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La politique de l’hospitalité : “l’homme est le remède de l’homme”............................................................................................................................................................................................. 23

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Sommaire

Bruxelles Laïque est reconnue comme association d’éducation permanente et bénéficie du soutien du Ministère de la Communautéfrançaise, Direction Générale de la Culture et de la Communication, Service de l’Education permanente.

Bruxelles Laïque asblAvenue de Stalingrad, 18-20 - 1000 BruxellesTél. : 02/289 69 00Fax : 02/502 98 73E-mail : [email protected]://www.bxllaique.be/

Editorial ......................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................... 3

Résister, c’est créer : rencontre avec Miguel Benasayag ........................................................................................................................................................................................................................... 5

Nouvelles formes de résistances ?.................................................................................................................................................................................................................................................................................... 9

Résister : ici et maintenant ? ................................................................................................................................................................................................................................................................................................ 12

INTERVIEW : OJOS DE BRUJO .......................................................................................................................................................................................................................................................................................... 15

Musique, résistance et engagement............................................................................................................................................................................................................................................................................. 17

INTERVIEW : ABD AL MALIK ................................................................................................................................................................................................................................................................................................ 19

La politique de l’hospitalité : “l’homme est le remède de l’homme”............................................................................................................................................................................................. 23

Cinéma des libertés....................................................................................................................................................................................................................................................................................................................... 25

Bruxelles Laïque s’expose en murmurant ............................................................................................................................................................................................................................................................... 28

Un procès décisif pour l’avenir de nos libertés.................................................................................................................................................................................................................................................. 30

Souveraineté alimentaire : penser global, manger local............................................................................................................................................................................................................................ 32

PORTAIL : Résister, c’est créer........................................................................................................................................................................................................................................................................................... 35

Les dangers du créationnisme : enjeux pour l’enseignement des sciences en Europe............................................................................................................................................ 37

SLAM : Électron Libre .................................................................................................................................................................................................................................................................................................................. 40

© photo de couverture : Eric Vauthier (spectacle MIRADA - Marisa Borraz)

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D u 31 octobre au 11 novembre, le Pathé Palace a accueilli l’édition 2007 du Festival des Libertés. Cette aventure multidisciplinaire seconfirme progressivement comme un brassage des multiples modes d’expression de l’engagement citoyen et aussi un espace

d’affirmation de la laïcité.

Après ces douze jours d’une programmation mêlant l’artistique et le politique, dans un décor original et une ambiance conviviale, nousconstatons – non sans un soupçon de fierté –, que notre Festival grandit et s’épanouit. Il progresse aussi bien par la quantité, la qualitéet la diversité de son contenu, que par l’affluence de son public toujours plus large et métissé. Il s’enrichit de nouveaux moyens de dénon-ciation et d’analyse.

Si l’année passée, notre attention s’était portée sur l’ensemble des peurs qui entravent les libertés, l’esprit critique et la cohésion sociale,en 2007, nous avons voulu prolonger ce questionnement et nous pencher sur les causes de fragmentation de la société et de repli crain-tif des individus ainsi que sur le sentiment d’impuissance voire de fatalisme qui en résulte.

Face au manque de perspectives offertes par la société, nous avons remarqué que chacun a tendance à se recroqueviller sur lui-mêmeou à se replier sur le plus proche et rassurant tel que la famille, l’ethnie ou le clan et risque du coup de céder aux chants des sirènes quise prétendent encore plus rassurants, à savoir les superstitions, les dogmatismes, les religions ou les sectes.

Cette tendance à l’affirmation, la stigmatisation et la rivalité identitaires ébranle progressivement le projet de société démocratique laïqueet nous pose des questions qui sont probablement les vôtres : où sont nos valeurs citoyennes dans un espace public encombré parl’égocentrisme, l’extrémisme, le consumérisme et les identitarismes confessionnels ou culturels ? Où sont l’espoir et le rêve d’une sociétémeilleure, où est le progrès de l’humanité ?

Pourtant, un peu partout dans le monde, des individus ou des groupes non seulement dénoncent mais résistent activement. Ils recréentdes liens, se réunissent autour de projets et de pratiques émancipatrices qui tentent de répondre, au niveau local, à des défis planétai-res.

C’est pourquoi il nous importe d’élargir le champ d’action de ces initiatives qui défient l’impression d’impuissance et le fatalisme, en leurproposant un espace de rayonnement et de rencontre avec un public diversifié.

Sous l’intitulé “Résister, c’est créer”, nous avons voulu promouvoir et relier ces initiatives pour signifier que résister, c’est autant refuserl’inacceptable que déjà ébaucher d’autres possibles.

Ce numéro du Bruxelles Laïque Échos tente de relater, à la fois, les réflexions qui ont servi de base à notre démarche, le foisonnementde nouvelles initiatives citoyennes ainsi que l’ambiance festive, artistiquement novatrice et musicalement métissée, qui ont réussi àréchauffer l’automne pluvieux de notre capitale.

Ariane HASSIDPrésidente

EDITOrial

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© picture by Pickle - http://www.morguefile.com/archive/?display=31845&

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Psychanalyste et philosophe de formation, ancien combattant de la guérilla guévariste contre la dictature en Argentine, Miguel

Benasayag observe depuis de nombreuses années l’émergence d’une nouvelle radicalité désireuse de changer la vie.

Des universités populaires en France et en Argentine aux expériences de psychiatrie alternative, des mouvements de paysans sans

terre latino-américains aux mobilisations européennes pour les sans-papiers, il constate que pour ces nouveaux mouvements, la

question n’est plus de savoir comment prendre le pouvoir. Il ne s’agit plus d’attendre de grands soirs en obéissant à des “maîtres

libérateurs”, le changement doit commencer ici et maintenant. Miguel Benasayag reprend ainsi de Foucault le concept de “micro

pouvoir”. Agir local et penser local, non pas comme abandon de l’universalité, mais pour renouer avec un “universel concret”.

Les vieux habits de la militance “contre” sont abandonnés au profit de la quête de modes de vie et de pratiques alternatives.

“Résister, c’est créer” reprendra-t-il de Gilles Deleuze. Créer des liens, reconstruire des solidarités pour dépasser en actes et dans

la vie de tous les jours l’individualisme du système. Etre du côté de la vie, créer quelque chose de désirable, de positif…

Miguel Benasayag met en garde contre les “militants tristes”, ceux qui ressassent sans cesse que le monde est un désastre, ceux

qui nous disent toujours comment il faut faire, “il n’y a qu’à” … Pour Benasayag, l’absence de modèle est un atout. Il plaide pour

une multiplicité joyeuse de luttes et la mise en réseau autour de projets, constatant que la centralisation, tout comme la dispersion,

mène à l’impuissance.

Impliqué dans différents collectifs et mouvements, dont le collectif “Malgré tout” et le mouvement des “sans”, il a participé et parti-

cipe encore à de nombreuses expériences, témoignant sans relâche de la manière dont le désir de lien a commencé à saper le

projet majeur du capitalisme, celui d’un monde unique et centralisé.

Résister, c’est créer Rencontre avec Miguel Benasayag

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Vous vous définissez comme un cher-cheur militant. Pourquoi ?

En général, quand on veut changer lemonde, quand on lutte pour la justice…,on se contente d’être indigné, mais on estsouvent très peu sérieux. Pour moi, unmilitant doit pouvoir assumer la com-plexité ; le désir de changer le monde nesuffit pas.Il est nécessaire qu’il y ait un travail, unerecherche théorique en profondeur, et cetravail doit être dans une relation d’aller-retour avec des pratiques. La question dulocal et du global, par exemple, est trèsimportante aujourd’hui, mais la recherchethéorique doit être élargie à une cliniqueou, pour un militant, à des pratiques. Il y aun aller retour qui se réalimente. Uneerreur cartésienne à ne pas commettre estde considérer que c’est la conscience quidoit orienter le corps. Certainement pas !Mis à part ça, une fois qu’on a dit que lathéorie ne devait pas diriger la pratique, ilfaut la pousser très loin, mais toujours àl’épreuve de la pratique.

Dans Du contre pouvoir, parlant desnouveaux modes de résistance, vousfaites remonter la “nouvelle radicalité”à 1994 au Chiapas, en parlant de la findu désenchantement et du droit del’hommisme. Pourquoi cette date etcomment décrire cette nouvelle radica-lité ?

On sortait des années très noires, c’était lachute des idéaux, la fin du modèle soviéti-que, une époque où l’on ne bougeait plus,où l’on pensait que les mouvementscontestataires, révolutionnaires ne pou-vaient pas se développer, faute d’avoir

un nouveau modèle de monde. Tout àcoup, au Chiapas, pour les latino-améri-cains, mais aussi pour d’autres, enFrance, en Italie, en Belgique, le mouve-ment zapatiste a constitué le basculementvers un autre mode d’engagement, où l’onbouge non plus malgré le fait de ne pasavoir de modèle, mais grâce au fait de nepas avoir de modèle. Tout à coup, on a vuémergé une nouvelle radicalité danslaquelle on ne demande pas à quelqu’unde lutter en croyant que le monde doit êtrecomme ci ou comme ça, mais en construi-sant dans la pratique des options nouvel-les. Cette revendication d’immanence dela lutte était quelque chose qui existaitdéjà à travers le mouvement des sansterre brésiliens, par exemple, mais en1994, avec Marcos, cette nouvelle radica-lité s’est donnée à voir à un niveau mon-dial. Elle disait : “le monde doit seconstruire autrement, on se bat mais sansaucun leader, ni modèle”. Et malgré leserreurs, cette nouvelle radicalité reste,pour moi, la seule voie d’une radicalitélibertaire, d’une émancipation possible.

Comment expliquer que les combatsbasés sur des idéologies aient échouéet d’un autre côté, comment éviter quecette nouvelle radicalité qui ne suit pasde modèle ne mène pas à un éclate-ment total des groupes d’action ?

Les combats basés sur un modèle ontéchoué pour des tas de motifs différents,mais notamment parce qu’il y a une diffé-rence entre ce qui est possible quand onle pense dans la tête et ce qui est possiblequand on est en prise avec la réalité. Tousles modèles d’émancipation ont abouti,de manière plus ou moins grave, au

contraire de ce qu’on voulait produire. Enrevanche, notre modèle, notre contre-modèle, que ce soit au Chiapas, au Brésil,en Argentine, en Italie, était le mouvementdes femmes qui est né dans une radicalitétrès forte. C’est un mouvement qui a desobjectifs, mais toujours partiels : il n’y apas de modèle d’une société féministe. Lemouvement de contre pouvoir n’est pasun mouvement qui peut être évalué dansle sens “il a échoué, il a réussi”, c’est unmouvement de la vie contre le néo-libéra-lisme.Et effectivement, le grand danger de cette“mouvance” est la dispersion. Nousvoyons bien que dans ce qu’on appellel’alter mondialisme – qui est un petit phé-nomène dans cette grande alternative –,comment la tendance Ramonet, Cassen,la direction parisienne d’ATTAC, veut cen-traliser. Ils admirent Chavez, Castro, lesleaders en fait. De l’autre côté, on a la ten-dance “ONG-iste”, la tendance tribale :chacun dans son coin, on fait des petitstrucs, on dit qu’on change le monde “endisant bonjour à sa voisine”. Ces deuxtendances sont dangereuses pour cettemouvance. Il faut éviter tant la dispersionque la tentation de centraliser avec un lea-der, un programme : “un autre monde estpossible et je vais vous dire lequel.”

Comment imaginer une instance inter-médiaire entre ces deux pôles ?

Il n’y a rien à imaginer, il y a à faire. Il y a àassumer des luttes multiples, plus oumoins articulées, dans la radicalité, l’ur-gence et la profondeur de ces luttes, touten ayant conscience que le monde ne sechange pas en passant d’un modèle à unautre. Quand bien même quand il y a un

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changement d’hégémonie, de régime, demode de production, la seule préoccupa-tion pour quelqu’un qui pense, qui vit, quidésire, sera, dans l’autre monde, de dire :“mais par où passe la liberté ?” Il faut cas-ser avec la métaphysique qu’il y aurait unmoment où il n’y aurait plus à se battre.C’est une vision organique, vivante del’engagement. C’est pourquoi le conflit :c’est l’idée du devenir.

Beaucoup de mouvements de contes-tations ont été accaparés par certainsgroupes. Comment éviter qu’ils nesoient l’apanage de ceux qui ont eul’instruction… ?

C’est très difficile et c’est inévitable. Parexemple, ici, lorsqu’il y a des mouvementsde sans-papiers ou de sans-toit, les “mili-tants tristes”, les militants professionnelsarrivent comme des vautours à chaquefois que quelque chose bouge. Il y a quel-que chose de très désagréable parce queces militants-là, quelque part, s’en foutentdu malheur des autres. C’est un tremplin,

quelque chose qui leur permet d’amenerleur programme du monde. La nouvelleradicalité consiste à dire : si d’autres mon-des sont possibles, ils émergeront à partirdu mouvement des gens. C’est une idéede non transitivité. La lutte des sans-papiers, c’est une lutte des sans-papiers,ce n’est pas un tremplin pour avoir undéputé. Mais je n’ai rien contre la démo-cratie représentative : la ligne du contre-pouvoir cohabite avec la démocratiereprésentative. Je pense que pour dessociétés complexes comme les nôtres, ilfaut bien un appareil représentatif quipuisse gérer. Mais ce sont des choses dif-férentes.

Vous faites souvent cette différenceentre “gestion” et “politique”. Com-ment inverser le lien de subordinationentre ces deux entités, pour que le pou-voir de gestion soit subordonné audésir de celui qui connait sa condition,ses besoins, c’est-à-dire le groupe à labase ?

