laquelle devrait désormais demeurer telle quelle pour toute l'éternité.../...

.../...Or, cela a tellement pénétré dans la conscience de l'humanité que l'on en est arrivé en fait à considérer tout le reste, tout ce qui ne peut être traité de cette manière, plus ou moins comme non-scientifique. C'est de cela qu'est issu alors quelque chose comme la déclaration de Kant, qui a dit : chaque discipline scientifique particulière ne contient de science véritable qu'à la mesure de la mathématique qui peut y être trouvée. On devrait donc en fait introduire le calcul, ou bien de la géométrie, dans toutes les sciences. Mais cela achoppe, du fait que les représentations mathématiques les plus élémentaires sont étrangères aux personnes qui, par exemple, étudient la médecine. A cause de notre répartition des sciences, on ne peut plus du tout aujourd'hui parler avec eux de notions mathématiques élémentaires. Et il arrive aussi que, d'un côté, soit posé comme idéal ce que l'on nomme connaissance astronomique. Du Bois-Reymond a formulé cela dans son discours sur les limites de la connaissance scientifique, en disant nous ne saisissons dans la nature que ce qui peut devenir pour nous connaissance astronomique, et nous ne satisfaisons notre besoin de causalité qu'avec cela. Ainsi, nous embrassons les phénomènes du céleste en dessinant les cartes du ciel avec les étoiles, en calculant avec ce qui nous est donné comme matériau. Nous pouvons indiquer de manière précise : il y a ici un astre, il exerce une force d'attraction sur d'autres astres. Nous nous mettons à calculer, nous avons, bien visibles devant nous, les choses particulières que nous introduisons dans notre calcul. C'est cela que nous avons introduit tout d' abord dans l' astronomie. Maintenant, considérons, disons, la molécule. Nous avons là, dans la molécule, lorsqu'elle est complexe, toutes sortes d'atomes qui exercent des forces d'attraction les uns sur les autres, qui se meuvent les uns autour des autres. Nous avons un petit univers. Et nous envisageons cette molécule selon le modèle de notre observation habituelle du ciel et des astres. Nous appelons cela « connaissance astronomique ». Nous considérons les atomes comme des petits corps célestes, la molécule comme un petit système universel et nous sommes satisfaits quand cela réussit. Mais voilà la grande différence : quand nous regardons le ciel et les astres, tous les éléments particuliers nous sont donnés. Nous pouvons tout au plus nous demander si nous les réunissons de façon correcte, ou bien s'il n'y aurait pas quelque chose d'autre que ce que par exemple Newtons a indiqué. Nous tissons là-dessus un filet mathématique-mécanique. Cela est en fait un ajout. Mais cela satisfait les besoins modernes de l'humanité sur le plan de la scientificité. Dans le monde des atomes et des molécules nous introduisons alors le système que nous avons tout d'abord imaginé et nous y ajoutons par la pensée les molécules et les atomes. Là nous ajoutons par la pensée ce qui, d'ordinaire, nous est donné. Mais nous satisfaisons notre dit besoin de causalité en disant : lorsque ce que nous pensons en tant que particules se meut de telle et telle façon, c'est là le fait objectif pour la lumière, pour le son, pour la chaleur, etc. Nous transposons des connaissances astronomiques dans tous les phénomènes du monde et satisfaisons ainsi notre besoin de causalité. Du Bois-Reymond l'a exprimé de façon particulièrement sèche : là où on ne peut faire cela, il n'y a absolument pas d'explication scientifique.

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Voyez-vous, à ce qui est mis ici en évidence devrait en fait correspondre, si l'on voulait par exemple aboutir à une thérapeutique rationnelle, c'est-à-dire si l'on voulait comprendre l'efficacité d'un médicament, le fait que l'on devrait pouvoir suivre les atomes, dans la substance de ce médicament, comme on suit d'ordinaire la Lune, le Soleil, les planètes et les étoiles fixes. Il faudrait que tout cela puisse devenir de petits systèmes universels. On devrait pouvoir dire, à partir du calcul, comment agit tel médicament. Il n'y a pas si longtemps, cela est même devenu un idéal pour beaucoup. Maintenant on a renoncé à de tels idéaux. Or, non seulement en ce qui concerne des domaines aussi spéciaux que par exemple la thérapeutique rationnelle, mais déjà simplement pour des choses beaucoup plus évidentes, cela ne marche pas que nos sciences soient réparties comme elles le sont aujourd'hui. Voyez-vous, le médecin actuel est en fait formé de telle manière qu'il ne peut détenir qu'extrêmement peu de véritable mathématique. Ainsi, pourra-t-on peut-être parler avec lui de la nécessité de connaissances astronomiques, mais on n'aboutit à rien avec lui si l'on parle de faire entrer dans son domaine des représentations mathématiques. C'est pourquoi il faudrait donc que ce que nous avons en dehors des mathématiques, de la mécanique et de l'astronomie soit présenté aujourd'hui comme non scientifique au sens strict du terme. Cela, bien sûr, on ne le fait pas. On décrit aussi ces autres sciences comme « exactes » mais, là encore, c'est seulement une inconséquence. I1 est toutefois caractéristique du présent que l'on puisse poser de façon générale l'exigence que l'on devrait tout comprendre selon le modèle de l'astronomie.

