33
HAS - Direction de l'Evaluation Médicale, Economique et de Santé Publique 1/33 Avis définitif COMMISSION DE LA TRANSPARENCE AVIS 13 MAI 2020 ibalizumab TROGARZO, solution pour perfusion Première évaluation L’essentiel Avis favorable au remboursement dans le traitement des adultes infectés par le VIH-1 multirésistant chez lesquels il est autrement impossible d’établir un schéma de traitement antirétroviral suppressif . Quel progrès ? Un progrès thérapeutique dans la stratégie de prise en charge des patients ayant une infection à VIH- 1 multirésistant et pour lesquels les traitements antirétroviraux (ARV) actuellement disponibles ne permettent pas d’atteindre la suppression virologique. Quelle place dans la stratégie thérapeutique ? La prise en charge du VIH est bien codifiée et fait l’objet de recommandations nationales et internationales. Les combinaisons thérapeutiques associant au moins 3 agents hautement actifs sont recommandées en première ligne, comprenant 2 INTI + un troisième agent (1 IP, 1 INNTI ou 1 INI). Chez les patients en échec virologique avéré, le choix du nouveau traitement est idéalement discuté au cours d’une réunion de concertation pluridisciplinaire associant cliniciens, virologue, et pharmacologue. L’avis d’une équipe expérimentée dans la prise en charge de ces patients est indispensable dans les situations où les options thérapeutiques apparaissent limitées. Sauf cas particulier, il n'est pas souhaitable de réaliser des interruptions thérapeutiques. Le schéma VIH Secteur : Hôpital

COMMISSION DE LA TRANSPARENCE A 13 MAI 2020 · 13 MAI 2020 ibalizumab TROGARZO, solution pour perfusion Première évaluation L’essentiel Avis favorable au remboursement dans le

  • Upload
    others

  • View
    4

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: COMMISSION DE LA TRANSPARENCE A 13 MAI 2020 · 13 MAI 2020 ibalizumab TROGARZO, solution pour perfusion Première évaluation L’essentiel Avis favorable au remboursement dans le

HAS - Direction de l'Evaluation Médicale, Economique et de Santé Publique 1/33 Avis définitif

COMMISSION DE LA TRANSPARENCE AVIS

13 MAI 2020

ibalizumab

TROGARZO, solution pour perfusion

Première évaluation

L’essentiel

Avis favorable au remboursement dans le traitement des adultes infectés par le VIH-1 multirésistant chez lesquels il est autrement impossible d’établir un schéma de traitement antirétroviral suppressif.

Quel progrès ?

Un progrès thérapeutique dans la stratégie de prise en charge des patients ayant une infection à VIH-1 multirésistant et pour lesquels les traitements antirétroviraux (ARV) actuellement disponibles ne permettent pas d’atteindre la suppression virologique.

Quelle place dans la stratégie thérapeutique ?

La prise en charge du VIH est bien codifiée et fait l’objet de recommandations nationales et internationales. Les combinaisons thérapeutiques associant au moins 3 agents hautement actifs sont recommandées en première ligne, comprenant 2 INTI + un troisième agent (1 IP, 1 INNTI ou 1 INI).

Chez les patients en échec virologique avéré, le choix du nouveau traitement est idéalement discuté au cours d’une réunion de concertation pluridisciplinaire associant cliniciens, virologue, et pharmacologue. L’avis d’une équipe expérimentée dans la prise en charge de ces patients est indispensable dans les situations où les options thérapeutiques apparaissent limitées. Sauf cas particulier, il n'est pas souhaitable de réaliser des interruptions thérapeutiques. Le schéma

VIH Secteur : Hôpital

Page 2: COMMISSION DE LA TRANSPARENCE A 13 MAI 2020 · 13 MAI 2020 ibalizumab TROGARZO, solution pour perfusion Première évaluation L’essentiel Avis favorable au remboursement dans le

HAS - Direction de l'Evaluation Médicale, Economique et de Santé Publique 2/33 Avis définitif

thérapeutique optimal comporte trois médicaments actifs, sur la base de l’historique thérapeutique et du génotype cumulé. Les ARV pouvant être considérés comme actifs sont ceux appartenant à une classe non encore utilisée ou appartenant à une classe déjà utilisée mais pour lequel le(s) génotype(s) de résistance actuel et cumulé permet(tent) de penser que cet ARV est actif.

L’introduction d’un nouveau traitement ne comportant qu’un seul médicament actif n'est pas recommandé, car cela conduirait à la sélection rapide de nouvelles mutations de résistance. Après un changement de traitement antirétroviral pour échec virologique, un contrôle précoce (au bout d’un mois) de la CV et de la tolérance du nouveau traitement est nécessaire.

Place du médicament

TROGARZO (ibalizumab) est une option de dernier recours, en association à d’autres antirétroviraux appropriés, pour le traitement des patients ayant une infection à VIH-1 multirésistant et pour lesquels les traitements antirétroviraux actuellement disponibles ne permettent pas d’atteindre la suppression virologique.

Recommandations particulières

Compte tenu des caractéristiques du produit et de la complexité de la prise en charge d'un patient en situation de multi-échec, la Commission préconise la restriction de la prescription de TROGARZO aux médecins expérimentés dans la prise en charge des patients ayant une infection multirésistante et après discussion en réunion de concertation pluridisciplinaire.

Page 3: COMMISSION DE LA TRANSPARENCE A 13 MAI 2020 · 13 MAI 2020 ibalizumab TROGARZO, solution pour perfusion Première évaluation L’essentiel Avis favorable au remboursement dans le

HAS - Direction de l'Evaluation Médicale, Economique et de Santé Publique 3/33 Avis définitif

Motif de l’examen Inscription aux collectivités

Indication(s) concernée(s)

« TROGARZO est indiqué, en association avec d’autres médicaments antirétroviraux, dans le traitement des adultes infectés par le VIH-1 multirésistant chez lesquels il est autrement impossible d’établir un schéma de traitement antirétroviral suppressif (voir rubrique 5.1 du RCP). »

SMR Important

ASMR

Compte tenu : - de son activité virologique contre le VIH-1 résistant aux médicaments

antirétroviraux actuellement approuvés, - des données cliniques limitées (étude TMB-301) disponibles chez des

patients en situation de multirésistance (multi-échec) mais ayant montré une activité virologique précoce importante, avec une réponse immuno-virologique et un profil de tolérance favorables à 25 semaines de traitement dans un contexte où l’ibalizumab est utilisé en association à un traitement de fond optimisé,

- du recul limité en termes de maintien de l’efficacité et concernant la tolérance à long terme,

la Commission considère que TROGARZO (ibalizumab), en association à un traitement de fond optimisé, apporte une amélioration du service médical rendu mineure (ASMR IV) dans la stratégie de prise en charge des patients infectés par le VIH-1 multirésistant chez lesquels il est autrement impossible d’établir un schéma de traitement antirétroviral suppressif.

ISP

TROGARZO (ibalizumab) est susceptible d’avoir un impact supplémentaire de santé publique, notamment en raison de son impact potentiel sur la rupture de la chaine de transmission du VIH avec virus multirésistant du fait de la réduction de la charge virale.

Place dans la stratégie thérapeutique

TROGARZO (ibalizumab) est une option de dernier recours, en association à d’autres antirétroviraux appropriés, pour le traitement des patients ayant une infection à VIH-1 multirésistant et pour lesquels les traitements antirétroviraux actuellement disponibles ne permettent pas d’atteindre la suppression virologique.

Population cible

Les situations de multirésistance sont de moins en moins fréquentes puisque moins de 1% des patients ont des virus résistants à tous les INTI et IP. Par extrapolation, la population des patients « adultes infectés par le VIH-1 multirésistant chez lesquels il est autrement impossible d’établir un schéma de traitement antirétroviral suppressif », ne peut être déterminée avec précision mais ne devrait pas excéder une centaine de patients par an en France.

Recommandations

Demandes particulières inhérentes à la prise en charge Compte tenu des caractéristiques du produit et de la complexité de la prise en charge d'un patient en situation de multi-échec, la Commission préconise la restriction de la prescription de TROGARZO (ibalizumab) aux médecins expérimentés dans la prise en charge des patients ayant une infection multirésistante et après discussion en réunion de concertation pluridisciplinaire.

Demandes de données L’AMM est conditionnée à la mise en place d’un registre, qui permettra de mieux caractériser l’efficacité de l’ibalizumab. La Commission souhaite être destinataire des données actualisées dès que celles-ci seront disponibles.

Autres demandes Considérant l’activité virologique sur les souches résistantes aux autres antiviraux disponibles, la Commission précise qu’il n’est pas envisageable de traiter un patient infecté par le VIH-1 multirésistant en impasse thérapeutique pour lesquels les traitements antirétroviraux actuellement disponibles ne permettent pas d’atteindre la suppression virologique sans disposer de l’ibalizumab. Cet avis tient compte de l’absence d’alternative à ce stade de la maladie et de l’apport de l’ibalizumab dans la stratégie thérapeutique.

Page 4: COMMISSION DE LA TRANSPARENCE A 13 MAI 2020 · 13 MAI 2020 ibalizumab TROGARZO, solution pour perfusion Première évaluation L’essentiel Avis favorable au remboursement dans le

HAS - Direction de l'Evaluation Médicale, Economique et de Santé Publique 4/33 Avis définitif

01 CONTEXTE

Il s’agit d’une demande d’inscription sur la liste des spécialités agréées aux collectivités et divers services publics de la spécialité TROGARZO (ibalizumab) 200 mg, solution pour perfusion. L’ibalizumab est un anticorps monoclonal humanisé de l’immunoglobuline G de type 4 (IgG4), qui dispose d’une AMM depuis le 26 septembre 2019, « en association avec d’autres médicaments antirétroviraux, dans le traitement des adultes infectés par le VIH-1 multirésistant chez lesquels il est autrement impossible d’établir un schéma de traitement antirétroviral suppressif ». Il s’agit d’un inhibiteur du VIH-1 dirigé contre le domaine 2 des CD4. L’ibalizumab empêche le VIH-1 d’infecter les lymphocytes T CD4+ en se liant au domaine 2 des CD4 et en interférant dans les étapes ultérieures à la fixation qui sont nécessaires à la pénétration des particules du VIH-1 dans les cellules hôtes, empêchant ainsi la transmission virale qui intervient lors de la fusion des cellules entre elles. L’ibalizumab est actif contre les isolats du VIH-1 du groupe M (sous-types A, B, C, D, E ou O). Il est également actif contre le VIH-1 résistant aux médicaments antirétroviraux actuellement approuvés et présente une activité antirétrovirale contre le VIH-1 à tropisme R5 et X4 et à tropisme double. TROGARZO a bénéficié d’une ATU nominative (ATUn) entre le 10 août 2018 et le 31 septembre 2019 puis d’une ATU de cohorte (ATUc) à partir du 31 septembre 2019. Au total 41 ATUn ont été accordées pour 24 patients et 12 patients ont bénéficié de l’ATUc à ce jour (dont 6 préalablement sous ATUn).

02 INDICATIONS THERAPEUTIQUES

« Trogarzo est indiqué, en association avec d’autres médicaments antirétroviraux, dans le traitement des adultes infectés par le VIH-1 multirésistant chez lesquels il est autrement impossible d’établir un schéma de traitement antirétroviral suppressif (voir rubrique 5.1 du RCP). »

03 POSOLOGIE

« Le traitement doit être instauré par un médecin expérimenté dans la prise en charge de l’infection par le VIH. Posologie La dose recommandée d’ibalizumab est une dose de charge unique de 2 000 mg suivie d’une dose d’entretien de 800 mg toutes les deux semaines. Si le médecin traitant estime qu’il n’existe aucun bénéfice clinique supplémentaire pour le patient en termes de réduction de la charge virale, un arrêt du traitement par l’ibalizumab devrait être envisagé (voir rubrique 5.1 du RCP). Dose oubliée Si une dose d’entretien (800 mg) d’ibalizumab est oubliée et que plus de trois jours se sont écoulés depuis le jour d’administration prévu, une dose de charge (2 000 mg) doit être administrée aussitôt que possible. Reprendre ensuite la dose d’entretien (800 mg) toutes les deux semaines. Patients âgés La sécurité et l’efficacité de l’ibalizumab n’ont pas été établies chez les patients âgés (≥ 65 ans).

