40
Espaces de Sobolev et introduction aux équations aux dérivées partielles Marius TUCSNAK Nancy Université/CNRS/INRIA May 7, 2012

Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

  • Upload
    others

  • View
    4

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

Espaces de Sobolev et introductionaux équations aux dérivées partielles

Marius TUCSNAK

Nancy Université/CNRS/INRIA

May 7, 2012

Page 2: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

2

Page 3: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

Contents

1 Rappels et compléments 5

1.1 Fonctions test . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6

1.2 Intégration sur la frontière d’un ouvert borné . . . . . . . . . . . . . . 10

1.3 Convolution et régularisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12

1.4 Distributions dans un ouvert . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16

1.5 Les opérateurs operateurs div, grad, rot et ∆ . . . . . . . . . . . . . . 20

2 Espaces de Sobolev 27

2.1 Définition et premières propriétés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27

2.2 Les espaces Hs(Rn), avec s ∈ R . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31

2.3 Densité et opérateurs de prolongement . . . . . . . . . . . . . . . . . 33

2.4 Opérateurs de trace . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36

3

Page 4: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

4 CONTENTS

Page 5: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

Chapter 1

Rappels et compléments

Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants de l’analyse math-ématique. Ces outils sont essentiels pour une approche moderne des équations auxdérivées partielles. Il s’agit, en particulier, de la théorie des distributions. Nousdonnons ici seulement quelques éléments de cette théorie, sans avoir la prétentionde remplacer un cours dédié à ce sujet. Pour une étude approfondie des distri-butions nous recommandons le livre [8] de Laurent Schwartz (fondateur de cettethéorie) où les travaux plus récents de Bony [2], Hörmander [5], Zuily [9]. Nousfaisons également quelques rappels sur le calcul différentiel et sur la convolution desfonctions.

Notation. Dans ce chapitre et dans les suivants, nous utilisons la notation pourles multi-indices telle qu’elle a été introduite par Laurent Schwartz. Plus précisé-ment, pour α = (α1, ... αn) ∈ Nn and x = (x1, . . . xn) ∈ Rn, on pose

|x| = ((x1)2 + (x2)

2 . . .+ (xn)2)

12 ,

xα = xα11 . . . xαn

n , α! = (α1!) . . . (αn!), |α| =n∑i=1

αj .

La somme de α = (α1, . . . , αn) et β = (β1, ... βn) définie par

α + β = (α1 + β1, . . . αn + βn).

Pour le produit scalaire dans Cn on utlise la notation:

v · w = v1w1 . . .+ vnwn .

Nous notons par Ω un ouvert de Rn. Pour tout any m ∈ N, Cm(Ω) est l’espacede toutes les fonctions φ : Ω→C dont les dérivées partielles d’ordre 6 m existentet sont continues. C0(Ω) est également désigné par C(Ω). Les fonctions de C(Ω) nesont pas nécessairement bornées. Nous notons par C∞(Ω) l’intersection de toutesles espaces Cm(Ω) (m ∈ N). Pour α ∈ Nn et f ∈ Cm(Ω) avec |α| 6 m, we nousnotons

∂αf =∂|α|f

∂xα11 . . . ∂xαn

n

=∂α1

∂xα11

. . .∂αn

∂xαnn

f .

5

Page 6: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

6 Rappels et compléments

1.1 Fonctions test

Si K est l’adhérence d’un ouvert de Rn, m ∈ N ou m = ∞, on note Cm(K)l’espace formé par the les restrictions à K des fonctions de Cm(Rn). On note C∞(K)l’intersection de tous les espaces Cm(K) (m ∈ N). Si K est un compact et m <∞,alors pour tout φ ∈ Cm(K) on définit

∥φ∥Cm(K) = supx∈K, |α|6m

|(∂αφ)(x)| . (1.1.1)

Muni de cette norme, Cm(K) est un espace de Banach. Pour φ ∈ Cm(Rn) et K uncompact arbitraire de Rn, on utilise encore la notation (1.1.1), même si pur un tel(compact arbitraire) K, (1.1.1) ne défini pas une norme sur Cm(K) (à cause du faitque ∂αφ n’est pas déterminé par φ|K).

Pour φ ∈ C(Ω), le support de φ est l’adhérence (dans Rn) de x ∈ Ω | φ(x) = 0.Le support de φ est noté par supp φ. On note par D(Ω) l’ensemble de tous φ ∈C∞(Ω) qui ont un support compact contenu dans Ω. Les fonctions de D(Ω) sont ditesfonctions fonctions test. Pour un compact K ⊂ Ω, on note par DK(Ω) l’ensembledes φ ∈ D(Ω) avec suppφ ⊂ K. Pour p ∈ [1,∞), on note Lp(Ω) l’espace de toutesles fonctions mesurables f : Ω→C telles que

∫Ω|f(x)|pdx <∞. On note par L∞(Ω)

l’espace des fonctions mésurables essentiellement bornées de Ω à C et par L1loc(Ω)

l’espace des fonctions mesurables f : Ω→C telles que∫K|f(x)|dx < ∞ pour tout

compact K ⊂ Ω. Dans le trois dernières espaces, nous ne faisons pas de distinctionentre des fonctions qui sont égales presque partout. (Les fonctions f, g ∈ L1

loc(Ω)sont égales presque partout ssi

∫K|f(x)− g(x)|dx = 0 pour tout compact K ⊂ Ω.)

La norme dans L∞(Ω) est notée par ∥ · ∥∞.Nous allons plusieurs fois utiliser des fonctions test avec des propriétés partic-

ulières. Nous donnons ci-dessous leur construction détaillée. Notons d’abord qu’ilexiste des fonctions test non identiquement nulles.

Lemme 1.1.1. Il existe φ ∈ D(Rn) telle que

φ(0) > 0 and φ(x) > 0 ∀ x ∈ Rn .

Proof. Il est facile de vérifier que la fonction

f(t) =

0 if t 6 0

e−1t si t > 0

, (1.1.2)

est de classe C∞ sur R et f(1) = 0. On déduit que la fonction

φ(x) = f(1− |x|2

),

a les propriétés démandées.Par un simple changement de variables on voit que, pour tout δ > 0, la fonction

x 7→ φ

(x− x0δ

),

est positive, strictement positive en x0 et à support dans la boule de rayon δ centréeen x0.

Page 7: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

Fonctions test 7

Lemme 1.1.2. Il existe une fonction croissante θ ∈ C∞(R) telle que

θ(x) =

0 if x 6 01 si x > 1

.

Proof. On considère de nouveau la fonction de C∞(R) définie par (1.1.2). Nousavons clairement supp(f) = [0,∞) et 0 6 f(x) 6 1 pour tout x ∈ R. Soientg(x) = f(x)f(1 − x) et G(x) =

∫ x0g(t)dt. Alors 0 6 g(x) 6 1 pour tout x ∈ R et

supp(g) ⊂ [0, 1]. De plus, g = 0 car g(12) =

[f(12

)]2 = 0. La fonction θ(x) = G(x)G(1)

est donc C∞(R), croissante et elle satisfait

θ(x) =

0 if x 6 0 ,1 if x > 1 .

Proposition 1.1.3. Soient a < c < d < b des réels. Alors il existe ρ ∈ D(R) avec

(1) ρ(x) = 1 si x ∈ [c, d];

(2) supp ρ ⊂ (a, b);

(3) 0 6 ρ(x) 6 1 pour tout x ∈ R.

Démonstration. Soit ρ(x) = θ

(x− a

c− a

(b− x

b− d

), où θ est la fonction construite

dans le Lemme 1.1.2. Il est facile de vérifier que ρ a les propriétés demandées.

Corollaire 1.1.4. Soient n ∈ N et 0 < r < R. Il existe ρ ∈ C∞ (Rn) telle queρ(x) = 1 si ∥x∥ < r et ρ(x) = 0 if ∥x∥ > R.

Démonstration. Nous définissons ρ(x) = ρ (∥x∥2), où ρ est la fonction de laProposition 1.1.3, avec

−a = b = R2 et − c = d = r2 .

Pour x ∈ Rn et r > 0 on note B(x, r) la boule ouverte centrée en x et de rayon r.Si K est un sous-ensemble compact Rn et ε > 0 nous notons

Kε = K +B(0, ε) =∪x∈K

B(x, ε) .

Proposition 1.1.5. Soit K un compact de Rn. Pour tout ε > 0 il existe φ ∈ D(K2ε)telle que φ(x) = 1 pour x ∈ Kε and 0 6 φ(x) 6 1 pour tout x ∈ Rn.

Démonstration. Comme clos Kε est un compact, il existe x1, . . . , xp ∈ K tels que

clos Kε ⊂p∪j=1

B

(xj,

3

).

Page 8: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

8 Rappels et compléments

Compte tenu du Corollaire 1.1.4, pour tout j ∈ 1, . . . , p il existe une fonctionφj ∈ D

(B(xj,

5ε3

))telle que φj(x) > 0 pour tout x ∈ Rn et φj(x) = 1 pour

x ∈ B(xj,

4ε3

). Soit ϕ(x) =

∑Nj=1 φj(x). Alors ϕ(x) > 1 pour tout x ∈

p∪j=1

B(xj, ε).

Par ailleurs, comme

clos

p∪j=1

B

(xj,

3

)⊂ K2ε ,

on déduit que ϕ ∈ D(K2ε). Soit θ ∈ C∞(R) la fonction du Lemme 1.1.2. Il est facilede vérifier que φ(x) = θ(ϕ(x)) satisfait les conditions requises.

Proposition 1.1.6. Soit K ⊂ Rn un compact et soient D1, ...DN des ouverts telsque K ⊂ ∪Nk=1Dk. Alors il existe des fonctions φk ∈ D(Dk) (k = 1, ... N) telles queφk > 0 et

∑Nk=1 φk(x) = 1 pour tout x dans un voisinage ouvert de K.

La famille de fonctions φ1, ...φN construite dans la proposition ci-dessus est ap-pelée partition de l’unité subordonnée au compact K et au recouvrement D1, ... DN .

Pour la preuve de la Proposition 1.1.6 nous avons besoin du lemme suivant.

Lemme 1.1.7. Soit K ⊂ Rn un compact et soit (Uj)j∈1,...N un recouvrement ouvertde K. Il existe alors des compacts (Kj)j∈1,...N tels que Kj ⊂ Uj pour j ∈ 1, . . . Net

K =N∪j=1

Kj . (1.1.3)

Démonstration. Pour chaque x ∈ K on choisit rx > 0 tel que clos B (x, rx) ⊂∩x∈Dj

Dj. Alors K ⊂∪x∈K

B (x, rx), donc il existe x1, . . . , xM ∈ K tels que

K ⊂M∪i=1

B (xi, rxi). On note

Kj = K∩ ∪

clos B(xi,rxi)⊂Dj

clos B (xi, rxi)

.

