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RAPPORT DE SYNTHESE Novembre 2018 ETUDE DE REFERENCE SUR LES MECANISMES DE GESTION DES SEMENCES PAYSANNES Burkina- Faso Niger Sénégal Togo Mali

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RAPPORT DE SYNTHESENovembre 2018

ETUDE DE REFERENCE SUR LES MECANISMESDE GESTION DES SEMENCES PAYSANNES

Burkina- Faso Niger Sénégal TogoMali

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‘‘Nul n’a le droit d’utiliser les aliments comme armes contre les peuples.’’

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ETUDE DE REFERENCE SUR LES MECANISMES DE GESTION

DES SEMENCES PAYSANNES

RAPPORT DE SYNTHESENovembre 2018

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Publié par JINUKUN, Réseau national pour une gestion durable des ressources génétiques au Bénin

Novembre 2018

Equipe de coordination:- René SEGBENOU du Bénin (JINUKUN), - Pierre BEDIYE du Bénin (JINUKUN), - Octave TCHEDJI du Bénin (JINUKUN), - SIDY Ba du Sénégal ( EndaPronat), - Clémence LANKOUANDE du Burkina Faso - ( Centre National de l’Agriculture Biologique), - Ibrahim HAMADOU du Niger, Souleye SOULEMANE Du Mali (Union des Groupements Maraichers), - Jacques NAMETOUGLY du Togo (AREJ)

Equipe de rédaction :

- René M. SEGBENOU, - Pierre BEDIYE, - Octave TCHEDJI

JINUKUN, Réseau national pour une gestion durable des ressources génétiques au Bénin06 B. P. 2083 Cotonou, tél.: (+229) 95 23 58 57; 94 20 94 73 E-mail : [email protected]; Site web : www.jinukuncopagen.org; jinukunagroecologie; Plateforme : https://viveagroecologie.org

Avec le soutien financier de :PAIN POUR LE PROCHAIN et ACTION DE CAREMELes organisations partenaires soutenues sont seules responsables du contenu de cette publication

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SOMMAIRE

SIGLES ET ABREVIATIONS 7

LISTE DES TABLEAUX 9

LISTE DES FIGURES 9

LISTE DES ENCADRES 9

I - INTRODUCTION 10

II - METHODOLOGIE 13

2.1 Approche méthodologique de l’étude 14 2.2 Présentation de l’échantillon de l’étude 15 2.3 Les exploitations agricoles couvertes par pays et pour les six pays 15 2.4 Taille des exploitations agricoles et activités exercées 17 2.5 Les autres groupes touchés 19 2.6 La qualité des personnes rencontrées 20

III - LE MECANISME DE GESTION DES SEMENCES PAYSANNES 21 3.1 Les semences, variétés de semences et types de semences utilisées 22 3.2 La provenance des semences 22 3.3 Sélection et multiplication des semences (itinéraires techniques) 24 3.4 Techniques de production 25 3.5 La conservation des semences 25 3.6 Les différents modes de circulation des semences 27 3.7 Les Pratiques culturelles et cultuelles autours des semences 3.8 Les semences paysannes dans le système de production agricole familial 28

IV - LES ACTIVITES DES AUTRES ACTEURS AUTOURS DES SEMENCES 30 4.1 - Activités des structures nationales de gestion des semences 31 4.2 - Les Origines/ provenances des intrants/ Importation et contrôle des intrants 31 4.3- Les spéculations, variétés de semences et types de semences 32 4.4 Itinéraires techniques et intrants recommandés 34 4.5 Les destination et types d’utilisation des semences 34 4.6 Les connaissances et appréciations des règlementations sur les semences 34 4.7 La Conservation des semences 34 4.8 L’avenir des semences selon les OSC, les Etats et les Entreprises Semencières 35

V -LE SYSTEME NATIONAL FORMEL DE GESTION DES SEMENCES 37 5.1 Le Mécanisme de certification et de distribution des semences 38 5.2 Les orientations nationales, les impacts sur les semences paysannes et les appréciations des paysans/paysannes 39

VI -LES RELATIONS ENTRE LE SYSTEME NATIONAL ET LES AUTRES SYSTEMES AU PLAN 42 REGIONAL ET AU PLAN INTERNATIONAL (UPOV)

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VII-LES REGLEMENTATIONS NATIONALES, REGIONALES ET INTERNATIONALES DES 44 SEMENCES

7.1. Le cadre juridique et réglementaire national 45 7.2 Le cadre juridique et réglementaire régional 45 7.3 Le cadre juridique et réglementaire international 46

VIII-LES GRANDES LECONS APPRISES DE L’ETUDE 48

8.1 Les semences paysannes 49 8.3 Le mécanisme de gestion des semences paysannes 49 8.2 Les semences locales 49 8.4 La situation duale de la gestion semencière 51 8.5 Les itinéraires techniques 51 8.6 La pression des industries semencières 52 8.7 Les semences paysannes de demain 52 IX-CONCLUSION 54 ANNEXES 56

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SIGLES ET ABREVIATIONS

ADRAO Association pour le Développement de la Riziculture en Afrique de l’Ouest

AFSA / APSA Alliance for Food Sovereignty in Africa

AFSTA African Seed Trade Association

AGRA Alliance for Green Revolution in Africa

AIC Association Interprofessionnelle du Coton

ANFO Association Nationale des Coopératives des Professionnels de la Filière Oignon

APPSN Association des Producteurs Privés de Semence du Niger

AREJ Action Réelle sur l’Environnement, l’Enfant et la Jeunesse

ATDA Agence Territoriale de Développement Agricole

ASIWA Alliance for seed Industry in West Africa

ASPSP Association Sénégalaise des Producteurs de Semences Paysannes

CaBEV Catalogue Béninois des Espèces et Variétés Végétales

CAIMA Centre d’Approvisionnement en Intrants et Matériels Agricoles

CAPROSET Centre Agroécologique de Production de Semences Tropicales

CDeS Conseil Départemental de Suivi

CILSS Comité Inter-Etats de Lutte contre la Sècheresse au Sahel

CEDEAO Communauté Economique Des Etats de l’Afrique de l’Ouest

CGIAR Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale

CNRA Centre National de Recherche Agronomique

CNEV Catalogue National des Variétés et Espèces Végétales

CNABio Conseil National de l’Agriculture Biologique

CNSP Comité National de Semences et Plants

COPAGEN Coalition pour la Protection du Patrimoine Génétique Africain

COAfEV Catalogue Ouest Africain des Espèces et Variétés Végétales

COASem Comité Ouest Africain de Semences

CROS Comité Régional d’Orientation et de Suivi

EndaPronat Environnement Développement Action pour la Protection des Terroirs

ES Entreprise Semencière

FAO Fond des Nations Unis pour l’Alimentation et l’Agriculture

FCM Fédération des Coopératives Maraichères du Niger

IFDC International Fertilizer Development Center

IFPRI Institut de Recherche Internationale sur les Politiques Alimentaires

IITA International Institute of Tropical Agriculture

INERA Institut National de l’Environnement et de la Recherche Agricole

INRAB Institut National de Recherche Agricole au Bénin

INRAN Institut National de la Recherche Agricole du Niger

IPES-FOOD International Panel of Experts on Sustainable Food Systems

ISRA Institut Sénégalais de Recherche Agronomique

LCSSA Laboratoire de Contrôle et de la Sécurité Sanitaire des Aliments

MAEP Ministère de l’Agriculture de l’Elevage et de la Pêche

NAFASO Neema Agricole du Faso

NISEM Nigérienne des Semences

OAPI Organisation Africaine de Propriété Intellectuelle

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OGM Organisme Génétiquement Modifié

OMC Organisation Mondiale du Commerce

ONG Organisation Non Gouvernementale

OSC Organisation de la Société Civile

PAU Politique Agricole de l’UEMOA

PDC Plan de Développement Communal

PNOPPA Plateforme Nationale des Organisations Paysannes et de Producteurs Agricoles

PPAAO Programme de Productivité Agricole en Afrique de l’Ouest

PSDSA Plan Stratégique pour le Développement du Secteur Agricole

PSRSA Plan Stratégique pour la Relance du Secteur Agricole

PSN Politique Semencière Nationale

ROPPA Réseau des Organisations de Paysans et de Producteurs d’Afrique de l’Ouest

SPQC Service de Protection et de la Qualité et du Conditionnement des Produits Agricoles

SONAPRA Société Nationale pour la Promotion Agricole

SSGP Systèmes Semenciers Gérés par les Paysans

STE Service Technique de l’Etat

UEMOA Union Economique Monétaire Ouest Africaine

UNIS Union Internationale Interprofessionnelle des Semences

UPOV Union pour la Protection des Obtentions Végétales

USAID US Agency for International Development

TIRPAA Traité International sur les Ressources Phytogénétiques pour l’Alimentation et l’Agriculture

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Tableau 1 : Effectif des exploitations agricoles couverts par pays et pour l’ensemble des six pays d’étude selon le genre Tableau 2 : Les spéculations couvertes par l’échantillon par pays et pour les six pays Tableau 3 : Type de production par rapport à l’échantillon Tableau 4 : Taille moyenne des exploitations par pays selon les zones et les spéculations Tableau 5 : Activités principales et activités secondaires par pays et par zone Tableau 6 : Les autres groupes touchés répartis par catégorie d’acteurs par pays et pour les six pays Tableau 7 : Effectif des acteurs par pays répartis en catégories d’acteurs Tableau 8 : Qualité des personnes enquêtées dans les services techniques étatiques Tableau 9 : Provenances générales des semences dans les six pays Tableau 10 : Mode de conservation (pour les six pays ensemble) Tableau 11 : Destination des semences (les six pays réunis) Tableau 12 : Semences des systèmes nationaux de gestion des semencesTableau 13 : Les variétés de semences paysannes et certifiées adoptées dans les systèmes de production paysan au Sénégal Tableau 14 : Choix des zones, semences, catégorie d’exploitants et type de culture Tableau 15 : Choix des catégories de personnes à interviewer au niveau national Tableau 16 : Choix des zones, semences, catégories d’exploitants et forme de culture Tableau 17 : Choix des personnes de l’administration publique, société civile et sociétés semencièr Tableau 18 : Choix des zones et des exploitants Tableau 19 : Choix des personnes de l’administration publique, société civile et sociétés semencières Tableau 20 : Choix des zones et des exploitants agricoles Tableau 21 : Choix des personnes de l’administration publique, société civile et sociétés semencières Tableau 22 : Choix des zones et des exploitations agricoles Tableau 23 : Choix des personnes de l’administration publique, société civile et sociétéssemencières Tableau 24 : Choix des zones et des exploitations agricoles

Tableau 25 : Choix des personnes de l’administration publique, société civile et sociétés semencières

LISTE DES TABLEAUX

LISTE DES FIGURESFigure 1: Schéma général du système formel de gestion des semences

Figure 2: Circuit global de distribution des semences certifiées au Bénin

LISTE DES ENCADRESEncadré 1: Déclarations sur des variétés cultivées Encadré 2: Réflexion sur la conservation des semences améliorées Encadré 3: Quelques exemples de rituels qui accompagnent la production Encadré 5: Un producteur évoque un avantage lié à la production des semences paysannes Encadré 6: Appréciations des semences paysannes comparées aux hybrides et améliorées Encadré 7: Utilisation des semences améliorées est assujettie à l’utilisation des intrants chimiques de synthèse Encadré 8: Un conseil venant de l’Institut de recherche agronomique du Sénégal

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I - INTRODUCTION

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L’étude de référence sur les mécanismes de gestion semencière à la base a été mise en œuvre à travers une collaboration entre des organisations de la société civile de six pays d’Afrique francophone (Bénin, Burkina Faso, Mali, Niger et le Togo). Ces six pays avaient auparavant participé à une étude sur les pratiques agroécologiques, initiée par JINUKUN en 2012. Cette étude avait créé une convergence des réflexions autour de la semence, incontestablement vue comme un des éléments clés de l’agroécologie, si l’on considère en plus, la terre, l’eau et les connaissances, savoir-faire (pratiques) et valeurs (savoir-être), qui les accompagnent.

Les contextes nationaux examinés, ont montré que, dans l’ensemble des pays d’Afrique francophone, en particulier ceux d’Afrique de l’Ouest, les semences paysannes continuent de jouir d’une bonne réputation en milieu rural et chez une bonne partie des consommateurs, puisque, comme cela transparait de notre étude, de 50 à 75 pour cent des semences vivrières sont d’origine paysanne et/ou adoptées depuis plusieurs décennies, cet ensemble pouvant être identifié comme regroupant les semences locales.

Jusqu’aujourd’hui, dans cet espace géographique considéré, rares sont les pays où les pouvoirs publics osent interdire aux paysannes et aux paysans de sélectionner, produire, conserver, échanger et vendre leurs semences. Au côté du système national (officiel) de gestion des semences, existe un système semencier géré par les producteurs agricoles. Dans plusieurs pays, à l’instar du Bénin, il existe un répertoire plus ou moins exhaustif des semences paysannes. Au Sénégal, par exemple, les organisations paysannes ont développé, sous l’égide d’EndaPronat, un système sui generis de gestion semencière, conçu et géré par l’Association Sénégalaise des Producteurs de Semences Paysannes (ASPSP).

Cependant, cette situation qui paraît confortable, comparée aux évolutions en cours en Afrique anglophone, est menacée. Les industries semencières sont préoccupées et n’entendent pas laisser la situation perdurer. Elles s’inquiètent du fait que les paysannes et paysans restent encore majoritairement méfiants de leurs inventions : semences améliorées, semences certifiées, semences hybrides et semences transgéniques.

Une de leurs plus récentes trouvailles en Afrique de l’Ouest est l’Alliance pour l’Industrie Semencière en Afrique de l’Ouest (en anglais, Alliance for SeedIndustry in West Africa - ASIWA,).

Selon l’Alliance, la situation est déplorable en Afrique de l’Ouest : les producteurs n’ont pas accès à des

semences certifiées pour assurer une production suffisante dans la région; il y a encore des écarts dans la production et la fourniture des semences de qualité, le coût des semences étant perçu comme élevé; l’environnement politique est peu favorable au développement de l’industrie des semences, avec des marchés semenciers sous-développés. Pour remédier à cela, ASIWA entend favoriser et soutenir le partenariat entre les acteurs privés et publics du secteur semencier de l’Afrique de l’Ouest; intégrer le secteur privé dans les efforts de développement des semences entrepris par les pouvoirs publics ; créer des synergies entre les programmes d’appui à la filière semencière en cours au sein de la CEDEAO; soutenir l’investissement (public et privé) dans la production et la distribution des semences; établir et renforcer la confiance des producteurs dans les semences certifiées; coordonner les efforts des acteurs pour élargir et consolider le marché régional des semences.

Il faut noter qu’ASIWA est une initiative de l’Association Africaine du Commerce des Semences (AFSTA). Dans sa stratégie d’influence, ASIWA déploie des efforts pour amener les acteurs clés autour de la table : le Réseau des Organisations de Paysans et de Producteurs d’Afrique de l’Ouest (ROPPA), l’AFSTA, l’USAID (bureau Afrique de l’Ouest), le CORAF/WECARD et enfin la CEDEAO/ UEMOA / CILSS. ASIWA dispose d’une structure régionale, qui doit se décliner dans chaque pays.

Le moins qu’on puisse dire est que la gestion des semences se fait à deux niveaux : au plan national où le mécanisme est fortement influencé de l’extérieur, avec pour tendance de correspondre aux cadres réglementaires régionaux et internationaux, répondant à un souci d’harmonisation non encore maîtrisée ; au plan local encore dit à la base, où les acteurs sont les paysannes et paysans qui assurent à près de 80 % l’alimentation des populations.

Il faut dire que c’est au plan national que s’élaborent les cadres réglementaires, juridiques et institutionnel qui influencent très peu les pratiques paysannes en matière de gestion des semences. Le catalogues régional des espèces et variétés végétales CEDEAO / UEMOA / CILSS, publié en 2016, ne s’est occupé que de 11 spéculations : riz, maïs, sorgho, mil, arachide, niébé, manioc, igname, pomme de terre, tomate et oignon.