Page 5: COMMISSION DE LA TRANSPARENCE A 13 MAI 2020 · 13 MAI 2020 ibalizumab TROGARZO, solution pour perfusion Première évaluation L’essentiel Avis favorable au remboursement dans le

HAS - Direction de l'Evaluation Médicale, Economique et de Santé Publique 5/33 Avis définitif

Population pédiatrique La sécurité et l’efficacité de l’ibalizumab n’ont pas encore été établies chez les enfants de moins de 18 ans. Aucune donnée n’est disponible. Mode d’administration Voie intraveineuse La solution d’ibalizumab diluée doit être administrée par un professionnel des soins de santé. L’ibalizumab doit être administré sous forme de perfusion intraveineuse. L’ibalizumab ne doit pas être administré en injection rapide ou bolus intraveineux. La durée de la première perfusion (dose de charge) ne doit pas être inférieure à 30 minutes. Si aucun effet indésirable associé à la perfusion n’est survenu, la durée des perfusions ultérieures (doses d’entretien) peut être réduite à condition de ne pas être inférieure à 15 minutes. Une fois la perfusion terminée, rincer avec 30 ml de solution injectable de chlorure de sodium 9 mg/ml (0,9%). Tous les patients doivent rester en observation pendant l’administration et une heure après que l’ibalizumab a été administré, au moins lors de la première perfusion. En cas de réaction, il convient d’arrêter la perfusion et d’instaurer un traitement médical approprié. Une médication prophylactique n’est pas nécessaire avant chaque perfusion. Si le patient ne présente aucun effet indésirable associé à la perfusion, la durée de surveillance post-perfusion peut être réduite à 15 minutes la fois suivante. Pour les instructions concernant la dilution du médicament avant administration, voir la rubrique 6.6 du RCP ».

04 BESOIN MEDICAL

L’infection par le VIH est une maladie grave mettant en jeu le pronostic vital. L’objectif d’un traitement antirétroviral (ARV), quelle que soit la situation (première ligne, lignes ultérieures, y compris après multi-échec) doit être l’obtention et le maintien d’une charge virale plasmatique < 50 copies/mL et un nombre de lymphocytes CD4 > 500/mm3. Six classes de médicaments anti-VIH de mécanismes d’action différents sont disponibles pour la prise en charge des patients infectés par le VIH : inhibiteurs nucléosidiques/tidiques de la transcriptase inverse (INTI), inhibiteurs non nucléosidiques de la transcriptase inverse (INNTI), inhibiteurs de protéase (IP), inhibiteurs de fusion (IF), inhibiteurs d’intégrase (INI) et les antagonistes du récepteur CCR5. Actuellement, les combinaisons thérapeutiques associant au moins 3 agents hautement actifs sont recommandées. Ces schémas thérapeutiques permettent d’augmenter la survie, de réduire les infections opportunistes et les complications liées à l’infection par le VIH et d’améliorer la qualité de vie. La trithérapie de première ligne reste une association de 2 INTI (ténofovir/emtricitabine ou abacavir/lamivudine) à un 3ème agent (1 IP ou 1 INNTI ou 1 INI). En situation d’échec virologique, il est recommandé : - de construire un schéma thérapeutique comportant si possible trois médicaments actifs, sur la

base de l’historique thérapeutique, des génotypes successifs et éventuellement des concentrations plasmatiques des ARV,

- d’obtenir à nouveau et maintenir une CV < 50 copies/mL, quelle que soit la situation d’échec, - de ne pas introduire un nouveau traitement ne comportant qu’un seul médicament actif, - de ne pas interrompre un traitement ARV incomplètement efficace, même si aucune option

thérapeutique nouvelle ne semble pouvoir être envisagée, - en cas de réplication virale faible (CV < 200 copies/mL), de corriger autant que possible les

causes de l’échec virologique et de ne changer le traitement ARV qu’en cas de persistance de la réplication virale, surtout si celle-ci augmente et se rapproche du seuil de 200 copies/ml et si le patient reçoit un traitement comportant un INNTI ou un INI,

- en cas d’échec virologique avéré (CV > 200 copies/mL), de modifier rapidement le traitement ARV,

Page 6: COMMISSION DE LA TRANSPARENCE A 13 MAI 2020 · 13 MAI 2020 ibalizumab TROGARZO, solution pour perfusion Première évaluation L’essentiel Avis favorable au remboursement dans le

HAS - Direction de l'Evaluation Médicale, Economique et de Santé Publique 6/33 Avis définitif

- en choisissant le nouveau traitement au cours d’une réunion de concertation multidisciplinaire associant cliniciens, virologues et pharmacologues.

Les molécules les plus récentes, qu’elles appartiennent à de nouvelles classes ou à des classes préexistantes, jouent un rôle important dans un contexte de résistance multiple. Chez les patients virologiquement contrôlés : Lorsqu’une personne sous traitement ARV est en succès virologique (CV < 50 copies/mL), une optimisation thérapeutique peut lui être proposée dans le but d’améliorer sa qualité de vie, de diminuer la toxicité potentielle au long cours d’un médicament, de favoriser l’observance sur le long terme et ainsi de prévenir la survenue d’un échec virologique. Dans tous les cas, il convient de prendre en compte l’antériorité thérapeutique en termes de résistance et de tolérance avant de changer un traitement quelle qu’en soit la raison, intolérance, simplification ou réduction de l’impact des facteurs de risque. Couverture du besoin médical Les traitements actuellement disponibles sont efficaces sur la réplication du virus mais n’en permettent pas l’éradication. Leur tolérance et l’émergence de résistance sur le long terme restent préoccupantes. Par ailleurs, la population infectée par le VIH vieillissant, la prévalence des comorbidités augmente, exposant en particulier ces patients souvent polymédiqués à des interactions médicamenteuses en particulier avec les potentialisateurs pharmacocinétiques1. Aussi, il persiste encore un besoin médical de disposer de nouveaux antirétroviraux avec des profils d’efficacité, de tolérance, de résistance et d’interactions médicamenteuses améliorés.

1 Alice Ranzani, MD et al. Burden of Exposure to Potential Interactions Between Antiretroviral and Non-Antiretroviral Medications in a Population of HIV-Positive Patients Aged 50 Years or Older. J Acquir Immune Defic Syndr 2018;78:193–201

Page 7: COMMISSION DE LA TRANSPARENCE A 13 MAI 2020 · 13 MAI 2020 ibalizumab TROGARZO, solution pour perfusion Première évaluation L’essentiel Avis favorable au remboursement dans le

HAS - Direction de l'Evaluation Médicale, Economique et de Santé Publique 7/33 Avis définitif

05 COMPARATEURS CLINIQUEMENT PERTINENTS

05.1 Médicaments

Les comparateurs cliniquement pertinents de TROGARZO (ibalizumab) sont les médicaments pouvant être proposés au même stade de la stratégie que lui donc en dernier recours. Or à ce jour, aucun autre médicament n’a une AMM superposable à celle de TROGARZO (ibalizumab) : traitement des patients adultes infectés par le VIH-1 multirésistant chez lesquels il est autrement impossible d’établir un schéma de traitement antirétroviral suppressif. A titre indicatif, les antirétroviraux utilisés dans la prise en charge de l'infection VIH sont rappelés ci-après. Les trithérapies actuellement recommandées dans la prise en charge de l'infection par le virus de l'immunodéficience humaine (VIH), chez l'adulte naïf de traitement, sont :

- 2 INTI (ténofovir / emtricitabine) + 1 INNTI (rilpivirine), - 2 INTI (ténofovir / emtricitabine) + 1 INNTI (doravirine), - 2 INTI (ténofovir / lamivudine) + 1 INNTI (doravirine), - 2 INTI (ténofovir / emtricitabine) + 1 IP/ritonavir (darunavir/ritonavir), - 2 INTI (ténofovir/ emtricitabine) + 1 INI (bictégravir, dolutégravir, elvitégravir, raltégravir), - 2 INTI (abacavir / lamivudine) + 1 INI (dolutégravir). - 1 INTI (lamivudine) + 1 INI (dolutégravir)

Tableau 1 - Médicaments actuellement recommandés en première ligne chez l’adulte comme 3ème agent ou en association fixe.

NOM (DCI)

Laboratoire

CPT identique Oui / Non

Indication Avis de la commission de Transparence Prise en charge

Oui / Non

Inhibiteurs non nucléosidiques de la transcriptase inverse (INNTI), seul ou en association avec 2 INTI

EDURANT Rilpivirine Janssen-Cilag

Non

En association avec d'autres médicaments antirétroviraux, dans le traitement de l'infection par VIH-1 chez des patients âgés de 12 ans ou plus naïfs de traitement antirétroviral ayant une charge virale ≤ 100 000 copies/ml d'ARN du VIH-1.

Avis de la CT du 06 décembre 2017 – Renouvellement SMR : Important

Oui

ODEFSEY Rilpivirine + Emtricitabine + TAF Gilead Sciences

Non

Traitement des adultes et des adolescents (âgés de 12 ans et plus, pesant au moins 35 kg) infectés par le VIH-1 dépourvu de mutation connue pour être associée à une résistance à la classe des INNTI, au ténofovir ou à l'emtricitabine et présentant une charge virale ≤ 100 000 copies/mL d'ARN du VIH-1

Avis de la CT du 14 décembre 2016 – Inscription SMR : Important ASMR V : dans la stratégie de prise en charge des patients infectés par le virus de l’immunodéficience humaine de type 1 (VIH-1).

Oui

Page 8: COMMISSION DE LA TRANSPARENCE A 13 MAI 2020 · 13 MAI 2020 ibalizumab TROGARZO, solution pour perfusion Première évaluation L’essentiel Avis favorable au remboursement dans le

HAS - Direction de l'Evaluation Médicale, Economique et de Santé Publique 8/33 Avis définitif

NOM (DCI)

Laboratoire

CPT identique Oui / Non

Indication Avis de la commission de Transparence Prise en charge

Oui / Non

DELSTRIGO Doravirine + lamivudine + TDF MSD France

Non Traitement des adultes infectés par le VIH-1 sans preuve antérieure ou actuelle de résistance à la classe des INNTI, à la lamivudine ou au ténofovir.

Avis de la CT du 3 avril 2019 – Inscription SMR : Important chez les patients avec CV faibles (< 100 000 copies/ml) ASMR V : dans la stratégie de prise en charge des patients infectés par le virus de l’immunodéficience humaine de type 1 (VIH-1).

Oui

PIFELTRO Doravirine MSD France

Non

En association avec d’autres médicaments antirétroviraux, pour le traitement des adultes infectés par le VIH-1 sans preuve antérieure ou actuelle de résistance à la classe des inhibiteurs non nucléosidiques de la transcriptase inverse (INNTI).

Avis de la CT du 3 avril 2019 – Inscription SMR : Important chez les patients avec CV faibles (< 100 000 copies/ml) ASMR V : dans la stratégie de prise en charge des patients infectés par le virus de l’immunodéficience humaine de type 1 (VIH-1).

Oui

Inhibiteurs de l’intégrase (INI) seuls ou en association avec 2 INTI

TIVICAY (Dolutegravir) Viiv Healthcare

Non Traitement de l'infection par VIH, chez les adultes, les adolescents et les enfants à partir de 6 ans, chez les patients naïfs et prétraités

Avis du 28 mai 2014 – Inscription TIVICAY 50 mg Chez les patients naïfs de traitement antirétroviral ou prétraités, dont le virus ne possède pas de mutation de résistance aux inhibiteurs de l’intégrase (INI) : SMR important ASMR IV : par rapport au raltégravir (ISENTRESS®) en raison d’une efficacité immuno-virologique non inférieure à celle du raltégravir, avec une barrière génétique au développement de résistance plus élevée et une meilleure facilité d’emploi que le raltégravir (une monoprise versus deux prises par jour pour le raltégravir).

Oui

ISENTRESS (Raltegravir) MSD France

Non En association avec d’autres agents antirétroviraux, dans le traitement de l’infection par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH-1)

Avis du 17 avril 2019 - Renouvellement d’inscription SMR important

Oui

GENVOYA Elvitegravir + Cobicistat + Emtricitabine + TAF Gilead Sciences

Non

Traitement des adultes et des adolescents (âgés de 12 ans et plus, pesant au moins 35 kg) infectés par le VIH-1 dépourvu de toute mutation connue pour être associée à une résistance à la classe des inhibiteurs de l’intégrase, à l’emtricitabine ou au ténofovir

Avis de la CT du 02 mars 2016 – Inscription SMR : Important ASMR V : dans la stratégie de prise en charge des patients infectés par le VIH-1.

Oui

TRIUMEQ Dolutégravir + Abacavir + Lamivudine

Non Traitement de l'infection par le VIH chez les adultes et adolescents à partir de 12 ans pesant au moins 40 kg

Avis du 17 décembre 2014 – Inscription SMR Important ASMR V : par rapport à la prise séparée des différents composants de l’association fixe.

Oui

Page 9: COMMISSION DE LA TRANSPARENCE A 13 MAI 2020 · 13 MAI 2020 ibalizumab TROGARZO, solution pour perfusion Première évaluation L’essentiel Avis favorable au remboursement dans le

HAS - Direction de l'Evaluation Médicale, Economique et de Santé Publique 9/33 Avis définitif

NOM (DCI)

Laboratoire

CPT identique Oui / Non

Indication Avis de la commission de Transparence Prise en charge

Oui / Non

Viiv Healthcare

BIKTARVY Bictégravir + emtricitabine+ TAF

Non

Traitement des adultes infectés par le virus de l’immunodéficience humaine de type 1 (VIH-1) sans preuve actuelle ou passée de résistance à la classe des inhibiteurs de l’intégrase, à l’emtricitabine ou au ténofovir

Avis du 5 septembre 2018 – Inscription SMR Important ASMR V : par rapport à TRIUMEQ dans la prise en charge des patients adultes infectés par le virus de l’immunodéficience humaine de type 1 (VIH-1) naïfs ou virologiquement contrôlés.

