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Page 1 Analyse Filmique, COMTE Mathieu, Architecture en représentation, L.Lescop, B. Suner M. Gransard

Analyse Filmique, COMTE Mathieu, - archirep.nantes.archi.frarchirep.nantes.archi.fr/DATA/Analyse_filmique/COMTE Mathieu/La... · Musique : Bernard Herrmann Direction artistique :

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Analyse Filmique, COMTE Mathieu, Architecture en représentation, L.Lescop, B. Suner M. Gransard

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La mort aux trousses Sommaire : .................................................................................... 2

Fiche technique du film : ............................................................... 3

L’origine du film : ........................................................................... 4

Le Synopsis : .................................................................................. 4

Le réalisateur : ............................................................................... 5

Les acteurs : ................................................................................... 7

Le déroulement du film : ................................................................ 8

Présentation de scène étudiée : L’attaque de l’avion .............. 10

Analyse de la scène : ..................................................................... 12

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Fiche technique du film :

La mort aux trousses Titre original : North by Northwest Réalisation : Alfred Hitchcock. Scenario : Ernest Lehman Musique : Bernard Herrmann Direction artistique : William A. Horning et Merrill Pye sous la direction de Robert Boyle Décors : Henry Grace et Franck McKelvey Maquillage : William Tuttle Coiffures : Sydney Guilaroff Photographie : Robert Burks Ingénieur du son : Franklin Milton Effets spéciaux : A. Arnold Gillespie et Lee LeBlanc Montage : George Tomasini Sociétés de production : Metro-Goldwyn-Mayer et Loew's Incorporated Producteurs : Alfred Hitchcock et Herbert Coleman Budget : 4 000 000 $ Format : Couleurs (Technicolor)- 1,85:1 - Mono (Westrex Recording System) - 35 mm (VistaVision) Genre : drame, policier, comédie Durée : 131 minutes Pays d'origine : États-Unis Dates de sortie : aux États-Unis : 17 juillet 1959 , en France : 21 octobre 1959 Photographie : Mark Irwin Montage : Ronald Sanders Conception des décors et effets spéciaux : Carol Spier, Chris Wallas La musique originale a été composée par Howard Shore et Nile Rogers Le film a été produit par la société Brooksfilm pour un budget d'environ 15 millions de dollars us. Le film de 95 minutes est tourné en couleur, au format 1,85:1, focal 35mm. La langue originale est l'anglais. Le son est en sortie stéréo. Le film est sorti en 1986 aux Etast-Unis et en 1987 en Europe. Il était distribué par la 20th Century Fox.

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L’origine du film :

En 1957, Hitchcock a signé un contrat avec la MGM pour adapter un roman de Hammond Innes, Le Naufrage de la Mary Deare. Cette histoire de bateau fantôme n’inspire guère Hitchcock, qui souhaite en confier l’écriture à un scénariste à succès, Ernest Lehman. Après quelques séances de travail infructueuses, les deux hommes décident de changer de projet sans avertir le studio. Hitchcock fournit au scénariste deux idées : une poursuite sur le Mont Rushmore, un meurtre aux Nations Unies. Lehman écrit une ébauche de scénario qui ravit Hitchcock et enthousiasme les pontes de la MGM, qui n’en verront pas la suite avant le tournage. Et pour cause : le scénario sera achevé tard, alors même que les préparatifs du tournage ont déjà commencé. La Mort aux trousses sera un film à gros budget, et même le film le plus cher de la carrière d’Hitchcock. Le Synopsis :

Roger Tornhill, un publiciste réussissant se trouve par un malentendu pris pour un dangereux espion. Pris pour un espion par une puissante organisation de malfaiteurs et pour un criminel par la police, Roger Tornhill n'a d'autre solution que la fuite. Il doit faire face à des situations toujours plus difficile, mais lui seul pourra se sortir de là, en remontant la filière jusqu'en haut.