L’ensemble Kj est clairement un compact contenu dans K et Kj ⊂ Dj. Nous devonsencore vérifier (1.1.3). Pour x ∈ K, il existe i ∈ 1, . . .M tel que x ∈ B (xi, rxi).Par aillers, il existe j0 ∈ 1, . . . N tel que xi ∈ Dj0 , donc clos B (xi, rxi) ⊂ Dj0 . Onen déduit que x ∈ Kj0 .

Nous sommes maintenant en mesure de prouver l’existence de la partition del’unité.

Démonstration de la Proposition 1.1.6. Compte tenu du Lemme 1.1.7, il existe descompacts (Kj)j∈1,...N tels que Kj ⊂ Dj, pour tout j ∈ 1, . . . N, et K = ∪Ni=1Kj.

Page 9: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

Fonctions test 9

De plus, en appliquant la Proposition 1.1.5 il résults que pour tout j ∈ 1, . . . N ilexiste ψj ∈ D(Dj) avec ψj(x) ∈ [0, 1], pour tout x ∈ Rn et ψj(x) = 1 pour x ∈ Kj.Si l’on pose

V =

x ∈

N∪j=1

Dj

∣∣∣∣∣N∑j=1

ψj(x) > 0

.

alors K ⊂ V et V est un ouvert. En utilisant la Proposition 1.1.5 on déduit qu’ilexiste η ∈ D(V ) telle que η(x) ∈ [0, 1] pour tout x ∈ Rn et η = 1 dans un ouvert Wtel que K ⊂ W ⊂ V . On pose

φj =ψj

(1− η) +∑N

k=1 ψk. (1.1.4)

Alors φj ∈ D(Uj), car le dénominateur du deuxième membre de (1.1.4) est positifsur V et il vaut 1 en dehors de V. Comme η = 1 sur W , la relation (1.1.4) impliqueque

∑Nj=1 φj(x) = 1 pour tout x ∈ W .

Corollaire 1.1.8. Soient K1 et K2 deux compacts disjoints de Ω ⊂ Rn. Il existealors φ ∈ D(Ω) telle que

φ(x) =

1 si x ∈ K1

−1 si x ∈ K2

et |φ(x)| 6 1 pour tout x ∈ Ω.

Démonstration. Soient U1 et U2 deux ouvert de Ω tels que

K1 ⊂ U1, K2 ⊂ U2, U1 ∩ U2 = ∅ .

En utilisant la Proposition 1.1.5 on sait qu’il existe φ1, φ2 ∈ D(Ω) telles que

φi(x) = 1 for x ∈ Ki, φi ∈ D(Ui), i ∈ 1, 2 ,

et0 6 φi(x) 6 1, i ∈ 1, 2 .

La fonction φ définie par

φ(x) = φ1(x)− φ2(x) ∀ x ∈ Ω ,

a clairement les proprétés requises.

On finit ce paragraphe en énonçant un résultat montrant qu’il existe “beaucoup”de fonctions test.

Proposition 1.1.9. Pour tout p ∈ [1,∞) l’espace D(Ω) est dense dans Lp(Ω).

Pour la preuve de ce résultat on renvoie, par exemple, à Adams [1, p. 31].

Page 10: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

10 Rappels et compléments

1.2 Intégration sur la frontière d’un ouvert borné

Définition 1.2.1. Soit Ω un ouvert borné de Rn. On dit que ∂Ω est Lipschitziennes’il existe L > 0 (appelé constante de Lipschitz de ∂Ω) telle que la condition suivantesoit satisfaite: pour tout x ∈ ∂Ω il existe un voisinage V de x in Rn et un systèmede coordonées orthonormées noté (y1, . . . yn) telles que

1. V est un rectangle dans ce système de coordonnées, i.e.,

V = (y1, . . . yn) | − ai < yj < aj, 1 6 j 6 n ;

2. Il existe une fonction Lipschitzienne φ de constante Lipschitz 6 L définie sur

V ′ = (y1, . . . yn−1) | − ai < yj < aj, 1 6 j 6 n− 1 ,

telle que |φ(y′)| 6 an2

pour tout y′ = (y1, . . . yn−1) ∈ V ′,

Ω ∩ V = y = (y′, yn) ∈ V | yn < φ(y′),∂Ω ∩ V = y = (y′, yn) ∈ V | yn = φ(y′).

Dans d’autres termes, dans un voisinage du point x ∈ ∂Ω l’ensemble Ω est endessous du graphe de φ et ∂Ω est le graphe de φ. Par conséquent, si Ω est un ouvertà frontière Lipschitzienne alors Ω est d’un seul coté de ∂Ω autour de tout point de ∂Ω.Par exemple, R∗ = R \ 0 n’est pas à frontière Lipschitzienne. Plus généralement,une domaine ayant une “coupure” dans Rn n’est pas à frontière Lipschitzienne.

Définition 1.2.2. Soient Ω un ouvert de Rn et m ∈ N. Nous disons que ∂Ω estde classe Cm si les propriétés dans la définition ci-dessus ont lieu avec φ de classeCm et les normes L∞ de toutes ces fonctions φ ainsi que de leurs dérivées jusqu’àl’ordre m sont uniformement bornées. Nous disons que ∂Ω est de classe C∞ s’il estde classe Cm pour tout m ∈ N.

A titre d’exemple, l’intérieur d’un polygone convexe de R2 a une frontière Lips-chitzienne qui n’est pas de classe C1. Si Ω = (x, y) ∈ R2 | y > sin x alors ∂Ωest de classe C∞, mais si nous remplaçons sinx par sin (x2) alors ∂Ω n’est pas Lips-chitzienne. Si Ω ⊂ R est une réunion finie d’intervalles d’adhérences disjointes, alors∂Ω (contenant un nombre fini de points) est de classe C∞.

Si Ω est un ouvert à frontière Lipschitzienne, alors l’ensemble ∂Ω peut être vucomme une variété de dimension (n − 1) dans Rn. En effet, si nous définissons Φsur V ′ par

Φ(y1, . . . yn−1) = [y1, . . . yn−1, φ(y1, . . . , yn−1)] , (1.2.1)

alors Φ−1 est une carte de ∂Ω∩ V sur V ′. En prenant une collection de telles cartes(Φ−1

j ) correspondant à une collection des rectangles (Vj) comme ci-dessus et recou-vrant ∂Ω, on obtient un atlas de ∂Ω, car les applications Φ−1

j Φk sont Lipschitziennes.

Page 11: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

Intégration sur la frontière d’un ouvert borné 11

Définition 1.2.3. Si Ω est un ouvert borné à frontière de classe C1 alors le champnormal extérieur est défini pour tout x ∈ ∂Ω, en utilisant des coordonnées localescomme dans la Définition 1.2.1 (donc x a les coordonnées (y′, φ(y′))), comme suit:

ν(x) =1√

1 +[∂φ∂y1

(y′)]2

+ · · ·+[

∂φ∂yn−1

(y′)]2

− ∂φ∂y1

(y′)...

− ∂φ∂yn−1

(y′)

1

. (1.2.2)

Ce champ vectoriel peut être prolongé à un champ défini sur tout V , en le prenantindépendant de yn. Soit maintenant (∂Ω ∩ Vj,Φ

−1j )Jj=1 un atlas de ∂Ω, où Vj =

[−aj, aj]n et Φj correspondent à φj, comme dans (1.2.1). En utilisant une partitionde l’unité (ψj)j=1,N subordonnée au compact ∂Ω et à son recouvrement (Vj)Jj=1 (voirProposition 1.1.6) nous pouvons définir un champ vectoriel ν dans un voisinage declos Ω coïncidant avec le champ normal extérieur sur ∂Ω. Si Ω est de classe Cm,avec m ∈ N∗, alors ν est de classe Cm−1. Avec les mêmes notations, nous pouvonsdéfinir l’intégrale de f ∈ C(∂Ω) sur la variété ∂Ω par∫

∂Ω

f dσ =N∑j=1

∫[−aj ,aj ]n−1

f(y′, φj(y′))ψj(y

′, φj(y′))√

1 + |∇φj(y′)|2 dy′. (1.2.3)

Définition 1.2.4. Pour f ∈ C1(clos Ω) le champ scalaire sur ∂Ω défini par

∂f

∂ν(x) = ∇f(x) · ν(x) for almost all x ∈ ∂Ω, (1.2.4)

est dit dérivée normale de f sur ∂Ω.

Les intégrales sur la variété ∂Ω sont liées aux intégrales sur ∂Ω par l’intermédiairede quelques formules très importantes. Nous acceptons sans preuve le résultat suiv-ant, de type “intégration par parties”.

Théorème 1.2.5. Soit Ω un ouvert borné de Rn à frontière de classe C1, soientf, g ∈ C1(clos Ω) et soit l ∈ 1, . . . , n. Alors∫

Ω

∂f

∂xlgdx +

∫Ω

f∂g

∂xldx =

∫∂Ω

fgνldσ, (1.2.5)

où νl designe la l-ième composante du champ normal extérieur introduit dans laDéfinition 1.2.3.

Remarque 1.2.6. Supposons que v ∈ C1(clos Ω;Cn) et g ∈ C1(clos Ω). En pren-nant f = vl dans (1.2.5) et en sommant pour l = 1, 2, . . . n, nous obtenons:∫

Ω

(div v)gdx+

∫Ω

v · ∇gdx =

∫∂Ω

(v · ν)gdσ. (1.2.6)

Page 12: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

12 Rappels et compléments

En particulier, pour g(x) = 1, nous obtenons la formule de Gauss∫Ω

div vdx =

∫∂Ω

v · νdσ. (1.2.7)

Remarque 1.2.7. La formule (1.2.6) est souvent rencontrée sous la forme: sup-posons que Ω est comme dans le Théorème 1.2.5, h ∈ C2(clos Ω) and g ∈ C1(clos Ω).Si l’on note v = gradh et on applique (1.2.6), nous obtenons la relation∫

Ω

(∆h)gdx+

∫Ω

∇h · ∇gdx =

∫∂Ω

∂h

∂νgdσ,

que nous appelerons première formule de Green . En inter changeant les rôles de het g et en prenant la différence des deux relations, nous obtenons la seconde formulede Green ∫

Ω

(∆h)gdx−∫Ω

h(∆g)dx =

∫∂Ω

∂h

∂νgdσ −

∫∂Ω

h∂g

∂νdσ,

qui a lieu pour toutes h, g ∈ C2(clos Ω).

1.3 Convolution et régularisation

Commençons par rappeler un théorème du cours d’intégration.

Théorème 1.3.1. Soient f et g deux fonctions de L1 (Rn). Alors on a

• Pour presque tout x ∈ Rn, l’application y→ f(x− y)g(y) est dans L1 (Rn).

