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IUFM DE BOURGOGNE CONCOURS DE RECRUTEMENT : professeur des écoles EDUQUER A L’INTERCULTURALITE A TRAVERS L’ETUDE ET L’ECRITURE DE CONTES Projet mené auprès d’élèves marocains (français langue étrangère) Cycle 3 BOURGUIGNON, Magali DIRECTEUR DE MEMOIRE : Rachel GASPARINI Année 2005 Dossier N° 05_04STA00513

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IUFM DE BOURGOGNE

CONCOURS DE RECRUTEMENT : professeur des écoles

EDUQUER A L’INTERCULTURALITE A TRAVERS L’ETUDE ET L’ECRITURE

DE CONTES

Projet mené auprès d’élèves marocains (français langue étrangère)

Cycle 3

BOURGUIGNON, Magali

DIRECTEUR DE MEMOIRE : Rachel GASPARINI

Année 2005 Dossier N° 05_04STA00513

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Eduquer à l’interculturalité à travers l’étude et l’écriture de contes

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SOMMAIRE

Page(s)

INTRODUCTION 4

PREMIERE PARTIE : Contes et Interculturalité 5

1 / L’INTERCULTURALITE 5

A / Définition de l’interculturalité 5 1) L‘interculturalité 2) Les différents sens de la culture 3) Distinction entre l’interculturel et le multiculturel

B / Les enjeux de l’interculturalité 6 1) Constats sur la société : problèmes liés à l’interculturalité 2) Evolution de la société et interculturalité 3) Agir auprès des jeunes

C / Vers une éducation à l’interculturalité ? 7 1) Les fonctions de l’éducation 2) Eduquer à l’interculturalité selon les âges 3) Objectifs et exemples de démarches interculturelles

2 / LE CONTE 10

A / Définition du conte 10 1) Le conte 2) Typologie de contes 3) Structures de contes

B / Les enjeux du conte 11 1) Les différentes fonctions du conte 2) Intérêts du conte pour les enfants 3) Légitimité du conte à l’école

C / Démarches pédagogiques à mettre en œuvre à l’école 13 1) Préconisations des Instructions Officielles 2) Types de contes à envisager selon les cycles 3) Projets possibles

3/ CONTES ET INTERCULTURALITE 15

A / Liens entre le conte et l’interculturatité 15 1) Invitation aux voyages 2) Symbole du particularisme et de l’universel 3) Transversalité

B / Légitimité de l’enseignement de l’interculturalité à travers les contes 16 1) Préconisations des Instructions Officielles 2) Une manière plus subtile d’éduquer à l’interculturalité 3) Le pouvoir de la littérature

C / Démarches pédagogiques possibles 17 1) En fonction des cycles 2) Démarches envisageables 3) Le cycle 3 en question

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DEUXIEME PARTIE : Etude de contes 19

1 / PREPARATION DU PROJET 19

A / Présentation du corpus 19 1) Le langage des animaux 2) Sélection de quatre contes 3) Structure des contes

B / Séquence envisagée 20 1) Remarques sur l’expérience déjà menée en France 2) Objectifs et compétences 3) Progression de la séquence sur l’étude de contes

C / Liens avec les Instructions Officielles 22

2 / MISE EN ŒUVRE DU PROJET 23

A / Présentation du stage au Maroc 23 1) Ecole Ihsane 2) Profil de la classe 3) Conditions de travail

B / Séance 1 24 1) Déroulement de la séance 2) Objectifs et compétences travaillées 3) Analyse de la séance

C / Séance 2 27 1) Déroulement de la séance 2) Objectifs et compétences travaillées 3) Analyse de la séance

3 / BILAN, TRANSPOSITION POSSIBLE EN FRANCE ET PROLONGEMENTS 29

A / Bilan des deux premières séances 29

B / Transposition possible en France 29

C / Prolongements 30

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TROISIEME PARTIE : Ecriture de contes 31

1 / PREPARATION DU PROJET D’ECRITURE 31

A / Comment mettre en place un projet d’écriture ? 31 1) Objectifs 2) Méthodologie 3) Projets d’écriture envisageables à partir des contes

B / Séquence envisagée 32

1) Sélection d’un projet d’écriture envisageable 2) Objectifs et compétences 3) Progression de la séquence sur l’écriture de contes

C / Liens avec les Instructions officielles 34

2 / MISE EN ŒUVRE DU PROJET D’ECRITURE 36

A / Adaptation nécessaire 36 1) Temps disponible pour le travail sur l’écriture des contes 2) Nature du travail effectué en parallèle 3) Modification de la séquence

B / Séance(s) menée(s) 37

1) Une heure supplémentaire avec le groupe 2 2) Déroulement de la séance (du mercredi) 3) Analyse de la séance

C / Analyse des productions écrites 38 1) Du point de vue du schéma narratif 2) Du point de vue des aspects culturels 3) Du point de vue des temps du récit

3 / BILAN, TRANSPOSITION POSSIBLE EN FRANCE ET PROLONGEMENTS 40

A / Bilan 40

B / Transposition possible en France 40

C / Prolongements 41

CONCLUSION 41 BIBLIOGRAPHIE 42 ANNEXES I

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INTRODUCTION

L’ethnocentrisme, les préjugés, les stéréotypes sont le propre de l’homme. Ces

processus sont normaux, inhérents à l’appartenance à une société et à des groupes. Ils reposent sur la conviction individuelle que l’unique point de vue acceptable est le sien propre.

Cependant, ces processus conduisent à des conflits culturels revêtant de plus

en plus d’importance. A l’heure où les relations entre les cultures sont inévitables, comment empêcher une « guerre des cultures » ? L’école a-t-elle un rôle à jouer ?

S’agit-il d’éduquer au non racisme ? Je ne pense pas que l’école ait vocation

à enseigner la négation des valeurs mais plutôt à enseigner des valeurs humanistes. L’école doit-elle donc éduquer à l’interculturalité ? Cet enseignement est-il légitime ? Les enfants sont-ils capables psychologiquement de s’ouvrir au monde ?

Comment transmettre et développer le goût pour la connaissance des autres

cultures ? A partir de mon propre vécu, je me suis demandée si la littérature ne pouvait pas être un moyen de relever ce défi de la société.

Je pense que rien ne remplace les voyages et les expériences humaines. Mais dans mon cas, mes lectures ont aussi accentué cette envie de découvrir d’autres cultures et m’ont permis de les accepter.

Mais, dans le cadre d’un enseignement, quel genre littéraire serait

particulièrement propice à l’éducation à l’interculturalité ? Le conte ? Quelles sont ses spécificités ? Quels seraient les projets possibles à mettre en place ?

Je vais tout d’abord tenter de répondre à toutes ces questions dans une

première partie. Ensuite, je présenterai et analyserai la démarche d’éducation à l’interculturalité que j’ai tenté de mettre en place dans des classes de CM2 d’une école marocaine, dans le cadre d’un stage en responsabilité de trois semaines. La deuxième partie portera donc sur l’étude de contes et la troisième partie sur l’écriture de contes par les élèves.

Ce dossier permettra donc de : - savoir si des activités pédagogiques en classe autour de l’étude et

l’écriture de contes peuvent contribuer à ce que les citoyens de demain soient plus tolérants face aux différences culturelles ;

- lister leurs conditions de mise en oeuvre ;

- voir un exemple concret de projet réalisé auprès d’élèves.

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PREMIERE PARTIE

Contes et interculturalité 1 / L’INTERCULTURALITE Avant de voir quels sont les enjeux de l’interculturalité et s’il est possible d’éduquer à l’interculturalité, il est tout d’abord nécessaire de définir ce mot et d’apporter des précisions sur des concepts voisins.

A / Définition de l’interculturalité

1) L‘interculturalité

L’interculturalité se définit comme étant des relations entre différentes

cultures. Ces relations réciproques (sens même du préfixe « inter ») peuvent reposer sur plusieurs processus : des processus d’interaction interculturelle, des processus de perception de l’autre et des processus de transfert et de réception entre cultures. L’interculturalité suppose que les partenaires de cultures différentes soient conscients du fait que l’autre est vraiment différent et qu’ils reconnaissent réciproquement leur altérité. Le concept de culture se trouve donc étroitement lié aux concepts d’ « identité », de « perception de soi » et de « perception de l’autre ». Les perceptions de soi et de l’autre peuvent être objectivées de façon empirique mais relèvent surtout de l’auto- et hétéro-qualification.

De plus, la démarche interculturelle est de mettre en interaction des cultures différentes, posées par principe comme égales. L’interculturalité ne conduit aucunement à une hiérarchisation des cultures (qui est une forme de racisme).

2) Les différents sens de la culture

Le terme « culture » est au centre de la définition de l’interculturalité. Cependant, dans la langue française, ce mot est polysémique. Il convient donc de rappeler brièvement ses différents sens. Le dictionnaire « Le Robert » nous propose la définition suivante :

- « 1. action de cultiver la terre pour la production de végétaux » ; ce premier

sens fait référence à une plantation ; - « 2. a) développement de certaines facultés de l’esprit par des exercices

intellectuels appropriés : ensemble des connaissances acquises » ; ici il est fait référence à l’éducation, la formation et on emploiera l’adjectif « cultivé ») : culture philosophique, scientifique, générale, de masse ;

- « 2. b) ensemble des aspects intellectuels artistiques d’une civilisation : culture occidentale, orientale ». L’adjectif correspondant à ce sens est « culturel ». Dans un sens didactique, la culture est un « ensemble des formes acquises de comportement dans les sociétés humaines : nature et culture, choc des cultures » ;

- « 2. c) culture physique : développement méthodique du corps par des exercices appropriés et gradués : éducation physique, gymnastique ».

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Dans le cadre de ce mémoire portant en partie sur l’interaction entre cultures, le sens à donner au mot « culture » est donc le « 2. b) » du Robert, c’est-à-dire les relations réciproques entre les civilisations.

3) Distinction entre l’interculturel et le multiculturel

Il convient également de préciser en quoi l’interculturel se distingue du multiculturel. En effet, voici ce que propose le dictionnaire « Le Robert » pour les préfixes « multi » et « inter » :

- multi : « élément qui signifie qui a plusieurs, beaucoup de… ». Le contraire est

donc mono, c’est-à-dire un seul ; - inter : « élément, du latin inter entre, exprimant l’espacement, la répartition ou

une relation réciproque »

Le multiculturel qualifie quelque chose qui a plusieurs cultures tandis que l’interculturel suppose notamment la relation entre ces cultures. Par exemple, la France est à la fois multiculturelle, de par la présence de cultures différentes, et interculturelle, de par la coexistence et donc les relations entre ces cultures.

Dans leur ouvrage intitulé « La pluralité culturelle dans les systèmes éducatifs européens » 1, Andrée Collot, Guy Didier et Béchir Loueslati ajoutent que le multiculturel produit « des effets spontanés dans lesquels on n’intervient pas » et « divise sans se soucier d’unifier » tandis que l’interculturel « vise à construire une articulation entre les porteurs (des cultures), afin de corriger les inconvénients de leur coexistence et, si possible, de les faire bénéficier d’avantages attendus ».

B / Les enjeux de l’interculturalité

Après avoir défini le terme « interculturalité », il semble maintenant intéressant

de voir comment cette interaction de cultures différentes se passe. Qu’est-ce qui divise les cultures ? Quelles sont les conséquences de ces divisions ? Est-il nécessaire de les combattre ? Qu’est-il possible faire pour tenter d’y remédier ?

1) Constats sur la société : problèmes liés à l’interculturalité

La division culturelle est possible selon plusieurs principes universaux légitimes : la localité, la religion et la classe sociale. Ces trois principes divisent les citoyens. Cela s’exprime de différentes manières, notamment par l’intolérance, le racisme, le non-respect des biens et des personnes, etc. On constate en effet que se produisent, aux échelles nationale et internationale, des actes malveillants à l’encontre de lieux de culte (mosquées, synagogues, cimetières juifs…), de personnes de confessions et d’origines différentes (à l’image notamment de la population maghrébine de Corse), de sexualité différente (agressions de personnes homosexuelles), etc., et que de nombreuses idées relèvent de la discrimination (à l’image de la montée de l’extrême droite en France).

1 (Documents, actes et rapports pour l’éducation, CRDP de Lorraine, 1993, 326 pages)

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2) Evolution de la société et interculturalité

A partir de ces constats sur l’existence de conflits liés au non-respect des différences, comment ne pas être sceptique vis-à-vis de l’avenir sur ce point précis ? En devenant Européens, notre champ culturel est de plus en plus élargi. Il est donc possible de se demander, à l’heure où l’Union Européenne n’est plus un projet mais véritablement une réalité économique, politique et sociale, avec à ce jour vingt-cinq pays membres, si les citoyens européens sauront vivre ensemble, en respectant les cultures de chacun. De plus, l’Union Européenne n’est pas isolée. Les interdépendances à l’échelle internationale font que la problématique revêt un caractère mondial. La même question se pose en tant que citoyens du monde. Il me semble qu’éviter à tout prix une « guerre des cultures » est l’un des défis à relever au cours du XXI ème siècle. Il est donc nécessaire de combattre toutes les formes d’intolérance. Mais comment contribuer à ce que les citoyens prennent conscience de la richesse de la diversité culturelle et soient ouverts au dialogue des cultures ?

3) Agir auprès des jeunes

Les jeunes d’aujourd’hui sont les citoyens de demain. C’est vers eux que doit se tourner la société pour que l’interaction entre les différentes cultures se passe bien, dans un climat de respect mutuel, de tolérance. Mais comment sensibiliser les jeunes au-delà d’un simple rappel à la loi contre la discrimination (raciale, religieuse, etc.) ? Comment privilégier la multiplication des situations au cours desquelles les citoyens de demain sont amenés à rencontrer et éprouver la pluralité des codes et des regards sur le monde ? L’école, en tant qu’interlocutrice privilégiée des jeunes, semble être l’institution qui peut jouer ce rôle unificateur et qui peut combattre les idées reçues et les stéréotypes tout en oeuvrant à l’intégration des jeunes étrangers.

C / Vers une éducation à l’interculturalité ? Si l’école doit prendre en compte cette tendance à la division avec tous les

problèmes de société que cela engendre, peut-elle envisager d’éduquer les enfants à l’interculturalité ? Les enfants sont-ils psychologiquement capables de prendre conscience de la diversité des cultures ? Que peut mettre en œuvre l’école pour éduquer à l’interculturalité ?

1) Les fonctions de l’éducation

L’éducation institutionnalisée (régie par l’Etat) a, selon Andrée Collot, trois

principales fonctions : éducation en tant qu’outil de qualification, outil de démocratisation et outil de développement personnel et de transmission des valeurs. De plus, plus que jamais, l’école doit préparer les élèves à devenir non seulement des citoyens français (échelle nationale), mais également des citoyens européens et des citoyens du monde. Or, toujours d’après A. Collot, « la société, diversifiée et interdépendante, nécessite un système de valeurs et un cursus scolaire moins ethnocentrique et nationaliste ». L’école a donc un rôle important à jouer en transformant les conflits latents (ou non), en compréhension. C’est une fonction pédagogique de l’école. Elle doit développer l’ouverture d’esprit, le respect des autres cultures et la prise de conscience des valeurs communes qui sont indispensables à un cadre démocratique et à la mise en place de dispositions sociales respectueuses des droits de l’homme.

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2) Eduquer à l’interculturalité selon les âges

Si l’école doit nécessairement agir et éduquer à l’interculturalité, l’enfant est-il prêt psychologiquement à être ouvert au monde qui l’entoure et comment l’école doit-elle s’y prendre avec les enfants ?

Selon Piaget, dans « La psychologie du développement », l’enfant ne fait

aucun effort pour se placer du point de vue de l’Autre, c’est l’égocentrisme enfantin. Cette conception de Piaget repose sur des procédés partant d’un modèle adulte conventionnel et observant l’enfant en fonction d’un tel système normatif. Pour Edouard Pichon, opposé à cette vision, si on pose l’égocentrisme comme une absence provisoire (parce que non apprise ou non éprouvée) du système normé de l’adulte, on se rend compte que l’enfant, loin d’être intellectuellement incapable de « quitter son point de vue de vivant animé d’intention », convient des propositions de l’éducateur, dans une dynamique d’échange et de dialogue. Il dépendrait donc de l’éducateur de transmettre les bases morales du respect de l’autre, l’enfant étant capable de les « recevoir ».

Mais cette transmission est-elle possible à tout âge ? A moins de 7 ans, les attitudes ethnocentriques de l’enfant culminent. C’est le

paroxysme du favoritisme envers le groupe d’appartenance et des préjugés à l’encontre des minorités étrangères. Cela s’explique du fait, qu’à cet âge, les processus affectifs prédominent. Que mettre en œuvre pour éviter l’enracinement des préjugés ? A cet âge, la démarche interculturelle est d’apprendre à distinguer ses états émotionnels, à les nuancer et à confronter une multiplicité de points de vue distincts. Au-delà de 7 ans, c’est le cognitif plutôt que l’affectif qui prédomine. L’enfant abandonne certains préjugés, par contre il y a un renforcement des influences extérieures. Comme démarche interculturelle, il convient alors d’analyser les situations qui le confrontent à autrui, d’analyser les images que les groupes se donnent les uns des autres, apprendre aux enfants à centrer leur attention sur les similitudes qui rapprochent les membres des groupes étrangers et sur les différences qui opposent les individus d’un même groupe et enfin, apprendre à reconnaître que deux modes de pensées distincts (dont le leur) peuvent être valables. La démarche interculturelle doit donc varier selon que l’enfant ait plus ou moins de 7 ans.

3) Objectifs et exemples de démarches interculturelles

Les objectifs de l’éducation à l’interculturalité sont le respect de la diversité, c’est notamment rester soi-même à condition de ne pas imposer à l’autre ses valeurs, la non-hiérarchisation des cultures, toutes les cultures sont égales malgré leurs différences, elles sont adaptées à un contexte écologique, économique, technologique et social, l’universalité des cultures, c’est-à-dire concevoir l’unité dans la diversité humaine, unité qui doit prendre en compte la diversité puisqu’elle ne peut se construire uniquement dans la projection de valeurs propres à un seul groupe, et l’évolution des cultures, une culture étant en construction permanente, toujours en devenir, perméable et soumise aux influences des autres cultures.

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L’éducation à l’interculturalité peut se faire autour de deux axes majeurs :

- le premier consiste à faciliter l’acceptation de l’autre en agissant notamment sur les attitudes envers la différence, tout d’abord en faisant admettre que les différences présentées sont légitimes en elles-mêmes, ce qui pousse à remplacer les jugements de valeur stigmatisant par l’écoute bienveillante, puis en mettant l’accent sur les différences non seulement des étrangers (ou d’un autre groupe) mais également des compatriotes (ou du groupe de référence) ;

- le second consiste à mettre en évidence le ou les dénominateur(s) commun(s) liant les deux ou plusieurs groupes. Des traits caractéristiques universels sont alors dégagés.

La diversité culturelle peut être l’objet d’étude dans différentes matières. Bien

sûr, certaines disciplines s’y prêtent mieux que d’autres. Tout d’abord, l’enseignement des langues vivantes étrangères semble être la

discipline de référence pour éduquer à l’interculturalité. Non seulement l’élève apprend à communiquer dans la langue de l’autre mais il découvre également la civilisation.