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C’est face à cette situation que, sur initiative de JINUKUN, des acteurs de la société civile des pays ci-dessus mentionnés se sont associés pour engager un projet triennal de plaidoyer en faveur des mécanismes de gestion semencière à la base et de la consolidation du pouvoir des paysannes et des paysans sur leurs semences. L’étude de référence sur les mécanismes de gestion des semences à la base est la première phase du projet. Comme stipulé dans les documents du projet, elle a pour objectifs de :

analyser les mécanismes ou pratiques de gestion des semences dans six pays au sein de l’UEMOA et de la CEDEAO avec leurs impacts sur les producteurs ;

identifier les mécanismes de gestion des semences qui profitent à l’agriculture familiale afin de les promouvoir dans chaque pays de la zone couverte par l’étude ;

développer un ensemble d’arguments avec les agriculteurs et les organisations de la société civile pour influencer les politiques agricoles et semencières, de sorte que les systèmes de gestion des semences actuels et futurs ne dépossèdent pas les agriculteurs de leurs semences.

Ce rapport de synthèse rend compte des résultats de l’étude de référence. En plus de l’introduction et la conclusion, le rapport présentera les sept grands chapitres suivants :

Méthodologie générale de l’étude Présentation de l’échantillon Activités concernant les semences Le système national / formel de gestion des semences Les relations entre le système national et les autres systèmes Les réglementations nationales régionales et internationales Les grandes leçons apprises de l’étude

Ce rapport de synthèse est accompagné des rapports “pays” qu’on peut télécharger sur internet aux adresses suivantes: http://www.jinukuncopgen.com et http://viveagroecologie.org

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II - METHODOLOGIE

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2.1 Approche méthodologique de l’étude

Elle a été participative ou encore interactive. Comme l’étude regroupe des acteurs provenant de six pays, il a fallu mettre en place un dispositif de gestion inclusive. Si l’équipe technique de JINUKUN a eu pour rôle d’assurer l’orchestration des activités, la partition a été jouée avec la pleine implication de chaque acteur à travers la mise en place d’un comité sous régional de coordination. Toute activité importante réalisée au cours de l’étude a été le fruit de la concertation entre l’équipe de JINUKUN et les acteurs clés des six pays. En effet, un répondant “pays” a été désigné pour répondre du projet au niveau de chaque pays. Pour chaque activité importante, un document de cadrage a été élaboré par l’équipe technique de JINUKUN et soumis à l’approbation des répondants “pays”. Lorsqu’une activité a réuni des acteurs provenant des six pays couverts, sa facilitation a été conçue et mise en œuvre par l’ensemble des répondants “pays”, chacun assumant le ou les rôles à lui attribués.

Pour ne pas se retrouver à inventer la roue, l’étude a démarré par un atelier dit de mise en synergie, précédé par une revue documentaire, qui a permis de recenser, de parcourir et de résumer les idées forces de la plupart des documents existants sur les mécanismes de gestion semencière dans les six pays couverts et au-delà, en incluant, la Côte d’Ivoire, la Guinée Conakry et le Tchad. La revue documentaire a aussi permis d’identifier des acteurs porteurs d’initiatives similaires à celui du projet. Des échanges ont permis de mettre à jour les initiatives recensées et identifiées des points de convergence, par rapport auxquelles des engagements ont été pris pour créer et animer un réseau d’échange sur la question des semences.

L’atelier de mise en synergie a été suivi par un atelier technique de préparation et de planification des activités de terrain, qui a réuni tous les répondant ”pays” et les responsables de JINUKUN. La méthodologie de l’étude a été revisitée et adaptée aux réalités du terrain. D’une façon générale, trois zones ont été sélectionnées dans chaque pays pour accueillir l’étude. Une planification générale a été faite au cours d’un atelier technique de trois jours.

Les outils de collecte de données ont été finalisés sur la base des propositions de l’équipe technique de JINUKUN.

Trois guides d’entretien ont été utilisés pour la collecte des données sur le terrain :

Chaque guide d’entretien a été testé dans chacun des six pays avant son utilisation. Chaque pays a recruté et encadré les agents qui ont collecté les données sur le terrain. Un mini atelier d’un jour a été organisé dans chaque pays pour restituer et valider les résultats issus des travaux de terrain. Un rapport “pays” a été rédigé et communiqué à JINUKUN, en vue de l’élaboration du rapport de synthèse.

La revue documentaire, de même que la collecte des données sur le terrain ont abouti, chacune, à la création d’une base de données, respectivement dans Excel et dans Access. Dans la base de données de la revue documentaire, un super lien a été créé, pour relier les titres des documents revus à leurs contenus, lorsque lesdits documents pouvaient être archivés sous format électronique. Quant à la base construite dans Access, elle a enregistré toutes les réponses aux questions des guides d’entretienet permet d’y accéder en opérant des tris à volonté. Les deux bases de données sont mises à disposition de tous ceux qui souhaiteraient les consulter sur la plate-forme Agroécologie de JINUKUN.

A l’instar de ce qui s’est passé au niveau de chaque pays, un atelier régional de restitution et de validation des résultats de l’étude a réuni un échantillon des personnes rencontrées au cours des travaux de terrain. Les débats ont permis de confirmer ou d’infirmer certains résultats et ont ouvert la voie à la finalisation du rapport de synthèse de l’étude. Par ailleurs, l’atelier régional de restitution et de validation a permis, de construire un argumentaire en vue du plaidoyer en faveur du maintien et de l’amélioration des systèmes semenciers gérés par les paysans (SSGP). On fera une large diffusion du présent rapport de l’étude, afin d’associer le plus grand nombre possible d’acteurs au processus du plaidoyer qui s’enclenchera à partir de la deuxième année du projet. Il est enfin prévu de diffuser un résumé des résultats de l’étude en anglais pour créer un lien d’échange avec certains pays anglophones d’Afrique.

un guide d’entretien pour les exploitants agricoles, un pour les organisations de la société civile et société semencière,un pour les services techniques de l’Etat.

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N° Pays Nombre de zones Nombre d’exploitants Femmes Hommes

01 Bénin 3 34 14 2002 Burkina Faso 4 32 13 1903 Mali 2 50 13 3704 Niger 4 34 18 1605 Sénégal 3 32 7 2506 Togo 2 34 13 21 Total 18 216 78 138 Pourcentage 100% 36% 64%

Source : Etude de référence sur les mécanismes de gestions des semences paysannes, 2017

Tableau 1: Effectif des exploitatants agricoles couvertes par pays et pour l’ensemble des six pays d’étude selon le genre

2.2 Présentation de l’échantillon de l’étude

L’étude devant se pencher sur la description des systèmes de gestion semenciers, nous avons sélectionné les personnes à rencontrer de manière à couvrir, au niveau des paysans et des autres acteurs, les différents types de systèmes semenciers existants à notre connaissance. L’effectif des paysans a été le plus important, parce qu’il doit nous permettre de décrire les systèmes paysans en fonction des grandes cultures pratiquées dans chacun des six pays concernés. En conséquence, le choix a été fait de rencontrer au moins 30 exploitants agricoles dans chaque pays, où seulement trois zones de collecte vont être identifiées. Cela fait au moins 10 exploitants agricoles à rencontrer par zone. Sur les 30 exploitants agricoles,

il est prévu de rencontrer 10 femmes. Pour les autres groupes, il est prévu 8 acteurs des structures étatiques à différents niveaux, depuis les responsables au bureau, jusqu’aux techniciens sur le terrain. On devait aussi rencontrer cinq organisations de la société civile et deux sociétés de distribution des semences.

Les rapports “ pays“ présentent dans le détail l’échantillon utlisé dans chaque pays. Les deux paragraphes qui suivent décrivent, dans le détail, toutes les catégories de personnes rencontrées effectivement et selon les critères retenus.

2.3 Les exploitations agricoles couvertes par pays et pour les six pays

En respect des consignes élaborées de commun accord lors de l’atelier technique, la méthodologie de travail mise en œuvre dans les six pays impliqués dans l’étude, a combiné les zones agroécologiques et les types de semences produites. Au niveau de chaque pays, au moins trente (30) exploitations agricoles ont été rencontrées suivant des tailles variables et suivant le sexe et réparties selon les zones agroécologiques définies (Les tableaux des effectifs des exploitations agricoles par zone et par sexe sont présentés pour les six pays en annexe1).

Pour les six pays, les effectifs des exploitations varient entre 32 (Burkina Faso et Sénégal) et 50 (Mali). Le nombre de zones agroécologiques couverts varie entre 2 et 4. Il faut remarquer que dans chaque pays, il est pris en compte des exploitations agricoles tenues par les femmes et celles tenues par les hommes. Ainsi pour l’ensemble des pays, la proportion des exploitations tenues par des femmes est de 36%, alors que celle des exploitations tenues par des hommes est de 64%.Le tableau ci-après présente l’effectif des exploitants agricoles visités par pays et pour l’ensemble des six pays.

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Tableau 2 : Les spéculations couvertes par l’échantillon par pays et pour les six pays

N° Pays Spéculations couvertes par pays

01 Bénin Maraîchères, Céréales (sorgho, mil, maïs, riz), Tubercules (igname, manioc, patate douce) Légumineuses (arachide, niébé, voandzou)

02 Burkina Faso Maraichage (Tomate, chou, oignon, concombre, poivre) Céréales (maïs, mil, petit mil, sorgho, riz) Tubercule (Pomme de terre) Légumineuse (arachide, niébé) Fruits (Banane, mangue, papaye, agrumes)

03 Mali Maraichage Céréales (Riz) Tubercule

04 Niger Maraichage Céréales Légumineuses

05 Sénégal Maraichère (Piment, tomate, oignon, jaxatu) Céréale (Riz, Sorgho, Maïs, Mil suna) Tubercule (manioc) Légumineuse (Arachide, Niébé)

06 Togo Maraîchage (piment, aubergine, gombo, tomate) Céréale (fonio, maïs, petit mil, sorgho rouge) Tubercule (igname) Légumineuse (niébé)

Source : Etude de référence sur les mécanismes de gestions des semences paysannes, 2017

Les échantillons ont tenu compte également des formes d’agriculture (agroécologique et conventionnelle) dans chaque pays. Globalement, la proportion des exploitations agro écologiques est inférieure à celles des exploitations conventionnelles. Cela représente la situation réelle sur laquelle nous devons travailler pour provoquer un changement. Le tableau 3, fait état des formes d’agriculture échantillonnées.

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Source : Etude de référence sur les mécanismes de gestions des semences paysannes, 2017

La taille des exploitations agricoles a été une préoccupation lors de l’échantillonnage. De ce fait, on note bien que par pays et par zone, la taille des exploitations agricoles varie en fonction des spéculations. Ainsi pour tous les pays, les petites tailles d’exploitations agricoles correspondent au maraichage.

Tableau 4: Taille moyenne des exploitations par pays selon les zones et les spéculations

Source : Etude de référence sur les mécanismes de gestions des semences paysannes, 2017

Tableau 3: Type de production par rapport à l’échantillon

N° Pays Nombre de zones Effectif des exploitations

01 Bénin 3 34 15 1902 Burkina Faso 4 32 11 2103 Mali 2 50 20 3004 Niger 4 34 17 1705 Sénégal 3 32 17 1506 Togo 2 34 21 13 Total 18 216 101 115 Pourcentage 100% 47% 53%

Exploitations agroécologiques exploitations conventionnelles

Formes d’agriculture

2.4 Taille des exploitations agricoles et activités exercées

Il faut noter que les tailles relevées ne disent rien sur la moyenne nationale.Le tableau 4 suivant présente les tailles moyennes des exploitations par pays selon les zones et suivant les spéculations.

N° Pays Zones Taille moyenne des exploitations Spéculations

01 Bénin Bande du littoral 2,3 Maraichage Centre Nord 2,6 Céréales Sud Centre 5,6 Tubercule et légumineuse

02 Burkina Faso Région de l’Est 14,56 Céréales et légumineuses Région du Nord 5,25 Pomme de terre Région Ouest et les cascades 2,66 Papaye, agrumes, mangue Région de centre 2,97 Maraichage

03 Mali Gao 0,77 Maraichage, riz Ansongo 1,24 Tubercule, riz, cultures sèches Ségou 4 Tubercule, Céréales

04 Niger Dosso 11,63 Céréales, Légumineuse Dogarawa 0,74 Maraichage Tillabery 0,95 Maraichage Niamey 0,5 Maraichage

05 Sénégal Bassin arachidier Nord 8,66 Tubercule, Légumineuse Bassin arachidier Sud-Est 10,58 Céréales, Légumineuses Niayes 1 Maraichage

06 Togo Région de savane 2,3 Maraichage

Région de Kara 3,63 Céréales, Tubercules

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Un autre centre d’intérêt de la présente typologie, concerne les activités menées qui sont scindées en activités principales, c’est-à-dire celles qui prennent plus de temps aux exploitants agricoles, et activités secondaires qui sont souvent saisonnières et qui viennent en appoint aux activités principales. Comme on pouvait s’y attendre, l’activité principale est l’agriculture dans toutes ses formes. Dans trois cas, le petit commerce (2) et la coiffure (1) sont apparus comme activités principales.

Au titre des activités secondaires il y a la coiffure (pratiquée aussi bien par les hommes que par les femmes), la transformation des produits agricoles, le petit commerce, la petite restauration, l’élevage de caprins, ovins, porcins et poulets, les travaux de forge, vente d’akassa, fonderie, couture, pêche, poterie. Les activités secondaires sont très variées comme on peut le voir dans le tableau 5 qui fait le point des activités principales et celles secondaires par pays et par zone.

Tableau 5: Activités principales et activités secondaires par pays et par zone

N° Pays Zones Activités principales Activités secondaires

01 Bénin Bande du littoral Agriculture, Coiffure, petit commerce Coiffure, Petit commerce Ferrailleur Centre Nord Agriculture Transformation des produits agricoles, Elevage, couture, Fabrication mortier Sud Centre Agriculture Fondeur, forgeron, élevage (Poulets, caprins, ovins, porcins,) Transformation de produits agricoles Préparation d’akassa (lio) Vendeuse de nourriture

02 Burkina Faso Région de l’Est Agriculture Activités génératrices de revenus Couture, vente de savon, Petit commerce, élevage (Petit rumi nant, volaille) Région du Nord Agriculture Activités génératrices de revenus Couture, commerce, élevage Région Ouest et les cascades Agriculture Activités génératrices de revenus Couture, Petit commerce, élevage (Petit ruminant et volaille), apiculture Région de centre Agriculture Activités génératrices de revenus Couture, vente de savon, Petit commerce, élevage (Petit rumi nant, volaille), maçonnerie, arbo riculture

03 Mali Gao Agriculture Petit commerce, élevage de volaille et petit ruminant, coiffure Ansongo Agriculture Petit commerce, élevage de volaille et petit ruminant, pêche Ségou Agriculture Petit commerce, élevage de volaille et petit ruminant, coiffure

04 Niger Dosso Agriculture Commerce, élevage de volaille et petit ruminants, enseignement coranique Dogarawa Commerce (oignon), élevage Commerce, formateur au centre des métiers, producteur de se- mences Tillabery Agriculture, élevage Agriculture, commerce, embouche, élevage, enseignant coranique Niamey Petit commerce, agriculture Agriculture, coiffure, embouche, com merce

05 Sénégal Bassin arachidier Nord Agriculture, élevage Commerce de cultures vivrières, élevage de bovin, ovin et caprin, Bassin arachidier Sud-Est Agriculture, Chauffeur, petit commerce des produits

locaux, élevage, embouche ovine, ani mateur rural Niayes Agriculture, Maraichage, embouche ovine, élevage de volaille, ovin et caprin, relais communau taires, 06 Togo Région de savane Agriculture Commerce de céréale, pépiniériste, pasteur/guérisseur, commerce de volaille Région de Kara Agriculture Pêche, poterie, foresterie, commerce de bétail, commerce de boisson locale,

Sour

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017

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En plus des exploitations agricoles, les données de l’étude ont été également collectées auprès des organisations de la Société Civile(OSC),des Services Techniques Étatiques(STE)et desEntreprises semencières/ Opérateurs privés (ES/OP)qui exercent dans le domaine des semences.

