9
Journal de thérapie comportementale et cognitive (2013) 23, 43—51 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com CAS CLINIQUE Expérience d’un groupe motivationnel tabac auprès d’une population psychiatrique en établissement et service d’aide par le travail Experience of a tobacco awareness group with a psychiatric population in a sheltered workshop Romain Lemaréchal , Louis Lebocey Maison des addictions (centre de soin, d’accompagnement et de prévention en addictologie), 41, avenue Père-Charles-de-Foucauld, 14000 Caen, France Rec ¸u le 14 mars 2012 ; rec ¸u sous la forme révisée le 17 ecembre 2012 ; accepté le 18 ecembre 2012 Disponible sur Internet le 23 mai 2013 MOTS CLÉS Thérapie cognitive comportementale ; Groupe psychothéra- peutique ; Motivation ; Tabac ; Malades psychiatriques Résumé Les malades psychiatriques, à l’instar de leurs soignants, croient peu en leurs capa- cités de changement face à leur tabagisme. Cela est en partie à la dépendance souvent sévère de ces sujets, mais aussi à une composante culturelle et cognitive partagée : la maladie psychiatrique empêche tout espoir d’arrêter de fumer. L’approche groupale mixte, utilisant, d’une part, les principes des thérapies cognitivo-comportementales, notamment la mise en lumière de distorsions cognitives qui bloquent la démarche de changement et, d’autre part, ceux de l’approche motivationnelle, montre que ces personnes ont les mêmes dispositions d’introspection et de fonctionnement en groupe que les non-malades. Il semble que l’impact de l’approche soit double, fait d’une forte mobilisation vers le soin au décours des séances grou- pales (90 %), et d’une réussite en termes de changement pour ceux qui ont fait la démarche individuelle. Ce résultat repose aussi sur l’implication institutionnelle ayant encouragé et sou- tenu les patients, et la continuité des thérapeutes, les sujets ayant retrouvé dans le soin les professionnels, animateurs des séances en groupe. © 2013 Publié par Elsevier Masson SAS pour l’Association française de thérapie comportementale et cognitive. KEYWORD Cognitive behavior therapy; Group psychotherapy; Summary Smokers with psychiatric problems consume more tobacco and have higher depen- dency levels than the general population (Office franc ¸ais de prévention du tabagisme [OFT] et Fédération franc ¸aise de psychiatrie, 2009 [1]; Wiesbeck et al., 2008 [2]; Ostacher et al., 2006 [3]; Quattrocki et al., 2000 [4]; Glassman, 1993 [5]; Dervaux et al., 2004 [6]; OFDT, 2006 [7]; Lasser et al., 2000 [8]; Grant et al., 2004 [9]; Williams et al., 2005[10]). They rarely seek help Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (R. Lemaréchal). 1155-1704/$ see front matter © 2013 Publié par Elsevier Masson SAS pour l’Association française de thérapie comportementale et cognitive. http://dx.doi.org/10.1016/j.jtcc.2012.12.001

Expérience d’un groupe motivationnel tabac auprès d’une population psychiatrique en établissement et service d’aide par le travail

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Page 1: Expérience d’un groupe motivationnel tabac auprès d’une population psychiatrique en établissement et service d’aide par le travail

Journal de thérapie comportementale et cognitive (2013) 23, 43—51

Disponible en ligne sur

www.sciencedirect.com

CAS CLINIQUE

Expérience d’un groupe motivationnel tabac auprèsd’une population psychiatrique en établissement etservice d’aide par le travailExperience of a tobacco awareness group with a psychiatric population ina sheltered workshop

Romain Lemaréchal ∗, Louis Lebocey

Maison des addictions (centre de soin, d’accompagnement et de prévention en addictologie), 41, avenuePère-Charles-de-Foucauld, 14000 Caen, France

Recu le 14 mars 2012 ; recu sous la forme révisée le 17 decembre 2012 ; accepté le 18 decembre 2012Disponible sur Internet le 23 mai 2013

MOTS CLÉSThérapie cognitivecomportementale ;Groupe psychothéra-peutique ;Motivation ;Tabac ;Maladespsychiatriques

