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    http://www.archive.org/details/bibliothquedel157ecol

  • BIBLIOTHQUEDE L'ECOLE

    DES HAUTES TUDESPUBLIEE SOUS LES AUSPICES

    DU MINISTRE DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE

    SCIENCES HISTORIQUES ET PHILOLOGIQUES

    CENT CINQUANTE SEPTIME FASCICULEHABITATIONS GAULOISES ET VILLAS LATINES

    DANS LA CIT DES MEDIOMATRICESPAR ALBERT GRENIER

    (avec plans) 1 , '' " >

    ^'/-A

    .

    .^\

    PARISLIBRAIRIE HONOR CHAMPION

    5, QUAI MALAQUAIS

    1906Tous droits rservs

    E DITE U R

  • HABITATIONS GAULOISES ET VILLAS LATINES

    DANS

    LA CIT DES MDIOMATRICES

    TUDE SL'R LE DVELOPPEMENT DE LA CIVILISATION GALLO-ROMAINE

    DANS UNE PROVINCE GAULOISE

  • HABITATIONS GAULOISESET

    VILLAS LATINESDANS

    LA CIT DES MDIOMTRICESTUDE SUR LE DVELOPPEMENT

    DE LA,

    CIVILISATION GALLO-ROMAINE DANS UNE PROVINCE GAULOISEAVEC PLANS

    PAR

    Albert GRExNIERAGRG DE l'u.NIVERSIT

    LVE DIPLM DE LA SECTIOU d'hISTOIRE ET DE PHILOLOGIEDE l'cole pratique des hautes tudes

    PARIS

    LIBRAIRIE HONOR CHAMPION, DITEUR5, QUAI MALAQUAIS

    1906

    Tous droits rservs

  • A MES MAITRESDE l'universit DE NANCY

    DE l'cole des hautes tudes

    ET du collge de FRANCE

    ET

    AMES AMIS LORRAINS

  • Sur l'avis de M. Hron de Villefosse, directeur d'tudes d'pi-graphie latine et antiquits romaines, et de MM. Emile Chtelain etThdenat, lve diplm, Commissaires responsables, le prsentmmoire a valu M. Albert Grenier, le titre : d'lve diplm de laSection d'histoire et de philologie de VEcole pratique des Hautes

    tudes.

    Le Directeur de la Confrence,

    Hron de Villefosse.

    Le Prsident de la Section,

    G. MONOD.

    Paris, le 13 mars lOO'i.

    Les Commissaires responsables,E. Chtelain, Thdenat

    .

  • INTRODUCTION

    Les habitations de l'poque gallo-romaine ont laiss de nom-

    breuses traces dans les campagnes du pays messin. Mais parmi

    les ruines qui nous en conservent le souvenir, deux ou trois

    seulement ont t, jusqu' prsent, l'objet de fouilles appro-fondies et d'tudes qui semblent dfinitives. De quelques autres

    villas, le plan a t reconnu dans ses parties essentielles.

    La plupart du temps, nous ne connaissons que l'emplacement

    de ces habitations, et l'tendue approximative de la superficie

    qu'elles couvraient. Des monnaies, ramasses parmi les

    dbris nous fournissent encore, parfois, quelques renseigne-

    ments sur la date de ces anciens tablissements. Ce sont l

    tous les matriaux qui ont servi cette tude.

    La part des renseignements indits que nous apportons

    est minime. Nous tenons cependant exprimer notre

    reconnaissance ceux des archologues lorrains qui nous

    les devons. Mais il nous a sembl que mme sans rvler aucundtail nouveau, une tude d'ensemble des restes d'habitations

    rencontrs dans une mme rgion, pouvait avoir sa raisond'tre et son utilit. Le plan d'une villa, les dtails de son am-nagement, le style de ses dcorations, mme le mieux dcrits,par la plus consciencieuse des monographies, ne prennent leur

    vritable signification, que parla comparaison avec les exem-

    ples voisins d'autres villas du mme genre. 11 est impossibled'expliquer les diffrentes particularits de la technique de

    construction, voire la destination des diffrentes parties des

  • 10

    btiments, sans se rfrer perptuellement aux ruines de mmecaractre dcouvertes antrieurement. I.es archologues en

    sont presque toujours rduits ii raisonner par analogie. 11 leursera commode de trouver, runis et classs, les documentsncessaires pour clairer leurs fouilles.

    Mais surtout une tude d'ensemble des difTrentes villas

    d'une mme contre, peut permettre de dgager du caractreparticulier de chaque villa, et des dtails qui lui donnent sa

    physionomie propre, l'ide gnrale qui a prsid la cons-

    truction de ces habitations et les diverses modifications qu'elle

    a subies. Il devient ainsi possible de suivre l'histoire de l'ar-

    chitecture domestique dans une rgion donne, et, par suite,

    celle des grandes directions de l'art et de la civilisation.

    Les habitations portent en outre, profondment empreinte, latrace des hommes qui les ont leves et habites. Leurs dimen-sions, leur conomie intrieure, leur dcoration rpondaient

    la richesse des populations, l'organisation de la famille et du

    travail. Leur rpartition fut soumise aux conditions naturelles,

    leur dveloppement aux vnements politiques. L'tude mtho-dique et raisonne des restes d'habitations fournit de pr-

    cieuses indications touchant l'tat conomique et social d'unpays.

    L'tude des habitations rurales et des villas est tout particu-

    lirement apte mettre en lumire les rsultats obscurs de

    la vie matrielle et de la culture morale de la Gaule roma-

    nise. Les villes jusqu'ici ont particulirement attir l'atten-tion. Mais leur civilisation est souvent fort diffrente de celle

    des campagnes. Les cits participent plutt de la vie gnrale

    des autres grandes villes, qu' celle du pays mme dont elles sontle centre. Le groupement de la population y modifie les condi-

    tions de l'existence ; il aide la transformation rapide des

    murs. Dans les provinces soumises une domination tran-

    gre, tout particulirement, lesvilles sont les points de contact

    entre le gouvernement conqurant et le reste du pays. L'action

    exerce immdiatement autour d'elle par l'administration et

  • 11

    ses reprsentants, parfois ne dpasse pas les portes des centres

    urbains o elle sige. Les monuments officiels qu'elle y lve

    prsentent une faade souvent trompeuse. Par eux on peut

    juger sans doute des directions gnrales imprimes la massedu peuple, et des efforts tents pour agir sur sa civilisation.

    Du rsultat de ces efforts, les documents que fournissent les

    campagnes permettent seuls de se faire une ide.

    L'importance des villes, au point de vue conomique et social,

    ne saurait d'ailleurs tre compare avec celle des campagnes.

    Aux poques anciennes surtout, c'est des campagnes que le

    pays tire ses ressources. L s'accomplit tout le travail, de

    l vient toute la richesse. L'histoire mme de la terre est labase de toute l'histoire. L'tude des habitations rurales nous

    permet prcisment d'atteindre cette histoire de la terre. Les

    villas sont invariablement lies l'exploitation agricole du sol.

    Le caractre de leur architecture est solidaire de celui de la

    colonisation du domaine dont elles sont le centre. A unemaison de plan latin, rpondent ncessairement des mthodes

    de culture latine, une organisation du travail et de la pro-

    prit de forme latine. L'extension des villas mesure donc

    exactement la pntration de la civilisation latine dans les cam-

    pagnes. Le confort et le luxe des habitations tmoigne de la

    prosprit de l'agriculture. Leurs dimensions correspondent h

    celles des domaines. Elles nous permettent de juger de l'tat dela proprit et par suite de l'tat social des populations. L'his-

    toire des villas ne se spare point de celle du travail agricole,

    et du dveloppement conomique du pays. On ne sauraitlaisser dissmins et perdus dans les innombrables revues

    locales, les documents prcieux, que peuvent ainsi four-

    nir les fouilles.

    Les limites d'une cit gallo-romaine nous ont sembl prter

    un cadre naturel cette tude des villas. Ces limites reprodui-

    saient, en gnral, celles qui avaient spar les anciens peuples

    gaulois. La civilisation latine rencontra donc, sans doute,

    l'intrieur de chaque cit, les mmes traditions et les mmes

  • 12

    usages. Ces trs anciennes divisions dpendaient de la confi-

    guration mme du sol, plutt que de l'action artificielle descauses politiques. Des ressources naturelles identiques, un

    mme climat, y durent produire des habitations assez sem-blables. La part d'autonomie que laissait aux cits le gou-

    vernement lointain de la mtropole, permettait chacune

    d'elles de garder sa physionomie propre. Le dveloppement de

    l'art de btir et de la colonisation, ne put donc manquer d'y

    prsenter une certaine unit. Le territoire d'une cit offre, en

    outre, l'avantage d'tre assez restreint pour permettre un re-

    censement attentif des traces d'habitations gallo-romaines qui

    s'y sont rencontres, et assez vaste pour que le nombre et la

    varit de ces exemples prtent leur tude un certain intrt

    scientifique. Les circonscriptions adoptes par l'administration

    romaine taient les plus naturelles pour l'tude des habi-

    tations de l'poque gallo-romaine.

    Des raisons personnelles n'ont pas seules dtermin le

    choix que nous avons fait de la cit des Mdiomatrices. Les

    ruines si nombreuses, et quelques-unes si caractristiques qui

    peuplent la valle de la Moselle, celle de la Sarre et les pla-

    teaux de l'Eifel, aux environs de Trves, avaient d'abord attir

    notre attention. Cette brillante floraison de villas de luxe ne

    date gure, autant que nous avons pu nous en convaincre, que

    de la seconde moiti du iii^ sicle. Elle fut dtermine unique-

    ment par le sjour partir de cette poque, des empereurs dans

    la ville de Trves. Ce sont eux et les grands seigneurs de leur

    cour, qui, dans les campagnes environnantes, ont lev ces

    somptueuses habitations de plaisance. Les villas trvires ne

    tiennent donc pas la vie intime du pays. Elles n'y sont pas

    le produit normal du dveloppement de la colonisation. Elles

    ne sauraient en aucune faon nous reprsenter les diffrentes

    phases de la civilisation gallo-romaine dans le pays.

    Tout autre est le caractre des villas mdiomatrices. Les

    vestio-es qui en ont t retrouvs sont infiniment moins nom-

    breux que dans la rgion de Trves. Ils n'offrent pas, sans

  • 13

    cloute, le mme intrt au point de vue de l'histoire de Tart.Mais les conditions dans lesquelles ces habitations ont t cons-

    truites, relvent bien plus de l'histoire conomique de la citdes INIdiomatrices, que de l'histoire politique de l'empire

    romain.

    Les restes de ces villas nous permettent donc de suivre l'vo-

    Kition rgulire de la colonisation des campagnes messines.

    L'introduction de la civilisation latine y fut sans aucun doute

    plus prcoce que dans le pays trvire. La population essen-

    tiellement gauloise n'offrit pas la mme rsistance aux arts dela paix apports par les vainqueurs, que les peuplades demi-

    germaines, ou du moins fortement mlanges d'lments ger-maniques de la basse valle de la Moselle. Divodurum, en effet,semble avoir t un centre d'influence latine, antrieurement

    Trves. Cette influence se rpandit peu peu dans les diff-

    rentes parties de la cit mdiomatrice. Ses tapes successives

    y donnrent naissance des habitations de genres distincts.

    De petites villas rustiques prcdrent les grandes villas de

    luxe. Nous en retrouvons les restes ct de ceux de btiments

    plus ou moins analogues ceux du pays trvire. Entre ces

    tablissements divers, il nous est possible d'tablir des diff-

    rences de date. L'histoire des habitations rurales nous permet

    ainsi d^tudier le dveloppement original d'une civilisation

    vritablement gallo-romaine. L'arrive fortuite d'une puissante

    aristocratie trangre n'en vint pas subitement interrompre le

    cours, et par une prise de possession du sol qui quivalait, pour

    ainsi dire, une seconde conqute romaine, faire disparatre

    toute trace de colonisation antrieure a son tablissement.