Combien il est difficile de parler aujourd'hui avec les gens de façon vraiment approfondie de certaines choses, c'est ce que je voudrais vous montrer à travers un exemple. Vous savez que la question de la forme des os crâniens de l'homme a joué un grand rôle dans la biologie moderne. Et j'ai parlé souvent aussi de cette affaire dans le cadre de mes conférences anthroposophiques. Au sujet de la forme des os crâniens de l'homme, Gœthe, Oken ont fait de grandioses anticipations. Ensuite l'école de Gegenbaur a fait des recherches classiques là-dessus. Mais quelque chose qui pourrait satisfaire un besoin de connaissance plus approfondie dans cette direction ne se trouve finalement nulle part aujourd'hui. On se dispute pour savoir si Gœthe avait plus ou moins raison quand il disait que les os crâniens étaient des vertèbres, des os de la colonne vertébrale métamorphosés, mais on ne peut pas parvenir aujourd'hui à une vision décisive sur cette question, et cela pour une raison tout à fait précise : du fait que, là où l'on parle de ces choses, on ne peut guère être compris. Et là où l'on pourrait être compris, eh bien, là, on ne parle pas de ces choses, parce qu'elles n'intéressent pas. Voyez-vous, c'est aujourd'hui presque un «collège impossible» celui qui verrait le jour si l'on réunissait un médecin actuel véritable, un mathématicien actuel véritable, c'est-à-dire qui maîtriserait les mathématiques supérieures, et une personne qui comprendrait assez bien les deux choses. Ces trois personnes ne pourraient guère se comprendre aujourd'hui. Celui qui serait assis au milieu, qui comprendrait un peu les deux autres, aurait des difficultés à parler avec le mathématicien et aussi avec le médecin. Mais le mathématicien et le médecin ne pourraient pas se comprendre sur des problèmes essentiels, du fait que ce que le médecin a à dire n'intéresse pas le mathématicien, et du fait que ce que le mathématicien a à dire - ou bien aurait à dire si cela venait toutefois à être discuté -, cela le médecin ne le comprendrait pas car il n'a pas les bases mathématiques nécessaires. Cela devient précisément évident pour le problème que je viens de présenter.../... .../... C'est cela que nous devons dépasser. Si nous ne dépassons pas cela, nos sciences se transforment en marécages. Elles se divisent toujours plus. Les gens ne se comprennent plus les uns les autres. Comment peut-on alors transposer la science dans des considérations sociologiques, ainsi que l'exige tout ce que je vous montrerai au cours de ces conférences? Mais elle n'est pas présente, cette science qui pourrait être transposée dans une science sociale.

Maintenant, nous avons donc d'un côté l'astronomie, qui tend toujours plus vers le mode de représentation mathématique et qui, sous sa forme actuelle, est devenue importante du fait précisément d'être une science purement mathématique-mécanique. Mais nous avons aussi un autre pôle vis-à-vis de cette astronomie et celui-ci ne peut pas en fait être étudié de façon conforme à sa réalité dans les conditions scientifiques actuelles, sans cette astronomie. Mais il n'est absolument pas possible de construire un pont entre l'astronomie et cet autre pôle de nos sciences. Cet autre pôle est nommément l' embryologie. Et seul étudie la réalité celui qui, d'un côté, étudie le ciel et les astres et

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qui, de l'autre côté, étudie le développement de l'embryon humain. Mais comment étudit-on en fait l'embryon humain de manière habituelle aujourd'hui ? Eh bien, on dit : l'embryon humain naît de la coopération de deux cellules, les gamètes, la cellule mâle et la cellule femelle. Ces cellules se développent dans le reste de l'organisme de façon telle qu'avant leur possibilité de coopération elles atteignent une certaine autonomie, qu'elles présentent ensuite une certaine opposition, que l'une des cellules éveille dans l'autre cellule d'autres possibilités d'évolution que celles qu'elle avait auparavant. Cela se rapporte à l'ovule. C'est en partant de là qu'on étudie de façon générale la cytologie. On s'interroge : qu'est-ce qu'une cellule? Vous le savez, depuis le premier tiers du 19è siècle à peu près, on édifie en fait la biologie sur la cytologie. On se dit : une telle cellule est constituée par une petite boule de substance, plus ou moins grande ou petite, qui consiste en associations de protéines. Elle possède un noyau, qui montre une structure quelque peu différente et, autour d'elle, il y a une membrane, nécessaire pour l'isoler. Elle est ainsi la pierre de construction de tout ce qui apparaît en tant qu'être organique. Les gamètes seraient alors aussi de telles cellules, si ce n'est qu'ils seraient structurés de façon différente pour les féminins et les masculins. Et c'est à partir de telles cellules que s'édifierait tout organisme complexe.