• Si l’on pose (f ∗ g)(x) =∫Rn f(x− y)g(y)dy alors f ∗ g ∈ L1 (Rn) et

||f ∗ g||L1(Rn) 6 ||f ||L1(Rn)||g||L1(Rn).

• supp(f ∗ g) ⊂ clos (supp(f) + supp(g))

• Si le support de f ou de g est un ensemble compact alorssupp(f ∗ g) ⊂ supp(f) + supp(g)

Preuve. Sur Rn ×Rn on définit la fonction F (x, y) = f(x− y)g(y). Pour presquetout y ∈ Rn on a∫

Rn

|F (x, y)|dx = |g(y)|∫Rn

|f(x− y)|dx = ∥f∥L1(Rn)|g(y)| <∞

et que ∫Rn

dy

∫Rn

|F (x, y)|dx = ∥f∥L1(Rn)∥g∥L1(Rn).

Page 13: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

Convolution et régularisation 13

D’après le théorème de Tonelli on déduit que F ∈ L1(Rn × Rn). En appliquant leThéorème de Fubini on obtient que∫

Rn

|F (x, y)|dy <∞ presque partout sur Rn

et ∫Rn

|(f ∗ g)(x)|dx 6∫Rn

dy

∫Rn

|F (x, y)|dx = ∥f∥L1(Rn)∥g∥L1(Rn).

Soit maintenant x ∈ Rn fixé tel que la fonction y → f(x− y)g(y) soit intégrable.On a

(f ∗ g)(x) =∫Rn

f(x− y)g(y)dy =

∫(x−supp(f))∩supp(g)

f(x− y)g(y)dy.

Si x ∈ supp(f)+ supp(g), alors (x− supp(f))∩ supp(g) = ∅ et (f ∗ g)(x) = 0. Donc

(f ∗ g)(x) = 0 presque partout sur Rn \ (supp(f) + supp(g)).

Par conséquentsupp(f ∗ g) ⊂ clos (supp(f) + supp(g)) .

La dernière conclusion du théorème découle de la précédente, en remarquant quel’ensemble supp(f) + supp(g) est fermé dès q’un des ensemble supp(f) où supp(g)est compact.

Généralisation (exercice): Si g ∈ Lp(Rn), avec 1 6 p < ∞ et f ∈ L1(Rn) alorsf ∗ g ∈ Lp(Rn) et ∥f ∗ g∥Lp 6 ∥f∥L1∥g∥Lp .

Remarque. Si f et g sont à support compact alors f ∗g est à support compact. Engénéral, si l’un des supports seulement est compact alors f ∗ g n’est pas à supportcompact.

Le résultat ci-dessous montre que la notion de convolution de deux fonctions peutêtre étendue dans un cadre plus général.

Proposition 1.3.2. Soient f ∈ L1loc(Rn) et g ∈ L1(Rn). On suppose que le support

essentiel de g est un compact K de Rn. Alors f ∗ g existe et est dans L1loc(Rn).

Démonstration. Soit L un compact de Rn et considérons

F (x, y) = χL(x)f(x− y)g(y) = χL(x)f(x− y)g(y)χK(y),

où χL (resp. χL) désigne la fonction caractéristique de L (resp. de K). En posantu = x−y et L−K = x− y | x ∈ L, y ∈ K, en appliquant le théorème de Tonelli,nous avons que∫

Rn×Rn

|F (x, y)|dxdy =

∫K

|g(y)|dy∫L

|f(x− y)|dx 6 ∥g∥L1(Rn)

∫L−K

|f(u)|du.

Page 14: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

14 Rappels et compléments

Comme L−K est un compact de Rn (image du compact L×K par la soustractionRn × Rn → Rn), on a ∫

L−K

|f(u)|du <∞.

Alors, d’après le Théorème de Fubini, f ∗ g est définie presque partout sur L etχL(f ∗ g) ∈ L1(Rn). Donc f ∗ g est bien définie dans L1

loc(Rn).

Théorème 1.3.3. Soit f ∈ L1loc(Rn) et soit g ∈ Cm

0 (Rn). Alors f ∗ g ∈ Cm(Rn) et

∂α(f ∗ g)(x) = f ∗ (∂αg) (x), ∀ x ∈ Rn.

Démonstration. Soit L un voisinage compact de x0 ∈ Rn et K = supp(g). Pourx ∈ Rn et y ∈ Rn on pose

F (x, y) = f(y)g(x− y)χL−K(y) .

Pour |α| 6 m on a

|∂αxF (x, y)| 6 |f(y)| ∥∂αg∥∞ χL−K(y) ∀ y ∈ Rn.

Comme la fonction y → ∥∂αg∥∞ χL−K(y) est dans L1(Rn), in obtient facilement lerésultat annoncé.

Définition 1.3.4. On appelle suite régularisante (mollifiers en anglais) toute suite(ρk)k>1 de fonctions telle que, pour tout k ∈ N on ait

ρk ∈ D(Rn), supp(ρk) ⊂ B

(0,

1

k

),

∫Rm

ρk = 1, ρk > 0 sur Rn.

Dorénavant on utilisera systématiquement la notation (ρk) pour désignerune suite régularisante.

Proposition 1.3.5. Soit f ∈ C (Rn). Alors la suite (ρk ∗ f) est dans D(Rn) et elleconverge uniformément vers f sur tout compact de Rn.

Preuve. Le fait que ρk ∗ f ∈ D(Rn) pour tout k > 1 découle directement duThéorème 1.3.3.

Soit K ⊂ Rm un compact fixé. Pour tout ϵ > 0 il existe δ > 0 (dépendant de Ket ϵ) tel que

|f(x− y)− f(x)| < ϵ ∀ x ∈ K ∀ y ∈ B(0, δ).

On a

(ρk ∗ f)(x)− f(x) =

∫Rn

[f(x− y)− f(x)]ρn(y)dy =

∫B(0, 1

n)

[f(x− y)− f(x)]ρk(y)y.

Page 15: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

Convolution et régularisation 15

et donc pour k > 1δ

et x ∈ K

|(ρk ∗ f)(x)− f(x)| 6 ϵ

∫Rm

ρk = ϵ.

Théorème 1.3.6. Soit f ∈ Lp (Rn) avec 1 6 p <∞. Alors ρk∗f→ f dans Lp (Rn).

Démonstration. Soit ϵ > 0. D’après un théorème connu il existe f1 ∈ C00(Rn)

telle que ||f − f1||Lp(Rn) < ϵ. D’après la Proposition 1.3.5 on sait que ρk ∗ f1 → f1uniformément sur tout compact. D’autre part on a (voir la Proposition 1.3.1)

supp(ρk ∗ f1) ⊂ B

(0,

1

k

)+ supp(f1) ⊂ K, K compact fixé .

Par conséquent, on en déduit que

limn→∞

||ρk ∗ f1 − f1||Lp(Rn) = 0.

Enfin on écrit

ρk ∗ f − f = [ρk ∗ (f − f1)] + (ρk ∗ f1 − f1) + (f1 − f) ,

d’où il résulte que

∥ρk ∗ f − f∥Lp(Rn) 6 2||f − f1||Lp(Rm) + ||ρn ∗ f1 − f1||Lp(Rm), ∀ n ∈ N

(grâce à la Généralisation du Théorème 1.3.1). On a donc

lim supk→∞

∥ρk ∗ f − f∥Lp(Rn) 6 2ϵ, ∀ ϵ > 0

i.e.lim supk→∞

∥ρk ∗ f − f∥Lp(Rn) = 0.

Corollaire 1.3.7. Soit Ω ⊂ Rm un ouvert quelconque. Alors D(Ω) est dense dansLp(Ω) pour 1 6 p <∞.

Preuve. Soit f ∈ Lp(Ω), ϵ > 0 et f1 ∈ C00(Ω) tels que ||f − f1||Lp(Ω) < ϵ. On

considère la fonction f1 définie par

f1(x) =

f1(x) si x ∈ Ω0 si x ∈ Rm \ Ω

de sorte que f1 ∈ Lp (Rm). D’après le Théorème 1.3.6

limn→∞

∥∥ρn ∗ f1 − f1∥∥Lp(Rm)

= 0.

D’autre part

supp(ρn ∗ f1

)⊂ B

(0,

1

n

)+ supp(f1) ⊂ Ω pour n assez grand.

Soit un =(ρn ∗ f1

)|Ω. Alors, pour n assez grand, un ∈ C0

0(Ω) et de plus ∥un − f1∥Lp(Ω) → 0.Donc, pour n assez grand, ∥un − f∥Lp(Ω) < 2ϵ.

Page 16: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

16 Rappels et compléments

1.4 Distributions dans un ouvert

Si u : D(Ω)→C est un opérateur linéaire, alors le résultat de l’application deu à φ ∈ D(Ω) est noté ⟨u, φ⟩. Nous adoptons une convention “bilinéaire” : ⟨u, φ⟩est linéaire par rapport aux deux arguments (ce qui est différent du produit scalairedans les espaces de Hilbert).

Définition 1.4.1. Une distribution dans Ω est une application linéaire u : D(Ω)→Csatisfaisant la condition de continuité suivante : pour tout compact K ⊂ Ω il existem ∈ N et une constante C > 0 (les deux peuvent dépendre de K) telles que

|⟨u, φ⟩| 6 C ∥φ∥Cm(K) ∀ φ ∈ DK(Ω) . (1.4.1)

L’ensemble de toutes les distributions dans Ω est noté D′(Ω). Il est claire que estun espace vectoriel. Si la constante C dans (1.4.1) peut être choisie indépendammentde K, alors le plus petit entier m avec cette propriété est appelé ordre de u.

Pour f ∈ L1loc(Ω) on peut définir uf : D(Ω) → C par

⟨uf , φ⟩ =∫Ω

f(x)φ(x)dx ∀ φ ∈ D(Ω) .

Alors uf ∈ D′(Ω) et u est d’ordre zéro. En effet, pouyr tout compact K ⊂ Ω on a

|⟨uf , φ⟩| 6

∫K

|f(x)|dx

∥φ∥C(K) ∀ φ ∈ D(Ω) .

Les distributions associées à une fonction f ∈ L1loc(Ω) comme ci-dessus sont dites

régulières ou de type fonction.

Proposition 1.4.2. Si f ∈ L1loc(Ω) est telle que uf = 0, alors f(x) = 0 pour presque

tout x ∈ Ω.

Démonstration. Nous devons montrer que si f ∈ L1loc(Ω) est telle que∫

Ω

fφdx = 0 ∀ φ ∈ D(Ω) , (1.4.2)

alors f(x) = 0 presque partout dans Ω. Supposons d’abord que f ∈ L1(Ω) et que Ωest borné. En appliquant la Proposition 1.1.9, pour tout ε > 0 il existe f1 ∈ D(Ω)telle que ∥f − f1∥L1(Ω) < ε. En utilisant (1.4.2) on a∣∣∣∣∣∣

∫Ω

f1φdx

∣∣∣∣∣∣ 6 ε∥φ∥L∞(Ω) ∀ φ ∈ D(Ω). (1.4.3)

Page 17: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

Distributions dans un ouvert 17

SoientK1 = x ∈ Ω | f1(x) > ε , K2 = x ∈ Ω | f1(x) 6 −ε .

