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  • BIBEBOOK

    CHARLES BUET

    LE CHASSEUR DOURS

  • CHARLES BUET

    LE CHASSEUR DOURS1895

    Un texte du domaine public.Une dition libre.

    ISBN978-2-8247-1287-1

    BIBEBOOKwww.bibebook.com

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    Sources : Bibliothque lectronique duQubec

    Ont contribu cette dition : Association de Promotion de lEcriture et de la

    Lecture

    Fontes : Philipp H. Poll Christian Spremberg Manfred Klein

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  • CHAPITRE I

    M H Bruno est un personnage bien original, etje vous demande, ami lecteur, la permission de vous le pr-senter.Figurez-vous une manire de gant, que les cuirasses du moyen ge ha-billeraient mieux que nos pantalons collants et nos vestons triqus ; desbras musculeux capables de soulever les fardeaux les plus lourds ; desjambes nerveuses, infatigables ; une poitrine semblable un souet deforge.

    Le visage de mon oncle prsente le type savoyard le plus pur : nezgros, rond au bout, maill de rubis et sem de verrues multicolores ; yeuxgris, fendus en amande, ombrags de longs cils et surmonts de sourcilsnormes qui coupent le front blanc, haut et large, de leur arc nettementtrac.

    Le visage respire la bont, la franchise, la simplicit, joserai mmedire la candeur.

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  • Le chasseur dours Chapitre I

    Tel que je le trace pour vous, lecteur, ce portrait nest point att ;mon oncle nest pas beau, et, sous ce rapport, tous ses neveux lui res-semblent.

    Hilarion Bruno est rentier de son tat, chasseur de profession, mairede son endroit, hbleur superlatif, parce quil est chasseur, plein dunerogue dignit, parce quil est maire.

    Il habite, quelques kilomtres de Saint-Jean-de-Maurienne, en Sa-voie, une charmante maisonnette aux murs couleur de rose, aux per-siennes grises, que les paysans du village appellent le chteau et les bour-geois de la ville, Maison-Rose.

    Cette maison possde une cave excellente, frache en t, chaude enhiver, dans laquelle vieillissent les bons vins du pays : le tonique Princeps,le capiteux Saint-Julien, le Bonne-Nouvelle et le vin de Rippes, dont leparfum se rapproche de celui de la violette.

    Le salon de Maison-Rose est un petit muse o sont runis ple-mledes pes amboyantes et des meubles sculpts ; des tableaux de matreet des fragments de vitraux. Les merveilles de la cramique italienne syjoignent aux ligranes de Gnes, aux verreries de Venise, aux maux cloi-sonns de la Chine, ces mille objets, en un mot, que largot parisiennomme bibelots, et que leur propritaire dcore pompeusement du titredobjets dart.

    Si mes souvenirs ne me trahissent point, la salle manger et la biblio-thque ntaient point indignes du salon.

    La salle manger, vaste pice lambrisse de vieux chne, tait encom-bre de trophes de chasse, trophes qui stalaient mme sur le grandbuet de poirier sculpt, o mon oncle renfermait sa massive argenterieet les belles porcelaines quil avait rapportes du Japon. Il y avait l descornes de chamois, des bois de cerf, des dfenses de sangliers, auxquelssaccrochaient dans un ordre admirable toutes sortes de fusils, de poires poudres, de asques, de bidons, de carniers. Les deux objets qui exci-taient le plus vivement mon admiration alors que javais douze ans, ily a longtemps de cela ! taient : 1 une gourde faite dune noix de cocosculpte et 2 une paire dours empaills placs en sentinelle aux deuxcts du buet.

    Oh ! que ces deux ours me faisaient peur avec leurs dents blanches et

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  • Le chasseur dours Chapitre I

    pointues ! leurs yeux de feu, leurs poils bruns, longs et friss !Quant la bibliothque, elle se composait uniquement de livres de

    voyage et de chasse. Ctait encore une des manies de mon oncle, lequel,je vous lai dj dit, tait un er original.

    Il avait un certain nombre de manies.Dabord, celle de la chasse ; puis, celle de raconter ses chasses. Ensuite,

    celle de raconter ses voyages, en montrant ses bibelots, ou bien en sablantle contenu des vieilles bouteilles de sa cave.

    Il navait jamais voulu se marier et vivait comme un ours, partageantson temps en quatre parties gales quil passait dans son salon, sa biblio-thque et sa salle manger ; la salle manger lui prenait deux parties surquatre !

    Chaque mois, il partait un beau matin, aprs avoir endoss la veste develours ctes, les culottes grises et les gutres de peau, qui composaientson costume de chasse, et ne revenait quau bout de huit jours, amenantavec lui le cadavre dun ours et quelques joyeux compagnons avec les-quels il mangeait son gibier.