Mais maintenant, qu'entend-t-on en fait lorsqu'on dit : c'est à partir de telles cellules que s'édifie un organisme? On veut dire par là: ce que l'on a par ailleurs comme substances dans le reste de la nature est reçu dans ces cellules et cela n'agit plus maintenant de façon directe comme d'habitude dans la nature. Lorsque par exemple de l'oxygène, de l'azote ou du carbone est contenu dans ces cellules, alors ce carbone n'agit pas comme d'habitude sur une quelconque autre substance de l'extérieur, mais cette action directe lui est retirée. Il est intégré dans l'organisme de la cellule et ne peut agir que comme cela est possible dans la cellule précisément, il n'agit pas de façon directe, mais la cellule agit et se sert de ses caractères particuliers en l'ayant incorporé à elle dans une certaine quantité. Ce que nous avons par exemple en l'homme en tant que métal, en tant que fer, cela agit seulement par le biais de la cellule. La cellule est la pierre de construction. On retourne donc à la cellule, lorsqu'on étudie l'organisme. Et si l'on observe tout d'abord seulement ledit corps cellulaire, sans le noyau, sans la membrane, on peut mettre en évidence en lui deux parties distinctes. On a une partie très fluide, transparente, et on a une partie qui forme une sorte de charpente. De sorte que l'on peut représenter une cellule de façon schématique à peu près en disant que l'on a la charpente de la cellule, et qu'ensuite cette charpente cellulaire est enrobée en quelque sorte par cette substance qui n'est pas constituée de la même manière que la charpente elle-même. Donc il faudrait se représenter la cellule comme étant élaborée à partir d'une masse demeurant liquide, qui ne prend pas de forme par elle-même, et à partir de sa charpente qui, elle, prend une forme, qui est structurée des façons les plus diverses. C'est cela que l'on étudie maintenant. On arrive plus ou moins à étudier la cellule ainsi: certaines parties en elle sont colorables, d'autres ne sont pas colorables. On obtient de cette façon, au moyen de carmin ou de safran, ou de quelque chose de ce genre que l'on utilise pour colorer les cellules, une structure de la cellule que l'on peut visualiser, si bien que l'on peut ainsi se former certaines représentations sur la structuration interne de la cellule. Et l'on étudie cela. On étudie comment cette structuration interne se modifie, par exemple, au moment où l'ovule est fécondé. On suit les différents stades, comment la cellule se modifie dans sa structure interne, comment ensuite elle se divise, comment chaque partie se rattache à d'autres de cellule à cellule, et comment une structure complexe naît de cet assemblage. On étudie cela. Mais, il ne vient à l'idée de personne de poser la question : bien, mais avec quoi toute cette vie dans la cellule est-elle en relation? Que se passe-t-il là en fait ? Personne ne s'avise de poser cette question.

Ce qui se présente là dans la cellule, cela est à prendre au départ de façon plus abstraite: j'ai la cellule; prenons-la, pour commencer, sous la forme qui se présente le plus fréquemment, sous la forme sphérique. Cette forme sphérique est de fait conditionnée par la substance fluide. Cette forme sphérique a, insérée en elle, la forme de la charpente. Et la forme sphérique, qu' est-elle ? La masse fluide est encore entièrement laissée à elle-même, elle suit donc les impulsions qui sont tout autour d'elle. Que fait-elle? Eh bien, elle reproduit l'univers! Elle a sa forme sphérique du fait qu'elle reproduit tout le cosmos en petit, cosmos que nous nous représentons aussi, de façon idéelle au départ, comme une forme sphérique, comme une sphère. Toute cellule, avec sa forme sphérique, n'est

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rien d'autre qu'une réplique de la forme du cosmos tout entier. Et la charpente à l'intérieur, chaque ligne qui est dessinée là dans la charpente, dépend des relations structurelles de tout le cosmos.../...

.../...Et maintenant prenez l'ovule et représentez-vous que cet ovule a porté les forces cosmiques jusqu'à un certain équilibre interne. Ces forces ont pris forme de charpente et, dans cette forme, elles se sont mises d'une certaine manière au repos, soutenues par l'organisme féminin. Maintenant a lieu l'intervention du gamète mâle. Il n'a pas mené en lui le macrocosme jusqu'au repos, mais il agit dans le sens de quelque force spécifique. Disons que le gamète mâle agit sur l'ovule, arrivé à l'état de repos, dans le sens justement de cette ligne de force. Alors a lieu, de par cette action particulière, une rupture des conditions de repos. Pour ainsi dire, la cellule, qui est une réplique du macrocosme tout entier, est mise en situation d'introduire à nouveau toute sa structure microcosmique dans le jeu d'interaction des forces. Dans l'ovule féminin le macrocosme entier a été d'abord amené au repos en une calme réplique. Le gamète femelle est arraché à ce calme par le gamète mâle, il est à nouveau introduit dans un domaine d'action spécifique, il est à nouveau mis en mouvement, il est à nouveau tiré du repos. II s'était rassemblé dans la forme calme pour imiter le cosmos, mais cette réplique est remise en mouvement par les forces masculines, qui sont des répliques de mouvements. Les forces féminines qui, elles, sont des répliques de la structure du cosmos, et sont arrivées au repos, sont tirées de ce repos, de cette situation d'équilibre.

Vous obtenez là des aperçus sur la forme et la structuration du plus petit, du cellulaire, à partir de l'astronomie. Et vous ne pouvez absolument pas étudier l'embryologie sans étudier l'astronomie. Car ce que vous montre l'embryologie n'est que l'autre pôle de ce que vous montre l'astronomie. Nous devons en quelque sorte, d'un côté, faire l'investigation du ciel et des astres, étudier la façon dont il montre des états successifs, et nous devons, après, rechercher comment se développe un ovule fécondé. Les deux choses vont ensemble car l'une n'est que la réplique de l'autre. Si vous ne comprenez rien à l'astronomie, vous ne comprendrez jamais les forces qui agissent dans l'embryon. Et si vous ne comprenez rien à l'embryologie, vous ne comprendrez jamais le sens des actions qui sont à la base de l'astronomique. Car ces actions apparaissent en petit dans les processus embryologiques.

