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DOSSIER N°17 SEPTEMBRE 2005 Prix Afci 2005 La communication interne a un nouveau rôle à jouer L’Intranet pour mobiliser le management DANS CE NUMÉRO LES CAHIERS DE LA COMMUNICATION INTERNE La communication interne dans l’entreprise en crise ( s )

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DOSSIER

N°17SEPTEMBRE 2005

Prix Afci 2005

La communicationinterne a un nouveaurôle à jouer

L’Intranet pour mobiliser le management

DANS CE NUMÉRO

LES CAHIERS DE LA COMMUNICATION INTERNE

La communication internedans l’entreprise en crise(s)

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Sommaire

Directeur de publication : Pierre Labasse • Rédacteur en chef : Guillaume Aper • Comité de rédaction : Robert de Backer,Jean-Philippe Cathelin, Jean-Marie Charpentier, Emmanuel Ducasse, Jean Hansmaennel, Laurence Hurstel • Remerciements :Françoise Plet-Servant • Secrétariat de rédaction : A ÉDITORIAL© • Délégation générale de l’AFCI : Laurence Hurstel, 15, avenue Victor Hugo, 92170 Vanves; Tél. : 01 41 09 05 24; Email : [email protected] • Éditeur: A ÉDITORIAL© ; Tél. : 01 42 40 23 00 • Dépôt légal : 4e trimestre 2005, Achevé d’imprimer en octobre 2005 • Imprimeur : Printimage - Paris

Publication de l’Association Française de Communication Interne (Afci)

DOSS

IER La communication interne dans l’entreprise en crise(s) __ p. 2

Gérer les crises : de la prévention du pire au développement de la performance Anaïs de MontjoyeD’une crise à l’autre, quand les modernisations s’enlisent dans la confusion Marc UhaldeDix crises (entre autres) qui nous ont marquésJean-Philippe CathelinLe Club Méditerranée et le tsunami : retour sur une gestion de criseInterview de Thierry Orsoni

Prix Afci 2005 ______________________________________ p. 17La communication interne a un nouveau rôle à jouerLaurent Sacchi, président du juryCommunication interne et développement durable, le cas EDFCarole TriviNégociation sociale et communication :l’accompagnement discursif de l’ARTT au sein de la Française de MécaniqueClaire Maurice et Romain HuëtDu projet d’entreprise au projet d’administrationOlivier Martin dit Neuville

Deux nouvelles marques pour dynamiser EDF_____________ p. 26Christine Descamps

L’intranet : un levier de mobilisationdu management sous-exploité __________________ p. 30Etienne Baërd

Reférendum 2005: regard critique sur la communication ____ p. 34Pierre Labasse

Lu pour vous _______________________________________ p. 36 Comment devenir chef (et le rester) en dix leçonsNathalie Lenoir et Jean CanourelL’entreprise durablePhilippe DétrieCitoyen du mondeCarlos Ghosn et Philippe RièsIl faut sauver la communicationDominique Wolton

La chronique du net _________________________________ p. 39 Michel Germain

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ous l’avez remarqué, depuis quelques semaines, l’Afci s’est dotée d'unenouvelle signature, « La communication au cœur des organisations »,et d'un nouveau logo. Une nouvelle signature pour traduire notrevision singulière de la communication : humanisante, stratégique,partagée. Un nouveau logo pour exprimer cette vision : couleurs

chaudes, formes rondes, dynamisme et ouverture. Décalé par rapport auxautres lettres, le « C » de la communication dialogue avec le « I » de l'interne,et témoigne qu'il n'est de communication que de relation.

Votre revue ne pouvait pas être en reste et les « Cahiers » évoluent eux aussiafin de refléter ces changements. Le numéro que vous avez entre les mains adonc adopté une nouvelle maquette qui, nous l’espérons, vous séduira.Au programme, un joli cadeau : les pages intérieures seront désormais endeux couleurs et comme pour le logo de l’Afci, le orange fait son entrée dansla maquette. Une maquette sobre, élégante, pleine de jolis détails bien pensés,conçus pour mettre en valeur de manière pertinente les idées des auteurs.

Précision de taille : tous ces changements sont uniquement formels et laformule rédactionnelle des Cahiers demeure… inchangée ! Les auteurs restentà l’honneur afin de contribuer toujours et encore à enrichir votre réflexion etvos pratiques.

Coïncidence ? Le dossier de ce numéro 17 traite également du changementou plutôt des changements de plus en plus fréquents qui surviennent dans lesorganisations et que l’on nomme souvent (parfois abusivement) des « crises ».Changements encore avec l’article de Laurent Sacchi qui prône une autre approchede la communication interne.Changement en perspective avec les communicants internes de demain quiont remporté le prix Afci du meilleur mémoire.Changement potentiel avec Étienne Baërd qui propose d’utiliser l’intranet commeun outil au service du management.Changement toujours avec le mécanisme de création et de lancement internede marques décrit par Christine Descamps.Gros changement, enfin, avec Pierre Labasse, qui se lance dans la politique !

N’hésitez pas à nous faire part de vos remarques sur cette dernière édition ennous écrivant à : [email protected]

Bonne lecture.

Guillaume Aper Rédacteur en chef des Cahiers

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Éditorial

Que de changements!

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rise produit, crise sociale, crise sécurité, crise financière, crise sociétale,crise liée à l’utilisation des TIC…Autrefois situation tout à fait exceptionnelle, la crise est devenue quasicourante dans l’entreprise. Pourtant, lorsque la crise éclate, l’entreprisese trouve profondément désarmée et hésite sur la conduite à tenir. Comme

le souligne Thierry Libaert, maître de conférences à l’Institut d’Études politiques deParis et auteur de « La communication de crise » (Dunod. 2001), « les crisess’accélèrent, elles concernent désormais tout type d’organisation, publique ouprivée, toute entreprise quelles que soient sa taille ou son activité : les facteursd’amplification sont de plus en plus nombreux et les citoyens y sont de plus enplus sensibles ».

La crise représente un réel danger pour l’entreprise et peut mettre à mal son fonc-tionnement, son organisation, son image, sa réputation, son existence parfois. Ellenécessite une gestion particulière dont la communication est une composante forte.La participation du directeur ou responsable de la communication interne à la gestionde la crise fait partie des activités identifiées dans le référentiel d’activités et decompétences du RCI que vient de publier l’Afci (cf. page 15).

Le dossier de ce numéro des Cahiers présente différents éclairages sur le sujet ponc-tués par des exemples de crises qui ont fait du bruit et que nous remet en mémoireJean-Philippe Cathelin, directeur de l’agence A Conseil. Anaïs de Montjoye,experte en gestion de crise au sein du cabinet Acyan, souligne l’importance d’uneapproche globale de la gestion de crise et la place qu’y tient la communication. Elleouvre une piste intéressante : la crise, « vecteur de progrès pour l’entreprise ».Marc Uhalde, chercheur au CNRS, nous livre une réflexion approfondie sur les crisestenant aux politiques de modernisation des organisations et sur la grande confusionqui parfois les accompagne…Enfin, le Club Méditerranée a du gérer une crise de l’ordre de l’impensable lors dutsunami de décembre 2004. Il nous a semblé intéressant d’interviewer Thierry Orsoni,son directeur de la communication, afin de recueillir son témoignage sur le dispo-sitif déployé à cette occasion…

C

La communication internedans l’entreprise en crise(s)

Dossier COMMUNICATION INTERNE : CAP SUR L’INTERNATIONAL !

Laurence Hurstel Déléguée générale de l’Afci

Les cahiers de la communication interne n° 17 - Septembre 2005

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epuis les célèbres affaires « Perrier »,« Seveso » ou encore celle de « la vachefolle », la gestion de crise est passée de l’âgede la préhistoire aux temps modernes…À ses balbutiements, la « gestion de crise »était bien souvent réduite à un seul volet

visible, la communication. Encore aujourd’hui, cesont bien les enjeux d’image, notamment sur la marqueou la réputation de l’entreprise et de ses dirigeants,qui inquiètent le plus les acteurs économiques etinstitutionnels. Protéger l’image est un des objectifsprioritaires d’une démarche de prévention et de ges-tion de crise. Mais pour autant, est-il pertinent de limi-ter la gestion de crise à la seule capacité de l’entrepriseà savoir communiquer le jour où l’événement seproduit ?La communication n’est que le reflet des décisions del’entreprise. Si celle-ci n’a pas su prendre les bonnesdécisions, elle n’a pas de miracle à en attendre et saréputation sera irrémédiablement entachée.Inversement, pour protéger son image, il ne lui suffitpas d’avoir pris les bonnes décisions, encore faut-ilqu’elle soit capable de convaincre par une commu-nication efficace ses différents interlocuteurs de sacapacité à gérer les situations de crise. Tout est doncétroitement lié.La gestion de crise ne peut donc s’entendre quedans le cadre d’une approche globale dont les prin-cipales étapes sont :

• la détection des signaux avant-coureurs,• la prise de décision en cellule de crise,• la communication vers les différents publics,

interne et externe,• sans oublier la clôture de la crise.Ces étapes constituent les étapes incontournablesdu processus de gestion de crise et chacune d’entreelles nécessite la mise enœuvre d’actions préventivespour être efficace et opérationnelle le jour où lacrise survient.

Première étape : détecter la crise

Et, bien souvent, c’est là que l’entreprise prend un pre-mier retard qui risque d’avoir de lourdes conséquencesdans la suite de l’événement… En dehors de situa-tions de crise dont l’évaluation ne fait aucun doutepour personne (explosion, tremblement de terre, etc.),la grande majorité des situations de crise sont précé-dées de signaux avant-coureurs, qui, identifiés et éva-lués comme des crises potentielles par l’entreprise,lui permettent de prendre immédiatement les mesuresqui s’imposent. Toute la difficulté est de reconnaîtreces signaux avant-coureurs, exercice rendu plus dif-ficile dans un environnement de plus en plus sensibleet exigeant, où les bruits de fond se font de plus enplus assourdissants pour les entreprises.

Gérer les crises : de la prévention

Bien communiquer le jour de la crise, c’est avoir su prendre lesbonnes décisions. Pour prendre ces décisions, il faut savoirdétecter et identifier un événement comme une crise potentielle.Si la gestion de crise ne peut s’entendre que dans le cadre d’uneapproche globale, elle devient, de plus en plus, un vecteur deprogrès pour l’entreprise.

Anaïs de Montjoye

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de la performance…du pire au développement

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Les cahiers de la communication interne n° 17 - Septembre 2005

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Existe-t-il des critères universelsde qualification d’une crise?À chaque entreprise de définir ses propres critères d’éva-luation. Ils vont permettre à ses membres de distin-guer un incident d’une crise potentielle au travers d’unegrille de lecture commune et cohérente dans toute lastructure. Selon leurs secteurs d’activité, deux entre-prises ne placeront pas le curseur au même niveau. Un accident du travail grave dans une entreprise de travaux publics ou dans une entreprise de service pourra être apprécié différemment. Cela nécessite doncune réflexion stratégique de la part de l’entreprise et unpositionnement clair de la direction générale vis-à-visde l’interne qui pourrait se résumer en un slogan :bienvenue aux mauvaises nouvelles !À la définition d’une crise potentielle pour l’entreprisedoit correspondre un circuit d’alerte, opérationnel vingt-quatre heures sur vingt-quatre, mobilisant des personnescapables d’évaluer la situation et, si nécessaire, deconvoquer la cellule de crise. Or, aujourd’hui combiend’entreprises peuvent garantir une prise en charge desappels le week-end, au siège comme sur l’ensemble deses sites ? Combien peuvent réellement compter surun circuit d’alerte prédéfini, une astreinte organisée,allant, si nécessaire, jusqu’à la convocation en urgen-ce de la cellule de crise, convocation rendue possiblepar une liste de contacts à jour?Chacun de ces maillons a un rôle clé à jouer dans ledispositif, un maillon manquant et ce sont des minutesvoire des heures perdues dans une course contre lamontre où chaque minute gagnée est une chancesupplémentaire pour l’entreprise de garder la mainsur l’enchaînement des événements.Si le génie créatif s’exprime fréquemment en situationde crise et si la solidarité des équipes et l’implica-tion de chacun se manifestent souvent de façon exem-plaire en pareille situation, la réussite de la gestiond’une crise ne doit rien au hasard.

Décider en cellule de crise

L’enjeu principal et la plus grande difficulté àlaquelle se trouve confrontée la cellule de crise del’entreprise est de savoir prendre la bonne décision– ou tout du moins la moins mauvaise – dans un contex-te à très fortes contraintes : manque de temps et d’in-formations, absence de certitude, pressions multiplesémanant d’acteurs internes et externes, poids desenjeux… Pour réussir cet exercice difficile, dont lapartie visible sera la communication, la cellule decrise doit pouvoir s’appuyer sur un cadre méthodo-logique minimal.L’objectif de ce cadre, qui se matérialise généralementsous la forme d’un manuel de gestion de crise, estd’optimiser l’efficacité des travaux de la cellule enla dotant d’un outil opérationnel. Ce manuel permet

d’aider la cellule à gérer les premiers moments avecrigueur. Il indique les balises incontournables dansla gestion d’une crise et stipule les étapes ou réflexesimportants à ne pas omettre en situation de crise, cequi arrive vite sous la pression des événements etdes acteurs.Savoir qu’il existe un cadre minimum sur lequel onpeut s’appuyer, des outils pré-identifiés et vérifiés « partemps calme », a aussi des vertus apaisantes pour lesmembres de la cellule. Or, pour cette dernière, l’en-jeu est de réussir, malgré les nombreuses pressionsqui s’exercent sur elle ; il lui faut prendre du recul pouradopter rapidement des décisions qui risquent d’en-gager l’avenir de l’entreprise, voire sa pérennité.Tout ce qui pourra contribuer à faire baisser le stressaura un impact direct sur l’efficacité des travaux dela cellule de crise.

Le manuel de gestion de crise est un moyenpour faciliter la prise de recul.Ce n’est pas le seul.Au-delà du manuel, les outils logistiques vontcontribuer à diminuer ou au contraire à accroître lapression sur la cellule de crise. Des plateaux-repasqui ne sont pas commandés, des feutres qui ne fonc-tionnent pas, l’absence de prises « réseau » dans lasalle de crise… autant de détails qui, s’ils n’ont pasété prévus, risquent de créer une crise dans la crise.La prise de recul constitue un véritable défi pour lesmembres des cellules de crise. Défi qu’il est biendifficile de relever quand on découvre « à chaud »le fonctionnement d’une cellule de crise et l’impactque la pression provoque sur son propre comporte-ment et sur celui des autres membres de la cellule.Le fonctionnement d’une cellule de crise diffèred’un comité de direction habituel. Dans le cadre d’ac-compagnement de telles cellules chez nos clients,nous avons pu observer à quel point les cellules ontla tentation de se précipiter dans l’action, dans larecherche de solutions immédiates, sans avoirmême posé les données du problème ni défini lesobjectifs et conséquences de chaque décision à courtmais aussi à moyen et long termes. L’exigence de pré-cision, le questionnement permanent qui frôle parfoisle désaccord, sont indispensables pour créer les condi-tions favorables à une bonne prise de décision.

Pour permettre au génie collectif de s’exprimer, la cellule de crise doit pouvoirs’appuyer sur un chef d’orchestre.Celui-ci doit être capable d’éviter à l’entreprise defonctionner sur une seule partition et de maintenirl’harmonie, malgré des sons parfois discordants ausein même de la cellule de crise. Ce rôle fait appel àdes compétences qui ne préexistent pas dans l’en-treprise et qui doivent être développées. Un chef d’or-chestre ne saurait tirer le meilleur d’une formation

Dossier LA COMMUNICATION INTERNE DANS L’ENTREPRISE EN CRISE(S)

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de musiciens, aussi talentueux soient-ils, sans répé-titions préalables. Il en va de même pour l’efficacitéd’une cellule de crise, elle ne s’improvise pas.Ainsi, chacun doit avoir expérimenté les difficultés,les contraintes, les écueils de ce travail d’équipe siparticulier pour pouvoir contribuer pleinement et effi-cacement à la gestion de la crise. Et parmi les membresde l’orchestre, le président de la cellule de crise (laplupart du temps le directeur général de l’entrepri-se) doit plus que tout autre comprendre et accepterle rôle du chef d’orchestre, stimulateur et régulateur

des travaux de la cellule de crise. Or,« l’action est le Prozac des dirigeants »

nous disent les psychologues etla pression qui s’exerce sur lesdirecteurs généraux est tellequ’ils sont souvent les plusempressés à prendre une déci-sion, confondant alors réacti-

vité et précipitation.Voilà donc notre cellule de crise

réunie, dans une salle équipée, ani-mée par un chef d’orchestre au fait de

son rôle, avec des membres avertis des règles peucommunes de fonctionnement. Dès lors, il va s’agirde déclencher une surveillance médiatique, de mettreen place un numéro vert ou encore une cellule desoutien psychologique… Autant de décisions souventjustifiées que l’entreprise doit pouvoir mettre en œuvredans les temps impartis, toujours très courts. Etpourtant, il aurait été tellement simple d’identifierles expertises externes qui peuvent s’avérer indis-pensables le jour de la crise… Se tourner vers des pro-fessionnels de la gestion de crise pour bénéficier deleur réseau est une solution ultime et possible.

Communiqueren situation de crise

« Il faut que l’on donne notre point de vue pour lejournal télévisé de ce soir ». Là, impossible debotter en touche vers des compétences externes. Ensituation de crise, seul un porte-parole de l’entre-prise est légitime pour faire face à la presse.Démontrer que l’entreprise est une entreprise res-ponsable, savoir manifester de l’émotion maissupprimer tout signe extérieur de nervosité, s’ex-primer en quelques phrases simples, factuelles, sansjargons et avec des illustrations concrètes, le touten quinze secondes… Qui osera dire « je sais faireet sans entraînement » ?

Gestion de crisene rime pas avec improvisation.De la détection d’une crise potentielle à la prisede parole de l’entreprise, reflet des décisions de la

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cellule de crise, force est de constater que gestionde crise ne rime pas avec improvisation. Mais n’est-ce pas disproportionné d’engager du temps et desmoyens pour un dispositif qui ne servira peut-êtrejamais ? À ceux qui opposent encore ce type d’arguments pour justifier de ne rien faire – et ilssont de plus en plus rares – il convient de répondredeux choses. D’abord la société bouge, le contexteest de plus en plus contraignant pour les entreprises,tant d’un point de vue réglementaire que média-tique, les marchés sont de plus en plus concurren-tiels, les relations avec les consommateurs plussensibles. Il serait imprudent, voire inconscient, pourune entreprise de se sentir à l’abri de toute crise.Dans la même logique, pourquoi ne pas annuler lescontrats d’assurance… Ensuite, bien plus que cetargument moyenâgeux, la gestion de crise a aujour-d’hui démontré qu’elle pouvait aussi contribuer àla performance de l’entreprise.

