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HAÏTI : Soigner un pays meurtri, p. 02 | TRANSPARENCE : Séisme et tsunami, p. 05 HAÏTI : Des progrès, mais une reprise lente, p. 06 | Un peu d’assemblage et le tour est joué, p. 08 | Des chansons d’apaisement et d’hygiène, p. 09 PAPOUASIE-NOUVELLE-GUINÉE : L’aide au cœur du dilemme, p. 10 TÉMOIGNAGE : Starved for Attention, p. 12 | RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO : L’âne accoucheur, p. 13 Un état d’urgence en constante évolution Haïti : MAGAZINE DE MSF CANADA Volume 13 Numéro 2 Été 2010 DEPECHES

Dépêches (Été 2010)

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Dépêches est le bulletin de Médecins Sans Frontières (MSF) Canada.

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HAÏTI : Soigner un pays meurtri, p. 02 | TRANSPARENCE : Séisme et tsunami, p. 05HAÏTI : Des progrès, mais une reprise lente, p. 06 | Un peu d’assemblage et le tour est joué, p. 08

| Des chansons d’apaisement et d’hygiène, p. 09PAPOUASIE-NOUVELLE-GUINÉE : L’aide au cœur du dilemme, p. 10

TÉMOIGNAGE : Starved for Attention, p. 12 | RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO : L’âne accoucheur, p. 13

Un état

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Haïti :

MAGAZINE DE MSF CANADA Volume 13 Numéro 2 Été 2010

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Les heures, les semaines et les mois qui ont suivi la tragédie en Haïti et ses con-séquences dévastatrices ont posé des défi s de taille à la population boulever-sée et au personnel MSF qui tentait de les aider.

Au petit matin du 12 janvier, la ville ressemblait à un vaste champ de ruine avec l’impression que la capitale venait

d’imploser.

Tout n’était que désolation autour des équipes médicales de Médecins Sans Frontières (MSF) : des feux de camp, des cadavres jonchant les rues, la bousculade de la foule et des secours, des blessures graves et la dégradation physique rapide des sinistrés. Les blessés sont arrivés en grand nombre dans les hôpitaux MSF de for-tune installés dans les rues. Les membres de notre personnel se sont démenés pour gérer cet afflux tout en essayant de localiser leurs pro-pres collègues ou leurs proches, dont un grand nombre était resté coincé sous les gravats.

Les survivants ont extrait des patients et d’autres membres du personnel, morts ou blessés, des ruines. Danielle Trépanier, ad-ministratrice logistique canadienne a survécu pendant 24 heures sous les décombres d’une maison MSF avant que des collègues haïtiens ne puissent la secourir. Nos trois hôpitaux ont subi d’importants dégâts. Le centre de trau-matisme de la Trinité s’est effondré sur des pa-tients et du personnel présents à l’intérieur, y compris notre chirurgien le plus expérimenté, Erik Edouard, qui fait partie des sept employés MSF tués dans le séisme.

L’hôpital obstétrique d’urgence, la Maternité Solidarité, dirigé par MSF Canada, a été évacué rapidement alors qu’il était sur le point de s’effondrer. Même pendant un désastre, les bébés continuent de venir au monde, et de nombreux accouchements ont été réalisés au milieu du chaos cette nuit-là.

On estime à environ 300 000 le nombre de per-sonnes à avoir été blessées au cours du séisme. Entre la vie et la mort, elles sont parvenues

dans nos structures avec de multiples fractures ouvertes, des membres écrasés, des visages dé-figurés, des fractures du crâne, des lésions à la moelle épinière et des brûlures mettant leur vie en danger. Cela a requis un triage draconien. La priorité a été donnée à ceux qui pouvaient survivre avec le minimum de soins médicaux. Les équipes se sont d’abord concentrées sur le nettoyage des blessures, le débridement, les pansements et la consolidation des fractures.

Parallèlement, les équipes MSF ont installé rapidement des postes de premiers secours et se sont occupées des centaines de blessés qui avaient besoin de soins. Elles ont mis en place des éclairages de fortune à l’aide de généra-teurs, de voitures et de lampes de poche. Aux quatre coins des rues adjacentes à l’hôpital ef-fondré, le moindre espace libre était occupé par des patients allongés sur le sol.

S’ADAPTER AUX BESOINS

Étant donné que l’ensemble de la population vivait dehors, les blessures non traitées se sont

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vite infectées. En l’espace d’une semaine, les équipes médicales ont constaté des gangrènes, des chocs hémorragiques et des septicémies en plus du syndrome d’écrasement, un type de traumatisme et d’insuffisance rénale courant à la suite d’un tremblement de terre.

Les équipes de logistique se sont rendues dans les hôpitaux MSF détruits pour récupérer des équipements, du matériel et des médicaments. Les stocks de contingence pour parer aux ur-gences ont été rapidement épuisés dès les pre-mières semaines de l’intervention. Des efforts supplémentaires ont été déployés pour assurer l’arrivée directe des fournitures médicales ou non médicales à l’aéroport de Port-au-Prince.

Cependant, le petit aéroport de la capitale haï-tienne avait lui aussi subi des dommages et avait de la difficulté à gérer les arrivées des avions cherchant tous à atterrir. Les priorités du trafic aérien étaient floues et des vols avec à leur bord des fournitures médicales ou des équipes de secouristes ont été détournés vers la Répu-blique dominicaine. En sachant que le délai pour

sauver le maximum de vies est de 10 jours, un seul jour de retard causé par des vols détournés peut avoir des conséquences dramatiques.

En définitive, la plupart du matériel MSF a dû transiter par la République domini-caine où l’organisation avait créé une base d’approvisionnement à Saint Domingue. Mal-gré le long trajet occasionné, cette alternative était la plus stable et la plus fiable pour les pre-miers mois, l’aéroport et le port maritime étant toujours surchargés.

L’afflux d’organisations non gouvernemen-tales médicales ou d’équipes hospitalières ve-nant des États-Unis et du Canada a été consi-dérable. Durant les premiers jours, les équipes MSF n’ont pas eu beaucoup de difficulté à trouver des zones sinistrées ne bénéficiant de l’aide d’aucune autre organisation humani-taire. Mais, alors que de nouvelles organisa-tions ont déployé leurs équipes ou étendu leurs activités, MSF a dû recentrer ses efforts, en s’assurant que ces nouvelles organisations soient informées de ses activités existantes et

en identifiant les possibilités de réorienter des patients vers de nouvelles structures médi-cales.

À la fin de la première semaine, nous avons traité plus de 3 000 blessés dans la capitale haïtienne et pratiqué plus de 400 opérations chirurgicales, dont 10 pour cent étaient des amputations.

DES URGENCES D’UN AUTRE GENRE

MSF fournissait des soins de santé depuis 19 ans en Haïti quand le séisme s’est produit. L’organisation disposait de quatre structures médicales comptant au total 800 membres du personnel. En l’espace de quelques mois, ce nombre est passé à 3 400 personnes travail-lant dans 26 hôpitaux, cliniques, structures de soins postopératoires et de rééducation pour répondre à cette intervention d’urgence d’ampleur considérable. Trois mois après le séisme, MSF disposait de 16 salles d’opération et de plus de 1 200 lits d’hôpital dans 19 sites médicaux. L’organisation a fourni des soins

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médicaux à plus de 92 000 patients et prati-qué près de 5 000 opérations chirurgicales.

