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Nathalie Loignon Christophe au grand cœur roman vert DOMINIQUE ET COMPAGNIE Extrait de la publication

Christophe au grand cœur...Dans mon village, bien sûr, les gens meurent quand même un jour. Mais pas à cause de la guerre. Parce qu’ils sont vieux, parce qu’ils sont tristes

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À peine 24 ans, des images etdes voyages plein la tête,

Nathalie Loignon voue unevéri table passion aux chats

et aux mots. Christophe au grandcœur, son premier roman, lui

a permis de remporter le prix littéraire Henriette Major

décerné chaque année à un nouvel auteur de littéra -

ture jeunesse par les éditionsDominique et compagnie.

Nathalie Loignon

Nathalie Loignon

Christophe au grand

cœur

Illustrations : Geneviève Côté

Quand on aime la vie, notre cœur n’est jamais trop petit… Christophe l’a

bien compris ! Et même si son cœur est malade, Christophe aime les

tournesols, les ron ron nements des chatset les poissons volants. Il aime rire, siffler et nager. Il aime aussi Papa,

Maman et Céline. Le cœur du garçon estpetit, mais il déborde d’amour.

Dans ce roman plein d’émotions,Christophe nous montre que même lamort ne peut arrêter la vie lorsqu’on

est heureux.

Chris

tophe

au gr

and c

œur

Natha

lie Lo

ignon

roman vert 1 roman vertD O M I N I Q U E E T C O M P A G N I E D O M I N I Q U E E T C O M P A G N I E

Les rabats de ce livre peuvent servir de marque-pages.

Visite notre site Internet pour en savoir plus sur nos auteurs, nos illustrateurs et nos collections :

www.dominiqueetcompagnie.com

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roman vert

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Sous la direction de

Yvon Brochu

Nathalie Loignon

Christophe au grand cœur

Illustrations

Geneviève Côté

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Sous la direction de

Yvon Brochu

Nathalie Loignon

Christophe au grand cœur

Illustrations

Geneviève Côté

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Données de catalogage avant publication (Canada)

Loignon, NathalieChristophe au grand cœur(Roman vert)Pour enfants de 9 ans et plus.

ISBN 2-89512-120-6

I. Côté, Geneviève. II. Titre. PS8573.O43C47 2000 jC843'.54 C00-940235-7PS9573.O43C47 2000PZ23.L64Ch 2000

© Les éditions Héritage inc. 2000Tous droits réservésDépôts légaux : 3e trimestre 2000Bibliothèque nationaledu QuébecBibliothèque nationaledu CanadaBibliothèque nationale de France

ISBN 2-89512-120-6 Imprimé au Canada

10 9 8 7 6 5 4

Direction de la collection :Yvon Brochu, R-D création enr.Éditrice : Dominique PayetteDirection artistique et graphisme : Primeau & BareyRévision-correction :Martine Latulippe

Dominique et compagnie300, rue ArranSaint-Lambert (Québec) J4R 1K5Téléphone : (514) 875-0327Télécopieur : (450) 672-5448Courriel :[email protected] Internet : www.dominiqueetcompagnie.com

Nous remercions le Conseil des Artsdu Canada de l’aide accordée à notreprogramme de publication. Nous recon-naissons l’aide financière du gouverne-ment du Canada par l’entremise duProgramme d’aide au développementde l’industrie de l’édition (PADIÉ) pournos activités d’édition.

Nous reconnaissons l’aide financière dugouvernement du Québec par l’entre -mise du Programme de crédit d’im pôtpour l’édition de livres– SODEC –et duProgramme d’aide aux entreprises dulivre et de l’édition spécialisée.

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Données de catalogage avant publication (Canada)

Loignon, NathalieChristophe au grand cœur(Roman vert)Pour enfants de 9 ans et plus.