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Le réalisateur :

Alfred Hitchcock est né dans la banlieue de Londres, en 1899, de parents épiciers. Enfant, alors qu’il avait fait une bêtise, son père l’envoi au commissariat avec une lettre pour le policier qui l’enferma quelques minutes dans une cellule en lui disant : « Voilà ce qu’on fait aux petits garçons méchants. ». Cette anecdote maintes fois narrée, dont on trouve un écho direct dans La Mort aux trousses quand Thornhill est brièvement emprisonné pour état d’ivresse, et l’éducation stricte et religieuse qu’il reçut chez les jésuites, sont souvent les raisons avancées pour expliquer l’univers du cinéaste, le rôle de la loi, la pression religieuse, la question des interdits, du mal, et de la peur.

Son premier métier est le graphisme publicitaire mais, attiré par le cinéma, il parvient à se faire embaucher dans une maison de production où il dessine des intertitres. Nous sommes au début des années 20 et Hitchcock, s’il a réalisé un premier film resté inachevé (Number Thirteen, 1922), côtoie de plus en plus les plateaux, comme décorateur ou assistant réalisateur. En 1925, on lui propose de mettre en scène un film en Allemagne, assisté de sa fiancée, Alma Reville. Ce sera The Pleasure Garden, mais le premier véritable « Hitchcock picture », comme il le dit lui-même, s’intitule The Lodger, une histoire de crime où l’on perçoit non seulement quelques thèmes typiques du cinéaste (l’innocent accusé à tort, par exemple) mais aussi les prémisses d’un style visuel extrêmement inventif. Ainsi commence la période anglaise, ponctuée de films importants tels Chantage (son premier film parlant), Les 39 marches, Agent secret, Jeune et innocent, L’Homme qui en savait trop ou Une Femme disparaît. Cette période (1926-1939) n’est pas seulement, dans l’œuvre d’Hitchcock, une antichambre de l’Amérique : son cinéma est déjà très abouti, ses effets raffinés, ses motifs déployés ; nombre de ses films américains s’appuieront sur les acquis de la période anglaise et l’influence du muet – Hitchcock concevant ses films comme des expériences visuelles où le récit demeure accessoire.

Ce brillant réalisateur anglais attire l’attention du producteur David O. Selznick, qui vient de produire Autant en emporte le vent. Selznick invite Hitchcock à travailler à Hollywood et lui propose de filmer l’histoire du Titanic, mais le projet ne verra jamais le jour. Son premier film américain, Rebecca (1940), est un succès et lance sa carrière américaine. Néanmoins, la production est marquée par les démêlés parfois rudes avec Selznick. Hitchcock ne l’oubliera pas, et fera en sorte, autant que possible, d’être son propre producteur (il fondera sa société de production en 1948) ou, à défaut, d’obtenir un maximum de contrôle artistique sur ses films. Les titres suivants, s’ils renouent avec les motifs anglais de l’espionnage et de la conspiration (Correspondant 17, Cinquième colonne), laissent entrevoir une tangente : les drames se personnalisent, à travers des héros inquiétants (Soupçons, L’Ombre d’un doute). Le succès aidant, Hitchcock se lance même dans des aventures formelles singulières (La Corde, semblant n’être constitué que d’un seul plan).