    Un jour, comme jtais all rendre visite mon oncle, je le priai de meconter une de ces histoires de chasse quil savait si bien conter.

    Hilarion Bruno me jeta un regard sournois. Tiens ! tiens ! petit, me dit-il tonn, je ne te savais pas curieux

    daventures.Je poussai un soupir fendre une roche en deux. Ah ! mon oncle ! mcriai-je dun air scandalis, quand je ferai des

    livres il faudra bien que votre nom y gure.Il sourit paternellement et haussa les paules. Il faut voyager pour faire des livres, grommela-t-il ; il ny a de beaux

    livres que les histoires de voyages !Ctait comme cela.Hilarion Bruno ne concevait rien au-del ! Il faisait des romans,

    abhorrait la philosophie, se souciait peu de lhistoire et ddaignait la po-litique.

    Pour en revenir mon histoire, ou plutt lhistoire de mon oncle,il alla dboucher un acon de vin blanc dHermillon, me versa rasade etreprit :

    3

  • Le chasseur dours Chapitre I

    Tiens ! neveu, je vais te raconter comme je suis devenu chasseur, etchasseur dours encore !

    Allch par ce prambule, je massis commodment dans un grandfauteuil de cuir oreillettes, et je me prparai couter de mon mieux.

    Il faut te dire, commena mon oncle, que je nai pas toujours eucinquante ans. En 1825, jtais un garonnet de quinze ans, fort et robuste,bourr de latin et de grec, mais orgueilleux comme dix humanistes et sotcomme vingt collgiens pris collectivement. Cette anne-l, jtais allpasser mes vacances chez ma tante Esthnie, laquelle habitait le villagedes Hulles, au-dessus du bourg de la Rochette. Ma tante Esthnie avaitsoixante-dix ans. Elle possdait quatre ls et deux lles : Georges, quiavait quarante ans ; Andr, qui en avait trente-cinq ; douard, qui en avaittrente-quatre, et Camille, mon an de deux ans. Les deux lles taientmaries : lune M. Amenet, le notaire, lautre lavocat Platine, le biennomm.

    Comme bien tu le penses, mon camarade le plus intime tait Camille.Georges me faisait peur. Andr mintimidait, douard me semblait ungant. Quant Mme Amenet, elle me bourrait de bonbons. Mme Platinehabitait Chambry et portait des chapeaux plumes ; elle ne venait jamaisaux Hulles, craignant de gter son teint.

    Il tait impossible de voir famille plus unie et gens mieux faits pourvivre ensemble sous un mme toit.

    Loncle Hilarion Bruno t une pause et jen protai pour lui dire queje ne voyais pas encore poindre les oreilles de lours.

    Estohijo ! grommela-t-il, patience ! neveu, patience ! jen ai dj vupas mal, des ours, quatre ou deux pattes ! attends un peu !

    Il but un grand verre de nectar hermillonnais et continua son rcit. En ce temps-l, reprit-il, on payait six francs un permis de chasseIl faut vous dire que mon oncle me racontait cette histoire en 1861,

    cest--dire une anne aprs lannexion de la Savoie la France. On payait six livres un permis de chasse et lon chassait partout.

    Les gardes taient de bons enfants qui faisaient leur devoir, sans oublierles prceptes de la civilit purile et honnte. Au jour daujourdhui, il

    1. Cet enfant.

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  • Le chasseur dours Chapitre I

    faut payer vingt-cinq francs, payer limpt des chiens, payer le loyer desbiens communaux, payer encore et toujours !

    Si au moins lon pouvait parler, aprs avoir pay ! scria mon oncle,en appuyant cette rexion dun grand coup de poing frapp sur la table.

    Il murmura quelques paroles quil ne serait point prudent de trans-crire ici, et poursuivit :

    Tous les matins, Georges, Andr, douard et quelques amis euxpartaient de grand matin pour chasser le livre.

    Camille, moi et un gamin de notre ge, qui rpondait au nom dAurle,nous partions aussi pour tirer les grives et les pigeons sauvages. Il y avaitun gros renard qui, chaque nuit, venait tordre le cou nos poules. Souventnous le rencontrions, mais nous nosions le tuer, tant il nous faisait peur.

    Mais lours, mon oncle ! interrompis-je. Attends, attends un peu, neveu ! Un matin, excits par le rcit des

    exploits de mes cousins, nous leur dclarmes que nous irions avec euxdu ct des tours de Montmayeur.

