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Journal de pédiatrie et de puériculture (2010) 23, 30—50 ARTICLE EMC Anorexie mentale à l’adolescence N. Godart a,,b , C. Lamas a , I. Nicolas a , M. Corcos a a Département de psychiatrie de l’adolescent et du jeune adulte, institut mutualiste Montsouris, 42, boulevard Jourdan, 75014 Paris, France b Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) U669, Maison des adolescents, hôpital Cochin 97, boulevard de Port-Royal, 75014 Paris, France 1. Introduction L’anorexie mentale (AM) est un trouble débutant le plus souvent à l’adolescence, dont l’expression clinique la plus visible est somatique (amaigrissement et aménorrhée) et ali- mentaire (restriction alimentaire et trouble des conduites alimentaires [TCA]), mais qui est en fait classé parmi les affections psychiatriques [1]. Cette affection fut décrite dès 1694 par Richard Morton, sous le nom de « phtisie ner- veuse » devant un tableau clinique associant : un manque apparent d’appétit, un refus de nourriture, une aménorrhée, une hyperactivité, une constipation et finalement une cachexie. En 1883, Huchard lui donne son nom actuel d’AM [2] (cf. Crémieux, 1942, dans « en savoir plus »). La définition clinique classiquement utilisée de l’AM en France s’appuie sur « un tableau clinique très constant au travers des époques et des pays » [2], fondé principalement sur la triade symptomatique des trois « A » : un Amaigrissement important (ou une absence de prise de poids pendant la croissance), une fausse Anorexie, qui est en fait initialement une restriction volontaire, une Aménorrhée, primaire ou secondaire (précédant l’AM dans 20 % à 30 % des cas et disparaissant sous contraception orale). À ces éléments de définition clinique du trouble s’ajoutent, selon les classifications, des symptômes cliniques variables en fréquence et en intensité tels que : la peur de prendre du poids ou d’être grosse, même lorsque le poids est inférieur à la normale, une influence du poids ou de l’apparence corporelle sur l’estime de soi et l’existence ou non de crises de boulimie associées. Grâce au partenariat mis en place en 2010 entre la revue Journal de pédiatrie et de puériculture et l’EMC, les articles de cette rubrique sont issus des traités EMC. Celui-ci porte la mention suivante : Godart N., Lamas C., Nicolas I., Corcos M. Anorexie mentale à l’adolescence. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Pédiatrie, 4-002-U-50, 2010. Nous remercions les auteurs qui ont accepté que leurs textes, publiés initialement dans les traités EMC, puissent être repris ici. Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (N. Godart). 0987-7983/$ — see front matter © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.jpp.2010.01.002

Anorexie mentale à l’adolescence

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N. Godarta,∗,b, C. Lamasa, I. Nicolasa, M. Corcosa

a Département de psychiatrie de l’adolescent et du jeune adulte,institut mutualiste Montsouris, 42, boulevard Jourdan,75014 Paris, Franceb Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) U669,Maison des adolescents, hôpital Cochin 97, boulevard de Port-Royal,

75014 Paris, France

1. Introduction

L’anorexie mentale (AM) est un trouble débutant le plus souvent à l’adolescence, dontl’expression clinique la plus visible est somatique (amaigrissement et aménorrhée) et ali-mentaire (restriction alimentaire et trouble des conduites alimentaires [TCA]), mais quiest en fait classé parmi les affections psychiatriques [1].

Cette affection fut décrite dès 1694 par Richard Morton, sous le nom de « phtisie ner-veuse » devant un tableau clinique associant : un manque apparent d’appétit, un refusde nourriture, une aménorrhée, une hyperactivité, une constipation et finalement unecachexie. En 1883, Huchard lui donne son nom actuel d’AM [2] (cf. Crémieux, 1942, dans« en savoir plus »).

La définition clinique classiquement utilisée de l’AM en France s’appuie sur « un tableauclinique très constant au travers des époques et des pays » [2], fondé principalement surla triade symptomatique des trois « A » : un Amaigrissement important (ou une absence deprise de poids pendant la croissance), une fausse Anorexie, qui est en fait initialementune restriction volontaire, une Aménorrhée, primaire ou secondaire (précédant l’AM dans

20 % à 30 % des cas et disparaissant sous contraception orale). À ces éléments de définitionclinique du trouble s’ajoutent, selon les classifications, des symptômes cliniques variablesen fréquence et en intensité tels que : la peur de prendre du poids ou d’être grosse, mêmelorsque le poids est inférieur à la normale, une influence du poids ou de l’apparencecorporelle sur l’estime de soi et l’existence ou non de crises de boulimie associées.

� Grâce au partenariat mis en place en 2010 entre la revue Journal de pédiatrie et de puériculture et l’EMC, les articles de cetteubrique sont issus des traités EMC. Celui-ci porte la mention suivante : Godart N., Lamas C., Nicolas I., Corcos M. Anorexie mentalel’adolescence. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Pédiatrie, 4-002-U-50, 2010. Nous remercions les auteurs qui ont accepté que leurs

extes, publiés initialement dans les traités EMC, puissent être repris ici.∗ Auteur correspondant.

Adresse e-mail : [email protected] (N. Godart).

987-7983/$ — see front matter © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.oi:10.1016/j.jpp.2010.01.002

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Anorexie mentale à l’adolescence

Épidémiologie

L’épidémiologie se propose d’étudier la fréquence despathologies et leurs facteurs de risque. Or, pour cela, il fautdéfinir précisément quel est l’objet considéré. Dans un soucid’homogénéiser la description des pathologies observées,se sont développées des classifications à but de recherche,qui définissent des « troubles » et non des maladies (lesétiologies en étant inconnues). Ainsi, dans la littératureinternationale, derrière le terme d’AM (anorexia nervosa),se cachent des classifications telles que la Classificationinternationale des maladies mentales version 10 (CIM-10) oule manuel diagnostique et statistique des troubles mentauxquatrième version (Diagnostic and Statistical Manual of Men-tal Disorder, fourth edition [DSM IV]) — classification la plusutilisée actuellement dans les recherches internationales —(Tableaux 1, 2). L’AM est soit de type restrictif, soit associéeà des conduites boulimiques. Dans ces classifications, l’AMest définie presque de la même manière, à des nuances près.

Les études épidémiologiques publiées à propos de l’AMont été réalisées à l’étranger et aucune n’a été réaliséeen France, ce qui fait cruellement défaut pour évaluer nosbesoins sanitaires dans ce champ.

La prévalence de l’AM varie dans les études en fonctiondes critères de définition utilisés et des populations étu-diées. Selon les deux études les plus récentes, elle touchede 0,9 % à 2,2 % de la population générale féminine et de0,25 % à 0,3 %, des hommes [3—5].

L’incidence et la prévalence de l’AM varient en fonctiondes études et des populations étudiées. Ainsi, l’incidence,selon la revue de la littérature de Hoek et al. [6], varie dehuit cas pour 100 000 personnes par an parmi les consultantsen médecine générale, à 270 cas pour 100 000 jeunes fillesde 15 à 19 ans et 15,7 cas pour 100 000 jeunes garcons de10 à 24 ans dans une population finlandaise de jumeaux [3].La prédominance féminine est nette dans toutes les études :huit cas sur dix d’anorexie féminine [7].

POINT FORT

L’anorexie mentale touche, dans huit cas sur dix, desjeunes filles ou des jeunes femmes et, dans deux cas,des jeunes garcons ou des hommes. Elle concerne de2 % à 4 % des jeunes filles, en fonction de la définitiondes troubles utilisée, et son incidence aurait augmentéaprès 1945.

Il est difficile de savoir si l’AM est plus fréquente ou nonactuellement qu’à d’autres périodes et si son incidence vacroissant ou non. En effet, les études sont contradictoires.D’une part, leurs sources sont différentes (populationsconsidérées, époques considérées, critères diagnostiques)et d’autre part l’incidence en population clinique (méde-cine générale ou soins spécialisés) dépend à la fois de lafréquence de la pathologie dans la population considérée, de

la demande de soins, de la capacité des praticiens à faire lediagnostic de la demande, de la saturation ou non de l’offrede soins et des pratiques du lieu considéré. Une augmenta-tion de l’incidence considérée en médecine générale peutrefléter des variations à tous ces niveaux.

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L’anorexie débute le plus souvent après la puberté, enoyenne, l’âge de début est de 17 ans pour l’AM (avec deuxics de fréquence autour de 14 ans et de 18 ans) [4].

Les patients traités dans les centres spécialisés dans’AM ne sont pas tous strictement anorexiques selon les cri-ères de DSM IV Text Revision. Plus de 20 % des patientsnorexiques soignés dans des centres spécialisés dénientne partie des symptômes-clés de l’AM répertoriés dans leSM IV. Ils nient leur peur de prendre du poids, se recon-aissent maigres et nient se percevoir trop gros. Cetteituation est plus fréquente encore parmi les plus jeunes.es sujets sont qualifiés d’eating disorders not other-ise specified (EDNOS) ou formes subsyndromiques. Enfin,

’aménorrhée est inconstante dans l’AM et ce, d’autantlus que les prises de contraception orale [7] la masquentarfois.

La durée d’évolution est variable en fonction des études,e 1,7 à 3 ans en population générale. Les taux de mortalitébservés varient en fonction des populations considérées.ne étude récente fait état de 66 % de sujets guéris à 5 ans

3,4]. Les durées observées en populations cliniques sontlus longues [8].

Les formes subsyndromiques d’AM (qui associent certainses critères diagnostiques, mais pas tous) sont 2 à 3 foislus fréquentes. Leur fréquence varie avec la définitionetenue. Ce sont, soit des formes prodromiques de TCA,oit des formes résolutives, soit des formes évoluant sur unode mineur ; elles seraient présentes chez 50 % des sujets

onsultant pour TCA [7]. Si elles n’atteignent pas l’intensitéymptomatique des formes avérées, ces formes cliniques’en ont pas moins des conséquences sévères sur le plan phy-ique et psychologique. Ainsi, Johnson et al. [9] ont montréue l’existence de formes atténuées de TCA à l’adolescencest un facteur de risque important de développement deroubles physiques et psychiques à l’âge adulte (troublesnxieux, symptômes cardiovasculaires, syndrome de fatiguehronique, douleur chronique, troubles dépressifs, limita-ion de leur activité liée à une mauvaise santé, maladiesnfectieuses, insomnie, symptômes neurologiques, tentativee suicide).

Dépister et traiter ces manifestations précocement estmportant, d’une part pour lutter contre leurs complicationsomatiques propres, d’autre part afin de prévenir les pro-lèmes psychiatriques ultérieurs. Plus le délai est courtntre le début des soins et le début de la prise en charge,eilleur est le pronostic [8].Les classifications de recherche individualisent artificiel-

ement l’AM, la boulimie et les troubles subsyndromiques,ui en fait évoluent souvent dans un continuum et en alter-ance au cours de la vie des sujets [10,11]. Cinquanteour cent des anorexiques développent des épisodes bou-imiques et 20 % à 36 % des boulimiques ont des antécédents’anorexia nervosa [7].