Même si ces chiffres paraissent énormes, il faut garder à l’esprit que l’urgence n’a pas pour autant été endiguée. De nombreuses organisations hu-manitaires ont quitté Haïti seulement quelques semaines après leur arrivée et ont transféré leurs patients vers les structures MSF pour des soins postopératoires et la prise en charge de leurs blessures. Des centaines de milliers de Haïtiens, un grand nombre étant encore blessé, sont toujours livrés à eux-mêmes, sans moyen de subsistance et sans abri. Ils vivent maintenant dans des villes-tentes aux quatre coins du pays.

Dans ces conditions de promiscuité inhu-maines où l’accès à l’eau potable et à l’hygiène est limité – dans le meilleur des cas –, les mala-dies contagieuses se répandent à vive allure. Le rétablissement des patients est lent et difficile, et les complications, telles que les blessures in-fectées, sont fréquentes. En raison de tant de traumatismes sévères, de traumatismes médul-laires et de membres amputés, les besoins en réadaptation médicale à long terme resteront importants pour les années à venir.

Les urgences médicales quotidiennes viennent s’ajouter au fardeau des soins postopératoires dans toutes les villes de la taille de Port-au-

Prince, Carrefour et Léogâne. Restera-t-il des moyens de gérer l’afflux quotidien de blessés liés à des accidents de voiture et de moto, de gens qui se sont blessés en essayant de récu-pérer leurs biens dans les immeubles détruits, de personnes brûlées par des feux provoqués par des poêles fonctionnant à la paraffine? On peut se poser la même question pour les traumatismes liés à la violence comme les blessures par balle, les coups de poignard, les viols et bien d’autres urgences telles que les grossesses compliquées.

Une autre source d’inquiétude importante est la saison estivale des ouragans qui apportera son lot de blessures et de déplacements. Rien qu’en 2008, à cause des tempêtes, 793 personnes sont décédées, 593 ont été blessées et 310 ont été portées disparues. Plus de 100 000 foyers ont été endommagés ou détruits, et les inondations ont ravagé 70 % des cultures du pays. Imagi-nez les conséquences que pourraient avoir ces tempêtes sur une population déjà affaiblie et meurtrie et vivant sous des tentes.

Avant la catastrophe, le système de santé d’Haïti était déjà insuffisant pour répondre aux besoins médicaux de base. De même, moins de la moitié de la population haïtienne pouvait s’offrir ces soins de santé. Plus de 70 % des Haïtiens vivaient, disait-on, avec moins de 2 $ par jour. La capitale, Port-au-Prince, comptait 21 structures de santé publique et seulement quatre hôpitaux pour répondre aux besoins de 3,5 millions de personnes. Ces structures facturant les actes médicaux manquaient de personnel qualifié, d’équipement et de ma-tériel. Rien qu’en octobre 2009, MSF a admis 1 470 mères au sein de son hôpital obstétrique d’urgence.

Alors que les bailleurs de fonds internationaux et les Nations Unies ont démarré une planifica-tion pour le long terme, MSF déclare que si le système de soins de santé en Haïti retournait à son état initial avant le séisme, tout cela ne se-rait qu’une mascarade car les Haïtiens méritent bien mieux et cela, depuis très longtemps.

Paul McPhun Directeur des opérations

Kevin CoppockAgent de liaison des affaires humanitaires

Paul McPhun, directeur des opérations et Kevin Coppock, agent de liaison des affaires humani-taires, travaillent à Toronto pour MSF Canada.

La version longue de cet article est parue en premier lieu dans le numéro d’avril 2010 d’Options politiques www.irpp.org

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MSF a cessé d’accepter les dons attitrés au tsunami seulement quelques jours après la catastrophe en 2004. Pourquoi avons-nous traité le séisme en Haïti dif-féremment?

Lors du séisme en Haïti, les Canadiens et les donateurs du monde entier ont répon-du à l’appel des victimes. MSF a connu

un élan de générosité exceptionnel en appui à son travail. Nombreux sont ceux parmi vous qui, en plus de leur contribution mensuelle ou annuelle déjà appréciable, ont fait un don supplémentaire dont certains spécifiquement dédiés à Haïti. Un grand merci. Nous ne te-nons jamais votre générosité pour acquise. En retour, nous vous promettons la plus grande transparence et nous engageons à vous ren-dre des comptes sur l’utilisation des fonds que vous nous offrez.

On m’a souvent demandé au cours des sept derniers mois ce qui différencie cette récente catastrophe et le tsunami de 2004 qui a dévas-té une partie du Sud-Est asiatique et entraîné un mouvement de solidarité extraordinaire et similaire de la part des donateurs. Vous vous souviendrez peut-être qu’à la suite du tsu-nami, MSF a cessé d’accepter des dons après quelques jours, ce que nous n’avons pas fait dans le cas d’Haïti.

Nous sommes conscients que notre décision d’accepter ou non des dons dédiés à un pro-jet peut parfois porter à confusion. Notre rai-sonnement dans le cas d’Haïti a été simple et cohérent : la population avait des besoins aux-quels MSF avait la capacité de répondre.

En tant qu’organisation axée sur le secours médical d’urgence, nous n’acceptons des

dons dédiés à un projet que lorsque nous sommes certains de pouvoir les utiliser dans les deux ou trois ans qui suivent une tragédie en particulier. Le tsunami a causé instantané-ment d’innombrables décès, comme le trem-blement de terre en Haïti, toutefois les besoins en soins médicaux en Asie n’étaient pas aussi importants que les défis liés à la reconstruc-tion et au développement à plus long terme, défis que les gouvernements et d’autres or-ganismes étaient mieux placés pour prendre en charge.

Le séisme en Haïti, en comparaison, était es-sentiellement une catastrophe médicale, de celles où MSF a un rôle crucial à jouer, tout comme ses fidèles donateurs.

À peine quelques heures après le séisme, MSF soignait déjà des patients dans des centres de traitement improvisés au cœur même du secteur dévasté. Si nous avons pu répondre si rapidement à l’urgence, c’est principalement parce que nous fournissions déjà une aide médicale aux Haïtiens, en grande partie grâce à vos dons réguliers. Le financement stable et constant provenant de nos donateurs nous a permis depuis 19 ans de prendre en charge certains problèmes médicaux chroniques qui affligent Haïti, bien avant, donc, que les mé-dias du monde entier y focalisent leur atten-tion en janvier dernier.

À la date où cet article a été rédigé, en mai 2010, cette formidable manifestation de solidarité a généré dans les bureaux MSF du monde entier l’équivalent de plus de 130 millions de dollars canadiens en dons privés pour soutenir son in-tervention médicale d’urgence en Haïti. Parmi cette somme, les Canadiens ont donné ou se sont engagés à donner quelque 13 millions

de dollars et MSF a déclaré au gouvernement canadien tous les dons admissibles au pro-gramme de dons jumelés pour Haïti (10,6 millions CAD). MSF estime que les coûts du programme en Haïti pour 2010 s’élèveront à 98 millions de dollars.