    Les tours de Montmayeur sont deux belles tours spares lune delautre par une distance de cent mtres aumoins. Elles sont restes debout la suite dun crime commis dans ce chteau par le dernier baron deMontmayeur, Jacques. Ce Jacques tait ls du marchal de Savoie. Or, en14

    Lorsque mon oncle se lanait dans lhistoire et quil abordait unelgende nationale, sa digression durait ordinairement de trois quatreheures. Moi, je tenais mon ours et je rclamais nergiquement lhistoirede cet ours.

    Hilarion Bruno eut aux lvres un sourire de piti et haussa les paules :Ah ! petiot, me rpondit-il, tu ne sais pas quel charme, quelle beaut,

    quel attrait mystrieux ont nos lgendes ! Si tu veux faire des livres, ilfaudra bien apprendre tout cela !

    Petiot ! ! !Dans toute cette phrase de mon oncle, je navais entendu que le mot

    petiot, et jallais avoir quinze ans au 23 octobre prochain !Je dvorai ma rage, esprant que lours ne tarderait point venir. Un matin donc, reprit mon oncle, nous nous dirigemes vers

    les tours de Montmayeur. Nous tions six, en y comprenant ma petite

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  • Le chasseur dours Chapitre I

    chienne Blondette, qui tait bien la bte la plus intelligente que jaieconnue. Elle me suivait pas pas.

    Comme je ne pouvais point marcher aussi lestement que mes grandscousins, jallai tranquillement, suivant dix pas mon cousin Camille.

    Voil que tout coup Bon ! interrompis-je encore, nous y sommes !Mon oncle me jeta un regard svre et reprit : Blondette se fourvoie dans un buisson et lance un livre qui passe

    entre mes jambes. Je me serais tax de prsomptueux si lide mtaitvenue de tirer un livre la course. Blondette dtala la suite de lanimalaux longues oreilles, et me voil parti aprs ma chienne, brandissant monfusil au-dessus de ma tte.

    Mes cousins staient arrts et riaient de tout leur cur. Bravo, petit ! me criaient-ils, bravo !Au lieu de venir mon secours, ces badauds riaient et me contem-

    plaient, bouche bante.Le livre courait toujours, Blondette aboyait, moi, je commenais

    perdre haleine.Enn ce bon livre vint se jeter dans un champ de pommes de terre.

    Mes cousins arrivrent ; mais je rclamai lhonneur de tirer le premiercoup, et protant dun moment o le livre laissait passer ses oreillesderrire les feuilles, jenvoyai ma charge tout entire dans les molletsde mon cousin Andr.

    Ma foi ! je s comme les cousins de mon oncle, jclatai de rire, tantet si fort, que mon accs dhilarit dura cinq bonnes minutes.

    Il faut si peu de chose pour faire rire les enfants ! Quand jeus ri tout mon aise, Hilarion Bruno recommena son rcit.

    Tu dois penser quels cris dpouvante furent pousss de ct etdautres. Les chos de la montagne en retentissaient Je crus avoir com-mis un meurtre, et je me mis fuir. Mes cousins marrtrent en poussantun grand cri.

    Je levai la tte dix pas de moi, un ours de la plus belle taille samusait fourrager

    dans un magnique champ davoine. notre vue, il huma lair, grogna etsenfuit dans la direction de la montagne.

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  • Le chasseur dours Chapitre I

    Je mlanai sa poursuite Un coup de feu retentit une balle sif-a mon oreille et je vis lours saaisser en poussant un gmissementlamentable.

    Mes cousins mexpliqurent alors que le champ tait entour dunecorde supporte par des piquets plants de distance en distance. Un fusily tait adapt, dispos de manire faire feu pour peu que lon touchtla corde tratresse.

    Et le mollet du cousin ? demandai-je en souriant. Bah ! rpondit Hilarion Bruno, le mollet du cousin tait protg par

    de fortes gutres, et le plomb navait touch que le cuir. Et cest votre premire chasse lours ? mon oncle. Oui, neveu. Mais depuis lors jen ai vu bien dautres ! Vraiment ? Oui ! jai chass le renard en Angleterre, le loup en Russie, lours

    blanc dans les mers du Nord, le lion en Afrique, la panthre Java, le tigredans les Indes et lhomme dans les pampas amricaines !