Comme K1 et K2 sont des compacts et K1∩K2 = ∅, on peut appliquer le Corollaire1.1.8 pour obtenir l’existence d’une fonction φ0 ∈ D(Ω) telle que

φ0(x) =

1 if x ∈ K1

−1 if x ∈ K2 ,

et |φ0(x)| 6 1 pour tout x ∈ Ω. En posant K = K1 ∪K2 il résulte que∫Ω

f1φ0dx =

∫Ω\K

f1φ0 +

∫K

f1φ0 ,

donc, grâce à (1.4.3), nous avons∫K

|f1|dx =

∫K

f1φ0dx 6 ε+

∫Ω\K

|f1|dx.

Par conséquent, notant la mesure de Lebesgue de Ω par µ(Ω),on voit que∫Ω

|f1|dx =

∫K

|f1|+∫

Ω\K

|f1|dx 6 ε+ 2

∫Ω\K

|f1|dx 6 ε+ 2εµ(Ω) ,

car |f1| 6 ε sur Ω \K. Donc

∥f∥L1(Ω) 6 ∥f − f1∥L1(Ω) + ∥f1∥L1(Ω) 6 2ε+ 2εµ(Ω) .

L’inégalité ci-dessus étant valable pour tout ε > 0, on conclut que f = 0 presquepartout dans Ω.

Soit maintenant Ω un ouvert arbitraire de Rn. Alors Ω =∪k∈NΩk avec Ωk ouver,

clos Ωk compact, clos Ωk ⊂ Ω. En effet, nous pouvons choisir, par exemple,

Ωk =

x ∈ Ω

∣∣∣∣ d(x,Rn \ Ω) > 1

kand |x| < k

.

Ci-dessus, d(x,M) représente la distance du point x ∈ Rn à l’ensemble M ⊂ Rn.En appliquant le résultat prouvé pour Ω borné, avec Ωk à la place deΩ et avec lesrestrictions correspondantes sur f , on obtient que f = 0 presque partout dans Ωk,donc f = 0 presque partout dans Ω.

Grâce à la proposition ci-dessus, on peut voir L1loc(Ω) comme un sous-espace de

D′(Ω). Dans ce sens, les distributions sont des généralisations des fonctions de L1loc

et elle sont parfois appelés fonctions généralisées. Lorsque u est une distributiondans Ω on dit que u ∈ L2(Ω) si u est régulière et elle peut être représentée par unefonction de L2(Ω). La signification des notations u ∈ L∞(Ω), u ∈ Cm(Ω) etc. estsimilaire.

Page 18: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

18 Rappels et compléments

Exemple 1.4.3. Pour a ∈ Ω on considère l’application linéaire δa : D(Ω)→Cdéfinie par

⟨δa, φ⟩ = φ(a) ∀ φ ∈ D(Ω) .

Pour tout compact K ⊂ Ω nous avons

|⟨δa, φ⟩| 6 ∥φ∥C(K) ∀ φ ∈ D(Ω) .

Donc,δa est une distribution d’ordra zéro dans Ω, appelée la masse de Dirac con-centrée en a. Cette distribution n’est pas régulière. En effet, supposons qu’il existef ∈ L1

loc(Ω) telle que

⟨δa, φ⟩ =

∫Ω

f(x)φ(x)dx = φ(a) ∀ φ ∈ D(Ω) . (1.4.4)

Notons Ωa = Ω \ a. Alors ⟨δa, φ⟩ = 0 pour tout φ ∈ D(Ωa). Comme reamrquéci-dessus, cela implique que f(x) = 0 presque partout dans Ωa et donc prersquepartout dans Ω. Par conséquent

∫Ωf(x)φ(x)dx = 0 pour toute φ ∈ D(Ω), ce qui

contredit (1.4.4).

Il n’est pas évident de définir une norme, ou même une distance, dans les espacesD(Ω) et D′(Ω). Néanmoins, les suites convergentes peuvent être définies commesuit:

Définition 1.4.4. La suite (φk) de D(Ω) converge vers φ ∈ D(Ω) s’il existe uncompact K ⊂ Ω telles que

1. suppφk ⊂ K pour tout k > 1 et suppφ ⊂ K,

2. pour tout m ∈ N nous avons limk→∞ ∥φk − φ∥Cm(K) = 0.

La suite (uk) de D′(Ω) converge vers u ∈ D′(Ω) si

limk→∞

⟨uk, φ⟩ = ⟨u, φ⟩ ∀ φ ∈ D(Ω) .

Il est facile de vérifier qu’une suite de D(Ω) ou de D′(Ω) a au plus une limite etque la somme de deux suites convergentes (dans l’un des espaces ci-dessus) convergevers la somme des limites.

Remarque 1.4.5. Soient p, q ∈ [1,∞] tels que 1/p + 1/q = 1. Si uk→u0 dansLp(Ω), alors uk→u0 dans D′(Ω). En effet,∣∣∣∣∣∣

∫Ω

u0(x)φ(x)dx−∫Ω

uk(x)φ(x)dx

∣∣∣∣∣∣ 6 ∥u0 − uk∥Lp(Ω) ∥φ∥Lq(Ω)

pour toute φ ∈ D(Ω).

Page 19: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

Distributions dans un ouvert 19

Définition 1.4.6. Soit u ∈ D′(Ω) et soit j ∈ 1, ... n. La dérivée partielle de u parrapport à xj, notée ∂u

∂xj, est la distribution définie par⟨

∂u

∂xj, φ

⟩= −

⟨u,∂φ

∂xj

⟩∀ φ ∈ D(Ω) .

Il est facile de vérifier que la formule ci-dessus définit une nouvelle distributionde D′(Ω). De plus, si u ∈ C1(Ω), alors ses dérivées partielles dans D′(Ω) coincidentavec les dérivées partielles habituelles . Les dérivées partielles d’ordre supérieur sontdéfinies par récccurence d’une manière évidente. Il est facile de vérifier que pourtout α ∈ N nous avons

⟨∂αu, φ⟩ = (−1)|α| ⟨u, ∂αφ⟩ ∀ φ ∈ D(Ω) . (1.4.5)

Exemple 1.4.7. Soit H ∈ L∞(R) la fonction de Heaviside , i.e., la fonction indica-trice de [0,∞). Alors ∂1H = dH

dx= δ0 dans D′(R), car⟨

dH

dx, φ

⟩= −

⟨H,

dx

⟩= −

∞∫0

dxdx = φ(0) ∀ φ ∈ D(R) .

Exemple 1.4.8. Soit u ∈ L1(R) donnée par u(x) = log |x|. La dérivée partielle∂1u ode cette distribution (régulière) est notée PV 1

xet elle est définie, pour tout

φ ∈ D(R), par⟨PV

1

x, φ

⟩= lim

ε→ 0, ε>0

∫|x|>ε

φ(x)dx

x=

R∫−R

[φ(x)− φ(0)]dx

x,

où R > 0 est tel que suppφ ⊂ [−R,R]. (PV signifie “valeur principale”.) .

Proposition 1.4.9. Soit (uk) une suite de D′(Ω) telle que uk→u in D′(Ω). Alors∂αun→ ∂αu dans D′(Ω) pour tout α ∈ N.

Démonstration. Pour tout φ ∈ D(Ω) nous avons

limn→∞

⟨∂αun, φ⟩ = (−1)|α| limn→∞

⟨un, ∂αφ⟩ = (−1)|α| ⟨u, ∂αφ⟩ = ⟨∂αu, φ⟩ .

Pour f ∈ C∞(Ω) et u ∈ D′(Ω), le produit fu ∈ D′(Ω) est défini par

⟨fu, φ⟩ = ⟨u, fφ⟩ ∀ φ ∈ D(Ω) .

Il est facile de vérifier que cette formule définit en effet une distribution. La versionsuivante de la formul de Leibnitz est également facile à vérifier:

∂xk(fu) =

∂f

∂xku+ f

∂u

∂xk∀ k ∈ 1, ... n .

Pour u ∈ D′(Ω) et O un ouvert de Ω, la restriction de u à O, notée u|O ∈ D′(O)est définie par

⟨u|O, φ⟩D′(O),D(O) = ⟨u, φ⟩D′(Ω),D(Ω) ∀ φ ∈ D(O) .

Page 20: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

20 Rappels et compléments

Proposition 1.4.10. Soit I un ensemble arbitraire d’indice et supposons que Ω =∪j∈IDj, où chaque Dj est un ouvert de Ω. Si u ∈ D′(Ω) est telle que u|Dj

= 0 pourtout j ∈ I, alors u = 0.

Démonstration. Soit η ∈ D(Ω). Comme supp η esr compact, il existe un ensemblefini d’indice F ⊂ I tel que supp η ⊂

∪j∈F Dj. Soit ϕj (j ∈ F) une partition de

l’unité subordonnée à supp η (voir la Proposition 1.1.6) et à son recouvrement Dj

(j ∈ F). Nous avons η =∑

j∈F ϕjη, avec ϕjη ∈ D(Dj). Donc,

⟨u, η⟩ =∑j∈F

⟨u, ϕjη⟩ =∑j∈F

⟨u|Dj

, ϕjη⟩

= 0 .

La proposition ci-dessus implique que pour tout u ∈ D′(Ω), la réunion O de tousles ouverts D ⊂ Ω tels que u|D = 0 a la propriété u|O = 0. Le complément de O(dans Ω) est appellé support de u et il est noté suppu.

1.5 Les opérateurs operateurs div, grad, rot et ∆

Soit Ω un ouvert connexe de Rn. Les distributions dans Ω à valeurs dans Cm

(m ∈ N) sont définies par composantes d’une manière évidente. Nous utiliserons lanotation D′(Ω,Cm) pour l’espace formé par des telles distributions. Les opérateursdifférentiels

div : D′(Ω;Rn)→D′(Ω) , grad : D′(Ω)→D′(Ω;Rn)

sont définis par

div v =∂v1∂x1

... +∂vn∂xn

, gradψ =

(∂ψ

∂x1, ...

∂ψ

∂xn

).

Pour n = 3, on introduit égallement l’opérateur

rot : D′(Ω;C3)→D′(Ω;C3)

par

(rot v)j =∂vl∂xk

− ∂vk∂xl

, (j, k, l) ∈ (1, 2, 3), (2, 3, 1), (3, 1, 2) .

Une manière non rigoroureuse mais utile de regarder ces opérateurs est d’introduirle “vecteur”

∇ =

(∂

∂x1, ...