La mise en place d’un dispositif degestion de crise a des effets bénéfiques à tous les échelons de l’entreprise.Par la mise en place d’un circuit d’alerte en cas decrise potentielle, la circulation de l’information estfacilitée au sein de l’entreprise, les dysfonctionne-ments s’en trouvent moins masqués et la vigilance estainsi améliorée.Combien de chefs d’entreprise ont regretté de nepas avoir organisé une réflexion en silo au sein de leurstructure et déploré une absence de dialogue entredirections ? Or, la gestion de crise, notamment danssa phase de veille et de détection des crises poten-tielles, implique l’ensemble des fonctions d’une entre-prise ; elle présente des enjeux forts pour l’entrepriseet nécessite un partage d’informations et une lectureglobale. La mise en place d’une démarche de pré-vention et de gestion de crise favorise donc ce décloi-sonnement, par exemple par la mise en place d’uncomité de veille, comité pluridisciplinaire, chargéde pratiquer une veille active grâce à la mise encommun de tous les sujets sensibles et des risquesidentifiés de façon isolée par chaque direction fonc-tionnelle. Définir la crise pour l’entreprise nécessiteune réflexion commune et des échanges générale-ment riches entre directions.

Décloisonner, échanger,mais aussi manager.La performance d’une entreprise se construit surses managers et sur leur propre capacité à mobili-ser leurs équipes. Y a-t-il un moment dans la vied’une entreprise où les capacités managérialessont davantage sollicitées qu’en cellule de crise ?N’est-ce pas le lieu où le manager se révèle, dansle meilleur comme dans le pire ? Préparer lesmanagers d’une entreprise à travailler en cellule de

Ne pasconfondreréactivité etprécipitation

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Dossier LA COMMUNICATION INTERNE DANS L’ENTREPRISE EN CRISE(S)

crise, à prendre des décisions sous de très fortescontraintes, n’est-ce pas les préparer au pire pourles aider, aussi, à mieux gérer le quotidien ?Ce constat, il semblerait que de plus en plus d’entre-prises l’aient fait car aujourd’hui, on assiste à une nou-velle ère de la gestion de crise qui a permis à denouveaux acteurs de s’impliquer dans le projet. Certes,un dispositif de gestion de crise reste nécessairepour prévenir le pire et les directions fonctionnellesles plus exposées des entreprises restent des interlo-cuteurs privilégiés dans la mise en place d’un teldispositif. Mais aujourd’hui la gestion de crise est aussiperçue comme un levier privilégié vis-à-vis du mana-gement. Les directions des ressources humaines ne

s’y sont pas trompées et sont devenues à leur tourdes prescripteurs de formations au travail en cellulede crise. « La crise facteur de progrès » : telle est depuisquinze ans notre conviction…

Anaïs de Montjoye Directeur de clientèle

Acyan – Cabinet de conseil en prévention,gestion et communication de crise

DIX CRISES (ENTRE AUTRES)QUI NOUS ONT MARQUÉS

Après une crise, l’image de marque de l’entreprise ressort plus ou moins détériorée ou,au contraire, renforcée. À l’analyse, ce sont réactivité, transparence, responsabilité desdirigeants, capacité à mobiliser l’interne sur la reconstruction qui ont souvent fait ladifférence. Quelques exemples qui nous restent en mémoire.

Renault ferme l’usine de Vilvorde

Février 1997 : le pdg Louis Schweitzer annonce lafermeture de l’usine de Vilvorde en Belgique et la suppression de 3 000 emplois. L’information tombecomme un couperet car rien ne laissait augurer cettedécision : dans cette usine historique, performante,on avait réalisé d’importants investissements et fait lesajustements successifs pour maintenir la compétiti-vité. Dans une Belgique en crise institutionnelle, lessalariés se mobilisent largement et c’est un énormeélan de solidarité qui s’exprime dans l’opinion, lesmédias. Les pouvoirs publics s’emparent aussi du sujet.Sans succès, l’usine ferme.

Deux images de Renault entrent ici en collision :l’entreprise qui sacrifie des emplois sur l’autel des sur-capacités européennes et des impératifs financiersd’un côté et, de l’autre, celle qui avait jusqu’à présentété un exemple du modèle social français.

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La Clinique du Sport et le germe xénopi

Octobre 1997 : une communication du Ministère dela santé recommande aux patients ayant subi une inter-vention chirurgicale à la Clinique du Sport entre 1988et 1993 de réaliser un examen radiologique pour détec-ter d’éventuelles lésions vertébrales. En février 2000,cinquante-huit personnes sont touchées par labactérie Mycobacterium xenopi due à une stérilisa-tion insuffisante du matériel chirurgical.

Le rejet en bloc des accusations surprend. Lesresponsables de la Clinique du Sport affichent un cer-tain mépris face au problème ; masquant d’abord lesfaits, ils tardent, une fois ceux-ci révélés par le Ministère,à agir et, de façon systématique, refusent toute remi-se en cause de leurs pratiques.

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Les cahiers de la communication interne n° 17 - Septembre 2005

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Suite page 12 >>>

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es décideurs et responsables de commu-nication sont aujourd’hui largement sen-sibilisés à la gestion de crise. Cetteexpression renvoie à un courant derecherche et de conseil qui, depuis plusde vingt ans, s’intéresse aux catastrophes

technologiques, naturelles, industrielles ; on penseimmédiatement à Bhopal, à Tchernobyl, à la tempê-te de 1999, aux canicules (1)… Ces événements sontd’une part éruptifs, de l’ordre de l’inédit, voire de l’im-pensable, et renvoient d’autre part à des phénomènes« extérieurs » aux organisations. La « crise » qualifieici des situations où les procédures standards del’organisation sont inefficientes face à l’événement,où les systèmes de décision doivent rapidement serepositionner et où les acteurs eux-mêmes (les diri-geants), sont cognitivement dépassés.Une autre forme de crise traverse aujourd’hui les entre-prises. Elle est de nature sociale et tient, non pas à desévénements extérieurs, mais à des politiques de moder-nisation gestionnaire, programmées et « communi-quées ». Si ce type de crise a d’évidentes analogiesavec la crise-événement, elle s’en distingue pardeux traits au moins : elle s’installe au sein du corpssocial, et ceci de manière progressive et insidieuse,en générant des situations de malaise et d’incompré-hension caractérisées. Elle est endogène à des orga-nisations qui tentent de se transformer et s’enlisentdans une dérégulation sociale qui devient un véritableétat de fonctionnement. Depuis une dizaine d’années,plusieurs recherches en sociologie et en psychosocio-

logie des organisations convergent vers ce diagnostic.Les notions de « désordre », de « contradictions » etde « crise durable » y occupent une place centrale.

Un modèle d’analyse des « crises de modernisation»

Nos travaux d’enquête dans un grand nombre d’or-ganisations (2) conduisent à proposer un modèle d’ana-lyse des « crises de modernisation », qui pose toutparticulièrement le problème de la « dirigeance » duchangement et invite à quelques réflexions sur le rôlede la communication interne.

La notion de crise est profondément polysémique.Devenue en un siècle un mot du langage courant, soncontenu tend à « se vider de l’intérieur » (E. Morin,1976). Effectivement, à la moindre escarmouche, toutdevient « crise » dans la société moderne: le politique,la jeunesse, les quartiers, les valeurs, la religion, lesidéologies…Ce mot-piège a pourtant gagné le rang de concepten psychopathologie, et ceci à partir d’une idée forte.Dans la compréhension des états de psychose, H. Ey (3)

a montré que la dimension la plus objective de la crisese manifeste dans la dimension subjective du vécu decrise (voir A. Bolzinger, 1982). D’une part, la struc-ture même de ce vécu est irréductible à d’autresétats psychiques, mais surtout elle est l’indicateurd’une logique sous-jacente ; si l’individu se sent en

D’une crise à l’autre :

s’enlisent dans la confusionL'entreprise n'affronte pas que des crises dues à des événements exté-rieurs mais aussi celles liées aux politiques internes de modernisationet de transformation de son organisation. Les chercheurs en sociologiedes organisations font le diagnostic que ce type de crise devient unvéritable état de fonctionnement. Les notions de "désordre", de"contradictions" et de "crise durable" donnent matière à réflexion entermes de communication interne.

Marc Uhalde

L

quand les modernisations

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Les cahiers de la communication interne n° 17 - Septembre 2005

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rupture, envahi par la confusion et en incapacité dese projeter dans l’avenir, c’est que ce désordre inté-rieur obéit à une structure qui le maintient dans cetétat et dont le clinicien va chercher à comprendreles mystères.La transposition de ce principe à l’analyse sociologiquedes organisations aboutit à des résultats probants. Encomparant quatre organisations très différentes,toutes engagées dans des démarches de modernisation,on met en évidence l’existence d’un « vécu collectif decrise », c’est-à-dire d’une structure de représentationscollectives, là où, au niveau individuel, on ne vit queconfusion et désordre (voir encadré ci-dessus).

Les caractéristiques du « vécu collectif de crise »sont les suivantes :

• Les individus ressentent tout d’abord une très fortedisjonction entre la sphère de l’activité de travail etcelle de l’organisation. Le travail est vécu comme satis-faisant, valorisant et porteur de sens, alors que l’or-

ganisation fait l’objet de frustrations, de désaccords,d’incompréhensions et de sentiments de menace. Cessentiments négatifs s’articulent systématiquementautour de plusieurs dimensions.• Le bouleversement psychologique traduit un doublesentiment de malaise et de confusion. La modernisa-tion est ressentie comme une rupture qui se traduitpar la représentation récurrente d’un « avant » et d’un« après ». De même, la confusion s’installe dans lejugement des autres (vis-à-vis des hiérarchies, desautres métiers…) qui sont à la fois violemment criti-qués au titre de leur rôle dans l’organisation et excu-sés en tant que personnes humaines contraintes dejouer ce rôle.• Le bouleversement cognitif montre un grand désar-roi quant à l’explication même des tensions socialesde l’organisation. Plus personne ne parvient à com-prendre comment l’organisation en est arrivée à ce point.Les individus se sentent totalement dépassés par les pro-cessus organisationnels, tout en sachant par ailleurs qu’ilscontribuent au quotidien à ce fonctionnement.

STRUCTURE DU VÉCU COLLECTIF DE CRISE

Dimensions

Investissement subjectifet valorisation du “travail”

Bouleversementpsychologique

Bouleversement cognitif

Solutions mythiques,recherche de boucsémissaires

Tassement de l'imaginaire

Variables

Attachement manifeste à l’activité de travail / Le travail comme véritable “métier”(source de satisfaction, de compétences, d’identité et d’utilité sociales)

• Vécu de disjonction entre la situation de travail (source de sens et de satisfaction) et le "système" (source de perturbation et de menace)

• Rupture de la temporalité : représentations structurées sur la dualité “avant-après”,pas de projection dans l’avenir

• Confusion dans le jugement d’autrui : distinction paralysante entre le rôleorganisationnel (objet de critique) et la personne (objet d’empathie)

• Incompréhension des règles et politiques de gestion, et des actions de la hiérarchie :sentiment d’incohérence, de contradictions (“Incompréhensibilité“)

• Sentiment d’urgence et de dépassement par les processus organisationnels : faibleclarté des rôles et des fonctions (“Qui fait quoi ?”) - Conscience de l’effetdysfonctionnel des stratégies d’adaptation à l’organisation

• Dénonciations/disqualifications croisées (“un monde d'incapables”) - Stigmatisationsponctuelles de boucs émissaires (accusations nominatives de personnes )

• Psychologisation des désaccords (“une affaire de personnes”)• Fantasme du complot hiérarchique / Fantasme de subversion et d’incompétence

des subordonnés

• Absence de pensée individuelle ou collective sur les alternatives au(dys)fonctionnement actuel

• Brouillage des projections individuelles dans l’avenir• Ambivalence à l’égard du changement : objet de désir, mais aussi de fatalité

(incrédulité sur la possibilité d'un changement concret)

Dossier LA COMMUNICATION INTERNE DANS L’ENTREPRISE EN CRISE(S)

Page 11: D La communication interne dans l’entreprise en crise s

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• L’invocation de solutions mythiques et de boucsémissaires révèle une activité imaginaire à la foisdébridée et désespérée. Plongés dans l’incompré-hension, les individus cherchent des explications radi-cales : la responsabilité du désordre organisationnelest reportée sur des métiers, des catégories hiérar-chiques, des groupes d’âge, des personnes nomina-tives… jusqu’à une psychologisation totale desdysfonctionnements (« c’est une affaire de per-

sonnes! »). La crise sociale se décrypte aussidans la manifestation de deux fantasmes

récurrents : celui du complot hié-rarchique (du point de vue des pro-fessionnels), et celui de lasubversion et de l’incompétencedes salariés (du point de vue dela hiérarchie et des directions).

• Enfin, le tassement de l’imagi-naire (4) qualifie une incapacité à se

projeter dans l’avenir, alors que, para-doxalement, les individus sont plongés au

quotidien dans la réalité du changement (la moder-nisation de l’organisation). Le fatalisme gagne lesesprits, condamnant l’idée même d’une sortie de crisepossible (« on a tout essayé »), bien que celle-ci soitintimement désirée par la plupart des acteurs. Letassement de l’imaginaire débouche alors sur unautre symptôme : la polarisation de l’énergie sur lesconditions d’existence dans le présent (l’urgence, tenirson rôle, son emploi, ses clients, etc.).

Un fonctionnement social singulier : la régulation de crise

Edgar Morin a proposé dès les années 1970 unensemble d’hypothèses permettant d’analyser les crisessociales, non pas comme le dérèglement passagerd’un système, mais comme un fonctionnement àpart entière, régi par des mécanismes spécifiques (voirencadré page 11). Appliqué aux modernisations d’en-treprise, ce canevas permet de rendre compte de la« logique du désordre » (G. Balandier, 1988, N. Alter,1990) qui s’y installe.

La rupture ressentie subjectivement par les acteursrenvoie bien à une rupture objective dans la trajec-toire de l’organisation. Dans tous les cas enquêtés,on observe une transformation radicale, bien quesouvent progressive, de leur modèle de gestion. Aprèsavoir longtemps fonctionné de facto en déléguant lagestion quotidienne aux professionnels, les organi-sations en question entrent dans l’ère du « mana-gement ». Quatre dynamiques gestionnaires les portentvers un nouveau modèle, que certains nomment le« productivisme réactif » (P. Askenazy, 2004) :• la rationalisation des procès de travail,

• la transversalité des fonctionnements,• la flexibilité de l’organisation et de la main-d’œuvre,• la gestion des compétences.La rupture réside aussi dans un nouveau mode de« dirigeance », fondé sur la centralisation et l’impo-sition des changements. De ces deux points de vue,il y a donc bien un avant et un après.L’analyse des relations hiérarchiques et fonctionnellesà partir du « problème de la coopération » (M. Crozier,E. Friedberg, 1976) révèle une configuration inéditede fonctionnement socio-organisationnel. Alors que lesdifférents acteurs de l’organisation sont plus que jamaisinterdépendants dans le procès de changement et d’op-timisation de l’organisation, les relations d’évitementse développent dans tout le système. À la source de cesmodes de relations, deux paramètres peuvent être misen avant: d’une part, ces situations génèrent des « incer-titudes radicales », c’est-à-dire des problèmes et desmodes de relations totalement inédits, face auxquelsles acteurs ne peuvent plus puiser dans leurs ressourceshabituelles ; d’autre part, ils conservent néanmoinsles savoir-faire nécessaires pour maintenir le niveaude leur activité. Les acteurs adoptent ainsi des « stra-tégies réfractaires » où ils tournent le dos à l’organisa-tion en renonçant à négocier les conditions duchangement et s’investissent par ailleurs, et parfois plusque jamais, dans leur activité de travail.De son côté, la hiérarchie intermédiaire est prise entredeux feux : sommée d’imposer le changement ges-tionnaire jusque dans les situations de travail des pro-fessionnels, elle doit composer avec le fort ressentimentde ces derniers (vécu de crise) pour ne pas risquerde ruiner l’efficacité de leurs pratiques informelles.Elle gère donc les équipes sous le mode de la « tolé-rance » (G. de Terssac, 1993), fermant les yeux surleur autonomie tant que les résultats sont atteints, maiss’imposant de manière autoritaire lorsqu’elle se sentmenacée par la hiérarchie supérieure. Il en résulteun système de statu quo critique, dans lequel lesproblèmes générés par la modernisation (des pro-blèmes techniques aux problèmes les plus immaté-riels comme la reconnaissance) ne trouvent aucunespace de « socialisation » institutionnelle.

Pour saisir la profondeur de ces états de crise socia-le, il faut aussi considérer la dimension symboliqueet identitaire des rapports de travail (R. Sainsaulieu,1977, 1997). La tétanisation des forces sociales quicaractérise la régulation de crise tient à l’intensité sym-bolique toute particulière de ces organisations. Ellesdisposent en effet d'un passé riche, qui consacre defortes identités de métier, des codes et des rites entreprofessionnels, un attachement affectif à l'activité età l'entreprise. Contrairement aux bureaucraties froideslongtemps analysées par la théorie des organisa-tions, il y existe une forte notion de « bien com-mun » qui a trait, selon les cas, à l’excellence

Polarisationdes énergies sur le présent

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professionnelle, à une réputation d’une entreprised’élite ou à l’ancrage dans un territoire à forte cultu-re. Cette intensité symbolique toute particulière seconvertit en une dualisation culturelle du systèmesocial une fois la modernisation engagée.Les professionnels (les acteurs au cœur de la produc-tion) se vivent comme les premiers détenteurs de cepassé riche. Ils en ont été le plus souvent les emblèmessymboliques, emblèmes cristallisés dans de fortes rela-tions d’entraide et de solidarité entre pairs. Lamodernisation gestionnaire bouscule les territoiresdu dedans et du dehors de l’organisation. Elle fait péné-trer dans l’organisation des contraintes totalement nou-velles qui contrarient l’identité collective antérieure.Les conditions de permanence de celle-ci se réduisent,instillant des tensions dans les relations de groupe etune méfiance envers les nouveaux. Le travail reste ledernier carré de la reconnaissance identitaire. Les indi-vidus y assurent une continuité symbolique à traversleurs relations personnalisées avec des clients, des four-nisseurs, des usagers… Ainsi, en cherchant à conser-ver son efficacité globale, l’organisation « tolère » cetespace d’autonomie, mais dénie par ailleurs, dansses nouveaux modes de gestion, la signification sub-jective qu’y placent les professionnels. Il y a donc làtous les ingrédients d’un brouillage symbolique et enmême temps d’un équilibre dans le déséquilibre. Lesidentités métiers ne sont plus vraiment reconnues parl'institution, mais sont préservées au sein de l'équipede travail. Si les professionnels ne choisissent ni larévolte ni le retrait, c’est qu’ils restent marqués par l’im-portance symbolique d’un bien commun. Ils courbentle dos, espérant confusément que le destin les sorte dece mauvais pas.De surcroît, la modernisation introduit un nouvelespace symbolique pour les cadres, les dirigeantset les experts fonctionnels. Les méthodes modernes

de management leur offrent l’opportunité d’une nou-velle professionnalisation et une source de recon-naissance. On identifie bien ici les traces d’un conflit« social-historique » que plusieurs auteurs attribuentau processus de modernisation (D. Martin etD. Gerristsen, 1997, E. Enriquez, 1991) : la hiérar-chie symbolique de l’entreprise se renverse auprofit de catégories professionnelles antérieurementdominées, que sont les cadres et les experts et per-met une « revanche » identitaire. Pour autant – etc’est l’une des dimensions explicatives de la régu-lation de crise – cette tension culturelle fondamentalen’est pas mise en œuvre dans les rapports sociaux.Les modernisateurs pensent le changement en termesd'opposition entre anciens et modernes, mais nele traduisent pas en conflit déclaré. Ils limitentleur investissement à la mise au point et au suivi desoutils de gestion, sans réellement prendre en comp-te leur appropriation par les professionnels, ce quisuffit à donner corps à un sentiment d'identité demanagers modernes. Le prix de cette stratégie estque la modernisation gestionnaire ne rejoint pas lamodernisation sociale de l’entreprise. Ces deux rivesdu changement ne se rejoignent pas.

