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Cécile et André : un amour intense Petits moments de bonheur, entre l’installation de Pierre et Marie DUCHE à Reims (donc la vente de leur résidence secondaire, le château de La Carte près de Tours), les travaux d’aménagement de la Grande maison de Vrilly, et les incessants déplacements d’André, à Paris ou à Roubaix. Quand ce ne sont pas des week-ends de chasse. Septembre 1909 : Cécile à André : « Toi qui es ce que j’ai de plus précieux au monde, tu as peut-être besoin de moi en ce moment, et tu es tout seul ! Mon pauvre pauvre petit chéri. Septembre 1909 : « Chéri mon petit chéri je t’aime. Je ne sais pas pourquoi ce soir j’ai peur que tu n’ailles pas bien. Tu n’es pas malade, dis ? » Cécile à André, Mai 1910 : « Ne crois pas que j’ai trop à faire, quand je vais bien, ce qui est mon cas habituel. Je peux fort bien m’occuper de ma maison. Il ne manquerait plus que ca ! Secondée comme je le suis avec tous ces domestiques qu’il me faille encore une intendante ! Je suis une petite femme

Cécile et André : un amour intense

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Cécile et André : un amour intense

Petits moments de bonheur, entre l’installation de Pierre et Marie DUCHE à Reims (donc la vente de

leur résidence secondaire, le château de La Carte près de Tours), les travaux d’aménagement de la

Grande maison de Vrilly, et les incessants déplacements d’André, à Paris ou à Roubaix. Quand ce ne

sont pas des week-ends de chasse.

Septembre 1909 : Cécile à André : « Toi qui es ce que j’ai de plus précieux au monde, tu as peut-être

besoin de moi en ce moment, et tu es tout seul ! Mon pauvre pauvre petit chéri.

Septembre 1909 : « Chéri mon petit chéri je t’aime. Je ne sais pas pourquoi ce soir j’ai peur que tu

n’ailles pas bien. Tu n’es pas malade, dis ? »

Cécile à André, Mai 1910 : « Ne crois pas que j’ai trop à faire, quand je vais bien, ce qui est mon cas

habituel. Je peux fort bien m’occuper de ma maison. Il ne manquerait plus que ca ! Secondée comme

je le suis avec tous ces domestiques qu’il me faille encore une intendante ! Je suis une petite femme

de luxe mais tout de meme pas à ce point la ! Mon petit chéri, il faut que tu m’aimes bien pour avoir

des idées pareilles ! Rien ne m’est plus doux que ton amour et moi je t’aime autant qu’il est possible.

»

Janvier 1911 : « Mon petit aimé….[……] J’espère que tu n’es pas trop fatigué par ton voyage [….] Je

t’aime, tu sais combien n’est-ce pas mon chéri, et je t’embrasse longuement sur tes lèvres aimées. »

Janvier 1911 : « ..C’est un soulagement pour moi lorsque tu n’es plus à Roubaix ! Je sais alors que tu

ne t’ennuies pas, il me semble que tu es plus près de moi….[….] Je t’envoie le plus amoureux des

baisers. »

Mai 1912 : « Je me demande mon aimé si tu as dormi cette nuit en arrivant à Roubaix et si tu es un

peu reposé. Je t’aime mon bon petit chéri et je t’embrasse passionnément avec tout l’amour de mon

être. Ta petite femme. »

Nov 1912 « … Mme X n’avait pas encore vu Vrilly depuis les agrandissements et a beaucoup

admiré..[…]

J’espère mon petit aimé que tu ne seras pas trop fourbu en arrivant à Paris. J’attends ton retour avec

une grande impatience et je te donne en attendant les baisers les plus amoureux que ta petite

femme puisse te donner. »

Aout 1913 : « C’est si bon de voir le jour de ton arrivée se rapprocher. IL n’y a qu’une chose que je

n’approuve pas dans tes projets, c’est ton voyage de nuit. J’ai peur que ce soit une trop grande

fatigue et malgré le bonheur que j’aurai à t’avoir 12 heures plus tôt, je ne veux pas que tu fasses une

chose mauvaise pour ta santé… »