Souvent, il y a des élus qui ont envie de seplier au contre-pouvoir. Mais ce n’est pasparadoxal du tout, ce sont simplementdes gens qui sont de vrais démocrates,qui disent “nous sommes là pour repré-senter la puissance de la base”. Il s’agit derappeler à ces amis-là – il y en a d’autresà qui il faut le rappeler plus fortement –qu’ils représentent la puissance de la baseet que l’objectif de la puissance dans unelutte n’est pas de devenir un représentant.L’objectif d’un peintre n’est pas de deve-nir directeur d’un musée. Mais le directeurde musée n’est pas l’ennemi du peintre.On peut avoir un directeur de musée trèsprogressiste comme on peut avoir un

directeur réactionnaire. Ce sont deuxmétiers différents, structurellement diffé-rents.

Dans un pays comme la Belgique où lasociété civile est relativement structu-rée, si on regarde par exemple lesexpulsions de squat ou l’affaire duDHKP-C, on voit de plus en plus le pou-voir de gestion qui empêche la puis-sance de la base de s’exprimer.

Malheureusement, je ne pense pas. Jecrois que si les gestionnaires, les hommeset les femmes politiques, ne prennent pasde mesures solidaires envers les person-nes expulsées, les personnes dans lescentres fermés…, c’est parce que la puis-sance de la base est très petite. D’un pointde vue très guévariste, je pense que c’esttoujours de notre faute. Ici en Belgique, jeme souviens dans les luttes contreVottem, je suis venu ici très souvent et onétait trois et demi, grosso modo. Alorsaprès, ça ne sert à rien de dire que lesdéputés ne font rien. Les députés repré-sentent le peuple. Autant la politique nem’a jamais intéressé, autant je suis trèsgentil avec ceux que ça intéresse et jepense que souvent, on les charge de fau-tes dont ils sont innocents. Quand on dit :“mais qu’est-ce qu’il fait le député” ; moije crois que le député, il aurait tout à fait ledroit de dire : “Mais qu’est-ce que vousfaites vous ? Mais que fait le peuple ?”Quand ce drame est arrivé avec SémiraAdamu, on pensait qu’en France cela nepourrait pas arriver, mais c’est arrivé plu-sieurs fois depuis. Ce n’est pas la fauteaux députés. A la limite, ce n’est mêmepas la faute à la brutalité policière, lapolice est plus ou moins brutale par

Miguel Benasayag

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rapport à ce que les gens permettent ounon. Si les flics sont “adorables” enArgentine, c’est parce qu’ils ont tout inté-rêt à l’être parce que la puissance de labase est tellement forte qu’ils ne peuventpas faire un pas de côté. Mais c’est lamême police qui, si la puissance de labase diminuait, pourrait à nouveau tortureret tuer.Il faut se regarder soi et en réalité, on esttrès peu puissants. On a du mal à trouverles mots, les mécanismes pour se révolter.On a du mal à trouver les mécanismesd’émancipation. Tous. C’est une respon-sabilité partagée. Mais ce n’est pas en sebagarrant, comme ça a été le cas enFrance à l’époque des élections, entretrois groupes gauchistes, qu’on va redon-ner la puissance à la base. Il faut lapatience de reconstruire le tissu social.

Lorsqu’on évoque cette nouvelle radi-calité et l’importance de la diversité,pourrait-on y voir une définitioncontemporaine de la laïcité ?

La laïcité est un problème complexe. Si onutilise la laïcité comme une arme pour res-sortir la supériorité de l’Occident qui secroit lui laïque, rationnel par rapport à ces“pauvres gens qui croient à des connerieset qui sont très dangereux”, si c’est cela lalaïcité, il vaut mieux pas. Si la laïcité signi-fie que chacun, avec sa singularité,accepte de partager un projet commun -un projet de nation, un projet de quartier,peu importe – un projet non-dogmatique,qui n’obéit à aucune croyance, fût-elle lacroyance dans le scientisme ; si la laïcité,c’est ça, c’est parfait ! En France, à pro-pos du voile, on aurait dû faire jouer la laï-cité comme une émulation pacifique, mais

au lieu de ça on a eu affaire à une laïcitéd’intolérance, hystérique… On a loupél’occasion d’un dialogue complexe et on apoussé à l’affrontement. Cette laïcité-là,ce n’est pas de la laïcité, c’est du colonia-lisme.

Propos recueillis par Nicolas HANOTEAU(Murmure Média) et retranscrits par

Sophie LÉONARD(Communication socio-politique,

Bruxelles Laïque asbl).

Bibliographie choisieÉloge du conflit, en collaboration avecAngélique del Rey.La Découverte, 2007.Connaître est agir, La Découverte (collec-tion armillaire), 2006.Résister, c'est créer, en collaboration avecFlorence Aubenas, La Découverte, 2002.Du Contre-pouvoir,en collaboration avecDiego Sztulwarkal, La Découverte, 2000. Le Mythe de l'individu, La Découverte,1998.

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Nouvelles formesde résistances ?

Dans les pays du Sud comme dans ces énormes poches de pauvreté des pays centraux, les sociétés contem-

poraines mettent au ban des pans entiers de leurs populations : “sans travail”, “sans toit”, “sans accès aux

soins”, “sans papiers”, “sans terre”. Cependant, ces “sans” ne sont pas vraiment “exclus” : parler d’exclusion

laisse passer par contrebande l’idée d’une inclusion encore possible. Les hommes politiques ont beau affir-

mer : “Travaillez, soyez disciplinés, attendez la croissance et après on

pourra distribuer”, ils ne peuvent que mentir, cette croissance étant

impossible. Mais comment penser l’alternative ? C’est là un point com-

plexe du conflit historique actuel : la contradiction entre le désir de

justice sociale et l’impossibilité de poursuivre une croissance pourtant

réputée extensible à tous les pays du monde.

L a crise du modèle de la croissance estaussi celle des conditions matérielles

du dépassement des injustices sociales.La lutte des laissés pour compte de nossociétés, les “sans”, émerge et se déve-loppe d’une façon différente des précé-dentes luttes d’émancipation : car si lemodèle dominant n’arrête pas de produiredes sans, ceux-ci, contrairement au prolé-tariat, ne sont pas en eux-mêmes porteursd’un dépassement objectif des problèmesde la société qui les condamne. Marxdisait en substance que la distributionsociale, le changement du régime de lapropriété et du travail, ne dépendent pasd’un regard humaniste sur les souffrancesdes femmes et des hommes opprimés,

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mais des conditions objectives histori-ques, permettant à leur tour l’existence dece regard qui verra dorénavant une situa-tion de souffrance comme situation d’injustice.

Les “sans” ne sont pas porteurs de cetexcédent qui leur permettrait de devenirde véritables sujets sociaux : leurs reven-dications sont transparentes pour le pou-voir : un “sans toit” voudra un toit, un“sans papiers” des papiers, un “sans tra-vail” du travail, etc. Ces groupes ne veu-lent pas quelque chose qui questionnel’ordre et les fondements sociaux, mais ceque possèdent les membres “intégrés” dela société. Ils ne peuvent plus s’envisager

comme exclus, car ils ont perdu le modèlesymétrique d’inclusion, mais ils ne peu-vent pas non plus se contenter de ce qu’ilsont, car ils sont des laissés pour comptedes sociétés de la promesse.

Pourtant, depuis les années 1980, les lut-tes des sans, par exemple celles des“sans terre”, ont souvent cherché àconstruire des espaces de vie alternatifs.Au Brésil ou en Argentine, les paysanspauvres qui occupaient des terres expli-quaient qu’ils l’avaient fait d’abord poursurvivre et qu’après coup, ils s’étaientrendu compte qu’ils étaient en train dedévelopper une vie plus désirable quecelle dont ils étaient exclus. C’est ainsi

que les sans sont progressivement deve-nus des laboratoires et des “chercheurs”de nouvelles possibilités : les liens entreles gens, et des gens avec l’environne-ment, connaissaient de nouvelles formes.Cela s’est développé pendant quelquesannées dans toutes les dimensions de lavie sociale : éducation, production,échange, médecine, art, etc. Maisaujourd’hui, la perspective des sanscomme nouveaux sujets sociaux semblesouvent engagée dans une impasse. Etelle s’éloigne d’autant plus que le mouve-ment “alter” qui s’est développé en lesaccompagnant est retombé dans l’an-cienne figure de la représentation commelieu du pouvoir ; il a discipliné et scléroséle mouvement alternatif : celui-ci n’a pasdisparu, mais il est devenu plus flou, plusdifficile à saisir.

Les sans ne sont donc pas porteurs d’unnouveau monde, tout au moins pas pourle moment ; mais ceci n’est pas unconstat d’échec : ce constat porte en réa-lité une signification quant au mode delutte dont a besoin notre époque de tran-sition. L’ordre mondial actuel est dirigé parun modèle de production/consommationinaccessible à tous ; or les sans expéri-mentent au quotidien les frontières inté-rieures du système-monde, en montrantque ce qui nous est présenté comme le“monde” n’est qu’une dimension restreinte de la réalité. Ce que le devenir-sans nous révèle, c’est que le système-monde ne tient pas, et qu’on essaie de leremplir avec de la discipline. On essaie desuppléer l’absence de promesse avec ducontrôle, à travers une unidimensionnali-sation utilitaire des pratiques. Et cela pro-duit des actes de barbarie, voire un désir

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de barbarie. Cela produit surtout des fron-tières dans lesquelles ceux qui se viventcomme des “sans” expérimentent que ledevenir disciplinaire de la société cacheun écrasement du conflit. Que le récit uti-litariste cache des pratiques sacrificiellesmassives et irrationnelles. Que le “tout estpossible” de la technique se heurte à desasymétries. Les sans désignent tous ceuxqui expérimentent que, derrière la virtuali-sation du monde, le système-monde esten train d’épuiser ses formes. Et c’est icique celui qui lutte pour survivre dans unbidonville et l’artiste qui lutte pour quevive sa création ont, aussi paradoxal celapuisse-t-il paraître, quelque chose encommun. Même si ce quelque chose sedéfinit plutôt négativement que positive-ment.

Il y a de la résistance et résister, c’estdévelopper les conflits qu’elle implique. Ily a par exemple résistance au devenir uni-dimensionnel de la vie, au formatage dis-ciplinaire des individus, au contrôle descorps. À l’époque du “biopouvoir” et del’“ennemi intérieur”, la résistance existeaux frontières intérieures de la société, làoù l’on manipule les individus et surtoutles groupes hors norme comme desobjets sociaux exclus et donc à inclure ouà détruire, parce qu’à la fois ils sont endanger et constituent un danger pour lesautres. Ainsi, les sans ne sont pas que pri-vés. Sans pouvoir se projeter commemembres d’un mouvement unitaire, ilsdésaturent les pratiques et libèrent unecertaine quantité d’énergie, retrouvant lesracines qui réactualisent des noyaux deréel.Par ailleurs, l’action des sans ne part pasd’une conception du monde tel qu’il

devrait être, mais entre en conflit avec lemonde tel qu’il est. Elle assume lesconflits parce qu’elle est et reste une luttesituationnelle prise dans la multiplicité. Àl’inverse, le mot d’ordre “penser global etagir local” revient à vouloir interpréter lessituations concrètes en fonction de princi-pes extérieurs à elles ; il casse les ressortsde la lutte et la détourne de ce qui lui per-mettait d’assumer les conflits et de retrou-ver ainsi des noyaux de réel. Pour les lut-tes des sans, la multiplicité est essentielleparce qu’elles sont toujours en situation.Si elles se mettent à chercher l’unité, ellesretombent inévitablement dans le piègede la virtualisation. Une économie paral-lèle, une occupation de terres, une cer-taine position par rapport à des questionsbioéthiques, un certain pari esthétiquedans une création : autant d’actions quine peuvent s’exporter vers l’ensemble dessituations composant un système. Toutagir répondant à une asymétrie concrète,il ne peut être que local, car dans la com-plétude d’un système global, il n’y a pasd’asymétries qui puissent ordonner l’en-semble.

Nous nommons “action restreinte” touteaction pensée et exécutée dans, pour etpar une situation donnée. Il peut s’agir durenversement d’une dictature, mais aussid’une nouvelle pratique médicale. Unetelle action peut devenir, pour les autres,un élément important de deux points devue : d’abord, parce qu’en modifiant lasituation, elle affecte inévitablement larésultante qui émerge entre elle et lesautres situations ; ensuite, parce que ledéploiement de nouveaux possibles dansune situation permet d’envisager desactions adaptées pour d’autres situations.

Mais l’action est toujours restreinte, parcequ’une expérience concrète connaît tou-jours ce que l’on pourrait appeler sa“masse critique”, au-delà de laquelle ellene peut plus conserver son sens.

C’est ainsi, par exemple, que lors de lagrave crise économique traversée parl’Argentine en 2001, les pratiques de trocjusque-là développées dans certains sec-teurs (et qui concernaient environ 800 000personnes) se sont généralisées en quel-ques jours à quelque cinq millions de personnes. La conséquence fut que cettepratique implosa littéralement, jusqu’aupoint de quasiment disparaître. Ce fut uneexpérience très intéressante, mais quiavait trouvé sa masse critique. Commeelle avait été pratiquée depuis une struc-ture de contre-pouvoir, sa réabsorption sepassa sans violences. Il en serait sansdoute allé autrement si cette pratique avaitété décidée depuis le pouvoir, si elle avaitété dogme métaphysique plutôt que parisituationnel. Le système, en tant que glo-balité dynamique, reste opaque pour sesagents : il comporte structurellement destendances illisibles depuis les situationsconcrètes. Il faut donc apprendre à penseren termes de systèmes dynamiques, oùtoute action est coproduction de savoir etd’agir, en assumant la complexité propre àla situation.

Angélique DEL REY,auteure avec Miguel Benasayag d’ Eloge

du conflit, La Découverte, Paris, 2007.