Résumé Les malades psychiatriques, à l’instar de leurs soignants, croient peu en leurs capa-cités de changement face à leur tabagisme. Cela est dû en partie à la dépendance souventsévère de ces sujets, mais aussi à une composante culturelle et cognitive partagée : la maladiepsychiatrique empêche tout espoir d’arrêter de fumer. L’approche groupale mixte, utilisant,d’une part, les principes des thérapies cognitivo-comportementales, notamment la mise enlumière de distorsions cognitives qui bloquent la démarche de changement et, d’autre part,ceux de l’approche motivationnelle, montre que ces personnes ont les mêmes dispositionsd’introspection et de fonctionnement en groupe que les non-malades. Il semble que l’impactde l’approche soit double, fait d’une forte mobilisation vers le soin au décours des séances grou-pales (90 %), et d’une réussite en termes de changement pour ceux qui ont fait la démarcheindividuelle. Ce résultat repose aussi sur l’implication institutionnelle ayant encouragé et sou-tenu les patients, et la continuité des thérapeutes, les sujets ayant retrouvé dans le soin lesprofessionnels, animateurs des séances en groupe.© 2013 Publié par Elsevier Masson SAS pour l’Association française de thérapie comportementaleet cognitive.

KEYWORDCognitive behaviortherapy;Group psychotherapy;

Summary Smokers with psychiatric problems consume more tobacco and have higher depen-dency levels than the general population (Office francais de prévention du tabagisme [OFT] etFédération francaise de psychiatrie, 2009 [1]; Wiesbeck et al., 2008 [2]; Ostacher et al., 2006[3]; Quattrocki et al., 2000 [4]; Glassman, 1993 [5]; Dervaux et al., 2004 [6]; OFDT, 2006 [7];Lasser et al., 2000 [8]; Grant et al., 2004 [9]; Williams et al., 2005[10]). They rarely seek help

∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (R. Lemaréchal).

1155-1704/$ – see front matter © 2013 Publié par Elsevier Masson SAS pour l’Association française de thérapie comportementale et cognitive.http://dx.doi.org/10.1016/j.jtcc.2012.12.001

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44 R. Lemaréchal, L. Lebocey

Motivation;Tobacco;Psychiatric patients

to stop smoking (Fagerström et al., 2009[15]; Ratschen et al., 2009 [16]). However, the OFT andthe French Anti-Tobacco Association, 2009 [1] recommend smoking cessation with the help of apsychiatrist, outside of severe episodes, nicotine replacement therapy and cognitive-behavioraltherapy (CBT). CBT aims to reduce self-destructive behaviors and excessive emotional reac-tions by modifying dysfunctional or erroneous thoughts and maladaptive beliefs which underliethese reactions (Ellis, 1962 [19]; Beck et al.,1976 [20]; Beck et al.,1979 [21]; Mahoney 1991[22]; Cottraux, 2011 [23]). As dependant patients are often ambivalent about their interest inchange (Beck et al., 1993 [27]; Bishop, 2000 [28]), the therapist has to act specifically on fac-tors influencing motivation. A therapeutic relationship and quality intervention strategies arefavored (Cungi, 2006 [33]; Miller and Rollnick, 1991 [34]; Miller et al., 1993 [35]; Miller, 2000[36]; Project Match Research Group, 1997 [38]). Motivational interviewig (MI) was specificallydeveloped with this in mind (Miller et al., 1991 [34]). To help patients who smoke overcometheir ambivalence and commit to change, it is possible to work on motivation in a group con-text (Ingersoll et al., 2000 [39]). For this purpose, we formed the tobacco awareness group(TAG) at the interface of CBT and MI. The objective was not abstinence but the creation of aplace of exchange, understanding, formation of hypotheses and experimentation on reductionin smoking.The TAG in a sheltered workshop. — Our hypothesis was that participation in a TAG could modifythe beliefs of smokers with psychiatric problems and encourage them to commit to change. Ourexperiment took place in a sheltered workshop for people with a treated and stabilized mentaldisorder. It was a closed group of six sessions from 1 h 30 mins to 2 h (one day a week) led bytwo therapists (a doctor specialized in smoking cessation and a psychologist trained in CBT).The group was made up of 10 people: a facilitator without a mental disorder and nine workersat a sheltered workshop of which 50% had strong dependence and 50% average dependence.They were all ambivalent towards change.Analysis and results. — Participation in the TAG brought up certain reoccurring cognitive distor-tions shared by all members in the group. On the one hand, dogmatic demands with regardto change: abstinence as the sole objective, absence of mental disorder before being able tostop and the need to stop without any assistance. On the other hand, cognitions showing lowtolerance to frustration in emotionally uncomfortable situations. Initially ambivalent, 90% ofpatients took individual action following the TAG to try to modify their consumption. Theywanted to consult the therapists who had led the TAG. They all tried to reduce consumptionusing nicotine patches and 60% tried to give up completely. One of these people managed todo so for more than a year. Although this population is traditionally considered to be difficult,participants remained committed. The impact of the TAG on the process of change over oneyear is analysed in relation with involved factors.Discussion. — The diversity of the TAG approach seems effective. The group dimension is highlyrecommended for this type of population who benefit from social support. It is primordial thatabstention is not the only objective. The main originality of this TAG was the identificationof a specific belief that psychiatric disorders prevent smoking cessation. The comments of allparticipants seem to confirm the underlying dogma of self-medication (Strand and Nybäck,2005) [11]: they smoke to control their emotions, their moods, which are, in their opinion,caused by their disorder. Bringing this dogma to the level of a hypothesis allowed the groupto explore other ways of confronting situations in daily life without smoking. This action couldnot have been successful without the work of the professionals at the sheltered workshop whoaccompanied and supported the participants at key moments of stress (first session of the TAG,individual consultation). Once the participants were committed, they came on their own.Conclusion. — This TAG seems to have contributed in modifying certain beliefs and encouraginga commitment to treatment. Support by the institution is essential in creating and maintaininggroup dynamics, and supporting individual initiatives.© 2013 Published by Elsevier Masson SAS on behalf of Association française de thérapie compor-