∂xn

)et de l’utiliser dans les calcules comme s’il était un vecteur de Rn. Avec ce formalismegradψ = ∇ψ (multiplication d’un vecteur par un scalair), div v = ∇ · v (produitscalaire de deux vecteurs). Pour n = 3 nous avons rot v = ∇× v (produit vectorielde deux vecteurs).

Page 21: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

Les opérateurs operateurs div, grad, rot et ∆ 21

Les identités suivantes peuvent être vérifier par un calcule direct:

rot grad = 0 , div rot = 0 .

En utilisant la formule de Leibnitz , pour φ ∈ C∞(Ω), ψ ∈ D′(Ω) et v ∈ D′(Ω;Cn)nous avons,

div (φv) = (gradφ) · v + φdiv v , (1.5.1)

grad (φψ) = ψ(gradφ) + φ(gradψ) . (1.5.2)

Si q ∈ D(Ω;C3) et v ∈ D′(Ω;C3), alors

div (q × v) = rot q · v − q · rot v .

L’opérateur ∆ = div grad , est appellé le Laplacien. (Avec le formalisme ci-dessus,∆ = ∇ ·∇.) Compte tenu de la Définition 1.4.6, pour toute distribution ψ ∈ D′(Ω)nous avons

⟨∆ψ, φ⟩ = − ⟨∇ψ,∇φ⟩ = ⟨ψ,∆φ⟩ ∀ φ ∈ D(Ω) . (1.5.3)

L’opérateur ∆ peut être appliqué, composante par composante, aux distributions àvaleurs vectorielles. Il est facile de vérifier que pour n = 3 nous avons

rot rot = grad div −∆ .

Si v ∈ D′(Ω;Cn) et ψ ∈ D(Ω;Cn) nous notons ⟨v, ψ⟩ =∑n

k=1⟨vk, ψk⟩ = ⟨ψ, v⟩. Ilest facile de vérifier que

⟨div v, φ⟩ = − ⟨v, gradφ⟩ ∀ v ∈ D′(Ω;Cn), φ ∈ D(Ω) , (1.5.4)

⟨rot v, ψ⟩ = ⟨v, rotψ⟩ ∀ v ∈ D′(Ω;C3), φ ∈ D(Ω;C3) ,

∆(φψ) = (∆φ)ψ + 2⟨∇φ,∇ψ⟩+ φ(∆ψ) ∀ ψ ∈ D′(Ω), φ ∈ D(Ω) . (1.5.5)

Remarque 1.5.1. Si Ω = Rn \ 0 alors, pour tout q ∈ R, la fonction f(x) = |x|qdéfinit une distribution régulière dans Ω et ∇f = q|x|q−2x. En utilisant la formule(1.5.1) nous obtenons ∆f = qgrad (|x|q−2) · x+ q|x|q−2div x, donc

∆|x|q = qdiv (|x|q−2x) = q(q + n− 2)|x|q−2 . (1.5.6)

Si nous incluons l’origine, i.e., si Ω = Rn, alors le calcul est plus délicat. Nouscalculerons ∇|x|q et ∆|x|q dans D′(Rn), pour q = 2 − n, dans l’Exemple 1.5.2 ci-dessous.

Exemple 1.5.2. Considérons la fonction

f(x) =1

|x|n−2∀ x ∈ Rn \ 0 .

Page 22: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

22 Rappels et compléments

Nous avons vu dans la Remarque 1.5.1 que

∇f =2− n

|x|nx ∀ x ∈ Rn \ 0 . (1.5.7)

Il est facile de vérifier que le deuxième membre de la relation ci-dessus définit unedistribution régulière (à valeurs vectorielles) sur Rn. Montrons d’abord que (1.5.7)reste vraie dans D′(Rn). En effet, soit φ ∈ D(Rn) et soit R > 0 suffisament grandpour qu’on ait suppφ ⊂ B(0, R) (ici B(0, R) désigne, comme d’habitude, la bouleouverte de rayon R centrée en zéro). Nous avons⟨

∂f

∂xj, φ

⟩= −

⟨f,∂φ

∂xj

⟩= −

∫B(0,R)

f(x)∂φ

∂xj(x)dx

= − limε→ 0+

∫B(0,R)\B(0,ε)

f(x)∂φ

∂xj(x)dx.

En utilisant le Théorème 1.2.5 on obtient

⟨∂f

∂xj, φ

⟩= lim

ε→0+

∫B(0,R)\B(0,ε)

2− n

|x|nφ(x)dx+

∫∂B(0,ε)

fφxjεdσ

=

∫B(0,R)

2− n

|x|nφ(x)dx,

donc (1.5.7) est bien vérifiée au sens de D′(Rn).

Calculons maintenant ∆f = div (∇f) dans D′(Rn). Avec φ et R comme ci-dessusnous avons

⟨∆f, φ⟩ = − ⟨∇f,∇φ⟩ = −∫

B(0,R)

(∇f)(x) · (∇φ)(x)dx

= − limε→ 0

∫B(0,R)\B(0,ε)

(∇f)(x) · (∇φ)(x)dx. (1.5.8)

Nous alons maintenant utiliser la première formule de Green (voir la Remarque1.2.7) sur le domaine Ωε = B(0, R) \ B(0, ε), où ε > 0. Nous prennons h = f , quiest clairement dans C2(clos Ωε), et nous prennons g = φ. Comme ∆f = 0 dans Ωε

(voir (1.5.6)), nous obtenons∫Ωε

(∇f)(x) · (∇φ)(x)dx =

∫∂Ωε

∂f

∂nφdσ.

En utilisant (1.5.7) on voit que ∂f∂ν

= n−2|x|n−1 sur ∂Ωε, donc (1.5.8) devient

⟨∆f, φ⟩ = − (n− 2) limε→ 0

∫∂Ωε

φ(x)

|x|n−1dσ = − (n− 2)Anφ(0) ,

Page 23: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

Les opérateurs operateurs div, grad, rot et ∆ 23

où An est l’aire de la sphère unité de Rn. Donc,

∆1

|x|n−2= − (n− 2)Anδ0 ,

où δ0 est la masse de Dirac en 0 (définie dans l’Exemple 1.4.3).

Dans la dernière partie de ce paragraphe nous montrons que les dérivées partiellesdans D′(Ω) preservent une proprieté importante de dérivées partielles classiques.

Théorème 1.5.3. Supposons que Ω est connex et que u ∈ D′(Ω) est telle quegradu = 0. Alors u est une fonction constante.

Pour la preuve de ce théorème nous avons besoin du lemme suivant.

Lemme 1.5.4. Soit η ∈ D(R), où R est un hypercube ouvert n-dimensionel. Alorsles conditions suivantes sont équivalentes:

(1)

∫R

η(x)dx = 0.

(2) Il existe ψ ∈ D(R;Cn) telle que η = divψ.

Démonstration. Le fait que (2) implique (1) peut être vérifié par simple integrationpar parties.

Nous prouvons par récurrence que (1) implique (2). Sans perte de généralité nouspouvons supposer que R = Rn = (−R,R)n pour un certain R > 0. Il est facile devérifier l’implication (1) ⇒ (2) pour n = 1. Supposons que k > 2 et que l’implicationa lieu for all n 6 k − 1. Considerons la fonction f définie par

f (x1, . . . , xk−1) =

R∫−R

η (x1, . . . , xk−1, y) dy . (1.5.9)

Alors supp f ∈ D (Rk−1). De plus, en appliquant le Théorème de Fubini, on obtientque

∫Rk−1

f(x)dx = 0, donc il existe g1, . . . , gk−1 ∈ D(Rk−1) avec

f =k−1∑j=1

∂gj∂xj

. (1.5.10)

Soit ρ ∈ D(R1) satisfaisant∫ R−R ρ(t)dt = 1 et soit la fonction η définie par

η(x) = η(x)−k−1∑j=1

∂gj∂xj

(x1, ... xk−1) ρ(xk) ∀ x ∈ Rk . (1.5.11)

La relation ci-dessus et (1.5.10) implique que

η(x) = η(x)− f(x1, ... xk−1)ρ(xk) .

Page 24: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

24 Rappels et compléments

Ceci combinée avec (1.5.9) et avec le fait que∫ R−R ρ(t)dt = 1 implique que

supp η ⊂ Rk,

R∫−R

η(x1, ... xk−1, t)dt = 0 ∀ (x1, ... xk−1) ∈ Rk−1 . (1.5.12)

Notons

ψj (x1, ... xk) = gj (x1, ... xk−1) ρ (xk) , ∀ j ∈ 1, ... k − 1 .

Nous avons ψj ∈ D(Rk) et de (1.5.11), et la dernière formule it suit que, pour toutj ∈ 1, . . . k − 1, on a

η = η −k−1∑j=1

∂ψj∂xj

. (1.5.13)

Ceci, combinée avec (1.5.12), implique que la fonction

ψk(x) =

xk∫−R

η(x1, ... xk−1, t)dt

satisfait les conditions ψk ∈ D(Rk) et que ∂ψk

∂xk= η. Ces fait, combinés avec (1.5.13),

impliquent que η = divψ .

Démonstration du Théorème 1.5.3. Dans une prémière étape nous supposons queR ⊂ Ω est un hypercube ouvert et nous prouvons que la restriction de u à R estune fonction constante. Soit θ ∈ D(R) telle que

∫R θ(x)dx = 1 et φ ∈ D(R). La

fonction η(x) = φ(x) −[∫

R φ(x)dx]θ(x) est dans D(R) and

∫R η(x)dx = 0. En

utilisant le Lemme 1.5.4 on déduit qu’il existe ψ ∈ D(R;Cn) telle que

divψ = φ−

∫O

φ(x)dx

θ .En appliquent u aux deux membres de la formule ci-dessus on obtient que

⟨u, φ⟩ =

∫R

φ(x)dx

⟨u, θ⟩+ ⟨u, divψ⟩ .

En utilisant (1.5.4) et le fait que gradu = 0, it suit que le dernier term du deuxièmemembre est nul. Notons par C la constante ⟨u, θ⟩, on déduit que

⟨u, φ⟩ = C

∫R

φ(x)dx ∀ φ ∈ D(R) .

Donc u|R = C (la function constante).

Page 25: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

Les opérateurs operateurs div, grad, rot et ∆ 25

Dans une seconde étape nous provons que la constante C obtenue à la premièreétape est la même por tous les hypercubes de Ω. Comme Ω est connexe, pourdeux hypercubes ouverts Rα, Rω ⊂ Ω il existe une chaine de hypercubes ouverts(R1, ...Rp) tels que R1 = Rα, Rω = Rp, Rk ⊂ Ω, Rk ∩ Rk+1 = ∅ pour toutk ∈ 1, ... p−1. Il suffit donc de prouver que la constante C est la même pour deuxhypercubes ouverts d’intersection non vide. Cela découle trivialement en considérantla restriction de u à l’intersection des deux hypercubes.

