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Dossier pédagogique Le Roman de Renart par la Compagnie Le Cabinet vétérinaire saison 2013/2014

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D o s s i e r p é d a g o g i q u eLe Roman de Renartpar la Compagnie Le Cabinet vétérinaire

saison 2013/2014

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L’œuvre

PrésentationGenèse Du « goupil » au « renard »

Arrêt sur...

Trois extraits : Avertissement du conteurSe taire pour entendreLes manières de Fortune

Des pistes pédagogiques

La production

La Compagnie Le Cabinet vétérinaireLa mise en scène, Edouard SignoletLa distribution

Aller + loin

Fables et satire animaleLes « branches » du Roman de Renart

Contacts

sommaire

En couverture : Roman de Renart, La pêche à la queue.Alléché par l'odeur des anguilles grillées, Ysengrin vient frapper à la porte de Renart qui luifait croire qu'il reçoit des moines. Le loup crédule se ferait bien moine pour en goûter luiaussi. Renart l'ébouillante sous le prétexte d'une nécessaire tonsure, puis le mène au troucreusé dans l'étang gelé où il l'assure avoir pêché le poisson. Un seau avait été laissé là.Renart le noue à la queue du loup et l'invite à pêcher sans bouger. Mais la queue se prenddans la glace ! Avec l'aube viennent des chasseurs qui se jettent sur le loup. Un coup d'épéemaladroit lui tranche la queue. Ysengrin prendra la fuite sans demander son reste.

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Vendredi 28 mars 2014 à 14h Durée 1h sans entracte

PIÉCE DE THÉÂTREPar la Compagnie Le Cabinet vétérinaire

Mise en scène Edouard SignoletCostumes et décors ND

AVECND

Dossier pédagogique réalisé grâce au portail de la Bibliothèque nationale de France :http://classes.bnf.fr/renart/index.htm

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Présentation

Le Roman de Renart est une série de contes médiévaux en langue romane, mettant enscène des animaux pour parodier les récits courtois et chevaleresques.

En effet malgré son nom, cette œuvre n'est pas réellement un roman mais une collectionde récits appelés « branches », écrits par des auteurs anonymes — sans doute des clercs— entre 1175 et 1250. Il existait sans doute une quinzaine de branches au début du XIIIesiècle, qui furent regroupées dans un premier temps ; une dizaine de branches supplé-mentaires vinrent s'y ajouter par la suite. On connaît actuellement trois collections de cescontes, qui diffèrent par le nombre de branches et l'ordre des histoires. Les auteurs, visi-blement très cultivés, puisèrent à toutes les sources de littérature : antique, médiévale,courtoise et épique, ainsi qu'au folklore et à la tradition orale. Leurs préoccupations etleurs dispositions pour l'écriture, très variées, font du Roman de Renart une œuvre dispa-rate.

Cette satire prend divers aspects : parodie des chansons de geste et des romans courtois,mais aussi critique sociale, anticléricalisme et transgression de tabous.

Le succès du Roman de Renart fut immédiat en France, puis en Europe, où il fut abon-damment imité.

Toutes les histoires du Roman de Renart mettent en scène des animaux qui incarnent dif-férents types humains. La multiplicité des interprétations possibles de chacun des animauxcrée un univers complexe et très riche : ainsi Renart, le héros, devenu un mythe, peut-ilêtre vu comme un goupil, un vassal révolté, un seigneur, un clerc, un jongleur ou mêmeune personnification de la ruse et de la méchanceté.

Cette épopée animale est une parodie du monde chevaleresque et courtois, fondée surune observation attentive de la réalité : détails de la vie rurale, féodale ou religieuse. Leshistoires sont souvent prétexte à faire rire des défauts des contemporains, et à dénoncerleurs travers (cupidité, lâcheté, ruse, bêtise, etc.), avec parfois une visée moralisatrice.

À la fin du Moyen Âge le personnage de Renart est si populaire que son nom, écrit avecun T, entre dans la langue française pour désigner l'animal, remplaçant l'ancien terme de"goupil".

Le Roman de Renart fut constamment remanié, coupé, complété depuis la fin du XIIIesiècle : Rutebeuf composa sur son modèle une satire allégorique, Renart le Bestourné, et,plus récemment, Maurice Genevoix en donna une nouvelle version (1958), à laquelle ilajouta un chapitre (le Bestiaire sans oubli, 1971).

l’œuvre

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A savoir :Les langues romanes sont les langues ayant pour origine le latin, développées depuis leMoyen Âge dans les pays européens issus de l'Empire romain, puis étendues à d'autrescontinents.