    Lhomme ! ! ! Le Peau-Rouge, neveu. Il est certains cas o il vaut mieux chasser

    qutre chass !Je vous lai dj dit, mon oncle Hilarion Bruno avait un faible pour les

    sentences philosophiques. Si tu veux, Charles, me dit-il quand je le quittai, nous irons demain

    faire une partie de chasse. Oh ! merci, merci, je naime point les ours.Il haussa les paules : Comme on lve les jeunes gens aujourdhui ! murmura-t-il avec

    un sourire de pit. Eh bien ! nous nous contenterons de tirer le renard.Cette fois, je ne pus que mincliner. Sais-tu au moins tenir un fusil ?La modestie nest pas mon fort : Ah ! mon oncle, rpondis-je, mieux quune plume, coup sr !

    n

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  • CHAPITRE II

    L , partmes laube pour aller chasser le renarddu ct dAiguebelle.Aiguebelle est un gros village, un petit bourg dont lunique pr-tention a toujours t de se donner comme une ville. Cest la patrie parexcellence du commrage et des plaisirs champtres. On y dcore touteschoses dun nom pompeux : la mairie devient Htel-de-Ville, et la justicede paix est un palais de justice. Les habitants nappelleront jamais leurpasteur : Monsieur le cur, mais bien : Monsieur larchiprtre. Soyez avocat, mdecin, notaire, professeur ; ce titre suivra chaque fois lemot monsieur quand on sadressera votre personne.

    Aiguebelle est form dune seule rue qui nest autre chose que la gran-droute sur les deux cts de laquelle salignent des maisons peinturesprtentieuses, balcons ambitieux.

    LHtel-de-Ville tale avec orgueil son pignon pointu et son badigeoncouleur beurre frais entre deux maisons dun gris sombre, que lon ma

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  • Le chasseur dours Chapitre II

    dit appartenir deux notabilits du pays.La rue est pourvue de trottoirs boueux et de candlabres en simili-

    bronze dans lesquels brle un simili-gaz obtenu laide du ptrole.Lglise menace ruine : elle tait jadis assez belle, mais lon y voit

    maintenant les traces du temps.Htons-nous de le dire, ce bourg, si humble et si petit en apparence,

    a son histoire que lui envieraient certaines grandes villes o rgnent lecharbon et la houille, o lon nentend que le bruit des roues et des ma-chines.

    Le chteau de Charbonnires, qui domine Aiguebelle, fut le berceaude la maison de Savoie, de cette illustre famille dont le roi philosophe,Louis XVIII, faisait un jour lloge en disant quun prince de la maison deBourbon ne pouvait pouser sans msalliance quune princesse de Savoie.

    Or, les premiers comtes de Savoie entourrent Aiguebelle de murset de fosss. Sous le rgne dAdlade de Suze, veuve du comte Oddon,on y battait une monnaie que les numismates dsignent sous le nom desalidimaurianenses.

    En 1536, Franois I rduisit en cendres les deux tiers dAiguebelledont le conntable de Lesdignires sempara de nouveau en 1597. Troisans plus tard, le marchal de Crqui sen rendit matre, et les Espagnolsle prirent dassaut en 1742.

    La petite ville dont nous parlons subit donc quatre siges en rgle, etlon doit avouer que lappellation de ville dont se servent ses habitantsparat moins ridicule quand on connat cette histoire.

    Hilarion Bruno me racontait cela, pendant que nous volions sur lesailes rapides de la vapeur. Veuille le lecteur me pardonner cette imagesuranne, que je mempresse dattribuer mon oncle, lequel aectait deparler le beau langage du sicle.

    Javais revtu, pour cette circonstance solennelle ma premirechasse, un costume en peau de diable qui me donnait, avec mon bonnetdhiglander, la tournure dun boy anglais en qute dun remde contre lespleen. Mon oncle riait en regardant cet excentrique accoutrement et medcochait de temps autre les plus mordantes pigrammes.

    Il fumait sa pipe, tout en causant avec moi et buvait de temps autreune gorge de vin blanc, son apritif ordinaire.

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  • Le chasseur dours Chapitre II

    Vers huit heures nous arrivmes Aiguebelle, et la vue de cette villeproduisit sur moi limpression que jexprime en termes un peu amers aucommencement de ce rcit.

    Notre premire visite fut pour un ami, qui nous orit un djeu-ner des plus substantiels. Une heure aprs, nous tions en chasse dansles vignobles de Durnires. Mon oncle avait t lev dans ce pays etle connaissait parfaitement. Un Aiguebellain nous avait accompagn etnous avait mis sur la piste dune famille de renards qui causait chaquejour de grands dommages aux fermes des environs.

    La chasse prsenta plusieurs incidents quil serait trop long et peut-tre oiseux de rapporter ici. Vers quatre heures du soir, nous avions forcla retraite du renard que mon oncle emportait dans son carnier avec unevisible satisfaction.

    Pour moi, jtaisHonteux comme un renard quune poule aurait pris !cest, ou jamais, le cas de le dire.Javais charg cinq ou six fois mon fusil, mais je revenais les mains

    vides et je contemplais avec envie la carnassire gone de mon oncleHilarion.

