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Le Mali : pour une économie verte et résiliente aux CHANGEMENTSCLIMATIQUES RÉPUBLIQUE DU MALI Un peuple • Un but • Une foi Ministère de l’Environnement et de l’Assainissement

économie - United Nations Development Programme

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Page 1: économie - United Nations Development Programme

Le M a l i :pour une économie verte et résiliente

aux C H A NG EM E N T S C L I M A T I Q U E S

R É P U B L I Q U E D U M A L I

Un peuple • Un but • Une foi

Ministère de l’Environnement

et de l’Assainissement

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Le M a l i :pour une économie verte et résiliente

aux C H A NG EM E N T S C L I M A T I Q U E S

R É P U B L I Q U E D U M A L I

Un peuple • Un but • Une foi

Ministère de l’Environnement

et de l’Assainissement

Agence de l’Environnement

et du Développement durable

(AEDD)

S E P T E M B R E 2 0 1 1 • P R O G R A M M E D E S N AT I O N S U N I E S P O U R L E D É V E L O P P E M E N T

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table des matières

pour une économie verte et résilient

Liste des abréviations et sigles 4

Résumé exécutif 7

Introduction 9

I. L’environnement et les changements climatiques : enjeux clés pour le développement du Mali 10

1. Les ressources naturelles au cœur du développement 10

2. Les changements climatiques, un défi majeur pour le développement 12

3. Rompre le cercle vicieux de la pauvreté et de la dégradation de l’environnement 14

II. Vers une stratégie d’économie verte et résiliente aux changements climatiques 16

1. Une économie résiliente aux changements climatiques 16

2. Une économie verte 20

III. Un engagement national pour construire une économie verte et résiliente aux changements climatiques 24

1. Une gouvernance spécifique 24

2. Une stratégie en développement 25

3. Une programmation en cours d’élaboration 26

4. Un instrument financier dédié : le Fonds Climat du Mali 27

5. Un soutien international fort dans le cadre d’un partenariat renouvelé 27

Bibliographie 29

Page 6: économie - United Nations Development Programme

6

Liste des abréviations et siglesAEDD Agence de l’environnement et du développement durable

CEDEAO Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest

CMAE Conférence des ministres africains de l’environnement

CCNUCC Convention cadre des Nations unies sur le changement climatique

CNCC Comité national changements climatiques

CNE Conseil national de l’environnement

CNRST Centre national de la recherche scientifique et technologique

CRED Centre for Research on the Epidemiology of Disasters

DNSI Direction nationale de la statistique et de l’informatique

EVRCC Économie verte et résiliente aux changements climatiques

GES Gaz à effet de serre

GIPD Gestion intégrée de la production et des déprédateurs

GMV Grande muraille verte

INSTAT Institut national des statistiques

IPE Initiative pauvreté - environnement

MDP Mécanisme de développement propre

MEA Ministère de l’environnement et de l’assainissement

MEME Ministère de l’énergie, des mines et de l’eau

MRV Mesure, reporting et vérification

NAMA Actions nationales appropriées d'atténuation

OFDA Office for Foreign Disaster Assistance

ONG Organisation non gouvernementale

PAM Programme alimentaire mondial

PANA Programme d’action national d’adaptation aux changements climatiques

PAN-CID Programmes d'action nationaux de la convention de lutte contre la désertification

PDD Document de définition du projet

PDESC Plan de développement social, économique et culturel

PIB Produit intérieur brut

PNAE Plan national d'action environnementale

PNCC Politique nationale sur les changements climatiques

PNUD Programme des Nations unies pour le développement

REDD+ Réduction des émissions liées à la déforestation et à la dégradation des forêts, incluant

la conservation, la gestion forestière durable et l’augmentation des stocks de carbone

SNCC Stratégie nationale sur les changements climatiques

UNICEF Fonds des Nations unies pour l’enfance

USD Dollars US

4

Liste des figuresFigure 1 : Coût des dommages et inefficiences au Mali

par domaine environnemental en 2007

Figure 2 : Évolution de la pluviométrie au Sahel - Mali

Figure 3 : Évolution territoriale de la pluviométrie moyenne

au Mali

Figure 4 : Rompre le cercle vicieux de la pauvreté et de la dégradation

de l’environnement par la construction d’une économie

verte et résiliente aux changements climatiques

Figure 5 : Répartition des émissions de gaz à effet de serre

du Mali en 2000

Figure 6 : Le cadre institutionnel pour une EVRCC

Figure 7 : Coûts des programmes proposés pour la mobilisation

de « financements rapides »

Liste des encadrésEncadré 1 : La multiplication des espèces envahissantes au niveau

des cours d’eau : un exemple de conjugaison des effets

du changement climatique et de la dégradation

de l’environnement

Encadré 2 : Une baisse anticipée de la productivité agricole liée

au changement climatique

Encadré 3 : La prise en compte de la dimension Genre

Encadré 4 : Le développement des services financiers

Encadré 5 : Le renforcement des capacités dans le domaine

de la finance carbone

Encadré 6 : Recherche, éducation, information et sensibilisation

et renforcement de capacités

Encadré 7 : L’Agence de l’environnement et du développement

durable (AEDD)

Encadré 8 : Le Conseil national de l’environnement

et le Comité national changements climatiques

Encadré 9 : Les régions naturelles

Encadré 10 : Un processus de planification hautement participatif

Page 7: économie - United Nations Development Programme

5

En ce début de XXIe siècle, la réalité des changements climatiques nous oblige à reconsidérer nos priorités pour bâtir un déve-

loppement durable. Les considérations qui ont jusqu’ici prévalu à la prise de décision sont devenues inopérantes. Face, à ce

nouvel enjeu, il faut des réponses appropriées.

Les changements climatiques constituent une réalité au Mali. Ils aggravent la dégradation de l’environnement et remettent en

cause les efforts du gouvernement malien pour la réduction de la pauvreté.

Conscient de cette situation, le Mali s’engage dans de profondes mutations afin de pouvoir bâtir une Économie verte et résiliente

aux changements climatiques.

Le Fonds climat, qui a l’appui du Programme des Nations unies pour le développement, procède de cette volonté.

Le Cadre stratégique pour une Économie verte et résiliente aux changements climatiques doit nous permettre de nous orienter

et de guider nos efforts vers la réalisation de cette vision.

Ce Cadre n’est qu’un premier pas dans cette direction. Un ample processus participatif sera mis en œuvre pour déterminer au

cours des deux prochaines années un plan d’investissement en la matière. Ce processus est en soi une avancée, tant la construction

d’un nouveau modèle de développement est avant tout un choix politique qui doit impliquer l’ensemble des parties prenantes.

Le défi environnemental et climatique ne constitue pas qu’une menace pour le Mali. Il présente aussi une source d’opportunités.

Il est l’occasion de repenser nos priorités autour d’une nouvelle vision pour les prochaines décennies.

Le Mali est prêt à assumer toutes ses responsabilités dans le long et sinueux chemin vers une Économie verte et résiliente aux

changements climatiques.

Le Mali, pour une économie verte et résilienteaux changements climatiques

Par Pr Tiémoko Sangaré, Ministre de l ’Environnement et de l ’Assainissement

pour une économie verte et résilient

Page 8: économie - United Nations Development Programme

Le Mali n’est pas à l’origine des changements climatiques,

mais il subit de plein fouet ses effets depuis plusieurs dé-

cennies.

Les évolutions climatiques négatives accroissent la dégra-

dation de l’environnement. Les populations, pour satis-

faire leurs besoins fondamentaux, sont obligées

d’exploiter, et très souvent de manière non durable, les

ressources naturelles qui occupent une place importante

dans l’économie rurale. Ce secteur emploie environ 80 %

de la population active et concentre plus de 35 % du PIB

et 30 % des recettes d’exportation (AEDD, 2010).

Selon l’évaluation économique de la gestion environne-

mentale au Mali (MEA, 2009), les dommages environne-

mentaux et l’utilisation inefficace des ressources

naturelles et des énergies couteraient chaque année en-

viron 21 % de la richesse nationale produite. La même

étude estime que les bénéfices attendus des actions né-

cessaires pour remédier à ces dommages seraient en

moyenne 2,1 fois supérieurs à leurs coûts. Investir dans

la protection de l’environnement est donc un impératif.

Il y a, à l’évidence, un lien très fort entre les changements

climatiques et la pauvreté. L’impact des changements cli-

matiques est visible dans la réduction de la pauvreté ; du

coup remet en cause l’atteinte des Objectifs du millénaire

pour le développement. Or, c’est bien la pauvreté qui est

souvent à la racine de ce processus de dégradation de

l’environnement. C’est cet engrenage vicieux qu’il faut

arrêter pendant qu’il en est encore temps. D’où, l’édifi-

cation d’une Économie verte et résiliente aux change-

ments climatiques (EVRCC).

résumé exécut i fLa construction d’une EVRCC vise à asseoir le développe-

ment du pays à partir d’une adaptation réussie aux effets

des changements climatiques d’une part et une maitrise

des émissions de gaz à effet de serre d’autre part.

Dans sa vision prospective, le Mali entend « disposer à

l’horizon 2025, des modes d’organisation, de consom-

mation et de production qui permettent à une population

malienne sans cesse croissante de vivre durablement sur

un espace territorial dont les ressources naturelles sont li-

mitées et sous la contrainte des changements climatiques,

faisant du Mali un exemple en Afrique en matière de ges-

tion des défis environnementaux et climatiques. »

Pour ce faire, il faudra investir massivement dans les sec-

teurs les plus vulnérables, parmi lesquels :

• l’agriculture à travers une meilleure gestion des sols,

des ressources en eau, l’accès des agriculteurs aux se-

mences améliorées et aux informations climatiques,

etc. ;

• l’élevage à travers une gestion durable des ressources

pastorales (eau, pâturages, cheptel), etc. ;

• la pêche à travers la gestion durable des pêcheries,

la protection des écosystèmes aquatiques, le déve-

loppement de la pisciculture, etc. ;

• l’eau à travers la Gestion intégrée des ressources en

eau (GIRE), la mise en œuvre d’aménagements hy-

drauliques, la récupération des eaux de pluie, le trai-

tement des eaux usées, etc. ;

• la santé, à travers notamment la lutte contre les ma-

ladies climato-sensibles, particulièrement le palu-

disme, l’assainissement et le planning familial.

Page 9: économie - United Nations Development Programme

7

Les secteurs des transports, des mines, de la météorologie sont

aussi concernés alors qu’une meilleure gestion des risques et des

catastrophes et une diversification de l’économie sont également

nécessaires pour s’adapter aux changements climatiques.

