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  • COSYSTMES

    Lapport essentiel de lcologie est sans doute davoir montr que les ensembles de populations existant dans un mme milieu et prsentant entre elles des interactions multiples, telles que relations de cohabitation, de comptition, de prdation, de parasitisme, constituaient avec le milieu o elles vivent des systmes biologiques, les cosystmes , qui demandaient une tude globale. Les cosystmes ont comme tout systme une structure qui doit tre prcise dans plusieurs domaines. Leur flore comme leur faune possdent une composition spcifique particulire, affecte dune variation saisonnire qui caractrise leur structure temporelle. Ces espces vgtales et animales se rpartissent en outre dans lespace en organisant la fois une structure verticale et une structure en plan. Non moins essentielle est la connaissance de la structure trophique, dfinie la fois par la photosynthse et par les relations de prdation, de parasitisme, de saprophytisme et de saprophagisme entre les espces: lcosystme est le sige dun fonctionnement, li bien entendu aux structures spatiale et temporelle, et que caractrisent les flux de matire et dnergie entre ses divers constituants. Il se produit une certaine quantit de matire vivante, la biomasse , qui, par des voies diverses, se transformera en matire organique morte, laquelle sera ensuite progressivement minralise en partie ou en totalit.

    Selon les cas, ce fonctionnement sinscrit dans un tat dquilibre une stabilit , ou au contraire il intervient dans une dynamique volutive de lcosystme dont la composition se modifie au cours du temps.

    Le terme dcosystme a t introduit par Tansley en 1935 pour qualifier lensemble dune communaut vgtale et de son milieu considr comme une unit. Ctait une extension de la notion de biocnose de Mbius (1927) qui ne considrait que les tres vivants. La notion dcosystme sest trouve prcise ensuite par lapproche tropho-dynamique propose par Lindeman (1942), lors de ltude dun lac aux tats-Unis. La biogocnose de Sukatchev (1947) en est un synonyme, au sens restreint dune biocnose homogne vivant dans un milieu homogne.

    Un cosystme peut donc au total tre dfini comme un systme biologique complexe form par les divers organismes vivant ensemble une biocnose dans un milieu donn, et par les lments de ce milieu qui interviennent dans leur existence ce que lon appelle souvent le biotope . Ce fragment de la biosphre constitue une entit relativement autonome par rapport aux cosystmes voisins et dont il est donc possible cest l lintrt essentiel du concept den analyser la structure et le fonctionnement.

    Dans les trois domaines systmiques de la structure, du fonctionnement et de lquilibre, le milieu physique intervient en liaison troite avec la biocnose. Lorsque, cependant, on sintresse principalement au peuplement constitu par les tres vivants, on peut en dgager une image assez claire de lcosystme correspondant, ne serait-ce que par comparaison avec dautres biocnoses prsentes dans des conditions similaires ou dans des conditions diffrentes. Le lecteur pourra, de ce fait, se reporter larticle BIOCNOSE pour tout ce qui a trait aux structures spatiale, temporelle et trophique de lcosystme et mme, pour une part, son volution. Mais le fonctionnement du systme, en revanche, ne saurait tre dissoci du milieu qui apporte, lorigine, tous les lments qui vont constituer la matire vivante, notamment lnergie, leau, le gaz carbonique, les sels minraux, comme les considrations exposes ci-dessous le dmontrent.

  • 1. Mesure du fonctionnement dun cosystmeBiomasseOn appelle biomasse le poids des tres vivants appartenant soit une mme espce, soit un groupe despces (un groupe ou un niveau trophique par exemple), soit lensemble de la biocnose.

    Lestimation des biomasses de ses diffrents constituants donne une vue statique de lcosystme (fig. 1): leur rpartition en niveaux trophiques (cf. COLOGIE, fig. 9) dcrit ainsi quantitativement la structure trophique de lcosystme. Une biomasse peut tre exprime en poids vif; elle est plus souvent donne en poids sec (aprs schage 70 0C par exemple, pour viter les pertes de matire organique quentraneraient des tempratures plus leves). Il est prfrable de la traduire en contenu dnergie, cest--dire en kilocalories ou en joules, pour viter de comptabiliser coquilles et squelettes. Les quivalents nergtiques peuvent tre mesurs avec une bombe calorimtrique, mais il est souvent suffisant dutiliser des tables dj tablies: rappelons qu 1 g de glucides correspond en gros 4,1 kcal, 1 g de protides 4 kcal et 1 g de lipides 9 kcal.

    En cologie aquatique, la biomasse peut tre rapporte une unit de volume, centimtre cube ou mtre cube. En cologie terrestre, elle est gnralement rapporte une surface dtermine en mtres carrs, ou en hectares, ou encore en kilomtres carrs selon ltendue des biocnoses. La figure 1 montre la rpartition des biomasses dans le milieu forestier. Remarquons que la biomasse contient, en sus de la matire organique, une certaine quantit de sels minraux (lments biognes ou autres) que lincinration permet de recueillir sous forme de cendres. Celles-ci sont parfois trs importantes dans certaines phytocnoses qui accumulent de la silice et de lalumine (10 p. 100 de SiO2 dans la matire sche des Equisetum ; 7,1 p. 100 de Al2O3 dans les feuilles de Symplocos spicata ); la phytocnose peut, dans un tel cas, jouer un rle gologique important. Duvigneaud (1964) a cr le terme de minralomasse pour cette fraction de la biomasse qui provient de laccumulation par les plantes dlments minraux puiss dans le sol par les racines.