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Hitchcock est alors considéré comme un remarquable artisan commercial, couronné du titre de « maître du suspense ». Mais au début des années 50, les jeunes critiques des Cahiers du cinéma (Rohmer, Chabrol, Truffaut) font de lui l’incarnation de l’auteur, l’artiste qui à travers sa mise en scène livre une vision du monde. Hitchcock perfectionne alors son art du suspense (L’ Inconnu du Nord-Express, Le Crime était presque parfait) et cisèle avec Grace Kelly le type de la blonde « hitchcockienne », froide mais pas frigide (La Main au collet). Fort de ces marques de fabrique, il investit le petit écran, en 1955, avec la série à succès « Alfred Hitchcock présente ». La décade 1955-1965 est une période de créativité exceptionnelle, et l’époque de ses films les plus célèbres. Il donne d’abord le programmatique Fenêtre sur cour, souvent cité comme « mode d’emploi » de son cinéma. En 1958 il présente son plus grand film, Vertigo, exploration vertigineuse de la cristallisation amoureuse. Suit La Mort aux trousses, puis deux films très violents qui traumatisent le public, Psychose et Les Oiseaux : sous le divertissement effrayant sourd la musique inquiète de la névrose. La psyché compliquée de Marnie, en revanche, rebute le public, tout comme les films d’espionnage auxquels Hitchcock revient avant de tourner en Angleterre un thriller hirsute, Frenzy. Le cinéaste achève sa carrière par un film mineur, Complot de famille, et s’éteint le 29 avril 1980.

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Les acteurs principaux :

Dès l’écriture, le rôle de Roger Thornhill est prévu pour Cary Grant. Quant à sa partenaire, contre l’insistance du studio qui souhaite engager Cyd Charisse, Hitchcock tient à faire de son héroïne une créature typiquement hitchcockienne : blonde et froide. C’est la jeune Eva Marie Saint qui est choisie et modelée selon les désirs du cinéaste.

Cary Grant : Lorsque Cary Grant endosse le personnage de Roger Thornhill, il

est au crépuscule de sa carrière, et tournera cinq autres films avant son retrait des plateaux en 1966, à 62 ans. L’acteur a donc 54 ans lorsqu’il tourne La Mort aux trousses. C’est vrai qu’il en fait moins, que sa partenaire à l’écran qui a vingt ans de moins que lui, que celle qui interprète sa mère à l’écran, Jessie Royce Landis, est née la même année que lui. En 1958, Cary Grant est un mythe sans âge, il incarne le classicisme hollywoodien, a tourné avec les plus grands cinéastes et les plus grandes stars, et traversé tous les genres, à l’exception notable du western. C’est toutefois par la comédie que cet Anglais acquit sa renommée. Enfant à problèmes, fils d’une mère dépressive, renvoyé de l’école à 14 ans pour une histoire dans le vestiaire des filles, il se fixe aux Etats-Unis en 1920, connaît ses premiers succès à Broadway avant de tenter sa chance à Hollywood en 1931 et de trouver son pseudonyme : Archibald Leach devient Cary Grant. Ses rôles auprès des stars Marlene Dietrich (Blonde Vénus) et Mae West (Lady Lou et Je ne suis pas un ange) font de lui une vedette populaire.

Eva Marie Saint : Eva Marie Saint est née le 4 juillet 1924, et a grandi dans le milieu bourgeois de Newark (côte est des États-Unis). Après avoir envisagé une carrière dans l’enseignement, ses études universitaires l’amènent à pratiquer l’art dramatique, en amateur. Cette expérience marquante va réorienter sa vie, mais elle n’en poursuit pas moins ses études, et passe une licence de Lettres. Peu après, elle déménage à New York, fait quelques prestations à la radio et, en 1946, interprète un premier rôle dans un téléfilm. À cette époque, ses activités touchent aussi la publicité et le mannequinat. C’est en 1950 qu’elle s’inscrit à l'Actors Studio, l’école d'art dramatique fondée par Elia Kazan, Robert Lewis et Cheryl Crawford. Elle y rencontre entre autres Karl Malden, Rod Steiger et Julie Harris.En 1953, elle est engagée par un théâtre de Broadway pour jouer dans une pièce de Horton Foot. Kazan qui travaille au casting de Sur les quais lui propose le rôle de Edie Doyle ; après un essai avec Marlon Brando, elle tourne son premier film, qui est maintenant un classique du 7e art. Pour couronner ses débuts, elle est récompensée par l’Oscar de la meilleure actrice dans un second rôle.