Oui

DOVATO

dolutégravir + lamivudine

Non

Traitement de l’infection par le virus de l’immunodéficience humaine de type 1 (VIH-1) chez l’adulte et l’adolescent âgés de plus de 12 ans et pesant au moins 40 kg, sans résistance connue ou suspectée à la classe des inhibiteurs d’intégrase, ou à la lamivudine

Avis du 8 janvier 2020 – Inscription SMR Important ASMR IV : dans la prise en charge des patients infectés par le VIH-1, à partir de l’âge de 12 ans, naïfs de traitement, ayant plus de 200 CD4/mm3, une CV < 100 000 copies/mL et sans résistance connue ou suspectée vis-à-vis de l’une des deux molécules.

En cours

Inhibiteur de protéase (IP)

PREZISTA Darunavir Janssen-Cilag

Non

En association avec d'autres médicaments antirétroviraux, dans le traitement de l'infection par le VIH-1 chez les adultes ainsi que chez la population pédiatrique à partir de l'âge de 3 ans et pesant au moins 15 kg

Avis de la CT du 19 septembre 2018– Renouvellement SMR : Important

Oui

TAF = ténofovir alafénamide ; TDF = ténofovir disoproxil fumarate

Page 10: COMMISSION DE LA TRANSPARENCE A 13 MAI 2020 · 13 MAI 2020 ibalizumab TROGARZO, solution pour perfusion Première évaluation L’essentiel Avis favorable au remboursement dans le

HAS - Direction de l'Evaluation Médicale, Economique et de Santé Publique 10/33 Avis définitif

Les autres antirétroviraux disponibles sont cités dans le tableau ci-dessous :

DCI Spécialité

Laboratoire Formes pharmaceutiques

Inhibiteurs nucléosidiques / nucléotidique de la transcriptase inverse (INTI)

abacavir ZIAGEN,

ViiV Healthcare comprimé pelliculé et solution buvable

didanosine VIDEX,

Bristol-Myers Squibb comprimé à croquer/ dispersible, gélule gastro-résistantes

emtricitabine EMTRIVA,

Gilead Sciences gélule et solution buvable

lamivudine EPIVIR,

ViiV Healthcare et génériques

comprimé pelliculé et solution buvable

stavudine ZERIT,

Bristol-Myers Squibb gélule et poudre pour solution buvable

zidovudine RETROVIR,

ViiV Healthcare comprimé pelliculé, gélule et solution buvable et injectable

ténofovir disoproxil VIREAD,

Gilead Sciences comprimé pelliculé

Inhibiteurs non nucléosidiques de la transcriptase inverse (INNTI)

éfavirenz SUSTIVA,

Bristol-Myers Squibb et génériques

comprimé, comprimé pelliculé, gélule et solution buvable

étravirine INTELENCE, Janssen-Cilag

comprimé

névirapine VIRAMUNE,

Boehringer Ingelheim et génériques

comprimé et suspension buvable

Inhibiteurs de protéase (IP) + potentialisateur

atazanavir REYATAZ,

Bristol-Myers Squibb gélule

fosamprénavir TELZIR,

ViiV Healthcare comprimé pelliculé et suspension buvable

indinavir CRIXIVAN,

MSD France gélule

lopinavir/ritonavir KALETRA,

Abbvie comprimé pelliculé et solution buvable

saquinavir INVIRASE,

Roche gélule, comprimé pelliculé

tipranavir APTIVUS,

Boehringer Ingelheim capsule molle et solution buvable

ritonavir (potentialisateur)

NORVIR, Abbvie

comprimé pelliculé et suspension buvable

Inhibiteur de fusion

enfuvirtide FUZEON,

Roche poudre et solvant pour suspension injectable

Inhibiteur de CCR5

maraviroc CELSENTRI,

ViiV Healthcare comprimé pelliculé

Associations à doses fixes d’INTI

abacavir + lamivudine KIVEXA,

ViiV Healthcare, et génériques

comprimé pelliculé

abacavir + lamivudine + zidovudine

TRIZIVIR, ViiV Healthcare

comprimé pelliculé

emtricitabine + ténofovir disoproxil

TRUVADA, Gilead Sciences, et

génériques comprimé pelliculé

Page 11: COMMISSION DE LA TRANSPARENCE A 13 MAI 2020 · 13 MAI 2020 ibalizumab TROGARZO, solution pour perfusion Première évaluation L’essentiel Avis favorable au remboursement dans le

HAS - Direction de l'Evaluation Médicale, Economique et de Santé Publique 11/33 Avis définitif

DCI Spécialité

Laboratoire Formes pharmaceutiques

zidovudine + lamivudine

COMBIVIR, ViiV Healthcare et

génériques comprimé pelliculé

Associations à doses fixes 2 INTI + 1 INNTI

éfavirenz + emtricitabine +

ténofovir disoproxil

ATRIPLA, Gilead Sciences

comprimé pelliculé

rilpivirine + emtricitabine +

ténofovir disoproxil

EVIPLERA, Gilead Sciences

comprimé pelliculé

Associations à doses fixes 1 INI + 1 INNTI

Dolutégravir + rilpivirine

JULUCA ViiV Healthcare

comprimé pelliculé

05.2 Comparateurs non médicamenteux

Sans objet Conclusion TROGARZO (ibalizumab) est un médicament de dernier recours réservé aux adultes infectés par le VIH-1 multirésistant chez lesquels il est autrement impossible d’établir un schéma de traitement antirétroviral suppressif avec les médicaments disponibles. A ce titre, il n’existe pas de comparateur cliniquement pertinent.

06 INFORMATIONS SUR L’INDICATION EVALUEE AU NIVEAU

INTERNATIONAL

Pays

PRISE EN CHARGE

Oui / Non / En cours Si non pourquoi

Population(s) Celle de l’AMM ou

restreinte

Royaume-Uni En cours

Allemagne En cours

Pays-Bas En cours

Belgique En cours

Espagne En cours

Italie En cours

Etats-Unis

Oui Libellé d’AMM

TROGARZO, a CD4-directed post-attachment HIV-1 inhibitor, in combination with other antiretroviral(s), is indicated for the treatment of human immunodeficiency virus type 1 (HIV-1) infection in heavily treatment-experienced adults with multidrug resistant HIV-1 infection failing their current antiretroviral regimen.

Page 12: COMMISSION DE LA TRANSPARENCE A 13 MAI 2020 · 13 MAI 2020 ibalizumab TROGARZO, solution pour perfusion Première évaluation L’essentiel Avis favorable au remboursement dans le

HAS - Direction de l'Evaluation Médicale, Economique et de Santé Publique 12/33 Avis définitif

07 ANALYSE DES DONNEES DISPONIBLES

Le dossier s’appuie sur 3 études :

- Etude TMB-202 : étude de phase IIb, multicentrique, randomisée, en double aveugle, comparant deux dosages de l’ibalizumab (800 mg toutes les deux semaines versus 2000 mg tous les mois). La durée de suivi était de 24 semaines. Elle s’est déroulée entre octobre 2008 et Janvier 2011 aux USA et à Taïwan. Sur la base de ces données, la posologie retenue dans les études cliniques ultérieures, qui est celle de l’AMM, est : une dose initiale de 2000 mg, suivie d’une dose de 800 mg administrée toutes les deux semaines.

- Etude TMB-301 : étude de phase III, multicentrique, simple bras, évaluant l’activité antivirale, l’efficacité et la tolérance de l’ibalizumab selon le schéma posologique de l’AMM. La durée de suivi était de 25 semaines. Elle s’est déroulée entre juillet 2015 et octobre 2016 aux USA et à Taïwan.

- Etude TMB-311 : étude de phase III, d’accès élargi, permettant aux patients des études 202 et 301 de poursuivre le traitement et à d’autres patients naïfs de traitement par l’ibalizumab d’être traités, selon le schéma posologique de l’AMM. Elle s’est déroulée entre janvier 2016 et octobre 2018 aux USA.

Aussi, seuls les résultats de l’étude de phase III ayant évalué l’ibalizumab selon le schéma posologique de l’AMM sont pris en compte dans l’analyse de l’efficacité. Les résultats de l’étude TMB-311 (étude d’extension) sont présentés à titre indicatif (données exploratoires).

07.1 Efficacité

7.1.1 Etude TMB-301

Méthodologie

Référence

Etude clinique de phase III, simple bras, d’une durée de 24 semaines,

multicentrique, évaluant l’ibalizumab en association à une thérapie ARV optimisée

chez des patients ayant déjà été traités et infectés par un VIH-1 multi résistant.

Emu B. et al. Phase III Study of Ibalizumab for Multidrug-Resistant HIV-1. N. Engl. J

Med. 2018 ; 379 : 645-54

N° protocole : TMB-301

Clinicaltrials.gov N° d’enregistrement : NCT02475629

Objectif principal de l’étude

Evaluer l’activité antivirale de l’ibalizumab chez des patients infectés par un VIH-1 multi résistant, une semaine après son administration correspondant à J14 et à la fin de la période de l’étude correspondant à la semaine 25.

Type de l’étude Etude de phase III, multicentrique, non comparative.

Date et durée de l’étude

Début de l’étude : 6 juillet 2015 Date de fin de l’étude : 20 octobre 2016 Etude conduite dans 30 centres en Amérique du Nord et à Taïwan.

Principaux critères d’inclusion

Patients de plus de 18 ans ayant une infection documentée au VIH-1 : - n’ayant pas eu d’événement lié au SIDA dans les 3 mois qui précédent la période de

sélection, autre qu’un sarcome de Kaposi cutané ou un syndrome cachectique lié au SIDA,

- ayant une CV > 1000 copies/mL avec une résistance documentée à au moins un ARV dans 3 classes et mesurée par un test de résistance.

- ayant des antécédents de traitement par ARV pendant au moins 6 mois. - recevant un traitement par ARV hautement actifs depuis au moins 8 semaines avant

la période de sélection et voulant bien poursuivre ce traitement jusqu’à J14, OU, en cas d’échec du traitement survenu au cours des 8 semaines précédentes, étant sans traitement et voulant bien le rester jusqu’à J14.

Page 13: COMMISSION DE LA TRANSPARENCE A 13 MAI 2020 · 13 MAI 2020 ibalizumab TROGARZO, solution pour perfusion Première évaluation L’essentiel Avis favorable au remboursement dans le

HAS - Direction de l'Evaluation Médicale, Economique et de Santé Publique 13/33 Avis définitif

- ayant une sensibilité virale totale à au moins un ARV autre que l’ibalizumab, et voulant / pouvant être traités par au moins un agent auquel le virus isolé est complétement sensible selon les tests de résistance en tant que composant de la thérapie ARV optimisée.

- acceptant, si sexuellement actif, d’utiliser une méthode de contraception efficace pendant l’étude et 30 jours après la dernière administration du traitement à l’étude.

Principaux critères de non-inclusion

- SIDA actif de catégorie C selon la classification CDC de l’infection à VIH, à l’exception d’un sarcome de Kaposi cutané ou d’un syndrome cachectique du SIDA.

- Traitement immunomodulateur. - Grossesse ou allaitement.

Schéma de l’étude

L’étude comportait 3 périodes : une période de contrôle entre J0 et J6 ; une période de monothérapie fonctionnelle de J7 à J13, et une période de maintenance de J14 à la semaine 25. - Période de contrôle (J0-J6) = période d’observation pour établir la charge virale

Pendant cette période, les données concernant les traitements en échec en cours (ou l’absence de traitement en cas d’arrêt dans les 8 semaines ayant précédé la sélection) étaient recueillies.

- Période de monothérapie fonctionnelle (J7-J13) = période pour établir l’activité virologique de l’ibalizumab Pendant cette période, les patients poursuivaient les traitements en échec et recevaient à J7 une dose de charge de 2000 mg d’ibalizumab. Les valeurs à J7, avant l’administration de l’ibalizumab, étaient considérées comme les valeurs à l’inclusion.

- Période de maintenance (J14-semaine 25) = période pour établir la tolérance de l’ibalizumab et la persistance de son efficacité virologique, en association avec une thérapie ARV optimisée A J14, la charge virale était évaluée (critère principal d’efficacité), puis la thérapie ARV optimisée était instaurée et devait comprendre au moins un traitement auquel le virus était complètement sensible. A partir de J21, une dose d’entretien de 800 mg d’ibalizumab était administrée, puis toutes les deux semaines jusqu’à la semaine 23.

Tous les patients avaient une visite de fin d’étude à la semaine 25.

Traitements étudiés

Les patients inclus dans l’étude recevaient l’ibalizumab en perfusion intraveineuse avec une dose de charge de 2000 mg. Une dose de 800 mg était ensuite administrée tous les 14 jours à partir de J21 jusqu’à la semaine 23. En cas de manquement d’une dose de 800 mg, une nouvelle dose de 2000 mg devait être administrée. La perfusion devait être effectuée dans la veine céphalique du patient (bras droit ou gauche). La durée de la perfusion ne devait pas être inférieure à 30 minutes au cours des deux premières administrations. Si aucun EI lié à la perfusion n’était survenu après ces deux administrations, la durée de la perfusion pouvait être réduite à 15 minutes (pas moins). Au cours des deux premières administrations, les patients restaient en observation pendant une heure. Si aucun EI lié à la perfusion n’était survenu après ces deux administrations, la période d’observation pouvait être réduite à 15 minutes pour les administrations suivantes. Traitements concomitants :

• Thérapie ARV optimisée, sélectionnée par l’investigateur et comprenant au moins un ARV complétement actif selon les tests de résistance, en plus de l’ibalizumab.