25 juillet 1914 : « En tout cas, c’est de Guillaume que dépend la paix. S’il laisse l’Autriche marcher

contre la serbie, c’est évidemment la guerre générale. C’est une bien grosse partie à jouer pour

l’Allemagne qui a plus à y perdre qu’à y gagner… »

28 juillet 1914 : « En somme, c’est de l’Allemagne que tout dépend. Je partirai à Roubaix ce soir que

s’il n’y a aucun télégramme inquiétant. »

28 juillet 1914 : « Ma chérie aimée, décidément, je pars à Roubaix. IL n’y a rien de neuf.. […] Je

t’aime, je t’aime. Un long baiser d’amour.»

29 juillet 1914 : « Ma chérie aîmée, au moment de partir hier soir, les nouvelles de la déclaration de

guerre officielle de l’Autriche à la serbie sont arrivées, je n’ai pas jugé prudent d’aller aussi loin de

Reims…. »

Cécile est à Aix les Bains avec les enfants. André lui écrit le 29 juillet 1914 suite : « Dans l’incertitude,

j’aime mieux t’envoyer de l’argent… Je t’envoie donc un chèque de cinq mille francs… »

Reims 31 juillet : « Ma chérie aimée, l’ordre de mobilisation générale n’est pas lancé, on l’attend d’un

instant à l’autre. On a déjà réquisitionné les chevaux, on est venu chercher ceux de la ferme a 4h du

matin…. » + André cache les bijoux et les œuvres d’art au coffre, et demande aux Muller de dormir

dans la grande maison.

Reims 31 juillet : - un espoir de paix ! – « Ma chérie aimée, cet après-midi, c’est rassurant, nous ne

partons pas au moins pour le moment. L’Allemagne avait donné l’ordre de mobilisation hier mais l’a

décommandé presque aussitôt. Notre mobilisation a été arrêtée et seuls les régiments d’active

restent mobilisés. Il semble qu’il y ait eu une peur intense en allemagne et ils semblent vouloir

reculer»

André, Reims le 1er aout : « Comme les affaires sont complètement arrêtées, je vais aller a La Fere

prendre connaissance de mon ordre de mobilisation. J’y serai jusqu’à ce qu’il y ait une solution à la

crise.. »

André, Le Fère, 1er aout 1914 : « Ma Chérie aimée, je suis bien arrivé en auto….[..] Je commande la

27ème section de munition d’infanterie […] Ce n’est pas un commandement dangereux….. Je serai

toujours à plusieurs kilomètres de la ligne … »

Cécile, Les Corbières près d’Aix les Bains, le 1er août 1914 : « J’ai bien réfléchi, nous attendons que la

mobilisation générale soit décidée. Dans ce cas, nous partirons tout de suite pour Fontainebleau, où

nous louerons une maison près de la forêt.[…] […]

Une fois les enfants en sûreté, rien ne nous empêchera au besoin d’aller à Paris sans eux…[..] Mon

désir à moi était de les laisser tous ici et moi de partir toute seule tout de suite pour te revoir....

IL fait très chaud ici….Que fais tu en ce moment ? Où es tu et où seras tu demain. Tout cela

m’angoisse mais je serais très calme, je te l’assure et tu peux avoir toute confiance dans ta petite

femme… »

André, La fère, 3 aout 1914 : « Je pars cet après-midi m’installer dans mon cantonnement, Liez où je

coucherai à l’avenir. » + des interrogations sur où et comment faire parvenir le courrier plus des

détails pour montrer à Cécile qu’il ne manque de rien…+ « .Je t’aime, je t’aime, je t’embrasse avec

amour, avec tendresse, je ferme les yeux en y pensant et c’est délicieux de sentir à quel point je

t’aime. »

André, liez le 9 août 1914 : « J’ai eu 360 chevaux [pour équiper sa section]. J’ai du faire barrer les

routes pour arrêter les automobiles…….. […] J’ai tous les jours à donner les ordres pour le lendemain

pour les gardes, écuries, police, corvées, etc.. »

