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éDITIONS LES CAHIERS c a h i s e l e i r n 3 r s i

Cahiers Leiris n°3

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Editions les Cahiers Dépot légal : mai 2012 ISBN : 978-2-9534806-2-7 16,5x24 cm 272 pages 35 euros

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éDITIONS LES cAHIERS

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Publié avec le concoursdu cRL de Franche-comtéet de la Région Franche-comté

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cahiers leirisnuméro trois

éditions les cahiers

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entretienMichel LEIRIS — Leiris, Miró, et le 45 rue Blomet

critique

William JEFFETT — Masson et Leiris De la peinture considérée comme une tauromachie

contexte

Jean-Max TOuBEAu — une conversation bien tempérée

Louis HINckER — Tombes des ancêtres

Marianne BERISSI — Leiris et Benjamin

critique

Lucile GOBET — Leiris main à plume

Marc VERLyNDE — une théologie du chromatique

Joseph MWANTuALI — Poésie et mystique du langage

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129

120

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143

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traductionEden VIANA MARTIN — A idade viril un livre-acteSébastien côTé, Eden VIANA MARTIN — Traduire L’Afrique fantôme, suivi de « Le langage de Leiris est un défi », entretien avec Florence Ferrari

contexteMatt RuSHTON — L’étrange cas du cochon de lait

critiquePhilippe SABOT — La possession et ses aspects littéraires

contexteSerge DEWEL — culte des zar en Abyssinie

théâtreGeneviève ROSSET-MERcIER — Michel Leiris à Gondar

s o rIam m e

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présentation

rue blomet

Dans ce troisième numéro des Cahiers Leiris, on retrouvera d’abord deux contributions de William Jeffett, commissaire d’exposition au Musée Salvador Dalí de St Petersburg en Floride. La première est un entretien avec Leiris, publié dans la revue Apollo, en 1988, inédit en français. Y sont évo-qués des souvenirs relatifs aux célèbres ateliers de Miró et de Masson, rue Blomet. Dans la seconde, « Masson et Leiris De la peinture considérée comme une tauromachie », Jeffett s’intéresse aux liens personnels et in-tellectuels qui unissaient le peintre et l’écrivain. Analysant au passage plusieurs œuvres du premier produites dans les années 1930, il explore la manière dont les deux hommes conce-vaient alors leur activité littéraire et artistique : une lutte contre soi-même. Évoquant leur implication respective dans Documents, il insiste également sur la symétrie entre la métaphore de la corrida comme confrontation avec le soi chez Masson et l’aventure autobiographique et anthropologique de Leiris.

une histoire de rencontres

Dans « Une conversation bien tempéré », Jean-Max Toubeau se re-mémore ses nombreuses conversations avec le cousin germain de son grand-père. Échelonnées sur une période de quinze ans, tenues avec une assiduité croissante, ses rencontres avec Leiris ont peu à peu fusionné dans sa mé-moire, s’organisant autour de deux sujets chers : l’écriture, la peinture.

D’une parenté à l’autre, d’une mé-moire à l’autre. Louis Hincker, dans « Tombes des ancêtres », interroge les tombes des grands-pères de Michel Leiris, situées au cimetière du Père-Lachaise. Il se concentre sur la signi-fication politique de ces sépultures inhabituelles pour l’époque, en ce qu’elles ne portent nul signe religieux, témoignage des enterrements civils de la fin du dix-neuvième siècle. Au final, Hincker en vient à se demander si le projet autobiographique de Leiris ne cherche pas, en partie, à ramener ses ancêtres à la vie.

Autre type de rencontres : celles qui, pour des raisons étranges, n’ont jamais vraiment eu lieu. Dans « Leiris et Benjamin », Marianne Berissi

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retrace le parcours de deux auteurs qui auraient dû se croiser ailleurs qu’au sein des cercles intellectuels parisiens de l’entre-deux-guerres : dans leurs propres textes. Pourtant, sur le plan de l’écriture, on constate une lacune. Comparant leur cheminement in-tellectuel, marquant les nombreux parallèles de leur démarche respec-tive, qu’elle fût ou non inspirée par le Collège de Sociologie, Berissi en conclut que les deux hommes se rejoi-gnent malgré tout dans leur condam-nation individuelle de certaines orien-tations du mouvement.