Seule la moitié des sujets souffrant d’AM est traitée poures difficultés [3].

Par ailleurs, l’AM est fréquemment associée à la dépres-ion, à des troubles anxieux [12,13], aux troubles de la

ersonnalité et, dans sa forme avec symptômes boulimiques,ux abus de substance [7]. Les antécédents d’abus sexuels7,14] existent dans 20 % à 50 % des cas. Enfin, les anté-édents familiaux de TCA, de dépression et d’anxiété sontréquents [7,14].
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iagnostic positif et différentiel

e diagnostic d’AM est avant tout un diagnostic clinique.es examens paracliniques interviennent essentiellementfin de dépister d’éventuelles complications et d’évaluer leetentissement de la dénutrition.

À la phase d’état, la présentation clinique, stréreoypée,st évocatrice, regroupant la classique « triade des trois A ».outefois, le diagnostic peut être retardé dans les premiersois d’évolution de la maladie par la mise en avant par leatient et l’entourage d’un symptôme isolé ou de plaintesonctionnelles autour de la sphère digestive alimentant lesationalisations autour du comportement alimentaire per-urbé.

remières consultations

hez la jeune fille, l’aménorrhée, la constipation, la frilo-ité, voire des fractures de fatigue ou autres conséquencese la dénutrition peuvent motiver les premiers rendez-vousuprès du médecin traitant. De fait, l’aspect psycholo-ique des troubles n’est pas toujours évoqué d’emble.es premières consultations interviennent fréquemmentur la demande insistante de la famille, dont l’inquiétudeontraste avec l’indifférence apparente de l’adolescente.

POINT FORT

Un amaigrissement avec un indice de masse corporellenormal ou bas chez un adolescent, associé à un désirde maigrir encore et/ou une absence de perception desa maigreur, doit faire évoquer le diagnostic d’anorexiementale.

II s’agit souvent d’une consultation chez le médecin deamille, généraliste ou pédiatre, avec des interrogationsutour d’une maladie organique, la demande d’examensomplémentaires afin d’expliquer l’amaigrissement récentt souvent déjà important de la jeune fille. Ce délaintre début des manifestations et premières consulta-ions, ainsi que l’importance initiale de la perte deoids, constituent des facteurs pronostiques importants.n retrouve également souvent, lors de l’anamnèse de

a patiente et de ses parents, l’allégation d’une sur-harge pondérale survenue au moment de la puberté, lelus souvent absente ou minime, « justifiant » le début’un régime alimentaire parfois initialement valorisé par’entourage.

Ces premières rencontres peuvent s’avérer difficiles dansa mesure où la jeune fille reconnaît rarement d’embléee caractère pathologique des conduites de restriction,lléguant une perte d’appétit, des troubles digestifs fonc-ionnels ou un régime alimentaire « normal ». Certainsndices peuvent cependant orienter le diagnostic vers unCA débutant : rigidité des conduites de restriction ne tolé-

ant aucun écart, culpabilité massive et anxiété en cas’infraction aux règles fixées, systématisation de la conduitet accentuation rapide de la restriction, importance prisear la nourriture et le poids dans la vie de la jeunelle.

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N. Godart et al.

hase d’état

e diagnostic clinique est alors souvent évident.Les conduites de restriction, sous-tendues par la peur

anique de prendre du poids et le désir de maigrir, ont unaractère actif et volontaire avec une lutte contre (pour)a sensation de faim, qui persiste tres longtemps lors deévolution et les différencie d’une anorexie « vraie ». Cetteensation de faim ne peut être reconnue par ces patients queans un second temps, souvent avec honte et culpabilité, etorsque les conduites de restriction sont mises à distance. Laestriction, constante, présente un degrè variable mais cres-endo, avec une éviction progressive et systématique desliments sélectionnés en fonction de leur valeur caloriqueet des modes en matière de diététique).

Ces conduites de restriction s’associent à un ensemblee comportements et rituels évocateurs, centres sur’alimentation et rapportés le plus souvent par l’entourage :ri des aliments, portions fractionnées indéfiniment,équence des plats inappropriée, emploi de condimentsn excès, dissimulation de nourriture, refus de participerux repas familiaux, de consommer de la nourriture qu’ils’auraient pas préparée eux-mêmes. Les rituels témoignentu caractère actif et envahissant de la conduite et visentcontenir l’anxiété liée à toute prise alimentaire vécue

omme ménacante par le patient. Ils reflètent également’intérêt excessif développé autour de la nourriture, illus-ré par les préoccupations croissantes du patient pour’alimentation de ses proches : préparation de repas aux-uels il ne participe pas, nouvel intérêt pour la diététique. . .

es rituels et ruminations incéssantes autour de la nourri-ure vont s’accentuer et s’autorenforcer, en partie du faite la dénutrition progressive.

L’amaigrissement, constant, souvent rapidement supé-ieur à 10 % du poids idéal théorique, est secondaire etirectement lié à la restriction alimentaire. II peut atteindreusqu’à 30 % à 40 % du poids initial, menacant parfois le pro-ostic vital. Dans certaines situations, chez les patients leslus jeunes, il n’y a pas de perte de poids mais une absencee prise de poids qui aboutit à une situation de maigreur.e diagnostic d’AM peut ainsi être posé quand le poids estnférieur à 15 % du poids attendu, soit un indice de masseorporelle (IMC) inférieur au dixième percentile chez lesdolescents, ou à 17,5 kg/m2 chez les adultes [7,15]. La bru-alité, autant que l’intensité de l’amaigrissement, constituen indice de gravité. Plus cette perte de poids est rapide,oins elle est bien tolérée sur le plan somatique, avec un

isque accru notamment de bradycardies, hypotensions etypothermies.

L’état de maigreur patent est dénié par le patient,ui ne s’inquiète de la perte de poids que pour la trou-er insuffisante. La crainte d’être obèse, de prendre duoids, lors de la moindre prise alimentaire, est rarementxprimée d’emblée mais est omniprésente à l’esprit de’adolescent, comme en témoignent les rituels fréquentsutour de la balance (pesée pluriquotidiennes, postpran-iales), la prise regulière des mensurations (tour de cuisse,e hanche, de taille) à la recherche de « rondeurs » éven-

uelles. Les distorsions de l’image corporelle, se focalisantutour de certaines parties du corps (cuisses, ventre, bras),onstituent un élément central du trouble et vont persisterouvent bien après la levée des conduites de restriction et la
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Anorexie mentale à l’adolescence

reprise de poids. Toutefois, le déni portant sur l’importancedu trouble de la perception de l’image du corps est impor-tant : 20 % des sujets traités dans un centre spécialisé pourles troubles alimentaires se trouvent maigres et nient untrouble de la perception de l’image du corps [16] et 28 %disent ne pas avoir peur de prendre du poids [17].

L’amaigrissement consécutif à la restriction alimentairepeut également être accentué par l’association, de manièreplus ou moins évidente, à un ensemble de stratégies decontrôle du poids et de l’apparence corporelle.

Ainsi, en dépit de la perte de poids et de la maigreur,l’adolescent affiche un sentiment de bien-être et de forceallant croissant avec l’amaigrissement, et associé à un déniou à une non-perception de l’état de fatigue. La recon-naissance, en consultation, de la fatigue physique et del’état d’épuisement constitue d’ailleurs souvent un indicede gravité chez un jeune jusqu’ici dans le déni massif destroubles. L’hyperactivité physique [2,18,19] très fréquente,à des dégrès variables, constitue un élément presque aussicaracteristique que la restriction alimentaire et tout aussidifficile à modifier. Elle peut s’inscrire dans le cadre d’unedemarche consciente et contrainte d’augmentation de ladépense énergétique et des calories consommées mais éga-lement, dans certaines situations, être vécue comme endehors du contrôle du patient, notamment à un stade avancéde la maladie. Elle est souvent associée à une restrictionvolontaire du temps de sommeil et/ou à des troubles dusommeil et à une incapacité à s’accorder le moindre repos.Cette hyperactivité, plus ou moins évidente ou dissimulée àl’entourage, peut prendre diverses formes : trajets à pieds,refus de prendre l’ascenseur, longues marches imposées sansbut, se tenir sur une jambe, etc., jusqu’à la pratique inten-sive et continue d’une activité sportive en dépit de l’étatde maigreur. Ces activités, souvent solitaires, contraintes,s’exercent sans plaisir, de manière rigide et automatique.L’interruption de l’activité, ou l’impossibilité de la rea-liser selon les règles établies par le patient, génère uneanxiété et une culpabilité importantes à l’instar de cellesliées à l’effraction des règles alimentaires. Les conduites« ascetiques » (exposition au froid, refus de se vêtir, refusde s’asseoir) se rapprochent de l’hyperactivité par le butcommun qui les sous-tend : s’alimenter le moins possible etmaigrir.

Les conduites de purge (vomissements provoqués, prisede laxatifs, de diurétiques. . .) sont à rattacher aux compor-tements de maîtrise du poids et de l’apparence corporelle.Les formes mixtes sont fréquentes et représentent jusqu’à50 % des formes actuelles de l’AM. Chez un même sujet,des périodes restrictives ou boulimiques se succèdent clas-siquement au cours de l’évolution. L’anorexie est souventrestrictive initialement et peut s’associer secondairementà des crises de boulimies (50 % à 64 % des cas) ; parfois,l’anorexie est d’emblée associée à des vomissements ; maisrarement des vomissements précédent l’anorexie [10,20].Ces conduites de purge constituent un facteur de gravitéà ne pas méconnaître du fait de leur dangérosité propre(troubles biologiques et cardiovasculaires notamment).

L’aménorrhée [21] demeure un symptôme cardinal de

l’AM. Le plus souvent secondaire, elle peut, dans certainscas, être primaire chez des jeunes filles pour lesquelles lestroubles débutent avant le début de la ménarche. Elle estconsécutive à l’importance de la dénutrition et de l’exercice

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33

hysique à l’origine de modifications de la fonction gona-otrope avec le retour à un profil hormonal prépubertaire.outefois, des facteurs psychologiques pourraient interve-ir indépendamment des effets de la dénutrition, comme enémoignent son installation dans près de deux tiers des casvant un amaigrissement conséquent [22] et sa persistanceouvent plusieurs mois après le retour à un poids normal.e pourcentage d’aménorrhée persistante après le retour àn poids normal, au-delà de six mois à un an, varie selones études de 13 % à 30 % [23,24]. Les taux d’estrogènesériphériques sont alors négativement corrélés à des symp-ômes clés de l’AM comme l’insatisfaction corporelle [25].e poids de retour des règles est, lui, positivement corrélécelui de leur disparition, avec un écart de 1 à 2 kg de

lus.L’aménorrhée peut être masquée par la prise de

ontraceptifs oraux ou de tout autre traitement hormo-al substitutif présent face à un symptôme cliniquementinexpliqué » ou inaugural. Cette aménorrhée est rarementercue et présentée par la jeune fille comme un problème.e n’est que tardivement, et souvent chez des jeunesemmes plus âgées, que sont formulées des inquiétudesoncernant cette absence de règles et son retentissementotentiel sur leur fécondité future.