    Aprs la mort des tres vivants, la matire organique qui les compose subit une dgradation progressive dont les tapes sont souvent difficiles distinguer: cest la litire des feuilles, des branches, des racines, et aussi les cadavres danimaux et leurs djections, puis la matire organique non figure et lhumus du sol. On peut regrouper sous le nom de matire organique morte lensemble de ces substances. Son importance par rapport la matire vivante est trs variable selon les cosystmes et constitue une caractristique intressante du systme.

    Des mesures de biomasses (tabl. 1) ont t faites et continuent dtre pratiques, afin de suivre les effets des mcanismes de dgradation (anthropiques ou physico-chimiques) qui affectent les grands biomes (cosystmes gnraux), puisquelles sont, nous lavons dit, une caractristique essentielle des cosystmes. Elles concernent tout spcialement les vgtaux de ces cosystmes, plus faciles tudier et dun ordre de grandeur en gnral trs suprieur. Quelques donnes existent nanmoins aussi sur les zoocnoses. La biomasse des micro-organismes, en revanche, est fort mal connue car difficile estimer, et par ailleurs de peu de signification par rapport leur activit mtabolique.

    Flux dnergie et productivitLa biomasse ne traduit quun aspect statique dune biocnose, donc dun cosystme. Plus important est son taux de renouvellement , cest--dire la production biologique parfois aussi appele productivit qui lui correspond (tabl. 1). De manire plus gnrale, il convient

  • dtudier les flux dnergie qui traversent les divers compartiments de lcosystme et mme, plus prcisment, tout le rseau trophique. La complexit de ce rseau conduit toutefois le simplifier considrablement, jusqu la reprsentation schmatique extrme que constitue la pyramide des flux dnergie, o ne figurent que les trois ou quatre niveaux trophiques successifs (fig. 2). On peut gnraliser, partir de cet exemple, en rappelant que les autotrophes (vgtaux verts) difient leur matire organique partir du gaz carbonique, de leau, de nitrates, phosphates et divers autres constituants minraux, essentiellement par le mcanisme de la photosynthse que permet lapport nergtique du rayonnement lumineux. Ils constituent le niveau des producteurs P. Les htrotrophes, eux, utilisent la matire organique ainsi forme. Ils sont reprsents par lensemble des animaux, mais aussi par beaucoup de bactries et par les vgtaux non chlorophylliens comme les champignons; ils constituent les niveaux successifs des consommateurs primaires C1 les herbivores et secondaires C2 les carnivores , niveaux auxquels il convient de rattacher les parasites, les dtritivores, les dcomposeurs, les fixateurs dazote.

    Les difficults dune prsentation synthtique des flux dnergie dans un cosystme sont multiples. Il y a dabord le fait que beaucoup despces sont polyphages et que leur rgime alimentaire les place cheval sur deux ou plusieurs niveaux trophiques: cest le cas des omnivores et des dtritivores. Le cas des micro-organismes est particulirement complexe, dabord parce quils se situent aussi divers niveaux et aussi parce que leur taille microscopique nen permet pas ltude selon les mmes techniques que celles qui concernent les organismes de plus grande taille. Aussi sont-ils souvent absents dans les prsentations de flux dnergie, notamment dans les pyramides des flux dnergie. On doit ajouter que les micro-organismes ont avec les autres organismes, animaux et vgtaux, des relations complexes encore mal connues.

    Lorsque les divers tres vivants dun cosystme auront pu tre rpartis entre les niveaux trophiques,on pourra faire apparatre comment se distribue le flux dnergie qui arrive sous forme dnergie radiante en provenance du Soleil.

    Le rayonnement du Soleil comporte de lultraviolet, mais surtout de linfrarouge court (l de 0,78 3 mm) et du visible (l de 0,38 0,78 mm). Ces variations sont pour une part rflchies sur les surfaces de lcosystme (albdo) et en grande partie utilises sous forme de chaleur pour combler le dficit thermique et vaporiser les grandes quantits deau de transpiration ncessaires au bon fonctionnement des vgtaux. Le rayonnement visible fournit la lumire indispensable la photosynthse (radiations photosynthtiquement actives, RPA).

    Du rayonnement lumineux total (LT) qui arrive sur un cosystme, seule une fraction LU frappe la vgtation et peut tre utilise (fig. 3), mais de cette fraction une partie seulement sert rellement lassimilation chlorophyllienne, lautre partie, LNA (lumire non assimile), intervenant dans lchauffement des plantes et leur transpiration. Le rayonnement utilis par lassimilation chlorophyllienne (LA) correspond ce que lon appelle souvent production primaire ou photosynthse brute, PB. Elle sert la synthse de la matire vivante production primaire nette ou photosynthse nette PN , qui est conjugue la respiration des plantes R0 (ou RA, respiration des autotrophes).

    Les rapports PB/LU et PN/LU sont des rendements physiologiques de photosynthse brute et nette tandis que PB/LT et PN/LT sont les rendements cologiques de la production primaire. Cest sans doute le rendement PN/LT qui rend le mieux compte du rle des producteurs primaires dans lcosystme.