Puis l’histoire, la géographie, l’éducation civique et artistique semblent être des matières propices à la découverte, la reconnaissance et l’appréciation de l’autre dans son évolution, ses conditions de vie, ses expressions artistiques, etc., tout en appréhendant l’espace international.

Mais je ne pense pas qu’il faille réserver cette éducation à ces quelques disciplines. C’est véritablement un thème transversal. L’éducation physique et sportive par exemple, à l’occasion d’événements internationaux, ou bien par la recherche des origines de pratiques sportives, ou autres, les mathématiques aussi, avec notamment l’histoire de l’apparition des chiffres, ou bien l’évolution des différentes méthodes opératoires, peuvent permettre l’ouverture sur le monde et les autres.

J’ajouterai seulement que les objectifs peuvent alors être différents. En effet, pour Pretceille A., « c’est bien la relation qui prévaut dans la rencontre de l’Autre et non pas les traits spécifiques de sa culture ». Il ne s’agit pas de donner artificiellement des éléments permettant de saisir quelques différences tenant du folklore mais d’offrir les moyens intellectuels par lesquels l’élève va pouvoir « agir avec autrui », d’où qu’il vienne et quelle que soit son origine. L’entrée dans la langue des autres est au cœur de ces moyens. Une des limites à la transversalité scolaire du thème est donc le risque de folklorisation des cultures.

En somme, éduquer à l’interculturalité contribue à relever un des défis de la

société, celui d’éviter une « guerre des cultures », surtout à l’heure où l’interaction des cultures est de toute évidence inévitable de par l’élargissement de l’Union Européenne et la globalisation de l’économie. De plus, l’école a un rôle à jouer, puisqu’elle a pour mission, entre autres, de transmettre les valeurs démocratiques et républicaines, et donc de préparer les élèves à leur statut de citoyen français, européen et du monde. Enfin, l’école doit adapter ses pratiques pédagogiques en fonction de l’âge des enfants et a pour cela de nombreuses possibilités et expériences interculturelles à leur faire découvrir et vivre.

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2 / LE CONTE

Avant de voir quels sont les enjeux du conte et les démarches pédagogiques qu’il est possible de mettre en place autour de ce genre littéraire, il est tout d’abord nécessaire de définir ce mot et d’essayer de donner une typologie et structure de contes.

A / Définition du conte

1) Le conte D’après le dictionnaire « Le Robert », un conte est « un récit de faits,

d’aventures imaginaires, destiné à distraire ». Le conte est donc un genre littéraire où la fiction l’emporte sur le réel ou le possible. Forme par excellence de la littérature orale, le conte est l’une des traditions les plus anciennes et les plus universelles qui soit. Le conte existe en effet dans des sociétés éloignées les unes des autres tant géographiquement que culturellement. Il a très longtemps joué un rôle social important dans la plupart des sociétés de par sa capacité à cimenter les liens entre les membres de la communauté. Il a pour mission de nous enchanter mais on lui en trouve généralement d’autres, comme celle de nous instruire. Quand des animaux ou des plantes sont des personnages, notre esprit sait voir derrière l’allégorie, les faits réels. Enfin, une des caractéristiques du conte par rapport aux autres récits est son intemporalité. Il n’y a pas de marques de temps précises, le passé n’est pas déterminé, on trouve les formules suivantes : « Il était une fois… », « En ce temps-là…, « Il y a bien longtemps… »

2) Typologie de contes

Tous les contes n’ayant pas les mêmes rôles, une typologie de contes peut

être établie. Jean-Claude Denizot, dans son ouvrage « Structure de contes et pédagogie » 2, nous propose la typologie suivante :

- les contes d’invention ou contes étiologiques : ils apportent les pourquoi et les

comment de l’invention du monde comme par exemple « Pourquoi les papillons battent des ailes », « L’origine de la lune », « L’invention de la nuit », « L’origine du jeu d’échec », « Comment la mer devint salée », « Comment le sapin devint un arbre de Noël », etc. Leur fonction est celle de la transmission culturelle.

- les contes d’interdits ou de sagesse : leur fonction morale est évidente. - les contes de loups et d’ogres : ce peut être une déclinaison du conte

d’interdit. - les contes merveilleux : la forme la plus classique du conte.

D’autres ajoutent à ces quatre types de contes, les contes de randonnée,

dans lesquels le schéma narratif est très répétitif avec une même question posée tout au long de la quête de quelque chose, et les contes d’animaux, proches des fables puisque les animaux se comportent en humains mais gardent leurs traits de caractère. Mais, même si une typologie de contes semble se dégager, elle n’en est pas pour autant hermétique.

2 CRDP de Bourgogne, 1995, 67 pages

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3) Structures de contes

Il en est de même pour les structures des contes, constantes universelles à

côté des habillages culturels particuliers. Ce sont de véritables « colonnes vertébrales » qui soutiennent le conte et lui permettent de se développer du début à la fin. Plusieurs spécialistes ont essayé de trouver les traits structurels communs aux contes. Vladimir Propp, par une analyse d’un point de vue morphologique, a dégagé trente-et-une fonctions regroupées en sept sphères d’actions (le héros, l’objet de la quête, le mandateur, l’agresseur, le donateur, l’auxiliaire magique et le faux héros) : « Les fonctions sont les parties constitutives fondamentales du conte. Le nombre des fonctions que comprend le conte merveilleux est limité » 3. A.J. Greimas, lui, parle d’actants correspondant à six sphères d’actions (le destinateur, le destinataire, l’adjuvant, l’opposant, le sujet et l’objet) : on parle de schéma actantiel. Larivaille, lui, propose un schéma quinaire, c’est-à-dire cinq fonctions qui s’enchaînent logiquement et chronologiquement, (état initial, élément perturbateur, action, force équilibrante et état final) et qui est de ce fait facilement applicable et utilisable en classe par les élèves.

B / Les enjeux du conte Le conte est un récit imaginaire, de tradition orale, transmis pendant des

siècles de génération en génération, qui est une forme d’écho de la réalité. Il a toujours fasciné les adultes et les enfants. Pourquoi un tel enchantement ? Quels peuvent être les différentes fonctions du conte ? Quels sont les intérêts particuliers pour les enfants ? Le conte a-t-il sa place à l’école ?

1) Les différentes fonctions du conte

Jean-Claude Denizot distingue trois fonctions essentielles du conte :

- une fonction sociale : de par son oralité, le conte ne peut exister que par l’échange et la communication, c’est une rencontre. On peut ajouter que le conte contribue à la cohésion sociale.

- une fonction psychologique : ce sont les voies de l’imagination et de

l’identification.

- une fonction éducative : sorte de synthèse des deux fonctions précédentes, qui « permet à l’individu de rencontrer le groupe et qui offre au groupe l’occasion d’intégrer l’individu ».

Le conte permet en effet la transmission du savoir et du savoir-vivre, semble

combler notre besoin du merveilleux et joue un rôle considérable dans la formation des personnalités. D’autres lui ajoutent une fonction ludique, le conte tout simplement pour amuser et divertir.

3 extrait de « Morphologie du conte », Propp Vladimir, Points Seuil, 1970

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2) Intérêts du conte pour les enfants

Si la richesse de ce genre littéraire n’est plus à démontrer, de par les nombreuses fonctions qu’il a auprès des publics adulte et enfantin, quels sont plus précisément ses intérêts pour les jeunes enfants ?

Pour Bruno Bettelheim, dans son ouvrage intitulé « Introduction à la psychanalyse des contes de fées » (1976), les contes répondent aux angoisses des enfants. Ils renvoient à des réalités que l’enfant ressent mais n’arrive pas à exprimer. Les contes permettent à l’enfant de surmonter ses peurs, résolvent ses problèmes psychologiques personnels et sont intéressants dans la construction du Moi de l’enfant et le dépassement des interdits. De plus, les contes présentent en général des personnages dont les caractéristiques ne sont pas ambivalentes, c’est-à-dire qu’il y a d’un côté les bons, de l’autre les méchants, les riches, les pauvres, etc. Et Piaget a démontré que l’enfant ne perçoit pas les situations intermédiaires, ce qui donne un intérêt particulier aux contes. Enfin, au travers des contes, du fait que le héros doit surmonter une multitude de difficultés et d’obstacles et qu’il y parvient, l’enfant prend confiance en lui et en l’avenir. Mais au-delà de tous ces intérêts portant sur le développement de l’enfant, les contes permettent tout simplement de réjouir l’enfant et de lui apporter une part de rêve.

3) Légitimité du conte à l’école

Par rapport aux intérêts du conte pour l’enfant, il apparaît évident que le conte ait sa place à l’école. Jean-Claude Denizot constate l’amplification lente mais régulière de la place du conte dans la vie culturelle et dans les activités pédagogiques. Il insiste sur le fait que non seulement cela semble être un effet de mode mais aussi une prise de conscience des apports du conte. Jean-Claude Denizot tente d’expliquer les raisons de cet engouement de la manière suivante :

- souci de renouer avec une forme traditionnelle (supposée « vraie ») - besoin de merveilleux et de rêve - ouverture sur d’autres mondes culturels (dépaysement) - fascination devant un mode de transmission - envie d’établir une communication privilégiée avec le conteur (émotions,

communications et échanges directs dans le cadre d’une sorte de communion des auditeurs)

De plus, le conte est un support pédagogique idéal pour travailler les

compétences exigibles des élèves. En effet, non seulement le conte permet de faire un travail relatif aux champs disciplinaires « littérature », avec ses activités sur le lire, dire, écrire, permettant notamment de lancer un projet d’écriture sur l’interaction lecture/écriture généralement fort motivant pour les élèves, et « observation réfléchie de la langue », mais il est également transversal, avec des activités relatives à l’éducation artistique (illustration des contes, mise en musique de contes, chant, mise en scène de passages de contes), à l’éducation physique et sportive (expression corporelle), à l’histoire et la géographie (origines des contes, modes de vie des pays, etc.), etc.

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C / Démarches pédagogiques à mettre en œuvre à l’école Si le conte a toute sa place à l’école, que préconisent les Instructions Officielles ? Certains contes sont-ils plus adaptés à un niveau d’enseignement particulier ? Quels peuvent être les projets à mettre en place ?

1) Préconisations des Instructions officielles Les Instructions Officielles de 2002, notamment pour le cycle 3, donnent une

importance particulière à la littérature. Le programme de littérature permet en effet « que se constitue une culture commune susceptible d’être partagée, y compris entre générations ». Le ministère publie d’ailleurs une liste d’œuvres, sur laquelle les enseignants peuvent s’appuyer et dans laquelle les contes prennent une place importante. Ce programme insiste sur les points suivants :

- lire des textes de la littérature de jeunesse (« classiques de l’enfance » et « littérature de jeunesse contemporaine »),

- dire les textes (« lus, relus ou mémorisés », « lors de la rédaction d’un texte ou au moment de sa révision »),

- écrire à partir de la littérature (« la plupart des genres littéraires rencontrés en lecture peuvent être le point de départ d’un projet d’écriture : conte, récit des origines, légende, nouvelle policière, etc. »

Le conte, de par ses caractéristiques citées auparavant, apparaît comme un genre littéraire qui permet de répondre à ces directives.

2) Types de contes à envisager selon les cycles

Si les contes font partie des genres littéraires à travailler avec les élèves,

certains types de contes ne sont-ils pas plus abordables que d’autres selon les cycles ? Jean-Claude Denizot nous propose le tableau de correspondance types de contes / niveaux d’enseignement suivant :

Niveaux d’enseignement

Types de contes Cycle 1 CP CE1 CE2 CM1 CM2

Conte d’invention (+) + + + (+)

Conte d’interdits + + + (+)

Loups et ogres + + +

Conte merveilleux (+) + +

Légende : + bonne correspondance type de conte / niveau d’enseignement (+) travail possible à ce niveau même si un autre niveau (plus jeune ou plus âgé) convient généralement mieux Cependant, dans le cadre d’un projet sur les contes, où la structure ne sera pas forcément étudiée, où la lecture plaisir aura une grande place, le respect de ce tableau n’est pas essentiel. Il apparaît plus comme un outil qui guide l’enseignant dans ses choix pédagogiques, pour mener à bien des apprentissages. Dans le cadre d’apprentissages, il est en effet, préférable de proposer des contes « abordables » pour éviter une surcharge de difficultés et permettre d’atteindre les objectifs prévus.

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Eduquer à l’interculturalité à travers l’étude et l’écriture de contes

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3) Projets possibles : De nombreux projets peuvent être menés autour du conte. Ils aboutissent

généralement à un travail d’écriture ou de réécriture. Ils peuvent être le support ou le moyen d’un travail sur l’observation réfléchie sur la langue, notamment en conjugaison pour aborder le passé simple. Voici quelques possibilités d’activités autour du conte :

- pastiches (elles conservent le style de l’auteur mais l’œuvre est toute autre), - parodies (elles sont l’imitation bouffonne d’une œuvre sérieuse, avec un effet

comique), - salades de contes (ce sont des mélanges de contes, des personnages de

contes différents se retrouvent dans un même conte, même les histoires peuvent s’enchevêtrer),

- contes à l’envers (par exemple les gentils peuvent devenir méchants, etc.), - détournement de contes par anachronisme (un même conte est réécrit à

une autre époque), - détournement du contenu ou de la forme des contes, - selon l’extrait donné, écrire le début, le milieu ou la fin d’un conte, - écrire un conte en entier en respectant des consignes particulières, - élaboration d’un recueil de contes, - mise en scène de passages de contes et théâtralisation, - comparaison de contes (d’origines diverses, de types différents, etc.) - etc.

En somme, le conte est un genre littéraire qui est destiné non seulement aux

adultes mais également aux enfants. De tradition orale, il se transmet de génération en génération. Son succès résulte non seulement de son aspect ludique mais également de ses rôles éducatifs, psychologiques et sociaux. L’école, par la prise de conscience des apports du conte sur le développement de l’enfant, mais aussi par l’adéquation entre les traits caractéristiques de ce genre littéraire et les préconisations des Instructions Officielles du Ministère de l’Education Nationale, met en œuvre de nombreux projets autour des contes, support propice à l’acquisition par l’élève de compétences véritablement transversales. Ces projets sont nécessairement adaptés au niveau des élèves, des contes apparaissant plus ou moins adaptés selon l’âge.

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Eduquer à l’interculturalité à travers l’étude et l’écriture de contes

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3/ CONTE ET INTERCULTURALITE Le conte, genre littéraire pouvant être caractérisé de récit imaginaire de tradition orale, ne pourrait-il pas être, de par son côté ludique et généralement fascinant pour les élèves, le moyen d’aller vers une éducation à l’interculturalité ? Quels sont les liens entre le conte et l’interculturalité ? Que préconisent les Instructions Officielles à ce sujet ? Quelles sont les démarches pédagogiques possibles ?

A / Liens entre le conte et l’interculturatité

1) Invitation aux voyages

Les contes sont des invitations aux voyages. Dès les premiers mots, l’auditeur

bascule dans un autre temps et un autre monde. Les lieux peuvent tout aussi bien être familiers que lointains. On se laisse porter au fil de l’histoire et on découvre par la même occasion les plaisirs de l’inattendu, de l’inhabituel et du dépaysement. Cela est comme un enchantement. En voyageant de la sorte, on peut s’identifier aux personnages locaux qui peuvent être d’une culture différente et les sentiments éprouvés nous rapprochent d’eux dans la mesure où l’on se met à la place de l’Autre et on le voit comme un autre être humain, sans stigmatiser les différences. Le conte est donc un moyen de connaître et d’apprécier des cultures différentes, dans un contexte ludique et sans qu’aucune forme de conflit ne transparaisse.

2) Symbole du particularisme et de l’universel

L’un des objectifs de l’interculturalité est de montrer qu’au-delà des traits

particuliers des cultures, celles-ci ont une part d’universel qui les lie. Les contes, de la même façon, sont le symbole du particularisme et de l’universel, et ce, sur plusieurs plans :

- les thèmes sont identiques quelles que soient les origines culturelles des

contes, par contre, des particularités liées au lieu (faune et flore, aliments, etc.), à l’époque (moyens de transport, de communication, etc.) et à la culture (religion, personnages, etc.) sont présentes ;

- tandis que l’oralité des contes est universelle, l’action de conter peut être

différente selon les cultures (alors qu’en Afrique, il s’agissait d’un moment privilégié où tout autre activité cessait et où la participation du public était la bienvenue par le chant et la danse, en Europe les villageois s’attelaient à leurs tâches quotidiennes pendant le conte dans un mélange de son, de voix et d’activité) ;

- un même conte va être non seulement conté différemment, du fait de la

touche personnelle spécifique que chaque conteur apporte, mais également perçu différemment par les auditeurs en fonction de leur personnalité .

Que ce soit l’interculturalité ou les contes, ils se fondent donc sur une part

d’universel et de particularisme.

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Eduquer à l’interculturalité à travers l’étude et l’écriture de contes

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3) Transversalité

Pour éduquer à l’interculturalité, il est possible d’avoir recours à de nombreuses disciplines. Une démarche interculturelle permet de travailler des compétences spécifiques dans certains domaines et des compétences transversales. Il en est de même pour le conte. En faisant un projet autour des contes, l’élève acquiert des compétences spécifiques mais aussi transversales. En alliant le conte et l’interculturalité, cette transversalité est d’autant plus accentuée.

B / Légitimité de l’enseignement de l’interculturalité à travers les contes

Si le conte et l’interculturalité sont liés, en quoi est-ce légitime d’éduquer à

l’interculturalité à travers les contes ?

1) Préconisations des Instructions officielles Les Instructions Officielles n’emploient pas le terme d’interculturalité mais

d’ouverture sur le monde et de découverte de faits culturels, qui peuvent se faire à travers la diversité linguistique, la géographie, l’histoire, l’éducation civique et les musiques du monde. La plupart de ces champs disciplinaires appartiennent au domaine « langue française, éducation littéraire et humaine ». D’ailleurs, à travers l’apprentissage d’une langue étrangère, les Instructions officielles préconisent le recours à la littérature : « des éléments pertinents du folklore, les personnages des légendes ou des contes, ainsi que quelques repères culturels propres aux pays ou régions concernés sont choisis et présentés ». Les contes sont donc des supports possibles et préconisés pour l’éducation à l’interculturalité.

2) Une manière plus subtile d’éduquer à l’interculturalité

Avoir recours aux contes pour éduquer à l’interculturalité semble être plus

subtile dans la mesure où la sensibilisation aux autres cultures se fait en douceur, plus implicitement et en plus de manière ludique. L’environnement fascinant des contes peut faciliter la rencontre des cultures. De par l’attachement, voire l’identification de l’auditeur ou du lecteur au héros d’une culture donnée, l’acceptation de l’autre apparaît comme un processus presque naturel.