À ce tableau évocateur, s’associe une modification radi-ale de la personnalité de l’adolescent, souvent décrite par’entourage plus que par le patient lui-même. On retrouveinsi une restriction progressive des investissements rela-ionnels et extrascolaires conduisant à un rapprochementt à un agrippement aux parents, notamment à la mère, àn âge plutôt marqué en principe par l’autonomisation et laécouverte du monde extérieur à la famille[2].

L’hyperinvestissement scolaire est habituel et classiqueais non constant. On retrouve dans ce domaine une

echerche excessive de perfection, une quête anxieuse etoujours insatisfaite de résultats irreprochables, conduisantdes résultats bien meilleurs pour l’apprentissage que dans

es domaines faisant appel à la créativité.La sexualité fait souvent l’objet d’un refoulement massif,

ant dans ses composantes physiologiques, comportemen-ales que dans sa dimension de désir. Parfois, la conduitenorexique peut s’installer après un premier émoi amoureuxù l’éveil au plaisir et au désir exercent un effet de sidéra-ion, débordant les capacités de contenance de l’appareilsychique et conduisant à l’installation de la conduite ano-exique comme mode de gestion et de mise à distance de laharge affective ainsi suscitée.

L’un des éléments paradoxaux de ce tableau est’absence de pathologie psychiatrique manifeste dans la plu-art des cas. II est ainsi classique d’exclure de l’AM lesableaux cliniques où le refus d’alimentation est sous-tenduar des phénomènes délirants (craintes de la contamina-ion, d’un empoisonnement) ou un épisode mélancolique.es comportements de maîtrise et de contrôle du poids,e l’alimentation et de l’apparence corporelle sont àomprendre dans leur ensemble comme des comportementséfensifs, venant faire contrepoids et figer l’ensemble de laroblématique sous-jacente, « gelée » par le caractère enva-

issant et, en un sens structurant, des TCA. Ce n’est queans un second temps, en cours d’évolution et lors du renon-ement progressif aux comportements de maîtrise, que vontréquemment apparaître des manifestations dépressives ou
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3 N. Godart et al.

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Tableau 2 Critères Diagnostic and Statistical Manual ofMental Disorder(4th ed) de la boulimie.

F 50,2 [307,51] Boulimie (bulimia nervosa)

Survenue récurrente de crises de boulimie (binge eating)Une crise de boulimie répond aux deux caractéristiques

suivantesAbsorption, en une période de temps limitée (par

exemple moins de deux heures), d’une quantité denourriture largement supérieure à ce que la plupartdes gens absorberaient en une période de tempssimilaire et dans les mêmes circonstances similaires

Sentiment de perte de contrôle sur le comportementalimentaire pendant la crise (par exemplesentiment de ne pas pouvoir s’arrêter de manger oude ne pas pouvoir contrôler ce que l’on mange, oula quantité que l’on mange)

4

nxieuses. Ces symptômes sont majorés par la dénutrition12,13] Tableau 1.

.

etentissement somatique, bilan clinique etaradinique à réaliser

a plupart des anomalies physiques présentes chez cesatients sont secondaires à la perte de poids, aux restric-ions (Tableau 2) alimentaires ou aux comportements deontrôle du poids (vomissements, abus de laxatifs, hyper-ctivité physique). Ces modifications sont pour la plupartéversibles avec la normalisation du poids et des conduiteslimentaires. Le Tableau 3 [7] présente une synthèse desrincipales manifestations somatiques retrouvées chez cesatients.

Les situations d’urgence, imposant une prise en chargeapide en milieu somatique, sont principalement liées aux

onséquences hémodynamiques de la dénutrition et sontraitées plus loin.

Le Tableau 4 [7] donne les recommandations quant auxxamens à réaliser. Cette synthèse des données existantes

Tableau 1 Critères Diagnostic and Statistical Manual ofMental Disorder (4th ed) de l’anorexie mentale.

F 50,0 [307,1] Anorexie mentale (anorexia nervosa)

Refus de maintenir le poids corporel au niveau ouau-dessus d’un poids minimum normal pour l’âge etla taille, par exemple perte de poids conduisant aumaintien du poids corporel à moins de 85 % du poidsattendu, ou incapacité à prendre du poids pendantla période de croissance, conduisant à un poidsinférieur à 85 % du poids attendu

Peur intense de prendre du poids ou de devenir gros,alors que le poids est inférieur à la normale

Altération de la perception du poids ou de la forme deson propre corps, influence excessive du poids ou dela forme corporelle sur l’estime de soi ou déni de lagravité de la maigreur actuelle

Chez les femmes postpubères, aménorrhée, c’est-à-direabsence d’au moins trois cycles menstruelsconsécutifs. (Une femme est considérée commeaménorrhéique si les règles ne surviennent qu’aprèsl’administration d’hormones, par exempleestrogènes.)

Spécifier le typeType restrictif (restricting type) : pendant l’épisode

actuel d’anorexie mentale, le sujet n’a pas, demanière régulière, présenté de crises de boulimie,ni recouru aux vomissements provoqués ou à la prisede purgatifs (c’est-à-dire laxatifs, diurétiques,lavements)

Type avec crises de boulimie/vomissements ou prisede purgatifs (binge-eating/purging type) : pendantl’épisode actuel d’anorexie mentale, le sujet a, demanière régulière, présenté des crises de boulimieet/ou recouru aux vomissements provoqués ou à laprise de purgatifs (c’est-à-dire laxatifs, diurétiques,lavements)

Comportements compensatoires inappropriés etrécurrents, visant à prévenir la prise de poids, telsque : vomissements provoqués ; emploi abusif delaxatifs, diurétiques, lavements ou autresmédicaments ; jeûne ; exercice physique excessif

Les crises de boulimie et les comportementscompensatoires inappropriés et récurrentssurviennent tous deux en moyenne au moinsdeux fois par semaine pendant trois mois.

L’estime de soi est influencée de manière excessive parle poids et la forme corporelle

Le trouble ne survient pas exclusivement pendant desépisodes d’anorexie mentale (anorexia nervosa)

Spécifier le typeType avec vomissements ou prise de purgatifs

(purging type) : pendant l’épisode actuel deboulimie, le sujet a eu régulièrement recours auxvomissements provoqués ou à l’emploi abusif delaxatifs, diurétiques, lavements

Type sans vomissements ou prise de purgatifs (nonpurging type) : pendant l’épisode actuel deboulimie, le sujet a présenté d’autrescomportements compensatoires inappropriés telsque le jeûne ou l’exercice physique excessif, maisn’a pas eu régulièrement recours aux vomissements

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provoqués ou à l’emploi abusif de laxatifs,diurétiques, lavements

ntègre les modifications liées aux pratiques observées sure terrain en France et appliquées par nos équipes (ellesont signalées dans le tableau par le signe « * », ou justi-ées dans le texte ci-dessous). Certains examens, jugés icion fondamentaux, n’en sont parfois pas moins utiles dansertains services de spécialité habitués à un outil de tra-ail (impédencémétrie) ; certaines investigations, comme’ostéodensitométrie recherchant une ostéopénie, consti-uent des outils nécessaires à une amélioration de larévention des complications. En l’absence d’antécédentsersonnels, familiaux, ou de signes évocateurs, un bilan lipi-

ique et une évaluation des axes thyréotrope, gonadotrope,omatotrope ou corticotrope, nous semblent facultatifs. Leableau 5 rappelle le profil endocrinologique [26], réversibleors de la rénutrition, retrouvé chez ces adolescents(es).
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l’adolescence35

Tableau 3 Manifestations somatiques de l’anorexie mentale.

Clinique Examen paraclinique Mécanismes physiopathologiques/conséquences somatiques

Présentation généraleFaciès émacié, anguleux, ridé, peau sèche, ongles cassants, membres

squelettiques, formes féminines effacées, lanugo, hypertrichoseRadio de thorax, silhouette cardiaquediminuéeÉchographie : épaisseur diminuée des paroi,parfois épanchement péricardique

Dénutrition : fonte musculaireHypoplasie de la moelle osseuseCarence martiale, déficit en folates

Cas sévères NFS : Anémie, leuconeutropénie avechyperlymphocytose relative, thrombopénieet, exceptionnellement, dégénérescencegraisseuse de la moelle

Impossibilité de passer de la position assise à la position debout sanss’aider des mains (fonte musculaire)

ScarificationsPâleur, fatigue, intolérance au froidAcrocyanose, froideur des extrémités, voire troubles trophiques,

œdèmes de carenceÉtat cardiaque, hémodynamique et pulmonaire

Pouls ralenti, tachycardie de renutrition Électrocardiogramme quasi constant :bradycardie sinusale (plus ou moinsarythmie respiratoire) allongement du QT etinversion de l’onde T

Dysaul’onomie par augmentation del’activité parasympathique

Tension artérielle basse, hypotension orthostatique Lorsque la dénutrition s’accentue peuventapparaître : des bradycardies jonctionnelles,des troubles de la conductionauriculoventriculaire, des arythmiesauriculaires et ventriculaires, tachycardieventriculaire et fibrillation ventriculaire.