Quelques années plus tôt, c’est sur le concept même d’écriture que les surréalistes ont jeté l’anathème, repre-nant une idée chère aux avant-gardes européennes, dont Dada. Dans cette atmosphère intellectuelle teintée de cynisme, Leiris rompt avec le mouve-ment en 1929, habité par un sentiment de profonde ambivalence. Leiris pour ou contre le Surréalisme ? Héritier ou opposant ? Au lieu de prétendre détruire la littérature en entrant dans la ronde, il aurait davantage combattu, selon Lucile Gobet, dans « Leiris main à plume », sa théologie négative, en acceptant son statut d’écrivain, s’es-crimant plume à la main à défaut de fleuret.

sAcré et mystique

De quelle couleur est le Sacré ? Tel est le mystère que Leiris cherche à élu-

cider en puisant aux sources poétiques de l’image. Se drape-t-il de noir ? De blanc ? Plutôt de rouge ? La théologie chromatique apparaît à Marc Verlynde comme le cœur de tout projet d’écri-ture de soi, la palette d’où proviennent les nuances et les chatoiements du style. Selon lui, dans « Une théolo-gie du chromatique », le chromatique est cette coïncidence qui, dépassant les clivages par lesquels le sacré est initiale-ment envisagé, dénonce une défaillance théologique.

Si la conception leirisienne de l’art littéraire a progressivement évolué avec le temps, il n’en va pas de même pour son code d’ écriture ou sa règle du jeu, restés invariants. C’est ce qu’avance Joseph Mwantuali dans « Poésie et mystique du langage ». Fibrilles contien-drait une ébauche des lois de cette règle que l’autobiographe cherchera toute sa vie, en vain. Mais, surtout, c’est là qu’il donnerait à sa poétique un nom aux échos sacrés : la mys-tique du langage. Mwantuali illustre le « programme » de celle-ci en analysant le poème « Avare », que Leiris semble avoir écrit à cet effet.

le brésil

à défaut d’y avoir vécu quelque temps comme Blaise Cendrars et Claude Lévi-Strauss, Leiris jouit de-puis peu d’une attention posthume au Brésil, notamment grâce à la traduc-tion de ses œuvres. Dans « A idade viril

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Un livre-acte », Eden Viana Martin se penche sur la traduction brésilienne de L’Âge d’homme, publiée en 2003 par Cosac & Naify, à São Paulo. Analysant certains choix stylistiques du traduc-teur, elle souligne surtout la valeur ajoutée des jeux intersémiotiques de cet objet-livre, où texte et image se fondent en un tout quasi insécable. En montrant ce qu’il dit, contrairement à l’édition de poche française, A idade viril se présente comme un livre-acte porteur d’un surplus de sens.

l’Afrique

Dans « Traduire L’Afrique fantôme », Sébastien Côté se joint à Eden Viana Martin pour aborder la traduction du carnet de route dévoyé de la Mission Dakar-Djibouti par ce même Cosac & Naify. œuvre souvent décrite comme monstrueuse, A África fantasma s’inscrit dans une longue série de livres exceptionnellement soignés. Un entretien avec Florencia Ferrari, anthropologue et directrice de collec-tion chez l’éditeur, éclaire par la suite le défi que représente le langage de Leiris.

Retracer le destin improbable de l’un des nombreux objets recueillis au cours de la Mission Dakar-Djibouti. C’est ce que fait Matt Rushton, dans « L’étrange cas du cochon de lait ». Il y étudie les rapports instables tissés entre le texte et l’image au fil des éditions de L’Afrique fantôme, avant de reconsti-tuer le parcours d’une photo illustrant

l’épisode le plus connu du livre : le vol des kono. Il existe au moins deux versions de cette photo, l’une prise in situ avec les moyens du bord, l’autre en studio dans des conditions idéales d’éclairage. Ces deux « cochons de lait », en passant du statut d’artefact ethnologique à celui d’œuvre d’art, racontent-ils la même histoire ?