Les fonds dédiés à Haïti que nous avons reçus jusqu’à maintenant serviront à couvrir les be-soins immédiats de la population. Toutefois, étant donné les difficultés qui accablaient déjà les Haïtiens avant le tremblement de terre et les grands défis qui les attendent, le rôle de MSF en Haïti demeurera substantiel pendant encore une longue période. Grâce à votre indéfectible soutien envers notre travail dans plus de 70 pays du monde, MSF fera tout son possible pour assurer aux Haïtiens comme aux autres populations en danger les soins qu’ils requièrent.

Votre contribution est cruciale et nous tenons à vous remercier de votre appui. Le travail de MSF étant le secours médical d’urgence, ses missions sont dictées par les besoins, ce qui requière un niveau de souplesse important. Les donateurs MSF tels que vous continuent d’ailleurs à faire preuve d’une grande sou-plesse : en ayant foi dans les décisions de l’organisation quant au moment et à l’endroit de nos interventions ainsi qu’au fait de recueil-lir des dons dédiés à un projet ou de demander plutôt à ses donateurs de contribuer à un fonds général d’urgence. Vous seuls êtes les garants que nos travailleurs de terrain seront en mesure de répondre aux futures catastrophes.

Rebecca Davies Directrice de la collecte de fonds

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Un médecin MSF, arrivé en renfort à l’hôpital orthopédique mis en place à Carrefour deux semaines après le sé-isme, évalue l’impact de la catastro-phe en fonction du rétablissement de ses patients.

On entend des milliers et des milliers d’histoires sur le séisme et puis sur les sinistrés et le niveau de destruction in-

imaginable. Je peux seulement en raconter quelques-unes. Je n’ai pas vécu la terreur des secousses, de la poussière, de l’écrasement. Je n’étais pas là pour entendre les cris des per-sonnes prises au piège. Je suis arrivée le 1er février, soit plus de deux semaines après le séisme. Voici l’histoire de trois patientes que j’ai rencontrées à l’hôpital orthopédique de Carrefour, l’un des nombreux projets MSF mis en place pour soigner les victimes du tremble-ment de terre.

DEARIE

Dearie, une jeune fille de 19 ans, était là depuis le début, avant même que notre hôpi-tal ne puisse vraiment être appelé un hôpital. Presque toute la surface de sa cuisse droite était recouverte d’un hématome infecté, et les chirurgiens devaient changer ses pansements sous anesthésie tous les cinq jours.

Dearie a tout perdu lors du séisme : son do-micile, son mari et son enfant d’un an. C’était toute la famille qu’elle avait et personne n’est donc jamais venu la voir à l’hôpital. Elle s’est fait des amis parmi ses voisins de tente et leurs proches qui se sont ainsi substitués à sa fa-mille en offrant un soutien social. La maladie et l’immobilisation favorisent l’établissement de liens sociaux très forts, j’imagine. Je pense

aussi que pour les Haïtiens les valeurs com-munautaires sont très importantes.

Elle a appris à marcher avec des béquilles et a été mécontente quand on les lui a reti-rées. « J’en ai besoin, disait-elle, je n’ai pas de force. »

« Tu retrouveras de la force en faisant de l’exercice, lui disait-on, il ne faut pas dépen-dre des béquilles. »

Sa plaie s’est guérie au bout de quelques semaines, mais Dearie était déprimée et appréhendait l’avenir. Je l’ai souvent vue en train d’écrire ou de dessiner. Elle lisait les livres pour enfant que l’équipe de santé mentale faisait circuler. Elle m’a dit un jour qu’elle n’avait nulle part où aller.

Le matin de sa greffe de peau, alors que nous venions de recevoir enfin le dermatome élec-trique et les lames que l’on met à l’intérieur, je l’ai trouvée en train de pleurer. Elle avait peur d’aller mieux, sachant que lorsque cela allait arriver, elle n’aurait plus de raison de rester à l’hôpital et alors qu’allait-il se passer?

LUCY

Le service obstétrique se trouvait dans la rue et nous venions juste de le déplacer sur le ter-rain d’une école. Il y avait beaucoup de confu-sion. La numérotation des lits n’était pas dans l’ordre, les fiches étaient incomplètes et il y avait un peu de flottement quant au nom des patients.

Vous penserez peut-être que ce n’était pas très professionnel mais, il faut dire que, l’équipe était débordée. Nous faisions tout en même

temps : essayer d’organiser le chaos et fournir des soins médicaux.

Lucy, une jeune femme de 31 ans, avait une fracture du tibia et du péroné à la jambe droite (deux os de la partie inférieure de la jambe). Nous avions de nombreux patients souffrant du même type de blessure. Elle avait des bro-ches externes, ce qui ressemble à un petit échafaudage de métal dont la base est vissée dans les os pour stabiliser la zone de fracture. Au Canada, cette même fracture aurait été trai-tée avec des fixations internes : des plaques et des vis raccordant les deux extrémités des os. En revanche en Haïti, dans notre salle d’opération au sol bétonné, avec des bâches en plastique recouvrant les portes et fenêtres pour protéger de la poussière, la contamina-tion potentielle du matériel médical représen-tait un réel risque pour la santé des patients.

J’ai vu Lucy tous les jours pendant mes rondes, mais je n’ai jamais vu aucun membre de sa fa-mille à son chevet. Elle était polie mais sa voix était discrète et monotone et ses yeux étaient toujours baissés. Je lui ai demandé pourquoi elle était toujours triste, elle a répondu douce-ment que c’était juste dans sa nature, les yeux posés sur ses cuisses où reposaient ses mains.

Sa réponse ne m’a pas convaincue et je me de-mandais plutôt si elle n’était pas profondément déprimée. J’ai demandé à l’équipe de santé mentale de la voir. Ils apportaient des jouets, organisaient des activités pour les patients et offraient aussi des séances psychologiques individuelles. Cependant, au bout de six semaines, je n’ai constaté aucune amélioration chez Lucy et, à chaque fois que j’entrais dans sa chambre, je pouvais sentir cette aura de tristesse autour d’elle.

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Par la suite, elle a été transférée au service voisin où nous avions ouvert une structure de rééducation et de physiothérapie. Elle n’avait aucune motivation pour faire ses exercices et je pense que sa dépression en était la cause. Une nuit, elle est tombée de son lit et disait qu’elle sentait sa fracture bouger. Je pensais qu’elle allait bien jusqu’à ce que je la voie marcher. Elle pouvait à peine s’appuyer sur sa jambe droite avec des béquilles. L’état de sa fracture était tellement précaire, qu’à chacun de ses pas, je pouvais la voir bouger.

Cela signifiait qu’il fallait la réopérer et que, huit semaines après le séisme, la guérison de son corps et de son âme allait prendre beau-coup de temps.

CAROL

Carol a été transportée à l’hôpital par sa fa-mille. Elle avait 34 ans. Sa jambe gauche était entièrement recouverte d’un plâtre et elle portait une attelle et des pansements encom-brants sur son avant-bras droit. À son arrivée, il était difficile de diagnostiquer ses blessures. Nous avons donc défait les pansements et fait une radio complète pour voir ce dont elle souffrait.