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Renart en train d'enjôler Chantecler le coq

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Genèse

Des récits animaliers

Le Roman de Renart est issu d'une longue tradition de récits animaliers en latin, fables ourécits exemplaires. Ces fables, familières aujourd'hui encore grâce à La Fontaine, mettenten scène un monde animal pour un enseignement moral qui se double souvent d'une sa-tire sociale et politique. C'est sur ce modèle qu'au milieu du XIIe siècle un moine de Gand,appelé Nivard, rédige un poème en latin de 6500 vers, Ysengrimus, où apparaissent lepersonnage de Reinardus et ses premières aventures.

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Ci-contre : Le Renard et le Chien - Avianus, Fables. Manuscrit latin du Xe siècleDe nombreuses fables inspirées d'Ésope circulent au Moyen Âge. Elles sont écrites enlatin par Phèdre (Ier siècle), Babrius (IIe siècle) et Avianus (fin du IVe siècle). Les fablesd'Avianus sont étudiées par tous les écoliers. Celles de Phèdre, largement recopiées dansles monastères, font l'objet, vers 1175, de deux adaptations en vers latins, qu'on appelle leRomulus. Ces fables, familières aujourd'hui encore grâce à La Fontaine, mettent en scène un mondeanimal pour un enseignement moral qui se double souvent d'une satire sociale et politique.C'est sur ce modèle qu'au milieu du XIIe siècle un moine de Gand, appelé Nivard, rédigeun poème en latin de 6500 vers, Ysengrimus, où apparaissent le personnage de Reinarduset ses premières aventures.

Des clercs anonymes

Moines et clercs s'amusent à filer les aventures du loup Ysengrimus et du goupil Reinardus,les transposant du latin en langage courant – on parle alors le "roman" –, ajoutant desépisodes ou les remaniant à leur gré. Ainsi se constitue le Roman de Renart, c'est-à-direun ensemble de récits en langue romane dont Renart est le héros. Les auteurs, au nombred'une vingtaine, sont des clercs fortement imprégnés de littérature classique latine et néo-latine. Le nom du premier d'entre eux nous est connu : un certain Pierre de Saint-Cloud.

Des recueils d'épisodes

Le Roman de Renart n'est donc pas un roman au sens moderne du terme, mais un en-semble disparate de récits appelés "branches" dès le Moyen Âge. On dénombre 25 à 27branches de 300 à 3000 vers, soient quelque 25000 vers. La plus ancienne brancheremonte aux années 1170, les plus récentes vers 1250. Dès le XIIIe siècle, les branchessont regroupées en recueils, sans ordre ni chronologie, auxquels des effets d'intertextualitéconfèrent une certaine unité.

Parodie des chansons de geste

Les plus anciennes branches du Roman de Renart narrent le long conflit, de type épique,qui oppose le goupil et les autres animaux de la forêt et de la basse-cour – Chantecler lecoq, Tibert le chat, Tiécelin le corbeau, Brun l'ours et surtout son pire ennemi, le loup Ysen-grin. Un prologue en souligne l'originalité : non plus un sujet antique comme le Romande Troie ou l'histoire de Tristan, mais "les aventures et les exploits de Renart" et "la terribleguerre qui l'oppose à Ysengrin."

Critique de la société médiévale

Les branches plus récentes dessinent une société animale organisée, où chaque espèceest dotée d'un nom propre, d'une fonction et d'un trait de caractère. Entouré de sa courde barons, le roi Noble le lion est juste et majestueux alors que la lionne Fière son épouse

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s'avère orgueilleuse et un peu sotte. Ysengrin, aussi fort que bête, assure auprès du roil'office de connétable. Le goupil et le loup s'affrontent comme des seigneurs féodaux.

Renart le Nouvel

À la fin du XIIIe siècle, Jacquemart Gielée reprend les mêmes personnages pour écrireune œuvre d'édification morale, Renart le Nouvel, à la forme allégorique et symboliqueoù le goupil devient l'incarnation du Mal, maître du monde. Renart triomphe et se retrouvefinalement installé au sommet de la roue de la fortune. Il est le démon qui séduit l'huma-nité par ambition.

