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bakchich N° 14  TER | INFORMATIONS, ENQUÊTES ET MAUVAIS ESPRIT | Besson, un converti en vaut deux | P. 3 BAKCHICH HEBDO N°14 TER | DU SAMEDI 6 FÉVRIER AU VENDREDI 12 FÉVIER 2010 | WWW.BAKCHICH.INFO | BAKCHICH HEBDO INFORMATIONS, ENQUÊTES ET MAUVAIS ESPRIT paris en ligne, l’OM drOit au butin | P. 9 nouvelle formule bakchich info www. Au bord de la noyade sur l’île de Beauté, le clan UMP attend des bouées du Président. Qui y a tant investi. medef, Parisot la sortie ! | P. 5 Barack Obama, plus populiste que populo | P. 8

Bakchich N°14

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Bakchich N°14

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Page 1: Bakchich N°14

bakchichN° 14 ter | informations, enquêtes et mauvais esprit |

Besson, un converti en vaut deux | P. 3

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Au bord de la noyade sur l’île de Beauté, le clan UMP attend

des bouées du Président. Qui y a tant investi.

medef, Parisot la sortie ! | P. 5

Barack Obama, plus populiste

que populo | P. 8

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U ne véritable fièvre législative s’est emparée de la majorité UMP à la veille des élections

régionales. Ainsi, sur le port du foulard pen-dant les manifestations, sujet évi-demment d’intérêt majeur, le gou-vernement est en train d’adopter parallèlement deux textes, pas moins. Le premier est examiné en ce moment par le Conseil d’État, le second est présenté devant le Par-lement. Le Conseil d’État vient d’être en effet saisi par plusieurs associations contre un article du code pénal qui prévoit de punir d’une amende de cinquième classe le fait de dissimu-ler son visage aux abords d’une manifestation sur la voie publique. L’application de ce décret promet d’être très difficile. Le même texte indique que ces dispositions ne sont pas applicables lorsque la dis-simulation du visage est « justifiée par un motif  légitime ». Est-il par exemple légitime de se protéger le visage des gaz lacrymogènes lors-que l’on passe aux abords d’une manifestation ? N’a-t-on plus le droit de porter un masque pendant un carnaval ? Dans le même temps, une proposition de loi, déposée par Christian Estrosi, alors député, a été adoptée par l’Assemblée nationale. Ce texte crée une circonstance aggra-vante pour « dissimulation volontaire de  tout  ou  partie  du  visage  afin d’échapper à toute identification ». Sans nuances, le texte est sensible-ment différent de celui qu’examinent les juges administratifs. Beaucoup de bruit législatif pour pas grand-chose ✹ NiCoLAS BEAU

Avez-vous jamais compris un seul instant les règles du cricket ? Bien sûr que

non. L’affaire Clearstream, c’est la même chose. Même si l’on n’y comprend rien, l’affiche divise et fait parler. Ce procès, qui pour la plupart, reste du chinois, n’est qu’un manomètre mesurant la force des coups échangés, dans le bas-ventre de la politique.Ce procès, puisque politique, est le dernier acte stalinien d’une histoire glacée que l’on croyait morte. Les croche-pieds de Ger-gorin et Villepin relèvent de la paire de claque et non de la cor-rectionnelle. Dans les salles de rédaction on parle d’une affaire de « cornecul ». Le président de la République ayant destiné les « coupables » au « croc de bou-cher », des magistrats empres-sés, lâchant soudain leurs dos-siers sérieux, face au billot se sont frénétiquement mis au boulot. Dommage que dans cette ur-gence d’État, ces magistrats instructeurs n’aient pas remar-

qué les marionnettistes cachés dans un cabinet noir. Vu, par exemple, que des noms, cloqués par Lahoud dans les listings, étaient les mêmes que ceux re-trouvés dans les carnets d’Yves Bertrand, ancien patron des RG. Celui qui, avec Philippe Mas-soni son co-turne, partageait un rôle de Beria en peau de lapin à la cour de Chirac…Juges indépendants qui re-laxent Villepin mais assassinent Gergorin et Lahoud, avec une force jamais vue au palais, sauf dans le cas de « Pascale », la prostituée de Toulouse ayant affublé Dominique Baudis d’un profil de partouzeur assassin.S’étant fait peur dans le blan-chiment de l’ancien Premier ministre, le tribunal cogne donc à la batte sur les lampistes. Et cher, puisque 700 000 euros tom-bent dans les comptes des diffa-més. Il n’y a que sous Mit-terrand que des juges ont condamné au prix aussi fort, l’impétrant étant Jean-Édern Hallier. Ce qui nous ramène aux procès politiques ✹

simple comme du cricket

la rédaction

ôte ta bUrqa-goUle

le héros de la semaineGourbangouly Berdymoukhamedov, le dictateur du Turkménistan, a été reçu par Sarkozy et sa clique pour signer de lucratifs contrats. Les rares journalistes accrédités n’ont pas pu poser la moindre question, notamment sur le départ de Médecins sans frontières du pays le mois dernier. Chapeau donc à « Gour-gour » pour sa discrétion et au French Doctor pour son amnésie. N’oublions pas Sarko qui, la semaine dernière, faisait son speech sur le capitalisme moral…

le muet de la semaineUne bonne partie du gouvernement s’est répandue dans les médias dès le verdict de l’affaire Clearstream. Mais pas son chef, qui a attendu une semaine Le silence du Premier ministre François Fillon a, semble-t-il, énervé Sarkozy qui pourrait y voir une nouvelle marque d’indépendance voire de défiance de celui qui grimpe dans les sondages. Tous derrière, mais lui devant.

le fayot de la semaineLe député-maire du Raincy, Éric Raoult, boude la campagne de sa collègue Valérie Pécresse en Seine-Saint-Denis pour une histoire de parachutage. « Je suis prêt à mourir pour Sarkozy, mais pas pour Pécresse ! », a-t-il lancé. Rien que ça… En désaccord avec Jean-François Copé sur l’interdiction du voile inté-gral, il s’en était également pris au rival de Sarkozy : « Moi, mon patron c’est Sarko, ce n’est pas Copé ! » Na ! ✹

Ça commence comme un conte de fées. Emma-nuelle Béart, « grâce à sa mère qui a fondé l’as-sociation Réflexe 

Solidarité, baigne dans l’aven-ture humanitaire depuis sa plus tendre enfance ». Wikipédia, qui se trompe parfois, le dit. Mais là, point.Devant les caméras, l’actrice ef-frontée mouille sa chemise. Elle est de tous les combats. Elle « ap-pelle à davantage de solidarité » sur TF1 au moment du Sidac-tion. Pour défendre les mal lo-gés : « Il est révoltant de découvrir que l’argent public, c’est-à-dire nos  impôts,  sert à  enrichir des Thénardier du monde moderne ».Sauf que… Sauf que notre amie est domiciliée en Belgique et ne paie plus d’impôts en France. C’est le Nouvel Obser-

vateur qui l’affirme dans son édition du 27 janvier.

expatriée fiscaleCe qui ne l’empêche pas de goû-ter aux cachets subventionnés par les contribuables français. L’Express du 21 janvier invite ses lecteurs à admirer la pul-peuse jouer dans Les Justes de Camus (ça ne s’invente pas), au Théâtre national de Bretagne, puis à la Colline, à Paris. Vive la République ! Elle n’est pas avare de l’argent de ses citoyens. Gé-néreuse, elle soutient des artis-tes qui refusent d’acquitter leurs impôts en France. Peut-être que certains contribuables iront manifester devant ces deux théâtres pour rappeler que la solidarité n’est pas qu’un outil d’autopromotion, c’est aussi un effort du porte-mon-naie ✹� BERTRAND RoThÉ

En vue des élections, la vie po-litique est verglacée, gare aux dérapages. Surtout quand on donne des coups de volant, à droite et à gauche : quand il y a du tangage dans l’idéologie, on voit partout de grosses conne-ries dans les petites phrases. Certaines, vite oubliées, sont habilement stockées puis res-sorties au bon moment : ainsi ce citoyen qui fête l’anniver-saire de Sarko en brandissant, sur un panneau, l’impérissable « casse-toi,  pauv’  con ! » ou la frêcherie archivée pendant un mois par un hebdo jusqu’à la

veille de la campagne électo-rale.Mais il n’est pas certain que les pires chauffards aillent au fossé à force de déraper : les horreurs de Le Pen ont eu peu d’effet sur ses scores, on continue à parler couramment de « racaille » (voire de « caillera »), et les net-toyeurs à haute pression n’ont pas changé de marque. L’ennui, avec les dérapages, c’est qu’on peut en entendre des tonnes chaque jour au bistrot, au bou-lot, dans la rue, et en plus, per-sonne ne les remarque. Ces vannes ne sont calamiteu-ses que dans la bouche des po-litiques : bien fait pour eux, quand on est sur l’estrade, on se surveille, mon bon ! Sinon, la presse, la Licra, Lefebvre, Em-

manuelli, tous les champions du bon goût te voleront dans les plumes et tu n’auras plus qu’à « rétropédaler ». Rappelons qu’en rétropédalant, on ne recule jamais, on freine – et encore ! – si le vélo est hol-landais.Au fait, les grands amateurs de ce verbe imagé ont-ils réalisé qu’on pouvait, avec quelque mauvais esprit, lui trouver des consonnances homophobes ? Il y a deux lustres, ce sont les mêmes rhéteurs de presse qui, à propos de la reine d’Angle-terre, parlaient non sans élé-gance d’annus horribilis. Et quand on sort trois numéros « spécial  francs-maçons » par an, cela sent-il bon ? ✹

JACqUES GAiLLARD

MoT PoUR MoT

“ „Le gentilhomme Arnaud Montebourg, sur Public Sénat, le 2 février,

en réponse à Georges Frêche qui a menacé de « porter plainte » contre le PS.

qu’il y aille, on l’attendra avec nos témoins sur le pré à l’aube !béart, des jUstes à l’avare

2�|�apéro

bakchich hebdo | SAMEDi 6 FÉVRiER 2010

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Besson trébuche dans le tapis de prière

schizo Éric Besson est bien embêté. D’un côté, il se démène avec son débat sur l’iden-tité nationale, de l’autre, il promet à sa future belle-famille de se convertir à l’islam…

L e chantre de l’identité nationale, Éric Besson, n’ est pas à la noce. En lançant son débat sur

l’identité nationale, le ministre a provoqué de multiples dérapages anti-islam et anti-immigrés. D’après certains sondages, une moitié des Français, veut-on croire, pensent que la pratique de la religion musulmane est incom-patible avec la vie en société.

Diable ! Voici Besson en bien mauvaise posture, lui qui est tombé raide amoureux, cet été, d’une jeune étudiante tunisienne, Yasmine Tordjman. Et qui a pro-mis à la belle famille de se convertir à l’islam. Tout cela fait un peu désordre.

(d)ébats franco-tunisiensÀ Paris, le ministre déchaîne des flots de xénophobie; à Tunis,

l’amoureux transi se dit prêt à une conversion aussi soudaine qu’inattendue. À l’origine de cet imbroglio po-litico-sentimental, le produc-teur Tarek Ben Ammar. Neveu de Wassila Bourguiba, l’épouse de l’ex-président tunisien, cet homme de l’art, avait vu sa cote s’effondrer auprès de Ben Ali et de son épouse Leila lorsqu’il leur avait conseillé des place-ments à la Banque Medici à Vienne (Autriche). Laquelle plaça le magot chez le financier Madoff, dont la faillite fut reten-tissante. Pour se remettre en selle, Tarek Ben Ammar avait cru bon d’inviter Éric Besson, devenu provisoirement l’un des chouchous de l’Élysée, et l’avait

sompteusement logé dans une villa du quartier Marsacube, à Lamarsa.

C’est là, à la hauteur de la ré-sidence de l’ambassadeur français, que la jet-set fran-co-tunisienne prend ses quartiers d’été. Hélas, les amours entre la jeune Yas-mine et le bel Éric n’ont pas eu l’air de plaire à Nabila, la grand-mère de la petite et fille de Wassila Bourguiba.

Avant Noël, Besson dut faire un voyage éclair en Tunisie, cal-mer grand-maman et s’engager à se convertir avant les noces en juin prochain. L’identité natio-nale, version Besson, tourne à la farce !✹� n. B.

Lellouche est nostalgiqueLe secrétaire d’État aux affaires euro-péennes Pierre Lellouche, quand il doit batailler contre la bureaucratie de la Commission européenne, est parfois nostalgique… de l’Afghanistan. non de la guerre, encore qu’on peut, dit-il, « faire un travail militaire pro-pre », mais des paysages et des colli-nes de la Kapisa. « Je pense tous  les jours aux soldats  là-bas » confie-t-il. Kaboul, capitale des cerveaux lents.

Léotard écrit encoreL’ancien ministre François Léotard n’avait pas publié de livre depuis Ça va mal finir, qui s’attaquait violem-ment à la présidence de nicolas Sarkozy.Cette fois, l’ex-ministre de la Défense donne dans le roman avec La nuit de Kahina (Grasset). Il s’agit de l’histoire de deux hommes qui tombent amou-reux de la même femme, en Algérie, dans les années 50. Interrogation de l’éditeur : « Est-ce un adieu à la Fran-ce qui  s’en va ? Ou un adieu à  l’hé-roïsme ? »

La solitude de JoxeDans Cas de conscience, Pierre Joxe écrit qu’il s’est trouvé « minoritaire et souvent  tristement  solitaire » au Conseil constitutionnel. Il épargne pourtant le « libéral » Jean-louis De-bré et s’en prend surtout à ses prédé-cesseurs à la présidence du Conseil, les gaullistes Yves Guéna et Pierre Mazeaud, qu’il qualifie de « réaction-naires ».

Villiers, terreur du bocageLe ralliement de Philippe de Villiers à l’UMP suite à la débâcle de son MPF aux européennes horrifie les républi-cains de droite qui ne veulent pas se mêler au sang bleu du vicomte. Sté-phane Frimaudeau, ex-UMP et ancien de l’UnI, chef de file du mouvement Pour une Vendée républicaine (on a le droit de rêver), affichera sa bobine sur la liste emmenée par le PS. C’est ça la gauche UnI ?

besson drague le fnMalgré l’échec de son débat sur l’identité nationale, Éric Besson est persuadé qu’il va sauver Sarkozy d’un désastre aux régionales en séduisant les électeurs du Fn. Dans ce sens, les services du ministère de l’Immigration sont mobilisés, depuis quelques jours, par un projet de loi sur l’immigration. Du genre… répressif !

nucléaire, échec après échecL’Élysée et le gouvernement cherchent un coupable à l’échec essuyé à Abu Dhabi qui a préféré la Corée du Sud à la France pour un gros contrat nu-cléaire. Anne Lauvergeon et son arro-gance pour les uns, Gadonneix, pa-tron de GDF Suez, et son désintérêt pour cette région du monde, pour les autres.Il faut faire fissa. Plusieurs délégations étrangères, dont celle du Koweit, ont débarqué dans le Golfe pour compren-dre la défaite française. Pas sûr que les réponses tricolores soient adap-tées ✹

SCooP toUJoUrS

terreUr

ci-gît oussama ben Laden

c omment briller en parlant d’Al-Qaida dans les dîners mondains sans faire café du commerce ? Dites : « Al-Qaida est morte ». Très tendance.