    Eh bien ! mon garon, me dit-il, te voil tout penaud !Je poussais un soupir. Eh ! eh ! continua-t-il en ricanant, tu voudrais peut-tre bien tre

    ma place, hein ?Nouveau soupir du neveu, nouveau ricanement de loncle. Eh ! eh ! eh ! tout le monde ne peut pas tre heureux. Cest ce queme

    disait un fakir, Lahore, en 1835. Il ajoutait que lesprance, elle-mme,tait un leurre et ne servait qu rendre la vie plus amre !

    Thorie dangereuse, arma lAiguebellain.Par esprit de contradiction, mon oncle soutint le contraire, et la dis-

    cussion sengagea vivement entre ces deux messieurs.LAiguebellain ntait pas de force, Hilarion Bruno le roula propre-

    ment.Quand nous fmes arrivs au pont de Randens, qui spare dAigue-

    belle le hameau de ce nom, mon oncle se retourna vers moi et me dit :

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  • Le chasseur dours Chapitre II

    Garon ! tiens, voici le renard. Marche en avant, je te permets de tednoncer comme meurtrier de cet animal dont les Hindous ont le carac-tre, et les Chinois la couleur, mais une condition

    Mon cur se prit palpiter, et je hasardai timidement cette question : quelle condition, mon oncle ?Un sourire eeura ses lvres et il me rpondit : Tu porteras jusqu la maison tout ce quon te remettra. Bien, mon oncle !Et je partis dun pas allgre, la casquette sur loreille, le poing sur

    la hanche, et siotant, de lair le plus dgag du monde, une chanson boire.

    Javais pass le renard en bandoulire autour de mon corps, et je por-tais mon fusil sur lpaule.

    Allez ! jtais bien le plus er et le plus joyeux enfant de la terre.Pour ne rien perdre de lhonneur que jallais tirer demachasse ( iro-

    nie !) je rsolus de traverser Aiguebelle dans toute sa longueur, et je sun dtour qui me conduisit au Paradis des Chvres. L, je pris la gran-droute, je passai sous larc-de-triomphe lev au roi Charles-Flix, et jeme trouvai lentre de la ville.

    Ds que lon maperut, ce fut un vritable remue-mnage. Les com-mres sassemblrent sur le pas de leurs portes, les piciers et les cafe-tiers, tout le commerce dAiguebelle sortirent de leurs boutiques, et toutce monde se mit madmirer, bouche bante, tandis que les gamins mecouraient aprs avec des cris de joie si perants que jen fus abasourdi.

    Bientt je vis diverses femmes rentrer prcipitamment dans leursmai-sons. Orgueilleux ! jattribuais cette brusque retraite leroi inspir parle cadavre de mon renard, dont le museau sanglant pendait quelquescentimtres de ma ceinture.

    Je ne tardai pas tre dtromp.Les mnagres sortirent lune aprs lautre. Lune mapporta douze

    ufs dont jemplis ma casquette ; lautre vint me donner une paire depoulets que je pendis mon bras ; la troisime me chargea dune botte decarotte, la quatrime dun lapin vivant

    Je ntais pas arriv au milieu de la rue, que je succombai sous le far-deau.

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  • Le chasseur dours Chapitre II

    Un jeune homme se chargea de la moiti de ces prsents, et je puscontinuer ma route.

    Il et fallu me voir, ainsi transform en garde-manger ambulant avecmes poules, mes ufs, mes carottes et surtout monrenard, que je navaispoint voulu donner mon complaisant compagnon.

    Je croyais dabord que lon voulait me mystier, mais les sourires gra-cieux, les compliments brle-pourpoint et les caressantes atteries quetout le monde madressait me tournrent la tte.

    Lorsque mon oncle rentra, cinq minutes aprs moi, il riait gorgedploye.

    Eh bien, petit, me dit-il, trouves-tu que ce soit agrable de porterun renard ?

    Certes, mon oncle !Je lui montrai mon butin.Quallons-nous faire de tout cela ? demandai-je. La belle question ! ce sont des cadeaux quon te fait, petiot ; une

    prime semblable est donne tous ceux qui tuent le renard. Cest unusage tabli depuis des sicles et dont on trouve le premier exemple dansla Chronique du chanoine Agrald, en 1221. Cette chronique, crite surparchemin

    Je me htai de fuir, craignant une nouvelle averse drudition.

    n

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  • CHAPITRE III

    Le moi est hassable , a dit Pascal.Aussi je dois cesser de parler autant de ma chtive personne. Jai, du

    reste, entrepris un portrait, il faut que je lachve. Je laisse l mon oncle,son neveu et le renard susdit, pour faire poser mon modle et commencermon esquisse.