    Au sein de chaque niveau de consommateurs, on trouve ensuite (comme pour toute population), lnergie ingre I, lnergie non assimile NA, lnergie assimile A, elle-mme rpartie en production P du niveau considr et nergie R de la respiration ce niveau. Dans

  • chaque niveau, comme pour une population, le fonctionnement est galement caractris par les rendements P/I, P/A et A/I, considrs cette fois lchelle de lensemble du niveau trophique. La reprsentation graphique utilise propos dune savane africaine dans la figure 4 fait bien apparatre les diffrences importantes de rpartition des flux dnergie qui existent entre deux niveaux trophiques successifs dun cosystme.

    Dun niveau trophique au suivant, il convient de tenir compte de la part non utilise du niveau suprieur, surtout importante pour la production primaire (NU1), le plus souvent ngligeable dans les niveaux de consommateurs (NU2). On peut alors dfinir les rendements des transferts dnergie dun niveau au suivant. Ij /Ij -1 reprsente ainsi le rendement de lnergie apporte un niveau trophique donn j , par exemple I2/I1 pour le passage des consommateurs primaires (herbivores) aux consommateurs secondaires (carnivores), ou I1/LU pour le passage de lnergie ingre par les consommateurs primaires lnergie lumineuse utilise par les producteurs chlorophylliens. Aj /Aj -1 est le rendement dassimilation un niveau trophique donn et Pj /Pj -1 le rendement de la production ce niveau: P2/P1 pour les consommateurs secondaires, P1/PN pour les consommateurs primaires. Cest cette succession des valeurs de P dans les niveaux trophiques successifs que traduit graphiquement la classique pyramide des flux dnergie (fig. 2 droite).

    Dautres rendements sont aussi employs par certains auteurs, ce sont les rendements dutilisation qui font intervenir deux lments non homologues de niveaux trophiques successifs. Tel est, par exemple, le rapport A2/P1 de lnergie assimile par les consommateurs secondaires (carnivores) lnergie que reprsente la production des consommateurs primaires (herbivores).

    Parmi les points dlicats des problmes de flux dnergie dans les cosystmes, il convient de remarquer le fait que les quantits non assimiles NA ne sont pas perdues. Elles seront utilises par dautres organismes, coprophages, dtritivores et surtout micro-organismes dont le rle na pu jusquici tre pleinement pris en compte dans les calculs. De mme les quantits dnergie dites non utilises NU sont en fait utilises le plus souvent par des micro-organismes dcomposeurs. Ce nest que sous leur forme respire (RH = respiration des htrotrophes) que les nergies sont effectivement perdues par lcosystme sous forme de chaleur.

    On appelle parfois productivit nette de lcosystme PNE la diffrence entre la productivit dassimilats par photosynthse (PB) et tout ce qui est perdu par respiration tant des plantes (RA) que des animaux et micro-organismes (RH):

    Dans un systme en quilibre (climax), la biomasse produite est gale la quantit

    consomme, dcompose et minralise, do: PNE = 0.Le systme nest toutefois pas toujours en quilibre, et une partie de lnergie fixe est parfois

    stocke dans lcosystme. Dans une fort en croissance, par exemple, un incrment de bois sajoute chaque anne la biomasse initiale; dans une toundra, la litire de matire morte ne cesse de saccrotre cause de lactivit rduite des dcomposeurs; dans les tourbires, un humus peu dcompos ajoute chaque anne une couche de tourbe celles des annes prcdentes. La proportion de matire organique morte par rapport la matire vivante peut ainsi devenir parfois considrable. Cest des phnomnes de ce type que nous devons les stocks de lignite, de houille et de ptrole qui se sont accumuls au cours de lhistoire de la Terre.

  • 2. Caractristiques de divers cosystmes continentauxcosystmes dulaquicolesLes cosystmes dulaquicoles comprennent les milieux limniques, stagnants, et les cours deau. Les cosystmes limniques continentaux lacs et tangs ont t parmi les premiers tudis, car leur relative pauvret en espces facilite ltablissement des liens trophiques; par ailleurs, les eaux stagnantes constituent des entits bien dlimites.

    Dans les cosystmes limniques, la production primaire, dorigine planctonique, apparat en gnral plutt faible, infrieure celle des cosystmes terrestres environnants. Cest plus spcialement le cas, bien entendu, des lacs oligotrophes de montagne.

    Une seconde caractristique des cosystmes aquatiques dominante planctonique est le fort rendement cologique de croissance des organismes qui constituent le niveau des consommateurs herbivores. La cause en est double: dune part, un taux dassimilation lev en rapport avec la faible proportion de cellulose dans le phytoplancton et inversement sa forte teneur en protines; dautre part, le fait que les consommateurs sont tous des htrothermes, quils soient crustacs, rotifres ou mme poissons, et jamais des vertbrs homothermes. Le phytoplancton tant presque compltement consommable par les herbivores planctoniques, cela diminue limportance des chanes partant des dtritivores dont le rendement est toujours faible ainsi que la quantit de matire vgtale non utilise, cest--dire en fait dcompose par les micro-organismes: la proportion de matire vgtale ainsi consomme ltat vivant atteint 90 p. 100 dans le cas du phytoplancton dun lac oligotrophe contre bien moins de 10 p. 100 dans une fort.

