32
exploration des degrés 7-9 classes ER – appui formation continue Revue de formation et d’échanges pédagogiques Département de la Formation et de la Jeunesse du canton de Vaud Sommaire Classe ER : une autre réponse ? Quelques remarques sur une expérience à Yverdon 2 Se rencontrer en se racontant des histoires… d’objets 6 Différenciation pédagogique au CYP2 10 Audit sur l’appui. Où en est-on aujourd’hui ? 13 Bilan provisoire de l'exploration des degrés 7 à 9 14 Projet EVAMAR: évaluer la nouvelle maturité 22 Analyse de pratiques : la parole aux acteurs 24 Formation continue : bilan encourageant des ateliers thématiques 26 Formation continue en HEP 29 Annonce – Publications 32 Solution miracle pour rendre les élèves plus autonomes, favoriser leur maîtrise de l’écriture et de la lecture ou encore leur permettre de faire face aux exigences de la société de demain, l’intégration des nouvelles technologies de l’information et de la communication (TIC) dans l’ensei- gnement est le lieu de toutes les espé- rances. Nombreux sont les pays qui ont investi des sommes considérables pour relever ces défis et gagner ce que Lionel Jospin a appelé «la bataille de l’intelligence». En Suisse, bien que l’instruction soit du ressort des can- tons, la Loi fédérale sur l’encourage- ment de l’utilisation des TIC dans les écoles, votée par les Chambres en décembre 2001, octroie une enve- loppe de 100 mio de francs sur 5 ans, et met l’accent sur la formation du corps enseignant. Toutefois la mise en œuvre de telles politiques se heurte trop souvent à «l’obsession technologique», à savoir une focalisation excessive sur l’équi- pement informatique plus que sur l’usage que l’on peut en faire et les bénéfices à en tirer. Il importe désor- mais de s’interroger sur l’impact des TIC sur le système scolaire. Au-delà de la simple digitalisation des proces- sus et des outils, quels apports peut- on attendre sur le plan pédagogique ? Quelles incidences ces nouvelles tech- nologies auront-elles sur l’évolution des modes d’enseignement ? En quoi pourraient-elles constituer un support privilégié de communication entre les différents acteurs de l’école ? Comment contribuer à réduire les inégalités de type social, mais aussi régional, dans la mesure où certaines écoles disposent d’un équipement de pointe alors que d’autres ne bénéficient d’aucune infrastructure informatique ? C’est pour répondre à ces questions que j’ai mis sur pied un Comité de pilotage chargé de définir un concept pédagogique précis d’intégration des TIC dans les écoles vaudoises ; il s’agit d’identifier clairement les besoins en équipement des classes, les ressources pédagogiques nécessaires et les exigences de formation des enseignantEs qui en découlent. Loin des tentations pharaoniques en matière d’équipement, c’est d’un véri- table projet reposant sur une vision d’ensemble de ce que peuvent appor- ter les nouvelles technologies dans l’école et la société de demain dont notre canton a besoin. En tant que Cheffe du DFJ, j’ai à cœur d’offrir à tous les élèves de l’école vaudoise un enseignement susceptible d’éveiller leur curiosité, de développer leur ima- gination, d’enrichir leur culture géné- rale – et qui leur permette de faire le meilleur usage de ce magnifique outil afin de participer activement et de s’intégrer pleinement dans la société de l’information du XXI e siècle. Gagner «la bataille de l’intelligence» sans tomber dans le piège de «l’obsession technologique» 1 Anne-Catherine Lyon, Cheffe du DFJ

Département de la Formation et de la Jeunesse du canton de ... · En Suisse, bien que l’instruction soit du ressort des can-tons, la Loi fédérale sur l’encourage-ment de l’utilisation

  • Upload
    others

  • View
    3

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

: « exploration des degrés 7-9

: « classes ER – appui

: « formation continue

R e v ue d e f o r m a t i o n e t d ’ é c ha ng e s pé d ag o g i q u e sDépartement de la Formation et de la Jeunesse du canton de Va u d

Sommaire

Classe ER : une autre réponse ?Quelques remarques sur une expérience à Yverdon 2

Se rencontrer en se racontant des histoires… d’objets 6

Différenciation pédagogiqueau CYP2 10

Audit sur l’appui. Où en est-on aujourd’hui ? 13

Bilan provisoire de l'exploration des degrés 7 à 9 14

Projet EVAMAR: évaluer la nouvelle maturité 22

Analyse de pratiques : la parole aux acteurs 24

Formation continue :bilan encourageant des ateliers thématiques 26

Formation continueen HEP 29

Annonce – Publications 32

Solution miracle pour rendre lesélèves plus autonomes, favoriser leurmaîtrise de l’écriture et de la lectureou encore leur permettre de faire faceaux exigences de la société dedemain, l’intégration des nouvellestechnologies de l’information et de lacommunication (TIC) dans l’ensei-gnement est le lieu de toutes les espé-rances. Nombreux sont les pays quiont investi des sommes considérablespour relever ces défis et gagner ce queLionel Jospin a appelé «la bataille del’intelligence». En Suisse, bien quel’instruction soit du ressort des can-tons, la Loi fédérale sur l’encourage-ment de l’utilisation des TIC dans lesécoles, votée par les Chambres endécembre 2001, octroie une enve-loppe de 100 mio de francs sur 5 ans,et met l’accent sur la formation ducorps enseignant.

Toutefois la mise en œuvre de tellespolitiques se heurte trop souvent à«l’obsession technologique», à savoirune focalisation excessive sur l’équi-pement informatique plus que surl’usage que l’on peut en faire et lesbénéfices à en tirer. Il importe désor-mais de s’interroger sur l’impact desTIC sur le système scolaire. Au-delàde la simple digitalisation des proces-sus et des outils, quels apports peut-on attendre sur le plan pédagogique ?Quelles incidences ces nouvelles tech-nologies auront-elles sur l’évolutiondes modes d’enseignement ? En quoi

pourraient-elles constituer un supportprivilégié de communication entre lesdifférents acteurs de l’école ?Comment contribuer à réduire lesinégalités de type social, mais aussirégional, dans la mesure où certainesécoles disposent d’un équipement depointe alors que d’autres ne bénéficientd’aucune infrastructure informatique ?

C’est pour répondre à ces questionsque j’ai mis sur pied un Comité depilotage chargé de définir un conceptpédagogique précis d’intégration desTIC dans les écoles vaudoises ; ils’agit d’identifier clairement lesbesoins en équipement des classes, lesressources pédagogiques nécessaireset les exigences de formation desenseignantEs qui en découlent. Loindes tentations pharaoniques enmatière d’équipement, c’est d’un véri-table projet reposant sur une visiond’ensemble de ce que peuvent appor-ter les nouvelles technologies dansl’école et la société de demain dontnotre canton a besoin. En tant queCheffe du DFJ, j’ai à cœur d’offrir àtous les élèves de l’école vaudoise unenseignement susceptible d’éveillerleur curiosité, de développer leur ima-gination, d’enrichir leur culture géné-rale – et qui leur permette de faire lemeilleur usage de ce magnifique outilafin de participer activement et des’intégrer pleinement dans la sociétéde l’information du XXIe siècle.

Gagner «la bataille de l’intelligence»sans tomber dans le piège

de «l’obsession technologique»

1

Anne-Catherine Lyon,Cheffe du DFJ

2

classe ERintégré dans ce que l’on doit bienappeler une classe de 50 élèves, quiplus est multi-âges, puisque les élèvesde 7e à 9e sont regroupés ! Quatremaîtres1 sont donc responsablesensemble de cette nouvelle structure.Plus concrètement, le «système» fonc-tionne de la manière suivante : • Les quatre maîtres proposent cha-

cun des thèmes pour ce qu’ils nom-ment les ateliers-expression, dotés dequatre périodes hebdomadaires (àtitre d’exemple ces dernièresannées : lecture suivie, créationd’un roman photo, expositions,reportage, réalisation vidéo, joueravec les mots, comédie musicale(Notre-Dame de Paris), etc.). Ces ate-liers durent 9 semaines (quatre ate-liers par année), et les élèves choi-sissent donc un atelier qui va lesregrouper pour la période de 9semaines, choix effectué sansconnaître le nom du maître res-ponsable.

• Les élèves ainsi regroupés selonleur atelier d’expression suiventensemble l’essentiel de l’enseigne-ment hebdomadaire (math, fran-çais structuration, connaissance dumonde actuel), avec le maître res-ponsable de l’atelier d’expression.

• Pour quelques périodes, d’autresgroupes sont constitués. C’est le casnotamment des options-découverte,dotées de 2 périodes hebdoma-daires, qui regroupent autrementles élèves par période de 9 semaineségalement, et où sont abordés desthèmes aussi variés que l’Egypteancienne, le dessin technique, laconstruction d’une montgolfière,ou encore une introduction à l’an-glais, proposés en fonction desgoûts particuliers des maîtres. Maisles élèves aussi peuvent proposerdes thèmes, qui seront pris encompte en fonction des compé-tences des maîtres : il n’est surpre-nant qu’en apparence que lesélèves aient proposé l’année der-

La DGEO, les enseignanteset les enseignants, tous lespartenaires concernés par lapédagogie compensatoireréfléchissent à la meilleuremanière d’aider les élèves endifficultés momentanéespour qu’ils puissent se ren-forcer avant de retrouver lecours normal de la scolarité.Cette réflexion renouvelée estsuscitée notamment par l’in-satisfaction des praticiensface au cadre institutionnelactuellement en place. Deux points : « ouvrez lesguillemets s’est largementfait l’écho de ces débatsdans ses derniers numéros.

Burofco

On y retrouve quelquesconstantes de la réflexion

sur les classes ER : risque de ghetto,difficulté du retour en classe «nor-male», caractère peu stimulant de laclasse réduite, rôle trop lourd, dansune petite classe, d’élèves au compor-tement très perturbé, etc. Ces constatssont établis par des enseignants parti-culièrement sensibles aux difficultésdes enfants, engagés souvent depuislongtemps dans la pédagogie com-pensatoire. Les réponses envisagéessont diverses, mais vont toutes dansla direction d’une prise en chargeplus souple, souvent dans le cadremême de la classe normale, par unenseignant supplémentaire, ou pardes regroupements ponctuels d’élèvesen difficultés (quelques heures hebdo-madaires). L’expérience que nousrelatons ici, commencée en 1998, estpartie d’une même insatisfaction queles maîtres concernés expriment demanière moins diplomatique et plusdirecte : on n’en pouvait plus, on n’avaitplus aucun plaisir à venir à l’école, on afailli tout plaquer, on a même pensé seretirer dans une ferme pour finir notrecarrière dans un projet personnel… Cesmaîtres, proches de la retraite …et duretrait, profitant des ouverturesd’EVM, ont trouvé pourtant l’énergiede préparer et de réaliser un projetsurprenant qui apporte un tout autreéclairage. Il nous a semblé intéres-sant de lui donner un écho plus large,tant il est vrai qu’il n’y a aucune rai-son pour que le soussigné et quelquesétudiants privilégiés de la HEP enaient seuls connaissance !

Structures de base : un effectifréduit de 50 élèves !A première vue, tout est surprenant,pour ne pas dire paradoxal, danscette expérience yverdonnoise : l’élèvede R, qui a besoin d’une relation forteau maître dans le cadre d’un petitgroupe, se retrouve ici avec quatremaîtres principaux par année, et

3

classe ERla conjugaison, un autre des exercicespour développer le vocabulaire, etc.Là encore, travail en équipe, «ratio-nalisation», et surtout efficacité d’unapprentissage technique fondé surune réalité qui est devenue bien com-mun des élèves !

Pour les mathématiques, les objectifsfondamentaux sont bien sûr lesmêmes que dans les classes «nor-males», et ils sont traités par périodede 9 semaines également, en paral-lèle entre les quatre groupes, étantdonné que ces derniers changentalors de composition. Là encore, fortsde leur expérience, les quatre col-lègues élaborent tout un matériel sipossible fondé également sur lesgrands thèmes abordés dans la classe.

Les atouts pédagogiques de l’hétérogénéité, différenciationPlutôt qu’un long développement,prenons un simple exemple dans ledomaine des mathématiques. Audébut de chaque période de 9 semai-nes, pour un thème particulier (linéa-rité, fraction, géométrie…), un testpréalable pour tout le monde permetde préciser les niveaux de chacun. Lesélèves auront ainsi un programmeindividualisé, acquisition des objectifsminimums pour les «plus faibles»,travail plus pointu pour les autres. Sil’on considère le passé scolaire et devie souvent tourmenté de ces élèves,on comprendra que ces «niveaux» necorrespondent pas forcément à l’an-née scolaire de l’élève. Autrement dit,un élève de 9e aura par exemple lachance d’acquérir, même avec retard,des notions de base essentielles pourson intégration dans le monde profes-sionnel, alors qu’un élève de 7e

nière une option-découverte algèbreet une autre encore dessin tech-nique, à côté d’options plus «socia-les», comme la préparation et laréalisation d’un après-midi sportif.

• Rappelons enfin que le groupe-classe de base change donc quatrefois par année, et rassemble desélèves de la 7e à la 9e année, hété-rogénéité sur laquelle nous revien-drons.

Quelques remarques pédagogiquesQuelques remarques s’imposent(mais il y faudrait à vrai dire unlivre…) sur les acquisitions de basenotamment en français structurationet en mathématique.

Pour ces deux branches, notons toutd’abord que les quatre maîtres,conscients de l’inadaptation desmoyens «normaux», constituentensemble les moyens d’enseignement.C’est évidemment un gros travail,mais que les maîtres de ER font detoute façon! Le fonctionnementd’équipe permet donc une économied’énergie, et les regards croisés sur letravail des collègues stimulent laréflexion.

Dans le domaine du fran-çais, de la lecture en

particulier, les maîtres d’Yverdon (etils ne sont pas les seuls…) ont étéconfrontés depuis longtemps à l’illet-trisme parfois grave de leurs élèves.Ils organisent leur cours de structura-tion à partir de documents travaillésou élaborés dans le cadre deConnaissance du monde actuel. Si nousprenons l’exemple de l’ONU, thèmerécemment traité, tel collègue va pré-parer des documents pour développer

pourra plus rapidement développerdes compétences mieux adaptées àson niveau réel. On notera encoreque ce système permet une entraideparfois très efficace entre les élèves.

Une expérience collective et communautaire Ce qu’il faut bien appeler l’esprit com-munautaire de tout le groupe d’unecinquantaine d’élèves se forme de dif-férentes manières.

Par le fait que les groupes sereconstruisent toutes les 9

semaines (cf. plus haut), chaque élèveest amené à rencontrer presque tousses camarades dans le courant d’uneou de deux années. En outre, c’estl’idée même du projet, les quatremaîtres principaux travaillentensemble, non seulement pour l’en-seignement proprement dit, maiségalement pour la mise en place desrègles de la vie scolaire (absence, pro-blème de discipline…), plus générale-ment pour les règles de la vie toutcourt. Puisqu’il est de mode aujour-d’hui de parler de charte, on peutévoquer ici la longue démarche qui aconduit à en établir une dans l’expé-rience yverdonnoise. Après avoir tra-vaillé le thème de l’ONU enConnaissance du monde actuel, lesmaîtres ont eu l’idée de mettre surpied une Assemblée générale, qui seréunit tous les quinze jours, préparéepar un Conseil de sécurité de huitmembres, les quatre maîtres et quatreélèves élus (on notera que très vite lesélèves élisent les plus compétents, etnon les plus turbulents !). C’est danscette structure, après de longues dis-cussions, que les élèves ont pu voterune charte, qu’ils signent individuel-lement. Une vidéo réalisée durantune Assemblée générale et présentéelors d’un après-midi portes-ouvertessuffit à montrer le sérieux et la qua-lité impressionnants des débats. Maiscette structure est aussi amenée à

… chaque élève est amené à rencontrerpresque tous ses camarades

dans le courant d’une ou de deux années.