    Il est inutile, je pense, de donner ici quelques dtails sur le quadrupdeauquel nous avons aaire.

    Lours des Alpes est le mme que celui des Pyrnes et des Asturies,selon le dire de la plupart des naturalistes. Cependant Cuvier prtend lecontraire. Cet animal se tient dans lesmontagnes boises ou dans les amasde rochers situs vers les cimes de certains escarpements des Alpes ; il vitde racines, de fruits acides, comme lpine-vinette, la ronce et la buxerole.Cest un grand dvastateur de ruches et de fourmilires : il mange le mieldes unes et les habitantes des autres. Sa vie est solitaire.

    Il nattaque point lhomme, si ce nest quand il est provoqu.

    13

  • Le chasseur dours Chapitre III

    Voil, mes chers lecteurs, tout ce que mes faibles connaissances enhistoire naturelle me permettent de vous dire sur le sauvage souverain denos montagnes.

    Ce nest point chose facile que de chasser lours.On ne le tue point avec une balle, comme le premier livre venu. Nos

    chasseurs chargent leurs fusils avec des chevrotines, dont la forme estcelle des dents dun rateau.

    Ces sortes de balles sont de forme conique, pointues une extrmit,arrondies lautre ; elles ne sont point de plomb, mais de fer. Les bourressont des rondelles dcoupes dans le feutre dun vieux chapeau.

    Ce fut La Chambre que je vis pour la premire fois un chasseurdours de profession. Puisque je dois vous instruire, tout en vous amusant,je puis bien vous dire en passant ce que cest que le bourg de La Chambre.

    Il est situ dans une valle riante et fertile, quelques kilomtres deSaint-Jean-de-Maurienne, et faisait autrefois partie du domaine tempo-rel des vques de ce diocse. Jadis cette valle inculte fut entirementdfriche par les Bndictins. La Chambre fut rige en comt en 1456,en marquisat en 1553, en faveur de la maison de Seyssel, qui fournit unnombre inni dillustrations : cardinaux, vques, marchaux de Savoie,lieutenants-gnraux du duch, chevaliers de lAnnonciade, etc.

    Ruin en partie sous le duc Charles I, le chteau de La Chambre futentirement dtruit par le roi Franois I de France, en 1536.

    Donc ce fut La Chambre, un jour de march, que je vis pour la pre-mire fois Franois Guigonnet, plus familirement appel Guignon, chas-seur dours de son tat. Il y a de cela deux ans. Si vous saviez ce que cestquun jour de march La Chambre !

    Il y avait des Villarmches en robes noires rayes de galons bleus ;chaque galon reprsente un sac de mille francs, faisant partie de la dot dela lle ; il y avait de grosses rougeaudes, aux bras nus, aux cheveux cr-pus, habitantes des Cuines ; il y avait des lles des Beauges, dont la beautorientale, la dmarche lente et grave dnoncent lorigine sarrazine. Quesais-je ? toutes les races de la Maurienne se confondaient ple-mle surle pr que ctoie le torrent de Bugeon.

    Franois Guigonnet allait et venait dun groupe lautre, lanant lun une grosse plaisanterie, serrant la main dun autre de faon

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  • Le chasseur dours Chapitre III

    la broyer, dcochant un compliment celle-ci, saluant avec respect lesvieillards, et veillant avec attention sur ses paroles : Chacun sait quunelangue de jeune homme est souvent beaucoup trop prompte.

    Il portait un pantalon et une veste de drap bleu, un gilet gris, une cra-vate noire ; ses pieds taient chausss dnormes souliers, autour desquelsla semelle faisait comme un petit trottoir. Une ceinture de laine rougesenroulait autour de son corps. Un feutre larges bords compltait cecostume et couvrait ses longs cheveux bruns.

    Connais-tu cet homme-l, me dit mon oncle Hilarion en me mon-trant Guigonnet.

    Pas le moins du monde ! rpondis-je avec indirence. Eh bien ! neveu, cest le chasseur dours. Nous allons faire connais-

    sance avec lui, et il te contera ses histoires.La prsentation fut bientt faite. Franois Guigonnet tait oblig de

    rester quelques jours La Chambre o le retenaient des aaires de famille.Il voulut bien passer avec moi tous les instants de loisir quil eut, et je fusbientt au courant de tous les dtails de sa vie.

    Ctait un bien beau caractre que celui de Franois Guigonnet : uncaractre grand, ouvert, gnreux. Il possdait le vrai courage, la rsolu-tion indomptable unie au sang-froid. Il y avait en lui une teinte de posiequi le distinguait des autres hommes de la montagne, et lentourait, mesyeux, dune vritable aurole.