    Parmi les vestiges les plus intressants qui purent ainsi sub-

    sister dans le pays des Mdiomatrices, il faut compter ceux

    de huttes demi-souterraines, couvertes de branchages et

    d'argile. Ces demeures, de caractre primitif, n'ont sans doute

    rien de commun avec les villas . Si leur origine les rattache la

    priode de l'indpendance gauloise, nous avons cependant la

    preuve, que bon nombre d'entre elles furent encore habites

  • - 14

    aprs la conqute romaine. Leur rpartition anormale nous per-

    met de nous firrurer la lutte entre l'influence latine et les

    traditions indignes. Ces habitations reprsentent l'lment

    original sur lequel vint se greffer la civilisation latine. Par

    elles on peut mesurer le progrs que marquent les villas.

    Les diffrentes sortes d'habitations qui se sont rencontres

    dans le pays messin, se retrouvent galement sur le terri-toire des autres cits gauloises. Les conditions gnrales

    auxquelles fut soumis le dveloppement des habitations et dela colonisation latine dans la cit des Mdiomatrices, ne sem-

    blent eu aucune faon, avoir t diffrentes de celles qui prsi-

    drent l'exploitation de toutes les campagnes gauloises. Onest donc autoris supposer que dans toute la Gaule ga-

    lement, les villas ne se substiturent que peu peu aux cons-

    tructions indignes; que ces premiers tablissements latins

    furent de petites villas rustiques, et qu'ils ne cdrent la place

    aux grandes villas urbaines, que dans les mmes circons-tances que nous permet de distinguer l'histoire des villas m-diomatrices. Les progrs de la civilisation latine, dans la

    cit dont nous avons choisi les limites comme. cadre de ce tra-

    vail, nous ont sembl pouvoir reprsenter assez exactement les

    phases de toute la civilisation gallo-romaine. Une tude parti- .

    culire des villas mdiomatrices dpassait ces villas elles-

    mmes. C'est cette raison surtout qui nous a dtermin

    l'entreprendre.

    Nous ne nous dissimulons pas cependant, que malgr une

    ressemblance gnrale, les habitations de l'poque gallo-

    romaine, durent tre assez diffrentes en Aquitaine par

    exemple (1), de ce qu'elles taient dans la Gaule Bel-

    gique. La technique et les procds de construction pouvaient

    fort bien n'tre pas les mmes. Le sol, le climat, la richesse dupays, ont donn sans doute h l'architecture comme aux formes

    (i) Cf. L. JouLiN, Les tablissements gallo-romains de la plaine deMartes-Tolosanes. Exlra'ii des Mmoires prsents par divers savants l'Acad. des Inscriptions et Belles-Lettres, i'^ srie. T. IX, p. 217-516(1900).

  • 15

    de l'exploitation agricole, des caractres particuliers. Le voi-

    sinage de ritalie, la facilit plus grande des relations, y ont

    fait sentir plus vivement peut-tre l'influence de Rome. Il

    serait dsirer que l'on pt, dans chaque cit, suivre l'his-

    toire des habitations gallo-romaines, et marquer avec prci-

    sion les traits qui leur sont propres. Les documents ne

    manquent dans aucune des rgions de la France. De cette la-

    boration des matriaux aujourd'hui disperss dans les revueslocales, pourrait se dgager enfin une histoire gnrale,

    exacte et complte, des habitations de forme latine en Gaule,

    et de la colonisation des campagnes gauloises l'poque de la

    domination romaine.

    C'est une simple contribution cette vaste enqute que

    nous avons voulu entreprendre. Comme il ne sera que tropfacile de s'en rendre compte, ce travail ne souffre pas moins

    de l'absence de points de comparaison hors des frontires de

    la cit des Mdiomatrices, que de l'insuffisance des fouilles

    excutes jusqu' prsent l'intrieur de ces limites. Seulsles exemples de villas rencontres dans d'autres cits pour-

    raient fournir les indications ncessaires pour combler les

    lacunes souvent considrables, que laissent entre elles les

    ruines d'une mme rgion. Faute de cet appui, les conclusionsque nous nous sommes efforcs de dgager, gardent bien

    souvent le caractre de simples hypothses. 11 tait bien diffi-

    cile d'chapper cet inconvnient. Nous avons cru utile

    cependant d'indiquer les questions qui, notre sens, se posaient

    propos des villas mdiomatrices, et de dgager les lments

    d'information fournis par les' fouilles. Nous souhaitons que

    d'autres rponses moins incertaines viennent bref dlai

    d'autres cits de l'ancienne Gaule.

    Octobre 1904.

  • HABITATIONS GAULOISES ET VILLAS LATINES

    LA CITE DES MEDIOMATRICES

    ETUDE SUR LE DEVELOPPEMENT DE LA CIVILISATION GALLO-ROMAINE

    DANS UNE PROVINCE GAULOISE

    CHAPITRE PREMIER

    Le Pays des Mdiomatrices et les Mdiomatrices.

    i" Description s;oc;Taphique. Les limites de la cit des Mdioma-trices.

    20 Le peuple des Mdiomatrices. Son histoire. La civilisation ro-maine et les traditions indis'nes.

    La jonction des deux valles de la Moselle et de la Seilleforme le cur du pays des Mdiomatrices. C'est sur la hau*teur dominant la vaste plaine sablonneuse o se rencon-trent les deux rivires, que fut tabli, ds l'poque gau-loise, l'oppidum de jDivodurum, capitale de la cit.Vers l'ouest, jusqu'aux ctes de Meuse, s'tend un vaste

    plateau de calcaire oolithique, peu accidentettrsapte laculture. A Test, des plaines oii dominent les marnes [Keii-per) et plus loin le calcaire Qoc\\\\\\\ev {Mnschelkalk\ con-duisent jusqu'aux Vosges. Entre la Seille qui les borde ausud, et la Sarre qui les entoure Test et au nord, l'Albe,la Rosselle et les deux Niedstablissentde larges passages.

    A. GuENiEK. flahifnlions gnuloises. 2

  • 18

    Ces terres, d'une fertilit moyenne, ont de tous tempsconstitu un pays agricole par excellence.Une ceinture de terrains grseux et accidents, encadre

    Test ce pays de plaines. Elle reparat au nord entre Sar-rebriicketSaint-Avold,etse continue toutlelongdu cours delaSarre. Gesgrsmarquent lalimite des pays montagneux etforestiers. A Test, ils Ibrment la chane des Vosges. Sesforts dessinent la frontire que ne dpasse pas la popula-tion mdiomatrice. De nouvelles forts, au nord du pays,bordent la Sarre de la Rosselle la Nied, couvrent le pla-teau qui spare la Sarre de la valle de la Moselle, et seprolongent au loin vers l'ouest. Les forts actuelles deMoyeuvre, de Caldenhoven, etde Warndt, ne sont plus quede faibles vestiges de celles, qui l'poque ancienne, en-serraient le pays presque de trois cts.Ces forts formaient les frontires naturelles du pays,

    frontires vagues et indtermines l'poque gauloise,mais que ne put manquer de prciser l'administration ro-maine. Ce sont les limites de l'poque gauloise que dcritStrabon. Au nord du pays des Helvtes, dit-il, les S- quanes puis les Mdiomatrices sont tablis sur la rive gauche du Rhin. Une peuplade germanique, les Tribo- ques, occupe d'ailleurs la partie de leur territoire qui est contigu au fleuve Au sud et l'ouest du pays des Mdiomatrices habitent les Leukes et les Lingons... ; au nord, les Trvires (1).Ce territoire est beaucoup plus vaste que n'tait la

    cit desMdiomatrices, l'poque romaine. S'tendant jus-qu'au territoire des Lingons, il comprenait la civitas Ye-rodunensium que nous trouvons mentionne part, dansla Notice des Cits de la Gaule (2). Les Triboques, d'autrepart, anctres des Alsaciens actuels, semblent avoir trattachs la province de Germanie suprieure. Ils for-ment au iv^ sicle, la civitas indpendante Argentora-tensium )>Quant aux limites de la cit des Mdiomatrices, ainsi r-

    duite, nous pouvons nous les reprsenter, faute de docu-ments plus prcis, par celles de l'ancien diocse de Metz.

    (i) Strabo, IV, 4, lO'^-(2) Cf. ho^Gsos, Allas liiston'que de la France. i'I. I et II, p. i!\.

  • 19

    Nous savons, en effet, que les divisions ecclsiastiques con-servrent la plupart du temps, presque sans changement,les anciennes circonscriptions administratives romaines(l).C'est donc au territoire circonscrit l'est par les Vosges,au nord par les hauteurs qui bordent la rive gauche de laSarre, et une ligne qui rejoint la valle de la Moselle peuprs la hauteur de Sierck; l'ouest et au sud parles an-ciens dpartements de la Meuse et del Meurthe, que nousbornerons notre tude.

    Le peuple que la conqute romaine trouva en possessionde ce territoire, appartenait la famille Belge, ces tard-venusdes invasions gauloises. Il n'a jou, semble-t-il, qu'unrle assez peu important dans la lutte pour l'indpendancede la Gaule. Csar ne le mentionne qu'une fois, proposdu contingent de 6000 hommes qu'il fournit l'arme desecours destine Alsia(2). Il n'apparat pas non plus,aprs la conqute, dans les soulvements auxquels prirentparties Trvires, ses voisins. Les Mdiomatrices, en effet,formaient une socia civitas ^3). Tacite reconnatqu'aucun acte d'hostilit de leur part ne justifiait l'abo-minable carnage que firent Divodurum les lgions deFabius Valens, lors des troubles qui suivirent la mort deNron (4).

    Ils semblent s'tre accommods trs vite de la civilisationromaine. Moins voisins des Germains que les Trvires,ils chappaient l'influence belliqueuse des tribus restesindpendantes. Tout porte croire que le sentimentnational ne leur fit jamais trouver lourd le joug de Rome.Divodurum apparat de bonne heure comme une ville com-pltement latinise. Elle est divise en vici (5); elle a son

    (i) ihid., PI. m.

    (2) Csar, de Bello Gallico, VII, 7"), 3.

    (3) Tacite, Hist., I., 70.

    (4) Tacite, Hist., I, 03.. . i

    (.5) Vicus honoris. {C 1. L. Pars. 1, Fasc. Il, '^3oi) \'icain vici ]iacis{Ibid. 43o3)

  • 20

    praefeclus stalornm (1), ses inscriptions en l'honneur desempereurs i2i, ses temples, son amphithtre, ses con-duites d'eau, etc. . (3). Il en est de mme dans les autrescentres urbains de la i-gion.

    La situation gographique du pays fait d'ailleurs com-prendre que l'influence romaine n'ait pas tard s'yrpandre. Les valles de la Moselle et de la Sarre taientdes passages naturels tout prpars, pour les routes dontTadministration des premiers empereurs sillonna la Gaule.Divodurum tait le carrefour de cinq grandes voies. L'unevenait de Lyon par Besancui, deux de Reims par Toul etVerdun, une autre allait Strasbourg et la dernire Trves (4). Ds le rgne de Nron, le lgat consulaire de laGermanie infrieure, L. Antistius Vtus, songeait tablirun canal qui et rejoint la Sane la Moselle (5).

    La civilisation latine tait donc apporte Metz parles lgions qui se dirigeaient vers le Rhin, et par lesmarchands, qui de l'Italie gagnaient les profondeurs demie inconnues de la Germanie. Les Mdiomatrices setrouvaient mis en relations par ce rseau de routes avectous les grands centres de la culture gallo-romaine.Sens (6), Autun (7), Lyon (8), Bordeaux (9), o l'on trouvedes inscriptions se rapportant eux. La rgion a pu, de trsbonne heure, participer la vie gnrale, qui, s'introdui-sant travers les pays locaux, fait profiter chacun desprogrs raliss pa*r tous.Ce n'est pas dire, cependant, que la civilisation dve-

    loppe par ces conditions si favorables, ait jamais perdutout caractre original. Les dieux romains, l'art romain,

    (i) Robert cl Cagxat, Epigraphii' de la valle de la Moselle, I, p. 21.= C. I. L., XIII, I, n 4291. (2) Ibid, II, p. 16-19, etc. = C. /., L., XIII, i, ip^ /i3oi 43o4, /|3i2,-4323 432r>.