4

classe ERprendre des décisions précises sur desprojets qui peuvent intéresser tout legroupe, et qui sont ensuite effective-ment réalisés (joute sportive parexemple). Une remarque encore :dans l’après-midi portes-ouvertes, ona pu voir aussi un montage dia évo-quant les destins de plusieurs élèves;pas de pathos, mais une émotionintense que les adultes présents nepouvaient guère cacher. C’est lemonde entier qui se trouve réunidans cette rue d’Yverdon, et l’on com-prend dès lors que l’idée d’uneAssemblée sur le mode de l’ONU nesoit pas artificielle !

Il faut dire encore que l’esprit com-munautaire n’est pas un but en soi(quoique…), mais bien une des condi-tions essentielles d’un climat propiceaux apprentissages.

Quelques remarques pour conclure• Ce projet trop brièvement présenté

résulte de circonstances hasar-deuses (réunion de maîtres dans lemême établissement…), maisrépond aussi à une sorte de néces-sité intérieure : comme ils le disenteux-mêmes, les maîtres ont ressentile besoin impérieux de construireune structure pour que les élèvessouvent marqués et défavoriséspuissent eux-mêmes entrer dans unprojet qui leur donnera les armespour affronter la réalité profes-sionnelle.

• Le projet a nécessité un gros travailde préparation, sur une année aumoins : conception, discussion avecl’institution, etc. Il exige aussi danssa mise en pratique une très grandemaîtrise du travail en équipe, desconsultations fréquentes, un travaild’élaboration très astreignant. Etpourtant, les maîtres insistent sur lebénéfice considérable pour eux-mêmes d’une telle structure,comme si les résultats obtenus par

les élèves compensaient largementl’investissement consenti !

• Réintégration dans le cursus nor-mal : on comprend aisément queles élèves (et leurs parents !) ne sou-haitent pas forcément réintégrerune classe normale. Mais ces réin-tégrations sont réussies dans la plu-part des cas, et la vraie évaluationde l’expérience est plutôt donnéepar les parcours des élèves au sortirde la scolarité obligatoire. De nom-breux contacts avec des patrons oùles élèves se retrouvent en appren-tissage montrent la réussite globaledu projet ! On pouvait craindre quese constitue un ghetto en marge del’établissement et de la société. Lesmaîtres répondent d’une formuleforte que si ghetto il y a, qu’il soitau moins le ghetto du plaisir donton sortira plus fort, plus autonomeet mieux armé.

• Une approche superficielle de l’ex-périence pourrait faire croire queles élèves sont «dispersés» dans desmultitudes de petites unités (risquede «zapping»). C’est tout lecontraire qui est vrai : par cettestructuration de l’année enpériodes de 9 semaines, les élèvessont amenés à maîtriser les objec-tifs de la période, à se concentrersur des projets forts, réalisablesdans un temps qui a pour eux unsens.

L’ expérience est-elle transpo-sable? représente-t-elle la pana-

cée tant désirée pour toute la pédago-gie compensatoire ? Certainementpas, et la lecture de ces quelqueslignes montre assez les difficultés qu’il faut affronter, les énergies qu’ilfaut dépenser… Mais on retrouve icice qui est peut-être l’honneur del’école : la possibilité de mener desexpériences concrètes qui alimententla réflexion, et qui permettent à desélèves souvent défavorisés de sortir del’école avec une valise où se retrou-

vent les acquisitions de base et uneexpérience de vie pour leur permettrede continuer leur voyage2.

Denis Girardet,Burofco

1 Il s’agit de Messieurs Roger Chanel, ClaudeGaillard, Alexandre Grin et Alain Siegrist.L’entretien à la base de cet article a été réa-lisé en juin de cette année avec les deuxderniers nommés.

2 Les quatre maîtres concernés tiennent àdire ici que leur démarche doit beaucoup àl’expérience connue de l’établissement dePréverenges, en 7e-8e-9e VSO (ancienneDT), qui a mis aussi en place une équipede maîtres, et développé l’idée de l’hétéro-généité des groupes réunissant des élèvesdes trois années.

classe ER

5

PROJET D’ÉTABLISSEMENTPOUR CLASSE DE PÉDAGOGIE COMPENSATOIRE

Structures

1. Principe de base : plus de maître de classe, mais une équipe de maîtres2. Classes hétérogènes (chaque classe est composée d'élèves 7-8-9)3. Répartition des élèves par classe en fonction d'un choix d'atelier (expression) sur une période

déterminée (4 ateliers par année)4. Simultanéité de l’enseignement dans les classes concernées durant la semaine (horaire identique

dans chaque classe)5. Options: organisation interne (les compétences des enseignants de l'équipe permettant d'offrir un

choix varié et possibilité de compter sur des intervenants maîtres spécialistes).

Justifications des objectifs (M : enseignants; E : élèves)

Pour le point 1 :M: – collaboration dans le travail – uniformisation des méthodes, des exigences, des objectifs –

meilleure connaissance des E, meilleure évaluation – partage des responsabilités.E : – intervenants aux mêmes exigences – adaptation à différentes personnalités – développement

de leur autonomie – socialisation (appartenance à différents groupes durant l'année, équipede M).

Pour le point 2 :M: – classe hétérogène: reflet de la société – suivi de l'élève sur 3 ans – ateliers uniques 7-8-9.E : – individualisation de l'enseignement – apprentissage de l’autonomie – collaboration entre les

élèves – imprégnation des matières des années suivantes – possibilité (si absolument néces-saire) de suivre un programme selon ses compétences – stimulation pour les plus jeunes.

Pour le point 4 :M: – simultanéité obligatoire pour permettre le travail en atelier – possibilité de déplacer un E

(en cas de difficulté) dans un autre groupe – uniformisation des exigences, des objectifs, desméthodes de travail – préparation du travail en équipe (enrichissement).

Pour le point 5 :M: – offrir des choix variés en fonction de l'intérêt, des capacités des E – mieux cibler l’offre, le

contenu en fonction de la vie pratique – interdisciplinarité entre les options et les autresbranches – collaboration des maîtres spécialistes en tant qu'intervenants (multimaîtrise dugroupe et non uniquement des maîtres de cours) – placer les options dans l'horaire au momentopportun (par ex. l'après-midi).

E : – développer l’esprit de groupe – travailler à leur rythme – une évaluation adaptée – optionsvalorisantes.

Je donne enfin en annexe un bref document élaboré voilà 5 ans déjà où les maîtres engagés présentaient leur projet.

histoires… d’objets

6

1999-2000L'année suivante, d’autres collèguesont rejoint le projet : Anne-Lise Borter,enseignante spécialisée en formation,Stéphane Gremaud et Vivien Andrey,maîtres en accueil.Cette deuxième année de collabora-tion fut proche, dans le sens où nousavons respecté la parité du nombre(10 pour chaque classe). Ainsi, desamitiés réelles se sont nouées entre lesélèves. Une phrase qui résume toutecette démarche fut prononcée par unjunior: «Avant, j'avais un peu peurquand je croisais Blaise, maintenanton se dit salut!». Toutefois nousn’avons pu éviter quelques réunionsavec tous les élèves de l'accueil,envieux de cette relation!

En 2000-2001Stéphane Gremaud devient maître declasse D et d'autres collègues de lastructure d'accueil décident de sejoindre à un grand projet: monter unspectacle ayant pour thème lesgrands-parents, spectacle donné dansla grande salle aiglonne mise gratui-tement à notre disposition.Ainsi 60 élèves et une dizaine d'ensei-gnants (Hélène Aubert, ChristianMoser, Hervé et Regina DiNocera) selancent dans cette aventure… Anne-Lise Borter en a fait son sujet demémoire de fin d'études (disponible àla HEP, section 4). Et là encore, uncadeau: un élève ayant déménagé enAustralie pendant l'été écrit à toutesles classes concernées pour les fêtes defin d'année.

2001-2002Forte de l'expérience du spectaclemais ne désirant pas la répéter,l'équipe décide d'écrire un livre. Plusde septante élèves participent à ceprojet : deux classes D, trois classesd'accueil, une classe logopédique,quelques élèves VSO. Nous rejoignentdans cette aventure DanielleRobertson et Colette Balet Diabaté,

Accueil

Un petit ouvrage tout blanc,sans mention d’auteur encouverture, mais une liste de94 noms en fin de volume,un titre : Histoire d’objets,ainsi se présente le livre paruen mai de cette année et éla-boré par les élèves et lesenseignants de quelquesclasses d’accueil, d'uneclasse du centre logopédiqued'Aigle et de deux classes D.

L’article qui suit racontecette aventure, de la ren-contre des personnes à larédaction et à l’édition dulivre, et parle surtout de l’en-richissement que tous lesacteurs ont trouvé dans ceprojet.

Histoires d’objets peut êtreobtenu auprès de FrançoisStettler (021 960 28 37)

Historique d'une collaborationIl était une fois…En 1998, Ingrid Laurent, enseignanted'une classe logopédique pour desélèves âgés de 7 à 9 ans, commençaitsa formation d'enseignante spéciali-sée. Claude Roshier, enseignant dansla structure d'accueil à des élèves âgésde 13 à 18 ans, était sa praticienne-formatrice.

L'idée d'une collaboration entreélèves si différents est donc née d'unenécessité institutionnelle… eh oui…quoique… Nous avions déjà évoquéensemble ce sujet, en mettant enavant les avantages d’une rencontreinter-âges :– pour les plus jeunes, être tirés en

avant, profiter du modèle que peutreprésenter un camarade plus âgé,bénéficier d'une sécurité et d'uneintimité provoquée;

– pour les plus âgés, pouvoir oserdans ce contexte des stratégiesgénéralement réservées auxenfants. Ainsi le résumait fort bienun adolescent lors de la présenta-tion de la démarche: «Je vous pose-rai la question et vous ferez commesi vous répondiez aux plus petits.Mais j’écouterai aussi!» Et se retrou-ver dans celui qui peut donner dela sécurité, compétence largementemployée dans leur famille.

1998-1999La première année de cette collabora-tion s'est terminée par une matinéeensoleillée où une centaine d'enfantsont écouté pendant près de troisheures les histoires préparées parleurs camarades.En bilan, nous relevions: «Quel quesoit l'âge des élèves, leur attitude faceà la langue écrite ne diffère pas fon-damentalement, même si elle estexprimée diversement. La peursemble prédominer, et le fait de sesentir petit, trop petit, suit de trèsprès».

textes pris dans la littérature. Lors dela dernière rencontre, les groupes ontdû établir des listes d'objets qu'ils dési-raient traiter dans le livre.Notre volonté d'enseignants était deparler de la migration (mais pas seu-lement d'un pays à l'autre), ce qui aforcément induit le classement de cesobjets rassemblés par thèmes. Cetteliste a été transmise aux élèves quiont alors quitté leur groupe de basepour un choix d'écriture.Ce n'est qu’à ce moment-là que nousnous sommes séparés en quatregroupes. Comme le décrivent si bienles élèves auteurs de la préface,chaque groupe a travaillé différem-ment. J'ai coenseigné avec DanielleRobertson et Sophie Berger dans legroupe ayant choisi l'évocation dupassé-présent-avenir. Il a fallu recréerce nouveau groupe et c'est ainsi qu'unmatin je me suis retrouvée à platventre par terre dans un exerciced'écriture automatique. Gérald,réfractaire à l'école, m'a alorsrejointe:– Tu écris quoi dans ton arbre,Madame?– Je ne sais pas trop, tu sais, j'écris lesmots qui me viennent, qui sortent dema plume.– Je peux écrire le soleil moi aussi? Ilpense quoi le soleil? Je peux le fairepenser comme je veux?

Cette multitude d'instants magiquesnous a encouragées à instituer desmoments «philo» où nous évoquionsnos textes, parlions d'un thème. Cesmoments se sont révélés très riches etj'ai découvert avec émotion la qualitéde réflexion des élèves. Les échangesdébutaient par une question poséepar un élève, elle était renvoyée au

nouvelles enseignantes dans l'établis-sement, à la tête des classes D.

Description de la démarcheEntre adultesChacun de nos projets a nécessitéenviron trente heures de rencontrehors de la présence des élèves. Nous yavons partagé des fous rires mémo-rables et des angoisses fortes ! Cetemps a permis des regards croisés surles élèves et chacun en a bénéficié.Regards croisés de personnes, certes,mais aussi de techniques, «deniveaux». Pour moi, qui enseignedepuis plusieurs années à des adoles-cents, ce fut l’occasion de (ré)ap-prendre des gestes, des stades d'ap-prentissage que j'avais oubliés.Certains de mes collègues les ontdécouverts, alors que notre propresavoir offrait des perspectives nou-velles aux enseignantes travaillantavec les plus jeunes.Cette année, la réflexion a été ampli-fiée par un cours Burofco sur la péda-gogie de coopération; l'applicationpratique étant centrée sur les inter-ventions destinées à 70 élèves…

Avec les enfantsDans un premier temps, nous avonsréuni tous les élèves pour quatre acti-vités dont l'objectif était de faireconnaissance. Des jeux en communet des chants devaient fonder legrand groupe de référence. Puis nous avons beaucoup travaillél'interdépendance positive à traversdes activités très ouvertes, mais oùchacun avait sa place. La participa-tion de tous était indispensable aubon fonctionnement des groupes debase de 5 à 7 membres. Lors de cetteétape, les enseignants ont beaucoupraconté d’histoires d'objets, lu des

histoires… d’objets

7

Pour moi, (…), ce fut l’occasion de (ré)apprendredes gestes, des stades d'apprentissage

que j'avais oubliés.

Exemples de moments«philo»

– J'ai un problème avec lafleur. Elle reçoit de laneige, mais je ne sais pasce qu'elle peut dire… çafait comment quand onne sait pas, quand c'est lapremière fois?– Comment peut-on savoirce que ça fait une premièrefois ?– En se rappelant– Et si on a oublié, on faitcomment ?– En demandant … envivant … On peut revivre une pre-mière fois ?– Si on revient à la fleur, onpourrait faire comment ?– Ah moi je me rappelle lapremière fois que j'ai vu laneige ici en Suisse ! C'étaittout drôle !– Mais est-ce qu'une fleursent la même chose que toi ?Est-ce qu'une fleur peut pen-ser comme nous?Et discussion sur cepoint…

– C'est quoi le temps?– Est-ce que Dieu ou Allahest dans le temps?– Qui a commencé le pre-mier ?– Comment savoir ce quis'est passé avant et est-ceque c'est important pourmoi, pour ma vie mainte-nant ? Toi, tu sais des tasde choses, mais ça te sert àquoi?– Pourquoi Dieu et Allahne se mettent pasensemble pour faire arrê-ter les guerres ?Et discussion sur cepoint…

histoires… d’objets

8

à l'imprimerie lorsque le livre a étésous presse. Moments forts : oui, nousavions réussi!

Une cérémonie où chacun areçu son exemplaire a

clos l'aventure de cette année. Avec laremarque d'un élève: «C'est bien, j'aile nom de tous les gens qui ont écritdans ce livre. Je n'oublierai pas; jevais aller demander à Nelson designer mon livre!»

Histoire d'une rencontre

Il était une fois une plume qui appartenait à un garçon.La plume n'écrivait plus alors on l'a jetée à la poubelle. Elleétait triste d'être dans une poubelle: elle était toute seule, il fai-sait noir et elle ne pouvait pas bouger. Le même jour, un musi-cien qui travaillait dans un cirque se promenait dans le villageet aperçut la plume dans la poubelle. Il la trouva jolie et la pritpour lui, dans sa poche. C'est là que la plume fit la connais-sance d'un crayon qui était depuis longtemps dans la poche dumusicien. Chacun trouva l'autre bizarre. L'homme de retour aucirque et ayant retrouvé ses amis clowns, acrobates, jongleurs,danseurs, dresseurs, dompteurs, rangea la plume et le crayondans une armoire. Juste à côté d'eux, des quilles et des ballesse heurtaient en rigolant. Le crayon expliqua la vie de cirque àla plume et tous deux rirent des pitreries des autres objets. Unjour, peu avant le début d'un spectacle, le musicien sortit d'untiroir une partition et voulut repasser à la plume quelque chosequ'il avait inscrit au crayon. Et le crayon a dit à la plume:«C'est moi qui avais tracé ces notes.» La plume s'appliqua àbien rester dans la ligne tracée par le crayon et ils s'aperçurentqu'ensemble, ils faisaient du bon travail, ils étaient complé-mentaires. En fait, le crayon et la plume étaient tombés amou-reux. Peu après, ils se sont mariés et ont eu plein d'enfants: despetits crayons, des petites plumes et des petits crayons-plumes.