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Le déroulement du film :

A New York, suite à un quiproquo, le publicitaire Roger Thornhill venu pour un rendez-vous dans le bar de l’hôtel le Plaza se fait kidnappé par deux hommes. Ceux-ci, pensant enlever un certain George Kaplan, l’amène dans une grande maison où il est reçu par M. Townsend lui aussi convaincu d’avoir en face de lui véritable G. Kaplan. Thornhill revendique l’identité qui lui est attribuée et tente de faire comprendre qu’il s’agit d’un malentendu. Townsend, restant sourd devant ces revendications, semble avoir beaucoup de chose à reprocher à Kaplan. Décidé de le faire exécuter, on l’oblige à boire jusqu’à l’ivresse dans le but de maquiller sa mort en accident de voiture.

De nuit, sur une route bordant une falaise, les hommes de mains de Townsend mettent Roger Thornhill au volant d’un véhicule. Mais, celui-ci reprenant peu à peu sa lucidité s’enfuit. Poursuivi par ses ennemis, son arrestation par la police lui permet de leur échapper. En sollicitant l’aide de la police, il se rend au domicile de Townsend où seule sa femme s’y trouve constant la présence de son mari parti aux Nations Unies pour le travail. Victime des apparences, nul de veut le croire.

Désireux de prouver son innocence, R. Thornhill prend la direction du siège des Nation Unies où il souhaite rencontrer le Diplomate Townsend qui s’avère, lui aussi ne pas être le même que celui qui l’a avait fait enlevé et menacé de mort. Toujours poursuivi par les hommes de main de Vandamm, le faux Townsend, il essaie d’expliquer sa situation au diplomate qui reçoit tout à coup un couteau dans le dos lancé par un des gorilles de Vandamm. Townsend s’effondre dans les bras de Thornhill passant dorénavant pour le meurtrier.

Dans les bureaux de la CIA, le Professeur et ses collègues discutent de l’affaire. Tout s’explique : Kaplan est un agent de la CIA qui n’existe pas. C’est un leurre destiné à tromper l’espion Vandamm, l’homme qui se faisait passer pour Townsend. Afin de détourner les soupçons de Vandamm et de protéger ainsi un autre agent sous couverture, la CIA décide donc de laisser Thornhill incarner Kaplan malgré lui, quitte à le sacrifier.

Désormais fugitif, Thornhill est poursuivi par toutes les polices pensant être

lancées à la poursuite du vrai Kaplan « qui n’existe pas ». En s’enfuyant, Thornhill fonce à la gare où il se cache dans un train en partance pour Chicago. A bord, Eve Kendall, une jeune femme blonde, l’aide à esquiver la police en le cachant dans son lit pendant qu’elle se fait interroger. Mais il ignore qu’il s’agit de la maîtresse de Vandamm qui voyage dans le même train. A l’arrivée en gare de Chicago, Eve, en fait complice de son amant, se propose de téléphoner à Kaplan. Elle indique ensuite à Thornhill, déguisé en porteur pour échapper à la police, le lieu et l’heure choisis par Kaplan pour un rendez-vous hors de la ville.

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Un bus dépose Thornhill au milieu de nulle part où il se retrouve seul. En fait, seul un avion est au rendez-vous. Soudain, ce dernier se met l’attaquer mais finit par percuter un camion-citerne sur la route. A nouveau échappé de justesse à la mort, le fuyard vole une voiture de gens qui s’étaient arrêtés.

De retour à Chicago, il se rend à l’hôtel Ambossador où est descendue Eve

qui semble surprise de le revoir vivant. Alors qu’il lui fait croire qu’il va prendre une douche, il suit Eve partie à une vente aux enchères où il la découvre en compagnie de Vandamm qui essaie à nouveau de la faire assassiner. En s’enfuyant, il est appréhendé par des policiers qui cette fois-ci ne le conduise pas au commissariat mais à l’aéroport. C’est ici qu’il fait connaissance avec le Professeur, agent de la CIA dont il apprend par sa bouche que Kaplan est un leurre censé être un agent de contre-espionnage et que, suite au quiproquo initial, il passe pour lui aux yeux de Vandamm. Il lui révèle par ailleurs qu’Eve est aussi un agent double chargée de démasquer l’Organisation de Vandamm chargé de faire sortir des microfilms des Etats-Unis au profit d’une puissance étrangère. Tous deux embarquent pour Rapid City, d’où Vandamm doit s’envoler le lendemain soir.