Trois perspectivespour penser la sortie de crise

Compte tenu de ce diagnostic, la question pratiqueest moins celle du changement que celle de la régulation du changement. La problématique del’apprentissage collectif (ou « apprentissage organi-sationnel ») qui alimente une large part de la littéra-ture managériale doit être déportée vers celle de lasortie de crise, c’est-à-dire, sur le plan sociologique,de la restauration de capacités sociales minimales

Dossier LA COMMUNICATION INTERNE DANS L’ENTREPRISE EN CRISE(S)

Éléments bibliographiques

• Alter Norbert, La gestion du désordre, L’Harmattan, 1990• Askenazy Philippe, Les désordres du travail, Seuil, 2004• Balandier Georges, Le désordre – Eloge du mouvement, Paris : Fayard, 1988• Barus-Michel Jacqueline, Giust-Desprairies Florence, Ridel Luc,Crises. Approche psychosociale clinique, Paris : Desclée deBrouwer, 1997• Bolzinger A., « Le concept clinique de crise », Bulletin depsychologie, XXXV, n° 355, 1982, p. 475-480• Crozier Michel, Friedberg Erhard, L’acteur et le système,Ed. Le Seuil, Paris, 1977• Enriquez Eugène, L’organisation en analyse, PUF, 1991• Francfort Isabelle, Osty Florence, Sainsaulieu Renaud, UhaldeMarc, Les mondes sociaux de l'entreprise, Paris, Desclée deBrouwer, 1995• Giust-Desprairies Florence, L’imaginaire collectif, Erès, 2003

• Lagadec Patrick, La gestion des crises, Paris : Ediscience, 1994• Martin Dominique, Gerritsen Danièle (dir.), Effets et méfaitsde la modernisation dans la crise, Desclée de Brouwer, 1997.• Mayer Paul, Challenger. Les ratages de la décision, PUF, 2003• Revue Française de gestion, Dossier « Crise : la gestionresponsable », mars-avril-mai 1996, n° 108, p. 72-122• Sainsaulieu Renaud, L’identité au travail, FNSP, 1977• Sainsaulieu Renaud, Sociologie de l’organisation et de l’entre-prise, Paris, Ed. Presses de Sciences Po, 1987 (réédition augmentée,1997)• Terssac (de) Gilbert, « Organisation du travail et sociologie »,Revue Française de Gestion, novembre-décembre 1993• Uhalde Marc (dir.), L’intervention sociologique en entreprise,Desclée de Brouwer, 2001• Uhalde, Marc, Crise sociale et transformation des entreprises,thèse de doctorat, Université de Paris-Dauphine, 2004

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pour reprendre la course de l’apprentissage collec-tif, exigée par la modernisation.Sur la base de nos propres expériences (Uhalde, 2001),mais aussi d’une étude assez large de la littératuresur la « crise », trois pistes peuvent être suggérées pourappréhender le processus de sortie de crise.

La première concerne « l’intelligibilité du réel ».Les organisations en crise vivent en effet un brouilla-ge aigu de leur histoire récente. Elles ne disposent plusde vues unifiées ni même convergentes de leur proprefonctionnement ; elles ont sécrété sans le vouloirleur propre incertitude, celle de ne plus connaître lanature de leurs ressources collectives (que pensentleurs acteurs, pourquoi, à quoi sont-ils sensibles,prêts ?…). Dans ces mondes gagnés par l’incompré-hensibilité, un travail de diagnostic du processus mêmede la modernisation critique constitue une premièresource de remédiation. Cette forme d’action d’inspi-ration analytique, et largement mise en œuvre par lapsychosociologie clinique, consiste à produire de l’intelligilibité sur de l’inintelligible, à formuler uneinterprétation rationnelle du désordre, là où la« conscience de désordre » (Balandier, 1988) gagneles esprits et inhibe l’action. En tant que sociologue,on sera ici particulièrement vigilant, non seulementà restaurer l’ancrage cognitif des individus dans leréel, mais aussi à tenter de socialiser ce cheminementà travers des débats et des confrontations pour queces prises de consciences individuelles donnent lieuà une vision partagée de l’existant.

Une autre piste est celle de « l’expérience de la confrontation » relationnelle.Fondamentalement, la crise telle que nous en parlonsici est une crise du lien social et de l’interconnais-

sance. Les stratégies d’évitement, le renoncement àla confrontation et les velléités d’une modernisationpar « contamination » des anciens par les nouveauxne conduisent qu’à un brouillage inextricable du sensdu changement. On retrouve un vieil adage de lasociologie des organisations : le changement est avant-tout un problème social et ne peut être produit qu’àtravers une activation du système social. C’est aussiprendre acte que l’identité au travail, qui est sansaucun doute le sel de la mobilisation productive dessalariés, ne se construit, non pas dans l’évitement oule retrait, mais par le « conflit » (au sens génériquede « confrontation »). Faire réagir les acteurs des orga-nisations en crise aux problèmes que génère lechangement, à travers des dispositifs expérimentauxde confrontation (groupes de travail, séminaire collectifetc.) est une manière de créer de la rationalitécollective et, avant cela, de leur faire dépasser lesfantasmes et les représentations erronées, inhérentesau vécu de crise.

Enfin, la sortie de crise pose la question souvent délicate du leadership et de la « dirigeance du changement ».Il s’agit ni plus ni moins que d’engager un processusréflexif avec les décideurs afin qu’ils parviennent, dansun premier temps, à saisir les dimensions de leur modede management qui génèrent des effets pervers àl’échelle du système social. Une telle prise de conscien-ce ne peut porter ses fruits que relayée par l’expéri-mentation progressive d’autres pratiques de« dirigeance » du changement, plus associatives etplus au fait des demandes et des capacités, souventconsidérables, des personnels. Une difficulté récur-rente tient à la prise de risque que suppose ce che-minement, à ce que la théorie des organisations nommele leadership. Dans quelle mesure celui-ci peut-ils’apprendre ?

Ces trois perspectives d’action interpellent sans aucundoute la communication interne. En tant que vec-teur d’explicitation des enjeux et du sens de la moder-nisation, la communication interne peut contribuerà apaiser les anxiétés et les représentations souventfantasmatiques que génèrent les processus de chan-gement. Elle permet une symbolisation de l’avenir etouvre potentiellement un nouvel espace imaginaire(F. Guist-Desprairies, 2003). Cependant, la commu-nication interne ne peut pas agir sans un fort enga-gement du dirigeant dans le changement. Lastratégie de modernisation doit non seulement êtreclaire et compréhensible pour les différentes cul-tures de l’entreprise, elle doit surtout et avant tout êtreportée devant les acteurs, et « engagée » jusqu’à desconfrontations. Ce chemin parfois difficile estconstitutif de l’objectif même qui est recherché,l’apprentissage collectif, et suppose finalement une

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Repères pour une « crisologie »(E. Morin)Edgar Morin distingue six dimensions qui constituent,selon lui, l’ossature possible d’une « crisologie »,c’est-à-dire une science des crises sociales ;• L’idée de perturbation• L’accroissement des désordres et des incertitudes• Les blocage et déblocage• Le déclenchement d’activités de recherche• Les solutions mythiques et imaginaires• La dialectisation de toutes ces composantes.

Texte fondateur : « Pour une crisologie », revue Communication,numéro thématique « La notion de crise », n° 25, 1976, SeuilTexte simplifié : E. Morin, Sociologie, Fayard, 1984,chapitre « Pour une théorie de la crise », p. 139-153

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politique d’entreprise incarnée. La communicationinterne doit sans aucun doute véhiculer cette poli-tique, appuyer sa restauration, mais ne peut certai-nement pas s’y substituer lorsque celle-ci est vacante.C’est probablement là l’une des difficultés particu-lières de la fonction de communication interne dansles situations de crise de modernisation.

DIX CRISES (ENTRE AUTRES)QUI NOUS ONT MARQUÉS

Marc Uhalde Diplômé du CELSA,

docteur en sociologieChercheur au Laboratoire Interdisciplinaire

pour la Sociologie Economique CNRS-CNAM

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Dossier LA COMMUNICATION INTERNE DANS L’ENTREPRISE EN CRISE(S)

EDF et la tempête

Décembre 1999 : face à la tempête, une partie duréseau électrique s’effondre, soulignant la rareté deslignes enterrées. Une grande partie de la France setrouve plongée dans le noir pendant plusieurs jours.Il a fallu en un temps record réparer, remettre en fonc-tionnement et parfois livrer une vraie course contrela montre pour sauver des vies humaines.

Pendant cette période, EDF a entretenu desliens privilégiés avec le public : pas de campagnede communication ni de promesses, mais la mobili-sation d’un grand nombre d’acteurs, dont desretraités, tout en diffusant des conseils à la radio età la télévision. EDF qui a su déployer des moyensextraordinaires a ensuite, publiquement et sur desencarts publicitaires, remercié ses collaborateurs EDFs’est ainsi hissée au hit-parade des entreprises pré-férées des Français.

Danone et les licenciements boursiers

Janvier 2001 : alors qu’il enregistre de fort bonsrésultats, le groupe Danone annonce un plan de restruc-turation et la fermeture de quatre usines LU, notam-ment celle, emblématique, de Ris-Orangis. Unedécision parallèle à celle de Michelin et ses 7500 sup-pressions de postes en Europe. Dans un climat poli-tique tendu, face à la forte mobilisation de ses salariés,Danone joue la carte de la fermeté. Le boycott des

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produits Danone par les consommateurs révèle la forteémotion que l’événement suscite et renforce les réper-cussions négatives de l’affaire.

En s’attaquant au site web de soutien au boycottmonté par les salariés du groupe, Danone s’imposepar la force. L’entreprise, qui représentait une desmarques les plus appréciées des Français, est du coupperçue comme une multinationale prête à tout pouravancer. Son indice d’image bascule en quelques moisde 72 à -38 points.

L’usine AZF à Toulouse explose

Septembre 2001 : une explosion se produit dans l’usi-ne pétrochimique AZF appartenant à la société GrandeParoisse, filiale du groupe Total Fina Elf. L’ampleur del’explosion équivaut à celle d’un séisme de 3,4° surl’échelle de Richter et les répercussions sont énormes :le bilan fait état de 30 morts, 3000 blessés et 27000logements partiellement ou totalement détruits.

Accident ou attentat, le mystère reste entier,mais les salariés ont chacun leur conviction. Legroupe Total ayant tiré les leçons de précédentes crises,son pdg se rend immédiatement sur les lieux. Il nelésine pas sur les moyens pour soutenir toutes les répa-rations. Un numéro spécial du journal interne« Résonances » fera sobrement un point complet detoute la catastrophe.

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Notes1 Voir notamment P. Lagadec (1994), P. Mayer (2003) et le numé-

ro thématique de la Revue française de gestion de 19962 Cet article repose sur deux sources : une vaste enquête

auprès de 80 organisations françaises, publiée en 1995 sousle titre « Les mondes sociaux de l’entreprise » et dans laquel-le la configuration de « l’entreprise en crise » avait été iden-tifiée ; et la réalisation récente de quatre enquêtes approfondiesdans des organisations en transformation : un départementd’usinage de pièces pour l’automobile, un département de res-sources humaines d’une usine sous-traitante de l’industrienucléaire, une cimenterie et un centre de réadaptation fonc-tionnelle, pour un total de 140 entretiens individuels. Cesenquêtes ont alimenté une thèse en sociologie (Uhalde, 2004).

3 H. Hey: médecin psychiatre, spécialisé dans les psychoses.4 Expression proposée par J. Barus-Michel, F. Giust-Desprairies

et L. Ridel (1997)

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Au Club, tout le monde se souvientévidemment du 26 décembre 2004?

Oh oui ! Avec mes collègues à la manœuvre dès lematin, nous ne sommes pas près d’oublier cedimanche, lendemain de Noël ! En effet, dans lanuit précédente, un tremblement de terre sous-marin,évalué à une magnitude 9 sur l’échelle de Richter,s’est déclenché au large de Sumatra, dans l’archipelindonésien. Le tsunami, généré par ce séisme,affecte la majeure partie des régions côtières. Lesmédias se mobilisent très vite sur la question, réqui-sitionnent leurs rédactions et traitent en boucle de cesujet à une période où l’actualité est normalementassez « creuse ». Avec trois villages dans la région(deux aux Maldives et un à Phuket), le Club étaitaux premières loges et très rapidement, notre dispo-sitif de crise a été activé… dès 6 h 25 (heure de Paris).Beaucoup de responsables étant logiquement en vacances, sautent qui dans des avions, qui dansdes trains ou dans leur voiture pour se retrouver « dare-dare » au siège de La Villette et une premiè-re réunion de la cellule de crise se tient dès 12 h 30en liaison avec notre bureau de Singapour (siège duClub Med en Asie) et, lorsque les communicationsle permettent, avec nos équipes dans les villagesconcernés. L’objectif prioritaire est alors de s’assu-rer définitivement que l’information qui nous a étédonnée dès le matin est bonne - à savoir pas de vic-time - et d’organiser la sécurisation des clients et

des salariés avant d’entreprendre l’organisation desretours dans leurs pays d’origine. Dès le matin, unepremière déclaration est faite en ce sens à l’AFPpuis à l’ensemble des médias. Elle sera confirméeen fin d’après-midi par un communiqué de pressemême si, entre-temps, nous avons été informés dela triste nouvelle du décès d’un de nos GO àPhuket. Un numéro d’appel gratuit a été mis immé-diatement à la disposition des proches de nosclients et salariés et diffusé « en boucle » par les télés.Parallèlement, un message du Président, puis desflashes, sont adressés par mail à l’ensemble des équipesde par le monde pour leur faire régulièrement le pointsur la situation.

Comment, dans ces circonstances, maîtriser la justesse de l’information et décider ce qu’il faut faire?

Souvenons-nous que le mot même de tsunamin’était pas particulièrement connu à ce moment-là !L’information était insuffisamment précise et on ad’abord parlé d’un raz-de-marée. Mais comme il tou-chait autant les Maldives que la Thaïlande, on en adéduit très vite que la situation était très grave. Il adonc fallu se mobiliser et tout mettre en œuvre poursécuriser et évacuer les quelque deux mille clientset salariés qui se trouvaient dans la région. Ce que jetiens à dire, en tout premier lieu, c’est que danscette circonstance dramatique, le Club a eu beaucoup,

Le Club Méditerranée

Confronté, comme la plupart de ses confrères, à une catastrophe naturelle d’uneampleur exceptionnelle, le Club Med a dû, avec le tsunami, affronter une situation d’urgence d’une rare intensité dramatique, alors que la crise occupe très vite l’agendamédiatique. Dès qu’on lui parle de la gestion de cette crise, Thierry Orsoni, Directeurde la Communication, évoque en tout premier lieu la « chance miraculeuse » qu’a euson entreprise, pour qualifier une situation qui aurait pu s’avérer dramatique alors quele Club avait environ 2500 GM (clients) et GO (salariés) sur place. Mais, à travers sespropos, nous découvrons aussi que l’entreprise avait mis en place une organisation degestion des crises particulièrement préparée. Regard sur le dispositif déployé.

Thierry Orsoni

et le tsunami:retour sur une gestion de crise

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beaucoup de chance. Ceci étant, le concept mêmedes vacances au Club Med, fondé sur le suivi indivi-duel de nos clients, nous a également beaucoup aidé.En effet, à partir des listings édités quotidiennement,on peut recenser chacun de nos clients. Par ailleurs,les GO ont l’occasion de les côtoyer fréquemment àtravers les activités sportives, les animations, les repaset, de ce fait, finissent par bien les connaître et lesrepérer ; dans le cas du tsunami, ils ont beaucoupcontribué à faire le comptage des présents, à les mettreen sécurité et à organiser leur départ du village ; sanscompter tout ce qu’ils ont pu faire pour rassurer etaider nos clients dans ces circonstances particulière-ment difficiles.

Comment s’organise la gestiondes événements dans ces situationsextrêmes?

Une chose est sûre : il faut aller très vite! Nous sommesorganisés pour gérer les situations sensibles et les crises,diffuser les informations (cf. encadré) et prendre lesdécisions qui s’imposent dans les meilleurs délais.Le Club, du fait de sa notoriété et de sa réputation,est vite la « cible » des médias même s’il n’est pasdirectement impliqué. Il s’agit par conséquent de pou-voir exposer ce qui se passe vraiment et d’éviter ladéformation de cette réalité. Dans cette perspective,le personnel - chefs de villages, directeurs régionaux…- est formé pour savoir comment réagir dans les

situations délicates. Beaucoup d’entre nous bénéfi-cient plusieurs fois par an d’exercices fictifs et dispo-sent de moyens pour réagir, questionner ou savoirtransmettre des messages de façon pertinente.

Et que se passe-t-il après la crise?

Chaque événement sensible est une leçon sur laquel-le il faut capitaliser. La cellule de crise rédige au furet à mesure des comptes-rendus pour action. Un« retour d’expérience » vient enrichir notre connais-sance et a vocation à améliorer la sécurité et lacommunication futures. Il faut éviter la reproduc-tion des écueils que nous avons pu rencontrer, dumoins ceux qui dépendent de nous. Dans le cas dutsunami, pour bien partager le vécu et la mobilisa-tion exceptionnelle de toute l’entreprise, LaurentSabbah, le Directeur de la communication interne,a restitué dans le magazine destiné au personnel, etsur dix pages, l’essentiel de l’événement. Pour ce der-nier cas de crise, l’émotion et la fierté sont impriméesen nous car nous avons su, dans ces circonstancesextrêmes, nous mobiliser et faire face à l’imprévisibleavec une efficacité reconnue.

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Dossier LA COMMUNICATION INTERNE DANS L’ENTREPRISE EN CRISE(S)

Le dispositif permanent de crise potentielle

1/ Une cellule de crise au siège dédiée et mobilisable 24h/24, 365 jours/an2/ Une salle de gestion de crise, équipée de visio-conférence, télévision

satellite, etc réquisitionnable à tout instant3/ Le manuel de gestion des situations sensibles et des crisesdiffusé

auprès des responsables dans tous les établissements. Au sommaire : la définition de la crise, le circuit d’alerte, les acteurs et leursmissions, les règles de base pour communiquer en interne et avec les journalistes, la gestion du stress, les situations types, la sortie de crise et le retour d’expérience. Et une liste de contacts. Cet outil s’accompagne d’une « invitation » à en prendresérieusement connaissance et avant que… Que faire à la réception du manuel, au début de saison, en cours, à la fin ? Invitation est également faite au lecteur pour qu’il vérifie,détecte d’éventuelles erreurs et propose des idées d’amélioration.