Il est concevable que l'on édifie une science où, d'un côté, on calcule, on décrit les événements astronomiques et où, de l'autre côté, on décrit tout ce qui se rapporte à eux en embryologie, car il s'agit seulement de l'autre versant de la chose. Maintenant, regardez la situation actuelle dans les sciences. Vous trouvez là que l'embryologie est étudiée en tant qu'embryologie. Ce serait pris pour de la folie si vous osiez demander à un embryologiste actuel qu'il étudie l'astronomie afin de comprendre les phénomènes de sa discipline. Et pourtant c'est ainsi. C'est cela qui rend nécessaire une complète redistribution des sciences. On ne pourra pas devenir embryologiste sans avoir étudié l'astronomie. On ne pourra pas former des gens qui simplement dirigent leurs yeux et leurs télescopes sur les étoiles. Car étudier ainsi les étoiles n'a pas grand sens si l'on ne sait pas que réellement le « plus petit univers » est formé à partir du grand univers.../...

.../...Si nous retournons aux Mystères égyptiens, nous trouvons là, dans ces Mystères égyptiens, des observations astronomiques telles qu'on les a faites alors. Mais, à partir de ces observations, on n'a pas seulement calculé quand il y aurait de nouveau une éclipse de Soleil et une éclipse de Lune, mais aussi ce qui devrait se passer dans l'évolution sociale. On s'est basé sur ce que l'on voyait au ciel, pour ce que l'on disait aux gens, pour ce qu'ils devaient faire, pour ce qui est intervenu dans la vie sociale. On a donc traité sociologie et astronomie comme une seule chose. Et nous devons réapprendre, même si c'est d'une autre manière que les Égyptiens, nous devons apprendre à rattacher ce qui se passe dans la vie sociale aux phénomènes du grand univers. Nous ne comprenons pas en fait ce qui s'est accompli au milieu du 15è siècle si nous ne pouvons pas rattacher ce qui est apparu alors aux phénomènes de l'univers. Il parle comme un aveugle aux couleurs celui qui parle de la transformation du milieu du 15è siècle dans le monde civilisé sans tenir compte de cela. La science de l'esprit est déjà un début dans ce sens. Mais nous ne pouvons pas arriver à cela, à réunir ce domaine compliqué de la sociologie, de la science sociale, avec le domaine de l'observation de la nature, si nous ne le faisons pas par le détour qui consiste à réunir tout d'abord l'astronomie et l'embryologie, à rattacher les faits embryologiques aux phénomènes astronomiques. Voilà ce que je voulais dire aujourd'hui en introduction et qui sera poursuivi demain.

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Allocution du 8 août 1921 à la suite d'une conférence de G. Rabel :

Comme Mademoiselle Rabel l'a dit à la fin de sa très remarquable conférence, j'ai fait une fois la remarque qu'en réalité ces nouvelles expériences peuvent servir à confirmer la théorie des couleurs de Gœthe. Mademoiselle Rabel m'a aimablement donné il y a quelque temps une de ses publications à ce sujet; j'avais dit alors que les faits, que la physique moderne fait ressortir de cette façon, sont dans la ligne qui doit conduire progressivement à une confirmation de la théorie des couleurs de Gœthe. Or aujourd'hui nous n'avons aucune possibilité d'entrer dans la controverse entre la théorie des couleurs de Gœthe et la théorie disons anti-goethéenne. Les représentations physiques, couramment utilisées de nos jours, partent de prémisses théoriques telles que la remarque suivante, faite par un physicien avec lequel j'ai eu une conversation sur la théorie des couleurs de Gœthe, s'en trouve justifiée: il disait simplement, honnêtement je l'atteste: pour un physicien d'aujourd'hui — et il se tenait pour tel à juste titre la théorie des couleurs de Gœthe n'a en fait aucun sens. C'est une chose parfaitement exacte en effet.

Nous ne devons pas oublier que certaines choses doivent encore être surmontées avant que les physiciens puissent prendre au sérieux la théorie des couleurs de Gœthe. Le physicien d'aujourd'hui est naturellement conduit à s'efforcer d'étudier ce qu'il appelle la lumière de la manière suivante: ce qu'il considère comme subjectif à l'intérieur de son domaine d'investigation ne doit plus jouer aucun rôle. Ce que ressent l'observateur face aux phénomènes de la lumière sert tout au plus à le rendre plus attentif au fait qu'il y a quelque chose à observer. Ce que le physicien accepte dans ses interprétations des phénomènes de la lumière, qu'il étend ensuite aux phénomènes des couleurs, doit être une entité complètement indépendante de l'expérience subjective.