Sous les pansements du bras, nous avons dia-gnostiqué une plaie en voie de cicatrisation, une amputation du quatrième doigt mais pas de fracture. Pour la jambe gauche, le diagnos-tic était une fracture du fémur qui, après une opération chirurgicale faite ailleurs, avait été immobilisée par une vis interne. L’opération chirurgicale semblait parfaite. Nous avons reti-ré les deux attelles. Carol avait besoin de séan-ces de physiothérapie parce qu’elle n’avait pas bougé pendant au moins un mois et était vraiment maigre. Nous l’avons donc prise en charge pour cette raison.

Tout comme Lucy, elle n’était pas très mo-tivée. Sa main droite était raide et, bien que la plaie soit désormais mineure, le gros bandage de gaze gênait encore plus ses mouvements. Sa main blessée venait interférer avec sa bles-sure à la jambe parce qu’elle ne pouvait pas utiliser ses béquilles de façon adéquate.

Agacée par son manque de progrès, j’ai donc défait ses bandages et refait le pansement moi-même. Malgré ses protestations, nous l’avons fait marcher avec ses béquilles pour voir comment elle se déplaçait. Elle était épui-sée après avoir marché sur une distance de la longueur de la tente.

« Tu es fatiguée parce que tu n’as eu aucune activité physique, l’avons-nous grondée, tu dois faire de l’exercice. »

Deux jours plus tard, elle a eu de la fièvre. Sa cuisse maintenue par la broche interne était brûlante. Sa cuisse qui semblait parfaitement

opérée paraissait désormais infectée. Le chirur-gien a donc procédé au débridement en ur-gence et a mis la patiente sous une forte dose d’antibiotiques afin de prévenir une éven-tuelle ostéomyélite (infection osseuse).

Peu après, j’ai quitté le pays. Quand je suis passée dans chaque tente pour faire un au re-voir précipité et plein d’émotion, elle n’a rien dit, elle m’a juste regardée, d’un air tragique, le visage baigné de larmes.

Beaucoup de patients nous ont demandé si on pouvait leur donner quelque chose, com-me des bâches en plastique ou une tente. Per-sonne n’avait d’habitation décente, pas même notre personnel haïtien (jusqu’à ce qu’on leur donne des tentes et des articles ménagers).

Ce n’est qu’à la mi-mars que nous avons eu des stocks suffisants pour donner aux patients des articles de survie comme des bâches en plastique, des moustiquaires, des kits d’hygiène et un petit peu d’argent pour le transport. Ce n’était pas grand-chose et la saison des pluies avait commencé. Les camps de personnes déplacées ne semblaient pas prêts à disparaître.

Notre hôpital avait à sa charge une centaine de patients quand je suis partie. Nous nous préparions à en accueillir davantage car à

mesure que les autres organisations quittaient le pays, leurs patients avaient besoin de suivi et de soins en cas de complications.

Une autre organisation a commencé à faire des prothèses pour les patients qui avaient perdu une jambe. Il faut des mois à une frac-ture sévère pour qu’elle supporte finalement du poids. Recouvrer force et équilibre et réap-prendre à marcher prennent autant de temps. Certains patients, comme Lucy et Carol ont connu des moments de régression dans leur guérison. Quant aux traumatismes mentaux et aux problèmes sociaux, il n’existe pas de rè-gles pour prévoir le temps que cela prendra.

Ma mission d’urgence de six semaines qui s’est terminée à la mi-mars a duré assez longtemps pour me permettre de voir des progrès clini-ques mais elle a été bien trop courte pour me donner la chance de voir des rétablissements complets. Prenez ces exemples que je viens de vous donner et multipliez-les des milliers de fois et vous aurez une idée des conséquences du séisme.

Wendy Lai Médecin

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Les kits d’intervention d’urgence pré-emballés de MSF : des programmes de vaccination rapides aux hôpitaux gon-fl ables.

Lorsqu’il s’agit de réagir face à une catas-trophe soudaine tel un séisme ou un tsu-nami ou encore d’essayer de contenir une

éclosion virale, sauver des vies dépend de la ra-pidité avec laquelle les secours, l’équipement et le matériel sont rassemblés sur le terrain.

En effet, tout le temps que l’on perd à cher-cher et acheter l’équipement ou les produits pharmaceutiques nécessaires est du temps précieux que l’on aurait pu utiliser pour répon-dre plus vite à l’urgence. C’est pourquoi, MSF s’est consacrée pendant ces trente dernières

années à la création et à l’amélioration de kits d’interventions pré-emballés et prêts à être transportés en quelques heures. Ces kits couvrent tous les besoins d’une intervention typique : que ce soit tout l’équipement néces-saire pour monter un bureau sur des palettes de manutention, l’ensemble de l’équipement stérile requis pour pratiquer 50 chirurgies et tout le matériel médical pour les besoins éven-tuels d’une population de 10 000 personnes pendant trois mois.

MSF rénove normalement les bâtiments pré-existants pour en faire des cliniques, des centres nutritionnels ou des hôpitaux. En revanche, lorsque aucun de ces bâtiments n’existent ou que leur structure n’est plus suffisamment solide, comme c’était le cas en Haïti, on met sur pied des structures temporai-res. L’un des premiers kits, la tente modulaire blanche, est utilisée dans les opérations sur le terrain de MSF depuis maintenant 39 ans.

En réponse au besoin pressant en installations médicales en Haïti, MSF a envoyé l’un de ses petits bijoux logistiques : un hôpital gonflable de 900 m2 comportant 100 lits, des salles de triage et d’urgence ainsi que deux blocs opératoires. L’hôpital en kit de 41 tonnes a immédiatement été envoyé par avion d’un entrepôt logistique de Bordeaux en France. Malheureusement, les autorités qui géraient la piste d’atterrissage au lendemain de la ca-tastrophe ont refusé à six avions-cargos MSF d’atterrir à l’aéroport déjà surchargé car elles donnaient la priorité aux avions militaires. MSF a exprimé son mécontentement contre ces re-tards lorsque son matériel de secours médical a été redirigé vers la République dominicaine et a ensuite dû être transporté par camion. L’hôpital mobile a été gonflé au milieu d’un

terrain de soccer dans le quartier de Delmas à Port-au-Prince, où encore aujourd’hui, il reste utilisé à sa capacité maximale.

Les kits sont principalement utilisés lors des phases d’urgence et de mise en route des in-terventions. Une fois que la situation s’est sta-bilisée et qu’une planification à moyen terme est envisageable, les tentes et les structures gonflables laissent place à des constructions plus permanentes. Mais avec le peu de bâti-ments solides restants en Haïti, MSF se tourne désormais vers une alternative relativement récente : l’hôpital-conteneur.

Ces structures ont vu le jour pour la première fois lorsque MSF est intervenue au Pakistan suite au séisme de 2005. Construits à partir d’un conteneur de six mètres, les modules de ces hôpitaux sont assemblés en Chine, puis acheminés par avion et par camion vers leur destination, où ils sont déballés et trans-formés. Les murs du conteneur se déplient vers l’extérieur et, ce faisant, triple la superficie au sol. On sort ensuite les cloisons intérieures et on met en place les circuits électriques, le sys-tème de ventilation et le réseau de plomberie.

