1
actualités | revue de presse internationale 6 OptionBio | Lundi 21 janvier 2008 | n° 393 L’ apparition d’un asthme chez un enfant est souvent précé- dée par des symptômes récurrents évocateurs de cette pathologie. Ces symptômes peuvent être causés par le début de la maladie elle-même ou par des virus à tropisme respiratoire. Des lavages broncho-alvéolaires réalisés chez des enfants en bas âge, ayant une respiration sifflante récurrente et sévère et une obs- truction bronchique, ont montré un nombre augmenté de macrophages et de neutrophiles. Il sem- ble donc exister une association entre ces respirations sifflantes observées chez les enfants en bas âge et une colonisation bac- térienne dans le début de l’installation d’un asthme. À la recherche d’une colonie bactérienne Afin de confirmer cette hypothèse, une équipe de chercheurs danois a étudié la relation entre l’existence d’une colonisation bac- térienne asymptomatique néona- tale au niveau de l’hypopharynx et le développement d’une respiration sifflante, d’un asthme ou d’une aller- gie durant les cinq premières années de vie. Les 321 enfants inclus dans l’étude ont été sélectionnés à partir d’une cohorte née de mères asth- matiques. Des prélèvements pha- ryngés ont été réalisés à l’âge de 1 mois, en l’absence de symptômes, et mis en culture à la recherche de différents germes comme Strepto- coccus pneumoniae, Haemophilus influenzae, Moraxella catarrhalis et Staphylococcus aureus. Un risque d’asthme élevé À l’âge de 4 ans, le nombre d’éosi- nophiles sanguins a été mesuré et un dosage des IgE réalisé. À l’âge de 5 ans, les fonctions pulmonaires et la présence d’un asthme ont été étudiées. Les résultats montrent, dès l’âge de 1 mois, une colonisa- tion bactérienne à S. pneumoniae, M. catarrhalis et H. influenzae dans 21 % des cas, colonisation qui est significativement associée à l’appa- rition d’une respiration sifflante pou- vant nécessiter une hospitalisation au cours des 5 premières années de vie. Les concentrations en éosino- philes et le taux d’IgE total sont éga- lement retrouvés augmentés chez ces enfants à l’âge de 4 ans. Enfin, le risque d’apparition d’un asthme à l’âge de 5 ans est significative- ment augmenté toujours chez ces enfants colonisés par les bactéries en période néonatale. | O.M. Colonisation bactérienne néonatale et asthme Une mutation STAT3 pour le syndrome des hyper-IgE ou syndrome de Job L e syndrome des hyperimmu- noglobulines de type E, encore dénommé syndrome de Job, a été décrit pour la première fois en 1966. D’un point de vue clinique, il se caractérise par des infections staphylococciques à répétition de type abcès froid, des pneumonies, un eczéma et une élévation du taux des IgE. Pas de déficit primaire de l’immunité Les pneumonies retrouvées ici sont des infections dues à plusieurs types de bactéries comme Sta- phylococcus aureus, Haemophilus influenzae ou encore Streptococcus pneumoniae. Les différents troubles allergiques retrouvés comme l’éosi- nophilie, l’eczéma et les taux élevés d’IgE sont en fait liés à une anoma- lie du rapport des lymphocytes T de type Th1/Th2, sans qu’il n’existe par ailleurs de déficit primaire de l’im- munité. Cette maladie est génétique et l’analyse cytogénétique montre la présence d’une mutation sur le chromosome 4, transmissible de manière autosomique dominante. Cette pathologie reste rare, mais des cas sporadiques peuvent exister. Mais une atteinte de la régulation du système immunitaire Une étude récente réalisée par une équipe de chercheurs américains a permis de mieux préciser l’origine de ces cas sporadiques. Les don- nées de patients atteints de ce syn- drome des hyper-IgE (en particulier les taux de cytokines secrétées par les leucocytes stimulés et l’expres- sion génique dans les cellules sti- mulées) ainsi que de leur famille ont été étudiées. Les résultats montrent en effet des taux élevés de gènes de transcription pro-inflamma- toires dans les neutrophiles non stimulés du sang périphérique et dans les cellules mononucléées de ces patients atteints du syndrome de Job. Les cultures des cellules mononucléées obtenues in vitro ont des taux élevés de facteur tumoral de nécrose. À l’inverse, ces cellules génèrent des taux plus bas de protéine 1 chimioattractive monocytaire en réponse à la présence d’interleu- kine 6, ce qui suggère un défaut dans le signal de l’IL-6. Plusieurs mutations ont été mises en évi- dence dans le gène 3 de transcrip- tion et d’activation STAT3 chez une cinquantaine de cas sporadiques et familiaux. Cette nouvelle cause génétique du syndrome des hyper- IgE, la mutation STAT3, permet d’ex- pliquer l’atteinte de la régulation du système immunitaire. | OPHÉLIE MARAIS médecin biologiste, Paris [email protected] © BSIP/G. Carlson © Fotolia.com/krysek Infection à | Staphylococcus. Source Holland S, DeLeo F, Elloumi H et al. STAT3 muta- tions in the hyper-IgE syndrome. NEJM. 2007 ; 357 : 1608-19. Source Bisgaard H, Hermansen MN, Buchvald F et al. Childhood asthma after bacterial colonization of the airway in neonates. NEJM. 2007 ; 357 : 1 487-95.