3) Le pouvoir de la littérature

Utiliser les contes comme outil d’une démarche interculturelle permet de

laisser l’auditeur ou le lecteur libre de ses émotions. La littérature a en effet le pouvoir de produire des émotions fortes. Celles-ci peuvent varier d’un individu à l’autre. C’est le ressenti de chacun. Et il me semble qu’au-delà des discours qui peuvent être tenus sur l’importance de respecter les autres cultures, une simple lecture littéraire peut avoir plus d’impact sur la personne, de par les sentiments éprouvés au cours de la lecture. Les effets de la littérature se font au plus profond de soi. C’est pourquoi le conte peut être intéressant pour éduquer à l’interculturalité.

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Eduquer à l’interculturalité à travers l’étude et l’écriture de contes

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C / Démarches pédagogiques possibles Il apparaît donc légitime d’éduquer à l’interculturalité à travers les contes. Quels peuvent être les objectifs pour chaque cycle ? Et pour le cycle 3 en particulier ? Quelles démarches pédagogiques sont envisageables ?

1) En fonction des cycles

Il est utile de rappeler que l’éducation à l’interculturalité et les contes doivent être adaptés à l’âge de enfant.

Au cycle 1, il s’agit de mettre en évidence les particularismes, par exemple sur les modes de vie (thème de l‘habitat, de la nourriture, etc.). On montre qu’ils existent. Pour ce qui est des contes, ils font également l’objet d’une progression. En maternelle, il est préférable de travailler sur des contes d’interdits, de loups et d’ogres et éventuellement sur des contes d’invention ou étiologiques. De ce fait, il faudrait plutôt envisager la lecture offerte d’un réseau de contes dont le thème est identique (par exemple la violence ou le mensonge) mais les horizons vraiment différents pour marquer une réelle rupture dans les conditions de vie (par exemple, un conte européen, africain et asiatique).

Au cycle 2, il s’agit d’étendre ces particularismes. On montre qu’ils existent et pourquoi ils existent. Pour les contes, c’est la continuité du cycle 1. Il serait alors intéressant de faire un projet sur les contes d’invention. Les contes proviennent alors de pays plus que de continents, pour éventuellement marquer les particularismes au sein même d’un continent. Et pour les expliquer, il faudrait envisager des séances parallèles en géographie notamment.

Au cycle 3, il s’agit de relativiser les particularismes pour aborder le thème d’universalité. Pour ce qui est des contes, il est préférable de travailler sur les contes merveilleux ou encore les contes d’invention et éventuellement les contes d’interdits. Et au-delà d’un relevé des particularismes, il est nécessaire de mettre en évidence les ressemblances et dégager la part d’universel.

2) Démarches envisageables

Plusieurs démarches sont possibles pour s’ouvrir sur le monde à travers les contes. L’une des possibilités consiste à choisir un corpus de contes dans lequel un même thème est traité mais selon des cultures différentes (par exemple le thème de l’amitié). Il est également possible que le corpus soit constitué de contes d’origines diverses mais dont l’un des personnages principaux soit le même (par exemple, un animal ou un homme pauvre ou une femme célibataire, etc.). Une autre possibilité consiste tout simplement en l’étude de contes de différentes origines (sans véritable lien apparent). Enfin, un même conte dans des versions différentes.

3) Le cycle 3 en question Dans le cycle des approfondissements, il faut faire le choix d’une démarche

interculturelle qui vise à fournir aux élèves l’occasion de relativiser les particularismes et d’appréhender de manière apaisée les marques de l’altérité, ce que soulignent par ailleurs les Instructions Officielles de 2002 à travers la littérature : « l’éducation littéraire montre comment l’écrivain, témoin de son temps et de sa société, est aussi porteur de valeurs universelles ». L’universalité est une notion à découvrir et à approfondir.

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Eduquer à l’interculturalité à travers l’étude et l’écriture de contes

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Je pense qu’au cours d’une année auprès d’élèves de cycle 3, de nombreuses occasions interdisciplinaires s’offrent au personnel enseignant pour aborder ce thème. Le conte peut être l’élément central d’un projet, qui peut être mené sur le long terme ou bien plus ponctuellement comme un stage en responsabilité. C’est d’ailleurs pour un stage de trois semaines que j’ai envisagé de mener à bien une séquence portant sur l’éducation à l’interculturalité à travers l’étude et d’écriture de contes. Une présentation et une analyse de ces pratiques vont être faites en partie 2 et 3 de ce mémoire.

En somme, l’ouverture culturelle, par des auteurs et œuvres de tous pays,

consiste à valoriser d’autres formes culturelles, d’autres œuvres que celles établies dans la culture nationale et à amener les élèves à découvrir le patrimoine de l’humanité dans son universalité.

Il convient cependant de choisir les œuvres littéraires, en l’occurrence les contes, non seulement en fonction des objectifs interculturels envisagés, mais également en fonction de l’âge des élèves. Il y a vraiment une interdépendance entre le développement de l’enfant, les notions interculturelles à aborder et les types de contes.

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Eduquer à l’interculturalité à travers l’étude et l’écriture de contes

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DEUXIEME PARTIE

Etude de contes

Dans cette partie, il s’agit de présenter et d’analyser des séances menées en stage en responsabilité en tant que professeur des écoles stagiaire, séances d’éducation à l’interculturalité à travers l’étude de contes. 1 / PREPARATION DU PROJET Ce projet a été envisagé pour des élèves de la fin du cycle 3 et de français langue étrangère, dans la mesure où ce stage a été effectué au Maroc.

A / Présentation du corpus Il m’a tout d’abord été difficile de choisir le corpus de contes. M’orientant au

départ vers un projet autour des contes étiologiques, pour la grande diversité des origines représentées et pour le passage rapide à la production de tels contes par les élèves (ces contes étant aussi plus simples pour des élèves de français langue étrangère), j’ai accumulé les lectures, découvrant par la même occasion que ces contes me fascinaient. Mais je n’ai pas réussi à faire un choix qui mette véritablement l’universel en évidence, comme il l’est préconisé au cycle 3. Je me suis alors tournée vers des contes de pays différents mais abordant un ou plusieurs thèmes universels comme la richesse, l’amitié, la ruse, la mort, etc. Les histoires étaient vraiment très différentes et il m’a semblé que pour un stage de trois semaines, cela pouvait être complexe à entreprendre. Grâce à la lecture de l’ouvrage « Contes et diversité des cultures : le jeu du même et de l’autre » de Decourt Nadine & Raynaud Michelle 4, qui propose un travail sur des contes de pays différents mais dont l’histoire reste à peu près la même, je me suis dit qu’il pouvait être intéressant d’adapter une séquence à partir de cette expérimentation faite en France et de voir ce qu’il en serait auprès d’élèves marocains.

1) Le langage des animaux

Cette expérimentation s’appuie sur une histoire qui s’intitule « le langage des

animaux ». Ce conte existe dans de nombreuses versions différentes, au moins dix-sept. Une bibliographie de ce corpus est disponible en annexes. C’est d’ailleurs la richesse du corpus qui garantie l’universalité du thème. On trouve en effet une version corse, auvergnate, martiniquaise, italienne, russe, ivoirienne, congolaise, irakienne, tzigane, etc. Les principaux thèmes qui y sont abordés sont les rapports entre l’homme et la femme, le mariage, la pauvreté, la richesse, le secret et la mort.

Pour résumer l’histoire, dans la plupart des cas, le personnage principal sauve un animal qui en échange l’emmène chez son père, le roi. Ce dernier lui donne, pour le remercier d’avoir sauvé son fils, le pouvoir de comprendre le langage des animaux. Mais il y a une contrepartie : ne pas dévoiler ce secret, sous peine de mourir. Le personnage principal entend alors la conversation entre des animaux qui parlent d’un trésor. Il le déterre, devient riche et se marie. Une nouvelle conversation ou situation entre des animaux le fait rire et sa femme souhaite qu’il donne les raisons de ce rire, ce qu’il ne peut faire sinon il meurt. De par l’insistance de sa femme,

4 (Argos démarches, CRDP de l’académie de Lyon, 1999 )

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Eduquer à l’interculturalité à travers l’étude et l’écriture de contes

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l’homme se résout à dévoiler le secret. Plusieurs épilogues sont possibles : l’homme dévoile le secret et meurt, l’homme entend la conversation entre des animaux, change d’avis et bat sa femme ou s’apprête à le faire sauf qu’en apprenant qu’elle est enceinte, il ne le fait pas et tous deux se réconcilient.

2) Sélection de quatre contes

A partir de ce riche corpus, j’ai du sélectionner quelques contes. Il m’a alors semblé intéressant de choisir des contes dont les aspects culturels soient plus ou moins mis en évidence, dont le déroulement de l’histoire soit plus ou moins le même, c’est-à-dire que pour certains contes, la situation finale est identique, pour d’autres non. Cela permet en effet d’envisager une étude comparative des contes sélectionnés et de dégager le maximum d’éléments possibles.

J’ai tout d’abord choisi le conte des Mille et une nuit : « Fable de l’âne, du bœuf et du maître de labour » du fait que ce conte se rapproche fortement de la culture des élèves marocains. Ensuite, le conte italien « Le langage des animaux » m’a semblé intéressant puisqu’il présente d’autres aspects culturels tout en proposant une histoire très proche de la précédente. Puis, le conte ivoirien « Seri, sa femme et son chien », qui, en plus des aspects culturels vraiment présents, apporte plusieurs modifications dans l’histoire, notamment la situation finale. Enfin, le conte sibérien, « Le langage obscur », qui a une fin originale .

Des exemplaires de ces quatre contes sont fournis en annexes.

3) Structures des contes

Ces quatre contes ont bien évidemment tous une situation initiale et une situation finale. Ce qui peut surprendre, c’est que parmi les situations intermédiaires (comment on passe de la situation initiale à la situation finale), il est possible de penser que le conte se termine (par exemple au moment où le personnage principal devient riche et se marie). C’est d’ailleurs souvent une caractéristique des fins des contes merveilleux. Sauf que dans ces contes, il y a un revirement de situation. Le conte ne se termine pas. C’est pourquoi, pour simplifier la structure des contes, je pense qu’il est possible de distinguer la situation initiale, l’événement perturbateur, la situation nouvelle (qui est une situation finale dans les contes merveilleux), le nouvel élément perturbateur et la situation finale. Parmi ces quatre contes, un seul dispose d’un schéma classique en trois temps (le conte des Mille et une nuits).

B / Séquence envisagée

1) Remarques sur l’expérience déjà menée en France

Ne souhaitant pas reproduire exactement ce qui a déjà été fait, même si une comparaison des travaux des élèves français avec ceux des élèves marocains aurait été intéressante, j’ai construit une séquence différente. Cette expérience, détaillée dans l’ouvrage « Contes et diversité des cultures : le jeu du même et de l’autre » 5, m’a tout de même servi de base de travail et m’a donné des idées.

2) Objectifs et compétences

Une liste non exhaustive des compétences travaillées et des objectifs correspondants peut être donnée :

5 de Decourt Nadine & Raynaud Michelle, Argos démarches, CRDP de l’académie de Lyon, 1999

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Eduquer à l’interculturalité à travers l’étude et l’écriture de contes

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Objectifs transversaux Compétences

S’investir dans son travail Etre capable de se lancer dans un projet

Travailler en groupe Etre capable de se mettre d’accord, de prendre en compte les points de vue des autres et de justifier

son point de vue

Objectifs spécifiques Compétences

Donner la nature et la fonction d’écrits variés

Etre capable de distinguer les différents genres et types de textes

Distinguer un genre d’écrit parmi d’autres

Etre capable de reconnaître les spécificités d’un genre de textes

Reformuler dans ses propres

mots une histoire ou un document

Etre capable, après avoir entendu un texte lu par le maître, de le reformuler dans son propre langage, le

développer ou en donner une version plus condensée

Interpréter et confronter son interprétation à celle d’autrui

Etre capable, à propos de toute lecture entendue ou lue, de formuler une interprétation et la

confronter à celle d’autrui

3) Progression de la séquence sur l’étude de contes Voici la progression envisagée pour le projet d’étude des quatre contes. Les

étapes ne sont pas forcément des séances : plusieurs étapes peuvent constituer une séance tandis qu’une seule peut être réalisée en plusieurs séances.

Etapes Objectifs Déroulement Matériel

1

Reconnaître les différents genres de textes

Tri de textes – travail en groupes de 4 : chaque groupe dispose d’un montage d’une vingtaine de textes, fait un classement, puis il y a une mise en commun

Montage de textes de genres variés et une affiche

2

Dégager les spécificités du conte

A partir des textes classés dans la catégorie « contes », expliciter les critères de classification : quelles sont ses spécificités ?

Affiches

3

Mettre en évidence les types de contes

Les contes sont-ils tous identiques ? Proposer de nouveaux contes pour enrichir la liste et tenter de faire une nouvelle classification, puis faire la mise en commun

Exemplaires de contes courts et une affiche

4

Présenter le projet dans sa globalité

Etude de quatre contes de pays différents, voir ce qui les distingue mais aussi ce qui les rapproche. Puis, individuellement, écriture d’un conte et élaboration d’un recueil.

5 Etudier les quatre contes

Lecture, commentaires et compréhension, étude plus approfondie (structure, aspects culturels, temps utilisés…)

Exemplaires des contes, affiche

6

Activités décrochées

Notamment en géographie : localisation des pays dont les contes sont originaires, découverte des modes de vie, etc.

Cartes, encyclopédies, manuels, Internet

7

Comparer les contes

Comparaison des schémas narratifs, des événements, des aspects culturels Employer les termes « particularités » et « universalité »

Affiche

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C / Liens avec les Instructions Officielles Cette progression que j’envisage respecte ce que préconisent les Instructions

Officielles. En effet, elle répond aux compétences suivantes, exigibles en fin de cycle 3 :

- « formuler dans ses propres mots une lecture entendue », - « participer à un débat sur l’interprétation d’un texte littéraire en étant

susceptible de vérifier dans le texte ce qui interdit ou permet l’interprétation soutenue »,

- « comprendre correctement la signification des divers emplois des temps

verbaux du passé dans la narration »

- « avoir compris et retenu qu’on ne peut confondre un récit littéraire et un récit historique, la fiction et le réel.

De plus, l’étude notamment d’un genre littéraire sous forme de réseau est conseillée dans les Instructions Officielles : « pour que l’élève puisse acquérir des références culturelles, il importe que les lectures ne soient pas abordées au hasard, mais se constituent en réseaux ordonnés : autour (…) d’un genre, (…) etc. Au cycle des approfondissements, c’est cet aspect de la lecture littéraire qui doit être privilégié plutôt que l’explication approfondie d’une oeuvre ».

En somme, préparer un projet d’étude de contes dans le but d’éduquer à

l’interculturalité n’a pas été chose facile. J’ai du multiplier les lectures avant de m’orienter vers un corpus de contes portant sur le langage des animaux. Une expérience avait déjà été menée mais j’ai préféré ne pas reprendre cette démarche. J’ai choisi de proposer aux élèves marocains un travail préparatoire sur les genres de textes et types de contes, puis l’étude et la comparaison de quatre contes de ce corpus. Cette progression a bien sûr été élaborée avec le souci de respecter les Instructions Officielles.

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2 / MISE EN ŒUVRE DU PROJET

Il s’agit maintenant de mettre en application ce projet. Pour cela, il est nécessaire d’adapter la séquence envisagée en fonction des élèves, des conditions de travail et bien sûr de la durée du stage.

A / Présentation du stage au Maroc Avant de voir en détail comment se sont déroulées les séances que j’ai pu

mener, il est utile de faire un état des lieux sur le déroulement du stage en responsabilité au Maroc.

1) Ecole Ihsane

Ce stage en responsabilité s’est déroulé au Maroc, à El Jadida. El Jadida est

une ville côtière moyenne d’environ 200 000 habitants, à 100 Km au sud de Casablanca (la capitale économique). L’école qui m’a accueillie s’appelle Ihsane. C’est l’une des écoles privées de la ville. Il y a Ihsane 1, pour la maternelle, Ihsane 2, du CP à la 6ème, et Ihsane 3, pour le collège et le lycée, qui sont respectivement dans des locaux différents mais peu éloignés. Effectuant mon stage auprès d’élèves du cycle 3, classes de CM2, je suis intervenue à Ihsane 2. Il y a trois classes de CM2 (97 élèves) d’environ 30 élèves chacune (le groupe 2 est composé de 34 élèves).

Le fonctionnement de cette école primaire est totalement différent du nôtre, dans la mesure où il n’y a pas un professeur par classe mais plusieurs. En effet, les élèves restent dans leur classe et la journée est divisée en trois temps forts : 2H de français, 2h d’arabe et 2H de mathématiques (1H de mathématiques et 1H de sciences ou d’arts visuels ou d’informatique) avec un professeur pour chacun de ces domaines. Les cours ont lieu du lundi au vendredi (sauf le mercredi après-midi) de 8H à 11h15 ou de 9H à 12H15 et de 14H à 17H15 ou de 15H à 18H15. Pour ce qui est du volume horaire hebdomadaire par discipline, il est le suivant :

- Français : 9 H (dont 1 heure le mercredi matin) - Arabe : 8 H - Histoire / Géographie 2 H (le mercredi matin) - Mathématiques 4 H (3H en arabe et 1H en français) - Sciences 2 H (2 fois 1 H) - Arts visuels 1 H - Informatique 1 H - E.P.S. ½ H (souvent 1H par quinzaine

Pour les cours de français, il s’agit donc souvent de deux heures consécutives.

Ce fonctionnement relève donc plutôt de notre système secondaire.

2) Conditions de travail

Pour ce stage en responsabilité, je suis intervenue auprès des trois groupes de CM2 mais de manières différentes. Devant absolument poursuivre la progression en français de l’enseignante marocaine, c’est-à-dire le chapitre 5 du manuel « Les couleurs du français » s’intitulant « Le témoignage », j’ai du négocier une heure d’intervention décrochée par semaine et par groupe pour mener à bien mon projet sur les contes.

en arabe

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Pour le groupe 1, je n’ai enseigné que le français (8 H hebdomadaires sur le chapitre 5 du manuel et 1 H décrochée le mercredi sur les contes). Pour le groupe 2, j’ai non seulement enseigné le français (même contenu que le groupe 1) mais également les mathématiques, les sciences et les arts visuels. Pour le groupe 3, je n’ai pu les avoir qu’une heure par semaine le mercredi, pour le travail sur les contes. Au final, sur la période des trois semaines de stage, je n’ai pu expérimenter que trois heures de travail sur les contes (par groupe). Pour cela, j’ai du adapter ma séquence et sélectionner trois étapes clés, pour que ce projet ait encore du sens.

Pour ce qui est des conditions matérielles, les classes étaient petites (peu de place pour circuler, pas de coins lecture ou autres), et le matériel sommaire (un tableau noir, des tables et chaises, une étagère). Des photographies sont disponibles en annexe.

3) Profil des classes

Mis à part l’effectif des classes plus élevé qu’en France, l’élément qui m’a

vraiment marqué est le dynamisme des élèves, leur rapport à l’oral. En effet, leur volonté de participer fait plaisir à voir. Ils ont confiance en eux et leurs éventuelles erreurs se semblent pas les déstabiliser. L’atmosphère de la classe est vraiment positive.