ISBN 2-89512-120-6

I. Côté, Geneviève. II. Titre. PS8573.O43C47 2000 jC843'.54 C00-940235-7PS9573.O43C47 2000PZ23.L64Ch 2000

© Les éditions Héritage inc. 2000Tous droits réservésDépôts légaux : 3e trimestre 2000Bibliothèque nationaledu QuébecBibliothèque nationaledu CanadaBibliothèque nationale de France

ISBN 2-89512-120-6 Imprimé au Canada

10 9 8 7 6 5 4

Direction de la collection :Yvon Brochu, R-D création enr.Éditrice : Dominique PayetteDirection artistique et graphisme : Primeau & BareyRévision-correction :Martine Latulippe

Dominique et compagnie300, rue ArranSaint-Lambert (Québec) J4R 1K5Téléphone : (514) 875-0327Télécopieur : (450) 672-5448Courriel :[email protected] Internet : www.dominiqueetcompagnie.com

Nous remercions le Conseil des Artsdu Canada de l’aide accordée à notreprogramme de publication. Nous recon-naissons l’aide financière du gouverne-ment du Canada par l’entremise duProgramme d’aide au développementde l’industrie de l’édition (PADIÉ) pournos activités d’édition.

Nous reconnaissons l’aide financière dugouvernement du Québec par l’entre -mise du Programme de crédit d’im pôtpour l’édition de livres– SODEC –et duProgramme d’aide aux entreprises dulivre et de l’édition spécialisée.

Extrait de la publication

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Chapitre 1

Fragiles châteaux de sable

Les gens, en général, je crois qu’ilsont peur de la mort. Je ne sais pastrès bien pourquoi. Moi, je l’aimebien, la mort. Pas la vraie, bien sûr,puisque je ne la connais pas en per-sonne. Je suis vivant. Mais tout cequi entoure la fin d’une vie me plaît.En tout cas, les fleurs, ça me plaît. Etles morts en reçoivent beaucoup.

Dans plein de villes du monde, lesgens meurent. On en parle sansarrêt à la télévision. Ces personnesmeurent parce qu’on tire sur ellesavec des canons. Des canons gros

9Extrait de la publication

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Chapitre 1

Fragiles châteaux de sable

Les gens, en général, je crois qu’ilsont peur de la mort. Je ne sais pastrès bien pourquoi. Moi, je l’aimebien, la mort. Pas la vraie, bien sûr,puisque je ne la connais pas en per-sonne. Je suis vivant. Mais tout cequi entoure la fin d’une vie me plaît.En tout cas, les fleurs, ça me plaît. Etles morts en reçoivent beaucoup.

Dans plein de villes du monde, lesgens meurent. On en parle sansarrêt à la télévision. Ces personnesmeurent parce qu’on tire sur ellesavec des canons. Des canons gros

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Page 12: Christophe au grand cœur...Dans mon village, bien sûr, les gens meurent quand même un jour. Mais pas à cause de la guerre. Parce qu’ils sont vieux, parce qu’ils sont tristes

trois ans, ma mère survole notremaison, au bord de la mer, ou bienelle fait quelques tours au-dessus del’hôpital quand j’y suis. Elle aimebien le vent frais et le parfum desmédecins. Avant de mourir, elle merépétait d’être toujours attentif àtoutes les odeurs, dans toutes les situa tions.

Maman sentait la fleur d’oranger.Elle était belle. Avant qu’ils netombent, ses cheveux roux ondu-laient. Mais les foulards allaienttellement bien à Maman que, sansles cheveux, c’était encore mieux.Elle me trouvait si gentil quand jelui disais qu’elle était belle… Jepense qu’elle ne me croyait pas.Maintenant qu’elle est morte, ellesait sûrement que je disais la vérité.