Légende :OSC : Organisation de la Société Civile ; STE : Services Techniques Étatiques ; ES/OP : Entreprises semencières / Opérateurs privés Source : Etude de référence sur les mécanismes de gestions des semences paysannes, 2017

Il faut remarquer au regard du tableau 6 que l’étude a pris en compte 25 Organisations de la Société Civile sur un total de 62 acteurs rencontrés.Les structures techniques étatiques représentent 50%, les organisations de la société civile environ 40% et les sociétés privées de distribution de semences 10% environ. Cela respecte l’équilibre des rôles.

Le tableau suivant présente le récapitulatif de toutes les catégories d’acteurs rencontrés par pays et pour les six pays.

Le tableau ci-après montre le nombre de ces catégories d’acteurs qui sont touchés par pays et pour l’ensemble des six pays.

2.5 Les autres groupes touchés

N° Pays OSC* STE* (ES/OP)*

01 Bénin 05 04 02

02 Burkina Faso / 02 01

03 Mali 09 08 /

04 Niger / 08 /

05 Sénégal 04 05 03

06 Togo 07 04 / Total pour les six pays 25 31 06

Tableau 6: Les autres groupes touchés répartis par catégorie d'acteurs par pays et pour les six pays

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Tableau 7: Effectif des acteurs par pays répartis en catégories d'acteurs

Légende : OSC : Organisation de la Société Civile ; STE : Services Techniques Étatiques ; ES/OP : Entreprises semencières / Opérateurs privés

Les Organisations de la Société Civile, les Services Techniques Etatiques et les opérateurs privés sont très actifs dans la sélection, la formation, le suivi – contrôle, la multiplication et la distribution des semences.

N° Pays Exploitations agricoles OSC STE ES/OP Total

01 Bénin 34 05 04 02 45

02 Burkina Faso 32 / 02 01 35

03 Mali 50 09 08 / 67

04 Niger 34 / 08 / 42

05 Sénégal 32 04 05 03 44

06 Togo 34 07 04 / 45 Total six pays 216 25 31 06 278

2.6 La qualité des personnes rencontrées

En plus des exploitants agricoles, trois catégories d’acteurs ont été rencontrées dans le cadre de la présente étude. Il s’agit des services techniques de l’Etat, des Organisations de la société Civiles et des Entreprises Semencières.

Les personnes rencontrées dans les services techniques des pays sont des cadres de niveau supérieurs occupant des postes stratégiques. Elles proviennent du ministère en charge de l’Agriculture, des ministères du Commerce et de l’Industrie, des instituts et centres de recherches agronomiques, des universités, des centres de formations professionnels. Les personnes ressources et cadres des Organisations de la société Civiles rencontrées, font partie de celles qui ont contribué à ce que leurs organisations soient actives dans les domaines des semences, de la terre et de l’eau, au niveau des pays concernés.

On peut citer quelques structures, dont, la PNOPPA au Bénin, le RESOPP au Sénégal, Agro bio Savane ONG au Togo, l’ONG MERCY CORP au Mali, la COASP au Burkina Faso, et ANFO pour le Niger.

Quant aux cadres des entreprises semencières, l’étude a touché ceux dont les rôles ont un impact dans la production et la distribution de semences au niveau national et sous régional. Comme entreprises semencières, onpeut citerBenin Semences pour le Bénin, la ferme semencière AINOMA pour le Niger, CAPROSET pour le Mali, NAFASO pour le Burkina Faso, et UNIS pour le Sénégal(Les tableaux des structures retenues par catégories d’acteurs pour les six pays sont en annexe n°1).

Source : Etude de référence sur les mécanismes de gestions des semences paysannes, 2017

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III - LE MECANISME DE GESTION DES SEMENCES PAYSANNES

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Dans ce chapitre, nous présentons les pratiques déployées par les paysans pour gérer les variétés et types de semence qu’ils utilisent sur leurs exploitations agricoles. C’est en fait ce que nous appelons les mécanismes de gestion semencière. Les mécanismes mis en œuvre permettent aux paysans de sélectionner, produire, conserver et distribuer les semences. Mais avant de décrire les pratiques observées sur les exploitations agricoles, nous présentons les spéculations et types de semences concernées par pays et pour cinq des pays concernés sauf le Togo, dont nous ne disposons pas de données. Ce chapitre abordera aussi les modes d’accès aux semences et les appréciations que font les paysans des différentes variétés et types de semences qu’ils utilisent.

Les spéculations prises en compte dans le cadre de la présente étude sont liées aux produits de forte consommation. Chaque pays a considéré les spéculations dominantes auxquelles les paysans sont habitués et aussi les grandes filières qui ont un impact sur le système alimentaire. Les semences paysannes cohabitent avec les semences certifiées ou améliorées, pour la même spéculation. (Cf. Tableau 2 spéculations couvertes par l’échantillon par pays et pour les six pays, pages 15)

En fait la provenance indique ici les modes d’accès aux semences. Le tableau ci-dessous montrent que les paysans sont jaloux de leur autonomie, puisque sur les 216 exploitants agricoles rencontrés, 143 produisent les semences qu’ils utilisent, soit envions 66,20%, pendant que les achats représentent près de 50%. Les paysans dépendent très peu de la recherche, qui se retrouve à l’avant dernier rang, juste devant les échanges, si l’on se réfère à l’échantillon de l’étude. Les entreprises semencières peinent à se positionner auprès des paysans et cela confirme les analyses de l’Association Africaine du Commerce des Semences (AfricanSeed Trade Association/ AFSTA),

3.1 Les semences, variétés de semences et types de semences utilisées

3.2 La provenance des semences

qui déplore le faible attrait des semences certifiées / améliorées sur les paysans en Afrique de l’Ouest, comme nous le verrons plus loin. Quand on additionne les fréquences de citation de tous les autres modes d’accès aux semences, on obtient 291 citations contre 54 pour les entreprises semencières et la recherche ensemble.Quand on sait, au regard de l’accès aux semences, que la vente des semences paysannes est déjà criminalisée en Afrique de l’Est et australe, la situation en Afrique de l’Ouest est enviable. Mais pour combien de temps encore.

Au Sénégal, les semences paysannes, excepté celles d’arachide (généralement achetées), sont issues d’héritage des grands parents, puis reproduites par les agriculteurs depuis des dizaines d’années. Elles sont parfois acquises suite à des échanges ou des dons entre agriculteurs d’une même famille, d’un même terroir ou d’ailleurs.

Au Niger, toutes cultures confondues, 55% des producteurs utilisent des semences locales ou paysannes. Cependant l’usage des semences paysannes dites locales concerne spécifiquement une gamme très limitée d’espèces en culture maraichère. C’est notamment, les cultures d’oignon, de courge, de tomate, d’aubergine, de piment. S’agissant des cultures céréalières, l’étude confirme une tendance à la préservation des semences dites paysannes notamment pour les cultures de mil, de sorgho, niébé.

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Quand on regarde les raisons qui poussent à choisir les semences paysannes, on peut dire qu’elles n’ont pas du tout démérité au côté des autres types de semences, qu’on aurait pensé d’office favorites.

Au Niger, on constate une préférence pour l'utilisation des semences certifiées particulièrement par rapport aux semences des cultures maraîchères. Les raisons avancées sont l'accessibilité (grâce aux subventions des projets, l'achat dans des firmes, etc.) et la garantie. Pour les semences certifiées des cultures pluviales, les raisons de leurs préférences sont liées à la précocité et l'homogénéité. Toutefois des tendances de préférences des semences paysannes ont particulièrement été constatées pour les cultures vivrières (mil, niébé, oseille etc.) pour des raisons d'adaptation aux aléas climatiques (résistances aux oiseaux, résistance à la sécheresse ; tolérance à la pauvreté des sols, etc.). Enfin certains producteurs (75% de l’échantillon du Niger) ont affirmé que les semences issues des variétés paysannes ont plus de gouts.On constate qu’un effort est fait pour accepter des spécificités et réalités paysannes, tout en prenant en compte les valeurs socio culturelles et économiques qui entourent les semences. Le choix des paysans répond toujours à des logiques que les techniciens ont parfois, du mal à comprendre

Au Bénin, la quasi-totalité des producteurs enquêtés préfèrent cultiver les semences certifiées (de maïs) pour la commercialisation et les semences paysannes

Tableau 8: Provenances générales des semences dans les six pays

Provenance des semences Nombre d’exploitants enquêtés Observations

Achat 107 Semences certifiées améliorées, OGM, Paysannes

Autoproduction 143 Semences reproduite et prélevées par sélection massale, donc semences paysannes

Don 31 Semences paysannes

Echange 10 Semences paysannes

Entreprises semencières 30 Semences certifiées, améliorées, OGM et paysannes

Recherches 24 Semences certifiées et améliorées

Source : Etude de référence sur les de gestions des semences paysannes, 2017mécanismes

pour l’autoconsommation. La raison est que les semences certifiées ont un rendement élevé (même si on utilise des engrais et pesticides). Mais leur conservation pose problème. Ces cultures issues des semences certifiées sont destinées exclusivement au commerce ou à la transformation, tandis que les produits de récoltes issus des semences paysannes sont conservés beaucoup plus longtemps pour les périodes de soudure ou de disette.

L’étude confirme le comportement pratique des paysans, dans leur ensemble. Tout en gardant leurs semences, ils ne rejettent pas totalement les autres types de semences, d’abord parce qu’ils sont la plupart du temps dans la posture d’expérimentation. Ils veulent voir ce que peut donner une semence qu’ils découvrent pour la première fois, pourvu que les conditions de reproduction soient à leur portée. C’est pourquoi la plupart des exploitants agricoles rencontrés utilisentles semences hybrides. Comme le prouve l’encadré ci-dessous, il arrive parfois que les paysans gardent plus longtemps que les centres de recherche, les semences qu’ils en reçoivent. Mais pour que les semences reçues des centres de recherche soient conservées sur une longue période, il faut qu’elles rentrent dans leurs critères de choix, pour ne pas dire d’adoption. Parmi les critères les plus importants, il y a le taux de germination, la résistance aux maladies et le goût à la consommation. Le rendement semble moins privilégié, sauf dans le cas des cultures de rente, qui subissent un turn over correspondant aux objectifs de commercialisation.

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Encadré 1: Déclarations sur des variétés cultivées

« Les semences de mil Khun, Makhaly et Lack sont cultivées dans la zone depuis plus de cent ans ». Mbaye Diouf agriculteur, (Sénégal) : « Ma famille conserve la variété traditionnelle de mil Khun depuis plus de cent ans ». Moussa Diop RENOLSE « J’ai hérité le maïs Dokorano de mes grands-parents qui l’avaient acquis depuis 1912 de la Guinée Bissau, et le maïs blanc depuis les années 60. Depuis lors ces deux variétés sont autoproduites de génération en génération dans ma famille. » Mamadou Camara, grand producteur de Koussana (Sénégal) « La variété traditionnelle de manioc Sooya est cultivée dans la zone depuis plus de 60 ans. Il y a cependant une autre « Sooya » introduite par la Recherche en 2004 mais son niveau d’adoption est faible du fait qu’elle est trop sensible à beaucoup de maladies ». MalickNdiaye (Sénégal).

Les déclarations affectives contenues dans l’encadré ci-dessous semblent indiquer qu’il y a des semences que les paysans cultivent et même conservent sans les aimer et d’autres qu’ils cultivent et conservent longtemps, parce qu’ils les aiment.

Sélection des semences d’ignames

On note deux façons de sélectionner les semenceaux d’igname.

Les rejets d’ignames sortent naturellement lors de la culture. Il n’y a pas une sélection ou une production en tant que tel. On récupère ces rejets avant qu’ils ne grossissent et on les conserve pour la culture prochaine.

Sélection de semences de maïs

On coupe les épis les plus beaux, gros et blancs au moment de la récolte, puis, on les sèche (Bénin, Burkina Faso, Niger, Togo) en hauteur dans la maison. Certains agriculteurs plus rigoureux procèdent d’abord à l’épouillage et au triage à la maison pour sélectionner les meilleurs épis sains (Sénégal).

Sélection de semences de tomate

A maturité, les plus gros fruits sont choisis comme porte-graine. Ils sont récoltés sur la plante quand ils deviennent mûrs et coupés horizontalement pour ne pas casser les graines qui sont superposées. Ensuite, les fruits sont pressés pour récolter les graines et le jus qui sont ensuite placés dans un récipient qui laisse passer l’air pour que le mélange fermente pendant 3 jours. Au bout de cette période, on constate que les mauvaises graines flottent et les bonnes reposent au fonds du récipient. Les mauvaises graines sont retirées, le mélange est tamisé et les bonnes graines sont rincées à l’eau, puis séchées.

3.3zSélection et multiplication des semences (itinéraires techniques)

Pour être concret, nous présentons les méthodes de sélection en lien avec quelques semences choisies

Sélection de semences de riz

La sélection se fait au niveau du champ en identifiant les meilleurs épis, les triant et les mettant de côté (Sénégal) ou on sélectionne après avoir procédé respectivement à la récolte des épis, au tri, au battage manuel et au vannage (Bénin, Togo).

Sélection de semences de sorgho

Certains producteurs commencent tout d’abord par identifier les talles les plus vigoureuses avant la récolte (Sénégal, Burkina Faso). D’autres attendent la récolte pour sélectionner les épis les plus beaux, gros et blancs, puis, les sèchent en hauteur dans la maison (Bénin, Niger, Togo).

3.3 Sélection et multiplication des semences (itinéraires techniques)

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3.4 Techniques de production

Les exploitations agricoles visitées n’ont pas de pratiques de production spécifiques à la production de semences, puisque la sélection des semences se fait sur le champ ou après la récolte. Décrire un itinéraire de production des semences revient donc à décrire des pratiques ordinaires de production agricole.Ainsi donc, le labour se fait généralement après les premières pluies. Concernant la fertilisation des champs de culture, certains producteurs utilisent selon la disponibilité, des engrais organiques tels que de la fiente de volaille, les bouses de vache, le fumier de petits ruminants, de cheval ou d’âne, des déchets ménagers organiques (bruts ou triées), de la coque d’arachide, de la cendre, du compost solide ou liquide à base de feuilles de neem ou d’acacia. L’utilisation d’engrais chimiques pour les cultures à base de semences paysanne est très rare. Car qui dit semences paysannes, dit avant tout production vivrière.En ce qui concerne le maraichage, le labour est généralement suivi d’aménagement de planches ou d’espaces destinés à recevoir les plants.

Les modes de conservations sont presque identiques d’un pays à l’autre. Selon les modes de conservation, nous avons :

Au lieu de sac, d’autres utilisent des bouteilles, des bidons, des futs ou des calebasses bien remplis et fermées hermétiquement. Ces contenants sont rangés dans des endroits à l’abri de la lumière du soleil. Parfois, pour éviter la lumière du soleil, les bouteilles et bidons sont cachés dans des trous faits à même le sol. (Mil, sorgho, niébé, maïs)

la suspension sur le toit des maisons ou sous le toit de la cuisine

Cela consiste à tresser et suspendre des bottes de céréales sous le toit de la cuisine tout en évitant de les mettre au-dessus du feu. La fumée du bois de chauffe et la vapeur de la cuisson des aliments réalisent le phénomène d’enrobage des graines et empêchent les insectes de les attaquer. C’est le cas du maïs et du sorgho.

Photo 2: Epis de maïs suspendus pour séchage (Togo)

Source : Etude de référence sur les mécanismes de gestions des

semences paysannes, 2017

La seconde façon de produire de petits semenceaux d’igname, consiste à : fragmenter un tubercule mère; traiter les morceaux avec de la cendre ; installer une planche et mettre les morceaux traités sur la planche; recouvrir ces morceaux de terre et arroser. On obtient la germination de ces morceaux d’ignames. On les transplante ensuite sur des butes avec des tuteurs, espacés de 25 cm. A maturité on sélectionne les tubercules ayant un poids inférieur à 300g : Ce sont les semenceaux d’ignames (Bénin).

Sélection des boutures de manioc

On choisit les boutures âgées de 10 à 14 mois, les plus robustes et sans agressions externes apparentes. On les découpe et on les sèche en attendant de les repiquer (Bénin, Sénégal, Niger…).