Anthropomorphisme des personnages

Dans les avatars du Roman de Renart, un certain réalisme satirique l'emporte sur l'imagi-nation comique des premiers récits. Un anthropomorphisme croissant marque cette pro-gression du réalisme. Évoluant dans une société véritablement organisée comme celledes hommes, les héros animaux prennent une forme humaine alors que le corps animalreste très présent dans les premiers manuscrits où les bêtes courent à quatre pattes.

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Renart le Contrefait

C'est la dernière forme prise par le Roman de Renart au Moyen Âge. L'auteur, un clerc dé-froqué, n'a pas voulu faire une imitation mais "contrefaire", c'est-à-dire prendre le masquede Renart pour critiquer la société et dénoncer les vices de son temps. Deux rédactionssont entreprises : l'une entre 1319 et 1322, l'autre, plus importante et d'un style plus assuré,de 1328 à 1342.

Renart consacré par la littérature

Souvent drôles et légers, parfois cruels et mordants, ces récits parodiques connaissenttrès vite un immense succès. Ils sont adaptés dans plusieurs langues européennes, no-tamment en allemand et en néerlandais. Le nom de "goupil" disparaît alors, remplacé parcelui de "Renart" qui entre dans la langue française pour désigner l'espèce animale.

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Du « goupil » au « renard »

Le renard est appelé « goupil », jusqu'au moment où il prend le nom du célèbre héros duRoman de Renart. Déjà considéré comme un animal fourbe et malfaisant par Aristote, parles fables antiques et par l'Evangile, le renard est au Moyen Âge le symbole de la ruse, dela perfidie et de l'hypocrisie : "Le renard est très fourbe et plein de ruse, et il ne suit jamaisun chemin rectiligne. [...] lorsqu'il a faim et qu'il ne trouve pas de quoi manger, il se rouledans la terre rouge de telle sorte qu'il donne l'impression d'être tout ensanglanté, puis ils'étend sur le sol les pattes en l'air comme s'il était mort, il retient son souffle et gonfle lapoitrine en cessant de respirer [...] Les oiseaux [...] s'imaginent qu'il est mort ; ils vont alorsse poser sur lui, mais à ce moment il s'empare d'eux et les mange. Le renard représentele Diable, car celui-ci feint d'être mort pour tromper tous ceux qui vivent selon la chair."(Pierre de Beauvais).

Ci-dessus : Traité de chasse, « Du renard et de toute sa nature »Dans ce traité de vénerie écrit de mai 1387 à 1389, le comte de Foix Gaston Phébus décrittous les animaux à chasser ainsi que les différents aspects de la chasse médiévale. Dansce manuscrit du XVe siècle, le chapitre consacré aux moeurs du renard est illustré d'unepeinture représentant l'animal dans toutes les attitudes de sa vie : sortant de sa tanière,courant, à l'affût, attrapant sa proie, la dépeçant.

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arrêt sur...

Trois extraits

Avertissement du conteur

Maintenant, il faut que je vous raconteune histoire qui vous divertisse,car, je le sais bien, la véritéc'est que vous n'avez aucune envie d'entendre un sermonou la vie d'un saint martyr ;ce que vous préférez,c'est quelque chose de plaisant.Que chacun donc veille à se tairecar j'ai l'intention de vous raconter une belle histoire,et j'en connais plus d'une, que Dieu m'assiste !Avec un peu d'attention,vous pourriez en tirer une leçonfort utile.Certes, on a l'habitude de me prendre pour un fou,pourtant, j'ai appris à l'écoleque la vérité sort de la bouche des fous.Inutile de s'appesantir sur le prologue.Donc, sans plus attendre,Je vais raconter une histoire et un seul bon tourdu maître de l'astuce :je veux parler de Renart, vous le savez bienà force de l'avoir entendu dire.Personne ne peut damer le pion à Renart,Renart dore la pilule à tout le monde,Renart enjôle, Renart cajole,Renart n'est pas un modèle à suivre.Personne, fût-il son ami, ne le quitte indemne.Renart est plein de sagesse et d'habileté,et aussi de discrétion.Mais en ce bas monde personne n'est assez sagepour être à l'abri d'une folie.Je vais donc vous raconter la fâcheuse mésaventurequi survint à Renart.