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ici et maintenant ? Résister :

L ’émergence voire le foisonnement deces “nouvelles radicalités”, depuis les

années ‘1990 , paraît neuf dans la mesureoù ces résistances se démarquent du mili-tantisme classique, “révolutionnaire” quiprévalait au temps de la guerre froide. Et dumême pas elles ne se reconnaissent pasnon plus dans la résignation, la fin desidéologies ou de l’histoire (autrement dit lafaillite des alternatives au capitalisme),l’exacerbation de l’individualisme et letriomphe de la pensée unique qui sem-blaient caractériser la période qui succédaà la chute du mur de Berlin. La pertinencedu terme ne fait pas l’unanimité : d’unepart, la radicalité ou le radicalisme n’estpas forcément ce qui définit ces initiativesde résistance, leurs acteurs, en tout cas enBelgique, ne s’en revendiquent pas ; d’au-tre part, certains libertaires se demanderontsi ce qu’elles développent est si inédit queprétendu. Néanmoins les grands traits dutableau que Benasayag et Aubenas bros-sent de ces nouvelles radicalités nous ontparus se retrouver au cœur de bon nombred’initiatives, de projets et de collectifs à quinous avons voulu donner la parole ou del’écho (via des films, expositions, installa-tions, …) tout au long de ce Festival.

Face à une avenir de plus en plus incertain, des perspectives deplus en plus précaires, une société de plus en plus divisée et unsentiment d’impuissance qui semble se répandre toujours plusinsidieusement, le Festival des Libertés 2007 a souhaité mettre enavant et surtout en relation une multitude d’initiatives susceptiblesde répondre tant à la fragmentation qu’au fatalisme social. Ces ini-tiatives développent des nouvelles formes de résistance, des résis-tances créatives ou encore des “nouvelles radicalités”, telles queles qualifie Miguel Benasayag à qui nous nous sommes permisd’emprunter l’intitulé de notre appel à la résistance et à la rencon-tre : “Résister, c’est créer” (une formule qu’avec FlorenceAubenas, Benasayag avait déjà reprise à Gilles Deleuze1). Non seu-lement ces résistances se révèlent créatives eu égard à d’autresqui les ont précédées, requièrent de la créativité pour rompre avecle fatalisme et se frayer leur chemin à travers la fragmentationsociale mais surtout elles soulignent combien résister, c’est tou-jours déjà être créatif, inventer de nouvelles formes de vie ; c’estautant refuser l’inacceptable que déjà ébaucher d’autres possi-bles. Résister signifie aussi créer des rencontres, des liens et despasserelles afin de créer de la confiance, sans laquelle ne peut serécréer l’espoir.

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Toutes ces initiatives ont, en effet, en com-mun de refuser l’horizon prétendumentindépassable du tout au marché, du néoli-béralisme et de l’individualisme égoïste,donc de résister à un certain fatalisme.Elles s’opposent à la marchandisation dumonde et de l’humain en proposant despratiques riches de sens, fondées sur lesrelations authentiques. Il s’agit avant toutd’agir sur les liens interindividuels, derecréer ceux-ci. Pour changer le monde, lesnouvelles radicalités commencent parinterroger et transformer le rapport à soi etaux autres. Une kyrielle d’injustices révol-tent leurs protagonistes, dans des domai-nes aussi divers que l’environnement, laprécarité, le travail, le logement, les migra-tions, l’alimentation, les guerres, la maltrai-tance des animaux, la psychiatrie, l’urbanisme, le prêt à consommer de la cul-ture, le système pénal et carcéral,… Maisceux-ci n’attendent de réponse ou de solu-tion ni de la part du monde politique enplace (gouvernements ou parlements) nid’une hypothétique révolution politique quiincarnerait la panacée. Face aux injustices,ou plus précisément animé par un désir dejustice et de libertés, ces initiatives ne sepositionnent pas dans une logique d’affron-tement, ni avec le pouvoir, ni avec le sys-tème, ni avec un quelconque ennemi, maischerchent des alternatives, l’épanouisse-ment de leurs aspirations, dans l’expéri-mentation concrète de pratiques originales.Elles habitent, sans attendre, le présent.

Autant dire qu’elles ne se reconnaissentabsolument pas dans le militantisme classi-que (tel qu’organisé par un parti politique)ni dans les “vieux schémas révolutionnai-res”. Ce qui les en distingue constitue uneautre manière de les définir, par la négative.

Les nouvelles résistances n’agissent pasen fonction d’un monde idéal ou d’unmodèle de société prédéfini mais elless’expérimentent, au jour le jour, au couppar coup, dans l’incertitude, le dialogue, laréflexivité permanente et la réflexion collec-tive. Elles n’attendent pas le grand soir, nesacrifient pas le présent aux lendemainsqui chantent, ni la liberté et les droits desmilitants à l’efficacité révolutionnaire. Lesmoyens d’action expriment d’emblée la finvisée (au lieu que celle-ci ne justifie ceux-là…). Les actrices et acteurs de ces multi-ples pratiques n’obéissent pas aux directi-ves d’un parti ou d’un chef charismatique,refusent toute forme de hiérarchie et nevisent nullement la prise de pouvoir pourtransformer la société. Chacune et chacunessaie de mettre en œuvre directementdans la pratique quotidienne ses rêves deliberté, d’égalité, de solidarité, de fraternité,… De sorte que ces résistances créent “iciet maintenant” le possible d’un autremonde.

Tout près de chez nous, donc, comme unpeu partout dans le monde, se dévelop-pent ce type d’initiatives et de résistances.Sans que nous en soyons toujours au cou-rant (si rien ne nous en rapproche géogra-phiquement ou thématiquement) car ellessont souvent soit très locales, soit très spé-cifiques. Avant tout, elles s’avèrent encoretrès minoritaires et reçoivent peu de publi-cité ou d’attention au sein des autoroutesde l’information dominante. N’est-ce pasnotamment parce que ces initiativesdemeurent trop peu connues et isolées lesunes des autres que se propagent l’impres-sion d’impuissance et de fatalisme auquel ilnous semble urgent de résister ? N’est-cepas précisément parce que la société est

de plus en plus divisée que ses membresn’imaginent plus un autre avenir ? Ce n’estque l’isolement qui donne l’impressiond’impuissance. Ce n’est que la fragmenta-tion sociale qui conduit au fatalisme.

La modeste contribution du Festival desLibertés au combat permanent que requiè-rent les libertés a donc consisté à offrir,avec les moyens qui sont les siens, unecaisse de résonance aux résistances multi-ples et novatrices qui nous entourent. Nousescomptions les encourager à sortir dou-blement de l’isolement : d’une part, faireconnaître, donner de l’écho à ces initiativeset, d’autre part, inviter leurs actrices etacteurs à réfléchir ensemble, à tisser desliens pour étendre et renforcer le vasteréseau des résistances. Ce dernier enjeus’est principalement joué parmi toutes lesrencontres et les échanges informels quifont la vie d’un festival (et celui-ci fut parti-culièrement vivant…). C’était aussi l’objec-tif du dernier débat lors duquel nous vou-lions interroger la pertinence, l’effectivité,les connectivités et les perspectives des“nouvelles radicalités” en Belgique. Pourouvrir la discussion et lancer quelques pis-tes de réflexion, nous avions invité, non pasdes experts ou des porte-parole, maisquelques actrices ou acteurs de ces résis-tances non étrangers à nos questionne-ments.

Fidèles à l’esprit des nouvelles radicalités,refusant la hiérarchie et la représentation,adeptes de l’horizontalité et de l’imma-nence, praticiens de l’expérimentationdirecte, les “invités” n’ont pas voulu se dis-tinguer du “public” et une assemblée libreen plein cœur du Festival des Libertés s’estsubstituée au débat initialement et trop

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classiquement programmé. Une assem-blée au cours de laquelle, une centaine depersonnes ont essayé de réfléchir et discu-ter ensemble sur les possibilités de résister,de créer et de se mettre en lien ici et main-tenant, aujourd’hui et demain. A l’instar desmoyens et des fins articulés par les nouvel-les radicalités, cette discussion se préoc-cupa autant de sa forme (comment distribuer la parole ? comment tous s’en-tendre ?…) que de son fond (commentétendre des résistances encore très restreintes, par choix ou par nécessité ?comment se faire connaître sans verserdans le spectaculaire ?…) en cherchantbien entendu à les accorder. Les questionsfurent loin d’être épuisées au terme dutemps imparti à ce type de rencontre maisl’expérience a eu lieu et, au-delà de la frustration, la plupart d’entre nous en som-mes repartis avec des envies, des idées,des rencontres, des contacts à prolongerou relancer. En se réjouissant qu’un autredébat, un autre mode de parole soit possi-ble…

Mathieu BIETLOTCoordinateur sociopolitique

1 Florence Aubenas et Miguel Benasayag, Résister, c’estcréer, Paris, La découverte, 2003.2 Benasayag situe l’émergence des nouvelles radicalités le1er janvier 1994, avec l’insurrection du mouvement zapatisteau Chiapas. Ce mouvement fut également mentionné parplusieurs participants aux débats du festival comme undéclic et une référence dans le développement de leursrésistances.

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OJOS DE BRUJOCréer et résister pour voir un peu plus loin

Véritable phénomène de la scène barcelonaise et de la world music, Ojos de Brujo réinvente le fla-menco avec finesse et énergie en le métissant de hip hop, d'électronique, de drums n' bass, de funk,de dub et de reggae. Collectif engagé dans l'action sociale comme sur la scène artistique, Ojos deBrujo clôtura avec brio le Festival des Libertés par une féerie musicale, rythmique et visuelle sans fron-tières.

© photo de plateau : Eric Vauthier

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Pour commencer, pouvez-vous nousparler du nom de votre groupe ?Pourquoi “Ojos de Brujo” (les yeux dusorcier) ? Est-ce en relation avec votreengagement artistique et politique ?

Paco : Tu ne te trompes pas. Nous som-mes des musiciens qui se sont rencontréset qui, à un moment donné, ont bien dûtrouver un nom, parce que nous faisionsun disque. Il y a eu beaucoup de proposi-tions et puis a surgi “Ojos de Brujo”. Cenom reflète une réponse à la société avecses problèmes. L’artiste doit en effetrépondre à la société mais aussi voir leschoses un peu plus au-delà. Et bien les“yeux” sont un peu comme le miroir del’âme, ils sont ceux qui parlent et “elbrujo”, le sorcier, dans le flamenco et dansle monde, c’est celui qui voit un peu plusau-delà.

Max : Le sorcier est une figure importantedans le flamenco. Dans toutes les cultu-res, il existe un sorcier. Ce sont les yeuxqui regardent un peu plus loin

Votre musique se nourrit de plusieursinfluences, elle est métissée, diversi-fiée. Elle est en fait à l’image de lasociété et du monde d’aujourd’hui. Aufond quel sens prend-elle justementdans ce contexte pour vous ?

P : Cela arrive naturellement. Elle estvenue d’une forme naturelle car déjà le fla-menco est un mélange de musique :arabe, juive,… On mélange avec beau-coup de respect pour le sens du flamencoet on mélange avec joie, sans prétention.

M : La musique ce n’est pas seulement le

mélange des influences, c’est surtout lemélange des êtres humains et chaque êtrepossède ses expériences. Dans le cas de“Ojos de Brujo”, il y a différentes généra-tions, entre 22 et 45 ans. Nous avons desstyles différents, certains ont étudié plus leflamenco, d’autres la musique cubaine ouencore indienne et le mélange se fait. Il y aaussi tellement de variété dans le fla-menco que tu peux trouver des parallèlesavec presque n’importe quelle musique.

A votre propos, j’ai souvent entendu :“on dirait tel groupe connu, par exem-ple ‘Les Gipsy Kings’” et j’en viens à matroisième question. Aujourd’hui on serend compte que la musique commetelle a quand même un grand pouvoir.Quand on voit que des groupes rem-plissent facilement des stades, en tantqu’artistes, pensez-vous que ce pou-voir qu’a la musique peut servir à chan-ger la vie des gens ?

P : Quand tu as un microphone et uneopportunité pour exprimer quelque chose,tu peux faire refléter la société telle qu’elleest. Pour moi, je préfère changer la situa-tion mondiale, faire éviter la guerre en Irakque recevoir un Grammy Awards1.J’espère que la musique possède la forcede pouvoir changer l’histoire.

M : Je crois que l’art en général, danstoute l’histoire, a été un moyen deréflexion et d’expression. La musique, lapeinture, le cinéma, le théâtre, tous sontdes styles qui parlent de moments parfoisagréables et parfois pas. Ce n’est pas unmessage politique mais plutôt uneréflexion ou une critique de ce qui sepasse.

Vous êtes aujourd’hui le dernier groupequi va clôturer le Festival des Libertés.C’est un festival politique dans le sensoù il utilise la culture comme vecteurpolitique. Chaque année, nous définis-sons un thème, avec un slogan. Cetteannée notre slogan est : “Résister, c’estcréer”. Quelle est votre réaction ?

P : C’est notre forme de vie. Nous vivonsde la création de nouvelles chansons etpour nous c’est de la résistance car notrelabel est indépendant.

M : Je pense au Grammy, c’est un peutrop institutionnalisé. C’est bien pour lapromotion mais que signifie ce prix parcequ’il y a beaucoup de groupes, commentpeux-tu choisir quel est le meilleur ? Cequi est agréable, c’est la reconnaissancequ’il nous exprime. La reconnaissancesurtout d’avoir travaillé comme des fousces dix dernières années. Si on est là c’estgrâce à notre travail et aussi pour notrelabel indépendant avec les deux derniersalbums. On a dédié notre vie à cela. P : C’est beaucoup de résistance !

Merci à vous, toutes nos félicitations, etbienvenue au Festival des Libertés.

Propos recueillis par Ababacar NDAW(formateur), traduits et retranscrits parRicardo LÉONARD (coordinateur de la

Boutique d’Emploi)

1 Suite à une nomination aux 8th Latin Grammy Awards quise sont tenus le 8 novembre à Las Vegas, Ojos de Brujo a dureporter au 11 novembre son concert au Festival desLibertés initialement prévu le 8 novembre.