Philippe Sabot propose de son côté une autre histoire, invitation au voyage, sur les traces de Leiris, à la découverte de l’Afrique, à Gondar. Dans « La possession et ses aspects lit-téraires », il questionne le déplacement de l’anthropologie dans le domaine de l’écriture de soi, qui fournit à l’œuvre de Leiris toute son unité paradoxale.

Parce que Serge Dewel a séjourné en Éthiopie pour observer les rituels inscrits en marge de l’Église, il in-vite à se plonger dans le « Culte des zar en Abyssinie ». La cérémonie de possession occupe dans celui-ci une place essentielle. Depuis les études de Leiris, ce fait est bien documenté par de nombreuses enquêtes de terrain, lesquelles considèrent la mythologie syncrétique des zar comme une fusion de cultes antérieurs au christianisme et de la doctrine éthiopienne orthodoxe.

Enfin, dans une pièce de théâtre signée Geneviève Rosset-Mercier, Michel Leiris à Gondar, apparaîtront et s’animeront, transformés en per-sonnages, ceux et celles qui rendent si vivante la seconde partie de L’Afrique fantôme. n sébastien côté

sébastien côté

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La ligne à écrire, à la fois horizon que je dois fixer,

corde raide sur laquelle il me faudra marcher

et câble à quoi m’agripper pour ne pas me noyer.

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est en 1921, par l’entremisede Max Jacob, que Joan Miró

fit la connaissance d’André Masson1. à l’occasion de cette rencontre, les deux peintres s’aperçurent qu’ils venaient tout juste de louer des studios adjacents dans le même bâtiment, sis au 45 rue Blomet, dans le XVème arrondissement de Paris. Miró sous-louait le sien d’un ami et compatriote, Pablo Gargallo. L’année suivante, Michel Leiris se mit à fréquenter régulièrement le studio, ce qui devait aboutir à la première des nombreuses collaborations avec Masson : Simulacre. Plusieurs autres poètes devinrent des habitués du célèbre studio : Desnos, Artaud, Limbour... En 1925, Masson peignit le portrait de Leiris2 et de Breton3, ce dernier s’étant joint au groupe grâce à Limbour4. Au cours des années 1920, Miró et Masson explorèrent d’abord les nouveaux territoires de l’imaginaire défrichés par le mouvement surréaliste, préoccupations au cœur de leur parcours à venir. Par la suite, Michel Leiris évoqua souvent, par écrit, Miró et Masson. Une large part de L’Âge d’homme consiste en une

autobiographie relatant sans relâche des souvenirs postérieurs à 1922. Par ailleurs, Miró et Masson collaborèrent à plusieurs reprises avec Leiris, illustrant ses recueils de poèmes et essais.

La rencontre avec Leiris eut lieu le 19 mai 1987 à son appartement du Quai des Grands-Augustins. à cette occasion, Carla Bannel-Mayan eut la gentillesse de m’aider à transcrire la conversation. On nous fit d’abord passer au salon, où nous patientâmes quelques minutes. Accrochés aux murs, il y avait de nombreux dessins et gouaches d’artistes tels que Francis Bacon et Fernand Léger. Bien que Leiris souffrît d’un léger zézaiement redevable à son asthme, ce fut néanmoins avec une grande clarté et sa précision habituelle qu’il s’exprima. S’il ne se priva pas d’afficher son sens de l’humour, cet aspect se révèle particulièrement difficile à rendre par écrit. Ses références à Miró et à ses amitiés avec les surréalistes étaient, par le ton employé, ironiques et drôles. Il me semblait évident que les épisodes racontés ne devaient pas être pris tout à fait au sérieux. n w. jeffett5

leiris, miró etle 45 rue blomet

michel leiris ★ entretien avec william jeffett

c'

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Vous AVez rencontré André mAsson pour

lA première fois en 1922. est-ce Au même

moment que Vous AVez fAit lA connAis-

sAnce de JoAn miró ?

J’ai connu André Masson et Joan Miró en même temps, en 1922. à cette époque ni l’un ni l’autre n’étaient surréalistes. Ils étaient simplement voisins. Quand j’ai rencontré Miró, il travaillait au tableau La Ferme6. Mais j’étais beaucoup plus lié à Masson qu’à lui. Il avait lu moins de choses que Masson.