Colonisation bactérienne néonatale et asthme

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Colonisation bactérienne néonatale et asthme

actualités | revue de presse internationale

6 OptionBio | Lundi 21 janvier 2008 | n° 393

L’apparition d’un asthme chez un enfant est souvent précé-

dée par des symptômes récurrents évocateurs de cette pathologie. Ces symptômes peuvent être causés par le début de la maladie elle-même ou

par des virus à tropisme respiratoire. Des lavages broncho-alvéolaires réalisés chez des enfants en bas âge, ayant une respiration sifflante récurrente et sévère et une obs-truction bronchique, ont montré un

nombre augmenté de macrophages et de neutrophiles. Il sem-ble donc exister une association entre ces respirations sifflantes observées chez les enfants en bas âge et une colonisation bac-térienne dans le début de l’installation d’un asthme.

À la recherche d’une colonie bactérienneAfin de confirmer cette hypothèse, une équipe de chercheurs

danois a étudié la relation entre l’existence d’une colonisation bac-térienne asymptomatique néona-tale au niveau de l’hypopharynx et le développement d’une respiration sifflante, d’un asthme ou d’une aller-gie durant les cinq premières années de vie. Les 321 enfants inclus dans l’étude ont été sélectionnés à partir d’une cohorte née de mères asth-matiques. Des prélèvements pha-ryngés ont été réalisés à l’âge de 1 mois, en l’absence de symptômes, et mis en culture à la recherche de différents germes comme Strepto-coccus pneumoniae, Haemophilus influenzae, Moraxella catarrhalis et Staphylococcus aureus.

Un risque d’asthme élevéÀ l’âge de 4 ans, le nombre d’éosi-nophiles sanguins a été mesuré et un dosage des IgE réalisé. À l’âge de 5 ans, les fonctions pulmonaires et la présence d’un asthme ont été

étudiées. Les résultats montrent, dès l’âge de 1 mois, une colonisa-tion bactérienne à S. pneumoniae, M. catarrhalis et H. influenzae dans 21 % des cas, colonisation qui est significativement associée à l’appa-rition d’une respiration sifflante pou-vant nécessiter une hospitalisation au cours des 5 premières années de vie. Les concentrations en éosino-philes et le taux d’IgE total sont éga-lement retrouvés augmentés chez ces enfants à l’âge de 4 ans. Enfin, le risque d’apparition d’un asthme à l’âge de 5 ans est significative-ment augmenté toujours chez ces enfants colonisés par les bactéries en période néonatale. |

O.M.

Colonisation bactérienne néonatale et asthme

Une mutation STAT3 pour le syndrome des hyper-IgE ou syndrome de Job

Le syndrome des hyperimmu-noglobulines de type E, encore

dénommé syndrome de Job, a été décrit pour la première fois en 1966. D’un point de vue clinique, il se caractérise par des infections staphylococciques à répétition de type abcès froid, des pneumonies, un eczéma et une élévation du taux des IgE.

Pas de déficit primaire de l’immunitéLes pneumonies retrouvées ici sont des infections dues à plusieurs types de bactéries comme Sta-phylococcus aureus, Haemophilus influenzae ou encore Streptococcus pneumoniae. Les différents troubles allergiques retrouvés comme l’éosi-nophilie, l’eczéma et les taux élevés

d’IgE sont en fait liés à une anoma-lie du rapport des lymphocytes T de type Th1/Th2, sans qu’il n’existe par ailleurs de déficit primaire de l’im-munité. Cette maladie est génétique et l’analyse cytogénétique montre la présence d’une mutation sur le chromosome 4, transmissible de manière autosomique dominante. Cette pathologie reste rare, mais des cas sporadiques peuvent exister.

Mais une atteinte de la régulation du système immunitaireUne étude récente réalisée par une équipe de chercheurs américains a permis de mieux préciser l’origine de ces cas sporadiques. Les don-nées de patients atteints de ce syn-drome des hyper-IgE (en particulier

les taux de cytokines secrétées par les leucocytes stimulés et l’expres-sion génique dans les cellules sti-mulées) ainsi que de leur famille ont été étudiées. Les résultats montrent en effet des taux élevés de gènes de transcription pro-inflamma-toires dans les neutrophiles non stimulés du sang périphérique et dans les cellules mononucléées de ces patients atteints du syndrome de Job. Les cultures des cellules mononucléées obtenues in vitro ont des taux élevés de facteur tumoral de nécrose.À l’inverse, ces cellules génèrent des taux plus bas de protéine 1 chimioattractive monocytaire en réponse à la présence d’interleu-kine 6, ce qui suggère un défaut dans le signal de l’IL-6. Plusieurs

mutations ont été mises en évi-dence dans le gène 3 de transcrip-tion et d’activation STAT3 chez une cinquantaine de cas sporadiques et familiaux. Cette nouvelle cause génétique du syndrome des hyper-IgE, la mutation STAT3, permet d’ex-pliquer l’atteinte de la régulation du système immunitaire. |

OPHÉLIE MARAIS

médecin biologiste, Paris

[email protected]

© B

SIP

/G. C

arls

on

© F

otol

ia.c

om/k

ryse

k

Infection à | Staphylococcus.

SourceHolland S, DeLeo F, Elloumi H et al. STAT3 muta-

tions in the hyper-IgE syndrome. NEJM. 2007 ;

357 : 1608-19.

SourceBisgaard H, Hermansen MN, Buchvald F et al. Childhood asthma after bacterial colonization

of the airway in neonates. NEJM. 2007 ; 357 :

1 487-95.