Car l’acte de décès de l’organisation d’Oussama Ben Laden est une chose entendue dans les milieux uni-versitaires, notamment américains et aujourd’hui français, qui travaillent sur le cadavre. Il est même daté sur son épitaphe : selon Alain

Chouet, chef du renseignement de sécurité de la DGSE de 2000 à 2002, invité avec d’autres experts à procéder à l’autopsie dans les entrailles du Sénat le 29 janvier dernier, Al-Qaida a agonisé, jus-

qu’à rendre l’âme, quelque part « entre  2002  à  2004 ». Autrement dit, après la campagne militaire inter-nationale menée par les

États-Unis en Afghanistan au lendemain des attentats du

11 septembre 2001, « dans  les 

trous à rats de Tora Bora », et la guerre « préventi-ve » en Irak lancée en 2003.Mais, reconnaît Alain Chouet, Al-Qaida a de beaux restes. La faute aux occidentaux qui, avant le der-nier râle de l’organisation, l’ont « engrossée de leurs erreurs » en la surdimensionnant, avec la complicité bienveillante de certains régimes musulmans, pour

qui cette lutte s’est vite confondue avec la chasse aux opposants. Les rejetons nés de cette union contre-nature, groupes franchisés ou loups solitaires, n’ont dès lors plus qu’à se voir attribuer le label par quelques figures médiatiques de

la nébuleuse, pour entretenir le mythe d’une hydre « qualifiée d’hyper-terroriste parce qu’elle s’est atta-quée à l’hyper-puissance ». Bref, pour tuer Al-Qaida, il faut d’abord la déclarer morte. Sûr qu’il y a encore du chemin : la réaction de l’administration Obama après la tentative d’at-tentat à Noël sur le vol Amsterdam-Detroit a été aussi démesurée que si l’attentat avait réussi.En attendant, Oussama Ben Laden se frotte la bar-be, sans doute mort… de rire ✹� Anne GIUDICeLLI

SoLDAteSqUe

L es forces spéciales « sont à la mode », selon la formule du chef d’état-major des armées

Jean-Louis Georgelin. Dès qu’un problème surgit à Kaboul, Gros-ny ou en mer Rouge, il convient de dégainer ses forces spéciales : SAS, Bérets verts, Spetsnaz, qu’importe le flacon pourvu qu’on ait sa troupe d’élite, incontournable signe extérieur de richesse.Pourquoi cet engoue-ment ? C’est l’une des questions à laquelle no-tre confrère Jean-Domi-nique Merchet, fin connaisseur de la chose militaire répond dans cette Histoire des forces spéciales*. Des comman-dos dont la modernité renvoie en réalité à la guerre primitive, celle où un pe-tit groupe parvient se glisser « comme des serpents à l’intérieur du territoire de l’adversaire ».Du cheval de Troie aux bandes nocturnes menées par Du Gues-clin, l’Histoire retient que les forces spéciales modernes sont nées avec les SAS au lendemain du désastre de Dunkerque, alors même que l’armée britannique est exsangue. Précisément, le souci de Sa Majesté est de frap-

per – fort – les esprits avec le peu de moyens qui restent !Souci voisin, lorsque Paris dépê-che les commandos du COS tra-quer le taliban : c’est spectacu-laire et moins coûteux que d’y déployer un régiment de nos pré-cieux chars Leclerc.Question efficacité, le débat fait

rage depuis la guerre du feu entre ceux partisans d e r e g r o u p e r l e s meilleurs au sein de trou-pes de choc et ceux qui estiment qu’à terme cet-te ponction des « élites » affaiblit le niveau géné-ral d’une armée, laquel-le apprend très vite à se reposer sur ses « spécia-listes ». Ainsi, de la dé-convenue récente d’une

armée israélienne – truffée de commandos – mais dans l’épreu-ve face au Hezbollah.Des Balkans à Mogadiscio, du 11e Choc à l’intervention du COS pour sauver le régime tchadien en 2008, une certitude, le récit de Merchet captive un lecteur qui n’a nul besoin d’être un « fana-mili » pour se laisser mener sur les sentes d’une guerre le plus souvent secrète ✹ ÉrIC LAFFItte *éditions Jacob-Duvernet

L’armée n’a pLus de secret

al-Qaida est peut-être morte, mais elle a de beaux restes…

a Éric Besson, le mutant.

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SAMeDI 6 FÉVrIer 2010 | bakchich hebdo

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coucous

P our ses dix ans, le groupe EADS s’est offert un nu-méro spécial de sa revue

interne, baptisée The Step Beyond. Le marchand d’armes européen y célèbre ses réussites, dont son avion de chasse, l’Euro-fighter, « qui réunit les meilleurs concepts de l’industrie aéronauti-que », et qui est « un succès à l’ex-portation ». Perfide pour le Ra-fale, que Dassault tente, en vain, de vendre à d’autres clients que l’armée française.

dassault dans les choux« Baptisé Typhoon pour l’expor-tation, l’Eurofighter est l’avion de combat le plus vendu au monde », claironne son concepteur. Et la revue d’enfoncer le clou en pré-cisant qu’« il ne trouve plus seu-lement acquéreur dans les pays qui l’ont conçu, mais aussi à l’étranger, notamment en Autriche et en Arabie Saou-dite ». L’Eurofighter ? « Un avion fan-tastique », s’exclame un colo-nel espagnol. « Toujours à la hauteur de nos atten-tes », renchérit le minis-tre de la Défense autrichien. Une success-story qui n’est pas près de s’arrêter. Selon EADS, l’In-de serait en effet tentée d’acheter 126 Eurofighters pour dix milliards de dollars. Une commande en ra-fale, en somme. On es-père que Dassault saura se procurer le canard offi-ciel de son concurrent, où est livré le secret tout bête

pour fabriquer des zincs qui se vendent. Il suffit de faire un pro-duit « rapide, performant et facile d’entretien ». Fallait y penser !Surprise, dans son article de cinq pages où il passe en revue les réa-lisations de son groupe cette der-nière décennie, le PDG Louis Gallois ne dit pas un mot de l’Eurofighter. Motus ! Sans doute un excès d’égard de Gallois vis-à-vis de l’État français, actionnaire d’EADS mais aussi coproprié-taire malheureux de Dassault. Mais l’essentiel, c’est qu’on a compris le message. S’il veut ren-trer de l’étranger auréolé de suc-cès commerciaux, Sarkozy ferait mieux de jouer les VRP pour l’Eurofighter plutôt que pour le Rafale franco-français ✹ émile borne

l’hélico d’eads en Rafale

algérie

bouteflika subit l’état des généRaux

l a cohabitation vacille entre le président Bouteflika et les militaires de la Direction du

renseignement et de la sécurité (DRS, ex-Sécurité militaire). Et les couteaux sont sortis. Hélas pour Boutef, les fins limiers du DRS ont tiré les premiers.

l’aRmée se RebiffeEn janvier, un séisme a se-coué le pouvoir algérien. La destitution et la mise sous contrôle judiciaire de Mohamed Meziane, président de la Sona-trach, et de quatre vice-présidents de la société, sont sans précédent. En Algé-rie, les hydrocar-bures sont un véritable État d a n s l ’ É t a t (120 000 salariés, 98 % des exporta-tions, 60 % des recettes budgétai-res). Personne ne songeait, jus-qu’à aujourd’hui, à intervenir dans ce sanctuaire pétrolier. Pas même les barbus, pendant la dé-cennie noire.À travers le président de la Sona-trach, c’est le ministre du Pétro-le, proche de Bouteflika, Chakib Khelil, qui est désormais dans le

collimateur. À la manœuvre contre Khelil, se trouve le puis-sant général Mediene, surnommé « Toufik », le chef du DRS depuis 1990 (!) et véritable patron de l’Al-gérie. C’est sa troupe qui a dé-clenché l’enquête judiciaire contre le président de la Sona-trach. Le général Mediene avait

pourtant soutenu Boutef aux présidentielles de 1999, 2004

et 2009. Un soutien déci-sif. Alors pourquoi

cette déclaration de guerre et pourquoi

aujourd’hui ? Ces derniers temps, Boutef a franchi une double ligne jaune. D’abord, le chef de l’État a mis

en avant son frère Said, conseiller à la Présidence,

comme un succes-seur possible. « C’était

oublier, commente un di-plomate français, qui l’a

fait Roi ». Deuxième souci, le pré-sident algérien a multiplié depuis l’automne les déclarations fra-cassantes contre la corruption, notamment pour « les postes à responsabilité sensible ». Le genre de déclarations que les militaires algériens n’aiment guère. La ré-ponse n’a pas tardé. Le DRS, via

des enquêtes ciblées, s’en prend à des amis de la Présidence. Longtemps, le ministre des Hy-drocarbures aura été intoucha-ble. En effet, Khelil entretenait les meilleures relations avec l’ad-ministration Bush, et notamment Dick Cheney. Avec l’arrivée d’Obama, tout a changé. La secré-taire d’État américaine, Hillary Clinton, n’a-t-elle pas déclaré que les remugles au sein de la Sona-trach étaient « une affaire pure-ment algérienne » ?

falcone, le RetouRD’autres affaires agitent le mi-crocosme algérois. Ainsi le dos-sier de l’autoroute est-ouest. Où l’on voit Pierre Falcone, empri-sonné en France dans l’affaire de l’Angolagate, se faire l’intermé-diaire d’une société chinoise auprès du ministre des Affaires étrangères algérien, un ancien de l’Unesco comme lui, Mohamed Bejaoui. Tandis qu’à Paris, un certain «Sacha», fidèle agent du même Falcone, a désormais dis-paru. Et où l’on découvre plu-sieurs militaires rackettant les Chinois, jusqu’à ce que ces der-niers balancent tout sur la place publique.À côté d’Alger, les luttes Sarko-Villepin paraissent bien fades ✹� nicolas beau

Qui a eu l’idée de publier un guide pour bien s’injecter de l’héroïne ?

a) la cycliste Jeannie longo révélant les vrais secrets de sa longévité.b) le maire de new York, bloomberg, pour éviter que les maladies des toxicomanes plombent le budget de la ville.c) la ministre de la santé roselyne bachelot afin de se débarrasser des seringues commandées pour la grippe a.

réponse : b. Depuis janvier, une brochure est distribuée à new York pour se piquer de manière « plus saine ». elle conseille entre autres de « sauter pour se réchauffer » ou de s’entourer d’autres amis toxicomanes lors de la piqûre.

arthur s’emPorteL’info Vous ne verrez pas de sitôt arthur au Fou du roi sur France inter (et c’est tant mieux).Le décryptage ulcéré par les révélations de Didier Porte sur son aller-retour avec michel Drucker en jet privé pour aller voir son spectacle à Tarascon, arthur avait menacé de porter plainte. Que nenni ! l’humoriste d’inter n’a jamais reçu son petit papier bleu. stéphane bern, l’animateur de l’émission, a tenté de rattraper le coup en invitant arthur. mais l’enfant de la télé a posé comme condition de ne parler que de son spectacle. bern a refusé de jouer le passe-plat. et privé du même coup les auditeurs d’inter du grand talent d’arthur. c’est triste ✹

mauvaise pub pour courbitL’info Depuis quelques semaines, des papiers plutôt corrosifs se multiplient dans la presse (Le Point, Mediapart, Bakchich...) sur stéphane courbit, proche de sarkozy, sacré troisième homme le plus influent dans la presse.Le décryptage en coulisses, armé d’anne méaux, sa commu-nicante et patronne d’image 7, l’homme s’interroge sur les raisons de cette campagne. même les barons du capitalisme sarkozyen, bouygues et lagardère, ou l’ex-chiraquien Pinault, voient d’un mauvais œil l’ascension de ce jeune fougueux. et l’ouverture prochaine du marché des jeux en ligne sur lesquels tous se positionnent pourrait être l’une des raisons de cette guerre larvée. Qui va gagner ? les paris sont ouverts ✹

garde à (entre)vueL’info Entrevue, mensuel de femmes à seins nus, consacre quatre pages à la douloureux problématique des cochons sauvages mutants (croisés avec des sangliers) en corse.Le décryptage le 20 janvier dernier, le directeur de publica-tion d’Entrevue, gérard Ponson, passe quelques heures en garde à vue. Des gendarmes venus de calvi l’interrogent sur la provenance d’une photo de l’humoriste eli semoun nu, et publiée dans le magazine de novembre. et discutent le bout

de gras, notamment des ravages porcins sur leur île de beauté… De l’art de mettre à profit ses ennuis judiciaires ✹

« libé » revient chez maoL’info Libération aime la chine et chanel… enfin, surtout chanel.Le décryptage comme beaucoup d’autres « grands » quotidiens ou hebdomadaires, Libé a son supplément, dont l’objectif princi-pal est de rameuter les annonceurs. Dans son

numéro 23, Next – le nom dudit supplément – Libé offre un publi-reportage sur mesure à la gloire de chanel. Pas moins de dix pages sur le défilé organisé à shanghai par la marque de haute-couture. un petit article sur les starlettes milliardaires du coin et six pages de photos pour présenter, entre autres, le dernier « blouson  en  agneau plongé » concocté par le corseté Karl lagerfeld. c’est mo-che, la presse en crise ✹

l’inFo à Poil

Adoptions en Haïti

4�|�Apéro

bakchich hebdo | sameDi 6 FéVrier 2010

Page 5: Bakchich N°14

Filouteries | 5boulets rouges Laurence Parisot est de plus en plus contestée au sein du patronat. Alors, au lieu de rassembler, la cheftaine cède à la pa-ranoïa et organise une tournée d’interrogatoires au siège du Medef. Tout ça à cause de la démission de l’un de ses directeurs adjoints.