C’est le cas des céréales (Riz, Maïs, sorgho, mil…). Les bottes ou épis de céréales peuvent être suspendus sous les toits de la case ou du magasin. La conservation des graines de céréales dans des contenants avec ou sans les produits naturels de protection

Après le battage et le séchage, les graines sont mises dans des sacs de jutes. En ce qui concerne le riz, par exemple, après le battage, le vannage et le conditionnement dans des sacs de jutes, ces derniers sont conservés à l’abri du soleil, dans une chambre à coucher. Certains producteurs traitent les semences avec des feuilles traditionnelles (feuilles de neem : Azadirachtaindica, de la cendre ou du sable chaud avant de les mettre dans les sacs.

3.4 - Techniques de production

3.5 - La conservation des semences

La conservation en bottes ou en épis dans les greniers ou les magasins

Dans ce mode de conservation, aucun produit de traitement n’est utilisé.

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la conservation des semences maraîchères

Les semences sont enveloppées dans un morceau de papier, de sachet, de tissu ou de pagne, lequel est déposé dans un sac à l’intérieur de la chambre. Les semences (tomate, piment…) sont également mises dans des bouteilles, des bidons, en verre ou en plastiques. Le contenant est fermé hermétiquement et gardé à l’abri de la lumière du soleil pour éviter la germination des graines. Avant d’introduire les semences dans ces contenants, certains paysans prennent le soin de faire un traitement préventif de leurs graines pour lutter contre les insectes et champignons, en les mélangeant avec de la cendre, de la poudre d’Azadirachtaindica ou du sable fin.

Source : Etude de référence sur les mécanismes de gestions des semences paysannes, 2017

Les maisons de semences sont individuelles ou appartiennent à des groupements de producteurs.

La Conservation avec les produits chimiques

Ce mode de conservation est rarement utilisé pour les semences paysannes. Par contre, il est automatique lorsqu’il s’agit des semences certifiées, améliorées ou hybrides. En effet, si le paysan cultive les semences certifiées, c’est pour les revendre soit aux structures de l’Etat soit aux entreprises semencières, soit aux paysans producteurs. Il est alors tenu de respecter les normes de production de semences qui recommandent l’utilisation de paquets technologiques qui doivent accompagner la production de semences certifiées. Au nombre de ces conditions, il y a l’utilisation de produits chimiques lors de la conservation.

Au Sénégal, c’est le Sumithion qui est utilisé pour conserver le riz. Il faut l’équivalent d’une boîte d’allumette de Sumithion par sac de 50 kg de riz, empilés sur des palettes installées à 1 m du mur à l’intérieur d’un magasin de stockage. Certains riziculteurs utilisent une quantité supérieure de Sumithion qu’ils épandent à trois niveaux dans le sac de 50 kg : une contenance d’une boîte d’allumette au fond du sac, une seconde au milieu et une troisième à ras bords du sac. A défaut d’un magasin de stockage, le produit est placé à l’intérieur des chambres ou du grenier.Au Bénin, c’était le Sofagrain qui était recommandé par les services techniques de l’Etat pour la conservation des céréales en générale. Mais ce produit a été finalement interdit et retiré du marché, une forte toxicité étant soupçonnée.

La conservation sous terre ou en pleine plantation.

Elle s’observe surtout pour les tubercules et les racines (igname, pomme de terre, taro, manioc). Les tubercules ou racines sont soit laissées sous terre, soit déterrées, mais recouvertes de terre ou de pailles. Les boutures de manioc sont, soit laissées sur pied en pleine plantation, soit découpées et rangées en tas et séchées de temps en temps.

Dans certains pays comme le Sénégal, le Burkina Faso, le Togo et le Bénin, on note l’existence de cases de semences. Ce sont de véritables greniers à semences traditionnelles conçus pour recevoir les différentes semences produites dans le village ou la communauté. La gestion de ces cases de semences est régie par des règles mises au point par la communauté. Ces cases de semences sont généralement sous la responsabilité de dignitaires religieux (cas du Bénin à Djougou), des organisations de femmes (cas du Sénégal, Médina Wandifa) ou de leaders d’opinion de la localité (cas du Togo). Les maisons de semences existent également particulièrement au Burkina Faso.

Tableau 9: Mode de conservation (pour les six pays ensemble)

Mode de conservation/transformation Proportion

Sacs de jute 28,89

bouteilles 33,33

pagnes 25,44

Papiers 3,58

greniers 15,67

bidons 18,56

igname et patate douce sous terres 8,22

Suspension sous les toits 15,85

Cases de semences 5,25

Source : Etude de référence sur les mécanismes de gestions des semences paysannes, 2017

Photo 3: Semences d'oignon en conservation dans des bouteilles en plastique (Sénégal)

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Une autre forme d’utilisation des semences est celle liée aux pratiques culturelles et cultuelles (rituelle). Au Niger, l'étude révèle que la production de semences est entourée de certaines pratiques rituelles dont la spécificité varie selon la zone et les réalités socio culturelles. Plus de 65 % des personnes enquêtées affirment avoir effectué des incantations, et / ou récité des versets coraniques au moment de certaines opérations (mise en pépinières, itinéraires techniques, utilisation des pesticides, etc.).Dans certaines communautés (au Bénin et au Sénégal) des producteurs ont arrêté de pratiquer des rites depuis l’introduction de la religion musulmane ou chrétienne. Cependant, d’autres communautés dans ces pays et ailleurs continuent de pratiquer des rituels comme le témoignent les encadrés ci-après.

Les semences hybrides sont plus exigeantes en fertilisants et ne sont pas reproductibles (dégénérescence au fil du temps), occasionnant une forte dépendance vis-à-vis du fournisseur : l’agriculteur n’est plus autonome parce que chaque année il est obligé de les renouveler.Les semences certifiées sont parfois plus productives, mais exigent l’application d’un paquet technologique assez coûteux à base d’engrais et de pesticides chimiques de synthèse qui ne sont pas toujours à la portée des producteurs.

Encadré 2: Réflexion sur la conservation des semences améliorées

Les produits chimiques sont indispensables pour la production et la conservation des semences obtenues après sélection et création variétale dans les laboratoires. Ils permettent de garder le peu de caractères contenues en elles (prises chez les semences paysannes) et de renforcer leur résistance face aux pressions environnementales (ravageurs, climats, etc.) étant donné qu’elles sont dépourvues de toute biodiversité contrairement aux semences paysannes. Comment comprendre qu’une chose qui est dite « améliorée » a encore besoin d’être soutenue par tout un ensemble d’engrais, de pesticides et de produits de conservation chimiques) !!!

3.6 Les différents modes de circulation des semences

Selon le tableau ci-dessous, le don et l’échange viennent après la vente. Ils s’observent beaucoup plus au niveau des semences maraichères, le maïs, le sorgho et le mil. Quant au prêt, il vient en dernière position et s’observe rarement. Les échanges, dons et prêts se font dans tous les pays. Ils se pratiquent pendant les visites (aux voisins, amis, à la belle-famille), les fêtes (mariages, baptêmes..), les cérémonies (funérailles…) les périodes de famine (les semences sont consommées pour ne pas mourir de faim) les foires et les ventes.

Tableau 10: Destination des semences (les six pays réunis)

Destinations Effectif de producteurs %don 113 30,00échange 90 23,90prêt 17 04,50vente 157 41.60Source : Etude de référence sur les mécanismes de gestions des semences paysannes, 2017

Encadré 3: Quelques exemples de rituels qui accompagnent la production

Dans la commune de Koussanar au Sénégal, à l’instar des autres zones, les pratiques diffèrent. Chez certains, le jour du semi des céréales (leurs principales cultures), un homme ou une femme porte une calebasse de capacité de 20 kg, qui n’a jamais touché l’eau, dans laquelle sont introduites les semences mélangées avec des feuilles d’arbres. Les semis se font à l’aide d’un semoir à n’importe quel jour de la semaine, sauf le mercredi chez certains agriculteurs, accompagnés de prières dans l’espoir de booster la production. Chez d’autres, les graines sont portées par une fille vierge chargée de les acheminer de la maison aux champs pour les semis. Au cours du trajet, elle ne doit ni regarder par derrière ni poser les semences au sol avant d’arriver à destination. D’autres mélangent les semences avec de la poudre de feuilles d’arbres tels que le Thingoli et le Jujubier. Ces pratiques, selon les agriculteurs, portent chance pour une production abondante.Au Bénin, dans la commune d’Agbangnizoun, les semences ne doivent jamais être manipulées par la femme qui a ses menstrues, sinon, elles perdraient leur capacité de germination.

3.6 - Les différents modes de circulation des semences

3.7 - Les Pratiques culturelles et cultuelles autours des semences

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Par ailleurs, les rituels observés dans tous les pays, font intervenir trois catégories de personnes : la femme (jeune, adolescent (e) ou adulte) et le sage jouent un rôle important dans la pratique des rituels et leur transmission de génération en génération.La femme adolescente est choisie pour sa virginité (symbole de pureté devant les Dieux), la femme adulte pour la fécondité et l’abondance des récoltes et le sage comme gardien de la tradition messager au près des divinités.

3.8 Les semences paysannes dans le système de production agricole familial

Le mécanisme de gestion des semences paysannes décrit ci-dessus montre un attachement avéré aux semences paysannes. Les exploitants agricoles rencontrés les préfèrent parce qu’ils les reproduisent eux-mêmes à travers des itinéraires techniques qu’ils maîtrisent mieux (de la sélection à la conservation). Ils sont rassurés et satisfaits de leurs performances agronomiques. Par ailleurs les semences paysannes sont préférées pour leur adaptation aux conditions pédoclimatiques de leur environnement, mais surtout pour leur rendement agronomique, leur qualité organoleptique et leur faible coût de production. D’autres pensent que les cultiver met à l’abri des semences certifiées dont la dépendance à long terme est plus risquée, et dont la qualité est parfois douteuse.

Encadré 4: Appréciations des semences paysannes comparées aux hybrides et améliorées

« La semence paysanne de maïs Bodédio est plus précoce, plus vigoureuse, très peu attaquée, se conserve mieux et est plus économique pour la ration alimentaire comparée à la semence certifiée EarlyThay qui n’est pas de bon goût et donne parfois des maux de ventre ». Konaté Dème, agriculteur (Sénégal) « Contrairement aux hybrides, les semences paysannes de maïs produisent même en cas de déficit pluviométrique sévère ou d’arrêt précoce des pluies, résistent plus à l’ensoleillement. Elles ont une maturité précoce (60 jours après semis) et les pertes de graines à la conservation sont très faibles comparés aux hybrides». Mamadou Camara, producteur (Sénégal)

Encadré 5 : Un producteur évoque un avantage lié à la production des semences paysannes

« On est souvent obligé d’aller acheter chaque fois les semences comme la carotte, le chou, le concombre, le persil… on aurait aimé produire nous-mêmes ces semences. Nous sommes très vulnérables par rapport à la disponibilité en semences qui ne sont pas toujours performantes. Or avec les semences paysannes, en cas de rupture je peux toujours aller voir mon voisin pour en prendre un peu ». ASSOGBA Euloge maraicher (Bénin)

En somme, les semences paysannes sont préférées parce qu’elles détiennent une mémoire qui leur permet de s’adapter à l’environnement et de conserver toutes les valeurs nutritives et organoleptiques,facilesà conserver, même si le rendement n’est pas si élevé. Quant aux semences dites améliorées ou certifiées, elles sont vidées de leurs mémoire, raison pour laquelle elles sont accompagnées d’un paquet d’appuis en termes d’intrants chimiques de synthèses. Le volet commerce et recherche de profit maximum rentre finalement en ligne de compte dans le choix des semences améliorées.

Malheureusement, l’étude a révélé que 95% au moins des exploitants agricoles rencontrés (dans tous les pays) ne maitrisent aucune lois ni textes ni règlements sur les semences. Ils ignorent les plans futurs du gouvernement concernant les semences et leurs impacts sur l’avenir. Ceux qui ont une connaissance sur les OGM (25%), reconnaissent qu’elles ne sont pas reproductibles donc peu recommandables.

Encadré 6: Avis d'un producteur sur l'utilisation des semences OGM

« Je pense que les OGM, ne sont pas indiqués dans la recherche de la souveraineté alimentaire, et de ce fait, ne doivent pas être diffusés dans le système semencier de notre pays, malgré leur énorme productivité. Ils sont à éviter en raison de procédés utilisés pour leur conception.Mr Kader Hassan (Niger)

3.8 - Les semences paysannes dans le système de production agricole familial

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Il faut enfin noter que certains exploitants agricoles, généralemet à la suite des services techniques de l’Etat, craignent queles semences paysannes ne s’adaptent pas du changement climatique (irrégularité des pluies, réduction de la durée de l’hivernage). Cela pourrait engendrer une baisse de rendement, du taux de germination et le risque de perdre leur pureté variétale d’origine faute de bons multiplicateurs capables de maîtriser les points critiques du processus de production à la conservation des semences. D’autres encore, craignent de perdre des variétés en cas de catastrophe naturelle, surtout dans les cas où les quantités produites ne couvrent pas les besoins de consommation annuelle du ménage. Ces exploitants agricoles font confianceau rendement élevé des semences certifiées corrélé avec les revenus qui en sont issus.

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IV - LES ACTIVITES DES AUTRES ACTEURS AUTOURS DES SEMENCES

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Les autres acteurs qui interviennent dans la gestion des semences sont les services techniques de l’Etat, les Organisations de la société civile et les Entreprises Semencières.

L’organisation interne des structures nationales de gestion des semences est différente d’un pays à l’autre. Mais la logique reste la même. Dans chaque organigramme, les directions nationales sont subdivisées en services. Au sein de ces structures, on peut noter l’existence de services de contrôle de qualité et de conditionnement qui s’occupent de la certificationdes semences et d’un laboratoire d’analyse. Les structures nationales communiquent aux structures internationales les préférences des producteurs et consommateurs, les facteurs biotiques et abiotiques nationaux, etc.

La sélection variétale commence souvent par l’identification des performances à prélever au niveau des semences paysannes. Dans certains cas, ces performances sont identifiées en collaboration avec les paysans. Les principaux critères de sélection variétale sont : le rendement, l’adaptation aux milieux de production, les préférences des agriculteurs et des consommateurs. Les objectifs déclarés de la sélection variétale (ou qualités recherchées) sont :

améliorer la productivité, accroitre la résistance des variétés aux mala dies et aux ravageurs, adapter les variétés aux écosystèmes.

Cette activité est réalisée par les structures nationales de recherches en collaboration avec les structures internationales similaires. Comme structures internationales, on peut citer l’Institut International de Recherche sur les cultures des zones tropicales semi-arides (ICRISAT) au Sénégal, IITA (International Institute of Tropical Agriculture) au Bénin et Africa-Rice.

Des variétés souches (G0) sont ainsi sélectionnées/crées ou introduites provenant de l’extérieur à partir de ces collaborations. Par multiplication des variétés souches, on obtient les pré-bases.

Comme structures s’occupant de la mise en place de semences de pré-base (G0), on peut citer l’INERA au Burkina Faso, l’INRAB au Bénin, l’IRAN au Niger le CNRA au Sénégal. Ces derniers s’occupent ensuite de la multiplication des pré-bases pour obtenir les bases (G1, G2, G3) dans les stations de recherche. Une fois les bases obtenues, elles sont distribuées à des fermes semencières de l’Etat (cas du Bénin, Niger, Sénégal) ou à des producteurs semenciers formés et encadrés à cet effet. Ces fermes d’Etat et producteurs semenciers suivent un itinéraire technique recommandé par la recherche pour produire à partir des semences de base, des semences certifiées (F1, F2, F3 ou R1, R2, R3). Les semences certifiées sont enfin distribuées aux paysans/ producteurs selon les filières organisées ou non.

Quel que soit le pays, on note une intense activité de sensibilisation et de vulgarisation des semences certifiées et/ou améliorées. Ces appuis-conseils sont accompagnés dans tous les cas et quel que soit le pays, d’un paquet technologique (respect de normes d’utilisation d’engrais et pesticides de synthèses). Ces services sont assurés par des structures étatiques.