Constituant un centre de maternité de 120 lits, les conteneurs qui seront acheminés vers Port-au-Prince cet été viendront renforcer la capacité d’accueil de l’hôpital gonflable déjà équipé de deux blocs opératoires et d’une salle d’urgence.

Mo Al-Nuaimy Agent des communications

Paul CaneyLogisticien

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Plan de site de la Maternité Delmasen date du 12 juin 2010

PompeCanalisation d’eau chlorée

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Dans les jours et les semaines suivant le tremblement de terre à Haïti, alors que les efforts des secours se tour-

naient vers la reconstruction, un son curieux s’est élevé du béton fissuré et du métal dé-formé : des chants.

Reine Lebel, psychologue MSF, les a en-tendus. En fait, parmi les voix chantant à l’unisson, on pouvait entendre la sienne.

Reine est partie en Haïti en vue d’aider les per-sonnes souffrant de traumatismes physiques et psychologiques. Deux de ses premiers

patients étaient deux jeunes musiciens, Em-manuel et Diosman, qui avaient tous deux perdu leur père et dont des membres de leur famille étaient encore porté disparus. « Nous avons parlé de l’importance de la créativité pour gérer les événements traumatisants, et ils ont tous deux écrit des poèmes pour exprimer leur peine. Ils sont revenus plus tard avec des guitares et des claviers pour mettre leurs poèmes en chanson. »

« C’était tellement émouvant », déclare Reine. « J’ai pleuré avec eux et je me suis dit : “C’est ainsi qu’il faut communiquer avec

les Haïtiens à l’heure actuelle”. La parole n’a qu’une portée limitée. Ce dont ils ont besoin c’est une manière d’exprimer leurs pensées, de se lier les uns aux autres. » Elle explique que la parole est unidirectionnelle alors que la musique est un acte participatif et un élément clé de la culture haïtienne.

« Les Haïtiens aiment chanter, jouer de la musique et danser. Même quand ils parlent c’est avec une note musicale. »

Reine a rapidement mis son idée en pratique en engageant les deux jeunes musiciens et deux autres pour créer un groupe qu’elle a appelé les Troubadours d’espoir. L’équipe a écrit des chansons en collaboration avec le personnel médical, des chansons axées sur des aspects pragmatiques comme l’hygiène de base pour réduire les risques d’épidémie dans les camps et comment garder les la-trines propres.

« Les troubadours sont allés dans les hôpi-taux et sur le terrain en chantant leurs mes-sages », explique Reine. « Très vite, les en-fants se baladaient en chantant les refrains qui restent gravés dans la tête. »

Mais toutes les chansons n’ont pas un contenu médical. Reine Lebel et ses trou-badours parlent avec les gens de ce qu’ils ont traversé, et le groupe improvise alors sur le sujet en donnant littéralement une voix à leurs peurs et à leurs espoirs. « Les gens commencent à chanter, danser et taper des mains, à former de grands rassemblements que de nombreux autres rejoignent. »

« La chanson est le langage naturel qui s’impose pour communiquer dans une situa-tion de crise, explique Reine, d’autant plus que ce que les Haïtiens ressentent va bien au delà des mots. »

« Chanter permet en fait d’atténuer la douleur en libérant des endorphines dans le cerveau, ce qui soulage la douleur à la fois physique et émotionnelle. Chanter a toujours été utilisé comme stratégie d’adaptation, surtout par les Haïtiens », ex-plique Reine. « Cela les aide à se rappeler qui ils étaient avant la tragédie et à retrou-ver leur côté créatif et leur force. Chanter et danser est un moyen d’accéder à la joie. »

Buffy ChilderhoseJournaliste

Pour écouter les chansons des Troubadours d’espoir, rendez-vous sur www.msf.ca et cliquez sur Balados MSF.

Des chansons d’apaisement et

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Les travailleurs humanitaires doivent-ils intervenir suite à des violences so-ciales qui ne sont pas liées à des confl its armés?

Les premières impressions qu’offre le pay-sage de la Papouasie-Nouvelle-Guinée sont idylliques : des îles et des atolls de

sable blanc et d’une eau bleue émeraude au milieu de collines et de montagnes ornées d’épaisses forêts. Ensuite vient le charme de ses habitants : ouverts et généreux et qui non seulement sourient sans cesse mais rient faci-lement aux éclats. C’est ce que j’ai constaté lors du vol cahoteux qui m’a conduit de Port Moresby à Lae où je devais visiter un centre de soutien aux familles dirigé par l’organisation humanitaire Médecins Sans Frontières (MSF).

Là, mon idylle romantique a brutalement volé en éclats. La première patiente que j’ai vu ar-river était une femme qui avait été frappée de trois coups de machette derrière la tête, sa lèvre et sa joue droite se détachant presque du

reste de son visage. Elle disait s’être disputée avec la deuxième épouse de son mari. Une simple querelle, selon elle. Pour une organisa-tion habituée aux graves répercussions de la guerre, cette violence familiale est choquante.

Ce qui est le plus surprenant est que le cas de cette femme n’a rien d’exceptionnel, c’est même plutôt de l’ordre du quotidien dans la ville industrielle de Lae. Durant l’après-midi, dans la salle d’attente, j’ai remarqué deux femmes assises l’une à côté de l’autre. Toutes deux avaient le bras droit bandé et maintenu par une bande de gaze blanche. J’ai trouvé ça presque amusant jusqu’à ce qu’un médecin de MSF m’explique qu’elles souffraient toutes deux d’une fracture de l’avant-bras. Elles avaient en effet voulu protéger leur tête d’un coup de tuyau ou de gourdin ou de n’importe quel objet qui aurait pu servir d’arme.

MSF est à la tête d’un projet similaire à Tari, située dans la belle région isolée des Hautes-Terres où de tels cas de brutalité familiale sont

aussi courants. Cela me dérange et me décon-certe parce que je n’ai jamais rien vu de sem-blable, je n’aurais même jamais pu l’imaginer. Dans les montagnes, la coordonnatrice de projet MSF m’a dit qu’elle avait dernièrement interrompu un homme en train de battre sa femme. La femme battue pleurait bruyam-ment pendant que les enfants de la famille jouaient gaiment à quelques mètres d’elle comme si même des éclats de voix n’avaient rien d’inquiétant.

J’ai aussi entendu dire qu’un membre de notre propre personnel, dans le périmètre de notre hôpital, avait blessé sa propre fille à la tête avec une machette après que celle-ci lui ait désobéi. Quand il a été renvoyé, il n’a pas semblé comprendre pourquoi il était puni, tellement son acte lui paraissait normal! Cette histoire et bien d’autres hantent l’équipe de médecins et le personnel infirmier de ces centres, non seulement à cause de leurs dé-tails effroyables et dérangeants mais aussi parce que rien au sein de nos expériences

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individuelles ou collectives ne peut expliquer cette violence familiale.