Afin de lever tout soupçon qui pèse sur elle, au Mort Rushmore, dans un

restaurant, Eve tire sur Thornhill et s’enfuit sous les yeux de Vandamm. Mais il ne sait pas qu’il s’agit d’une mise en scène avec un faux pistolet. Le Professeur emmène Thornhill, présumé mort, dans une forêt où il retrouve Eve, qui vient lui faire ses adieux. Mais il refuse qu’elle continue de suivre Vandamm et fini par se faire assommer. Censé être mourant, Thornhill s’enfuit de l’hôpital. Il se rend ensuite à la maison de Vandamm où il découvre Eve démasquée par Léonard le second de Vandamm. Il réalise que des microfilms sont cachés dans une statuette. Il parvient à avertir Eve du danger, mais il est surpris par une complice de Vandamm. Eve semble devoir prendre l’avion avec Vandamm, mais finalement elle et Thornhill parviennent à s’échapper avec la statuette.

Poursuivis par leurs ennemis, ils arrivent sur les statues du Mont Rushmore.

Pendant leur fuite, tandis que Thornhill se débarrasse d’un de ses ennemis, Eve est poussée par Léonard dans le précipice. Il réussie à s’accrocher à la falaise. Alors que Thornhill tente de la hisser Léonard lui écrase les doigts. La chute semble alors inévitable. Fort heureusement, les hommes du Professeur interviennent à temps : Ève et Thornhill sont sauvés et on les retrouve mariés... dans un train.

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Présentation de scène étudiée : L’attaque de l’avion

(1’03’’35 – 1’13’’02)

À la gare de Chicago, Eve a prétendu avoir téléphoné à Kaplan afin de fixé une heure et un lieu pour un rendez-vous hors de la ville à Thornhill. Mais cela s’avère rapidement être un piège : Thornhill est déposé par un bus au milieu de nulle part, où seul avion survole les lieux scrutant sa proie en attente du moment propice pour l’attaque. Le moment où le personnage sera totalement seul au milieu de ce lieu désert. La scène est placée exactement au milieu du film, c’est le sommet de La Mort aux trousses, une étape cruciale de bravoure qui déroge complètement aux normes hollywoodiennes : près de dix minutes, quasiment aucun dialogue, presque pas de musique.

C’est une pure scène d’action où le rythme s’accélère soutenu par un découpage très important : 134 plans, soit une moyenne d’environ 4,25 secondes par plan.

D’un point de vue narratif cette scène à deux figures : elle joue sur un

suspense de l’attente. En effet, le personnage et le spectateur n’attendent pas la même chose. Thornhill attend Kaplan, son rendez-vous, les mains dans les poches pensant voir Kaplan en chacun des passants. Mais le spectateur lui sait très bien que Kaplan ne sera pas au rendez-vous et qu’Eve est une traitresse. Ce qu’il attend, c’est une mise à mort, « d’où ? par qui ? et comment ? » va survenir l’attentat. Le fondu enchaîné qui envoie la scène et dissout le visage d’Eve dans le paysage – une sorte de plan 0 de la séquence – nous l’indique avec insistance. Ce morceau de nulle part marqué d’une croix qui vue du ciel, ou d’un avion, figure une cible, est l’empire d’Eve et donc de la mort. Le suspense, pour nous, porte seulement sur le « comment » du crime : comment tuer un homme dans un lieu désert, en plein jour ?