    Chez un Savoyard, le courage est chose ordinaire : il voit trop souventla mort de prs, pour quil en ait peur Chez le montagnard, le couragese transforme en une sorte dexaltation. Il aime le danger parce que cestle danger ; parce que le danger est son lment. Il peut, chaque instant,rouler dabme en abme jusquau fond de ces prcipices, dont aucun ilhumain na jamais sond la profondeur ; il peut tre enseveli sous uneavalanche, tomber dans une fente de glacier, mourir cras par la chutedune roche, devenir la proie des loups ou des vautours !Qui sait ? Il peutavoir sourir les tourments pouvantables de la faim et de la soif !

    Rien ny fait.Il part dun pied leste, le front haut, lil xe, le fusil sur lpaule, et

    chantant pleine voix lantique chanson des montagnards :Amis, que la montagne est belle !

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  • Le chasseur dours Chapitre III

    Fuyons les bruits de la cit.Courons gament fter loin delleNotre pays, en libert !

    Le sac au dos, en main la pique,Pressons le pas.

    Faisons un eort nergique,Pressons le pas.

    e les dangers ne nous arrtent pas,Car les dangers pour nous nexistent pas !Ce courage, cette exaltation leur donnent une adresse nulle autre

    pareille. Ils luttent contre la montagne. Ils franchissent dun pas fermeles passages les plus diciles : ils mesurent, sans vertige, la profondeurdes goures : ils marchent sans crainte sur les bords des crevasses desglaciers, ils dent lorage et supportent avec indirence les rafales duvent. Oh ! ce sont des hommes forts !

    Et puis, sous leurs yeux se droule un paysage immense autant quevari. Ils ne voient jamais deux fois la nature sous le mme aspect. En hi-ver, cest un vaste manteau de neige sur lequel tombe un maigre rayon desoleil qui donne cette blancheur un chatoiement de perle ; alors, le cielest gris, terne, pommel de nuages ; alors, tout dort ! Mais au printemps, lemonde sveille ; la neige a fondu et remplit maintenant les larges combesdans lesquelles mugissent les torrents noirs ; le mont revt sa robe de ver-dure ; ce sont des prairies semes de eurs, des arbustes qui grimpent surdes roches, couvrant leur nudit dune guipure de feuillages ; des aman-diers couverts de eurs blanches, des sapins aux feuilles sombres qui cou-ronnent les sommets altiers. Vient lt, avec ses moissons jaunies, sesarbres chargs de fruits que le soleil mrit lentement. Enn lautomne, laplus belle des saisons, quoiquen disent les potes ! Le Savoyard comprendet admire toutes ces splendeurs. Il saisit toutes les beauts du paysage ; ilvoit chaque jour avec un nouveau plaisir le soleil se lever du ct dItalieet se coucher, l-bas, du ct de la France.

    Quand lastre disparat, le ciel sempourpre comme par leet dungigantesque incendie : tantt il se diapre de nuages dors, tantt il seaceen laissant derrire lui une trane lumineuse.

    Et le Savoyard contemple chaque jour un spectacle nouveau.

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  • Le chasseur dours Chapitre III

    Cette nature, si magniquement belle, il la peuple dune cration fan-tastique ; son imagination lui montre partout un monde surnaturel quilentoure et lenchante et qui, suivant lexpression dun de nos romanciersde haut parage, Octave Feuillet, lui fait sentir la vie avec une intensit quenous ignorons.

    Enn, il est libre, absolument libre. Il ne relve de personne que delui-mme. Il est souverain seigneur et matre de la montagne ; il va o ilveut, fait ce quil veut et ne reconnat de volont suprieure la sienneque celle de Dieu.

    Que lui importent les vaines rumeurs du monde ? Que lui fait cettefourmilire sur laquelle il jette un regard ddaigneux, fort de sa grandeuret de son indpendance ?

    Voil, cher lecteur, ce que me disait Franois Guigonnet ; sa voix taitmue ; son regard brillait dune loquence nave ; son langage vulgaire setransformait en un parler plein dune sauvage posie.

    Moi, je lcoutais sans oser linterrompre. Quand il meut dpeint lamontagne, il me raconta sa vie.

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  • CHAPITRE IV

    F G n en 1810, il avait donc aujourdhuicinquante-huit ans. Ctait un homme dune taille leve, dunemaigreur extrme ; son visage norait aucun trait saillant etnexprimait quune sorte de placidit mle une certaine nesse. Sescheveux taient longs, trs noirs, et le bas de son visage sencadrait dansune barbe assez bien soigne.