Les classes sont pourtant hétérogènes (pour ce qui est de l’enseignement du français). Les disparités sont visibles tant à l’oral qu’à l’écrit. Cela s’explique notamment par le fait que le français est parlé par certains élèves à la maison. Ce n’est malheureusement pas le cas de tout le monde. Mais globalement les élèves ont un bon niveau. L’écrit est bien sûr plus difficile surtout qu’ils ont tendance à essayer de retranscrire l’arabe en français. Le respect des codes orthographiques est difficile même si les leçons de grammaire et de conjugaison semblent bien connues. L’application des règles n’est pas systématique ce qui peut provenir du manque de liens entre les séances d’observation réfléchie de la langue et le projet d’écriture.

En ce qui concerne le projet sur les contes, les élèves avaient déjà vu l’imparfait dans une séance antérieure, mais pas le passé simple, un des temps du récit beaucoup utilisé dans les contes. Mais, je devais le traiter avec le chapitre 5 du manuel avec les témoignages du passé.

B / Séance 1

La séquence envisagée a donc du être limitée à trois séances. Cette première séance d’une heure a été menée dans les trois classes de CM2, le premier mercredi de mon stage. La fiche de la séance est disponible en annexe.

1) Déroulement de la séance

Cette séance est la première, elle est donc déterminante pour lancer le projet et donner envie aux élèves d’y participer.

La première phase de la séance consiste donc en la présentation du projet, à savoir l’étude de quatre contes de pays différents (notamment les différences, ressemblances entre ces contes), étude qui conduira à l’écriture individuelle par les élèves de contes marocains, qui seront en partie lus à la classe. Il s’agit ensuite de débuter l’étude des contes.

Dans cette première séance, j’ai choisi de travailler sur deux des quatre contes du corpus sélectionné : « Le langage des animaux » 6 (conte italien) et « Fable

6 de Ph. et R. Soupault

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de l‘âne, du bœuf et du maître de labour » 7 (conte irakien). J’ai voulu les introduire dans cet ordre car le premier est moins complexe que le deuxième, les étapes du schéma narratif sont plus faciles à dégager.

La deuxième phase de la séance consiste en la lecture offerte du premier conte : la version italienne. Avant de débuter la lecture, un questionnement sur les règles d’écoute d’une lecture offerte est mené pour que celle-ci se passe dans les meilleures conditions. Puis la consigne d’écoute de la lecture offerte est donnée : « repérez quelles sont les différentes étapes du contes et les événements correspondants ». La lecture offerte peut alors commencer. D’ailleurs pourquoi une lecture offerte ? Tout d’abord, j’ai fait ce choix pour le côté pratique. Je ne pouvais pas faire 100 exemplaires du conte (pour mes trois classes de CM2), conte qui était en plus sur plusieurs pages. De plus, je pense que la lecture offerte n’était pas pratiquée par l’enseignante, ce qui permettait aux élèves de travailler d’une manière différente. Je pense aussi que cette méthode permet de développer chez les élèves leur capacité d’écoute. Ils doivent essayer de rester attentifs à partir du son qu’ils entendent. Enfin, je pense que la lecture offerte est pertinente lorsque le niveau des élèves (français langue étrangère) est hétérogène, car une lecture volontairement intonative et gestuelle (légère mise en scène) permet de faciliter la compréhension de tous.

Après cette première lecture, la troisième phase consiste en un bref commentaire sur le conte, la construction du schéma narratif et le détail des événements constituant les différentes étapes. A ce stade, toutes les entrées du tableau sont donc complétées, ainsi que la première colonne (celle correspondant à ce conte). Cette phase permet notamment aux élèves de reformuler avec leurs propres mots les moments importants de l’histoire.

Une fois ce travail réalisé, la quatrième phase consiste en la lecture offerte du deuxième conte : la version irakienne. La consigne est à nouveau donnée : « repérez quels sont les événements correspondants aux différentes étapes du conte ».

La cinquième et dernière phase de cette séance est un bref commentaire sur le conte (réactions pouvant faire le lien avec le premier conte), le détail des événements constituant les étapes du schéma narratif et, comme les deux premières colonnes sont complétées, la comparaison des deux contes, du point de vue des événements et des aspects culturels. En effet, les différences et ressemblances ont été mises en évidence, avec un travail sur le vocabulaire et les spécificités des cultures.

Cette séance repose donc essentiellement sur des échanges oraux. Quelles sont les objectifs et compétences travaillées ?

2) Objectifs et compétences travaillées

L’un des premiers objectifs de cette séance est de susciter l’intérêt des élèves pour ce petit projet.

Il s’agit également de développer les compétences d’écoute des élèves. En effet, sur la durée de la séance, la moitié est consacrée à l’écoute des contes. A ce sujet, Jean-Claude Denizot8 déplore « l’apparente dispersion de l’esprit et de l’attention devant la richesse multiple des sollicitations médiatiques ». Il affirme même que « le phénomène « télé » (ou du moins sa surconsommation sans accompagnement éducatif) est rendu responsable du manque de concentration devant le message. Le son et l’image relèvent de la fugacité, le message procède

7 des Mille et une nuits 8 Dans son ouvrage « Structure de contes et pédagogie » (CRDP de Bourgogne, 1995, 67 pages)

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de l’instabilité. Ecouter (comme voir) nécessite de fait un apprentissage pour redonner au mot, au son, valeur et sens. Le conte, dans cette perspective, réconcilie oralité et écoute ».

Un autre objectif est d’amener les élèves à verbaliser une histoire qui vient de leur être contée, donc à partir de ce qu’ils ont compris.

Enfin, il s’agit de les amener à faire des liens entre les deux lectures entendues, à les comparer, ce qui demande un effort de remémoration.

Les compétences travaillées sont alors les suivantes : - Ecouter, rester attentif, pour comprendre - Savoir se servir des échanges verbaux dans la classe : « à propos de toute

lecture entendue ou lue, formuler une interprétation et la confronter à celle d’autrui » et « après avoir entendu un texte lu par le maître, le reformuler dans son propre langage, le développer ou en donner une version plus condensée » 9

- parler : « formuler dans ses propres mots une lecture entendue » 10

Pour ce qui est des séances spécifiques à la conduite de la séance, l’élève devra repérer et nommer les différentes étapes du conte (schéma narratif), réinvestir le schéma narratif pour les contes suivants et repérer et reconnaître le vocabulaire spécifique à un pays, une culture.

3) Analyse de la séance

Tout d’abord, je tiens à rappeler que cette séance a été menée dans trois

classes différentes. Je vais essayer de rendre compte de manière globale, les élèves ayant eu des réactions et comportements similaires.

Dans l’ensemble, les élèves n’ont pas été déstabilisés par la lecture offerte. Le silence régnait et ils étaient très attentifs. Au fil de la lecture, je voyais les visages réagir face aux événements comiques ou tragiques, ce qui est en général un signe de concentration et de bonne compréhension. Cette impression s’est révélée vraie lors de la phase orale de commentaires sur le conte et de construction du schéma narratif. J’ai pu noter avec satisfaction que les élèves avaient bien compris l’histoire et que cette dernière leur avait plu. Leur participation était importante. J’ai remarqué que les élèves ayant des difficultés à parler en français faisaient un effort particulier pour essayer de raconter un événement du conte ou donner leurs impressions. Pour la construction du schéma narratif, cela n’a pas posé de problème. Je pense que pour les élèves, ce n’était pas une situation d’apprentissage mais plutôt de réinvestissement. Pour la situation initiale, ils ont précisé sans difficulté qu’il s’agissait des indications de temps et de lieux ainsi que la présentation des personnes.

Pour ce qui est de la remémoration des événements, j’ai remarqué que cela avait été moins facile avec le deuxième conte que pour le premier. Je pense que cela peut être du à la plus grande difficulté de ce deuxième conte, de la confusion possible d’événements qui sont très semblables au premier et aussi certainement d’une baisse de l’attention des élèves au cours de cette deuxième lecture offerte. En effet, vers la fin, certains élèves commençaient à s’agiter, ce qui peut s’expliquer en partie par la durée consacrée à l’écoute, et le décrochage naturel de certains élèves, pour lesquels rester attentif demande un effort particulier.

9 Extrait des Instructions Officielles de 2002, maîtrise du langage, compétences générales, p 219 10 Instructions Officielles de 2002, maîtrise du langage, compétences spécifiques ( littérature) p 221

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En ce qui concerne la gestion du temps, le minutage a été respecté même si j’aurais aimé approfondir un peu plus les particularités culturelles des contes, qui ont eu du mal à émerger. Et je pense que si la construction du schéma narratif avait été une situation d’apprentissage, je n’aurais pas pu en une heure finir ce qui était prévu.

Pour ce qui est de l’utilisation du tableau en papier, à cette séance, son utilisation n’était peut-être pas nécessaire, dans la mesure où il n’y avait que deux colonnes à compléter. Mais avec le système de caches pour les deuxième et troisième groupes, il m’a sûrement permis de gagner du temps puisqu’au moment de la validation des étapes, je n’avais plus qu’à retirer le cache et non plus écrire.

C / Séance 2

Cette séance a eu lieu le deuxième mercredi de mon stage, toujours dans les

trois classes de CM2. Se reporter éventuellement à la fiche de la séance en annexe.

1) Déroulement de la séance

Le corpus sélectionné étant composé de quatre contes et la première

séance en introduisant deux, cette deuxième séance va dans un premier temps revenir sur les contes italien et irakien, puis dans un deuxième temps, les deux contes restant vont être lus et étudiés.

En effet, la première phase de cette séance consiste en un retour oral (avec support écrit) sur le schéma narratif et événements des deux premiers contes, avec ce qui se ressemble et se distingue.

Puis la deuxième phase consiste en la lecture du troisième conte : « Le langage obscur » 11 (conte sibérien), précédée d’un rappel des règles d’écoute de la lecture offerte et de la consigne d’écoute suivante : « repérez quels sont les événements correspondants aux différentes étapes du conte » . Ce conte est étudié en troisième car il apporte notamment une fin originale, différente des deux premières. Là aussi j’ai fait le choix de la lecture offerte pour les mêmes raisons qu’à la séance 1.

La troisième phase est faite de commentaires sur ce conte, du remplissage du tableau et de la comparaison avec les contes précédents, d’un point de vue événementiel et culturel.

La quatrième phase consiste en la lecture offerte du dernier conte : « Seri , sa femme et son chien » 12(conte ivoirien), caractérisé par ses nombreuses différences et sa brièveté.

La cinquième phase consiste en des commentaires du conte, le remplissage du tableau, la comparaison avec les contes précédents et un bilan sur l’interculturalité des contes (particularités et universalité).

Enfin, la sixième phase consiste à donner la consigne d’écriture du conte marocain, travail à faire à la maison (possible au Maroc), et de faire émerger le cahier des charges.

Cette séance ressemble donc beaucoup à la première.

11 de H. Gougaud 12 de Denise Paulme

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2) Objectifs et compétences travaillées Il en va de même pour les objectifs et les compétences travaillées. Comme

pour la première séance, ceux-ci portent sur l’écoute, l’attention, la reformulation de l’histoire dans son propre langage, la remémoration des étapes importantes du conte mais aussi des précédents et la comparaison des quatre contes.

Pour ce qui est des séances spécifiques à la conduite de la séance, l’élève devra réinvestir le schéma narratif vu en première séance, trouver les ressemblances et différences entre plusieurs contes et essayer de les expliquer et repérer et reconnaître le vocabulaire spécifique à un pays, une culture.

3) Analyse de la séance

Tout d’abord, la phase de remémoration des contes précédents s’est faite

sans problème. J’ai été surprise qu’ils se rappellent aussi bien, d’une semaine à l’autre, de tous les événements à partir d’une seule écoute et sans avoir pu lire le conte individuellement. De plus, les élèves étaient impatients de découvrir les deux autres contes et ont été très attentifs lors des lectures. A la différence de la première séance, il n’y a pas eu de relâchement à la fin du deuxième conte, celui-ci étant très bref.

Par contre, la comparaison des contes a à nouveau plus porté sur les événements que sur les aspects culturels.

Pour ce qui est de l’utilisation du tableau en papier, fabriqué afin d’éviter non seulement de le réaliser à nouveau dans les autres classes (un système de cache a été mis en place et enlevé après validation) mais aussi pour éviter de le refaire manuellement d’une semaine à l’autre (surtout qu’il est complété au fur et à mesure), ce système m’a semblé judicieux et le gain de temps était certain.

En ce qui concerne l’émergence du cahier des charges pour l’écriture d’un conte marocain, la référence aux temps du récit n’a pas posé problème dans la mesure où, en parallèle, avec le chapitre sur le témoignage dans leur manuel de français 13, les leçons de conjugaison abordaient l’imparfait et le passé simple.

En somme, par rapport au projet d’étude de quatre contes tel qu’il a été

envisagé, sa mise en œuvre a du se limiter à deux séances, caractérisées par des découvertes auditives, des reformulations, des comparaisons événementielles et culturelles. J’ai du m’adapter aux conditions d’enseignement de cette école marocaine afin que ce projet ait encore du sens. Après ces deux séances, mon impression est d’avoir réussi à intéresser les élèves.

13 « Les couleurs du français - CM2 »

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3 / BILAN, TRANSPOSITION POSSIBLE EN FRANCE ET PROLONGEMENTS

A / Bilan des deux premières séances

Une des grandes difficultés que j’ai rencontrée est de ne pas avoir la possibilité d’avoir plus de temps pour revenir sur des points importants. C’est un véritable inconvénient de ne pouvoir adapter son emploi du temps à des besoins ponctuels, du fait des horaires fixes (1h), sans débordement possible et limitées (3 fois 1h), sans possibilité de continuer la prochaine fois, sinon le projet ne peut être mené. De plus, être obligée de réduire l’étude des contes à deux séances m’a vraiment frustré. C’est dur de se dire que le projet ne pourra être réalisé dans sa globalité.

Mais il y a tout de même des points positifs. Tout d’abord la motivation des élèves, qui se manifestait par des propos tels que « mercredi, on va continuer de travailler sur les contes ? », « super !», « pour écrire notre conte on pourra faire intervenir tel animal/personnage ? » etc., ce qui montrait vraiment leur intérêt pour ce petit projet. Cet intérêt se manifestait aussi par l’envie de lire les contes, de posséder le support écrit car plusieurs élèves sont venus me voir « Maîtresse j’ai recherché les contes mais je ne les ai pas trouvés. Vous pouvez nous les donner ? » .

Si c’était à refaire, dans les mêmes conditions, il me semble que je n’aurais pas vraiment eu le choix de procéder autrement.

Si les conditions avaient été différentes, j’aurais notamment aimé disposer de plus d’heures pour approfondir le rapport à l’interculturalité. J’aurais peut-être laissé le corpus des contes aux élèves. Je l’ai juste laissé à l’enseignante de français, qui avec mon accord avait assisté aux séances avec un groupe et qui souhaitait reprendre ce travail les années suivantes.

B / Quelle serait la transposition possible en France ?

Ce travail a été réalisé au Maroc. De quelle manière pourrait-il être envisagé

en France ? Quelles sont les questions qu’il est possible de se poser ? Tout d’abord, il me semble que je pourrais exploiter le côté transversal de ce

projet. Un des éléments qui me vient à l’esprit est qu’à la période où ces contes ont été lus aux élèves, il y a eu la journée mondiale de la femme. Malheureusement, par manque de temps, ce thème n’a pas été exploité alors qu’il a un lien direct avec les contes, la femme étant battue dans les deux premiers contes. Je pense qu’en France, un débat pourrait être organisé ou bien une exposition.

De plus, il pourrait être intéressant de faire des recherches sur les différents pays d’où proviennent ces contes, dans le cadre de l’enseignement de la géographie. Une carte du monde pourrait être utilisée, l’outil informatique également avec éventuellement des recherches ciblées sur l’Internet, comme les modes de vie dans ces pays (religion, coutumes, etc.).

En ce qui concerne les modalités d’introduction des contes, je pourrais peut-être envisager des lectures offertes mais aussi des lectures silencieuses puis collectives, afin que le texte lu intérieurement par chaque élève permette une interprétation personnelle et non influencée par la lecture de l’enseignant. En effet, la lecture intonative ne serait peut-être pas judicieuse du fait qu’il ne s’agisse pas ici d’aider à la compréhension de l’histoire.

Enfin, il est possible de se demander si les élèves en France auraient autant de difficultés à relever les éléments culturels des contes que les élèves marocains. L’histoire leur plairait-elle ? Je pense qu’il serait intéressant de pouvoir mener la même expérience en France et de faire des comparaisons.

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C / Quels sont les prolongements possibles ?

Après l’étude de ces quatre contes, je pense qu’il serait intéressant d’établir un réseau de lectures collectives ou individuelles (peut-être par l’intermédiaire d’un cahier ou carnet de lectures) portant sur des contes de mêmes origines. Par exemple, trouver d’autres contes ivoiriens ou irakiens, les lire avant tout pour le plaisir et donner la possibilité à ceux qui le souhaitent (sous forme d’inscription) de les raconter au reste de la classe. De plus, dans la mesure où ces contes ont permis de mettre en évidence qu’au-delà des particularismes liés à chacune des cultures, il y a une part d’universel qui lie ces cultures, il serait possible dans le cadre de l’éducation à la citoyenneté de se demander « quelles sont les valeurs universelles sur lesquelles on ne peut transiger ? ». Pour cela, il est bien évidemment nécessaire de se référer et de s’appuyer sur la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, tel que le préconisent les Instructions Officielles 14.

De la même manière, à travers la découverte de l’Europe et de l’Union Européenne, je pense qu’il serait intéressant de rechercher les aspects communs à tous les Etats membres (universalité) et ceux qui leur sont propres (particularités). Enfin, dans le cadre d’activités d’expression artistique, je pense qu’il pourrait être pertinent de transposer les principales actions du conte en images, images qui peuvent ensuite être utilisées pour créer des contes (cela sera abordé dans la troisième partie) ou tout simplement permettre aux élèves d’illustrer un conte et ainsi laisser leur imagination opérer.

En somme, par rapport aux contraintes, je fais un bilan plutôt positif de ces

deux premières séances. Elles ont vraiment intéressé les élèves. Dans des conditions différentes, notamment en France, il serait possible

d’envisager de nombreuses activités transversales et, pour l’introduction des contes, de varier les entrées. Pour ce qui est des prolongements possibles de ces séances, ils portent non seulement sur le champ disciplinaire « littérature » mais aussi sur d’autres comme les arts visuels, l’éducation civique, l’histoire et la géographie.

14 Instructions Officielles 2002, éducation civique, compétences devant être acquises en fin de cycle 3

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Eduquer à l’interculturalité à travers l’étude et l’écriture de contes

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TROISIEME PARTIE

Ecriture de contes Dans cette partie, il s’agit de présenter et d’analyser le projet d’écriture

envisagé et mené en stage en responsabilité, projet qui est le prolongement de l’étude des quatre contes.

1 / PREPARATION DU PROJET D’ECRITURE

Comme il a déjà été précisé auparavant 15, le conte est un support privilégié pour envisager un projet d’écriture. Mais comment mettre en place un tel projet ? Quels sont les projets possibles, selon quels objectifs ? Quelle peut être la progression ? Que préconisent les Instructions Officielles ?

A / Comment mettre en place un projet d’écriture ?