André, Liez le 11 août 1914 : « Chère petite femme chérie, quelle bonne surprise, j’ai reçu 7 lettres

dont 4 de toi. J’ai reçu ces lettres au moment ou je ramenais de l’arsenal mes 34 voitures avec mes 8

millions de cartouches… »

André, le 11 août : « J’ai reçu une proclamation à lire aux troupes. Je m’acquitterai de ce devoir cet

après-midi. J’ai été faire une petite prière pour vous tous dans l’église d’ici qui est assez jolie. Je ne

sais s’il y aura une messe aujourd’hui, le curé est peut-être parti. Je t’aime ma chérie, je t’aime…. »

Cécile, le 6 août 1914 : « La victoire des belges a été accueillie avec enthousiasme, il est vrai que

c’est beau ce petit peuple qui bat ces colosses arrogants. Les nouvelles sont vraiment bonnes mais

nous dit-on l’exacte vérité (c’est une idée de moi que je ne dis à personne).. ».

André, le 16 août 1914 : « Aujourd’hui, c’était dimanche, j’ai été à la messe et j’ai prié pour ma chère

femme, et mes petits et puis pour la France… ».

André le 18 et 19 aout 1914 : « Quant a la guerre, tu connais trop mes sentiments pour que je te les

dise, et tu sais tout mon regret de ne pas commander une batterie, je sais aussi que tu me

pardonneras ces sentiments qui ne sont pas un manque d’amour,

mais les sentiments qu’un homme doit avoir quand il défend son foyer, les libertés, l’avenir de ses

enfants et puis nous sommes dans la main de Dieu, il ne voudra peut-être pas séparer ce qu’il a si

étroitement uni… »

André le 20 août : « IL fait un temps superbe, et cette vie, si tu étais là, te plairait beaucoup ».

André le 22 août : « Nous avons encore fait une étape considérable ce matin, en deux jours 70

kilomètres….Pendant la route, un aéroplane allemand est passé au dessus de nous… »

Cécile, le 20 aout 1914 : «Cette grande bataille imminente en Belgique dont on parle toujours me fait

trembler. Aujourd’hui, on dit que les allemands passent la meuse en masse…..[…] Mon aimé chéri, je

t’aime, comme je voudrais que ce soit fini et que tu sois revenu auprès de moi. »

Cécile, Aix, le 21 août : « Mon petit chéri que j’aime, en datant cette lettre je pense que sans la

guerre, nous serions en train de rentrer et d’ici peu d’heures je serais dans tes bras à Vrilly, chez

nous. Il ne faut pas que je pense à cela, je dois avoir du courage mais parfois je me sens déprimée,

c’est mal ! »

Cécile, le 25 aout : « Mon aimé chéri, voici un mois que nous sommes à Aix, un mois et un jour que

j’ai eu ton baiser dans le creux de ma main lorsque le train partait… et dans combien de temps te

reverrai-je ? Enfin, cette épreuve je la supporte avec patience et résignation et ce n’est rien si nous

devons nous retrouver un jour. Cette grande bataille engagée en Belgique me pénètre d’angoisse et

d’horreur….Je sais bien que victorieux ou vaincus, nos pertes en homme seront les mêmes »

Cécile, Aix le 25 aout : « J’ai des remords de ma lettre envoyée cet après-midi : elle n’était pas

..rechoupillante ! Je devrais soutenir ton courage et j’ai la faiblesse de te demander de soutenir le

mien. C’est mal, mais j’ai tant l’habitude d’aller à toi quand j’ai de la peine, c’est si bon de te sentir

fort auprès de moi… »

Le 31 aout, Cécile quitte l’hôtel pour s’installer dans une villa. Cécile, Aix le 1er septembre : « Mon

cher petit aimé, tu me sembles tellement loin que j’ai l’impression que ma pensée ne peut pas te

parvenir. Je t’ai envoyé des cartes mais reçois tu tout cela ? N’es tu pas plutôt comme moi sans

aucune nouvelles – toi au moins tu dois savoir que nous sommes bien portant et en toute sécurité ».