    (3) F. Keune, Annudife de la Socif d'Histoire et Archologie Lor-raine, VS^ (1897), p. i33-20i, X(i898), p. 1-71.

    {[\) Itiner. Anton. (Ed. Partiiey et Pindek), p. iii. 112. 173. 174. 177.Voir la carte. 1*1. I.

    (i) Tac, Ann., XIII, ."jS.(6) C. I. L., XIII, 29.'j4.

    (7) C. L L., XIII, 2674.(8) C. I. L. XIII, 1807.

    (9) C. I. L., XIII, G29, JuLLi.A-N. Insrript. roni. de Bordeaux, I, n Sg.

  • - 21

    et surtout rarchitecture, les murs romaines, toutes cesimportations trangres trouvaient en face d'elles, unereligion, des principes, des habitudes, avec lesquelles illeur fallut composer. Elles ne subirent pas sans altrations,ce contact avec les traditions indignes. Cette sorte decontamination tait la condition et la consquence nces-saire de leur acclimatation.La masse de la population mdiomatrice, l'poque ro-

    maine, tait en effet gauloise, et demeura gauloise. Leslments latins qui s'y mlangrent furent rares, et ne suf-firent pas la transformer. Les provinces gauloises sedistinguent profondment cet gard de celles du Limesgermanique, peuples de marchands latins, semes decolonies de vtrans, occupes demeure par les campset les postes romains (1). Les cits de la Gaule Belgique,en particulier dont la population tait peine habitue la vie sdentaire, taient demeures beaucoup plus voisi-nes de la barbarie primitive que celles du centre et dusud de la Gaule (2). Elles taient de toutes, les moins prtes profiter de la civilisation apporte par Rome.Nous ne parlons pas ici, sans doute, de la population

    des villes, enrichie de bonne heure par le commerce, etfacilement accessible l'influence romaine. Il nous fautga-lement faire exception en faveur de la noblesse mdioma-trice. Nous savons, en effet, avec quel engouement la classeriche avait adopt en Gaule, tous les raffinements de la cul-ture latine. Mais il n'en pouvait tre de mme du peupledes campagnes ; et il formait, selon toute vraisemblance,la grande majorit de la population mdiomatrice. Nous letrouvons en effet encore au iv^ sicle, obstinment attach ses vieilles croyances religieuses et sa langue celtique.Il avait d conserver avec le mme enttement la manirede vivre de ses anctres, leurs mthodes de constructionet de culture, et les principes sur lesquels tait fonde lacondition des personnes et de la proprit.De cette persistance des traditions indignes, ct de

    celles qu'apportait la civilisation latine, de l'adoption par

    (i) Hettner, Zur Culiiir von Germanlen il. Gallia Bchjica. West-deutsche Zeitschrift, II (i883), p. 1-2 1.

    (2) Strabon, IV, 4-1- .

  • 22

    les riches d'un genre de vie tout romain, nous ne pou-vons manquer de retrouver la trace dans les habita-tions de l'poque gallo-romaine. L'tude des restes quis'en sont rencontrs dans la cit des Mdiomatrices,peut nous fournir sur l'histoire du pays et celle de seshabitants, des renseignements de nature prciser et complter, le peu que nous apprennent les textes an-ciens.

  • CHAPITRE II

    Les Huttes gauloises a l'Epoque Gallo-romaine.

    1 Textes et monuments figurs relatifs aux habitations gauloises.2 Les mardelles clans le pays des Mdiomatrices.3 Partie souterraine des habitations a,'auloises.4^ La construction recouvrant la mardelle.5 Date des mardelles.0" Rpartition des mardelles dans le pays des Mdiomatrices.

    Les habitations les plus anciennes dont les fouilles ontmis au jour des vestiges, dans le pays des Mdiomatrices,sont des huttes demi-souterraines, construites en bran-chages, couvertes de chaume et de terre. Elles rpon-dent assez exactement aux descriptions succinctes quenous ont laisses les crivains anciens, des maisons gau-loises. Ce sont donc ces chaumires qui reprsentent dansle pays les traditions de l'architecture gauloise. Elles yont prcd les villas, et comme nous le verrons, ne leuront cd que peu peu le terrain. C'est par elles que nouscommencerons notre tude.

    Les textes littraires d'o l'oii a cru pouvoir tirer unedescription des habitations gauloises, ne nous permettentpas, en ralit, de nous en faire une ide prcise.

    Csar, toujours trs sobre de dtails, se borne remarquer que les cases des Gaulois sont gnralement cou-vertes de branchages (1).

    (r) De li. G., V., /(3, i, casa" qua' more allico siramenlis oranltectae.

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    D'aprs Strabon, nous savons que les Belges habitaientde grandes maisons de planches et de clayonnages, enforme de berceaux, couvertes d'une paisse couche dechaume (1). On ne saurait attribuer une importance dci-sive ce passage, tant donn que Strabon n'a pas vu lui-mme ces maisons, dont il parle d'ailleurs, d'une faonassez vague. Tous ses renseignements lui viennent dePosidonius^ et l'tat qu'il dcrit est antrieur la con-qute.Quant Vitruve, il nous apprend que de son temps, un

    certain nombre de peuples, parmi lesquels les Gaulois,en sont encore rests une phase trs primitive de l'artde btir ; ils habitent des maisons de planches ou de bran-chages (2).

    11 donne sur ce genre de constructions quelques dtailsque l'on croit pouvoir appliquer aux huttes gauloises.Tout d'abord, dit-il, on dressa des fourches entre les-quelles on disposait de menus branchages; ces paroistaient recouvertes de boue. D'autres faisaient scher desmottes de terre, dont ils difiaient les murs, ils les abri-taient de la pluie et de la chaleur par un revtement deroseaux et de feuillages. Puis, voyant que les toits nepouvaient supporter le poids des pluies de l'hiver, on euvint construire des fates recouverts de boue, qui parleur inclinaison facilitaient l'coulement de l'eau (3). Il nefaut voir dans ces indications, nous semble-t-il, qu'uneesquisse rapide des perfectionnements de l'art de btir,suggrs aux peuples barbares par la ncessit. Nous nesaurions nous faire, l'aide de ces seules considrationsthoriques sur les origines de l'architecture, une ide

    (i) IV, l\, 3. TciV/ S'o/oy; Iv. aviGwv y.al vjppwv /ovt'. (jLv/.o'j;, Oo/.oiSs;

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    exacte des habitations en usage dans le nord de la Gaule l'poque romaine.On peut tenter, il est vrai, d'appuyer ces textes et de les

    prciser l'aide des reprsentations de maisons gauloisesque nous fournissent des monuments figurs.Le plus caractristique de ces monuments est un bas-

    relief romain d'assez bon style, conserv au ^luse duLouvre (1). Il semble dater du i*'' sicle de l're chrtienne.La provenance en est inconnue. L'n barbare, un Gaulois,semble-t-il, en juger par sa physionomie et sa longuechevelure, dfend contre un soldat romain, sa cabanereprsente au second plan. C'est une hutte ronde, cou-verte d'un toit conique, dont le milieu semble tredemeur ouvert, pour livrer passage la fume du foyer.Les roseaux qui recouvrent les parois aussi bien que letoit sont nettement dessins. Une ouverture rectangulaireforme la porte.Ce sont, d'ailleurs, les mmes huttes rondes, tantt

    couvertes de roseaux, tantt formes de poutres accoles,tantt construites en pierre, que les bas-reliefs de lacolonne Trajane (2) attribuent aux Daces, ceux de lacolonne d'Antonin (3) ou de Marc-Aurle (4) aux Marco-mans et aux Quades. Ce type uniforme, adopt par lesartistes romains pour figurer les habitations de leursennemis barbares, est-il copi sur la ralit ? Ne leur est-il pas suggr plutt, par d'anciennes traditions, qui fontde la hutte ronde en branchages et en chaume, la demeureprimitive des populations non civilises. Ces reprsenta-tions ne sont-elles pas, en un mot, tout aussi convention-nelles que la description de ^'itruve? (5)De nombreux monuments, provenant du pays des

    JSIdiomatrices, nous en reprsentent, il est vrai, leshabitations avec plus de chances d'exactitude. Ce sontquelques petits bas-reliefs, et surtout des tombes. Comme

    (i) (',Lvi\.vc,, Mitsi^e ile sculpture, II, ii" '.\:>A\, p. 7(37.

    (2) Frohner, La co/onp Trajane.(3) Frohner, La colonne d'Antonin.

    (4) Petersen-Domazewski, Die Marcussaiile, pi. im, 112, 118.(5) Le caractre conventionnel de ces reprsentations est trs nette-

    ment indiqu sur la colonne Trajane, par ce fait que les huttes rondesy apparaissent bties en superbes pierres de taille.

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    un grand nombre de peuples de l'antiquit, les Gauloisaimaient donner aux monuments abritant les restes deleurs morts, la forme des maisons o ils vivaient. Nousn'avons pas tenir compte, pour nous faire une ide dugenre de construction gaulois, de celles de ces tombes quiont t trouves dans le voisinage des villes (1). Ellesappartiennent une population romanise et reprsententles maisons des villes conues sur un plan tout romain.D'autres tombes, d'apparence beaucoup plus ancienne,proviennent des forts des Vosges. Grossirement tail-les, et ne portant aucune inscription, elles semblent leproduit d'un art absolument indigne. Ce sont, pour laplupart, des blocs de grs prismatiques base rectangu-

    FiG. 1. Tombes en forme de huttes trouves dans les Vosges.D'aprs la Westd. Zeitsch. Erg;inzungshett, X. p. 48.

    laire allonge, et dont la partie suprieure forme soit unangle, gnralement trs aigu, soit une ogive (2). Des habi-tations ainsi formes de deux parois obliques se rejoignant leur sommet ne peuvent tre que des huttes en bran-chages. Quelques tombes, en petit nombre, figurent, il est

    (i) Par exemple Soarpone : Cf. L. (^)iiNT.\nD, Journal Soc. Arch.Lor., lyoo, p. 99-100 : et Metz. Cl". Kecne, Sahlon in romisch. Zeit.Annuaire dp la Socit d'Histoire et d'Archologie Lorraine, 1908, p. Zil\-4Gi, pi. XIII, XXVI.

    (2) De nombreux spcimens de ces lombes sont rassembls auxMuses de Metz, de Saverne et d'Epinal. Cf. Ann. Soc. Hist. et Arch.Lor., 1899, p. '6']^ el4i5, 1900, p. 38.3. Westdeutxche Zeitschrift,,riX,\\-zungshefl, X, p. t\%.

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    vrai, une maison murs verticaux, surmonts d'un fatage.Ces murs pouvaient tre constitus de troncs d'arbresaccols, ou de planches. Peut-tre aussi dans ce pays ole grs abonde, la pierre pouvait-elle tre employe leurconstruction. Une petite ouverture dans le bas du bloc,reprsente la porte. C'est le seul dtail que permette de dis-tinguer le caractre par trop rudimentaire de la sculpture.

    Plus instructifs sont deux petits bas-reliefs consacrs,l'un la desse Nantosuelta, l'autre la mme desseassocie au dieu Sucellus (1). Sur les deux m.onuments, ladesse tient d'une main un sceptre surmont d'une petitecabane rectangulaire.Le bas-relief consacr Nantosuelta seule nous montre

    cette cabane couverte d'un fate assez aigu, surplombantlgrement les murs, et assez pais pour tre fait dechaume. Une porte s'ouvre au milieu de la face antrieure,l'ensemble, en somme, est trs voisin de quelques-unesdes tombes que nous venons de dcrire. Cette maison,sur le second monument est plus large ; le toit en estplus cras, et deux portes symtriques s'ouvrent sur lafaade. Ce dernier dtail ne donne-t-il pas croire queces petits difices reprsenteraient des temples plutt quedes maisons ? On est d'autant plus port le supposer,que sur le premier bas-relief, Nantosuelta supporte de samain reste libre une autre construction d'un caractretout diffrent. C'est une petite hutte ronde. Les parois ver-ticales en semblent formes de troncs d'arbresjuxtaposs.Le toit conique et surplombant, laisse deviner sa partiesuprieure le croisement des branchages qui en formentla charpente. Cette hutte ressemble de trs prs cellequi est reprsente sur le bas-relief du Louvre. Les dis-positions et le genre de construction qu'elle nous faitconnatre rpondent assez bien ce que nous pouvonssavoir par Csar, Strabon et Yitruve des maisons habitespar les Gaulois. Cette concordance confirme sans douteles renseignements gnraux que nous avaient fournis lestextes littraires. Elle n'y ajoute que fort peu de dtails,et n'augmente pas la porte des conclusions que nouspouvons en tirer.