Texte établi et traduit par Jean Dufournet et Andrée MélineGF-Flammarion, 1985. Tome 1, p. 309-311

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Se taire pour entendre

Si maintenant vous vouliez bien vous taire,seigneurs, vous pourriez entendre,avec un petit effort de mémoire,une partie de l'histoirequi conte comment Renart et Isengrinse firent la guerre à n'en plus finir.Si vous me prêtez une oreille attentive,je suis prêt à vous raconter des choses extraordinairessur Renart qui est le diable en personne.Je suis tout émoustillé, tout excité,à l'idée de vous raconter son histoire ici-même,sans plus attendre,car jamais vous n'avez entendu parler en un si bel endroitde lui ni d'Isengrin le loup.

Texte établi et traduit par Jean Dufournet et Andrée MélineGF-Flammarion, 1985. Tome 2, p. 193

Texte original en ancien français :

Se or vos volïez taisir,Seignor, ja porïez oïr,S'estïez de bone memoire,Une partie de l'estoireSi con Renart et Ysengrin Guerroierent jusqu'en la fin.Se vos me prestés vos oreilles,Ja vos voldrai dire merveillesDe Renart qui est vis maufés:Toz sui espris et escaufésDe Renart dire en tel endroit, Sanz delaiement orendroit,Q'einc n'oïstes en si bon leu.De lui e d'Ysengrin le leu.

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Les manières de Fortune

Il faut être fou pour suivre ses folles pensées :il y a beaucoup de déchets dans les pensées d'un fou.Il faut être fou pour suivre de folles espérances,car le monde entier vit dans l'instabilité.Fortune se joue des gens :les uns montent, les autres descendent,elle élève celui-ci, abaisse celui-là,elle appauvrit l'un, enrichit l'autre.Les manières de Fortunefont qu'elle aime l'un et se fâche contre l'autre ; elle n'est pas l'amie de tous,elle place l'un au-dessus et l'autre au-dessous,et à celui qu'elle met à la plus haute place,au plus sage, au plus valeureux,elle fait un croc-en-jambeun jour ou l'autre.Seigneurs, le monde ici-bas ne nous est que prêté :l'un a peu, l'autre beaucoup,mais le plus fortuné a tant de dettesque les pauvres se retrouvent au-dessus de lui. Quand on emprunte peu, on a peu à rembourseret on vous laisse vivre tranquillement.Quelqu'un est-il aujourd'hui très puissan t?Avant la fin de l'année,il n'aura plus qu'un bien mince pouvoir,il faut que vous en soyez persuadés.Je vous l'assure sans plaisanter :l'on tombe facilement de haut en baset, ma foi, des bas-fonds,on peut remonter sur les hauteurs.

Texte établi et traduit par Jean Dufournet et Andrée MélineGF-Flammarion, 1985. Tome 2, p. 9

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Des pistes pédagogiques

La filiation

En parcourant le sommaire d'un recueil de Fables de La Fontaine, repérez les fables quimettent en scène le renard : quels sont ses compagnons, quel est son rôle, quelle est lamorale ? Est-ce en accord avec ce que vous connaissez du Roman de Renart ?

Lecture d’images

Observez attentivement (décor, personnage, perspective, point de vue) les images ci-des-sous représentant deux scènes de lecture du texte, la première par l'un des auteurs, Jac-quemart Gielée, et la deuxième par un chanoine : que nous apprennent-elles sur le modede diffusion à l'époque ?

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La Compagnie Le Cabinet vétérinaire

la production

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A venir

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La mise en scène, Edouard Signolet

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Note de mise en scène

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La distribution

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Fables et satire animale

Les fables sont de courts récits à visée pédagogique qui prennent le masque animal pourillustrer une vérité morale. Comme les mythes et les contes, les fables font partie du fondscommun de l'humanité, auquel ont puisé écrivains et moralistes. Celles que nous connais-sons proviennent de deux traditions principales : l'une occidentale, grecque puis latine,est issue d'Esope ; l'autre orientale, indienne puis arabe, est attribuée au sage Bidpaï.

La tradition fait d'Ésope le créateur du genre littéraire des fables. Sa vie est mal connue.Grec d'origine phrygienne, Esope aurait vécu au VIe siècle avant J.-C. On dit de lui qu'ilétait bègue et bossu. Esclave au service de plusieurs maîtres, il aurait été affranchi parXanthus, avant de voyager en Afrique et en Orient. Il serait mort à Delphes, précipité duhaut d'un rocher, pour avoir dénoncé les fautes commises par les prêtres d'Apollon. Esope est l'héritier d'une tradition orale : des fables étaient connues bien avant lui.Quelque 240 fables qui lui sont attribuées, mais il est impossible de savoir quelle est lapart de l'inventeur de celle du compilateur.