De par la durée de cette séquence et du nombre de plan qu’elle présente, mon analyse se limite à la mise en situation de personnage jusqu’au déclanche de l’attaque : la découverte du décors, la mise en tension entre les différentes appartions, la partie où le narrateur donne le suspens de l’attente avant l’attaque. Une double narration avec d’un côté le personnage qui est en attente d’un rendez-vous et le spectateur qui lui attend l’attaque organisée par Eve. C’est une séquence qui est un tour de maître, car elle montre que l'on peut raconter une histoire, et faire

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ressentir des émotions fortes au spectateur, uniquement par les jeux de cadrages, et quasiment sans paroles ni musique d’accompagnement mais seulement le bruitages en champ et hors champ des moyens de transport qui viennent semer le doute et le suspens pour le héro et le spectateur.

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Analyse de la scène :

Le premier temps de la séquence consiste en un quadrillage de l’espace, qui nous montre avec insistance qu’il n’y a rien ici, à perte de vue.

Plan 1 : Ce tout premier plan en plongée, depuis une vue d’avion, introduit sans aucun doute du spectateur, une scène à suspens. En effet, il est annonciateur de menace, de danger proche, montrant le personnage principal isolé, au cœur d’un environnement désert. L’intersection des routes forme une croix comme une cible signalant un objectif. Ce plan d’ensemble met en avant l’impuissance, la vulnérable du héro face à un danger imminent dont il ignore encore l’arrivée. Dans ce plan très large, le réalisateur a du créer un masque afin de dissimuler une ville visible au loin. Nous savons dorénavant qu’il est tombé dans un piège. Un décor désertique, sans témoins, ce sont des indices de menaces propices à l’assassinat. La lumière du soleil y est vive, perceptible par les ombres des poteaux de clôture portées sur le sol ainsi que par l’expression de visage du personnage qui fronce les sourcils. Toujours dans ce même plan, on aperçoit au loin un car dont on observe et entend son arrivée sans aucune interruption. Le fait de montrer son déplacement dans son intégralité repousse l’arrivée du rendez-vous tant attendu. De plus, dans cette séquence, afin de d’insister sur le rien, seuls les bruits sont présents. On peut ici, par exemple, suivre la progression du car par la graduation sonore de son moteur, son arrêt, l’ouverture des portes qui ne se voit pas forcément à l’image et son départ qui se poursuit en hors champ jusqu’au plan 3 où on le voit et l’entend enfin disparaître après avoir déposé Thornhill au milieu de ce traquenard. Ainsi, Hitchcock insiste sur l’attente et le suspens vécu par le personnage jusqu’ici seul dans cette immensité.

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Plan 2 : Sur ce plan moyen, le héro, les bras ballants, semble complètement perdu dans l’immensité qui l’entoure.

Durant l’ensemble de cette scène, l’orientation corporelle du personnage (buste, tête et regard) est extrêmement présente. En effet, la volonté de vouloir que le spectateur s’identifie au personnage est mise en place par la relation entre l’orientation du regard et les vues subjectives.

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Plan 3 à 35 :

Une fois Thornhill identifié seul sur le bord de la route, une série de 33 plans s’enclenche (de 3 à 35), où s’alternent deux types de cadrages : 16 plans taille fixes d’une valeur identique sur Thornhill à côté du poteau de l’arrêt de bus sur lesquels on le voit regarder autour de lui (tous les plans à numéro pair entre 4 et 34) ; 16 plans fixes correspondant à sa vision subjective (tous les plans à numéro impair entre 3 et 35, à l’exception du plan 33). Le jeu du regard y est très important, à chaque plan américain on peut le voir tourner la tête pour regarder dans une nouvelle direction. A travers ces plans, on observe à la fois le personnage scruter les alentours à la recherche de son rendez-vous mais aussi ce qu’il voit. Ainsi, le spectateur peut se glisser dans sa peau en voyant la scène à travers ses yeux. Le spectateur est ainsi davantage impliqué dans l'action : NOUS SOMMES A LA PLACE DU HÉROS. Tout ce qui va arriver au héros, nous le subirons aussi, en esprit. Cette alternance est rythmée de la façon suivante : 3 secondes sur le cadrage sur Thornhill et 4 secondes sur les vue subjectives.