Page 14: COMMISSION DE LA TRANSPARENCE A 13 MAI 2020 · 13 MAI 2020 ibalizumab TROGARZO, solution pour perfusion Première évaluation L’essentiel Avis favorable au remboursement dans le

HAS - Direction de l'Evaluation Médicale, Economique et de Santé Publique 14/33 Avis définitif

• D’autres traitements concomitants à l’exception de ceux listés ci-dessous pouvaient être administrés à la discrétion de l’investigateur. Les traitements non autorisés étaient : les vaccins incluant les vaccins anti-VIH, les traitements en cours d’expérimentation, les traitements pouvant potentialiser l’activité des ARV ou avoir une activité ARV intrinsèque mais n’ayant pas l’indication dans le VIH (mycophénolate, hydroxyurée ou foscarnet), les traitements immunomodulateurs (interleukines et interférons), les immunosuppresseurs médullaires en oncologie, la radiothérapie.

Critère de jugement principal

Proportion de patients ayant une diminution de la charge virale (CV) ≥ 0,5 log10 entre l’inclusion (J7) et J14.

Critères de jugement secondaires, notamment

Critères non hiérarchisés - Réponse virologique : proportion de patients ayant une CV d’ARN VIH-1 < 50

copies/mL et la proportion de patients ayant une CV d’ARN VIH-1 < 400 copies/mL à la semaine 25.

- Réponse immunologique : variation moyenne du nombre de CD4+ entre l’inclusion (J7) et la semaine 25.

- Qualité de vie : mesurée par l’échelle Functional Assessment of HIV Infection (FAHI). - Résistance : changements de sensibilité du HIV-1 associés à un échec virologique

après l’administration de l’ibalizumab. - Immunogénicité de l’ibalizumab. - Tolérance

Taille de l’échantillon

Un total de 30 à 50 patients devait être inclus dans l’étude, afin d’obtenir une puissance de 81% pour détecter un OR de 5,0 avec un test bilatéral de McNemar au seuil de signification de 0,05. L’OR correspondait à une différence de 0,400 entre les taux appariés, si la proportion de patients ayant une baisse de la CV ≥ 0,5 log10 entre J0 et J7 était de 0,10 et la proportion de patients ayant une baisse de la CV ≥ 0,5 log10 entre J7 et J14 était de 0,50.

Méthode d’analyse des résultats

Analyse de l’efficacité Les analyses d’efficacité (principale et secondaires) étaient effectuées sur la population ITT, constituée de l’ensemble des patients inclus dans l’étude. L’analyse

statistique snapshot2 était appliquée pour l’analyse de l’efficacité en cas d’échec virologique le cas échéant. Population d’analyse pour la tolérance La population de tolérance était constituée de l’ensemble des patients qui avaient reçu une dose, même partielle, d’ibalizumab.

Résultats : Effectifs Parmi les 63 patients sélectionnés, 40 ont été inclus dans l’étude et ont reçu au moins une dose d’ibalizumab (Tableau 1). Au total, 32 (80%) ont reçu toutes les doses et 31 (77,5%) ont effectué toutes les visites de l’étude. Parmi les 9 patients qui n’ont pas effectué toutes les visites, 4 sont décédés (un événement par patient : sarcome de Kaposi, lymphome, insuffisance hépatique, sida au stade terminal), un patient a arrêté l’étude du fait d’un EI grave (leucoencéphalite progressive multifocale). Aucun des décès n’a été jugé lié au traitement par l’ibalizumab. Tableau 1. Disposition des patients (population ITT)

Total N (%)

Patients sélectionnés 63

Patients inclus 40

Patients (%) ayant terminé le traitement (per protocol)a 32 (80,0)

Patients (%) n’ayant pas terminé le traitement 8 (20,0)

Evénement indésirable 4 (10,0)

Décès 3 (7,5)

Décision du médecin 1 (2,5)

2 Analyse correspondant à la prise en compte de la valeur de la charge virale aux visites déterminantes ou selon une

période définie autour de cette visite

Page 15: COMMISSION DE LA TRANSPARENCE A 13 MAI 2020 · 13 MAI 2020 ibalizumab TROGARZO, solution pour perfusion Première évaluation L’essentiel Avis favorable au remboursement dans le

HAS - Direction de l'Evaluation Médicale, Economique et de Santé Publique 15/33 Avis définitif

Abandon par le patient 1 (2,5)

Patient non observant 1 (2,5)

Patient perdu de vue 1 (2,5)

Patients (%) ayant terminé l’étude (per protocol)b 31 (77,5)

Patients (%) n’ayant pas terminé l’étude 9 (22,5)

Evénement indésirable 5 (12,5)

Décès 4 (10,0)

Décision du médecin 1 (2,5)

Abandon par le patient 1 (2,5)

Patient non observant 1 (2,5)

Patient perdu de vue 1 (2,5) a Patients ayant reçu toutes les doses d’ibalizumab jusqu’à la semaine 25 b Patients ayant reçu toutes les doses et ayant eu la visite de fin d’étude à la semaine 25 ou la semaine 29

Principales caractéristiques des patients à l’inclusion La majorité des patients étaient des hommes (85%), avec un âge médian de 53 ans (min-max : 23-65 ans). L’ancienneté moyenne du diagnostic de l’infection à HIV-1 était de 20,3 ans et les patients avaient reçu en moyenne 11 médicaments ARV (médiane 10 [min-max : 3-22]). La charge virale (CV) moyenne était de 4,47 log10 copies/mL et le taux de CD4 de 150,2/mm3 (médiane : 73/mm3), dont 27 patients (67,5%) avec un taux de CD4 < 200/mm3. Dix-sept patients (42,5%) avaient nécessité un traitement par un médicament en cours d’expérimentation, le fostemsavir, en tant que composant de leur thérapie ARV optimisée. Les patients inclus étaient résistants aux INTI (65%), aux NNTI (65%), aux IP (63%) et aux INI (48%) ; 50% avaient une résistance documentée à tous les médicaments dans au moins trois classes, et 33% une résistance documentée à tous les médicaments des quatre classes. Cinq patients (13%) avaient une résistance à tous les ARV approuvés y compris les inhibiteurs d’entrée (IE) du VIH. Pendant l’étude tous les patients ont reçu une thérapie ARV optimisée, comprenant au moins un ARV complétement actif, en plus de l’ibalizumab. Les médicaments les plus fréquemment prescrits dans le cadre de la thérapie ARV optimisée étaient : le tenofovir (78%), l’emtricitabine (70%), le dolutegravir (65%), et le darunavir (60%). Chez 17 patients (42,5%) un deuxième médicament en cours d’expérimentation avait été ajouté (fostemsavir). Le maraviroc était prescrit chez 4 patients (10%) et l’enfuvirtide chez 1 patient (2,5%). Critère principal de jugement d’efficacité : proportion de patients ayant une diminution

de la CV ≥ 0,5 log10 à J14 par rapport à J73 La proportion de patients ayant eu une diminution de la CV ≥ 0,5 log10 à la fin de la période de monothérapie fonctionnelle (J14) a été de 82,5% (IC95% [67,2 ; 92,7]), (Tableau 2, figure 1). Tableau 2. Proportion de patients ayant une diminution de la CV ≥ 0,5 log10 entre l’inclusion (J0 à J7) et la fin de la monothérapie fonctionnelle (J7 à J14), population ITT - analyse MEF*

Total N=40

Diminution de la CV ≥ 0,5 log10 à J7

n (% [IC95%]) 1 (2,5% [0,06 ; 13,16])

Diminution de la CV ≥ 0,5 log10 entre J7 et J14

n (% [IC95%]) 33 (82,5% [67,2 ; 92,7])

pa < 0,0001 a Test de McNemar comparant la proportion de patients ayant une diminution de la CV ≥ 0,5 log10 à J7 à la proportion de patients ayant une diminution de la CV ≥ 0,5 log10 à J14, calculé sur le même échantillon de patients pendant les deux périodes. *Analyse MEF : les valeurs manquantes étaient considérées comme des échecs et remplacées par la valeur à l’inclusion.

3 Une diminution (ou augmentation) de la CV de 0,5 log10 correspond à une division (ou multiplication) par 3,2 ; de 1 log10 correspond à une division (ou multiplication) par 10 ; et de 2 log10 correspond à une division (ou multiplication) par 100.

Page 16: COMMISSION DE LA TRANSPARENCE A 13 MAI 2020 · 13 MAI 2020 ibalizumab TROGARZO, solution pour perfusion Première évaluation L’essentiel Avis favorable au remboursement dans le

HAS - Direction de l'Evaluation Médicale, Economique et de Santé Publique 16/33 Avis définitif

Figure 1. Proportion de patients ayant une diminution de la CV ≥ 0,5 log10 à chaque visite par rapport à J7 (valeur à l’inclusion), population ITT - analyse MEF*

Critères de jugement secondaires Réponse virologique entre J7 et la semaine 25 : 42,5% (17/40 patients) des patients ont eu une CV d’ARN VIH-1 < 50 copies/mL ; 50% (20/40) une CV d’ARN VIH-1 < 200 copies/mL et 52,5% (21/40) une CV d’ARN VIH-1 < 400 copies/mL. Cinquante-cinq pour cent des patients ont eu une réduction ≥ 1 log10 de la charge virale, et 48% une réduction ≥ 2 log10 de la charge virale à la semaine 25. Les analyses en sous-groupes ont suggéré une réponse virologique plus faible chez les patients ayant des taux de CD4 bas (< 50/mm3) (3/17 patients) ou une charge virale élevée (> 100 000 copies/mL) (1/7 patients) (Tableau 3). Tableau 3 : Analyses en sous-groupe de la réponse virologique à la semaine 25

Réduction de la CV à la semaine 25

< 50 copies/mL n/N (%)

< 200 copies/mL n/N (%)

Réponse virologique 17/40 (43) 20/40 (50)

Selon les variables à l’inclusion

Nombre de CD4 (cellules/mm3) < 50 50 – 200 > 200

3/17 6/10 8/13

4/17 7/10 9/13

Charge virale (copies/mL) ≤ 100 000 > 100 000

16/33 (48)

1/7

19/33 (58)

1/7

Traitement optimisé Avec fostemsavir Sans fostemsavir

6/17 11/23

8/17

12/23

Résistance Avec résistance aux INI Sans résistance aux INI

11/27 6/13

12/27 8/13

SSG* (résultats historiques des tests) 0 1 2 3 4

1/5 5/12 9/18 1/3 1/2

1/5 6/12

11/18 1/3 1/2

* Le SSG indique le nombre de médicaments pleinement actifs contenus dans le traitement de fond optimisé (OBR) d’un patient, sur la base des résultats au test de résistance antérieur et actuel disponibles. Il a été nécessaire de démontrer la sensibilité au médicament au moyen de tests génotypiques et phénotypiques lorsqu’il était techniquement possible de

Page 17: COMMISSION DE LA TRANSPARENCE A 13 MAI 2020 · 13 MAI 2020 ibalizumab TROGARZO, solution pour perfusion Première évaluation L’essentiel Avis favorable au remboursement dans le

HAS - Direction de l'Evaluation Médicale, Economique et de Santé Publique 17/33 Avis définitif

réaliser les tests au moyen de ces deux méthodes. À titre d’exemple, un SSG de 2 indiquerait que l’isolat du VIH-1 testé était pleinement sensible à deux médicaments de l’OBR.

Echec virologique : 25% (10/40 patients) des patients ont eu un échec ou rebond virologique entre J7 et la semaine 25. Réponse immunologique : une variation du nombre de cellules CD4+ été observée entre J7 (150,2 /mm3) et la semaine 25 (239,9/mm3), soit une augmentation moyenne de 62,4 cellules/mm3. Résistance : Parmi les 7 patients qui n’avaient pas atteint le critère principal d’efficacité, deux avaient un virus ayant une sensibilité diminuée à l’ibalizumab. Parmi les 10 patients en échec virologique ou en rebond virologique, 9 ont eu une diminution de la sensibilité à l’ibalizumab. Immunogénicité : Aucun patient n’a développé d’anticorps anti ibalizumab durant l’étude.

7.1.2 Etude TMB 311

Méthodologie

Référence

Etude de phase III, pour permettre l’accès au traitement par l’ibalizumab à

des patients infectés par un VIH-1 multi résistant, prétraités et en échec

virologique.

N° protocole : TMB-311

Clinicaltrials.gov N° d’enregistrement : NCT02707861

Objectif principal de l’étude

L’objectif de l’étude était de démontrer la sécurité d’emploi et la tolérance de l’ibalizumab chez des patients prétraités et en échec virologique, ayant une infection à HIV-1 multi-résistant.

Type de l’étude Etude de phase III, multicentrique, non comparative, conçue pour permettre aux patients de poursuivre leur traitement avec l’ibalizumab pendant 144 semaines ou jusqu’à la mise sur le marché de l’ibalizumab.