Au Medef, c’est la lutte finale«I l n’y a plus vraiment de

direction au Medef, ni de suivi des dossiers, du coup on est un peu livrés

à nous-mêmes. On pourrait aller au cinéma l’après-midi, ça ne changerait pas grand-chose. » Bonjour l’ambiance au Medef ! Si l’on en croit cette collaboratrice au siège de l’organisation patro-nale, l’immeuble de l’avenue Bos-quet, dans le VIIe arrondissement de Paris, avec ses 150 perma-nents, est devenu un bateau ivre. Et ce, alors que Laurence Parisot, qui doit remettre en jeu son man-dat en juin, est de plus en plus contestée au sein du patronat. Même dans l’art de la communi-cation, son domaine d’excellence, Parisot semble avoir perdu la main.

le juda crucifiéLa preuve avec le départ, le 5 jan-vier, de son directeur général adjoint, Jean-Charles Simon, qui n’en finit pas de faire des vagues. Il était arrivé début 2008 pour tenter de travailler en binôme avec Hélène Molinari, proche de la patronne et, elle aussi, direc-trice générale adjointe. Mais Si-mon, excédé par une désorgani-sation savamment orchestrée et le goût pour le bling-bling de l’état-major, n’a pas tenu deux ans.Si Laurence Parisot a présenté cette décision comme « irration-nelle, imprévisible et incompré-hensible », la belle formule n’abu-se personne au Medef. Les

tiraillements ne dataient pas d’hier entre Molinari, au profil de cheftaine scout très branchée sur les gadgets de com’ qui font le XXIe siècle, et Simon, trente-naire organisé et résolument « trop technique ». En fait, l’escar-mouche se serait produite sur un dossier social partagé par le bi-nôme – le Medef aurait raté un appel d’offres en province – et la directrice aurait souhaité le rou-vrir avec l’accord de Laurence Parisot, histoire de mettre en cause Simon.Ce qui aurait pu être présenté, en accord avec le partant, comme un simple incident de la vie d’une entreprise a donné lieu à une crucifixion publique du traître. Car Parisot voit dans cette défec-tion qui l’affaiblit une manœuvre téléguidée par ses adversaires. Et ils sont nombreux : à l’extérieur, à l’Union des industries métal-lurgiques et minières (UIMM), ou parmi les proches de Denis Kessler, ancien vice-président du Medef, qui serait, dit-on, le favori de l’Élysée.

chasse aux sorcièresDeux jours plus tard, le 7 janvier, le mail d’adieu de Jean-Charles Simon aux permanents du Medef crée un niveau d’alerte maxima-le. Dans le texte, il en profite pour dénoncer les manœuvres « indi-gnes » utilisées pour le discrédi-ter alors qu’il part sans deman-der un sou. Mais la parano monte d’un cran dans la garde prétorienne de Laurence, parce

que l’envoi du mail est, visible-ment, ciblé. Savoir qui l’a eu per-mettra de connaître dans quel camp se situent les collabora-teurs qui peuplent les différents étages. Parisot, qui a dirigé l’Ifop et une partie de son équipe, ne peut pas s’empêcher d’avoir le réflexe sondagier.Du coup, la tournée des bureaux commence et aboutit à ce que

plusieurs salariés vivent comme « un interrogatoire ». Heureuse-ment, les acquis sociaux ont fini par pénétrer le siège du grand patronat qui s’est doté, cet été, d’un comité d’entreprise avec des délégués du personnel (sans éti-quette) élus. Du coup, l’un d’eux a osé la ramener auprès de la di-rection pour dénoncer ce genre de chasse aux sorcières.

Vive la Sociale ! Détail crous-tillant, quelques jours plus tard, lors de sa conférence de presse mensuelle, Laurence Parisot, évoquant une négociation pari-taire nationale en cours, lance : « Je souhaite vraiment que l’on arrive à définir ce qu’est la vio-lence au travail ainsi que le har-cèlement ». Exemple de terrain à l’appui… ✹ é. b.

o rganisé au restaurant Drouant il y a quelques jours par Michel Pébereau, le patron de BNP Paribas, le déjeuner avait tout de l’entretien

d’embauche. Thibault Lanxade, candidat déclaré à la succession de Laurence Parisot, n’aura finale-ment pas convaincu l’influent Pébereau qu’on dit, plus que jamais, faiseur de roi au Medef. « Un peu falot », estime l’un des convives. Retoqué.Reste que la tenue d’une telle rencontre témoigne combien, au sommet du patronat, le sort de Parisot est scellé. Ironie du sort, Michel Pébereau s’agite le plus pour lui trouver un successeur, lui qui l’a portée à la tête de l’organisation patronale.

coups de gueuleEntre eux, la relation semble s’être nouée sur un malentendu. « Il la connaissait mal au départ, mais il trouvait qu’elle avait le profil idéal : une femme, fille d’un industriel de province, avec une absence apparente de vie privée », raconte un proche de Pé-bereau. Et puis rien ne s’est passé comme il l’avait prévu. Le caractère affirmé de la présidente du Me-def, ses « coups de gueule » à répétition, ont surpris tout le monde. Les rumeurs sur son incapacité à prendre la moindre décision sans l’avis de sa

« coach » – grassement rémunérée par l’organisa-tion – vont ternir son image auprès de ses pairs.Sa gestion de l’affaire des caisses noires de l’UIMM a été jugée par le petit monde des grands patrons comme « indigne ». Au Medef, on ne lave pas son linge sale en public.

le gadget de sarkoSes sorties contre la règle des trois tiers pour répar-tir les profits des entreprises, lancée par Sarkozy, ont également agacé. Non qu’il eût fallu la soutenir – évidemment –, mais plutôt qu’il convenait d’ac-cueillir avec une indifférence bienveillante ce qui n’était qu’un gadget pour amuser l’opinion.Dernier couac : l’Ania, la fédération de l’agroali-mentaire, a claqué la porte du Medef pour une brouille au sujet de la TVA. D’autant que, au mo-ment de son élection en 2005, Parisot avait compté dans les rangs de l’Ania ses plus zélés soutiens. Aujourd’hui, Jean-René Buisson, son président l’a dit clairement : «On ne reviendra que si elle s’en va ». Denis Kessler, le PDG de Scor, compte patiemment les points. Et attend qu’on fasse appel à lui, « en dernier recours » ✹ Lucie deLAPorTe

couLisses

parisot, par ici la sortie

sAMedi 6 février 2010 | bakchich hebdo

Les 35 heures ont 10 ans

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Petit retour en arrière. En 2003, en ces temps bénis où Sarkozy est ministre de l’Intérieur, le pre-mier flic de France subit un re-vers de taille. Pourtant défendu personnellement par l’hôte de la

place Beauvau, qui pensait s’être assuré la victoire grâce à l’appui

des chefs de l’aile radicale des natio-nalistes, le projet de collectivité territo-riale unique n’aboutit pas. La Corse vote « non » au référendum.

Alors, pour s’assurer d’emporter la mise aux régionales de 2004, Sarko se cherche un nouvel allié dans le camp nationaliste. Tandis que la

gauche est donnée gagnante, il tient à faire émerger une tendance « modérée », plus « respectable » et réputée plus loyale. Adieu, Charles Pieri, héritier du FLNC canal histo-rique. Bonjour, Jean-Christophe Angelini, un jeune ambitieux, leader du Parti de la nation corse. Angelini a été mis en orbite par « les Ajacciens » liés à Antoine Nivaggioni, lieutenant d’Alain Orsoni, ancien boss du Mouvement pour l’autodétermination (MPA) et de son FLNC canal habituel, le rival du FLNC canal historique.Une fois élu, en 2004, Camille de Rocca Serra remercia chaleureusement les nationalistes. « Il y a beaucoup de choses sur lesquelles nous pouvons nous retrouver », souligna avec force

le chef de clan avant de s’asseoir, grâce à leur soutien, sur le fauteuil du pouvoir ter-ritorial.Sans oublier l’aide « passive » du puissant président du conseil général de Haute-Corse, Paul Giacobbi. Ce député PRG apparenté so-cialiste, s’est chargé, lui, de casser toute dy-namique alternative à gauche en présentant alors sa propre liste transversale à connota-tion « corsiste ». Une philosophie, « ni de droite ni de gauche », qui se bat pour « mettre l’intérêt de la Corse avant celui des partis po-litiques nationaux » : la Corse d’abord !Six ans plus tard, Sarko, a cru pouvoir peau-finer encore plus son système : diviser pour mieux régner. Avec quelques ratés… ✹ e. p.

6 | Filouteries

spécial haïti

Corse, le clan Sarkozy1982 Nicolas Sarkozy épouse sa première femme, Marie-Domini-que Culioli, fille d’un pharmacien de Vico et nièce d’Achille peretti, l’inamovible maire de Neuilly-sur-Seine pendant trente ans. C’est le début d’une histoire d’amour entre Sarko et la Corse. D’amour mais aussi de pouvoir et de réseaux : ceux hérités de môssieu Charles pasqua, qui fut le patron des Hauts-de-Seine, ainsi que le témoin de mariage de Nicolas et Marie-Dominique.

2003 Arrestation d’Yvan Colonna, deux jours avant le référendum sur l’avenir institutionnel de la Corse. Le « non » l’emporte par 51 % des voix. porté personnellement par un Sarkozy alors ministre de l’Intérieur, ce résultat est un échec personnel. en fin d’année le leader nationaliste Charles pieri, considéré comme le chef du FLNC canal historique est arrêté.

2004 Aux élections régionales, l’UMp menée par Camille de Rocca Serra obtient 32 % des voix, le pRG Émile Zuccarreli 19 %, edmond Simeoni (Nationalistes) 17 %, et paul Giaccobi, également pRG, près de 15 %.

2007 Le 30 octobre, voulant marquer son attachement à la Corse, Nicolas Sarkozy délocalise le Conseil des ministres à Bastia. Une première dans l’histoire de l’île.

2009 Yvan Colonna est condamné en appel par la Cour d’assises spéciale de paris à la réclusion à perpétuité. Charles pieri bénéficie d’un régime de semi-liberté, avec interdiction de remettre les pieds en Corse.

2010 Nicolas Sarkozy effectue son vingt-neuvième déplacement en Corse en l’espace de sept ans ✹

Bakchich heBdo | SAMeDI 6 FÉVRIeR 2010

Sarkozy en Corse : diviser pour mieux régner

Anos gouvernants de tout temps, l’envie de maîtriser le paysage corse a valu plus

qu’une rage de dents. Souvent un échec cuisant. Entre la struc-ture clanico-féodale qui domine la société, la galaxie nationaliste avec ses FLNC qui s’agitent dans le maquis, et la solide présence du milieu mafieux qui s’investit autant en affaires qu’en politi-que, nul pouvoir exécutif n’a réussi à imposer la paix dans l’île. Tous, de Giscard à Chirac en passant par Mitterrand, Jos-pin ou Pasqua s’y sont brûlés les doigts. D’alliances avec les na-tionalistes – les « natios » – en bienveillance avec les affairistes, de paix armée avec les autono-mistes en compromissions avec les bandits, les nuits corses ont toujours été riches en cauche-mars.

saRko aUX iNsUlaiRes, des pRoMesses eN VeUX-tU, eN VoilÀLe passage en Corse de Sarko ce 2 février a réveillé ces relents. À l’instar de ses prédécesseurs, le Président s’est fendu de triom-phales et lapidaires déclarations. « Nous  ne  laisserons  jamais  la Corse et ses habitants devenir la proie du banditisme et des ma-fias. » Jamais, jamais, jamais, a martelé le Président. Que ce mes-sage soit bien entendu. Et que chacun en soit bien conscient : ces dérives, ces « mafias », seront combattues sans repos. Propos tenus, ô hasard, à Ajaccio… Dans sa stratégie, si efficace en 2004 qu’elle permit à son ami Ca-mille de Rocca Serra de conser-ver le pouvoir sur l’île, le chef de l’État a beaucoup misé sur la cité napoléonienne. Et surtout sur le clan des natios modérés.

Sarko a en particulier misé sur le leader du Parti de la nation corse (PNC), Jean-Christophe Angelini. Un jeune loup aux dents très longues. Nationaliste autant « modéré » qu’ultralibé-ral, Sarkozy ne lui a pas caché son intérêt, pour le plus grand bonheur des soutiens ajacciens de Jean-Christophe. Soutiens liés à Antoine Nivaggioni, l’homme-lige d’Alain Orsoni, autrefois leader du Mouvement pour l’autodétermination (MPA). De nos jours, les anciens du MPA ont ôté leurs cagoules pour s’in-vestir dans les affaires et contrô-lent la très puissante Chambre de commerce de la Corse du Sud, ainsi que bon nombre d’affaires dans la région ajaccienne. Malheureusement pour Sarko, la branche ajaccienne du natio-nalisme modéré s’est emmêlée dans l’affaire de la SMS, une so-ciété de gardiennage au carre-four de bien des contacts comme des affaires, et qui raflait des marchés publics et stratégiques, d’Ajaccio jusqu’à Marseille, Hyè-res, Toulon. Frauduleusement, pensent les juges…En cavale pendant dix-huit mois, Nivaggioni a entraîné dans ses troubles Jean-Christophe Ange-lini. Soupçonné par les flics d’avoir voulu fournir un faux passeport à son ami Antoine, mais aussi de s’être intéressé de trop près à la SMS, le leader du

PNC est mis en examen pour as-sociation de malfaiteur et com-plicité de faux. Un brin embêtant pour Sarko qui ne cachait pas sa sympathie pour cette jeune étoi-le montante du nationalisme new-look.

MiseR sUR les « Natios » ModéRés, l’eRReUR dU pRésideNtSoupçonné de complicité de meurtre, Alain Orsoni clame son innocence depuis sa prison tou-lonnaise. Selon sa défense, le dos-sier d’accusation serait complè-tement vide. Quant à Nivaggioni, sa sortie rocambolesque de pri-son en novembre dernier n’a pas effacé toutes les charges qui pe-saient contre lui. Ni ses liens in-cestueux avec un brigadier de Renseignements généraux, Chris-tian Orsatelli. De là à penser que Sarko Ier a misé sur le mauvais cheval…

Car le Parti de la nation corse n’est pas le seul à avoir le mono-pole de la dénomination « natio modéré »… Le vieil Edmond Si-meoni veut aussi sa part du label. Fidèle aux traditions clanistes, le héros d’Aleria a mis son fils sur les rails. Le bouillonnant avocat Gilles Simeoni, défenseur d’Yvan Colonna, est désormais intronisé à la tête d’Inseme per a Corsica (Ensemble pour la Corse). Une nouvelle formation au discours quasi identique, à une nuance populiste près, à celui récité par le PNC. Entre ces deux forma-tions, une seule contradiction. De taille. Qui va paraître comme le leader des natios « non frontis-tes » – par opposition au FLNC, le Front de libération nationale de la Corse – en cas d’union ? Gilles, le fils d’Edmond, ou bien Jean-Christophe, l’homme des Ajacciens ?