4/ Le pocket mémo « En cas de crise contacter » : plié, au format carte bleue, cette synthèsetient dans le portefeuille. L’essentiel peut ainsi être porté sur soi en permanence :définition de la crise, circuit d’alerte, numéros de téléphone (personnel, professionnel etportable) de toute la direction, principaux contacts utiles au siège et partout dans lemonde.

5/ La formation régulière des personnels concernés.

Thierry Orsoni Directeur de la communication

du Club Méditerranée

Interview réalisée par Jean-Philippe Cathelin ”

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Buffalo Grill et la vache folle

Décembre 2002: un ancien salarié accuse Buffalo Grilld’avoir importé de la viande britannique malgré l’em-bargo de 1996 lié à la vache folle. La fréquentationdes restaurants plonge de 40 %. Le fondateur dugroupe et le directeur des achats sont mis en examenpour homicides involontaires par le juge d’instructionqui enquête sur le décès en 2000 de deux victimes dela maladie de Creutzfeldt-Jakob.

En quelques jours une stratégie se dessine :François Picart devient l’interlocuteur des médias ; ladirection soutient la manifestation de salariés ; un siteinternet est immédiatement réalisé pour contrer de faussesrévélations. À la mi-janvier, Buffalo Grill prend l’initia-tive de lancer une campagne de publicité dans la pres-se, sur affiches, dans les restaurants. Dès 2004, malgrél’intense couverture médiatique, les clients reviennentet les résultats de l’année prouvent que l’image est…restaurée.

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Adecco et ses comptes

Janvier 2004 : à partir de soupçons d’irrégularitéscomptables, le groupe franco-suisse perd un tiersde sa valeur en une seule séance à la bourse de Zurich.Malgré le renouvellement d’une partie de l’équipedirigeante et à cause de reports successifs de la publi-cation des comptes, l’inquiétude perdure quelquesmois.

En juin, non seulement les résultats 2003 s’avè-rent bons, mais les problèmes comptables n’entraî-nent aucun retraitement des exercices antérieurs.Cette saga livrée dans un contexte « post-Enron » restesans incidence négative sur l’image de l’entreprise.Inconvénient temporaire : la chute du bénéfice netdû aux frais d’audit et de contrôle des comptes(100 millions d’euros).

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La participation à la gestion de la crise est intégrée dans les activités du RCI dans le cadre de sa mission de conseil au management.

Extrait du référentiel d’activités et de compétences du Responsable de la communication interne paru en septembre 2005.

Ce que dit le Référentiel de l’Afci sur…la communication de crise

DIX CRISES (ENTRE AUTRES)QUI NOUS ONT MARQUÉS

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Dossier LA COMMUNICATION INTERNE DANS L’ENTREPRISE EN CRISE(S)

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Pour en savoir plus sur la communication de crise…Le site de l'Observatoire international des crises propose un guide écrit par Thierry Libaert, intitulé "Crises, de 10 à 100".Il vous propose un très bon panorama sur le sujet en publiant :10 idées, 20 définitions, 30 citations, 40 livres, 50 principes,60 articles, 70 crises majeures, 80 mots clés, 90 questions et 100 sites web.

À télécharger gratuitement sur www.communication-sensible.com/portail

d’Athènes. Sur le site internet, un calculateur nutritionnelpermet de connaître les apports en calories de chaquehamburger et les besoins des enfants et adultes. Peut-être de quoi rassasier les sceptiques!

Bouygues Telecom et sa panne de réseau

Novembre 2004: pour la première fois, une panne natio-nale paralyse un réseau de téléphonie mobile, celuide Bouygues Telecom, pendant plusieurs heures : lessept millions de clients ne peuvent ni passer ni rece-voir d’appel. La cause: un dysfonctionnement de la basede données clients qui sert à repérer le mobile duclient et lui permet d’acheminer les appels, ceci com-plété par une exceptionnelle défaillance des serveursde secours.

Pendant deux jours, l’opérateur enchaîne désin-formations, fausses nouvelles ou absence de com-munications. Le geste commercial pour dédommagerles clients de cette « journée noire » apparaît plutôtmodique. Toutefois, la colère tombe vite, et aucuneaction de consommateurs n’est vraiment menée contrele groupe. Mais certaines organisations qui avaientopté pour un opérateur unique réviseront vraisem-blablement leur stratégie.

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Aéroports de Paris :le terminal de Roissy s’effondre

Mai 2004 : le terminal 2E de Roissy s’effondre,faisant quatre morts et plusieurs blessés. La concep-tion puis la construction de ce bâtiment récentsont mises en cause. Sont également prises à par-tie les sociétés de contrôle technique et les bureauxd’études et de contrôle interne.

ADP monte une cellule de crise efficace etopte pour une stratégie de transparence vis-à-vis dupublic. Informations et images sont largement misesà disposition des médias. ADP annonce même quele terminal serait rasé si nécessaire. Finalement, ladécision de reconstruction avec cette fois une voûtemétallique crédibilise l’image de la sécurité. Lesdoutes s’envolent.

MacDonald’s et la malbouffe

Juin 2004 : le film « Super Size me » clairement diri-gé contre le groupe américain stigmatise l’image d’unerestauration rapide symbole de la mondialisation etde la culture américaine.

Face au risque d’une crise profonde, l’entreprise segarde de répondre à la provocation tout en refusant lerôle de coupable. MacDo joue la carte commercialeet publicitaire et intègre une nouvelle gamme de menusplus équilibrés, associés au parrainage d’athlètes des JO

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DIX CRISES (ENTRE AUTRES)QUI NOUS ONT MARQUÉS

Jean-Philippe Cathelin Directeur de l’agence A CONSEIL

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Prix des meilleurs mémoiresen communication interne

Bonne cuvée 2005pour cette troisième édition!

Développement durable, négociation sociale, projet d’entreprise et projet d’administration: les thèmes récom-pensés cette année sont au cœur de l’actualité.Lors de la remise des prix, le 27 mai dernier, devant unparterre de directeurs et responsables de la communi-cation interne, les lauréats nous ont épatés par lamaturité de leur réflexion, leur facilité d’élocution et

parfois même leur franc-parler. Un air frais a soufflésur les « vieux loups de la communication »…

La rédaction des Cahiers a demandé aux trois lauréatsde formuler les idées-clés de leurs mémoires. L’intégralitéde leurs travaux est disponible www.afci.asso.fr

PrixAfci

2005

Félicitations à• Carole Trivi, Celsa - 1er prix, 3e cycle

Communication interne et développement durable :le cas d’EDF

• Claire Maurice et Romain Huët, IUP Infocom de Lille 3 - 1er prix, 2e cycleNégociation sociale et communication :l’accompagnement discursif de l’ARTT au sein de la Française de Mécanique (double félicitations pour ce duo qui a annoncé sonmariage lors de la remise des prix ! NDLR)

• Olivier Martin dit Neuville, Université Paris XIII2e prix, 2e cycleDu projet d’entreprise au projet d’administration

Nos partenaires• La Française des Jeux • EDF • Groupe Seb• La Chambre de Commerce et d’Industrie de Paris• Givaudan • Les Chocolats Weiss • Stratégies

Le jury• Laurent Sacchi, groupe Danone et président du jury• Jean-Marie Charpentier, EDF-GDF Services • Gérard Gallienne, sociologue et enseignant • Thierry Garnier, Renault Trucks et président de l’Afci • Pierre Labasse, consultant et président d’honneur

de l’Afci • Claire Leblanc, consultante et trésorière de l’Afci • Geneviève Monestiez-Geay, cabinet André Robitaille

et Associés et enseignante • Marc Potel, Caisse d’Epargne de Bretagne et enseignant • Frédéric Saliba, Stratégies

Merci aux nombreux membres du pré-jury qui ont étudié avec beaucoup de professionnalisme chacun des mémoires présentés.

Les inscriptions au Prix 2005-2006 sont ouvertes.N’hésitez pas à en parler autour de vous. Pour les étudiants, ce prix est un tremplin pour rentrer dans le monde de l’entreprise. Pour les professionnels, il constitue un véritable réservoir d’idées. C’est aussi une occasion d’identifier de nouveaux talents…

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ous entretenir de l’importance et de la spé-cificité de la communication interne pour-rait de ma part passer pour une provocation.En effet quand j’ai pris en charge la dircomdu groupe DANONE, j’ai supprimé le postede directeur de la communication interne et

fusionné com’ interne et com’ externe.

Dans un monde idéal, la fonction communication interne serait inutile

La fonction communication interne n’existe queparce que le fonctionnement de l’entreprise estimparfait, qu’il y a des frottements, des pertes enligne. La communication interne n’est rien d’autre qu’unemédiation qui, en théorie, dans un monde économiquesans frottement, n’aurait pas lieu d’être. Pourquoi cela?Parce que ce travail qui consiste à faire passer l’infor-mation, à donner du sens, à créer du lien, à impli-quer, à développer de l’affectif et du symbole, estclairement celui du management. Si l’entreprise étaitorganisée pour que les managers puissent prendre encharge cette mission, nous n’aurions pas besoin de com’interne. D’ailleurs, c’est dans les sociétés qui ont lemoins de culture de management et plutôt des culturestrès techniques qu’on rencontre les plus gros servicesde communication interne. Je prends souvent l’exemplede la population des commerciaux. Chez DANONE,ils constituent sans doute la population « la plus ani-mée» du point de vue managérial et c’est clairementla population qui a le moins besoin des produc-tions de la communication interne. Dans toutes lesétudes d’opinion interne, ce sont eux les plus positifssur tous les thèmes liés à la communication interne.

Les frottements se développant, la communication interne a un nouveau rôle à jouer

La com’ interne est essentielle pour créer une com-munauté alors que les différents acteurs sont tirailléspar des intérêts apparemment de plus en plus diver-gents, à l’heure où les équipes s’internationalisent, où

les cadres se « mercenarisent ». Elle est essentiellepour créer de l’implication et donner du sens, àl’heure où tout le monde doute de la finalité del’aventure entrepreneuriale et où parallèlement lesentreprises doivent mobiliser face à un environne-ment concurrentiel de plus en plus tendu. C’est l’effet de ciseau : un besoin d’implication de plusen plus grand face à un détachement croissant.Enfin, elle est essentielle pour aider les managers àfaire leur travail. Et c’est là je crois une des fonctionsnouvelles de la communication interne, une tendancelourde de l’évolution de ce métier : un rôle d’expertdes relations à l’intérieur de l’organisation, de coachpour employer un mot à la mode. Les responsables decom’ interne qui réussissent dans nos filiales sont ceuxqui ont réussi à s’imposer dans ce rôle-là. Je crois d’ailleursque c’est une chance historique pour la communica-tion interne, celle de quitter sa place de truc un peu àpart («Ça, c’est le boulot de la com’ interne »), un peu« événementiel », ponctuel, fonctionnant au rythmede la production de ses supports, pour s’ancrer vraimentdans le quotidien, dans le micro-management…

Alors pourquoi avoir supprimé la fonction chez DANONE?

D’abord, la fonction n’a pas été supprimée : l’interneet l’externe ont été fusionnés, tout le monde dans lastructure travaille pour les deux. Ensuite, ce mouve-ment ne concerne que la couche « corporate », quele niveau central. Dans les filiales, la fonction demeu-re. Mais c’est vrai, il n’y a plus de «Monsieur ou deMadame Communication Interne groupe DANONE».Pour comprendre, il faut regarder un peu le contextedans lequel nous évoluons :

Un groupe internationalLe groupe compte 80 filiales, qui travaillent sur desmarques souvent différentes dans plus de 40 pays.80000 salariés dans le monde, dont 13000 en France…et 23 000 en Chine (produisant pour les marchéslocaux). Je sais parler à un salarié français, ou à unsalarié italien, mais est-ce que je sais vraiment par-

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La communication internea un nouveau rôle à jouer

“Laurent Sacchi, directeur de la communication du groupe DANONE, aprésidé le jury du prix du meilleur mémoire en communication interne 2005.Lors de la remise des prix, le 27 mai dernier, il a exprimé quelquesconvictions sur la fonction communication interne et son rôle.

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ler à un collaborateur russe, chinois, malais oumexicain ? Ce n’est pas qu’une question de langue,mais plus profondément une question de culture. Envoyageant en Indonésie, dans l’une de nos plus impor-tantes sociétés, ayant plus de 4 000 collaborateurs,j’ai demandé comment étaient relayés les messagesdu groupe, en prenant le cas de l’opération ChildrenHour que nous venions de lancer dans tous les pays.On m’a répondu : « Vous verrez demain matin àl’usine». Le lendemain matin, tous les salariés étaientdans la cour, pas au garde à vous, mais attentifs devantle directeur de l’usine qui, avec un mégaphone, leurexpliquait l’opération. Je pouvais oublier ma belle pla-quette en indonésien ! De là est née l’idée de la sub-sidiarité. Et celle de la com’ indirecte ou en cascadedécentralisée. Je ne communique que ce qui nepeut être communiqué localement. Je ne m’adressequ’à une population qui par sa formation partagedes traits culturels communs : les managers. Ils sontcertes très différents les uns des autres, mais ils ontau moins des formations voisines, et maîtrisent l’an-glais au moins à la lecture. Je n’oublie pas les autres,mais cela reste le travail des filiales.

La porosité des cibles, des publics, des audiences.Dans une entreprise comme DANONE, à la fois visibleet exposée, l’alignement de la communication enversles différentes cibles est un facteur clé.• Tout d’abord, les salariés tirent en partie leur connais-sance et leur compréhension de l’entreprise de sourcesexternes. La revue de presse de DANONE en France,c’est au minimum quinze articles par jour qui parlentde nous. Une personne qui lit Les Echos tous les jourslit quelque chose sur DANONE trois fois par semaine,et cette personne est loin de recevoir des messages dela com’ interne trois fois par semaine!• Second point, en tant qu’entreprise cotée, nous évo-luons dans un contexte légal qui exclut de plus enplus les différences de traitement entre publics. Je nepeux communiquer publiquement une information« matérielle » en interne avant de la communiquer aumarché, sans courir le risque d’être accusé de favo-riser une audience particulière. Dans l’autre sens, il y a aussi le délit d’entrave. Tout pousse donc à lasimultanéité et à l’alignement, à la standardisation,l’uniformité, la normalisation de la communication.Ça devient même un enjeu clé.

La complexité croissantede la matière à communiquer.DANONE, comme beaucoup d’entreprises très visibles,leaders et un peu « icônes », doit faire face à une exi-gence de plus en plus forte de la part de ses différentspublics. Nous sommes interrogés sur tout, interpelléssur tout, pris en exemple ou en contre-exemple surtout… Dans une entreprise de 80 000 personnes, le

vrai problème n’est plus d’être capable de produirele bon outil, c’est de maîtriser les sujets, de trouverles réponses aux questions qu’on nous pose, d’iden-tifier les initiatives pertinentes à communiquer.Ce contexte m’a conduit à organiser mes ressources dif-féremment. À ne plus spécialiser l’équipe en fonctiondes audiences mais en fonction des sujets importants.En clair, j’ai un responsable de communication surchaque grand sujet stratégique pour nous : lesmarques et les produits, les RH, la recherche, les financesou, plus généralement, la performance… Et chacuns’adresse à la fois aux publics internes et aux publicsexternes.

La pression budgétaire.Pour retrouver un peu de marge de manœuvre bud-gétaire, il faut tirer parti des synergies. L’exemple duweb est clair. Entre un intranet corporate et un inter-net corporate, il y a 80 % d’informations communes.Et pourtant tout le monde a développé deux outils dis-tincts, deux solutions techniques différentes, mis enplace deux équipes différentes qui travaillent à l’ani-mation de ces outils… et mettent en ligne le plussouvent deux fois la même chose ou presque. Pourquoine pas avoir une seule plate-forme, une seule équipegérant un site web global avec un tronc commun et des modules plus spécifiques pour l’interne ? Ce n’est qu’un exemple parmi d’autres…

Au niveau corporate, il n’y a donc plusde fonction communication interneidentifiée.

Ceci ne veut pas dire que nous ne fassions plus decom’interne. On en fait même plutôt plus qu’il y a deuxans. Je ne sais pas si on la fait mieux mais on en fait plus.Cela ne veut pas dire non plus que nous nions la spé-cificité de la communication interne. Nous travaillonsjustement sur la formalisation de nos référentiels métiersde communication et nous y insistons naturellementbeaucoup sur les spécificités en termes de compétencesde la fonction communication interne.Je voudrais seulement en évoquer une ou deux, sachantque ces spécificités ne sont pas techniques et qu’ellesrelèvent plus des comportements, des attitudes.Citons d’abord, le rôle de l’écoute et de l’empathie, le rôle de la psychologie… Ensuite, la dimensiond’accompagnement dont j’ai parlé tout à l’heure. Enfinla dimension proximité, la dimension « sociale » ausens noble du terme. Quelque chose dont la commu-nication interne s’est peut-être éloigné ces dernièresannées pour aller vers des sujets considérés commeplus gratifiants, plus prestigieux, perdant au passageune grande partie de son utilité… ”

Prix Afci 2005

Laurent Sacchi Directeur de la communication du groupe DANONE

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Communication interne

le cas EDF(1)

Carole Trivi a passé sept ans dans le secteur de l’eau potable au sein d’unecollectivité locale en tant que chimiste et en charge de la communication envi-ronnementale auprès du grand public. Elle a choisi de reprendre des études auCelsa et est aujourd’hui titulaire d’une maîtrise et d’un DESS en communicationdes entreprises et des institutions. Carole est chargée de communication à laDirection Commerce d’EDF depuis un an et demi.

Les livres traitant de développement durable se multiplient dans les librairies ; cepen-dant, rares sont ceux qui abordent le sujet sous l’angle de la communication inter-ne. Celle-ci semble pourtant essentielle pour toute entreprise engagée dans cettedémarche. Qu’en est-il pour EDF qui affiche depuis plusieurs années un attache-ment notable aux problématiques environnementales et sociétales au travers de sacommunication institutionnelle ? L'électricien s'est bâti au fil du temps une imaged'entreprise éthique, ce qui lui permet sans doute de se hisser régulièrement entête de classement des entreprises préférées des Français (2). Comment l'engagementdéveloppement durable d'EDF, si reconnu à l'externe, se décline-t-il en interne?Quel(s) objectif(s) l'entreprise poursuit-elle par le biais de sa communicationinterne sur le développement durable?