Idem aggravé par l’hypovolémie

Signes d’hypokaliémie Vomissements, laxatifs, diurétiquesSignes de péricarditeÉchographie cardiaque : prolapsus de lavalve mitrale et plus rarement, de la valvetricuspide ; diminution de la masseventriculaire gauche ; épanchementpéricardiqueAnomalies pulmonaires : pneumomédiastin

Système nerveuxConfusion Hyponatrémie, hypoglycémie, troubles

ioniquesDénutrition majeure

Rarement convulsions Imagerie par résonance magnétique :atrophie du tissu cérébral réversible(substance blanche et grise)

Potomanie

Page 7: Anorexie mentale à l’adolescence

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Tableau 3 (Suite )

Clinique Examen paraclinique Mécanismes physiopathologiques/conséquences somatiques

Neuropathie sensitivomotrice par compression (rare) Hypercortisolémie

Troubles digestifs : constantsConstipation, diarrhée Transaminases et bilirubine conjuguée

augmentées en cas de dénutrition majeure,insuffisance hépatocellulaire

Diminution de la motricité gastriqueet intestinale et diminution dessécrétions acides de l’estomac ; prisede laxatifs

Digestion difficile, ballonnements HyperamylasémiePancréatite (rare)

Troubles hormonauxAménorrhée, perte de la libido Fonction thyroïdienne : T3, T4 et TSH

normaleDénutrition

Hypothermie Fonction gonadotrope : hypoestrogénie,baisse de la LH et de la FSH

Arrêt de la croissance Cortisolémie augmentéeHypertransaminasémie et stéatosehépatiqueHypoglycémie, hyponatrémie

Os et dentsOstéopénie, ostéoporose et fractures osseuses Absorptiométrie : diminution de la densité

minérale osseuseFacteurs favorisant l’ostéopénie dansl’anoxerie

Retard de croissance et retard pubertaire (si début précoce) Élévation des phosphatases alcalines Carence estrogénique, diminution del’IGF-1, carence d’apport en calciumet en vitamine D, hypercorticisme,activité physique excessiveDénutrition

État dentaire précaire (caries, déchaussements dentaires)

Complications urologiques et néphrologiquesDiabète insipide infraclinique Augmentation de l’urée baisse de la

créatinineDéshydratation

Exceptionnellement : néphrolithiase, pollakiurie, incontinence urinaire Insuffisance rénale fonctionnelle Anomalies dans la régulation del’hormone antidiurétique ouinsensibilité à son actionPotomanie, perte des muscle duplancher pelvien

Anomalies gynéco-obstétricales

Page 8: Anorexie mentale à l’adolescence

Anorexie mentale à l’adolescence

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37

Les examens complementaires sont présents afin’apprécier le retentissement de la dénutrition et de mettren évidence les signes de gravité éventuels mettant en jeu leronostic vital. Il convient de rappeler que la mortalité est,ans 50 % des cas, liée à une complication somatique du TCA.arfois, paradoxalement, l’absence de complications et leilan biologique quasi normal contrastent avec l’ampleur dea dénutrition, donc un bilan clinique et biologique normale doit pas faussement rassurer. A contrario, nous souhaitonsnsister sur un point majeur : si un suivi somatique et un bilanédical sont indispensables, l’excès de prescriptions para-

liniques, de surveillance rapprochée et/ou la déclinaison,ous forme de catalogue, à la patiente et à sa famille, deoutes les complications potentielles, ont des effets contre-roductifs et délétères (fascination, accentuation du déni,écompensation anxiodépressive, installation d’un rapportadomasochiste) (Fig. 1).

ormes cliniques

’AM prépubère fait l’objet d’un article distinct du traité deédopsychiatrie de l’EMC [27].

L’individualisation de TCA chez le jeune garcon [28,29]st relativement récente et la prévalence sans doute sous-stimée. Ceci s’explique en partie par l’importance de’aménorrhée dans l’établissement du diagnostic (la diminu-ion de la libido en constituant l’équivalent chez le garcon),insi que par l’évolution longtemps supposée des formesasculines vers des troubles psychotiques. L’anorexie mas-

uline est souvent décrite comme une copie de l’AMeminine, avec des caractéristiques psychiatriques, psycho-ociales, une évolution et un devenir similaires. Toutefois,ertaines études soulignent des spécificités propres à cesormes masculines comme la fréquence de l’hyperactivitéhysique, les préoccupations marquées pour l’image cor-orelle et la moindre importance accordée au poids. Sure plan des antécédents, des attitudes de restriction ali-entaire seraient davantage susceptibles d’apparaître cheze jeunes garcons en cas de pratique sportive intensive,’obésité (dans l’enfance et au début de l’adolescence) ete troubles de l’identité sexuelle. Orientation homosexuellet obésité dans l’enfance constituent des facteurs de risquetablis dans la littérature. La pauvreté de la vie sexuelle, lesonduites homosexuelles sont à rapprocher d’un trouble de’identité sexuée qui pourrait constituer un élément centrale la problématique de ces adolescents.

Sur le plan comportemental, il existe peu de différencesvec les formes féminines. Toutefois, on peut soulignera moindre fréquence des formes restrictives pures, lesonduites de restriction étant souvent associées à des épi-odes boulimiques (50 % des cas) et à des conduites de purgevomissements, prises de laxatifs). L’hyperinvestissementntellectuel serait également moins marqué, alors que’hyperactivité physique est au contraire très fréquente.es préoccupations concernant le poids et l’apparence cor-orelle seraient également assez différentes. Les hommesxprimeraient davantage le désir de perdre « leur graisse »,

fin de parvenir à l’idéal d’un corps musclé, que celui deerdre du poids.

L’évolution serait assez proche des formes féminines. Leait d’être un garcon ne constituerait pas en soi un facteur deronostic péjoratif. Ces jeunes garcons seraient également

Page 9: Anorexie mentale à l’adolescence

38 N. Godart et al.

Tableau 4 Bilan clinique et paraclinique à réaliser.

Chez tous les patients présentant des troubles alimentairesExamen clinique complet incluant la force musculaire (test assis, debout, sans les bras), examen cutané, fréquence

cardiaque, tension artérielle, température, poids et taille (évaluation de l’IMC et du percentile pour les plusjeunes

Évaluation du stade pubertaire de Tanner chez l’adolescent (recherche d’un retard pubertaire)Numération formule sanguine C réactivea protéine ou vitesse de sédimentationIonogramme sanguin avec natrémie, kaliémie, chlorémie et réserve alcalineGlycémieUrée et créatinine (interprétation en fonction du poids) plasmatiqueTransaminases (ASAT, ALAT),Électrocardiogrammea

Ostéodensitométrie « initiale », à répéter une fois par an (évolutivité parfois rapide)a

En cas de dénutrition sévère (IMC < 13 kg/m2) réaliser en plusLa température doit être surveillée et une hypotension orthostatique recherchéeÉvaluation métabolique : phosphorémie, magnésémie, glycémieRecherche d’une souffrance multiviscérale : taux de prothrombine, CPKSi anémie en fonction du type, doser ferritine, folatea

Échographie cardiaqueBandelette urinaire avec recherche de protéines, leucocytes, hémoglobine, nitrites, acél’one et contrôle de la

densité urinaire et du pH*Éventuellement : clairance de la créatinine sur urine des 24 heures

Au cours d’une renutrition orale (ou entérale par sonde)Surveillance clinique

Pesée au moins deux fois par semaine pour éviter une prise de poids trop rapide (> 1,5 kg/semaine en dehors de lacorrection d’une déshydration)Recherche d’œdèmesTest de l’acidité gastrique par bandelette réactive ou radiographie pulmonaire après pose d’une sonde gastriqueRepère bien visualisable sur la sonde pour contrôler à vue un éventuel déplacement, et pour remise en place

Surveillance biologiqueIonogramme sanguin, phosphorémie, magnésémie et transaminases une fois par semaineExamens perturbés lors de l’évaluation initiale à répéter à un rythme fonction de l’importance des perturbations

Cas particuliersAmylasémie

Discutable si volonté du référent psychiatre ou somaticien de surveiller l’évolution des vomissementsIndispensable devant un syndrome douloureux abdominal aigu, une amylasémie élevée conduisant à demander lesisoamylases pancréatiques et une lipasémie

PotomanieSurveillance de la diurèse, de l’ionogramme urinaire, de la densité urinaireVomissements connus : examen stomatologique, surveillance du ionogramme

En cas d’aménorrhée persistante après normalisation du poids : estrogène, LH, FSH, prolactine, échographieovarienne pour les plus jeunes, à la recherche d’une maturation folliculaire

IMC : indice de masse corporelle ; CPK : créatine phosphokinase ; ASAT : aspartate aminotransférase ; ALAT : alanine aminotransférase.LH : luteinizing hormone ; FSH : follicle stimulating hormone.a Choix de notre équipe, qui diffèrent des guidelines internationales.

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avantage susceptibles d’être affectés par les complicationssseuses de la dénutrition (ostéoporose et ostéopénie). Enevanche, d’après les études internationales, les troublessychotiques ne seraient pas plus fréquents au sein deette population, contrairement à ce que l’on pensaitusqu’alors.

iagnostic différentiel [7]

n cas de signes d’appel somatique, on recherche touteses causes possibles d’amaigrissement à cet âge, avec une

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ttention particulière sur deux diagnostics : une pathologienfectieuse (tuberculose) ou une affection digestive (mala-ie de Crohn). Mais il faut, en fonction de la clinique,enser à une tumeur intracérébrale, à un processus malin,une pathologie inflammatoire ou endocrinienne (maladie

’Addison, panhypopituitarisme. . .).

II faut éliminer des affections psychiatriques associées

ossiblement à des TCA et/ou un amaigrissement tels untat délirant associé à une anorexie ou un état dépres-if avec amaigrissement. Le bilan paraclinique élimine cesiagnostics.

Page 10: Anorexie mentale à l’adolescence

Anorexie mentale à l’adolescence 39

Tableau 5 Profil endocrinologique de l’anorexie mentale (réversible à la renutrition).

Fonction thyréotrope Fonctioncorticotrope

Fonctiongonadotrope

Fonctionsomatotrope

Autres

Euthyroïdie clinique,avec LT4 et TSHnormales etabaissement de LT3

Pas d’anomaliescliniques

Dysfonctionnementhypothalamohypo-physaire, régressionà un stadeprépubertaire avechypo-estrogénie

Taux basald’hormone decroissance souventaugmenté, maisréponse aux tests deprovocationinsuffisante

Baisse del’hormoneantidiurétique,de la leptine

Cortisolémie etcortisol libreurinaire augmentés

Perte durétrocontrôle positif

Diminution del’IGF-1 et desprotéines de liaisonsGHBP-IGF BP3

Ghréline etneuropeptide Yélevés

Disparition durythme circadien ducortisol

Disparition des picsspontanés de LH

ACTH normale Diminution de LH etFSH sériquesProlactinémienormale oulégèrement élevéeRéceptivitéovarienne normale

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LT : lutéotrophine ; TSH : thyroid stimulating hormone ; LH : luteigrowth factor ; GHBP : growth hormone binding protein ; ACTH : a

Étiopathogénie

L’AM est une entité psychiatrique dont l’étiopathogéniereste mal connue. II n’a pas été identifié, à ce jour, decauses directes de ce trouble. De nombreux modèles étio-pathogéniques ont été développés. Certains s’intéressentprincipalement à une hypothèse étiopathogénique unique(par exemple : les troubles comportementaux et cognitifsou la dimension génétique), alors que d’autres envisagentla question sur un plan développemental et intégrent demultiples modèles (ils considèrent alors des éléments aussidivers que les histoires familiale et individuelle du sujetqui comportent des éléments psychologiques, biologiques,génétiques et sociaux). Les deux abords de la question ontleurs limites. Le premier considère la question selon unangle de vue très réduit, qui ne permet que l’abord partiel(unidimensionnel) mais précis, d’un phénomène complexe.Ces hypothèses sont explorées au travers de recherchesquantitatives empiriques. Cet abord a donné lieu à desmodèles étiopathogéniques multiples et partiels (chaquecourant théorique créant son modèle). Le second tented’aborder la question en construisant des modèles multidi-mensionnels dit « intégratifs ». Ils intègrent les précédentset sont appelés « modèle bio-psycho-sociaux » (exemple :Garner[30]) qui, s’ils permettent une vue d’ensemble, nesont pas, à ce jour, totalement satisfaisants. Ils prennent en

compte des dimensions multiples, sans réellement connaîtrele poids et la place de chacune ; de plus, ils n’ont jamais ététestés par des études prospectives quant à leur pertinence.En fait, ces deux approches, focalisées sur un axe ou globa-lisantes, sont complémentaires et permettent de construire

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hormone ; FSH : follicle stimulating hormone ; IGF : insulin-likecorticotrophic hormone.

es modèles étiopathogéniques évolutifs que l’on espère delus en plus pertinents [31].