Les principales orientations pour la construction d’une économie

verte sont :

• la préservation et l’accroissement du couvert forestier, à tra-

vers notamment la limitation des pressions sur la forêt ;

• le développement des énergies renouvelables (solaire, éolien,

bioénergies, etc.) ;

• l’amélioration de l’efficacité énergétique ;

• la restauration des terres dégradées, le développement du

système de riziculture intensive, l’application du système de

microdoses pour l’utilisation des engrais et une meilleure ges-

tion des résidus agricoles ;

• le développement des études sur les liens santé - environne-

ment et de la filière des plantes médicinales.

Bâtir une économie verte et résiliente aux changements clima-

tiques consiste à intégrer dans la planification du développement

un ensemble d’outils à même d’éclairer les choix politiques à tra-

vers notamment le développement des services financiers (micro-

finance, assurance contre les risques climatiques, etc.), la sécu-

risation foncière et l’aménagement du territoire.

À cet effet, la consolidation d’une équipe de gouvernance spéci-

fique, l’élaboration d’une stratégie détaillée et d’un plan d’inves-

tissement, la création d’un instrument financier capable de

canaliser de manière transparente et efficiente les investissements

nécessaires, doivent être des priorités.

Plusieurs jalons ont été posés dans cette optique: la mise en place

progressive d’un secrétariat spécifique au sein de l’Agence de

l’environnement et du développement durable (AEDD), la créa-

tion du Conseil national de l’environnement, la création du Co-

mité national changements climatiques.

Le cadre stratégique est un premier pas vers l’élaboration d’une

stratégie complète et d’un plan d’investissement. Une proposi-

tion de programmes pour la mobilisation de « financements ra-

pides » a été également élaborée et nécessite la mobilisation de

494,1 millions de dollars sur la période 2012-2016, dont 248,5

millions pour la période 2012-2013.

Dans la démarche, le Mali entend bâtir un partenariat renouvelé

avec ses partenaires internationaux en leur proposant un cadre

idéal pour la réalisation de leurs engagements dans le cadre de

la Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements Cli-

matiques.

Page 10: économie - United Nations Development Programme

10

Page 11: économie - United Nations Development Programme

11 9

Progressivement, la communauté internationale prend la mesure du défi que représentent pour l’humanité les changements climatiques

en cours. Alors que des objectifs ambitieux de réduction des émissions de gaz à effet de serre tardent à voir le jour, des mécanismes de

financements se mettent en place pour permettre aux pays en développement de faire face aux effets changements climatiques.

L’Accord de Copenhague, en décembre 2009, prévoit l’allocation, principalement à travers un fonds international, de 30 milliards d’USD

à la lutte contre les changements climatiques dans les pays en développement pour la période 2010-2012, montant qui atteindrait 100

milliards d’USD par an à partir de 2020.

Les changements climatiques sont non seulement porteurs de risques immenses et pressants pour l’avenir du pays mais ils sont également

une source d’opportunités. En investissant dans un mode de développement à faible intensité carbone et en mobilisant pour cela des fi-

nancements internationaux prévus dans l’Accord de Copenhague, le Mali peut en effet renforcer durablement sa compétitivité écono-

mique.

Le Mali a donc décidé de s’engager résolument dans une transformation profonde pour construire à horizon 2025 une économie verte

et résiliente aux changements climatiques. Cette transformation la fédération et la coordination des efforts de l’ensemble des acteurs :

le gouvernement, le secteur privé, la société civile, les institutions de recherche et les partenaires techniques et financiers.

Ce document présente les implications pour le Mali des changements climatiques. Il définit une vision commune ainsi qu’une feuille de

route pour construire une économie verte et résiliente aux changements climatiques.

introduction

Page 12: économie - United Nations Development Programme

10

1. Les ressources naturellesau cœur du développement

Le capital naturel du Mali contribue de manière critique à la pro-duction nationale et aux conditions de vie des ménages. Les ser-vices environnementaux constituent la base des moyensd’existence, à hauteur de 68 % de la population qui vit en milieurural, population essentiellement touchée par la pauvreté (DNSI,2007).

Le secteur primaire (hors mines), fondé sur l’exploitation des res-sources naturelles, occupe une place importante dans l’économienationale : il emploie environ 80 % de la population active etconcentre plus de 35 % du PIB et 30 % des recettes d’exporta-tion (AEDD, 2010). L’agriculture, qui représente environ 17 % duPIB (AEDD, 2010), dépend fondamentalement de la qualité dessols, de l’existence d’habitats pour des pollinisateurs naturels es-sentiels aux récoltes alimentaires ou pour des prédateurs naturels

contrôlant les parasites, de la protection des bassins hydrolo-giques et de la conservation de variétés et d’espèces résistantesà la sécheresse.L’élevage, qui représente environ 10 % du PIB (AEDD, 2010), estessentiellement de type extensif et est donc très dépendant desressources naturelles : fourrages aériens, herbacées, eau…La pêche contribue à environ 5 % du PIB et emploie 7 % de lapopulation active (AEDD, 2010). Elle dépend in fine de la pro-ductivité des pêcheries, elle-même liée à la santé des écosystèmesaquatiques.La filière bois représente 5 % du PIB, principalement pour la four-niture de bois de chauffe et de charbon de bois, qui proviennentdans leur intégralité des formations forestières, et représententenviron 80 % de la consommation énergétique nationale (AEDD,2010).

La forêt fournit des matériaux de construction pour l’habitat ainsique des produits non ligneux tels que le karité et la gomme ara-bique, qui constituent des filières d’exportation dynamiques.

Par ailleurs, les écosystèmes naturels assurent la production deplantes médicinales qui, utilisées pour soigner 50 % à 80 % desmaladies, constituent la principale ressource permettant à la po-pulation de se soigner (MEA, 2010). C’est également sur eux quereposent en partie le développement du tourisme au Mali, la pro-duction hydroélectrique qui assure 80 % de l’électricité produitedans le pays (MEA, 2011), le transport fluvial et la constructionde la majorité des habitats.

Ces ressources naturelles qui sont à la base du développe-ment du pays, font face à un processus important de dé-gradation, sous les effets conjugués de leur surexploitationet des dynamiques écologiques naturelles aggravées parles changements climatiques.

On constate tout d’abord au Mali une importante dégradationdes sols, de la végétation et des écosystèmes terrestres. La dé-gradation des sols résulte de phénomènes naturels (l’érosion hy-drique et éolienne) accentués par des pratiques agricolesdestructives. Ces pratiques sont liées à la forte pression démo-graphique qui atteint 2,4 % de croissance annuelle (AEDD,2010), et à l’absence d’amélioration de la productivité agricole -à l’exception notable des zones irriguées de l’Office du Niger -au cours des 40 dernières années (Ministère de l’Équipement etdes Transports, 2007) liées à des contraintes économiques, fon-cières et environnementales. Elles sont marquées par la surexploi-tation des sols (réduction des jachères, abandon et sous-utilisation des engrais naturels) qui deviennent progressivementstériles et sont abandonnés. La surexploitation de sols est d’au-tant plus problématique que les sols déjà peu fertiles, sont natu-rellement sensibles à l'érosion éolienne et/ou hydrique. Les tauxde matières organiques y sont en moyenne faible (rarement plusde 1 %) tout comme les teneurs en azote total (moins de 0,2 %),

L’environnement et les changements climatiques sont des enjeux, de plus en plus structurants ; des facteurs déterminants du bien êtrede la population.

I. L’environnement et les changements climatiques :enjeux clés pour le développement du Mali

Page 13: économie - United Nations Development Programme

11

I . L’env i ronnement e t les changements c l imat iques

en potassium et en phosphore (PNAE/PAN-CLD, 1998). Cette dé-gradation des terres, dans un contexte de besoin alimentairecroissant, renforce la tendance à un fort accroissement des su-perficies cultivées (4,7 %/an) aux dépens d’importants écosys-tèmes naturels (AEDD, 2010).

La perte annuelle de superficie forestière est ainsi estimée à en-viron 100 000 ha/an (MEA, 2010). Dans la région de Mopti, 75 %des forêts ont disparu au cours des 20 dernières années (MEA,2009). Cette dégradation des terres entraine également la miseen culture de terres peu productives, les terres marginales repré-sentant 26 % des superficies cultivées (MEA, 2010), avec desconséquences graves en termes d’érosion et de désertification.Le surpâturage, qui entraine la disparition du couvert végétal etle compactage des sols, les feux de brousse et la surexploitationdes ressources en bois contribuent également de manière impor-tante à la dégradation des terres.

Par ailleurs, l’exploitation minière ainsi que la construction et l’en-tretien des infrastructures de transports et de communicationcontribuent également à cette dégradation, à travers le décapageet le dépôt d’énormes quantités de terre sur d’importantes sur-faces rendues ainsi stériles. Elles entrainent également l’augmen-tation soudaine et incontrôlée de la pression démographique surles ressources naturelles locales. Ces dégradations augmententle risque d’érosion et de désertification, entrainent une perte im-portante de biodiversité, affectent la productivité des terres etdes écosystèmes et constituent à ce titre une menace majeurepour la sécurité alimentaire.

On constate par ailleurs une détérioration préoccupante des éco-systèmes aquatiques et de la disponibilité et qualité des res-sources en eau liée à la conjonction de différents facteurs. Ladiminution de la pluviométrie et les sécheresses récurrentes ontperturbé l’équilibre des écosystèmes (MEA, 2006-2007) alors quel’érosion des sols a contribué à l’envasement et l’ensablementdes cours d’eau, mares et lacs et à l’abaissement généralisé duniveau des nappes d’eau. L’extension du front agricole, particu-lièrement l’utilisation abusive des berges comme champs en zonenord guinéenne (PNAE/PAN-CLD, 1998) ou la surexploitation dubourgou (Echinochloa stagnina) entrainant la destruction irréver-sible des mares à bourgou (MEA, 2006-2007 ; MEA, 2009) quisont des sites de frayère, constituent d’autres causes importantesde cette dégradation. Les pratiques destructrices de pêche et lasurexploitation des plans d’eau, ainsi que les gaspillages - dans

le Delta intérieur du Niger, les pertes en eau sont estimées à 30milliards de m3/an (AEDD, 2010) - par exemple la gestion non ra-tionnelle des réseaux d’irrigation, viennent s’ajouter à ces diffé-rentes causes.