Deux mois avant les régionales, Sarko s’en est allé jouer, ce 2 février, les démineurs en Corse. Querelles de leaderships à droite, émer-gence du « corsiste » Paul Giaccobi, nationalistes « amis » plombés par les affaires… les mèches courtes ne manquent pas. Et font crain-dre au chef de l’État un vrai feu d’artifice : un basculement à gauche de l’île et un nouvel échec dans sa politique corse.

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Filouteries | 7

cherche la sortie du maquis

samedi 6 février 2010 | Bakchich heBdo

Camille de rocca serra rocca serra, 56 ans, est le président UmP de l’assemblée de Corse et le député de Corse-du-sud depuis 2002. il est le fils de Jean-Paul de rocca serra, surnommé « le renard argenté », figure politique incontournable de l’île pendant cinquante ans. sa famille règne, depuis sa ville natale Porto vecchio, sur l’extrême sud de la Corse, la « terre des seigneurs », aujourd’hui promise aux pelleteuses des promoteurs immobiliers. C’est lui qui a présenté Nicolas sarkozy à sa première femme, marie-dominique Culioli ✹

Paul GiaccobiCe député, membre du Parti radical de gauche, est, à 52 ans, président du conseil général de Haute-Corse. son père françois est l’un de ceux qui avaient refusé les pleins pouvoirs à Pétain, avant de devenir ministre du général de Gaulle. Giaccobi est né dans les Hauts-de-seine, mais son fief est à venaco, au centre de la Corse. À l’été 2009, il était donné secrétaire d’état. sarkozy a finalement fait machine arrière, pour ne pas se brouiller avec rocca serra qui visait un poste semblable ✹

ange santini À 50 ans, santini est, depuis 2004, le président UmP du conseil exécutif de Corse (l’équivalent du conseil régional en métropole) et le maire-adjoint de Calvi, sa ville natale, en Haute-Corse. avec Camille de rocca serra, il forme le duo contraint et souvent explosif qui verrouille la droite dans l’île. Les deux hommes ont été brouillés mais ils se sont opportunément réconciliés pour les circonstances électorales : « Camillou » est numéro un sur la liste UmP pour les régionales, ange est numéro trois ✹

U n homme est au centre des alliances entre les « clans historiques » et le néo-clan

des nationalistes modérés : le très corsiste Paul Giacobbi. À première vue, le président du conseil général de Haute-Corse n’est pas à une contradiction prêt. Au Parlement, ce député PRG siège avec le PS. Ce qui ne l’a pas empêché de jouer le premier rôle d’un grand feuilleton à rebondisse-ments, dont le pitch était sa possible nomination au gouvernement de Nicolas Sarkozy. Le chef de l’État avait bien envie de se ga-rantir Giacobbi dans son dispositif.

pion stratégiqUeEn privant la gauche de l’appui du puissant clan du président du conseil géné-ral de Haute-Corse, difficile d’imaginer déboulonner l’UMP de la gestion de la collectivité territoriale. « Giacobbi veut faire monter les enchères, à droite comme à gauche. L’homme est impré-visible et peut changer son fu-sil d’épaule à  la vitesse d’un éclair », nous explique un hom-me d’affaires qui fut, autrefois, très proche de Giacobbi.Fin août 2009, le feuille-ton s’est pourtant in-terrompu. Après dif-férents tête-à-tête avec le président de la République, Paul Giacobbi a annoncé qu’il n’intégrera pas l’équipe gouvernementale. « Ce n’étaient  que  des  rumeurs  sans fondement aucun », plaide l’inté-ressé. Plus vraisemblablement, Nicolas Sarkozy ne semble pas avoir été capable d’offrir un mi-nistère assez important au chef de clan corse.

Mais ce n’est pas tout. Nicolas Sarkozy n’est pas resté insensi-ble aux caprices de son ami Ca-mille de Rocca Serra, qui n’aurait pas dénigré, lui, un fau-teuil de sous-ministre. « Ca-millou » a donc fait le siège de

l’Élysée afin que Paul Giacobbi ne puisse pas accéder à de tels honneurs. C’est ainsi qu’en cette fin d’été 2009, Giacobbi officia-lise son éloignement du disposi-tif sarkozyste. Désormais, le patron du clan de Haute-Corse n’a qu’un but : ravir le conseil exécutif à l’UMP et faire payer à Camillou tant d’hos-

tilité. En choisissant de céder aux caprices de Camille, l’Élysée a perdu un appui stratégique, un appui qui risque bien de lui faire perdre l’île tout entière. Pour une fois réactif, le PS n’a pas attendu que Giacobbi chan-ge d’avis. Via ses relais francs-

maçons, Patrick Mennucci, assisté du vénérable frère PS du Grand Orient à Bastia, Laurent Croce, a pris la direction de l’opération « il faut ré-cupérer le soldat Gia-cobbi ». Des socialistes d’influence pensent que Giacobbi pourrait bâtir une liste capable de de-vancer au premier tour l’UMP Émile Zuccarel-li, ancien député PRG aux accents chevène-mentistes très pronon-

cés. De nos jours, ce der-nier se contente de gérer la ville de Bastia avec la manne financière que lui

octroie gentiment la collec-tivité territoriale… En

échange d’une opposi-t i o n v i s i b l e m e n t inexistante à l’assem-blée de l’île.

giacoBBi a ditS’il venait à devancer la liste de « Zucca », le

corsiste Giacobbi, dé-sormais investi par le

PS, pourrait rassembler tout le PRG insulaire et

même s’assurer de l’appui du Front de gauche, promis à un excellent score sur l’île en mars prochain. Ensuite, Giacobbi ne devrait pas avoir trop de mal à récupérer les voix des natios mo-dérés, pour, enfin, s’asseoir le plus tranquillement du monde sur le fauteuil de la présidence de l’exécutif territorial ✹ e. P.

MonsieUr paUL fait Monter Les enchèrestaCtiqUe

Encore une fois, c’est la tradition clanique qui a gagné. Gilles figu-rera en tête de liste aux territo-riales de 2010. Et cette nouvelle alliance présente un avantage de taille pour bien des tribus : les « modérés », formellement oppo-sés à la violence politique, peu-vent devenir des alliés fréquen-tables. Que ce soit avec le corsiste Paul Giacobbi, qui a échappé à l’ouverture sarkozyste (voir ci-contre), ou avec la droite UMP qui se lézarde…

Les Barons de La droitecorse se déchirentCar entre Camille de Rocca Ser-ra, président de l’Assemblée ter-ritoriale, et Ange Santini, prési-dent de l’exécutif, rien ne va plus. « Camillou », déjà frustré de n’avoir pas été nommé sous-mi-nistre dans le gouvernement, ne souhaite plus siéger à la prési-dence de l’Assemblée de l’île ; une c h a r g e , s o m m e toute, ho-norifique. Non, dé-sormais, il ambitionne de s’asseoir sur le fauteuil de son « ami » Ange. Et, encore une fois, c’est Sarko Ier qui doit intervenir pour met-tre de l’ordre dans ses propres rangs. Et, encore une fois, le chef de l’État fait pencher la balance en faveur de son ami R o c c a S e r r a .

Convoqué à l’Élysée, Santini est prié de s’écraser. Ange s’exécute, mais il y a des humiliations qui laissent des traces…Officiellement, Sarko est venu annoncer que l’île sera reliée, dans un futur plus qu’incertain, au Galsi, projet de gazoduc qui doit relier l’Algérie à l’Italie via la Sardaigne. En réalité, le prési-dent français espère qu’avec son charisme, ainsi qu’avec ses pro-messes d’aides économiques, il arrivera, in extremis, à garantir au clan Rocca Serra d’asseoir une nouvelle fois son pouvoir sur l’île de Beauté, une île à laquelle le Président est si « attaché ». La mission semble pourtant bien compromise. Et Sarko risque de payer très cher sa fidélité à Ca-millou. Un chef de clan visible-ment pas à la hauteur de ses pro-pres caprices ✹� eNriCo Porsia

Les histoires corsées de « Bakchich »en Corse, mener des enquêtes peut s’avérer explosif. en août dernier, la voiture de notre journaliste enrico Porsia, qui habite avec sa famille dans le sud de l’île de Beauté, a été plastiquée pendant la nuit. La reconnaissance d’un long travail d’investigation…Les pressions d’élus, de journalistes locaux et de nationalis-tes ne manquaient déjà pas depuis la mise en cause de hauts responsables de la collectivité territoriale corse. en-rico a pu dénoncer sur le site de Bakchich de scanda-leux conflits d’intérêts.au hasard, les terrains d’ange santini et Camille de rocca serra, auparavant inconstructibles, se sont retrouvés sur le nouveau Plan d’aménage-ment de l’île (le Padduc) dans des zones propices à une exploitation immobilière. après la fronde pro-voquée par les articles, l’exécutif de l’île dut retirer le texte ! Les « natios » n’ont pas non plus goûté

d’être baptisés « les  patriotes  du  béton ». toujours prompts à « défendre la terre » contre les continentaux, ils ne rechignent pas à offrir une « protection » à des pro-priétaires de lotissements en bord de mer et à des restau-rants de plages. quand bien même ces établissements saccagent le littoral.Les visiteurs de Bakchich.tv n’auront pas non plus manqué le portrait du parrain Jean-Jé Colonna par son ami, l’auteur aty-

pique Gabriel-Xavier Culioli. amateurs de molotov, cagou-les et chemises noires, rendez-vous sur Bakchich ✹ LaUreNt maCaBies

Les écolos pas dupes du Padduchttp://minu.me/1nh7/p

Rocca Serra, un Corse tout-terrainhttp://minu.me/1nh8/p

Du travail de professionnelhttp://minu.me/1nh9/p

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obama épouse les thèses populistesstazunis

l e dramatique virage à droite de Barack Obama est un dé-sastre économique et politi-

que. Le président américain a annoncé, le 27 janvier, dans son discours au Congrès sur « l’état de l’Union », le gel de toutes les dépenses du gouvernement pour le reste de son mandat (à l’excep-tion du budget militaire, le plus gros dans l’histoire du pays).Le Prix Nobel d’économie Paul Krugman, chroniqueur au New York  Times et, jusqu’à récem-ment, ardent supporter d’Obama, l’a immédiatement condamné comme « révoltant à tous les ni-veaux, alors que l’économie souf-fre encore du chômage massif  ». Il a jouté que, pour lui, ce gel était « une trahison perfide de tout ce pour quoi les sup-porters d’Obama pensaient œuvrer » et « une capitula-tion au reaganisme ». Quant à Joseph Stiglitz, autre No-bel d’économie, ce gel ne fera « qu’empirer  les  cho-ses ».

réactionnaireLa thèse principale du par-ti républicain, reprise en plus véhément par les Tea Party (le nouveau mouve-ment populiste de droite), est que le gouvernement fédéral est l’ennemi du peuple. Avec le gel des dé-penses, Obama épouse cette proposition réaction-naire. Et il coupe l’herbe sous les pieds des démocra-tes au Congrès avant les législatives de novembre, quand toute la Chambre des représentants et un tiers du Sénat se présen-

tent pour une réélection. C’est pourquoi, dans les coulisses du Congrès, les démocrates pestent en « off » et avec des gros mots : comment provoquer l’enthou-siasme de l’électorat démocrate, au plus bas niveau depuis des décennies, si le président démo-crate adopte le dogme central du parti concurrent ?

suicidaireLe mouvement des Tea Party, dont la force motrice est la crise économique, est désormais beau-coup plus populaire que les dé-mocrates et les républicains, selon le sondage le plus fiable du pays. Ce constat, et la perte par

les démocrates du siège au Sénat de feu Teddy Kennedy, qui a créé un séisme dans le paysage poli-tique, a semé la frayeur à la Mai-son Blanche. Le virage à droite n’est que la réponse paniquée d’un Obama dont les yeux sont rivés sur sa réélection en 2012.Mais c’est une réponse suicidaire car elle équivaut à avouer l’im-puissance du gouvernement fé-déral au moment où, selon les chiffres officiels, un Américain sur dix est au chômage (le taux de chômage réel se situe plutôt vers 18 % si on ajoute ceux qui ont abandonné la recherche d’un job et ceux qui ne trouvent que des boulots à mi-temps).

risibleLes économistes récla-ment un plan Marshall pour l’emploi, au lieu de quoi Obama n’a proposé que trente petits mil-liards pour créer des boulots. Risible, comparé aux 3 800 milliards de budget total du pays. Le Congressional Budget Office, organe bipartite établi par le Congrès, prévoit que, dans les cir-constances actuelles, le chômage ne descendra pas à un niveau « suppor-table » avant 2014, soit deux ans après la prési-dentielle.En faisant les yeux doux aux électeurs de droite, Obama risque de lutter pour sa réélection dans un climat économique aussi morose qu’au-jourd’hui ✹� doug ireland

la banque syz & co est accusée de fraude fiscale et de travail dissimulé.

le fn en pleine gronde régionaleaffront national

t out comme son père, Marine Le Pen va par-tout, répétant à qui veut l’entendre que « le FN  va  créer  la  surprise ! »  En attendant le

grand soir, le Front national tente de sauver les quelques permanents qui restent. Or, perclus de dettes, le FN va mal. Dernier avatar en date, le parti d’extrême droite va voir sa subvention publi-que pour 2010 lui passer sous le nez : son principal créancier, l’imprimeur Fernand Le Rachinel, ayant fait saisir les 1 838 000 euros d’aides pour se rem-bourser en partie d’une dette qui avoisine les 7,5 millions d’euros. Impossible donc de payer les salariés du « Carré », dont le nombre se réduit comme peau de chagrin.

seaux de fumierEn décembre dernier, c’est la fédération de Seine-Maritime qui a volé en éclats après la désignation d’un proche de Marine comme tête de liste en Hau-te-Normandie. Ancien MNR et conseiller municipal de Sartrouville, Nicolas Bay a été accueilli avec des seaux de fumier par les dirigeants de la fédération. Les frondeurs ont été rapidement exclus, mais la révolte se poursuit et le parachuté a bien du mal à monter ses listes, sur lesquelles figurent deux

conseillers régionaux d’Ile-de-France ainsi que le gorille de Le Pen, qui, jusqu’à juin dernier, était payé en tant qu’assistant parlementaire européen.