Pour toute sa pensée en général, Gœthe part de prémisses tout à fait différentes. Et je considère comme juste encore aujourd'hui, ce que je disais en 1893 à Francfort-sur-le-Main à propos de la conception de la nature de Gœthe: aujourd'hui on peut parler des idées de Gœthe sur la morphologie et en effet j'ai fait une conférence à ce sujet. Car les conceptions de Gœthe sur la métamorphose et sur les origines des espèces en relation avec la métamorphose, se rencontrent aujourd'hui en un certain sens avec celles qui découlent d'une façon tout à fait différente il est vrai, de la théorie de Darwin-Haeckel. C'est là au moins dans un certain sens un domaine où les idées se rencontrent. Mais ce n'est absolument pas le cas avec le traité des couleurs de Gœthe qui, entre parenthèses, ne veut pas être un traité d'optique. Certes il y a la possibilité de parler de la théorie des couleurs de Gœthe sur un plan, disons, anthroposophique; mais une confrontation avec les résultats qu'un physicien d'aujourd'hui dérive de ses hypothèses physiques sur la couleur, restera encore tout à fait infructueuse. Il est nécessaire pour cela que certaines conceptions de base, qui sont implicites chez Gœthe et dont il a tiré sa théorie des couleurs, soient explicitées pour qu'on puisse les utiliser vraiment comme une base. Je considère donc tout ce que j'ai dit sur la théorie des couleurs de Gœthe dans mes livres comme quelque chose qui est lancé provisoirement dans le monde et qui ne prétend nullement pouvoir entrer dans une discussion fructueuse - je souligne, fructueuse avec les idées de la physique non pas opposées, mais dérivant de bases tout à fait différentes. Or vous pouvez être certains que Gœthe aurait reconnu une confirmation de ses conceptions fondamentales dans les phénomènes présentés si aimablement par Mademoiselle Rabel. Et c'est sur cela que je voudrais insister.

Lorsqu'on parle de la différence que Gœthe faisait entre les deux côtés du spectre, donc de l'opposition entre rayons de longue et courte longueur d'onde, il est juste, bien que pas complètement, de parler de relation de polarité. La polarité est une relation très abstraite qu'on peut appliquer à beaucoup d'oppositions, donc aussi à ce phénomène. Mais pour Gœthe ce n'est pas cela qui importe dans ce contexte... (Notes incomplètes). Lorsqu'on réduit l'épaisseur du faisceau lumineux et qu'on parle d'un rayon d'épaisseur nulle, une expression que je n'ai d'ailleurs jamais employée, on pense avoir exclu toute erreur. En réalité il n'y a pas de différence de principe entre un faisceau large et un faisceau étroit. Gœthe par contre dans ses expériences avec la petite fente a indiqué une différence de principe et c'est cela qui est important. Dans l'expérience du prisme, on ne peut pas exclure les choses que la physique moderne aimerait bien exclure, car on ne peut introduire d'aucune manière ce «rayon d'épaisseur nulle» dans le champ d'expérimentation. Mais on peut diriger son attention sur la frontière entre le sombre et le clair. Là en effet se trouve une frontière précise. Avec cette frontière

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précise de l'expérience de Gœthe on obtient dans un certain sens ce que cherche la physique moderne. Gœthe a travaillé avec la frontière et pas avec le faisceau de rayons. C'est cela qui est important. En travaillant avec la frontière et non pas avec les rayons, Gœthe satisfait en réalité à cette exigence justifiée de la science. Gœthe organise toute la série de ses expériences à partir du phénomène de la frontière. Si l'on devait refaire aujourd'hui ces expériences, dans un esprit goethéen, il faudrait, il est vrai, procéder différemment.

J'espère justement que nous exécuterons dans notre institut de recherche de physique à Stuttgart des expériences de principe à ce sujet et que nous pourrons ainsi éliminer ce «camouflage» selon l'expression du Docteur Schmiedel. Nous essaierons d'apprendre à travailler avec les frontières de façon exacte et de saisir ensuite le spectre comme un phénomène où le phénomène de frontière est élaboré comme un phénomène primordial. Tel serait notre programme. Or en travaillant ainsi avec la frontière, on obtient précisément, ce que le Dr. Schmiedel appelait la relation polaire entre les deux extrémités du spectre.

Donc «Polarité» est ici, dans le sens goethéen, une expression employée d'une façon beaucoup trop abstraite! On peut bien sûr utiliser cette expression pour toutes sortes de phénomènes naturels. Or Gœthe, en poursuivant toujours ses expériences, parvient à l'opposition fondamentale entre la nature du rouge et la nature du bleu`. Je ne peux entrer dans les détails, ce soir, par manque de temps. Remarquez bien que Gœthe ne parle pas de lumière rouge ou bleue, ce qui n'aurait aucun sens pour la conception goethéenne, mais de la nature du rouge et de la nature du bleu. La lumière est absolument indifférentiable et ce sont les phénomènes dans la lumière qui apparaissent comme différentiation. A l'entité lumière Gœthe oppose l'entité obscurité, qu'il considère non comme le néant, mais comme une véritable entité, en accord avec les résultats de la physique moderne. Et si je dois indiquer en quelques mots, ce qui chez Gœthe est une notion plutôt compliquée, je dois le faire ainsi: dans les nuances de couleurs, autant dans la partie rouge que dans la partie bleue, on a affaire non pas à un mélange, mais à une interaction dynamique entre lumière et obscurité. Dans la partie rouge cette interaction est telle que le rouge résulte de l'activité de la lumière dans l'obscurité. Dans la partie bleue nous avons affaire à l'activité de l'obscurité dans le clair. Ceci est donc l'expression précise de la polarité.