    (i) MicnAEMS, Jn/z. Snc. Hisf. et Arcli. Lorr., 1895, i, p. iTif).

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    Laissant o rle les donnes insuffisantes des textes etdes monuments, un savant allemand, M. Meitzen a cru de-voir chercher d'un autre ct, des documents plus prcissur la maison gauloise. Il la rattache un type gnrald'habitation, propre aux tribus celtiques, et conditionn parl'organisation de la famille en clan patriarcal (1).

    ^Nlais la mthode de laisonnements thoriques, d'ail-leurs trop j)eu rigoureuse, employe par ce savant, ne peutrien ajouter la connaissance que nous avons par ailleursde l'architecture domestique des Gaulois (2). La cons-titution de la famille gauloise est trop peu connuepour autoriser aucune induction touchant l'conomie desdemeures qu'elle habitait. Les seuls documents propres prciser les donnes trop vagues des textes littraires etdes monuments figurs sont ceux qui sont fournis par lesfouilles. Il ne s'agit pas du reste, pour nous, d'tablir letype gnral de la maison gauloise, mais simplement d'-tudier les vestiges des habitations indignes relevs dansle pays des Mdiomatrices, et d'essayer de reconnatre lescaractres et la date des demeures dont ces restes nousont conserv la trace.

    Les restes des habitations gauloises sont pendant long-temps passs inaperus. Ils se prsentent en gnralsous la forme de trous circulaires de 10 40 mtres dediamtre, et profonds de 2 10 mtres. Trs rares dans lesparties basses de la valle, ces excavations se rencontrentsurtout sur les pentes des collines et sur les plateaux, sou-vent proximit de sources ou de ruisseaux. Elles sont par-ticulirement frquentes dans les forts o les travaux del'agriculture ne les ont pas niveles. La couche paisse detourbe et d'argile qui en garnit le fond en a transformun grand nombre en mares. Ce sont les mares au diable

    (i) Meitzkn, Sicdeliing u. Ar/rai'iresen der Kelter. Romer, Finneu, ii

    .

    Sl(iren.f\ vol. in-S^ dont un atlas. Berlin, iSrif), T. I, p. i84, III, p- 281.

    (2) Voir les reproches tout fait i'onils l'ornuilos l'adresse deceUe thorie par J. Flach, L'origine historique de l'habitation et deslieujc habits en France, p. 11 sqq.

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    ou mares des paens (Heidenpullen), comme on les appelledans le pays. Longtempsconsidres comme des lieux han-ts, elles sont encore aujourd'hui entoures de lgendesmystrieuses. On les dsigne habituellement par le termede margelles ou plutt mardelles (1).Ces mardelles (2j, si nombreuses en certains endroits,

    qu'elles donnent des plateaux l'aspect de fonds marca-geux, n'taient pas sans provoquer l'tonnement. La naturetrs difFrente des terrains o elles se rencontrent excluaitla possibilit de toute explication gologique. On n'y pou-vait voir un phnomne naturel du mme genre que celuiquia produit les cavits dites trous au loup dans lesterrains calcaires (3). Ces mares ne pouvaient tre quel'uvre de l'industrie des hommes (4).Les uns,enconsquence, voulaient y voir d'anciennes car-

    (i)Sur cette question des 'm.irdclles et des habitations gauloisesdans le pays messin, a paru depuis le dpt de ce Mmoire l'Ecole desHautes-Etudes, une tude trs importante de M. Wichmann : Ueher dieMaren oder Mertel in Lothringen. Ann. Soc. Hist. et Avch. Lovv., 1908,p. 218-262, pi. I-XI. Les conclusions de cet article confirment surpresque tous les points, notamment propos de la date assigneraux habitations gauloises des campagnes mdiomatrices, celles aux-quelles nous tions arrivs de notre ct. Ce travail apportait en outreun certain nombre de dtails indits sur des fouilles qui n'avaient tpublies que trs sommairement auparavant. Nous nous sommes effor-cs d'en faire notre profit et de mettre autant que possible notre tudeau courant des dernires publications.

    (2) Wichmann, dans l'article mentionn plus haut, p. 227-280, pro-leste contre l'emploi du terme mardelle pour dsigner ces excava-tions. Ce mot n'est mme pas franais dit-il ; il est emprunt au patois.Il propose de le remplacer simplement par le mot mare . Nousferons remarquer que le terme mare suppose la prsence au moinsintermittente d'eau dans ces dpressions, ce qui n'est gure vrai (|ue dela moiti d'entre elles. Ce mot mardelle employ depuis prs d'unsicle par les archologues, ])eut tre considr, ([uelle ([ue soit sa prove-nance, comme ayant acquis droit de cit dans la langue scientifi([ue. Ila le grand avantage de la prcision et permet de distinguer des autres,ces mares d'une espce toute particulire qui nous conservent la tracedes habitations gauloises.

    (3) Cf. Bulletin de la Soc. d'Arch. de hi Mo.^elle, i8t>2, j). (la.

    (4) Aprs de longues discussions les gologues ont fini par s'accordertous sur ce point. Cf. Schtmachku, MillheiliuKjen des tjeolocjischenLandesan.stalt v. Elsass. Lol/iri/u/e/i, i8()(), 11, IVjo et van Wvakvkkk, Bei-trge ziir Kentniss der lothrinijisclien Mardellen. Ihid., i()()8. \'. Fasc.4, p. 35 1 sqq.

  • ;!()

    ricres d'o Ton aurait lire l'argile ncessaire la fabrica-tion des poteries (i). D'autres en faisaient des citernes aban-donnes. D'autres enfin, par une nouvelle application de lathorie chre aux archologues anciens, assignaient auxmardelles, comme toute ruine antique, une origine mili-taire, et prtendaient y reconnatre la trace de campe-ments romains, plus ou moins prolongs, ou peut-tre depostes d'observations et de retranchements de fortune,tablis par les lgions la lisire des forts et aux abordsdes routes (2).

    Ils ignoraient en effet que des excavations analoguesavaient t ds le xviii" sicle observes et fouilles enAllemagne (3) et en Angleterre (4). En P>ance, M. de Lavil-legille dans le Berry, et l'abb Cochet en Normandie,avaient ds 1838 entretenu la Socit des Antiquaires deFrance, des mardelles trsnombreuses dans ces rgions 5).Toutes ces recherches avaient abouti aux mmes conclu-sions : les mardelles reprsentaient de trs anciennes ha-bitations.La renaissance des tudes d'archologie locale, vers

    1860, et les fouilles qui en turent la consquence en Lor-raine, allaient permettre d'y vrifier le mme fait.Depuis un certain temps dj, on avait relev la pr-

    sence, juge inexplicable, de troncs de chnes, gisant dansles mares, sous la terre vgtale, dans des terrains bour-beux, dans le fond des valles, et aussi en grand nombredans le lit des rivires (6). Ces constatations avaient faitsurgir les hypothses les plus invraisemblables touchantles inouvementsdu sol, et l'extcnsiondes Igrts l'poqueprhistorique. Le hasard mit les archologues sur la voiede l'explication vritable.En cherchant vider, pour la combler ensuite, une

    mardelle situe sur le Rotterhof, entre Mitterheim et

    (i) Biillei. Soc. Arch. Moselle, 1862, p. O2 sqq.(2) Ledain, Austrasie, 18^7, p. 448. Mm. Soc. Arch. Mos., V. (18G2),

    p. 53.

    (3) DiiNNHAui'T, yl/(//V//Ms- so.ronttes, 17 18.

    (4) Archolofjie Brit

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    Munster, on avait trouv dans le fond, des troncs d'arbresgrossirement taills et des fragments de poterie. Lesbaliveaux, rayonnant des bords vers le centre de la mare,taient enfouis sous une paisse couche de tourbe, formede dbris de feuilles mortes, et de menus branchagesprotgs par de l'argile. Le mme fait et les mmes dispo-sitions avaient t remarques dans une autre mardellemise sec, aux environs de Sarrebourg, la suite des tra-vaux du canal des houillires de la Sarre (1).

    Les deux problmes de la prsence de troncs d'arbresdans les terrains bourbeux et de l'existence des mardelles,taient solidaires l'un de l'autre. La solution ds lors entait trouve (2). Les mardelles conservaient la trace d'an-ciennes huttes en branchages, en partie souterraines.Les fouilles ds lors se multiplirent, de plus en plusprcises, et de plus en plus fcondes en renseignements.On a relev jusqu' prsent plus de 5000 mardelles enLorraine (3).

    Partie souterraine des habitations gauloises. Les exca-vations dans lesquelles ont t retrouvs les dbris deshuttes en branchages, montrent suffisamment que lesdemeures dont nous avons ainsi conserv la trace taient enpartie au moins, souterraines. Cette habitude de creuserles habitations dans le sol se rattache directement aux tra-ditions les plus anciennes de l'humanit, cherchant abri dansles cavits naturelles. On comprend qu'elle se soit perp-tue sous un climat excessif, comme celui de la Gaule,

    (i) L. Benoit, Les voies romaines dans Varrondisseinenl de Sarrebour(j.Mni. Soc. Arc/i. Lorraine, i865, p. i4 s(j([.

    (2) L. Benoit {article cit), Bach, Mmoire sur /es /lahiff/f/ons r/aidoisrset les vestiges f/ii'on en trouve dans les prorinces de l'Est. Mm. Soc.Arch. Mos., i80(i, p. 85 s(j([, et Bullel., i8(i8, p. lOosqq.

    (3) Nous empruntons M. Wichmaiin : Ueber die Maren oder Mertelin Lolhringen. Ann. Soc. I/isf. et Arcli. Lorr., i()()3, p. 23o, des statis-tiques et des chiffres prcis. Sur ces 5ooo mardelles, 1800 environ sontsitues en plein champ, les autres se trouvent dans les forts. Sur lesmares places hors des forts, 787 sont toujours sches, .'')37 toujoursremplies d'eau, 44^ sches eu t, et pleines d'eau en hiver.

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    chez des peuples malhabiles travailler la pierre, et qui neconnaissaient pas l'usage du mortier.Les Germains, eux aussi, nous rapj)orte 'l'acitc, cher-

    chaient, en habitant sous terre, un abri contre la rigueurde l'hiver et la chaleur de l't (1). De fait, les mardellessont galement trs frquentes en Allemagne. Le genred habitation des tril)us belges, ne diffrait donc pas essen-tiellement du leur.Nous avons dit que la forme la plus frquente des mar-

    delles en Lorraine tait ronde ou ovale (2). On en signalegalement quelques-unes de forme rectangulaire (3), cesdernires de dimensions gnralement trs suprieures celles des mardelles circulaires. Elles ne mesurent en effetgure moins de 40 mtres de long sur 10 15 mtres delarge, tandis que le diamtre moyen des autres varie entre10 et 20 mtres (4). La profondeur en est gnralement de2 4 mtres, et dpasse rarement o mtres. L. Benoit ensignale cependant de 10 mtres de profondeur (5).De semblables cavits fournissaient un dblai consid-

    rable. Rarement cependant on en trouve la trace proxi-mit des mardelles. Une ou deux fois seulement, on a puconstater autour des bords une lvation artificielle dusol [6). En rgle gnrale, la terre extraite a d tre trans-porte ou tendue une certaine distance.