4.2 Les Origines/ provenance des intrants/ Importation et contrôle des intrants

Les entreprises semencières (nationales) sont en étroite collaboration avec les structures nationales de l’Etat. Elles assurent la multiplication des semences de base en semences certifiées. Elles s’occupent également de la distribution des semences certifiées. D’autres sociétés privées font de l’import / export des semences.

Il existe également un certain nombre de sociétés privées (étrangères et nationales) qui font de l’’importation et de la distribution de semences hybrides et OGM) et des pesticides. Ces importations se font sur la base de contrats établis avec les Etats. Ces sociétés sont en principe tenues d’importer des intrants homologués et recommandées par les Etats.

Pour contrôler ces importations, chaque pays dispose, en principe, des services de contrôles phytosanitaires au niveau des frontières (terrestre, aéroport et portuaire).

4.1 - Activités des structures nationales de gestion des semences

4.2 - Les Origines/ provenances des intrants/ Importation et contrôle des intrants

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Au niveau de ces points de pénétration, des inspections sont normalement effectuées et des prélèvements réalisées pour des analyses aux laboratoires. Le but est de vérifier si les intrants importés par ces privés sont conformes aux normes ou sont homologués et autorisés selon les lois en vigueur. Au Bénin, par exemple, on a les services de contrôle phytosanitaires de la Direction de la Production Végétale (DVP) à travers le SPQC et le LCSSA. Au Mali, c’est la Division Législation et Contrôle Phytosanitaire (DLCP). Au Burkina, on a le BUNASOL. Au Sénégal, c’est le DISEM (pour les semences).

Pour les filières d’intérêt national comme le coton, le riz, l’arachide, le sésame, l’Etat lance des avis d’appels d’offres pour la fourniture d’intrants spécifiques (engrais et pesticides). Cependant beaucoup de semences et de pesticides de mauvaise qualité se retrouvent entre les mains des producteurs. Ces intrants échappent au contrôle des services des Etats. La porosité de nos frontières facilite l’entrée de toute sorte de semences et de pesticides de qualité douteuse. Cette situation serait due selon le pays, au manque de contrôle rigoureux, à la libéralisation du marché des semences, à l’inorganisation de la distribution des semences et à une insuffisance de semences certifiées offertes par la recherche qui manque sérieusement de moyens pour faire face à la demande sans cesse croissante en semences

4.3 Les spéculations, variétés de semences et types de semences

Les semences prises en compte par les systèmes nationaux de gestion des semences sont diverses et variées. Ces semences concernent les cultures aussi bien industrielles d’exportation que les cultures de grande consommation par les populations. Le tableau ci-après fait le point de quelques variétés de semences des systèmes nationaux des six pays concernés par la présente étude.

Les semences prises en compte par le système national occupe au plus 25% des semences totales consommées par les producteurs dans chacun des pays.

4.3- Les spéculations, variétés de semences et types de semences

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Tableau 11: Semences des systèmes nationaux de gestion des semences

Source : Etude de référence sur les mécanismes de gestions des semences paysannes, 2017

Pays Semences certifiées/ améliorées par les structures nationales et internationales

Bénin Semences de maïs ; semences d’arachide Semences de Tomate (TLCV-15), Semences de gombo (ICRISAT, KELEYE), Semences de piment (TPS), Semences de tchayo, amarante, grande morelle Variétés de maïs (DMR/QPM, EVDT 97, 2000 Synée) Variétés de riz (IR 840, LES NERICA+ Soja (TGX)

Burkina Mangue, agrume, banane Sésames

Niger SEPON 82, IRAT 204); NIEBE(TN5-78, KVX, IT90K, TN27-80, IT99K.); ARACHIDE( 55-437, RRB, JL29); SESAM( SN 203) ; MAÏS (P3 KOLLO) ; RIZ(GAMBIAKA) ; TOMATE (ICRIXINA) ; OIGNON (VIOLET GALMI); LAITUE (MAYA); GOMBO (KONNI). mil HKP; sorgho MOLAMARADI; niébé(TN5-78, IT90, KVX) Mil:hkp(hainikéqey précoce), zatib, h-80-10-gr, p3 kollo,civt, taram(tara ame lioré) ankoutess./ Maïs: p3 kollo, MAKA, et CET./ Niebé:tn 5-78; tn 3-78; tn 121-80; tn 256-87; tn 27-80; it 90k 372-1-2; it 89 kd-374-57./ Arachide:55-437, RRB.

Mali Semences de riz de plaine (DKA30; DKa31; DKAM7;DKAM11; Kolondiéba Andy 11, khaoGuaenDM16,)

Sénégal Semences d’arachide (55-437, GC8-35, 55-33, 73-33, 28-206, Fleur 11, H75-0, 69-101, GH 119-20, PC 79-79, SRV 1-19) - Semences de riz (Nérica 1, Nérica 4, Nérica 5, Nérica 6, Nérica 8, BG 90-2, Sahel 108, Sahel 177, Sahel 201, Sahel 202, Wab 56-50, Rok) - Semences de mil (Souna 3, Thialack 2, Gawane) -Semences de sorgho ( CE 145-66, CE 180-33, CE 196-7-2-1, Nguinthe, Darou, Faourou, Nganda) Sorgho CE 196-7-2-, Nginthe (nouvelle variété), Faourou ou 621 B (nouvelle v.), Nganda (nouvelle variété), Darou ou 621 A (nouvelle v.); NiébéMelakh, Yacin; Mil Souna 3, Thialack ; Arachide 55-43 69-1,173-33,Fleur 11;

Togo Soja TGX1910-14F Arachide RMP 12 Sorgho sorvato Soja IR841 Maïs Ikene Maïs obatampa; maïs jaune de Borgou; maïs Ikene; Soja locale

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4.4 Itinéraires techniques et intrants recommandés

D’une manière générale, les itinéraires techniques recommandées par la recherche et qui accompagnent les semences proposées par les systèmes nationaux sont presque identiques : un labour profond est recommandé dans la préparation du sol (défrichage, labour), ensuite une utilisation systématique du NPK et de l’UREE comme engrais chimiques de synthèse dans tous les pays.

Au Bénin,les normes recommandent l’utilisation stricte des intrants chimiques de synthèses (NPK et UREE) dans la multiplication des semences (pré-base, bases et certifiées). Par contre la dose recommandée au Bénin par exemple pour la plupart des spéculations (riz, maïs certifiés et améliorés) en pleine cultures est de 150kg/ha de NPK et 50 kg/ha d’UREE. L’apport de fumure de fond avant l’introduction des engrais chimiques (NPK et UREE) est recommandé, mais rarement respecté par le paysan.

Pour les pesticides d’une manière générale, il y a une liste de produits qui sont homologués par chaque Etat.Par exemple au Burkina, les produits comme le Cypercal, le Décis, Le Titan, les herbicides comme le Gramaxone et le Glycel, sont homologués, recommandés et utilisés.

Les critères d’appréciation de la qualité des semences selon les services techniques des Etats, sont globalement le taux de germination, pureté/homogénéité, le rendement, la résistance aux maladies, l’adaptation aux changements climatiques/résilience, le cycle de production.

Les semences issues des systèmes nationaux de gestion des semences sont exclusivement destinées aux producteurs,à travers les projets et programmes qui s’approvisionnent auprès des services étatiques pour les acheminer vers les organisations paysannes ou elles sont vulgarisées et commercialisées. Ces semences sont utilisées dans le cadre de gestion des filières agricoles (coton, arachide, sésames, manioc, mil, sorgho, etc.). Ces filières sont ciblées et choisies selon les politiques agricoles de chaque pays.

On peut noter par exemple l’arachide au Sénégal, le sésame au Burkina, le maïs et le riz au Bénin et au Togo.

Dans tous les pays, les acteurs des mécanismes nationaux de gestion des semences ont une bonne connaissance des lois et réglementations sur les semences. Mais ces acteurs exploitent les textes et règlements sous- régionaux qui vont dans le sens de la promotion des semences améliorées. Au nom de la sécurité alimentaire et d’autres raisons inavouées, ils (chercheurs, cadres des ministères et structures en charge des politiques agricoles nationales) sont prêts à offrir des avantages énormes aux multinationales de l’industrie semencières. Il faut reconnaitre qu’il existe d’énormes pressions des multinationales sur nos gouvernements afin que ces derniers adoptent des lois en leur faveur.Somme toute, l’objectif des acteurs des mécanismes nationaux est d’améliorer le taux de consommation des semences améliorées et certifiées. Ce taux ne dépasse guère 25% dans tous les pays.

Dans tous les pays, la conservation des semences améliorées et/ou certifiées se fait selon des normes précises recommandées par les services de certifications. D’une manière générale, les principales opérations après récolte des semences certifiées sont le battage, le vannage, le calibrage, le triage, la pesée, la mise en sac, l’étiquetage, la certification et le stockage. Les sacs de semences certifiées reçoivent des étiquettes spécifiques. Ils sont ensuite transportés au magasin et disposées sur des palettes à un mètre des murs. Les raisons habituelles liées à cette formes de conditionnement des semences sont la propreté exigée des semences (dépourvues des impuretés comme les cailloux, brindilles, etc.), le calibrage pour avoir des grains de même taille, l’étiquetage pour la reconnaissance rapide des variétés et pour la traçabilité. Au cours du conditionnement en sac, les semences sont mélangées à des produits chimiques de conservation. Ces produits de conservation varient d’un pays à l’autre. Comme déjà dit, au Bénin, c’était le sofagrain pour le maïs et le riz. Au Sénégal, c’est le Sumithion qui est utilisé pour conserver le riz.

4.4 Itinéraires techniques et intrants recommandés

4.5 Les destination et types d’utilisation des semences

4.6 Les connaissances et appréciations des règlementations sur les semences

4.7 La Conservation des semences

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Les semences sont ainsiconservées plus longtemps et gardent leurs caractères de performance recherchés (établies lors de la sélection variétale au laboratoire), lesquelles sont maintenues tout le long de la production grâce aux engrais et pesticides chimiques de synthèse. Le rôle de ces intrants chimiques dans la préservation des qualités des semences certifiées ou améliorées montre à quel point ces semences sont fragiles et ne peuvent garantir une biodiversité durable.

Encadré 4: Utilisation des semences améliorées est assujettie à l'utilisation des intrants chimiques de synthèse

« Il y a des semences paysannes de céréale et de tubercules qui n’existent plus maintenant parce que les jeunes ne cultivent plus ces semences. Ils sont tournés vers les semences certifiées qui sont accompagnées d’intrants (engrais et pesticides). L’utilisation de ces semences est orientée vers une production destinée exclusivement à la vente. Or la conservation des produits dérivés de ces semences certifiées est impossible sans les produits chimiques de synthèse, alors que la plupart des paysans ne maitrisent pas toujours les normes d’utilisation de ces produits chimiques.CHABI DRAMANE AKPO, Producteur d’ignames et de Céréales (Bénin)

Au Sénégal, Mali, Togo et Niger, le constat fait par les OSC est le même. Il n’y a pas de politique semencière nationale capable de satisfaire la demande des agriculteurs. Pire, les semences paysannes commencent à disparaître du fait que les paysans n’ont pas suffisamment pris conscience des enjeux autour de la semence et de l’accompagnement méthodologique et technique nécessaire. L’introduction des semences hybrides et des OGM constitue une menace pour l’agriculteur. Car ce dernier deviendrait vulnérable, exposé à la dépendance et à la disparition progressive de ses semences paysannes.

Au Burkina Faso, l’on assiste à une offensive visant à remplacer les systèmes semenciers paysans par un système dit moderne, fondé sur des semences dites “améliorées” et certifiées. L’utilisation de ces semences engendre un changement radical des systèmes, des valeurs culturelles, des pratiques et habitudes agricoles et alimentaires bien au-delà du changement du type de semence utilisée. La limitation des droits des paysan-ne-s de conserver, multiplier, échanger et vendre leurs semences (à travers un régime de protection industrielle/brevetage) s’accompagne de l’abandon de variétés traditionnelles/paysannes, de l’utilisation abondante d’engrais et de pesticides chimiques de synthèse, de la mécanisation, de l’individualisation de l’agriculture, du changement des habitudes alimentaires, etc. Le système semencier commercial ou conventionnel vise à ruiner une grande partie des producteurs (70 à 80%) par l’utilisation des semences certifiées ou dites « améliorées ».

Le point de vue des services techniques étatiques

Au Bénin, les services techniques de l’Etat recommandent fortement aux producteurs l’utilisation des semences certifiées et améliorées. Le plan futur du gouvernement est d’augmenter le taux de consommation des semences dites améliorées, voire les OGM afin de garantir, selon eux, la sécurité alimentaire aux populations. Les institutions de recherches ont ainsi une place de choix et sont supposées proposer des semences dites performantes pour l’agriculture. Selon l’Etat, il est important de respecter les normes qui recommandent l’utilisation des engrais chimiques de synthèse aussi bien dans la production des semences certifiées que des autres semences. Les tentatives et manœuvre de l’Etat béninois visant à faire voter la loi sur UPOV 91 démontrent sa volonté d’ouvrir les portes du pays aux multinationales productrices de semences hybrides et OGM. Les services de l’Etatestiment que les semences paysannes qui font partie

4.8 L’avenir des semences selon les OSC, les Etats et les Entreprises Semencières

Le point de vue des Organisation de la Société Civiles

Selon les Organisations de la société civile des six pays, l’avenir des semences paysannes est très critique.

Au Bénin, Les organisations de la société civile rencontrées souhaitent une prolongation du moratoire sur les OGM et un approfondissement des recherches sur la dangerosité de ces types de semences et que les résultats des recherches soient rendus publiques. Ils estiment qu’il faut être très prudent et s’en remettre aux vrais experts dans le domaine. Pour d’autres, l’utilisation généralisée des semences certifiées provoquerait l’abandon et la disparition des semences paysannes. Il faut que les populations (Consommateurs et producteurs agricoles) obligent le gouvernement à agir en sa faveur des semences paysannes au même titre que les semences certifiées et améliorées. L’état est garant de la préservation de la biodiversité et du patrimoine génétique du pays.

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du patrimoine génétiques du pays, sont bien conservées dans les banques de gènes/semences et chambres froides conçues à cet effet.

Au Sénégal, Togo et Niger, les services techniques continuent de répertorier les variétés locales qui sont souvent très adaptées aux conditions environnementales et de les croiser avec des variétés plus productives, afin de produire des semences améliorées. Les Etats envisagent de renforcer ses efforts pour augmenter l’offre en semences certifiées.

Encadré 5: Un conseil venant de l’Institut de recherche agronomique

du Sénégal

Au Burkina Faso et au Mali, les semences certifiées et améliorées sont présentées comme des solutions à certaines difficultés rencontrées par les communautés paysannes, notamment liées au changement climatique, à l’autosuffisance alimentaire et même à la souveraineté alimentaire. Les semences dites améliorées sont propagées et diffusées par différents acteurs tels que l’État Burkinabè, des bailleurs de fonds, des entreprises semencières, des ONG etc., qui disposent d’importants moyens financiers. L’objectif est de créer un marché des semences certifiées/commerciales et des produits nécessaires pour leur production (engrais chimiques, pesticides etc.), ce qui profite à quelques entreprises semencières, aux dépens des paysans (nes).

Le point de vue des entreprises semencières,

Au Bénin comme dans les autres pays, les entreprises semencières qu’elles soient nationales ou étrangères, exploitent les lois en vigueur dans l’Etat auquel elles appartiennent. Elles sont prêtes à fournir ce qui est demandé (semences certifiées, hybrides, OGM ou semences paysannes) sur les marchés locaux, nationaux et régionaux. Leur seul objectif est la recherche du profit au maximum. Les systèmes semenciers nationaux actuels profitent mieux aux entreprises semencières ayant accès aux marchés pour écouler leur production.

« La dégénérescence des semences paysannes dépend des espèces et des régions, mais il ne faut jamais encourager les producteurs à multiplier indéfiniment leurs semences. Mieux vaut qu’ils les renouvèlent tous les 2 ou 3 ans par des semences certifiées. »Institut Sénégalais de Recherche Agronomique.