I

Lp[li

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tementale et cognitive.

ntroduction

es fumeurs avec des troubles psychiatriques consommentlus de tabac que les fumeurs sans troubles psychiatriques

1—9]. Les patients schizophrènes fument plus que la popu-ation générale et leur niveau de dépendance est plusmportant [6,7,10].

lcv

Plusieurs hypothèses ont été formulées afin d’expliquerette très importante co-occurrence entre tabagisme etchizophrénie. La plus communément admise est celle de’automédication : fumer pourrait être un moyen de contrô-

er les émotions, les humeurs, ainsi que divers troublesognitifs [11]. Cependant cette hypothèse reste contro-ersée [12—14]. Les facteurs liés à l’institutionnalisation
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Expérience d’un groupe motivationnel tabac auprès d’une population psychiatrique 45

Tableau 1 Les stades de changements (Prochaska et DiClemente, 1982) : trois types de patients (Bishop, 2000).The stages of change (Prochaska and DiClemente, 1982): three types of patients (Bishop, 2000).

Type I : déni1 Précontemplation : la personne n’a pas l’intention de changer quoi que ce soit

Objectif : lever le déni (honte, méconnaissance, manque de sécurité ou de confiance)

Type II : ambivalent2 Contemplation : la personne est ambivalente

Objectif : travailler la motivation intrinsèque au changement3 Détermination et préparation : la personne réfléchit à comment changer

Objectif : prévenir la récidive, planifier, anticiper

Type III : non-ambivalent4 Action : la personne agit au quotidien pour prévenir les problèmes repérés

Objectif : suivi régulier, l’accompagner dans les étapes de changement5 Maintien : la personne a pris des habitudes

Objectif : prévenir la rechute6 Rechute : la personne a dérapé, si le dérapage est continu on parlera de rechute

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Objectif : aider à retourner dans un processus de changem

(ennui, gestion du temps, vie en groupe, etc.) pourraientparticiper à expliquer le maintien du tabagisme et sa pré-valence élevée.