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La musique n’est pas présente au Festivaldes Libertés comme un produit culturel,voué à la consommation de masse, maiscomme un moyen de créer ou de recréerdu politique, c’est à dire une consciencecommune, des liens, des solidarités et unpouvoir d’agir. Ce n’est pas parce qu’ungroupe ou un artiste sont célèbres, rem-plissent des salles et vendent des milliersde disques, qu’ils ont nécessairement leurplace dans la programmation musicale duFestival des Libertés.La plupart de ceux qui s’y sont succédéss’inscrivent dans un profil d’artistes-acteurs démocratiques ou d’artistescitoyens pour qui la musique est un enga-gement au service des droits et des liber-tés.Linton K. Johnson, apôtre de la Dub-

poetry et militant des droits de l’homme.Marcel Khalife, le plus grand protest-sin-ger du Proche Orient, exilé forcé pourcause de fatwa. Plus récemment Abd AlMalik, Ojos de Brujo, Seun kuti…

Reggae, rock, hip-hop, rap, afro-beat etautres musiques urbaines, s’inscriventdans le contexte actuel de crise des for-mes classiques de l’action politique,comme de nouveaux registres d’engage-ment individuel ou collectif.Plus que de simples expressions artisti-ques, ce sont des faits sociaux quiempruntent des formes musicales pours’exprimer. Ainsi, la plupart des groupes

issus de ces courants musicaux anciensou nouveaux, se considèrent comme desportes paroles des oubliés de la société.Ils critiquent sans nuance le pouvoir politi-que, dénoncent pêle-mêle, la corruption,les conditions sociales, les inégalités, lesinjustices, les discriminations, etc.

Vecteurs d’individuation notamment chezles jeunes urbains du nord comme du sud,

Musique, Le sens d’une programmation musicale

La musique comme nouveau registre d’actions collectives

RésistanceEngagementET

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la pratique de la musique leur permet dese structurer, de s’identifier et de seconstruire des moyens concrets de sevaloriser et d’être acteur. Faire de la musi-que, fonder un groupe, c’est affirmer undésir d’émettre une parole politique et depouvoir la faire entendre. Cela ne va passans risque, notamment dans des contex-tes non démocratiques. Ainsi, beaucoupde ces groupes s’organisent en collectifspour s’auto produire, faire des concerts,très souvent gratuits, là où c’est possible,par manque de salles pour jouer, maisaussi pour cause de censure.

Qualifiés souvent de dépolitisés, les jeu-nes réinventent à travers ces musiques denouvelles manières de se politiser, loin desformes conventionnelles d’actions collec-tives, mais qui n’en demeurent pas moinsefficaces. En Afrique de l’Ouest, le rap et le hip hopont acquis une audience qui a dépassélargement les frontières des villes pouratteindre les campagnes et les massesrurales. A travers des textes en langueslocales et des formes musicales où semarient rythmiques traditionnelles etarrangements modernes, ils comblentl’absence d’information, le manque d’édu-cation politique, l’inexistence de contrepouvoirs et d’une vraie société civile.

Réprimées, parfois contraintes à l’exil, cesformations musicales s’inscrivent dans lacontinuité des Fela A. Kuti, John Lennon,F. Zappa, Bob Marley, qui eux aussiavaient fait de leurs musiques des armesde combat contre les injustices.

Ababacar NDAW formateur © picture Mongoose by Johannes Vande Voorde

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Accoucher de soi-même à larencontre de l’autre

ABD AL MALIK

Abd Al Malik mélange rap, jazz, chansonet slam dans un style parlé chanté quiapparaît sur la scène du Hip Hopcomme une véritable révolution esthéti-que. Accompagné de musiciens talen-tueux, Abd Al Malik fait swinguer deshistoires qui parlent de droits, de liber-tés, d'attentats, d'amour, d'espoir ou detragédies de la vie. Avant son concertinoubliable, le 1er novembre au Festivaldes Libertés, nous avons rencontré cetartiste bouleversant de vérité et d'au-thenticité.

© photo de plateau : Eric Vauthier

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Dans une de tes chansons tu dis : “Onse croise, on se toise, on ne se rencon-tre pas”. Alors, j’ai envie de te deman-der : à ton avis, qu’est-ce qui peut rendre la rencontre possible ?

A.M : D’abord, pour moi, la rencontre c’esttoujours un événement. Ça demande uneattitude volontaire, il faut vouloir rencon-trer l’autre et c’est quelque chose qui doitse passer dans les deux sens. Alors pourpouvoir rencontrer l’autre, il faut d’abordsaisir et comprendre profondément quel’autre est une richesse, que l’autre peutm’apporter quelque chose que je n’ai pas.Comprendre aussi, viscéralement, quec’est dans le dialogue, la rencontre etl’échange qu’on devient véritablement soi.C’est d’abord un travail sur soi, consistantà se dire qu’on ne se suffit pas à soi-même, qu’on a besoin de l’autre. C’est encela que c’est une attitude volontaire. Etc’est pour cela que c’est difficile. Cargénéralement on est là, suffisant, dansune attitude égotique à se dire “moi je,moi, moi, moi…” Donc je pense que c’estune attitude individuelle, personnelle etvolontaire d’abord.

Il y a quand même une difficulté danscette démarche volontaire, c’est le risque que nous fait courir l’autre. Car ilpeut aussi apparaître comme étrange,insaisissable. Pour que la rencontre soitpossible, ne dois-je pas renoncer à lecontrôler ?

A.M : Il y a deux choses dans ce que tudis. La première est que si nous partonsdu fait que l’autre est potentiellement dan-gereux déjà cela fausse le départ. Et c’estsouvent le cas. La deuxième chose, c’est

que l’autre serait incontrôlable, insaisissa-ble et bien… heureusement ! Parce quesinon, cela ne serait plus une rencontre. Sion veut dominer l’autre, il n’y a pas de ren-contre, pas de dialogue, pas d’échange…

Et pourtant n’est-ce pas ce que nouscherchons toujours à faire ?

A.M : Mais est-ce la bonne attitude ?Quand tu me parles comme cela, du faitde voir le danger dans l’autre, il y a unehistoire qui me vient en tête. Une histoireracontée dans l’Islam sur le Christ, surJésus. C’est Jésus qui se promène avecses apôtres et sur le chemin il rencontre lecadavre d’un chien. Alors tous les apôtresregardent et aperçoivent l’animal en étatde décomposition, Jésus s’approche etdit “Que ses dents sont blanches !”.L’enseignement de cela est de dire qu’ilfaut d’abord voir ce qui est beau, ce quiest positif et ainsi cela nous élève et nouspermet de tirer une leçon de quelquechose. Même lorsqu’en face c’est négatif.En fait l’attitude du départ va déterminer lafin.

Justement, par rapport à tout cela, si onregarde autour de nous, on est dans ladiversité totale et c’est ce que sont lesgens aussi à l’intérieur d’eux-mêmes.Pourtant on vit dans des sociétés quicontinuent à imposer l’homogènecomme norme et, de notre point de vue,c’est peut-être ça le fossé qui empêcheréellement la rencontre et qui est aussila source principale des représenta-tions que les gens se font. Commentpenses-tu que ta musique, en tant quecréation, peut contribuer à faciliter et àrendre possible cette rencontre ou ces

rencontres que la diversité de toutefaçon impose.

A.M : Ma démarche est simple. Tout ceque tu viens de dire par rapport au faitqu’on impose une sorte d’homogénéitéalors que la diversité est là de fait… etbien ça, c’est lié à quelque chose de mal-heureusement simple : c’est la peur. Lasociété dans laquelle nous sommes estrégie par la peur. Et le meilleur moyen decontrôler ce sentiment face à l’inconnu,c’est de normaliser les choses. Et moi, entant qu’artiste, ayant conscience de cela,je suis là pour dire aux gens “N’ayez paspeur” ou “N’ayez plus peur”, “Comprenezqu’en face de vous, vous avez un êtrehumain qui a des sentiments commevous”. Quelqu’un qui rêve, qui a des espé-rances, des peurs,… Et à partir de là, onréduit le fossé, on essaye de réduire lefossé. En réalité, c’est ce qu’ont fait tousces artistes comme Bob Dylan. Et enmême temps, le culturel permet de rassembler les gens parce que l’art, lamusique, c’est le travail de l’émotion, dupartage et de la rencontre et cela se faitnaturellement. Du coup, il y a des barriè-res que l’on fait sauter.

A travers ce que tu as pu voir ou lire surce festival, tu auras pu comprendrequ’il n’est pas seulement festif ou artis-tique. Il s’inscrit dans un engagement, ilentend promouvoir les résistances.Est-ce que tu considères ta musiquecomme un moyen de résistance ?

A.M : D’un point de vue général, l’art estune résistance. Une résistance face àl’idée d’accepter tout ce qui se passeautour de nous, une résistance contre tou-

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tes les formes de conformismes. C’estune rupture, en fait. J’ai le sentiment quel’art est un miroir de l’humanité. Alors lescombats sont nombreux : le fait de recon-naître que nous sommes tous issus de lamême famille, qu’on est de la famillehumaine, et qu’il n’y a pas de personnessupérieures sous prétexte qu’elles vien-nent de telle partie du globe et d’autresqui seraient inférieures parce qu’ellesviennent d’ailleurs. Il y a d’autres combatsaussi, dans la même continuité : l’accessi-bilité à certains médicaments dans cer-tains pays, les libertés essentielles, …Nous, les artistes, nous sommes là pourattirer l’attention et poser des questions.On n’est pas là pour donner des réponses,mais bien pour dire : “Là, il y a tel pro-blème : est-ce qu’on y pense ? Il y a tellechose qui est importante pour moi etpeut-être est-ce important pour vous ?”Donc pour moi, la posture même de l’ar-tiste est une posture de combat.

Le Festival des Libertés sert aussi avanttout à poser des questions, à interpel-ler. Il s’inscrit dans une vision et uneperspective de changement dans notresociété. Chaque année nous proposonsun thème. Tout à l’heure tu as parlé despeurs, ce fut le thème de l’année pas-sée. Aujourd’hui, nous abordons toutesces réalités qu’impliquent les peurs : leretranchement individuel, le désenga-gement social des personnes, … C’estpourquoi nous voulons célébrer le lienen se disant qu’une démocratie ne peutpas subsister s’il n’y a pas de liensocial. Que penses-tu de cela et com-ment vois-tu ton apport dans cettedémarche-là ?

A.M : Ma démarche est finalement à cha-que fois la même : elle consiste à direqu’avec mon petit art de troubadour, avecma musique, peut-être que je peux aiderà ce que les personnes puissent sortir deleur propre prison, sortir des visions unpeu réduites. Je pense avec d’autres quel’art pour l’art n’existe pas (ou en tout casn’est pas ce qu’il y a de plus important).L’art contient cette idée de poser desquestions. Pour moi, on pourrait dire quequelqu’un comme Socrate est un artistepar excellence : il est là, il pose des ques-tions et il aide les gens à accoucher d’eux-mêmes. Poser des questions, cela peutpermettre à des gens, nous, moi commetoi comme vous, d’accoucher d’eux-mêmes et de se rendre compte quejusqu’à présent ils n’étaient pas encoreeux-mêmes. Dans ce sens là, je penseque ce genre de festival, c’est plus qu’es-sentiel, c’est vital. On est véritablement enDémocratie et ça permet cette force et cetélan.

Pour traduire cette démarche et cecombat dans la musique, est-ce querésister, c’est créer uniquement dans lapratique artistique, par exemple par lestextes, ou faut-il également veiller àcréer des structures de productions etde diffusion différentes ? Dans l’indus-trie du disque par exemple, est-ce quec’est facile, pour un artiste comme toide se passer des majors et des grandesradios ?

A.M : La possibilité de diffuser nos créa-tions au plus grand nombre fait partie decette démarche de résistance dans lesens où il s’agit d’être dans une mentalitéindépendante, donc les structures qui tra-

vaillent à promouvoir ces artistes comp-tent autant qu’eux. Mais la question ne sepose pas dans ces termes-là. Lorsqu’onest un artiste qui n’est pas conventionnel,la question qui se pose est : commentamener mon travail au plus grand nombre,quelle est la meilleure manière de diffuserce que je fais ? Les majors ne sont finale-ment pas des ennemis, ce sont des asso-ciés, des partenaires. Après, il s’agit decomprendre si ce que l’on fait est digestepour l’industrie ou s’il faut passer par desstructures parallèles. Donc le tout est depouvoir diffuser son art et pas de se posi-tionner nécessairement dans une attitudede combat face aux grosses machines.Un artiste est toujours quelqu’un qui,quelque part, se situe entre le refus et leconsentement. C’est quelqu’un qui ditnon parce qu’il est dans une démarcheartistique entière, affirmant ce qu’il penseou ce qu’il est, et en même temps il estdans une attitude d’acceptation dans lesens où pour se faire entendre, il doit faireavec des structures existantes ou en créerd’autres qui vont travailler en collaborationavec les structures existantes et avec lesmedias, ce qui est aussi une forme d’ac-ceptation.

En partant de l’exemple du slam, est-ceque le fossé ne se creuse-t-il pas entreles débuts du mouvement et la situationactuelle où l’on presse des CDs. Y a-t-ilune fracture ou encore une communi-cation ?

A.M : C’est assez difficile pour moi derépondre à ce genre de question parceque je suis un rappeur et un MC qui a uti-lisé le Slam, le Jazz, la chanson dans sonnouvel album, mais je ne suis pas un

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slameur à proprement parler. Qu’on fassedu slam, du rock, du rap, ou qu’importe,être un artiste, c’est avant tout être soi. Laforme qu’on utilise n’est d’une certainemanière qu’une plateforme. Parce qu’il nefaut jamais oublier que derrières tous cesgenres musicaux, il y a des êtres humains,il y a des femmes et des hommes avec unmême cœur. L’idée c’est d’être dans lepartage et l’émotion. Quel que soit lestyle, l’art c’est ça : la possibilité de parta-ger des émotions avec des gens. Donccela va bien au-delà d’une étiquette.