1) Objectifs Avant de voir comment mettre en place un projet d’écriture, je pense qu’il est

utile de rappeler quels sont les objectifs généraux d’un tel projet. Tout d’abord, un projet d’écriture a pour objectif de développer la maîtrise du

langage et de la langue française. Il contribue en effet à travailler de nombreuses compétences spécifiques et transversales.

De plus, c’est un moyen de lier les activités métalinguistiques à un projet concret et motivant et de ce fait les leçons de conjugaison, de grammaire, de vocabulaire et d’orthographe ont du sens pour l’élève car elles lui permettent d’améliorer sa production et de finaliser le projet d’écriture.

Un projet d’écriture a aussi pour objectif d’impliquer l’élève, qu’il soit acteur de ses apprentissages. Le projet doit donc avoir du sens pour lui et pour cela l’élève a besoin de clarté. Il est alors fondamental avant de passer à l’écrit, que l’élève sache ce qu’il va écrire (lettre, conte, poème, etc.), à qui il écrit (camarades, correspondants, parents, etc.), pour quoi il écrit (faire rire, faire peur, convaincre, etc.) et comment.

Enfin, le projet d’écriture a un rôle de socialisation. Il est bien souvent préférable de commencer par des écrits sociaux, pour notamment mettre en évidence l’utilité de l’écrit dans la vie quotidienne, puis poursuivre à partir de la littérature.

Mais comment construire ce projet d’écriture ?

2) Méthodologie

Du fait de l’importance de l’interaction lecture / écriture, le projet d’écriture intervient souvent après la lecture d’œuvres littéraires mais aussi après la lecture de textes scientifiques (ou autres). Il est en effet important que l’élève ne rattache pas l’action d’écrire exclusivement aux champs disciplinaires « littérature » et « observation réfléchie la langue ». Pour mettre en place un projet d’écriture à partir de la littérature, je pense qu’il est tout d’abord nécessaire que les élèves s’imprègnent du genre littéraire en

15 Partie I, 2/ Le conte, C/ Démarches pédagogiques à mettre en œuvre à l’école

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question, par de nombreuses lectures. Cette imprégnation peut par ailleurs s’accompagner d’une étude plus approfondie, notamment sur les caractéristiques formelles et sémantiques de ce genre. A partir de ce moment là, le projet d’écriture doit être explicité. La première écriture peut alors être envisagée. Puis, l’enseignant, par la lecture de ce premier jet, repère les difficultés et met en place des remédiations. Une nouvelle écriture a ensuite lieu, suivie éventuellement à nouveau de remédiations. On passe alors à la production finale.

Pour ce qui est de l’organisation, personnellement, je pense que pour les écrits littéraires, l’implication de l’élève est plus grande s’il s’agit d’un écrit individuel. Cela n’empêche pas le travail en binôme, par exemple pour des phases d’amélioration de l’écrit, où les élèves peuvent s’échanger les copies et s’aider.

3) Projets d’écriture envisageables à partir des contes D’après les documents d’application des programmes, « Littérature, cycle des

approfondissements » 16, « tous les genres rencontrés peuvent faire l’objet d’un travail d’écriture : la nouvelle, les différents genres romanesques, la poésie, le théâtre, le conte, etc. Il ne s’agit pas de les travailler abstraitement, mais de s’appuyer sur un texte lu pour entrer en écriture ».

Les projets qu’il est possible de mettre en place à partir des contes sont nombreux. Cela a été abordé précédemment 17. Je peux simplement ajouter que quel que soit le projet choisi, il peut être adapté au niveau de l’élève. En effet, il existe de nombreuses possibilités, comme écrire la fin d’un conte à partir du début, ou inversement, écrire le début à partir de la fin (déjà plus difficile). A partir du début et de la fin d’un conte, on peut demander aux élèves d’écrire le milieu. Il est aussi possible de transposer un conte existant dans un autre lieu ou d’écrire un nouveau conte dans sa globalité soit en combinant des personnages et actions d’œuvres lues, soit en l’imaginant totalement. Les objectifs et les degrés de facilité sont bien évidemment différents. Voici ce que stipulent les Instructions Officielles à ce sujet : « on peut amorcer le travail en se contentant de faire modifier un aspect du texte lu (le lieu, le temps, un personnage, un épisode, etc.). L’expansion ou la réduction d’un texte lu sont souvent des exercices qui structurent fortement l’écriture. On peut, au contraire, lancer les élèves dans la planification d’une écriture nouvelle, mais, cette fois, en ancrant l’effort d’invention dans l’exploration d’un genre ».

B / Séquence envisagée

1) Sélection d’un projet d’écriture envisageable

A partir des différents projets d’écriture possibles, je choisis de proposer aux élèves, après l’étude de quatre contes d’origines différentes, d’écrire un conte en entier portant sur leur propre culture, afin qu’il y ait un lien avec l’interculturalité. En effet, au cycle 3 et surtout au CM2, je pense qu’il est préférable de leur laisser la plus grande autonomie et qu’ils sont capables d’inventer un conte dans sa globalité. Mais pour guider tout de même les élèves dans ce projet, j’envisage de leur donner des contraintes d’écriture qui peuvent être le respect d’un thème général, du schéma narratif des contes étudiés, des contraintes de lieux et de culture et le respect des temps du récit.

16 Collection Ecole, CNDP, 2002 17 Partie 1, 2/ Le conte, C/ Démarches pédagogiques à mettre en œuvre à l’école, 3) Projets possibles

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Eduquer à l’interculturalité à travers l’étude et l’écriture de contes

33

2) Objectifs et compétences

Une liste non exhaustive des compétences travaillées et des objectifs correspondants peut être donnée :

Objectifs transversaux Compétences

Susciter l’intérêt et la motivation S’engager dans un projet

Mener un projet à son terme

Etre conscient des efforts à fournir pour mener un projet à son terme

Se repérer le temps et l’espace Mettre en place une chronologie d’événements

et de lieux et planifier les différentes étapes

Travailler ensemble Accepter les remarques d’autrui sur son travail

Objectifs spécifiques Compétences

Ecrire un texte d’un genre

spécifique

Reconnaître les traits caractéristiques d’un genre littéraire et écrire un texte correspondant à ce

genre

Améliorer sa production écrite

Etre capable de modifier son texte pour l’améliorer

Oraliser un texte

Etre capable d’oraliser des textes (connus, sus par coeur ou lus) devant la classe pour en

partager collectivement le plaisir

3) Progression de la séquence sur l’écriture de contes

Voici la progression envisagée pour le projet d’écriture. Les étapes ne sont pas forcément des séances : plusieurs étapes peuvent constituer une séance tandis qu’une seule peut être réalisée en plusieurs séances.

Etapes Objectifs Déroulement Matériel

1

Présenter le projet d’écriture

Bilan sur l’étude des quatre contes, consigne d’écriture d’un conte marocain, individuellement, pour une lecture à haute voix devant les autres camarades et la réalisation d’un recueil.

Tableau d’analyse des quatre contes

2

Elaborer le cahier des charges (ou grille de relecture)

Réfléchir collectivement aux éléments à respecter pour écrire ce conte (s’aider des commentaires qui ont été faits lors de l’étude des contes)

Affiche

3

Ecrire le premier jet

Individuellement, chaque élève commence à écrire son conte

Copie / Affiche et tableau des quatre contes

4

Remédiation

Activités décrochées en ORL

Manuel / Affiche

5 Ecrire le deuxième jet

Individuellement, chaque élève améliore son conte et continue à écrire s’il n’a pas fini

Copie

6

Remédiation

Activités décrochées en ORL et/ou échange de copie en binôme, avec l’utilisation de la grille de relecture

Manuel / Affiche

7

Ecrire la version finale et oralisation

Modifications éventuelles apportées sur la copie et mise en forme de la version finale

Copie / Traitement de texte / Recueil

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Eduquer à l’interculturalité à travers l’étude et l’écriture de contes

34

C / Liens avec les Instructions officielles Cette progression que j’envisage respecte ce que préconisent les Instructions

Officielles. En effet, elle répond aux compétences suivantes, exigibles en fin de cycle 3 : « élaborer et écrire un récit d’au moins une vingtaine de lignes, avec ou sans support, en respectant les contraintes orthographiques, syntaxiques, lexicales et de présentation ».

De plus, l’utilisation du tableau d’analyse des contes étudiés, pour les guider dans l’écriture de leur propre version, est conseillée dans les Instructions Officielles : « Le recours aux prototypes doit être permanent, soit pour dégager des caractéristiques susceptibles de guider la mise en œuvre du projet, soit pour répondre aux questions que sa réalisation ne manque pas de poser. »

Les phases de réécriture ou d’amélioration, qui suivent les phases de remédiations en observation réfléchie de la langue, sont également préconisées par les Instructions Officielles : « La révision reste, comme dans tous les projets d’écriture, un moment essentiel. Les élèves doivent être régulièrement conduits à ajouter, supprimer, remplacer, déplacer des fragments de textes sur leurs propres brouillons ou sur ceux de leurs camarades, en s’appuyant sur les annotations des autres élèves ou du maître et en utilisant les outils construits par la classe. »

Enfin, la finalisation du projet avec le recours à l’outil informatique est suggérée de la sorte par les Instructions Officielles : « Tout projet d’écriture peut se prolonger par un projet d’édition du texte réalisé. C’est l’occasion, pour les élèves, de s’initier à la fabrication d’un livre (couverture, page de titre, mise en pages, illustration) ».

En somme, un projet d’écriture suppose une interaction lecture / écriture. La

lecture peut porter sur des œuvres littéraires mais pas seulement. Dans le cadre d’une préparation d’un projet d’écriture sur les contes, il convient tout d’abord de s’adapter au niveau des élèves : il existe différents projets, avec des degrés de difficultés différents et des objectifs et compétences particuliers. J’ai choisi de proposer aux élèves marocains l’écriture d’un conte dans sa globalité, conte devant respecter certaines contraintes. Une progression a été élaborée avec le souci de respecter les Instructions Officielles.

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2 / MISE EN ŒUVRE DU PROJET D’ECRITURE Une fois le projet d’écriture préparé, il s’agit de le mettre en œuvre, c’est-à-dire de le tester et voir si les objectifs ont été atteints.

A / Adaptation nécessaire Seulement, cette séquence doit nécessairement être adaptée aux classes

auxquelles elle est destinée et aux conditions de stage.

1) Temps disponible pour le travail sur l’écriture des contes

Ne disposant en tout que de trois séances d’une heure pour faire mon projet sur les contes et deux heures ayant déjà été utilisées pour l’étude des quatre contes, il ne me reste qu’une séance d’une heure pour réaliser cette séquence sur l’écriture de contes. Autant dire que cela est impossible sans modifier considérablement cette séquence. Comment faire pour que les élèves puissent tout de même produire leur propre conte marocain ?

2) Nature du travail effectué en parallèle

Tout d’abord, j’ai essayé de voir en quoi les séances d’observation réfléchie de la langue qui étaient réalisées les autres jours de la semaine, avec le travail sur le témoignage, pouvaient avoir un lien avec l’écriture de contes. Il s’est alors avéré que l’imparfait ayant déjà été abordé dans un autre chapitre, je devais traiter le passé simple avec les élèves. En effet, le témoignage étant un récit du passé, j’ai pu travailler avec les élèves les valeurs des différents temps du récit : l’imparfait, le passé simple et le présent (pour les discours rapportés ou dialogues) et l’alternance imparfait / passé simple, ainsi que les terminaisons de ce dernier temps.

3) Modification de la séquence Pour réduire la séquence en une séance, j’ai donc envisagé tout d’abord de donner le conte à écrire en devoir à la maison, avec un délai de cinq jours à une semaine selon les groupes. Dans l’école marocaine où j’étais, les enfants ont chaque soir des devoirs à faire, en mathématiques, arabe et français. Je me suis donc dit que je pouvais me permettre de leur donner ce travail. Ensuite, je me suis dit que l’intérêt en une séance porte plus sur les aspects sémantiques du conte que ceux métalinguistiques, les élèves ayant pu s’entraîner notamment à l’alternance imparfait / passé simple. J’ai donc envisagé, au lieu de faire une séance de remédiation, de passer directement à une lecture offerte d’une partie des contes marocains produits, le lecteur étant celui qui a écrit le conte et les auditeurs le reste de la classe, avec une évaluation collective à partir de critères précis. Voyons dès à présent comment cela s’est réellement passé.

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B / Séance(s) menée(s)

1) Une heure supplémentaire avec le groupe 2

Ayant les groupes 1 et 2 en français le reste du temps, je leur ai donné le travail d’écriture à faire le mercredi pour le lundi (tandis que pour le groupe 3 il était à faire pour le mercredi suivant). J’ai ramassé les productions écrites de ces deux groupes le lundi et leur les ai rendues le mardi avec une appréciation et pour certains quelques annotations. Sachant que je ne pourrais pas disposer de temps supplémentaire avec le groupe 1, je leur ai simplement demandé de préparer la lecture de leur conte pour le mercredi, en prenant en compte mes remarques. En revanche, sachant que je pourrais travailler une heure avec le groupe 2 sur les contes, je leur ai rendu leurs copies et j’ai pu mener une séance de réécriture. En effet, à partir de mes commentaires, les élèves ont pu revoir les temps des verbes, l’utilisation des pronoms personnels, etc. Comme pour le groupe 1, ils devaient préparer pour le lendemain la lecture de leur conte. Donc pour la séance du mercredi, mes trois groupes de CM2 étaient tous à une étape différente. Je n’avais pas du tout lu les contes du groupe 3 et allais les découvrir au cours de cette séance. J’avais lu les contes du groupe 1 mais les élèves n’avaient pas pu les améliorer. Tandis que pour le groupe 2, non seulement j’avais lu leurs contes mais ils avaient pu les améliorer.

2) Déroulement de la séance (du mercredi) Cette séance a eu lieu le troisième et dernier mercredi de mon stage, toujours

dans les trois classes de CM2. Se reporter à la fiche de la séance en annexe. Tout d’abord, je tiens à rappeler la consigne d’écriture qui a été donnée aux élèves, en même temps que le tableau récapitulatif de l’étude des quatre contes : « En t’inspirant des quatre contes étudiés, rédige un conte marocain qui respecte ce schéma narratif. Tu es libre de choisir les personnages, les animaux et la fin du conte. Pense à utiliser un vocabulaire propre à la culture marocaine ». La première phase de cette séance a consisté en le rappel des critères d’évaluation des contes qui seront entendus (respect du schéma narratif, respect du thème le langage des animaux, respect des temps du récit et écriture d’un conte marocain) et des règles d’écoute d’une lecture offerte. La deuxième phase a consisté en la lecture offerte du conte d’un élève par celui-ci, les autres ayant pour consigne de repérer les étapes et événements de son conte et de voir si les critères d’évaluation ont été respectés. La troisième phase a consisté en des commentaires du conte entendu, avec mise en évidence des différentes étapes et des événements, donc remplissage d’une nouvelle colonne du tableau et conclusion sur les critères respectés ou non. Les phases 4/5 et 6/7 reprennent ce déroulement mais avec deux autres contes d’élèves.

La huitième phase consiste en un bilan sur les contes écrits par les élèves et sur le projet. D’ailleurs, l’un des éléments que j’ai essayé de leur montrer, c’est qu’avec l’étude des contes, il avait été vu que des contes de cultures différentes ont bien sûr des différences mais aussi une part d’universel, mais aussi qu’avec leurs contes à eux, reflétant une même culture, de nombreuses différences apparaissaient aussi.

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3) Analyse de la séance Tout d’abord, j’ai trouvé les élèves très attentifs lors de la lecture offerte des

contes de leurs camarades et ils ont su se rappeler des différentes étapes alors que moi-même par moments, je ne me souvenais plus très bien de certains événements.

De plus, leur participation était toujours aussi importante, pour compléter le tableau mais aussi pour lire leur conte. Beaucoup n’ont malheureusement pas pu lire leur conte : 9 sur 10 à peu près, ce qui est frustrant.

Pour ce qui est de l’évaluation des contes, qui s’est faite collectivement, j’ai trouvé cela intéressant de faire participer les autres élèves. Les critères étaient les mêmes pour tout le monde et il fallait essayer de voir si le camarade les avait respectés. Cette méthode n’a pas du tout posé problème. Cela semblait clair pour tout le monde. L’élève évalué semblait ouvert aux remarques de ses camarades.

Pour ce qui est du contenu des contes entendus, à chaque fois, ils étaient vraiment tous les trois différents. Chacun avait imaginé des fins différentes. Certains avaient eu l’idée de faire le mélange de plusieurs situations des contes étudiés. D’ailleurs, je pense qu’il est intéressant de faire le point sur ces productions.

C / Analyse des productions écrites Voici ce qu’il est possible de dire des productions des élèves ayant écrit un

conte sur le thème du langage.

1) Du point de vue du schéma narratif En ce qui concerne le schéma narratif, la plupart des élèves ont respecté les

cinq étapes comme il l’avait été demandé. Certains en ont fait trois mais ce n’est pas dramatique puisque le conte des Mille et une nuits en avait trois. Une élève du groupe 3 (élève d’un très bon niveau) a multiplié les étapes et je n’ai pas compté les revirements de situation. Son conte est d’une très grande qualité d’un point de vue sémantique. J’ai moi-même été surprise. Et lors du remplissage du tableau, tout le monde (y compris moi) avait du mal à s’y retrouver, sauf elle, évidemment, qui, du fait, nous relisait des passages !

Pour rentrer un peu dans les détails, je peux présenter un échantillon des types

de langage choisis, des motifs du don du langage, des contreparties du don, des raisons du rire et des épilogues dans les tableaux suivants :

Types de langage choisis Le langage du monde / des animaux / obscur / mystérieux des animaux / des plantes / des oiseaux / des poissons

Les motifs du don du langage Le héros a sauvé un chaton / un serpent / un lézard / un singe / un oiseau / un dauphin / un chien / c’est un cadeau de l’âne

Les contreparties du don : garder le secret sinon …

La mort / la transformation en sardine / droit de dévoiler le secret mais une seule personne doit être au courant sinon c’est la mort / devenir aveugle

Les raisons du rire Conversation entre le cheval et la jument / entre une vache et un bœuf / propos d’un requin / propos des oiseaux / pas de raison particulière

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Les épilogues La femme se résout à ne plus le questionner, par peur de son mari et tous les deux vivent heureux / l’homme dévoile le secret et meurt / l’homme s’apprête à battre sa femme mais celle-ci lui annonce qu’elle est enceinte : fin heureuse / le héros dévoile le secret, est transformé en sardine et mangé par le requin / le héros dévoile le secret et devient aveugle / grâce au trésor ils vivent riches et heureux / ils vivent riches et heureux et ont un enfant / grâce à un vase magique, le héros est riche et heureux / le secret est dévoilé à plus d’une personne, l’héroïne meurt

Ce tableau montre bien la richesse des productions des élèves.

2) Du point de vue des aspects culturels

Tout d’abord, les élèves ont donné des prénoms marocains à leurs personnages : on trouve notamment Ali, Ahmad, Amina, Azouze, Sami, Nadia, Hamid, Mohamed.