Voici naturellement une représentation à laquelle j'admets volontiers que le physicien moderne ne peut pas rattacher grand-chose. Mais pour Gœthe le rouge est l'activité de la lumière dans l'obscurité, le bleu est l'activité de l'obscurité dans le clair, donc dans la lumière. Cela peut être appelé une polarité, c'est une polarité. Gœthe applique ce principe général aux couleurs physiques, c'est-à-dire les couleurs du spectre, mais aussi aux couleurs chimiques, tout en étant conscient qu'il avance à tâtons, dans l'incertitude, car il ne peut naturellement pas toujours appliquer ce principe dans les détails. Mais prenons maintenant ce que je viens d'esquisser rapidement: nous avons partout où surgissent les couleurs, dans tous les endroits où elles apparaissent, nous avons un qualitatif. Ici nous touchons un point qui sera un jour décisif. Voyez-vous, notre époque en est encore à découvrir une grande quantité de phénomènes. Encore aujourd'hui on vous a aimablement présenté une multitude de phénomènes, qui effectivement demanderaient à être développés par des séries de conférences, pour vous montrer comment ils s'insèrent dans la théorie des couleurs de Gœthe et dans le domaine général des sciences naturelles. Mais nous vivons aujourd'hui des phénomènes qui doivent apporter des rectifications, — tout à fait différentes de celles éventuellement apportées par la théorie de la relativité sur les représentations de la vitesse dans la lumière etc... —, nous vivons en effet ce que Mademoiselle Rabel vient de mettre en relief, à savoir que le physicien se sent poussé à revenir à la théorie émissive de Newton, bien que sous une forme très modifiée. Il est vrai qu'il y a une très grande différence entre la théorie de Newton dérivée de phénomènes relativement simples et la théorie actuelle. Car je crois que la conception actuelle repose principalement sur l'impossibilité pour la théorie ondulatoire habituelle d'expliquer par exemple ceci: si on envoie de la lumière ultraviolette sur un métal, des électrons sont émis en retour et on peut analyser ces électrons. Ils présentent alors une certaine énergie. Cette énergie ne dépend pas de la distance de la source de lumière ultraviolette au métal. Vous pouvez éloigner la source, et vous obtenez cependant la même énergie en volts. Or l'énergie devrait naturellement diminuer, si, comme on le suppose, l'intensité de la source de lumière

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reste constante. Mais cela n'est pas le cas pour les électrons qui vous sont renvoyés par le métal. On voit que leur énergie ne diminue pas du tout avec la distance, mais dépend uniquement de la couleur. Que les couleurs soient proches ou éloignées, vous obtenez la même chose. On est alors amené, pour commencer, à modifier les idées qu'on a eues sur la lumière. Aujourd'hui on fait appel à la théorie des quanta, qui dit que ce n'est pas quelque chose de continu qui se propage, mais que la lumière se propage de façon atomisée. Si elle se propage d'une façon atomisée, on trouve un quantum à un certain endroit et c'est là qu'il agit. Il ne s'agit pas ici (...) Le quantum ne peut être qu'à un seul endroit. Dès qu'il est là, il déclenche les actions des électrons.

Donc ces choses ont conduit à revenir à la théorie de l'émission. Tandis que Newton se représente que des substances, des entités se propagent d'une façon pondérable, l'intensité diminuant avec le carré de la distance, maintenant on remplace celles-ci par la propagation des champs électromagnétiques, qui vont réellement à travers l'espace et ceci dans le sens de la théorie quantique. On a donc affaire en effet à l'émission de champs électromagnétiques, tandis que dans la théorie ondulatoire, qui était tout à fait courante par exemple au temps de ma jeunesse, on avait affaire à une pure et simple propagation du mouvement. Rien ne rayonne dans l'espace, seul le mouvement se propage. Aujourd'hui, il me semble que précisément les idées sur ce qui existe objectivement sont en continuelle évolution. Et les expériences présentes indiquent toutes, Mademoiselle Rabel avait raison d'y insister, que la simple notion de longueur d'onde ne suffit pas, que cela contient en soi une espèce de contradiction. Mais c'est cela-même le point fondamental de la question. La vérité au fond est qu'on s'était habitué pendant longtemps à tout calculer avec la seule notion de longueur d'onde etc... L'idée était certes extraordinairement simple. Somme toute on ne calculait objectivement qu'avec des ondes de certaine fréquence et des vibrations se propageant avec certaines vitesses. On caractérisait ce qui se trouve dans le spectre du violet au rouge, en disant que cela produit une impression sur la rétine de l'œil. En deçà du rouge et au-delà du violet on a d'autres vibrations qui ne produisent aucune impression, mais elles ne se distinguent pas qualitativement de celles-ci. Quelques uns n'ont pas accepté cette explication. Eugène Dreher par exemple dans les années 70 et 80 du siècle passé s'est opposé à cette conception d'une façon intéressante. Il fit beaucoup d'expériences pour démontrer que lumière, chaleur et entité chimique sont trois entités différentes l'une de l'autre d'une façon tout à fait radicale. Et il fut possible de démontrer vraiment cela jusqu'à un certain degré. Et précisément l'état actuel de la chose démontre que tout le complexe des questions au fond est en évolution. Aussitôt qu'on parvient justement à ce qui, abstraction faite du subjectif, se présente réuni sous le complexe des «phénomènes de lumière»... (lacune). L'essentiel est que Gœthe a introduit ce qui aujourd'hui s'impose à la physique. Certes il l'a introduit, étant donné l'état d'imperfection de la physique à la fin du XVIIIè siècle, mais c'est lui qui a introduit cela../....