Il y a à peine cinq ans, une question faisait débat au sein de MSF : une intervention dans des contextes de violence non liée aux conflits armés est-elle justifiée? La réponse fut en ma-jorité négative. Des voix se sont élevées pour dire que la violence sociale ou familiale était un phénomène distinct de la violence poli-tique due à des conflits armés, et que MSF devait se concentrer seulement sur ce second type de violence. À cette époque, j’étais at-taché au service des affaires humanitaires de MSF, et nous avons commencé à disséquer cette fausse distinction en portant notre at-tention plutôt sur les conséquences médicales directes sur les individus que sur les auteurs ou les causes de la violence. Ça a l’air simple comme bonjour.

Pourtant je dois reconnaître que des ob-stacles très pragmatiques ont empêché MSF de se rendre dans des endroits comme la Papouasie-Nouvelle-Guinée pour aider les victimes de violences sociales. La Papouasie-Nouvelle-Guinée n’est victime d’aucune guerre, et ne connait aucune situation de crise, comme une épidémie, par exemple, qui finirait par disparaître d’elle-même. Au lieu de cela, les gens sont confrontés à une violence quotidienne (qu’ils créent eux-mêmes), à tel point que cette violence fait presque partie de leur culture. La violence est comme la pau-vreté, le changement doit se faire sur le long terme plutôt que sur la base d’une interven-tion d’urgence.

MSF est tiraillée dans ce genre de situation parce que ce n’est jamais le bon moment de partir et aussi parce qu’il n’y a ni soldats ni

milices, mais seulement des maris, des épouses, des frères et des sœurs. La pauvreté environnante rend la situation encore plus complexe pour MSF. Dans l’hôpital du district de Tari, il n’y a pas de médecins désignés par le gouvernement, et l’équipe MSF ne sait plus où donner de la tête dans des services hospitaliers qui regorgent de maladies infectieuses, de problèmes de santé maternelle et infantile et de personnes qui désespèrent de voir leurs proches être soignés. On manque de matériel et de personnel. Mais y a-t-il une autre solution?

Quand je suis arrivé à Tari, j’ai trouvé une équipe épuisée, faisant fi des règles de MSF, à savoir de s’occuper seulement de la chirurgie et de la violence familiale. Cependant, le tra-vail de l’équipe est sans frontières et les choix qu’elle a faits sont les seuls possibles.

Les problèmes liés à la violence familiale exigent des stratégies différentes de la part de MSF. Il est déjà difficile de se battre con-tre les violences faites aux civils pendant un conflit ou d’obtenir l’autorisation des gou-vernements de se rendre auprès des réfugiés. Mais ici, en Papouasie-Nouvelle-Guinée, les étrangers que nous sommes peuvent-ils faire changer une culture? Pouvons-nous nous mêler de la politique de la dot qui confère aux hommes le sentiment que leur épouse leur appartient et qu’ils peuvent les frapper à une fréquence alarmante?

Voici un autre exemple de la complexité de la situation : dans de nombreux pays, nous fournissons un rapport médical aux victimes de violence sexuelle afin de servir de preuve. C’est souvent la seule façon pour la personne qui survit à un viol d’être reconnue comme

victime et de recevoir des indemnités pour ses blessures. En Papouasie-Nouvelle-Guinée, ces rapports sont utilisés comme déposition au sein d’un système de compensation tradition-nel qui est lui-même la cause d’autant de vio-lence. La famille élargie de la victime, appelée « wontok », demande des dédommagements pour le préjudice subi par un de ses membres, ce qui peut engendrer rapidement d’autres affrontements violents. Pire encore, dans au moins un cas, nous craignons que notre rap-port ait servi à justifier le passage à tabac d’un coupable qui a été réduit à un état végétatif.

Les projets de Lae et Tari, de par leur contenu et leurs défis, sont révolutionnaires pour une organisation humanitaire telle que MSF. C’est emballant de voir MSF se dépasser. Nous fournissons aux victimes de violence des traitements vitaux et un soutien psycho-social qui n’existent nulle part ailleurs. En effet, il existe beaucoup de programmes d’éducation et de prévention dédiés aux questions de violence sexuelle, mais peu de choses sont faites pour les victimes. Nous espérons mettre à profit notre expérience acquise à Lae et Tari pour faire changer les choses, pour inciter la création de centres fa-miliaux semblables dans d’autres hôpitaux, et peut-être même pour dénoncer davantage cette violence phénoménale.

Marc Dubois Directeur général, MSF Grande-Bretagne

Cet article a été initialement publié dans le journal Guardian Weekly.

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La malnutrition tue entre 3,5 et 5 millions d’enfants chaque année. L’Organisation mondiale de la Santé

estime à 178 millions le nombre d’enfants souffrant de cette maladie, qui nuit à leur développement mental et physique et peut les empêcher de contribuer pleine-ment à leur société une fois adultes.

MSF présente Starved for Attention, une campagne multimédia qui, par le biais de documentaires, met en lumière les causes sous-jacentes de la malnutrition sévissant à l’échelle mondiale ainsi que les approches innovantes mises en œuvre pour la combat-tre. Menée en collaboration avec l’agence

de photographies de renommée interna-tionale VII, cette exposition se compose de sept courtes vidéos présentant des images choc et des messages provenant de parties du monde victimes de ce fléau : Djibouti, l’Inde, le Mexique, le Burkina Faso, le Ban-gladesh, la République démocratique du Congo et même les États-Unis.

Les vidéos présentent le travail des pho-tographes de l’agence VII comprenant Marcus Bleasdale, Jessica Dimmock, Ron Haviv, Antonin Kratochvil, Franco Pagetti, Stephanie Sinclair et John Stanmeyer. Vous pouvez regarder ces vidéos en ligne sur www.msf.ca.

Au cours de sa tournée mondiale, l’installation de photos et de vidéos a fait étape à Toronto en juin à l’occasion des sommets du G8 et du G20.

Rendez-vous au www.msf.ca pour signer la pétition appelant les députés fédéraux et les bailleurs de fonds à agir pour en-rayer la malnutrition infantile. Vous pou-vez également contribuer à sensibiliser la population à cet égard en faisant suivre les vidéos et les messages de cette exposition sur Facebook, Twitter ou sur tout autre ré-seau social.

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Esquivant la violence et les orages, la journaliste Sally Armstrong est la pas-sagère d’une sage-femme en RDC.

La chance n’était pas de notre côté. Chantal Bamurange, 32 ans, était en plein travail, prête à accoucher, le col était dilaté mais

sa poche des eaux ne s’était pas rompue et elle saignait. La sage-femme n’arrivait pas à entendre les battements de cœur du bébé. Un orage se préparait dans la vallée avec des nuages tellement noirs que la clairière où la jeep de Médecins Sans Frontières (MSF) s’était arrêtée allait être prise dans la tempête dans quelques minutes. Et en cette mi-journée de décembre en République démocratique du Congo, les soldats d’une demi-douzaine de milices nomades étaient embusqués de l’autre côté des collines. Les mêmes milices qui avaient violé des femmes et mis le feu à leur village, et les avaient forcées à fuir vers des abris de fortune comme celui de Kilolirwe, à mi-chemin entre Goma et Kitchanga.