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et développement durable,

étude des supports de communicationinterne d’EDF montre que via le déve-loppement durable, cette communicationrépond à d’autres ambitions que cellede relayer un positionnement affiché àl'externe. Afin de bien comprendre ce qui

suit, il convient de rappeler le contexte particulierdans lequel se trouve l’entreprise au moment où estréalisée cette étude, à savoir l'ouverture du marchéde l'électricité à la concurrence (3). Il s'agit là d'unemutation sans précédent pour cette entreprise publiquequi, depuis toujours en situation de monopole surson marché domestique va désormais devoir faireface aux attaques d'autres grands acteurs énergétiquessur un marché européen. Face à ce nouvel enjeu,les réactions en interne sont mitigées. À l'excitationde vivre une grande aventure se mêlent les incerti-tudes liées à l'évolution du statut et à l'ouverture du

capital. EDF se trouve alors face à une double injonc-tion, se devant de prouver à la fois sa capacité àêtre compétitive et aussi son aptitude à sauvegarderses valeurs de service public dans un monde concur-rentiel. Ainsi à la veille de l'ouverture du 1er juillet2004, un climat d'incertitude générale s'immisce dansle quotidien des agents : leur entreprise ne risque-t-elle pas avec la concurrence de perdre son âme ?

Rassurer : le développement durable,version moderne du service public

Dans ce contexte, la communication interne revêt uneimportance majeure et chez EDF, l’objectif premierde la communication interne sur le développementdurable est de rassurer les salariés. Notre étude, etplus particulièrement l'analyse de contenu menée surle journal interne de l’entreprise entre 2000 et 2003,

L’

1erPrix

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nous a permis de mettre en évidence une triple évo-lution du discours. Tout d’abord, le terme de « déve-loppement durable » se substitue progressivement àcelui d' « environnement ». Parallèlement, on obser-ve une résurgence sensible de la thématique de ser-vice public qui avait plus ou moins disparu du discoursde l’entreprise car jugée quelque peu démodée.L'entreprise impose ainsi le développement durablecomme une version modernisée du service public, lesdeux notions présentant d’importantes similitudes ets'inscrivant dans une parfaite continuité. Dans le mêmetemps, un nouveau vocable lié à la notion de « concur-rence » apparaît au sein du discours managérial : lestermes de rentabilité, résultat, objectif, performancese font de plus en plus visibles, alimentant les craintesd’une entreprise désormais vidée de son sens de ser-vice public. Au travers du développement durable,la communication interne fait référence à desvaleurs familières des agents, introduisant ainsi deséléments de réassurance dans le discours managérial.

Le développement durable, atoutconcurrentiel et élément de légitimation : déployer la stratégiecommerciale et industrielle

Conduire le changement, c'est aussi pour EDF faireen sorte que les salariés s'approprient et portent lastratégie commerciale et industrielle de l'entreprise.Présenté comme un atout concurrentiel, le dévelop-pement durable est aussi la base de certaines offrescommerciales. Par ailleurs, face à une société civilede plus en plus suspicieuse et avide de transparence,le projet industriel de l'entreprise, axé sur l'EPR4,trouve dans le développement durable un élément delégitimation. La communication interne sur le déve-loppement durable d'EDF a donc pour autre objectifde faire des agents les ambassadeurs de la stratégiecommerciale de l'entreprise et les défenseurs de seschoix énergétiques. Cette communication sert ainsi lemanagement pour le déploiement de la stratégie del'entreprise.

Extraire le développement durable d’undiscours institutionnel

Au-delà de ces conclusions liées au cas particulierd'EDF, cette étude a permis de mettre en évidencece qui paraît constituer les deux principaux écueilsde toute communication interne sur le développe-ment durable. Précisément, la difficulté à faire vivrece concept quotidien et à lui donner un caractèreconcret semble représenter les obstacles majeurs àsa bonne appropriation par les salariés. Aussi avons-nous formulé quelques règles que toute communi-cation interne sur le développement durable se devraitd'appliquer.

Trois phases doivent guider l'appropriation du déve-loppement durable au sein d'une entreprise. Aprèsla phase "initiale", qui correspond au moment où l’en-treprise formalise son engagement, les phases de« concrétisation » et « d'ancrage dans le quotidien »doivent rapidement être menées.• La concrétisation consiste à faire un lien systéma-tique entre les engagements déclarés de l'entrepriseet des actions concrètes : au-delà de définir des objec-tifs chiffrés pour chaque filiale ou entité, il s'agit sur-tout de ne pas omettre de communiquer sur cesobjectifs et sur les progrès réalisés d'année enannée.• L'ancrage consiste à faire en sorte que le dévelop-pement durable ne devienne pas le « marronnier »de la communication interne mais qu'il en constituela toile de fond. Il ne s'agit pas d'évoquer le sujet aumoment où l'actualité s'y prête ni de le cantonner àdes supports de communication dédiés, mais de lemettre en lien avec chaque action de l'entreprise etde l'intégrer aux supports déjà existants et utiliséspar les salariés.• Enfin il convient de ne pas se contenter d'unecommunication descendante mais de favoriser lesremontées d'expérience et les bonnes pratiques. Alorsseulement et à condition encore de lui en laisser letemps, le développement durable parviendra à s'ex-traire d'un discours purement institutionnel pour deve-nir véritablement un acte managérial et ainsi s'intégrerdans la culture de l'entreprise.

1 Cas présenté avant l'ouverture à la concurrence du marchéde l'électricité aux professionnels et avant le changement destatut de l'entreprise, à savoir avant le passage d'un statutd'EPIC (Entreprise Publique à caractère Industriel etCommercial) à celui de S.A.

2 Publiscope grand public Louis Harris 98 - 99 ; Ifop pour lemagazine l'Expansion. 2000 ; Sofres pour le TOP COM 2001 ;Sondage CSA, septembre - octobre 2002

3 Depuis le 1er juillet 2004 tous les clients non résidentielspeuvent choisir un autre fournisseur d'électricité qu'EDF. En2007 tous les particuliers auront à leur tour la possibilité dechanger de fournisseur d'électricité.

4 EPR: European Pressurized Reactor - Nouvelle génération de réac-teurs nucléaires plus sûrs, plus compétitifs, plus respectueux del’environnement.

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Retrouvez l’intégralité du mémoire surwww.afci.asso.fr

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Négociation sociale et communication:

Claire Mauriceest titulaire d’un DUT Techniques de Commercialisation, d’une Licence et MaîtriseInformation et Communication à IUP Infocom de Lille 3 et d’une formation complémentaire en Graphisme-infographisme. Elle est actuellement en stage au sein du studio graphique de la Banque Scalbert Dupont(groupe CIC).

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La négociation sur la réduction dutemps de travail et sa communication

Notre travail porte sur l’analyse des discours quiont accompagné la mise en place de la RTT au seinde la Française de Mécanique (entreprise industriellede construction de moteurs, environ 7 000 sala-riés), qui a été tenue de négocier un accord sur laRTT. Cette négociation présente un caractèreinédit, de par une dynamisation sans précédent dudialogue social (augmentation significative du nombrede négociations) et une densité des thèmes voués àêtre négociés (emploi, formation, conditions detravail, rémunération, etc.). Ainsi, la conclusion decet accord sur la RTT a nécessité un intense dialogueentre syndicats et direction : pas moins de quatorzeréunions entre les partenaires sociaux ont été néces-saires pour aboutir à un compromis sur les modalitésd’application de la RTT.

La négociation est une activité qui met en face àface deux ou plusieurs acteurs, qui, confrontés à lafois à la divergence de leurs intérêts et à leur inter-dépendance au sein de l’organisation, choisissent unesolution mutuellement acceptable, leur permettant decréer et maintenir une relation (Dupont, 1990). Ainsi,une analyse de la communication aurait pu consis-ter en l’étude des « actes de communication » qui sejouent dans la négociation, en analysant ce « face àface » entre les partenaires de la négociation.Notre perspective est autre. Nous avons choisi d’ana-lyser la médiatisation du déroulement des négocia-tions au sein de l’espace privé de la FM. À l’issue dechacune des quatorze réunions, les partenaires sociaux« rendent compte » de manière singulière des négo-ciations : ils produisent un certain nombre de dis-cours écrits, censés donner une représentation fidèle,régulière et transparente du déroulement des réunions.Les publics visés par ces documents sont les salariés,

Romain Huëtest titulaire d’un DUT Techniques de Commercialisation, d’une Maîtrise Informationet Communication à l’IUP Infocom de Lille, et d’un Master de Recherche en Sciences de l’Informationet de la Communication à l’Université Lille 3. Il débute une Thèse de Doctorat en Sciences de l’Informationet de la communication sur la thématique de « la Responsabilité Sociale des entreprises ; Il est éga-lement chargé de recherche au Centre de Recherche en Éthique Économique à l’Université Catholiquede Lille.

1erPrix

l’accompagnement discursif de l’ARTTau sein de la “Française de Mécanique”

Derrière un titre relativement ambitieux, nous interrogeons les liens organisation-nels qui existent entre l’acte de « négocier » et l’acte de « communiquer ». Notrearticle porte une attention particulière sur le rôle à la fois plus important et pluscomplexe de la communication dans la conduite des négociations sociales. Trois pointsclés issus de notre recherche sont présentés en conclusion.

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Prix Afci 2005

devenant ainsi une « instance suprême de jugementet de modération » de cette « guerre des mots » quise joue entre les parties prenantes de la négociation.

Recherche de compromis dans la négociation et recherche de pouvoir par la communication : des stratégiesdiscursives différentes au service de la conquête des salariés

Nous avons analysé l’ensemble de la documenta-tion écrite diffusée par les partenaires sociaux à l’is-sue de chacune des réunions de négociation (tracts,lettres, articles parus dans le journal d’entreprise oudans les journaux syndicaux, affiches…). Nous avonsrepéré, dans les documents, une véritable « régulari-té idéologique et discursive » propre à chaque par-tenaire. Ces derniers ne communiquent donc en aucuncas une représentation objective du déroulementdes négociations (comme ils voulaient le faireadmettre), mais ils en donnent une conceptionorientée. Chacun fait valoir des revendications et pré-occupations spécifiques (organisationnelles, juridiques,économiques, sociales…).Une règle élémentaire en communication revient àcomprendre qu’un discours se construit toujours enréponse à un autre. Autrement dit les discours des orga-nisations syndicales et ceux de la direction sont prisdans un « interdiscours » c’est-à-dire dans des inter-actions sociales. Dans ces interactions parfois conflic-tuelles, chacun se doit de combattre les idées et lespropositions émises par les adversaires (les syndicatsdeviennent aussi adversaires entre eux, hors négo-ciation), de faire triompher ses propres idées et de lesfaire partager au public témoin concerné par les enjeuxdu conflit (les salariés). Chacun occupe donc un ter-rain discursif pour se démarquer et influencer le publiccible. Dans le prolongement des perspectives ouvertespar Uli Windish (1987, « Le KO verbal : la communi-cation conflictuelle »), nous avons identifié trois stra-tégies discursives conflictuelles où le discrédit del’adversaire se traduit de différentes manières :

• L’instauration d’une relation de proximité entrel’émetteur et le récepteur (les salariés) : on laisse parler les sentiments et les émotions pour s’ancrerdavantage dans le langage du quotidien. Ce type dediscours « affectif-conflictuel » a essentiellementété développé par la CFTC et la CGT, dans unelogique offensive.

• La « démonstration objective » ; il s’agit deprendre distance par rapport à toute « empreinted’affectivité » pour justifier d’une certaine experti-se sur les questions que soulève la RTT. Ce dis-cours « argumentatif conflictuel » a été développépar la CFDT et la CFE-CGC.

• Enfin, le discrédit peut être invisible. Rien ne montreexplicitement que les propos entrent en conflit avecd’autres. Le discours prend forme à travers une stra-tégie « didactique-conflictuelle » où l’émetteurcherche à expliquer le « pourquoi du comment »dans une optique de transparence absolue, pourinciter les salariés à se saisir des enjeux de lasituation. Ce type de discours semblable à une « guer-re invisible » a été développé par la direction.

En définitive, chacun de ces discours est déployé toutau long du processus de négociation pour servir lesintérêts de celui qui les met en place et pour se démar-quer aux yeux du « public-témoin » ainsi qu’aux yeuxdes « adversaires » (les autres parties prenantes de lanégociation). Les discours s’inscrivent dans unetemporalité nécessaire à une continuité idéolo-gique, qui a pour but ultime d’aboutir à un change-ment des perceptions qu’ont les salariés sur l’évolutiondes négociations. Chacun des acteurs communiquedonc à la fois pour peser sur les négociations (miseen place d’un rapport de forces qui ne cesse d’évo-luer), mais aussi pour se démarquer des autres orga-nisations syndicales (les acteurs peuvent être en mêmetemps solidaires et concurrents) afin de rallier leplus grand nombre de salariés à leur cause. En défi-nitive, ces communications prolongent la « négocia-tion officielle » et s’apparentent à une « guerre desmots » dont les salariés, pris à témoin, sont la variablequi légitime ou non tel discours.Le discours conflictuel offre une illustration concrètedu « théâtre » où se joue une « guerre des mots »dont les acteurs se mettent en scène au prix de lareconnaissance et du pouvoir. Sur la scène socialede la FM, cette guerre des mots aboutit à une véritableredistribution des rôles et des rapports de force entreles partenaires sociaux, en crédibilisant certains audétriment d’autres.

Retrouvez l’intégralité du mémoire surwww.afci.asso.fr

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Du projet d’entreprise

Olivier Martin dit Neuville a rédigé ce mémoire dans le cadre de sa MaîtriseIUP de Communication d’Entreprise à l’Université Paris 13. Quatre années de formationsprofessionnalisantes en communication et de multiples expériences au travers destages ont influencé le style et la portée du mémoire : l’approche est essentiellementopérationnelle. Le traitement se veut par ailleurs généraliste afin d’intéresser des pro-fessionnels de tout horizon. Dans le cadre de son Master au Celsa, Olivier Martin ditNeuville est actuellement en stage de fin d’étude chez Fortis Banque en tant que rédac-teur en chef du magazine interne, chargé de communication interne et “country projectmanager” d’un projet concernant la marque Fortis.

Le mémoire de Maîtrise « Projet d’entreprise et projet d’administration » aborde le projet d’en-treprise tel qu’il a été adopté et adapté dans les administrations. Si cet acte de manage-ment et de communication apparu en France dans les années quatre-vingt a fait l’objet d’unelittérature abondante, son adaptation plus récente dans les administrations a suscitémoins d’enthousiasme. Vingt-cinq ans plus tard, un constat s’impose : ce type de projets’est généralisé, a évolué et donc est toujours d’actualité.

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u’ils soient nommés « plan stratégique »,« charte », « projet d’entités » ou « feuillede route », les projets foisonnent dansles organisations. La définition que nousen retenons est celle d’un acte de mana-gement qui passe par la mise en œuvre

d’une stratégie de management et de communicationvisant à mobiliser les ressources humaines dans unsens commun, connu et accepté de tous. Ce projet,porteur d’une vision et de valeurs partagées faitdonc idéalement l’objet d’une implication des per-sonnels. En termes d’organisation, un projet globalfixe des orientations générales proches des valeurs del’organisation qui sont ensuite déclinées pour chaqueentité en plans d’actions qui servent eux-mêmes debase à la détermination d’objectifs collectifs et indi-viduels. L’ensemble de l’organisation est concernéet doit connaître et comprendre la démarche. Undispositif complet de communication est donc néces-saire, avec une segmentation en cibles, messages etoutils valable pour toute stratégie de communication.

Un travail doit être mené pour créer une identité auprojet, en lui donnant un nom, un visuel et destemps forts qui rythment sa vie.

La première adaptation du projet d’entreprise auxadministrations date de la circulaire Rocard du23 février 1989 « relative au renouveau du servicepublic ». Les objectifs annoncés des « projets de ser-vices » alors décrits sont proches de ceux des pro-jets d’entreprise : orienter et fédérer pour finalementmotiver. Mais les différences entre secteurs privéet public influencent la gestion de ces projets, notam-ment parce que la marge de manœuvre d’une admi-nis t rat ion est plus réduite. Les orientat ionsstratégiques sont en effet fixées par le pouvoirpolitique, par exemple en ce qui concerne la ges-tion des ressources humaines. Dans ce contexte, ilest plus difficile de mobiliser, particulièrement à tra-vers des consultations, car les personnels sontconscients que des éléments externes au projet déter-minent leur avenir.

Q

2ePrix

au projet d’administration

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Prix Afci 2005

Les récifs des projets d’administrationLa Délégation Générale pour l’Armement, au seindu ministère de la Défense, a pour objectif deconcevoir et faire réaliser les systèmes de défense.Dans cette optique, elle joue un rôle d’intermédiaireentre les états-majors utilisateurs et les industriels four-nisseurs. Sa fonction de maître d’œuvre se traduitpar la conduite annuelle de près de 80 programmes.Elle emploie 18000 personnes de statuts variés (fonc-tionnaires, contractuels, ouvrier d’état, ingénieursde l’armement, militaires) dont la culture dominanteest industrielle et technique. La fierté d’appartenan-ce à la DGA est très forte (79 % ), même si lesinquiétudes se cristallisent autour de l’avenir (38 %de confiance en l’avenir des structures).

Les entretiens menés au sein de la DGA au premiertrimestre 2004 ont permis d’identifier les atouts et leslimites de ses projets. Il est ainsi apparu que l’ap-propriation de ces démarches projet par les colla-borateurs est difficile à obtenir, particulièrement auprèsde la base. Les moyens de communication interneassurent pourtant une bonne circulation de l’infor-mation dans toute la structure. D’autre facteurs ontdonc été identifiés, certains étant caractéristiques desadministrations. La bureaucratisation, associée à unestructure rigide, entraîne ainsi la démotivation, lescepticisme et la résistance au changement. Des luttesde pouvoir peuvent également intervenir car le projet est une occasion pour certains managers dedélimiter leur zone d’influence accrue par ladéconcentration du pouvoir. Ces éléments entraînentune perte de la cohérence globale de la démarchequi peut donner une impression de confusion et decontradiction. Ainsi, la cohabitation de trois ou quatreniveaux de projets, parfois menés sans réel souci delogique, entrave la lisibilité de la démarche.

Entreprise versus Administration,un clivage à dépasserSi l’étude du cas de la DGA a permis de décelercertains atouts et risques dans les démarches pro-jet, elle a également révélé que le statut d’adminis-tration n’est pas le seul facteur dimensionnant dela réussite du projet. La culture en vigueur au seinde l’entité est tout aussi essentielle. Ainsi des per-sonnels empreints d’une culture industrielle et tech-nique sont dans l’attente d’un projet concret,quantifiable et mesurable. Ils seront moins sensiblesaux discours plus imagés et axés sur des valeursqui caractérisent les cultures plus « tertiaires », etqu’on peut retrouver dans des services centraux oudans d’autres secteurs d’activité. Les démarches par-

ticipatives rencontrent moins d’impact auprès de cestechniciens car elles les obligent à s’extraire deleur spécialité.

L’histoire de l’organisation intervient également,notamment sur les attentes des personnels. Desréformes, des réorganisations et des restrictions suc-cessives suscitent une inquiétude par rapport àl’avenir. Le projet est alors un moyen de rassurer enoffrant une visibilité sur l’avenir. Pour sa part, lacommunication du projet doit répondre à la foisaux impératifs du management et aux attentes despersonnels. Le risque est de livrer une communica-tion trop descriptive, à la remorque du projet, et doncpeu impliquante pour tous.