Propos recueillis par Ababacar NDAW(formateur) et Nicolais HANOTEAU

(Murmure Média), retranscrits par Fabrice VAN REYMENANT

(directeur) et Mathieu BIETLOT

(coordinateur sociopolitique).

© photo de plateau : Eric Vauthier

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On ne peut se demander ce qu'est lamaladie mentale sans se demander

aussi ce qu'est la psychiatrie. Et la critiquede la psychiatrie ne jaillit pas dans l'isole-ment d'un laboratoire ou d'un sujet, elle esttoujours inscrite dans un contexte historique déterminé, aujourd’hui celui de lamondialisation, du néolibéralisme et de labiopolitique.

Si l’asile psychiatrique est physiquement enextinction, il survit à travers des instrumentsculturels et opérationnels qui en reprodui-sent l’idéologie : l’utilisation incontrôlée denouveaux médicaments, la constitution destructures thérapeutiques résidentielles quise transforment souvent en ghettos pour de“nouveaux chroniques”, la légèreté aveclaquelle on prononce des diagnostics médi-caux sans appel, l’utilisation d’instrumentsthérapeutiques exclusivement dans un butde contrôle, l’agressivité de la psychiatriebiologique – étant entendu que les compo-santes bio-pharmacologiques de la maladiedoivent être affrontées – comme réduction-nisme banalisant et simplificateur de lacomplexité de l’homme, offensant pour ladignité et la souffrance du patient.

Le sentiment d’inadéquation et d’impuis-sance face à la complexité des situations àaffronter, provoque leur étouffement par des

solutions plus maniables et auto-rassuran-tes : les solutions médico-pharmacologi-ques.

La conception encore partagée que la folieest un phénomène entièrement naturel etbiologique est le fruit d’un lourd condition-nement idéologique mêlé aux exigencesplus inconscientes du besoin de se rassureren interposant une instance entre la folie etsoi. Si la folie est une maladie du cerveau,elle peut n’avoir aucun contact avec notreexpérience personnelle au-delà de la peinequ’elle suscite en nous. Mais si elle est unévénement existentiel et lacérant, elle serapproche trop dangereusement de notrenormalité, pour ne pas être perçue commeinquiétante et angoissante.

A la question de François Tosquelles, psychiatre catalan (1912-1994) qui se pré-sentait sur la place publique, dans son sec-teur territorial, en disant qu’y a-t-il pourvotre service ?, sachant qu’il peut compter,comme disait le psychiatre français LucienBonnafé (1912-2003) sur le potentiel soi-gnant du peuple qu’il connaît, s’est substi-tué un système technocratique de plus enplus excluant, avec à la clé la charité, ladétresse des familles, la rue ou la prison, oualors on fait un retour à l’asile, ce qui seraitune monstruosité. L’abandon ou l’enferme-

ment, telle est l’alternative dans laquelle onse place si l’on évacue le secteur territorialpsychiatrique.

On peut parler d’un possible retour à la bar-barie. Nous sommes en effets entrés dansun “Etat d’exception”, de mise au ban, biendécrit par le philosophe italien GiorgioAgamben, entre autres. Le législatif vient secoller à l’exécutif sous l’“atmosphère cultu-relle générale” de la sécurisation, accordéau principe de précaution, qui sévit sur lemonde entier. Et l’expertise médico-juridi-que généralisée de tout comportement quidépasse à la surface sociale, devient la véri-table magistrature de notre temps.

Par ailleurs, l’inclusion de la psychiatriedans la médecine, qui se déploie à la foisdans le champ psychiatrique et celui de lasanté mentale, rend moins visible le méca-nisme de rationalisation –comme fonctionde contrôle social– que cette dernièreexerce de façon indubitablement plusextensive et plus silencieuse, et donc moinsexposée à des oppositions de la part dutechnicien, du praticien professionnel.

La véritable “institution asilaire” n’est pas lapsychiatrie mais la médecine qui appauvritla complexité de la demande en réduisanttous les problèmes de nature sociale, la

La politique de l'hospitalité“L’homme est le remède de l’homme”

(Proverbe Wolof)

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24 E C H O S N ° 5 9© Photo : Nibu John

misère, la marginalité, la perte de pouvoircontractuel et de droits de citoyenneté, àune réponse sanitaire. La maladie n’est pasla souffrance, la maladie est la rationalisa-tion de la souffrance à travers une idéologiemédicale qui se charge de l’occulter.

Loin de privilégier de petites stratégiescréatrices, des occasions de rencontres quisoient des germes d’émancipation, despossibilités multipliées d’échanges entrepersonnes, en ne séparant pas l’existence-souffrance de la personne du corps social,une armée de nouveaux techniciens de lanorme, juges de normalité, pathologisent levivant et la politique, pris dans une biopoli-tique qui surplombe le délitement de l’Etat-providence, la rupture de l'intégration entrele social et le sanitaire, la privatisation desservices publics, le post fordisme, la préca-risation du travail et la “formation-contrôle” permanente.

La question des résistances, des subjecti-vations créatrices, de la prise que les personnes ou groupes peuvent développerpar rapport à ce qui apparaît parfois commeune fatalité extérieure à eux-mêmes,comme un processus historique d’amer-tume qu’aucun événement ne pourrait dés-ormais transformer, est primordiale.

Dans ce contexte, à l’échelle moléculaire, leréseau de lieux de vie chez l’habitant et lesmaisons communautaires (où pour deuxd’entre elles, des Peuls d’Afrique del’Ouest, ex-demandeurs d’asile, donnentasile à des personnes qui ont été exiléesdans les institutions de leur propre pays)procèdent d’une volonté d’accueillir le sin-gulier (la personne “accueillie”) et de créerdu bien commun. L’accueil est un rapport à

l’extériorité, une ouverture par laquelle on setient sur un seuil entre soi et l’autre ou entresoi et les autres. Le seuil est le lieu où l’ex-tériorité, l’altérité, le danger vient accoster.L’inconnu, affecté de la dangerosité,menace de forcer l’ “accueillant” à changer.L’accueil est cette pratique politique, qui ense plaçant sur le seuil, devra mettre à l’abricelui qui est en danger, en l’occurrence exilédans des institutions qui mal-traitent ouabandonné au dehors, fané à grands coupsde lueurs diagnostiques standardisées,celui qui dans le danger n’en a aucun,d’abri. Lui permettre de passer le seuil.L’accueil, plutôt que la stabilité, implique lamétamorphose et constitue un acte com-mun de transformation de l’accueillant et del’accueilli. Accueillir n’est pas héberger.

L’hébergement prête un toit, l’accueil quiabrite construit une relation en arrachantaux habitudes, aux automatismes et auxmécanismes, en bousculant la vie quoti-dienne. S’il est vrai que le caritatif occupe ànouveau la place cardinale depuis la révolu-tion économique et politique néo-libéraledes années 80, l’accueil peut néanmoinsêtre le contraire du solipsisme1 moral ou reli-gieux, auquel des siècles de christianismeet d’idéalisme moral nous ont habitué.Confection collective du bien commun, ils’institue geste politique.

Pour l’Autre “lieu”,Yves-Luc CONREUR

1Conception philosophique qui ramène tout le réel au moi :le monde et les autres n’existeraient que parce que je lespense ou les rêve.

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CinémalibertésD

ES

D ifficile de ne pas penser chaque jour àce qui se passe dans le monde, à ces

conflits qui, au-delà des “Allah Akbar !”,des “God bless America !” et autres slo-gans agressifs, sont les guerres du déses-poir, guerres de ceux que Franz Fanonappelait les “Damnés de la Terre”.Principalement guerres des pauvres etdes opprimés contre cette Amérique desmultinationales qui, avec la collaborationde ses alliés, notamment occidentaux -dont malheureusement nous sommes -prétend régir le monde, lui imposer sesvaleurs et sa loi.

Même si, dans ce contexte de violence,cela semble dérisoire, il m’est difficile dene pas faire un parallèle avec le cinéma,avec l’omniprésence de l’industrie holly-

woodienne qui occulte l’expression detant de créateurs et étouffe leur possibilitéde rencontre avec le public… Avec nous.Depuis plus de soixante ans, cette indus-trie “occupe le terrain” à coup de dollarset, alors que les techniques de communi-cation n’ont jamais été aussi développées,transforme notre monde en un royaumede muets.

Comme dit Eduardo Galeano : “La dicta-ture de la parole unique et de l’imageunique, bien plus dévastatrice que celledu parti unique, impose partout unmême mode de vie et décerne le titre decitoyen exemplaire à celui qui estconsommateur docile, spectateur passif,fabriqué en série, à l’échelle planétaire,selon un modèle proposé par la télévi-

sion et le cinéma commercial améri-cains.”

Mais qu’on ne s’y trompe pas, ce n’estpas contre LE cinéma américain que nousdevons lutter car, on l’ignore trop souvent,les cinéastes indépendants des USA sontpour la plupart dans une situation similaireà celle des cinéastes latinos, européensou africains. Bien qu'ils représentent 80%de la production annuelle de leur pays, lepoids des majors hollywoodiens handi-cape fortement leur diffusion.

Il ne faut pas se tromper d’ennemi. Ce à quoi il faut résister, ce qu’il faut com-battre, c’est ce que le producteur MarinKarmitz appelle le “cinéma barbare”, cetteindustrie qui ne produit plus que des ima-

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ges/concepts, qui ne sont plus que lemiroir d’elles-mêmes et non plus celui dela société, ces films “pop-corn” qui, peu àpeu décervèlent le spectateur qui va aucinéma comme au cirque, ce cinéma“macdo” qui fait de la violence un simpledivertissement.Ce que nous devons combattre c'est l’industrie qui fabrique ce type d’imagesaliénantes, c'est les medias audiovisuelsqui les propagent.

Dans cet environnement oppressant, lasituation des créateurs de films dits“documentaires” est certainement la pluspénible… Alors que, bien plus que lecinéma de fiction, le documentaire est lesecteur le plus dynamique de la produc-tion cinématographique mondiale. C'est par dizaine de milliers que, chaqueannée, des cinéastes des cinq continentsentreprennent de communiquer leurs réa-lisations (dans la seule Union européenne,la production dépasse les 8.000 films paran).Une grande partie de ces films sont cequ'on appelle dans le jargon des "docu-mentaires de création" pour les distinguerdes documentaires de simple information. Ce sont des œuvres de véritables auteurs,d'artistes sensibles et intelligents, desfilms passionnants par leur contenu et par leur force cinématographique…Simplement dissemblables des films defiction par le fait qu'il n'y a pas de comé-diens.

Ces documentaires ne trouvent, malheu-reusement, que très peu de débouchésdans le circuit des salles de cinémas etl'espace qui leur est concédé dans lesstations de télévision, même de service

public, est extrêmement congru. Quant à la presse dite “spécialisée”, c'estavec une condescendance bienveillantequ'elle consent, très rarement, à en parler… A moins que ce silence ne soitsurtout un aveu d'incompétence.

Il faut bien se rendre à l'évidence : dans cemonde du “paraître” qui nous envahit jour-nellement, devant la politique mercantilede course à l'audimat qui guide lesmedias de l'audiovisuel, les cinéastesn'ont souvent que la guerilla commemoyen d'action.D'où l'importance des festivals dédiés audocumentaire. Ils deviennent de plus en plus les seulslieux où ces films trouvent un accueil et untremplin de diffusion… Et où le public peutles admirer.Ils sont aussi le point de rencontre desassociations progressistes de tous hori-zons qui viennent y “faire leur marché”pour l'organisation de rencontres etdébats sur les thèmes qui motivent leursactions de sensibilisation.

Au niveau de notre plat pays, le “Festivaldes Libertés” de Bruxelles Laïque joue, àcet égard, un rôle essentiel. C'est près de 600 films récents (2005 à2007) qui ont été récoltés à travers lemonde depuis deux ans sur le thème deslibertés et des droits humains. Cette vidéothèque couvre la plupart deschamps des préoccupations actuels etdevrait pouvoir être largement exploitéepour que “Résister, c'est créer” ne restepas un vœu pieux.

Rudi BARNET-WALGRAEVEConsultant

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Les lauréats de la deuxième compétition internationale de cinéma :

LE PRIX DU FESTIVAL DES LIBERTÉS entendait primer ledocument qui pour son engagement, en terme d’initiativecitoyenne de résistance et de défense des libertés fondamen-tales, et sa qualité artistique, se révélerait de la plus grandeutilité publique. Il a été décerné à La leçon de biélorusse deMiroslaw Dembinski qui de manière très vivante met enavant le dynamisme et la créativité de la jeunesse biélorussedans son combat pour la défense de sa culture.La récompense de 5000 euros (réservés à la diffusion du film)permettra au film de poursuivre son chemin vers un publicélargi. On se rappellera, par ailleurs, que le protagoniste prin-cipal du film, le jeune activiste Franak Viacorka, avait étéemprisonné par le régime autoritaire durant une semaine cetété. Les organisateurs du Festival des Libertés avaientadressé une lettre de protestation au président Loukachenko.

LE PRIX SPÉCIAL DU JURY a récompensé Le voyage deNadia de Carmen Garcia et Nadia Zouaoui. L’émancipationféminine et la complexité des appartenances culturelles mul-tiples restent des thèmes qui doivent retenir l’attention deshumanistes et amis des libertés.

LE PRIX AFRICALIA, sous la direction de Mirco Popovitch, aprimé le documentaire Suffering and smiling de DanOllman. Il a moins voulu honorer le réalisateur du film queson contenu qui, par un portrait de Fela Kuti et de ses suc-cesseurs, célèbre la lutte permanente des peuples africainsconfrontés à un pillage en règle de leur pays, tant par les mul-tinationales que par la corruption de leurs dirigeants soutenuspar la complicité occidentale. Ce film promeut lui aussi lacréativité – la musique et la poésie – comme arme de résis-tance.