Selon ces modèles intégratifs, l’AM se déclarerait chezes sujets prédisposés, à la faveur de facteurs déclenchantsinsatisfaction du sujet sur lui-même, régime, puberté,euil, séparation) et serait maintenu par des facteursérennisants (dénutrition, réaction des autres, nouvel équi-ibre psychique), réalisant un véritable cercle vicieux. Lesacteurs prédisposants [31] sont, pour partie, individuels,amiliaux et culturels. Ils sont nombreux et le plus souventon spécifiques de l’AM : ils sont bien souvent des facteurs deulnérabilité communs à d’autres troubles psychiatriques.ur le plan individuel, il y aurait des anomalies biologiquesotentiellement préexistantes au développement de

POINT FORT

L’hypothèse la plus consensuelle actuellementdeveloppée est que les troubles des conduitesalimentaires sont d’origine multifactorielle.

l’AM (anomalies sérotoninergiques et/ou de l’axe cor-icotrope), qui seraient soit le résultat de particularismeénétique (l’héritabilité génétique serait plus importanteour l’AM que pour la boulimie), soit la résultante biologique’évènements de vie périnataux ou de la petite enfance

erturbant le développement psychologique (via des pertur-ations relationnelles et/ou des perturbations biologiquese l’axe corticotrope). Certains ont aussi fait l’hypothèseue des stress précoces ou des relations de mauvaise qualitévec les parents causeraient, comme cela a pu être démon-
Page 11: Anorexie mentale à l’adolescence

40 N. Godart et al.

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igure 1. Arbre décisionnel. Conduite à tenir face à un amaigriss

ré chez le rat, des modifications du fonctionnement de’axe corticotrope hypo-thalamo-hypophysaire responsable’une réponse majorée aux stress, sur le plan psychologiquet biologique. Ce terrain « généticobiologique » favorise-ait l’apparition de l’AM en association, ou du fait dearactéristiques psychologiques associées. Parmi les carac-éristiques psychologiques plus spécifiquement impliquéesans le développement de l’anorexie, sont clairement iden-ifiés une estime de soi faible, un niveau de perfectionnismelevé, des difficultés d’autonomisation et de gestion de laolère [19,20]. L’environnement familial a aussi un impactmportant au travers des échanges relationnels décrits danses facteurs individuels, mais aussi par l’intérêt prononcéu milieu familial pour les régimes alimentaires et leurratique, l’alimentation, la silhouette, et le poids qui

st propice au développement de l’AM chez de jeunesujets.

Néanmoins, le facteur pronostique essentiel est laature des difficultés psychopathologiques sous-jacentesla conduite anorexique. Celles-ci peuvent être appré-

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t chez un adolescent.

iées indirectement par la qualité, la souplesse, la richesseu fonctionnement prémorbide et l’histoire du dévelop-ement affectif et relationnel du sujet. Indirectement,a persistance ou non de relations satisfaisantes avec’environnement familial, amical, sentimental, témoigne dea plus ou moins bonne capacité d’aménagement des rela-ions interpersonnelles : autrement dit, de la mise en placeréalable et de la préservation de possibilités d’étayage plusu moins diversifiées sur l’extérieur, reflétant le fonctionne-ent psychique antérieur du sujet.De nombreux symptômes psychiatriques sont observés

u cours de révolution, qui peuvent se comprendre à laumière des données psychopathologiques sous-tendant cesonduites : la problématique de dépendance y est cen-rale, ce qui rend compte de l’apparition de ces troubles

l’adolescence, période de la puberté, lorsqu’il s’agit’accéder à la sexualité génitale, d’achever ses identifica-ions, de se séparer des parents et de s’insérer au mondees adultes. La qualité des intériorisations préalables et,orrelativement, de l’estime de soi, qui s’est établie au

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Anorexie mentale à l’adolescence

cours de l’enfance, grâce aux liens noués avec les procheset aux composantes généticobiologiques de l’individu, setrouvent donc mises à l’épreuve par le stress majeur dela puberté, combiné ou non, selon les cas, à des évène-ments de vie, eux aussi, stressants (séparation, deuil. . .), oula survenue d’éléments anxieux ou dépressifs. La restrictionalimentaire alors rencontrée, soit par hasard (maladie apha-giante, vraie anorexie de la dépression), ou volontairement(régime), va rapidement, chez des individus prédisposés,prendre une fonction particulière. Dans un premier temps,la dénutrition apaise les tensions psychologiques (anxiété,dépression, troubles divers de la personnalité), en donnantau sujet un sentiment de maîtrise ; puis, dans un secondtemps, elle contribue à développer symptômes anxieux etdépressifs, que le sujet va tenter de colmater par un ren-forcement et une aggravation de sa restriction alimentaire,créant un véritable cercle vicieux. Croyant s’être affranchiede sa dépendance à autrui et de sa fragilité grâce à son symp-tôme, le patient se retrouve en fait doublement contrainte,toujours seul et désormais enfermé dans sa conduite [19].

Évolution et facteurs pronostiques

L’évolution de l’AM à l’adolescence est variable. S’il n’estpas exceptionnel que l’évolution naturelle se fasse versune guerison spontanée, le plus souvent, les patients ontbesoin d’une prise en charge spécifique. Cette prise encharge est d’autant plus efficace qu’elle est démarréeprécocement. L’enjeu est de taille : il s’agit en effetd’éviter les complications aiguës liées à la dénutrition, ainsique de limiter les risques liés à la chronicisation de cestroubles qui s’accompagnent d’un taux de mortalité pré-occupant. Cette évolution est nettement plus sévère chezles patients souffrant d’anorexie restrictive pure que chezles patients souffrant de syndrome boulimique ou hyperpha-gique [32,33,42].

L’évolution de ces troubles n’est connue que dans despopulations traitées ; l’évolution de cohortes en populationgénérale, avec ou sans soins, souffrant parfois de formespartielles d’AM n’est que tres mal connue.

Évolution à court terme

L’AM chez les adolescents étant une pathologie qui s’installesouvent sur plusieurs mois, l’évolution des troubles à courtterme se fait sur un à deux ans. Les complications à courtterme sont largement dominées par les conséquences soma-tiques de la dénutrition et/ou des conduites de purgeéventuellement associées : le pronostic vital peut alorsêtre engagé, nécessitant une hospitalisation en urgence.Cependant, la comorbidité fréquente avec les troublesanxiodépressifs ne doit pas être négligée et, dans des situa-tions d’urgence, le risque suicidaire doit être evalué.

Si beaucoup d’études se sont intéressées au suivi au longcours de patients anorexiques, moins d’études se sont pen-chées sur l’évolution à court terme de ces adolescents. II en

ressort néanmoins que l’évolution des patients anorexiquessuivis est meilleure à long terme qu’à court ou moyen terme,et que les patients anorexiques restrictifs purs changent fré-quemment de catégorie diagnostique de leur TCA au coursde l’histoire de leur maladie [10].

41

Parmi les facteurs pronostiques prédictifs de l’évolutioncourt terme, le fonctionnement familial sain et l’existence’évènements de vie comme facteur déclenchant d’un épi-ode anorexique à l’adolescence sont des facteurs de bonronostic pour l’évolution à un ou deux ans : les sujetsercoivent une détérioration du fonctionnement familial àn an, mais une amélioration à deux ans [34].

Enfin, parmi les adolescents hospitalisés pour AM,ne équipe s’est intéressée aux facteurs predictifs liesux caractéristiques de la prise de poids pendant’hospitalisation [35], il en ressort que la vitesse de prisee poids, supérieure ou égale a 0,8 kg par semaine pendant’hospitalisation, est le seul élément prédictif retrouvé.es patients, qui ont pris du poids rapidement pen-ant l’hospitalisation, ont significativement moins souventechuté dans l’année qui a suivi la sortie de l’hopital quees autres patients. II n’est pas precisé s’il s’agit d’un liene causalité ou d’un marqueur d’une bonne tolérance àa prise de poids chez des patients qui acceptent pendant’hospitalisation de retrouver un poids normal.

volution à long terme

ans une revue des études de devenir portant sur des sujetsdultes et/ou adolescents soignés en ambulatoire ou en hos-italisation et suivis au minimum quatre ans, les auteurs [8]oncluent qu’à l’issue du suivi, en moyenne 44 % des sujetsraités reprennent un poids proche de la normale et ont leursègles, 24 % sont toujours en sous-poids, avec des règlesbsentes ou sporadiques. Les préoccupations concernant leoids et l’alimentation sont présentes dans deux cas sur troist 40 % sont boulimiques. Cinq pour cent des sujets sontécédés. Nombreux sont les sujets, guéris ou non, à souffrire troubles psychiatriques (dysthymie, troubles obsession-els compulsifs, phobie sociale et abus de substances) [36].

Le pronostic est meilleur chez les sujets adolescents,vec 50 % à 70 % de guérison, 20 % de symptômes residuelst 20 % de chronicisation [16].

D’après une revue de la littérature réalisée par Katzman37], les facteurs de mauvais pronostic chez les patientsouffrant d’AM à l’adolescence sont donc le retard à larise en charge, mais aussi les relations familiales diffi-iles, un IMC inférieur à 13 en début de prise en charge,’association à un trouble de personnalité ou à une dépres-ion, un nombre et une durée élevés des hospitalisationsl’hospitalisation sélectionné du fait des critères de sévé-ité et de résistance aux soins ambulatoires des sujets plusévèrement atteints [38]). D’autres éléments cliniques telsue l’existence de vomissements provoqués et l’âge précocee début des troubles constituent des facteurs de mauvaisronostic plus discutés, avec des résultats contradictoireselon les études [39].

POINT FORT

Les troubles des conduites alimentaires évoluent

toujours sur une durée longue de plusieurs moisà plusieurs années. Leurs complications somatiqueset psychiatriques doivent etre recherchées avecattention, car elles grèvent le pronostic.
Page 13: Anorexie mentale à l’adolescence

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volution de la symptomatologie alimentaire

ur le plan clinique, l’évolution se fait souvent vers desormes mixtes associant des symptômes anorexiques, bou-imiques et hyperphagiques. Ainsi, en ce qui concernees patients anorexiques, des symptômes boulimiques ouyperphagiques sont associés, dans près de la moitié desas, soit d’emblée, soit secondairement. II est beaucouplus rare que des patients souffrant d’anorexie-boulimievoluent vers une symptomatologie restrictive pure37].