Une réelle utilité… et donc un avenir !Un projet mené avec transparence et cohérence estcapable d’améliorer l’activité, notamment en met-tant en relation des individus et des services qui nel’étaient pas auparavant. Les démarches participa-tives peuvent initier une évolution des comporte-ments : le personnel des administrations, autrefoissubordonné à l’exécution d’ordres hiérarchiques etdésormais informé et consulté sur les orientationsstratégiques, apparaît davantage valorisé et respon-sabilisé.

Les démarches projets d’entreprise représentent doncbien une opportunité pour les administrations.Particulièrement dans un contexte de réforme de l’État,ils doivent permettre de sensibiliser les personnelsaux enjeux de leur activité et aux évolutions de leurenvironnement. Et si ces projets d’administrationrevêtent aujourd’hui surtout une dimension interne,ce n’est qu’une première étape. À l’image des projetsd’entreprise, leur prochain défi sera vraisemblable-ment d’associer à la démarche interne une dimen-sion externe, pour accroître leur visibilité etlisibilité auprès des contribuables, de leurs partenaireset de leurs clients.

1 Source : Baromètre de climat interne 2003 de la DGA

Retrouvez l’intégralité du mémoire surwww.afci.asso.fr

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n 2003, 37 % du marché de l’électricitéfrançais est ouvert à la concurrence(consommation > 7 GWh/an) pour suivreles directives de Bruxelles. Les très grandesentreprises sont donc déjà libres de choi-sir leur fournisseur, français ou étranger.

Le 1er juillet 2004 marque la deuxième étape decette ouverture à la concurrence, et libéralisel’accès au fournisseur de leur choix aux profession-nels, aux PME et aux collectivités locales. Désormais70 % du marché sera ouvert à la concurrence, cequi représente un marché de 20 milliards d’euros et2,3 millions de clients.La dernière étape de l’ouverture est fixée au 1er juillet2007 et libérera le marché des particuliers. L’acteurmajeur du changement concernait la BrancheCommerce d’EDF en charge de la commercialisa-tion de l’électricité.

Pourquoi créer de nouvellesmarques?

Trois raisons majeures ont conduit le ComitéExécutif d’EDF à faire ce choix :

• Créer une marque est souvent nécessaire lorsqu’oncherche à s’adresser à une cible qui a des attentes spé-cifiques. C’est aussi le moyen de re-dynamiser larelation, de « redonner à voir » l’offre sous un journouveau.La marque agit alors comme « repère » d’une offredifférente : elle a une fonction « packaging » enquelque sorte.

EDF se retrouve confrontée à la nécessité de marquerle changement auprès de ses cibles entreprises et pro-fessionnels, surtout auprès des professionnels qu’elleavait jusqu’alors assimilés à la cible des particuliers.Ceci d’autant que la Branche Commerce préparait àcette époque de nouvelles offres mieux adaptées auxbesoins de ses cibles et voulait le leur faire savoir.

• EDF est à un moment crucial de son histoire où elledoit à la fois embrasser son ambition européenne et serapprocher de ses clients pour qu’ils la « re-choisissent ».D’un côté la marque EDF doit donc prendre de lahauteur pour accompagner les évolutions de l’en-treprise (34 % du chiffre d’affaires réalisé hors deFrance, nouvelle organisation en Branches, engage-ment dans le développement durable, enjeuxnucléaires, etc.). De l’autre, maintenir le chiffred’affaires en France signifie gagner en proximité avecles clients pour mieux répondre à leurs attentes.

• Accompagner la nécessaire mutation culturelleinterne doit trouver un signe fort alors qu’EDF quittele monopole pour la concurrence.Il s’agit d’aider les équipes à mettre le client aucœur de la relation, alors que l’entreprise est cultu-rellement installée dans une posture de « défense del’intérêt général » qui, par conséquent, « sait » cequi est bon pour ses clients. L’entreprise a aussi pourobjectif de motiver ses commerciaux alors qu’ellene peut que perdre des clients et voir sa part de mar-ché décroître. Pour inverser le processus, il fautconvaincre que chaque client « regagné » est un clientfidélisé et satisfait, d’autant qu’il doit signer un contrat,ce qui n’existait pas sous le statut du monopole.

Deux nouvelles marques

Pour affronter de façon compétitive l’ouverture des marchés de l’énergie à laconcurrence le 1er juillet 2004, EDF a voulu affirmer sa mutation auprès detous ses clients en lançant EDF Entreprises et EDF Pro. Deux nouvelles marquespourquoi ? pour qui ? pour dire quoi ? et portées par qui ?

Christine Descamps

E

pour dynamiser EDF

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Au printemps 2003, on identifie quatre temps fortspour lancer les deux marques :

• Lancement à la Convention Commerciale d’octobre2003 (1 500 personnes rassemblées à Disneyland)avec deux films internes conçus pour mobiliser surles nouvelles marques et leurs valeurs.• Un kit managers envoyé à chaque unité de laBranche Commerce pour que les managers, pré-sents à la Convention Commerciale, déploient auprèsde leurs équipes (novembre et décembre 2003).• Des formations aux valeurs des marques (janvier àmars 2004) sous forme de demi-journée de sensibi-lisation/appropriation pour les 4 500 personnes encharge des entreprises et des professionnels.• Un D-Day, la semaine précédant le lancement exter-ne pour célébrer l’événement et faire une dernière« piqûre de rappel ».

Les films de lancement de la Convention Commerciale

Le film de la Division Entreprises est conçu sur le mes-sage suivant :« Chez EDF Entreprises, nous avons bien compris quel’énergie est une composante vitale dans la produc-tivité et la compétitivité d’une entreprise… et nousferons toujours tout pour mériter la confiance de nosclients ». Le film est donc composé d’images de stocks(extraits de films longs métrages ou films publicitaires)démontrant la confiance, avec comme message final :« La confiance, c’est ce qui donne l’énergie d’allerplus loin. Nous chercherons toujours à gagner laconfiance de nos clients », puis le nouveau logo s’affichait.Le film de la Division Particuliers et Professionnelsest conçu sur le même modèle mais sur un posi-tionnement en adéquation avec les attentes desprofessionnels :« Chez EDF Pro, nous avons bien compris que votrepriorité est votre activité et son développement, etnous nous devons de vous simplifier l’énergie afinde vous permettre d’accroître votre compétitivité sansvous faire perdre de temps ». Le film se compose doncde vignettes montrant différentes manières de se simplifier la vie avec comme message final : « On gagne toujours à se simplifier la vie. Nouschercherons toujours à faciliter l’énergie pour nosclients. », puis le nouveau logo s’affichait.Les deux films fonctionnent sur des registres très différents: le premier est émouvant, alors que le secondest léger et drôle. Ils remportent tous deux une adhé-sion immédiate. À la seconde diffusion du filmd’EDF Entreprises, la salle se remplit même de briquets allumés comme lors d’un concert !

À l’issue de cette analyse, il est décidé endécembre 2002 de créer les marques EDF Entrepriseset EDF Pro. La première est destinée principalementaux PME/PMI (135 000 clients) et la seconde auxprofessionnels (2,1 millions de clients). Il est conve-nu que les logos seront des « adaptations » du logode la maison mère pour en exploiter la force et lareconnaissance et s’inscrire parfaitement dans sa filia-tion, ce qui viendrait la nourrir en retour.

Quel dispositif de lancementà l’interne?

À compter de l’année 2003 et jusqu’au lancementen mars 2004, la Branche Commerce organisée endeux divisions (la Division Entreprises et la DivisionProfessionnels et Particuliers) devient le pilote uniquedu projet marques, à l’exception des campagnes decommunication externes qui sont co-pilotées avecla Direction de la Communication. Un comité Marqueest créé dans chacune des Divisions autour duDirecteur de la Division pour suivre l’avancementdu projet, ses impacts dans tous les métiers (Systèmesd’information, Ressources Humaines, Marketing,Commercial, etc.) et en garantir le timing.Ce projet est un projet parmi beaucoup d’autresdans l’accompagnement du changement. Toutes leséquipes doivent se former aux nouveaux outils clients(en particulier un nouveau système d’information),aux nouvelles méthodes de vente et donc aussi auxnouveaux discours.

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La démarche de création de marques relatée parChristine Descamps précède le changementd'identité visuelle (avec notamment un nouveaulogo) adopté par EDF le 7 juillet dernier. Depuiscette date, les deux marques subsistent avec lenouveau logo.

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Marques qui deviendront l’engagement de toutes leséquipes à vivre leur marque.Ainsi, « Être Expérimenté » pour EDF Pro signifie :« Nous mettons en œuvre le partage d’expérience,la capacité à apprendre en permanence et à savoirconvaincre ». Ou encore, « Être Souple » se traduitpar : « Nous cherchons à personnaliser nos relationset à nous mettre à la place de nos clients. » Chacunde ces thèmes est ensuite explicité dans le Livre deMarque d’EDF Pro.

Interactives, voire ludiques, ces formations ont ététrès appréciées par toutes les équipes. Au cœur du « tun-nel de formations » que les uns et les autres devaientsuivre, la formation à la marque apparaît comme unevéritable respiration, un moment unique pour réfléchirà la dimension relationnelle du contact avec les clients.

• Un D-Day, la semaine précédant le lancementexterne en mars 2004Ce D-Day doit prendre une forme conviviale (un cock-tail ou un déjeuner buffet) et être l’occasion pour chaqueDirecteur Régional d’encourager une dernière foisses équipes. Les campagnes publicitaires radio et pres-se qui sortent juste après sont aussi dévoilées et le Livredes Marques distribué, ainsi qu’une série d’accessoiresau sigle de la nouvelle marque (tapis de souris, sty-los, affichettes…). Le D-Day prit même des allures defête dans certaines régions ; ce fut une occasion de ras-sembler toutes les équipes d’un territoire parfois trèsvaste géographiquement, et à chaque fois le lancementde la marque et la distribution des objets qui la repré-sentent ont constitué un temps fort.

En conclusion, les marques EDF Pro et EDF Entreprisesse sont révélées de bons moteurs pour entraîner leséquipes dans le changement, pour mettre l’accent surles clients, pour faire comprendre que les comporte-ments portent l’empreinte de la qualité de service. Ilest clair que l’implication des managers dans le pro-cessus de déploiement est certainement à l’origine dela forte mobilisation et de l’enthousiasme généré parces nouvelles marques.Enfin, ajoutons que les résultats du premier baromètreexterne sur EDF Pro en octobre 2004 apportent des résul-tats encourageants : on y apprend que la notoriété assis-tée d’EDF Pro est alors de 60,2 % et que l’imaged’EDF Pro est meilleure que celle d’EDF sur les critères« est à votre écoute » et « vous aide à maîtriser vosdépenses d’énergie ».

Les Kit Managers EDFEntreprises et EDF Pro

Ils sont conçus pour ceux qui n’ont pas été invités àla Convention Commerciale. L’objectif est d’expliquerde façon simple à la fois ce qu’est une marque, sonrôle, son message, ses valeurs et comment elle va setraduire concrètement (cf. le déroulé du kit managerpage suivante).

Formations aux valeurs des marques

Ces formations ont pour objectif de faire travaillertoutes les équipes des Divisions Commerciales surl’appropriation des valeurs des marques et leurtransformation en comportements. Elles se dérou-lent sur une demi-journée, sont extrêmement inter-actives et se décomposent en cinq temps forts :

• La marque dans notre quotidien : Grâce à un jeuqui consiste à lister cinq marques préférées et cinqmarques détestées, nous faisons prendre conscienceà chacun que les marques font partie de notre vie etque notre perception est le fruit de nombreux éléments(qualité des produits, image, publicité, valeurs partagées ou non, service clients, etc.).

• La marque pour quoi faire? Par un exercice en sous-groupes, il est proposé de s’identifier à un vendeur duClub Med, tandis que d’autres vendaient NouvellesFrontières et qu’un troisième groupe défendaitRêv’Vacances. Les « acteurs » réalisent que desarguments différents sont utilisés pour vendre unemarque « référente », une marque « challenger » ouune marque « suiveur ». Les notions de positionne-ment et d’image deviennent alors plus concrètes.

• Le contenu de notre marque : Après ces deuxexercices, nous pouvons expliciter le message de notrenouvelle marque, le bénéfice pour les clients et lesvaleurs retenues pour la mettre en œuvre.

• L’application des valeurs dans son travail quoti-dien : Les équipes sont ensuite amenées à réfléchir sur« comment vivre la marque au quotidien, chacun dansson métier et dans la relation client » en essayant detraduire ce que signifie Être Proche, Expérimenté,Professionnel, Souple dans sa vie quotidienne et danssa vie professionnelle.

• Pour aller encore plus loin dans la traduction desvaleurs en termes de comportements à l’égard desclients, les participants sont invités à trouver deuxengagements concrets illustrant chacune des valeurs.Ceux-ci seront ensuite restitués dans les Livres des

Christine Descamps Fondatrice de CDS Brand Consulting.

Cabinet expert-conseil sur les marques.Christine Descamps était responsable

des marques chez EDF de 2001 à 2004.

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Slide 7 : Les valeurs de notre marquecommercialeLes valeurs commerciales d’EDF Pro vont nous per-mettre de vivre notre marque au quotidien, chacun dansnotre métier.Proche, Expérimentée, Professionnelle, Souple (quicomposent l’acronyme PEPS).Le contenu de ces valeurs, nous allons le définir et ytravailler ensemble pour que tous nous puissions contri-buer au message de notre marque.

Slide 8Nous expliquons comment les marques commer-ciales s’inscrivent dans la filiation de la marque EDF,entreprise préférée des Français (l’héritage) et de sesvaleurs (la Charte Éthique : Respect de la personne,Respect de l’environnement, Performance, Solidarité,Intégrité) à travers des valeurs plus concrètes, auservice des clients.

Slide 9Diffusion du film interne.

Slide 10 : EDF Pro va se traduirepar un ton et un nouveau discours Un ton unique quels que soient les clients et qui reflé-tera la marque : proche, expérimentée, professionnelleet souple.Un discours d’écoute, centré sur le client plutôt qu’undiscours d’expertise et de défense de l’intérêt général.Ce ton et ce discours, vous allez les construire enparticipant à des formations/animations relationnelles.Il sera ensuite porté par :• chaque personne d’EDF Pro,• tous les canaux de la relation : téléphone, courriers,publicité, salons, RP, Internet, brochures, face à face.Tous les outils seront mis en place entre décembre 2003et mars 2004.

Déroulé du Kit Manager d’EDF Pro

Slide 1 : Qu’est-ce qu’une marque?Un repère sur un marché : « la place que l’entrepriseveut occuper dans l’esprit de ses clients et des autresacteurs du marché ».

Slide 2 : Rôle de la MarqueUn schéma démontre qu’une marque, c’est la percep-tion que s’en font les clients et cette perception est lefruit à la fois de la communication externe et des contactsque les clients ont avec la marque à travers le serviceclients (plateformes téléphoniques principalement, dansle cas des marques commerciales d’EDF).

Slide 3 : Pourquoi créer une marquecommerciale pour les professionnels ?Pour relever les défis qui s’offrent à nous aujourd’hui :• Réussir dans notre métier de « commercialisateur »• Faire que nos clients professionnels confirment leurchoix d’EDF en leur apportant de la reconnaissance eten prenant en compte leurs attentes spécifiques• Faire que chaque salarié travaillant pour les profes-sionnels soit acteur du changement

Slide 4 : EDF Pro parce queEDF c’est notre histoire, notre expertise technique, nosmissions de service public et l’entreprise préférée desFrançaisPro un nom générique, valorisant pour une vaste cible(2,1 millions de clients) qui se reconnaît dans cette déno-mination. D’autres marques ont déjà eu cette démarchequi est familière pour nos clients : SFR Pro, OrangePro, Windows Professionnel, MAAF Professionnels, etc.Nous-mêmes sommes « des pros au service des pros »et 73 % des professionnels considèrent cette créationde marque comme utile (étude CSA juin 2003).

Slide 5 : Le logoUne reprise du logo d’EDF parce que le signe est « connuet reconnu » de tous.

Slide 6 : Le message de notre marqueEDF Pro met tout en œuvre pour simplifier la vie deses clients.Comment ? « Au quotidien comme dans les moments-clés, nous vous facilitons l’énergie et les services asso-ciés… »Pourquoi ? « …car EDF Pro est votre conseiller de proxi-mité et d’expérience »

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du management sous-exploité

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Comment relayerl'impulsion initiale?

La réponse de court terme est souvent claire : pour ini-tier la dynamique, rien de tel qu'organiser un dialoguedirect entre les managers et les dirigeants. Celapasse généralement par un séminaire d'échangessur les priorités, parfois précédé ou suivi d'ateliersde travail participatifs.Mais cette première phase achevée, on se heurte àla difficulté du déploiement sur la durée. Pourtant,soutenir la mobilisation est bien nécessaire pouraller au-delà des premiers enthousiasmes et ancrer lesnouvelles orientations dans le réel. Et l'enjeu de com-munication est d'autant plus élevé qu'il faut parve-nir à impliquer l'ensemble des managers et passeulement ceux qui ont pu s'impliquer dans des ate-liers ou séminaires.Les responsables de la communication se trouventsouvent démunis face à cet enjeu. Dans le meilleurdes cas, les orientations seront traduites dans les sys-tèmes de management – objectifs et évaluations enparticulier. Cela ne suffit pas pour autant à ce queles orientations soient claires pour tous. On rappel-lera aussi l'importance du sujet lors du séminaire del'année suivante… si le contenu s'y prête ou si de nou-velles préoccupations ne viennent pas le reléguer ausecond plan. Par exemple, qui envisagerait d'orga-niser trois années de suite le séminaire annuelautour des « nouvelles » valeurs de management ?Pourtant, ce n'est pas le séminaire de lancement

à lui seul qui en assurera le déploiement. On peutaussi s'appuyer sur des posters, des brochures, desarticles dans le journal ou le portail d'entreprise, maissans grande conviction… Et pour cause : ces supportsjournalistiques ou quasi-publicitaires permettent difficilement une communication riche et à forte valeurajoutée (voir schéma).

Un potentiel mal utilisé

Les dirigeants et leurs responsables de communicationdisposent pourtant d'un levier particulièrement puis-sant, mais largement sous-exploité: l'intranet. Une telleaffirmation peut surprendre. La plupart des organisa-tions ne disposent-elles pas de portails internes déjàsurchargés en informations ? Et n'est-il pas avéré quela plupart des managers s'en désintéressent, d'autantplus qu'ils sont à un rang élevé dans la hiérarchie ?De fait, la réponse ne réside pas dans l'outil lui-même,mais dans l'utilisation qui en est faite. Ainsi, dans laplupart des organisations, l'offre intranet à destinationdes managers se limite à la transposition à l'écrandes brochures officielles sur la politique d'entrepri-se, à l'accès à quelques outils de gestion et parfois àl'équivalent d'un journal d'entreprise en ligne… Undispositif loin de constituer un vecteur de communi-cation stratégique !