Vous AVez Visité l’Atelier de lA rue blomet

lorsque mAsson trAVAillAit à Votre por-

trAit. AVez-Vous écrit Simulacre dAns ce

même lieu ?

Simulacre fut rédigé au 45, rue Blomet. Nous avons composé Simulacre simultanément pour bien montrer que Masson n’était pas en position d’infériorité, comme l’est souvent un illustrateur par rapport à l’auteur. Nous avons signé ensemble.

Vous souVenez-Vous exActement quAnd

miró A commencé à Affirmer qu’il VoulAit

« AssAssiner lA peinture »7 ?

C’est au moment où il est devenu surréaliste que Miró a déclaré cela.

Je m’intéresse pArticulièrement Aux ob-

Jets et Aux sculptures de miró. Je pense

que, dAns son cAs, il y A touJours un

combAt, une lutte entre lA peinture et

lA sculpture.

On ne peut pas parler de combat. Cette idée n’est pas juste. Je dirais plutôt qu’il s’est servi tantôt de l’une, tantôt de l’autre.

peut-on VrAiment considérer miró comme

un surréAliste, en tenAnt compte de son

tempérAment, de son esprit ?

Miró, à mon sens, n’a pas été surréa-liste. Ses tableaux sont extraordinaires, mais je le considère plutôt comme un plasticien. Mais, historiquement,

William Jeffett est commissaire d’exposition au Musée Salvador Dalí de St Petersburg, en Floride. Spécialiste de Miró, Dalí, Masson et du Surréalisme, il s’intéresse également à l’Art contemporain et a organisé de nombreuses expositions, notamment autour de Jaume Plensa, Jordi colomer, Mabel Palacín et Joan Fontcuberta.

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il l’a bel et bien été. Et en cela jamais désavoué par Breton.

André breton A Visité lA rue blomet en

1924. quelques Jours Après son pAssAge,

il A Acheté le chaSSeur. quelles étAient

les relAtions entre miró et breton8 ?

Breton a acheté Le Chasseur en 1924. Leurs relations étaient très bonnes. Miró avait un caractère très facile.

et pAr qui breton A-t-il Acquis le tA-

bleAu ?

Par Jacques Viot9. Avant de devenir cinéaste, celui-ci s’est occupé d’Ernst, d’Arp et de Miró. C’est lui qui a servi d’intermédiaire. Le tableau fut exposé à la galerie Pierre Loeb, en 1925.

en 1930, deux Amis de miró ont essAyé de

le pendre. mAn rAy ferA son portrAit,

AVec lA corde. sAVez-Vous qui sont ces

deux poètes, et pourquoi ils ont eu cette

idée10 ?

C’est Patrick Waldberg, historien et poète, qui m’a raconté cette his-toire. Max Ernst était l’un des deux poètes en question. Ils ont menacé Miró : « On va te pendre si tu ne blasphèmes pas contre Dieu ! ». Miró a eu très peur, mais n’a pas succombé

au blasphème... Ils ont fini par le lais-ser tranquille. Il s’agissait d’une pure mystification.

dAns documentS11, Vous AVez écrit que lA

peinture de miró reflète un « VéritAble

Vide », dAns le sens positif de ce mot. quel

sens Attribuez-Vous à ce « Vide » dAns

l’ŒuVre de miró ? le Vide fut-il un élé-

ment importAnt pour lui, sA Vie durAnt12 ?

Ce qui m’a poussé à parler de vide, c’est le très peu d’éléments que contenaient les toiles de Miró à cette époque-là.

Justement, à cette époque, celle de

documentS, fréquentiez-Vous miró ?

On se voyait de temps en temps. C’est par son entremise que nous avons été un certain nombre à connaître Dalí. Le Sang est plus doux que le miel13 est le premier tableau que j’ai vu de lui. Après ses prises de po-sition franquistes, Miró et lui se sont séparés, fâchés. Jusque-là, Miró était le propagandiste de Dalí. C’est lui qui l’a fait connaître à Breton. à sa place, d’autre artistes auraient été jaloux et n’auraient pas fait de publicité pour un compatriote.

pouVez-Vous me pArler du rApport

entre bAtAille et miró ? et entre miró

et giAcometti14 ?