    La faible part de la vgtation non utilise jointe au fort rendement cologique de croissance des herbivores conduisent dans les milieux aquatiques des rendements de transfert levs du niveau des producteurs celui de leurs consommateurs: ces rendements atteignent ainsi des valeurs de lordre de 0,05 0,15 et parfois mme davantage (fig. 2). En revanche, entre le niveau des herbivores et celui des carnivores, les transferts dnergie ne sont pas trs diffrents de ce quils sont dans les cosystmes terrestres: les exemples tudis les rvlent compris entre 0,05 et 0,22. Mais, loriginalit des milieux limniques rapparat si on considre le taux de renouvellement de la biomasse, qui fait intervenir le facteur temps dans les transferts dnergie. Dans le milieu aquatique dominent, en effet, des espces de petite taille coppodes, rotifres, cladocres par exemple et aussi des organismes unicellulaires, notamment le phytoplancton, dont la vie moyenne est particulirement courte. Il en dcoule que le renouvellement de la biomasse est nettement plus rapide dans les cosystmes aquatiques que dans les cosystmes terrestres. Le fait est particulirement net pour le niveau des producteurs. L, comme nous lavons signal, un rle souvent dominant revient aux organismes microscopiques du phytoplancton, dont la dure de vie ne dpasse pas quelques heures en priode chaude et, mme en priode froide, nexcde que rarement une ou quelques semaines. Les taux de renouvellement annuels P/B atteignent alors et dpassent mme des valeurs de plusieurs dizaines.

    On est loin videmment des valeurs observes pour les plantes des milieux terrestres, qui sont de lordre de 1 pour les herbes, et descendent souvent bien moins de 0,1 pour les arbres, correspondant ainsi des dures de vie moyenne de lordre de 1 an plus de 30 ans, respectivement.

    Le taux de renouvellement lev de la biomasse des producteurs se traduit par une pyramide des biomasses base relativement troite par rapport celle des cosystmes herbacs et plus encore forestiers. Il ne faut toutefois jamais perdre de vue que les considrations qui prcdent

  • ne concernent que les lments visibles et facilement dnombrables des biocnoses. Les micro-organismes, quil sagisse des bactries ou des protozoaires, ne sont le plus souvent pas pris en compte, ce qui, videmment, fausse grandement la conception de niveau trophique. Dans la ralit, ces micro-organismes jouent pourtant un rle essentiel ds le niveau des consommateurs primaires: les protozoaires, en se nourrissant de phytoplancton, et surtout les bactries, en utilisant la matire organique et la cellulose des vgtaux. Le rle de ces dernires sera donc dautant plus important que les vgtaux comporteront une part plus grande non ou difficilement assimilable par les herbivores, ce qui est le cas essentiellement des vgtaux terrestres et, en milieu aquatique, des macrophytes.

    De fait, toutes les remarques faites jusquici se rapportent essentiellement aux milieux limniques o la production primaire est due au phytoplancton. Tel nest plus le cas lorsque la profondeur est trs faible et que des macrophytes, tels que nnuphars, massettes, roseaux, prennent une part importante dans la production primaire. La situation se rapproche alors de celle des milieux terrestres herbacs, car ces vgtaux ne sont que trs partiellement consomms par les herbivores. La production primaire de tels cosystmes est plus leve que celle des cosystmes dominante planctonique, mais les chanes de dtritivores deviennent prpondrantes, avec un mauvais rendement cologique de croissance et un taux de renouvellement faible si lon ne considre pas les bactries.

    On peut remarquer que les cosystmes deaux courantes tant soit peu rapides, qui ne permettent pas le dveloppement du plancton et qui, par ailleurs, peuvent recevoir, en provenance des cosystmes terrestres environnants, des apports importants de dbris vgtaux riches en cellulose et en lignine, se comportent un peu, certains points de vue, comme des chanes de dtritivores.

    Savanes tropicalesLes milieux de ce type, caractriss par la prsence dun tapis herbac dense parsem de formes ligneuses, arbres ou arbustes, occupent dans le monde de vastes superficies. Elles sont lies au monde tropical o alternent deux saisons contrastes, lune pluvieuse, lautre sche. Leur structure et surtout leur fonctionnement dpendent troitement de la quantit de pluie et de sa rpartition saisonnire.

    Dans la savane prforestire de Lamto, en Cte-dIvoire, milieu herbac parsem darbres, darbustes et de palmiers, la biomasse peut atteindre en matire sche (MS) 66 t/ha, dont 42 piges, tandis que la production primaire est de 28,5 t/ha/an (114 Z 106 kcal/ha/an) dont 15 piges. Bien entendu, la part relative des herbes et celle des arbres et des palmiers est trs diffrente selon quil sagit des biomasses ou des productions: avec une biomasse bien moins importante que celle des plantes ligneuses, les herbes assurent une production bien suprieure.

    Le schma de la figure 4 traduit les flux dnergie dans les organismes non microscopiques des niveaux trophiques successifs de cette savane.

    De la production primaire P = 114 Z106 kcal/ha/an, seule une fraction (I = 62 Z 106 kcal/ha/an) est consomme par les animaux. Une autre fraction est brle chaque anne par le feu de brousse (8 t/ha/an soit 36 Z 106 kcal/ha/an) et une troisime partie (NU = 16 Z 106 kcal/ha/an) semble non utilise. Il est apparu galement que lnergie ingre par les consommateurs primaires ntait que pour une trs faible part rellement assimile: plus de 90 p. 100 est rejete sous forme dexcrments (NA = 54 Z 106 kcal/ha/an).