L’évolution de l’AM est marquée dans près de la moitiées cas par des rechutes. Celles-ci ne constituent pas forcé-ent un facteur de mauvais pronostic puisqu’il ne s’agit pas’une répétition à l’identique : entre temps, le patient auraait l’experience de sensations corporelles et des relationsux autres avec un poids normal, ce qui pourra l’aider petitpetit à dépasser ses angoisses de changement (Tableau 3)

2].

ortalité’AM est l’une des pathologies psychiatriques ayant le tauxe mortalité le plus élevé. La mortalité semble moins impor-ante chez les sujets soignés avant 20 ans [8].

Cinq pour cent à dix pour cent des adolescents souf-rant d’AM décèdent des complications de leur pathologie,nviron la moitié du fait des complications somatiquesboutissant à un arrêt cardiaque, et l’autre moitié paruicide. La mortalité par suicide est plus fréquente chezes patients ayant des conduites boulimiques. La morta-ité des anorexiques chroniques est plus elevée encore40] : mortalité prématurée de 15 % à 20 % avec plus de0 ans de recul de suivi, ce qui répresente une mor-alité de 0,5 % par année l’évolution, soit 12 fois plusue la mortalité attendue à cette période de la vie41].

La plus grosse étude realisée à ce jour en populationénérale concernant la mortalité de l’AM (sur 6009 sujetsospitalisés en Suède pour AM entre 1973 et 2003) estimeue la mortalité est 6,2 fois plus importante chez ces sujetsu’en population générale.

Un âge de début précoce et une hospitalisation plusongue sont associés à un devenir meilleur, alors que lesomorbidités physiques et psychiatriques assombrissent leronostic. Les principales causes de mortalités observéesans cette étude étaient l’AM, l’abus de substances (prin-ipalement l’alcoolisme) et le suicide. La mortalité estaximale l’année qui suit la sortie de l’hospitalisation.ependant, une étude centrée sur 748 adolescents, hos-italisés pour AM en Suède entre 10 et 26 ans [38], aontré une surmortalité de ces adolescents, en compa-

aison avec la population générale (4,5 % contre 0,9 %).inblad [42] a montré qu’elle a diminué au cours du tempshez des sujets hospitalisés en Suède, ce qu’il attribueu développement de centres de soins spécialisés dans ceays.

volution vers la chronicitén population générale, 66 % des sujets sont guéris à cinqns [3,4]. De 15 % à 25 % des anorexiques évoluent vers lahronicité, dont il est licite de parler au-delà de cinq ans

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N. Godart et al.

’évolution, même si à tout moment la guérison reste pos-ible [43,44].

Le risque de chronicité est très important chez leseunes anorexiques dont l’état n’est pas trop alarmantur le plan pondéral, qui ne se mettent pas en dangere facon aiguë sur le plan somatique, mais qui stag-ent pendant plusieurs années à un poids bas, avec unensertion sociale qui s’appauvrit et se restreint au fil duemps. Ainsi, sur le plan psychosocial, la persistance deymptômes anorexiques s’accompagne dans deux tiers desas d’une dépendance familiale majeure, contre un tiershez ceux qui n’ont plus de symptôme alimentaire. Enevanche, l’insertion professionnelle et les relations inter-ersonnelles restent globalement plutôt bonnes malgré desifficultés d’adaptation sociale [8]. Une étude centrée sur48 adolescents hospitalisés pour AM en Suède entre 10 et6 ans [38], a montré un risque plus élevé de problèmee sante (5,8 fois plus important) de dépendance financière2,6) et moins de sujets ayant des enfants (0,6).

L’évolution des patients boulimiques est souvent plushaotique que celle des patients ayant un profil restric-if pur, avec des répercussions psychosociales plus lourdes19].

athologies psychiatriques associées à l’AMes pathologies associées les plus fréquentes sont l’anxiétét la dépression [12,13].

Les comorbidités de l’AM sont nombreuses [43,45]. Leslus fréquentes sont :les troubles dépressifs, cette comorbidité est à la foisindividuelle et familiale [13,14] ;les troubles anxieux particulièrement l’anxiété généra-lisée, la phobie sociale[46] et les troubles obsessionnelscompulsifs [12] ;les abus de substances (alcoolisme, psychotropes, toxico-manie) : surtout quand il y a des symptômes boulimiquesassociés ;les troubles de la personnalité : cluster C (évitantes,dépendantes, obsessives compulsives, passives agres-sives) ;le syndrome d’Asperger ou troubles appartenant auspectre de l’autisme ;plus rarement les troubles psychotiques : il s’agit souventd’anorexies atypiques, marquées par exemple par un trialimentaire étrange, pas nécessairement hypocalorique,parfois sous-tendues par des idées délirantes (angoissed’être empoisonné).

athologies somatiques associées à l’AMes principales complications somatiques à long terme de’AM sont d’une part, dans le cadre de l’anorexie pré- et per-ubertaire, les troubles de la croissance et d’autre part, lesonséquences du déficit hormonal estroprogestatif d’origineypothalamique (à savoir l’ostéoporose et l’infertilité).

Les complications plus spécifiques des conduites bouli-

iques potentiellement associées sont constituées par les

onséquences des vomissements répétés : troubles ioniquest leurs conséquences, pathologies dentaires (érosion de’email, caries) et de l’appareil digestif haut (césophagites,astrites).

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Anorexie mentale à l’adolescence

Conséquences sur la croissance staturale àl’adolescenceLe retard de croissance staturopondéral est une compli-cation non négligeable de l’AM à l’adolescence. En casd’anorexie prépubère, cette complication est plus fré-quente encore, et bien souvent les courbes de croissancestaturales et pondérales sont ralenties depuis plusieursannées quand le diagnostic est posé, ce qui témoigne d’unerestriction alimentaire ancienne. Le retour à un poids nor-mal s’accompagne d’une reprise de la croissance, si ce n’estpas trop tard et que les cartilages de croissance ne sontpas soudés, il n’y a pas toujours de récupération totalede la croissance staturale. Les retards de croissance sontconsécutifs à des perturbations hormonales : baisse des T3 etT4, élévation des taux de cortisol, mise au repos de l’axegonadotrope (insuffisance ovarienne d’origine hypothala-mique) [37]. Enfin, les TCA chez les adolescents induisentdes altérations importantes de l’axe somatotrope, avecune « résistance » à l’hormone de croissance, growth fac-tor (GH) : taux normaux ou élevés de GH, taux effondrésd’insulin like growth factor (IGF-1) et de growth hormonbinding protein (GHBP). La dénutrition inhibe la productiond’IGF-1, augmentant par un rétrocontrôle négatif le taux deGH, qui ne suffit pas à relancer la production d’IGF-1. Lefonctionnement de cet axe se normalise avec la renutrition[45].

Le retentissement de la dénutrition chronique sur lacroissance se percoit également sur le plan cérébral. Eneffet, les effets de la dénutrition objectivés à l’imageriepeuvent avoir, à long terme, un impact négatif surle développement cognitif des plus jeunes adolescents[47,48].

Ostéoporose et aménorrhéeLorsque l’aménorrhée est installée depuis plus de sixmois, on observe un tableau clinique proche tant dela période prépubertaire que de la ménopause, asso-ciant l’aménorrhée, la régression des caractères sexuelssecondaires et l’ostéopénie pouvant évoluer vers une ostéo-porose, à l’origine de fractures spontanées, de fractures defatigue et plus tard, de tassements vertébraux (les sujetsayant un antécédent d’AM ont un risque fracturaire plusélevé qu’en population générale).

Sur le plan physiopathologique, la dénutrition a unedouble conséquence sur la croissance osseuse : diminutionde l’action des ostéoblastes et augmentation de l’actiondes ostéoclastes. La densité minérale osseuse de ces adoles-centes est correlée à 1’IMC, à l’âge au début de la maladie età la durée de la maladie. Les mécanismes impliqués dans laperte de densité osseuse dans l’AM sont l’hypoestrogénie,le taux de IGF-1 bas, l’augmentation du taux de cortisol ;l’hyperactivité physique (qui en temps normal augmentel’action des ostéoblastes, mais qui associée à une dénu-trition à l’effet inverse), la dénutrition et la carence encalcium et vitamine [37].

La prise de poids permet d’améliorer la déminérali-

sation osseuse, même en l’absence de reprise de cyclesmenstruels (c’est-à-dire malgré un déficit d’impregnationestrogénique). Malgré cela, la déminéralisation osseusen’est pas complètement réversible après la disparition deTCA, puisque environ un tiers des patientes ayant souf-

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43

ert d’AM à l’adolescence ont une ostéopénie persistanteu niveau du rachis lombaire.

raitement de l’ostéopéniee traitement de l’ostéoporose chez les patientes ano-exiques passe avant tout par la prise de poids et la reprisees cycles menstruels[49], les deux étant évidemment liés. IIst donc recommandé de surveiller de facon annuelle dévo-ution du bilan hormonal et de la densité osseuse. Chez larande majorité des patientes (85 %), on observe un retoures règles après six mois de stabilisation à un poids suffi-ant (environ 2 kg de plus que le poids à l’arrêt des règles)50,51].

On sait aussi que des facteurs psychologiques sont impli-ués dans l’aménorrhée chez les patientes souffrant deCA : chez un tiers des patientes l’aménorrhée précède

a perte de poids, et des aménorrhées ou dysménorrhéeseuvent persister malgré le retour à un poids normal. Lesaisons avancées sont alors soit la poursuite de problèmeslimentaires à bas bruit, soit la persistance de difficultéssychologiques [23,24]. Par ailleurs, sur le plan thérapeu-ique, on conseille souvent la prescription de calcium etitamine D chez les patientes anorexiques, bien que la miné-alisation osseuse ne soit pas corrélée à la supplémentationalcique, mais leurs carences d’apport sont majeures.

Aucun traitement médicamenteux n’a fait la preuve deon efficacité dans le traitement curatif de la déminérali-ation osseuse des patientes anorexiques. Les traitementsar pilule estroprogestative sont néanmoins bien trop sou-ent présents chez les adolescentes et les adultes, ceui est discutable [19]. En effet, ils permettent d’induirees saignements mensuels qui s’apparentent à une reprisee cycles menstruels et peuvent ainsi faussement rassureres patientes en donnant l’apparence d’une résolution desomplications de l’anorexie. II faut alors être vigilant à ceue ces prescriptions ne favorisent pas un déni ou une bana-isation des troubles par les patientes.

nfertilitées patientes anorexiques, très dénutries, n’ont pas’ovulation et ne peuvent donc pas être enceintes. Cepen-ant, ces troubles de la fertilité ne sont pas majeurs chezes femmes suivies : plus la durée du suivi est longue, pluse taux de fertilité est proche de la population générale,u moins si l’on tient compte des femmes vivant en couplet désireuses d’avoir des enfants [52]. En revanche, onetrouve un nombre non négligeable de femmes souffrante TCA en consultation de procréation médicalement assis-ée (environ 16 %) ; il s’agit le plus souvent de TCA non prisn charge [53].

omplications à long terme des vomissementsrovoquéslles sont nombreuses (Tableau 6). Les complications cardio-asculaires sont les plus dangereuses à court terme avec,

n cas d’hypokaliémie majeure, un risque vital non négli-eable.