Claude Roshier

groupe. Nous décidions d'en parler etfixions le temps pour ce faire. Lesadultes étaient interpellées au mêmetitre que les camarades. Des explica-tions ont été échangées, des explica-tions sur le sens du monde, de la vie.Ça allait parfois très loin. Le faitd'avoir un groupe très hétérogène(âges, connaissances, intérêts) a lar-gement enrichi les échanges. Les plusgrands reprenaient les plus jeunes quiinterrogeaient, osaient dire leurs pen-sées sur un thème…

Dans le prolongement deces moments, ils ont

écrit à la maison, parfois maladroite-ment, mais toujours avec profondeur.Ils arrivaient avec leurs textes, ils leslisaient devant tout le groupe (20 à25) ou nous demandaient de les lire.Puis nous distribuions le travail : autableau, les textes en cours, ceux qu'ilfallait améliorer à partir de leurpropre brouillon mis au net, les objetsencore non évoqués. En fait, rapide-ment, il s'est créé trois groupes dontles membres étaient fluctuants: lescorrecteurs, les enrichisseurs et ceuxqui écrivaient le premier jet destextes.Les textes ont ainsi passé de mains enmains, de plume en plume. Et àchaque OK de l'équipe correctrice,Danielle, Sophie ou moi nous lesremettions au net à l'ordinateur. Puisil y avait relecture dans le grandgroupe avec corrections notées… Ils ont été remaniés, relus, vérifiésune bonne dizaine de fois.Qui a écrit quoi, ce n'était plus impor-tant. Par contre si un copain ne fai-sait rien, s'amusait, là ça devenaitimportant!

Nous avions fixé une date finale… etdonc nous avons cessé d'écrire à cettedate-là. Un peu tristes et orphelins dece foisonnement d'idées, de rires, decomplicité partagée.Quarante élèves se sont retrouvés

A titre d’illustration, deux textes tirés de Histoires d’objets

histoires… d’objets

9

L'importance de se tenir les coudes

D'un côté, il y a un très joli livre avec de belles images et des histoires intéressantes. De l'autre, ona une paire de ciseaux rouge, assez longue, toute neuve et bien limée, toute contente de ne pascouper du carton pendant les vacances de son maître.Les deux objets sont dans un sac bleu à rayures rouges et blanches. Ce sac se trouve dans uneécole. Le livre et la paire de ciseaux s'y trouvent depuis un mois et demi, depuis que leur maître lesa oubliés avant de partir.Maintenant, ils se disputent, ils n'acceptent pas de vivre dans un même endroit. Le livre a peurque la paire de ciseaux lui fasse mal. La panique a commencé entre ces deux objets et ils se détes-tent l'un et l'autre.La paire de ciseaux dit au livre:– Si tu as peur que je te fasse du mal, va te cacher, moi, je suis fait pour ça.Le livre lui répond:– Mais je ne veux pas me cacher, je veux rester ici et je veux que tout le monde voie comme je suisbeau. Mais si quelqu'un de nous doit se cacher, c'est toi parce que tu es moche et que tu medéranges toujours.La paire de ciseaux ajoute:- Oh ! mais tu es bête. Quand je coupe, je ne fais que mon travail.

Le livre ne parle plus à la paire de ciseaux, il en a très peur. Il n'est pas un livre ordinaire. Il estcapable de faire sortir des objets et des personnes de ses images. Ces objets et ces personnesdeviennent, dès leur sortie du livre, vivants. Mais pour que cette magie se produise, il faut que lelivre soit ouvert. Mais comment ne pas craindre les coups de ciseaux sur les images ? Le livre restedonc fermé.La paire de ciseaux ne sait rien de tout cela. Elle est simplement jalouse du livre si beau alorsqu'elle se trouve moche.La bagarre entre ces deux objets ne s'arrête pas.Le livre a de la peine à dormir. Il veille parce qu'il a peur que les ciseaux lui coupent ses bellesimages. La paire de ciseaux, elle, est tranquille. Elle dort bien parce que le livre ne peut pas luifaire du mal.Quelques jours plus tard, les ciseaux et le livre discutent.Ils se mettent d'accord car ils ne peuvent plus vivre comme ça. Le livre n'a plus de force, il estépuisé. Les ciseaux, eux, s'ennuient. Le livre décide alors de lui parler tout en gardant ses dis-tances car il ne peut pas lui faire tout à fait confiance.Pendant des jours, la situation est bonne et les ciseaux parlent. Une nuit, un orage violent détruitle toit de l'école. Comme le sac était resté ouvert, la paire de ciseaux et le livre sont trempés. Lelendemain matin, les ciseaux se découvrent rouillés. Ils n'arrivent plus à couper et le livre estabîmé. Ils sont tristes. Les ciseaux proposent au livre d'oublier le passé et de s'épauler car ils ontbesoin l'un de l'autre. Les deux objets se sont rapprochés pour vivre ensemble, mais la paire deciseaux ignore que le livre est magique et qu'il a des pouvoirs, dont celui de se réparer. Elle ne voitqu'une chose: elle est perdue car elle sera bientôt jetée. Le livre essaie de la réconforter sans succèsLes ciseaux sont tellement tristes que le livre, à la fin, en a marre.Il décide de l'aider sérieusement en utilisant son pouvoir magique.Mais avant de s'y mettre, il lui pose une question:– Si je réussis à te réparer et à te redonner de la vie, dis-moi si tu me feras du mal, si tu trouerasmes pages ?– Je te jure que tu n'auras plus de soucis à te faire.Le livre utilise son pouvoir et les ciseaux redeviennent tout neufs et heureux.Dès ce moment-là, les deux objets ont accepté de vivre ensemble et ils ont compris que, dans lavie, on a besoin les uns des autres.

10

différenciation

La différenciation pédago-gique tient un rôle majeurdans la réforme EVM. Si ladifférenciation externe (pardes filières) commence enseptième année pour l’ensei-gnement régulier, la différen-ciation interne (au sein de laclasse) est encouragée dès letout début de la scolarité.Dans le cadre du suivi effec-tué par l’URSP pour le CYP2,nous avons interrogé, parl’intermédiaire des délégués,les enseignants des treizeétablissements explorateursvaudois sur leurs pratiquesde différenciation.

Dans le questionnaire éla-boré à ce propos, nous noussommes beaucoup attachésà étudier également l’impactde l’organisation en cyclesd’apprentissage sur les possi-bilités de différenciation enclasse. Cet article tente derestituer les réponses desenseignants explorateurs àce questionnaire, ainsi queles avis exprimés lors d’unediscussion avec les déléguéset les directeurs des établis-sements explorateurs.

URSP

Pourquoi différencier?Dans la littérature, le but de la péda-gogie différenciée est «d’adapter lesméthodes pédagogiques et les condi-tions d’apprentissage à la diversitédes élèves» (Bétrix Köhler & Blanchet,1999). Les objectifs décrits par lesenseignants sont du même ordre,mais peuvent être placés dans deuxcatégories :∂ Accent sur les compétences de base

(«assurer l’indispensable chez tousles élèves», «lutter contre l’échecscolaire», etc.)

∑ Accent sur le bien de l’élève («res-pecter le rythme de l’élève», «tenircompte des intérêts de l’élève», etc.)

Il va de soi que ces deux catégories deréponses sont très complémentaires;si l’on se centre sur le bien de l’élève,c’est pour assurer au mieux ses ap-prentissages, et cet objectif corres-pond parfaitement à un intérêt pré-pondérant pour les compétences debase et à la lutte contre l’échec sco-laire.

Comment différencie-t-on ?Dans les réponses portant sur lamanière dont est pratiquée la diffé-renciation, il apparaît que les ensei-gnants travaillent surtout en fonctiondu rythme d’acquisition et, dans lamesure du possible, du style d’ap-prentissage qu’ils ont identifiés chezl’élève. Ils donnent régulièrement destâches spécifiquement adaptées auxdifférents élèves de la classe; si celles-ci sont le plus souvent définies enfonction du niveau scolaire de l’en-fant, bon nombre d’enseignantsdisent qu’ils attachent aussi unegrande importance à la manière detravailler et aux intérêts personnelsdes élèves.

On peut également se deman-der si la différenciation

s’applique (voire même si elle estapplicable) à toutes les disciplines. Acette question, tous les enseignants

11

différenciationconvienne. Dans certains «établisse-ments monoâges», on a mêmerecours, dans de rares cas, à unemodification de l’enclassement pourplacer un élève en grande difficultédans une classe de première annéedu cycle – ce qui revient, il faut bienl’admettre, à réintroduire le redouble-ment en 3P.

Et l’évaluation formative?Pour différencier de manière appro-priée, il est important de connaîtreautant que possible les forces et lesfaiblesses des élèves. C’est l’objectif del’évaluation formative, surtout quandelle est appliquée au début d’uneséquence didactique pour identifierles besoins propres à différentsgroupes d’élèves.

Les enseignants pratiquent l’évalua-tion formative à des degrés trèsdivers. Pour certains, elle est fré-quente, voire systématique, au débutd’une séquence didactique. D’autresenseignants ne la pratiquent quequelquefois, voire rarement. Dansdeux établissements, les déléguésmentionnent que la pratique del’évaluation formative se développeprogressivement depuis quelquetemps. Dans un autre établissement,elle semble être pratiquée essentielle-ment en début de cycle, pour évaluerles prérequis. Au cours du cycle, elledevient apparemment plus infor-melle et s’inscrit dans la pratiquepédagogique habituelle, que ce soitau début d’une séquence didactiqueou pendant l’ensemble de son dérou-lement.

Il est d’ailleurs quelquefois difficile desavoir précisément ce que l’on entend

était très favorable ou plutôt favo-rable à la différenciation pédago-gique. L’avantage le plus souventmentionné est le fait que deux anssont disponibles, et non plus un seul,pour remplir les objectifs d’apprentis-sage. Cela permet de laisser un peuplus de temps à l’élève pour acquérirune notion difficile. En même temps,bon nombre d’enseignants ont relevéque si on différencie trop les rythmesd’acquisition, on risque d’aboutir àune augmentation des maintiensd’élèves dans le cycle pour une troi-sième année.

Le canton de Vaud voit actuelle-ment coexister deux organi-

sations des cycles d’apprentissage :classes monoâges et classes mul-tiâges, laissées au libre choix des éta-blissements. Nous avons questionnéles enseignants sur les avantages etdésavantages de chacune de cesformes d’organisation. Il ressort desréponses que la classe monoâge estperçue comme plus facile à gérer, lesdifférences entre élèves étant moinsimportantes. On peut donc pratiquerune différenciation plus fine, et l’on aun peu moins d’activités différentes àpréparer pour les élèves, ce qui limitela charge de travail. Dans les avan-tages des classes multiâges, on men-tionne l’aide que les «grands» peu-vent apporter aux «petits», ainsi quela plus grande facilité à gérer uncycle raccourci ou rallongé. Si unélève, par exemple, est en grande dif-ficulté dans une classe multiâge, il estpossible de le faire travailler avec lesélèves de première année du cycle.Dans une classe monoâge, il serabeaucoup plus difficile de le faire tra-vailler dans un groupe qui lui

ont dit pratiquer la différenciation enfrançais et mathématiques. La diffé-renciation dans les autres disciplinessemble moindre. On peut relever lefait que les pratiques de différencia-tion sont systématiques dans les disci-plines considérées comme détermi-nantes pour la réussite de l’élève. Ils’agit d’ailleurs des disciplines qui ontla plus forte dotation horaire, ce quifacilite manifestement les pratiquesde différenciation.

Jusqu’où différencier ?La différenciation poussée à l’extrêmepourrait devenir un préceptorat géné-ralisé, chaque élève suivant un pro-gramme personnel. Il faut distinguerla différenciation de l’individualisa-tion, qui représenterait clairementune charge de travail impossible àgérer pour l’enseignant. Comment,donc, peut-on différencier sans indivi-dualiser complètement l’enseigne-ment ? Une des pistes, mentionnéedans une discussion consacrée à laquestion, est le développement dutravail en atelier ou en petits groupes.En constituant les groupes, l’ensei-gnant peut s’assurer que chaqueélève se trouve dans une situationfavorable à l’apprentissage. Le maîtreest amené à gérer ainsi six ou septactivités, et non pas une par élève.Selon les délégués, le travail degroupe est une bonne entrée dans lespratiques de différenciation pour quel’enseignant ne soit pas submergé parla tâche impossible qui consiste àsuivre chaque élève individuellement.

Différenciation et cycle d’apprentissageUn des points phare de la réformeEVM est également le fonctionnementen cycles d’apprentissage de deuxans. Cette organisation est-elle favo-rable ou défavorable aux pratiquesde différenciation ? La totalité desenseignants ont répondu que l’orga-nisation en cycles d’apprentissage

Pour différencier de manière appropriée, il est important de connaître autant que possible

les forces et les faiblesses des élèves.

12

par évaluation formative. Dans cer-tains établissements, elle est prati-quée surtout de manière informelle,en collectif ou par oral. Il s’agitdavantage, pour l’enseignant, defaire un «rappel du connu» qued’évaluer les compétences effectivesde ses élèves.

Pour pointer les principalesdifficultés ou lacunes,

un moment collectif de rappel desnotions censées être connues donneprobablement des informations suffi-santes à l’enseignant sur les remédia-tions à entreprendre ou les groupes àcomposer.

Les problèmes de la différenciationIl est évident que la différenciationpédagogique entraîne certaines diffi-cultés que ne susciterait pas un ensei-gnement plus homogène. La sur-charge de travail est le problème leplus souvent mentionné par les ensei-gnants.

L’ augmentation de travail liée àl’évaluation formative est men-

tionnée au premier plan. Observerchaque élève individuellement etanalyser ses performances demanière approfondie est une chargeimportante. Une enseignante relevaitqu’une analyse qualitative deserreurs doublait le temps à consacrerà la correction, sans compter le tempsnécessaire pour élaborer une tâche deremédiation «sur mesure». Plusieursenseignants déplorent également laquasi-absence de matériel pédago-gique différencié prêt à l’emploi : «ilfaut tout créer en fonction des besoinsdes élèves».

Sur un plan plus pratique, le travailen atelier implique un temps de pré-paration de la salle de classe qui peutêtre relativement important. De plus,pendant le travail en atelier, les ensei-

gnants ont souvent l’impression qu’ilfaudrait être partout à la fois, et lagestion des activités parallèles peuts’avérer très difficile.

On relèvera enfin que ces difficultéssemblent plus importantes pour desenseignants qui sont employés àtemps partiel : ils manquent encoredavantage de temps en classe pourmettre en place des remédiationspédagogiques.

Pour conclure…La différenciation pédagogique est aucentre de l’intérêt de nombreux péda-gogues. Si elle est encouragée parl’institution depuis quelques années,les réponses des délégués montrentqu’elle a toujours été présente à desdegrés divers sur le terrain.

Les pratiques de différenciation desenseignants peuvent porter sur plu-sieurs dimensions : le rythme de tra-vail de l’élève, son niveau de compé-tences, ses intérêts personnels, sonstyle de travail, etc. Les délégués relè-vent également qu’on différenciebeaucoup en adaptant la tâche aurythme de travail de l’élève, tout enveillant à ce que les objectifs soientatteints à la fin du cycle. Le styled’apprentissage de l’enfant est sou-vent identifié par l’enseignant, maisrarement pris en compte pour unedifférenciation qualitative des activi-tés. Il semble qu’il est encore plus dif-ficile pour les enseignants de tenircompte des intérêts de l’enfant, et cetype de différenciation est donc beau-coup plus rare.