La Ligue des Droits de l’Homme, partenaire du Festival desLibertés, avait décidé depuis cette année, de récompenser etsoutenir un film qui par son contenu, contribue à la promotiondes Droits de l’Homme. LE PRIX DE LA LIGUE DES DROITSDE L’HOMME a été attribué à Nisida. Grandir en Prison de

Lara Rastelli. Un film qui explore le sens d’un enfermementqui se veut éducatif, dans la prison de l'île de Nisida, au largede Naples, où vivent une quarantaine de jeunes âgés de 14 à21 ans.

En outre, le jury a décidé de créer un PRIX D’HONNEUR qu’ila attribué, avec beaucoup d’émotions, à René Vautier pourl’ensemble de son œuvre et son infatigable combat pour uncinéma indépendant et engagé.

Le cinéma de résistance à l’honneur

Sans aucun doute, la mémoire du cinéma de résistancegagnerait à être connue davantage. Alors que nous réalisionsla programmation de l’édition 2007 du Festival des Libertés,peu d’entre nous, avaient déjà entendu parler de RenéVautier, ou de son ami Paul Meyer, récemment décédé. Etpourtant, ces hommes, l’un français, l’autre belge, comptentincontestablement parmi les précurseurs du cinéma engagéque nous tentons de défendre à travers notre Festival. Lacaméra au poing, ces hommes n’ont jamais craint de luttercontre toutes les formes d’oppression au prix d’une censureacharnée, de blessures ou de la privation de liberté. Desconditions de vie des mineurs italiens filmées par Paul Meyerdans le Borinage aux réalités de la colonisation mises enlumière par René Vautier dans Afrique 50, ces réalisateursn’ont cessé d’utiliser le cinéma comme moyen de libération,travaillant toujours aux côtés des mouvements d’émancipa-tion.

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Informer, c’est présenter, rapporter lesfaits. C’est avec plaisir que nous nous

sommes attelés à vous plonger dans l’am-biance du Pathé Palace. Concerts, perfor-mances, représentations théâtrales, installations, débats, ou autres surprisesnous ont permis une multitude de rencon-tres qui ont laissé autant de traces dansnos réalisations. C’est le versant factuel,un aperçu des activités au jour le jour.Mais informer c’est aussi (surtout ?) réflé-chir. Dans le sillage de l’affiche du festival,nous avons cherché à nous concentrer surla diversité des combats et des formes delutte présentés. Les particularités inhéren-tes à chaque situation et à chaque

réponse donnée sont autant de richessesdans la confection d’un outillage perfor-mant pour résister à l’éclatement de lasociété et du monde. Ces particularitésnous ont servi de base pour nous posercette question, ligne directrice de nos réalisations : “si eux ont répondu de tellesorte, que pouvons-nous faire, nous, pourrépondre aux crises que traverse notrecadre de vie ?”. Ainsi, les problématiquessoulevées du Chiapas à la Birmanie nesont peut-être pas aussi exotiques quecertains le croient. Bon nombre d’entreelles ne sont pas si éloignées de notreroyaume ou des institutions européennes.Le souci de mise en parallèle des sujets

soulevés avec la situation en Belgiquenous a ainsi inspiré durant ces douze joursde questionnement.

Pour jeter des ponts au sein d’une sociététoujours plus atomisée, il convient d’écar-ter tout parti pris, d’éviter de “choisir soncamp” de manière dogmatique. Il est plusjudicieux de chercher un nous dans ladiversité. Nous avons donc pris soin d’évi-ter tout jugement préconçu. Le meilleurmoyen d’y arriver était sans doute de lais-ser le plus de place possible à ceux quenotre route a croisés. Nous espérons avoirpu leur donner la parole et ainsi leur per-mettre de défendre toutes ces alternatives

Résister c’est créer. Créer des pistes alternatives ici et maintenant. Créer autant de pistes que les situations

l’exigent, car la voie des contre-pouvoirs est loin d’être unique. Les mouvements sociaux du vingt et unième

siècle se distinguent plutôt par leur diversité, tant dans les aspirations que dans les formes de combat. Le

Festival des Libertés s’est proposé de transformer le Pathé Palace en caisse de résonance de cette diversité

d’idées et d’actions qui tentent de faire en sorte que cet “autre monde possible” prenne pied dans le présent.

L’A.S.B.L. Murmure média est heureuse d’avoir emboîté le pas de ce projet en se chargeant de la réalisation

de spots vidéos quotidiens qui ont fait écho aux pistes de réflé-action lancées au sein du festival.1

Bruxelles Laïque s’expose en murmurantFestival des Libertés 2007 :

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qui, bien que ne se croisant pas toujours,doivent chercher à aller dans le mêmesens : celui du vivre mieux et du vivreensemble. Laisser la parole aux autresdisions-nous… Mais les intervenants d’unfestival, c’est également le public. Merci àtous d’être venus faire vibrer nos microsde vos cris et de vos chuchotements, etd’avoir ainsi contribué à notre laboratoiredes résistances.

La caméra est une arme. René Vautiernous l’a rappelé durant le festival avecautant de force que d’émotion2. Toutefois,le média vidéo a aussi ses limites. Le format de six minutes quotidiennes, choisipour vous présenter le Festival desLibertés, en est une. Nous n’avons doncpas la prétention d’avoir pu faire le tourdes problématiques abordées, et espé-rons plutôt humblement que nos réalisa-tions ont pu vous transmettre quelquespistes d’action et vous donner l’envie devous replonger dans les questions soule-vées durant le festival. Résister c’est créer.Merci d’avoir créé hier. Merci de continueraujourd’hui.

L’équipe de Murmure Média

1 Spots consultables sur www.festivaldeslibertes.be,onglet “vidéos”.2 Figure centrale du cinéma militant, René Vautier était pré-sent au festival le 9 novembre, en raison de la diffusion dufilm “Le petit blanc à la caméra rouge”, de Richard Hamon.

© photo de plateau : Eric Vauthier

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U n procès important pour nos libertésvient de se terminer ce 20 novembre

à la Cour d'Appel d'Anvers. Le prononcéest attendu pour le 20 décembre. Ce pro-cès engage nos libertés car il crée unejurisprudence à la loi dite “antiterroriste”,votée fin 2004, qui va déterminer le vraicontenu de la loi.Il fait suite à un arrêt de la Cour deCassation du 19 avril 2007 qui a invalidédeux jugements précédents. Des person-nes liées au DHKP/C, organisation politi-que turque d'opposition, avaient été lourdement condamnées, pour apparte-nance à une organisation terroriste, enpremière instance à Bruges et en appel àGand. La Cour de Cassation a critiqué le faitqu'un juge ait été déplacé de sa juridic-tion. Ce qui, dans les faits, créait un tribu-nal spécial. L'arrêt de la Cour deCassation peut ainsi être interprétécomme une opposition de l’appareil judi-ciaire à ce contournement de la légalité.

Les prisonniers, qui n'ont commis, ni collaboré à aucun acte violent, ont été

soumis à des conditions de détention particulièrement sévères. Ils devaient enpermanence pouvoir être vus. Durant lanuit, soit les gardiens allumaient la lumièretoutes les demi-heures, soit une lumièreaveuglante de 80 watts restait alluméejuste au-dessus de leur tête, les empê-chant de dormir et provoquant des troubles du sommeil. Ils ont dû égalementsubir des fouilles anales lors des trans-ferts, ainsi que avant et après les visites. Al’occasion de chaque comparution, ilsétaient mis à nu à trois reprises. Lesconditions de transfert étaient aussi très“sécurisées” : gilet pare-balle de quinzekilos, yeux bandés et convoyeurs cagou-lés. Bref, tout était orchestré pour créerl'effroi et pour signifier, en opposition avecles faits, que ces personnes étaient parti-culièrement dangereuses, confirmant ainsile message de l'étiquette “terroriste”.Faisant démentir la prétendue nécessitéde ces mesures, ces personnes se sontlibrement présentées à leur nouveau pro-cès.Elles ont été condamnées, pour avoir par-ticipé à des activités légales d'une organi-

sation qui lutte violemment contre unrégime “démocratique”, à savoir le gouvernement de la Turquie.Le tribunal a attribué un caractère démo-cratique à un régime connu pour la guerrequ'il mène contre ses populations. Il défi-nit comme terroriste toute action, mêmepacifique, liée à une organisation qui amené des actions armées, même si ellessont marginales dans sa lutte.

L’arrêt rendu en degré d'appel va encoreplus loin. Il justifie le coup d'Etat militaireen Turquie, en le présentant comme uneaction de défense du pouvoir vis à visd'organisations voulant le renverser. Maissurtout, on sent poindre en filigrane decette décision judiciaire, la phraséologieclassique de tout dictateur qui veut légiti-mer sa prise de pouvoir. Rappelonsqu’Hitler, Mussolini ou Pinochet avaientjustifié leur coup d'Etat par la nécessitéd'empêcher les communistes de prendrele pouvoir. Cette lecture a pour effet queles accusés ne peuvent invoquer les crimes du gouvernement pour justifier leurrésistance.

Un procès décisif pour l'avenir de nos libertés

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L’arrêt entend par “soutien” le simple faitde traduire ou de porter à la connaissancedu public, un communiqué de l'organisa-tion incriminée. En fait, tout ce qui aide àdiffuser son point de vue, est considérécomme un soutien. La personne poursui-vie ne peut invoquer, pour sa défense, lecaractère légal de ses activités.Pour le tribunal, tout discours sur lesactions de l'organisation est une publicitéqui lui est nécessaire pour la poursuite deses actes violents. Ainsi, il stipule que lefait même de donner une explication, sansqu'il soit question d'une revendication, ausujet d'une “organisation terroriste”constitue un fait punissable. Est crimina-lisé non seulement le fait d'apporter unpoint de vue opposé à celui de l'Etat surun conflit violent partout dans le monde,mais aussi de rapporter des faits quientrent en contradiction avec la lecture duréel opérée par le pouvoir.

L'arrêt de la Cour de Cassation peut êtrelu comme une réaction de l'appareil judi-ciaire à la tentative de créer, par le biais dela jurisprudence, des tribunaux spéciauxconstruits pour obtenir un jugementorienté. En ce qui concerne les mesuresde détention, les prisonniers ont contestéces procédures d'exception et plusieursjugements en référé leur ont donné raison.Aucun d'entre eux n'a été exécuté. Suiteau refus de l'administration d'appliquer lesarrêts favorables aux détenus, la Courd'Appel de Bruxelles avait rendu le 12décembre 2006, un arrêt qui a mis fin àl'éclairage de nuit et aux fouilles corporel-les.

Cette dualité d'attitude entre l'administra-tion et l'appareil judiciaire est constante.

Seules les décisions judiciaires de Brugeset de Gand rencontrent la volonté del'exécutif. Rappelons qu’au niveau du tri-bunal de première instance le juge Trochavait été spécialement désigné. On peut leconsidérer comme un “homme” de l'exé-cutif, déplacé de sa juridiction afin d'obte-nir un résultat orienté. Freddy Troch a étéprésident du comité parlementaire de surveillance des polices et cela lui avaitpermis de bloquer la publication de l'en-quête de ce comité sur l'opération“Rebelle”, mise en place par la gendarme-rie afin de ficher les Turcs de Belgique. Ence qui concerne la décision d'appel deGand, c'est la même autorité judiciaire,qui avait désigné ce juge qui avait pu, entoute légalité cette fois, assurer la compo-sition du tribunal.

Les derniers jugements ne peuvent êtreconsidérés comme l'action de l'ordre judi-ciaire en tant que tel, mais comme celled'un tribunal spécial chargé de faire abou-tir la politique de l'exécutif. Cela expliquel'importance du procès actuel devant laCour d’Appel d'Anvers. La question est desavoir si cette juridiction va garantir l'Etatde droit ou si elle va mettre en place unejurisprudence qui permettra de poursuivretoute personne engagée dans des actionslégales de soutien ou donnant des infor-mations sur des luttes à contre courant dela politique internationale belge.

L'enjeu de ce procès n'est pas de punirune organisation turque, à laquelle laBelgique n'est pas confrontée, mais debriser la capacité des citoyens de sedémarquer des politiques officielles. Lecaractère violent de certaines actions (quise sont déroulées sur le territoire turc)

apparaît comme un simple prétexte. Ainsi,l'organisation non violente Greenpeaceest actuellement poursuivie par Electrabel,pour association de malfaiteurs et“menace de faits criminels”, afin de briserses actions de sensibilisation sur les dangers de l'énergie nucléaire.L'enjeu de ces actions judiciaires est biende pouvoir criminaliser toute action, prisede position ou simple information qui nevont pas dans le sens de la politique gou-vernementale et des groupes économi-ques associés.

Jean-Claude PAYE,sociologue, auteur de :

La Fin de l'Etat de droit, La Dispute, Paris, 2004.

Global War on Liberty, TELOS Press, New York, 2007.

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Souve ra ine té a l imen ta i re :

penser global, manger localLa souveraineté alimentaire… une très belle idée ! Le mouvement paysan international, Via Campesina, a

présenté ce concept pour la première fois en 1996 et depuis il a été fortement véhiculé par les ONG et les

mouvements altermondialistes. Il s’agit d’un droit international qui permet aux populations et aux Etats de

définir leur politique agricole sans qu’elle ne puisse porter préjudice à d’autres pays. C’est donc tout le modèle

du libre marché actuellement en vigueur sur la planète qui est mis à mal par cette idée et par le mouvement

paysan. C’est l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce) qui soumet notre alimentation et notre agriculture

aux règles internationales du commerce1 entraînant, partout sur la terre, une industrialisation de la production

agricole et une disparition de l’agriculture paysanne. La distribution des aliments aussi se concentre dans les

mains de quelques grands groupes de supermarchés dont le numéro 1 mondial est Wallmart2 (Etats-Unis),

suivi par Carrefour (France) qui occupe la deuxième place mondiale3. En Europe, on estime qu’en moyenne

une ferme disparaît toutes les trente secondes. En Belgique, environ 1500 fermes disparaissent chaque année

et les terres se concentrent au sein de fermes industrielles toujours plus grandes. C’est ainsi qu’en quarante

ans la Belgique a perdu 75 % de ses paysans.