Enfin, la pollution des cours d’eau est liée principalement à l’ab-sence de dispositifs de traitement des eaux usées qui sont reje-tées directement dans les cours d’eau et à l’utilisation des intrantsagricoles (engrais et herbicides) dans le cadre de l’intensificationde la production des cultures de rente (coton) et irriguées (riz)(MEA, 2009a).

Le fleuve Niger reçoit ainsi plus de 800000 m3 par an d’eaux uséesissues des activités industrielles (MEA, 2011c) alors que chaquejour les 32000 m3 d’eaux usées domestiques produites dans laville de Bamako sont évacuées directement dans les cours d’eau.

On constate ainsi une détérioration continue de la qualité deseaux de surface, par exemple celle des fleuves au Mali, non pastant du fait d’une pollution physico-chimique mais plutôt bacté-riologique, ainsi que celle des eaux souterraines, comme parexemple aux alentours de Bamako où elles sont fortement conta-minées notamment par les métaux lourds (surtout le mercure etle plomb) et par d’autres substances toxiques. Cette pollution afavorisé la prolifération d’espèces envahissantes telle que la ja-cinthe d’eau (PNAE/PAN-CLD, 1998).

De manière générale, cette dégradation des écosystèmes aqua-tiques et des ressources en eau se caractérise par la baisse de laproductivité des pêcheries, l’ensablement des cours d’eau, parti-culièrement les fleuves Niger et Sénégal, la disparition de nom-breux points d’eau ou la réduction de leur superficie. Celle duDelta intérieur du Niger, où plus de 13 millions de tonnes delimon sont déposées chaque année (AEDD, 2010), a par exemplebaissé de 37000 km2 au début des années 1950 à environ15000 km2 en 1990 (AEDD 2011a).

Enfin, les rejets de polluants et le faible développement de sys-tèmes efficaces de gestion des déchets - seuls 40 % des déchetsdes grandes villes sont évacués vers les dépotoirs finaux du faitde dysfonctionnement dans la filière de gestion des déchets - en-trainent une pollution importante non seulement des ressourcesen eau, mais également des sols et de l’air. Ils sont principalementle fait des activités industrielles, minières, agricoles (via l’usage deproduits phytosanitaires) et de santé (déchets biomédicaux) dans

un contexte marqué par l’absence de normes les régulant et dedispositifs de traitement. Les activités domestiques sont égale-ment en cause alors que seuls 33 % de la population a accès àdes systèmes d’assainissement (MEA, 2011a).

La pollution de l’air intérieur est également problématique auMali, du fait du recours massif au bois de feu et au charboncomme combustibles de cuisson avec un impact sur la santé par-ticulièrement fort sur les femmes et les enfants, qui peuvent ainsisouffrir d’infections respiratoires aiguës. C’est le cas de 8 % desBamakois (MEA, 2011c).

Cette dégradation des terres et des écosystèmes aquatiques repré-sente le principal défi au processus de développement et de réduc-tion de la pauvreté au Mali. Elle concerne particulièrement pour lespopulations pauvres qui dépendent fondamentalement des res-sources naturelles. Les populations plus riches ont en effet généra-lement pu s’éloigner de ces conditions environnementales difficileset s’assurer un accès prioritaire à ces ressources. Selon l’évaluationéconomique de la gestion environnementale au Mali (MEA, 2009b),les dommages environnementaux et l’utilisation inefficace des res-sources naturelles et des énergies couteraient chaque année environ21 % de la richesse produite. La dégradation des sols et des forêtscoûteraient ainsi entre 4 et 6 % du PIB, affectant principalement laproduction agricole, pastorale et forestière.

Les maladies hydriques engendrent par exemple un coût d'op-portunité (perte de main-d’œuvre et frais de santé) avoisinant3 % du PIB alors que les coûts de transaction induits par un accèsdéficient à l'eau (perte de temps) pour les ménages atteignent1 % du PIB. Cela fait du Mali un des pays les plus affectés par

Page 14: économie - United Nations Development Programme

I . L’env i ronnement e t les changements c l imat iques

12

ces dommages du fait de la forte dépendance des activités éco-nomiques aux ressources naturelles et d’une forte croissance ur-baine, qui, en raison du manque d'infrastructure, génèrentd’importants impacts environnementaux et sanitaires. Selon lamême étude, les bénéfices attendus des actions nécessaires pourremédier à ces dommages seraient en moyenne 2,1 fois supé-rieurs à leurs coûts. Investir dans la protection de l’environnement est donc àla fois nécessaire et rentable.

2. Les changements climatiques,un défi majeur pour le développement

Le pays se caractérise par des conditions climatiques parti-culièrement drastiques. Plus de la moitié de sa superficie, soit610095 km2, est localisée en zone saharienne au Nord (pluvio-métrie annuelle < 200 mm), le reste du territoire connaissant unclimat sahélien au centre (pluviométrie annuelle comprise entre200 mm et 600 mm), soudanien (pluviométrie annuelle compriseentre 600 mm et 1000 mm) et soudano-guinéenne au sud (plu-viométrie > 1000 mm) (MEA, 2009a). Le climat tropical sec dupays est ainsi marqué par une pluviométrie annuelle et une duréede la saison pluvieuse croissante du nord au sud.

Le climat est une des dimensions structurantes de l’environne-ment. Son évolution actuelle est très perceptible au Mali en raisondes perturbations importantes quelle génère dans le fonctionne-ment des écosystèmes du pays, et sa contribution au processusde désertification. On observe en effet l’instauration d’un climatplus aride sur l’ensemble du territoire. La pluviosité a chuté ainside 20 % entre la période 1971-2000 et 1951-1970 et les iso-hyètes se sont déplacées d’environ 200 km vers le sud (MEA,2010). Le début et la fin de la saison des pluies sont devenus demoins en moins prévisibles et la durée de la période humide (hi-

Figure 1. Coût des dommages et inefficiences au Mali par do-maine environnemental en 2007 (MEA, 2009b)

vernage) a diminué, passant de 5 mois dans les années 50 à 3 à4 mois aujourd’hui.

De même, les données de température relevées en Afrique del’Ouest, et particulièrement dans le Sahel, indiquent un réchauf-fement plus rapide que la tendance mondiale, avec des augmen-tations allant de 0,2 à 0,3 °C depuis la fin des années 70(CEDEAO, 2009). Enfin, le nombre et l’ampleur des événementsclimatiques extrêmes se sont accrus. En 27 ans (1980-2007), leMali a connu cinq épisodes majeurs de sécheresse tandis que lafréquence des inondations semble croître, et des vents violentstouchent de plus en plus fréquemment les zones sahélienne etsaharienne. Il en résulte sur le plan de la végétation, que le couvertvégétal, qui était composé de savane arborée et de forêt galerieen 1950, est caractérisé depuis deux décennies par une « sahéli-sation » de la savane et une progression des zones désertiques etsemi-désertiques vers le sud du pays. On note également un stresshydrique accru, caractérisé principalement par le tarissement despoints d’eau, l’abaissement du niveau de la nappe phréatique etla réduction du débit des cours d’eau.

Cette évolution du climat devrait se poursuivre dans les an-nées à venir. Les prévisions climatiques réalisées à partir des mo-dèles MAGICC et SCHENGEN estiment que les températurespourraient augmenter de 2 °C en 2050 et de 4 °C en 2100 parrapport à la période 1961-1990 et que la diminution de la plu-viométrie pourrait être comprise entre 5 % et 10 % en 2050 parrapport au niveau de 1960-1990 (CNRST, 2003). Outre le niveaumoyen des précipitations, leurs distributions spatiales et tempo-relles pourraient connaître des changements significatifs. À hori-

Figure 2. Évolution de la pluviométrie au Sahel – Mali (MEA,2008)

Page 15: économie - United Nations Development Programme

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zon 2025, la sécheresse frapperait ainsi le pays durant la premièremoitié de l’hivernage (mois de mai, juin et juillet). Les catas-trophes naturelles (sécheresses, inondations, épidémies…), quide 1980 à 2007 ont affecté près de 3 millions de personnes ettué près de 3,300 personnes au Mali (OFDA/CRED InternationalDisaster Database), pourraient se multiplier et s’intensifier.

Les changements climatiques continueront donc de participer àla dégradation des écosystèmes, particulièrement au processusde désertification. Cette dégradation pourrait avoir des conséquences économiqueset sociales dramatiques, alors que les capacités d’adaptation despopulations sont aujourd’hui faibles du fait de la situation depauvreté qui domine. Selon le PANA, le Programme d’action na-tional d’adaptation aux changements climatiques (Ministère del’Équipement et des Transports, 2007), les secteurs les plus vul-nérables aux changements climatiques sont dans l’ordre l’agri-culture, la santé, la pêche, l’énergie, les ressources en eau,l’élevage, la forêt - faune, l’habitat, le transport, l’industrie etl’éducation. Les petits exploitants agricoles sont, avec les artisans,les populations les plus vulnérables par rapport aux impacts deschangements climatiques sur les moyens d’existence.Le Mali n’utilise aujourd’hui qu’une part minime de ses ressourcesen eau - environ 3,6 milliards de m3 par an sur un potentiel de

■ Encadré 1

La prolifération des espèces envahissantes au niveau des cours

d’eau : un exemple de conjugaison des effets des changements

climatiques et de la dégradation de l’environnement.

Les changements climatiques favorisent l’envahissement des

plans d’eau par des espèces aquatiques envahissantes : salade

d’eau, jacinthe, typha, etc., à travers principalement la réduc-

tion de la vitesse d’écoulement des cours d’eau et l’augmenta-

tion de la température. La détérioration de la qualité des eaux

y contribue également. Ces végétaux entravent la pêche, la na-

vigation, le fonctionnement des aménagements hydro-agricole

et hydro-électriques. Ils asphyxient plusieurs plans d’eau de

la région dont la diversité biologique est reconnue d’impor-

tance mondiale.

l’ordre de 137 milliards de m3 par an (AEDD, 2011b) – dont l’im-portance devrait lui éviter tout problème de disponibilité. Cepen-dant, cette ressource est faiblement mobilisée, du fait desproblèmes d’accès (eaux souterraines, forte évaporation…) etune répartition dans l’espace et dans le temps problématique.Ainsi, les changements climatiques devraient générer un stresshydrique accru. La baisse attendue de la pluviométrie devrait eneffet impacter la disponibilité de ces ressources. Il est ainsi estiméqu’une baisse de 18 % de la pluie entraînerait une diminutionde 35 % des ressources en eau de surface et de 13 % pour lesressources renouvelables des aquifères par rapport à la période1961-1990 (CNRST, 2003). Cette baisse, associée à la dégrada-tion de leur qualité, aurait des conséquences importantes pourles écosystèmes aquatiques, la production nationale et les condi-tions de vie des populations. La diminution du nombre de joursde pluie et l’accroissement de l’intensité des pluies devraient en-traîner par ailleurs une augmentation des inondations.