    (i) Gcrin. i(), SdIciiI et sul)tei'r;inoos specus apcrirc, eos([iu' iiuiltoinsupcrfimo oiu-i'aiit, siiffimiuin liiciuis... (|uia rii^iirciii l'rii;oruni t'jusmodi loci niolliuul.

    (2) On ne saurait d'ailleurs tirer de cette particularit aucune indica-tion touchant la forme des habitalions; l'eau qui ren)])Iit les cavits apu en ronger les bords.

    (3) Correspondenzblott d. dciilscli. (lesellsrli.f. Aiilhi-opol. EihmA. u.Urgeschichte, nov. 1903, p. i32.

    Cette forme exceptionnelle en Lorraine, semble, d'aprs M. dcLaville-gille : Min. Soc. Anti(i. de France, XIV (i838), p. i(u, avoir t lari^Ie en Berry. Les dimensions qu'il indi(]ue pour ces mardelles berri-chonnes semblent d'ailleurs fort sujettes caution (iHo mtres de longsur 80 de large et 6 8 mtres de profondeur).

    (4) Wk;hmann, l'eher die Mciven... Ann. Soc. ///s/, et Acc/i. Lorr.,ir)o3, p. 23(), |i,irnii les niaidcilcs siluces hors des bois en ((ini])te12/19 iiyant entrr m cl 3()8 ayant moinsde 10 mtres, 201 ayant ])lus de 3o mtres.

    (.")) L. \^v.son, Les roies /-o/ti. de /'(//ro/id. de Sa/webou/y, Min. Soc.Arch. Lorr., iSG.").

    (0) Par exemple dans la fort de Ilohen Buchen, prs Lan'Acnberg

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    Dans la plupart des mardclles fouilles, les difFrentescouches que Ton rencontre successivement se sont pr-sentes dans l'ordre suivant :

    1 Directement sous Teau ou formant le sol dans lesmardelles sches, une couche de vase ou d'humus cons-titue parles feuilles mortes, la poussire et les dbris detoutes sortes accumuls dans la cavit.

    2" Une ou deux, ou mme trois couches d'argile de cou-leur ou de finesse difFrentes.

    3 Une couche de tourbe forme par des feuillages, dela paille et de menus branchages. C'est au milieu de cettecouche et entre elle et la suivante que sont tendus, dansun certain nombre de mardelles, les troncs d'arbres dontle nombre et les dimensions varient.

    4'^ Une ou plusieurs couches d'argile recouvrant le solnaturel.Le fond de l'excavation et la couche d'argile qui le tapis-

    sait taient amnags pour former le sol de l'habitation.Une des mardelles des plus caractristiques cetgard, etde toutes la mieux dcrite, est celle qui a t fouille Altrip en 1901 (1).La mare, ovale, mesure 20 mtres sur 17 mtres de dia-

    mtre. Le bord nord-ouest, l'extrmit du grand diamtre,est plus haut de 1 mtre que le bord sud-est. D'abordvertical jusqu' une profondeurde l'"10, il secontinue jus-qu'au fond (3'"40 au-dessous du niveau du sol) par un talusfortement inclin (0'"80 par mtre). Au sud-est, au con-traire, un plan inclin etformantdos d'ne, descend dou-cement jusqu'au centre de la mare. De ce ct tait sansdoute l'entre de l'habitation. La partie la plus profonde dela mare dessine ainsi une sorte de fer cheval, bordcontre le talus par une rigole, dont les plus grandes di-mensions atteignent, du ct oppos l'entre, environ0'"50 de large et 1 mtre de profondeur. Un lger rebord,mnag la base du talus, au niveau du fond de la mar-delle permettait probablement de couvrir cette rigole deplanches ou de pierres plates. Cette disposition assurait

    (Cercle de Sarreboura;), Correspb. d. deulsclien Gese/lsc/i./. Anf/ir-npul.,nov. 1908, p. 182.

    (i) CF. WicHMANN, Ueber die Maren..., Ann. Soc. Ilisf. et Arch. Lorr.,1908, p. 241-142.

    A. Grenier. Ilabilcdions (jaidoises. 3

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    rcouleiiient de riiumiditc qui pouvait s'introduiro dansla cajjane. On peut conclure de ces j)rcautions minu-tieuses, que nous avons l le sol mme de l'habitation.

    Ces dtails qui semblent si naturels n'ont pu tre, il estvrai, que rarement constates. On ne s'en tonnera pas sil'on songe la dilicult que prsentent de telles obser-vations dans le fond d'une mare envahie par l'eau. On nesaurait d'ailleurs nier, quoiqu'on n'ait jamais pu l'tablir,que l'excavation n'ait pas parlois simplement servi de cave.Un plancher aurait alors form le sol de la pice servant rhabitation(l). Peut-tre, si l'on doit admettre la profondeurde 10 mtres qu'attribue Benoit aertaines mardelles (2),faut-il supposer qu'elle comprenait la hauteur d'une caveet d'une habitation encore tablie en sous-sol, quoiquebtie sur cave. ]Mais nous en sommes rduits sur ce point de pures hypothses.De quelque faon qu'il soit amnag, le fond de l'exca-

    vation est toujours revtu d'une couche d'argile, dontl'-paisseur varie d'une mardelle l'autre, aussi bien qued'un endroit l'autre du sol de la mardelle. Tous ceux quise sont occups de la question sont d'accord sur ce fait,llsadmettaientgalement que cette argile avait t disposeintentionnellement pour servir d'enduit aux parois etgarnir le fond de la cavit (3). Un tel revtement cons-tituait en effet une excellente protection contre l'hu-midit du terrain environnant. L'emploi de l'argile battuepour former le sol des granges et mme des picesd'habitation est du reste, dans les campagnes, unevieille tradition. Il s'est continu jusqu' nos jours en Lor-raine. On en trouve des exemples nombreux et caract-ristiques dans des constructions de l'poque romaine,tmoin les caves des canabae voisines du camp de laSaalburg explores par Jacobi. Les parois et le sol avaientt tapisss de terre glaise mlange de paille^ que le feu

    (i) Cf. WiciiMANN, Ann. Soc Ilisl. et. Ari-lt. Lorr., nyn, p. Jiy.(2) (^r. [)Ius haut p. 'i'2, noie 5.(il) \\'()i,i-i\AM, Pi-otoixolh' >(

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    avait ensuite transforme en un revtement de terre cuiteporeuse, d'une seule pice (i). Ce procd qui n'est pas ro-main avait t emprunt sans doute aux populations indi-gnes. Il n'tait pas surprenant d'en retrouver l'originedans les huttes souterraines des Gaulois.

    L'tude de la mardelle d'Altrip a amen M. Wich-mann formuler contre cette manire de voir des objec-tions qui nous semblent plus spcieuses que justes (2). Ilremarque que cette couche d'argile forme sur toute la sur-face du fond de la mare une masse d'un mme niveau, etque, par consquent, trs mince sur la pente en dos d'ne(0"'iO peine) elle atteint, contre le talus, l'paisseurinvraisembable de plus d'un mtre. En cet endroit, ellecomble mme entirement la rigole, et et ainsi empchl'coulement de l'eau. Il en conclut que nulle part, l'ar-gile ne devait originellement tapisser le sol de l'habita-tion, et tente d'expliquer comment elle s'est dpose en cetendroit. Les troncs d'arbres qui formaient les parois dela hutte, en s'croulant les uns sur les autres, auraientlaiss entre eux des intervalles. L'eau, qui bientt remplitla mardelle, pntra la masse des feuillages et de l'argilequi constituaient les murs, et la dsagrgea. Les feuillessurnagrent et l'argile fut entrane au fond. A la longue,les feuilles s'imbibrent d'eau et revinrent s'appliquer surles poutres qu'elles recouvrent maintenant. Quant lacouche superficielle d'argile qui sous l'eau de la mareprotge la tourbe et les branchages, elle proviendrait del'boulement des bords de la mardelle et des dbristombs l durant le cours des sicles.Nous remarquons simplement, qu'en admettant mme

    que les bords de la mare fussent argileux et aient pufournir la couche d'argile qui recouvre les dbris de lahutte croule, on ne saurait, dansThypothse de M. Wich-mann, distinguer dans cette couche, deux ou mme plu-sieurs autres de couleur et de finesse dillrentes. Or,M. Welter affirme l'avoir pu faire pour plusieurs mar-delles (3).

    (i) Jacoisi, iJds linnu'rkdutcl SdiiUnivfj, iSiy, |). ii:>.(2) l'fhrr die Mareii... Ann. Sor. Hisl. et Arrh. Larr., \^y^'.^, p. ?'\'.\.{.')) NolamnuMit : Mardoilc 1 cl 11 de la l'ort de (iuiidroxang-e, Currcsplu

    d. deulsch. Gesidlsrh. f. Anthropol... uov. i(jo3, ]>.1.''.").

  • 3(3

    En second lieu, on ne conoit pas comment l'eau et pudissoudre l'argile, et la faire passer travers les paroisdont elle formait le revtement extrieur. On ne trouve,en effet, aucune trace de la dsagrgation dont parleM. Wichmann. Les feuillages formant l'paisseur desmurs n'ont jamais t attaqus par l'eau, puisque lui-mmey a reconnu sans la moindre difficult des feuilles dechne et de htre (1). Leur enduit d'argile les a donc tou-jours protgs, et n'a pu fournir celui que nous trouvonsdans le fond de la mardelle.

    Il est du reste possible de comprendre, sans les artificesimagins par M. Wichmann, comment une certaine quan-tit d'argile a pu s'accumuler contre le bas des talus del'excavation, et combler une rigole qui n'en tait pas pri-mitivement garnie. Au moment de rcroulemeiit de lahutte, l'enduit s'est dtach en partie des parois qu'ilrevtait. 11 est tomb prcis.ment au pied du talus dela fosse. Il a pu former dans le fond, contre le bord, unemasse paisse. Mais comment aurait-il tapiss tout le solde la mardelle? Il semble donc bien qu'un revtementcontinu du sol de la mardelle ne puisse tre qu'intention-nel. 11 est trop conforme aux habitudes gauloises pourn'avoir pas t en usage dans la plupart des cas.Vers le centre de l'habitation se rencontrent souvent

    les restes d'un foyer : pierres plates noircies par le feu,cendres, dbris d'os et de poteries (2). C'tait donc bien,dans ces sortes de caves, que vivaient les Gaulois.

    La construction recouvrant la mardelle. Les poutres,les feuillages et Tenduit d'argile qui les recouvrent, sontles restes de la hutte btie au-dessus de l'excavation quenous venons de dcrire.

    (i ) Ihid., p. sSO.

    (2) (;r. /iidlel. Soi-. Af/i. J/o.s., iM(i2, p. (la sep]. Huai, Mr/ii. Sor.Arch. Mos., 186G, p. 8.^ in\i\. Wolfram, Protokollc d. (ieiipratrersaml.(t. Grsamlnpreins d. deafsrh. (InsilurlUs. ii. Alterlhitiiisrfri'ine, eu Metz,iH()(). W'iiLTEu, Correspb. d. (trulsch. Gesellsch. f. Antliropol...,iiov. i(jo3.

  • 37

    Les forts troncs d'arbres que nous trouvons parmi cesdljris, formaient la charpente de la construction. On en aconstat la prsence dans 107 des mardelles que Ton afouilles (1), le nombre de ces mardelles ne dpassantpas, autant que nous sachions, 150 ou 200. Le groupe desmardelles^, situes autour d'Altrip, fort bien tudies parMM. Colbus et Wichmann, nous permettra mieux djugerde la frquence de ces trouvailles. Treize d'entre elles,sur quinze contenaient de ces poutres (2). Et encore est-ilfort possible que les deux autres aient t vides prc-demment et dpouilles de ces bois. On peut donc consi-drer cette charpente de troncs d'arbres comme gnraledans les mardelles.Le nombre, les dimensions et la disposition de ces pou-

    tres varient de l'une l'autre.Dans une des mardelles fouilles aux environs de Sarre-

    bourg, une des premires que l'on ait tudies, ces troncsd'arbres mesuraient 6'"50 de long sur environ 0'"35 dediamtre. Ils avaient t briss, tous peu prs la mmehauteur, sans doute au niveau du sol. Ils rayonnaient dubord vers le centre de la mare (3).Aux Bachats, prs de Rodt (cercle de Sarrebourg),

    parmi de nombreuses branches noyes dans la tourbe, sesont trouvs deux grands pieux en chne l'un de 17 m-tres, l'autre de 1350. De leur grosse extrmit ces pieuxtouchent le bord de la mare, chacun d'un ct oppos, etviennent se croiser vers le centre. Les autres branchagesde fort diamtre taient disposs de la mme faon, tandisque les plus petits, gisaient ple-mle dans toutes lesdirections (4).