Etait aussi célèbre une parodie de l'Iliade – la Batrachomyomachie, c'est-à-dire le Combatdes rats et des grenouilles – longtemps attribuée à Homère mais sans doute écrite Vesiècle av. J.-C. par Pigrès d'Halicarnasse si l'on en croit Plutarque.

Les poètes latins reprennent le corpus des Fables d'Esope : Phèdre au Ier siècle après J.-C. ; Babrius, au IIe siècle, qui versifie en grec dans une métrique latine (le vers "iambique"); Avianus à la fin IVe siècle après J.-C. De leurs trois collections dérivent les fables enlatin qui circulent au Moyen Âge.

La tradition orientaleLe texte indien du Panchatantra, un recueil de contes et d'apologues sanskrits attribuésau sage Bipdaï, est à l'origine de la tradition orientale des fables. Des préceptes y sont il-lustrés par des fables qui mettent en scène tout un bestiaire parlant à comportement hu-main. Ces fables indiennes sont traduites vers 750 par Ibn al-Muqaffa' dans une versionarabe destinée à l'éducation morale des princes, le Livre de Kalîla et Dimna, du nom desdeux chacals héros du livre.

Les fables médiévales

En Occident, les fables latines d’Avianus sont étudiées par les écoliers du Moyen Âge.Celles de Phèdre sont largement recopiées dans les monastères et font l’objet, vers 1175,de deux adaptations en vers latins, qu’on appelle Romulus.

La première, qui compte 60 fables, a été rédigée par le chapelain du roi d’AngleterreHenri II Plantagenêt, Walter l’Anglais, pour l’éducation du jeune roi de Sicile Guillaume II.Des moralités à portée générale viennent conclure chaque fable sur un ton sentencieux.La seconde est l’œuvre de l’Anglais Alexandre Nequam : ses 42 fables animalières sontavant tout un outil d’enseignement, destiné à fournir des exemples moraux pour les ser-mons.

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Marie de France

Vers 1180, la grande poétesse Marie de France écrit le premier recueil de fables en françaisà partir du Romulus. Elle est la première à concevoir la fable en tant que genre littéraireà part entière, autonome et vivant, où il est possible de faire œuvre créatrice. Dans ses103 fables, dont un quart est nouveau, Marie de France met davantage en avant la moraleque le récit lui-même.

À sa suite, plusieurs recueils de fables en français sont rédigés et diffusés sous les nomsd’isopets et d'avionnets, adaptations populaires françaises d’après Ésope et Avianus.

Marie de France écrivantRecueil de pièces versifiées en ancien français comprenant les Fables de Marie de France Manuscrit copié à Paris en 1285-1292, enluminé par le Maître de Jean de PapeleuBnF, Bibliothèque de l'Arsenal, Ms. 3142 fol. 256

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Le bestiaire médiéval

Dans le bestiaire médiéval, les mœurs des animaux renvoient à l’Écriture. Les fables utili-sent l’animal comme miroir de l’homme, le mettent en scène dans des histoires qui reflètentla société de manière critique et satirique, et en tirent une morale.

On retrouve une trentaine de fables dans le Miroir historial, une des trois parties du GrandMiroir de Vincent de Beauvais traduit en français par Jean de Vignay en 1332. Certaines,comme "Le corbeau et le renard", sont diffusées par le Roman de Renart, ensemble detextes composés entre 1170 et 1250, inspirés de fables antiques, récits folkloriques ettextes latins tel l’Ysengrinus du moine Nivard (1148).

Le Roman de Fauvel

À la même époque (1310-1314) que le Roman de Renart, Gervais du Bus écrit le roman deFauvel, qui raconte l’histoire d’un âne devenu roi. Véritable pamphlet contre l’ordre établiet contre le roi Philippe le Bel, il décrit un "monde à l’envers" où les hommes se conduisentcomme des bêtes, où le pape se soumet au roi, où les prêtres et les moines sont riches etcorrompus, et où toutes les couches de la société viennent "torcher Fauvel".