    Ce faible rendement dassimilation est li la dominance des vers de terre. Plus avant dans le fonctionnement, au niveau des consommateurs secondaires C2 et C3 les carnivores , les

  • rendements dassimilation A/I et de production biologique P/I deviennent au contraire excellents (fig. 5).

    On a montr par ailleurs que les micro-organismes consommaient dans le sol 54 Z 106 kcal/ha/an soit lquivalent de 13 t/ha/an, et 12 Z 106 kcal/ha/an, soit environ 3 t/ha/an au-dessus du sol (dbut de dcomposition des feuilles). Cette activit (NU) correspond prcisment lnergie en apparence non utilise et lnergie non assimile par les herbivores (NA). Dans les savanes plus sches, au Sahel par exemple, la production primaire diminue progressivement. En revanche, la part relative consomme par les organismes non microscopiques est plus importante, par suite sans doute dun ralentissement des phnomnes de dcomposition bactrienne li la scheresse. Les fourmis et les termites jouent un rle de plus en plus essentiel, tandis que les vers de terre perdent de leur importance.

    FortsForts tempres caducifoliesCe sont les cosystmes les plus tudis, tant en Amrique du Nord (rablire, tuliperaie) quen Europe (chnaie, htraie). Dans les forts tempres caducifolies, la phytomasse totale atteint en fin de dveloppement (climax) des valeurs de 250 450 t MS (matire sche)/ha (fig. 1 et tabl. 1). Les racines en reprsentent de 15 20 p. 100 et le poids des feuilles reste de lordre de 3 4 t MS/ha.

    La productivit brute PB, qui se mesure par les mthodes sophistiques de lcophysiologie, est approximativement le double de la productivit primaire nette PN. Cette productivit a t mesure en de nombreux endroits; lors de loptimum de croissance de la phytocnose, elle est de lordre de 11 16 t MS/ha/an, ce qui correspond 45-70.106 kcal/ha/an, et diminue ensuite progressivement.

    Au cours dune anne, la priode de vgtation (phnophase feuille) nest que de 4 6 mois et la productivit primaire se partage ainsi en : une fraction qui meurt et tombe, surtout lautomne, sous forme de chute de litire utilise par des dtritivores; un apport aux consommateurs herbivores ou phytophages; une exportation de matriaux divers, surtout importante lorsquil y a exploitation par lhomme (claircies ou coupes blanc); une contribution laugmentation de la phytomasse ligneuse: cest lincrment de la fort souvent exprim en mtres cubes de bois fort (jusqu 7 cm de diamtre) par les forestiers occidentaux. Cet incrment est de 6-13 t MS/ha, soit 3 8 m3 lhectare de bois fort pour le htre et environ 5 m3 pour le chne, dont la densit est plus forte; pour des bois lgers croissance rapide comme celui de certains rsineux, lincrment peut tre bien plus important: il atteint jusqu 20 m3 pour lpica.

    La fraction de la production nette PN entrant dans le rseau de consommation par lintermdiaire des herbivores et phytophages est gnralement trs faible; les vertbrs sont peu importants: 5-7 kg MS/ha pour les mammifres, 1-2 kg MS/ha pour les oiseaux. Les invertbrs peuvent tre bien plus abondants, surtout lors dannes dinvasion par des chenilles dfoliatrices qui affectent profondment la fixation dnergie: leur biomasse peut alors passer de 10-20 kg MS/ha (valeur normale) 75-150 kg MS/ha, ce qui correspond une destruction de plus de la moiti de la production foliaire. Lentomofaune circulante, qui atteint une biomasse de 15-20 kg MS/ha, est compose dinsectes (surtout diptres) commenant leur vie ltat de larve dans la litire et dans lhumus (rles sapro-, rhizo- ou zoophages). Tous ces animaux nutilisent

  • quune partie de la phytomasse consomme difier leur biomasse (productivit secondaire); le reste est perdu sous forme de fces et dnergie respiratoire.

    La chane des dcomposeurs lemporte totalement sur celle des consommateurs. En effet 50 75 p. 100 de la productivit primaire nette donnent chaque anne une litire qui entre dans le rseau de dcomposition. De cette litire une fraction, lente se dcomposer, subsistera pendant un nombre plus ou moins grand dannes, sajoutant la litire prexistante; une autre fraction, livre aux dtritivores et aux transformateurs, deviendra de lhumus; le restant sera reminralis (recyclage) par des bactries minralisatrices.

    La biomasse des bactries nest que de quelques kilogrammes de matire sche par hectare, mais leur productivit est particulirement forte, car elles ne cessent de se multiplier en mme temps quelles manifestent les activits les plus diverses dcomposition, nitrification, dnitrification, fixation de lazote, reminralisation. Les animaux dcomposeurs de la pdofaune sont avant tout des bactrio et mycophages pturant les peuplements de micro-organismes dvelopps dans et sur la litire.