Dans une troisième étape nous montrons que u = C, où C est la constante obtenueà la deuxième étape. Le résultat obtenu dans la deuxième étape implique que(u − C)|R = 0 pour tout hypercube R ⊂ Ω. La réunion de tous les hypercubesoverts containus dans Ω est Ω, donc, en utilisant la Proposition 1.4.10, on conclutque u− C = 0.

Page 26: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

26 Rappels et compléments

Page 27: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

Chapter 2

Espaces de Sobolev

Dans ce chapitre nous rassemblons quelques définitions et résultats fondamentauxsur les espaces de Sobolev. Pour plus d’information nous renvoyons à Adams [1],Grisvard [4], Evans [3], Lions et Magenes [6], Neças [7].

2.1 Définition et premières propriétés

Soit Ω ⊂ Rn un ouvert et soit m ∈ N.

Définition 2.1.1. L’espace de Sobolev Hm(Ω) est formé par l’ensemble des distri-butions f ∈ D′(Ω) telles que ∂αf ∈ L2(Ω) pour tout α ∈ Nn avec |α| 6 m.

La définition ci-dessus implique que H0(Ω) = L2(Ω).

Proposition 2.1.2. Hm(Ω), muni du produit sclaire,

⟨f, g⟩m =∑|α|6m

∫Ω

(∂αf) (∂αg)dx ∀ f, g ∈ Hm(Ω), (2.1.1)

est un espace de Hilbert.

Démonstration. Il est facile de vérifier que (2.1.1) définit un produit scalaire surHm(Ω). Nous devons encoure prouver que Hm(Ω) est complet par rapport à lanorme induite ∥ · ∥m. Soit (fj) une suite de Cauchy par rapport à la norme ∥ · ∥m.Alors, pour tout α ∈ Nn avec |α| 6 m nous avons

limj,k→∞

∥∂αfj − ∂αfk∥2L2 = 0 .

Par conséquent, pour tout |α| 6 m la suite (∂αfj) est de Cauchy dans L2(Ω), quiest un Hilbert. Nous pouvons donc conclure que, pour tout α ∈ Nn avec |α| 6 mil existe gα ∈ L2(Ω) telle que ∂αfj → gα dans L2(Ω). Comme la convergence dansL2(Ω) implique la convergence dans D′(Ω) (voir la Remarque 1.4.5), nous avons

27

Page 28: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

28 Espaces de Sobolev

que fj → g0 dans D′(Ω). En appliquant la Proposition 1.4.9 il suit que ∂αfj → ∂αg0dans D′(Ω). Nous avons donc prouvé que ∂αg0 = gα ∈ L2(Ω) ce qui implique queg0 ∈ Hm(Ω). De plus, par la définition de gα, nous avons que

∥g0 − fj∥2m =∑|α|6m

∥gα − ∂αfj∥2L2 → 0 ,

donc nous obtenons que fj → g0 dans la norme de Hm(Ω).

Remarque 2.1.3. Soit Ω ⊂ Rn un ouvert, X = L2(Ω), α ∈ Nn avec |α| = m et soitA défini par

Aφ = ∂αφ, D(A) =φ ∈ L2(Ω)

∣∣ ∂αφ ∈ L2(Ω).

Alors A est un opérateur fermé sur X. En effet, soit (φk) une suite de D(A) telleque

φk→φ, Aφk→ψ in X.

Comme φk→φ nous obtenons, grâce à la Proposition 1.4.9, que Aφk→ ∂αφ dansD′(Ω). Donc ∂αφ = ψ dans D′(Ω). Par conséquent φ ∈ D(A) et Aφ = ψ, donc Aest fermé.

Il es claire que Hm+1(Ω) ⊂ Hm(Ω), avec injection continue. Ci-dessous on définitun espace très utile dans l’étude des problèmes aux limites pour des EDP elliptiques.

Définition 2.1.4. Pour m ∈ N, l’espace Hm0 (Ω) estl’adhérence de D(Ω) dans

Hm(Ω).

Les espaces de Sobolev d’ordre négatif sont définis comme suit:

Définition 2.1.5. Pour tout m ∈ N, l’espace de Sobolev H−m(Ω) est le dual deHm

0 (Ω) par rapport à l’espace pivot L2(Ω).

Remarque 2.1.6. Un élément u de H−m(Ω) peut être regardé comme une distri-bution:

H−m(Ω) ⊂ D′(Ω) .

Cette injection est continue, dans le sens suivant: la convergence d’une suite dansH−m(Ω) implique sa convergence dans D′(Ω).

Proposition 2.1.7. Soit α un multi-indice avec |α| = m. Alors, pour tout p ∈ Z,nous ∂α ∈ L(Hp(Ω),Hp−m(Ω)), avec ∥∂α∥ 6 1.

Démonstration. Si p > m lé résultat découle évidemment de la définition deHp(Ω). Pour p = 0 nous argumentons comme suit: Soit u ∈ L2(Ω). Il est clair de(1.4.5) que

⟨∂αu, φ⟩D′,D 6 ∥u∥L2 · ∥∂αφ∥L2 6 ∥u∥L2 · ∥φ∥m ∀ φ ∈ D(Ω) .

Page 29: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

Définition et premières propriétés 29

Comme D(Ω) est dense dans Hm0 (Ω), il resulte que ∂αu admet une extension continue

à Hm0 (Ω), donc ∂αu ∈ H−m(Ω) et ∥∂αu∥H−m 6 ∥u∥L2 . Pour 0 < p < m nous

décomposons α = α1 + α2, avec |α1| = p and |α2| = m− p. La conclusion suit de larelation ∂α = ∂α2∂α1 an combinant les cas p > m et p = 0 discutés ci-dessus.

Il nous reste à étudier le cas p < 0. Si u ∈ Hp(Ω) alors

|⟨u, ψ⟩D′,D| 6 ∥u∥Hp · ∥ψ∥−p ∀ ψ ∈ D(Ω) .

Utilisant ce fait et (1.4.5), nous obtenons

|⟨∂αu, φ⟩D′,D| 6 ∥u∥Hp · ∥∂αφ∥−p 6 ∥u∥Hp · ∥φ∥m−p .

Ceci montre que ∂αu ∈ Hp−m(Ω) et ∥∂αu∥Hp−m 6 ∥u∥Hp .

Dans la dernière partie de ce pargraphe nous donnons quelques résultats durl’espace H1

0(Ω). Nous prouvons ci-dessous que, sous une condition géométriquesimple, les fonctions de cette espace satisfont une inégalité remarquable , appeléeinégalité de Poincaré .

Proposition 2.1.8 (Inégalité de Poincaré). Supposons que Ω est contenu entre deuxhyperplanes parallels situés a une distance δ > 0. Alors

∥f∥L2 6 δ∥∇f∥L2 ∀ f ∈ H10(Ω) .

Démonstration. Nous remarquons d’abord qu’il suffit de prouver la propositionpour f à valeurs réelles. De plus, en utilisant la densité de D(Ω) dans H1

0(Ω) onvoit qu’il suffit de prouver l’inégalité pour f ∈ D(Ω). Considéron un système decoordonnées tel que Ω ⊂

x ∈ Rn | − δ

2< x1 <

δ2

et prologeons f par zéro en

dehors de Ω. Alors pour tout x′ ∈ Rn−1 et x1 ∈(− δ

2, 0)

nous avons

f 2(x1, x′) =

x1∫− δ

2

∂x1(f 2(ξ, x′))dξ = 2

x1∫− δ

2

f(ξ, x′)∂f

∂x1(ξ, x′)dξ ,

ce qui implique (en utilisant l’inégalité de Cauchy-Schwarz ) que

f 2(x1, x′) 6 2

0∫− δ

2

f 2(ξ, x′)dξ

12 0∫− δ

2

[∂f

∂x1(ξ, x′)

]2dξ

12

.

Intégrant la relation ci-dessus par rapport à x1, nous obtenons

0∫− δ

2

f 2(x1, x′)dx1 6 δ

0∫− δ

2

f 2(x1, x′)dx1

12 0∫− δ

2

[∂f

∂x1(x1, x

′)

]2dx1

12

.

Page 30: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

30 Espaces de Sobolev

La relation ci-dessus implique que

0∫− δ

2

f 2(x1, x′)dx1 6 δ2

0∫− δ

2

[∂f

∂x1(x1, x

′)

]2dx1 .

Integrant pa rapport à x′ nous obtenons∫(− δ

2,0)×Rn−1

f 2(x)dx 6 δ2∫

(− δ2,0)×Rn−1

[∂f

∂x1(x)

]2dx 6 δ2

∫(− δ

2,0)×Rn−1

|(∇f)(x)|2dx.

En combinant l’inégalité ci-dessus avec l’estimation similaire pour x1 ∈ (0, δ2) nous

obtenons l’inégalité recherchée. (Sans couper le domaine en deux parties nous au-rions obtenu 2δ à la place de δ dans l’inégalité faisant l’objet de cette proposition.)

Lemme 2.1.9. Soit Ω1, Ω2 deux ouverts de Rn, avec clos Ω1 ⊂ Ω2. Alors l’operateurde prolongement E défini par

(Ef)(x) =

f(x) if x ∈ Ω1

0 if x ∈ Ω1∀ f ∈ H1

0(Ω1) ,

est une isométrie de H10(Ω1) à H1

0(Ω2).

Démonstration. Pour toute f ∈ H10(Ω1) il existe une suite (fn) de D(Ω1) telle

que fn → f dans H10(Ω1). Si l’on note gn = Efn, pour tout n ∈ N alor (gn) est

clairement une suite de Cauchy dans H10(Ω2), donc gn → g in H1

0(Ω2). Il est facile devoir que g(x) = f(x) si x ∈ Ω1 et que g(x) = 0 si x ∈ Ω2\Ω1, donc Ef = g ∈ H1

0(Ω2)et ∥Ef∥H1

0(Ω2) = ∥f∥H10(Ω1).

Proposition 2.1.10. Soit n ∈ N et soit Ω un ouvert borné Rn. Alors l’inclusionJΩ de H1

0(Ω) dans L2(Ω) est un opérateur compact.

Démonstration. Soit Q un hypercube ouvert de Rn, avec clos Ω ⊂ Q et notonsE ∈ L(H1

0(Ω),H10(Q)) l’opérateur de prolongement du Lemme 2.1.9. De plus, pour

g ∈ H10(Q) nous notons Rg la restriction de g à Ω. En utilisant les faits que

R ∈ L(L2(Q), L2(Ω)) et JΩ = RJQE, on voit que la compacité de JΩ est uneconséquence de la compacité de JQ.