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L a logique du libre marché est aveugle,seul le profit en ligne de mire fait tour-

ner cette machine infernale4. Les dégâtssociaux sont énormes mais les impacts surl’environnement sont considérables égale-ment5 et c’est le consommateur qui paie !La “malbouffe” de nos supermarchés oudes fast-foods omniprésents en ville nouscoûte très cher. C’est nous, les consomma-teurs qui achetons les emballages et finan-çons leur incinération ou leur recyclagedans le meilleur des cas. C’est nous quipayons ces aliments contaminés par toutessortes de produits chimiques et qui enassumons ensuite les frais médicaux, c’estnous qui faisons fructifier les bénéfices deces grandes firmes de l’agro-alimentaire.Certes, vous pourriez en toucher quelquedividende dans la grande bonté du Capitalsi vous achetiez quelques actions, il faut lereconnaître, mais ce n’est pas la voie quel’on vous propose ici. Au contraire, tout enrevendiquant la souveraineté alimentaire auniveau national et international, il est possi-ble de la pratiquer à une échelle plus localeici et maintenant. Il ne tient qu’à vous desortir de ce système absurde et destruc-teur. En matière d’alimentation “Penser glo-bal et agir local” prend tout son sens etdevient très concret !

La souveraineté alimentaire inclut ladéfense des traditions alimentaires de cha-que peuple, ainsi que la conservation et lecontrôle des ressources de l’agriculture (laterre, l’environnement et les hommes). Celaimplique également de donner la prioritéaux marchés et circuits de commercialisa-tion locaux afin de lutter pour un monderural vivant et développé, contre les désas-tres de l’agriculture industrielle. EnBelgique, il est encore temps d’acheter

directement ses aliments auprès de certains producteurs fermiers. Différentesinitiatives existent en ce sens. En effet, il nesuffit pas d’acheter bio les yeux fermés ausupermarché. Le bio perd tout son sens s’ilne provient pas d’agriculteurs locaux pro-duisant selon les principes de l’agriculturepaysanne. Vous pourriez, par exemple,trouver des tomates bio en plein hiver pro-venant du Maroc ou de serres chauffées aumazout dans la périphérie bruxelloise.

Pour éviter tous ces pièges, il est néces-saire de se tourner résolument vers le circuit court6 qui est un mode de commer-cialisation directe avec un minimum d’intermédiaires, ce système de commer-cialisation se base sur une économie localeet des rapports équitables. C’est l’alterna-tive que prône le manifeste national despaysans et artisans7 publié en juillet 2007 àLibramont. Sur le site de la nouvelle coordi-nation de défense et de promotion des pro-duits paysans et artisanaux, vous trouverezles adresses des fermes qui vendent leurproduction en circuit court. La vente s’ef-fectue alors directement à la ferme oudirectement sur les marchés ou encore parl’intermédiaire d’un petit commerçant quirevend les produits fermiers dans les mar-chés locaux. Une initiative originale en cir-cuit court est le nouveau magasin “Côtésoleil”8 créé à l’initiative de la coopérativede producteurs paysans du Pajottenland(dans la périphérie occidentale deBruxelles). Ici aussi, les producteurs invi-tent les consommateurs à devenir des par-tenaires à part entière. Ils peuvent, en effet,devenir membres coopérateurs et acquérireux aussi des parts (par tranche de 100euros) dans la coopérative tout en bénéfi-ciant ainsi de réductions sur leurs achats.

Des collectifs de familles s’organisent aussien groupe d’achat commun (GAC) pourpasser des commandes groupées chezdes fermiers ou artisans. Il existe aussi unsystème de partenariat plus poussé qui afait ses preuves en Amérique du Nord etplus récemment en France sous le nomd’AMAP (Association pour le Maintien del’Agriculture Paysanne) qui permet de relo-caliser l’économie. Il s’agit du partenariatau travers des contrats locaux qui lient lesménages de “consom’acteurs” aux fermes.A Bruxelles, depuis février 2007, 50 famillesse sont engagées ainsi à acquérir la pro-duction annuelle de légumes de la fermearc-en-ciel. Ces familles s’organisent encollectifs autonomes sur trois lieux de dis-tribution différents. La dénomination decette initiative est GASAP9, c-à-d, Grouped’Achat Solidaire de l’AgriculturePaysanne. Grâce à l’engagement de ces“consom’acteurs”, les revenus de la fermese stabilisent, une personne en plus y tra-vaille dorénavant comme paysan à tempsplein. Déjà sept nouveaux groupes de cetype à Bruxelles sont en train de se formeret cherchent à établir de nouveaux partena-riats avec d’autres fermes. Vous pouvezaussi vous manifester auprès du réseaubruxellois des Gasap et rejoindre un groupeen formation ou participer à la création d’unnouveau groupe dans votre quartier.

Une autre façon de pratiquer la souverai-neté alimentaire est de produire vous-mêmes une part de vos aliments. En ville,vous pouvez ainsi louer une parcelle depotager ou participer avec d’autres habi-tants de votre quartier à un jardin collectifdans lequel vous produisez et récoltezensemble vos fruits et légumes. On parlede plus en plus d’agriculture urbaine

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comme une alternative sérieuse à la luttecontre la faim dans les pays du Sud maiscela se pratique aussi dans le Nord et celay constituera certainement à l’avenir unenjeu de taille face, notamment, à la pénu-rie prochaine de carburant bon marché. Cetype de dynamique urbaine permet en effetaux participants de “se réapproprier leursvies, d’avoir prise sur le réel car elle nouspermet de vivre immédiatement de noscréations et donc d’en faire un point dedépart pour un changement à la racine(radical).”10 Dans la périphérie bruxelloise, ilexiste le jardin collectif de Hoeilaart11 ouencore la terre à légumes de l’Oasis dugingko à Braine-l’Alleud12. En ville, deux jar-dins collectifs sont en démarrage à Laekenet à Ixelles, à l’initiative de l’asbl Le débutdes haricots. Parallèlement au développe-ment de ce type d’initiatives, des potagersouvriers sont souvent mis en danger par laspéculation immobilière et sont menacésd’expropriation13, ce qui nous rappelle qu’ilfaut rester toujours vigilants, notammentaux travers des comités de quartier14, parexemple.

En tant que citoyens consommateurs, vouspouvez devenir membre de ce large mouvement de défense de l’agriculturepaysanne en signant par exemple le manifeste de Saveurs paysannes et enadhérant ainsi à l’association Les amis deSaveurs paysannes.En réalité, quand on s’intéresse à l’agricul-ture, on se rend vite compte combien lefossé est grand entre les citoyens et leursélus politiques. En remédiant à cette formed’impuissance et d’indifférence générali-sée, en informant la population, en combat-tant les intérêts des grands industriels et enouvrant de nouveaux espaces d’engage-

ment citoyen, des organisations commeSaveurs Paysannes trouvent parfaitementleur raison d’être ! C’est vous qui avez la possibilité de fairevivre ces collectifs, ces associations, enrenforçant les liens sociaux localement eten contribuant ainsi à construire un avenirviable pour les générations suivantes.

Kari STÉVENNE, un ami de Saveurs paysannes

Liens internet- Un petit clip sur l’industrialisation del’agriculture : www.themeatrix1.com (dis-ponible en français)- Coordination pour la défense de produitspaysans : www.saveurspaysannes.be- Syndicat paysan wallon : www.fugea.be- L’asbl Le début des haricots : www.haricots.org- L’Oasis du gingko : http://users.skynet.be/oasisduginkgo- Le réseau bruxellois des GASAP :http://gas-bxl.collectifs.net- La coopérative Côté Soleil : www.cote-soleil-bruxelles.com- La coopérative Coprosain : www.coprosain.be- L’association Nature&Progrès : www.natpro.be- L’association Les Amis de la Terre :www.amisdelaterre.be- AMAP- Association pour le Maintien del'Agriculture Paysanne : http://alliancepec.free.fr/Webamap-Alliance Provence (AMAP) :http://www.allianceprovence.org-Information générale sur les AMAP :http://fr.wikipedia.org/wiki/AMAP

1 Le libéralisme économique qui régit l’OMC se base notam-ment sur la thèse de David Ricardo (1772-1813) sur les “avan-tages comparatifs”, selon laquelle chaque pays doit se spécia-liser dans ce qu’il sait le mieux faire et laisser le libre marchérépartir toutes les marchandises idéalement pour le bonheurde tous. 2 En 2006, avec des ventes s'élevant à 351,1 milliards de dol-lars et 11,2 milliards de dollars de bénéfices (soit approximati-vement le budget de la France), Wal-Mart a repris la place depremière entreprise mondiale en terme de chiffre d'affaires. Lefondateur de Wal-Mart, Sam Walton était classé de 1985 à 88homme le plus riche des Etats-Unis. Ses enfants “Rob”, Jim etAlice (ainsi que John décédé le 27 juin 2005) et sa veuve HelenWalton sont chacun à la tête d'un patrimoine de plus de 18 mil-liards de dollars (91 milliards de dollars en tout). Ils tiennent 5des 10 premières places des personnes les plus riches desÉtats-Unis et sont toujours bien placés sur la Liste des milliar-daires du monde. Lire aussi Les coulisses de la grande distri-bution de Ch. Jacquiau (2000).3 Lire Les coulisses de la grande distribution de Ch. Jacquiau(2000) pour plus de détails sur la situation en France et dans lemonde.4 Un exemple absurde parmi tant d’autres : en 1999, la Francea exporté 3.515 millions de tonnes de lait, et au cours de cettemême année, en a importé 1.641 millions de tonnes ! 5 André Pochon, Les sillons de la colère – la malbouffe n’est pasune fatalité. Paris, 2001. 6 Nature & Progrès et ses groupes locaux de bénévoles est uneassociation d’agriculture biologique active dans la promotiondu circuit court depuis de nombreuses années. Elle édite leBiottin dont vous pouvez facilement vous procurez un exem-plaire auprès de votre groupe local le plus proche ou sur le sitewww.natpro.be 7 Disponible sur www.saveurspaysannes.be 8 Rue Van Artevelde 93-95 à 1000 Bruxelles - http://www.cote-soleil-bruxelles.com 9 Remplissez le formulaire d’inscription sur http://gas-bxl.collectifs.net dans la rubrique “contactez-nous” 10 Pablo Servigne, “L’anarchie par les plantes”, dansRéfractions 18 (printemps 2007). 11 Initié par le collectif Semences d’Utopies, vous pouvezcontacter ces jardiniers à l’email [email protected] 12 Info sur http://users.skynet.be/oasisduginkgo 13 A Jette, sur les terrains de la VUB, plus d’un hectare de jardins ouvriers est menacé par un projet de constructiond’un terrain de football :http://www.ipetitions.com/petition/LaarbeekbOOs (le site dela pétition vous demandera une contribution financière. Enréalité, ce n’est pas le cas. Il suffit de cliquer sur [next] poursigner la pétition GRATUITEMENT). 14 Inter-Environnement Bruxelles est une fédération de près de80 comités de quartier à Bruxelles : http://www.ieb.be/presentation

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RÉSISTER C’EST CRÉER

Parce que Résister, c’est montrer qu’un autre monde

est possible, qu’il n’y a pas de fatalité, c’est créer de

l’espoir et des alternatives ;

Parce que Résister, c’est inventer de nouvelles formes

de solidarité ;

Parce que Résister, c’est enfin relever la tête, refuser

la soumission et se battre pour une société plus juste

et plus solidaire ;

Parce qu’il ne s’agit pas seulement de résister politi-

quement, mais d’inventer, d’ouvrir de nouveaux che-

mins, et parce que l’art est également essentiel à la

société, aux humains, aussi important que la liberté, le

travail, les pommes de terre…

Ce portail se veut (modestement) un espace d’illustra-

tion de différentes formes de résistances capables

d’opposer, à l’emprise du fatalisme, des fanatismes,

des idéologies, des peurs et des interdits qui désoli-

darisent, la force des synergies qui unissent.

PORTAIL

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http://malgretout.collectifs.net/

La question que se pose le collectifMalgré tout est la suivante : “comments’engage-t-on dans une époqueobscure ?”. Il ne s’agit pas ici de chercherquel modèle, programme ou homme pro-videntiel suivre, mais comment on vit etrésiste dans “l’époque obscure” elle-même. Premier élément de réponse pro-posé : la condition d’une résistancejoyeuse est de renoncer à tout espoir dansun but final chimérique ; l’agir privilégié sesitue ici et maintenant.Miguel Benasayag, Angélique Del Reyainsi que de nombreux autres auteurs ali-mentent cette réflexion.A suivre…

http://www.revolutionsoundrecords.org/index.php?op=edito

Face à la toute puissance des majors avi-des de musiques formatées destinées à ladiffusion de masse, Revolution soundRecords (RsR) se veut être un collectifd'artistes composé de musiciens souhai-tant simplement partager et construire uneautre vision.L'évolution offerte par le home-studio et lenumérique offre de multiples possibilitésde création et la musique permet de nousentrainer sur des chemins non conven-tionnelles.RsR nous y amène en mettant gratuite-ment à la disposition de l’internaute unlarge éventail de création sonore indépen-dante ainsi qu’un forum bouillonnant devitalité.

http://www.lacid.org

L’Association du Cinéma Indépendantpour sa Diffusion a été créée en 1992 pardes cinéastes qui refusaient la perspectived'un cinéma régi par un modèle unique,excluant progressivement toute expres-sion et toute diffusion cinématographiqueindépendante.La force du travail de l’ACID est avant toutson idée fondatrice unique : le soutien pardes cinéastes de films d’autres cinéastes,français ou étrangers.