Les changements climatiques devraient continuer à affecter la pro-duction agricole à travers un déficit accru en eau (avec un impactparticulièrement fort dans les zones les plus arides), la dégradationdes terres, les perturbations du calendrier agricole, la multiplica-tion des événements climatiques extrêmes. Les baisses attenduesde la productivité agricole du fait de l’évolution du climat sontassez significatives pour menacer gravement la sécurité alimen-taire des populations (cf. encadré 2). Les changements climatiquessont également susceptibles de favoriser la recrudescence des in-vasions acridiennes. La plus récente et la plus grave qui date de2004 a compromis les objectifs de production agricole de 30,2 %par rapport aux prévisions (Banque mondiale, 2011).

L’augmentation des températures, la diminution des précipita-tions et l’intensification des événements climatiques extrêmes de-vraient continuer d’avoir des répercussions importantes sur lasanté animale et par conséquent sur la qualité et la quantité ducheptel, sur la disponibilité du fourrage et de l’eau et la qualitédes pâturages. Il est notable que les principales contraintes ac-tuelles à l’augmentation de la productivité du secteur – faible dis-ponibilité et mauvaise qualité de l’alimentation animale ainsi quela mauvaise gestion et maîtrise des épizooties (Banque mondiale,2011) - menacent de s’intensifier avec les changements clima-tiques. L’accroissement déjà constaté du phénomène de trans-humance devrait continuer à se traduire par des mouvementsmassifs du nord vers le sud entraînant des conflits entre éleveurset paysans.

I . L’env i ronnement e t les changements c l imat iques

Figure 3. Évolution territoriale de la pluviométrie moyenne au Mali (MEA, 2010)

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La pêche est particulièrement vulnérable aux effets des change-ments climatiques, qui devraient conduire à une augmentationde la température des plans d’eaux, une diminution des crues dufleuve Niger entraînant une réduction drastique des surfacesinondées qui sont importantes pour la reproduction des poissons,et même à l’assèchement de certains points d’eau. Il pourraitainsi entraîner une diminution de la quantité de poissons et ladisparition de certaines espèces. Historiquement, les volumes depêche ont été réduits de 50 % durant les années de sécheresse,comme en 1984 (AEDD, 2011a).

L’évolution des conditions climatiques devrait impacter directe-ment et indirectement le secteur forestier. L’aridité accrue du cli-mat devrait conduire à la multiplication des feux de brousse etnuire à la capacité de régénération et de résilience des forêts,tandis que la dégradation des terres devrait entraîner une aug-mentation de la déforestation.

Le secteur énergie devrait être affecté par la réduction de la dis-ponibilité des ressources en bois et en eau. La production hydro-électrique est particulièrement sensible à la disponibilité desressources en eau, qui peuvent générer des baisses de produc-tion, allant jusqu’à 20 % durant les années de sécheresse, se tra-duisant par des coupures de courant (AEDD, 2011b).

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Les changements climatiques pourraient favoriser la proliférationde certaines maladies telles que le paludisme - qui représente auMali la première cause de consultation médicale et de mortalitéinfantile (MEA, 2010) - ou la méningite, en étendant leurs zonesd’endémies. Ceci est déjà constaté dans le cas de la Méningitequi sévit également aujourd’hui dans les régions du Nord, habi-tuellement situées en dehors de la ceinture méningitique. Les ma-ladies hydriques, telles que le choléra, pourraient égalements’accentuer avec la raréfaction des ressources en eau potable,ainsi que les maladies respiratoires du fait d’une pollution accruede l’air.

Le faible taux de bitumage des routes (moins de 4 % du réseaunational) les rend particulièrement vulnérables aux changementsclimatiques, particulièrement à l’augmentation de l’érosion et del’ensablement qui en découle, tandis que le réseau de transportfluvial sera handicapé de manière croissante à l’avenir par le dé-ficit pluviométrique et l’ensablement du lit des fleuves.

3. Rompre le cercle vicieuxde la pauvreté et de la dégradationde l’environnement

La dégradation de l’environnement, aggravée par les change-ments climatiques, menace ainsi d’exacerber la situation de pau-vreté qui touchait, en 2005, 59 % de la population malienne.Elle met ainsi en péril plusieurs décennies d’efforts dans la luttecontre la pauvreté et le développement et pourrait accroître l’in-sécurité alimentaire qui concerne environ 15 % de la population(PAM-UNICEF, 2005) ainsi que les migrations internes et externesde populations dépourvues d’autres alternatives. Elle menace l’at-teinte des Objectifs du Millénaire pour le Développement, parti-culièrement en ce qui concerne l’élimination de l’extrêmepauvreté et de la faim, le combat contre le paludisme et l’assu-rance d’un environnement durable.Or, c’est bien la pauvreté qui est souvent à la racine de ce pro-cessus de dégradation de l’environnement. Les populations pau-vres qui dépendent si étroitement des ressources naturelles pourleur subsistance sont généralement très conscientes de leur va-leur et du besoin de les conserver. Mais la pauvreté peut les ame-ner à dégrader ces ressources pour répondre à leurs besoins dujour, les projetant ainsi dans un cercle vicieux où pauvreté et dé-gradation de l’environnement s’entretiennent mutuellement.

I . L’env i ronnement e t les changements c l imat iques

Figure 4. Rompre le cercle vicieux de la pauvreté et de la dé-gradation de l’environnement par la construction d’une éco-nomie verte et résiliente aux changements climatiques

Ainsi, la pauvreté, à travers notamment l’absence d’alternativeséconomiques ou technologiques, favorise au Mali l’exploitationnon durable des terres pour l’agriculture, du bois, la surpêche oule surpâturage, l’urbanisation anarchique, bien que cela se révèlecontre-productif sur le long terme.

C’est ce cercle vicieux, qu’il s’agit de rompre par laconstruction d’une économie verte et résiliente aux chan-gements climatiques. Pour ne pas être condamné à une simplegestion de crises devenues récurrentes, le pays est en effet résoluà s’engager dans la construction d’un nouveau modèle écono-mique fondé sur une gestion durable des ressources naturelles,principal rempart contre la pauvreté, les changements climatiqueset leurs effets.

La vision du Mali est de « disposer à horizon 2025, des modesd’organisation, de consommation et de production qui permettentà une population malienne sans cesse croissante de vivre durable-ment sur un espace territorial dont les ressources naturelles sontlimitées et sous la contrainte des changements climatiques, faisantdu pays un exemple en Afrique en matière de gestion des défisenvironnementaux et climatiques. »

L’opérationnalisation de cette vision passe par l’identification desprincipales orientations stratégiques pour la construction de cenouveau modèle économique.

■ Encadré 2

Une baisse anticipée de la productivité agricole liée aux chan-

gements climatiques

La productivité des cultures du sorgho et du mil dans la zone

de la haute vallée du Niger baisserait de 10 à 26 % en 2025

par rapport à la moyenne de la période 1961-1990 du fait des

changements climatiques (CNRST, 1998).

Une étude portant sur certaines localités du delta intérieur du

Niger a montré que des problèmes de répartition dans le temps

et dans l’espace de la ressource eau liés aux changements cli-

matiques entraîneraient une baisse de la productivité des cul-

tures (CNRST, 2003).

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1. Une économie verte et résilienteaux changements climatiques

Face à la grave menace que constituent les changements clima-tiques, il est fondamental pour le Mali de bâtir une économie ca-pable de résister aux effets de cette évolution du climat. Laconstruction d’une économie résiliente aux effets des change-ments climatiques exige des transformations profondes au niveaudes secteurs clés du développement que sont l’agriculture, l’éle-vage, la pêche, l’eau, la santé, les transports, les mines, le foncier,l’aménagement du territoire, la météorologie, la gestion des ca-tastrophes naturelles, la forêt, l’énergie.

À la croisée des domaines d’intervention de différents secteurs,la gestion durable des terres doit occuper une place centrale dansla construction d’une économie résiliente aux changements cli-matiques. Elle permet également d’augmenter le stockage ducarbone dans les sols. Dans cette perspective, l’accroissement dela surface forestière et agro-forestières, la mise en œuvre d’ou-vrages antiérosifs, la réduction des feux de brousse, l’aménage-ment durable des pâturages, la gestion durable des ressourcesen eau et la sécurisation foncière doivent permettre de prévenir

le processus de dégradation des terres, d’augmenter la produc-tivité des terres et de réhabiliter les terres dégradées. Enfin, lagestion durable des terres est un élément clé pour faire du sec-teur agricole, qui est le secteur qui offre le potentiel le plus im-portant en termes d’effet d’entraînement sur le reste del’économie (Banque mondiale, 2011), le moteur du développe-ment économique du pays.

● L’AGRICULTUREL’adaptation du secteur agricole aux changements climatiquespasse par la vulgarisation des variétés améliorées et adaptées.Pour cela, la sauvegarde de l’agro biodiversité devra être organi-sée et les conditions de sélection, production et de distributionde ces variétés mises en œuvre.

Une attention particulière doit être portée à la gestion des solset à une plus grande sécurisation foncière. Les variétés et typesde cultures doivent être choisis en fonction de l’aptitude des sols.Des aménagements antiérosifs (aménagements en courbes deniveau, cordons pierreux, fixation des dunes, reboisement, etc.)doivent être mis en œuvre. La fertilisation des sols doit être or-ganisée principalement à partir de solutions agro écologiques (ja-chère améliorée, compostage, fumier, engrais biologiques, biopesticides, agroforesterie, techniques culturales tels que le labourminimum ou le semis sur couvert végétal, etc.), qui se révèlentgénéralement moins coûteuses, plus facilement accessibles etplus efficaces sur le long terme.