Dans les milieux de soins psychiatriques, la dépen-dance tabagique des patients est insuffisamment abordéeet peu d’entre eux se font offrir de l’aide pour cesserde fumer [15,16]. Pourtant, plusieurs études démontrentqu’une maladie mentale n’est pas une contre-indication aurenoncement au tabac ni à la prescription d’une pharma-cothérapie pour cesser de fumer [17,18]. Plus de 15 étudesconcordantes montrent l’absence d’évolution de la sympto-matologie psychotique lors de l’arrêt [1]. L’Office francaisde prévention du tabagisme (OFT) [1] recommande unarrêt du tabac en prenant quelques précautions dont celled’initier tout sevrage à distance d’épisode aigu ou aumoment d’une hospitalisation. De plus, l’accompagnementpar un psychiatre (en collaboration ou non avec un tabaco-logue) est indispensable, ainsi que l’utilisation des substitutsnicotiniques (SN) ; une prise en charge psychothérapeutiquecognitivo-comportementale (TCC) se doit d’accompagnerle tout. Elle a apporté la preuve de son efficacité dansle sevrage tabagique. Les TCC tentent de réduire lescomportements autodestructeurs et les réactions émotion-nelles excessives en modifiant les pensées dysfonctionnellesou erronées et les croyances inadaptées qui sous-tendent cesréactions [19—23]. Plusieurs techniques comportementaleset cognitives sont utilisées pour permettre un changementdurable [24—26]. Appliquées à l’addictologie, elles tra-vaillent sur quatre axes complémentaires [27,28] :

• axe 1 : trouver des facons plus satisfaisantes et réalistesde faire face à ses problèmes (internes ou externes)conduisant à la détresse émotionnelle sans se tourner versle comportement addictif ;

• axe 2 : réduire les pulsions (urgences, craving) ;• axe 3 : retrouver un équilibre de vie [29,30] ;

• axe 4 : rester motivé [31].

La motivation au changement serait un élément cen-tral pour l’initiation et l’accompagnement d’un changement

mffg

en évitant la paralysie de la culpabilité

omportemental. Les personnes aux prises avec un troubleddictif sont souvent très ambivalentes quant à l’intérêt’un changement [27,28]. Prochaska et Diclemente [32] sug-èrent qu’elles traversent une série de stades (Tableau 1)on pas de facon uniforme, linéaire mais de facon cyclique,arfois anarchique. Cliniquement, Bishop [28] distingue sim-lement trois types de patients (Tableau 1) : dans le déni (I),mbivalents (II) et non ambivalents (III).

En repérant à quel stade se trouve le patient, le théra-eute adapte son intervention (stratégies, attitudes, outils)our lui permettre d’accéder au stade suivant. En connais-ant les stades futurs, il peut anticiper certaines difficultésn y préparant le patient.

Aider les patients de type I et II incite donc le théra-eute à agir spécifiquement sur les facteurs influencant leursotivations au changement. Un rapport collaboratif entreatient et thérapeute est donc primordial [33]. Il est favo-isé par l’adoption d’un style relationnel très différent desaractéristiques de la relation médecin/malade classique.e thérapeute est empathique, recherche la compréhensiont la concertation de manière chaleureuse et authentique.a motivation y est percue comme le fruit d’une relationhérapeutique de qualité où le thérapeute influence favo-ablement ou négativement la motivation du patient par laualité de ses stratégies d’intervention [34,35]. L’entretienotivationnel (EM) a été spécifiquement développé dans ce

ens [34]. C’est un style d’entretien visant à faire ressor-ir la motivation intrinsèque des patients de facon durablen les aidant à identifier et à nommer leur motivation

changer [36]. Celle-ci est supposée émerger quand ilsercoivent une dissonance cognitive [37], c’est-à-dire « unécalage entre l’endroit où ils sont et où ils veulent être »38].

Il est également possible d’effectuer un travail de natureotivationnelle via un groupe [39]. Au sein de notre struc-

ure nous avons développé et expérimenté les groupes

otivationnels tabacs (GMT) pour accompagner les patients

umeurs dans le dépassement de leur ambivalence etavoriser ainsi leur engagement dans une démarche de chan-ement.