    Forts de rsineuxLes grandes forts borales toujours vertes de lhmisphre Nord, adaptes des climats souvent difficiles, nont en zone de taga quune productivit mdiocre. Rodin et Basilevic donnent, pour les forts de lU.R.S.S., les valeurs moyennes suivantes : biomasse en tonnes par hectare = 100 en taga du Nord, 260 en taga centrale et 330 en taga du Sud; productivit nette par hectare et par an, respectivement 4,5 t, 7 t et 8,5 t.

    Cependant, la productivit varie fortement avec lge et, dans la taga du Sud, elle peut passer par un pic de 20 t/ha/an pour les forts en pleine croissance sur bon sol, la moyenne tant de 14 t/ha/an.

    Lpica a t et est encore aujourdhui la principale essence de reboisement des zones peu fertiles de lEurope occidentale. Ici, protges par lhomme, les plantations monospcifiques dpicas (cosystmes culturaux) ragissent bien mieux un climat plus favorable que celui de leur pays dorigine, et leur production nette atteint 15-20 t/ha/an, mme sur des sols mdiocres.

    Les pins (Pinus) , grce leur grande frugalit, colonisent des sols trs pauvres. Ainsi, la principale usine bois de lEurope occidentale est la fort de pins maritimes (Pinus pinaster) rtablie dans le triangle des landes de Gascogne. Entre 24 et 28 ans, laccroissement des troncs atteint de 5 20 m3/ha et la production globale est de lordre de 14 t/ha/an.

    Forts tropicalesLes forts tropicales, particulirement les forts tropicales humides (forts sempervirentes ou rain forest), sont caractrises par la luxuriance de leur vgtation dans laquelle se superposent une srie de strates; les arbres les plus hauts peuvent dpasser 50 m.

    Une solide tude dcosystme forestier tropical humide a t ralise en Malaisie Pasow. La biomasse pige dpasse 430 t (matire sche) par hectare, dont 346 t pour les troncs et moins de 8 t pour les feuilles. La production primaire nette peut tre estime 26,7 t/ha/an, dont 13,7 concernent les parties ligneuses et 7,4 les feuilles. La respiration de ces vgtaux est intense, par suite de la temprature constamment leve, mme la nuit: elle reprsente lquivalent de 50,5 t/ha/an, ce qui permet destimer la production brute de lcosystme 77,2 t/ha/an. Lcart considrable entre production brute et production nette est caractristique des milieux tropicaux, et tout spcialement des forts sempervirentes.

    Sur cette production, la quantit consomme vivante est excessivement faible: de lordre de

  • 0,3 t/ha/an seulement, ce qui signifie que lessentiel de la matire vivante forme est utilis aprs sa mort par des dtritivores et plus encore par des micro-organismes dcomposeurs. Quant la grande faune des forts, si elle peut tre trs diversifie, elle nest reprsente que par de trs faibles densits dindividus de chaque espce. De plus, elle est en grande partie dans les strates suprieures (singes, oiseaux), l prcisment o se trouvent les feuilles vivantes qui sont le point de dpart des chanes trophiques.

    ToundrasTout loppos des forts tropicales, les toundras sont des formations vgtales trs basses localises dans les rgions les plus froides du globe. Les formes vgtales dominantes y sont des lichens ou des mousses.

    La production annuelle est trs faible, infrieure 3 t/ha/an, et le temps de renouvellement de la biomasse relativement trs long pour des plantes herbaces de petite taille. La vitesse de dcomposition est galement trs lente.

    La vie animale, surtout endoge, et pour une part aquatique, dans un sol gel une grande partie de lanne, mais imbib deau, est reprsente surtout par des dtritivores dont laction est complte par celle des micro-organismes dcomposeurs qui ont, par suite du froid, une action trs ralentie. De fait, le cycle saisonnier est trs accentu et marqu par une longue phase dinactivit hivernale. Quelques vertbrs suprieurs peuvent survivre, la faveur de lhomothermie, mais leur importance quantitative est trs faible, quils soient herbivores ou carnivores.

    Prairies des zones tempresContrairement aux cosystmes forestiers, la prairie est destine dvelopper la productivit secondaire des grands herbivores. Relativement apprciable, celle-ci sera exporte sous forme de viande, de lait, de cuir, de laine. Ce sont pourtant encore ici les dcomposeurs et reminralisateurs (lombrics, bactries, champignons) qui profitent le plus dune productivit primaire o la part des racines est trs importante.

    Cette prairie peut devenir permanente, ou faire partie dun systme de rotation dans lequel elle est priodiquement retourne pour faire place des cultures. La rcolte de lherbe surtout gramines et lgumineuses se fait de deux faons: la fauche (prs foin) ou la dent des animaux (ptures), ou parfois des deux combines.

    La productivit primaire dpend du nombre de fauches ou du nombre de passages du btail; en fonction de ce nombre, elle augmente dabord, pour diminuer ensuite (surpturage destructeur). Elle est en gnral de 5 15 t MS/ha/an pour les parties ariennes, mais irrigation et engrais peuvent, dans quelques cas, lamener 25 t. La productivit des racines est difficile dterminer, celles-ci se renouvelant tous les 1, 2, 3 ans ou plus, selon les espces; de plus, les racines sont des organes rgulateurs, participant la repousse de lherbe aprs chaque coupe, grce aux matires stockes pendant les intervalles. La phytomasse des racines est de lordre de 10 t MS/ha et lon peut en estimer la productivit 5 t/ha ou mme davantage.