La place de l’évaluation forma-tive varie énormément d’un

groupe d’enseignants à un autre. Onpeut se demander s’il est nécessaired’avoir une connaissance précise desforces et faiblesses de chaque enfantlorsqu’on débute un apprentissage,ou si une vue globale de la classe est

suffisante pour commencer. Certainsenseignants se limitent donc à propo-ser d’abord une activité collective,basée sur le niveau moyen de laclasse, avant de différencier les activi-tés proposées à chaque élève en fonc-tion de ses performances à cette pre-mière activité. Cette pratique permetde réserver plus de temps pour diffé-rencier, dans une deuxième phase dela séquence d’apprentissage, et limitel’importante surcharge de travail queles enseignants attribuent, entreautres choses, à l’évaluation forma-tive.

La mise en œuvre de la différen-ciation pédagogique n’est

pas systématique dans les établisse-ments primaires, certaines disciplinesn’en faisant pratiquement jamaisl’objet, notamment les disciplines fai-blement dotées. Relevons finalementque, pour plusieurs délégués, c’estune pratique qui se développe aucours du temps; il serait donc intéres-sant de pouvoir suivre la situationdans deux ou trois ans, lorsque lagénéralisation et quelques années detravail dans cette nouvelle perspec-tive auront permis aux enseignantsde stabiliser quelque peu leurs pra-tiques.

Référence bibliographique

Bétrix Köhler, D., & Blanchet, A. (1999).Vers une évaluation au service des appren-tissages dans une pédagogie différenciée. InD. Bétrix Köhler & A. Blanchet (Eds.),Enseigner sur mesure; éclairages sur les pra-tiques d'évaluation formative et de différencia-tion (pp. 13-40). Lausanne: URSP.

Joëlle Leutwyler,URSP

différenciation

13

En certains lieux, l’aide spéci-fique apportée aux enfants

intervient très tôt, au CIN déjà, sousla forme d’appuis, de CIF, voire declasses d’accueil. Il serait intéressantd’observer l’effet produit par ce typed’interventions.

Les chiffres recueillis auprès des éta-blissements étaient partiellementconnus jusqu’ici. Une certaine confu-sion existait cependant entre les coursde français dispensés aux élèves nonfrancophones et les appuis, parexemple, dans la mesure où ilsétaient parfois offerts par les mêmesenseignants. L’enquête ne fournit enrevanche aucune indication sur l’effi-cacité des mesures adoptées. Seuleune observation des pratiques au seindes établissements permettra d’identi-fier, sur la base d’indicateurs recon-nus, les mesures qu’il conviendrait dedévelopper et celles qui se révèlentmoins performantes. Cette tâche sepoursuivra donc durant la prochaineannée scolaire, en relation avec lesbesoins exprimés et la situation parti-culière vécue par chaque établisse-ment.

Enfin, si aucune régula-tion n’a encore été

envisagée au niveau du Départementdans le domaine de l’appui ou desclasses particulières (faute d’informa-tions suffisantes), il sera intéressantd’observer, dans les semaines à venir,les ajustements décidés au sein mêmedes établissements qui, pour la pre-mière fois, effectuent leur proprerépartition de périodes d’enseigne-ment dans le cadre d’une «enve-loppe» de ressources pédagogiques.

comme l’aide apportée aux enfants àhaut potentiel.

Cette enquête n’a pas encore été tota-lement dépouillée. Il est donc difficiled’en rendre compte de manière pré-cise aujourd’hui, et encore moins d’enfournir une analyse crédible.

Ce qui ressort néanmoins deschiffres communiqués par

les établissements est l’extrême diver-sité des approches adoptées dans cedomaine. Certains ne recourent prati-quement pas à l’appui ou aux coursintensifs de français mais ont déve-loppé des formes de regroupementsvariées. Il s’agit surtout des établisse-ments secondaires, ce qui démontrela difficulté de pratiquer l’appui, telque conçu par le législateur, dans unsystème marqué par un enseigne-ment disciplinaire dispensé par demultiples enseignants. Le regroupe-ment permet de limiter le nombred’intervenants et de concentrer l’ef-fort autant sur une aide socio-éduca-tive que sur l’enseignement propre-ment dit, à un âge où les problèmesde comportement ou d’incivilité pren-nent le pas sur les difficultés d’ordrepurement scolaire.

Les appuis sont dispensés surtout auxélèves de l’école primaire et, dans unemoindre mesure, à ceux du CYT.Dans certains cas, près d’un élève surcinq bénéficie d’un appui, sur untemps relativement réduit il est vrai.Ailleurs, un très petit nombre d’en-fants reçoivent en revanche unnombre élevé de prestations.

On constate également l’aug-mentation du nombre de

«classes du mercredi». Ces regroupe-ments régionaux accueillent desélèves à haut potentiel, une demi-journée par semaine, pour des activi-tés qui échappent au plan d’étudesproprement dit.

Il y a tout juste une année,la DGEO décidait de lancerun «audit» sur les mesuresd’appui en vigueur dans lesétablissements du canton.La raison en était très simple :les chiffres à disposition nepermettaient pas de mesurerl’ampleur de ce dispositif etaucun critère précis ne déter-minait l’affectation des mon-tants qui y étaient consacrés.

Un groupe, composé de repré-sentants des milieux concer-

nés (parents, enseignants, directeurs,chercheurs, services partenaires) semit en place. Sa réflexion se concen-tra sur l’ensemble de l’aide que l’écolepeut apporter aux élèves en difficulté.

En fin d’année scolaire, un question-naire fut adressé aux établissementsafin d’établir un recensement desdiverses mesures : appuis, mais aussiclasses à effectif réduit, classes dedéveloppement, cours intensifs defrançais ou classes d’accueil, groupesdivers répondant à des besoins précis,

Cilette CrettonDirectrice pédagogique

de la DGEO

DGEO

appui

14

explo 7-9

Après cinq années de travail– de découvertes, de douteset d'essais renouvelés – l'ex-ploration des nouvelles pro-positions liées à EVM s'estachevée au niveau secon-daire. La fin de l'explorationne signifie pas la fin desefforts, et l'on sait que denombreux chantiers demeu-rent ouverts, comme ce bilanva d'ailleurs en témoigner.Ce qui reste à faire, avecl'ensemble des établisse-ments, ne doit cependantpas nous priver d'un regardrétrospectif sur cette intensepériode de cinq ans pendantlaquelle les enseignantsexplorateurs et les respon-sables scolaires de tous lesniveaux ont dû engagertoutes leurs forces afin dedéchiffrer les intentionsexprimées dans la Loi et leRèglement.

Ce bilan ne concerne que lesdegrés 7 à 9, et surtout le

dernier d'entre eux, que les délégués*

venaient de vivre. Pour recueillir lesdonnées auprès des enseignantsexplorateurs, un canevas de ques-tions a été remis aux délégués destreize établissements concernés (unétablissement ne s'est pas exprimé).Pour chacune des 25 questions, uneappréciation globale était d'aborddemandée: Comment estimez-vous glo-balement les modifications intervenues?avec le choix entre quatre apprécia-tions: très négatives, plutôt négatives,plutôt positives, ou très positives. Lesenseignants étaient ensuite librementinvités à préciser par des commen-taires les aspects positifs et les aspectsnégatifs du thème concerné.

Nous disposons donc, pour chaquequestion, d'une information quantita-tive et de commentaires. Il convien-dra de prendre avec beaucoup de pru-dence les pourcentages que nousallons indiquer.

Les voies secondairesLes avis positifs, concernant les modi-fications intervenues, sont très nom-breux. Ils constituent trois quarts despoints de vue exprimés et même 90%pour ce qui est de la VSO. Ces posi-tions sont un peu inattendues dans lamesure où l'orientation dans les voiessecondaires et même le nombre de cesvoies sont l'objet de discussion et depropositions de changement.

La VSO (voie secondaire à options)Les caractéristiques de la VSO sontdonc presque unanimement considé-rées comme bonnes. L'élément positifprincipal est la préparation des élèvesà l'entrée dans le monde profession-nel, que ce soit par les cours d'AMP(Approche du monde professionnel),les stages ou les contacts directs queles maîtres peuvent établir. Cette pré-paration n'est pas nouvelle, mais

davantage de temps peut lui êtreconsacré.

Le fait d'avoir à choisir des «paniers»d'options est aussi souligné, même si,dans de petits établissements, le choixest considéré comme trop restreint, cequi pose un problème d'équité.

A la grille horaire de la VSO, deuxpériodes sont libres. Les établisse-ments en fixent le contenu. Cespériodes d'établissement sont utilisées,selon les cas, comme appoint pourcertaines disciplines ou certainesoptions, ou pour développer des pro-jets d'une certaine ampleur, permet-tant d'offrir aux élèves des momentsde création et d'expression valorisants.Ces périodes semblent généralementtrès appréciées.

Options et projets concourent à moti-ver et à valoriser les élèves. Pourtant,plusieurs délégués relèvent que laVSO souffre toujours d'une imagetrop négative pour les élèves eux-mêmes et dans le public: la société estignorante du bon travail qui s'y fait.

La VSG (voie secondaire générale)Les maîtres qui se sont exprimésapprouvent très largement la défini-tion de la VSG actuelle, pourtant lesavis sont assez partagés à propos dela suppression des sections. Si certainsestiment qu'elle évite les clivages, ouqu'elle développe l'autonomie et motiveles élèves qui ont envie de travailler,d'autres, un peu plus nombreux, luireprochent principalement d'être àl'origine d'une baisse de niveau desélèves: on pouvait demander plus danscertaines disciplines. – On ne fait plusrien à fond. Ce nivellement se fait audétriment d'un certain profil, qui facili-tait la recherche d’un apprentissage oud’une formation subséquente.

Les avis sont quasi unanimes enrevanche à approuver le projet inter-

URSP

15

explo 7-9nouveau Plan d'études vaudois. Les OFpermettent de se centrer sur l'essentiel –et favorisent les échanges entre les col-lègues. Pour les enseignants quiapprécient ces aspects, le caractèregénéral des OF n'est pas nécessaire-ment négatif: Cela nous donne unegrande latitude. Il est plus cohérent detravailler dans la globalité et par compé-tences larges (langues), – OK pourautant que ceux-ci restent assez vagues.

D' autres en revanche les trou-vent encore trop flous dans cer-

taines disciplines, – trop généraux, – dif-ficiles à évaluer, – laissant une tropgrande marge de manœuvre, ce quiimplique de grandes différences d'unprof et/ou d'un établissement à un autre.Enfin, la définition forcément géné-rale des OF induit, pour certains, descompréhensions trop personnelles dece que les élèves doivent atteindre outrop de difficultés pour les mettre enapplication.

Relation pédagogique et apprentissageEn demandant d'apprécier la centra-tion sur l'apprentissage des élèves(évaluation formative et différen-ciation: auto-évaluation, remédia-tion, etc.), on entre au cœur de l'in-novation. Même si plusieursremarques soulignent que cesdémarches se pratiquaient déjà avantla récente réforme, c'est bien à uneremise en question profonde de larelation pédagogique que devaientconduire les idées de «centrer l'atten-tion sur l'élève», de mieux respectersa progression, de le pousser davan-tage à prendre en charge ses appren-tissages, à tirer parti de ses erreurs,etc. Le maître est vu comme un coachplutôt qu'un cocher.

Globalement, les avis sont très parta-gés sur l'incidence positive ou néga-tive des modifications introduites(54% et 46% respectivement). Descommentaires soulignent bien le res-pect des rythmes, des intérêts et des pro-jets des élèves; les élèves se sentent plusconcernés et certains prennent plaisir àtravailler dans ce contexte, – cela per-met une observation plus fine de l'évolu-tion de chaque élève. Mais si en théoriec'est magnifique, dans la pratique l'ap-plication n'est pas facile. La difficultéprincipale tient à l'attitude des élèvesqui ne rentrent pas dans le «jeu», – sereposent et attendent la différenciation etla remédiation avant de se mettre au tra-vail! Plusieurs remarques suggèrentque les démarches formatives sontmieux adaptées aux élèves de 5e et 6e

année, mais fonctionnent mal quandles élèves avancent dans l'adoles-cence.

Ainsi, même ceux qui approuventglobalement les nouvelles démarches(la moitié des enseignants environ)estiment qu'elles sont difficiles à réali-ser. On ne peut pas savoir pour l'ins-tant si le bilan mitigé des démarchesformatives est dû aux problèmes demise en place (contexte de l'explora-tion, changements des procéduresd'évaluation, temps d'assimilation),ou si des facteurs plus généraux enlimitent l'application (contraintes dusystème, âge des élèves).

Une seconde question concer-nait directement les

innovations pédagogiques et avaittrait au travail par projets (travauxinterdisciplinaires, examensApproches du monde, travaux decertificat, travaux effectués pen-dant les périodes d'établissement).

disciplinaire: C'est un travail quidemande de grandes qualités de syn-thèse aux élèves, une certaine autono-mie, un esprit critique et un engagementpersonnel. Plusieurs remarques relè-vent que le projet n'est pas toujourspris au sérieux et suggèrent qu'il fau-drait en clarifier l'évaluation ou intro-duire des notes.

Le même problème existe pour l'exa-men Approches du monde. Considérécomme intéressant, – original, – condui-sant les élèves à une meilleure responsa-bilisation, – à se mettre en projet, cetexamen vise l'intégration desconnaissances et ne devrait pas êtrela cause d'échecs. Plusieursremarques soulignent que cette visionformative fait que certains élèves leprennent trop à la légère et s'investissenttrop peu.

La VSB (voie secondairede baccalauréat)La nouvelle définition de la VSBrecueille trois quarts d'avis positifs.Dans la même proportion, la suppres-sion des sections est considéréecomme favorable à l'ambiance desclasses, à l'équilibre entre filles et gar-çons ou entre «scientifiques» et «litté-raires», ce qui permet d'éviter le cloi-sonnement et, dans une certaine mesure,le «snobisme» de certaines options (p.ex. le latin). Pour une grande majorité,le mélange des élèves est donc vucomme une richesse, tant pour la for-mation que pour la socialisation. Uneminorité, en revanche, estime que laplus grande hétérogénéité conduit àdes différences trop importantes.

L'enseignementet ses pratiquesLes objectifs fondamentaux de fin de degréLes trois quarts des avis exprimés sontplutôt positifs par rapport au travailde définition des objectifs fondamen-taux (OF), effectué dans le cadre du

… c'est bien à une remise en question profonde de la relation pédagogique que devaient conduire

les idées de «centrer l'attention sur l'élève».

16

explo 7-9Ces travaux de plus longue haleine,suscitant mises en relation et interdis-ciplinarité, sont considérés demanière positive par la plupart desenseignants (88%).

Dans les aspects positifs, onrelève une meilleure

responsabilisation de l'élève, une amé-lioration de son autonomie, de sa moti-vation, notamment par le travail engroupe, un intérêt à travailler différem-m e n t . Les projets permettent de t r a v a i l l e rdes méthodes, développer la réflexion etla recherche, tout en constituant unebonne révision. Pour les maîtres, c'estun moyen de mieux différencier, d'élar-gir l'horizon et de lutter contre le saucis-sonnage de l'enseignement.

Malgré ce tableau flatteur, certainsmaîtres perçoivent quelques difficul-tés: les élèves sont lents à se mettre autravail, le travail par projets prendtrop de temps et empêche de terminer leprogramme. Il faudrait plus demoyens de manière à éviter la sur-charge, et permettre un meilleur suiviet des contrôles: les élèves moins bonsou moins motivés peuvent «passerentre les gouttes». Quelques avis relè-vent que pour beaucoup l'exercice estdifficile, la motivation décroît avec letemps, – les élèves sont noyés par ce typede travaux. Toutes ces difficultés nesemblent cependant pas découragerune très large majorité des ensei-gnants pour le travail par projets.

L'efficacité de l'enseignementCette centration sur le processus d'ap-prentissage et les projets permet-elled'assurer l'efficacité de l'enseigne-ment (transmission des connais-sances, niveaux atteints)? L'essentieldes appréciations exprimées sontnuancées à ce sujet, avec une légèremajorité d'avis négatifs (58%), lescommentaires étant nettement plussouvent négatifs.

Les remarques favorables relèventque les acquisitions sont meilleuresquand la découverte est personnelle, – les élèves sont plus à l'aise devant larecherche de documents et la rédaction-présentation d'exposés, ils sont plusdébrouillards et plus autonomes.