sauve-qui-peutJean-Marie Le Pen n’échappe pas à la grogne des cousins de province. Le conseiller régional des Al-pes-Maritimes, Max Baeza écrivait sur son blog : « Il serait suicidaire que certains, fraîchement ins-tallés dans le 06, […] n’ayant aucun passé dans ce département et totalement étrangers au terroir azu-réen ou méditerranéen, puissent se voir attribuer les premières places sur cette liste Régionales ! » (sic)En Ile-de-France, où les scores du FN sont en bais-ses constantes, on assiste à un sauve-qui-peut quasi général des élus vers des rivages plus pro-metteurs. Jean-François Jalkh, le « monsieur élec-tions » du FN, élu de Seine-et-Marne, montre l’exemple en filant dans les Vosges. Huguette Fa-tna, responsable des Dom-Tom, va affûter son ac-cent créole en… Alsace. Marine Le Pen, toujours conseillère régionale d’Ile-de-France, avait anti-cipé la débandade en filant à Hénin-Beaumont dès 2008. Gouverner, c’est prévoir ! ✹ pierre jardin

helvète undergroundimpair et banque

d écidément, les banques suisses sont dans le colli-mateur de la France. Après

HSBC Genève, c’est au tour de la banque privée Syz & Co de devoir répondre bientôt aux questions de la justice tricolore. L’établissement est soupçonné de vendre depuis des années des fonds communs de placement à des clients ins-t i t u t i o n n e l s français, tels que des ban-ques, des cais-ses de retraites, des compagnies d’assurance, sans agrément ! Syz réaliserait chaque année en France un chiffre d’affaires com-pris entre 850 millions et un mil-liard d’euros pour plusieurs di-zaines de millions de bénéfices. Pourtant, la banque ne possède même pas un placard à balais dans l’Hexagone. Et aucun sala-rié… Jérôme G. n’est pourtant pas un fantôme. Ce Français de 37 ans a travaillé chez Syz de septem-bre 2004 jusqu’à son licencie-ment à l’été 2009 comme « ven-deur  sur  la  France », avec un objectif de 250 rendez-vous pro-fessionnels par an. Mais si Jé-rôme G. était déclaré en Suisse comme frontalier domicilié dans l’Ain, son lieu de travail officiel était à Genève. « Je ne passais que trois, quatre jours par mois à Genève, le reste du temps j’étais à Paris, lieu de mon  domicile.  J’appelais  les clients de chez moi, mais la ban-que Syz exigeait que je leur télé-phone de mon portable, jamais de mon fixe, et que surtout je ne leur donne  jamais  rendez-vous  chez 

moi », explique l’ex-employé de Syz, qui a déposé un dossier le 4 septembre 2009 au conseil des Prud’hommes à Paris, plutôt qu’à Genève.Licencié sans indemnités, alors que selon lui il donnait satisfac-tion, Jérôme a déposé une plain-te au pénal en octobre 2009 afin de dénoncer « des délits de travail 

dissimulé  par dissimulation d’activité, de tra-vail  dissimulé par  dissimula-tion d’emploi sa-larié, de presta-

tion de services d’investissement malgré le défaut d’agrément et de fraude fiscale ». Dossier, pour lequel le parquet de Paris a décidé d’ouvrir une en-quête préliminaire. Pour sa part, la banque Syz balaie toutes les accusations et assure que « ses vendeurs institutionnels sont ba-sés à Genève », et qu’elle « ne se livre  à  aucune  distribution, conseil ni prise d’ordre ».Présente partout en Europe, la banque est curieusement absente de France. Cela tient sans doute à quelques subtilités que seuls les financiers maîtrisent. Il s’agit des prestations portant sur le « conseil en investissement » et sur la « recommandation personnali-sée ». «La banque genevoise feint d’ignorer qu’elle pratique bien du conseil en investissement en Fran-ce auquel cas son activité devrait être requalifiée », explique un res-ponsable de l’Autorité des mar-chés financiers. Une banque clan-destine en France qui n’y paye pas d’impôts, c’est pas inqualifia-ble ? ✹� amédée sonpipet

8 | Filouteries

bakchich hebdo | samedi 6 février 2010

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Sur le terrain, le plus grand club du monde ne ne s’évite pas les migrai-nes. Résultats en dents de

scie, titre de champion qui s’éloi-gne : l’OM ne fait plus saliver ses supporters. En revanche, aucun maux de tête sur le terrain juri-dique. Depuis le début de la sai-son, le club n’a eu à déplorer qu’une perquisition le 5 octobre dernier sur l’affaire Ribéry, qui ne le concerne que de loin.

Toutefois, une affaire a piqué no-tre intérêt : la convocation, en novembre dernier, du directeur général de l’OM, Antoine Veyrat, par la police des jeux parisienne. Depuis quelque temps, les flics de Nanterre s’intéressent de près à toutes ces sociétés de paris en ligne qui fleurissent sur le Net. Et sur lesquelles courent et ont couru différentes enquêtes préli-minaires. Qui pour publicité en infraction à la législation sur les

jeux de hasard, qui pour tenue illégale d’une maison de jeux. Sur le bureau du vice-procureur de Marseille, traîne un dossier sur BetClic, le site dirigé par Sté-phane Courbit, que l’on compte parmi les plus influentes person-nalités du monde médiatique. Et dont le siège est à Malte. BetClic est soupçonné de tenue illégale d’une maison de jeux. « Avec as-sez d’éléments pour audiencer un procès, glisse une souris du palais

de justice. Mais avant de s’atta-quer à Courbit, un des chouchous de Sarko, on réfléchit à deux fois ». Voire trois, quand le dossier concerne également l’Olympique de Marseille.En effet, sur le site officiel du club, entre différentes pubs pour les paris en ligne qui tournent, un onglet racole : « Pariez  sur l’OM, on vous offre votre premier pari de 20 euros ». Un clic, et bien-venue sur le site de BetClic. D’où la tentation, chez les poulets, de viser le club pour « compli-cité de tenue illé-gale d’une mai-son de jeux de hasard ».Mais le flou juridique sur la lé-gislation des paris en ligne et le projet de loi en gestation incitent magistrats et flics à la prudence. « Urgent d’attendre », entend-on en chœur à la police des jeux et dans les parquets de France et de Navarre, tous aussi impatients de voir le texte enfin accouché. Y compris les équipes de football, qui ne voient pas d’un mauvais œil l’arrivée d’une nouvelle manne financière sur leurs maillots.Ainsi, Lyon et l’OM, les deux plus gros budgets du championnat de France de Ligue 1, dont les comp-tes sont structurellement défici-taires, ont d’ores et déjà signé un contrat de sponsoring maillot avec la holding Lov Finance, pi-

lotée par Courbit et propriétaire de BetClic. Respectivement pour 7 et 4,5 millions d’euros par an.Au-delà de l’aspect saugrenu de voir une équipe de foot soutenue par un parieur sportif, la signa-ture de l’accord a déclenché une violente croisade de presse du président lyonnais Jean-Michel Aulas. Le boss de Guignol criant au complot et la Ligue refusant que le nom de BetClic apparaisse

sur le maillot des joueurs go-nes tant que le texte de loi sur les paris en li-gne n’est pas voté.Sur le Vieux

Port, le contrat a tourné à la ga-léjade industrialo-familiale. Sté-phane Courbit, bien en cour en Sarkozie, a depuis longtemps noué des rapports privilégiés avec les frères Veyrat. Tant avec le DG de l’OM, Antoine, qui a si-gné le contrat avec BetClic, qu’avec Jacques, qui songe à in-vestir dans BetClic via… le Grou-pe Louis-Dreyfus où il a succédé à la présidence, à feu Robert Louis-Dreyfus, propriétaire de l’équipe phocéenne. Or ses héri-tiers demeurent actionnaires majoritaires à la fois du club et du groupe financier.Bref, l’OM se retrouve au centre d’un micmac qui ne manquera pas d’attiser les polémiques. On parie ? ✹� xavier monnier

Au bazar du sport | 9curieux hasard L’olympique de marseille se retrouve mêlé à une affaire sur les jeux de hasard. en cause, ses liens avec le site de paris sportifs sur internet, BetClic, détenu par le gourou des médias Stéphane Courbit. Pour l’instant, rien ne bouge, grâce au vide juridique sur la question.

Paris en ligne, l’OM ne répond plus

h abituellement, quand John Terry tire, l’Angleterre ap-plaudit. Pas cette fois. De-

puis les révélations du Sun la semaine dernière, les Britanni-ques connaissent les détails les plus scabreux de l’aventure ex-tra-conjugale du populaire défen-seur de Chelsea. Il y a quelques mois, le footballeur a trompé son épouse avec un mannequin fran-çais… qui s’avérait aussi être la poule de son coéquipier, Wayne Bridge, aujourd’hui à Manches-ter City. Le genre de scandale dont raffolent les tabloïds outre-Manche. D’autant que le cocu et le coquin devraient partager le même hôtel lors de la Coupe du monde à laquelle participera le Onze de Sa gracieuse Majesté l’été prochain.Mais du Guardian à The Indepen-dent en passant par BBC News, les plus sérieux médias du pays

se sont aussi emparés de l’« af-faire ». L’écart du « papa de l’an-née 2009 » – arrivé en tête d’un vote organisé par une marque de ketchup – a ainsi fait l’objet de plus de quarante articles du Ti-mes en trois jours.

mât dresséN’ayant sans doute rien de plus important à faire, le ministre des Sports a réclamé que Terry rende son brassard de capitaine de l’équipe nationale ! Comble du ridicule, lors du match suivant

les révélations, les joueurs de Manchester City ont tenu à « ren-dre hommage » à leur coéquipier en portant un t-shirt avec le nom du trompé… Outre son brassard, Terry pourrait perdre une grosse partie des 8 millions d’euros an-nuels que lui rapportent ses sponsors. Son épouse a filé à Du-baï pour demander un divorce qui lui coûterait 13 millions d’euros. Moralité : s’il veut éviter la tempête, un bon capitaine an-glais doit éviter de dresser son mât n’importe où ✹�L. m.

john terry tire un coup pas très franc

Perfide aLBion

marseille a signé un contrat de 4,5 millions d’euros avec BetClic.

Samedi 6 février 2010 | Bakchich heBdo

Joue-la comme Beckham !entre 2003 et 2006, david Beckham, alors capitaine de l’angleterre, a en-chaîné les rumeurs d’adultère à la vitesse de ses géniaux coups francs. mais les aventures du queutard restaient cantonnées à la presse poubelle et personne n’a pensé à réclamer le brassard de « l’exemplaire » Beckham. Le couple utilise encore cette réputation pour sa com’. Lui pose en slip dans une pub, et son épouse – un modèle de distinction – décrit dès qu’elle le peut l’anatomie de david en la comparant à « un pot d’échappement de tracteur ». Classe ✹

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Retrouvez la chronique Médiatics chaque mercredi sur notre site

www.bakchich.info

bruits de la ville

allô, M6 ? Passez-moi le rédac’ chef ! Éric Besson est un spectateur assidu des JT de M6. Assidu et exigeant. Il n’a pas aimé l’angle compassionnel d’un sujet sur l’échouage de boat-people kurdes en Corse, qui dépeignait le portrait d’une famille de réfugiés après sa libération. Aussi, ce 25 janvier, le ministre s’est-il emparé de son téléphone pendant la diffusion du reportage et a tapé un scandale auprès de la rédaction de M6. La liberté de la presse, c’est simple comme un coup de fil ? ✹

Google établit chaque année son classement des mots les plus recherchés par les internautes. Pour la France en 2009, le mot-clé en plus forte progression est « allostreaming ». Allostrea-ming.com permet de rechercher et de voir des films disponibles sur Internet sans les téléchar-ger. En 2008, le mot-clé le plus à la mode était « Deezer », du nom du site d’écoute de disques sans téléchargement. « Hadopi » n’est pas dans les classements ✹

À propos d’Hadopi, ça grogne chez les candidats verts aux régionales en Ile-de-France. Motif : le chanteur Sanseverino, dossard numéro 39 (non éligible) sur la liste parisienne, fait partie des artistes qui se sont engagés contre le téléchar-gement illégal. La médiatisa-tion du chanteur se retrouve en porte-à-faux avec la ligne d’un Cohn-Bendit plus en phase avec le monde du Web et qui défend la licence globale contre « l’illusion » de la loi Hadopi ✹

beyoncé, la chanteuse de R’n’B, peut dire merci aux Grammy Awards. Les six récompenses qu’elle a reçues atténuent la polémique née après la révéla-tion par le New York Post de son concert privé donné chez Hannibal Kadhafi, fils du colonel-dictateur libyen. Boulette n°1 : Beyoncé a reçu 2 millions de dollars pour interpréter cinq titres seule-ment. Boulette n°2 : Hannibal est impliqué dans une affaire de violence conjugale. Les médias américains avaient reproché cette mauvaise fréquentation à la chanteuse, qui se targue de féminisme à travers ses chan-sons et ses engagements ✹

twitter Grâce au fil de messages mis en ligne sur le nouveau site de micro-blogging, certains rédacteurs sont devenus de vraies vedettes, forts d’« articles » longs de… 140 signes. Du buzz ou de l’info, coco ?

Les stars du journalisme en brefIls s’appellent Xavier Terni-

sien, Vincent Glad ou en-core Melissa Bounoua et ils ou elles sont journalistes.

Et pas n’importe quels journalis-tes, s’il vous plaît. Leur « travail » fait partie des plus commentés sur le site Topjournaliste.com, qui propose aux internautes de noter leurs plumitifs adorés… ou détestés.

MicrocosMeMais, au fait, qui sont ces Terni-sien, Glad et autres Bounoua ? Les Woodward et Bernstein des années 2010 ? Peut-être – il ne faut jurer de rien –, mais, en at-tendant, ce sont des « Twitte-riens » hors pair. Des quoi ?, s’in-terroge le lecteur pour qui la dernière expérience avec Inter-net remonte à la création d’un compte Caramail en 1999. Des utilisateurs forcenés du site de micro-blogging Twitter, soit une plateforme sur laquelle on écrit des minimessages qui sont lus par des followers (nom twitterien pour « lecteur »). On y écrit et on y lit accessoirement les messa-ges des autres, les following, ceux qu’on a décidé de suivre. Bref, une petite communauté (seulement 126 000 Français auraient un compte Twitter, se-lon le cabinet Sysomos), mais une communauté forte d’une densité de journalistes presque aussi importante que devant un buffet-cocktail lors de vœux à l’Élysée. Et pour nombre d’entre eux, leur lectorat Twitter compte d’avantage que l’audience de leur propre journal.