    Les animaux pturants ne sont sur le terrain que pendant la priode de vgtation active (180-225 j/an); leur productivit dpend de la quantit et de la qualit de lherbe (digestibilit, protines digestibles, oligolments); elle dpend aussi du nombre de passages (division de la prairie en parcelles). On a tabli que, dans de bonnes conditions, une vache laitire de 500 kg mangeant 70 kg dherbe (14 kg MS par jour) produit 15 l de lait par jour; un buf lengrais de 350 kg accrot son poids vif de 1 kg/j en mangeant 45 kg dherbe (9 kg MS) par jour.

    Le rendement et la saison de pturage peuvent tre augments par lutilisation de foin et

  • daliments plus concentrs. Ces aliments fournis ltable sont souvent produits la ferme par des cosystmes annexs la prairie permanente: prs de fauches, luzernires, cultures de crales ou plantes tubercules, etc. Cela nous introduit dans un type dcosystme plus complexe, lagrocosystme.

    AgrocosystmesAu sens large, lagrocosystme est le plus ancien cosystme tudi et mis en place par les hommes du milieu rural. Une fois ralise la domestication des plantes et des animaux, il devenait vital pour les paysans dobtenir les meilleurs rendements de leur terre, en assurant les assolements ncessaires, la conservation de lhumus et le recyclage des nutriments minraux par lquilibre agro-pastoral .

    La fort joue aussi un rle dans la valorisation des terres agricoles (matriaux divers, bois de feu, haies pare-vent, pturage sous fort, etc.), de sorte que lon peut parler, avec Kuhnholz-Lordat, dquilibre sylvo-agro-pastoral . Il sagit de maintenir, suivant les rgions, des proportions quilibres cologiquement de forts (silva ), de pturages (saltus ) et de cultures (ager ); la localisation topographique peut tre aussi trs importante: les forts sur les crtes rgularisent le cycle de leau et empchent linondation des vallons, o les apports rguliers dalluvions fertiles forment des sols favorables aux cultures; les pentes, o le travail de la terre est plus difficile, peuvent servir de pturages, condition den viter la surcharge.

    On voit apparatre ici les notions de paysage cologiquement fonctionnel, dcopaysage, voire dcorgion.

    Ayant envisag dj les cas de la fort et de la prairie pture, nous considrerons ici lagrocosystme dans son sens troit de champ cultiv. Une partie trs importante de la productivit primaire est exporte, non seulement par la rcolte des grains, tubercules ou autres organes recherchs, mais souvent aussi sous forme de paille, feuilles ou dchets divers servant lalimentation animale, la litire dcurie, au compostage, etc. Cest dire que la restitution au sol de matire organique et de nutriments minraux est faible, ce qui ncessite une importation compensant les matires premires perdues si lon veut viter une dgradation et un appauvrissement progressif du sol; aujourdhui, le traditionnel fumier fait une place de plus en plus grande aux engrais chimiques.

    Pour fixer les ides, la productivit primaire nette dun bon champ de bl, sur sol sablo-limoneux fertile, est de 16,7 t MS/ha, dont 6,5 t de grains, 2,2 t de glumes et glumelles, 5 t de tiges, 2 t de feuilles, 1 t de racines. Les 6,5 t de grains et 7,5 t de pailles (glumes, tiges et feuilles sches) sont exportes; 2,7 t de bas de tiges, racines et feuilles sont restitues, sous forme dteule abandonne sur le terrain aprs la coupe.

    Dans les pays dvelopps, la productivit des cultures est trs fortement augmente par limportation de grandes quantits dnergie fossile (ptrole, gaz naturel) ncessaire (machines agricoles, transports, irrigation, engrais, pesticides, amnagement des installations, etc.).

    Lexemple de lcosystme champ de mas aux Etats-Unis, tudi par Pimentel et ses collaborateurs (1973) montre que, en moyenne, le champ de mas reoit, pendant la priode de vgtation, 5,1.109 kilocalories dnergie solaire totale, par hectare; 1,26 p. 100 de cette nergie est convertie en production (PN1), de mas total, soit 64 360.103 kcal, correspondant 16 t MS/ha/an; environ le tiers de cette production correspond aux grains: 20 432.103 kcal (5,1 t MS grains/ha/an), reprsentant en tout environ 0,4 p. 100 de lnergie solaire reue (fig. 6). Une telle productivit ne peut tre obtenue quavec lintervention, de trs nombreux niveaux, de quantits importantes de combustibles fossiles:

  • nergie de tractorisation (e, f, g, k): plus de 3 000 .103 kcal/ha; nergie de fabrication des engrais (h), surtout azots: en tout 2 641.103 kcal/ha; nergie de fabrication des pesticides (j); nergie dirrigation (i): en moyenne, 85.103 kcal dnergie sont ncessaires pour amener leau et la distribuer sur 1 hectare de culture de mas; nergie de schage car le grain mr de mas hybride qui contient 13 p. 100 deau risque de moisir et il faut utiliser 300.103 kcal dnergie pour le scher; nergie lectrique pour les besoins les plus varis de la ferme (b, c): 775.103 kcal pour 1 hectare de champ cultiv; apport de graines slectionnes (mas hybride) pour plantation, soit une importation dnergie dans le systme de 157.503 kcal; nergie humaine (d): aux tats-Unis o un ouvrier agricole travaille 40 heures par semaine en consommant 21 770 kcal/semaine et o il passe, pour toute la saison, 22 h sur 1 hectare de champ de mas, cela reprsente 12,3.103 kcal dnergie alimentaire.