Quelques maîtres estiment qu'il n'y apas eu de changement, mais de nom-breuses remarques soulignent aucontraire que le niveau des acquisitionssemble en baisse, – le rythme d'appren-tissage est ralenti, les programmes nesont presque plus réalisables. Pourexpliquer ce phénomène, les com-mentaires insistent sur la moinsgrande motivation des élèves: ils sem-blent moins concernés par leur avenir, –ne travaillent pas assez.

On sait que l'impression d'unebaisse de niveau est perma-

nente au cours du temps. Cetteimpression doit cependant être priseen considération, notamment si ellese double d'une démotivation desélèves, et surtout des plus faiblesd'entre eux. Ceci pourrait conduire àcreuser des écarts entre les élèves,dont on sait, depuis l'enquête PISA,qu'ils sont particulièrement impor-tants dans notre canton.

venues, mais en fait, la majorité descommentaires soulignent qu'EVMn'est pour rien dans ce qui relève de ladynamique de classe, – ne change pasles élèves, – des phénomènes de sociétésont plus forts que nous. Les avis confir-mant le statu quo sont ainsi deux foisplus nombreux que ceux qui expri-ment une baisse de la motivation.

Sur le plan général toujours, lebut ultime de l'école est que

l'élève intègre les connaissances,acquière de l'autonomie et soitcapable de résoudre des problèmes.La majorité des enseignants qui ontrépondu sont plutôt positifs (59%) àl'égard de ce but. Les commentaires,quant à eux, se répartissent assez éga-lement entre ceux qui relèvent desaspects positifs, négatifs ou sans chan-gement. On notera que plusieurs com-mentaires attirent l'attention sur lefait que ce sont les bons élèves, motivéset suivis à la maison, qui profitent leplus des modifications introduites,notamment du travail de groupe. Ceproblème se pose effectivement pourtoutes les démarches qui font appel àl'initiative de l'élève et à une certainefamiliarité avec la culture scolaire. Cen'est pas une raison de renoncer à cesdémarches, mais plutôt d'en faire unusage mesuré et différencié.

En ce qui concerne les dispositionsfacilitant la prise en charge desélèves en difficultés (appuis divers,équipe pluridisciplinaire), deux tiersdes avis sont plutôt favorables. Maisles quelques commentaires positifssont nettement moins fréquents queles remarques négatives. Pour plus dedétail, on se rapportera à une syn-thèse précédente (Deux points : « ouvrez les guillemets, n° 17) où ilapparaissait que la prise en charged'enfants en difficultés était moinsdéveloppée en 7-9 que dans lesannées précédentes.

Les projets permettentde travailler

des méthodes, développer la réflexionet la recherche, tout en

constituant une bonne révision.

Sur un plan plus général, le plaisir etla motivation des élèves (participa-tion, curiosité, dynamisme) ne sem-blent pourtant pas en baisse. Deuxtiers des répondants estiment plutôtpositivement les modifications inter-

explo 7-9

17

On observe donc en généralque la nouvelle approche,

centrée sur l'apprentissage des élèves,fait maintenant bien partie de la cul-ture pédagogique, mais rencontre desdifficultés pratiques. Les problèmes demotivation, évoqués pour expliquerces difficultés, ne sont pas autant res-sentis lorsqu'on pose la question de lamotivation des élèves sur un plangénéral. Le fait que l'efficacité de l'en-seignement soulève de l'inquiétudechez les enseignants ne devrait pasrester sans réponse. L'impressiond'être efficace est un facteur impor-tant de motivation pour les maîtres. Il faudrait pouvoir objectiver les com-pétences acquises par les élèves,comme l'enquête PISA peut le faire,pour pouvoir prendre, le cas échéant,les mesures nécessaires et éliminer cesentiment de dévalorisation latent del'institution scolaire.

L'évaluationDans le cadre d'un bilan, quelquesquestions sur les instruments d'éva-luation sont incontournables. On rap-pellera qu'une modification est inter-venue depuis une année, puisque desnotes sont apparues en cours depériode lorsqu'une étape est franchie:travaux écrits ou produits de l'élèvemarquant la fin d'une séquence d'ap-prentissage (appelés éléments significa-tifs). En fin de période, une note syn-thétique est attribuée qui, sans être lerésultat du calcul d'une moyenne, doitêtre en cohérence avec les résultats dela période. Ceci permet au maître deprendre en considération l'ensembledu travail de l'élève et de tenir comptesi nécessaire de sa progression aucours de la période. Enfin, au terme del'année, une moyenne indicative estcalculée sur la base des résultats destrois périodes (et de l'examen de certi-ficat en 9e pour certaines disciplines).Cette moyenne peut être arrondie versle haut dès qu'elle dépasse l'entier(à .3 dans la plupart des cas), pour

autant que le maître ait, là aussi,observé une progression sensible.

On voit qu'il s'agit là d'un com-promis entre deux positions

opposées. On observe en fait que cettesolution ne génère pas un consensuspuisqu'elle laisse déçus aussi bienceux qui ne voulaient plus entendreparler de moyennes que ceux qui sou-haitaient la réintroduction de notes etde leur traitement arithmétique tradi-tionnel. Contrairement à presquetoutes les autres questions, celles por-tant sur l'évaluation ont ainsi suscitédes avis majoritairement négatifs.L'existence d'oppositions de diversesnatures parmi les enseignants nelaisse guère augurer d'une nouvellesolution acceptable par tous, et l'onsait, de plus, que des modificationspourraient être imposées de l'exté-rieur (cf. initiative populaire sur leretour des notes).

Pour ce qui est de lamanière d'élaborer et

de communiquer l'évaluation auxélèves au cours d'une période(appréciations, codes, notes), 61%des avis sont, globalement, plutôt outrès négatifs. Dans les commentaires,les arguments favorables soulignentla simplification et la clarification quisont intervenues: maintenant, les codessont clairs pour tous; l'enseignant dis-pose d'une plus large latitude pourl'évaluation. Le retour partiel auxnotes soulève des commentairesopposés. Par exemple, les avis sui-vants proviennent du même établis-sement: Retour aux notes : bien tristecompromis et les 1 à 4 éléments signifi-catifs obligatoires [ne sont] pas pra-tiques. – On tourne en rond. La notedéfinit clairement un niveau de compé-

tence par rapport à un objectif. Lesélèves la réclament.

Les commentaires relevant desaspects négatifs sont nombreux. Ilssoulignent les trop fréquents change-ments qui sont intervenus au coursde l'exploration. A son terme, l'im-pression dominante est que la clartéet la simplicité ne sont pas au rendez-vous. Ceci produit une perte de repèrescommuns, un besoin constant de justi-fier les appréciations, un emploi desnotes et des codes très différent d'unmaître à l'autre, – un manque de cohé-sion au sein du même établissement. Lecalcul de moyennes apparaît chez lesélèves, même dans le contexte d'unepériode, par la transformation descodes en notes.

En ce qui concerne la manièred'élaborer et de communi-

quer l'évaluation aux élèves à la find'une période (notes «en cohérence»mais sans moyenne), les avis glo-baux sont comparables à ceux de laquestion précédente (négatifs à 58%).Dans les aspects positifs, certainsmaîtres soulignent la souplesse dusystème et sa possibilité de tenircompte de l'évolution de l'élève.

Cependant, ces maîtres, et biend'autres nettement plus critiques, sou-lignent que ce système n'est pas facileà expliquer aux élèves et à leursparents: cela demande des clarificationspour les élèves quant au poids des diffé-rentes évaluations et de la progression, –difficulté de la part des élèves et desparents à comprendre que les élémentsnon significatifs comptent aussi, – avecdes résultats similaires, des élèves peu-vent avoir deux notes différentes, ce quiest très dur à justifier et à faire passer,

… le plaisir et la motivation des élèves (participation, curiosité, dynamisme) ne semblent pourtant pas en baisse.

18

explo 7-9autant si ceux qui les expriment sou-haitent un retour aux notes et auxmoyennes traditionnelles: avec ce sys-tème, il devient quasi impossible de raterson année…

Ces avis remettent en question le faitd'arrondir la moyenne à l'entier, oumême à partir de .3 lorsque l'élève esten progrès: arrondir le 0,3 à lamoyenne supérieure favorise ceux qui semettent à travailler en fin d’année. Celaencourage à ne rien faire le 1er trimestre.Plusieurs avis souhaitent ainsi quedes moyennes soient précisées à ladécimale ou au demi-point près.Quelques avis souhaitent enfin leretour au système traditionnel:parents, élèves et enseignants veulentdes résultats clairs, donc des notes, –revenons aux moyennes !

Les avis divergents, on le voit,ne manquent pas. Il est

difficile d'imaginer comment et àquel terme une tendance pourraitfinalement nettement prévaloir,même en restreignant le débat auxpartenaires directs de l'école et en selimitant aux explorateurs. Et l'on saitque ces questions sont débattues bienplus largement et que les argumentspédagogiques ne seront pas nécessai-rement ceux qui prévaudront. Il resteà espérer que les décisions futures necoupent pas l'élan de ceux pour quila réflexion sur l'évaluation a consti-tué un renouvellement pédagogique.

Les relations avec les parentsMême si les questions précédentes neconcernaient explicitement que lesélèves, les avis exprimés englobaientaussi souvent les parents. A la ques-tion spécifique sur la manière decommuniquer l'évaluation aux

Les différentes manières d'interpréter le système actuel par les enseignants augmentent

la confusion des parents.

car [cela génère un] sentiment d’injus-tice très prononcé.

Face à cette situation désagréableautant pour les élèves que pour les ensei-gnants et les parents, on observe unegrande variété de positions, entreceux qui résistent à recourir à unemoyenne, ceux qui ne voient pluscomment l'éviter et ceux qui souhai-tent son retour par gain de paix.

On voit mal pour l'instantcomment concilier le souci

légitime de beaucoup d'enseignantsde prendre en considération les pro-grès de l'élève en évitant la moyenne,et les craintes d'un bon nombre quecette appréciation soit la porte ouverteà l’arbitraire ou, au mieux, au pifomètrecomme outil d’évaluation.

La manière d'élaborer et de com-muniquer l'évaluation aux élèvesen fin d'année (moyennes indica-tives) recueille le plus d'avis négatifs(plutôt négatifs: 50%, très négatifs:21%) de l'ensemble des questionsposées. Les commentaires relèventpour la plupart des aspects négatifs,mais on peut y déceler deux ten-dances différentes qui convergentdans la critique.

Le premier groupe regrette leretour des moyennes pour la

note de fin d'année: soit on met desmoyennes, soit on n’en met pas ! Maisces moyennes empêchent le bon fonc-tionnement et l’esprit d’EVM d’arriver àévaluer sans notes. Le retour desmoyennes est donc jugé comme uneimportante source d'incompréhen-sion: Nous nageons en pleine incohé-rence avec ces «notes» qui ne sont pasdes «notes» mais qui deviennent desnotes ! Un autre groupe d'avis, toutaussi nombreux, critique aussi le sys-tème en place en raison de la stimu-lation insuffisante qu'il apporte auxélèves, sans qu'on puisse savoir pour

parents (appréciations, codes,notes), la majorité des enseignants(61%) estiment globalement que lesmodifications intervenues sont néga-tives. Mis à part quelques commen-taires positifs, l'essentiel desremarques soulignent la complexitédu système et son manque de clartépour les parents. Ceux-ci sont «lar-gués», – désorientés, ou déstabilisés. Ilest impossible pour les parents de maîtri-ser plusieurs systèmes d'évaluation enmême temps. Les différentes manièresd'interpréter le système actuel par lesenseignants augmentent la confusiondes parents. Un seul système seraitpréférable. Si les difficultés de com-préhension des parents sont aussifortes, on voit mal pour l'instant cequi pourrait leur faire choisir unautre système que celui qu'ils onteux-mêmes connu.

Sur un plan plus général, unequestion demandait si un

des objectifs importants de laréforme, la collaboration avec lesparents (partenariat), avait apportédes changements positifs. Les avissont partagés (50%-50%). Si les com-mentaires positifs soulignent l'aug-mentation de la fréquence descontacts et leur qualité, ainsi que l'in-térêt et la confiance qui en ressortent,les commentaires négatifs, deux foisplus nombreux, mettent l'accent surla confusion qui existe dans ces rela-tions. Il s'agit d'une part d'une impor-tante difficulté pour les parents àcomprendre le fonctionnement del'école, mais il s'agit surtout d'uneconfusion dans le rôle qu'ils ont à yjouer. Ainsi, certains parents pensentqu'ils peuvent négocier les résultats, –décider des évaluations, des réorienta-tions.

19

explo 7-9

On retrouve aussi le regret d'unabaissement des exigences

et du niveau des élèves lorsque laquestion de la diminution de l'échecscolaire est posée. Près des deux tiersdes avis sont négatifs à ce sujet. Laplupart des commentaires exprimentdes doutes que l'échec ait diminué,affirment qu'il est aussi fréquentqu'avant ou estiment qu'il s'agitd'une illusion due au fait que les exi-gences ont diminué. L'analyse despromotions des années passées (cf.Blanchet 2002) a montré qu'en faitles échecs avaient plutôt tendance àaugmenter. Mais, en raison des dispa-rités importantes entre les établisse-ments, tous les constats sont locale-ment possibles.

L'intérêt des commentaires est denous montrer les satisfactions ou lespréoccupations des enseignants. Al'évidence, le nombre d'échecs n'ap-paraît pas comme un problème, alorsque la baisse des exigences – qui per-met un plus grand nombre de promo-tions – revient très fréquemment.

Le métierLes trois dernières questions concer-nent plus spécifiquement le métierd'enseignant, soit dans les contactsqu'entretiennent les enseignants entreeux, dans les moments où il faut déci-der en commun de la promotion desélèves ou assurer la vie de l'établisse-ment, soit de manière plus généraleet personnelle par l'intérêt que suscitele métier.

La majorité des enseignants(61%) estiment positivement

la manière de décider de la promo-tion d'un élève (tableau de syn-thèse, tableau des tolérances,conseil de classe, conférence desmaîtres). Les commentaires positifssoulignent l'observation plus fine et lavision plus nuancée, plus fidèle à l'élèveque permettent les nouvelles procé-

nombre de promotions ordinaires, etceci dans des proportions telles que lefondement du processus d'évaluation(l'atteinte par tous des objectifs fonda-mentaux) est remis en question.Les avis recueillis à propos desdiverses formes de promotion (ordi-naire, extraordinaire, sous contrat)s'avèrent globalement négatifs (55%)avec un nombre important d'avis trèsnégatifs (20%). Les commentaires rele-vant les difficultés sont trois fois plusnombreux que ceux qui soulignentdes aspects positifs. Par ces derniers,les enseignants disent apprécier depouvoir tenir compte de la situationglobale, de tous les paramètres sco-laires et personnels, ce qui permetplus de souplesse et de liberté. La pos-sibilité de proposer des contrats estrelevée par quelques maîtres, mais ilssont trois fois plus nombreux à souli-gner la difficulté de les mettre enœuvre et de bien les gérer.

Les principales critiques négativesdisent que ces différentes formes depromotion sont trop compliquées etpeu cohérentes, notamment en ce quiconcerne la promotion extraordinairesans condition. Les enseignants men-tionnent aussi souvent leur crainted'une promotion trop facile: tropsimple de réussir même si on a degrosses lacunes, – quelle est la significa-tion des notes au vu du nombre de 3 oude 2 admis? – Certains élèves se sontdéjà rendu compte qu'il suffisait de fairetrès peu pour être promus. Cette inquié-tude a déjà été mentionnée à plu-sieurs reprises.

Au-delà de l'inconfortpersonnel que

peut éprouver l'enseignant obligé dese justifier, un problème plus généralse pose. Le partenariat compriscomme un droit de s'immiscer dansl'école, sans limites clairement défi-nies, risque de la réduire à un super-marché où le consommateur devient roi,ce qui augmenterait les inégalitéssociales: les parents de classes socialeségales ou supérieures à celles desenseignants sont généralement plusdéterminés, connaissent mieux lesdroits de recours, argumentent et écri-vent plus aisément des lettres, peu-vent assumer des frais, etc. La colla-boration avec les parents doitpermettre de renforcer l'autorité del'école plutôt que la fragiliser.Comment faire alors pour que l'ou-verture de l'école ne se traduise paspar une augmentation des discrimi-nations sociales?