En réalité, mieux utilisé, l'intranet se révèle un moyenparticulièrement efficace pour stimuler l'attention

L'intranet: un levier de mobilisation

Comment mobiliser les managers sur de nouvelles orientations straté-giques? Comment insuffler et entretenir l'adoption de nouvelles pratiquesou valeurs de management ? Comment aider les managers de terrain à « porter » la stratégie et les changements vis-à-vis de leurs équipes ?Des questions que les communicants se posent tous les jours sans vraimenttrouver de réponse satisfaisante. Et si intranet pouvait les aider…

Étienne Baërd

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dépassé les attentes : sur les premières six semainesd'existence du site, plus de 80 % des dirigeants« ciblés » s'y sont rendus chacun trois fois en moyen-ne, pour télécharger au total six à sept documents,alimentant ainsi notablement leur préparation auxdébats.

En 2001, Alexander Nieuwenhuizen, directeur dudéveloppement des organisations et de la formationdu groupe Lafarge, doit stimuler l'émergenced'une nouvelle culture de management, adaptéeaux défis d'un groupe en pleine expansion inter-nationale. Mais comment faire partager aux 1 500principaux cadres du groupe, répartis sur plus de80 pays, les priorités de management arrêtées parle comité de direction ?Un de ses leviers a été de lancer la Lafarge LeadershipLibrary, site conçu non seulement pour préciserles priorités de management, mais aussi pour aiderchacun à les mettre en œuvre, au moyen deguides méthodologiques et de supports de réflexion.Quatre ans après son lancement, la « 3L » est unecomposante notable de l'offre de la nouvelleUniversité, et constitue une aide à l'action en répon-se aux interrogations de plus d'une centaine demanagers chaque semaine.

et la mobilisation des managers. Un petit nombred'entreprises, comme la Banque de France, DCN,Lafarge ou Sodexho ont su en tirer parti pour accom-pagner la mise en œuvre de changements impor-tants. Ces organisations ont conçu des supportsintranet directement utiles au déploiement deleurs orientations, exploités de façon significativeet sur la durée par les managers et dirigeants.Nous allons explorer les principes à la base de cessuccès.

Un impact avéré

Lorsqu'il prépare le séminaire d'été 2002 des diri-geants du groupe Accor, Jean-Jacques Gressier, direc-teur de l'Académie Accor, a pour enjeu de créer lesconditions d'un débat productif sur un sujet d'actua-lité, à savoir aborder la crise comme une opportuni-té. Mais comment inciter 200 dirigeants dispersés, auxemplois du temps surchargés, à préparer leur réflexionpour le débat à venir ?La solution a résidé dans la création d'un siteintranet simple, dédié à l'événement, conçu pourstimuler chez chaque directeur l'envie d'explorerdifférentes facettes du sujet à débattre. L'impact a

LE CHAÎNON MANQUANT

Richessedes échanges• Volume

d’informations• Personnalisation• Interactivité

Population touchée à coût donné

SéminairesAteliers de travail

L’intranet commesupport à l’action :

le chaînonmanquant?

L’intranet commebrochure ou

journal en ligne

Articles dans lejournal interne,

brochures, affiches

Très bien pour larichesse des échangesmais les coûts impartis nesont généralementjustifiés qu’aulancement

Un levier inexploité :il permet de combinermessages et offre unerichesse de contenusen support à l’action

Leur coût permet une large diffusiondans la durée, mais leur richesse de contenus reste limitée

L’intranet est souvent aujourd’hui le “chaînon manquant” du dispositif de communication lors du déploiementde nouvelles orientations ou priorités. L’utiliser pour diffuser l’équivalent d’une brochure ou d’un journald’entreprise en ligne est insuffisant. C’est lorsqu’il combine messages et supports à l’action que l’intranet jouepleinement son rôle dans la mobilisation.

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Positionner le site comme un outil que l'on est naturellementappelé à utiliser dans le cadre de son activité

Proposer des contenus utiles ne suffit pas pour queles managers s'en servent ! Encore faut-il parvenir àsusciter chez eux le réflexe d'y recourir.Là non plus, la réponse ne réside pas dans unmatraquage publicitaire. Plutôt que d'exhorter lesmanagers à se rendre sur le site, il faut les mettre ensituation d'avoir envie d'y aller. Cet objectif est trèsstructurant lors de la conception du site : ce dernierdoit être pensé non pas comme « le site de commu-nication sur… » mais comme « le site en réponse auxinterrogations sur… ». Et ces interrogations doiventêtre concrètes, opérationnelles, sources de préoccu-pation pour tout manager dans le cadre normal desa mission. Par exemple, « comment puis-je correc-tement jouer mon rôle dans ce nouveau processus? »,« comment vais-je surmonter les réticences à lamise en œuvre de ce changement d'organisation ? »,« comment vais-je traduire les nouvelles prioritésen objectifs pour mes équipes ? », etc.Dans ces conditions, le site n'est plus un simple « sup-port intéressant », à l'instar d'un journal interne quel'on feuillette si l'on a le temps, pour le plaisir d'êtreau courant ou de se sentir partie prenante. Il devientun véritable outil de travail, vers lequel on se dirigespontanément, et auquel on accorde son attention.Ainsi, comment a-t-on pu inciter les 200 cadres diri-geants d'Accor à se rendre trois fois sur le site pré-paratoire à leur séminaire? En positionnant clairementce dernier comme partie intégrante de l'opérationd'échanges et de réflexion commune : un question-naire recueillait les opinions de chacun pour prépa-rer les débats ; des supports de réflexion permettaientde nourrir sa réflexion avec les points de vue de diversexperts, etc.

Proposer un accès rapide à des contenus efficaces et synthétiques

Pour devenir un support utilisé spontanément en répon-se à une difficulté, le site doit être adapté à la situa-tion de travail typique d'un manager ou dirigeant :ce dernier est pressé, exigeant, et veut rapidementsavoir s'il peut ou non obtenir une aide rapide sur sonproblème. De ce point de vue, rien de tel qu'un moteurde recherche qui propose 41 résultats à sa requêtepour le faire fuir ! Et pour s'aliéner définitivement lesrares courageux, le plus efficace est encore de pro-poser en vrac un mélange constitué de documentsde réflexion en 25 pages, de notes de procédure, desupports méthodologiques de qualité variable,

Ces deux exemples possèdent une valeur illustrativeparticulière, dans la mesure où ils établissent qu'onpeut tirer parti de l'intranet pour stimuler l'intérêt decadres dirigeants – et cela sur la durée.Que l'on s'adresse à des cadres dirigeants ou à des mana-gers de terrain, les principes qui sous-tendent le succès de tels dispositifs sont étonnamment similaires :• concevoir un site qui constitue un support à l'action;• le positionner comme un outil que l'on est naturel-lement appelé à utiliser dans le cadre de son activité ;• proposer un accès rapide à des contenus efficaceset synthétiques ;• faire du site un vecteur de promotion des orienta-tions retenues.

Concevoir un site quiconstitue un support à l'action

Bien communiquer nécessite souvent de répéter inlas-sablement les mêmes messages. Mais, à défaut quel'émetteur ne se lasse, ne lasse-t-on pas souvent lesdestinataires ? Combien de slogans, de credo ou devaleurs d'entreprises deviennent ainsi vides desens, à force d'être répétés sans autre justification quede les marteler dans les esprits ? Rien d'étonnant, ainsi,que les brochures ou articles en support des nouvellesorientations (priorités stratégiques, valeurs, programmede changement, etc.) fassent rapidement l'effet d'unelangue de bois…L'intranet dispose d'un atout majeur pour palier cerisque : pouvoir mettre à disposition des utilisateursune grande richesse d'informations, tout en préser-vant la simplicité d'accès au contenu qui intéresserachacun. Grâce à cela, on peut concevoir une« communication orientée action », destinée non seulement à rappeler les priorités, mais à faciliter leurmise en œuvre.En effet, une fois les orientations connues, la prin-cipale préoccupation des managers porte sur le« comment » : Comment relayer le message à noséquipes ? Comment accompagner les change-ments en cours ? Comment mettre en œuvre les nou-velles valeurs et pratiques de management ? L'intranetest un vecteur idéal pour aider à répondre à cesquestions, en mettant à disposition des managerstoute une base de supports utiles pour passer à l'action :informations pratiques ou kits de communication,bien sûr, mais aussi conseils pratiques, documentsde réflexion ou d'approfondissement, témoignages,partages d'expériences, etc. Ainsi, la LafargeLeadership Library ne rappelle pas seulement lespriorités de développement du management : ellepropose des outils pour guider le développementdes compétences et constitue un centre de ressourcesqui aide les managers à trouver des réponses auxobstacles qu'ils rencontrent.

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d'un site régulièrement entretenu, en permanence àjour. On peut ainsi régulièrement capter l'attentiondes managers, à un coût très maîtrisé, sans provoquerde sentiment de saturation.Par exemple, Lafarge diffuse chaque mois par mail àses managers un message portant sur les pratiquesde management. Plus de trois ans après le lance-ment de la Lafarge Leadership Library, ce messageconduit à chaque fois plusieurs centaines de mana-gers à explorer les contenus proposés sur le sujet cou-vert – avec un impact autrement plus profond ques'il s’était agi de simplement rappeler les valeurs demanagement du groupe.

Ainsi, en faisant porter la communication non pas surune répétition des messages, mais sur la diffusiond'idées utiles, on se donne l'opportunité de rappeleren permanence les enjeux auxquels être attentifs.

d'une vidéo, d'une interview d'expert et de trois « pop-up » qui détaillent le credo de l'entreprise en deuxlignes…Il est en effet essentiel de concevoir le site dans uneoptique d'efficacité pour l'utilisateur. Une règle simpleest particulièrement utile : partir du principe quel'on dispose de trente secondes pour capter l'atten-tion du visiteur ; puis de deux minutes pour leconvaincre que le contenu peut lui être réellementutile ; puisque, au-delà, il faut lui permettre d'impri-mer les informations pour les consulter à son aise aumoment propice. Et là aussi, attention au volume d'in-formation : il faut s'efforcer de limiter tout documentà moins d'une dizaine de pages, clairement structu-rées.Un autre impératif découle d'une définition classiquede ce qu'est la qualité en matière de service, àsavoir « l'écart entre le niveau de prestation reçu etles attentes initiales ». En d'autres termes, si vous faiteslibrement appel à un service en sachant à quoi vousattendre, et que ces attentes ne sont pas déçues,vous jugez le service satisfaisant. En matière d'intra-net, cela signifie qu'il faut porter un effort particulierà la qualité et à l'homogénéité des contenus proposés,quitte à proposer moins de contenus qu'il ne seraitpossible. Ainsi, pour fidéliser ses « clients » utilisa-teurs, on a tout intérêt à calibrer leurs attentesautour d'une « offre » claire (supports à l'action, à laréflexion ou bien à la communication? supports courtsou documents d'approfondissement ? aide à la prisede recul ou cadrage méthodologique ? etc.) et às'imposer de respecter les standards de cette offre. Decette façon, les utilisateurs ne seront pas déçus : ense rendant sur le site, ils sauront quelle nature de conte-nu ils y trouveront.

Faire du site un vecteur de promotion des orientationsretenues

Dès lors que la communication véhicule des conte-nus utiles, elle est vécue non plus principalementcomme un vecteur de promotion, mais comme uneressource pour réussir dans sa mission. Ce change-ment de perspective permet de communiquer de façonplus riche et plus fréquente, sans risquer de susciterde cynisme ou de réaction de rejet à ce qui serait perçucomme du matraquage.Pour cela, le plus efficace est de procéder à des enri-chissements réguliers du site, et de les communi-quer par newslet ter électronique. Ainsi , lacommunication porte sur un apport tangible auxmanagers, et non sur une simple diffusion d'infor-mation, un rappel des priorités ou encore uneexhortation à utiliser le site : elle est de ce fait bienacceptée. De plus, elle met en évidence qu'il s'agit

Étienne BaërdPrésident fondateur de Manageris.

Manageris publie des supports synthétiquessur les meilleures pratiques en management

et accompagne les organisations dans lamobilisation et le développement de leurs

managers et cadres dirigeants, en particulierau travers de l'intranet.

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regard critique sur la communication

Les cahiers de la communication interne n° 17 - Septembre 2005

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e présent article est issu d’une discussionavec des étudiants en communication quia eu lieu le surlendemain du référendumdu 29 mai 2005 sur le traité constitution-nel européen. La problématique de départétait la suivante : en quoi la communica-

tion peut-elle expliquer la large défaite du « oui »(45,13 % des suffrages exprimés contre 54,87 % au« non ») dans une consultation qui a passionné lesFrançais (taux de participation de 69,74 %) ?

Les difficultés objectives

La communication pour le « oui » s’annonçait d’em-blée comme difficile. Les obstacles objectifs, de différentes natures, ne manquaient pas. Ont-ils étésuffisamment analysés ou en tout cas pris en comp-te avant la décision de recourir à un référendumdont le résultat, de leur fait et malgré les illusions pro-voquées par les premiers sondages, ne pouvait êtreque très aléatoire ?

• la nature du scrutin. Le référendum attise le goûtbien connu des Français pour la division en deuxcamps. Elle explique sans doute pour une part la « passion » qui a entouré cette consultation sur unsujet dont on sentait qu’il était important…• l’objet du scrutin. Le texte était disparate, d’une gran-de complexité, pratiquement impossible à lire (ne serait-ce qu’en raison de la multiplication des renvois). Comme

par ailleurs il n’exposait pas un programme d’actionmais traçait un cadre institutionnel, ses effets étaientforcément sujets à interprétation. Ce qui a permis auxuns et aux autres d’affirmer tout et son contraire surles conséquences qu’il entraînerait.• les facilités du « non ». Les adversaires du traitéont eu beau jeu d’enfermer le débat dans l’alternativemodèle « libéral » / modèle « social », bien qu’ellen’ait été ni posée ni même évoquée dans le documentproposé au vote. Cela a évidemment radicalisé le débatet a encouragé le rejet du texte…• le passif de l’Europe. La construction européennes’était faite jusqu’ici soit sans consulter les citoyens (lesextensions successives depuis l’entrée du Royaume-Uni) soit dans une certaine ambiguïté (l’introductionde l’euro). C’est en tout cas un sentiment largementpartagé. De plus l’Europe n’a pas de projet politiquequi puisse la faire « exister » de manière positive auxyeux des peuples. Elle est restée pour l’essentiel unezone de libre-échange, un « marché commun ». Il n’estdonc pas étonnant qu’elle passe pour être la causede tous les maux : le chômage, les délocalisations, lamondialisation, sans oublier l’explosion de la régle-mentation dans laquelle chacun voit une limitation desa liberté. Cela d’autant plus facilement que les res-ponsables de tous bords ont pris l’habitude de se déchar-ger sur elle des mesures impopulaires qu’ils prennent,les politiques (qui évoquent volontiers les « contraintesextérieures » et les « diktats » de Bruxelles) commeles patrons (qui lui imputent la compétitivité toujoursinsuffisante selon eux des entreprises malgré les efforts

Référendum 2005 :

Voici un sujet assez inhabituel dans Les Cahiers. Mais que nos lecteurs se rassurent :il ne s’agit pas de « faire de la politique »! L’objectif de ce court papier est seulementde proposer une réflexion sur la pratique de la communication à partir d’un faitexemplaire dont tout le monde a pu être témoin. L’expérience montre que les situationsextérieures au monde de l’entreprise, quelles qu’elles soient, permettent un reculpropice à l’exercice du bon sens ; elles favorisent des analyses libres de tout modèlepréétabli. Parmi elles, les événements politiques, pris à chaud, offrent un intérêt toutparticulier, parce qu’ils sont par nature des moments forts de communication et qu’ilsconstituent une référence commune présente dans tous les esprits.

Pierre Labasse

L

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• l’incapacité de susciter des émotions autres que négatives. Deux ressorts ont été utilisés : la peur, maisil arrive qu’elle favorise le passage à l’acte au lieu dele conjurer, et la fierté nationale (« qu’est-ce que lesautres vont penser de nous? »), mais elle peut pousserau rejet des autres (« on n’en a rien à faire ! »).

Ce qu’il aurait(peut-être !) fallu faire…

• Expliquer, expliquer et expliquer encore ! D’abordl’Europe : pourquoi et comment, dans le monde telqu’il est, elle constitue la seule solution possible auxproblèmes de la France. Ensuite la nature et les enjeuxdu traité constitutionnel qui ne faisait que reprendreen les améliorant plutôt les textes antérieurs. Cela,en trouvant les bons arguments, en s’y attelant suffi-samment à l’avance et en faisant preuve d’un maxi-mum d’objectivité (notamment sur les conséquencesdu vote).• Mettre en avant des personnalités jouissant d’uneforte légitimité sur les questions européennes et n’ayantpas d’intérêts politiques directs dans l’affaire. On necitera évidemment pas de noms, mais il en existait àl’évidence…• Susciter des émotions positives, pour ne pas direde la passion :- en remerciant ceux qui étaient décidés à voter « oui »,en s’adressant à ceux qui étaient tentés de voter « non »avec le souci de leur montrer que l’on comprenait lesraisons de leur choix mais qu’elles étaient peut-être extérieures au traité lui-même ;- en soulignant la valeur et la signification historiqued’un compromis trouvé entre 25 États à l’histoire,à la culture et aux intérêts différents, dont chacuna dû accepter de faire un pas vers les autres ;- en exaltant le travail fait depuis cinquante ans pourconstruire l’Europe, le rôle moteur joué par laFrance dans l’affaire, ce que l’Europe a apporté auxpeuples qui la composent et aux Français en parti-culier sans qu’ils en soient toujours conscients.

Pierre Labasse Président d’honneur de l’Afci

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et les sacrifices consentis par leurs salariés). Pourquoi,dans ces conditions, dire oui au diable ?• le rejet des élites. Le phénomène avait déjà étéconstaté – et abondamment analysé – en 1992 lors duréférendum sur le traité de l'UEM : à la surprise géné-rale, le « oui » ne l’avait emporté que d’extrême justesse(50,81 % des suffrages exprimés contre 49,19 % pourle « non »), alors que les principaux partis politiquesde gauche comme de droite, les syndicats, les milieuxéconomiques, un grand nombre d’intellectuels etd’artistes l’avaient soutenu. La situation a pratique-ment été la même en 2005, la plupart des gens quicomptent ayant pris position pour le « oui ». D’où latentation des « gens de peu » de prendre leur revanchesur ceux qui ont pignon sur rue, de dire en quelquesorte non aux « oui ».• l’impopularité du gouvernement. Elle a sans doutepoussé de nombreux électeurs à un vote « sanction »contre le pouvoir, sans lien avec l’objet de la consul-tation… La tentation était grande de répondre non pasà la question posée mais à celui qui la posait.