Ces solutions sont souvent fondées sur des synergies au sein desystèmes de production agro-sylvo-pastorales diversifiés et com-plémentaires. Compte tenu de leur impact négatif sur l’environ-nement, le recours aux engrais minéraux et aux pesticides ne doit

II. Vers une économie verte et résilienteaux changements climatiques : les principales orientations stratégiques

La construction d’une EVRCC s’appuie sur la vision du Mali à l’horizon 2025. Cette vision a consacré la gestion durable de l’envi-ronnement comme un objectif stratégique à long terme (République du Mali, 1999). Elle vise à fonder le développement du pays et laréduction de la pauvreté sur une adaptation réussie aux effets des changements climatiques d’une part et une maitrise des émissionsde gaz à effet de serre d’autre part, à travers principalement une gestion durable des ressources naturelles maximisant les synergiespotentielles entre les mesures d’adaptation et d’atténuation. En effet de nombreuses mesures, telles que le reboisement, la lutte contreles feux de brousse ou la recherche d’une meilleure durabilité de la filière bois-énergie, permettent à la fois de réduire les émissions degaz à effet de serre et de favoriser l’adaptation aux changements climatiques. Nous présenterons ces mesures dans l’une ou l’autre desparties selon l’importance relative de leurs potentiels en matière d’atténuation et d’adaptation.

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être effectué que dans des cas très spécifiques (absence d’alter-native, ressources locales comme les phosphates naturels de Ti-lemsi) et doit faire l’objet d’un usage modéré (microdosage…)dans le cadre d’une gestion intégrée de la production et des dé-prédateurs (GIPD) mettant l’accent sur l’information et la sensi-bilisation des populations. La mise en œuvre de ces mesurespasse par l’amélioration des services de vulgarisation agricole.

Dans le cadre de la gestion durable des ressources en eau, lestechniques de captage et de stockage des eaux de pluie, permet-tent au secteur de s’adapter aux nouvelles conditions climatiquesmarquées par une aridité accrue. Le développement de l’irriga-tion constitue un autre levier important. Le potentiel irrigables’élève à 2,2 millions d’hectares principalement concentrés dansles vallées des fleuves Niger et Sénégal (MEME, 2005) et seule-ment 238,000 hectares sont aujourd’hui exploités. L’efficacitédes systèmes d’irrigation existants peut être améliorée grâce à lalimitation des pertes et au recours à des systèmes économiseursd’eau comme le système goute-à-goute…

À ces mesures, il convient d’ajouter l’Information et la sensibili-sation des populations sur le calendrier agro climatique de réfé-rence pour la planification des activités agricoles, les prévisionsmétéorologiques saisonnières et le bénéfice d’alertes précocesen cas d’événements climatiques extrêmes.

Enfin, la diversification de la production agricole pourrait favoriserune meilleure résilience du secteur face aux changements clima-tiques. Pour faire face aux besoins alimentaires pouvant résulterd’années de sécheresses ou d’inondations, le développement desassurances agricoles notamment, un mécanisme structurel doitêtre mis en place.

● L’ÉLEVAGEL’adaptation de l’élevage aux changements climatiques passe toutd’abord par une gestion durable des ressources pastorales. Il s’agitde promouvoir le respect de la capacité de charge des pâturages,l’aménagement et l’ensemencement des pâturages, la mise enplace de nouveaux périmètres pastoraux et de pare-feu, le déve-loppement de l’élevage intensif… Le développement des culturesfourragères doit permettre également de soulager la pression surles pâturages. Par ailleurs, les calendriers de descente des animauxdans les zones de cultures et les couloirs de passage et des pistesde transhumance doivent être aménagés et entretenus. Des mé-canismes de gestion concertée des ressources naturelles (conven-

tions locales…) doivent être mis en place afin de renforcer la du-rabilité de cette gestion et limiter les conflits.

Le cheptel pourrait également s’adapter aux nouvelles conditionsclimatiques grâce au choix des espèces animales selon des zonespastorales, la conservation des races autochtones résistantes auclimat et ses fluctuations, ainsi que les croisements avec ces racesautochtones. Des dispositifs de lutte contre les maladies climato-sensibles doivent être mis en place, particulièrement la recherchedans ce domaine, les campagnes de vaccination et le renforce-ment des services vétérinaires.

Enfin, la facilitation de l'accès au foncier et l’aménagement despoints d’eau (forages et puits pastoraux, surcreusement desmares et retenues d’eau…) doivent faciliter la résilience du sec-teur aux changements climatiques.

● LA PÊCHELe développement d’un secteur pêche résilient aux effets deschangements climatiques implique le développement de la ges-tion durable des pêcheries de la protection des écosystèmesaquatiques et des bassins versants à travers la mise en défens, la

lutte contre les plantes envahissantes, l’identification des zonesde frayères et de juvéniles.

Pour réduire la pression sur les pêcheries traditionnelles, il faudradévelopper la pisciculture, particulièrement dans les zones irri-guées en lien avec la culture du riz. Il faudra aussi créer des ré-serves piscicoles dédiées à la conservation de la biodiversité.

Enfin la chaîne du froid doit être renforcée au niveau de la filièrepar la mise en place de conditions de l’accès au crédit en vue del’acquisition de matériels et équipements appropriés (camions fri-gorifiques - sacs de conservations - mise en place de sociétés deproduction de glaces, etc.).

● LES RESSOURCES EN EAULe défi des changements climatiques appelle la mise en œuvreeffective de la gestion intégrée des ressources en eau. Il s’agitprincipalement pour cela d’améliorer le suivi des ressources eneau par le renforcement des dispositifs de collecte et de traite-ment des données, de renforcer les cadres de concertation pourla gestion de l’eau et d’envisager des systèmes de transferts deseaux des zones excédentaires vers les zones déficitaires pour va-loriser leurs potentiels agro-sylvo-pastoraux. Il s’agit par exemple

I I . Vers une économie ver te e t rés i l ien te aux changements c l imat iques : les pr inc ipa les or ienta t ions s t ra tég iques

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de mise en eau des vallées fossiles comme la vallée du Serpent,la vallée du Tilemsi, les anciens lits des fleuves Niger et Bani, etc.

Un effort important sera également nécessaire pour la mise enœuvre d’aménagements hydrauliques (grands barrages, barragescollinaires, lacs, mares, captage d’eaux de ruissellement, restau-ration de points d’eaux, forages) de manière à améliorer la mo-bilisation des ressources en eau. Il s’agit d’assurer ainsi unmeilleur accès à l’eau potable, une meilleure disponibilité de laressource eau pour la production et des capacités accrues(stockage, mesures de protection) pour gérer les risques d’inon-dation.

Par ailleurs, il est nécessaire de promouvoir la récupération deseaux pluviales (par la mise en place de réservoirs), ainsi que lestechniques, technologies et comportements en faveur des éco-nomies d’eau et de la réutilisation des eaux usées. Enfin, la miseen place de systèmes de traitement des eaux usées doit permettred’assurer la qualité des ressources en eau.

● LA SANTÉMalgré tous les efforts consentis dans le domaine de la recherche,les effets potentiels des changements climatiques au Mali sur lasanté humaine doivent faire l’objet de davantage de recherches.

Un système de coordination de la veille sanitaire, environnemen-tale et climatique, doit également être mis en place. Il doit per-mettre de suivre les maladies sensibles au climat et à ladégradation de l’environnement au Mali, tandis que les effortsspécifiques contre celles-ci doivent s’intensifier. Par exemple dansle cas du paludisme, l’épandage d’insecticide, la distribution demoustiquaires imprégnées, l’assainissement des milieux vecteursde la maladie, le diagnostic précoce et le traitement adéquat, ainsique la sensibilisation des populations doivent être renforcés.En plus des avancées constatées dans le domaine de l’accès àl’eau potable, l’amélioration de la santé passe par des efforts enmatière d’assainissement, notamment la promotion des latrines,des systèmes de collecte et de gestion des déchets, ainsi que lamise en place de stations d’épuration. Aussi, l’amélioration del’hygiène est un facteur clé nécessitant des campagnes de sensi-bilisation des populations.En outre, la mise en place et l’application effective d’un cadre lé-gislatif et réglementaire adapté est nécessaire pour une meilleuregestion des déchets biomédicaux en milieu hospitalier.

Enfin la promotion du planning familial doit permettre de réduirela pression sur l’environnement et constitue de ce fait une condi-tion cruciale pour améliorer les conditions de vie des populationspauvres, ainsi que la santé maternelle (République du Mali,2009). Le taux d’utilisation de la contraception est pour l’instanttrès faible : moins de 10 % des femmes de 15 à 49 ans en couple(République du Mali, 2009).

● LES TRANSPORTSConstruire la résilience aux changements climatiques du systèmede transport terrestre implique d’assurer d’abord le contrôle desémissions par les véhicules (automobiles, motocyclettes) à traversl’application rigoureuse du contrôle technique, le renouvellementdu parc automobile, l’interdiction d’importer les véhicules âgés,etc. doit permettre au secteur des transports de s’adapter auxchangements climatiques.D’autres mesures comme l’utilisation biocarburant, du covoitu-rage, la promotion de moyens de transport électrique, de tram-ways et d’autres transports en commun, constituent aussi desgages pour une adaptation aux changements climatiques.

● LE SECTEUR MINIERLa systématisation du recours aux évaluations d’impact environ-nemental et social ainsi que la mise en place de plans de gestionenvironnemental et social des impacts directs et indirects sur l’en-vironnement des activités minières doivent contribuer à laconstruction de la résilience aux changements climatiques.Le secteur minier artisanal doit également faire l’objet d’un appuivisant à limiter son impact sur l’environnement, particulièrementla consommation de bois et la pollution des eaux, par la promo-tion d’alternatives techniques et la sensibilisation des populationsprincipalement.

● L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ET L’HABITATBâtir une économie résiliente aux changements climatiques im-plique la mise en place d’une planification territoriale tenantcompte des risques y afférents.Il est également nécessaire de mettre en place des systèmesd’alerte pour protéger les populations dont l’habitat est en zonesinondables à risque, ainsi que de créer des mécanismes financiersde compensation (fonds, assurances risques) pour permettre defaire face aux effets des événements climatiques extrêmes sur lespopulations, leurs territoires et habitats. À compléter par l’idéede type de construction et matériaux

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● LE FONCIERLa sécurisation foncière est une condition nécessaire à la gestiondurable de l’environnement, en fournissant aux propriétaires lesincitations adéquates pour cela. Des efforts importants doiventêtre menés dans ce domaine, à travers l’application de la LOA etla capitalisation des expériences réussies La prise en compte dela dimension Genre devra occuper également une place centraledans cette démarche.

● LA GESTION DES RISQUES ET DES CATASTROPHESLa résilience aux changements climatiques doit s’appuyer sur unegestion active et efficace des risques et des catastrophes. Pourcela, il est nécessaire de renforcer le cadre législatif et institution-nel dans le domaine de la prévention, réduction des risques ainsique la gestion des catastrophes.