Pendant ce temps, les lignes Françaises avaient été enfoncées, André s'est retrouvé derrière les

lignes ennemies, à vivre pendant trois semaines un danger de tous les instants avant de pouvoir

gagner Dunkerque puis rentrer à Paris. Mais cela, Cécile ne le savait pas.

Cécile, le 12 septembre, toujours sans nouvelle d’André : « Cher petit aimé à moi, je ne t’ai pas écrit

hier parce que je me suis mise à relire tes lettres. J’y suis restée très longtemps, je les sais presque

par cœur. Pendant que je me pénétrais de tous les mots, y cherchant des choses que je n’aurais pas

encore découvertes. Je les ai embrassées tes chères petites lettres, et je n’ai peut-être pas été très

brave mais j’étais toute seule et personne ne me voyait. … »

Et puis c'est la victoire de la Marne. Les allemands qui se sont un peu trop avancés, une fissure dans

le front allemand que les troupes françaises ont su saisir. Pour la petite histoire, c'est Alfred Dreyfus

qui aurait appris le premier cette opportunité le 4 septembre. Et alors que les soldats reculaient

depuis 15 jours, les voilà qui se jettent dans la brèche et obligent les armées allemandes à reculer

!Le 10 septembre, les allemands entament leur repli et le 12, la victoire est consommée. Dès le

lendemain, le 13, Cécile est au courant!

Cécile, Aix le 13 septembre : « Mon aimé, on nous apprend officiellement une victoire française,

l’ennemi est en retraite sur toute la ligne. J’en pleurais de joie et d’émotion… SI cela pouvait être la

grande déroute et qu’ils soient chassés.. »

« De bien vieilles nouvelles depuis le 22 août, cette lettre où tu m’as raconté que vous avez fait une

étape de 70 km en deux jours et qu’un aéroplane allemand a volé au dessus de vous. Qu’avez-vous

fait depuis, pendant ces 23 jours ? Et comment avez-vous fait pour reculer cet immense convoi de

tout ce qu’il avait avancé. Car vous avez sûrement reculé. C’est cela qui m’effraye ! ».

Cécile, Aix le 16 septembre : « Mon cher aimé, hier les journaux, avec la confirmation de notre

victoire et de la retraite générale des allemands nous annonçaient une nouvelle qui avait contribué à

me mettre de la joie dans le cœur. ON annonçait que la correspondance avec les militaires allait

redevenir normale ».

Cécile, Aix, 17 septembre : « Mon chéri que j’aime, j’ai reçu une autre lettre de toi ce matin, elle est

antérieure à la dernière du 22, elle est datée du 20 août. Que t’est-il arrivé depuis ? Je n’ose pas me

le demander ! »

Cécile, le 20 septembre, Aix : « Mon aimé chéri, en rentrant de la messe tout à l’heure a 11h, j’ai

trouvé ton télégramme – te dire ce que cela a été pour moi est impossible – penses donc que je

n’avais rien de toi depuis ta lettre du 22 août. Chaque soir je m’endormais après avoir pensé

d’affreuses choses je ne savais pas si tu étais même encore

(suite) vivant et je n’avais même pas la ressource de me dire que je serais prévenue en cas

d’accident puisque c’est Henri qu’on aviserait et qu’il ne peut plus communiquer avec moi. Et alors

là, tout-à-coup, savoir que tu vis, que tu es à Paris, oh chéri, c’est trop bon ».

Cécile apprend qu’André va à Pontivy.

Cécile, Aix le 22 septembre : « Mon petit chéri que j’aime, toi qui es toute ma joie de vivre , tout mon

bonheur [..] Combien tu as du souffrir pendant ces trois semaines, physiquement et moralement ! »

André le 20 septembre de Paris : « Ma chérie aimée, j’ai été avant-hier de Douai à Dunkerque et hier

ou j’ai pu prendre le train de Dunkerque à Paris. J’ai été en arrivant me commander un nouvel

uniforme puis aux invalides…[..] On me renvoie au dépôt de mon régiment à Pontivy. J'espère bien

ne pas y rester trop longtemps et retourner rapidement à l'armée. Je suis terriblement inquiet pour

Reims qui a été bombardée hier. »

« Et si notre maison de commerce est détruite avec notre stock actuel, ce peut être très grave pour

nous. J'espère bien que je pourrai bientôt retourner sur le front, j'ai trop vu d'horreurs, je voudrais

ne pas rester inactif dans un pareil moment. »

A la fin de son rapport sur les événements du 22 août au 18 septembre, André écrit : »J’ai l’honneur

de demander à être renvoyé le plus tôt possible aux armées combattantes ».