Les vomissements provoquent également une altérationes muqueuses buccopharyngées et digestives (œsopha-ite, ulcérations œsogastriques, reflux gatro-œsophagien,

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44 N. Godart et al.

Tableau 6 Complications spécifiques des vomissements.

Clinique Examen paraclinique Mécanismes physiopathologiques/ conséquences somatiques

Présentation généraleCallosité sur le dos des doigts et

hypertrophie des parotidesIonogramme sanguin :hypokaliémie, alcalosehypochlorémique(vomissements)/acidose(laxatifs) hyperchlorhémique,hyperamylasémie

Vomissements

Déshydratation Augmentation de créatinineet de l’urée sanguine, voireinsuffisance rénalefonctionnelle

Vomissements et/ou arrêt deboissons

Faiblesse musculaireÉtat dentaire précaire (caries,

déchaussements dentaires)Pétéchies sur le visage, hémorragie

conjonctivaleÉtat cardiaque et hémodynamique

Palpitations Électrocardiogramme : Vomissements, laxatifs,diurétiques

Bradycardie signes d’hypokaliémiesigne de péricardite

Troubles digestifsHypertrophie parotidienne Hyperamylasémie VomissementsDouleurs pharyngées, érythème ou

ulcérations du pharynx, œsophagite,gastrite, douleurs abdominales, refluxgastro-œsophagien, ulcère œsophagien

Exceptionnellement, syndrome deMallory-Weiss, achalasie, ruptureœsophagienne avec médiastinite(syndrome de Boerhaave), syndrome del’artère mésentérique supérieure,dilatation aiguë de l’estomac voirerupture gastrique, diarrhée,constipation

Complications urologiques et néphrologiquesInsuffisance rénalefonctionnelle

Déshydratation,

Néphropathietubulo-interstitielle avecacidose tubulaire de type1 en cas d’hypokaliémieprolongée

Hypokaliémie chroniqueVomissements, hypokaliémie,diurétiques

Insuffisance rénale terminale

Complications dentaires

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Caries dentaires, érosion de l’émail

yndrome Mallory-Weiss, dilatation aiguë, rupture gastro-ntestinale).

Les patients souffrant de symptômes boulimiques avecomissements provoqués peuvent avoir des complicationsentaires graves et irréversibles, allant de l’érosion den-aire et des caries, aux gingivites et stomatites jusqu’auxhutes de dents par déchaussement.

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Vomissements

ynthèse

’évolution de l’AM est très variable d’une personne à’autre, allant d’une modalité particulière d’expression durocessus adolescent rapidement favorable en quelquesois, à la chronicisation avec les multiples risques soma-

iques qu’elle engendre, au risque d’engager le pronostic

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Anorexie mentale à l’adolescence

vital. L’AM ne préjuge pas de la psychopathologie sous-jacente. II nous est actuellement impossible de prédire ledevenir d’un patient qui se présente pour débuter une priseen charge ; dans tous les cas il s’agit de ne pas banaliser cestroubles et la souffrance qu’ils accompagnent et de pro-poser un traitement adapté au plus vite, afin d’aider aumieux le patient à développer des capacités d’étayage surl’entourage familial, amical et soignant.

Traitement

Principes généraux

Les guides thérapeutiques actuels de l’AM insistent tous surun élément crucial sans lequel la guérison somatique etpsychique ne peut être obtenue : la restauration du poids[7,54,55]. La prise en charge de la restriction alimentaireet des TCA constitue une priorité dans la mesure ou ilsvont avoir tendance à s’autoentretenir, s’autorenforcer etse bloquer au fil du temps. Toutefois, cette prise en comptedu poids et du comportement alimentaire doit s’associerà une évaluation et à la prise en charge des difficul-tés psychopathologiques et relationnelles concomitantes sil’on veut espérer avoir une action durable sur la conduitesymptomatique [2,18,19]. Dans l’AM, seules les approchespsychothérapiques, relationnelles et institutionnelles ontfait la preuve de leur efficacité, les médicaments psycho-tropes occupent une place marginale. Le niveau de preuveexistant qui justifie de l’utilisation de ces traitements dansces indications est cependant assez faible, la plupart destraitements n’ont pas été évalués ni comparés les uns auxautres ; les indications de ceux-ci reposent sur un consensusd’experts le plus souvent, à l’exception de certaines formesde psychothérapie ayant fait la preuve de leur efficacitédans des études randomisées, pour des indications précises.

Le traitement proposé compose avec les ressourceslocales, la gravité de la situation clinique rencontréeet son retentissement somatique et psychique, ainsi quel’acceptabilité par le patient et sa famille des mesures pro-posées. La réponse thérapeutique dans tous les cas doit etregraduée et adaptée à chaque cas et à chaque étape del’évolution ; elle associe, dans un travail de partenariat plu-ridisciplinaire des professionnels des champs concernés uneprise en charge somatique, psychique, sociale et familiale.

Prise en charge ambulatoire

Initialement, dans la majorité des situations en dehors del’urgence vitale, des soins ambulatoires plus ou moins inten-sifs sont suffisants. Ils s’appuient sur l’élaboration d’unealliance thérapeutique avec le patient et ses parents, limi-tant ainsi le risque de ruptures et de discontinuité de la priseen charge.

Les premiers entretiens ont pour objectif une évalua-tion minutieuse de la problématique de l’adolescent, dela dynamique familiale, du retentissement des manifesta-

tions symptomatiques, mais également une appréciation descapacités de mobilisation et de changement de l’adolescentet de son entourage autour du cadre thérapeutique pro-posé. Elle vise notamment à resituer l’épisode actueldans l’histoire développementale infantile et récente de

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45

’adolescent et dans l’histoire familiale, permettant la misen perspective de ces éléments. II est important que cesremières rencontres ne s’engagent pas sur le mode d’unapport de force venant répéter les relations et attitudesamiliales actuelles autour de l’alimentation. Une approcheentrée de manière exclusive sur le symptôme alimentaireait courir le risque de cette répétition et de l’accentuationu déni des troubles. Sans ignorer la gravité et le retentisse-ent somatique des manifestations, il semble fondamental’engager la relation selon des modalités qui permettentu patient de trouver une écoute attentive de ses difficul-és, sans vouloir à tout prix « lever » le déni portant sur laonduite. La mise en place d’un suivi au minimum bifocal,ssociant un psychiatre à un pédiatre, un généraliste ou unutritionniste se coordonnant, permet de différencier leslans et que chaque interlocuteur travaille avec le sujet eta famille tous les axes des soins de manière complémen-aire.

ollaboration somaticien et psychiatre : un axeentral

I est souvent utile de dissocier prise en charge psychia-rique et somatique par la collaboration entre un psychiatret un somaticien (médecin généraliste, pédiatre. . .). Toute-ois, il est important que l’un des intervenants soit désignéomme coordonnateur des soins afin de garantir la cohé-ence du projet thérapeutique. Des contacts réguliers entrees intervenants permettent l’ajustement de ce projet deoins de manière individualisée, en fonction de l’évolutionu patient. Le suivi des paramètres physiques (courbe deoids, de croissance, retentissement somatique et biolo-ique) est fondamental afin de détecter les complicationsventuelles de l’anorexie et d’en suivre l’évolution.

Des consultations avec un nutritionniste ou un diététicieneuvent constituer un élément complémentaire du projethérapeutique, ainsi que la proposition de consultations spé-ialisées auprès d’un gynécologue ou d’un endocrinologue.

Un suivi dentaire régulier est également important afine dépister certaines complications et de prodiguer desonseils d’hygiene buccodentaire relatifs aux troubles duatient.

rise en compte des parentsa nécessité de l’implication des parents à tous les momentse la prise en charge doit également être soulignée. Leomportement s’inscrit dans un contexte familial et rela-ionnel et induit également en lui-même des modificationses équilibres intrafamiliaux et une souffrance, qu’il estmportant de prendre en considération aux différents tempse l’évolution du trouble. Cette collaboration prend auinimum la forme d’entretiens conjoints avec l’adolescent

t ses parents [19,56,57]. Ce travail doit, quand cela estossible, être poursuivi et complété par une thérapie fami-iale d’inspiration systémique ou psychanalytique. Cettepproche familiale a pour objectifs de permettre au patientt à la famille de ne plus se polariser sur le symptôme ano-

exique, d’assouplir des modalités de communication rigidest répétitives, de faciliter la restauration d’une identitéropre et de limites plus différenciées et satisfaisantes entrees différents membres de la famille, permettre à la fratriee s’exprimer sur les difficultés partagées. Ces thérapies
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amiliales sont particulièrement indiquées chez les patientsdolescents. II s’agit du traitement le plus évalué en termes’efficacité dans l’AM [55].

Les groupes de parents trouvent également une indi-ation particulière dans la prise en charge de patientsnorexiques. La mise en perspective et en commun desxpériences et des difficultés rencontrées par les parentsvec l’adolescent autorise la verbalisation des inquiétudesuscitées par la conduite, l’élaboration de la culpabilité eteur reprise dans le groupe sous le regard d’un tiers (psycho-ogue, psychiatre) qui n’est pas directement impliqué dansa prise en charge de leur enfant [18].

lace des psychothérapiesl’adolescence, la thérapie familiale s’avère plus perfor-ante que la thérapie individuelle [56]. Cette dernière

e doit être proposée qu’en seconde intention derrière lahérapie familiale, dans des cas précis, quand la thérapieamiliale n’est pas possible ou quand on l’adjoint à cetteernière si le sujet est demandeur, et en capacité de s’ympliquer. Elle n’est jamais une priorité chez les sujets trèsénutris.

Les thérapies individuelles, très souvent employées, sontariables dans leurs modalités, reposant sur des prérequishéoriques extrêmement variés, rendant toute comparaisone leur efficacité difficile. Leur choix et leurs indicationseposent rarement sur des bases rationnelles mais davan-age sur la motivation et les attentes du patient et de laamille, la formation initiale du thérapeute et les ressourcesocales.

Les médiations artistiques de type ergothérapie, les acti-ités sociales, de jeux, de relaxation au sein de groupese paris peuvent être intéressantes, afin de faciliter

es échanges avec autrui, d’échanger autour d’un thèmeommun, de retrouver le plaisir de relations interperson-elles et d’entrer en contact avec ses éprouvés corporels ene décentrant des préoccupations obsédantes concernant laourriture.