Ensuite, ils ont essayé de choisir des animaux que l’on peut trouver au Maghreb : mouton, âne, singe, serpent, lézard, chaton, oiseaux, sardine, poisson, etc.

Ils ont également essayé de trouver des traits caractéristiques de leur culture et de leur mode de vie : le sultan, les pêcheurs, le couscous, vendredi le jour du couscous, les pastillas, la sécheresse, les palmiers, les noix de coco, le puits, six enfants. Dans l’ensemble les élèves se sont plus concentrés sur le fait de respecter le schéma narratif. Mais, je pense que c’est déjà un bon début surtout que c’est une tâche difficile. Il aurait fallu faire une activité spécifique à la recherche des spécificités de leur culture.

3) Du point de vue des temps du récit

Pour ce qui est des temps du récit, très peu ont su alterner l’imparfait et le passé simple. Beaucoup ont utilisé le présent et surtout le passé composé. Il est vrai que ce temps est plus employé dans le langage oral pour faire le récit d’événements. Cela est bien évidemment plus naturel plus eux. Pourtant il avait été vu qu’il était d’usage d’utiliser le passé simple et l’imparfait.

De plus, lorsque le passé simple a été employé, bien souvent les verbes ont été mal conjugués. Il apparaît évident que des séances décrochées sur les temps du récit devraient être menées en plus pour améliorer ces productions écrites.

En somme, par rapport au projet d’écriture tel qu’il a été envisagé, sa mise en œuvre a du se limiter à une seule séance. Le travail d’écriture a donc été donné à faire à la maison et la séance menée en classe a consisté en la mise en voix et l’analyse de quelques contes. Je pense que j’aurais pu mener autrement cette phase de présentation des contes en limitant la lecture de ceux-ci et en favorisant l’étude du contenu par une synthèse collective, ce qui aurait permis de passer en revue toutes les productions écrites. Je suis plutôt satisfaite des contes écrits par les élèves : ceux-ci ont réinvesti ce qui avait été vu et ont eu beaucoup d’imagination.

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3 / BILAN, TRANSPOSITION POSSIBLE EN FRANCE ET PROLONGEMENTS

A / Bilan Une des principales difficultés rencontrées est la mise en évidence par les

élèves des particularités de leur culture. Il est vrai que cela n’est pas évident. C’est en partie en constatant qu’autrui vit différemment que je réalise les particularités de mon mode de vie. Il est coutume de manger le couscous le vendredi midi au Maroc mais avant de savoir que c’est une particularité, il faut découvrir qu’ailleurs ce n’est pas le cas. De plus, même si ce n’était pas mon principal objectif, d’un point de vue métalinguistique, les écrits restent très moyens. Mais tout est relatif bien sûr ; je tiens à rappeler que pour ces élèves, le français est tout de même une langue étrangère.

Mais dans l’ensemble, les élèves ont eu beaucoup d’imagination. Certains sont vraiment de grande qualité. Ils ont eu envie d’écrire leur propre conte et de le transmettre.

Cependant, si c’était à refaire, par rapport à la frustration ressentie par une grande majorité des élèves de ne pouvoir raconter leur conte, je pense, avec du recul, qu’il serait préférable de ne lire que deux contes, puis d’essayer de mettre en place une sorte de synthèse faisant participer tout le monde. Par exemple, lister tous les épilogues qu’ils ont trouvés, lister les animaux qu’ils ont introduits, etc., pour avoir l’éventail des possibilités qu’ils ont imaginées. De cette manière, tout le monde pourrait parler de son conte et se rendre compte encore plus de la diversité des solutions possibles au sein d’une même culture.

B / Transposition possible en France Ce travail a été réalisé au Maroc. De quelle manière pourrait-il être envisagé

en France ? Le premier élément qui serait à modifier en France, c’est l’écriture du conte,

qui, au Maroc, a été réalisée en travail à la maison (compte tenu du peu de temps à ma disposition pour ce projet) mais qui, en France, devrait être effectuée bien évidemment en classe.

Pour ce qui est du projet d’écriture en lui-même, il pourrait être demandé aux élèves en France, selon le même principe, d’écrire un conte français. Il pourrait être intéressant de voir quels traits culturels feraient ressortir les élèves. Je pense qu’il serait aussi intéressant de demander aux élèves français d’écrire un conte marocain, afin de faire des comparaisons sur les traits culturels utilisés. Mais il est bien sûr également possible de laisser le libre choix à l’élève quant à l’origine du conte qu’il souhaite écrire (idée que j’ai failli conserver dans ma préparation de séquence).

Dans la mesure où plus de temps serait à ma disposition en France, les séances menées correspondraient à la séquence qui était envisagée au début. Je conserverais la phase de mise en voix des contes devant la classe, à tour de rôle, en instaurant un horaire pour cela. Au fur et à mesure des écoutes, l’éventail des possibilités serait mis en évidence. Il y a de nombreuses choses à faire, ce qui relève peut-être plus des prolongements.

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C / Prolongements La première idée qui me vient à l’esprit serait de réaliser un recueil de ces contes écrits par les élèves. Il faudrait envisager de recourir à l’outil informatique, avec l’utilisation du traitement de texte. Pourquoi ne pas envisager une correspondance avec une autre classe, où chaque semaine un des contes leur serait envoyé (format papier, numérique ou audio). Il serait aussi possible de sélectionner un conte et d’envisager sa mise en scène, soit dans le cadre d’une théâtralisation (voix et gestes), soit par de l’expression artistique (musique et gestes). Il pourrait alors être intéressant de faire venir un conteur professionnel. La représentation se ferait devant un public, comme une classe de plus petits. Un jeu de cartes pourrait être réalisé (dans le cadre des arts visuels) à partir de l’éventail des solutions possibles (il est possible d’en imaginer d’autres). Un élève tirerait au sort une carte pour chaque étape du schéma narratif. Il devrait alors s’en imprégner et raconter ce conte aux autres. Un travail de recherche de contes qui ont été repris et réécrits dans plusieurs pays pourrait être effectué. Ce n’est qu’un échantillon des nombreux prolongements possibles.

En somme, même si ce projet a vraiment été réduit au maximum, je suis

satisfaite des résultats et de la motivation des élèves. C’est sûr, j’aurais aimé disposer de plus de temps mais dans un sens, cela me motive à renouveler cette expérience, en prenant en compte les améliorations certaines et en envisageant les nombreux prolongements qui relèvent d’un projet transdisciplinaire.

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CONCLUSION

En somme, il apparaît nécessaire que l’école joue un rôle dans la bataille contre l’intolérance. Elle peut mettre en place de nombreux projets pédagogiques, qui répondent non seulement à des objectifs liés à l’ouverture sur le monde, mais aussi à des objectifs spécifiques à des champs disciplinaires et même à des objectifs transdisciplinaires. Mais ces projets doivent être adaptés à l’âge de l’enfant.

Au cycle 3, le conte peut être un moyen de mettre en évidence les similitudes

qui rapprochent les membres de groupes étrangers et les différences qui opposent les individus d’un même groupe.

Le projet, qui a été mené auprès d’élèves marocains de cycle 3, classe de

CM2, a contribué à dégager ces notions. Cependant, je pense que trois séances n’ont pas suffit pour que les élèves en prennent véritablement conscience.

Je reste donc insatisfaite, même si les élèves ont été ravis de travailler sur les

contes et que leurs productions étaient vraiment intéressantes. Ce thème est vraiment difficile à traiter. Pour éduquer à l’interculturalité et

atteindre l’objectif suprême de tolérance (si cela est vraiment possible ?), la solution est peut-être dans l’alternance des différentes approches pédagogiques à mettre en œuvre, qui ont chacune leur avantages et inconvénients :

- l’approche transversale qui n’aborde jamais de front le sujet - l’approche d’éducation à la citoyenneté qui insiste sur les droits et les devoirs - l’approche rationaliste qui privilégie l’enseignement scientifique et

philosophique - l’approche moralisante - l’approche républicaine originelle qui ne sait comment assumer la distinction

entre les enfants.

Mais quelle que soit la manière, je pense que l’école doit agir, même si cela peut sembler être une goutte d’eau dans l’océan, c’est toujours ça.

De toute manière, elle ne peut aller à l’encontre de la liberté de pensée de

l’individu, quelles que soient ses pensées. L’école doit préparer au mieux le citoyen de demain. Elle ne peut être tenue

responsable de ses dérives.

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BIBLIOGRAPHIE � Collot Andrée & Didier Guy & Loueslati Béchir – La pluralité culturelle dans les systèmes éducatifs européens – CRDP de Lorraine – 1993

� Decourt Nadine & Raynaud Michelle – Contes et diversité des cultures : le jeu du même et de l’autre – Argos démarches – CRDP de l’académie de Lyon – 1999

� Denizot Jean-Claude – Structures de contes et pédagogie – CRDP de Bourgogne - 1995

� Education enfantine – S’ouvrir aux autres cultures – N° 1052 – 100ème année – N°1/septembre 2003

� Les Cahiers Pédagogiques – N° 419 – Agir avec les élèves en classe et dans l’institution – décembre 2003

� Martin Serge - Les contes à l’école – Parcours didactiques à l’école – Bertrand Lacoste – 1997

� Ministère de l’Education Nationale – Qu’apprend-on à l’école élémentaire ? Les programmes – CNDP Scérén – XO Editions – 2002

� Ministère de l’Education Nationale - Littérature, cycle des approfondissements - Documents d’application des programmes - Collection Ecole - CNDP - 2002

� Pagé Michel & Ouellet Fernand & Cortesao Luiza – L’éducation à la citoyenneté – Editions du CRP (Canada) – 2001

� Popet Anne & Roques Evelyne – Le conte au service de l’apprentissage de la langue – Cycles 2 et 3 – Retz – Collection pédagogie pratique - 2000

� Sanz Michel - Lire et écrire des contes – Cycle des approfondissements – Bordas – 1992

(Consultation du dictionnaire « Le Robert », de quelques sites Internet dont celui de l’encyclopédie de l’Agora, www.rfo.fr, etc., et de quelques mémoires.)

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I

ANNEXES

Pages

- Corpus des contes sur le « Le langage des animaux » II

- Corpus et exemplaires des contes sélectionnés et étudiés III

o Version italienne III

o Version des Mille et une nuits VI

o Version sibérienne VIII

o Version Ivoirienne XII

- Photographies de l’école Ihsane 2 XIII

- Photographies de l’une des classes de CM2 XIV

- Séance 1 XV

- Séance 2 XVI

- Séance 3 XVII

- Photographie du tableau de l’étude des contes XVIII

- Version polycopiée de ce tableau, avec consigne d’écriture XIX

- Production d’élèves XX

o N°1 XX

o N°2 XXII

o N°3 XXIV

o N°4 XXVI

o N°5 XXVII

o N°6 XXIX

o N°7 XXXI

o N°8 XXXIII

o N°9 XXXV

o N°10 XXXVIII

o N°11 XL

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II

- Corpus des contes sur « Le langage des animaux » � Afanassiev, « Le chasseur et sa femme », Contes populaires russes, Paris, Maisonneuve et Larose, Vol. 3, 1992, p. 14-15 � Césaire L., « Le langage des animaux » (Martinique), Notre Librairie, N° 65, juillet-septembre 1982, p. 43-44 � Clews Parsons E., “Langage des animaux”, Folk-lore of the Antilles, French and English, New York, publicited by the American Folklore Society, Vol. 2, 1936, p. 215 � Confiant R., « Le langage des animaux », Contes créoles des Amériques, Paris, Stock, 1995, p. 75-80 � Decourt N., Louali-Raynal N., « Le langage des animaux », Contes maghrébins en situation interculturelle, Paris, Karthala, 1995, p. 43-46 � Delarue P., Térèze M-L., « Le langage des bêtes » (Lorraine), Le conte populaire français, II, Paris, Maisonneuve et Larose, 1977, p. 568-571 � Gougaud H., « Le langage obscur » (Sibérie), L’arbre d’amour et de sagesse, Paris, Seuil, 1992, p. 87-93 � Ficowski J., « Le langage des animaux », Le rameau de l’arbre du soleil, Contes tziganes, Wallada, 1990, p. 87-89 � Massignon G., « Le langage des animaux », Contes corses, Ed. Picard, 1984, p. 4-6 � Massignon G., « Le berger et le serpent » (Corse), De bouche à oreilles, Le conte populaire français, Berger-Levrault, 1983, p. 395-398 � Mille et une nuits, « La fable de l’âne, du bœuf et du maître de labour », traduction de J-C. Mardrus, Paris, Robert Laffont (Bouquins), 1980, p. 10-13 � Paulme D., « Seri, sa femme et son chien » (Bété, Côte d’Ivoire), La mère dévorante, Paris, Gallimard, 1976, p. 61-63 � Paulat L., « La femme curieuse », Contes juifs, Paris, Gründ, 1986, p. 41-44 � Pourrat H., « Le coq hardi » (Auvergne), Le trésor des contes, III, Paris, Gallimard, 1951, p. 140-150 � Soupault Ph. & R ., « Le langage des animaux » (Italie), Histoires merveilleuses des cinq continents, Seghers, 1975 (réed. 1985), p. 342-346 � Tchicaya U Tam’Si, « Il était une fois » (récit de Mouissou, Congo), in Ces fruits si doux de l’arbre à pain, Paris, Seghers, 1987 (1990), p. 169-180 � Tomek J ., « Le pain, le fromage et les Djinns », Contes arabes, Paris, Gründ, 1978, p. 139-142

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III

Corpus et exemplaires des contes sélectionnés et étudiés

- Soupault Ph. et R., « Le Langage des Animaux », extrait de « Histoires

merveilleuses des cinq continents », Seghers, 1985, (Italie) - Mille et Une Nuits, « Fable de l’âne, du bœuf et du maître de labour »,

traduction J.C. Mardrus, Bemond Grasset, collection Bouquins, 1980 (Irak) - Gougaud H., « Le langage obscur », extrait de « L’arbre d’amour et de

sagesse », Paris, Seuil, 1992 (Russie - Sibérie) - Paulme Denise, « Seri, sa femme et son chien » extrait de « La mère

dévorante », Paris, Gallimard, 1976 (Côte d’Ivoire)

« LE LANGAGE DES ANIMAUX »

de Ph. et R. Soupault, Histoires merveilleuses des cinq continents, Seghers, 1985 (Italie)

Un berger, qui depuis de longues années, servait son maître avec autant de

zèle que de fidélité entendit, un jour qu’il faisait paître son troupeau à l’orée d’une forêt, un long sifflement. Ne sachant pas ce que ce sifflement signifiait, il entra dans la forêt. En approchant d’une clairière, il vit que l’herbe sèche et les feuilles mortes avaient pris feu et, au milieu d’un cercle de flammes, il aperçut un serpent qui sifflait à perdre haleine. Dès que le serpent aperçut le berger, il lui cria : - Berger ! berger ! sauve-moi ! Le berger tendit sa houlette au-dessus des flammes. Le serpent s’enroula autour du bâton et monta jusqu’à la main du berger. De la main, il glissa jusqu’à son cou et l’entoura comme un collier. Quand le berger vit cela, il eut grand peur et dit au serpent : - Malheur à moi ! T’ai-je donc sauvé pour ma perte ? - Ne crains rien, répondit le reptile. Conduis-moi chez mon père qui est le roi des serpents. Le berger refusa, parce que, dit-il, il ne pouvait pas laisser ses moutons sans gardien. Mais le serpent lui dit : - Ne t’inquiète pas pour ton troupeau. Il ne lui arrivera aucun mal. Conduis-moi donc aussi vite que tu pourras chez mon père. Le berger se mit à courir dans la forêt avec le serpent autour du cou. Il arriva devant une porte faite de longues couleuvres entrelacées. Le serpent siffla. Aussitôt, les couleuvres s’écartèrent, puis il dit au berger : - Quand nous serons dans le château, mon père ne manquera pas de t’offrir ce que tu peux désirer : de l’argent, de l’or, des bijoux et tout ce qu’il y a de plus précieux dans le monde. Refuse ce qu’il te proposera, mais demande-lui de comprendre le langage des animaux. Il refusera longtemps, mais il finira tout de même par t’accorder ce privilège. Ils arrivèrent dans la grande salle du château. Le serpent raconta au roi des serpents comment il avait été cerné par les flammes et comment le berger l’avait sauvé. Le roi des serpents se tourna alors vers le berger et lui dit : - Quelle récompense veux-tu que je t’accorde pour avoir sauvé mon fils ? - Je veux comprendre le langage des animaux, répondit le berger. Le roi lui dit :

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IV

- Si je te permettais de comprendre ce langage et que tu livres ton secret à âme qui vive, tu mourrais aussitôt. Demande-moi autre chose qui te soit plus utile. Je te le donnerai. Mais le berger insista : - Si tu veux me récompenser, apprends-moi le langage des animaux, sinon laisse-moi m’en aller ; je ne veux pas autre chose. Et il fit mine de s’éloigner. Alors le roi le rappela et lui dit : - Puisque tu le désires, viens ici devant moi et ouvre la bouche. Le berger ouvrit la bouche ; le roi des serpents y souffla et lui dit : - Maintenant souffle à ton tour. Et quand le berger eut obéi, le roi des serpents lui souffla une deuxième fois dans la bouche. Et quand ils eurent ainsi soufflé trois fois, le roi lui dit : - Maintenant tu pourras comprendre le langage des animaux ; mais si tu tiens à la vie, garde-toi bien de jamais trahir ce secret, car si tu livres ce secret à âme qui vive, tu mourras à l’instant. Le berger s’en alla. Comme il traversait la forêt, il comprit ce que chantaient les oiseaux. Il retrouva son troupeau et se coucha sur le sol, au pied d’un arbre pour dormir. Deux corbeaux vinrent se poser sur l’arbre et se mirent à bavarder et à croasser : - Si ce berger savait qu’à l’endroit où il dort il y a sous la terre un coffre plein d’or et d’argent, que crois-tu qu’il ferait ? Dès que le berger eut entendu ces croassements, il alla trouver son maître, à qui il demanda une voiture et, en creusant au pied de l’arbre, ils trouvèrent un coffre plein d’or et d’argent qu’ils emportèrent. Le maître, qui était honnête homme, dit au berger : - Mon fils, ce trésor est à toi, car c’est toi qui l’as trouvé. Le berger emporta le trésor, construisit une maison et se maria. Il vécut joyeux et content. Il fut le plus riche propriétaire de son village et des environs. Il possédait des troupeaux de moutons, de bœufs, de chevaux et des champs et des forêts. Un jour, la veille de Noël, il dit à sa femme : - Il faut préparer un grand repas pour les bergers et les fermiers. La femme s’empressa d’obéir et prépara un excellent repas. Le lendemain, quand les bergers et les fermiers se présentèrent, le propriétaire leur dit : - Mes amis, mangez, buvez, amusez-vous. C’est moi qui veillerai cette nuit à votre place. Il s’en alla à travers champs. A minuit, les loups se mirent à hurler et les chiens à aboyer. Les loups hurlaient aux chiens : - Les bergers sont partis. Laissez-nous venir près des troupeaux. Si vous nous laissez faire, il y aura de la viande pour tous. Et les chiens répondirent : - Approchez-vous ; nous voulons, nous aussi, nous rassasier une bonne fois. Mais il y avait un vieux chien qui n’avait plus que deux crocs. Il cria aux loups :

- Tant qu’il me restera deux crocs dans la gueule, vous ne ferez pas tort à mon maître. Les loups se le tinrent pour dit. Le propriétaire avait entendu et compris tous ces hurlements. Quand il revint chez lui le matin, il ordonna de tuer tous les chiens et de ne laisser en vie que le plus vieux qui n’avait que deux crocs. Les bergers, étonnés, dirent : - Pourquoi ? Quel dommage ! Mais le propriétaire insista : - Faites ce que je vous dis.