Dans l’esprit de la compétition internatio-nale du film du Festival des Libertés, l’as-sociation promeut la diversité de la créa-tion cinématographique et œuvre à la ren-contre entre les œuvres, leurs auteurs et lepublic.

http://www.artisresistance.com

Un site déjanté, à l’image de son concep-teur, Trent Reznor (Nine Inch Nails). A voir également son site cousin :http://bethehammer.net/Comprenne qui pourra….

http://www.lkjrecords.com/

Seul artiste international à avoir été invitélors de deux éditions du Festival desLibertés, Linton Kwesi Johnson, plusconnu sous le nom de LKJ, est l’inventeurdu Dub-Poetry. Résolument militant, ceBritannique d'origine jamaïcaine estdevenu un artiste incontournable dont lestyle vise autant à élever l'esprit de sescontemporains, qu'à briser définitivementles chaînes de l'esclavage moderne.

http://www.desobeir.net/

Réapprenons à désobéir.Face à l’injustice sociale, au saccage de lanature et au néo colonialisme, un groupede citoyen actif à décider de rentrer enrésistance. “Nous croyons que la réalitédes rapports de force que nous subissonsen matière de nucléaire civil et militaire, deprotection de l'environnement contre lespratiques de certaines multinationales, demondialisation de l’injustice sociale, etc.exigent de renouer avec une culture de ladésobéissance civile/civique, de l'actiondirecte non violente, du refus radical etludique”.Pour une désobéissance active, suivez leguide…

http://www.alternatives-images.net/

Les “terroristes” d’hier, devenus papys, semobilisent pour que l’Histoire ne soit pasrécupérée, et pour défendre les conquêtesdurement acquises : Sécurité sociale,retraite pour tous, des médias indépen-dants... Les héros de la résistance (1940-1945)lancent donc un appel pour définir ensem-ble un nouveau “Programme deRésistance” pour notre siècle, sachantque le fascisme se nourrit toujours duracisme, de l'intolérance et de la guerre,qui eux-mêmes se nourrissent des injusti-ces sociales.Plus que jamais, à ceux et celles qui ferontle siècle qui commence, la crème de larésistance veut dire avec vigueur : “Créer,c'est résister. Résister, c'est créer.”

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Les dangerscréationnisme: D

U

enjeux pour l’enseignement des sciences en EuropeLe texte qui suit, signé par de nombreux universitaires, est paru sous la forme d’une carte blanche en novem-

bre dernier. Nous le reproduisons dans notre trimestriel car nous adhérons à son propos et soutenons sa

démarche, clairement laïque. Laïque au sens philosophique, il alerte sur les dangers du dogmatisme et de

l’obscurantisme. En outre, du point de vue politique, il prône une juste séparation entre croyance et science,

entre convictions personnelles et enseignement public, non sans souligner l’irréductible pluralisme des opi-

nions (en ce compris au sein d’une même religion).

Si nous promouvons aussi bien la créativité des résistances que la rencontre des différences, ce n’est pas à

n’importe quel prix : toujours en vue de l’émancipation de tous et de la construction d’un « nous » commun.

Le retour du créationnisme, loin de s’apparenter à la créativité, à la résistance ou à l’émancipation, nous paraît

exprimer un refus du progrès et risque de couper ses adeptes de l’évolution du monde. Sans ériger la science

en vérité absolue, nouveau dogme ou nouvelle religion, il importe de reconnaître qu’elle propose aujourd’hui –

et jusqu’à preuve du contraire – les explications du monde les plus cohérentes et les plus fonctionnelles. C’est

à ce titre qu’elle constitue un des piliers de l’école publique apte à construire ce monde commun au sein

duquel les spécificités et convictions de chacun, situées à leur juste place, peuvent s’exprimer et s’entendre.

Bruxelles Laïque

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L ’Assemblée Parlementaire du Conseilde l’Europe vient d’adopter une réso-

lution (n° 1580/2007) intitulée “Les dan-gers du créationnisme dans l’éducation”.Cette résolution “s’oppose fermement àl’enseignement du créationnisme en tantque discipline scientifique, ou dans toutcadre disciplinaire autre que celui de lareligion”. Pour rappel, le créationnismeest un courant de pensée qui rejette lathéorie de l'évolution, jugeant qu’elle estincompatible avec la croyance en la créa-tion de l'univers et des organismes vivantspar un être transcendant. Or, les scientifi-ques considèrent la théorie de l'évolutioncomme le cadre explicatif rationnel le pluscohérent pour intégrer l’ensemble de nosconnaissances concernant le vivant et sesorigines. Diverses formes de création-nisme existent: le créationnisme “jeuneterre” interprète à la lettre les textes rela-tifs à la genèse, et affirme que l’univers aété créé il y a 6000 ans ; le créationnisme“vieille terre” admet que l’univers estbeaucoup plus ancien, mais nie le phéno-mène d’évolution biologique; une formeplus récente du créationnisme accepteune évolution qui serait “dirigée” par uneentité supérieure.

Pour mieux comprendre les enjeux, il estutile de retracer brièvement l’histoire desmouvements créationnistes. Depuis lapublication du livre de Darwin (l’Originedes espèces, 1859), la théorie de l’évolu-tion a toujours fait l’objet d’attaques de lapart de certains mouvements religieux(tout au moins leurs tendances les plusconservatrices). Tout au long du 20e siè-cle, les mouvements créationnistes chré-tiens américains ont mené un incessantcombat pour remplacer l’enseignement de

l’évolution par une interprétation littéraledes textes sacrés. Depuis une dizained’années, ils ont adopté une stratégie plussubtile, en revêtant des apparences scien-tifiques, avec le mouvement du “DesseinIntelligent” (Intelligent Design, ID). Celui-cine rejette pas le fait que les espècesvivantes aient évolué, mais affirme que lemonde vivant est tellement complexe etparfait qu’il ne peut résulter que de l’ac-tion d’une intelligence supérieure, quiaurait conçu les premiers êtres vivants etguidé leur évolution jusqu’à nos jours.Cependant, les arguments présentés enfaveur de la théorie de l’ID, s’ils peuventparaître déroutants pour une personnenon avertie, ne résistent pas à une analysescientifique. En particulier, comme l’hypo-thèse de l’ID fait appel à une explicationsurnaturelle pour rendre compte de lacomplexité du vivant, elle ne peut être nivalidée ni invalidée par des expériencesou des observations et sort donc du cadrescientifique. Plus important encore, au-delà de son discours pseudo-scientifique,le mouvement de l’Intelligent Designrevendique un agenda politique consistantà instaurer une morale chrétienne fonda-mentaliste en tant que valeur de référencepour l’ensemble de la société. Une autre forme de créationnisme revientactuellement en force en Turquie avec la“Fondation pour la recherche scientifique”(BAV). Le fondateur, président d’honneuret membre le plus actif de ce BAV estHarun Yahya, auteur de l’Atlas de laCréation, dont le premier volume, unluxueux ouvrage de 770 pages, a étéenvoyé gratuitement à des milliers d’établissements scolaires en France,Belgique, Suisse, Italie, Espagne et dansd’autres pays. Dans ce cas, il s’agit d’un

créationnisme qui ne se limite pas à nierles mécanismes évolutifs proposés parDarwin, mais nie le fait même de l’évolu-tion. En termes d’argumentation, le livreconstitue une manipulation grossière etmalhonnête des données paléontologi-ques, allant jusqu’à nier les évidences afinde rejeter toute évolution. Tout comme lestenants de l’ID, Harun Yahya est animé parun projet politique. Il propose de détruireles fondements du matérialisme, et prôneune certaine lecture du Coran comme fon-dement de vérité et de morale, afin d’atteindre la paix entre les peuples touten instaurant la primauté d’une forme particulière et extrême du religieux sur lepolitique.

Outre l’impact médiatique de tels mouve-ments fondamentalistes, il est plus inquié-tant encore de constater qu’ils trouvent unrelais politique efficace au sein de plusieurs pays européens, dont les autori-tés adoptent officiellement des idéescréationnistes et attaquent la biologie del’évolution. Cela a été le cas notammentsous le gouvernement italien deBerlusconi, mais aussi en Serbie, enRussie, en Pologne. La théorie del’Intelligent Design a trouvé un écho favo-rable auprès de la précédente ministrehollandaise des sciences.

Il est important de souligner qu’au sein dechaque religion co-existent une grandediversité d’opinions concernant l’accepta-tion de l’évolution biologique et l’interpré-tation des textes sacrés. L’utilisation dethèses créationnistes à des fins politiquesne reflète donc ni les positions officiellesdes religions, ni l’opinion de l’ensembledes communautés croyantes. On doit se

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féliciter de l’adoption de la résolution 1580qui établit clairement les distinctionsessentielles entre les différents plans de lascience, de la croyance, et leurs enseigne-ments respectifs. “L'objectif de la pré-sente résolution n'est pas de mettre endoute ou de combattre une croyance […]Il faut séparer la croyance de la science. Ilne s'agit pas d'antagonisme. Science etcroyance doivent pouvoir coexister”. Letexte ne s’attaque pas non plus au choixd’inclure ou non des cours de religiondans les programmes scolaires. Ce que letexte dit, c’est que le créationnisme n’estpas une matière scientifique, et qu’il nedoit donc pas être enseigné dans lescours de sciences.

En dépit de la position extrêmement clairedu Conseil de l’Europe, pas moins d’untiers des parlementaires présents ont votécontre la résolution (25 voix contre, 48pour). Les votes négatifs proviennentessentiellement du Parti PopulaireEuropéen (PPE), avec un bon nombre dereprésentants de pays de l’Est et d’Italie.On compte également parmi les “non” unreprésentant de la Belgique, Luc Van DenBrande, qui préside le groupe PPE/DC.Comment interpréter ces votes négatifs ?Ces parlementaires pensent-ils, à l’encon-tre des académies des sciences de 67Etats qui se sont prononcées en faveur del'enseignement de l’évolution, que le créa-tionnisme mérite le statut de théorie scien-tifique ? Ou alors considèrent-ils qu’unedoctrine religieuse doit faire partie descours de sciences à l’école secondaire ?Une telle position nous semble incompré-hensible.

Charles Susanne (VUB-ULB), Jacquesvan Helden (ULB), Bruno André (ULB),Henri Alexandre (UMH, ULB), ThierryBackeljau (KBIN), Philippe Baret (UCL),Benoit Bourgine (UCL), Claude Bragard(UCL), Philippe Claeys (VUB), GuyCoppois (ULB), Pierre Coulon (IRScNB),Luc Crevits (UG), Felice Dassetto (UCL),Jean-Christophe de Biseau (ULB),Charles De Cannière (ULB), WalterDecleir (UA), Frits De Vree (UA), BernardFeltz (UCL), Marie Jo Gama (ULB),Jean-Claude Gregoire (ULB), ThierryHance (UCL), Roland Hauspie (VUB),Anne-Laure Jacquemart (UCL), EddyKeppens (VUB), Luc.Leyns (VUB), AnneLombart (Ecole Decroly), Henri Maraite(UCL), Mark Nelissen (UA), RosineOrban (IRScNB, ULB), Laurence Perbal(FNRS, ULB), Jacques Reisse (ULB),Jean Richelle (ULB), Ariane Toussaint(ULB), Ludwig Triest (VUB), Philippe vanden Bosch de Aguilar (UCL), MartineVercauteren (ULB), Rudi Verheyen (UA),Etienne Vermeersch (UG), WalterVerraes (UG), Marcel Voisin (UMH),John Wérenne (ULB)

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Assurer un logement décent à tous est undroit inaliénable inscrit dans laConstitution belge (art.23).Pourtant de plus en plus de personnesfragilisées vivent dans des logementsinsalubres ou se retrouvent à la rue. Laspéculation immobilière n’a fait qu’aggra-ver la crise : des logements restent videset on demande des loyers scandaleuse-ment élevés pour des taudis.

Initiative dans le cadre de la campagne Logement duCentre d’Action Laïque.Avec le soutien du service de l’EducationPermanente de la Communauté française deBelgique.

Design by Bruxelles Laïque asbl

L’interculturalité s’oppose au leadershipculturel et ne se contente pas de la tolé-rance. Elle impose la reconnaissancemutuelle, la capacité de se remettre enquestion, la gestion de l’altérité et lavolonté de dialoguer d’égal à égal.

Initiative dans le cadre de la campagneInterculturalité du CAL.Avec le soutien du service de l’EducationPermanente de la Communauté française deBelgique et de la Commission Communautaire fran-çaise.

Design by Teresa Sdralevich

Centre d’Action Laïque asblCampus de la Plaine ULB, cp236 – 1050 Bruxelles, Belgique

Tél. : (+32) 2 627 68 11 – www.laicite.be – [email protected]

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Ariane HASSID, Présidente

Philippe BOSSAERTSClément DARTEVELLEFrancis DE COCKJean-Antoine DE MUYLDERFrancis GODAUXEliane PAULETMichel PETTIAUXPaul-Henri PHILIPSYvon PONCIN Johannes ROBYNPascale SCHEERSLaurent SLOSSEDan VAN RAEMDONCKCédric VANDERVORST

Fabrice VAN REYMENANT

Mathieu BIETLOTMario FRISOPaola HIDALGOSophie LEONARDAbabacar N’DAWOlivia WELKE

Conseild’Administration

Direction

Comitéde rédaction

GRAPHISMECédric BENTZ & Jérôme BAUDET

EDITEUR RESPONSABLEAriane HASSID,

Présidente de Bruxelles Laïque,18-20 Av. de Stalingrad - 1000 Bruxelles

ABONNEMENTSLa revue est envoyée gratuitement aux membres de Bruxelles Laïque. Bruxelles Laïque vous propose une formule d’abonnement de soutien pour un

montant minimum de 7€ par an à verser au compte : 068-2258764-49.Les articles signés engagent la seule responsabilité de leurs auteurs.

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