Date et durée de l’étude

Début : Janvier 2016 ; Fin : Octobre 2018 Etude conduite dans 50 centres en Amérique du Nord et à Taïwan.

Principaux critères d’inclusion

Les patients inclus pouvaient être issus de 3 sources : - les études cliniques de phase IIb (TMB-202), et de phase III (TMB-301) - les patients ayant reçu l’ibalizumab dans le cadre d’une utilisation compassionnelle - de nouveaux patients aux options thérapeutiques limitées. Les patients des deux premiers groupes constituaient la cohorte 1 (patients prétraités) ; Les patients du groupe 3 constituaient la cohorte 2 (patients naïfs de traitement par ibalizumab). Principaux critères d’inclusion pour les patients de la Cohorte 1 : patients en cours de traitement par l’ibalizumab dans le cadre un essai clinique ou d’une ATU. Principaux critères d’inclusion pour les patients de la Cohorte 2 : patients de plus de 18 ans ayant une infection documentée au VIH 1, et :

- ayant une CV > 1000 copies / mL avec une résistance documentée à au moins un ARV dans 3 classes.

- ayant des antécédents de traitement par ARV pendant au moins 6 mois - en échec de traitement antirétroviral, poursuivi ou arrêté - sensible à au moins un ARV autre que l’ibalizumab, selon un test de

résistance réalisé dans les 6 mois précédents la sélection et voulant / pouvant être traités par au moins un agent auquel le virus isolé est complétement sensible selon les tests de résistance en tant que composant de la thérapie ARV optimisée.

- acceptant, si actif sexuellement, d’utiliser une méthode de contraception efficace pendant l’étude et 30 jours après la dernière administration du traitement à l’étude

Page 18: COMMISSION DE LA TRANSPARENCE A 13 MAI 2020 · 13 MAI 2020 ibalizumab TROGARZO, solution pour perfusion Première évaluation L’essentiel Avis favorable au remboursement dans le

HAS - Direction de l'Evaluation Médicale, Economique et de Santé Publique 18/33 Avis définitif

Principaux critères de non-inclusion

Cohorte 1 : aucun critère de non-inclusion Cohorte 2 : - Un traitement immunomodulateur (y compris l’interféron), des corticoïdes ou une chimiothérapie par voie générale, au cours des 12 semaines précédant l’inclusion. - Une exposition antérieure à l’ibalizumab. - Grossesse ou allaitement. - Anomalie de grade 3 ou 4 selon la “Division of AIDS (DAIDS) grading scale” à l’exception des évènements de grade 3 : élévation des triglycérides et du cholestérol total.

Schéma de l’étude

Cohorte 1 : les patients poursuivaient le traitement à la même posologie que précédemment, en association avec la thérapie ARV optimisée. Cohorte 2 : A J0, les patients recevaient une dose de charge de 2000 mg ; une thérapie ARV optimisée sur la base des tests de résistance était instaurée à J0 et devait inclure au moins un médicament auquel le virus du patient était sensible. A partir de J14, le patient recevait 800 mg toutes les deux semaines jusqu’à la fin de l’étude, en association avec la thérapie ARV optimisée.

Initiation du traitement Ibalizumab : Dose de charge de 2000mg à J0 + thérapie ARV optimisée

Période de maintenance Ibalizumab 800mg toutes les 2 semaines + thérapie ARV optimisée

J0 J7 J14 …. Fin de l’étude

Critères d’évaluation

Pour la cohorte 2 uniquement : Le critère de jugement principal de l’efficacité était la proportion de patients ayant une diminution de la CV ≥ 0,5 log10 à J7 par rapport à l’inclusion. Critères secondaires (pour les deux cohortes), notamment :

- La variation moyenne de la CV par rapport à la valeur d’inclusion et la proportion de patients ayant une CV d’ARN VIH-1 < 50 copies/mL et la proportion de patients ayant une CV d’ARN VIH-1 < 400 copies/mL à chacune des principales visites (J7 pour la cohorte 2, semaines 24, 48, 72, 96, 120 et 144 (fin de l’étude).

- La variation moyenne du nombre de CD4+ entre la valeur d’inclusion et les différentes visites de suivi

Taille de l’échantillon Il n’y avait pas d’hypothèse à tester. Il était prévu d’inclure environ100 patients.

Méthode d’analyse des résultats

Population d’analyse pour l’efficacité (population ITT) La population ITT était constituée de l’ensemble des patients inclus dans l’étude.

Population d’analyse pour la tolérance La population de tolérance était constituée de l’ensemble des patients qui avaient reçu une dose même partielle du traitement à l’étude.

Résultats : La cohorte 2 était constituée de 38 patients, pour la majorité des hommes (86,8%), d’âge médian 53 ans, ayant une infection à VIH-1 multirésistant. A l’inclusion, la CV médiane était de 4,70 log10

copies/mL, la CV d’ARN VIH-1 de 54 050 copies/mL et le nombre de CD4 de 25,5 /mm3. L’ibalizumab était administré à raison d’une dose de charge de 2000 mg à J0 suivie d’une dose d’entretien de 800 mg toutes les deux semaines. Une thérapie ARV optimisée était associée. Une diminution de la CV ≥ 0,5 log10 (critère principal) a été observée chez 75,7% (28/37) des patients à J7. Une réponse favorable a été également observée sur les critères secondaires, avec :

• une CV d’ARN VIH-1 < 50 copies/mL chez 8/17 patients à la semaine 48,

• une CV d’ARN VIH-1 < 400 copies/mL chez 10/17 patients à la semaine 48,

• une diminution moyenne de la charge virale par rapport à l’inclusion de -1,10 log10 copies/mL à J7 et -1,94 log10 copies/mL à la semaine 48.

Page 19: COMMISSION DE LA TRANSPARENCE A 13 MAI 2020 · 13 MAI 2020 ibalizumab TROGARZO, solution pour perfusion Première évaluation L’essentiel Avis favorable au remboursement dans le

HAS - Direction de l'Evaluation Médicale, Economique et de Santé Publique 19/33 Avis définitif

• une augmentation moyenne des CD4 de 9,7 cellules/mm3 à J7 et 6,3 cellules/mm3 à la semaine 48.

La cohorte 1 était constituée de 27 patients de l’étude TMB-301 et de 12 patients de l’étude TMB-202. Les données de suivi sont très limitées pour permettre une interprétation fiable.

07.2 Qualité de vie

La qualité de vie des patients a été analysée dans l’étude TMB-301 comme critère secondaire à l’aide du questionnaires FAHI4. Aucun changement n’a été observé entre J0 et la semaine 25. Cependant, compte tenu du caractère ouvert de l’étude, de l’absence de groupe contrôle et dans un contexte où un manque de puissance ne peut être exclu, il n’est pas possible de conclure à l’absence de dégradation de la qualité de vie.

07.3 Tolérance

7.3.1 Données issues des études cliniques

Etude TMB-301 Au total, 40 patients ont été exposés à l’ibalizumab pendant une durée médiane de 155 jours. Les EI les plus fréquents ont été : la diarrhée (20%), des nausées (12,5%), de la fatigue (12,5%), de la fièvre, (12,5%), des éruptions cutanées (12,5%) et vertiges (12,5%). Parmi les 18 EIG survenus chez 9 patients (22,5%), seul un cas d’IRIS a été considéré comme lié au traitement par l’ibalizumab. Parmi les 4 décès (10%) survenus, aucun n’a été considéré comme lié au traitement par l’ibalizumab. Dans l’étude TMB-311 - Au sein de la cohorte 2 (nouveaux patients), 38 patients ont été exposés à l’ibalizumab pendant une durée médiane de 321,5 jours. Les EI les plus fréquents ont été : la diarrhée (23,7%), des céphalées (21,1%), des nausées (15,8%), de la toux (15,8%), des éruptions cutanées (15,8%), et de la fatigue (15,8%). Un cas d’IRIS a été considéré comme lié. Aucun des 3 décès n’a été considéré comme lié. - Au sein de la cohorte 1, les durées médianes d’exposition ont été comprises entre 645 (5 patients issus de l’étude 202 traités par 800 mg toutes les deux semaines), 651 jours (27 patients issus de l’étude 301) et 763 jours (7 patients issus de l’étude 202 traités par 2000 mg toutes les 4 semaines). Les EI les plus fréquents des patients issus de l’étude 301 ont été : des infections respiratoires hautes (33,3%), la diarrhée (29,6%), des éruptions (22,2%), de la fièvre, des arthralgies, et des infections urinaires (18,5% chacun). Trois décès sont survenus et ont été considérés comme non liés au traitement. Les EI les plus fréquents des patients issus de l’étude 202 ont été des infections respiratoires hautes (5/12 patients), des infections virales, (2/12 patients), la diarrhée (3/12 patients), des nausées (3/12 patients), de la fatigue (3/12 patients) et des vertiges (2/12 patients). Deux décès sont survenus et ont été considérés comme non liés au traitement.

4 Le questionnaire de l’évaluation fonctionnelle de l’infection par le VIH (FAHI) est un test validé permettant d’évaluer la qualité de vie des patients avec un questionnaire de 44 items comportant 5 échelles fonctionnelles (bien-être physique, bien-être émotionnel pour les patients vivant avec le VIH, bien-être fonctionnel et global, bien-être social et l’évaluation de la fonction cognitive). Chaque question est notée de 0 (pas du tout), 1 (un petit peu), 2 (un peu), 3 (pas mal) ou 4 (beaucoup). Le score total FAHI est calculé en ajoutant les scores de chaque question (score totale allant de 0 à 176 points). Les scores les plus élevés indiquent une détérioration de la fonction (les scores maximaux sont : bien-être physique = 40 points, bien-être émotionnel pour les patients vivant avec le VIH = 40 points, bien-être fonctionnel et global = 52 points, bien-être social = 32 points et l’évaluation de la fonction cognitive = 12 points). Le questionnaire FAHI a été administré à l’inscription (jour 0) et à la fin de l’étude.

Page 20: COMMISSION DE LA TRANSPARENCE A 13 MAI 2020 · 13 MAI 2020 ibalizumab TROGARZO, solution pour perfusion Première évaluation L’essentiel Avis favorable au remboursement dans le

HAS - Direction de l'Evaluation Médicale, Economique et de Santé Publique 20/33 Avis définitif

7.3.2 Données issues du Plan de Gestion des Risques (PGR)

Risques importants identifiés - Aucun

Risques importants potentiels - IRIS

Informations manquantes - Femmes enceintes et allaitantes - Patients > 65 ans - Utilisation sur le long terme

7.3.3 Données issues du RCP

« Les effets indésirables les plus fréquemment rapportés ont été les suivants : éruption cutanée (9,2 %), diarrhée (3,9 %), vertiges (3,9 %), maux de tête (3,9 %), nausées (3,9 %), fatigue (2,0 %) et vomissements (2,0 %). La liste des effets indésirables présentée dans le RCP de TROGARZO sont les suivants. Les fréquences sont définies comme suit : très fréquent (≥ 1/10), fréquent (≥ 1/100 à < 1/10), peu fréquent (≥ 1/1 000 à < 1/100), rare (≥ 1/10 000 à < 1/1 000), très rare (< 1/10 000), et fréquence indéterminée (ne peut pas être estimée sur la base des données disponibles). Les effets indésirables sont classés par ordre de gravité décroissant dans chaque catégorie de fréquence. Tableau récapitulatif des effets indésirables associés à l’ibalizumab (source : RCP de TROGARZO)

Classe de systèmes d’organes Effets indésirables Fréquence*

Affections du système immunitaire hypersensibilité, syndrome inflammatoire de reconstitution immunitaire (voir ci-après et rubrique 4.4 du RCP)

Peu fréquent

Affections du système nerveux vertiges, maux de tête, paresthésie Fréquent

tremblements Peu fréquent

Affections cardiaques extrasystoles ventriculaires, électrocardiogramme anormal

Peu fréquent

Affections vasculaires hypertension, hypertension labile, hypotension orthostatique

Peu fréquent

Affections gastro-intestinales diarrhée, nausées, vomissements Fréquent

sécheresse buccale Peu fréquent

Affections de la peau et du tissu sous-cutané

éruption cutanée**, dermatite, sécheresse cutanée Fréquent

papule, prurit, érythème noueux Peu fréquent

Troubles généraux et anomalies au site d’administration

fatigue Fréquent

sensation de chaleur Peu fréquent

Lésions, intoxications et complications liées aux procédures

contusions Peu fréquent

* La fréquence a été calculée sur la base de données de sécurité sur 24 semaines portant sur 153 personnes recrutées dans une étude de phase IIB, l’étude TMB-202 (n = 113) et une étude de phase III, l’étude TMB-301 (n = 40), ainsi que sur la base de données de sécurité sur au moins 48 semaines portant sur 27 patients de l’étude TMB-301 qui ont été transférés vers l’étude à accès élargi TMB-311. **Inclut la combinaison des termes « éruption cutanée », « éruption cutanée érythémateuse », « éruption cutanée généralisée », « éruption maculaire », « éruption maculo-papuleuse », « éruption pruritique » et « éruption papuleuse ».