.../...De nos jours l'expérience des interférences se trouve au point qu'elle nécessite une nouvelle explication. La physique l'admet. Et là vraiment la théorie des quanta n'a pas encore bien réussi. La situation est la suivante: on n'est pas encore arrivé très loin, mais il devient de plus en plus clair qu'avec les fréquences ou les longueurs d'onde on a des nombres utiles, de la bonne monnaie de calcul. Mais personne ne peut dire aujourd'hui qu'il y ait quelque chose de réel à la base de cela. J'aimerais dire que lorsqu'on donne la fréquence d'oscillation des rayons rouges et bleus, on a exprimé une certaine relation entre le rouge et le bleu, par un rapport entre deux nombres. On peut déjà dire aujourd'hui: les rapports entre ces nombres sont beaucoup plus importants que la valeur absolue des fréquences individuelles.. Et cela fait passer du quantitatif au qualitatif. Aujourd'hui o n est malgré tout sur le chemin de se dire: avec les seules longueurs d'onde cela ne marche pas, on a besoin de quelque chose d'autre.

Mais cette autre chose ressemble de plus en plus à ce que Gœthe recherchait sur son chemin. Aujourd'hui cela ne se remarque pas encore très fortement, mais pour celui qui connaît bien les choses, il est à remarquer que la physique y mène peu à peu. Et comme je l'ai déjà dit, les phénomènes cités aujourd'hui, Gœthe les comprendrait de façon qu'il les considérerait comme une confirmation de ses idées.../... .../...On sera conduit toujours plus à abandonner de construire, disons, des figures de polarisation

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purement et simplement dans la lumière. Cette construction marchait admirablement bien avec l'ancienne théorie ondulatoire purement mécanique; mais elle n'est plus valable de la même manière dans les conditions actuelles. Le physicien sera conduit à ne plus traiter les phénomènes de polarisation comme une construction dans la lumière, mais il observera une interaction de la lumière avec la matière. Ainsi la constitution de la matière est dévoilée pour ainsi dire par ces phénomènes parmi d'autres, qui entrent en scène de façon qu'on les conçoit comme une émission d'ondes électromagnétiques. Il est plus intéressant aujourd'hui d'essayer de voir comment on peut sortir d'une manière de penser qui en vérité n'est fondée que sur le fait qu'on s'est tellement habitué à la conception mécanique de l'éther, qui est construit comme solide par les uns, comme liquide par d'autres... (lacune)... On s'est habitué à certaines représentations et on n'arrive pas à s'en débarrasser vraiment... La théorie ondulatoire ne suffit pas, il faut supposer encore autre chose... Dans cette situation, on doit bien remarquer: Gœthe était sur le chemin de chercher cette «autre chose»; toute cette théorie ondulatoire, qu'il a bien entendu connue de son vivant, ne l'a pas vraiment intéressé. Ce qui l'a intéressé, c'est ce que j'ai indiqué de façon tout à fait insuffisante, lorsque je ramenai la polarité dans la réalité concrète. On pénètre plus profondément dans ce que Gœthe voulait, lorsqu'on suit son traité des couleurs de chapitre en chapitre jusqu'au dernier, «l'effet physique-psychique de la couleur», où les couleurs disparaissent de la vue pour ainsi dire et les qualités psychiques-spirituelles, morales, apparaissent. Ces qualités on les éprouve au lieu du bleu et du rouge, lorsqu'on est transporté dans le royaume de l'âme. Et Gœthe dirait: en vérité on ne commence à connaître la nature de la couleur que lorsque la couleur disparaît et que quelque chose de tout autre apparaît.

Nous tenons ici quelque chose qui est le début des chemins vers la connaissance supérieure, qui sont décrits par la science spirituelle anthroposophique. Ces chemins mènent à abandonner réellement la séparation entre le sujet et l'objet, qui n'a plus de sens à un certain niveau de la connaissance. Ils mènent à la possibilité de l'union du sujet dans l'objet. Cela doit être observé. Une théorie de la connaissance qui maintient une séparation absolue entre le sujet et l'objet ne pourra jamais satisfaire'. Il faut considérer cette séparation entre sujet et objet en réalité comme une construction provisoire, comme je l'ai démontré dans mes écrits sur la théorie de la connaissance. La physique moderne, comme elle est définie disons par Blanc, vise à exclure complètement le subjectif et à présenter les phénomènes tels qu'ils se déroulent dans le champ objectif sans aucune référence à l'homme. Louis Blanc dit: la physique ne doit décrire que des choses du monde objectif, qui pourraient être aussi affirmées par un habitant de Mars, peut-être organisé tout différemment de l'homme. Et ceci est en effet tout à fait juste. Mais la question est celle-ci : est-ce que l'on ne peut pas trouver dans l'homme lui-même quelque chose qui correspond aux résultats de la physique obtenus purement d'après mesure, nombre et poids, trouver quelque chose de correspondant à cela dans l'homme, à un certain niveau de la conscience supérieure? La réponse à cette question est: oui, certainement. A ce niveau de conscience, nous passons à travers une région, nous faisons exactement l'expérience de cette région que le physicien moderne n'obtient que par une construction, une certaine construction à partir des phénomènes. Mais on découvre alors que le substantiel qui est à la base de cette région n'est plus du matériel, mais du spirituel. On acquiert même le droit d'utiliser les formules de la physique dans une certaine forme, seulement on y substitue une autre substance. Newton pensait qu'aux équations se substituait une sorte de matière pondérable, la théorie ondulatoire d'Huygens le nombre d'ondes; la nouvelle théorie les champs électromagnétiques.