● LE RENFORCEMENT DES CAPACITÉS DE LA MÉTÉOROLOGIELe réseau de mesure météorologique doit être étendu et renforcéainsi que les capacités d’analyse des données de manière à pou-voir améliorer les prévisions du climat à court, moyen et longterme. Ces prévisions sont nécessaires pour permettre l’adapta-tion du calendrier agricole à l’évolution et à la plus grande varia-bilité du climat, l’adaptation du pays à l’accroissement desévénements climatiques extrêmes à travers le renforcement dusystème d’alerte précoce et le développement d’une politiquenationale d’adaptation fondée sur une vision claire et précise del’évolution du climat.

● LA DIVERSIFICATION DE L’ÉCONOMIELa diversification de l’économie est un levier important pour réduiresa vulnérabilité aux changements climatiques. Le développementdes secteurs du tourisme, de l’industrie agroalimentaire, des mines,des services, les NTIC sont des priorités qu’il faut développer dansle cadre d’une gouvernance améliorée afin qu’ils contribuentmieux au développement économique et social du pays.

I I . Vers une économie ver te e t rés i l ien te aux changements c l imat iques : les pr inc ipa les or ienta t ions s t ra tég iques

■ Encadré 3

La nécessaire prise en compte de la dimension Genre

Les couches vulnérables, notamment les femmes, les jeunes, les vieil-

lards, les étrangers, etc. impliquées dans la gestion des ressources

naturelles sont les plus exposées aux conséquences néfastes des chan-

gements climatiques.

La dégradation de l’environnement entraîne une charge de travail plus

importante pour les femmes qui sont de ce fait particulièrement sensi-

bles à sa protection. Il est donc nécessaire de veiller à, la sauvegarde

des intérêts de cette catégorie d’acteurs dans la construction d’une éco-

nomie verte et résiliente aux changements climatiques. Cela doit se tra-

duire non seulement au niveau des actions à mettre en œuvre

(alternatives au bois-énergie, activités génératrices de revenus, micro-

finance, droits fonciers, planning familial, etc.) mais également par une

participation importante des femmes dans le processus d’élaboration

de la stratégie et du plan d’investissement en matière d’EVRCC.

■ Encadré 4

Le développement des services financiers

De nombreuses actions mentionnées pour construire une

EVRCC nécessitent pour les populations de réaliser des

investissements, en raison de leur faible capacité finan-

cière. Il est donc nécessaire de favoriser le développement

des services financiers, particulièrement de la micro fi-

nance, qui doit faciliter à travers le crédit, l’accès aux

équipements adéquats, par exemple dans les secteurs de

l’agriculture, de la pêche, de l’énergie, etc. Les services

d’épargne et d’assurance sont également nécessaires pour

permettre à la population malienne de mieux gérer les

risques associés aux changements climatiques, particu-

lièrement dans le domaine agricole. La mise en place d’un

service d’assurance contre les risques climatiques pour

les agriculteurs est dans ce sens une priorité.

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2. Une économie verte

Pour affronter ses défis environnementaux et climatiques, le Malidoit construire une économie sobre en carbone et respectueusedes ressources naturelles. Une production à faible intensité decarbone doit en effet lui conférer un avantage concurrentiel dansun contexte marqué à l’avenir par une contrainte carbone de plusen plus structurante au niveau de l’économie globale. Cet objec-tif doit être atteint dans un contexte de croissance forte : le gou-vernement du Mali ambitionne une croissance de la productionannuelle de 7 % pour la période 2012-2017, rendant ainsi l’ob-jectif à la fois encore plus nécessaires et plus difficile à atteindre.Une économie sobre en carbone doit permettre de trouver denouvelles opportunités de développement.

L’examen de la répartition sectorielle des émissions de gaz à effetde serre (GES) du Mali en 2000 permet d’identifier les principalespotentialités en matière d’atténuation des changements clima-tiques qui se trouvent principalement dans les secteurs forêts,énergie/transports et agriculture (cf. figure 5). Les feux de broussene sont pas inclus dans cette répartition car leur contribution auxémissions de GES est difficile à estimer bien que probablementsubstantielle.

Ces potentialités ont déjà été largement explorées, à travers prin-cipalement la participation aux Mécanismes de développementpropre (MDP), pour lesquels plus de 40 idées de projets à diffé-rents stades de développement ont été identifiées au Mali, parmi

lesquels deux ont déjà été enregistrés auprès du Comité exécutifdu MDP. Cependant, afin de permettre une transformation profonde del’économie malienne dans le sens d’une croissance verte, ilconvient de passer de la phase d’expérimentation basée sur desprojets à une phase d’investissement reposant sur des pro-grammes sectoriels. Ceux-ci devront être construits autour d’Ac-tions nationales appropriées d'atténuation (NAMA) dont lesrésultats en termes de réduction des émissions de gaz à effet deserre pourraient répondre aux critères internationaux en matièrede mesure, reporting et vérification (cf. encadré 5).

● FORÊT • ENVIRONNEMENTLa déforestation constitue le facteur le plus important d’émissionsde gaz à effet de serre au Mali. Les sources de la déforestationse situent au niveau des systèmes de production agricoles et dela satisfaction des besoins en bois.

Ainsi, au niveau du secteur agricole, l’amélioration de la produc-tivité agricole, la lutte contre la dégradation des terres et un meil-leur aménagement du territoire doivent permettre de réduire ladéforestation.

Au niveau du secteur énergie, la baisse de la pression sur les fo-rêts peut provenir du développement d’énergies alternatives (bio-gaz, biomasse à partir de résidus agricoles, électricité, etc.) etd’une amélioration de l’efficacité énergétique via la poursuite dela promotion des foyers améliorés. Une autre alternative est defavoriser une meilleure durabilité de la filière bois-énergie à tra-vers notamment la poursuite des efforts d’organisation de la fi-lière (les marchés ruraux de bois) et la promotion de plantationsforestières.

Au niveau du secteur forêt, la gestion durable passe par la conso-lidation du réseau d’aires protégées, la décentralisation de la ges-

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Figure 5. Répartition des émissions de gaz à effet de serre du Mali en 2000 (MEA, 2011)

■ Encadré 5. Le renforcement des capacités dans le domaine de la finance carbone

La mise en œuvre de NAMA nécessite de disposer de capacités nationales pour gérer le volet carbone de ces programmes de déve-

loppement. Il s’agit notamment de rédiger les documents (PDD pour le MDP) permettant de justifier et valider les réductions

d’émissions de gaz à effet de serre réalisées. À cet effet, l’objectif est de disposer d’une offre nationale de services, dotés des expertises

techniques requises au niveau des différents secteurs concernés par l’atténuation des changements climatiques. Le renforcement

des capacités en matière de MRV est également nécessaire, ainsi que la mise en place d’un cadre institutionnel et légal définissant

les règles en matière de partage des bénéfices et de propriété des crédits carbone.

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tion des forêts, la valorisation des produits non ligneux (karité,gomme arabique, etc.) et leur exploitation durable, ainsi que lalutte contre les feux de brousse, qui pourraient se multiplier àl’avenir du fait des changements climatiques.Enfin le boisement/reboisement ou la régénération naturelle as-sistée offrent un potentiel important de séquestration et destockage de carbone tout en facilitant l’adaptation du Mali auxchangements climatiques. Par exemple, le projet de la grandemuraille verte (GMV) vise à réaliser une ceinture de végétationmulti-espèces, large de 15 km reliant Dakar à Djibouti sur unelongueur d’environ 7000 km. Ce projet permettra de luttercontre l’avancée du désert et la pauvreté et de mettre en valeurdes zones dégradées du Sahel.

Le bilan carbone du secteur forêt pourrait être ainsi amélioré deplus de 10 millions de tonnes par an à horizon 2020 (MEA,2011a).

Si la majeure partie des actions nécessaires dans le domaine del’environnement a été présentée au niveau des différents secteursconcernés, il convient toutefois de souligner la nécessité du ren-forcement du cadre légal dans ce domaine, particulièrementl’adoption d’un code de l’environnement permettant notammentune meilleure lutte contre les pollutions (définition de normes,etc.), et le renforcement de l’application de la loi. De même, ladécentralisation de la gestion des ressources naturelles par letransfert concomitant de compétences et de ressources est né-cessaire pour renforcer la participation des populations à laGDRN.

L’application correcte de la législation en vigueur sur l’Évaluationenvironnementale stratégique (EES) et des Études d’impact envi-ronnemental et social (EIES) participerait à l’amélioration du choixdes options respectueuses de l’environnement et prenant encompte les risques liés aux changements climatiques suivi del’état de l’environnement. Enfin, une meilleure connaissance despratiques culturales favorables à la conservation, en vue de leurpérennisation, est souhaitable.

● ÉNERGIELe développement des énergies renouvelables constitue le prin-cipal levier pour limiter les émissions de gaz à effet de serre dusecteur énergie. Le pays dispose pour cela d’un potentiel impor-tant dans le domaine de l’énergie solaire (photovoltaïque et ther-mique), de l’énergie éolienne (principalement au nord du pays)

et des bioénergies. Il s’agit notamment du biogaz grâce à l’utili-sation des déchets agricoles, animaux et ménagers, de l’énergiebiomasse et des biocarburants, particulièrement celle de la pour-ghère, produite depuis 10 ans au Mali, dont la production et l’uti-lisation locale en particulier dans les transports doivent êtreencouragées. Pour cela, l’implication du secteur privé doit êtrepromue à travers la mise en place de mesures incitatives. Enfin,la mise en œuvre d’une politique et des pratiques concrètes enmatière d’efficacité énergétique en particulier dans l’industrie etle bâtiment, constitue une autre voie vers une plus grande so-briété en carbone.

● TRANSPORTSAfin de limiter la consommation d’hydrocarbures au niveau dusecteur des transports, il est nécessaire de développer la politiquede renouvellement du parc automobile (plus de 77 % du parcont un âge supérieur à 15 ans selon MEA, 2010), particulière-ment par la mise en place de normes plus exigeantes et decontrôles plus stricts. Les transports en commun doivent égale-ment être développés dans les grandes villes en particulier à Ba-mako, et les actions permettant de fluidifier le trafic mises enœuvre. Toutes ces mesures permettront d’améliorer la qualité del’air et généreront à ce titre des impacts positifs sur le plan de lasanté. Il convient également de renforcer et développer les trans-ports ferroviaires interurbains et interrégionaux ainsi que de par-ticiper à la réussite de la mise en place d'une interconnexion partrain au niveau de la CEDEAO (Guinée, Mali, Burkina Faso).