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Il n’existait pas de rapports réels entre Miró et Bataille. Miró n’était pas lié, non plus, à Giacometti. Ils se sont seulement rencontrés.

miró A beAucoup Aimé le JAzz et lA dAnse.

étAit-ce égAlement le cAs de breton ?

Breton avait horreur de la musique.

il y A beAucoup d’imAges de sexuAlité dAns

les tAbleAux de miró. étAit-il intéressé

pAr lA notion d’érotisme ?

Je ne pense pas que Miró se soit beaucoup intéressé à l’érotisme. Pour lui, la sexualité était quelque chose de naturel. En soi, l’idée ne l’intéressait pas. Il a eu la vie sentimentale la plus paisible possible. Il adorait Pilar, et il est resté avec elle jusqu’à la fin.

Vous-AVez écrit beAucoup de choses

sur miró, marronS SculptéS pour miró

pAr exemple. inVersement, miró A illus-

tré certAins de Vos liVres, BagatelleS

végétaleS15 et FiSSureS, notAmment. étAit-

ce lui qui cherchAit cette collAborAtion

AVec les poètes ?

Ce ne sont pas les poèmes de Fissures qui sont illustrés par Miró. Ce sont eux qui m’ont été demandés par la Galerie Maeght pour illustrer les gravures de Miró. Il y avait Miró d’abord et moi qui ai fait quelque chose ensuite.

quAnd Vous AVez rédigé marronS SculptéS

pour miró, AViez-Vous en tête l’imAge de

ses sculptures en bronze ?

Pour Marrons sculptés..., je n’avais pas d’idée particulière. Le titre sem-blait convenir à Miró, qui adorait les choses populaires. Il possédait des sif-flets en terre cuite des Îles Baléares qui représentaient de petits personnages.

miró AimAit beAucoup lA boxe. en étAit-il

de même pour lA tAuromAchie ?

Miró a boxé avec Hemingway. Si l’on fait abstraction de l’adversaire, il était un très bon théoricien. Mais pas un bon praticien, selon Hemingway.

En ce qui concerne la tauromachie, Miró n’était pas comme Picasso qui, lui, était un homme du Sud. Les taureaux n’étaient pas vraiment son affaire.

pensez-Vous que miró A écrit les « Jeux

poétiques » sous l’influence de Votre

gloSSaire j’y Serre meS gloSeS ?

La pratique surréaliste des jeux de mots a débuté avec Marcel Duchamp. Miró, ensuite, s’est inscrit dans cette tradition. Il n’existait pas d’amitié particulière entre les deux. Miró était un homme d’une grande politesse. Duchamp, quant à lui, n’était pas particulièrement cordial.

leiris, miró et le 45 rue blomet

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pourquoi dAniel-henry KAhnweiler16 n’A-

t-il pAs choisi miró pour exposer à lA

gAlerie simon ? quelle étAit son opinion

sur miró ? lA sculpture ? et giAcometti ?

Kahnweiler n’aimait pas la pein-ture de Miró, c’est tout. Pas du tout. Il n’aimait pas non plus la sculpture ; pour la même raison il n’a donc pas choisi Giacometti.

en 1947, Vous AVez éVoqué, pAr écrit, le

« cArActère enfAntin, folKloristique du

merVeilleux chez miró. rien de sophisti-

qué chez lui comme chez tAnt d’Autres

surréAlistes »17. quAnd AVez-Vous com-

mencé, en compAgnie d’Autres Amis de

ses poètes, à Vous référer à lui comme

à un Artiste nAïf ?

à l’époque de la rue Blomet, on ne le considérait pas encore comme un artiste naïf. On avait plutôt ten-dance à se moquer de lui. Cette mys-tification de la pendaison n’aurait pu se faire avec personne d’autre. Miró a réellement cru qu’on allait le pendre ! Sa qualité maîtresse était la fraîcheur. Il ne parlait pour ainsi dire jamais. Parfois, il évoquait un peu ses projets, mais il en restait là. « Je voudrais faire des arlequins à têtes de grenouilles » disait Miró18. Toujours très soigné, il avait une certaine éloquence. n traduction : s. côté

michel leiris