    La disposition des bois est encore plus caractristiquedans une mardelle fouille, Altrip, en 1901 (5). Sous

    (i) WiCHMANN, Ueber die Maren... Ann. Soc. Hist. et Arch. Lorr., igoS,p. 233.

    (2) Ihicl.

    (3) L. Benoit, Les voies romaines ricins l'arrond. de Snrreboiirf^, Mm.Soc. Arch. Lorr., i8G5, p. i4 sqq.

    (4) Hammerstein, Ann. Soc. Nisf. et Arch. Lorr., 1894, P- 3 10 sqq.

    (5) XXII Allgerneine Versand. d. deufsch. Gesellscli. f. Anthropol...,sept. iqoIjP 78 sqq. Wiciimanx, l'elior die Maren... Ann. Soc. llisl. etArch. Lorr., igoS, p. 241 et pi. V.

  • 38

    toutes les autres poutres gisent deux forts troncs dechne; ils devaient donc soutenir renseinble de l'chafau-dage. L'un, bris aux deux tiers de sa hauteur, tait plantexactement au nord de la mardelle, l'autre, dont la grosseextrmit est encore apointe, vers le sud-ouest. Entre cesdeux matresses poutres, taient plants, au nord-est etau nord-ouest, deux htres longs de 1()"'80; l'un se terminepar une fourche destine recevoir l'autre. C'est ensuite,du bjrd de la mardelle vers le centre, un rayonnement depoutres plus ou moins brises de 0'"30 0'"45 de diamtre,et qui devaient mesurer de iO 14 mtres de long. On encompte une vingtaine. Du ct sud, vers lequel sembles'tre croule la cabane, les poutrelles, dont quelques-unes sont des troncs encore munis de la naissance deleurs branches, vont rejoindre le ])ord nord-est de lamare. On trouve, en outre, une trentaine de branchesplus lgres, d'environ 0'"2() de diamtre, mais peu prsgales aux autres en longueur. Une quantit d'autresbranchages moins solides sans parler des menus ra-meaux sont parpills et se croisent dans toutes lesdirections (1).Ces poutres trouves Altrip, aussi bien que celles qui

    proviennent d'autres mardelles, sont rapidement bran-cheset grossirement tailles la hache. Un certain nom-bre d'entre-elles, comme on le remarque surtout dans unedes mardelles de la fort de Gondrexange ont conservune partie des branches latrales (2). L'extrmit destine

    (i) Voici, tel f[ii(' le (loiiiic M. Wiciimann, l'i'hfrdie Mai'en... A/iri,Sot-, /lis/, et An/t. Ao/v.. i()i)i), |>. 230, le dtail des bois de cliar|)enletrouvs dans la mardelle de I>e_v\veiler, voisine de celle d'Altrip : 8 troncs d'arbres particulirement forts, dont 4 chnes de o'"4o * o'"4r) de diamtre, et 4 htres de o'n2r) o^So. L'un des chnes avait envi-ce ron i4 mtres de lonif, deux avaient 9 mtres, le quatrime tait bi-is en trois morceaux. Venaient ensuite 17 troncs de o'"i5 oi^ao de diamtre, 7 chnes de 10 mtres le loii';", lo htres de 8 10 mtres, puis six poutres de chne d'un diamtre infrieur o'iio, longues de 6 8 mtres, trois aunes de () mtres de hjiii;", o"'io o'"i2 de dia- mtre. Le tronc d'arbre le plus lon

  • 39

    tre enfonce dans le sol, est la plupart du temps apointeet durcie au feu (1). Ces poutres ont parfois t l'objet d'untravail beaucoup plus soign. Elles sont faites dans unedes mardelles de Gondrexange, de troncs d'arbres fendusen deux sur toute leur longueur, et bien quarris(2). Sou-vent elles portent la trace des trous, et mme des chevillesqui servaient les ajuster 3j. Rarement, il est vrai, pour nepas dire jamais, on ne trouve de bois travaill la scie.Quelques planchettes se sont rencontres et l, maisjamais de planches(4). Tout ce travail de charpente, nan-moins, varie depuis l'tat le plus primitif, jusqu' un degrassez avanc d'habilet technique.Ces troncs d'arbres de tailles diverses formaient comme

    le squelette de la hutte. Ils taient recouverts des feuil-lages, au milieu desquels on les retrouve aujourd'hui aufond des mares.

    L'paisseur de la couche de tourbe produite par cesfeuilles entasses varie beaucoup. On remarque qu'elleest en gnral suprieure au centre de la mardelle, cequ'elle est sur les bords. Elle ne mesure aux Bachats que028(5). Dans la premire mardelle fouille Gondrexangeelle est de 0^25 sur les bords, et de 0'"40 vers le milieu;dans la seconde, 0"'30 sur les bords, 0"80 au centre (6).Elle a atteint Altrip en certains endroits l'"50, et l^QOdans la mardelle voisine de Leyweiler(7). Il est vrai, qu'unepartie de celte masse norme, peut fort bien avoir tfournie par une litire de feuillages, garnissant le sol dela hutte. Parfois, au contraire, la couche de tourbe man-

    (i) Mardelle des Bachats, Ann. Soc. Ilist. et Arch. Lorr., 1894, 2.,p. 3i5. Mardelle de Gudenbrunuen (prs Harskirchen, cercle deSaverne) Correspb. d. deutsch. GeseUscIi. f. Anthropol., nov. 190.3,p. i33.

    (2) Mardelle n 2 de la fort de Gondrexang-e. Correspb.f. A nthrop., etc.nov. 1903, p. i32.

    (3) Ibid., et mardelle de Gudenbrunnen, ibid.(4) Mardelle de Gudenbrunnen : petite planche de chne on20 X oi3

    sur oi^ooa d'paisseur. Mardelle d'Altrip. Anu. Soc. Hist. et Arch.Lorr., 1903, p. 238.

    (5) Ann. Soc. Hist. et Arch. Lorr., 1894, 2. p., 3io sqq.(6) Correspb. d. deutsch. Gesellsch. f. Anthropol., nov. kjoS, p. i33.(7) Ann. Soc. Hist. et Arch. Lorr., 1903, p. 230 et 239.

  • 40

    que compIcHemont dans les mardelles (1), soit qu'elle aitt extraite avant les Ibuilles, soit (jue les feuilles n'aientpas t employes pour recouvrir la charpente de bran-chages.Les feuilles garnissant les [)arois des huttes, y taient

    maintenues et protges par de l'argile. On a remarquque cette argile recouvrant les feuilles est souvent plusfine que celle qui garnit le fond de la mardellei^2). Elle estsouvent dispose par couches successives dont on dis-tingue encore, parat-il, les teintes diffrentes. On encompte deux dans la premire mardelle de la fort deGondrexange, la premire de 0'"45, la seconde de 0'"25. Onen trouve jusqu' trois dans la seconde mardelle; ce sonten allant de l'intrieur vers l'extrieur, une premire cou-che de 0"'40, une seconde de 0"'25, une troisime de0'"20(3). C'taient l, videmment des enduits successi-vement ajouts. La pluie, la chaleur, devaient facilementdtriorer le revtement extrieur des murs. 11 tait n-cessaire de le rparer assez frquemment. C'est sans doutede ces restaurations que les diffrentes teintes de l'argile,nous ont conserv la trace.Des parois construites de la sorte, pouvaient on le voit,

    fournir un abri assez confortable et assez solide, les troncsd'arbres formaient une vritable armature de bois, dontles pices devaient tre assujetties entre elles, par desclayonnages et des entrelacements de menus branchages.Les feuilles donnaient au mur de l'paisseur et en fai-saient im excellent isolant contre la temprature extrieure.Un fort revtement d'argile protgeait le tout. En addi-tionnant les diffrentes couches formant les parois, onarrive, sans mme compter le volume des troncs d'arbres, ()'"90 et l'"25 pour les mardelles de Gondrexange. Unepareille paisseur est du reste parfaitement en rapportavec les dimensions de ces huttes.

    (i) Mardelles (le Di'iilliiii;-, (lorrcsjth... etc., uov. njoil Ce sont desmardelles creuses dans le roc de ^rs.

    (2) H.vMMEKSTiciN, Mardelle des liacliats, .1/;//. Soc. llisl. el An/i.Lorr., i8()4. ^ P-i ^J '^MM-

    (3) \\'i;i.Ti:u, Corn-sj)!). d. dciilsc/t. (icscllsclt. /". Aiithrujju/..., nov.i9(j3, j). i33.

  • 41

    Essayons maiiiLeriaiit de nous reprsenter la forme etl'lvation des cabanes ainsi construites.

    Il semble bien, en juger, non pas tant d'aprs la formecirculaire des mardelles qui pourrait tre trompeuse i),que d'aprs la disposition des troncs d'arbres, que lesliaJitations en majorit taient rondes ou ovales. Les ma-triaux employs se prtaient mal, en effet, des cons-tructions qui eussent exig des angles. Les huttes rec-tangulaires dont les tombes des Vosges nous prsententdes modles, ne seraient donc que des exceptions qu'ilfaudrait localiser dans les rgions montagneuses. Peut-treoffraient-elles moins de prise la tempte, ou plutt per-mettaient-elles en allongeant le plan, sans l'largir, d'a-grandir indfiniment les habitations.Des parois formes de feuillages maintenus par un

    enduit d'argile, pouvaient difficilement tre verticales. Lepoids de ce revtement peu homogne en aurait amen lachute la moindre secousse. La forme conique s'imposaitdonc. Et de fait, c'est bien cette forme que semble indi-quer la disposition des bois aprs l'croulement des murs.Les pices matresses de la charpente rayonnent des bordsvers le centre de la mardelle. La construction en bran-chages tait donc simplement une toiture, abritant unehabitation souterraine. Il n'tait pas utile qu'elle dpasstde beaucoup le niveau du sol. La profondeur de la mar-delle supplait au peu d'lvation du toit, et donnait cl'intrieur de la hutte, une hauteur suffisante.

    L'existence de parois verticales supportant le toitconique, tait, on le voit, totalement superflue. De hauts tuguria cylindriques, tels que nous les reprsententles bas-reliels du Louvre et le monument votif consacr Nantosuelta, ne permettent pas de supposer une mardelleau-dessous d'eux (2). Les murs en exigent d'autres mat-riaux que les feuilles et l'argile que nous avons trouvpartout. Des planches, ou du moins un grand nombre de

    (i)Cl'. supra, p. o2 noio : 2

    (2) A moins que l'excavaliou n'ail servi (|iio

  • - 42

    poutres trs rgulirement tailles (1), un revtement deroseaux ou de chaume (2), taient ncessaires de tellesconstructions. Elles sont d'un caractre moins primitifque celles dont les restes nous ont t conservs. Quoi(|ueleur plus grande lvation au-dessus du niveau du sol dtles exposer davantage souffrir des temptes, elles taientseules possibles, dans les valles et les bas-fonds, aussibien que dans les rgions rocheuses, partout, en un mot,o Ton ne pouvait creuser de mardelles. On comprendd'ailleurs aisment, que nous ne puissions retrouver aucunetrace d'habitations tablies ainsi la surface du sol.Quant l'abri, qui couvre les mardelles, sa construc-

    tion devait entraner parfois certaines difficults. Lesexcavations de 30 mtres et plus de diamtre ne sont passans exemple. Gomment trouver des troncs d'arbres assezforts et assez longs pour se rejoindre au dessus d'elles?Une toiture conique, analogue celle des mardelles depetite dimension tait videmment impossible (3). Il nousest difficile de deviner le procd employ dans l'archi-tecture domestique gauloise, pour couvrir ces vastesespaces. Qu'il nous suffise d'indiquer c|ue le toit, coniqueou non, aii parfois soutenu par des piliers plants dansl'intrieur de la mardelle. M. Wichmann en a comptneuf dans la mare de Leyweiler, voisine de celle d'Altrip.Ils ne mesurent que de 5 8 centimtres de diamtre :leur grosse extrmit s'enfonce en terre de 0,30 0,40;ils sont briss presque au ras du sol. Trois taient grou|)svers le centre, autour des restes du foyer, tandis que les

    (i) Voyez par exemple les huUes rondes reprsentes sur la cnloiinode iMare-Aurle. Petersen DoM.\ZEvvKi,f//V jl/o/'rssrtH7?, pi. iio, 112, 118.