Les chances d’accoucher en toute sécurité, de donner naissance à un enfant en bonne santé et de repartir rapidement sans ennui étaient faibles. Sigrid Kopp, sage-femme MSF âgée de 35 ans, une professionnelle pragma-tique de Hambourg en Allemagne, devait prendre une décision. Devait-elle transporter cette femme à qui l’accouchement donnait plus de souffrance que de délivrance? Ce qui signifiait un voyage de presque trois heu-res sur des routes aux ornières si profondes qu’on pouvait y laisser la transmission de la jeep. Ou devait-elle rompre la poche des eaux sur place, mettre l’enfant au monde et laisser Chantal aux soins du garde-malade lo-cal et de ses amis?

Les perspectives étaient sombres : si le saignement inexpliqué augmentait, la mère pouvait mourir. Si le rythme cardiaque inau-dible du bébé était plus qu’un problème de positionnement, le bébé risquait de ne pas survivre au travail d’expulsion.

Voilà à quoi ressemblent les voyages avec MSF : prendre des décisions vitales en toute hâte et avoir en horreur les personnes qui (comme cette journaliste par exemple) sug-gèrent d’accomplir des miracles dans les en-droits les plus dangereux de la planète.

Nous avons commencé par ce qu’on appelle une « manœuvre de relais ». Dans le jargon MSF, cela signifie se déplacer d’un endroit à l’autre sans être retardé ou retenu par des bandits ou des soldats répu-tés pour semer le trouble au Congo. Voici le principe : si vous devez aller d’un point A à un point B, plutôt que d’envoyer un véhicule sur toute la distance, vous faites partir les véhicu-les du point A et du point B pour qu’ils se ren-contrent à mi-chemin et transfèrent notam-ment des marchandises, des médicaments, du personnel ou des journalistes en visite qui, comme moi, cherchent désespérément un moyen de transport. Ce n’est pas tout. Une telle manœuvre nécessite un conducteur, bien

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sûr, mais aussi ce qu’on appelle un « âne ». L’âne est le passager désigné qui, toutes les cinq minutes, signale grâce à un émetteur-récepteur la position du véhicule et s’assure qu’elle a bien été notée de façon à ce que de l’aide puisse être envoyée si les passagers ren-contrent des problèmes sur la route. En plus de réaliser des accouchements, de soigner des blessures atroces et d’apporter un sou-tien aux victimes de viol qui se cachent dans la forêt pour fuir leurs agresseurs, l’équipe MSF doit être vigilante quant aux questions de sécurité. MSF est la seule organisation non gouvernementale opérant encore avec un personnel international permanent dans cette région du Congo, un pays ravagé par la violence et l’insécurité. Le travail est périlleux, c’est le moins que l’on puisse dire.

Ce jour-là, Sigrid Kopp s’est bien moqué de son rôle d’âne et s’est joint au voyage car elle

avait entendu dire qu’une femme avait des difficultés à accoucher à Kilolirwe. La suite fut dramatique à souhait et du pur MSF.

Tandis que l’orage éclatait avec fracas, que la tempête tropicale prenait tout son sens avec des vents violents, du tonnerre et des éclairs et que la menace omniprésente des soldats arrivant sur place planait toujours, Sigrid s’affairait à transformer l’arrière de la jeep en une salle d’accouchement. Alors que des torrents de pluie s’abattaient sur les flancs du véhicule, elle a posé une voie intra-veineuse sur la patiente. Cherchant autour d’elle un endroit pour accrocher la poche de perfusion afin qu’elle soit au-dessus de la patiente et s’écoule correctement, elle a repéré une fenêtre coulissante, l’a ouverte et y a calé la poche dans l’espace libre. Une chose de faite.

Ensuite elle a arraché les ceintures de sécu-rité de leur point d’attache, les rendant inu-tilisables, et a placé les embouts dans les mains de la patiente pour qu’elle puisse s’y agripper pendant les contractions. Tout cela en continuant de lui parler, de lui dire des mots rassurants et encourageants avec une voie calme et confiante. Dehors, la pluie bat-tante ne s’interrompait pas. Sigrid a jeté un coup d’œil à l’extérieur. Elle savait qu’on ne pouvait pas rester longtemps, en raison de l’insécurité latente. Ainsi, dès que la pluie s’est calmée, elle a dit au conducteur de se mettre en route pour Kitchanga.

Les trois heures qui ont suivi furent un vrai cauchemar pour Chantal ainsi que pour Sigrid qui surveillait chaque contraction et les symptômes inquiétants de la patiente, perchée sur une boîte de métal dans le peu d’espace qu’il restait à l’arrière de la jeep. « Les femmes ici ont tant d’épreuves à sur-monter », explique-t-elle. « Elles viennent me voir et me racontent que leur mari est mort, que leurs enfants ont été tués et me demandent de les aider. Elles sont des mil-liers dans la brousse à être privées de l’aide dont elles ont besoin. Au bout du compte, ce problème-là, nous pouvons le résoudre. Les soins obstétriques sont un vrai miracle ici. Regardez cette femme, elle a eu 10 grossesses, et seulement cinq enfants ont survécu. »

Quand le véhicule s’est arrêté devant la clini-que et que Chantal a été installée sur un lit de camp, Sigrid perça habilement la poche des eaux et un bébé de 3,1 kg en pleine santé se retrouva dans ses bras en quelques secondes. « C’est le plus beau bébé que j’ai mis au monde dans toute ma carrière », s’exclama-t-elle, manifestement soulagée par le dénouement heureux d’un voyage plutôt périlleux. Puis elle enveloppa l’enfant et passa le nouveau-né à sa maman sou-riante. « Les choses peuvent mal tourner. Mais en général nous savons quoi faire, nous pouvons aider beaucoup de gens. Aujourd’hui c’était le destin. »

Puis elle est partie en direction de son bureau MSF pour remplir des documents admini-stratifs, refaire sa mallette de sage-femme et préparer son départ au petit matin vers un autre village. Elle serait horrifiée si je disais d’elle qu’elle est une héroïne.

Sally Armstrong Journaliste

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AFRIQUE DU SUDCheryl McDermid Vancouver, C.-B. Médecin

BANGLADESHMargie Atkinson Westlock, Alb. InfirmièreSharla Bonneville Unionville, Ont. LogisticiennePatricia Gould Comox, C.-B. InfirmièreAmy Hollings Gabriola Island, C.-B. InfirmièreMarjorie Middleton Calgary, Alb. Infirmière

BURUNDILuella Smith Waterside, N.-B. Médecin

COLOMBIEElaine Sansoucy Montréal, Qc Infirmière

GUINÉEJosé Godbout St-Colomban, Qc Coordonnateur de projetAudrey St-Arnauld St-Colomban, Qc Infirmière