    Ces divers apports dnergie reprsentent plus du tiers de lnergie solaire fixe sous forme de grains (1 kcal dnergie fossile pour produire 2,8 kcal de grains). Dans les cas, trs frquents, o les grains de mas servent lalimentation des animaux domestiques, il faut ds lors compter 3 kcal dnergie fossile pour produire 1 kcal de viande par lintermdiaire de 9 kcal de grains.

    Si lon considre, par ailleurs, que lalimentation humaine est la fois dorigine vgtale et dorigine animale, cest--dire que lhomme se situe la fois au niveau des herbivores et celui des carnivores et quentre ces deux niveaux la perte dnergie est de 100 1, on voit daprs lexemple prcdent quelle conomie nergtique peut reprsenter pour lhumanit de demain un rgime de plus en plus vgtarien. De fait, les populations qui doivent vivre des densits considrables, comme cest le cas des habitants des deltas indochinois par exemple, ont depuis toujours une alimentation essentiellement vgtale.

    3. Contrle du fonctionnement linverse dun organisme, un cosystme ne possde pas dorganes de contrle dont le rle serait analogue celui des systmes neuro-endocrinien et immunitaire des vertbrs, dont la fonction est dassurer la fois lintgration du fonctionnement des organes effecteurs, la constance du milieu intrieur et ladaptation optimale aux conditions changeantes de lenvironnement. Lcosystme nest donc pas une sorte de superorganisme install dans un ensemble de conditions physiques qui lui conviennent. La cohsion de sa composante vivante est entirement assure par la complmentarit dintrts (en termes de valeur adaptative, ou fitness ) des espces qui la composent. Celles-ci sont associes sous leffet de deux types de contraintes, les unes externes, les autres internes.

    Les contraintes externes constituent ce que lon appelle couramment les facteurs limitants du systme, dont ils dterminent la fois les limites spatiales et la structure temporelle; ils influencent aussi le taux de renouvellement de ses composantes vivantes. Lidentification des principaux facteurs limitants des cosystmes est ancienne, bien antrieure la naissance de lcologie en tant que discipline autonome. Dans les cosystmes terrestres, les rles capitaux de la temprature et des prcipitations, de laltitude et de la latitude, ont t reconnus ds le dbut du XIXe sicle; les lignes isothermes, les isohytes et les courbes de niveau interviennent ce titre dans tous les travaux des biogographes. La lumire ou la teneur en oxygne et en sels minraux jouent un rle essentiel dans les milieux aquatiques. La restriction spatiale et

  • lisolement gographique ont depuis longtemps t impliqus en tant que variables influenant la richesse spcifique et par consquent la structure trophique des biocnoses.

    Lanalyse des modalits daction de ces facteurs limitants exognes est cependant bien loin dtre acheve. On a, par exemple, trop utilis jusquici les moyennes annuelles de la temprature ou des prcipitations, et trop souvent sous-estim les valeurs extrmes. Quelle que soit la latitude, en effet, les variations saisonnires des paramtres climatiques majeurs ont de profondes rpercussions sur la structure et la dynamique des cosystmes. Limportance des variations journalires des mmes variables na pas reu non plus toute lattention quelle mrite, en particulier sur les hautes montagnes tropicales. Dans les phnomnes dinsularit, limportance de la distance des sources possibles de migration et des phnomnes dextinction spontane na t reconnue que trs rcemment.

    ct de ces contraintes exognes, la part des contraintes endognes est difficile apprcier dans un cosystme naturel mature dont lhomostasie est gnralement excellente. En revanche, ds que lon considre des successions dans le temps (sries biocnotiques progressives ou rgressives) ou certaines situations exprimentales (agrosystmes), il devient possible dentrevoir limportance de certains mcanismes internes de rgulation. Les uns ont pour fonction de limiter la taille des populations spcifiques, de faon viter quelles ne dpassent la capacit de charge du milieu: tel est le cas des facteurs sociocologiques de rgulation de la natalit et de la mortalit dpendant de la densit, dont lexistence semble certaine chez un certain nombre de vertbrs. Quand ces facteurs ne jouent plus, gnralement du fait dune intervention humaine, une pullulation de consommateurs peut aboutir la destruction de leur propre habitat: la dforestation quasi totale de certains parcs nationaux africains conscutive une surpopulation par les lphants est un exemple connu de tous.

    Dautres mcanismes internes de rgulation sont interspcifiques et ont pour effet dempcher ou de limiter la comptition un niveau trophique donn. Telle parat tre la fonction de ces substances chimiques scrtes par beaucoup de vgtaux et qui peuvent empcher la croissance despces concurrentes (phnomnes dantibiose et dalllopathie). Certains agents pathognes animaux (des virus aux hmatozoaires) qui ne causent que des accidents mineurs chez leurs htes habituels, mais peuvent entraner une mortalit trs leve chez des formes voisines non sympatriques, ont peut-tre un rle cologique voisin (myxomatose, herps simien, certains trypanosomes, etc.). Des phromones animales, en particulier celles exerant un pouvoir rpulsif, sont peut-tre ranger aussi dans cette catgorie.