Description de certains effets indésirables Éruption cutanée Les éruptions cutanées sont fréquentes. De manière générale, les éruptions cutanées sont d’apparition précoce (c’est-à-dire entre 1 et 3 semaines suivant la première dose d’ibalizumab), d’intensité légère à modérée et ont disparu dans un délai de 1 à 3 semaines avec la poursuite de l’administration de l’ibalizumab. En cas d’éruption cutanée, il est recommandé de surveiller le patient et d’instaurer un traitement symptomatique le cas échéant (par exemple, corticostéroïdes et/ou anti-histaminiques). Sur les 153 patients recrutés dans les études cliniques de phase IIB et III, un patient a présenté une éruption cutanée sévère (non grave). Ce patient a présenté huit effets indésirables sous forme d’éruption cutanée, dont un épisode d’éruption maculaire, un épisode d’éruption cutanée

Page 21: COMMISSION DE LA TRANSPARENCE A 13 MAI 2020 · 13 MAI 2020 ibalizumab TROGARZO, solution pour perfusion Première évaluation L’essentiel Avis favorable au remboursement dans le

HAS - Direction de l'Evaluation Médicale, Economique et de Santé Publique 21/33 Avis définitif

généralisée et six épisodes d’éruption maculo-papuleuse à différents moments au cours du traitement par l’ibalizumab. Aucune mesure n’a été prise concernant l’ibalizumab en réponse à ces épisodes Syndrome inflammatoire de reconstitution immunitaire (IRIS) Sur les 153 patients, deux ont développé un syndrome inflammatoire de reconstitution immunitaire (IRIS) (voir rubrique 4.4 du RCP) se manifestant respectivement par une exacerbation de la leucoencéphalopathie multifocale progressive (grave) et de l’infection cutanée cryptococcique (grave). Ces deux patients ont été exclus du traitement par l’ibalizumab. Hypersensibilité Il a été rapporté qu’un patient sur les 153 avait présenté une réaction d’hypersensibilité (réaction allergique) au jour 21 (soit 7 jours après la deuxième perfusion d’ibalizumab). L’ibalizumab a été interrompu pour ce patient. Immunogénicité Les 153 patients inclus dans les études cliniques de phase IIB et III ont tous été testés afin de détecter la présence d’anticorps IgG anti-ibalizumab tout au long de leur participation. Seul un patient présentait des anticorps anti-ibalizumab. Ce dernier n’avait présenté aucun effet indésirable associé au résultat positif du test d’immunogénicité. Le patient a reçu un traitement par l’ibalizumab pendant une période supplémentaire de 1 an ½ avant de quitter volontairement l’étude avec une charge virale indétectable (< 50 copies/ml). Anomalies de laboratoire Des élévations de la créatinine de grade 3 ont été fréquemment observées chez les patients présentant une insuffisance rénale sous-jacente, des facteurs de risque d’insuffisance rénale et/ou chez des sujets prenant un traitement concomitante connu pour être néphrotoxique. »

07.4 Données d’utilisation

Entre le 10 août 2018 (date de la première ATU nominative) et le 31 septembre 2019 (date de mise en place de l’ATU de cohorte), 41 ATU nominatives chez 24 patients ont été accordées. Aucune donnée concernant les patients n’est disponible. Le 5 septembre 2019, l’ANSM a accordé une ATU de cohorte pour l’ibalizumab. Elle est en place depuis le 30 septembre 2019 dans l’indication suivante : Trogarzo, en association avec d’autres antirétroviraux, est indiqué pour le traitement des patients adultes infectés par le VIH-1 multirésistant, pour lesquels il n’est autrement pas possible de mettre en place un traitement antiviral suppressif A ce jour il y a 12 patients inclus dans la cohorte (dont 6 préalablement sous ATUn). Deux inclusions ont été refusées car il s’agissait de patients infectés par le VIH-2 uniquement. L’âge moyen des 12 patients était de 49,25±14,04 ans (valeur médiane : 53,5 ans). Il s’agissait de 6 hommes et de 6 femmes, avec une ancienneté de la maladie de 26,04±6,77 ans (valeur médiane : 28,63 ans). La charge virale avant le traitement était de 516,48 (±1114,31) x103 copies/mL (valeur médiane : 86,12 103 copies/mL). Le taux de CD4 avant le traitement était de 231±286 /mm3 (valeur médiane : 94,5/mm3). Les derniers traitements antirétroviraux reçus (≥ 3 patients) étaient le darunavir/ritonavir (9 patients), le dolutégravir (5 patients), l’association fixe Emtricitabine / Ténofovir disoproxyl fumarate (5 patients), le maraviroc (4 patients), la trithérapie Bictégravir / Emtricitabine / Ténofovir alafenamide (3 patients) et la doravirine (3 patients). En termes de résistance du VIH, 9 patients n’étaient pas sensibles aux NRTI, 5 n’avaient aucune sensibilité aux NNRTI, 5 n’avaient aucune sensibilité aux inhibiteurs de protéase. Les traitements antirétroviraux associés à TROGARZO (≥ 3 patients) étaient principalement le darunavir/ritonavir (6 patients), le dolutégravir (5 patients), le fostemsavir (4 patients), l’association

Page 22: COMMISSION DE LA TRANSPARENCE A 13 MAI 2020 · 13 MAI 2020 ibalizumab TROGARZO, solution pour perfusion Première évaluation L’essentiel Avis favorable au remboursement dans le

HAS - Direction de l'Evaluation Médicale, Economique et de Santé Publique 22/33 Avis définitif

fixe bictégravir/emtricitabine/ténofovir alafenamide (4 patients), l’atazanavir, l’enfurvitide, la doravirine ou l’association fixe emtricitabine / ténofovir disoproxyl fumarate avec 3 patients chacun. Tableau récapitulatif des traitements associés à TROGARZO

Au 31 janvier 2020, 10 patients étaient encore traités. Ainsi, 2 patients ont interrompu le traitement en raison d’un événement indésirable après la première injection (1 patient) et en raison de l’absence d’un effet thérapeutique satisfaisant selon le médecin après 7 injections (1 patient). Le nombre total de flacons délivrés au cours de l’ATU de cohorte sur la période du 30 septembre 2019 au 31 janvier 2020 a été de 129 unités communes de dispensation pour un total de 12 patients.

07.5 Résumé & discussion

L’ibalizumab (TROGARZO) est un anticorps monoclonal humanisé de l’immunoglobuline G de type 4 (IgG4), qui dispose d’une AMM depuis le 26 septembre 2019, « en association avec d’autres médicaments antirétroviraux, dans le traitement des adultes infectés par le VIH-1 multirésistant chez lesquels il est autrement impossible d’établir un schéma de traitement antirétroviral suppressif ». Il a bénéficié d’une ATU nominative (ATUn) entre le 10 août 2018 et le 31 septembre 2019 puis d’une ATU de cohorte (ATUc) à partir du 31 septembre 2019. Au total 41 ATUn ont été accordées pour 24 patients et 12 patients ont bénéficié de l’ATUc à ce jour (dont 6 préalablement sous ATUn). L’ibalizumab est un inhibiteur du VIH-1 dirigé contre le domaine 2 des CD4, avec une activité antirétrovirale contre le VIH-1 à tropisme R5 et X4 et à tropisme double. Il est actif contre le VIH-1 résistant aux médicaments antirétroviraux (ARV) actuellement approuvés. La posologie recommandée d’ibalizumab est une dose de charge unique de 2 000 mg suivie d’une dose d’entretien de 800 mg toutes les deux semaines, en perfusion intraveineuse. Efficacité L’activité antivirale et l’efficacité de l’ibalizumab, administrée à la dose de 2 000 mg suivie d’une dose d’entretien de 800 mg toutes les deux semaines, en perfusion intraveineuse, a été évaluée dans une étude clinique de phase III (étude TMC-301), multicentrique, non comparative. Cette étude a été réalisée chez des patients infectés par le VIH-1 lourdement prétraités, multirésistants (résistance documentée à au moins un ARV dans trois classes) et ayant une charge virale supérieure à 1 000 copies/mL. Les patients devaient avoir été traités par des antirétroviraux pendant au moins six mois et devaient ne pas répondre au traitement ou ne pas avoir répondu à un traitement récent (au cours des huit dernières semaines). L'étude a consisté en trois périodes distinctes :

Page 23: COMMISSION DE LA TRANSPARENCE A 13 MAI 2020 · 13 MAI 2020 ibalizumab TROGARZO, solution pour perfusion Première évaluation L’essentiel Avis favorable au remboursement dans le

HAS - Direction de l'Evaluation Médicale, Economique et de Santé Publique 23/33 Avis définitif

- une période de contrôle (jour 0-6) visant à établir la charge virale VIH de référence, pendant laquelle les patients sont restés sur leur schéma d'échec, ou n'ont reçu aucun traitement.

- une période de monothérapie fonctionnelle (jours 7-13, 2000 mg d'ibalizumab) visant à établir l’activité virologique de l’ibalizumab. Pendant cette période, les patients poursuivaient les traitements en échec et recevaient à J7 une dose de charge de 2000 mg d’ibalizumab.

- une période d'entretien (jour 14-semaine 25) visant à établir la sécurité et la durabilité de la suppression virologique de l’ibalizumab lorsqu’il est combiné à un traitement de fond optimisé. A J14, la charge virale a été évaluée au regard du critère principal d’évaluation et, par la suite, le traitement de fond a été optimisé pour inclure au moins un médicament auquel le virus du patient était sensible. L’utilisation d’un médicament expérimental dans la composition du traitement de fond optimisé a été autorisée. À partir du jour 21, une dose d’entretien de 800 mg d’ibalizumab a été administrée toutes les deux semaines jusqu’à la semaine 25.

Parmi les 63 patients sélectionnés, 40 ont été inclus dans l’étude et ont reçu au moins une dose d’ibalizumab. La majorité était des hommes (85%), avec un âge médian de 53 ans (min-max : 23-65 ans). L’ancienneté moyenne du diagnostic de l’infection à VIH-1 était de 20,3 ans et les patients avaient reçu en moyenne 11 médicaments ARV (médiane 10 [min-max : 3-22]). La charge virale (CV) moyenne était de 4,47 log10 copies/mL et le taux de CD4 de 150,2/mm3 (médiane : 73/mm3), dont 27 patients (67,5%) avec un taux de CD4 < 200/mm3. Les patients inclus étaient résistants aux INTI (65%), aux NNTI (65%), aux IP (63%) et aux INI (48%) ; 50% avaient une résistance documentée à tous les médicaments dans au moins trois classes, et 33% une résistance documentée à tous les médicaments des quatre classes. Cinq patients (13%) avaient une résistance à tous les ARV approuvés y compris les inhibiteurs d’entrée (IE) du VIH. Les médicaments les plus fréquemment prescrits dans le cadre de la thérapie ARV optimisée comprenant au moins un ARV complétement actif, en plus de l’ibalizumab étaient : le tenofovir (78%), l’emtricitabine (70%), le dolutegravir (65%), et le darunavir (60%). Chez 17 patients (42,5%) un deuxième médicament en cours d’expérimentation avait été ajouté (fostemsavir). Le maraviroc était prescrit chez 4 patients (10%) et l’enfuvirtide chez 1 patient (2,5%). Le critère principal de jugement était la proportion de patients atteignant une diminution ≥ 0,5 log10 de la charge virale entre J7 (fin de la période de contrôle) et J14 (fin de la période de monothérapie fonctionnelle).

Sur la période de monothérapie fonctionnelle (jour 7 à jour 13), une dose de charge de 2000 mg, administrée à J7 sans aucun autre traitement antirétroviral actif, a entraîné une diminution significative de la charge virale (≥ 0,5 log10) chez 33/40 patients (82,5% ; IC95% [67,2 ; 92,7]) entre les jours 7 et 14 contre 1/40 (2,5 % ; [0,06 ; 13,16]) au cours des 7 premiers jours.

Les résultats sur la période d’entretien (critères secondaires) entre J14 à la semaine 25, avec l’ibalizumab administré à la dose de 800 mg toutes les deux semaines en association à un traitement de fond optimisé, ont montré : - une réponse virologique favorable, avec 42,5% (17/40) des patients obtenant une CV d’ARN

VIH-1 < 50 copies/mL; 50% (20/40) une CV d’ARN VIH-1 < 200 copies/mL et 52,5% (21/40) une CV d’ARN VIH-1 < 400 copies/mL.

- une réponse immunologique (variation du nombre de cellules CD4+) favorable, avec une augmentation moyenne des CD4 de 62,4 cellules/mm3.