Tu es belle, Maman, et je sens

11

comme notre maison. Papa m’a ditl’autre jour que c’était triste, toutcela. J’ai demandé : «Pourquoi c’esttriste, Papa ? » Et Papa a réponduque, là-bas, beaucoup de petitsgarçons comme moi n’ont plus depapa. Je ne sais pas très bien à quoiressemble une vie sans papa. Lemien est toujours à la maison. Il n’apas de travail. On lui donne des sousavec lesquels il achète des avionsminiatures. Des avions qui peuventvoler pour de vrai et aller dans leciel, où l’on veut, grâce à des télé-commandes. C’est chouette, un papaqui fait voler des avions. J’aimeraisbien que Papa soit un pilote, qu’ilsache conduire de vrais avions. Unpapa qui vole dans le ciel, ça doitêtre bien. Mais, de toute façon, j’aidéjà une maman qui le fait. Depuis

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trois ans, ma mère survole notremaison, au bord de la mer, ou bienelle fait quelques tours au-dessus del’hôpital quand j’y suis. Elle aimebien le vent frais et le parfum desmédecins. Avant de mourir, elle merépétait d’être toujours attentif àtoutes les odeurs, dans toutes les situa tions.

Maman sentait la fleur d’oranger.Elle était belle. Avant qu’ils netombent, ses cheveux roux ondu-laient. Mais les foulards allaienttellement bien à Maman que, sansles cheveux, c’était encore mieux.Elle me trouvait si gentil quand jelui disais qu’elle était belle… Jepense qu’elle ne me croyait pas.Maintenant qu’elle est morte, ellesait sûrement que je disais la vérité.

Tu es belle, Maman, et je sens

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comme notre maison. Papa m’a ditl’autre jour que c’était triste, toutcela. J’ai demandé : «Pourquoi c’esttriste, Papa ? » Et Papa a réponduque, là-bas, beaucoup de petitsgarçons comme moi n’ont plus depapa. Je ne sais pas très bien à quoiressemble une vie sans papa. Lemien est toujours à la maison. Il n’apas de travail. On lui donne des sousavec lesquels il achète des avionsminiatures. Des avions qui peuventvoler pour de vrai et aller dans leciel, où l’on veut, grâce à des télé-commandes. C’est chouette, un papaqui fait voler des avions. J’aimeraisbien que Papa soit un pilote, qu’ilsache conduire de vrais avions. Unpapa qui vole dans le ciel, ça doitêtre bien. Mais, de toute façon, j’aidéjà une maman qui le fait. Depuis

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Page 14: Christophe au grand cœur...Dans mon village, bien sûr, les gens meurent quand même un jour. Mais pas à cause de la guerre. Parce qu’ils sont vieux, parce qu’ils sont tristes

encore ton parfum le matin justeavant de m’éveiller, ou encore le soirquand mes yeux se ferment et quemon cœur demande le sommeil.

• • •

Mon nom est Christophe. J’habitetrès loin des villes où il y a la guerreet les canons géants.

Dans mon village, bien sûr, lesgens meurent quand même un jour.Mais pas à cause de la guerre. Parcequ’ils sont vieux, parce qu’ils sonttristes ou parce qu’ils ont des acci-dents. Moi, je suis né accidenté.

Je vis à deux endroits dans le mêmevillage : dans ma maison, près de lamer, et dans l’hôpital, à l’autre boutdu village. À la maison, ma chambreest bleue avec des nuages dessinés

13Extrait de la publication

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encore ton parfum le matin justeavant de m’éveiller, ou encore le soirquand mes yeux se ferment et quemon cœur demande le sommeil.

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Mon nom est Christophe. J’habitetrès loin des villes où il y a la guerreet les canons géants.

Dans mon village, bien sûr, lesgens meurent quand même un jour.Mais pas à cause de la guerre. Parcequ’ils sont vieux, parce qu’ils sonttristes ou parce qu’ils ont des acci-dents. Moi, je suis né accidenté.

Je vis à deux endroits dans le mêmevillage : dans ma maison, près de lamer, et dans l’hôpital, à l’autre boutdu village. À la maison, ma chambreest bleue avec des nuages dessinés

13Extrait de la publication

Page 16: Christophe au grand cœur...Dans mon village, bien sûr, les gens meurent quand même un jour. Mais pas à cause de la guerre. Parce qu’ils sont vieux, parce qu’ils sont tristes

Et soudain, il coule à pic. Alors, jeme dis que ce poisson n’aura plusjamais à remonter pour reprendreson souffle. Qu’il doit être bien con-tent, le poisson volant, de vivre enfinà un seul endroit. Moi, la moitié dutemps, je vis près de la mer ; l’autremoitié, je vis avec les gens malades,à l’hôpital.