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Tableau 7 Critères de gravité somatique faisant poser l’indic

Signes cliniques

Perte de poids rapide, supérieure à 30 % du poids totalIMC inférieur à 13Fréquence cardiaque inférieure à 40/min ou supérieure

à 100/minDouleurs rétrosternales, palpitations, troubles du

rythme ou de la conduction cardiaqueHypothermie inférieure à 36 ◦CAphagie totalePathologie œsophagienneSyndrome d’occlusion hauteÉpuisement physiqueRalentissement du débit verbal et idéiqueConvulsions (possible œdème cérébral par

hyponatrémie de dilution)

IMC : indice de masse corporelle ; K : potassium ; Na : sodium ; Mg : mag

N. Godart et al.

lace des psychotropeses psychotropes occupent une place marginale dans la prisen charge de ces patients et constituent un traitementymptomatique de certaines manifestations psychiatriquesssociées. Aucun type de psychotrope n’a fait la preuve deon efficacité pour traiter l’AM elle-même, d’autant que peu’études ont été conduites sur des populations adolescentes58].

Les médicaments psychotropes n’ont d’intérêt qu’enraitement d’appoint [59] lors de troubles anxieux, derouble obsessionnel compulsif, ou de trouble dépressifaracterisé et persistant après renutrition. De fait, la majo-ité des symptômes dépressifs et anxieux disparaissent lorse la renutrition, et la prescription d’une chimiothérapie’est pas sans comporter le risque d’effets secondaires etst d’une inefficacité relative chez des patients très dénu-ris, dans un état somatique précaire. Les antidépresseursricycliques notamment sont à proscrire du fait de la gra-ité des effets secondaires éventuels en cas de dénutritionu d’hypokaliémie et en raison de la létalité potentielle enas d’ingestion médicamenteuse volontaire.

Un traitement par benzodiazépines ou neuroleptiquesnxiolytiques à très faibles doses peut être proposé sur deourtes durées en cas d’anxiété importante. Les troublesu sommeil, souvent observés, cèdent également le plusouvent lors de la renutrition et nécessitent rarement larescription d’hypnotiques.

L’intérêt croissant pour les neuroleptiques atypiques, lespioïdes, et les antivomitifs dans le traitement de l’AM, nee concoit actuellement que dans un cadre de recherche, ouans des cas exceptionnels par des équipes spécialisées.

ospitalisations dans l’AM

’hospitalisation tient une place limitée dans le panel desoins proposés aux patients atteints d’anorexie mentale etlle se décide en coordonnant les avis des différents interve-ants de la prise en charge ambulatoire. Elle signe souventa gravité du tableau clinique.

ation d’une hospitalisation en urgence.

Signes paracliniques

K < 2,5 mmol/l lié aux conduites de purgeNa < 125 mmol/lMg < 0,5 mmol/l

P < 0,5 mmol/l

Glycémie < 2,5 mmol/lLeucopénie < 2000/mm3

Thrombopénie < 10 0000/mm3

Insuffisance rénale fonctionnelleBilan hépatique perturbé

nésium ; P : phosphore.

Page 18: Anorexie mentale à l’adolescence

Anorexie mentale à l’adolescence 47

Tableau 8 Syndrome de renutrition dans le traitement de l’anorexie mentale (d’après Melchior JC, 2008[61]).

Manifestations cliniques Manifestations biologiques Traitement préventif en cas dedénutrition sévère

Œdème des membres inférieurs Surcharge hydrosodée etperturbationshydroélectrolytiques

Renutrition par voie entéralepréférable si IMC < 13

Apports en sodium minimumInsuffisance cardiaque, arythmie,

altération de la fonction myocardiqueHypophosphorémie aiguë Supplémentation en phosphore :

par voie parentéraleConfusion, coma, paralysie des nerfs

crâniens, pseudosyndrome de Guillainet Barré, paresthésies, rhabdomyolyse,convulsions

Si P < 0,6 mmol/l, interrompre lanutrition entérale le temps denormaliser la phosphorémie

Insuffisance respiratoire aiguë Apport énergétique progressif :10 à 15 kcal/kg/j, max. :500 kcal/j

Ostéomalacie Apport de protéine < 2 à2,5 g/kg/j, adapté à la fonctionrénale

Anémie hémolytique, altérations de lalignée blanche

Au maximum : défaillance multiviscéraleAtteintes neurologiques Carence en thiamine Apport de glucose<1,5 à 2 g/kg/j

les 3 premiers joursAtteintes cardiaques Supplémentation en thiamine

par voie intraveineuse

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IMC : indice de masse corporelle ; P : phosphore.

Elle ne doit pas être brandie comme une menace, aurisque d’être ensuite vécue comme un échec par le patientet sa famille, mais comme une étape parfois nécessaire.II est en effet important de travailler l’alliance thérapeu-tique avec les sujets, ce qui passe souvent dans un premiertemps par une alliance avec les parents, les anorexiquesétant fréquemment dans la banalisation, voire le déni, deleur trouble. Ils peuvent cependant être sensibles à certainssymptômes liés à la dénutrition tels que les difficultés deconcentration, l’irritabilité et la dégradation des relationsfamiliales et amicales qui en résulte, la baisse de densitéosseuse, la perte des cheveux ou la sensation persistante defroid [54,60].

Hospitalisation en urgencePour ce qui est des hospitalisations en urgence, les indica-tions sont largement dominées par les urgences somatiquesnécessitant une prise en charge dans un service de soinssomatiques, voire de réanimation (Tableau 7).

Ces situations d’urgence somatique peuvent être traitéesen quelques heures dans un service d’urgence (rééquili-bration des perturbations hydroélectrolytiques). Si l’étatsomatique est trop sévère, ou si les consultations auxurgences se répètent (par exemple devant une apha-

gie totale), une hospitalisation est necessaire. Si unerenutrition doit être mise en place, elle doit être progres-sive, afin d’éviter le syndrome de renutrition inapproprié(Tableau 8), par voie entérale à l’aide d’une sonde nasogas-trique.

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Les patients peuvent également présenter une détressesychologique nécessitant une hospitalisation en urgenceans un service de psychiatrie du fait des troubles psy-hiatriques associés à l’AM. II est notamment important’évaluer le risque suicidaire chez ces adolescents, leisque suicidaire étant nettement plus élevé qu’en popu-ation générale, surtout lorsqu’il existe des symptômesoulimiques ou des conduites de purge associées aux symp-ômes boulimiques. Dans ces derniers cas, un tableaulinique avec une multiplication des conduites impulsiveseut se développer (scarifications, alcoolisations, état deal boulimique. . .) : une hospitalisation courte peut alorsermettre un apaisement.

POINT FORT

Les soins doivent être précoces, afin d’améliorer lepronostic. Ils doivent être multidisciplinaires, associantune prise en charge somatique, psychique, sociale etfamiliale sur le long terme.

’hospitalisation programmée

’hospitalisation peut être mise en place de manière pro-rammée lorsqu’il y a eu une perte de poids importanteIMC inférieur à 14) et que le patient n’arrive pas àeprendre du poids en ambulatoire, ou lorsque le poids,ans être extrêmement bas, stagne et maintient le sujet
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un stade pathologique, provoquant une chronicisation desroubles.

L’hospitalisation est alors plus longue (de plusieursemaines à plusieurs mois), et elle a pour but d’aider leatient à retrouver un poids normal et à sortir d’un état degel psychique » provoqué par l’état de dénutrition chro-ique. L’hospitalisation peut se faire dans un service deoins somatiques ou dans un service psychiatrique : idéale-ent, le choix se fait en fonction de la gravité du tableau

omatique ou de la gravité des troubles psychiatriques asso-iés, mais en pratique il dépend principalement de l’offre deoins proposée au niveau locorégional [56]. Nous plaidons,ans les cas graves et si cela est possible dans tous les cas,our une prise en charge en milieu psychiatrique specialiséans les TCA [14]. Quoi qu’il en soit, les deux approchesoivent être présentés simultanement et en lien, du fait de’intrication somatopsychique de l’AM. En effet, le retour

un poids normal a souvent un impact sur la souffrancesychologique, notamment les symptômes dépressifs etnxieux : ces symptômes peuvent s’améliorer avec la reprisee poids, ou à l’inverse apparaître avec l’abandon desymptômes alimentaires lorsque ceux-ci assurent une fonc-ion de lutte contre l’effondrement dépressif. Par ailleurs,’amélioration psychologique, qui ne s’accompagne pas dehangement dans les habitudes alimentaires et le poids,st souvent précaire [54]. L’hospitalisation programmée desatients anorexiques permet la mise en place d’un contrate soins variable d’une équipe à l’autre, très souvent avecn contrat de poids ou un contrat comportemental cen-ré sur les difficultés alimentaires. La nature du contratiffère selon les équipes. II inclut ou non une périodee séparation d’avec le milieu de vie habituel, permet-ant au sujet de se retrouver lui-même, puis de retrouveres autres autrement, sans que les symptômes anorexiquesoient au centre de la relation et finalement empêchentout échange en amenant un appauvrissement considéra-le de la vie relationnelle [2]. Pour ce faire, la période deéparation ne doit en aucun cas etre un isolement (adoles-ent isolé dans sa chambre, sans échange avec les autresatients ni avec les soignants), qui s’avérerait être toxiqueu traumatique. Les soins sont axés sur les médiationshérapeutiques, corporelles ou culturelles, (ergothérapie,rthérapie, approches corporelles diverses telles que lesassages, la balneothérapie, la relaxation, la psychomotri-

ité).Enfin, le travail avec les adolescents anorexiques hos-

italisés doit impliquer largement les parents (entretiensamiliaux réguliers, participation des parents à des groupese parole, voire thérapie familiale). De nombreuses étudesontrent que le travail avec les families, dans la prise en

harge des anorexiques, est efficace chez les adolescents60]. II permet d’aborder la violence liée au TCA, le sen-iment de culpabilité des parents, toujours présent maisarfois dénie, l’incomprehension et parfois le rejet de laratrie vis-à-vis d’une pathologie complexe et difficile àomprendre.

onclusion

’AM à l’adolescence témoigne d’une souffrance psychiquee gravité variable. Elle peut gravement hypothéquer la

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N. Godart et al.

anté physique et psychique des sujets à l’âge adulte,insi que leur insertion sociale. Leur croissance peuttre compromise, mais peuvent aussi perdurer, au-delàe la guérison, des conséquences sur le squelette à type’ostéoporose et des conséquences dentaires. Des troublessychiatriques y sont fréquemment associés. C’est pourquoille impose des soins multidisciplinaires. Par ailleurs, l’AM,ême si elle guérit dans la majorité des cas en moins de

inq ans, peut se chroniciser et perdurer à l’âge adulte ete compliquer alors de divers troubles, dont l’infertilité.

Le traitement des anorexiques en ambulatoire, commeans le cadre de l’hospitalisation, doit donc privilégierne approche pluridisciplinaire somatique, psychologiquet sociale, afin d’accompagner au mieux les patients versa guerison, dont on sait qu’elle peut nécessiter plusieursnnées de suivi. Le suivi doit durer pendant la maladie eterdurer une année au-delà au minimum [7].

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