Les analyses en sous-groupes ont suggéré une réponse virologique plus faible chez les patients ayant des taux de CD4 bas (< 50/mm3) (3/17 patients) ou une charge virale élevée (> 100 000 copies/mL) (1/7 patients). Cependant, bien que les résultats de la période de monothérapie fonctionnelle (jour 7 à jour 13) permettent d’établir l’activité virologique de l’ibalizumab, en l’absence de groupe contrôle, les données de suivi (période d’entretien entre J14 à la semaine 25) reflètent un effet global du traitement (ibalizumab + traitement de fond optimisé), mais ne permettent pas de déterminer la

Page 24: COMMISSION DE LA TRANSPARENCE A 13 MAI 2020 · 13 MAI 2020 ibalizumab TROGARZO, solution pour perfusion Première évaluation L’essentiel Avis favorable au remboursement dans le

HAS - Direction de l'Evaluation Médicale, Economique et de Santé Publique 24/33 Avis définitif

réponse immuno-virologique attribuable à l’ibalizumab en ajout du traitement de fond optimisé et la durabilité de l’effet de l’ibalizumab. Résistance Une diminution de la sensibilité à l’ibalizumab a été observée chez la plupart des patients ayant un échec virologique. Parmi les 7 patients qui n’avaient pas atteint le critère principal d’efficacité, deux avaient un virus ayant une sensibilité diminuée à l’ibalizumab. Parmi les 10 patients en échec virologique ou en rebond, 9 ont eu une diminution de la sensibilité à l’ibalizumab. Selon le RCP « aucun effet résiduel pertinent de l’ibalizumab n’est attendu en cas de développement de résistance. La diminution de la sensibilité à l’ibalizumab n’altère pas la sensibilité à d’autres agents approuvés et ne donne pas lieu à la sélection d’isolats viraux indépendants du CD4 ». Tolérance Les données limitées disponibles n’ont pas mis en évidence de préoccupation majeure en matière de sécurité d’emploi. Les effets indésirables les plus fréquemment rapportés ont été les éruptions cutanées, la diarrhée, les vertiges, les maux de tête, les nausées, la fatigue et les vomissements. La commercialisation de TROGARZO (ibalizumab) est conditionnée à un plan de gestion des risques afin de contrôler les aspects liés à la sécurité d’emploi, en particulier le risque important potentiel de Syndrome inflammatoire de reconstitution immunitaire (IRIS). Les informations manquantes concernent le profil de tolérance chez la femme enceinte et allaitante, les patients > 65 ans et l’utilisation sur le long terme. Discussion Bien que l’activité antivirale de l’ibalizumab soit établie, il est difficile d’apprécier son apport thérapeutique à la posologie et à la durée d’utilisation retenue par l’AMM au vu des données disponibles limitées et comportant de nombreuses limites méthodologiques (étude ouverte, absence de groupe contrôle, faible effectif), dans un contexte où l’ibalizumab est utilisé en association à un traitement de fond optimisé. De plus, le recul est limité en termes de maintien de l’efficacité et concernant la tolérance à long terme. L’AMM est conditionnée à la mise en place d’un registre, qui permettra de mieux caractériser l’efficacité de l’ibalizumab (Cf. rubrique 7.6 Programme d’étude). En l’état actuel des données, TROGARZO (ibalizumab) apporte une réponse au besoin médical identifié, en raison de son activité virologique sur les souches résistantes aux autres antiviraux disponibles, mais dont l’impact sur la morbi-mortalité et/ou sur la qualité de vie est difficile à apprécier à partir des données limitées disponibles. Cependant, il est attendu un impact sur la rupture de la chaine de transmission avec virus multirésistant du fait de la réduction de la charge virale.

07.6 Programme d’études

Une étude PAES (Post Authorization Efficacy Study) a été demandée par l'EMA sous forme de registre afin de caractériser l'efficacité de l'ibalizumab en association avec d’autres médicaments antirétroviraux, dans le traitement des adultes infectés par le VIH-1 multirésistant chez lesquels il est autrement impossible d’établir un schéma de traitement antirétroviral suppressif.

Etude post-inscription demandée par l’EMA. Soumission du rapport Final

Post-authorisation efficacy study (PAES) : In order to further characterise the efficacy of ibalizumab in combination with other anti-retroviral medicinal products, for the treatment of adults infected with multidrug resistant HIV-1 infection for whom it is otherwise not possible to construct a suppressive antiviral regimen, the MAH should conduct and submit the results of a study based on data from a product registry. This study should be conducted according to an agreed protocol.a

31-Oct-2025

Page 25: COMMISSION DE LA TRANSPARENCE A 13 MAI 2020 · 13 MAI 2020 ibalizumab TROGARZO, solution pour perfusion Première évaluation L’essentiel Avis favorable au remboursement dans le

HAS - Direction de l'Evaluation Médicale, Economique et de Santé Publique 25/33 Avis définitif

08 PLACE DANS LA STRATEGIE THERAPEUTIQUE

Instauration d’un premier traitement antirétroviral chez l’adulte Actuellement, les combinaisons thérapeutiques associant au moins 3 agents hautement actifs sont recommandées en première ligne5, comprenant 2 INTI + un troisième agent (1 IP, 1 INNTI ou 1 INI) :

- 2 INTI (ténofovir / emtricitabine) + 1 INNTI (rilpivirine), - 2 INTI (ténofovir / emtricitabine) + 1 IP/ritonavir (darunavir/ritonavir), - 2 INTI (ténofovir/ emtricitabine) + 1 INI (dolutégravir, elvitégravir, raltégravir), - 2 INTI (abacavir / lamivudine) + 1 INI (dolutégravir).

Options recommandées pour l’instauration d’un premier traitement (Morlat avril 2018)5

2 INTI INNTI Comprimé/

prise par jour Commentaires

ténofovir alafénamide /emtricitabine

25/200 mg x 1

rilpivirine

25 mg x 1 1/1

- Uniquement si CV < 5 log copies/ml. Précaution si CD4 < 200/mm3

- Association contre-indiquée si clairance de la créatinine < 30 ml/min.

- Prise au cours d'un repas. Association à un IPP contre-indiquée

ténofovirDF/emtricitabine Gé

245/200 mg x 1

rilpivirine

25 mg x 1 2/1

- Uniquement si CV < 5 log copies/ml. Précaution si CD4 < 200/mm3

- Précaution si clairance de la créatinine < 80 ml/min. Surveillance rénale.

- Prise au cours d'un repas. Association à un IPP contre-indiquée

2 INTI INI Comprimé/

prise par jour Commentaires

ténofovirDF/emtricitabine Gé

245/200 mg x 1

dolutégravir 50 mg x 1

2/1

- Précaution si clairance de la créatinine < 80 ml/min. Surveillance rénale.

- Peu d'interactions médicamenteuses avec le dolutégravir

abacavir/lamivudine

600/300 mg x1

dolutégravir 50 mg x 1

1/1

ou 2/1*

- Uniquement si HLA-B*5701 négatif - Peu d'interactions médicamenteuses avec le

dolutégravir

ténofovir alafénamide /emtricitabine

10/200 mg x 1

elvitégravir/c

150/150 mg x 1 1/1

- Association contre-indiquée si clairance de la créatinine < 30 ml/min.

- Interactions médicamenteuses avec cobicistat

ténofovirDF/emtricitabine

245/200 mg x 1

raltégravir 1200 mg x 1 (2

comprimés de 600 mg)

3/1

- Précaution si clairance de la créatinine < 80 ml/min. Surveillance rénale.

- Pas d'interaction médicamenteuse avec le raltégravir

2 INTI IP/r Comprimé/

prise par jour Commentaires

ténofovirDF/emtricitabine

245/200 mg x1

darunavir/r 800/100 mg x 1

3/1

- Intérêt particulier dans les indications suivantes : immunodépression avancée, charge virale plasmatique élevée, nécessité d'entreprendre un traitement rapidement, femme enceinte.

- Précaution si clairance de la créatinine < 80 ml/min. Surveillance rénale.

- Interactions médicamenteuses avec le ritonavir

ténofovirDF = ténofovir disoproxil fumarate (TDF) *Si 2 INTI sous formes génériques (Gé)

Le bictégravir, nouvel INI et la Doravirine, nouvel INNTI, n’étaient pas disponibles lors de l’actualisation des recommandations françaises.

5 https://cns.sante.fr/wp-content/uploads/2017/01/experts-vih_initiation.pdf

Page 26: COMMISSION DE LA TRANSPARENCE A 13 MAI 2020 · 13 MAI 2020 ibalizumab TROGARZO, solution pour perfusion Première évaluation L’essentiel Avis favorable au remboursement dans le

HAS - Direction de l'Evaluation Médicale, Economique et de Santé Publique 26/33 Avis définitif

BIKTARVY (bictégravir/emtricitabine/ténofovir alafénamide)6 et PIFELTRO (doravirne)7 ou DELSTRIGO (doravirine/lamivudine/ténofovir disoproxil)8 font désormais partie des options de première ligne chez les patients naïfs ; ainsi que la bithérapie dolutégravir + lamuvidune (DOVATO)9. Prise en charge des situations d’échec virologique Le rapport Morlat distingue les situations de réplication virale faible (CV détectable < 200 copies/ml) et les échecs virologiques avérés (CV > 200 copies/ml), confirmés sur deux prélèvements consécutifs, dont les conséquences et la prise en charge sont distinctes.

• Situations de réplication virale faible (CV < 200 copies/ml) Une surveillance particulière est requise et une intervention éventuelle adaptée à la nature du traitement ARV en cours. En cas de difficultés d’observance non liées à des effets indésirables, un changement de traitement n’est généralement pas la réponse la plus appropriée. Si l’inobservance est liée à des effets indésirables ou une inadéquation du schéma posologique avec le rythme de vie du sujet, ce changement peut être considéré. La simplification du traitement (nombre de prises, nombre de comprimés) peut permettre d’améliorer l’observance. Le choix se portera de préférence vers un traitement comportant un IP/r. Après un changement de traitement ARV pour échec virologique, un contrôle précoce (au bout d’un mois) de la CV et de la tolérance du nouveau traitement est nécessaire.

• Situations d’échec virologique avéré (CV > 200 copies/ml) Le choix du nouveau traitement est idéalement discuté au cours d’une réunion de concertation pluridisciplinaire associant cliniciens, virologue, et pharmacologue. Sauf cas particuliers, il n'est pas souhaitable de réaliser des interruptions thérapeutiques. Le schéma thérapeutique optimal comporte trois médicaments actifs, sur la base de l’historique thérapeutique et du génotype cumulé. Les ARV pouvant être considérés comme actifs sont les suivants :

- appartenant à une classe non encore utilisée ; - appartenant à une classe déjà utilisée mais pour lequel le(s) génotype(s) de résistance actuel

et cumulés permettent de penser que cet ARV est actif. Le nouveau traitement associera de préférence un IP/r actif (essentiellement darunavir/r ; exceptionnellement le tipranavir/r ; l’association de deux IP n’est pas recommandée), associé à deux autres ARV actifs à choisir parmi :

- l’étravirine (qui reste fréquemment active même en cas de résistance à efavirenz et/ou névirapine, alors qu’il existe une résistance croisée avec rilpivirine) ;

- le raltégravir (en particulier en association au darunavir/r et à l’étravirine) ; - le dolutégravir qui reste généralement actif, à la posologie de 50 mg x2/j, en cas de mutations

de résistance au raltégravir ou à l’elvitégravir. L'association du dolutégravir avec l’étravirine ne doit pas être utilisée, sauf en association à un IP/r pour compenser l’effet inducteur enzymatique de l’étravirine sur le métabolisme du dolutégravir ;

- il n’y a pas de données disponibles à ce jour concernant l’utilisation de l’elvitégravir/c chez les patients en situation d’échec virologique ;

- maraviroc, à condition qu’un test de tropisme, réalisé au moment de l’échec ou antérieurement, n’ai pas détecté de virus utilisant le corécepteur CXCR4 ;

- enfuvirtide (mais dont l’utilisation prolongée est limitée par sa forme injectable) ; - un ou plusieurs INTI. En cas de multirésistance aux INTI (≥ 3 TAM + M184V), il peut persister

une activité résiduelle de l’abacavir et du ténofovir. Toutefois, le maintien d’INTI en cas de

6Cf. avis de la CT du 5 septembre 2018 relatif à la spécialité BIKTARVY. Disponible sur : https://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_2873692/fr/biktarvy-bictegravir-emtricitabine-tenofovir-alafenamide-association-d-antiretroviraux 7Cf. avis de la CT du 3 avril 2019 relatif à la spécialité PIFELTRO. Disponible sur : https://www.has-sante.fr/jcms/c_2965620/fr/pifeltro 8Cf. avis de la CT du 3 avril 2019 relatif à la spécialité DELSTRIGO. Disponible sur : https://www.has-sante.fr/jcms/c_2965623/fr/delstrigo-doravirine-lamivudine-tenofovir-disoproxil-association-d-antiretroviraux 9 Cf avis de la CT du 8 janvier 2020 relatif à la spécialité DOVATO. Disponible sur : https://www.has-sante.fr/jcms/p_3147186/fr/dovato

Page 27: COMMISSION DE LA TRANSPARENCE A 13 MAI 2020 · 13 MAI 2020 ibalizumab TROGARZO, solution pour perfusion Première évaluation L’essentiel Avis favorable au remboursement dans le

HAS - Direction de l'Evaluation Médicale, Economique et de Santé Publique 27/33 Avis définitif

multirésistance à cette classe d’antirétroviraux ne se justifie pas lorsqu'au moins trois autres antirétroviraux pleinement actifs sont disponibles.

- Avant d'arrêter un INTI actif sur le VHB (lamivudine/emtricitabine, et surtout ténofovir), il est impératif de vérifier le statut VHB.