Les erreurs dans la communication pour le « oui »

Si l’on applique de manière certes un peu sommairela grille de la rhétorique aristotélicienne (logos, ethos,pathos), qui constitue toujours un bon instrumentd’analyse, trois types d’erreurs apparaissent :

• le déficit d’explication, auquel on a sans doute tenté de remédier mais trop tard. C’est un mal chronique, typiquement français, que l’on observelors de chaque réforme importante. Il provient desprofondeurs de notre culture nationale. Depuis troissiècles au moins, l'histoire politique de la Francemontre, à travers de multiples exemples, que lesdirigeants, lorsqu’ils ne peuvent exercer l'autorité parla contrainte, sont naturellement enclins à recouriraux artifices et aux boniments plutôt qu’à l’explica-tion. Les professionnels de la communication, fortsde leur panoplie, les poussent trop souvent dans cettevoie. Quand on considère en plus la complexité del’Europe et de ses problèmes institutionnels, oncomprend facilement combien la tentation d’emprunterles chemins habituels a pu être forte…• le manque de crédibilité des champions du « oui ».On a surtout vu et entendu des politiques soupçon-nés de toujours mentir, d’être animés par des arrière-pensées partisanes. Ils se sont adjoint quelques stars,en service commandé, dont les compétences sur laquestion n’étaient pas forcément évidentes. En outredes erreurs techniques ont été commises, comme ledébat télévisé, aussi fastidieux qu’artificiel, entre lePrésident de la République et des jeunes visiblementpeu concernés par le sujet.

>

Ces vues, rapides et passablement schématiques, prêtent bien sûr à discussion. Certains de nos lecteurs peuvent en avoir d’autres. Qu’ils acceptentde nous en faire part sur le site web de l’Afci en écrivant à [email protected] pourrait être l’occasion d’engager un débat intéressant sur la communication.

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Les deux auteurs, cadres degrands groupes industriels,connaissent bien l’entreprise et le management. Ilsdévoilent les coulisses dupouvoir en entreprise sur unton volontairement provocantet attaquent les clichés officielsqui veulent faire croire quel’entreprise est un lieud’épanouissement personnel et collectif…

Ce « vrai-faux » manuel d’apprentissagepropose dix leçons accompagnées d’exercicespratiques :1. Tisser sa toile2. Cloner son chef3. Eliminer les concurrents4. Prendre les attributs du chef5. Maîtriser son temps et celui des autres6. Organiser sa cour7. Déléguer pour mieux régner8. Ecouter pour mieux manipuler9. Prendre la parole pour prendre le pouvoir10. Comment utiliser son chef pour devenir

super chef.

Au-delà du caractère cynique et amusant del’ouvrage, c’est un livre que toutcommunicant devrait lire. Il met à nu lesdiscours et incantations théoriques que biensouvent nous relayons dans nos organisationssans trop nous poser de questions. Nous reconnaîtrons « la duperie dumanagement moderne », parfois nous

pourrons même nous y reconnaître un peu…Enfin, en lisant ce livre, je me suis demandési je ne connaissais pas Nathalie Lenoir et JeanCanourel… Je crois d’ailleurs que les auteursse cachent derrière des pseudos et sont bienconnus de l’Afci.

Laurent Churstel

Comment devenir chef(et le rester) en 10 leçonsGuide du cynisme en entrepriseNathalie Lenoir, Jean CanourelBourin, 2005, 126 pages

L’entreprise durableest une entrepriseresponsable etengagée.Responsable, c’est-à-dire capablede répondre de ses actes auprès de tous ceux qui la font exister(fournisseurs,actionnaires, salariés,

clients…). Engagée, car l’entreprise est uneforce de changement puissante dans lemonde moderne. Aujourd’hui plus quejamais, pour son bon fonctionnement,l’entreprise doit prendre en compte toutes lesparties prenantes de son entité. Henri Fordécrivait déjà en 1920 : « L'entreprise doit fairedes profits sinon elle mourra. Mais si l'on tente defaire fonctionner une entreprise uniquement sur leprofit, alors elle mourra aussi car elle n'aura plusde raison d'être». Partant de cette conviction et des enjeux pour l’entreprise d’être durablel’auteur, Philippe Détrie, président d’Inergie,examine de façon concrète la manière depiloter les efforts dans cette direction. Aprèsnous avoir rappelé dans les cent premièrespages le concept et les enjeux de l’entrepriseengagée, l’auteur promeut une entreprise quis’engagerait à satisfaire conjointement quatreattentes : l’utilité à la société, la satisfaction de

Lu pour vous

>

L’entreprise durablePhilippe DétrieDunod, 2005, 288 pages

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ses clients et usagers, la performance pour sespropriétaires et l’accomplissement de sessalariés/agents dans leur travail. Ce référentielest présenté à la fois comme un instrumentd’analyse, d’aide à la décision, de positionnementet de communication interne et externe.

À travers cette démarche, il ne s'agit pas pourles entreprises de se lancer dans une nouvelleapproche de management ou d'analysefinancière, mais bien de prendre en comptede nouveaux critères (écologiques et sociaux)pour une stratégie de développement à longterme. Le souhait est de proposer auxmanagers de (ré)concilier les attentes dechaque partie prenante et de leur fournirdes pistes d’action concrètes et originales surla pérennité de leur entreprise.

L’approche de l’auteur adopte un parti pris :la mesure uniquement des résultats. Par lesbilans de onze entreprises pionnières dans cedomaine, ce livre intègre concrètementl’objectif du développement durable sanscéder à la facilité de l’utopie.

Lydie Bertrand

Les origines de M. Ghosn, ses racines plutôt,se situent au Liban chez les chrétiensmaronites « qui ont toujours vécu dans un mondeouvert, tout en préservant une forte identité ».Comment ne pas lier cette remarque à l'unedes valeurs les plus fortes défendues parl'auteur et appliquées au sein de l'Alliance :« respect des identités, développement dessynergies », idée que l'on retrouve à propos de la mondialisation - « L'avenir est quandmême aux entreprises globalisées qui ont essayéd'adopter les meilleures pratiques et de s'ouvrirau monde tout en préservant leur identité ».Son éducation se déroule au Liban, chez les Jésuites. Là, il y apprend la simplicité duraisonnement, la discipline, l'organisation, lacompétition et le goût pour le travail bien fait,tout un programme mis en œuvre bien plustard, sur le terrain de l'entreprise, aux quatrecoins du monde : France (Carlos Ghosn fut directeur d'usine à 27 ans…), Brésil, États-Unis pour Michelin, France et Japonpour Renault et Nissan.

Sont ici dévoilés une bonne partie desingrédients de l'extraordinaire réussite deCarlos Ghosn chez Nissan. D'abord, uncomportement adéquat éclairé par l'expériencede l'international : « Le Japon allait faire partiede moi, Nissan allait faire partie de moi. Maiss'intégrer ne veut pas dire perdre sa personnalité,son originalité. Je savais que dans tous les cas, je serais différent » (p. 199). Pas de compromis,mais pas de provocation, et toujours de lasimplicité. Ensuite, un allié objectif, legouvernement japonais, soulagé que Renaultoffre une dernière chance à Nissan, mais aussiune relative indifférence des concurrentslocaux qui, visiblement, n'ont pas cru, au départ, au redressement de Nissan par les hommes de Renault. Enfin, une convictionà contre-courant des idées reçues sur laculture japonaise (favoriser la patience, etc) : « L'entreprise était dans une situation tellementdétériorée que c'était surtout en interne quej'allais devoir trouver les solutions (...). Chez Nissan, il fallait recréer de la passion,reconstruire une vision, retrouver un rythme,

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Citoyen du mondeCarlos Ghosn et Philippe RièsGrasset, 2003, 438 pages

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Cet ouvrage n’appartient àaucun genre, il est à la foisautobiographie, étude decas et livre de management.Respectant la chronologiede l'itinéraire atypique deCarlos Ghosn, le livreavance par longuescitations, dont le caractèreoral est à peine retouché.L'ensemble estparticulièrementconvaincant et

intéressant : il dévoile le passé, les originesfamiliales et fait œuvre de transparence.

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Les cahiers de la communication interne n° 17 - Septembre 2005

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donner un élan et un projet. Si je pouvais résumer,je dirais qu'il y avait besoin de flamme,d'intensité, de lumière ».La suite est mieux connue (révélation choc du NRP, application immédiate, redressementspectaculaire) car surmédiatisée - mais fallait-iljouer la transparence ? « La crédibilité repose sur deux piliers. D'abord, la performance. Ensuitela transparence (...) Nous allons parler de nosproblèmes et de nos résultats. S'ils sont bons, nousle dirons mais quand ils ne seront pas bons, nousle dirons aussi (...). Dès le départ, il était évidentqu'il fallait que le capitaine communique sur ce qu'il avait planifié, sur ce qu'il était en train de faire. Certains parlent d'un culte de lapersonnalité, de mégalomanie. Moi (...) quandj'étais chez Michelin, je ne faisais pas la une desjournaux. Ce n'était pas vraiment le style de lamaison. Pour Nissan, je l'ai fait par nécessité ».Expliquer, justifier sans cesse, défendre deschoix stratégiques, c'est aussi la raisond'exister de Citoyen du monde.

D.B.

Avec ce nouveaulivre, DominiqueWolton lance un cri d’alarme. La « com » n’est pas synonyme de communication !Sauver lacommunication,c’est admettre qu’elleest distincte del’information, car

elle concerne la relation, toujours difficile,avec l’autre. L’enjeu est de la faire sortir de

Il faut sauver la communicationDominique WoltonFlammarion, 2005, 224 pages

>

l’emprise technique et économique danslaquelle elle est aujourd’hui pour lui faireretrouver sa dimension humaniste. C’est également critiquer les idéologies quila portent et tous ceux qui la dévalorisent en la réduisant à des logiques de vente, de manipulation ou de paillettes.

À travers ce livre, Dominique Wolton nousamène à réexaminer de façon passionnante lesrapports entre information et communication.Aujourd’hui l’information l’emporte sur lacommunication. Demain, selon lui, la sociétéde communication s’installera en lieu et placede la société d’information. La réalité del’incommunication obligera alors à construirela cohabitation et le dialogue. Il conclut enaffirmant que sauver la communication, c’estfinalement défendre l’idéal démocratique etcomprendre que communiquer et cohabitersont parmi les grands enjeux de paix et deguerre du XXIe siècle…

Ce dernier livre de Dominique Wolton estlimpide. Il montre la fragilité de lacommunication tout simplement parce qu’iln’y a pas de communication sans respect de l’autre, et qu’il n’y a rien de plus difficileque de reconnaître l’autre comme son égal,surtout si on ne le comprend pas.

Nous retrouverons avec joie DominiqueWolton lors d’un dîner-débat Afci, le 12 janvier 2006.

Laurence Hurstel

À noter…Le guide des métiers de la communication2005-2006 est paru aux éditions L’Etudiant.

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Apôtre de l’ergonomie internet ou applicative, JakobNielsen est l’initiateur du concept d'utilisabilité (usa-bility). Comme chaque année, il a distingué les 10 intra-nets qu’il considère comme les réalisations les plusremarquables. Au palmarès six entreprises américaines,une entreprise espagnole, une suédoise, une néerlan-daise et une britannique. À quand une entreprisefrançaise?

1 - Banco Español de Crédito (Banesto - Espagne)2 - Cisco Systems (U.S.A)3 - Electrolux (Suède)4 - The Integer Group (U.S.A)5 - NedTrain (Pays-Bas)6 - Orbis Technology (U.K.)7 - Park Place Dealerships (U.S.A)8 - Procter & Gamble (U.S.A)9 - Schematic (U.S.A)10 - Verizon Communications (U.S.A)

Palmarès des meilleurs intranets

La chroniquedu net

Surfant sur la notoriété acquise sur Internet, Googlepropose aux entreprises « Google Search Appliance »,solution de moteur de recherche basée sur le principede l'indexation automatique des contenus. Adapté àla problématique de l'entreprise, ce moteur est proposé en deux versions distinctes. La première permet d'indexer environ 100 000 documents. La

seconde intervient sur un spectre étendu de 100000à 15 millions de documents. Le moteur reconnaît plusde 200 formats de fichiers, HTML, PDF, Word,Excel, etc. Il sait également chercher au sein decontenus structurés dans des bases de données(Oracle, SQL serveur, etc.).

Mettez Google dans votre intranet

Avenir de l’Intranet?

Avenir du Web?Le rapport « The Future of Internet » de l'institut de recherche Pew Internet & American LifeProject lève quelques pans du voile concernant l'évolution du Web. En voici les principalesconclusions qui ne révèlent pas de nouveautés fracassantes :• accroissement de la surveillance exercée par le gouvernement sur les internautes, comme par

les entreprises sur les intranautes ;• développement du Learning et son organisation par centre d'intérêt, en fracture avec le décou-

page actuel par tranche d'âge ;• extension du télétravail et de la formation à distance (atténuation de la séparation entre activité

professionnelle et loisirs).

Dans son ouvrage intitulé « Intranet-Management » (Éditions Economica), Nicolas Humeau soulignela nécessité d’adapter l'intranet aux logiques d'usage. Il annonce le passage de l'intranet à l'intrasphèreavant les dix prochaines années. Il s’agira d’un intranet multi-fonctionnel, en charge des processuscollaboratifs et décisionnels les plus divers. Dans le cadre d'une « webisation» générale de l'entre-prise, des interactions multiples s'effectueront entre les composantes du système et les utilisateurs.

Boule de cristal

Michel Germain (Arctus)

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La seconde édition de l'observatoire de l'intranet dansles collectivités locales a été réalisée du lundi 24 jan-vier 2005 au jeudi 24 février 2005 par CDC Mercure,filiale de la Caisse des Dépôts et Consignations.

D'une année sur l'autre, l'enquête a connu un accrois-sement sensible de la participation et on enregistre191 réponses en 2005 (dont 103 mairies, 38 conseilsgénéraux et 15 conseils régionaux).

Observatoire de l'intranet dans les collectivités locales

L’accord signé en mai 2005 par Microsoft avec Grooveconfirme l’intérêt stratégique de la firme de Richmond pourles solutions collaboratives. Ces dernières constituent eneffet l’un des enjeux majeurs de l’intranet en 2005. GrooveVirtual Office a été inventé par Ray Ozzie… en d’autrestemps l’un des créateurs de Lotus Notes (bis repetita). Sesfonctionnalités élargiront l’offre de Microsoft Office dontla nouvelle version paraîtra à l’automne 2006.De manière synthétique, le panorama diversifié des solu-tions collaboratives comprend trois branches distinctes :

• Les solutions propriétaires avec, à titre d’exemples,l’offre d’IBM (Lotus Notes), de Documentum (e-Room)ou d’Open Text (Livelink), etc.

• Les solutions Open Source comme OpenGroupware,eGroupWare, Lucane, Nuxeo, Bynari Insight Server,MoveWork, Open-Xchange, etc.

• Les solutions en mode ASP comme Mayetic ou Affinitiz.Apparue dès 1978 dans les travaux de Peter et TrudyJonhson-Lenz, la notion de groupware définit « l'ensembledes processus et des procédures d'un groupe de travaildevant atteindre un objectif particulier, ainsi que les logi-ciels conçus pour faciliter ce travail de groupe ». Le conceptde Computer Supported Cooperative Word (CSCW)apparu en 1984, a été francisé en 1994, sous la dénomi-nation de TCAO (Travail Coopératif Assisté par Ordinateur).

Quatre critères permettent de circonscrire les champset les fonctionnalités des outils de collaboration :

• L’identification des tâches et des processus de travail dontles réponses relèvent de l’utilisation des formes les plus

simples (messagerie par exemple) ou les plus sophistiquéesdes TIC (webisation d’applications métiers, etc.), dans unefinalité stratégique d'efficacité individuelle et collective.

• La distinction entre collaboration synchrone et asynchrone.La collaboration s'effectue de manière synchrone quanddes personnes travaillent en même temps sur une applica-tion déterminée (visioconférence, audio-conférence, accèssimultané à un document ou une application de travail).Elle est asynchrone quand une succession d'étapes s’inscritdans un processus organisé (« workflows » de demandesde congé, réservation de salles ou de matériel, demandesde travaux, procédures de notes de frais, etc.).

• La perception de l’approche collaborative qui conjuguetrois dimensions : la couche applicative des outils utiliséspour travailler en commun (groupware et workflow), la for-malisation des processus et des procédures de travail(approche organisationnelle), la définition des principesd’animation et d’évaluation du dispositif d’ensemble(approche managériale).

• La distinction des spécificités des différents outils utilisésdans les mécanismes de collaboration. Dans une combi-natoire appropriée, il peut s’agir d'outils de communica-tion (messagerie, tableau blanc, audio-conférence, messagerieinstantanée…), d'outils de coordination (agenda partagé,annuaire, outils de gestion de projet, application de work-flow…), d'outils de collaboration (espaces de travail parta-gé, visio-conférence, blogs ou wikis), enfin d’outils decapitalisation (gestion de contenu, moteur de recherche,outils d’indexation et de gestion documentaire, etc.).

Intranet et travail collaboratif

• Intracom-Québec (du 2 au 4 novembre 2005), Québec

• Solutions Intranet (16 et 17 novembre 2005), Paris

• Online Information 2005 (du 29 novembre au 1er décembre 2005), Londres

• Intracom-Paris (4 et 5 avril 2006) Paris, en partenariat avec l’Afci.

> Calendrier : événements concernant l’Intranet

Page 43: D La communication interne dans l’entreprise en crise s

Les organisations se complexifient, les changementss'accélèrent, les outils d’information accroissent la rapiditédes échanges, les attentes des salariés évoluent, l’entreprisese trouve confrontée à de nouveaux acteurs… Pourquoi etcomment dans ce contexte la communication des organisationsest-elle interpellée ?

Une certaine idée de la communication Nous croyons que la performance d’une organisation estprofondément liée à la qualité des relations qui s'éta-blissent en son sein avec ses partenaires et ses partiesprenantes. Nous croyons qu'une communication cherchant à favori-s e rdes relations de coopération équilibrées permet aux sala-riés, aux dirigeants et à l'ensemble des acteurs de l'envi-ronnement d'une organisation, de partager durablement desobjectifs communs.

Pour y parvenir, la fonction communication doit écouter le corps social, favoriser la circulation de l’information,développer le débat et l’expression des salariés, conseillerle management sur sa communication et développer ladynamique collective.

C’est ainsi que l’Afci conçoit et veut promouvoir la com-munication au cœur des organisations.

L’Afci au service de ses adhérentsForte de plus de 320 membres, l’Afci, depuis sa fonda-t i o nen 1989, s’efforce de faire évoluer la communicationdans les organisations. Elle contribue à accroître laprise en compte de la communication dans les organisations et à faireprogresser les personnes en charge de la fonction.

Réseau de professionnels, réservoir de compétences et d’ex-périences, espace de réflexion et d’échanges au carre-four des évolutions de la communication des organisations,l’Afci s’est donnée trois missions :Professionnaliser : développer les compétences des pro-fessionnels. Échanger : offrir un espace d'échange de pratiques, de

Afci, la communicationau cœur des organisations

Page 44: D La communication interne dans l’entreprise en crise s

Le référentiel d’activités et de compétences de l’Afci(édition septembre 2005) décrit un métier en pleineévolution.

Il clarifie les missions, activités et compétences du responsable de la communication interne et lui permet de se positionner sur l’ensemble des dimensions de la fonction.

Il ne s’agit pas de proposer un modèle ou d’édicter des normes, les situations réelles sont bien différentesd’une entreprise à l’autre. L’objectif est d’explorer lespossibles et de promouvoir une vision ambitieuse dumétier de la communication interne.

Communiquer au cœur des organisations : un métier

Le référentiel d’activités et de compétences est disponible sur le site de l’Afci www.afci.asso.fr Le

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