• • •

Tout le monde me connaît, àl’hôpital. J’y ai une chambre en per-manence. On l’a peinte en jaune etorange. À ma fenêtre, il y a desrideaux verts. J’ai aussi un aquariumavec trois poissons rouges. Chaquefois que mes poumons pleins d’eauet mon cœur trop petit sont fatigués,ils vont se reposer à l’hôpital. Céline

15

au plafond. J’habite là-bas avec Papaet sa copine. Je passe des journéesentières à jouer dans le sable et ànager dans la mer, juste devant lamaison. Papa n’aime pas que je mebaigne seul. Il a peur pour mon cœurfaible et dit que j’ai déjà bien assezd’eau sur les poumons. Mais je nagecomme un poisson, alors Papa melaisse aller à la mer.

Les poissons qui habitent près denotre plage sont en majorité despois sons volants. Ils sortent de l’eau,plongent, ressortent et replongent,comme moi. Les poissons volantsmeurent, eux aussi. Un jour, ils nevolent plus ; ils font la planche, leventre au soleil, les yeux ouverts.Quand je trouve un poisson mortsur la berge, je le lance dans lesvagues. Souvent, il flotte longtemps.

14Extrait de la publication

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Et soudain, il coule à pic. Alors, jeme dis que ce poisson n’aura plusjamais à remonter pour reprendreson souffle. Qu’il doit être bien con-tent, le poisson volant, de vivre enfinà un seul endroit. Moi, la moitié dutemps, je vis près de la mer ; l’autremoitié, je vis avec les gens malades,à l’hôpital.

• • •

Tout le monde me connaît, àl’hôpital. J’y ai une chambre en per-manence. On l’a peinte en jaune etorange. À ma fenêtre, il y a desrideaux verts. J’ai aussi un aquariumavec trois poissons rouges. Chaquefois que mes poumons pleins d’eauet mon cœur trop petit sont fatigués,ils vont se reposer à l’hôpital. Céline

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au plafond. J’habite là-bas avec Papaet sa copine. Je passe des journéesentières à jouer dans le sable et ànager dans la mer, juste devant lamaison. Papa n’aime pas que je mebaigne seul. Il a peur pour mon cœurfaible et dit que j’ai déjà bien assezd’eau sur les poumons. Mais je nagecomme un poisson, alors Papa melaisse aller à la mer.

Les poissons qui habitent près denotre plage sont en majorité despois sons volants. Ils sortent de l’eau,plongent, ressortent et replongent,comme moi. Les poissons volantsmeurent, eux aussi. Un jour, ils nevolent plus ; ils font la planche, leventre au soleil, les yeux ouverts.Quand je trouve un poisson mortsur la berge, je le lance dans lesvagues. Souvent, il flotte longtemps.

14 Extrait de la publication

Page 18: Christophe au grand cœur...Dans mon village, bien sûr, les gens meurent quand même un jour. Mais pas à cause de la guerre. Parce qu’ils sont vieux, parce qu’ils sont tristes

Martine m’a montré des photos decimetières d’éléphants. On dirait desjardins d’os, pleins de cages blanches.Ça doit être énorme, un cœur d’élé -phant.

À l’hôpital, il n’y a pas que Martineet Céline. J’y rencontre aussi desgens qui ne font que passer : desfemmes enceintes et des médecinsheureux qui promènent des bébésroses, des couturières avec des aiguilles et du fil faits exprès pourrecoudre la peau, et aussi des vieil-lards, des brûlés, des tombés-sur-les-genoux et des filles très maigres quine mangent pas assez. Les maladesse partagent les trois premiers étagesde l’hôpital. Ma chambre est audeuxième. Les morts sont dans lesous-sol. J’aimerais bien aller les visi ter. Parce qu’il faudra bien que je

17

blague toujours en disant que j’ai leplus grand cœur du monde. Célinetravaille à l’urgence. C’est la copinede Papa. Elle répète souvent que,même si mon cœur déborde d’amour,il n’y a pas de danger qu’il explose.J’aime Céline, j’aime Maman, j’aimePapa et mon chat… Ça fera peut-être grossir mon cœur d’aimer au-tant de gens. Mais, pour guérir, moncœur doit aussi aller à l’hôpital.