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V

Puis accompagné de sa femme, il partit pour aller rendre visite à ses voisins. Le mari monta sur un beau cheval gris, la femme sur une belle jument blanche. Bientôt le cheval gris prit de l’avance, et la jument resta en arrière. Le cheval se retourna et dit à la jument : - Allons ! allons ! Plus vite, plus vite ! Pourquoi veux-tu ralentir ? La jument répondit : - Cela t’est bien facile d’aller vite, à toi qui ne portes que ton maître ; mais moi, en même temps que ma maîtresse, je porte des colliers, des bracelets, des jupes brodées et des jupons. Il faudrait quatre bœufs pour porter toute cette quincaillerie. Le mari, comprenant ce que disait la jument, éclata de rire. Sa femme lui demanda ce qui le faisait tellement rire. - Rien du tout ; une sottise dont je me suis souvenu. La femme pressa son mari de lui dire pourquoi il avait ri. Mais il résista tant qu’il put et lui dit : - Je ne sais pas moi-même pourquoi j’ai ri. Plus il refusait de parler, plus elle insistait pour savoir pourquoi il avait éclaté de rire. A la fin, exaspéré, il lui dit : - Si je te disais ce qui m’a fait rire, je mourrais à l’instant même. Plus que jamais, la femme, de plus en plus intriguée, tourmenta son mari pour qu’il parlât. Ils revinrent chez eux. En descendant de cheval, le mari ordonna qu’on lui prépare un cercueil. Il le fit placer devant la maison et dit à sa femme : - Je vais me coucher dans le cercueil. Je te dirai alors ce qui m’a fait rire : mais, aussitôt que j’aurai parlé, je serai un homme mort. Et il se coucha dans le cercueil. - Apporte un morceau de pain et donne-le à notre vieux chien, dit-il à sa femme. La femme jeta un morceau de pain au vieux chien qui ne le regarda même pas. Mais le coq accourut et piqua le pain, et le vieux chien lui dit : - Ingrat, comment peux-tu songer à manger quand tu sais que notre maître va mourir ! Et le coq lui répondit : - Qu’il meure, puisqu’il est assez sot pour cela. J’ai vingt femmes. Quand une d’elles veut désobéir, je la corrige avec mon bec ; et lui qui n’a qu’une seule femme, il n’a pas l’esprit de la mettre à la raison ! Sitôt que le mari entendit ce que disait le coq, il sauta hors du cercueil, prit un bâton et appela sa femme : - Viens ici, et je te dirai ce que tu as si grande envie de savoir. Et alors, il la raisonna à coups de bâton en disant : - Voilà, ma femme, voilà ! C’est de cette façon qu’il lui répondit, et jamais, depuis, sa femme ne lui a demandé pourquoi il avait ri.

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VI

« FABLE DE L’ANE, DU BŒUF ET DU MAITRE DE LABOUR »

des Mille et Une Nuits, traduction J-C. Mardrus, Bemond Grasset, collection Bouquins, 1980 (Irak)

Sache, ô ma fille, qu’il y avait un commerçant, maître de grandes richesses

marié et père d’enfants. Allah Très-Haut lui donna aussi la connaissance des langues des animaux et des oiseaux. Or le lieu d’habitation de ce commerçant était un pays fertile sur le bord d’un fleuve. Dans la demeure de ce commerçant, il y avait aussi un âne et un bœuf. Un jour, le bœuf arriva à l’endroit occupé par l’âne, et trouva cet endroit balayé, arrosé : dans l’auge il y avait de l’orge bien criblée et de la paille bien criblée et l’âne était couché bien au repos ou bien quand son maître le montait, c’était seulement pour une petite course qui par hasard était urgente, et l’âne revenait bien vite à son repos. Or, ce jour-là, le commerçant entendit le bœuf qui disait à l’âne : « Mange avec délices et que cela te soit sain, profitable et de bonne digestion ! Moi, je suis fatigué, et toi, reposé ; tu manges l’orge bien criblée et tu es servi ! Et si, des fois parmi les moments, ton maître te monte, il te ramène bien vite ! Quant à moi, je ne sers qu’au labour et au travail du moulin ! Alors l’âne lui dit : « Lorsque tu sortiras au champ et qu’on te mettra le joug sur le cou, jette-toi à terre et ne te lève point même si on te frappait ; et quand tu te seras levé, vite recouche-toi pour la seconde fois. Et si alors on te fait retourner à l’étable et qu’on te présente les fèves, n’en mange point, tout comme si tu étais malade. Ainsi efforce-toi de ne pas manger ni boire durant un jour ou deux ou trois. De cette façon-là, tu te reposeras de la fatigue et de la peine ! » Or, le commerçant était là, qui entendait leurs paroles. Lorsque le meneur du bétail vint près du bœuf pour lui donner le fourrage, il le vit manger très peu de chose ; et quand, le matin, il le prit au labour, il le trouva malade. Alors le commerçant dit au meneur du bétail : « Prends l’âne et fais-le labourer à la place du bœuf durant toute la journée ! » Et l’homme revint et prit l’âne à la place du bœuf, et le fit labourer durant tout le jour. Lorsque l’âne retourna à l’étable à la fin du jour, le bœuf le remercia pour sa bienveillance et pour l’avoir laissé se reposer de la fatigue durant ce jour. Mais l’âne ne lui répondit aucune réponse, et se repentit le plus fort repentir. Le lendemain le semeur vint et prit l’âne et le fit labourer jusqu’à la fin du jour. Et l’âne ne retourna que le cou écorché et exténué de fatigue. Et le bœuf, l’ayant vu dans cet état, se mit à le remercier avec effusion et à le glorifier de louanges. Alors, l’âne lui dit : « J’étais bien tranquille auparavant : or, rien ne me nuisit que mes bienfaits. » Puis, il ajouta : « Pourtant il faut que tu saches que je vais te donner un bon conseil ; j’ai entendu notre maître qui disait : « Si le bœuf ne se lève pas de sa place, il faut le donner à l’égorgeur pour qu’il l’immole et qu’il fasse de sa peau un cuir pour la table ! » Et moi j’ai bien peur pour toi, et je t’avise du salut ! » Lorsque le bœuf entendit les paroles de l’âne, il le remercia et dit : « Demain, j’irai librement avec eux vaquer à mes occupations. » Là-dessus, il se mit à manger et

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VII

avala tout le fourrage et même il lécha le boisseau avec la langue. Tout cela ! et leur maître écoutait leurs paroles. Lorsque parut le jour, le commerçant sortit avec son épouse vers l’habitation des bœufs et des vaches et tous deux s’assirent. Alors le conducteur vint, et prit le bœuf et sortit. A la vue de son maître, le bœuf se mit à agiter la queue, à péter avec bruit et à galoper follement en tous sens. Alors le commerçant fut pris d’un tel rire qu’il se renversa sur le derrière. Alors son épouse lui dit : « De quelle chose ris-tu ? » Il lui dit : « D’une chose que j’ai vue et entendue, et que je ne puis divulguer sans mourir. » Elle lui dit : « Il faut absolument que tu me la racontes et que tu me dises la raison de ton rire, même si tu devais en mourir ! » Il lui dit : « Je ne puis te divulguer cela à cause de ma peur de la mort. » Elle lui dit : « Mais alors tu ne ris que de moi ! » Puis elle ne cessa de se quereller avec lui et de le harceler de paroles avec opiniâtreté, tant qu’à la fin il fut dans une grande perplexité. Alors il fit venir ses enfants en sa présence, et envoya mander le kadi et les témoins. Puis il voulut faire son testament avant de révéler le secret à sa femme et de mourir : car il aimait sa femme d’un amour considérable, vu qu’elle était la fille de son oncle paternel et la mère de ses enfants, et qu’il avait déjà vécu avec elle cent vingt années de son âge. De plus, il envoya quérir tous les parents de sa femme et les habitants du quartier, et il raconta à tous son histoire et qu’à l’instant même où il dirait son secret il mourrait ! Alors tous les gens qui étaient là dirent à la femme : « Par Allah sur toi ! laisse de côté cette affaire de peur que ne meure ton mari, le père de tes enfants ! » Mais elle leur dit : « Je ne lui laisserai la paix qu’il ne m’ait dit son secret, même dût-il en mourir ! » Alors ils cessèrent de lui parler. Et le marchand se leva de près d’eux et se dirigea du côté de l’étable, dans le jardin, pour faire d’abord ses ablutions, et retourner ensuite dire son secret et mourir. Or, il avait un vaillant coq capable de satisfaire cinquante poules, et il avait aussi un chien ; et il entendit le chien qui appelait le coq et l’injuriait et lui disait : « N’as-tu pas honte d’être joyeux alors que notre maître va mourir ! » Alors le coq dit au chien : « Mais comment cela ? » Alors le chien répéta l’histoire et le coq lui dit : « Par Allah ! notre maître est bien pauvre d’intelligence ! Moi, j’ai cinquante épouses, et je sais me tirer d’affaire en contentant l’une et en grondant l’autre ! Et lui n’a qu’une seule épouse et il ne sait ni le bon moyen ni la façon dont il faut la prendre ! Or, c’est bien simple ! Il n’a qu’à couper à son intention quelques bonnes tiges de mûrier, et entrer brusquement dans son appartement réservé et la frapper jusqu’à ce qu’elle meure ou se repente : et elle ne recommencera plus à l’importuner de questions sur quoi que ce soit ! » Lorsque le commerçant eut entendu les paroles du coq discutant avec le chien, la lumière revint à sa raison et il résolut de battre sa femme.

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VIII

« LE LANGAGE OBSCUR »

de H. Gougaud, L’arbre d’amour et de sagesse, Paris, Seuil, 1992 (Russie - Sibérie)

Il était une fois un berger nommé Pierre. Il n’avait peur de rien, mais ne le

savait pas. Rien n’était survenu d’effrayant dans sa vie. Or, un jour qu’il gardait le troupeau de son maître, dans un pré, à la lisière d’une forêt, comme il mangeait son pain de midi à l’ombre d’un ormeau, il entendit soudain, venant du fond du bois, un sifflement si déchirant qu’il se dressa d’un bond et se dit : « Qui s’égosille ainsi est au bord de la mort ! » Il s’approcha du premier rideau d’arbres, écouta un instant, n’entendit plus que le vent. Il franchit la lisière.

Alors l’appel lointain à nouveau traversa les verdures et sa force parut aux oreilles de Pierre tant éperdue, souffrante et fascinante aussi qu’il se sentit captif et tiré droit devant, sans pouvoir résister à travers les feuillages et les buissons de ronce. Il pensa : « je suis fou, malheur, je vais me perdre ! » Mais son corps s’avança sans écouter sa tête jusqu’à ce qu’il parvienne au bord d’une clairière. Là il fit halte enfin. Au milieu du rond d’herbes environné de chênes était un cercle de feu. Au centre de ce cercle se tenait un serpent. Ce serpent était noir, rouge et jaune doré. Voyant Pierre apparaître il éleva sa gueule au-dessus du brasier, il la tendit au ciel et dit à voix humaine :

- Berger, je brûle ! Au nom de Dieu, sauve-moi de la mort ! « Si c’est au nom de Dieu que ce monstre m’appelle, pensa Pierre, je dois le secourir. » Il s’approcha, lui tendit son bâton ferré à travers les flammes, et le long du bâton le serpent s’enroula, et s’enroula aussi le long du bras de Pierre, et s’enroula enfin autour de la poitrine, autour du cou de Pierre qui se mit à gémir, le souffle presque éteint : - Est-ce ainsi que l’on paie un service rendu au nom du Tout-Puissant ? Le monstre répondit en sifflant contre sa tempe : - Homme, ne crains pas. Si je te tiens serré, c’est que j’ai grand besoin, encore, de ton aide. Je suis le fils du roi des serpents, et tu dois me ramener au palais de mon père. - Monstre, je ne peux pas. J’ignore où il se trouve. - Qu’importe, moi je sais. Va tout droit. Pierre sen fut tout droit, puis à gauche et à droite, escalada des rocs, franchit des passes sombres. Il s’enfonça si loin dans l’ombre du sous-bois qu’il parvint en un lieu inconnu des oiseaux. Il perdit le nord et le sud dans d’obscures broussailles. Les rayons de soleil sous l’épaisseur des branches se firent plus menus que des fils d’araignée. Encore il chemina dans les profondeurs vertes. Devant lui soudain se dressa un haut portail aux étranges battants. Ils n’étaient pas de bois, ni de fer, ni de pierre. Ils étaient faits de milliers et milliers de vipères enchevêtrées. Au seuil de ce portail Pierre enfin s’arrêta. - Nous voici parvenus au lieu le plus secret du monde, lui dit le fils du roi des Serpents. Homme, écoute-moi bien. Mon père règne ici. Tu le verras bientôt. Pour prix de ta bonté, il te demandera ce que tu veux de lui. Sache qu’il est un bien plus précieux que tout autre. Lui seul peut te l’offrir. C’est le langage obscur. Il siffla trois coups. Le portail de vipères aussitôt se défit.

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IX

Un palais apparut, à nul autre semblable. Ses colonnes étaient des arbres millénaires. Sa voûte était de feuilles, ses murs de brume opaque. Au bout d’une longue allée était un trône fait de racines mêlées. Le roi des Serpents se tenait là noblement assis. Pierre s’approcha de lui, mit un genou à terre et resta tête basse, sans oser regarder cet être magnifique aux yeux terrifiants. Au-dessus de sa tête il entendit ces mots : - Tu as sauvé mon fils, homme, merci à toi. Veux-tu quelques diamants pour prix de ce service ? - Je veux plus, je veux moins, dit Pierre,à voix tremblante. - Quelques poignées d’argent ? - Beaucoup plus, beaucoup moins. - Une charretée d’or ? - Seigneur, je veux le langage obscur. - Que demandes-tu là, imprudent ? gronda la voix soudain terrible. Sais-tu que si je te donne le secret du langage obscur tu ne devras jamais le révéler à personne, sous peine de mourir sur l’heure ? Il te pèsera lourd. Sauras-tu le garder ? - Seigneur, c’est mon affaire. - Fort bien, dit la voix sombre après un long silence. Approche ton visage. Pierre ferma les yeux et tendit la figure, sentit dans ses oreilles, la droite puis la gauche, se darder vivement une langue fourchue. - Homme, tu as maintenant le langage obscur. Va, murmura la voix. Pierre se redressa, il tourna les talons, sortit du palais et se mit à courir à travers la forêt, et courant follement s’émerveilla bientôt, car la rumeur du vent dans les arbres feuillus l’appelait par son nom et lui contait merveilles, et le chant des oiseaux lui souhaitait le bonjour, et les bruissements d’herbes, et les mille rumeurs des buissons traversés parlaient, chantaient, riaient à ses oreilles neuves. Mille voix et chansons ainsi l’accompagnaient jusqu’à la lisière du bois où était son troupeau. Il s’assit essoufflé à l’ombre de l’orme où il avait laissé son pain et sa serviette. Il ouvrit son couteau pour déjeuner enfin. Alors il entendit sur une haute branche deux corbeaux croasser. Il comprit leur langage. Il était simple et net dans la paix de midi. L’un dit à son compère : - Vois-tu cette dalle qui couvre le caveau où un vieux coffre d’or attend qu’on le découvre ? Là est un nid de vers charnus et succulents. - Où donc ? répondit l’autre. Je suis vieux, ma vue baisse. Je ne distingue rien. - Regarde le bélier. Il est couché dessus. Pierre aussi regarda. « Ainsi donc, pensa-t-il, un trésor est enfoui sous cette pierre plate où se tient le bélier. Oh, la bonne nouvelle ! » Il planta son couteau dans son croûton de pain, courut à la maison où son maître fumait tranquillement sa pipe en lisant un journal vieux de quelques années. - Viens vite, lui dit-il. Ils s’en retournèrent au pré, soulevèrent la dalle, virent au fond du trou un coffre vermoulu, le hissèrent sur le pré, l’ouvrirent, restèrent bouche bée. Il débordait d’or. Après qu’ils eurent ri, chanté, dansé la gigue, le maître (un homme bon, bénie soit sa famille) prit Pierre par le bras et lui dit : - Tu as besoin de tout, je n’ai besoin de rien. Prends ce trésor et fais-en ton profit. Achète une maison, des vignes, des champs, des troupeaux de chevaux, de vaches, de moutons, engage des bouviers, des bergers, des servantes, épouse enfin ma fille et vivons tous heureux.

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X

Et Pierre fit ainsi. Il acheta maison, champs, vignes et troupeaux, engagea quelques bonnes gens du voisinage, prit femme et vécut satisfait jusqu’au prochain Noël. Or, ce beau matin-là, comme il disposait la paille de la crèche devant la cheminée, sa femme lui trouva la mine chiffonnée. Elle lui demanda : - As-tu quelque souci ? Il répondit : Je me souviens du temps où je passais ces jours de la Nativité tout seul avec mes bêtes, sans amis, sans épouse. Je pense à nos bergers qui sont comme j’étais encore l’an dernier. Femme, je ne veux pas que la nuit où Dieu naît ils se sentent oubliés autant que j’ai pu l’être. Je veux qu’ils soient contents. Nous allons donc ce soir leur porter des cadeaux, quelques flacons de vin et des dindes rôties, afin qu’ils réveillonnent comme de bons chrétiens. Ainsi fut bientôt fait. L’une sur sa jument, l’autre sur son cheval, ils montèrent aux enclos où étaient les bergers. Dès qu’ils furent rendus, Pierre les embrassa tous, et leur dit bonnement : - Buvez, faites bombance, cette nuit est à vous. Ne vous souciez pas des bêtes. J’en prendrai soin jusqu’au prochain matin. Il veilla toute la nuit, puis dans le jour levé il salua son monde, appela son épouse, battit la croupe de sa monture d’un grand coup de chapeau, et tous deux s’en allèrent. Or, comme ils cheminaient sur la lande déserte, Pierre entendit soudain parler son cheval. La bête grognassa quelques remarques acerbes sur l’état du chemin, puis souffla des naseaux, remua sa crinière et dit à la jument que montait sa femme, et qui traînait un peu par les caillasses : - Presse-toi donc, il va bientôt neiger, et la route est encore longue avant l’écurie ! - Hé, trotte donc, répondit la jument, luttant derrière lui contre le vent glacé. Tu peux aller bon train, tu ne portes qu’un homme ! - Et que portes-tu donc, dis-moi, de plus pesant ?