● AGRICULTUREL’atténuation des émissions de gaz à effet de serre du secteuragricole implique un certain nombre de mesures qui permettentégalement l’adaptation du secteur aux changements climatiques.La restauration des terres dégradées permet en effet de stockerdavantage de carbone dans les sols, alors que la réduction dutemps d’inondation des terres dans le système de riziculture irri-guée par la méthode du système de riziculture Intensive permetnon seulement de limiter les besoins en eau mais aussi les émis-sions de méthane. Par ailleurs, l’application du système de mi-crodoses pour l’utilisation des engrais dans l’agriculturepermettrait de réduire les doses utilisées conventionnellement de50 % à 60 % selon le niveau de pluviométrie de la localité (MEA,2011a), et donc dans la même mesure les émissions de N2O,ainsi que la pollution.Enfin, une diminution des émissions de GES liées au brûlage desrésidus agricoles est possible via l’enfouissement de ceux-ci dans

le sol ou leur utilisation pour la préparation de la fumure orga-nique plutôt que leur brûlage. Ceci permettrait aussi d’une partla réduction des quantités d’engrais chimiques à utiliser et d’autrepart une meilleure conservation de l’humidité dans le sol et enfinune meilleure gestion de l’eau dans les zones irriguées.

● SANTÉDes études sur l’impact sur la santé de la qualité de l’environne-ment (air, eau, terre…) doivent être réalisées et permettre de pro-mouvoir les mesures permettant de maximiser les synergies entrele secteur santé et celui de l’environnement.

En outre, le développement harmonieux de la filière des plantesmédicinales devrait être encouragé. Pour cela, la conservation etl’approvisionnement durable en plantes médicinales devraientêtre favorisés par l’appui à la mise en place de structures cultivantses plantes. En outre, la recherche - développement sur les

I I . Vers une économie ver te e t rés i l ien te aux changements c l imat iques : les pr inc ipa les or ienta t ions s t ra tég iques

■ Encadré 6

Recherche, éducation, information et sensibilisation

et renforcement de capacités

Les défis environnementaux et particulièrement climatiques

impliquent un effort important en termes de recherche.

Pour cela, la création d’un centre d’excellence sur les change-

ments climatiques au sein d'une Université/Grande école du

Mali est prévue. Il développerait une formation de Licence/

Master/Doctorat spécialisée sur ce thème et coordonnerait en

lien avec l’ensemble des différentes institutions impliquées sur

ce thème un soutien scientifique et technique à l’AEDD et au

CNCC, avec lesquels l’agenda de recherche sera défini. L’édu-

cation, via l’insertion des thèmes de l’EVRCC dans les cursus

scolaires et académiques, ainsi que l’information et la sensibi-

lisation doivent permettre à la population de comprendre, sou-

tenir et participer activement à la construction d’une EVRCC,

qui nécessite un renforcement important des capacités natio-

nales dans ce domaine.

Page 24: économie - United Nations Development Programme

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plantes médicinales devrait être promue, au sein d’un cadre lé-gislatif et réglementaire permettant de lutter contre la bio pira-terie et favorisant un partage équitable des bénéfices tenantcompte du savoir traditionnel. La production de phytomédica-ments, ou médicaments traditionnels améliorés, devrait en outreêtre impulsée comme une réponse économique aux problèmesde santé en veillant à la durabilité des approvisionnements.

Enfin la transition vers une économie verte passe notamment parl’intégration de cette priorité dans l’ensemble des outils de pla-

nification du développement, et l’institutionnalisation des instru-ments économiques (évaluation économique, fiscalité et comp-tabilité verte, etc.) pour éclairer l’action des décideurs. Des effortsdans ces domaines sont en cours mais devront être approfondisde manière importante dans les années à venir.

Enfin le chemin vers une économie verte passe par l’intégrationde cette priorité dans l’ensemble des outils de planification dudéveloppement, et l’institutionnalisation des instruments écono-miques (évaluation économique, fiscalité et comptabilité verte,

etc.) pour éclairer l’action des décideurs. Des efforts dans ces do-maines sont en cours mais devront être approfondis de manièreimportante dans les années à venir.

Cette transformation profonde que la République du Mali entendinitier est une voie ambitieuse et pionnière vers le développementdurable. C’est aussi probablement la seule qui soit réaliste,compte tenu de la réalité environnementale et climatique. Faceà l’ampleur des changements à mettre en œuvre, elle nécessiteun fort engagement national, qui doit être institutionnalisé.

I I . Vers une économie ver te e t rés i l ien te aux changements c l imat iques : les pr inc ipa les or ienta t ions s t ra tég iques

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1. Une gouvernance spécifique

Un Secrétariat technique pour une EVRCC est en train de se met-tre en place sous la responsabilité de l’Agence de l’environne-ment et du développement durable (AEDD). Il sera composé, nonseulement de représentants du ministère en charge de l’Environ-nement et de l’Assainissement, mais également du ministère encharge de l’Économie et des Finances afin d’assurer que les prio-rités identifiées sont bien traduites au niveau budgétaire. Il tra-vaillera avec l’ensemble des parties prenantes et sera en chargede la conduite opérationnelle du processus EVRCC. Il s’agit no-tamment de mobiliser les savoirs et expertises nécessaires, d’iden-tifier les priorités d’action, leur traduction dans la stratégie et leplan d’investissement EVRCC, d’appuyer la conception et la miseen œuvre des programmes ainsi que de réaliser le suivi - évalua-tion des actions réalisées et de l’avancement du pays vers uneEVRCC, en lien avec l’Institut national des Statistiques (INSTAT).Il développera ainsi des capacités en matière de Mesure, repor-ting et vérification (MRV) requises par la Convention cadre desNations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), demanière à permettre au pays d’accéder aux financements inter-nationaux dans ce cadre et d’instaurer un système de suivi per-mettant une coordination efficace des efforts en matièred’EVRCC au niveau national. Le secrétariat technique s’appuierasur un réseau de points focaux EVRCC au sein des différents mi-nistères, régions et communes.

III. Un engagement national pour bâtirune économie verte et résiliente aux changements climatiques

Ce cadre stratégique n’est que le point de départ d’un long chemin à parcourir pour bâtir une économie verte et résiliente aux chan-gements climatiques. Il est bien sûr marqué par l’insuffisance des connaissances et l’abondance d’incertitudes qui caractérisent ce do-maine. Mais celles-ci ne doivent pas retarder la conception et la mise en œuvre de nos réponses au défi majeur du XXIe siècle, qui adéjà des implications concrètes et parfois dévastatrices dans la vie quotidienne de la population malienne. Le principe de précautionnous recommande d’agir dès maintenant et d’affiner au fur à mesure notre compréhension de ce défi et des solutions à y apporter.Notre approche se veut donc flexible et innovante mais avant tout volontariste. Ainsi, malgré ses limites naturelles, ce cadre noussemble permettre de fédérer les efforts de l’ensemble des acteurs du pays autour d’une vision commune et de mobiliser les soutiens denos partenaires internationaux dans le respect de leurs engagements financiers en matière de lutte contre les changements climatiques.Cette vision ne pourra se concrétiser et aboutir sans une coordination effective de ces efforts par des institutions spécifiques, dont lamise en place a déjà commencé. Faire de notre vision d’une économie verte et résiliente aux changements climatiques une réalitéimplique d’établir une équipe et une gouvernance spécifique à cet effet, d’élaborer une stratégie détaillée et un plan d’investissement,ainsi que de créer un instrument financier capable de canaliser de manière transparente et efficiente les investissements nécessaires.

Figure 6. Le cadre institutionnel pour une EVRCC

■ Encadré 7

l’Agence de l’environnement

et du développement durable (AEDD)

L’Agence de l’environnement et du développement durable

(AEDD) a pour mission d’assurer la coordination de la mise

en œuvre de la Politique nationale de protection de l’environ-

nement au niveau des différents secteurs en veillant à l’inté-

gration des efforts en termes de gestion durable de

l’environnement avec les objectifs de lutte contre la pauvreté.

Elle est rattachée au ministère de l’Environnement et de l’As-

sainissement.

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La conduite stratégique du processus EVRCC est de la responsa-bilité du Conseil national de l’environnement. Il sera chargé dedéfinir les orientations stratégiques en matière d’EVRCC, decontrôler leur exécution, d’assurer la mobilisation coordonnéedes efforts au sein des différents secteurs et régions en veillant àpromouvoir les synergies potentielles et la concertation entre lesdifférents acteurs et d’examiner les questions et propositions sou-mises par le Secrétariat technique. Il s’appuiera pour cela sur leComité national changements climatiques.

I I I . Un engagement nat iona l pour bât i r une économie ver te e t rés i l ien te aux changements c l imat iques

■ Encadré 9Les régions naturelles (PIRT, 1983)Les 14 régions naturelles sont des subdivisions des quatrezones agro-climatiques du Mali. Il s’agit de :• Adrar-Timétrine, Azaouak, Tilemsi et Aklé-Azaouad pour

la zone saharienne• Gourma, plateau de Bandiagara, Hombori, Gondo-Mon-

doro, le Hodh, le Delta central Nigérien pour la zone sahé-lienne

• Plateau Mandingue, plateau de Koutiala, Guidimaka, laFalémé pour la zone soudanienne

• Haut Bani-Niger, plateau Mandingue pour la zone gui-néenne.

■ Encadré 8

Le Conseil national de l’environnement

et le Comité national changements climatiques

Le Conseil national de l’environnement (CNE) a été créé par

le décret N° 10-390 du 26 juillet 2010. Il a pour mission de

donner un avis et formuler des propositions sur toutes les

questions portant sur l’environnement. Il est composé de

plus de 60 membres : des représentants des différents minis-

tères et agences publiques, ainsi que du secteur privé, des

collectivités territoriales et de la société civile. Son secréta-

riat est assuré par l’AEDD.

Le Comité national changements climatiques (CNCC) a été

créé par le décret 2011/107 du 11 mars 2011, comme un or-

gane du CNE, spécialisé sur l’ensemble des questions ayant

trait aux changements climatiques. Il comporte cinq groupes

thématiques sur les questions d’adaptation, d’atténuation (y

compris REDD+), de transfert de technologies, de finance-

ment et de renforcement de capacités. Présidé par le ministre

chargé de l’Environnement, il est composé de 56 membres :

des représentants des différents ministères et structures pu-

bliques, ainsi que du secteur privé, des collectivités territo-

riales et de la société civile. Son secrétariat est également

assuré par l’AEDD.