La Fontaine et Orwell

Avec Jean de La Fontaine (1621-1695) se poursuit la tradition qui consiste à s’abriter ainsiderrière des animaux pour faire passer une critique du pouvoir et de la société ou énoncerune morale. Dans son introduction aux Fables, il s'inscrit dans cette longue tradition en seréclamant d’Ésope. La Fontaine avait en effet une grande culture classique grecque et latine. Il connaissaitÉsope aussi bien que Kalîla et Dimna. Bien que ses fables étaient dédiées à l’éducationdu Dauphin, le futur roi, La Fontaine a surtout critiqué la société dans laquelle il vivait :"Je me sers des animaux pour instruire les hommes".La fable du Corbeau et du Renard parle ainsi avant tout de la cour du roi Louis XIV où lescourtisans vivaient de flatterie. Tout comme dans le Roman de Renart, les animaux chezLa Fontaine sont un moyen déguisé de critiquer les travers d’une société des hommes.

Renard faisant le mort

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George Orwell (1903-1950) prend lui aussi le masque de l'animal pour dénoncer les uto-pies du XXe siècle : paru au lendemain de la Seconde guerre mondiale, La ferme des ani-maux (1945) brosse le tableau d'une république des animaux, sorte de communautéégalitaire, qui vire à la dictature et l'esclavage.

On trouve aujourd’hui le même procédé dans les bandes dessinées, notamment Mausd’Art Spiegelman.

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Les « branches » du Roman de Renart

Le Roman de Renart est la somme de récits, appelés "branches", composés aux XIIe etXIIIe siècles par des auteurs presque tous anonymes, qui ne se connaissaient que parleurs oeuvres. Les branches sont regroupées en recueils, sans ordre ni chronologie.

Le Roman de Renart n'est pas un roman au sens moderne du terme, mais un ensembledisparate de récits appelés "branches" dès le Moyen Âge. On dénombre 25 à 27 branchesde 300 à 3 000 vers, soit quelque 25 000 vers. La plus ancienne branche remonte auxannées 1170, les plus récentes vers 1250, mais les branches principales sont composéesentre 1174 et 1205. Dès le XIIIe siècle, les branches sont regroupées en recueils, sansordre ni chronologie.C'est un classement des branches arbitraire, qui ne correspond ni a un ordre chronologiquede composition, ni a un ordre rigoureux de succession des épisodes, mais des effets d'in-tertextualité leur confèrent une certaine unité. Leur trait commun est de mettre en scènedes animaux qui, sauf quelques exceptions tardives, éprouvent a leurs dépens la perfidiede Renart. L'élément essentiel est cependant la rivalité de Renart et d'Ysengrin, le loup.

On attribue à Pierre de Saint-Cloud le premier récit en français (appelé branche II), rédigéentre 1174 et 1177. Il ne se nomme pas, mais les auteurs anonymes des branches I et XVIparlent de lui. Ce premier récit se termine par le viol de la louve par Renart. Il remporteun vif succès auprès de toutes les classes sociales. Un autre auteur à l'idée de décrire leprocès de Renart devant la cour de Noble (branche I) : ce récit, fertile en rebondissements,servira de point d'ancrage aux principaux épisodes, Renart multipliant les méfaits maiséchappant toujours au châtiment suprême. Participant de la veine parodique et satirique, cette épopée héroï-comique offre un refletdes institutions et du fonctionnement de la société féodale des XIIe et XIIe siècles. Elledécrit un monde hiérarchisé où règne la violence, où il faut sans cesse se battre pourmanger et survivre. Elle ne ménage pas les représentants de l'Église. Si quelques vilainsapparaissent, la bourgeoisie est à peu près absente et aucun épisode ne se situe dans unmilieu urbain.

Des continuateursÀ la fin du XIIIe siècle, Jacquemart Gielée reprend les mêmes personnages pour écrireune oeuvre d'édification morale à la forme allégorique et symbolique où Renart devientl'incarnation du Mal, maître du monde (Renart le Nouvel, 1288). Plus clairement polémiques et dirigées contre les Ordres Mendiants, deux autres oeuvresdu XIIIe siècle utilisent la forme du Roman de Renart : Renart le Bestourné de Rutebeuf(vers 1261) et le Couronnement de Renart. Au XIVe siècle, enfin, un clerc de Troyes donneune derrière version de Renart : son but est de prendre le masque de Renart pour critiquerla société. Son Renart le Contrefait passe en revue tous les états et accorde une place dechoix à la bourgeoisie.

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