- Trois vies, l’ami, trois vies ! Un poulain dans mes flancs, sur mon dos une femme, dans son ventre un enfant ! Pierre, entendant cela, partit d’un grand rire émerveillé. « Un enfant, pensa-t-il, bonté divine ! » A nouveau il se prit à rire à grands éclats. Sa femme, étonnée par cette joie subite, poussa jusqu’à lui sa monture et lui demanda pourquoi diable il se réjouissait ainsi tout seul. Il s’en fallut d’un rien, tant il était heureux, qu’il n’avoue le secret qu’il lui fallait garder. - J’ai ri, dit-il, c’est vrai. Femme, j’ai mes raisons. Tu n’en sauras pas plus. Sa compagne, piquée, sentit ses joues rosir. Une lumière vive s’alluma dans ses yeux. Il refusait de dire ? Elle ne voulut savoir qu’avec plus d’impatience. Pierre resta muet. Elle le harcela, fit semblant de pleurer, se plaignit hautement qu’on la tint à l’écart des choses importantes. - Femme, lui dit son homme, si je parle je meurs. Veux-tu donc être veuve ? Il espérait clouer le bec de la jolie. Hélas, il ne fit qu’aiguillonner sa hargne. Les femmes sont ainsi. Quand tu veux leur parler, « cause toujours, bonhomme ». Mais quand tu veux garder quelque chose pour toi, les voilà tout à coup affamées de l’oreille. - Je m’en moque, lui grinça-t-elle au nez. Le jour de notre mariage, nous nous sommes promis de n’avoir jamais aucun secret l’un pour l’autre. Tiens parole, brigand.

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XI

Ils étaient parvenus dans la cour de leur ferme. - Fort bien, tu sauras donc, dit Pierre, résigné. Mais puisqu’il me faudra aussitôt trépasser permets-moi, s’il te plaît, de dire adieu au monde. Il fit porter son lit au seuil de sa maison, se coucha dessus et salua le ciel, les nuages, le vent, ses outils dans la cour, ses champs, ses vignes, son chien qui lui léchait les mains en gémissant. Pierre le caressa, puis sortit de sa poche un morceau de vieux pain. - Mange, compagnon, c’est mon dernier cadeau, lui dit-il tristement. La bête répondit : - Maître, je n’ai pas faim. Le croûton tomba dans l’herbe. Un coq, passant par là, s’en vint le picorer avec une vigueur si joyeuse et gourmande que le chien lui grogna : - As-tu donc un caillou à la place du cœur ? - Pourquoi ? demanda l’autre. - Notre maître se meurt. Toi tu manges, content, sans souci de sa peine. - Bon vent, s’il veut périr ! répondit le coq. Ce ne sera qu’un fou de moins dans ce bas monde. En vérité, l’ami, il n’entend rien aux femmes. Il vivrait, et fort bien, s’il savait ce qu’il faut à la sienne. - Et que faut-il, dis-moi ? - Quelques coups de bâton sur ses fesse dodues. Ainsi lui passerait l’envie de poser des questions qu’elle ne doit pas poser. « Sacredieu, pensa Pierre, ce bougre parle d’or. » Il bondit hors du lit, prit un manche de pioche, entra dans la maison. Sa femme chantonnait en faisant la cuisine. Il lui vint droit dessus en grondant, le poing haut. Elle se tourna vers lui. - Mon homme, lui dit-elle, cessons nos disputes, car je crois que je porte un enfant dans le ventre. Elle baissa la tête en souriant tout doux. Il la prit dans ses bras. Elle lui dit encore : - Que voulais-je savoir ? Je ne m’en souviens plus. - Qu’importe, lui dit-il. Et ils rirent ensemble.

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XII

« SERI, SA FEMME ET SON CHIEN »

de Denise Paulme, La mère dévorante, Paris, Gallimard, 1976 (Côte d’Ivoire),

Un jour, Seri partit en forêt avec son chien pour recueillir du vin de palme. Arrivé au palmier, Seri en commence l’ascension lorsque son couteau lui échappe, tombe à terre. Il se lamente : « Comment faire ? Si je descends pour ramasser mon couteau, je serai fatigué et n’aurai plus la force de remonter. Que mon chien n’est-il un homme ; je lui dirais de monter m’apporter mon couteau. » Le chien entend ces mots et répond à Séri : « Je monterai te donner ton couteau. Je vais te faire un cadeau. Mais si tu ne fais pas bien attention, tu mourras. » Seri dit : « Je ferai attention. » Le chien monte, lui donne son couteau. (Seri saigne son palmier). Seri et son chien sont descendus. Une fois à terre, le chien verse quelques gouttes d’un médicament dans les yeux et dans le nez de Seri. Aussitôt, celui-ci comprend ce que disent tous les animaux. Ils rentrent au village. Le soir, la femme de Seri qui était borgne pilait le riz. Une poule et ses poussins s’approchent du mortier, la poule dit aux poussins : « Mes enfants, passez du côté où la femme ne voit pas, vous pourrez manger à votre aise ; moi, pour retenir son attention, je vais picorer de l’autre côté. » Seri l’entend, il rit. Sa femme lui demande : « Pourquoi ris-tu ? - Si je te le dis, je vais mourir. » La femme s’irrite : « Je sais pourquoi tu ris, tu ne veux pas l’avouer : c’est que ma mère est morte. » Seri proteste, sa femme refuse de l’écouter. Dans la nuit, la femme pleurait. Les souris sont venues manger le riz qu’elle avait mis de côté. Tandis qu’elle chassait les souris, l’une d’elles dit à ses compagnes : « Sa mère est morte, mais son chagrin ne l’empêche pas de surveiller son riz. » Seri l’entend, il rit. Au matin, la femme, offensée, est partie chez ses parents. Seri la rejoint, lui demande de revenir. Elle refuse. On explique l’affaire aux parents de la femme. Ceux-ci demandent à Seri : « Pourquoi as-tu ri ? - C’est un secret, si je le dis, je vais mourir. » Les parents demeurent inflexibles : « Si tu ne t’expliques pas clairement, tu m’emmèneras pas ta femme. » Ainsi contraint, Seri a dit pourquoi il avait ri. Ayant violé sa promesse, il est mort. Depuis, si un homme refuse d’obéir, on n’insiste pas.

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XIII

ECOLE IHSANE 2

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XIV

CLASSE DE CM2

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XV

Domaine : Français

ETUDES DE CONTES ET INTERCULTURALITE

Séance 1 du 2/03/05

Objectifs et compétences spécifiques : - repérer et nommer les différentes étapes du conte (schéma narratif) - réinvestir le schéma narratif pour les contes suivants - repérer et reconnaître le vocabulaire spécifique à un pays, une culture

Durée Déroulement et consignes Matériel et organisation Tâches de l’enseignant

5 min

15 min

10 min

15 min

15 min

� Explication du projet : - lecture offerte de quatre contes de pays

différents - étude comparative de ces contes

(ressemblances, différences) - écriture d’une version marocaine de ces

contes

� Lecture offerte de la première version : - élaboration des règles d’écoute - repérez quelles sont les différentes étapes du

contes et les événements correspondants

� Commentaires sur le conte, construction du schéma narratif et remplissage du tableau

� Lecture offerte de la deuxième version : - repérez quels sont les événements

correspondants aux différentes étapes du conte

� Commentaires, remplissage du tableau et comparaison des contes (traits culturels notamment)

Trame du tableau à double entrée (à ce stade ne figurent

que les titres et origines des différents contes qui seront lus)

« Le Langage des animaux » de Ph. et R. Soupault

(Italie)

Oral collectif

« Fable de l’âne, du bœuf et du maître de labour »

des Mille et une nuits (Irak)

Oral collectif

Accrocher le tableau fait d’une multitude de feuilles en

papier A4 (disponible en annexe)

Lecture intonative et offerte

Remplissage du tableau

Lecture intonative et offerte

Remplissage du tableau

Remarques : - intérêt des élèves pour ces deux contes, l’histoire semblant leur plaire - pré-requis intéressants sur le schéma narratif : ne semble pas être une situation d’apprentissage - repérage difficile des aspects culturels des contes

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Eduquer à l’interculturalité à travers l’étude et l’écriture de contes

XVI

Domaine : Français

ETUDES DE CONTES ET INTERCULTURALITE

Séance 2 du 9/03/05

Objectifs et compétences spécifiques : - réinvestir le schéma narratif vu en première séance - trouver les ressemblances et différences entre plusieurs contes et essayer de les expliquer - repérer et reconnaître le vocabulaire spécifique à un pays, une culture

Durée Déroulement et consignes Matériel et organisation Tâches de l’enseignant

10 min

15 min

10 min

10 min

10 min

5 min

� Retour sur le schéma narratif commun aux contes

� Lecture offerte de la troisième version : - rappel des règles d’écoute - repérez quels sont les événements

correspondants aux différentes étapes du conte

� Commentaires, remplissage du tableau et comparaison avec les contes précédents

� Lecture offerte de la quatrième version : - repérez quels sont les événements

correspondants aux différentes étapes du conte

� Commentaires, remplissage du tableau, comparaison avec les contes précédents et bilan sur l’interculturalité des contes (particularités et universalité) � Pour le lundi 14/03, écriture d’un conte marocain

Tableau (les deux dernières colonnes restent à compléter)

« Le langage obscur » de H. Gougaud

(Sibérie)

Oral collectif

« Seri, sa femme et son chien »

de Denise Paulme (Côte d’Ivoire)

Oral collectif

Travail écrit individuel à la maison

Accrocher le tableau en papier, ne dévoiler les

colonnes qu’après validation

Lecture intonative et offerte

Remplissage du tableau

Lecture intonative et offerte

Remplissage du tableau

Ecriture de la consigne

Remarques : - bonne mémorisation des deux premiers contes et écoute attentive des deux nouveaux - comparaison des contes portant plus sur les événements que sur les aspects culturels

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XVII

Domaine : Français

ETUDES DE CONTES ET INTERCULTURALITE

Séance 3 du 16/03/05

Objectifs et compétences spécifiques : - réinvestir le schéma narratif pour le conte marocain - employer les temps du récit - utiliser le vocabulaire spécifique à un pays, une culture (Maroc)

Durée Déroulement et consignes Matériel et organisation Tâches de l’enseignant

5 min

15 min

15 min

15 min

10 min

� Mise en place des critères d’évaluation et rappel des règles de la lecture offerte :

- respect du schéma narratif - respect du thème « le langage des animaux » - respect des temps du récit - conte marocain

� Lecture offerte d’un premier conte d’un élève - repérez quelles sont les différentes étapes du

contes et les événements correspondants et si tous les critères sont respectés

et commentaires sur le conte, remplissage d’une nouvelle colonne du tableau et évaluation collective

� Lecture offerte d’un deuxième conte d’un élève et commentaires sur le conte, remplissage d’une nouvelle colonne du tableau et évaluation collective

� Lecture offerte d’un deuxième conte d’un élève et commentaires sur le conte, remplissage d’une nouvelle colonne du tableau et évaluation collective � Bilan des productions et du projet

Tableau en papier, entièrement complété mais prolongé à la

craie sur le tableau noir

Oral collectif

Oral collectif

Oral collectif

Oral collectif

Accrocher le tableau en papier tout à gauche sur le

tableau noir et écrire les critères d’évaluation

Ecoute attentive

Ecriture du titre du conte et remplissage du tableau

Ecoute attentive Ecriture du titre du conte et

remplissage du tableau

Ecoute attentive Ecriture du titre du conte et

remplissage du tableau

Remarques : - productions écrites très satisfaisantes d’un point de vue sémantique (frustration de ceux qui n’ont pas pu passer) - bonne attention des autres élèves et bonne participation lors du remplissage du tableau et de l’évaluation

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XVIII

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Eduquer à l’interculturalité à travers l’étude et l’écriture de contes

XIX

CONTES DU MONDE

CONSIGNE : en t’inspirant des 4 contes étudiés, rédige un conte marocain qui respecte ce schéma narratif. Tu es libre de choisir les personnages, les animaux et la fin du conte. Pense à utiliser un vocabulaire propre à la culture marocaine.

SCHEMA NARRATIF

Le langage des animaux

(Italie)

Fable de l’âne, du bœuf et du maître de labour

(Irak)

Le langage obscur

(Russie)

Séri, sa femme et son chien

(Côte d’Ivoire)

Situation initiale : - présentation du héros (prénom, métier, situation familiale…)

un berger pauvre et célibataire un riche commerçant, marié, Allah lui donna le pouvoir de comprendre le langage des animaux

un berger (Pierre) pauvre et célibataire

cultivateur (Séri), marié, situation moyenne, il comprend les chiens

Elément perturbateur : - comment le héros reçoit le pouvoir de comprendre le langage des animaux

il sauve un serpent, en échange, on lui donne le pouvoir de comprendre le langage des animaux, mais il ne faut pas révéler le secret

il sauve un serpent, en échange, on lui donne le pouvoir de comprendre le langage obscur, mais il ne faut pas révéler le secret

il perd son couteau, le chien l’aide et lui donne un cadeau, un médicament magique pour comprendre tous les animaux

Situation nouvelle : - conséquence de la connaissance du langage des animaux

conversation entre les deux corbeaux, trésor sous l’arbre, enrichissement du berger (maison, mariage, riche propriétaire)

conversation entre les deux corbeaux, trésor dans un caveau, sous le bélier, enrichissement du berger (maison, mariage, riche propriétaire)

le cultivateur comprend tous les animaux, il n’y a pas de changement particulier dans sa vie

Elément perturbateur : - situation qui déclenche le rire du héros et le questionnement de la femme

conversation entre le cheval et la jument, rire du berger, questionnement de sa femme

conversation entre l’âne et le bœuf, comportement du bœuf, rire du commerçant, questionnement de sa femme

conversation entre le cheval et la jument, rire du berger, questionnement de sa femme

conversation entre la poule et ses poussins, rire du cultivateur, questionnement de sa femme, conversation entre les deux souris, rire à nouveau

Situation finale : - ce que le héros décide de faire, dévoiler ou non le secret (retournement de situation possible)

préparation à la mort (cercueil) conversation entre le corbeau et le coq (morceau de pain), secret non dévoilé, femme battue

préparation à la mort (testament, ablutions, …), conversation entre le coq et le chien (morceau de pain), secret non dévoilé, femme battue

préparation à la mort (au revoir au monde, animaux et choses), conversation entre le coq et le chien (morceau de pain), berger prêt à battre sa femme, celle-ci annonce qu’elle est enceinte, secret non dévoilé, réconciliation, fin heureuse

la femme va chez ses parents, elle ne rentrera pas avec son mari s’il ne lui dit pas pourquoi il a ri, secret dévoilé par amour pour sa femme, mort du héros

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XX

Productions d’élèves :

N°1

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XXI

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XXII

N°2

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XXIII

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XXIV

N°3

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XXV

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XXVI

N°4

Ce conte a été retranscrit tel quel avec le traitement de texte. (Il était écrit sur le cahier de devoirs de l’élève. Ne pouvant le garder avec moi pour aller en ville faire des photocopies, j’ai du le recopier rapidement sur place dans l’école, afin d’en conserver une trace). …………………………………………………………………….

Le langage des plantes. Un jour, pendant que la petite laitière Nadia se promenait dans la grande

forêt près d’El Jadida avec son petit oiseau Sami entendit un cri elle a sut que c’était d’un singe elle courut et disparaît entre les arbres de la forêt.

Mais quand elle arrive elle le trouve entrain de se noyer dans la petite rivière. Elle lui sauva la vie et comme ça ils devenèrent amies. Un jour qui était le jour d’anniversaire de Nadia, le singe voulut lui donner un cadeau, alors la meilleure chose est de lui offrir le langage des plantes. Elle était très heureuses mais le singe lui dit de ne pas avouer se secret à personne juste à une seule personne qu’elle aime. L’an suivant au village de Nadia il y avait la sécheresse. Elle entendu une conversation entre une tournesole et la rose qu’elle a déjà planter dans sa maison. La tournesole lui dit : si notre Nadia savait qu’il y avait en dessous du village de l’eau, jamais il y aura la sécheresse. Quand elle a entendu cela elle appela sa mère et son père pour l’aider à creser un puie. Les voisins les en vue alors tout les habitants du village commencèrent a creser et depuis ce jour là il n’y a plus de la sécheresse.

Un autre jour elle a entendu une conversation entre un petit arbre et un long palmier. Le palmier lui dit : un charmant sultan endormit dans le château du bois et pour se reveillé il a besoin du noix de coco. Alors, elle commence a préparer ses valises pour voyager, avec elle une noix de coco. Elle arriva dans le grand château elle a passé à la grande salle où dort le prince lui donna le noix de coco. Il se reiveilla et lui remercia en lui disant mon père te dira que tu devras choisir ta recompence. Si tu veux tu peux lui demander de m’épouser. Elle demanda cela au roi et il accepta. Le mariage était passe elle a invité son singe après le mariage le prince lui a demander de lui dire la cause d’inviter le singe. Elle lui avoua la vérité car elle l’aimé et elle lui demanda de garder ce secret et de ne le dire à personne car si quelqu’un le connais elle sera morte à coup.

Un jour le prince est tombé amoureux d’une jolie et merveilleuse princesse et oublia sa femme. Il se maria d’elle sans que Nadia le sache jusqu’à un beau jour ou l’arbre du jardin a parlé à une tulipes : - La pauvre Nadia elle ne sais même pas que son mari qu’elle croyait qu’il l’aimait a épousé une jolie princesse. Quand elle a entendu cela elle a dit : - Je sais que ma fin est presque arrivée car il dira a sa nouvelle femme qu’elle connaissait le langage des plantes. Alors, je vais mouru vraiment car le jour qu’elle craignait est arrivé. La prince a su que sa femme connai tout, alors pour qu’elle ne tue pas sa nouvelle femme il a décidé d’avouer le secret et comme ça Nadia sera morte. En se temps là, Nadia était assise tout à coup elle tomba morte.

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XXVII

N°5

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XXVIII

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XXIX

N°6

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XXX

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XXXI

N°7

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XXXII

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XXXIII

N°8

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XXXIV

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XXXV

N°9

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XXXVI

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Eduquer à l’interculturalité à travers l’étude et l’écriture de contes

XXXVII

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XXXVIII

N°10

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Eduquer à l’interculturalité à travers l’étude et l’écriture de contes

XXXIX

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Eduquer à l’interculturalité à travers l’étude et l’écriture de contes

XL

N°11

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Eduquer à l’interculturalité à travers l’étude et l’écriture de contes

XLI

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EDUQUER A L’INTERCULTURALITE A TRAVERS L’ETUDE ET L’ECRITURE

DE CONTES

Projet mené auprès d’élèves marocains (français langue étrangère)

Cycle 3

Résumé : Face au défi de la société d’éviter une « guerre des cultures », du fait de l’existence de conflits liés au non-respect des différences, l’école a un rôle à jouer. Elle doit préparer les élèves à leur futur statut de citoyen français, européen et du monde à travers notamment une éducation à l’interculturalité. Les contes sont un support privilégié pour que les élèves s’ouvrent aux autres cultures. Les compétences travaillées autour de l’étude et l’écriture de contes sont nombreuses, à la fois spécifiques et transversales, les projets à envisager pouvant être véritablement transdisciplinaires. Mots clés :

- interculturalité - ouverture sur le monde - contes - projet d’écriture