La promotionDans le prolongement des change-ments apportés à l'évaluation, diffé-rentes formes de promotion ont aussiété proposées. Entre la promotion etle maintien dans le même degré(redoublement), deux formes de pro-motion ont été introduites dans le butde diminuer l'échec scolaire. Il s'agitde la promotion extraordinaire sanscondition, qui accorde le passage audegré suivant malgré quelques résul-tats inférieurs au niveau attendu, etla promotion extraordinaire souscontrat, qui lie la poursuite normalede la scolarité à la réalisation d'untravail supplémentaire réglé par uncontrat. Cette dernière solutiondevrait permettre de ne pas faireéchouer un élève dont les lacunessont circonscrites à un domaine parti-culier. On a vu ailleurs (Blanchet2000, 2002) que le problème de cesnouvelles formes de promotion estqu'elles ne diminuent pas le nombrede maintiens, mais au contraire le

A l'évidence, le nombred'échecs n'apparaît pas

comme un problème,alors que la baisse desexigences (…) revient

très fréquemment.

20

explo 7-9dures. Cette plus grande souplesse estrendue possible par une vue d'en-semble des résultats de l'élève et la priseen compte de critères humains, et sur-tout par les échanges intéressants quis'effectuent dans le cadre des conseilsde classe, ce qui permet de combinerplusieurs visions pour une décision plusjuste.

Les commentaires négatifsrelèvent au contraire que

cette manière de faire est trop souple,parfois trop arbitraire, – c'est parfoiscompliqué et laisse, dans certains cas,une désagréable impression de «juge-ment à la tête du client». Il est évidentque le fait de prendre en considéra-tion d'autres critères que les notesrend les décisions plus complexes, for-cément plus subjectives (ce qui neveut pas dire injustes), et nécessitel'accord entre les différents interve-nants (intersubjectivité) de manière àéviter les appréciations trop person-nelles. De fréquentes remarques relè-vent la lourdeur de ce dispositif, soncoût en temps et en paperasse.Plusieurs critiques concernent aussi lerôle de la conférence des maîtres danslaquelle beaucoup d'enseignants doi-vent se prononcer à propos d'élèvesqu'ils ne connaissent pas.

Selon que les maîtres adhèrent ounon à cette démarche plus qualitativeet plus complexe, ils ressentiront demanière bien différente le tempsinvesti, l'obligation de confronter lespoints de vue et les responsabilités àprendre au moment de la décision. Siles commentaires négatifs sont les

plus nombreux, l'appréciation glo-bale est cependant positive.

On retrouve la même opposi-tion quand est posée la

question plus générale des contactsprofessionnels entre les enseignants(concertation, travail en équipe,projets d'établissement). Cependant,les avis globaux sont ici très nette-ment positifs (81%). Dans leurs com-mentaires, les enseignants disentapprécier les échanges, la confronta-tion et l'enrichissement général qui endécoulent. La collaboration se concré-tise par un partage du travail de prépa-ration, pour autant que l'on s'entendebien avec les collègues, une meilleuredifférenciation de l'enseignement etdavantage de cohérence dans le choixdu programme.

Enfin, à la question de savoir si toutesces modifications avaient eu unimpact sur l'intérêt pour le métier(plaisir d'enseigner, possibilités deformation), une petite majorité(54%) répond positivement. Les ensei-gnants qui relèvent des aspects posi-tifs apprécient la remise en question etla réflexion qui évite la monotonie etpermet de se renouveler. Les possibili-tés de formation continue sont aussiconsidérées comme importantes.

Pour les aspects négatifs, onretrouve la surcharge,

le stress, les contraintes trop nombreusesqui empêchent certains collègues d'at-teindre les objectifs et génèrent un sen-timent de ne pas bien faire son travail, lafatigue et le travail administratif qui a

énormément augmenté au détriment del'enseignement. La formation continueest aussi souvent citée dans lesaspects négatifs, trop vague et théo-rique, – pas à la hauteur, – trop axéesur les «sciences molles», ne donnantpas assez de vrais outils de travail.Certains parlent même de décourage-ment, de déséquilibre ou de déstabili-sation en raison du flou des repères etd'une reconnaissance insuffisantepour le travail effectué, soumis à tropde changements.

Malgré le nombre plus élevé de com-mentaires négatifs et le ton quelque-fois très vif de certains d'entre eux, ontrouve une majorité (petite, il est vrai)d'enseignants qui restent positifs àl'égard des changements intervenusen ce qui concerne le plaisir d'ensei-gner, malgré les conditions difficiles.

Pour conclure De tous les éléments qui ont été pas-sés en revue, on voit que ceux quisont considérés très positivement onttrait à la structure du système (les dif-férentes voies et leurs ouvertures) ouaux contenus de l'enseignement (lesobjectifs et les projets).

A l'opposé, et pour des raisonsparfois différentes, toutes les

questions touchant à l'évaluation, àla promotion ou à l'échec ainsi qu'àl'efficacité de l'enseignementrecueillent une majorité d'avis néga-tifs. Modifier l'évaluation, c'est chan-ger les relations entre le maître,l'élève et ses parents, c'est changer lamanière dont s'exerce le pouvoir etdont s’entretient la motivation. Laréflexion doit être poursuivie, pru-demment. Dans ce domaine notam-ment, il est indispensable que l’écolesoit confiante dans ce qu’elle est pourêtre efficace… et réciproquement.

Enfin, la plupart des autres questionsn'occasionnent qu'une modeste majo-

… le fait de prendre en considération d'autres critères que les notes rend les décisions plus

complexes, forcément plus subjectives, et nécessitel'accord entre les différents intervenants de manière

à éviter les appréciations trop personnelles.

21

explo 7-9

21

rité d'avis positifs. S'agissant d'idéesmaîtresses de la nouvelle approchepédagogique – la centration sur l'ap-prentissage (évaluation formative etdifférenciation), l'intégration desconnaissances (autonomie), le dia-logue avec les parents – une majoritéplus nette aurait constitué un signeplus encourageant. Les appréciationsmitigées concernant le plaisir d’ensei-gner vont dans le même sens, maisheureusement la collaboration entreenseignants est clairement appréciée.

Le nombre de thèmes sur les-quels les délégués ont eu à se

prononcer montre bien l'importanceet la diversité des changements quisont intervenus. Un très grand effortde formation et de réflexion a étéconsenti dans un canton qui n'avaitpas la réputation d'être ouvert audébat pédagogique et à la remise enquestion qu’imposent les change-ments sociaux. Même s'ils ne font pasl'unanimité, les concepts de différen-ciation, d’évaluation formative, decycles, d’objectifs, etc. constituent unbagage commun, propre à la profes-sion. Sur ces thèmes, le corps ensei-gnant est souvent divisé. L'explora-tion aura fréquemment mis à jour cesavis contraires. Dans ce bilan aussi,un bon nombre de questions séparentles réponses en deux camps de forcesà peu près égales. Il faudra quel'école apprenne à vivre avec cescontradictions. L'illusion de l'unitédans l'opposition à un pouvoir exté-rieur, qu'il soit politique, social (lesparents) ou administratif ne peut suf-fire. Il est probable que plusieurs desproblèmes qui ont été soulevés netrouveront pas de solution acceptablepar une nette majorité. Peut-êtrequ'en étant mieux conscient desdivergences et des raisons qui les fon-dent, on se donne davantage dechances de trouver un terrain d'en-tente. Y a-t-il un autre choix?

Au terme de trois ou de cinqannées d'effort, il existe

manifestement une usure importantedes enseignants. Il s’agit maintenantde distinguer ce qui tient à la fatigueet aux conditions difficiles de départ,et ce qui tient à des causes plus pro-fondes pour lesquelles des correctifsdevront être apportés.

Alex Blanchet,URSP

* Ce terme, comme ceux d'enseignant et demaître, est utilisé de manière générique.

Références bibliographiques

Blanchet, A. (2000). Promotions et réorienta-tions à l’issue de la 7e année exploratoire.Lausanne : URSP.Blanchet, A. (2002). Promotions et réorienta-tions à l’issue de la 8e année exploratoire.Lausanne : URSP.

22

evamarla réussite au terme de la formation.Cette partie de l’étude consiste entrois sous-projets ou modules, etdurera jusqu’en 2004. La responsabi-lité globale en est confiée à M. ErichRamseier, de l’Office de RecherchePédagogique du canton de Berne. Laseconde phase ne devrait pas com-mencer avant 2004, et est en cours depréparation.

Description des trois modules

Module 1 : parcours et réussiteLa réforme de la maturité modifieradicalement l’offre de cours et donneaux élèves de l’Ecole de maturité lapossibilité de choisir certaines disci-plines. Le choix d’une option spéci-fique, d’une option complémentaireet d’un thème de travail de maturitévise à permettre de construire un pro-fil de formation qui corresponde bienaux intérêts et aux futurs projets deformation de l’élève. Le module 1 viseprincipalement à comprendre dansquelle mesure les élèves ont réelle-ment accès aux disciplines qui leurpermettent d’ajuster leurs étudesgymnasiales à leur formation ulté-rieure, et dans quelle mesure lesenseignements prodigués correspon-dent à leurs attentes et à leursbesoins. Les informations serontrécoltées par le biais de question-naires auprès des élèves de la pre-mière et de la dernière année desétudes gymnasiales.

Module 2 : objectifs pédagogiquestransversauxUn des objectifs centraux du nouveauRèglement est de permettre auxélèves de développer des compétencestransversales, c’est-à-dire qui ne sontpas liées à une discipline particulière(par exemple : «structurer sesconnaissances et les exploiter»). Dansce but, l’interdisciplinarité est encou-ragée dans l’enseignement et dans laconduite du travail de maturité. Le Plan

Le Règlement sur laReconnaissance des certifi-cats de maturité (ci-dessous :RRM) a fondamentalementbouleversé la structure desétudes gymnasiales. Surmandat de la Confédérationet de la Conférence desDirecteurs de l’InstructionPublique (CDIP), le projetd’évaluation de la nouvellematurité (EVAMAR) a été missur pied. Il comprend deuxphases successives. La pre-mière phase vise à étudier lamise en œuvre de la réformedans les cantons et les éta-blissements. Dans la secondephase, il s’agira d’évaluer lesacquis des élèves à la fin deleur formation gymnasiale.

Le RRM: un bref rappelL’objectif principal de la réforme de lamaturité est d’ajuster le règlement dela maturité fédérale à la recomposi-tion du paysage scolaire suisse, endictant quelques principes fondamen-taux dans un pays où cantons etécoles disposent d’une large autono-mie de fonctionnement.

L’ organisation de la nouvellematurité s’articule autour de

quatre lignes directrices principales:¨ un nombre relativement élevé de

disciplines fondamentales assu-rent une formation générale dequalité;

≠ un système avec des options per-mettant aux élèves de faire deschoix quant à la composition deleur formation gymnasiale;

Æl’approfondissement d’undomaine d’études grâce auxoptions et au travail de maturité;

Ø l’apprentissage de méthodes detravail et l’exercice du questionne-ment face à l’information.

Dans cette optique, lesélèves de gymnase

suivent maintenant un noyau de dis-ciplines fondamentales, accompa-gnées d’une option spécifique etd’une option complémentaire, quipermettent de personnaliser le profilde formation de l’élève. En outre,chaque élève doit accomplir un travailde maturité, dont l’un des objectifs estde développer l’autonomie et les com-pétences transversales (non spéci-fiques d’une discipline).

EVAMAR : les grandes lignesLe projet EVAMAR découle d’un man-dat conjoint de la Confédération et dela Conférence des Directeurs del’Instruction Publique (CDIP) pourl’évaluation de la nouvelle maturité.EVAMAR s'attachera d'abord à étudierla mise en œuvre de cette réformedans les cantons, et son influence sur

URSP

23

evamard’Etudes-Cadre pour les Ecoles de matu-rité (PECMAT) donne une liste decompétences transversales dont ledéveloppement doit être recherché.

Dans le module 2 d’EVAMAR, uneenquête sera réalisée par question-naire auprès des élèves de terminaleet des enseignants impliqués dans untravail de maturité ou enseignant enterminale. Les questions porteront surla manière dont les compétencestransversales sont développées danschaque discipline, dans des enseigne-ments interdisciplinaires, et dans letravail de maturité. Ces questionnairesdoivent permettre de mieux com-prendre les démarches pédagogiquesmises en place dans cet objectif, etleur perception par les élèves.L’enquête sera menée auprès d’unéchantillon représentatif d’établisse-ments des trois régions linguistiquessuisses.

Module 3 : organisation et développe-ment des établissementsLa mise en œuvre de la nouvellematurité nécessite une adaptation del’organisation des établissements.Leur aptitude à faire face à ce chan-gement radical est importante pour lefonctionnement quotidien de l’écoleet pour ceux qui y travaillent. Lemodule 3 vise à étudier les effets de laréforme de la maturité sur la struc-ture de l’école et sur les conditions detravail des enseignants, en fonctiondes conditions spécifiques à un can-ton ou à un établissement.

L’ étude débutera par un recense-ment des différences réglemen-

taires entre cantons ou entre établis-sements. Suivront des étudesqualitatives préliminaires dans cer-tains gymnases, puis une enquêteexhaustive auprès des directions. Unsuivi téléphonique est prévu auprèsd’un tiers environ des gymnases. Larécolte d’information se terminera

par un travail d’étude de cas appro-fondie, réalisé auprès de 15 à 20 éta-blissements.

Calendrier – organisationLes modules 1 à 3 doivent durer jus-qu’au deuxième trimestre 2004, laprise d’information se terminant à lafin de l’année 2003. Suivra la secondephase du projet, qui doit débuter en2004 et dont la durée n’est pas encoreconnue. Nous nous trouvons donc audébut d’un long processus derecherche impliquant l'ensemble desétablissements secondaires supérieursde Suisse et de nombreuses institu-tions de recherche. Nous espéronsvivement que ces différentes prisesd'informations seront fructueuses, etpermettront d’obtenir une imagefidèle de ce qu’est l’Ecole de maturité.

Joëlle Leutwyler,URSP

24

analyse de pratiques

Burofco

A l'issue de séances d'ana-lyse de pratiques, il a étéproposé aux participantsd'évoquer l'expérience qu'ilsavaient vécue lors de cetteformation. Voici trois textesrécoltés à cette occasion,trois témoignages d'ensei-gnantes et d'enseignants.

A la lecture de ces témoignages, nousavons retrouvé des éléments qui reflè-tent largement les expériences quenous avons vécues avec les ensei-gnantes et les enseignants. Séance après séance, nous avons vules participants, chacun à leurrythme, partager leurs doutes, leursquestions, leurs soucis, leurs réussites,leurs ressources, leurs valeurs, sanscrainte de jugement.En partageant des situationsconcrètes, difficiles, bloquées ouenfermées dans l'urgence du quoti-dien, les enseignants ont pris du reculet se sont ouverts.Grâce aux apports de chacun, leschoses sont devenues moins lourdes,des perspectives d'action, des straté-gies se sont dégagées. Les richessesdes uns et des autres ont été mises envaleur.

lumière, éclairage, prise de conscience. En effet, grâce à l'écoute attentive, activeet sans jugement de collègues, je peuxmettre des mots sur mes actions, mesréactions, mes sentiments face à diversessituations. De plus, la compétence etl'empathie de l'animateur m’apportentles connaissances nécessaires aumoment opportun; il centre les interven-tions, les structure, en dégage l'essentiel,les met en perspective. Nous sommesainsi conduits à dépasser nos blocages,nos lamentations, nous sommescapables d'envisager et de proposer desactions concrètes pour améliorer mêmedes conflits installés de longue date.

Et voilà le merveilleux de l'histoire : çamarche ! Je pense par exemple à unesituation conflictuelle vécue douloureuse-ment par plusieurs d'entre nous avec unélève particulièrement agressif verbale-ment, insolent, malheureux, avec lequelnous n'arrivions pas à entrer en dialogueet dont le comportement a changé radi-calement d'un jour à l'autre, et durable-ment, puisque, aujourd’hui encore, nosrelations sont agréables, constructives;même l'humour et le sourire ont fait leurapparition !