Donc dans la succession des différentes théories, il règne quand même une certaine libéralité sur ce qui flotte en réalité dans toutes ces formules. Pour cette raison on ne devrait pas trop s'opposer à la nécessité pour la science spirituelle d'introduire l'esprit dans ces équations qui voltigent dans l'espace cosmique. Mais pour y introduire l'esprit et non ce que voulait Newton ou la physique toute moderne, il faut d'abord savoir ce qu'est l'esprit. Cela n'est pas accessible à une quelconque théorie, mais seulement à l'expérience supérieure.../...

L'AGROBIOLOGIE

Manger bio c'est bon pour la santé. Et c'est bon aussi pour l'environnement. Si l'agriculture biologique connait aujourd'hui un boum sans précédent c'est qu'elle répond aux

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exigeances des consommateurs avertis. Mais elle n'est pas née d'hier. Elle fut inspirée par des philosophes comme J-J. Rousseau, Goethe, Emerson. Rudolf Steiner et Goethe sont à l'origine de l'agrobiologie...

Dans les années 1920, le philosophe autrichien Rudolf Steiner (1861-1925), fondateur du mouvement anthroposophique (littéralement «sagesse de l'homme»), prolonge la vision naturaliste de Goethe à propos des rapports de l'homme à la nature (Essai d'histoire naturelle et de morphologie ; Essais sur les métamorphoses des plantes). Steiner jette alors les bases de l'agriculture biodynamique par sa célèbre démonstration : « Le cours aux agriculteurs » s'appuie sur une approche « vitaliste » opposée aux engrais chimiques qui peuvent tuer « la terre, organisme vivant », concept emprunté à Goethe. Refusant tout pesticide chimique ou de synthèse, l'agriculture bioclynamique repose sur deux principes essentiels : La biodynamie de « l'organisme », et l'influence tellurique de la lune. Un mouvement international en faveur de l'agriculture biodynamique prend alors son essor depuis l'Autriche vers l'Allemagne, pour s'implanter fortement en Scandinavie, en Hollande, en Suisse, en Australie et aux Etats-Unis. Durant les années 1930, en pleine crise économique, les promoteurs du mouvement biodynamique recommandent le retour à une société rurale plus autonome et lancent une coopérative et leur label : Demeter Vers 1959 - Début en France de l'agriculture bio. Le premier groupement d'agriculteurs bio se forme en France est soutenu par un groupe de médecins (Dr Bas, élève du Dr Carton, auteur de Les Lois de la vie saine) et de naturopathes qui avaient constaté les méfaits de cette alimentation sur la santé de leur clientèle depuis 1950. Au même moment, des blancs d'Amérique du Nord redécouvrent la profondeur de la vision écologique amérindienne : « Apprenez à vos enfants ce que nous avons toujours appris aux nôtres, que la terre est notre mère. Ce qui advient à la terre advient aux fils de la terre. Si les hommes crachent sur la terre, ils crachent sur eux-mêmes », à force de vivre loin des prairies du Grand Esprit, l'homme blanc a fini par en oublier ses lois ! soupirait le chef Seattle. Ils vont écrire des manuels d'hygiène de vie tels que la Méthode Kneipp. Après la création en 1962 de l'Association française pour l'agriculture biologique (Afab), c'est la société SVB Lemaire, fournisseur de fertilisants et de matériel agricole, qui lance sur le terrain la méthode agrobiologique Lemaire-Boucher et qui se charge de la distribution des aliments obtenus selon son cahier des charges. « Nature & Progrès » En 1964, André Louis et Matéo Tavera ont fondé l'association « Nature & Progrès », fer de lance du « bio » en France et coordinatrice chaque année du salon Marjolaine. Claude Aubert, maître à penser de l'agriculture biologique, qui la définit en 1970 comme « une agriculture basée sur l'observation et les lois de la vie, et qui consiste à nourrir non pas directement les plantes avec des engrais solubles mais les êtres vivants du sol qui élaborent et fournissent aux plantes tous les éléments dont elles ont besoin ». Dans les années 70, Philippe et Jacqueline Desbrosses, depuis leur ferme expérimentale de Sainte-Marthe (Loir-et-Cher), font rayonner l'agriculture biologique jusqu'auprès des instances de I'Etat. En 1980, Philippe Desbrosses mène la délégation de la Charte de Blois (signée par les fédération d'agriculteurs biologiques) pour faire reconnaître « l'existence d'une agriculture n'utilisant ni produits chimiques ni pesticides de synthèse », puisque le terme "agriculture biologique" demeure proscrit ! Depuis la fin des années 90, des organismes tels que la Confédération paysanne et son porte-parole José Bové, l'Observatoire de la mondialisation, ATTAC, et bien d'autres, luttent contre l'introduction des semences OGM, dans l'agriculture.