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Il s’adresse aux patients de Type II, à l’interface des TCCt de l’EM. Le groupe est la base fonctionnelle du change-ent. Il est plus aisé de changer les croyances et les normes’un petit groupe que celles d’individus isolés. En effet, lesembres d’un groupe sont prêts à adhérer à de nouvelles

ormes si le groupe, dans son ensemble, y adhère [40]. Pourue la dynamique fonctionne, il faut que les échanges eta décision finale soient libres [37]. L’objectif affiché n’estas l’abstinence : ce n’est pas un groupe d’arrêt. L’idée este créer un lieu d’échanges, de compréhension, de forma-ion d’hypothèses et d’expérimentation sur le tabagisme. LeMT s’intéresse aux situations où les personnes ont réussi ouon à résoudre leurs dissonances.

e groupe motivationnel tabac entablissement et services d’aide par le travail

et écrit rapporte l’expérience d’une intervention de natureotivationnelle auprès de patients fumeurs ayant la particu-

arité d’être des malades psychiatriques. Notre intervention eu lieu dans un établissement et service d’aide par le tra-ail (ESAT) qui accueille des personnes présentant un troubleental traité et stabilisé. L’équipe locale, soucieuse de la

anté des salariés a pris contact avec notre Centre de soin et’accompagnement en addictologie (CSAPA) pour une inter-ention visant à agir sur le tabagisme. Malgré la fréquence et’intensité du tabagisme, aucune personne de l’ESAT n’avaitxprimé le désir de stopper le tabac ou l’intention de consul-er afin de réfléchir à un sevrage. La décision fut donc prisee faire un travail de nature motivationnelle via un GMT.

ypothèse

ous avons émis l’hypothèse que l’utilisation d’un GMT pou-ait modifier les croyances des fumeurs ayant des troublessychiatriques et ainsi favoriser leur engagement dans uneémarche de changement.

rganisation

e GMT est organisé comme suit :

groupe fermé ; six séances (un jour par semaine) ; durée 1 h 30 à 2 heures ; séances sans pause, sans tabac ; maximum dix patients ; deux thérapeutes.

echniques d’animation

e GMT nécessite deux thérapeutes cliniciens ayant uneonnaissance des principes de l’EM et des TCC : un médecinabacologue diplômé et un psychologue formé à la psy-hothérapie comportementale émotivo-rationnelle (PCER)

yant une bonne expérience des pratiques de groupe. Ilsont non directifs dans l’exploration de l’ambivalence et desaleurs fondamentales des participants (entretien motiva-ionnel), directifs par la sélectivité des reflets, des résumés

Ldn

R. Lemaréchal, L. Lebocey

t le cas échéant dans l’exploration des cognitions en situa-ion (TCC). La structuration de l’intervention est propice àe qu’elle soit motivationnelle, indépendamment du mode’intervention de chaque intervenant (en italiques les pointsechniques de l’EM) :

pour d’emblée interroger les objectifs et mettre enexergue les dissonances, un canevas d’animation basé surdes questions ouvertes est utilisé :1. quel(le) fumeur(se) je suis ?2. où je veux aller ?3. qu’est-ce qui marche déjà bien ?4. qu’est-ce qui bloque ?5. quelle est mon attente en lien avec le groupe ?6. quel plus petit objectif réaliste et réalisable j’imagine

mettre en place dans les semaines ou les mois à venir ?Cela met en relief les situations où la personne

est dissonante (Q4) ou consonante (Q3) vis-à-vis de sonobjectif à long terme (Q2) : chaque situation est (ou a été)une énigme à résoudre pour les participants. Elle est (oua été) peut-être une solution à court terme. Cela induitégalement notre philosophie : il n’y a jamais d’échec(Q1) mais une réussite différée, obtenue par expériences(Q6). Il n’y a jamais de guérison définitive (Q1), il fautprévenir les reprises. Chaque réponse fait l’objet de refor-mulations et de questionnements ouverts. Cela aide lesparticipants à s’identifier et à appréhender les différenceset les similitudes qui existent entre eux ; trouver un sou-tien social (Q5) ;

échanges avec le groupe (remue-méninges) et les théra-peutes (qui reflètent, résument et reformulent) ;

définition du problème (passer du général au particulierde l’idée au concret) ;

regroupement des situations « consonantes » et« dissonantes » ;

balance collective des avantages et inconvénients ; formulation d’hypothèses de changement (causes, consé-

quences, comment agir ?) ; transcription sur paperboard faisant feedback et reformu-

lation ; expérimentation ou mise en situation librement choisie ; point de vue du thérapeute, proposition de modélisation

(Information) via des modèles scientifiques de psycholo-gie [25—29] et de tabacologie [41].