Entre autres éléments, ces témoi-gnages mettent en évidence le rôle del'animateur : sa présence est-ellenécessaire dans un groupe d'analysede pratiques professionnelles ? Desenseignants ne pourraient-ils pas seretrouver «simplement» entre eux ?Son rôle nous semble important, etapparaît comme tel lorsqu'on inter-roge les participants.

Par son attitude, l’animateur peutnuancer ou même suspendre les juge-ments qui paralysent les échanges etretarder l’énoncé de ces solutions«prêtes à appliquer» qui empêchentsouvent d’aller au-delà des appa-rences. C’est ainsi qu’il enrichit lacompréhension d’une situation en lais-sant s’exprimer les différentes percep-

Ce fut aussi l'occasion parfois dereconnaître ses limites et celles del'école, et de les accepter. Choisir ourenoncer est parfois douloureux, maisl'expression de ces choix et de cesrenoncements donne du sens au par-cours professionnel de chacun,décharge des poids inutiles et permetde garder l'enthousiasme.

Le cours d'analyse de pratiquesprofessionnelles m'a été utile

pour résoudre différents problèmes ren-contrés en classe et améliorer la qualitéde mon enseignement ainsi que mes rap-ports avec mes élèves. Je trouve extrêmement important et enri-chissant qu'un tel cours existe et je suistrès heureuse d'avoir eu la chance depouvoir y participer.

A part des cours d’art-thé-rapie, aucun autre

cours de formation continue ne m’aautant aidé pédagogiquement.Pour la première fois, je peux rencontrerréellement des collègues pour partageravec eux mes préoccupations et aborderen toute confiance et simplicité les vraisproblèmes. Je découvre que je ne suis passeul à éprouver des difficultés, et que jepeux sans honte demander de l’aidesans avoir à me plaindre ni à peser surqui que ce soit. J’apprends à mieux mesituer et à relativiser les situations, à sor-tir de mon isolement, à mieux communi-quer. Je réalise que le partage en groupe,sous l’impulsion de l’animateur, révèledes ressources inattendues et que chacuny contribue.

Les résultats sont peut-être peuapparents, mais d’autant

plus profonds et réels ! C’est l’attitudepédagogique fondamentale qui est remiseen question et se renouvelle. Au vu del’évolution actuelle du climat scolaire,c’est précisément le type de cours qu’ilfaudra développer à l’avenir.Pour moi, la caractéristique essentielle ducours d'analyse de pratiques est son côté

25

analyse de pratiques

Forme particulière d’analyse depratique, les séminaires d’écriturede pratiques professionnelles per-

mettent aux enseignants d’enta-mer une démarche réflexive parle biais d’ateliers d’écriture. Unanimateur tente ici de rendre

compte de la démarche par unbref texte qui pourrait être lui-

même une production lors d’uneséance d’un tel séminaire. Nousle publions donc à la suite des

témoignages précédents.

tions qui se font jour dans le groupe. L'animateur facilite la mobilisationdes ressources du groupe, en question-nant, en stimulant les apports, enproposant une synthèse des points devue exprimés. Il permet d'éclairer deséléments laissés dans l'ombre, derepenser le sens attribué à unes i t u a t i o n .P a rfois encore, l'animateur cadre et

Former pour écrire ou écrire pour se former ?

Inutile de trancher, je veux dire oui, deux fois.

Toutes et tous, nous avons été formés pour écrire. Nous avons même fait preuve de compétences particulières. Nous sommes passés maîtres. Aujourd'hui, c'est nous qui formons pour écrire.

Mais bon sang que c'est difficiled'écrire à ses élèves ! A leurs parents !A nos collègues ou à notre directeur. Que c'est difficile d'écrire à propos de

l'écriture et que les lignes semblentlongues jusqu'à pouvoir frapper un

point… et refermer les guillemets.

Ecrire pour la forme.La forme des lettres que les enfants poinçonnent. Dessiner les mots, hiéroglyphes;peser le sens des idées, idéogrammes. Écrire la forme des mots, des phrases; désaccord sur les accords. Les lettres qui déforment les mots; l'émoi et les maux des élèves qui ne respectent pas les formes, moi.

Ecrire pour retrouver la forme. Pour renouer avec le plaisir d'écrire ses espoirs, ses colères et ses valeurs. Écrire pour panser ses douleurs, pour penser ses doutes, pour dépenser ses joies.Ecrire pour jouer avec les lettres, les signes, les couleurs. Écrire pour rire et pour en rire.

Oser écrire.Ecrire pour se former.Ecrire pour coucher sa pratique sur un divan de papier, pour l'écouter et l'observer, pour se souvenir de ses origines, de ses premiers textes, premiers écrits et premiers cris. Ecrire pour prendre de la distance, pour en dire plus, etpour ne pas oublier. Ecrire pour comprendre sa pratique, et pour pouvoir la lire et la relire. Ecrire pour agir sur ce qui a été écrit.

Depuis trois ans, le Burofco propose aux enseignants de tous les degrés de la scolarité obligatoire et post-obligatoire un séminaire d'écriture de pratiques professionnelles. L'écriture est le moyen choisi pour marquer le pas; pour prendre quelquedistance, pour bloquer le flux de l'urgence et rechercher le sens des actions quotidiennes.

Osez écrire, osez vous inscrire !

Pierre-Alain Besençon,formateur Burofco

propose différentes modalités pouraborder une situation décrite, etexplorer de la manière la plus richepossible chacun de ses enjeux.Il veille enfin à une constructioncommune, qui laisse sa place à cha-cun, dans le respect et l'écoute, autravers d'un cadre choisi et assumépar tous les participants. Formé à cesi n t e rventions et extérieur au groupe,

sa position lui permet d'accepterl'agréable comme le douloureux,pour accueillir les émotions qui parti-cipent des prises de décision quoti-diennes des enseignants.

Certes, il n'a pas de baguettemagique. Mais après tout, ce n'estpas ce qui est attendu de lui !

26

formation continueBref rappelLes notes suivantes ne concernentque les ateliers thématiques, uneprestation en relation avec la mise enœuvre d’EVM parmi d’autres (forma-tions négociées et accompagnementde projet, journées pédagogiques…).

Pour l’année 2001-2002, l’offre duBurofco comportait 87 ateliers théma-tiques, pour l’ensemble de la scolaritéobligatoire, selon quatre axes de for-mation : développer la communication,différencier l’enseignement, évaluer lesapprentissages, travailler en équipe.Quatre axes qui bien entendu se croi-sent parfois: le travail en équipe per-met de développer la communicationpour aider à réfléchir sur la différen-ciation, par exemple. Un autre classe-ment permettait de distinguer lesapproches plus particulièrementdidactiques (ateliers souvent destinésà un seul secteur d’enseignement) etles approches transversales, pédago-giques au sens large. Nous y revenonsen conclusion : les évaluations globa-lement si bonnes des enseignantes etdes enseignants s’expliquent peut-être d’abord par ce principe fonda-mental des ateliers thématiques quiimpliquent une participation active desenseignantes et des enseignants durantles séances conduites par la formatriceou le formateur et, selon le type d’ate-liers, entre les interventions1. C’estd’ailleurs dans cette même logiqueque la très grande majorité des ate-liers, de 7 à 20 périodes, comportaitau moins deux séances espacées pourpermettre aux enseignantes et auxenseignants diverses réflexions ouexpérimentations intermédiaires.Principe fortement affirmé, puisqueles formateurs et les formatrices refu-saient en général de réduire leur ate-lier à une journée par exemple.

Bien que nous n’en ayons pas effec-tué le suivi statistique, on signaleraici que les ateliers ont souvent connu

des prolongements révélateurs decette attitude non consommatrice desparticipants : nombreuses ont été eneffet les demandes de prolongationsous la forme d’accompagnements deprojets par le formateur ou la forma-trice de l’atelier, de réunions supplé-mentaires pour confronter des expé-riences pratiques, enfin, lorsque laformatrice ou le formateur était lui-même enseignant, de visites de classedans le cadre du réseau classe ouverte.

On est bien loin ici de l’imageparfois présentée d’une for-

mation imposée, mais proche aucontraire d’une vision dynamique oùla formation continue n’est qu’unmoment dans une progression per-sonnelle.

Remarques sur les évaluationsLes 87 ateliers offerts, présentés etorganisés par les animateurs de for-mation en établissement (AFE) sur lerôle desquels nous reviendrons encore,ont été suivis par environ 3100 ensei-gnants de tout le canton, en majoritédes cycles initial, primaire et de transi-tion. Selon l’esprit de participationévoqué plus haut, l’évaluation essen-tielle d’un atelier se réalise d'abord engroupe, par une discussion claire entreles participants et la formatrice ou leformateur2. Mais il semblait utile(pour les formateurs, pour le Burofco,pour le DFJ…) de fournir à tous lesparticipants une feuille d’évaluationanonyme et identique pour toutes lesformations. On sait que ces formulesd’évaluation, où il s’agit de cocher descases, ne sauraient rendre compte detoute la complexité d’un vécu. Ellesdonnent pourtant une indicationd’autant plus intéressante que lespetites croix un peu réductrices s’ac-compagnaient souvent de remarquesplus étoffées et plus nuancées.

Pour la seule année scolaire dernière,ce sont 2276 formules qui ont été

Au moment où la HEP publieson offre de formation conti-nue, au moment où leBurofco met fin à son man-dat d’accompagnement dela réforme scolaire, aumoment où Deux points : « ouvrez les guillemetssonge à les fermer, il nous asemblé intéressant de rendrecompte d’une brève synthèsedes évaluations fournies parles collègues à la fin d’ate-liers thématiques suivisdurant l’année 2001-2002.Eussent-elles été moinsbonnes, en aurions-nousparlé ? D’autres en tout casl’auraient fait à notreplace… Les notes qui suiventne se veulent évidemmentpas une auto-célébration,même s’il est plus aisé(quoique dans le canton deVaud…) de réfléchir sur lepositif plutôt que de ressas-ser l’échec, mais plutôt uneoccasion de tirer des leçonspour le futur.

Burofco

27

formation continueainsi rassemblées, et qui pourraientsans doute faire l’objet ensuite d’uneétude plus complète3.

Les participants pouvaient exprimerleur opinion sur trois affirmationsproposées :

La formation a globalementrépondu à mes attentes.

À Les apports de la formation sontconformes aux objectifs annoncés.

à Je vois comment exploiter lesapports de la formation dans mapratique professionnelle.

Pour chacune des trois affirmations,choix était donné entre – –, –, + et ++,et la feuille permettait d’ajouter desremarques sur un aspect ou sur l’en-semble de la formation.

Dans le tableau de synthèse ci-des-sous, on peut constater que le cumuldes insatisfactions ne dépasse pas les3%. A moins de considérer systémati-quement comme négatives les non-réponses, ce que rien ne démontre, onest bien obligé de constater que les

tranches les plus négatives peinent àressortir sur le schéma !

Pour la première proposi-tion, quelques réponses

plus détaillées signalent qu’on nevient pas toujours avec des attentesprécises, mais parfois par simple inté-rêt pour un thème. D’autres recon-naissent des attentes «excessives» :j’aimerais toujours avoir toutes les solu-tions… Mes attentes sont souvent tropélevées…

Pour la deuxième proposi-tion, on peut y voir l'ef-

fet du gros travail préparatoire enamont des ateliers, et l’effort tout par-ticulier d’une information préalableaussi précise que possible sur lesobjectifs visés. L’expérience duBurofco a porté ses fruits : rencontreen début d’année entre les formateurset les AFE, qui jouent un rôle décisifde contact entre les participantspotentiels et les formateurs, descrip-tion précise des ateliers dans l’offre, …Tous les enseignants le savent : nos

élèves n’aiment pas qu’on ne fassepas ce qu’on a annoncé, moinsencore qu’on fasse ce qu’on avaitannoncé qu’on ne ferait pas… La for-mation d’adultes n’est pas différentesur ce point : on s’en doutait un peu !Il faudrait bien sûr s’intéresser parti-culièrement aux réponses négatives.Elles ont diminué au cours des annéesd'activité du Burofco, probablementparce qu’elles ont été prises encompte pour un ajustement toujoursplus fin des offres et des attentes !

Mais le plus importanttouche la dernière pro-

position, parce qu’elle concerne lesens même de la formation continue :la traduction concrète des apports del'atelier dans la pratique en classe. Ilest ici utile de réfléchir à la formula-tion de la question, qui avait donnélieu au Burofco à une discussionintense : fallait-il demander simple-ment si les enseignants envisageaientà terme des applications concrètes,ou, de manière plus précise, s’ilsétaient déjà au clair, à la fin de l’ate-

Evaluation «à chaud» des ateliers thématiques, année 2001-2002La formation a répondu

globalement à mes attentes

– – – + ++3 84 866 1266

Les apports de la formation sont conformes aux objectifs

annoncés– – – + ++5 38 659 1475

Je vois comment exploiter lesapports de la formation dans ma

pratique professionnelle– – – + ++7 75 1024 1106

57.1% 39%

3.8%

– – 0.1%– 3.8%+ 39%+ + 57.1%

– – 0.2%– 1.7%+ 30.3%+ + 67.8%

– – 0.3%– 3.4%+ 46.3%+ + 50%

67.8% 30.3%

1.7%

50% 46.3%

3.4%

28

formation continuelier, sur cette exploitation des apportsde la formation? On a choisi cettedernière perspective, qui expliquesans doute, malgré le résultat positifglobalement satisfaisant, le nombreplus grand de collègues qui ontrépondu avec un seul +. Un parcoursdes remarques sur ce point montreque les enseignants étaient conscientsdes difficultés : ça demande une bonnedigestion. Beaucoup de pistes et d’idées,mais on voit tout de même que le cheminsera long pour mettre les choses enplace. J’aimerais venir voir dans votreclasse comment tout cela peut se mettreen place. Aurai-je assez de temps ? Il estpresque trop tôt pour donner une justeévaluation du cours… L’expérience vamontrer jusqu’où je peux exploiter ce quej’ai appris… Ces remarques, parmibeaucoup d’autres, signalent la luci-dité des enseignants, conscients desrisques et des difficultés du «retour surterre» après un atelier jugé stimulant.Elles expliquent aussi les demandeslégitimes de prolongation de forma-tion. Là encore, le parti pris d’ateliersfondés sur la participation active etnon sur la remise clé en main derecettes toutes faites se trouveconfirmé : une réponse trop claire-ment positive à cette dernière propo-sition aurait été à cet égard presqueinquiétante !

En guise de conclusion et d’ouvertureMême si l’on ne dispose pas d’undépouillement aussi sérieux des éva-luations des années précédentes, leconstat du Burofco et des formateursest clair : «l’indice de satisfaction» desateliers s’est amélioré au cours desannées. Pas de miracle pour expli-quer ce constat, mais, au-delà d'untravail intense et d'une réflexionconstante sur les expériences réali-sées, quelques éléments méritent unrappel conclusif.

1 Cf. L’offre d’ateliers thématiques 2001-2002,Les Ateliers thématiques en quatre ques-tions

2 Les formatrices et les formateurs s'en sontd'ailleurs fait l'écho dans leurs propresremarques sur les ateliers qu'ils avaientconduits.

3 On peut signaler ici que la recherche-action menée par Danièle Seguin et ungroupe de formateurs, dont Deux points :« ouvrez les guillemets s’est fait l’écho dansson dernier numéro, a permis d’approcherles représentations de la formation conti-nue chez les enseignants vaudois grâce àl’analyse de longs entretiens dépouillésselon les principes de l’analyse des discoursen sciences humaines. L’approche est icibeaucoup plus modeste, mais ces évalua-tions donnent également une image inté-ressante.

Les formateurs, enseignantseux-mêmes ou extérieurs à

l’école, ont accumulé des expériencesdans le domaine de la formationd’adultes en milieu enseignant: ilsont assuré leur propre formationcontinue !