Prenez Xavier Ternisien, par exemple. Ce rubricard en charge de l’actu des médias pour le journal le Monde est suivi quoti-diennement sur Twitter par plus de 27 000 lecteurs. Pas certain que 27 000 acheteurs du Monde lisent tous les jours du Terni-sien. Idem pour son « pote » Vin-cent Glad (5 000 followers). Ce jeune journaliste du site Slate.fr (le site d’info créé par Jean-Ma-rie Colombani en 2009) est plus connu pour ses saillies sur le site de micro-blogging (plutôt drôles, il faut bien l’avouer) que pour ses scoops et ses enquêtes fouillées.

deux pHrases MaxiMuMC’est là que le bât blesse. Effi-cace outil d’alerte en temps réel, Twitter limite les contributions

à 140 signes, soit deux phrases grand maximum. Un format idéal pour le buzz et le commen-taire, moins pour le travail jour-nalistique. D’ailleurs, une étude américaine récente menée à Baltimore a démontré que seu-lement 4 % des informations produites dans la ville éma-naient des médias de type blog et Twitter.

info biG MacEt pourtant les journalistes raf-folent de plus en plus de cette information vite écrite, souvent pas vérifiée et tout simplement relayée. Une information Big Mac en quelque sorte, qui n’a que la saveur de l’instantanéité. Des voix commencent à s’élever contre ce nouveau saint Graal journalistique.

L’ancien patron de la rédaction du Monde, Edwy Plenel, après avoir lu les tweets qui ont été écrits en direct de l’audience du procès Clearstream en octobre dernier, a jugé « nulle » la re-transcription de son témoignage. Le magazine Technikart a consa-cré en février un dossier sur cette dictature du buzz qui nous fait prendre des « retweets » pour des lanternes. Si la plupart des journalistes ont conscience de la limite de l’outil et assurent que Twitter sert principalement de caisse de ré-sonance aux articles parus dans leurs propres médias, d’autres se délectent cette notoriété que leur procure le site. Twitter n’a pas d’avenir dans un métier si peu narcissique ✹ martin kirsch

l es millions des droits télé que les chaînes paient pour diffu-ser le sport, c’est du très gros

argent. Et des embrouilles. Ainsi cette querelle qui oppose Marke-ting vidéo média (MVM) au Groupement des diffuseurs fran-çais (GRF), représentant de l’Union européenne de radio-té-lédiffusion (UER). De 1999 à 2005, le GRF a confié à MVM la diffu-sion du sport pour les lieux « hors

du cercle de famille » (bars, hôtels…), mar-ché représentant quel-que 24 millions d’euros de recettes pour la so-ciété. Or MVM s’est rendu compte que le GRF avait cédé ces mê-mes droits à Euros-port.Christian Le Liard, le pa-tron de MVM, étonné

qu’on puisse vendre deux fois la même cho-se à deux clients, a donc demandé à la justice de condamner le GRF au rembourse-ment de 21 millions, e t E u r o s p o r t , à 3,5 millions. Au GRF,

où France Télévisions est majoritaire en voix, les interlocuteurs de MVM

sont alors Christopher Baldelli, patron de France 2, puis Patrick de Carolis, PDG du groupe. En fait, ont-ils expliqué, Eurosport a acquis les droits auprès de l’UER, tandis que le GRF n’a cédé à MVM qu’une « garantie d’exclusivité », mais pas « tota-le »…Pourtant, Bakchich s’est procuré un document approuvé, le 15 fé-vrier 2005, par Christopher Bal-delli. Le précieux papier indique que « le contrat passé par France Télévisions avec Eurosport est contraire à l’exclusivité accordée par le GRF à MVM pour ces ex-ploitations ». Voilà qui mérite un carton rouge✹ jacques-marie bourGet

quand la télé publique arnaque les boîtes privées

Droits sportifs

a Le courrier adressé à christopher baldelli, patron de france 2, attestant que france télévisions a signé un contrat avec eurosport dans le dos de mVm.

10 | Au bazar des médias

bakcHicH Hebdo | sameDi 6 féVrier 2010

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L e 31 janvier 2010, Moscou fê-tait ses noces de porcelaine avec le géant du fast-food

américain McDonald’s. Voilà en effet vingt ans que l’enseigne s’est implantée sur la place Pou-chkine, centre historique de la capitale russe, au prix de négo-ciations chaotiques et d’une cer-taine résistance bureaucratique locale. Mais l’idylle a tenu bon et l’historique McDo est, en 2010, le plus gros vendeur de burgers du monde.

« Beeg mak »Le jour de son ouverture, en 1991, le McDo de la place Pouchkine bat le record mondial d’affluence de l’enseigne. Jamais la statue du poète russe n’avait été encerclée par autant de Moscovites avides de dépenser des roubles pour dé-guster leur premier « Beeg Mak ». Les médias sont également pré-

sents et récupèrent les témoigna-ges mitigés des goûteurs. Cer-tains apprécient les hamburgers tandis que d’autres n’arrivent pas à se faire aux sourires forcés des 650 employés du site. « Ils pensent qu’on se moque d’eux », explique une vendeuse aux camé-ras de CBS. Mais ces obstacles culturels ne font pas peur à Geor-ges Cohon, directeur McDonald’s Canada de l’époque et responsa-ble de l’arrivée des hamburgers en Russie. L’homme a négocié pendant quatorze ans avec les bureaucrates soviétiques pour installer le premier fast-food à deux pas du Kremlin et s’appro-visionne chez des producteurs agricoles locaux pour faire taire les José Bové soviétiques. En récompense, le succès du pre-mier McDo russe a été immédiat, oubliant vite la résistance cultu-relle locale pourtant très pré-

sente au début des années 90. Ainsi, lors du premier anniver-saire du restaurant en 1992, une émeute a empêché les célébra-tions prévues. En 1993, le fast-food a carrément été saccagé. Et plus récemment, en 2004, une loi est venue rompre ce que Georges Cohon appelait la « diplomatie du hamburger », en limitant le nombre de fast-foods en Russie. Plus tard encore, la mairie de Moscou a même décidé d’ouvrir son propre restaurant rapide : le Ruskie Bistro, qui met en avant la nourriture traditionnelle rus-se. Le combat est équitable : contre le Big Mac - Coca, l’ensei-gne propose le Bortch - Kvas. Mais l’initiative n’entrave pas l’ascension de McDonald’s.

245 mcdo russesAujourd’hui, Jim Skinner, actuel PDG de la chaîne de restauration américaine, souhaite investir quelque 135 millions de dollars dans le pays. Il faut dire qu’en vingt ans, 245 McDo se sont im-plantés en Russie et servent en-viron 950 000 clients par jour. En outre, selon le rapport annuel de 2009, les ventes globales ont aug-menté de 3,8 % par rapport à 2008, dont 5,2 % en Europe. Et la tendance reste positive puisque le directeur évoque « la Russie comme le meilleur pays pour réin-vestir en 2010 » (The Moscow Ti-mes). N’en déplaise aux amateurs de pirojki, ces typiques petits pains fourrés à la viande, le premier McDo de Moscou a vingt ans et vit parfaitement intégré dans le paysage culturel de la Russie. Dasdrovia ! ✹ ✹

anne-claire ducoudray

charognard

P aris-Match. Si la vie est un loisir, la mort est son mé-tier. Le bon papa de l’info

qui règle le fric comme sa mon-tre. Deux « une » en trois semai-nes sur le suicide de l’ex-femme de Bertrand Cantat, Kristina Rady. Opération quotidienne et froide. 14 janvier 2010 : « Bertrand Cantat,  le  nouveau  drame ». 28 janvier 2010 : « Kristina :  le mystère de sa mort, le récit de ses derniers jours ». L’écrire propre-ment, en série, jour après jour. « Elle disait toujours “je dois sau-ver la vie de Bertrand. Moi je ver-rai après” ». Fabriquer de l’info comme un potier fait des pots. Stratégifier d’une plume calme : « Alice  et  Milo  retournaient  à l’école. Accompagnés de leur seul père ». Connaître son métier sur le bout des doigts, appliquer conformément aux précédents les règles de la mort. Souvenez-vous, déjà, il y a sept ans, lors de la mort de Marie Trintignant. Le 7 août 2003 : « Marie Trintignant : ses derniers jours de bonheur avec Bertrand Cantat ». Le 14 août : « Marie Trintignant, des familles incon-solables ».

Le 28 : « Marie Trintignant : les avocats lèvent le voile sur la soi-rée tragique ». Enfin, le 31 août : « Marie Trintignant, victime de la  passion ». Et puis, surtout, mettre les faits d’aujourd’hui en accord avec les grands principes : « [Kristina] demande pardon à ses enfants,  à  ses  parents.  Et  c’est tout ». La régularité est mère des grandes victoires et des ventes de papier glacé. Un spectacle de la

mort comme dans les arènes de la Rome antique. Quatre photos de Kristina Rady sourire aux lè-vres avant qu’elle ne se suicide. Tout ce qui s’élève sera abaissé, tout ce qui dépasse sera raconté : « Personne  ne  savait  qu’ils  vi-vaient là leur dernier instant de bonheur ». Il n’y a qu’à obéir, les yeux clos, et surtout sans but, si ce n’est guidé par l’odeur de la maille. Pas de cause finale. Tuer et faire

mourir dans le plus grand naturel, comme un arbre pousse, com-me la pluie tombe. « Tout le monde connais-sait et appréciait Kris-tina, […] elle avait re-trouvé  le  sourire,  elle était amoureuse. » C’est le destin. Fer-mons le bec. 650 000 exemplaires vendus. Mieux encore que pour le séisme en Haïti ✹ louis cabanes

Paris-match, Le cantat soi

Écrire la mort en série, jour après jour. comme un potier fait des pots.

Fille aînée de l’Église, la France, malgré la sépara-tion des Églises et de l’État, honore encore sa maman. Pas question de

faire triompher le Onze de l’équipe de foot nationale, qui entraîne dans son ennui tous les stades où elle se produit. Deux seules petites anicroches dans l’histoire, un titre de champion du monde en 1998, un titre de champion d’Europe en 2000.

Ni de couvrir de gloire le XV de la sélection nationale de rugby. Jamais un titre hors d’un tour-noi à V puis à VI nations. Et un lot éternel de déceptions. De grandes victoires dans les matchs amicaux, pendant les Coupes du monde, de préférence contre les tout-noirs néo-zélandais. Et une chute brutale de leur beau nuage lors des matchs décisifs ou en finale.Non, la France célèbre le chiffre biblique par excellence, le chif-fre de Dieu, 7. Dimanche dernier,

elle a remporté un nouveau ti-tre. Championne d’Europe de handball. Après les titres de championne du monde (1995, 2001, 2009), olympique (2008), et déjà d’Europe (2006). Toujours présente dans les grands rendez-vous, implacable et géniale ma-chine à gagner. Sans blaser. Mais quatre jours après son sacre, mercredi, le hand français n’oc-cupait plus qu’un quart de page, dans la Bible du sport, l’Équipe. Nul n’est prophète en son pays... ✹ X.M.

Le handBaLL tricoLore, sePt extra

Rab de Bazar | 11

goinfre

mc moscou, diPLomatie et hamBurgers

La Poste s’en posela Poste interroge les entreprises. Parmi les questions, un dilemme. « Quand vous recevez du courrier par La Poste, qu’est-ce qui compte le plus pour vous ? 1) L’heure à laquel-le vous recevez le courrier. 2) Le choix du lieu où vous pour-riez recevoir votre courrier. » Transmis aux naïfs qui croyaient que le courrier devait arriver à leur adresse… ✹

demi-jumeauxun papa doutait tant de la fidélité de sa femme qu’il a fait réaliser des tests adn sur ses deux jumeaux de 3 ans. et découvert qu’il n’était pas le géniteur de l’un d’eux ! ce phénomène rarissime chez les mammifères en général, et chez les femmes en particulier, s’appelle « superféconda-tion ». les frères ont été séparés après le divorce ✹

saMedi 6 février 2010 | Bakchich heBdo

la radinerie de la seMaine

christophe, usager de la raTP, se déplace avec une carte imagine r quatre zones, l’abonnement étudiant pour les transports en ile-de-france, à 525 euros l’année. comme des millions d’autres, il a subi la grève de la ligne a du rer, en novembre.aussi a-t-il esquissé un sourire de satisfaction en recevant ce gentil courrier de la régie : « Consciente des désagréments occasionnés par le mouvement social sur votre ligne du RER en novembre 2009, la RATP a décidé de mettre en place des offres commerciales. Vous trouverez ci-joint un chèque correspondant à la valeur de la réduction appliqué au prorata temporis sur votre titre de transport. » Montant du chèque : 1,42 euro. royale régie ! ✹

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12 | Autopromo

Informations, enquêtes et mauvais esprit également sur Internetbakchich info

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Au Rallye, par Pierre Place,éditions Warum, 16 euros.

Face aux crimes du marché, par William Bourdon, éd. La Découverte, 317 pages, 23 euros.