■ Encadré 10Un processus de planification hautement participatifL’élaboration de la stratégie et du plan d’investissement serafondée sur un effort de planification à la fois sectoriel et parrégions naturelles (aux différents niveaux territoriaux et enmobilisant en priorité les régions les plus vulnérables). Cettedimension territoriale est particulièrement importantepuisqu’elle permet d’assurer l’adéquation des actions avec lesréalités agroclimatiques, alors qu’historiquement les territoiresont été peu impliqués dans la lutte contre les changements cli-matiques au Mali. L’ensemble des acteurs (société civile, sec-teur privé, administrations, etc.) et particulièrement lesfemmes (cf. encadré 3) et les jeunes, seront impliqués dans ceteffort de planification, de manière à assurer la pertinence, lalégitimité et l’appropriation des travaux. Cela doit permettreégalement de s’assurer de capitaliser sur les démarches etconnaissances existantes. Pour cela, des groupes de réflexion,assurant une large participation des différents acteurs, serontcréés au niveau des zones naturelles et de chaque secteur.

2. Une stratégie en développement

Ce cadre stratégique n’est qu’un premier pas vers l’élaborationd’une stratégie complète et détaillée en matière d’EVRCC quisera élaborée d’ici à 2013 au terme d’un large processus partici-patif incluant l’ensemble des acteurs concernés (cf. encadré 10).

Elle détaillera l’ensemble des orientations sectorielles et par ré-gions naturelles (14 au total, cf. encadré 9) à horizon 2025 pourrépondre au défi des changements climatiques et de la dégrada-tion de l’environnement. Elle s’appuiera sur l’ensemble des poli-tiques, stratégies et plans d’action existants au niveau sectoriel,et particulièrement dans les domaines de l’environnement, de lagestion durable des terres pour laquelle un cadre stratégiqued’investissement (AEDD, 2010) existe déjà, de la gestion desrisques et des catastrophes, et des changements climatiques. Elle chiffrera l’ensemble des besoins financiers pour mettre enœuvre cette transformation.

Page 28: économie - United Nations Development Programme

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Dans ce domaine, elle pourra capitaliser les acquis du Programmed’action national d’adaptation aux changements climatiques(PANA) ainsi que de la Politique nationale et Stratégie nationalesur les changements climatiques (PNCC - SNCC), toutes deux encours de d’adoption. Une stratégie spécifique au secteur forestier sera mise en placedans le cadre d’un processus national REDD+, dont la premièreétape consiste en l’élaboration d’un plan de préparation à laREDD+. Au sein de ce dispositif, la forêt sera considérée au Mali,non seulement comme un moyen d’atténuer les changementsclimatiques, mais également comme un levier majeur d’adapta-tion aux évolutions du climat, de lutte contre la désertification etde conservation de la biodiversité.

3. Un plan d’investissementen cours d’élaboration

Une proposition de programmes pour la mobilisation de « finan-cements rapides » accompagne ce document. Six programmesont ainsi été identifiés et élaborés pour répondre de manière ur-gente au défi climatique. Ils nécessitent la mobilisation de 494,1millions de dollars sur la période 2012-2016, dont 248,5 millionspour la période 2012-2013. Il s’agit de :

• Programme de reboisement intensif pour la reconstitutiondes écosystèmes forestiers du Mali

• Programme de développement d’une agriculture résilienteaux changements climatiques

• Programme d’aménagement pastoral résilient aux change-ments climatiques

• Programme de développement de la pisciculture• Programme de captage et stockage des eaux de pluie• Programme de développement des énergies renouvelables

Ces programmes visent à engager le pays, sans attendre la fina-lisation de sa stratégie EVRCC, dans ce processus de transforma-tion vers une EVRCC en mettant en œuvre des actions incontour-nables et pour lesquelles les capacités humaines et institution-nelles existent déjà dans le pays.

Cette planification sera intégrée dans les différents plans secto-riels et territoriaux, notamment les Plans de développement socialéconomique et culturel (PDESC) au niveau des communes rurales.

Dans un premier temps, le déploiement des investissements vi-sera en priorité les 166 communes les plus vulnérables avant d’at-teindre l’ensemble des 703 communes et l’agglomérationurbaine de Bamako.

4. Un instrument financier dédié:le Fonds Climat du Mali

Le Fonds Climat du Mali qui devrait voir le jour d’ici la fin 2011doit permettre de canaliser de manière sécurisée et efficiente lesinvestissements nécessaires à la construction d’une EVRCC auMali. Il permettra au Gouvernement du Mali d’accéder aux fondsinternationaux climat, à la fois publics et privés, multilatéraux etbilatéraux. Pour cela, il s’appuiera sur une cogestion avec les Pro-gramme des Nations Unies pour le développement (PNUD) à tra-vers son bureau des Fonds multipartenaires et en assurant laconformité fiduciaire et technique aux normes et exigences inter-nationales, y compris les mesures MRV. Les fonds ciblés de ma-nière prioritaire sont les fonds d’adaptation, les fonds verts et lesfinances « démarrage rapide ».

Le Fonds Climat du Mali cherchera également à attirer des inves-tisseurs privés locaux et étrangers, et particulièrement les acteursdu marché du carbone, à travers la vente de crédit carbone. Lescontributions d’ONG et de fondations privées seront aussi recher-

I I I . Un engagement nat iona l pour bât i r une économie ver te e t rés i l ien te aux changements c l imat iques

Programmes

Budget (en millions d’USD)

2012-2016dont pour la période

2012-2013

Reboisement intensif pour la reconstitutiondes écosystèmes forestiers du Mali 118,8 60,1

Développement d’une agriculturerésiliente aux changements climatiques 94,0 40,0

Aménagement pastoral résilientaux changements climatiques 109,9 54,9

Développement de la pisciculture 31,0 17,6

Captage et stockage des eaux de pluie 62,8 28,4

Développement des énergiesrenouvelable 77,6 47,5

Total 494,1 248,5

REDD+

Atténuation

Adaptation

Adaptation

Adaptation

Adaptation

Adaptation

Atténuation

REDD+

Adaptation

Atténuation

REDD+

Figure 7. Coûts des programmes proposés pour la mobilisation de « financements rapides »

Page 29: économie - United Nations Development Programme

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chées. L’objectif de canaliser à travers ce fonds la majeure partiedes financements pour la lutte contre les changements clima-tiques, notamment ceux issus de la coopération internationale,vise à améliorer l’efficacité de l’aide et appuyer le passage d’unelogique de financement de projets vers une approche program-matique. Les financements issus de ce fonds seront mobilisablespar l’ensemble des acteurs du développement : non seulement lesservices de l’État mais également les organisations de la sociétécivile et du secteur privé.

Il sera régi et supervisé par un Comité de pilotage présidé par leMinistère de l’Environnement et de l’Assainissement avec la par-ticipation des ministère de l’Économie et des Finances, du minis-

tère des Affaires étrangères et de la Coopération internationale,ainsi que de représentants des contributeurs/partenaires au dé-veloppement, les Nations Unies, la société civile et d‘autres par-ties prenantes, le cas échéant. L’AEDD en assurera le secrétariattechnique. Des normes et systèmes internationaux de surveillancefinancière, de reddition de comptes et de transparence assurerontla bonne gouvernance du fonds. Les opérations du fonds serontainsi accessibles au public via internet.Si le bureau des Fonds multipartenaires du PNUD assurera pen-dant les premières années les fonctions d’administration desfonds, il développera et renforcera les capacités d’une entité na-tionale qui aura été choisie pour assurer les fonctions d’adminis-tration et de gestion à l’avenir.

5. Un soutien international fortdans le cadre d’un partenariatrenouvelé

Bien que le Mali ne soit pas un grand émetteur de gaz à effet deserre il fait partie des pays qui seront les plus durement touchéspar les effets néfastes des changements climatiques. Face auxdéfis environnementaux et particulièrement climatiques, il est ré-solu à assumer ses responsabilités de manière pleine et entière.Il s’agit pour le pays d’atteindre les Objectifs du Millénaire pourle Développement en renforçant ses capacités d’adaptation auxchangements climatiques, et de contribuer aux efforts d’atténua-tion des changements climatiques, en application du principe deresponsabilité commune mais différenciée.

Le Mali se prépare pour cela à réunir les facteurs clés de succèspour la mise en place d’une économie verte et résiliente auxchangements climatiques : volonté politique, processus participa-tif mobilisant l’ensemble des acteurs, stabilité démocratique,bonne gouvernance, recherche de synergies et excellence tech-nique. Il propose ainsi à ses partenaires internationaux un cadreidéal pour la concrétisation de leurs engagements internationauxdans le cadre de la Convention ccadre des Nations Unies sur leschangements climatiques, avec l’ambition de faire du Mali unmodèle servant d’exemple pour l’ensemble de l’Afrique.

Nous attendons à ce que nos partenaires internationaux assu-ment leurs responsabilités et envoient un signal fort dans le sensde la mise en œuvre effective de l’accord de Copenhague, parti-culièrement la mobilisation de financements nouveaux et addi-tionnels à la hauteur des enjeux. Cela doit se concrétiser enpremier lieu dans le cadre des « financements rapides », pourlesquels le Mali a préparé un ensemble de programmes à lancerau plus vite. Le pays ne doit plus attendre car : les prochaines an-nées seront cruciales pour la concrétisation de la vision d’uneéconomie verte et résiliente aux changements climatiques.

Le Mali entend ainsi bâtir un partenariat renouvelé avec les paysdéveloppés, autour des principes non seulement de solidarité,mais également de responsabilité, de justice, d’efficacité et d’ex-cellence.

I I I . Un engagement nat iona l pour bât i r une économie ver te e t rés i l ien te aux changements c l imat iques

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Ministère de l'environnement et de l’assainissement, STP/CIGQE, 2008 : Éléments de la politiquenationale d’adaptation aux changements climatiques

Ministère de l'environnement et de l’assainissement, 2008 : Droits de l’homme et changement cli-matique

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Ministère de l'environnement et de l’assainissement, 2006-2007 : Étude de la place de la GDT auMali

Page 32: économie - United Nations Development Programme

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w w w. e n v i ro n n e m e n t . g o v. m l

w w w. u n d p . o r g . m l

Photographie : ©Marc Wajnsztok/Bamako, Mali

Maquette et Impression : Imprim Color Bamako

Ministère de l’Environnement

et de l’Assainissement