André, Paris le 20 septembre : « ..mais combien j'ai été heureux de savoir que vous étiez en bonne

santé. Mais toi, ma chérie, comment vas-tu , combien je …. pour une bonne petite femme, l'épreuve

qu'elle vient de subir, j'espère que tu as eu du courage et que je retrouverai une petite femme jeune

et jolie. SI tu savais comme je t'aime et combien j'ai souffert de ne pouvoir t'écrire ! »

André, St Brieuc, 1er janvier 1915 : « Je n’ai pas pu vous quitter sans émotion ce matin, … Ces

quelques jours passés près de vous m’ont rendu profondément heureux et j’éprouve une grande

reconnaissance d’avoir eu ce bonheur . Je retourne à Pontivy prêt à tout pour faire mon devoir quel

qu'il soit, avec patience et le mieux que je pourrai.».

Pontivy, le 11 avril 1915, André : « Chère petite chérie, c’est cette fois ci la dernière lettre que je

t’écris de Pontivy. … »

Baud, le 11 avril ; André : « Prière faire tous préparatifs pour être prêt à embarquer demain matin.

[..] Je crois bien que c'est pour Marseille.... ». Donc l'armée d'Orient.......

André est à Marseille le 3 mai après un périple en train depuis la Bretagne. LE 5 mai il écrit : «

J’ignore toujours la date du départ mais cela ne tardera pas. Je ne pense pas rester au-delà de

dimanche ou lundi ». Le 15 mai, il est encore à Marseille. Début juin aussi

André, Marseille le 6 juin 1915 : « Ma chérie aimée, oui c’est aujourd’hui l’anniversaire d’une journée

qui a transformé ma vie. Grâce à toi, ma chérie, j’ai eu le bonheur. Notre union au bout de 15 ans est

plus intime, notre amour plus profond, le jour est plein de doux souvenirs, si le présent nous sépare,

nos cœurs sont unis, nous sentons que rien ne peut troubler l’intimité de nos cœurs et de nos

pensées et c’est très bon d’avoir une sentiment de paix dans l’amour, même si nous devons rester de

logs mois séparés. Quand nous nous retrouverons, nous n’aurons pas l’impression que nous nous

sommes quittés, nous n’aurons pas ce sentiment douloureux de se sentir un peu étrangers l’un à

l’autre et de n’avoir plus rien à se dire. Cette certitude aide à supporter l’idée d’une séparation très

dure. »

André, Marseille, 28 juin : « J’ai été ce matin voir le Colonel commandant l’artillerie du Corps

expéditionnaire d’Orient. Nous allons bientôt partir »..

André, Marseille, 29 juin : « Ma chérie aimée, je viens de faire mes paquets et je vais quitter

l’hotel…».

André, 8 août : « Je suis à bord de la Chaouia »

André, 12 août, en escale à Bizerte.

André, 18 août, prequ’ile de Gallipoli. « Bien arrivé hier dans la nuit… Je commande la 27eme SMA,

45ème artiellerie, 1ère division du CEO Secteur 194….J’habite une maison faire de caisses à obus, du

dernier confortable ».

André, 5 septembre : « C’est le calme plat, les turcs n’ont sans doute plus d’obus au front, ils n’ont

plus rien tiré depuis deux jours. »

André, Dardannelles le 6 octobre : » On nous a annoncé aujourd’hui que nous n’aurions plus de

courrier qu’une fois par semaine , faute de bateaux probablement ».