Quand on me ramène à l’hôpital,je suis content de revoir Martine,mon professeur à moi tout seul. Sapeau est toute bronzée. Elle mangetoujours des légumes, des trempetteset du chocolat pour dessert. Elle saitrépondre à toutes mes questions.Quand elle ne connaît pas la ré -ponse, elle cherche dans des livres.Les éléphants sont mon sujet favori.

16Extrait de la publication

Page 19: Christophe au grand cœur...Dans mon village, bien sûr, les gens meurent quand même un jour. Mais pas à cause de la guerre. Parce qu’ils sont vieux, parce qu’ils sont tristes

Martine m’a montré des photos decimetières d’éléphants. On dirait desjardins d’os, pleins de cages blanches.Ça doit être énorme, un cœur d’élé -phant.

À l’hôpital, il n’y a pas que Martineet Céline. J’y rencontre aussi desgens qui ne font que passer : desfemmes enceintes et des médecinsheureux qui promènent des bébésroses, des couturières avec des aiguilles et du fil faits exprès pourrecoudre la peau, et aussi des vieil-lards, des brûlés, des tombés-sur-les-genoux et des filles très maigres quine mangent pas assez. Les maladesse partagent les trois premiers étagesde l’hôpital. Ma chambre est audeuxième. Les morts sont dans lesous-sol. J’aimerais bien aller les visi ter. Parce qu’il faudra bien que je

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blague toujours en disant que j’ai leplus grand cœur du monde. Célinetravaille à l’urgence. C’est la copinede Papa. Elle répète souvent que,même si mon cœur déborde d’amour,il n’y a pas de danger qu’il explose.J’aime Céline, j’aime Maman, j’aimePapa et mon chat… Ça fera peut-être grossir mon cœur d’aimer au-tant de gens. Mais, pour guérir, moncœur doit aussi aller à l’hôpital.

Quand on me ramène à l’hôpital,je suis content de revoir Martine,mon professeur à moi tout seul. Sapeau est toute bronzée. Elle mangetoujours des légumes, des trempetteset du chocolat pour dessert. Elle saitrépondre à toutes mes questions.Quand elle ne connaît pas la ré -ponse, elle cherche dans des livres.Les éléphants sont mon sujet favori.

16 Extrait de la publication

Page 20: Christophe au grand cœur...Dans mon village, bien sûr, les gens meurent quand même un jour. Mais pas à cause de la guerre. Parce qu’ils sont vieux, parce qu’ils sont tristes

passer un peu d’air. La dame de machambre ronflait très fort, à cause deson asthme, même lorsqu’elle nedormait pas. Monsieur Antoine, quiest aussi mon médecin, avait mis destubes dans le nez de cette dame.L’air pouvait se battre contrel’asthme et essayer de gagner la partie. Mais un matin, l’air a perdu labataille : la femme est morte. Jesavais qu’elle était morte parce que,pendant la nuit, elle avait cessé deronfler. Alors, je me suis levé pourla voir. C’était comme si elle dor-mait. J’ai eu envie de lui parler, de luidire qu’elle avait de la chancepuisqu’elle apprendrait à voler. Je luiai expliqué que, si les poissonsvolants arrêtent de voler en mourantpour rejoindre le fond de la mer, leshumains morts, eux, se mettent à

19

m’habitue à la mort et que j’appren neun peu comment on vit quand onmeurt. Il faudra bien que je voie lesmorts avant de partir vivre avec euxpour de bon.