Il faut cependant souligner que la réglementation de la CEDEAO, UEMOA, CILSS, sur les semences et plants d’origine végétale, a entrainé l’adoption et la mise en œuvre d’une réglementation nationale similaire dans tous les pays signataires. Celle-ci fut complétée par des lois nationales semencières, disposition prévue par le règlement régional, pour sanctionner les délits commis en la matière, selon la particularité de chaque Etat. Ces dispositions réglementaires, communes, ont pour but de faciliter la libre circulation des semences et plants d’origine végétale dans tous ces espaces communautaires en vue de contribuer à l’atteinte de la sécurité alimentaire.

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V -LE SYSTEME NATIONAL / FORMEL DE GESTION DES SEMENCES

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Bien que l’étude de référence soit axée sur les mécanismes de gestion semencière à la base, elle s’intéresse au système national ou formel de gestion des semences, pour évaluer son impact à la base. En effet personne ne peut nier à l’Etat son rôle régalien pour l’orientation politique en matière de semence et la mise en place des services qu’il juge utiles pour la mise en œuvre de sa politique, même si on peut s’interroger sur comment cela est fait. Dans tous les cas, les paysans s’ajustent et se réfèrent au système formel. On ne peut donc décrire leurs systèmes en dehors ou isolés du système national. On abordera la certification et la distribution des semences, la politique nationale et son impact sur le système paysan, puis les appréciations que les paysans en font. Voilà le bien-fondé de ce chapitre.

homologues sénégalais avaient un point de vue contraire : question à élucider.Le schéma ci-après présente le circuit de production des semences certifiées.

Figure 1: Schéma général du système formel de gestion des semences

Organisations internationales de recherche, structures nationales de recherche, Universités Directions nationales de production végétale

Entreprises semencières, producteurs de

Sélection et création variétale souche (G0)

Multiplication des souches pour avoir pré-base (G1, G2, G3)

Multiplication des bases pour obtenir les

Multiplication des pré-bases pour obtenir lesbases (G4)

Source : Etude de référence sur les mécanismes de gestions des semences paysannes, 2017

Après la production, beaucoup de soins sont apportés au stockage des semences. En effet, le stockage des semences améliorées et certifiées se fait suivant des normes précises recommandées par les services de certifications. Les sacs de semences certifiées reçoivent des étiquettes spécifiques. Comme déjà dit, les principales opérations après récolte sont le battage, le vannage, le calibrage, le triage, la pesée, la mise en sac, l’étiquetage, la certification et le stockage. Après le conditionnement en sac, les semences sont transportées au magasin et disposées sur des palettes à un mètre des murs. Les raisons habituelles liées aux précautions de conditionnement des semences sont la propreté exigée des semences (dépourvues des impuretés comme les cailloux, brindilles, etc.), le calibrage pour avoir des grains de même taille, l’étiquetage pour la reconnaissance rapide des variétés et pour la traçabilité.

La distribution des semences certifiées est conçue dans un système formel porté par les services d’encadrement agricoles nationaux, les coopératives de production des semences certifiées et l’Etat. De façon générale, l’Etat se porte garant pour acheter les semences auprès des coopératives. Ces semences sont mises à disposition des services agricoles qui à leur tour les reconditionnent pour les distribuer au niveau des producteurs individuels. Dans certains pays comme le Bénin, il est créé aussi des institutions étatiques telle la Société Nationale de Promotion

5.1 Le Mécanisme de certification et de distribution des semences

La certification et la distribution des semences au niveau des pays suivent la même logique. Elle apparait dans chaque organigramme, au sein des ministères chargés de l’agriculture: une direction chargée de la production végétale qui s’occupede la production et de la certification des semences. Ces structures dans chaque pays sont en relation avec les institutions nationales de recherche agronomique. Elles sont aussi en relation avec les représentations des institutions internationales de recherches telles que l’IITA, Africarice qui produisent des semences de pré-base et parfois de base. La réalité est que les institutions internationales s’imposent plutôt aux structures nationales de plusieurs manières, dont l’attraction du financement n’est pas des moindres. Les principaux critères de sélection variétale sont : le rendement, l’adaptation aux milieux de production, les préférences des agriculteurs et des consommateurs. Les objectifs déclarés de la sélection variétale (ou qualités recherchées) sont : améliorer la productivité, accroitre la résistance des variétés aux maladies et aux ravageurs et adapter les variétés aux écosystèmes.

Dans chacun des pays, il est mis en place un réseau de producteurs / multiplicateurs de semences certifiées. Ceux-ci reçoivent des semences de base qu’ils multiplient suivant un cahier des charges dont le respect des contenus est rigoureux. Il faut dire qu’au cours de l’atelier régional de restitution des résultats de l’étude, les représentants de la DVP-Bénin, tenaient mordicus au fait qu’il n’est pas possible de produire des semences certifiées sans utiliser des intrants chimiques de synthèse (pesticides et fertilisants), pendant que leurs

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Agricole (SONAPRA) et des inter professions telles que l’Association Inter professionnelle du Coton (AIC) qui sont également des acteurs très actifs dans la distribution des semences certifiées.

Figure 2: Circuit global de distribution des semences certifiées au Bénin

Coopératives de producteurs de

semences

SONAPRA

Services d’encadrement

agricole

Producteurs /trices agricoles

Entreprises semencières

Projets /Programmes

Source : Etude de référence sur les mécanismes de gestions des semences paysannes, 2017

Dans tous les pays on remarque que les circuits de distribution sont similaires et font intervenir les mêmes types d’acteurs, à l’instar du Bénin où l’on retrouve les sociétés nationales de collecte et de distribution des semences, les organisations interprofessionnelles, les sociétés semencières et les projets/programmes.

Les orientations nationales et leurs impacts sur les semences paysannes

Dans tous les pays impliqués dans l’étude, les orientations nationales sont en faveur des semences hybrides et des semences certifiées. Le cheminement vers les semences certifiées est décrit plus haut.

Selon les données collectées, les semences prises en compte par les systèmes nationaux occupent au plus 25% des semences totales consommées par les producteurs dans l’ensemble des pays. Ainsi la large majorité des semences consommées est issue des semences paysannes.

Mais il faut reconnaître que les efforts déployés par les Etats pour introduire les semences hybrides et

certifiées font que les deux systèmes formels et informels se côtoient. De ce fait, l’on retrouve dans les systemes de production des paysans. On les retrouve généralement dans les semences dites locales.Par exemple au Sénégal, il y a une diversité de variétés locales et de variétés certifiées adoptées dans les systèmes de production. Le tableau n°12 illustre la grande diversité des semences utilisées au Sénégal.

5.2 Les orientations nationales, les impacts sur les semences paysannes et les appréciations des paysans/paysannes

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Spéculations Variétés paysannes/locales Variétés certifiées

Arachide Law (47-16), Yeugar, Fourré Diaobé 55-437, GC 8-35, 55-33, 73-33, 28-206, Fleur 11, H75-0, 69-101, GH 119-20, PC 79-79, SRV 1-19

Riz Falandianké, Momosamsakhane, Nérica 1, Nérica 4, Nérica 5, Nérica 6, Nérica MomoDiate, Ndongodj wane 8, BG 90-2, Sahel 108, Sahel 177, Sahel 201, Sahel 202, Wab 56-50, Rok 5

Mil Khun, Makhaly, Souna traditionnel, Souna 3, Thialack 2, Gawane Kolonding, Souna local O djigolé, Mil d’origine Inde, SunaDiappal, Souna traditionnel KeurSaloly, Souna traditionnel Thiakho, Souna traditionnel Thioupane, Souna Ndiongolor, CTP, Sosat C88 Sorgho Goor Gatte blanc, Goor Gatte rouge, CE 145-66, CE 180-33, CE 196-7-2-1, Nguin- O Ndidjongué blanc, O ndidjongué the, Darou, Faourou, Nganda rouge, Sorgho d’origine Inde, Nianiko, Diawdo, Maïs Danédio, Bodédio, Dokorano, Obatampa, Early thaï Suwan, Synthétique 82.84

Niébé Ndiagaaw, Baayngagne, Ndout, Niaw a Sésék, Yacine, Pakau, Melakh Niébé Inde

Oignon Violet de Galmi, Orient, Yali Gandiole

Tomate MboroOvoide Mongal, Xina

Gombo Rouge de Thiès, Caretas Volta

Piment Tyson Bombardier, Safi

Chou Tropica cross, Tropicana ---

Manioc Sooyalocal et Bant bu xonk ---

Aubergine amère --- KeurMbirNdao, Soxna plus

Aubergine doux --- Kalenda

Poivron --- Nikita

Tableau 12: Les variétés de semences paysannes et certifiées adoptées dans les systèmes de production paysan au Sénégal

Source : Etude de référence sur les mécanismes de gestions des semences paysannes, 2017

Dans cette grande diversité de semences utilisées, on note dans les six pays d’étude que les semences paysannes sont plus largement utilisées que celles certifiées. Par exemple au Niger, dans la région de Torodi, la proportion de semence locale utilisée dépasse largement celle des semences certifiées. Dans la région de Loga, au Niger, la même tendance est observée. (Cf. graphique 4, page 25 du rapport du Niger). Au Burkina Faso, l’étude a révélé que 70%

des paysans utilisent toujours les semences paysannes et 30% les semences améliorées ou certifiées, notamment pour ce qui concerne les grandes cultures. Au Bénin, en dehors de la région du Littorale dans laquelle la production maraichère domine, au niveau des autres régions où l’étude s’est déroulée, 80% des paysans utilisent des semences paysannes. Au Mali, la grande majorité des paysans utilisent des semences paysannes. Selon leurs appréciations, elles

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résistent mieux aux aléas climatiques et répondent mieux au goût des producteurs et des consommateurs.

Appréciation des paysans et paysannes et les autres acteurs de l’étude

De façon générale il se dégage des appréciations et inquiétudes des acteurs des semences interviewés que :

Les semences paysannes sont menacées de disparition, car les semences certifiées apparaissent de façon persistante dans l’environnement des producteurs, leur circuit de commercialisation est organisé et soutenu, et les lois semencières dans les pays sont en leur faveur. Il faut reconnaitre aussi que le système de production, de conservation, de distribution et de transformation des semences paysannes n’est pas suffisamment organisé pour garantir la durabilité et la prévalence souhaitées.

Le risque de dépendance vis-à-vis des semences certifiées augmente pour les paysans de la zone d’étude, en particulier pour les produits de rente, car les semences certifiées sont largement vulgarisées par les services agricoles.

Les rendements des cultures obtenus à partir des semences paysannes sont faibles. Mais il faut reconnaitre qu’elles sont meilleures quant à l’adaptation au changement climatique. Par ailleurs, tout le monde sait que le rendement est fonction des techniques culturales. Ainsi une bonne utilisation des techniques culturales agroécologiques, aujourd’hui de plus en plus disponibles et efficaces conduira forcement à de meilleurs rendements.

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VI -LES RELATIONS ENTRE LE SYSTEME NATIONAL ET LES AUTRES SYSTEMES AU PLAN REGIONAL ET AU PLAN INTERNATIONAL (UPOV)

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Le constat qui se dégage des nombreux contacts que l’étude a permis d’avoir avec les structures techniques étatiques, est qu’elles sont plus attentives aux règlementations internationales, régionales et nationales, qu’à ce qui se passent dans l’agriculture paysanne qu’elles sont censées soutenir. La tendance est de privatiser à terme le secteur semencier. La conséquence immédiate est la fragilisation du système semencier paysan et la recherche des droits de propriété, considérés comme la meilleure façon de protéger les semences. Les pratiques paysannes sont considérés comme obsolètes. Dans les six pays de l’étude, les efforts nationaux sont déployés pour promouvoir des semences certifiées dans un système très formel qui relie la recherche aux services étatiques d’encadrement, aux paysans multiplicateurs et aux services de commercialisation formelle. Les semences qui proviennent de ce système sont appelées semences certifiées. Elles sont cataloguées et sont pratiquement les seules reconnues comme semences. Les autres semences qui sont dites paysannes sont simplement recensées pour servir dans la sélection variétale.

Dans ce contexte, l’Union internationale pour la Protection des Obtentions Végétales (UPOV) est certainement la menace la plus actuelle contre les semences paysannes, surtout dans sa version de 1991. Les lobbies qui travaillent en faveur de l’UPOV ont réussi à faire passer comme priorité à l’Organisation Africaine de Propriété Intellectuelle (OAPI), l’adhésion de tous ses Etats membres à l’UPOV 1991. Les raisons les plus souvent avancées sont les suivantes :

Pour qui connait le contexte dans lequel se déroule l’agriculture paysanne pratiquée par plus de 70% des paysans sur le continent, c’est tout le contraire qui va arriver. C’est pourquoi il est plus indiqué d’écouter l’OMC et l’Union Européenne qui déconseillent aux pays en développement d’adhérer à l’UPOV, tout en montrant combien il est plus avantageux pour eux d’aller vers des réglementations de type sui generis, afin de mieux coller au contexte de leur développement. Ce qui pose problème ici est l’empressement des Etats africains et leurs services techniques à adopter des réglementations qui vont à l’encontre du rôle qu’ils sont supposés jouer pour accompagner l’agriculture qui, jusqu’aujourd’hui, reste l’activité la plus pratiquée sur le continent.

Les Etats s’appuient sur les sélectionneurs nationaux qui opèrent dans les centres de recherche tels que: INRAB, INERA, ISRA (pour ne citer que ceux-là) pour produire selon le schéma précédemment présenté, les semences améliorées. Dans le même temps, les sélectionneurs étrangers des institutions de renommée internationale introduisent des semences dans les pays profitant des accords de recherche. Les semences sont également produites et parfois mises en vulgarisation au sein des institutions internationales installées dans les pays par exemple IITA, AfricaRice, etc. Il est observé aussi que des projets pilotés organisés par des institutions régionales ou internationales font la promotion des semences spécifiques. C’est le cas au Bénin des projets 2SCALE, 1000+ pilotés par l’IFDC. Les nombreuses entreprises semencières installées dans nos pays recherchent des semences dans le monde entier, signent diverses sortes de contrats d’importation.

Les Etats dans nos pays encouragent toutes sortes de relations allant dans le sens de l’introduction des semences améliorées sans considérer les impacts négatifs que de telles introductions peuvent produire sur l’environnement et la santé des populations consommatrices.

les barrières au commerce seront levées ;

les agriculteurs et producteurs seront incités à devenir obtenteurs, puis créer des entreprises semencières locales, nationales et internationales ; l’UPOV offre un système transparent, efficace et facilement accessible aux petites et moyennes entreprises (PME), avec des possibilités commerciales; les revenus des agriculteurs et producteurs vont augmenter ; l’UPOV va inciter à la création de nouvelles variétés permettant aux agriculteurs de relever les défis économiques et environnementaux

il y aura la coopération « gagnant-gagnant» entre agriculteurs et producteurs

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VII-LES REGLEMENTATIONS NATIONALES, REGIONALES ETINTERNATIONALES DES SEMENCES

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7.1. Le cadre juridique et réglementaire national

Dans chacun des six pays de l’étude, il existe des lois et des décrets d’application et d’autres textes juridiques relatifs aux semences. Ces textes juridiques, dans leur grande majorité définissent les orientations relatives aux conditions d’inscription, de production, de certification et de commercialisation des semences ou plants, ainsi que les sanctions encourues pour les contrevenants. Ils définissent aussi l’organisation, l’attribution et le fonctionnement du comité national des semences. Ces réglementations instituent un catalogue des espèces et variétés nationales qui présente les droits d’obtention végétale, les fiches d’identification des semences paysannes par les critères de provenance ou origine, noms des variétés, période de culture, types de sols.

Dans chacun des pays, il existe des règlementations spécifiques à certaines cultures d’importance. Ainsi au Bénin, il y a une stratégie de développement de la filière ‘semence riz’, avec un accent mis sur la production et la multiplication des semences améliorées et les méthodes de conservation (ex situ et in situ). Au Burkina Faso, le cadre légal et règlementaire des semences d’oignon, de riz et de sésame traite de façon spécifique de la sélection variétale, la multiplication, le traitement et le stockage de ces semences. Au Mali, dans le document relatif à la politique semencière, il est présenté les forces et faiblesses de la politique semencière puis des orientations et des plans d’actions qui incluent la gestion traditionnelle des semences. Le cas particulier du Sénégal est relatif à la diffusion du Système de Riziculture Intensive (SRI) dans la zone de riziculture, la production de semences pré-bases, la production de semences certifiées de céréales par le réseau des producteurs et le conditionnement des semences.