Les plans 9 … font les objets de l’apparition de nouveaux éléments : le survole d’un avion au dessus d’un champ, le passage de véhicules une première fois de gauche à droite puis de droite à gauche. Sur ces plans, alors que dans les autres l’œil (caméra) reste fixe, ici le regard de Thornhill suit ces éléments par, la rotation de la caméra, le balayage panoramique. Cela montre la méfiance il met l’accent à chaque passage sur un doute de menace réelle ou supposée, l’attente du rendez-vous qui n’arrive pas. A chaque passage on voit Thornhill commencer à sortir les mains de ses poches. Bien qu’à chaque changement de plan ces éléments disparaissent, on peut suivre leur cheminement grâce à la continuité du son en hors champ. L’enchainement des apparitions augmente peu à peu. Le nombre de plan sur l’observation du paysage alentour diminue entre chaque arrivée. Par exemple, lors la disparition du véhicule noire, le camion est déjà présent au bout de la route sur la ligne d’horizon.

Cette série est perturbée par le plan 33 qui décroche par rapport au système en présentant un point de vue nouveau, un plan plus large, pris depuis l’autre côté de la route. Ce changement d’axe annonce quelque chose : le camion passe devant Thornhill et dégage un nuage de poussière qui lui brouille la vue. Cette interruption semble être le message de l’élément déclencheur. D’ailleurs, le plan suivant n’est pas directement une nouvelle caméra subjective comme pour les autres, mais un resserrement sur un plan américain.

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Plan 36 à 41 :

Retour à la vision subjective : une fois le nuage dissipé, se produit une apparition. Il y a une nouvelle fois ce système d’alternance de cadrage. Mais fois-ci, Thornhill est d’avantage détaché du poteau de bus. Son regard et son corps se sont réorientés vers le champ de maïs qui lui fait face attiré par un nouveau de bruit de moteur. Par conséquent, la caméra est réorientée se un nouvel axe pour mettre d’avantage en confrontation le personnage à cette nouvelle apparition : un ¾ de face qui met en relation directe le Thornhill et son opposant. A chaque plan taille le corps et la tête de Thornhill suit et montre au spectateur la progression du de la voiture sortie de nulle part. La progression à vive allure de la voiture dans le chemin de terre fait penser au déclenchement de l’attaque et donne à nouveau une fausse piste au spectateur.

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Plan 43 à 48 :

C’est l’apparition d’un nouveau personnage. Non celle de Kaplan, bien sûr, mais celle d’un homme que l’on pourrait prendre pour un tueur à gages. Une fois de plus le point narratif entre le personnage et le spectateur est encore en décalage car Thornhill attend Kaplan et le spectateur un meurtrier. Le suspens fait accroître le doute sur l’identité de ce nouveau figurant. Le cadrage de la caméra se ressert sur un plan taille plus serré et change à nouveau d’axe. Les deux hommes se font face et attendent chacun un signe de l’autre.

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Plan 49 :

Le plan 49 présente les deux hommes face à face. Ce cadrage est caractéristique des scènes de duel, le moment le plus dramatique des westerns américains. L'inconnu porte un chapeau faisant penser au cowboy et ses mains sont appuyées sur ses hanches comme s'il allait saisir une arme. Seul le spectateur sait que le héros est dans un piège, et seul le cadrage (façon duel) nous suggère que c'est une scène d'affrontement. Du coup le spectateur a peur et attend le déclenchement de l’action, alors que le héros lui ne se doute de rien. Pourtant, il n’arrive toujours rien. Jusqu’à présent, la mise en scène insiste sur le rien, sur l’inaction. Les séries d’alternances sont pourtant perturbées par de soudains changements d’axe (33 et 49). Cette perturbation s’est déjà produite à un autre niveau, sous une forme différente, nous l’avons vue sans y prêter attention : dans un des plans de la première série (3 à 35), le plan 9, apparemment anodin, montre un petit avion au fond de l’image, laissant une traînée blanche dans son sillage.