Les situations de multirésistance sont de moins en moins fréquentes puisque moins 1% des patients ont des virus résistants à tous les INTI et IP. Dans la situation, actuellement exceptionnelle, où un seul ARV reste actif, il est préférable d’éviter une situation de monothérapie fonctionnelle qui conduirait à la sélection rapide de nouvelles mutations de résistance. La possibilité pour ces patients d’accéder à des médicaments en développement, dans le cadre d’essais cliniques et/ou d'ATU, doit être recherchée. Si le test génotypique de résistance montre une résistance à l’ensemble des médicaments disponibles, il est recommandé de ne pas modifier le traitement en cours dans l’attente de pouvoir proposer une multithérapie active. Il est parfois utile d’augmenter les doses des IP/r, sous couvert de dosages plasmatiques, afin d’obtenir une concentration efficace sur des souches multirésistantes (concept de quotient inhibiteur génotypique). Les études de cohorte ont montré que le maintien d’un nombre de CD4 stable malgré une situation d’échec virologique s’accompagnait d’un risque moindre de progression clinique. L’utilisation de foscarnet peut être discutée au cas par cas en l’absence d’autre possibilité thérapeutique pour réduire la CV avant d'introduire un traitement ARV non pleinement efficace. Dans ces situations de multi-échec, les décisions thérapeutiques doivent être prises en réunion multidisciplinaire. L’avis d’une équipe expérimentée dans la prise en charge de ces patients est indispensable dans les situations où les options thérapeutiques apparaissent limitées. Après un changement de traitement ARV pour échec virologique, un contrôle précoce (au bout d’un mois) de la CV et de la tolérance du nouveau traitement est nécessaire. Les recommandations européennes10 actualisées et américaines11, actualisées en 2019 et intégrant l’utilisation de l’ibalizumab ont été prises en compte (cf. annexe). Place de TROGARZO dans la stratégie thérapeutique TROGARZO est une option de dernier recours, en association à d’autres antirétroviraux appropriés, pour le traitement des patients ayant une infection à VIH-1 multirésistant et pour lesquels les traitements antirétroviraux actuellement disponibles ne permettent pas d’atteindre la suppression virologique. Compte tenu des caractéristiques du produit et de la complexité de la prise en charge d'un patient en échec thérapeutique, la Commission préconise la restriction de la prescription de TROGARZO aux médecins expérimentés dans la prise en charge des patients ayant une infection multirésistante et après discussion en réunion de concertation pluridisciplinaire.

10 EACS (European AIDS Clinical Society) Guidelines. Version 10.0. November 2019. Disponible sur : https://www.eacsociety.org/files/2019_guidelines-10.0_final.pdf 11 Aidsinfo. Guidelines for the Use of Antiretroviral Agents in Adults and Adolescents with HIV. December 2019. Disponible sur : https://aidsinfo.nih.gov/guidelines/html/1/adult-and-adolescent-arv/15/virologic-failure

Page 28: COMMISSION DE LA TRANSPARENCE A 13 MAI 2020 · 13 MAI 2020 ibalizumab TROGARZO, solution pour perfusion Première évaluation L’essentiel Avis favorable au remboursement dans le

HAS - Direction de l'Evaluation Médicale, Economique et de Santé Publique 28/33 Avis définitif

09 CONCLUSIONS DE LA COMMISSION

Considérant l’ensemble de ces informations et après débat et vote, la Commission estime :

09.1 Service Médical Rendu

L’infection par le VIH est une maladie grave mettant en jeu le pronostic vital. TROGARZO (ibalizumab) vise à prévenir et/ou à corriger le déficit immunitaire induit par l’infection à VIH chez les patients adultes. Son rapport efficacité/effets indésirables est mal établi en l’absence de données étayant la durabilité de l’effet dans les études cliniques et reste à préciser dans le cadre de l’AMM. Cependant, les données préliminaires démontrant une activité virologique à court terme sur les souches résistantes aux autres antiviraux disponibles sont pour l’instant rassurantes et jugées satisfaisantes au regard du besoin médical. TROGARZO (ibalizumab) est un médicament de dernier recours réservé aux adultes infectés par le VIH-1 multirésistant chez lesquels il est autrement impossible d’établir un schéma de traitement antirétroviral suppressif. Il n’existe pas d’alternative thérapeutique.

Intérêt de santé publique Compte tenu : - de la fréquence et de la gravité de l’infection concernée, - du besoin médical de disposer de nouveaux antirétroviraux avec des profils d’efficacité,

de tolérance et d’interactions médicamenteuse améliorés, - du besoin non couvert chez les patients infectés par le VIH-1 multirésistant chez lesquels

il est autrement impossible d’établir un schéma de traitement antirétroviral suppressif, - du fait que TROGARZO, pourrait apporter une réponse au besoin médical identifié, sans

démonstration formelle, en raison de son activité virologique sur les souches résistantes aux autres antiviraux disponibles, mais dont l’impact sur la morbi-mortalité et/ou sur la qualité de vie, ne peut être apprécié à partir des données limitées disponibles,

- de l’absence d’impact démontré sur le parcours de soins et de vie, - mais au regard de son impact attendu sur la rupture de la chaine de transmission du VIH

avec virus multirésistant, du fait de la réduction de la charge virale. TROGARZO (ibalizumab) est susceptible d’avoir un impact supplémentaire de santé publique, notamment en raison de son impact potentiel sur la rupture de la chaine de transmission du VIH avec virus multirésistant du fait de la réduction de la charge virale.

Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, la Commission considère que le service médical rendu par TROGARZO (ibalizumab) est important dans l’indication de l’AMM. La Commission donne un avis favorable à l'inscription sur la liste des spécialités agréées à l’usage des collectivités dans l’indication et aux posologies de l’AMM.

09.2 Amélioration du Service Médical Rendu

Compte tenu : - de son activité virologique contre le VIH-1 résistant aux médicaments antirétroviraux

actuellement approuvés, - des données cliniques limitées (étude TMB-301) disponibles chez des patients en

situation de multirésistance (multi-échec) mais ayant montré une activité virologique précoce importante, avec une réponse immuno-virologique et un profil de tolérance favorables à 25 semaines de traitement dans un contexte où l’ibalizumab est utilisé en association à un traitement de fond optimisé,

- du recul limité en termes de maintien de l’efficacité et concernant la tolérance à long terme,

Page 29: COMMISSION DE LA TRANSPARENCE A 13 MAI 2020 · 13 MAI 2020 ibalizumab TROGARZO, solution pour perfusion Première évaluation L’essentiel Avis favorable au remboursement dans le

HAS - Direction de l'Evaluation Médicale, Economique et de Santé Publique 29/33 Avis définitif

la Commission considère que TROGARZO (ibalizumab), en association à un traitement de fond optimisé, apporte une amélioration du service médical rendu mineure (ASMR IV) dans la stratégie de prise en charge des patients infectés par le VIH-1 multirésistant chez lesquels il est autrement impossible d’établir un schéma de traitement antirétroviral suppressif.

09.3 Population cible

La population cible de TROGARZO est constituée par les patients « adultes infectés par le VIH-1 multirésistant chez lesquels il est autrement impossible d’établir un schéma de traitement antirétroviral suppressif ». On estime que 153 400 (IC 95 % : 150 300- 156200)12 personnes vivaient avec le VIH en France en 2013. Parmi elles, 84% étaient diagnostiquées, 75% étaient sous traitement ARV et 68% avaient une charge virale contrôlée (50 copies/ml).

Au 31 décembre 201413, le nombre de patients en ALD (Affection Longue durée) au titre du VIH pris en charge dans le cadre du régime général (et des sections locales mutualistes) était de 104 442. En extrapolant les données du régime général (et des sections locales mutualistes), à l’ensemble de la population en France, on peut estimer le nombre de personnes bénéficiant d’une ALD pour l’infection au VIH à environ 118 684 personnes en 2015.

Parmi ces patients, 90% reçoivent un Traitement ARV et 12% des patients sous Traitement ARV ont une charge virale détectable, soit une population de l’ordre de 10 000 patients.

Il n’existe pas de données épidémiologiques françaises publiées pour estimer avec précision le nombre de patients adultes infectés par le VIH-1 multi-résistant et pour lesquels la suppression virale par les traitements ARV disponibles actuellement n’est pas possible. Selon le rapport Morlat, les situations de multirésistance sont de moins en moins fréquentes puisque moins de 1% des patients ont des virus résistants à tous les INTI et IP.

Par extrapolation, la population des patients « adultes infectés par le VIH-1 multirésistant chez lesquels il est autrement impossible d’établir un schéma de traitement antirétroviral suppressif » ne devrait pas excéder une centaine de patients par an en France. A titre indicatif, entre le 10 août 2018 (date de la première ATU nominative) et le 31 septembre 2019 (date de mise en place de l’ATU de cohorte), 41 ATU nominatives chez 24 patients ont été accordées. A ce jour, il y a 12 patients inclus dans la cohorte (dont 6 préalablement sous ATUn)14.

010 AUTRES RECOMMANDATIONS DE LA COMMISSION

Demandes particulières inhérentes à la prise en charge Compte tenu des caractéristiques du produit et de la complexité de la prise en charge d'un patient en situation de multi-échec, la Commission préconise la restriction de la prescription de TROGARZO aux médecins expérimentés dans la prise en charge des patients ayant une infection multirésistante et après discussion en réunion de concertation pluridisciplinaire.

Demandes de données

12 Prise en charge médicale des personnes vivant avec le VIH. Recommandation du groupe d’experts. Rapport 2017. Sous la direction du Professeur Philippe Morlat et sous l’égide du CNNS et de l’ANRS.https://cns.sante.fr/wp-content/uploads/2017/01/experts-vih_initiation.pdf [consulté le 16/07/2018] 13Données CNAMTS 2015.https://www.ameli.fr/fileadmin/user_upload/documents/VIH_2015.pdf[consulté le 16/07/2018] 14 Information fournie par le laboratoire.

Page 30: COMMISSION DE LA TRANSPARENCE A 13 MAI 2020 · 13 MAI 2020 ibalizumab TROGARZO, solution pour perfusion Première évaluation L’essentiel Avis favorable au remboursement dans le

HAS - Direction de l'Evaluation Médicale, Economique et de Santé Publique 30/33 Avis définitif

L’AMM est conditionnée à la mise en place d’un registre, qui permettra de mieux caractériser l’efficacité de l’ibalizumab. La Commission souhaite être destinataire des données actualisées dès que celles-ci seront disponibles.

Autres demandes Considérant l’activité virologique sur les souches résistantes aux autres antiviraux disponibles, la Commission précise qu’il n’est pas envisageable de traiter un patient infecté par le VIH-1 multirésistant en impasse thérapeutique pour lesquels les traitements antirétroviraux actuellement disponibles ne permettent pas d’atteindre la suppression virologique sans disposer de l’ibalizumab. Cet avis tient compte de l’absence d’alternative à ce stade de la maladie et de l’apport de l’ibalizumab dans la stratégie thérapeutique.

011 INFORMATIONS ADMINISTRATIVES ET REGLEMENTAIRES

Calendrier d’évaluation

Date d’examen : 19 février 2020 Date d’adoption : 4 mars 2020 Date d’audition : 13 mai 2020

Parties prenantes / expertise externe

Non

Présentations concernées

TROGARZO 200mg/1,33mL (ibalizumab), solution pour perfusion B/2 flacon de 1,33 mL (CIP : 34009 589 018 9 8)

Demandeur THERATECHNOLOGIES INTERNATIONAL LIMITED

Liste concernée Collectivités (CSP L.5123-2)

AMM Date initiale (procédure centralisée) : 26/09/2019

Conditions de prescription et de délivrance / statut particulier

Liste I Médicament soumis à prescription hospitalière. La première administration doit être effectuée en milieu hospitalier. ATU nominative du 10/08/2018 au 30/09/2019 ATU de cohorte depuis le 05/09/2019 (date de notification par l’ANSM) et mise en place le 30/09/2019

Code ATC J05AX23

Page 31: COMMISSION DE LA TRANSPARENCE A 13 MAI 2020 · 13 MAI 2020 ibalizumab TROGARZO, solution pour perfusion Première évaluation L’essentiel Avis favorable au remboursement dans le

HAS - Direction de l'Evaluation Médicale, Economique et de Santé Publique 31/33 Avis définitif

012 ANNEXE

012.1 Extrait des recommandations européennes (EACS 2019)10

Page 32: COMMISSION DE LA TRANSPARENCE A 13 MAI 2020 · 13 MAI 2020 ibalizumab TROGARZO, solution pour perfusion Première évaluation L’essentiel Avis favorable au remboursement dans le

HAS - Direction de l'Evaluation Médicale, Economique et de Santé Publique 32/33 Avis définitif

Page 33: COMMISSION DE LA TRANSPARENCE A 13 MAI 2020 · 13 MAI 2020 ibalizumab TROGARZO, solution pour perfusion Première évaluation L’essentiel Avis favorable au remboursement dans le

HAS - Direction de l'Evaluation Médicale, Economique et de Santé Publique 33/33 Avis définitif

012.2 Extrait des recommandations américaines (AIDSinfo 2019)11