Dans le cadre de la note de politique agricole du Togo, les points suivants ont été abordés à savoir :

contrôle de la qualité des semences produites à tous les niveaux ;

sensibilisation des paysans sur la nécessité d’utilisation de semences améliorées combinée avec l’application de l’ensemble des itinéraires techniques.

Il apparait donc clairement que dans les législations nationales des semences très peu d’intérêt a été accordé aux pratiques de sélection, de production et d’utilisation des semences paysannes.

7.2 Le cadre juridique et réglementaire régional

L’espace régional concerné est occupé par l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA), la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et le Comité Inter Etat de Lutte contre la Sécheresse au Sahel (CILLS), qui inclue le Tchad. A ces différents niveaux, les textes de loi portent sur les réglementations semencières harmonisées (loi sur l’harmonisation des règles semencières dans l’UEMOA), suite à l’analyse des lois semencières nationales. Le système semencier dans l’UEMOA met l’accent sur la privatisation en renforçant le rôle du privé notamment les entreprises semencières. La règlementation de l’UEMOA donne une ouverture aux privés dans le système de production et de gestion des semences, promeut le monopole des semenciers industriels. Cela montre bien la menace que représente le système formel face au système paysan de gestion des semences.

La CEDEAO et le CILSS ont emboité le pas à l’UEMOA sur l’aspect harmonisation de la règlementation semencière régionale. Les réflexions qui se font à ces niveaux sont relatives au meilleur accès des producteurs aux semences de qualité, l’état des systèmes semenciers en général. Il est élaboré à ces niveaux des programmes semenciers et des plans d’action pour l’amélioration du système dans l’espace considéré.

Si toutes les initiatives régionales présentées ci-dessus sont d’origine étatique, il faut noter que les industries semencières ne sont pas de reste dans la sous-région. L’Association Africaine du Commerce des Semences (AfricanSeed Trade Association / AFSTA) a créé une plate-forme appelée « Alliance for Seed Industries in West Africa / ASIWA ». Comme on peut le lire sur le site web d’ASIWA, sa vision est : « La construction d’une plate-forme durable, inclusive, effective

appui à la production de semences améliorées ;

réhabilitation et relance des activités de production de semences de base ;

élaboration et application d’une nouvelle législation semencière ;

mise en place d’un réseau national de producteurs de semences commerciales et la formation de ceux-ci en itinéraires techniques de production de semences;

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pour faire le plaidoyer et agir sur les questions clés nationales ou régionales du développement du secteur semencier, afin d’accroître la production, la distribution et l’utilisation de semences certifiées en Afriquede l’Ouest ».

Du point de vue d’AFSTA, le contexte semencier d’Afrique de l’Ouest est caractérisé par :

des écarts dans la production et dans la fourniture de semences de qualité, car pendant des décennies, la disponibilité limitée et le coût élevé perçu de semences certifiées ont empêché l’adoption, par les agriculteurs, de variétés adaptées de semences certifiées ;un environnement politique peu favorable au développement de l’industrie des semences;

plusieurs contraintes liées aux politiques, qui handicapent la disponibilité des semences améliorées et de manière générale, empêchent le développement du secteur semencier dans toute l’Afrique.

des marchés semenciers sous-développés, parce que généralement trop petits et fragmentés pour attirer le niveau d’investissement et les entreprises commerciales de semences qui ont permis le développement du secteur semencier en Afrique de l’Est et australe.

Face à cette situation, ASIWA préconise, expressément, de : favoriser et soutenir le partenariat entre les acteurs privés et publics du secteur semencier de l’Afrique de l’Ouest ; intégrer le secteur privé dans les efforts de développement des semences entrepris par les pouvoirs publics ; créer la synergie entre les programmes d’appui à la filière semencière en cours au sein de la CEDEAO ; soutenir l’investissement (Public & privé) dans la production et la distribution des semences ; établir et renforcer la confiance des producteurs dans les semences certifiées ; coordonner les efforts des acteurs pour élargir et consolider le marché régional des semences.

En conséquence, la direction d’ASIWA pilote, avec l’aide d’un coordonnateur dédié, la facilitation du marché et des solutions aux investissements, l’harmonisation régionale semencière et l’initiative régionale sur la qualité des semences. Au plan national, ASIWA a prévu d’installer une plateforme nationale affiliée, avec un représentant Pays. Au plan régional, elle dispose d’un Comité Régional d’Orientation et de suivi (CROS), aujourd’hui présidé par le ROPPA.

ASIWA est soutenue par l’USAID, le CORAF, la FAO, AGRA (Alliance for Green Revolution in Africa), etc. Elle est un acteur important à suivre sur l’échiquier de la politique semencière en Afrique de l’Ouest.

7.3 Le cadre juridique et réglementaire international

Les constats faits jusqu’ici sur les réglementations publiques des semences montrent la promptitude des décideurs nationaux à se soumettre aux réglementations régionales, qui à leur tour obéissent aux réglementations internationales, même lorsqu’il existe des espaces à exploiter pour élaborer des dispositions juridiques plus conformes aux contextes du pays ou de la sous-région. Ainsi l’OAPI va, comme nous l’avons vu, pousser ses États membres à adhérer à l’UPOV 1991, alors que l’OMC et l’Union Européenne préconisent d’aller vers des réglementations sui generis, plus conformes à leurs niveaux de développement. On verra dans la sous-région que les projets dits d’harmonisation vont devenir des dictats pour les décideurs nationaux, parce que la plupart du temps, il n’y a rien à harmoniser, le travail de base n’ayant pas été fait. Par ailleurs, ce qui accroît la dépendance des pays vis-à-vis des législations extérieures, est la tendance des juristes nationaux à aller copier les lois déjà élaborées au niveau régional ou international, quitte à juste insérer le nom des pays, pour rendre la législation nationale.

Cela dit, on relève des préoccupations autour de la problématique de l’harmonisation des lois semencières en Afrique, mais en même temps la menace des multinationales, des institutions internationales et des industries semencières sur les systèmes semenciers et l’agriculture Africaine. Grâce aux actions des Organisations Non Gouvernementales (ONG) de plaidoyer et de certaines institutions dont la FAO, il apparaît des préoccupations autour des droits du paysan dont celui sur les semences. Tout cela est illustré par les travaux récents autour du Traité International sur les Ressources Phytogénétiques pour l’Alimentation et l’Agriculture (TIRPAA), dont l’article 9 dit : “Rien dans cet Article ne devra être interprété comme limitant les droits que peuvent avoir les agriculteurs de conserver, d’utiliser, d’échanger et de vendre des semences de ferme ou du matériel de multiplication, sous réserve des dispositions de la législation nationale et selon qu’il convient”. Signé en 2005, le TIRPAA va s’enliser dans des tractations interminables, au point que Guy Kastler écrira un article dans Seedling (octobre, 2009), intitulé « TIRPAA, droits des agriculteurs ou marché de dupe ? ».

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Le protocole de Nagoya, signé en 2010, aurait pu conforter les droits des agriculteurs, puisqu’il était prévu pour régler l'accès aux ressources génétiques (conservées par les agriculteurs) et le partage juste et équitable des avantages découlant de leur utilisation.

Malheureusement, ce protocole est aussi plombé par le bon vouloir des Etats et surtout des industries qui sont de plus habiles négociateurs que les agriculteurs. On peut donc difficilement compter sur les réglementations internationales pour promouvoir et protéger les droits des agriculteurs sur leurs semences.

Le bien-fondé de cette étude de référence est bien de poser les bases qui permettent de mieux comprendre l’environnement dans lequel se développe le système semencier propre aux agriculteurs, afin de construire avec eux des stratégies qui sauvegardent véritablement leurs droits sur leurs semences. Sinon, pendant que les batailles juridiques et les tractations de tout genre vont continuer, l’Afrique de l’Ouest ira inexorablement vers la même situation que l’Afrique de l’Est et Australe où des lois semencières criminalisent déjà des agriculteurs, leur interdisant de librement utiliser leurs semences. Il a été rapporté récemment qu’en Tanzanie, des paysans ont été interdits d’exposer leurs semences au cours d’une foire, parce que n’étant ni inscrites au catalogue, ni certifiées, ces semences n’étaient tout simplement pas considérées comme des semences.

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VIII-LES GRANDES LECONS APPRISES DE L’ETUDE

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Cette étude nous a mis en contact avec un nombre bien varié d’expériences en agriculture dans les six pays concernés et dans environ trois zones de production agricole dans chacun des pays. Nous avons rencontré des paysans et des paysannes actifs sur des exploitations agricoles de type varié, des agents en poste dans des structures étatiques, des agents actifs dans des organisations non gouvernementales et des acteurs privés agissant dans la distribution des semences. C’est dire aussi que nous avons eu accès à des sources d’apprentissage très diversifiées, qui ont amélioré nos connaissances sur l’ensemble des points d’investigation de l’étude, dont l’essentiel est présenté dans ce chapitre.

Elles appartiennent au patrimoine génétique des communautés rurales constitué et transmis de génération en génération jusqu’à nos jours. Ces semences sont sélectionnées, produites et reproduites par les paysans qui les diffusent dans leur propre système d’échange. Elles sont reproductibles sans limite et justifient d’une longue vie dans le patrimoine semencier de chaque communauté rencontrée.

Elles bénéficient d’un attachement affectif particulier qui favorise leur conservation dans le temps grâce à des efforts parfois inédits déployés par les paysans et paysannes qui les ont conservées pour des générations. La longue utilisation des semences leur permettent de s’adapter à l’évolution climatique ou tout simplement environnementale. Une variété de maïs, par exemple le DMR, ou de riz, par exemple, régulièrement reproduite selon des pratiques paysannes dans une zone agroécologique donnée, n’est plus la même après des décennies de reproduction. La recherche scientifique devrait procéder à une nouvelle caractérisation d’une telle semence pour nous instruire sur ses nouveaux potentiels génétiques.Une semence paysanne n’est pas tout simplement une graine qui germe une fois mise en terre. Elle est une condensée des savoirs et des pratiques culturelles, économiques, sociales et cultuelles. En dehors de ces pratiques, elle n’a plus de sens pour les communautés. Toutes ces pratiques la consacrent comme source de reproduction de la vie et en tant que telle, elle bénéficie d’un soin particulier pour sa conservation et devient objet de préoccupation lorsqu’elle est menacée de disparition. Quand nous parlons de la promotion et de la conservation des semences, c’est de tout cet ensemble qu’il s’agit. Si les semences paysannes n’étaient que des graines à faire germer,

elles auraient disparu depuis longtemps. A cet égard, on peut se demander quel attachement les paysans ont-ils vis-à-vis des semences des produits de rente, qu’ils reçoivent des stations de recherche. Il est presque nul. Les concernant, tous les soucis sont délocalisés vers les stations de recherche. Le paysan sait qu’on peut lui apporter du jour au lendemain une nouvelle semence. Dans ce cas, ce n’est pas lui qui décide, mais l’acheteur.

Pour rester opérationnel et au vu de tout ce que nous avons appris, nous distinguons les semences paysannes des semences locales. Elles sont nouvellement arrivées au niveau des communautés et sont encore à l’épreuve. Il est établi que le paysan / paysanne est d’une âme chercheuse ou plus simplement curieuse. Il/elle n’a de cesse de voir ce que donne une semence reçue d’un voisin, d’un autre village, de la recherche, d’un autre pays, etc. Il/elle va la semer, la suivre jusqu’à la récolte, partager son expérience avec d’autres paysans / paysannes, leur donner quelques graines, pour qu’ils/elles essayent aussi ; geste pas du tout anodin, parce qu’il/elle va ainsi garantir l’existence de la semence dans la communauté.

Les semences locales sont à côté de la base alimentaire, pas refusées, mais pas encore vraiment acceptées. Le temps n’a pas permis de poursuivre les recherches dans ce domaine, où il aurait été très instructif de faire l’histoire des semences locales devenues paysannes, comme le riz dans plusieurs régions africaines, et des semences locales encore à l’épreuve, comme le soja qui rentre encore difficilement dans l’alimentation de base. Il lui faut encore beaucoup de temps pour égaler le niébé.

Quatre éléments constitutifs de ce mécanisme ont été bien décrits dans cette étude. Toutes les semences qui bénéficient, comme nous l’avons vu, d’un attachement affectif, passent régulièrement par ces quatre étapes de gestion, minutieusement exécutées par les paysans / paysannes.La sélection massale est privilégiée, parce qu’elle correspond bien à la situation et aux souhaits des communautés rurales. Il faut noter que les premiers soucis des paysans / paysannes est la préservation et la promotion de la diversité biologique.

8.1 Les semences paysannes

8.2 Les semences locales

8.3 Le mécanisme de gestion des semences paysannes

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C’est l’arme principale contre la disparition et pour la résistance aux maladies. Une population qui perd sa diversité ou est réduite à l’unicité court à sa perte. Les paysans / paysannes vont ainsi regarder chaque année sur leurs champs à la recherche des prochaines semences. Les plus beaux épis, les plus beaux feuillages, les plus belles boutures, rien n’échappe à la vigilance du paysan / de la paysanne. Ils / elles savent que la prochaine récolte en dépend. Cependant les critères DHS ne font pas partie de leurs préoccupations, parce qu’ils sont loin de leurs réalités et peuvent les conduire à des exigences non compatibles avec leurs situations. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que la plupart des paysans / paysannes que nous avons rencontrés se méfient des semences hybrides. Dans leur appréciation, ils / elles savent qu’elles sont fragiles, les rendent dépendant(e)s, non seulement parce qu’ils / elles doivent les renouveler chaque année de culture, mais aussi parce qu’ils / elles doivent respecter des pratiques culturales imposées de l’extérieur. Face à cela, les paysans / paysannes ont fait leur compte et leur choix. C’est pourquoi les semences améliorées (certifiées et hybrides) ne représententque 20% ou 25%des semences utilisées par les communautés rurales.

Pour la production, il faut rappeler que dans l’échantillon de notre étude, on note que 53% des exploitations agricoles rencontrées pratique de l’agriculture conventionnelle, c’est-à-dire qu’elles utilisent des intrants chimiques de synthèse. Il n’est pas impossible qu’une observation plus fine révèle un pourcentage plus élevé, vu les stratégies et les facilités mises en œuvre pour augmenter l’accès des paysans / paysannes à ces intrants chimiques. Dans la totalité des politiques agricoles de l’espace couvert par l’étude, cela est considéré comme un progrès. Les coopérations bilatérales, multilatérales, les projets / programmes de grandes fondations (Bill et Melinda Gates, Rockefeller et autres), des instituts et centres de recherche et d’appui au développement (IFDC, IITA,le groupe CGIAR, etc.) poussent à l’utilisation massive des intrants chimiques de synthèse. Généralement, les paysans / paysannes ne refusent pas ce qu’on leur apporte surtout si cela est gratuit. Tout en prenant des précautions s’il le faut, ils / elles vont d’abord expérimenter ce qui est nouveau.

Par ailleurs, parmi les 47% d’exploitations agricoles que nous considérons comme agroécologiques, une bonne partie, encore à déterminer, n’utilise pas les intrants chimiques de synthèse que parce qu’ils / elles n’en ont pas les moyens.

Donc malgré l’ingéniosité de quelques paysans / paysannes, en milieu paysan, les pratiques agricoles sont à améliorer de l’intérieur et non par substitution. Quand on leur demande ce qu’ils / elles attendent des structures étatiques, la formation vient en premier lieu. Mais si l’on se réfère aux opinions exprimées par les structures étatiques sur les semences paysannes et les intrants chimiques de synthèse, on peut craindre ce qu’une telle formation peut apporter aux communautés rurales à l’état actuel des choses.