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Plan 50 et 51:

Dans ces deux plans Hitchcock montrer l’hésitation du héros sur l’identité de l’individu.

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Plan 52 à 56 :

Nous voyons à nouveau par les yeux du héros, mais cette fois-ci, la caméra est en mouvement. C’est la première fois depuis le début de cette séquence que la caméra devient dynamique. Toujours par une alternance avec le point de vue subjectif, la caméra devient mobile avec le relais du travelling avant et arrière qui montre peu à peu le rapprochement entre les deux personnages. L’alternance permet aussi d’étirer le mouvement et fait ainsi augmenter le suspens. Le héros se met en marche et le spectateur marche avec le héros. Que va-t-il se passer ? L'inconnu va-t-il dégainer une arme et tirer sur le héros ?

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Plan 56 à 64 :

Le plan 56 se prolonge par la fixation de la camera en plan fixe sur les deux personnages en ¾ dans lequel Thornhill instaure un faux dialogue afin de connaître son identité. C’est la première et une des seules fois de cette séquence qu’il y a un dialogue. Mais l'inconnu n'est qu'un passant qui attend le bus. Il n'est pas une menace, le spectateur à encore été envoyé sur une fausse piste. On entend un avion au loin. L'inconnu prononce une phrase intrigante: "c'est étrange, l'avion saupoudre là où il n'y a pas de récoltes". Mais le héros n'y fait pas attention. Pourquoi ? Parce qu'il ne sait pas qu'il est en danger seul le spectateur sait que c'est un piège donc il ne se sent pas concerné par cet indice bizarre. Cette phrase s’adresse donc directement au spectateur. Hitchcock s'amuse avec les nerfs de son public : c'est le ressort du suspens : nous savons qu'il y a un danger, mais pas le héros.

A nouveau, le plan le change d’axe, le plan 62 annonce un évènement : le départ de l’individu. Avec des bruits hors champ : l’arrivée du car et toujours celui de l’avion qui plane. Ce plan est suivi de l’entrée et sortie de champ du car qui prend son nouveau passager.

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Plan 56 à 64 :

Toute la mise en scène préalable n’aura servie qu’à ça : insister sur l’attente du héro et semer le doute et prolonger le suspens dans la tête du spectateur et enfin introduire la réelle menace. L’avion qui fait jusqu’ici faisait partie du décor devient acteur dans la scène. Le plan initial sur l’avion (9) est repris deux fois, puis une troisième (65). On se retrouve alors à nouveau en vue subjective, à travers les yeux du personnage qui observe l’avion, intrigué par les déclarations de son interlocuteur.

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Ce dernier semble sortir du cadre, alors que soudain, sa direction change subitement. Ce changement de trajectoire surprend le héros qui se met à le suivre du regard (rotation autour d’un axe de la caméra). Il apparaît en pleine lumière, au plein centre du cadrage comme une arme et attaque Thornhill à la manière d’un monstre aveugle et sans visage. Jamais Hitchcock ne donne à voir le point de vue du pilote, ni ne révèle son identité. L'avion se rapproche à grande vitesse du héros Notre héros se met à courir avant de se jeter à terre dominer par l’avion qui le survole.

La caméra recule (travelling arrière), face au héros, pendant que celui-ci avance. Dans l'angle gauche nous apercevons la menace qui se rapproche : l'avion mitrailleur. La caméra est à la même hauteur que le héros, et elle se déplace à son rythme. C'est un travelling arrière accompagné : nous ne voyons plus par les yeux du héros, mais nous courons avec lui. C’est le début de la seconde partie de cette séquence. Une longue poursuite entre Thornhill et l’avion avant qu’il lui échappe lorsque l’avion percute un camion citerne.