À partir de la seconde séance :

tour de parole à propos de la séance précédente et de lasemaine écoulée (résumé) ;

retour d’expérimentation, valorisation des expériences.Le renforcement positif est privilégié, il renforce le sen-timent d’efficacité personnelle [42] ;

formulation d’hypothèses (causes, conséquences,comment agir ?) ;

puis la séance se poursuit comme la précédente.

nalyses de situations et thèmes abordés

e thérapeute peut illustrer et schématiser le rôle importantes croyances du participant dans une situation précise. Il’y a pas de thèmes dédiés à chaque séance ou abordés

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Expérience d’un groupe motivationnel tabac auprès d’une population psychiatrique 47

Tableau 2 Traitements pharmacologiques des patients.Pharmalogical treatments of patients.

9 patients

Schizophrènes Dépressifs Bipolaire

1 2 3 4 5 6 7 8 9

NeuroleptiquesAripriprazole +Alimémazine +Cyamémazine + +Olanzapine + + +Oxapine +Halopéridol +Pipampérone +Zuclopenthixol +

Correcteurs de neuroleptiquesTropatépine +Trihexylphénidyle +

BenzodiazépinesOxazépam + + +Lormétazépam +Alprazolam +

AntidépresseursFluoxetine +Clomipramine +Paroxetine +

Thymorégulateur

sdd

Valpromide

systématiquement mais plutôt des situations récurrentesse référant aux quatre axes de travail des TCC appliquéesà l’addictologie : faire face aux problèmes, réduire lesenvies, retrouver un équilibre de vie et rester motivé. Àpartir des échanges autour de ces situations problèmes,les thérapeutes « reconstruisent » des modèles simples quipermettent de résumer les interactions en jeu entreles dimensions « rationnelle/automatique/motivationnelle »[41] ou la triangulation cognition-émotion-comportement[17,18]. Nous avons opté pour le modèle « ABC » issu de laPCER [17] qui est à la fois simple à comprendre et très effi-cace (A comme événement Activateur ; B comme Beliefs,c’est-à-dire les croyances, les pensées ; C comme Consé-quences [émotionnelles ou comportementales]).

Population

Ce GMT était composé de dix personnes : un encadrant, chefd’atelier non-malade psychiatrique et neuf travailleurs del’ESAT dont six personnes souffrant de troubles schizophré-niques et trois présentant des troubles thymiques (un cas debipolarité et deux cas de dépression). Le Tableau 2 présente

les traitements pharmacologiques des patients, le Tableau 3leur consommation de tabac et de SN.

Avant les séances, les encadrants de l’ESAT ont fait rem-plir deux auto-questionnaires :

lGA

+

la dépendance a été évaluée au moyen du test de Fagers-tröm. Le score moyen était de 6,5. Tous avaient uncomportement de dépendance ou d’abus avec le tabac :◦ 50 % des sujets ont une dépendance forte (Score entre

7 et 10) contre 18 % dans la population générale desfumeurs [7],

◦ 50 % ont une dépendance moyenne (Scores 5 et 6)(contre 31 %) ;

les facteurs poussant à fumer ont été interrogés parl’intermédiaire des questions 34 et 35 du dossier deconsultation en tabacologie de l’Institut nationale de pré-vention et d’éducation pour la santé (INPES) [43], outil derenseignements sur le tabagisme de la personne. Chaqueitem est coté de 0 à 10. Nous avons établi une moyennedes réponses :◦ 7,7 (plaisir),◦ 6,8 (soutien moral),◦ 6 (action anti-stress).

En dehors de la notion de plaisir dont on peut interroger leens (plaisir réel ou plaisir en valeur absolue — soulagement’émotion ou de manque), nous voyons que le tabac s’inscritans les stratégies visant à contrôler les émotions.

La motivation à l’arrêt n’a pas fait l’objet d’une éva-uation psychométrique. En revanche la première séance duMT a permis de définir à quel stade chacun se trouvait.ucun n’était dans le déni (Type I) ni dans une démarche de

Page 6: Expérience d’un groupe motivationnel tabac auprès d’une population psychiatrique en établissement et service d’aide par le travail

48 R. Lemaréchal, L. Lebocey

Tableau 3 Consommation de tabac et de substitut nicotinique des participants.Consumption of tobacco and nicotine replacement therapy.