Les AFE, de l’avis de tous, ontjoué un rôle décisif dans ce

que l’on pourrait appeler dans unlangage économique peu prisé «l’adé-quation de l’offre et de la demande» :connaissant de nombreux forma-teurs, sentant les besoins et les préoc-cupations de leurs collègues d’établis-sement d’une manière infinimentplus fine que ce que l’on obtiendraitpar un sondage, ils ont été le relaisindispensable pour la diffusion desoffres et pour la mise sur pied de for-mations négociées : selon cette jolieformule, ils évitaient que les partici-pants «débarquent de la lune dansun atelier».

Les enseignants, enfin, se sontéloignés peu à peu d’une

ancienne logique du «recyclage» (motqui fait en effet frissonner…) pourentrer dans une perspective derecherche commune et continue oùprennent sens et cohérence, à l’occa-sion notamment d’un atelier, la mul-titude des pratiques professionnellesdéjà expérimentées. Ces 2200 ensei-gnantes et enseignants globalementsatisfaits des ateliers thématiquesl’ont peut-être été parce qu’ils avaientjustement décidé d’y participer, enconnaissance de cause, en touteliberté, et dans la conscience desremises en question permanentesqu’exige notre métier. Ce serait làsans doute le résultat le plus encoura-geant des petits camemberts ici pré-sentés…

Denis Girardet,Burofco

29

formation continue

La rentrée d’août 2002 amarqué la pleine mise enœuvre de la formation conti-nue en HEP : • un Programme 2002-2003

a été distribué à tous lesenseignants,

• le Centre de ressources,qu’il s’agisse de sa compo-sante bibliothèque-média-thèque ou des médias ettechnologies de la commu-nication, accueille ensei-gnants et demandesdiverses,

• des collaboratrices et colla-borateurs de la Section 2sont à disposition des ensei-gnants et des établisse-ments pour répondre àleurs demandes et élaboreravec eux des formationsnégociées.

Rappel ci-dessous des pers-pectives et des grands axesde cette formation continueen HEP.

HEP

Le choix a été fait dans le can-ton de Vaud d’intégrer la for-

mation initiale et la formation conti-nue des enseignants dans une mêmeinstitution. S’affirme ainsi la volontéde faire de la HEP la «maison desenseignants». Cette volonté impliquede créer un lien fort entre ces deuxtypes de formation et d’instaurerentre elles des échanges et des colla-borations. Il ne devrait certes pas yavoir de rupture, puisqu’elles sontfondées sur une même conception dumétier d’enseignant et qu’elles tra-vaillent l’une et l’autre au développe-ment des compétences profession-nelles. Cependant, pour construireune collaboration sur des basesclaires, il est important de bien distin-guer leurs spécificités.

Enseignants acteurs de leur formation continueLa formation continue s’adresse à unpublic d’enseignants confirmés etengagés dans le métier. Leurs attentessont donc particulières et doivent êtreprises en compte par l’institution deformation et par les formateurs. Lesenseignantes et les enseignants serontdonc associés à l’élaboration, à larégulation et à l’évaluation de leurpropre formation continue. De plus,la HEP souhaite que les groupes d’en-seignants, les établissements et lesinstitutions soient le plus souventdemandeurs de formation, afin deprivilégier des formations négociéesdans le cadre de relations de collabo-ration et de construction commune.Même si la HEP propose un pro-gramme, elle ne souhaite pas quecelui-ci favorise une attitude deconsommation, mais plutôt larecherche de parcours de formationcohérents et porteurs de sens pour lesenseignantes et les enseignants.

Dans cette optique, la HEP désireaussi encourager les contacts entre lesdifférents niveaux d’enseignement.

C’est pourquoi les formations dédiéesen priorité à certains destinatairesseront également ouvertes à toutautre enseignant intéressé.

FinalitésFaut-il rappeler la complexité dumétier? L’enseignement requiert eneffet des savoirs et des compétencesmultiples. La HEP quant à elle sou-ligne trois dimensions de la profes-sion qui fondent son offre de forma-tion: le «maître artisan», «l’acteursocial» et le «praticien réflexif».

Comme artisan, l’enseignant maîtriseet exploite les connaissances essen-tielles de ses domaines d’enseigne-ment, en articulant des savoirs théo-riques et pratiques, en intégrant dessavoirs didactiques, pédagogiques,psychologiques et philosophiques. Ses responsabilités d’acteur sociall’amènent à s’investir dans des pro-jets collectifs pédagogiques, culturelsou sociaux, à développer des rela-tions de collaboration avec lesparents et avec l’institution scolaire, àaffronter les devoirs et dilemmeséthiques de la profession.

En tant que praticien réflexif,l’enseignant, seul ou en

groupe, s’efforce d’appréhender plusclairement les effets de son action, lesmécanismes et interactions en cause,et d’offrir aux élèves, dans uneapproche différenciée, des conditionsd’apprentissage toujours meilleures.

Thématiques prioritairesDès lors, les thèmes prioritaires s’im-posent d’eux-mêmes :– apprentissages des élèves (motiva-

tion, analyse des erreurs, régula-tion, différenciation pédagogique,observation, évaluation, préven-tion de l’échec scolaire, …);

– communication et collaborationavec les partenaires, rôle socio-édu-catif de l’école (rôle de l’enseignant

3030

formation continuedans l’accompagnement éducatif,prévention et gestion des conflits,éducation à la citoyenneté, rela-tions avec les parents, entretiens,participation à la gestion del’école…);

– pratiques professionnelles (élabora-tion de séquences didactiques,approche interdisciplinaire, dyna-mique de la classe, projets, analysedes pratiques, travail en équipe).

Des formations de nature diverseUn des rôles essentiels de la HEPconsiste à répondre à des demandeset à des propositions individuelles oucollectives d’enseignants et de cadresde l’école en élaborant avec eux desactions de formation négociée. Ellemet aussi en œuvre des formationssur mandats institutionnels. Elle pro-pose enfin un programme de forma-tion annuel, avec adjonctions pério-diques. Mais, là aussi, qui ditformation ne dit pas forcément cours.

On peut donc distinguer : Les actions de formation négociéesLa HEP met sur pied des formations àla demande d’un groupe d’ensei-gnants, d’un établissement, d’uneinstitution ou d’une région.Dans ce cas, la HEP collabore avec lesdemandeurs afin de mieux cerner lesbesoins et de proposer les réponses lesmieux adaptées en termes decontenu, de dispositif et d’équipe deformation. La HEP privilégie ce typed’actions qui permettent d’inscrire laformation au cœur des établisse-ments, au plus près de l’activité pro-fessionnelle.

Les actions d’accompagnement La HEP met à la disposition des pro-fessionnels de l’école un ensemble deprestations d’accompagnement cen-trées sur leur activité professionnelle,envisagées de manière individuelleou collective. Ces prestations, souples

quant à leur mise en œuvre, peuvents’intégrer dans des modules de forma-tion, les compléter ou être proposéesde manière indépendante. Il s’agit enparticulier, et à la demande des per-sonnes concernées, de :• l’accompagnement de projets indi-

viduels ou collectifs;• conseils (pédagogique ou didac-

tique, documentation, multimédia,organisation de formation, …);

• l’analyse de pratiques profession-nelles;

• l’animation de réseaux;• l’animation d’espaces de rencontre

(cafés pédagogiques, forums, col-loques)

• la mise à disposition de ressourcespédagogiques, documentaires ettechniques;

• la publication de démarches péda-gogiques.

Les actions de formation sur mandat institutionnelLes services de l’enseignement et lesécoles ou institutions de l’enseigne-ment spécialisé peuvent mandater laHEP en vue de mettre sur pied unensemble d’actions de formation per-mettant de faciliter la mise en œuvred’une nouvelle approche pédago-gique ou didactique, ou d’assurer laformation de personnes assumant desfonctions spécifiques au sein del’école.

Un programme de formationLa HEP élabore et propose un pro-gramme de formation permettantaux professionnels de l’enseignementde développer leurs compétences.Il est diffusé auprès de l’ensemble desprofessionnels concernés. Des inscrip-tions individuelles ou collectives sontpossibles.

Un centre de ressources pédagogiquesLes ressources pédagogiques sont défi-nies de manière large comme unensemble de compétences, de serviceset de moyens. Elles sont composées enpremier lieu des compétences des pro-fesseurs formateurs, des chargés decours, des collaborateurs chargés deformation et de l’ensemble des profes-sionnels de l’école. Ces ressources sontaussi de nature documentaire (biblio-thèque–médiathèque) et technique(médias et technologies de l’informa-tion et de la communication). S’yajoutent des ressources financières,permettant de donner des subsides, àtitre individuel ou collectif, pour desformations suivies dans d’autres insti-tutions que la HEP.

L’organisation des actions de forma-tion continue de la HEP consiste àarticuler ces diverses ressources et àen négocier la mise en œuvre. Cettenégociation implique l’ensemble despartenaires, elle est un principe detravail permettant de répondre auxbesoins des professionnels.

Plus généralement la HEP, entant que centre de com-

pétences, participe avec ses parte-naires au développement de réseauxde ressources pédagogiques, sur lesplans régional, cantonal, romand etsuisse. Elle constitue un centre de res-sources pédagogiques (CRHEP) à dis-position des professionnels de l’ensei-gnement, des étudiants et desformateurs de la HEP.

Actuellement, le Centre de res-sources pédagogiques de la HEP estconstitué de deux ensembles distinctssur le site des Cèdres, l’un à l’avenue

Pour construire une collaboration sur des bases claires, il est important

de bien distinguer les spécificités.

31

formation continue

Section 2HEP

de Cour 33 (bibliothèque-média-thèque) et l’autre au chemin deBellerive 34 (éducation aux médias,technologies de l’information et de lacommunication et enseignement spé-cialisé).

La bibliothèque-médiathèque de laHEP propose des ouvrages (et quel-ques moyens d’enseignement) dansles domaines des sciences de l’éduca-tion, de la pédagogie, des didactiqueset de l’enseignement spécialisé. Desbibliothécaires sont à dispositionpour renseigner les étudiants et lesenseignants et assurer un service deconseil et de prêt.

Au Centre de ressources pédago-giques du ch. de Bellerive 34, des col-laborateurs chargés de formationassurent, outre des prestations de for-mation, une permanence de conseilpédagogique ou des accompagne-ments de projets à la demande. Sontà disposition dans les locaux duCentre de ressources à la fois dessalles d’informatique, un local deconsultation de CD Rom et de logi-ciels éducatifs, une salle de vidéo. Uncafé pédagogique, lieu d’échangesentre étudiants, enseignants et for-mateurs, est en cours de création.

Une formation dans la duréeOn le sait, la formation continue estd’autant plus efficace qu’elle se déve-loppe dans la durée. En outre, il estégalement important de prendre encompte les acquis ou les attentes desenseignants et de leur permettre dedévelopper un projet personnel deformation. Sur cette base, la HEP pro-pose une formation continue quis’appuie sur l’expérience et les savoirsaccumulés par le professionnel touten créant les conditions pour laconstruction de nouveaux savoirs etde nouvelles compétences. Elle veutdonc se mettre au service de l’ensei-

gnant dans son projet de formationcontinue à long terme.

C’est dans cet esprit que la HEP s’ef-force de : • fournir des éclairages théoriques, • proposer et organiser des espaces de

débat, • accompagner des actions mises en

œuvre par les enseignants, notam-ment des projets collectifs, dans lecadre des établissements,

• donner son appui au développe-ment de réseaux de collaborationentre enseignants et partenaires del’école,

• instaurer enfin des échanges depratiques.

Les demandes des établissements etdes enseignants dans les prochainsmois, les échos que rencontrera leProgramme 2002-2003, nous permet-tront d’infléchir le cas échéant, d’affi-ner et d’enrichir de toute façon nosoffres de formation, en collaborationavec les formatrices et les formateursde la HEP.

Les lignes ci-dessus résument le document de référence

Formation continue en HEP : principes etperspective (texte intégral disponible sur le

site de la HEP : www.hep.vd.ch)

32

:« Comité de rédaction : Françoise Gavillet,HEP / Alex Blanchet, URSP / Denis Girardet, Burofco

:« Conduite éditoriale : Philippe Lavanchy, chef du SESSFO et Daniel Christen, directeur général de l’enseignement obligatoire

:« Conception graphique : Création Ka

:« Mise en page: Claire-Lise Mottas, URSP

:« Distribution : (10500 ex.)http://www.dfj.vd.ch/pub/pub_INFO_000.ht

Contact pour toute modification d’adressage ou de distribution : URSP : tél. 021 316 36 36 – fax 021 316 36 11e-mail : [email protected]

Dans le cadre des rencontres extraordinaires du Réseau romand d’échanges sur le soutien pédagogique,

le Secrétariat suisse de pédagogie curative et spécialisée (SPC) organise,en collaboration avec le Centre de Ressources

de la Haute Ecole Pédagogique du canton de Vaud,domaine de l’enseignement spécialisé,

une Journée de formation consacrée àl’usage des technologies de l’information et de la communication

dans le soutien pédagogique.

Cette journée de formation se déroulera

le samedi 16 novembre 2002de 9h15 à 16h45, à Lausanne

Préprogramme et renseignements auprès duSecrétariat suisse de pédagogie curative et spécialisée (SPC),

av. du Temple 19C, CH-1012 Lausanne;tél. 021/653 68 77; fax 021/652 67 10.

www.spc.che-mail : [email protected]

Promotions etréorientations

à l’issue de la 8e année

exploratoire

Alex Blanchet, 29 pages

URSP 107/2002

En complément aux analyses qualita-tives effectuées dans le cadre des sui-vis (voir le bilan de l'exploration 7-9en pages 14 à 21 de ce numéro),l'URSP analyse aussi les données sta-tistiques récoltées en fin d'année sco-laire. Il est ainsi possible de suivre lavolée des élèves qui, avec leursmaîtres, explorent les nouvelles dis-positions de l'école vaudoise (EVM).L'analyse des promotions de diffé-rentes natures, des échecs ou desréorientations permet de dégager unétat de situation de l'école au cours decette exploration. Faisant suite à l'étude effectuée à pro-pos des décisions de fin de 7e année(cf. Promotions et réorientations à l'issuede la 7e année exploratoire, AlexBlanchet, URSP, 2000), la présentepublication étudie les décisions prisesune année après (fin de 8e). Les pro-motions ordinaires sont-elles plusnombreuses? Les promotions extraor-dinaires sans condition s'adressent-elles bien à des cas exceptionnels? Lestaux de maintiens et de réorienta-tions permettent-ils de dire quel'échec scolaire est en baisse, commele souhaitent les responsables sco-laires? Les différences entre établisse-ments sont-elles importantes? Pour tenter de répondre à ces ques-tions, les données sont comparées àcelles qui ont été recueillies les annéesprécédentes. Cette vision plus globalede la première année de mise enœuvre des innovations au 8e degrépermet d'approfondir la réflexion surles transformations en cours.

Cette publication peut être obtenue gratuitement en contactant l’URSP par téléphone

(021/316 36 36), fax (021/316 36 11) ou courriel ([email protected]).

Le rapport peut aussi être consulté sur le site del’URSP (www.dfj.vd.ch/ursp).

La création de Deux points : « ouvrez lesguillemets a été liée à la mise en placedu Burofco (et à son budget). Sonsous-titre Revue de formation et d’échan-ges pédagogiques indique bien cettevisée. Dès le départ, l’URSP et leBurofco ont ainsi uni leurs forces pourla conception et l’élaboration des dif-férents numéros, en étant rejoints, aufil des parutions, par toutes les ensei-gnantes et tous les enseignants qui ontaccepté de présenter leurs réflexions etleurs activités.

Le Burofco a terminé ses activités enjuillet dernier. La barque Deux pointscourt encore sur son erre: vous avezdans les mains l’avant-dernière livrai-son de la revue ; le dernier numéro, le19e, paraîtra au printemps prochain.

Et au-delà ?La nécessité d’une revue pédagogiquedans le canton est maintenant recon-nue. Depuis cette rentrée 2002, lesmissions de formation continue et lesprestations en matière de ressourcespédagogiques sont assurées par laHEP. La réflexion est en cours au seinde l’institution sur ses publications àvenir, et un avant-projet de revuepédagogique est en cours d’élabora-tion.

Suite… au prochain numéro.

Françoise Gavillet, HEP

L’avant-dernier