    (2) Reconnaissahle sur le hs-relief du Louvre.(8) Cf. Wichmann, Ueherdic Morcn..., Ann. Soc. Hist. et Arrh. Lorr.,

    1908, p. 248-249. M. Wichmann, nous semble nanmoins port exag-rer les difficults de ce genre de couverture et multiplier outre mesurele nombre des mardelles qu'il devait tre impossible de couvrir d'untoit conique. Les critiques ([u'il adresse ce propos,

  • 43

    six autres placs intervalles peu prs rguliers taientaligns dans le sens du plus grand diamtre de la mare (1).De mme dans la mardelle des Bchais il sigfnale Texis-tence d'un tronc d'arbre ayant conserv de tous les ctsla naissance de ses branches, et qui par consquent, nepouvait faire partie des parois. Il ne pouvait servir que desoutien du toit, dans le milieu de la hutte (2).Nous n'avons aucun renseignement touchant la disposi-

    tion intrieure des huttes orauloises et leur amnaofement.Les trouvailles se sont rduites dans la plupart des mar-delles des dbris de clayonnages, formant parfois de vri-tables panneaux d'environ 2 mtres de long sur 1 mtre delarge et encadrs de forts montants de bois cylindriques.Trois claies de ce genre se sont rencontres au fond de laseconde mardelle fouille dans la fort de Gondrexange (3).A Gudenbrunnen, on n'en a plus trouv que les mon-tants percs de part en part d'un grand nombre de petitstrous, qui les font ressembler, dit M. Welter un mtier tisser primitif (4). Avons-nous l des dbris de portes, oupeut-tre de cloisons destines sparer l'habitation enplusieurs appartements, comme on Ta voulu supposer? Lefait est peu probable. Ces huttes primitives ne devaientformer l'intrieur qu'une sorte de vaste tanire o toutela famille s'entassait ple-mle. Les dimensions de cer-taines mardelles permettent mme de supposer que lebtail y devait, pendant l'hiver, trouver place ct desgens. La porte, et, sans doute, une ouverture pratique dansle toit pour le passage de la fume du foyer, taient lesseules ouvertures, laissant pntrer la lumire. De telleshabitations, semble-t-il, ne devaient gure fournir abri quepour la nuit et la mauvaise saison, une population rete-nue dehors tout le reste du temps par ses gots et sesoccupations.

    Date de ces habitations. Les 5000 mardelles que nous

    (i) Ihid.,^. 287.

    (2) Ihid., p. 253.

    (3) Corrcsph. d. deuiscli. Gesellsvli. f. AidhrorxA..., nov. inoo, p. S?,.(4) Ibid.

  • 44

    retrouvons encoro aujoLirtrhui, sur le territoire de la petitecit (les Mdiomatrices, se rpartissent sur iine durede plusieurs sicles. Les premires remontent l'poquegauloise. On y trouve des dc])i-is de poterie de l'poquede Hallstatt et de La Tne. Mais un certain nombre d'entreelles datent de l'poque gallo-romaine. Quelques faits per-mettent au moins d'afirmer qu'elles taient encore habites cotte [)oque.

    Sans doute, il est difficile de rien conclure de certain,de ce fait signal par les anciens archologues, qu'uncertain nombre de mardelles, se trouvent dans le voi-sinage, plus ou moins immdiat, des voies romaines (1). Ilserait tmraire d'en induire que les huttes ainsi placessont postrieures la construction de ces voies. Rien neprouve que le passage de la route, ait t prcisment lacause dterminante de l'emplacement des habitations.

    Il n'en est pas moins vrai que le passage d'une rouleamne, en gnral, dans son voisinage, la disparition detous les vestiges des civilisations antrieures. Il est vrai-semblable, que nous ne retrouverions plus sur le parcoursdes voies romaines aucune trace des huttes en branchages,si elles avaient dj cess compltement d'tre habites l'poque o les routes furent construites.Des indices plus positils permettent d'ailleurs d'tablir

    que la civilisation gallo-romaine pntra dans un bonnombre des habitations que nous venons d'tudier. Cesont les tessons de vases et les dilrents dbris trouvsau fond des mardelles, sous la couche de tourbe et debranchages; ils nous fournissent par consquent unedate indiscutable. Ces trouvailles, il est vrai, n'ont pas tjusqu'ici bien frquentes. Les huttes gauloises, en effet, nesemblent ])as avoir pri, comme la plupart des villas, parincendie ou par quelque catastrophe subite. Elles se sontcroules, faute d'entretien, abandonnes par leurs habi-tants. Ceux-ci avaient emport tous les objets qui pou-vaient tre de quelque usage. Les rares dbris qu'ils ont

    (i) L. Benoit, Les voies romaines... Mni. Soc. Arr/i. Lorr., i8().").Ledain, Mm. Soc. Arch. de In Moselle, i8()-2, j). f)."? sqi]. . 1*. Hacii,ibid., i866, p. 85 et sqq. Hammerstein, Annuaire Soc. Ilist. et Arch.Lorr., 1894, 2. p. 3i5.

  • 45

    laisss portent presque tous la marque de l'poque ro-maine.Nous savons que la brique et la tuile furent en Gaule

    une importation latine. Or, frquemment parmi les pierresqui forment le foyer, dans les mardelles, se sont ren-contrs des fragments de briques plates et de tuiles (1).M.Wichmann en signale deux fragments dans la mardellede Leyweiler, prs d"Altrip (2). A Drulling, M. Weltera trouv une tuile rebords presque intacte (3). Aucune,malheureusement, ne porte d'estampille qui permettrait deprciser la date.Les dbris de poterie sont plus frquents encore, et

    non moins caractristiques. Ce sont, Leyweiler destessons de terre rouge et jaune assez fine, l'anse et le coud'une grande cruche en terre rouge (4), Altrip et Drul-ling des tessons de ces vases en terre blanchtre, si fr-quents dans l'est de la Gaule, et les provinces de Ger-manie, l'poque romaine (5). Dans l'une des mardellesde Diulling on a mme ramass un fragment de terresigille (6). A Gondrexange se sont trouvs les dbrisd'une cruche romaine anse, d'un modle courant l'poque de Trajan (7). Mais la trouvaille, de toutes la plussignificative, fut faite aux Bachats (8). Sous la couched'argile, cache au pied d'une des grandes poutres dechne s'est trouve une trua de bronze fort bien con-serve, encore garnie de sa trulla. Cet ustensile absolu-ment romain, et qui tenait de prs aux usages du bas-

    (i) CoHAusEN, ProtokoHe d. Generalvevsnminl . s'lls-h. f. Anthro;)!)! ..., nnv. i.ji):>.|). i;').").

    (4) WicHMVNN, l'i'h'r di" Mir'Ji... Ami. S.y. Ilisl.cl A/-r/i. Ijut.,1903, p. 287.

    (f)) XXXII. All!ff/n'>in(' V

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    peuple ilalieu (1), laiL donc galement connu et employpar le peuple des campagnes mdiomatrices.Des cimetires se sont aussi rencontrs parfois ct

    de groupes compacts de mardcUes. M. AX'elter en signaleun d'assez grande tendue dans lalort de HohenBuchen(2)(prs Langenberg. cercle de Sai-rebourg). En l'absence detoute autre trace d'hajjitation dans le voisinage de cettefort, il semble peimis de supposer que ces spulturessont bien celles des liabilants des mardelles. Ce sont biendes spultures gallo-romaines. Les cendres sont(;nfermesdans de petites uines creuses dans un cube de pierre.On n'y trouve, il est vrai, ni vases ni monnaies. Cetteabsence de document prcis interdit de fixer une date,mme approximative ; elle n'autorise pas mettre endoute le caractre gallo-romain de ces tombes incin-ration.

    Si peu nombreux que soient tous ces indices, et sivague qu'en demeure le caractre, on peut en conclurecependant, avec une certitude entire qu'un bon nombredes habitations dont les mardelles nous ont conserv latrace, datent de l'poque gallo-romaine. Des huttes de cegenre devaient, en effet, se dtriorer rapidement. Laconstruction n'en exigeait, ni beaucoup de frais, ni beau-coup de temps. Il est supposer que chaque hutte ne dutjamais avoir qu'une dure assez courte et que les gn-rations nouvelles ne devaient pas hsiter abandonnerl'abri o elles avaient grandi pour s'en lever un nouveau.Nous constatons qu'elles s'en tinrent pendant longtemps,sans aucun changement, au genre de construction quitait celui des plus anciens Gaulois.Ces procds primitifs de l'architecture gauloise auraient

    cependant d disparatre rapidement devant la techniqueromaine. Le solide appareil de pierres ou de briques, liesau mortier, tait de toutes les nouveauts intioduites parles liomains dans les provinces conquises, la plus avan-taofeuse. Elle tait immdiatement la porte des habitants

    (1) HoRAfF., S(tl.,]\, :>, V, l/|I.l'anper

    Qui Veientaniim festis potare diebusCampana solilus tiulla, vappainque profestis.

    (2) Corret^pli. d. (li'iiisrit. Ccsi'llr.fli. f. AnIhrnjKilofj., nov. 1908, p. i36.

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    du pays mdiomatrice. La pierre abonde, en eflet, surtoutle territoire de la cit ; les voies amliores et multiplies,eu rendaient le transport facile. A dfaut de pierre, leshabitants des campagnes avaient partout sous la main Tar-gile et le bois ncessaire pour fabriquer des briques.Leur attachement aux misrables huttes de branchages etde boue montre une sorte de rsistance passive et obstinedu vaincu tout ce qui lui venait de son vainqueur. 11 enaccepta sans doute quelques poteries indispensables, laplupart d'ailleurs provenant du pays mme, quelquesvases, comme celui des Bachats, dont le mtal, le bronze,lui rappelait les ustensiles produits par l'ancien art indi-gne. Mais pour tout ce qui touchait de prs son genrede vie et ses murs, il s'en tenait aveuglment aux tra-ditions anciennes. Il est absolument vraisemblable que lesmthodes de culture romaines, les principes sur lesquelstait fonde en Italie la condition des personnes et dela proprit, demeurrent longtemps aussi trangers aux pagani mdiomatrices que Tart de btir des Romains.