9 patients

Schizophrènes Dépressifs Bipolaire

1 2 3 4 5 6 7 8 9

Consommation detabac/jour(Nombre decigarettes ougrammes detabac à rouler)

<10 15 5—10 23 g <10 20 20 20 18 g

SN 0 0 0 0 0 0 0 0 0

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SN : substitut nicotinique.

hangement (Type III). Ils se trouvaient donc aux stades 2 ou selon le modèle de Prochaska et DiClemente [32] (Type II)28].

nalyses et résultats

a pratique du GMT a fait ressortir des questionnements etes croyances autour d’axes habituellement abordés par unroupe. Les situations d’inconfort émotionnel (axe 1) et deraving (axe 2) ont soulevé le plus de questionnements. Le

plaisir » de fumer, initialement invoqué s’est révélé être,ans une large mesure, soit un soulagement du manqueoit un mode de régulation émotionnelle. L’équilibre de vieaxe 3) fut questionné plus tard, au travers de l’exploratione ces deux premiers axes. Enfin, l’impact du GMT sur lesémarches de changement des participants (axe 4) sembletre positif.

xe 1 : les situations d’inconfort émotionnel

e groupe a eu beaucoup de problèmes à étiqueter les émo-ions. Pour pouvoir utiliser le modèle ABC et ainsi accéder àertaines cognitions pouvant bloquer le processus de chan-ement, il fallait nécessairement aider les participants àeformuler ce qu’ils vivaient. Nous sommes donc partis desensations corporelles, des monologues intérieurs (quandes personnes y sont arrivées) et des tendances à l’action« Qu’est-ce que vous feriez là, tout de suite, dans cetteituation ? ») pour dénommer avec le groupe ce qui se passaitu plan émotionnel.

Ainsi, nous avons repéré certaines distorsions cognitivesécurrentes (exigences dogmatiques, basse tolérance à larustration) partagées par tous les membres du groupe.

xigences dogmatiquese ne plus être malade psychiatrique pour pouvoir arrêter.

La Maladie », terme pudique adopté par le groupe, auraitn impact direct sur leur tabagisme, un véritable contrôle

xterne :

« C’est la maladie (qui nous pousse à fumer) » ; « Sans la maladie ce serait pas pareil » ;

oldt

« Y a beaucoup de moments où on est mal avec la maladie,dans ces moments-là y a rien à faire » ;

« C’est pire depuis ma maladie (l’annonce de lamaladie. . .) ».

La résolution du problème revenait donc à éradiquera maladie avant le problème addictif tout en sachant learactère chronique de celle-ci. . . Cette vision défaitistet déresponsabilisante a été discutée. Il est apparu qu’elletait particulièrement ancrée chez les participants ayantéjà fait des tentatives d’arrêt par le passé et ayant repris.’est l’effet de violation d’abstinence [29] : la dissonanceénérant le malaise émotionnel est résolue en attribuant’écart à des facteurs :

internes (personnalisation : « Je manque de volonté »), globaux (auto-reproches : « Je suis nulle »), incontrôlables (étiquetage : « C’est la maladie », « On est

malade »).

Ces croyances dichotomiques (tout-ou-rien) contribuentargement à transformer un dérapage en rechute et sontenforcées à chaque reprise.

Suite aux questionnements sur la rechute, l’accent a étéis sur les notions d’apprentissage, de conditionnement, deotivation. Ce questionnement a été mené aussi bien sur

’apprentissage de la fume que l’apprentissage de la « dé-ume » [41]. Pour résumer ces différentes notions et leursnteractions, nous avons au tableau « reconstitué » le modèleroposé par Molimard [41] à partir des échanges du groupe.insi, il est rapidement apparu que tous les participantstaient dépendants bien avant l’apparition des premiersymptômes psychiatriques,’abstinence. Par exemple :

« Il faut arrêter » ; « C’est l’abstinence ou rien ».