Dardanelles, le 14 octobre 1915 : « Hier nous avons fait une bonne farce aux turcs. UN de leurs

aéroplane avait lancé il y a 3 jours des proclamations nous invitant à nous rendre….. Hier a 7h on a

allumé un grand feu et nous avions arrêté des 6h toute fusillade. Les turcs ont du regarder et sortir

un peu et à ce moment on a donné le signal et toutes les batteries ont tiré en même temps… »

Dardanelles, le 18 octobre : « je ne veux pas penser à l'avenir, je pense à vous me demandant ce que

vous devenez, ce que vous faites... »

Dardanelles, le 18 octobre 2015 : « Le service est toujours peu considérable et monotone, memes

fusillades et canonnades quotidiennes. IL passe d’immenses vols de grues… . Mon cerveau est à peu

près figé, je ne veux pas penser à l’avenir je pense à vous me demandant ce que vous devenez. »

Dardanelles, 26 octobre 1915 : « le « canard » du jour, c’est le départ de notre division fin novembre

pour destination inconnue. Je n’y crois pas. »

Moudros, le 16 novembre 1915 : « Ma chérie aimée, je suis a Moudros, mais comme j’ai eu la bétise

d’attraper la maladie à la mode, l’ictère, je suis à l’hopital d’évacuation n°2. Tu sais que l’ictère n’est

pas une maladie grave.. Le seul ennui, c'est que c'est très long pour redevenir blanc..... »......

Moudros, 20 novembre : »Ma chérie, je suis encore dans la période stationnaire, néanmoins je me

sens un peu mieux. »

NOTES DE CECILE

Ces lettres écrites uniquement pour me rassurer ne donnent aucune idée des souffrances qu’il a

endurées. IL était dans un baraquement en planche, entouré de typiques, où il n’existait aucun des

commodités indispensables, la température était de 5 degré avec le vent passant par les interstices.

Il était obligé de coucher tout habillé avec son grand manteau et son bonnet sur la tête. Les médecins

ne s’occupaient pour ainsi dire pas des malades. Leur indifférence était révoltante. Les infirmiers ne

pouvaient ou ne voulaient rien faire. Seules les infirmières étaient très dévouées mais elles étaient 4

pour 230 malades. Elles étaient exténuées de fatigue, et certaines malades elles mêmes.

Mon chéri, atteint d’ictère colonial, qui est une maladie microbienne, et non pas la jaunisse ordinaire

a surtout atrocément souffert de brulures et de douleurs à la rate et au foie. Cette maladie a laissé

des suites qui ont certainement contribué à causer sa mort.

Le Lt Gérard, quand il est venu me voir à Paris, m’a raconté toutes les souffrances de mon chéri à

l’hopital et aussi aux Dardannelles. C’est par lui que j’i su qu’il y était extrêmement exposé sans

aucun abri sûr, ainsi que l’horreur de cette vie dans une atmosphère ampuantie par l’odeur des

cadavres enterrés partout et baignant dans l’eau qu’il fallait boire et dans laquelle il fallait se laver.

ON ne buvait que de l’eau bouillie (du thé) et le moins possible c’est ce qui a causé ses coliques

néphrétiques qui l’ont aussi tant fait souffrir. Il a été obligé de se laisser évacuer. J’ai su par le

lieutenant qui est venu me voir qu’il a eu une traversée atroce pour venir a Moudros. IL m’a caché sa

maladie aussi longtemps que possible. D’ailleurs, il avait eu auparavant deux coliques néphrétiques

dont ses lettres ne disent rien.

André, Moudros, 26 novembre 1915 : « Ma chérie aimée, je vais décidément mieux. IL n’y a plus de

pigmentation dans mes urines. Le public prétend que je suis moins jaune. »

André, Moudros, le 20 décembre 1915 : « Le commissaire m’a proposé pour un congé en France de

15 jours, c’est 5 jours de mieux que prévu. »

André, Castro, 25 décembre : « Ma chérie aimée, je suis parti de l’hopital ce matin. ».

André, NImes le 8 février 1916 : « Je dois partir pour Lyon le 10 février pour compléter ma section.

C’est une section de 155 court ».

André, secteur 48 , 25 mars 1916 : « On n’a réellement pas l’impression d’être à la guerre ici, bien

qu’on entende le canon »