    Faut-il voir l simplement l'effet d'une rsistance volon-taire toute innovation et tout progrs ? Il est probableque la masse de la population gauloise se trouva excluedu bienfait de la civilisation romaine parl'efFet de sa misre,bien plutt que par sa volont propre. La condition socialedu peuple tait, semble-t-il, assez misrable dans la Gaulearistocratique d'avant la conqute. Les guerres et la dfaite,ne furent jamais profitables aux humbles. Il est probableque la conqute romaine ne fit qu'aggraver sa situation.La confection du cadastre ordonne par Auguste duttourner surtout l'avantage des grands propritaires dontl'administration romaine cherchait gagner les sympathies.L'tablissement d'une mardelle et la construction d'unabri en branchages, ne demandaient au Gaulois sans res-sources, que du temps et un peu de peine. II ne pouvaitsonger s'lever une demeure de pierre ou de brique.Ces huttes lgres, faciles btir et facilement aban-

    donnes, nous rvlent l'existence, l'poque romaine,d'une population entirement pauvre et sans doute encore demie nomade. Aucun lien solide n'attache la terrel'habitant d'une semblable cabane. Il n'en possdait sansdoute que ce qu'il parvenait occuper pour quelques sai-

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    sons. Incapable de lutter avec la concurrence de la grandeculture dveloppe par la paix romaine, il ne devait d'ail-leurs ensemencer que ce qui tait indispensable sa sub-sistance et celle de sa famille. Quelques troupeauxdevaient constituer tout son avoir; car les mardelles peu-vent avoir servi d'tables, aussi bien que d'habitations. Ilsdevaient se composer surtout de petit btail, de porcs etde moutons, dont Tlevage tait traditionnel en Gaule.Une telle situation tait l'obstacle le plus infranchissable

    oppos Texpansion de la civilisation romaine dans lescampagnes gauloises. Loin de s'aplanir avec le temps, ilne pouvait que crotre. Seule la disparition de cette popu-lation misrable pouvait achever le triomphe de la coloni-sation latine. Jusqu' quelle poque la population gau-loise non romanise, qui continuait d'habiter les mar-delles, subsista-t-elle dans le pays mdiomatrice ? Ilest difficile de le dire. Ces reprsentants obstins destraditions indignes furent-ils englobs plus tard, avec lereste de la population libre, dans le grand mouvement ducolonat, ou persvrrent-ils jusqu' la fin de la domina-tion romaine dans leur misre et leur indpendance, c'estce qu'aucun document ne nous permet d'tablir.

    Rpartition des mardelles dans le pays des Mdionia-Irices . Suivant les premiers archologues qui ont tudiles mardelles, elles se rencontreraient gnralement pargroupes de trois, l'une, exposaient-ils, aurait servi d'habi-tation, la seconde d'table, la dernire de grange (i). Dansles endroits o elles se rencontrent en plus grand nombre,on en compterait 6, 9, 12.., etc. Une telle rgularit seraitde tous les caractres qui distinguent les mardelles, leplus extraordinaire. Elle fournissait, d'ailleurs, de tropfaciles dveloppements, pour ne pas flatter l'imaginationde chercheurs souvent plus presss d'expliquer que sou-cieux de constater les faits. L'ide de ce grouj)ement par

    (i) Ledain, Adslrasi'p, \S'}-], p. /i^|8. L. Benoit, Les voies romdincs lel' arrondissement de Surrebourg. M/n. Soc. Arch. Lorr., i8(j.^, p. i8.

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    trois, type cFune petite exploitation agricole, une foisadmise, un peu de complaisance suffisait pour le retrouverfacilement dans toutes les rgions o les mardelles abon-dent.En fait les mardelles se rencontrent, tantt complte-

    ment isoles au milieu des champs et des bois, tanttassocies en petit nombre, et disperses des intervallestrs variables dans un rayon de 1 ou 2 kilomtres.Parfois aussi, et le cas n'est pas rare, elles sont troite-ment groupes en certains endroits et semblent avoirconstitu de vrita])les villages.Une carte des mardelles releves jusqu' prsent dans le

    pays des Mdiomatrices, a t dresse par les soins de laSocit d'Histoire et d'Archologie Lorraine (1). On cons-tate qu'elles y sont trs ingalement rparties.Nous remarquons tout d'aord qu'on ne rencontre aucune

    mardelle, dans toute la rgion situe au nord de Saint-Avold, entre Forbach l'est, et Sarrelouis l'ouest. Il enest de mme dans la rgion vosgienne proprement dite,au sud de Lorquin, et l'est de la valle de la Sarre. Aunord de Saint-Avold, comme dans les Vosges, le sol estconstitu par le grs.

    Cette seule et mme raison gologique : la nature duterrain, suffit expliquer l'absence de mardelles, sur cesdeux points du territoire mdiomatrice. Il tait difficile decreuser des habitations dans le roc. Surtout, le manqued'argile rendait impossible la construction des huttes debranchages et de terre que nous avons dcrites. La pierreaffleurant le sol fournissait des matriaux d'un autre genre.Autre terrain, autre mode de construction. Ces demeuresde pierres, tablies sans fondations ont laiss moins detraces, que les huttes demie souterraines.Un exemple cependant permet de se faire une ide du

    genre d'habitation qui, dans les pays du grs, correspon-daient aux mardelles. C'est celui d'une petite maison dontles fondations ont t mises au jour au-dessus de Wals-cheid, proximit du cimetire gallo-romain de Drei Hei-

    (i) Reproduite la suite de l'article de \\'ichniann, .l/z/(. Soc. Flist.et Arch. Lorr., i()o3, pi. I.

    A. Grenieh. Ilahildtions (jauloiscs. 4

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    ligen (i). Les murs pais d'environ 1 mtre forment unquadrilatre de 6'"75 sur 4'80. Ils sont construits de blocsirrguliers, simplement entasss, sans aucun moyen deliaison (2). Au centre de la salle, une dalle pose plat etdeux autres qui semblent avoir t places de champ,reprsentent le foyer. Attenante l'habitation tait unevaste enceinte de 45 mtres de long sur 23 mtres delarge d'un ct et 25'"50 de l'autre. Les murs en sont plusruins que ceux de l'habitation ; les blocs semblent enavoir t moins rgulirement disposs. C'tait soit unparc bestiaux, soit une cour entoure d'une clture.A dfaut de restes d'habitations, d'autres vestiges nous

    permettent d'tablir, au moins pour la rgion vosgienne,l'existence d'une colonisation aussi indpendante de lacivilisation latine, que celle dont les mardelles nous ontconserv la trace. Nous voulons parler de ces amas depierres considrables que la langue du pays dsigne sousle nom de rottelii . Sur les pentes des hauteurs, ils for-ment comme de longs murs continus, bordant des sortesde terrasses. On y voulait voir autrefois les restes d'unvieux systme de fortifications. Il parat tabli aujourd'hui,que ces rotteln ne doivent leur existence qu'aux blocsextraits des champs o ils gnaient la culture, et entassssur les limites de faon former des cltures (3). Certainsparmi ces blocs portent en effet de longues et nom-breuses raflures qui ne semblent dues qu'au passage dela charrue (4). Ces amoncellements de blocs nous appor-

    (i) Weltkr, Strassbiirr/pr Pnst., 20 dcc. i()o3.(2) Les substructioiis de murs, construits de mme fa(;on, en Idocs

    irrsfuliers, mais lies par de l'argile ont t trouvs galement parM. Weller, au nord du pays messin, Rdan^e (prs de la frontireluxembourgeoise). Aiin. Soc. Ilist. et Arcli. Lorr., 1902, p. 470. La cons-truction laquelle ils appartenaient date de l'pocjuc gallo-romaine. Ony a trouv une monnaie romaine, moyen bronze, fruste, une cupule enterre cuite, et un fond d'cuelle en terre sigille. Ibid., 1899, p. 878.Il est inutile de rappeler que l'emploi de l'argile en guise de mortierest un procd gaulois. (]f. Bulliot, Les fouilles du Mont lienvi'aij,notamment la description de la forge situe la porte de l'oppidum. I,p. 3 sqq.

    (3) Behlen, MittlieihiiKjen. d. Vei'. f. Nussduisclie. AllcrliiiiisL-iinde.u. Gesrhichtsforsch., 1903-1904, n i.

    (4) Welteh, Die Ilorlik'er ini Vofjeseiifjebii'ffe ciir fjdllo-rinischerZeil. Ann. Soc. Ilist. et Arcli. Lorr., 1908, p. 483-488, pi. XXXVIL

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    tent donc la preuve de l'exploitation une poque anciennedes terrains o ils se rencontrent.Le voisinage de cimetires gallo-romains nous autorise

    dater cette mise en valeur de Tpoque romaine. L'absencede tout lment caractristique de la civilisation latine, laforme tout particulirement gauloise de la majeure partiedes tombes, montre en mme temps une populationdemeure fidle aux traditions indignes. Cette popula-tion semble absolument la mme que celle qui l'on doitles mardelles. Les rotteln amnags par elle, s'tendenttout le long de la lisire du massif vosgien, depuis Albers-chwiller jusqu' Bitche. Profitant des petites valles, ilss'avancent jusqu' l'entre des forts, qui marquent aujour-d'hui encore et marqueront toujours la limite extrme deshabitations. Malgr l'absence de mardelles, il nous estdonc permis d'affirmer que les abords des Vosges etsans doute aussi la rgion forestire situe au nord deSaint-Avold furent l'objet d'une colonisation analogue celle dont les mardelles nous ont conserv le souvenir.Les mardelles font galement entirement dfaut dans

    un rayon de quinze vingt kilomtres autour de Metz. Onn'en trouve aucune sur les collines et le riche plateau quispare la ]\Iosellede la Seille, pas plus que dans la valle dela jNIoselle et sur les ctes qui la bordent jusqu' Thionville.Elles sont extrmement rares dans tout le pays de la Seille.Aucune raison gologique ne s'opposait ici leur tablis-sement. Le sol, trs argileux, rendait au contraire extr-mement facile l'amnagement de ces habitations demisouterraines. Ces plaines et ces coteaux sont les plus richesde tout le pays. Ils ont d tre de tout temps les centresles plus peupls. Il semble que l'on devrait y retrouver destraces de colonisation, remontant aux poques les pluslointaines.On peut admettre, il est vrai, que la fertilit mme de

    cette rgion et la densit de population qui en fut de touttemps la consquence, aient contribu faire disparatredans le cours des ges, les traces de ces demeures primi-tives. Mais cette explication ne saurait suffire. Tous lesvestiges de civilisations anciennes ne manquent pas gale-ment, en effet, sur ces collines et dans ces valles. Lesrestes de villas gallo-romaines, notamment, s'y rencon-

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    trent en grand nombre. La longue perturbation produitedans le pays par l(;s invasions barbares, a laiss le temps ces ruines de se recouvrir d'une couche d'humus oude trouver une protection dans les fourrs des fortsrenaissantes. 11 en et t de mme pour les mardelles.Quelques-unes au moins auraient pu ainsi, chapper aunivellement de la charrue.Une seule raison permet de rendre compte de leur dis-

    parition totale. Nous n'en trouvons aucune dans les fertilesvalles de la Moselle et de la Seille, parce que prcis-ment les villas gallo-romaines y abondaient. Les huttesgauloises y ont t toutes dtruites dessein, pour treremplaces par des constructions d'un genre moins gros-sier. Les campagnes, voisines desgrandes villes, de Metzetde Scarpone, coupes en tous sens parles voies reliant lacapitale de la cit au reste de la Gaule et Tltalie, ne j)Ou-vaient chapper linduence latine. Leur richesse attiraitla civilisation. La population devait se plier aux mn-urs,accepter les mthodes de colonisation et l'art de btir desnouveaux matres du pays, ou bien disparatre. Dans toutpays conquis, l'avantage reste toujours la civilisation laplus avance. Les indignes qui ne purent ou ne voulurentpas devenir des romains de Gaule durent peu peu cderle terrain. Us cherchrent dans l'intrieur du pays desrgions plus cartes et moins accessibles aux murs nou-velles. C'est l qu'ils creusaient leurs huttes, en attendantque le flot de la civilisation envahissante les repousstdans des lieux toujours plus pauvres et plus sauvages.

    C'est, en effet, dans les rgions les moins favorises dupays lorrain, que nous trouvons en plus grand nombre,les restes des habitations gauloises. Nous avons dj vu, eneffet, qu'ils ne manquaient pas la lisire des foits et surles mamelons rocheux des Vosges. Quant aux mardelles,elles se rencontrent par groupes compacts extrmementdenses, sur toute la rive gauche de la Sarre, depuis largion des Etangs jusqu' l'Albe, depuis l'Albe jusqu'la Rosselle. C'tait la partie de la cit des Mdiomatrices laplus loigne de la capitale. Occupe j)ar de maigres pla-teaux en partie boiss, elle formait en avant de la fortvosgieAne, une sorte de marche frontire, que la pauvretde ressources rendait peu pntrable.

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    Les mardelles abondent galement au sud de Sierck