    Le pre de Franois tait un honnte cultivateur qui fut pris dans ladernire leve que t Napolon avant la premire Restauration et quimourut la guerre, laissant une femme jeune encore, mre de huit en-fants. Deux ou trois ans aprs, la veuve se remaria.

    Quand Franois eut quinze ans, il partit pour la France, muni dunebote de colporteur. En cinq ans, il amassa lnorme somme de millefrancs, revint au pays, acheta un bout de terrain et se maria. Quand samre mourut, il se trouvait la tte dune fortune de trois mille francs,reprsente par une chaumire, un jardinet et le lopin de terre, fruit de

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  • Le chasseur dours Chapitre IV

    ses conomies.Sa femme et ses deux enfants moururent ; Franois, alors g de qua-

    rante ans, fut pris par le dsespoir et voulut quitter le pays. Il vendit sonbien et partit. Au bout de six mois, il revenait malade de nostalgie. Alors ilse t chasseur dours et les pres jouissances de la chasse lui rent oublierses malheurs.

    Aujourdhui, il a rachet sa chaumire et vit compltement isol.Quand il lui prend fantaisie de chasser ou bien quand on lui signale

    un ours dans la montagne, il part de grand matin, muni de sa carabine etcherche la piste de la bte.

    Sa chasse dure quelquefois trois ou quatre jours.Quand il a trouv le repaire de lours, il va se poster avant laube

    quelque distance de ce repaire et attend. peine le soleil se lve-t-il der-rire les monts de Beaune quun sourd grognement lavertit du rveil desa future victime.

    Il se place derrire un tronc darbre ou un rocher et lorsque loursapparat lentre de sa tanire, il vise loreille ou le front, entre les deuxyeux, an de ne point gter la peau de son gibier.

    Quelquefois, il manque son coup. La bte alors se rue en avant : arrive deux pas du chasseur, elle slance furieuse vers son agresseur pourltouer dans ses bras.

    Si le chasseur manque de sang-froid, il est perdu. Guigonnet, lui, neseraie pas pour si peu. Il attend tranquillement, sans bouger de sa place ;puis, quand lours est bien en face de lui, quil ouvre sa gueule formidableorne de dents aigus, il ajuste et fait feu bout portant, dans cette gueulerouge, fumante Lours tombe et tout est dit.

    Un jour, il lui advint une singulire aventure. Il chassait le renard encompagnie de quelques amis. Or, pendant que ses compagnons latten-daient de lautre ct de la fort, Franois Guigonnet avait grimp sur lamontagne et guettait le renard au passage.

    Il se trouvait tout auprs dune coule, sorte de boyau taill pic dansle roc et par lequel on fait glisser du haut de la montagne en bas les fa-gots que lon coupe dans les forts et les broussailles. La coule tait bor-de darbres touus qui, runissant leurs hautes branches, formaient au-dessous delles une vote de verdure travers laquelle le soleil ne pourrait

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  • Le chasseur dours Chapitre IV

    pntrer.Quelques instants aprs, le renard passa au galop, suivi de plusieurs

    chiens qui aboyaient tue-tte. Lanimal sauta dun bond dans la coule,se faula travers la broussaille et disparut.

    Nobissant qu son instinct de chasseur, Guigonnet bondit Le piedlui glissa il tomba.

    Linstinct qui porte tout homme qui tombe chercher un point dap-pui, lui t jeter les mains en avant. Une de ses mains rencontra un objetvelu quil prit pour une branche moussue. Il tomba, entranant avec luice quoi il se retenait et, en quelques secondes, il fut arriv au bas de lacoule.

    Un pouvantable grognement retentit aussitt, et notre ami Franoisse trouva face face avec un ours de la plus belle taille.

    Or, son fusil ntait charg qu balle et la balle glisse sur la peau delours, comme une pierre sur la glace ! Il se trouvait en pleine fort, seulavec cet animal froce

    Ma foi ! je crois quil eut peur.Heureusement lours eut plus peur que lui. Il t un bond de ct et

    senfona sous le bois, en courant aussi vite que lui permettaient les obs-tacles sems sur sa route.

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  • CHAPITRE V

    G bien dautres histoires, un jour que je luiavais oert une bouteille de bon Saint-Julien, au caf G Maissil fallait tout dire, je serais bien embarrass, et peut-tre mesjeunes lecteurs me traiteraient-ils de blagueur ! ! !

    Cet ge est sans pitiJe prre men tenir lesquisse ci-dessus.

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  • Table des matires

    I 1II 8III 13IV 18V 21

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  • Une dition

    BIBEBOOKwww.bibebook.com

    Achev dimprimer en France le 11 juin 2015.