• • •

J’ai déjà vu des morts. De vraismorts, je veux dire. Pas seulementdes poissons. Des humains, aussi.Jusqu’à maintenant, j’en ai vu deux.La première fois, à l’hôpital, c’était ily a deux ans. Je n’avais pas encorema propre chambre. Une femme oc-cupait l’autre lit et elle avait bien dumal à respirer parce que l’asthmebloquait sa gorge. L’asthme, c’estcomme un mauvais bouchon debaignoire : il s’installe au fond de lagorge et laisse maladroitement

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passer un peu d’air. La dame de machambre ronflait très fort, à cause deson asthme, même lorsqu’elle nedormait pas. Monsieur Antoine, quiest aussi mon médecin, avait mis destubes dans le nez de cette dame.L’air pouvait se battre contrel’asthme et essayer de gagner la partie. Mais un matin, l’air a perdu labataille : la femme est morte. Jesavais qu’elle était morte parce que,pendant la nuit, elle avait cessé deronfler. Alors, je me suis levé pourla voir. C’était comme si elle dor-mait. J’ai eu envie de lui parler, de luidire qu’elle avait de la chancepuisqu’elle apprendrait à voler. Je luiai expliqué que, si les poissonsvolants arrêtent de voler en mourantpour rejoindre le fond de la mer, leshumains morts, eux, se mettent à

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m’habitue à la mort et que j’appren neun peu comment on vit quand onmeurt. Il faudra bien que je voie lesmorts avant de partir vivre avec euxpour de bon.

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J’ai déjà vu des morts. De vraismorts, je veux dire. Pas seulementdes poissons. Des humains, aussi.Jusqu’à maintenant, j’en ai vu deux.La première fois, à l’hôpital, c’était ily a deux ans. Je n’avais pas encorema propre chambre. Une femme oc-cupait l’autre lit et elle avait bien dumal à respirer parce que l’asthmebloquait sa gorge. L’asthme, c’estcomme un mauvais bouchon debaignoire : il s’installe au fond de lagorge et laisse maladroitement

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voler. À observer de loin ceux qu’ilsaiment. Et ils reviennent parfoistoucher la douceur du sable chaudsur les plages, comme ma mère lefait.

Maman, elle, n’atterrit que trèsrarement. Seulement quand elle avraiment envie de faire un châteausur notre plage. Et le matin, lorsqueje vais me promener avec Papa etCéline, les châteaux sont là, im-menses, avec des fenêtres et desportes partout. Maman a beaucoupde talent pour faire des châteaux.Maman, c’est le deuxième humainque j’ai vu mort.

Toutes ces choses sur Maman etles châteaux, et la dame morte dansma chambre, je n’en parle à per-sonne d’autre qu’à Catimini, monchat. Je n’ai pas peur d’en parler.

20Extrait de la publication

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Extrait de la publication

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À peine 24 ans, des images etdes voyages plein la tête,

Nathalie Loignon voue unevéri table passion aux chats

et aux mots. Christophe au grandcœur, son premier roman, lui

a permis de remporter le prix littéraire Henriette Major

décerné chaque année à un nouvel auteur de littéra -

ture jeunesse par les éditionsDominique et compagnie.

Nathalie Loignon

Nathalie Loignon

Christophe au grand

cœur

Illustrations : Geneviève Côté

Quand on aime la vie, notre cœur n’est jamais trop petit… Christophe l’a

bien compris ! Et même si son cœur est malade, Christophe aime les

tournesols, les ron ron nements des chatset les poissons volants. Il aime rire, siffler et nager. Il aime aussi Papa,

Maman et Céline. Le cœur du garçon estpetit, mais il déborde d’amour.

Dans ce roman plein d’émotions,Christophe nous montre que même lamort ne peut arrêter la vie lorsqu’on

est heureux.

Chris

tophe

au gr

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œur

Natha

lie Lo

ignon

roman vert 1 roman vertD O M I N I Q U E E T C O M P A G N I E D O M I N I Q U E E T C O M P A G N I E

Les rabats de ce livre peuvent servir de marque-pages.

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