Si vous êtes à la fois fau-ché et curieux de la réalité du monde, Face aux crimes du marché,

le livre de William Bourdon, est un bonheur tombé de la main (gauche) de Dieu. Il suf-fit de lire ce bouquin, et aussi La Haine de l’Occident, celui de Jean Ziegler, pour tout comprendre de l ’ injustice mondialisée. On aurait dit na-guère, « des crimes du capita-lisme ».

bouquin de jouvenceJe vous vois bouger sur votre chaise : « La barbe du vieux Karl et de ces bouquins généreux et en-nuyeux sur une triste misère »… Rien du tout, ces livres ne sont pas écrits par des chaisières, ils ont la jouvence d’un Le Carré. On sait seulement que les salauds ne vont pas mourir à la fin, sinon le forum de Davos serait un cime-tière.Peut-être avez-vous vu William Bourdon à la télé, Saint Just au barreau de Paris ? Vous connais-sez sa tête d’acteur qui, dans les films américains, défendra tou-jours le Black dans le couloir de la mort ? C’est à cause d’elle, de sa tête, qu’il écrit des bouquins sur les désespérés. Comme si l’harmonie des traits donnait as-sez de force pour être généreux. Là, je m’égare du côté de Vogue Homme. Surtout, Bourdon pos-sède la connaissance du droit international comme Sarkozy ignore celui de la France : parfai-

tement. Et c’est cet utopiste sans illusions qui veut faire régner le droit sur tout le globe. Mais sa devise reste celle de Scott Fitzge-rald, le plus lucide des vivants : « Ce n’est pas parce que les choses sont désespérées qu’il ne faut pas se décider à les changer ». C’est dire que chaque matin, Bourdon hésite entre aller au palais de « justice » ou s’acheter un roc-king-chair. Pourtant, un café serré et il fonce au tribunal. Comme toujours. Si je lambine à vous décrire le héros du livre, son auteur, c’est que l’homme est dans le contenu. Et inverse-ment.Aux côtés de ses amis de l’asso-

ciation Sherpa, Bourdon se bat donc pour une justice sans fron-tières. Contre Total qui, en Bir-manie, balaye au bulldozer des villages entiers. Contre Areva, au Mali, dont les mines d’ura-nium trouent les poumons des touaregs. Pour illustrer la lutte entre les intérêts des multinatio-nales et ces malchanceux ayant eu la bêtise de naître là où Shell fait des bénéfices, William Bour-don énumère quelques grands massacres perpétrés au nom des bénéfices. Le mercure déversé dans la mer du Japon, le lait pour bébés de Nestlé qui fait dérailler la chaîne alimentaire du Sud, l’Union Carbide qui, sans incon-

vénients, tue 20 000 hindous à Bhopal, Pfizer accusé d’avoir tué des gosses nigérians lors des es-sais d’un médicament, en passant par le naufrage de l’Érika. Bref inventaire de la désolation.

sav du pauvreCe livre est si intense, et donne si bien, dans sa froideur, l’émo-tion qu’on éprouve quand on est témoin de l’horreur, qu’il est dif-ficile à décrire posément. Le mo-tif d’indignation est à toutes les pages. Hortefeux devrait le faire saisir pour trouble à la conscien-ce tranquille.Prenez ces think tanks, ces usi-nes à penser (privées) qui ajus-

tent les lois aux États-Unis : ces associations de malfaiteurs pous-sent toujours les législateurs à s’adapter aux désirs des multina-tionales, et la norme Exxon ou Texaco devient le Code civil ou pénal. Prenez les paradis fiscaux, on voit mieux leur rôle quand coulent les pétroliers en Breta-gne, mais le reste du business est à l’avenant : allez poursuivre une firme qui a son siège aux Iles Caïman…Toujours dans son refus du roc-king-chair, ce Bourdon qui souf-fre avec ses « patients », ne se contente pas d’énoncer, de dénon-cer. Il tente de réparer, comme un service après-vente non prévu dans le contrat de confiance de la mondiale gouvernance. Sur la saloperie faite au Birmans, Total a négocié des réparations et au Mali, Areva a été contrainte de mettre de la santé dans son mi-nerai. Tandis que certaines ONG deviennent des multinationales, avec parfois les défauts des trusts industriels, ou des États dans les États, partout de nouveaux révol-tés se regroupent pour demander justice des crimes politiques ou industriels. Ce qui dans le monde selon Wall Street est souvent la même chose. Mais Adam Smith n’avait pas prévu Fitzgerald✹� jacques-marie bourget

muzik

Heligoland Massive attacken 2003, on ne don-nait pas cher de mas-sive attack, en pleines

dissensions internes. ouf ! Leur re-tour tient toutes ses promesses. Leur cinquième album porte son nom comme une moufle : Heligoland (une île de la mer du Nord). il fait en effet bien froid sur ce beau disque ombrageux qui convie le gratin des vocalistes. Damon albarn, martina topley-bird, Hope sandoval ou Ho-race andy hantent ses rythmiques glacées, sa basse cryogénique et ses synthés morbides sur fond de groove crève-cœur.

urgence HaïtiPourquoi faut-il que les disques à voca-tion humanitaire ras-semblent toujours les

chanteurs les plus ringards ? Dans la veine des enfoirés, voici urgence Haï-ti. cette compilation, dont les bénéfi-

ces seront reversés à action contre la faim, enchaîne maurane, calogero, Florent Pagny, Lara Fabian, bernard Lavilliers... si l’intention est loua-ble, nos oreilles en prennent un sale coup. À quand murat chantant la paix dans le monde avec Daft Punk et sébastien tellier ?

i’M new Heregil scott-Heronquinze ans qu’on était sans nouvelles de gil scott-Heron. Ça valait

le coup d’attendre... Pionner du hip-hop de chicago, militant anti-raciste, le sexagénaire revient en grâce après être passé par la case prison. I’m New Here confirme ses talents de poète urbain et de musicien hors-pair. tein-té de soul vénéneuse, folk mutant, trip-hop ou blues moderne, ce nouvel album mi-acoustique mi-électronique impressionne par sa puissance vocale. un flow caverneux entre Leonard co-hen et barry White ✹

éLéoNore coLiN

béDé

M ême pas la trentaine et voilà Pierre Place sélec-tionné dans la course au

prix du festival d’Angoulême 2010. Si le jeune homme repart bredouille cette année, le succès d’estime est là. C’est que les plan-ches offertes dans l’ouvrage mé-ritent qu’on s’y pose, le coude sur le zinc accompagné d’un bon café noir. Pour vous ce sera le Balto, l’Abribus ou le Drapeau, pour lui c’est le Rallye.

canons dès potron-MinetUn bar PMU des environs de la Porte de Pantin. Un lieu de vie où se croise une certaine France d’en bas. Celle qui, selon qu’elle est noire, arabe, ou blanche, n’a pas de boulot, pas de papiers, pas de chance. C’est la France qui joue au Rapido et boit des canons dès potron-minet. Il y a José, fraîchement libéré de Nan-

terre. José, c’est un dur. Entre deux séjours à l’ombre, il vient se poser au Rallye, prendre le pouls du quartier et tchatcher avec Antoine, le taulier. Lui, il a hérité des murs il y a trois ans et s’obstine à faire des cocktails au Get 27. C’est un flambeur. Et ça commence à lui courir, toutes ses embrouilles. Il se verrait bien sur la côte en patron de boîte. Et pourtant il reste. Faute de mieux. Comme une bière de fin de fût, c’est pas très bon mais ça se boit. Faute de mieux. Nabila, Hakim, Driss, Idir, Sacha et tant d’autres. Comme Will Eisner racontait ses errances à Brooklyn, Pierre Place nous emmène dans les quartiers populaires du XIXe. Entre BD reportage et roman noir, le monde à portée de comp-toirs ✹� simoN PieL

un roMan noir coMMe un café

Un vrai (Bour)don de soiengageMent William bourdon est avocat à Paris. quand il ne défend pas Bakchich et ne lutte pas avec l’association sherpa pour une globa-lisation à visage humain, cet homme-là écrit des livres sur les désespérés. généreux, son dernier propose des armes aux citoyens.

Un peu de culture | 13

sameDi 6 Février 2010 | bakcHicH Hebdo

Page 14: Bakchich N°14

�4 | Un peu de cultureen salles

zappette

Les gens de Canon City, bled américain profond du Colora-do, n’ont pas peur de la crise. au contraire. L’industrie locale c’est la pri-

son. Dans cette ville pleine d’avenir, un cinquième de la population est un tau-lard. Une émission de la chaîne cablée planète Justice, mardi 2 février en soi-rée, a diffusé un documentaire impla-cable : Le Business du bagne. avec le film de planète, on a l’horreur pour miroir. ainsi donc, à Canon City, le prix de l’immobilier a monté de 20 % en une paire d’année. À Florence, dans la périphérie de ce bled, des écoliers ont cassé leur tirelire pour participer à l’achat d’un terrain privé où va se construire une treizième taule, privée bien sûr. actionnaire d’un bagne à 17 ans, ça vous fait un homme.Sur l’écran de planète, on peut voir des gros pépères contents de ce que leur

industrie ne soit « pas polluante », moins que l’élevage de vaches à cause des rots des ruminants.

ma cabane aux usaet puis, la prison c’est comme les cime-tières, le réassort ne risque pas de manquer. C’est avec le regretté Reagan que le tout carcéral a fait un boum : tolérance zéro. Forcément, quand on exécute des innocents, ça signifie qu’on ne pinaille pas pour coller des non cou-pables au placard, surtout s’ils sont blacks ou latinos.ainsi, il y a deux millions d’US citizens en cabane et, chaque année, huit mil-lions de ces hommes, étoilés d’une bannière, passent un petit moment derrière les murs. La double peine, qui veut qu’un condamné libéré, et qui vole une pizza, peut retourner à Biribi pour dix ans, n’est pas une loi qui déplaît à Canon City. en vingt ans, les États-Unis ont ouvert plus de 3 000 prisons, le budget de la pénitentiaire a été multi-

plié par cinq et le business carcéral est le deuxième employeur d’amérique. N’est-il pas beau, ce pays-là ? Le docu-mentaire nous montre un shérif être le propriétaire de ses enchristés. Il fait ce qu’il veut des prisonniers, qui n’ont ni journaux, ni télés, ni bouquins. Juste la Bible. ailleurs, on vient d’inventer un système vidéo qui permettra de suppri-mer les parloirs. Suffira pour le câlin de lécher l’écran, idéal contre la diffusion du H1N1.en France, ne soyez pas impatients, ça vient. La preuve, la société Sodexo a déjà une prison privée en angleterre. À Seysses, près de toulouse, une société que je vous recommande, la Gepsa, s’occupe de tout sauf des matons. Mais ça va ne pas durer. Bientôt, pour éco-nomiser des fonctionnaires, de gentils vigiles vont prendre le relais. Ici, pour l’investisseur, pas de crise à craindre, il y aura toujours une Guigou, une MaM ou un Hortefeux pour leur envoyer du monde ✹ J.-M. B.

grâce à la geôle, touchez le pactole

I love you Phillip Morris : incroyable, un bon Besson !

ciné Un escroc allumé s’échappe plusieurs fois de prison pour retrouver l’homme de sa vie. Un film terriblement drôle et sensible inspiré d’une histoire vraie. Interview bidon de Luc Besson, producteur de l’opus.

Alors, Luc, t’as enfin produit un bon film ?- ’Tain, tu déconnes ? C’était pas un bon film

Taxi ? ’Tain, dans Taxi, Samy, un as du volant, roule en Peu-geot 406 blanche, bastonne des Teutons et s’engueule avec Ma-rion Cotillard parce qu’elle a ses règles.- C’est pas le même scénario que Le Transporteur ?- T’es fou ? Dans Le Transpor-teur, Jason, un as du volant, conduit une BMW noire, il se frappe avec des Niakoués et em-balle Shu Qi. Ça n’a aucun rap-port !

- Complètement différent de Ta-ken, donc ?- T’as carrément raison, mec. Liam, un as du volant agent se-cret, conduit une Audi S8, fra-casse des salauds d’Albanais et sauve sa fille kidnappée par un cheikh arabe pédophile. Non, vraiment, à Bakchich, vous n’y connaissez rien en cinoche.- OK, t’es le plus fort, Luc, mais je voulais parler de I love you Phillip Morris. Cette histoire d’amour fou entre deux hom-mes, c’est pas vraiment Europa-Corp, non ? - J’aime les lolitas, mais si tu regardes bien Le Transporteur,

Hitman ou Le Baiser mortel du dragon, il y a toujours le héros qui tombe le marcel, gonfle ses gros biscotos huilés et s’engage dans un corps à corps sensuel avec le malfaisant en chef. On est gay friendly, à Europa…- Peut-être, mais cela n’a rien à voir avec Phillip Morris, basé sur une histoire vraie absolu-ment abracadabrantesque. Cel-le d’un petit arnaqueur, Jim Carrey, qui dé-couvre le grand amour en pri-son, et qui va s’échapper une demi-douzaine de fois pour re-trouver l’hom-me de sa vie. Le film est incroyablement drôle, sensible, émouvant, politique-ment incorrect, et il est réalisé par Glenn Ficarra et John Re-qua, scénaristes du très réussi Bad Santa, et non pas par les tâcherons habituels de ton écu-rie. Bref, c’est ton chef-d’œuvre, et de loin ! - Tu sais, je suis seulement le producteur exécutif de ce truc, j’ai aidé au financement car les Américains aiment pas trop les films de pédés et ils ont déjà donné avec Le Secret de Broke-back Mountain. Bon, je trouve que ça manque quand même de putes de l’Est, de yamakasis vo-lants et de poursuites… Mais

I love you Phillip Morris, de Glenn Ficarra & John Requa, avec Jim Carrey, Ewan McGregor.En salles le 10 février.

la hordede Y. dahan et b. rocher

Le scénario est nul (des racailles du 9-3 transformées en morts-vivants), les dialogues pathétiques (« J’vais te faire chanter La Marseillaise ») et les acteurs mauvais comme des co-chons. Mais on sent que les réalisa-teurs de cette série z ont le cinoche dans le sang et il y a un enthousias-me vraiment communicatif.

Wolfmande Joe Johnston

terminé depuis plus d’un an, Wolf-man est un film qui a beaucoup souf-fert (« divergences artistiques » en pagaille, départ du réalisateur Mark Romanek…). À l’arrivée, une assez bonne surprise, grâce à un Benicio Del toro plus poilu que Sébastien Chabal et quelques séquences super-bement réalisées.

lovelY bonesde peter Jackson

plus peter Jackson maigrit, plus son cinéma devient lourd. Réalisateur de films gores zinzins, notre Néo-zélandais est devenu une superstar avec Le Seigneur des anneaux, block-buster numérique un brin ampoulé. après un King Kong complètement raté, Jackson s’emmêle les logiciels avec cette histoire d’ado massacrée par un serial-killer qui contemple sa famille et son assassin depuis l’au-delà. pas un gramme d’émotion dans cette connerie new age fluo, dégoulinante d’effets 3D très mo-ches.

ninJa assassinde James mcteigue

Les frères Wachowski et le réalisateur de V pour Vendetta reviennent pour une histoire de ninjas bastonneurs. C’est visuellement splendide, il man-que simplement un scénario et de vrais persos. et dire que les frères W ont réalisé Matrix… ✹

j’aime bien l’accident de voitu-res qui marque le coming-out de Jim Carrey. - En parlant de Carrey, il est simplement géant et livre sa plus belle performance depuis Man on the Moon. - C’est vrai, mais entre nous, ça vaut pas une bonne baston avec Jason ou Jet Li, non ? Mais pour rassurer mes fans, je voudrais leur dire que le 17 février pro-

chain, il y aura F r o m P a r i s with Love, avec John Travolta, as du volant, qui conduit une Renault et qui e x p l o s e l e s Chinetoques au

lance-roquettes. Ça va déboîter ! Et surtout, en mars, ils pour-ront aller voir L’Immortel, avec Jean Reno, qui conduit un 4x4 à pot catalytique puis une moto, qui va faire vivre la misère à Kad Merad. C’est inspiré du ro-man de Franz-Olivier « Prosta-te » Giesbert et je peux l’annon-cer en avant-première à Hachich : c’est mon putain de Citizen Kane ! ✹ MaRC GoDIN

La plus belle performance de Jim Carrey depuis Man on the Moon.