HAÏTI Christine Bonneau Lac Beauport, Qc Spécialiste en santé mentaleMaryse Bonnel Morin-Heights, Qc InfirmièrePatrick Boucher Québec, Qc LogisticienSylvain Charbonneau Ste-Thérèse de Blainville, Qc LogisticienJordi Cisa Sudbury, Ont. ChirurgienNatalie Dickinson Deep River, Ont. Spécialiste en santé mentaleMarc Forget Montréal, Qc MédecinNancy Gabel Kapuskasing, Ont. AnesthésisteAsha Gervan Toronto, Ont. Coordonnatrice de projetGuillaume Giard Montréal, Qc Logisticien Karine Godbout Toronto, Ont. InfirmièreLiz Kavouris Montréal, Qc Chef d’équipe médicaleMichèle-Alexandra Labrecque Montréal, Qc Médecin Laura Madsen Vancouver, C.-B. LogisticienneJoel Melanson Vancouver, C.-B. Spécialiste en eau et assainissementSusan O’Toole Collingwood, Ont. MédecinAnne-Marie Pegg Yellowknife, T. N.-O. MédecinNadia Perreault Mascouche, Qc InfirmièreRachelle Seguin Greenfield Park, Qc Coordonnatrice de projetEmily Shallhorn Montréal, Qc InfirmièreEyal Tapiero Montréal, Qc Administrateur des ressources humainesStephanie Taylor Iqaluit, NU MédecinNadia Tijioti Toronto, Ont. LogisticienneSusan Trotter Edmonton, Alb. InfirmièreFiona Turpie Hamilton, Ont. AnesthésisteMartine Verreault Rivière-du-Loup, Qc Pharmacienne

INDERichard Crysler St. Catharines, Ont. Spécialiste en santé mentaleAnne MacKinnon Fredericton, N.-B. InfirmièreCatherine Oliver Toronto, Ont. Médecin

IRAK Reshma Adatia Vancouver, C.-B. Coordonnatrice de projet Mathew Schraeder Massey, Ont. Coordonnateur de projet

KENYALori Beaulieu Prince George, C.-B. LogisticienneMaguil Gouja Montréal, Qc Coordonnateur des financesLuis Neira Montréal, Qc Coordonnateur médical

MALINina Hodonou Montréal, Qc Médecin

MOZAMBIQUEIsabelle Casavant Montréal, Qc InfirmièreSerge Kaboré Québec, Qc Médecin

MYANMARAnne-Josée Boutin-Trudeau Montréal, Qc Logisticienne

NIGERFabrice Fotso Montréal, Qc Logisticien

NIGERIAAdam Aboshahbo Toronto, Ont. LogisticienFrank Boyce Belleville, Ont. MédecinStephanie Gee Vancouver, C.-B. InfirmièreCaroline Kowal Winnipeg, Man. MédecinManisha Rajora Vancouver, C.-B. Médecin

PAKISTANIvan Gayton Vancouver, C.-B. Coordonnateur de projet

PAPOUASIE-NOUVELLE-GUINÉEJudy Adams Moncton, N.-B. Spécialiste en santé mentaleNicolas Perez Montréal, Qc Logisticien

RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINEColette Badjo Laval, Qc MédecinNicolas Bérubé Montréal, Qc LogisticienRichard Currie Salmon Arm, C.-B. MédecinPascal Désilets Montréal, Qc Logisticien Peter Heikamp Montréal, Qc Coordonnateur de projetStella Carine Kengne Tine Montréal, Qc MédecinJudith Letellier Montréal, Qc LogisticienneThierry Oulhen Montréal, Qc Coordonnateur de projetÉlizabeth Poirier Boucherville, Qc InfirmièreRichard Poitras Noyan, Qc Coordonnateur de projetDaniela Widmer Vancouver, C.-B. Infirmière

RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGOTamiko Andrews Montréal, Qc InfirmièreGrant Assenheimer Fort Sask, Alb. Coordonnateur de projetCharmaine Brett Ottawa, Ont. Coordonnatrice de projetOwen Campbell Montréal, Qc Logisticien Claire Foulon-Abdulahad Montréal, Qc LogisticienneMartha Gartley Toronto, Ont. Spécialiste en eau et assainissementSamantha Kemp Thunder Bay, Ont. Infirmière

Chantelle Leidle Fort Sask, Alb. Spécialiste en eau et assainissementIsabelle Major Trois-Rivières, Qc LogisticienneTricia Newport Vancouver, C.-B. InfirmièreGabriele Pahl Windsor, Ont. Coordonnatrice médicaleTodd Philipps Winnipeg, Man. LogisticienGisèle Poirier Montréal, Qc InfirmièreGrace Tang Toronto, Ont. Chef de missionNicolas Verdy Montréal, Qc Logisticien

SOMALIEJustin Armstrong Haileybury, Ont. Coordonnateur de projet

SOUDANJaroslava Belava Vancouver, C.-B. InfirmièreDuncan Coady Toronto, Ont. Coordonnateur des financesOonagh Curry Toronto, Ont. LogisticienneTyler Foley Fredericton, N.-B. LogisticienSylvain Groulx Montréal, Qc Chef de missionCatee Lalonde Montréal, Qc Coordonnateur de projetSabin Lapointe Montréal, Qc LogisticienLetitia Rose Vancouver, C.-B. InfirmièreTara Seon Toronto, Ont. Coordonnatrice des ressources humaines

SRI LANKAJL Crosbie Toronto, Ont. Coordonnateur de projetNancy Graham Toronto, Ont. InfirmièreSarah Lamb Ottawa, Ont. Logisticienne

TCHADFrancine Belisle Montréal, Qc InfirmièreJean-François Harvey Rivière-du-Loup, Qc Coordonnateur de projetMarie-Michèle Houle Victoriaville, Qc InfirmièreClea Kahn Toronto, Ont. Chef de missionMichèle Lemay Montréal, Qc MédecinAda Yee Calgary, Alb. Coordonnatrice des finances

OUGANDAMiriam Lindsay Irlande, Qc LogisticienneAlia Tayea Oakville, Ont. Agent responsable des affaires humanitairesElaine Wynne Vancouver, C.-B. Médecin

OUZBÉKISTANSusan Adolph Dartmouth, N.-É. InfirmièreCalvin White Salmon Lake, C.-B. Spécialiste en santé mentale

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LES CANADIENNES ET CANADIENS EN MISSION

DÉPÊCHESMédecins Sans Frontières (MSF)720, av. Spadina, bureau 402Toronto (Ontario) M5S 2T9Tél. : (416) 964-0619Téléc. : (416) 963-8707Sans frais : 1 800 982-7903Courriel : [email protected]

www.msf.ca

Rédacteurs : Mo Al-Nuaimy, linda o. nagyDirectrice de la rédaction : Avril BenoîtCoordonnatrice de la traduction : Jennifer OcquidantCollaborateurs : Mo Al-Nuaimy, Sally Armstrong, Paul Caney, Buffy Childerhose, Kevin Coppock, Rebecca Davies, Marc Dubois, Wendy Lai, Paul McPhun

Photo de la couverture : © Julie Rémy

Tirage : 140 000Graphisme : Tenzing CommunicationsImpression : Warren’s Waterless PrintingÉté 2010

ISSN 1484-9372

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SILENCE.

OPÉRATIONS EN COURS.Trouver un endroit sûr pour travailler sur les lieux d’une

catastrophe naturelle ou d’un conflit armé fait partie

des défis que rencontrent les médecins, le personnel

médical et infirmier de MSF. L’organisation intervient là

où son aide est la plus nécessaire et fournit des secours

médicaux d’urgence et des soins de santé. Toutefois,

rien ne saurait être fait sans votre aide. Pour en savoir

plus ou faire un don, composez le 1 800 982-7903

ou rendez-vous sur www.msf.ca.

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Le monde est

notre salle d’urgence.