Prouvons maintenant que JQ est compact. Pour simplifier, nous supposons queQ = (0, π)n. De la théorie de base des séries de Fourier nous savons que la famille(φα)α∈Nn définie par

φα(x) =

(2

π

)n2

n∏k=1

sin (αkxk) ∀ α ∈ Nn, x ∈ Q,

Page 31: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

Les espaces Hs(Rn), avec s ∈ R 31

est une base orthonormée de L2(Q). Dans cette preuve nous notons ∥α∥2 =∑n

k=1 α2k

poun un multi-indice α ∈ Nn. Soit f ∈ H10(Q). Alors

∥f∥2L2(Q) =∑α∈Nn

∣∣∣⟨f, φα⟩L2(Q)

∣∣∣2 ,∥f∥2H1(Q) =

∑α∈Nn

(1 + ∥α∥2)∣∣∣⟨f, φα⟩L2(Q)

∣∣∣2 .Les formules ci-dessus impliquent que si m ∈ N et JQ,m ∈ L(H1

0(Q), L2(Q)) est défini

parJQ,mf =

∑α∈Nn, ∥α∥26m

⟨f, φα⟩L2(Q) φα ∀ f ∈ H10(Ω) ,

alors∥JQf − JQ,mf∥2L2(Q) 6 1

1 +m∥f∥2H1

0(Ω) .

Ceci implique quelimm→∞

∥JQ − JQ,m∥L(H10(Q),L2(Q)) = 0 .

Comme dimRan JQ,m <∞, nous concluons que JQ is compact.

2.2 Les espaces Hs(Rn), avec s ∈ R

Au cas où Ω = Rn les espaces de Sobolev ont une caractérisation simple en utilisantla transformation de Fourier.

Proposition 2.2.1. Soit m ∈ N. Alors

Hm(Rn) =u ∈ L2(Rn)

∣∣∣ (1 + ∥ξ∥2)m

2 u ∈ L2(Rn).

Démonstration. Si u ∈ Hm(Rn) alors u ∈ L2(Rn) et ∂αu ∈ L2(Rn), pour toutα ∈ Nn, |α| = m, donc u ∈ L2(Rn) et ξα u ∈ L2(Rn), pour tout α ∈ Nn, |α| = m.On déduit que u ∈ L2(Rn) et ∥ξ∥m u ∈ L2(Rn) donc (1 + ∥ξ∥2)

m2 u ∈ L2(Rn).

Réciproquement supposons que (1 + ∥ξ∥2)m2 u ∈ L2(Rn). On peut facilement vérifier

qu’il existe une constante C telle que

|ξα u(ξ)| 6 C∣∣∣(1 + ∥ξ∥2

)m2 u(ξ)

∣∣∣ ,pour ξ ∈ Rn et pour tout α ∈ Nn, |α| 6 m, donc ξα u ∈ L2(Rn), pour α ∈ Nn, |α| 6m. En utilisant le Théorème de Plancherel on déduit que ∂αu ∈ L2(Rn), pourα ∈ Nn, |α| 6 m, donc u ∈ Hm(Rn).

Le résultat de la Proposition 2.2.1 suggère la définition suivante.

Définition 2.2.2. Soit s ∈ R. On dit que u ∈ L2(Rn) appartient à l’espace Hs(Rn)si (

1 + ∥ξ∥2) s

2 u ∈ L2(Rn).

Page 32: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

32 Espaces de Sobolev

Proposition 2.2.3. Les espaces Hs(Rn) sont hilbertisables ; munis du produit scalaire

⟨u, v⟩s =∫Rn

(1 + ∥ξ∥2

)su(ξ) v(ξ)dξ,

ou de tout autre produit scalaire donnant une norme équivalente à la norme

∥u∥s =∥∥∥(1 + ∥ξ∥2

) s2 u

∥∥∥L2,

ce sont des espaces de Hilbert.

Preuve. Il est clair que ⟨u, v⟩s est un produit scalaire. D’autre part, l’application

u→(1 + ∥ξ∥2

) s2 u

est par définition une bijection isométrique de Hs(Rn) sur L2(Rn). Ce dernier espaceétant complet, il en est de même de Hs(Rn), pour la norme ∥·∥s ou pour toute normeéquivalente.

Le résultat suivant montre que, si s est assez grand, les fonctions de Hs(Rn) sontcontinues.

Théorème 2.2.4 (Théorème d’injection de Sobolev). Pour s > n2

les éléments deHs(Rn) sont des fonctions continues tendant vers 0 à l’infini.

Preuve. On peut écrire

u (ξ) =[(1 + ∥ξ∥2

) s2 u(ξ)

] [(1 + ∥ξ∥2

)− s2

].

Le premier facteur appartient à L2(Rn) si u ∈ Hs(Rn), et le second facteur appartientà L2(Rn) dès que s > n

2. On a donc u ∈ L1(Rn) et, en appliquant le théorème de

Riemmann-Lebesgue, on obtient que la fonction u est continue et tend vers 0 àl’infini.

Dans la suite de ce cours nous notons

Rn+ = (x1, . . . , xn) ∈ Rn | xn > 0.

Pour m ∈ N, l’espace Hm(Rn+) peut être carctérisé à l’aide de la transformation de

Fourier partielle. Plus précisément, pour u ∈ L1(Rn+), la transformation de Fourier

partielle un est définie par

un(ξ1, . . . , ξn−1, xn) =

∫Rn+

u(x)e−i∑n−1

k=1 xkξk dx1 . . . dxn−1 ∀xn > 0, (ξ1, . . . , ξn−1) ∈ Rn−1.

Comme pour la transformation de Fourier classique, on peut montrer que l’opéroteuru 7→ un se pronge à une isométrie de L2(Rn

+).

L’espace Hm(Rn+) peut être caractérisé à l’aide de la transformation de Fourier

partielle un comme suit:

Page 33: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

Densité et opérateurs de prolongement 33

Proposition 2.2.5. Soit m ∈ N. Alors

Hm(Rn+) =

u ∈ L2(Rn+)

∣∣∣∣∣∣m∑j=0

∫Rn−1

(1 + ∥ξ′∥2

)m−j∣∣∣∣∂jun∂xjn

∣∣∣∣2 dxndξ′ <∞

,

où ξ′ = (ξ1, . . . , ξn−1).

La démonstration du résultat ci-dessus est similaire à celle de la Proposition 2.2.1et nous la proposons comme exercice au lecteur.

2.3 Densité et opérateurs de prolongement

Soit Ω un ouvert de Rn et

Ωε = x ∈ Ω | d(x, ∂Ω) > ε.

Npus prouvons d’abord que toute fonction d’un espace de Sobolev peut être approx-imée par des fonctions de classe C∞ dans tout ouvert d’adhérence contenue dansΩ.

Proposition 2.3.1. Soit Ω un ouvert borné de Rn, m ∈ N et f ∈ Hm(Ω). Onconsidère la suite (gk)k>1 définie par

gk(x) =

∫Ω

ρk(x− y)f(y)dy ∀ k > 1, x ∈ Ω 1k,

où (ρk) est une suite régularisante. Alors

gk ∈ C∞(Ω 1k) ∀ k > 1,

et gk → f dans Hm(O) pour tout ouvert O avec clos O ⊂ Ω.

Démonstration. Soit f ∈ L1(Rn) la fonction obetnue en prolongeant f par zéro àl’extérieur de ∂Ω. Il est claire que nous avons gk = ρk ∗ f sur Ω 1

k. Compte tenu du

Théorème 1.3.3 (voir aussi la Proposition 1.3.5), on déduit qu’il existe k0 ∈ N telque ρk ∗ f ∈ C∞(O) et ∂αgk = ∂αρk ∗ f sur O pour k > k0 et tout α ∈ Nn. De plus,en appliquant le Théorème 1.3.6, on obtient que, pour tout α ∈ Nn, |α| 6 m, nousavons ∂αgk → ∂αf dans L2(O), donc gk → f dans Hm(O).

Si la frontière de Ω est suffisament régulière, alors le résultat de densité ci-dessousmontre qu’une fonction de Hm(Ω) peut être approximée par des fonctions qui sontC∞ jusqu’au bord de Ω.

Théorème 2.3.2. Soient m, n ∈ N et soit Ω ⊂ Rn un ouvert borné à frontière declasse C1. Alors C∞(clos Ω) est dense dans Hm(Ω).

Page 34: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

34 Espaces de Sobolev

Démonstration. Comme ∂Ω est de classe C1, pour tout x ∈ ∂Ω il existe r > 0 etun système de coordonées orthonormées noté (y1, . . . yn) telles que

V := Ω ∩B(x, r) = (y1, . . . yn) ∈ B(x, r) | yn > φ(y1, . . . , yn−1 ,

où φ est une fonction de classe C1 (voir la Définition 1.2.1) . Notons U = Ω∩B(x, r

2

)et

xε = x+ εen ∀ x ∈ U, ε > 0,

de sort que, pour ε suffisament petit, nous avons xε ∈ Ω∩B(x, r) pour tout x ∈ U .Pour u ∈ Hm(Ω) on pose uε(x) = u(xε) pour tout x ∈ U . Si (ρk)k>1 est une suiterégularisante, on pose

vk = ρk ∗ u 1k

∀ k > 1.

Notons que supp vk ⊂ V pour k suffisament grand et que, pour tout α ∈ Nn, |α| 6 m,nous avons

∥∂αvk − ∂αu∥L2(V ) 6 ∥∂αvk − ∂αu 1k∥L2(V ) + ∥∂αu 1

k− ∂αu∥L2(V ).

Le deuxième terme du membre de droite tend vers zéro lorsque k → ∞ car l’opérationde translation est continue dans L2(V ). Le fait que le premier terme tend vers zéropeut être vérifié comme dans la démonstration de la Proposition 2.3.1. Nous venonsdonc de prouver que

limk→∞

∥∂αvk − ∂αu∥L2(V ) = 0. (2.3.2)

Soit maintenant δ > 0. Comme ∂Ω est un compact il existe un nombre fini de points(xj0)16j6N de ∂Ω et les réels strictiment positifs (rj)16j6N tels que

∂Ω ⊂N∪j=1

B(xj0,

r

2

).

En appliquant d’une manière répétée (2.3.2) et en posant Vj = Ω∩(xj0,

r2

)on déduit

qu’il existe les fonctions (vj)16j6N telles que

vj ∈ C∞(clos Vj), ∥vj − u∥Hm(Vj) 6 δ ∀ j ∈ 1, . . . , n. (2.3.3)

Nous introduisons également un ouvert V0 tel que clos V0 ⊂ Ω et Ω ⊂∪Nj=0 Vj.