« Mais où est passé (Frédéric) Mitterrand? » se demandait, en couverture, l’Express (28/01). L’hebdo relevait en effet qu’au lendemain de polémiques saignantes (ses séjours thaïlandais, polanski…), le ministre de la Culture « joue aujourd’hui la discrétion pour tenter de rebondir ». Il était pourtant à angoulême, le 31 janvier, pour remettre les prix au Festival de bande dessinée. Mais la Charente, à paris, ça ne compte pas.

le pipole de la semaine✹ ✹ ✹ ✹ ✹ ✹

bakchich hebdo | SaMeDI 6 FÉvRIeR 2010

Page 15: Bakchich N°14

Un peu de culture | 15

Directeur de la rédaction : Nicolas Beau • Conseiller éditorial : Jacques-Marie Bour-get • Chroniqueurs : Matthieu Adenil, Daniel Carton, Jacques Gaillard, Marc Go-din, Doug Ireland, Éric Laurent • Rédacteur en chef édition : Cyril Da • Maquette : Rampazzo et associés (conception), Émilie Parrod, Victor Buchotte • Secrétaire de rédaction : Pierre-Georges Grunenwald • Rédaction : Monsieur B, Sacha Bignon, Émile Borne, Émilie Buono, Louis Cabanes, Renaud Chenu, Éric de Saint-Léger, Lucie Delaporte, Catherine Graciet, Éric Laffitte, Anthony Lesme, Laurent Macabies, Simon Piel, Enrico Porsia, Bertrand Rothé, Gré-gory Salomonovitch, Anaëlle Verzaux• Dessinateurs : Bar, Baroug, Bauer, Essi, Ray Clid, Khalid, Kerleroux, Mor, Morvan-diau, Nardo, Oliv’, Pakman, PieR Gajewski, Roy, Thiriet • Directeur de la publication : Xavier Monnier.Groupe Bakchich, SAS au capital de 56 980 euros • Siège social : 121 rue de Charonne 75011 Paris.

CPPAP : 1114 C 90017 • ISSN : 2104-7979 • Dépôt légal : à parution • Impression : Print France OffsetGestion des Ventes au numéro : A.M.E | Otto Bors-cha | Tél. 01 40 27 00 18 | [email protected] | N° Vert : 0800 590 593 réservé uniquement au réseau de vente. Bakchich Hebdo près de chez vous : www.trouverlapresse.com

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festoche

la bédé, on l’angoulême ou on la quitte

Thiriet garde bonne mineBravant la fatigue consécutive à quatre jours de dédicaces, Jean-Michel Thiriet, vieux routard de la BD, collaborateur régulier de Fluide Glacial, nous fait l’hon-neur de nous raconter son festival en dessin. L’accueil un peu plus chaleureux que celui de Willem, Thiriet joue du feutre avec brio. Comme autant de regards, parfois caustiques, parfois absurdes, sur le grand raout de la BD. Son dernier ouvrage, Fugues pour six pattes, vient de paraître aux éditions L’Association ✹ S.P.

a u wagon-bar, Berberian cause musique. Jul, dessi-nateur à Charlie Hebdo,

taille le bout de gras avec une jo-lie brune. « Non mais, attend, quand DiCaprio dessine Kate Winslet dans Titanic, c’est à mou-rir de rire. Même place Du Tertre on n’oserait pas montrer le des-sin », s’indigne la belle. Ohm, dessinateur chez Glénat, sourit. Le doute n’est plus permis, il s’agit bien du TGV Paris-An-goulême. Voilà trente-six ans que les minots des Charentes ac-cueillent le festival international de la BD. Cette année, c’est Blutch qui préside. Pas le caporal des Tuniques bleues, mais le dessina-teur strasbourgeois, grand prix du festival l’année dernière, vir-tuose du crayon et créateur du Petit Christian, de Mitchum, ou encore d’un très attendu Adieu Paul Newman !

La pluie s’abat sur la ville. Fluide Glacial, venu en mini-bus pour l’occasion, « sert sa soupe » aux visiteurs transits. « Cette année, il y a moins de monde. L’année dernière, c’était mission impossi-ble pour trouver un restau où il restait de la place », confie un auteur. Le chapiteau qui abrite les « grands éditeurs », Caster-man, Glénat, Dargaud et autres, est toutefois pris d’assaut.

feutre acéréDirection celui de la BD indé-pendante, à côté de l’hôtel de ville. Willem, sourcils froncés, feutre acéré, trône aux éditions l’Association. « Bakchich ? Vous voulez une réponse polie ? J’ai acheté les deux premiers… Et puis je les ai jetés. » La veille, Sempé, un autre grand bonhomme, est venu faire un tour. « Probable-ment le dernier », nous dit-on. La rumeur angoumoisine le dit très fatigué.

Mais la relève est là. Avant d’al-ler finir la journée au bien nom-mé bar le Minage, elle défend haut et fort les couleurs du neu-vième art. Judith et Marinette, FLBLB, Warum, Requins Mar-teaux. Tous sont là. Joe Sacco, pionnier du bédéreportage, vole la vedette pour quelques instants. Il répond aux questions de Fran-ce Inter. Gaza, Sarajevo. Zones de conflits. Zone de croquis. Et quel-ques traits de plus pour dessiner l’histoire. Celle d’Angoulême continue de s’écrire, au rythme des dédicaces. L’amateur de bulles est prié d’acheter un exemplaire pour espérer un gribouillis personna-lisé. C’est que la crise est passée par là, mon bon monsieur. Dimanche, 16 h 30, le verdict tom-be. Baru remporte le grand prix. Mince ! À une lettre près, c’était pour Barou, fondateur de Bak-chich et dessinateur à ses heures perdues ✹ S. P.

SAMEDI 6 FÉVRIER 2010 | bakchich hebdo

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pillages confraternels

L’agité du Bockelcopé (Jean-françois) qui vient de « nor-maliser ses relations avec Sarko », et réciproquement, a inventé une nou-velle unité de mesure politique : le « Bockel », du nom, bien sûr, de l’ac-tuel et semi-clandestin secrétaire d’État (d’ouverture) à la Justice, Jean-Marie Bockel, éjecté naguère de la coopéra-tion sur pression de feu Bongo. confi-dence du président du groupe UMp à l’assemblée au Figaro (02/02) : «Quel-que part, Sarkozy ne nie plus le fait que j’ai une existence politique. Je ne peux pas valoir moins que Bockel », lequel, animateur de la microscopique « aile » dite « de gauche » de la majorité, se-rait donc le degré zéro de « l‘existence politique ». Que Kouchner se rassure : il est au moins à Bockel +1. Le Puy du floucomme d’autres, le Point (28/01) don-ne pour « imminente » la nomination au conseil constitutionnel du sénateur mitterrandolâtre Michel charasse, par la grâce de sarkozy. le magazine s’est intéressé à la gestion locale de Michou-les-Bretelles, maire, depuis 33 ans, de puy-guillaume (2 752 habitants, puy-de-Dôme), mais aussi « influent, bien au-delà de sa commune, en Auvergne ». « Il a rendu bien des services », observe un élu. « Il a arrosé tout le monde », résume un autre, « puisant pour le bien public dans la réserve parlementaire ». on se pince : un mitterrandiste aussi patenté pourrait avoir eu des mœurs bananières ?

Bousin germainl’ex-chancelier allemand gerhard schröder n’en finit plus de courir le très gros cachet. alors même qu’il dispose d’une retraite publique de 20 000 euros mensuels. sorte de « porte-drapeau » du titan moscovite de l’énergie gazprom, conseiller de la Banque rothschild pour les questions russes, il est aussi attendu le 21 février à téhéran où une organisation patronale l’a enrôlé pour « vendre » les entreprises allemandes au Moyen-orient. Questionné par le Nouvel Obs (28/01), gerhard s’en sort par une boutade : « J’ai 65 ans. Je ne veux pas être toute la journée à la maison dans les pattes de ma femme. Il faut bien que je m’occupe.  C’est  normal,  non ? » ah évidemment, si ahmadinejad assure la paix du foyer schröder…

Ermite et légendesÀ son retour d’afrique où l’avaient conduite ses fonctions « d’ambassa-drice » du fonds mondial contre le sida, carla Bruni-sarkozy a bien voulu, pour le Parisien (31/01) s’expliquer sur un trait fondamental de sa personnalité, sa « discrétion » (elle aussi !) : « J’ai toujours vécu comme une ermite. Et cela ne s’arrange pas avec le temps (rires). Je ne suis pas forcément quelqu’un de très sociable ».sûrement pas, mais en revanche « quelqu’un de très » cohérent, allant sans cesse, dans sa fuite du monde, de monastère isolé en carmel : le mannequinat, le show-bizz, le palais de l’Élysée… Tony a eu du BlairDes députés britanniques, qui siègent à la commisssion d’enquête sur l’en-trée de la grande-Bretagne dans la guerre d’irak, ont fait une remarque d’un certain bon sens à tony Blair, qu’ils entendaient le 29 janvier : dans les mois qui ont précédé l’invasion, bien loin de pouvoir lancer une formi-dable machine de guerre, « l’économie irakienne était en lambeaux, (...) cade-nassée par le régime de sanctions in-ternationales ».Blair ne s’est pas démonté (le Monde, 02/02) : « Si on avait laissé (Saddam) au  pouvoir  avec  ses  fils », il aurait « sans doute repris sa quête » d’armes de destruction massive. pour le coup, « le doute » n’a pas profité à l’accusé. et encore moins à ses malheureux ad-ministrés.

Appelée araignéeDominique strauss-Kahn, que, selon un récent sondage ifop-JDD, les fran-çais – mais pas les sympathisants ps – préfèrent à Martine aubry pour la candidature socialiste de 2012, n’est peut-être pas systématiquement ga-lant homme. DsK qualifiait naguère, croit savoir le Journal du dimanche (31/01), sa gran-de rivale au sein du gouvernement Jospin de « tarentule », c’est-à-dire, selon le Petit Larousse qui fait tout de même foi, de « grosse araignée ve-lue ». Dont, par surcroît, il raillait « l’incompétence » en matière écono-mique et « la méchanceté ». elle lui inspirait pourtant bien des gentilles-ses… ✹

aUrÉlien Donat

Georges Frêche, l’assaut impérieux

BAndiT De déclarations fracassantes en dérapages non contrôlés, le patron ps de la région languedoc-roussillon dérange. gros plan sur un éléphant pas si rose.

Il est comme ça, Georges : impérieux. Trois fois député, maire de Montpellier de 1977 à 2004, il trône – pour qui l’a vu en séance, le mot n’est pas trop fort – dans les hémicycles de la région

et de la communauté d’Agglo, et collectionne les surnoms. « Imperator » pour son autoritarisme et son goût de l’Antiquité, « Le Pen de gauche » pour ses saillies verbales et ses œillades aux pieds-noirs, nombreux à Montpellier. Si l’on ajoute ses lubies – il a émis l’idée d’ériger les statues de dix grands du siècle dernier, parmi lesquels Mao et Lénine –, sa réputation, qu’il a mau-vaise, n’est plus à faire. De tout cela, ce fils né dans un bled du Tarn en 1938, d’une institutrice socialiste et d’un mi-litaire résistant qu’il n’a que très peu connu, s’en fiche comme de l’an 40.

PiédEsTALIl est comme ça, Georges : confiant. Démesurément. « Il tient tout de sa mère, décrypte Karim Maoudj, jour-naliste à Midi  Libre et auteur d’une biographie* du monarque. Elle  l’a  toujours  mis  sur  un piédestal. » L’intéressé pré-fère citer Romain Gary : « Les hommes élevés par des femmes  ont  en  eux  une confiance  extraordinaire. J’ai  peur  de  rien,  j’ai  les épaules larges. » Mégalo ? « Non… Mais quand on fait des choses importantes, y en a toujours qui sont pas d’accord, hein, comme De Gaulle… » Désigné chef de file des régionales par les militants, Georges a senti le vent tourner du côté de la rue de Solférino. « Aubry a essayé de 

m’aligner », glisse-t-il, sachant qu’elle ne peut ni se passer de lui ni le supporter.Les attaques fusent depuis l’entrée en campagne. Hélène Mandroux, qu’il avait « placée » à la mairie, doit lancer une liste contre lui. Jean-Louis Roumé-gas, ancien colistier, tête de liste Europe-écologie, assène : « Il n’est plus que l’ombre de lui-même ».

Quant à Raymond Couderc, sénateur-maire de Béziers investi par l’UMP, il claironne qu’il

va défier en mars un homme « sénile ». Mais s’il ne se déplace qu’avec une canne – une douleur tenace à une hanche – le vieux lion montre encore les crocs. Der-nier coup de griffe : début octobre, en

pleine séance municipale, il lance, hi-lare et ostensible, à un dissident fré-chiste, adjoint au maire PS : « Le jour où je te couperai les couilles, tu ne le 

verras pas venir. »

BAsTonIl est comme ça, Georges : bagarreur.

Déjà, étudiant marxiste-léniniste – tendance Mao – à la fac de droit de Pa-

ris, il bastonnait dur contre les partisans de l’OAS, avant de débarquer à Montpel-lier en 1969. Puis la SFIO et le PS, même

« s’[il] les emmerde depuis trente ans, parce que je suis pas un apparatchik ». Et de conclure : « Il n’y a qu’une chose qui peut m’abattre, c’est la mort. Et ce 

n’est pas pour demain. » L’Impe-rator défie même la faucheuse. Il

est comme ça, Georges ✹BenJaMin König

*Georges Frêche, Grandes heures et décadence, éd. de Paris.

reMontÉe

BiEn mALAwi…Mes chers petits Gaulois, jus-q u ’ i c i , vo u s vous interessiez beaucoup aux biens mal ac-

quis de nos dictateurs afri-cains. Feu Bongo, Sassou de Brazza ou Obiang de Malabo. De grâce, continuez: ça nous aidera. Mais, dieu merci, le monde change. Le chefaillon Kadhafi a enfin perdu son trône de président de l’Union afri-caine. Il va falloir vous y faire, chers Gaulois, apprenez ce

qu’est le Malawi. Et au-delà de l’étonnante fessée adressée lors de la Coupe d’Afrique de na-tions à l’Algérie (3-0). Les Fen-necs devront s’en remettre avant d’aller se ballader cet été en Afrique du Sud. Ce petit pays qu’est le Malawi, membre du Commonwealth, est aussi intéréssant et compli-qué que le nom de son prési-dent Bingu wa Mutharika! À vos souhaits. Heureusement que son nom n’était pas dans les faux listings Clearstream ✹ s.a.r. le prince poKoU

Culture | ��6 | Ben la Der bakchich

BAkchich hEBdo | saMeDi 6 fÉvrier 2010