Par contre, toujours concernant les pratiques agricoles, il y a un défi très intéressant à relever par la recherche agricole, si elle accepte de changer de paradigme et de concevoir une recherche en lien étroit avec les réalités et problèmes vécus par les paysans / paysannes, en les impliquant à toutes les étapes, depuis la conception jusqu’à l’analyse des résultats en passant par l’expérimentation. Une telle recherche peut aider les paysans / paysannes non seulement à construire leur progrès technique sur ce qu’ils / elles savent déjà, mais leur redonner confiance en eux-mêmes, pour poursuivre avec des innovations. Le constat qui a été fait dans le domaine des appuis possibles aux paysans / paysannes, est qu’ils / elles sont pratiquement laissés à eux-mêmes, lorsqu’ils / elles ne sont pas intégrés dans une filière de produit de rente. L’agriculture familiale, qui assure au moins 70% de l’alimentation des populations dans les pays concernés par l’étude, bénéficie de très peu de soutien.

Le cas du riz, devenu aliment de base dans tous les pays couverts par l’étude, est patent. Les six pays sont de gros importateurs de riz, alors que leur potentiel de production de cette denrée est incontestable.

La conservation des semences a été l’élément du mécanisme de gestion semencière décrit avec le plus de détail. Les paysans / paysannes ont vraiment fait preuve d’ingéniosité dans ce domaine, ce qui montre à l’évidence qu’il s’agit d’un point aussi central que la sélection. Si après la sélection, les semences perdent leur pouvoir de germination à cause du procédé de conservation, l’espoir fondé sur la semence sélectionnée et suivie jusqu’à la récolte, est ruiné. Malgré cela ce qui est tout à fait surprenant est que la tentative d’utiliser des produits chimique de synthèse est quasi nulle. Au lieu de cela, tous les procédés de conservation ont fait appel aux ressources naturelles disponibles dans l’environnement du sélectionneur ou de la sélectionneuse :

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Mais des améliorations sont encore possible et peuvent faire l’objet d’une vraie recherche participative.

Pour la destination des semences, le don, l’échange et le prêt représentent ensemble environ 59% des moyens utilisés pour faire circuler les semences. Malgré la monétarisation de l’économie, la visée mercantile ne domine pas ici. Même la vente qui est à 41%, doit être nuancée par le caractère socio-culturel des marchés locaux, lieux d’échanges sociaux par excellence. Les semences paysannes échappent à la domination de l’argent. Elles forment définitivement des éléments de lien et de partage.

L’étude a confirmé que la gestion semencière se fait dans une situation duale dans les six pays couverts. Nous avons au plan national un système que nous avons qualifié d’officielle. Elle est constituée de mesures prise par l’Etat, pour contrôler la qualité des semences certifiée par l’établissement d’un catalogue, organiser la production, la certification et la distribution des semences. Cette dernière partie du système connait des insuffisances presque partout. L’Etat fait produire mais ne rachète pas les semences selon les ententes conclues au départ, ce qui perturbe le système. Les semences sont alors vendues sur les marchés locaux plutôt pour la consommation. Il en découle que les paysans sélectionnés pour être semenciers perdent confiance dans le système. Malheureusement, c’est ce système qui souffre d’insuffisance et qui ne gère qu’entre 20 % et 25 % de l’ensemble des semences utilisées dans l’agriculture qui consomme au moins 80 %des moyens de l’Etat mis au service de la gestion de semences. Parallèlement à ce système officiel, fonctionne le système semencier paysan. C’est ce système qui prend en charge l’agriculture vivrière et garantit donc entre 70 % et 80 % de l’alimentation des populations. Le système semencier paysan assure la sélection des semences (sélection massale), la production selon des itinéraires techniques fondés sur des traditions culturales transmises de génération en génération,

avec des adaptations qui se sont imposées selon l’évolution des écosystèmes qui accueille la production agricole.

Il a montré beaucoup d’ingéniosité pour la conservation des semences, dont il assure toutes les formes d’échange et de distribution (échange, vente, don, prêt, etc.).

Le système semencier paysan est fondé sur un attachement affectif aux semences. Les agents des structures étatiques ne comprennent pas cela. Ils banalisent l’expression « cette semence, je la tiens de mes aïeuls » ou la considère comme le symptôme d’un comportement archaïque. Or c’est ce lien affectif qui fait que le paysan / paysanne va déployer tous les efforts nécessaires pour ne pas perdre une semence, dont il / elle sera un jour fier d’être un / une des rares conservateurs / conservatrices. Ce lien affectif garantit la transmission de génération en génération, des semences, pour assurer à l’agriculture paysanne, le rôle primordial d’activité nourricière.

Dans le contexte ci-dessus présenté, le poids réel du système officiel de gestion des semences est surestimé. On peut dire qu’il s’agit d’un mythe. Si on enlève la puissance de l’Etat et les moyens financiers, d’ailleurs disproportionnés, le système se réduit pratiquement à rien, surtout si l’on sort de l’agriculture de rente. Quand on se réfère aux encadrés sur la production et la diffusion des semences certifiées au Bénin, au Burkina Faso, au Sénégal et au Togo, on constate que le système semenciers officiel justifie des dépenses énormes pour des résultats minimes.

A en croire les responsables de fermes visitées, ils / elles sont autonomes dans le développement et la mise en œuvre des pratiques agricoles. Rappelons que notre échantillon n’est pas qu’agroécologique. Il y domine d’ailleurs les producteurs / productrices conventionnels. Nous n’avons pas pu identifier des cas de mixité des itinéraires techniques. Cependant la pénétration des intrants chimiques de synthèse justifie des inquiétudes et la raréfaction de la main d’œuvre agricole en milieu paysan ne sécurise pas les bonnes pratiques. La confiance totale des agents des structures étatiques dans l’utilisation des intrants chimiques de synthèse augure d’un avenir préoccupant et indique que la part de l’agroécologie dans les politiques agricoles restera congrue si ceux et celles qui en sont convaincus laissent les tenants de l’agriculture chimique dicter la loi.

8.4 La situation duale de la gestion semencière

8.5 Les itinéraires techniques

l’enrobage par la fumée et la vapeur de la cuisson des aliments,

papier, tissu et sachet pour faire une enveloppe “soft”,

cendre et sable fin,

mise en bouteille,

diverses manières de conserver sous terre,

grenier et case de semences.

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Heureusement que la progression du recrutement des paysans pour produire des semences certifiées est pour le moment lente. Sinon, c’est un poussoir redoutable pour la propagation de l’utilisation massive des intrants chimiques de synthèse, puisque tout paysan sélectionné pour la production des semences certifiées est astreint à l’utilisation systématique et rigoureuse des intrants chimiques de synthèse, sauf le cas du Sénégal où un chercheur a admis que le paysan producteur de semences certifiées n’est pas obligé d’utiliser des intrants chimique de synthèse. On aimerait bien que cela soit confirmé par des faits.

A côté des deux systèmes décrits ci-dessus, pointe timidement un troisième à la faveur d’un soi-disant désengagement de l’Etat de la production des semences. Des paysans sont incités à s’organiser pour créer des structures spécialisées dans la production de semences. On leur fait miroiter l’opportunité de créer des mini-entreprises semencières. Pour qu’un tel système marche, il faut l’appui de l’Etat, par exemple pour leur octroyer l’exclusivité de la production des semences, ce qui est actuellement difficile à obtenir vu l’attachement viscéral des paysans / paysannes à leurs semences. Ce qui peut conforter une telle initiative serait des appuis venant des industries semencières.

Dans l’espace couvert par l’étude, deux projets stratégiques illustrent la pression des industries semencières : celui de l’OAPI qui pousse ses Etats membres à adhérer à l’UPOV et celui de l’Association Africaine du Commerce des Semences (AfricanSeed Trade Association / AFSTA) qui a créé une plateforme appelée « Alliance for Seed Industries in West Africa / ASIWA », pour accroître la production, la distribution et l’utilisation de semences certifiées en Afrique de l’Ouest ».

Les deux projets instrumentalisent l’Etat pour créer les conditions d’une privatisation totale des semences sous le couvert du partenariat public / privé, devenu le leitmotiv de la politique économique des Etats de la zone de l’étude. Les agents des structures étatiques rencontrées ne rêvent que de créer dans leur pays des situations similaires à celles qu’ils observent dans les pays dits développés. Les allégations sont tout aussi similaires. Il faut garantir la qualité des semences pour sécuriser la production agricole.

L’UPOV a mis en avant l’intérêt des agriculteurs, qui deviendraient très vite des obtenteurs, créeraient des entreprises semencières, augmenteraient leurs revenus et participeraient ainsi à la création de nouvelles variétés, dans un système de coopération ‘gagnant – gagnant’. La plateforme ASIWA, créée par l’Association Africaine du Commerce des Semences, viendra soutenir l’investissement dans la production et la distribution des semences.

La pression des industries semencières est plutôt directement sur les Etats qui cèdent d’autant plus facilement qu’ils ont des fonctionnaires qui pensent en priorité à leurs intérêts. Les menaces qui pèsent sur les semences paysannes sont à craindre à cause de cette combinaison d’intérêts publics et privés.

L’avenir des semences paysannes sera incertaine, si l’on croise les bras devant la situation que l’étude nous a permis d’analyser à tous les points de vue ci-dessus présentés. Les acteurs des structures étatiques ne croient pas aux semences paysannes. Elles sont juste reconnues comme vivier pour la sélection variétale et sont, dans le meilleur des cas, recensées à cet effet. Qu’elles puissent constituer, de façon autonome, une base pour l’amélioration du patrimoine génétique national, cela entre difficilement dans les axes à privilégier pour l’établissement de la politique semencière nationale.

Dans aucun des pays couverts par l’étude, on ne note aucune politique affirmée, mettant les semences paysannes à la place qu’elles méritent, vu le rôle qu’elles jouent aujourd’hui pour l’alimentation des populations, rôle reconnu par les instances les plus autorisées comme la FAO, IPES-FOOD et l’Union Européenne. Le mieux qu’on a fait dans l’espace de l’étude, est de mettre en place des législations ou des réglementations qui les tolèrent pour le moment. C’est le cas au Bénin, au Sénégal, au Mali et au Togo, où il est stipulé dans les réglementations semencières que les agriculteurs peuvent continuer à reproduire et à échanger les semences issues de leurs exploitations. Il faut noter que faute d’inclure les semences paysannes de façon volontaire dans la politique agricole, les décideurs politiques en la matière tolèrent ou contribuent à développer des actions qui les agressent. C’est ce qui se révèle dans la volonté du gouvernement béninois à faire voter au parlement, l’adhésion du Bénin à l’UPOV 1991,

8.6 La pression des industries semencières

8.7 Les semences paysannes de demain

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la version la plus agressive contre les semences paysannes. Les fallacieuses exceptions notées dans l’article 15 de l’UPOV 1991 sont aussitôt annulées, parce que le même article 15 les conditionne à la sauvegarde des intérêts de l’obtenteur.

Ce qui attend les six pays couverts par l’étude, s’observe déjà en Afrique de l’Est et australe, que les industries semencières en Afrique de l’Ouest donnent comme exemple. En Tanzanie, l’échange et la commercialisation des semences paysannes sont déjà criminalisés au point que pendant une foire organisée récemment dans le pays, il a été interdit aux paysans d’exposer leurs semences. Un tel avenir pour les semences paysannes est intolérable, ce qui justifie davantage les motivations qui ont fondé cette étude: connaître la situation réelle des semences paysannes, pour être en capacité de développer des actions de plaidoyer pour leur garantir un avenir meilleur.

Pour que les paysans / paysannes demeurent les gardiens / gardiennes de leurs semences, il faut :

les convaincre de l’importance de leur rôle aujourd’hui et faire en sorte qu’ils / elles aient confiance en eux-mêmes / elles-mêmes ;

leur apporter des appuis en renforcement de capacités, qui passe par la Recherche – Action – Formation et en moyens financiers ;

les aider à comprendre la situation de leurs semences aujourd’hui et à développer des actions de plaidoyer, fondées sur un argumentaire solide, en direction des décideurs politiques, pour une prise en compte volontariste des semences paysannes dans la politique semencière nationale ;

les aider à comprendre les enjeux sous régionaux et internationaux autour des semences, pour une meilleure défense du patrimoine semencier national.

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IX-CONCLUSION

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L’étude confirme qu’il existe dans la sous-région concernée une situation duale en matière de gestion des semences : un système formel qui se met en place dans un mimétisme évident des cadres réglementaires et institutionnels des pays du Nord et un système à tendance « sui generis » géré par les paysans à la base.

Dans les six pays de l’étude, il existe un système formel de gestion des semences caractérisé par un arsenal de réglementation de type occidental, bénéficiant des moyens de l’Etat, ressources financières, humaines et institutionnelles. Dans ce système, la gestion des semences est organisée sur la base des lois, des décrets et autres textes règlementaires confinés, dans leur ensemble, au cercle restreint de l’administration et du secteur privé. Ce système s’occupe en priorité d’environ 25 % des semences utilisées dans l’agriculture de chaque pays. Lorsque les institutions nationales créent des répertoires pour recenser les semences paysannes, c’est pour en faire un réservoir de ressources génétiques d’où elles tireront les matériels nécessaires pour mettre au point des obtentions végétales. Lorsque les praticiens de ce système rentrent en contact avec les paysans, c’est pour en sélectionner ceux qu’ils souhaitent consacrer « paysans multiplicateurs de semences ». Leurs actions ne ciblent que quelques semences reçues de la recherche nationale ou internationale. Ce fut le cas pour le riz NERICA, qui est entré dans la lignée des matériels issus de la recherche scientifique, prioritairement axée sur les produits de rente comme le cacao, le café, le palmier à huile ou l’arachide. Comme l’indique l’étude, les critères de sélection privilégiés sont la haute productivité, la résistance aux maladies et aux ravageurs, puis accessoirement l’adaptation aux écosystèmes. C’est récemment que la recherche scientifique a commencé à faire le lien entre les sujets abordés et les problèmes vécus par les paysans. Mais ceux-ci demeurent, dans beaucoup de cas, des faire-valoir.Comme cela apparaît à travers l’étude, les produits phares de ce système sont les semences dites améliorées, qu’elles soient certifiées ou hybrides, desquelles la grande majorité des paysans continue de se méfier, au grand dam des industries semencières, surtout lorsqu’il s’agit des semences vivrières.

Le système semencier à la base prospère encore partout, tandis que le Sénégal présente celui qui est le mieux organisé et géré par une organisation paysanne. Il constitue la base de l’alimentation partout dans la zone.

Toutes les semences de ce système sont reproductibles, caractéristique au premier rang des critères de leur acceptation, au nombre desquels, il faut citer la longueur du cycle de production et la qualité organoleptique. L’attachement aux semences paysannes repose aussi sur le rôle que certaines jouent dans la culture et le culte. Le souhait des paysans est de maintenir durablement ces semences. Ils demandent en conséquence des renforcements de capacités, afin de mieux poursuivre leurs activités.

Comme déjà dit, cette étude n’est que la première étape d’un processus qui durera au moins trois ans. Les résultats de l'étude confirment la nécessité de poursuivre le projet sur les mécanismes de gestion semencière à la base. Si rien n’est fait l’offensive des industries semencières renversera la situation présente comme c’est déjà le cas dans plusieurs pays anglophones d’Afrique. Heureusement, nous avons en Afrique francophone un socle adossé à la méfiance des paysans vis-à-vis des semences améliorées dites à haut rendement ou encore certifiées.

Les actions doivent être menées à deux niveaux. Une action de plaidoyer à la fois vis-à-vis des décideurs politiques et des communautés rurales. Celles-ci ont besoin d’être consolidées dans leurs options actuelles, par lesquelles elles accordent la priorité aux semences paysannes. Les chefs d’exploitations agricoles rencontrés au cours de l’étude attendent des institutions nationales en charge des semences de les aider à améliorer ce qu’ils savent déjà faire pour le maintien et la promotion du patrimoine semencier national. Concomitamment à l’action de plaidoyer, la recherche scientifique doit se mettre véritablement au service de la cause paysanne.

Pour les acteurs de la société civile réunis dans le projet, l’étude de référence n’est qu’une étape. Un argumentaire sera construit, fondé sur les résultats de cette étude et diffusé le plus largement possible pour construire un mouvement qui aura pour objectif de faire en sorte que les paysannes et les paysans demeurent des gardiennes et des gardiens toujours plus conscients du patrimoine semencier reçu des générations passées pour un avenir meilleur de l’agriculture sur le continent africain.

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ANNEXES

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