D’après la Proposition 2.3.1, il existe v0 ∈ C∞(clos V0) telle que

∥v0 − u∥Hm(V0) 6 δ. (2.3.4)

Considerons maintenant une partition de l’unité (φj)06j6N , subordonnée au com-pact clos Ω et à son recouvrement (φj)06j6N (voir, la Proposition 1.1.6). Si l’onpose

v =N∑j=0

φjvj,

alors v ∈ C∞(clos Ω) et, en utilisant (2.3.3) et (2.3.4), on obtient que ∥v−u∥Hm(Ω) 6(N + 1)δ. Comme δ est arbitraire et indépendant de N , nous obtenons bien queC∞(clos Ω) est dense dans Hm(Ω).

Page 35: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

Densité et opérateurs de prolongement 35

Remarque 2.3.3. La condition que Ω soit borné n’est pas essentielle dans le théorèmeci-dessus. Il est facile d’adapter la preuve pour certains domaines non bornés comme,par exemple, Ω = Rn où Ω = Rn

+.

En combinant le Théorème 2.3.2 et la Proposition 2.1.10 on obtient facilement :

Corollaire 2.3.4. Soit Ω un ouvert borné de Rn avec ∂Ω de classe C1. Alorsl’inclusion JΩ de H1(Ω) dans L2(Ω) est un opérateur compact.

En combinant encore le Théorème 2.3.2 et le Théorème 2.2.4 nous obtenons:

Corollaire 2.3.5. Pour tout Ω ouvert régulier borné de Rn, m entier positif etp ∈ N, p > n

2+m on a Hp(Ω) ⊂ Cm(clos Ω), avec inclusion continue.

Nous finissons ce paragraphe par un résultat montrant que, sous certaines condi-tions, une fonction de Hm(Ω) peut être prolongée à une fonction de Hm(Rn).

Théorème 2.3.6. On suppose que m, n ∈ N et que Ω est un ouvert avec ∂Ω bornéet de classe C∞ (ou bien Ω = Rn

+). Alors, pour tout m ∈ N, il existe un opérateurlinéaire P : Hm(Ω)→Hm(Rn) tel que pour tout u ∈ Hm(Ω)

1. Pu|Ω = u.

2. ∥Pu∥Hm(RN ) 6 C∥u∥Hm(Ω)

où C dépend seulement de Ω.

Démonstration. Nous donnons la preuve dans le cas particulier où N = 1, m = 1et Ω =]0, 1[. Soit donc u ∈ C1[0, 1]. En utilisant la fonction G de la preuve de laProposition 1.1.3 on peut construire η ∈ C∞(R) telle que η(x) ∈ [0, 1], pour toutx ∈ R et

η(x) =

1 si x < 1

4

0 si x > 34

.

On définit alors u :]0,∞[→R par

u(x) =

u(x) si 0 < x < 10 si x > 1

.

Alors ηu ∈ C1(]0,∞[) et (ηu)′ = η′u+ ηu′. La fonction u ∈ C1[0, 1] s’ecrit

u = ηu+ (1− η)u.

La fonction ηu est d’abord prolongée à ]0,∞[ à ηu ∈ C1[0,∞[∩H1(]0,∞[) en posant(ηu)(x) = 0 pour x > 1. On prolonge ensuite ηu à R par réflexion, i.e. on définitv1 ∈ C1(R) ∩H1(R) en posant

v1(x) =

(ηu)(x) si x > 0(ηu)(−x) si x < 0.

Page 36: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

36 Espaces de Sobolev

Il est claire que v1 ∈ L2(R) et que v1 est continue sur R. De plus, une simpleintégration par parties montre que la dérivée de v1 dans D′(R) est la fonction v′1 ∈L2(R) définie par

v′1(x) =

(ηu)′(x) si x > 0−(ηu)′(−x) si x < 0.

Donc v1 ∈ H1(R) prolonge u et

∥v1∥L2(R) 6 2∥u∥L2(Ω) , ∥v1∥H1(R) 6 C∥u∥H1(Ω)

(où C dépend de ∥η′∥L∞).

On procède de manière analogue avec (1 − η)u, c’est à dire que l’on prolonged’abord (1− η)u à ]−∞,−1[ par 0 sur ]−∞, 0[ et ensuite on prolonge à R parune réflexion (par rapport au point 1). On obtient ainsi une fonction v2 ∈ H1(R)qui prolonge (1− η)u et telle que

∥v2∥L2(R) 6 2∥u∥L2(0,1) , ∥v2∥H1(R) 6 C∥u∥H1(0,1).

L’opérateur P : C1[0, 1] → H1(R) par Pu = v1 + v2 satisfait donc les conditions

(Pu)(x) = u(x) ∀ x ∈ [0, 1],

∥Pu∥H1(R) 6 C∥u∥H1(0,1) ∀ u ∈ H1(0, 1),

où la constante C dépénd seulement de ∥η′∥L∞(R). Compte tenu de la densité deC1[0, 1] dans H1(0, 1) (voir le Théorème 2.3.2), on déduit que P se prolonge à unopérateur sur H1(0, 1) satisfaisant les conditions du théorème.

2.4 Opérateurs de trace

Une fonction f ∈ H1(Ω) est, en général, définie seulement presque partout dans Ω,donc ses valeurs sur ∂Ω n’ont pas de sense. Néanmomoins, ces valeurs peuvent êtredéfinies dans un sens faible, comme le montre le résultat suivant:

Théorème 2.4.1. Soit Ω un ouvert borné de Rn avec une frontière de classe C1.Alors l’application γ0 : C

1(clos Ω)→C0(∂Ω) définie par

γ0f = f |∂Ω ∀ f ∈ C1(clos Ω),

admet un prolongement unique à un opérateur linéaire borné de H1(Ω) dans L2(∂Ω).

Démonstration. Compte tenu de la densité de C0(Ω) dans H1(Ω) (voir le Théorème2.3.2), il suffit de verifier l’existence d’une constante C > 0 telle que

∥f∥L2(∂Ω) 6 C∥f∥H1(Ω) ∀ f ∈ C(Ω). (2.4.5)

Page 37: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

Opérateurs de trace 37

Comme ∂Ω est de classe C1, pour tout x ∈ ∂Ω il existe a > 0 et un système decoordonées orthonormées noté (y1, . . . yn) telles que

V := Ω ∩ [−a, a]n = (y1, . . . yn) ∈ [−a, a]n | yn > φ(y1, . . . , yn−1 ,

où φ est une fonction de classe C1 (voir la Définition 1.2.1) . Notons f(y′, yn +φ(y′))η(y′, yn + φ(y′)) = g(y) et soit η une fonction continue, à support contenudans [−a, a]n. Alors∫

[−a,a]n−1

|f(y′, φ(y′))η(y′, φ(y′))|2dy′ =∫

Rn−1

|g(y′, 0))|2dy′ (2.4.6)

Par ailleurs, en utilisant une intégration par parties et l’inégalité de Cauchy-Schwarz,on obtient ∫

Rn−1

|g(y′, 0))|2dy′ = −∫Rn+

∂yn|g(y))|2dy 6 ∥g∥H1(Rn

+)∥g∥L2(Rn+).

L’inégalité ci-dessus et (2.4.6) impliquent que pour tout η ∈ C00([−a, a]n) il existe

C > 0 telle que ∫[−a,a]n−1

|f(y′, φ(y′))η(y′, φ(y′))|2dy′ 6 C

∫Ω

|f(y)|2dy.

Compte tenu de définition (1.2.3) de l’intégrale sur ∂Ω, on obtient facilement laconclusion (2.4.5).

Pour f ∈ H1(Ω) nous appelerons γ0f the la trace de Dirichlet of de f sur ∂Ω.Pour simplifier les notations, nous noterons pafois f(x) au lieu de (γ0f)(x) (pourx ∈ ∂Ω). L’espace H1

0(Ω) introduit dans la Définition 2.1.4 peut être carctérisécomme suit:

Proposition 2.4.2. Soit Ω un ouvert borné de Rn à frontière de classe C1. Alors

H10(Ω) = f ∈ H1(Ω) | γ0f = 0 .

Démonstration. L’inclusion

H10(Ω) ⊂ f ∈ H1(Ω) | γ0f = 0 ,

découle facilement de la densité de D(Ω) dans H10(Ω) et du Théorème 2.4.1.

L’inclusion opposée est plus dificile à obtenir et nous omettons la preuve (le lecteurintéressé pourra consulter [3, p.259–261].

Page 38: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

38 Espaces de Sobolev

Page 39: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

Bibliography

[1] R. A. Adams, Sobolev Spaces, Academic Press, New York, 1975. Pure andApplied Mathematics, Vol. 65.

[2] J.-M. Bony, Cours d’analyse, Editions de l’Ecole Polytechnique, Palaiseau,2001.

[3] L. C. Evans, Partial Differential Equations, vol. 19 of Graduate Studies inMathematics, American Mathematical Society, Providence, RI, 1998.

[4] P. Grisvard, Elliptic Problems in Nonsmooth Domains, vol. 24 of Monographsand studies in mathematics, Pitman, Boston, 1985.

[5] L. Hörmander, The Analysis of Linear Partial Differential Operators. I,vol. 256 of Grundlehren der Math. Wiss., Springer-Verlag, Berlin, 1983.

[6] J.-L. Lions and E. Magenes, Non-homogeneous Boundary Value Problemsand Applications. Vol. I, Springer-Verlag, New York, 1972. Translated from theFrench by P. Kenneth, Die Grundlehren der mathematischen Wissenschaften,Band 181.

[7] J. Neças, Les Méthodes Directes en Théorie des Équations Elliptiques, Masson,Paris, 1967.

[8] L. Schwartz, Théorie des distributions, Publications de l’Institut de Mathé-matique de l’Université de Strasbourg, No. IX-X. Nouvelle édition, entiérementcorrigée, refondue et augmentée, Hermann, Paris, 1966.

[9] C. Zuily, Elements de distributions et d’équations aux dérivées partielles,Dunod, Paris, 2002.

39

Page 40: Espaces de Sobolev et introduction aux équations …Marius.Tucsnak/cours_EDP_2011.pdfChapter 1 Rappels et compléments Dans ce chapitre nous introduisons quelques outils importants

Index

atlas, 10, 11

base orthonormée, 30

carte, 10champ normal extérieur, 11constante de Lipschitz d’une frontière,

10

distribution dans un ouvert, 16distribution de type fonction, 16distribution régulière, 16domaine rectangulaire, 10dérivée normale, 11dérivées partielles d’une distribution,

19

fonction teste, 6formule de Gauss , 12formule de Leibnitz, 21frontière de classe C∞, 10frontière de classe Cm, 10

injection compacte, 30, 35inégalité de Poincaré, 29

Laplacien, 21Lipschitz boundary, 10

ordre d’une distribution, 16

partition de l’unité, 8, 11, 20

suite de Cauchy dans un espace normé,27

support d’une distribution, 20, 24support d’une fonction continue, 6

trace de Dirichlet, 37

valeur principale, 19

40