Cette croyance a été ébranlée lors de la présentation des

bjectifs du GMT. Le fait que des thérapeutes défendente droit de changer ce que l’on veut ou peut a permis deéculpabiliser la plupart des participants et de les remotiverous,
Page 7: Expérience d’un groupe motivationnel tabac auprès d’une population psychiatrique en établissement et service d’aide par le travail

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Expérience d’un groupe motivationnel tabac auprès d’une p

D’arrêter sans aide. Par exemple :

• « Si on a de la volonté on arrête comme ca ! »,• « Les patchs ca remplace pas la volonté ».

Cette croyance était fortement ancrée à la premièreséance. Beaucoup évoquaient clairement le peu d’espoirqu’ils avaient qu’une aide quelconque soit nécessaire à quiest réellement prêt à arrêter. Elle fut contestée par legroupe après l’utilisation des SN puis, à mi-parcours, enconstatant les bienfaits qu’apportait le GMT,

La basse tolérance à la frustration (BTF)Les situations d’inconfort (non de détresse émotionnelle)comme par exemple ne pas fumer à la pause ou le soir avantde manger sont interprétées comme :

• « Impossible, il faut que je fume, c’est trop dur » ;• « Je vais devenir dingue » ;• « Non, non, il me la faut je vais être trop mal » ;• « Je m’imagine pas être chez moi sans fumer. Ca serait

horrible ».

En séance, l’anticipation de ces situations amenaitles participants à ressentir une forte anxiété (peur del’inconfort). La confrontation à la situation anxiogène suggé-rée par les thérapeutes a été adoptée, par certains, commeobjectif pour la semaine suivante. Ils ont rapporté que dansleur quotidien, une forte frustration mêlée de colère lesenvahissait (BTF).

En revanche, différer ne serait-ce que de cinq minutesla cigarette leur a permis de mieux appréhender le rôle deleurs croyances dans leur comportement. Il leur est aussiapparu que le fait d’être dépendant générait des antici-pations anxiogènes et des situations de conflits internes,indépendamment de leur pathologie psychiatrique.

Axe 2 : les situations de craving

Les situations de fortes envies relevaient pour la plupartd’un manque physique. Un questionnement sur les SN arévélé une méconnaissance et une méfiance vis-à-vis de cesaides médicamenteuses. L’exploration d’expériences pas-sées a clairement fait apparaître qu’un confort certainpouvait en être retiré. Des SN sous toutes formes ont étéproposés gratuitement à l’expérimentation. Les retours ontété très positifs, les personnes ayant pu vérifier l’efficacitéde la nicotine pour faire face à nombre de situations de cra-ving. Au passage l’exigence dogmatique « Il faut arrêter sansrien » venait d’être battue en brèche.

Axe 3 : équilibre de vie et soutien social

Jusqu’alors, l’évitement des situations dangereuses étaitvalorisé. Si cela était impossible, la socialisation, larecherche d’un tiers, semblaient être un moyen efficace dedétourner son attention. Cela a mis le doigt sur des pro-

blématiques centrales dans la vie des membres du groupe :la vacuité, l’ennui, l’indécision. Cela a introduit des ques-tionnements sur l’Axe 3 par rapport à l’équilibre de vie.Les participants évoquaient une plus grande motivation

à

ét

ation psychiatrique 49

infléchir leur comportement entouré des membres duroupe ou dans le contexte de l’ESAT où les interactionsociales permettaient de différer certaines consommations.n revanche, dans leur vie privée, dès le retour au domi-ile, un déficit chronique de contacts sociaux était évoqué.e soutien social pour le groupe est primordial.

xe 4 : impact sur les démarches individuellesost-Groupe motivationnel tabac

e Tableau 4 propose des repères pour appréhender l’impactu GMT sur les démarches individuelles sur un an. Il pré-ente, pour chaque patient, l’évolution de sa motivationchangement de stade), de ses objectifs et s’il utilise ouon des SN, entre la première séance du GMT et la premièreonsultation individuelle. Nous inférons ces changements auMT. Ce tableau présente également l’assiduité (différencentre consultations honorées et non honorées) et la duréees tentatives d’arrêt, témoignant d’une affiliation dans leoin et peut-être d’une alliance thérapeutique de qualité.

Initialement ambivalentes, huit personnes sur neuf (90 %)ont passées à l’action (stade 4) à l’issue du GMT pour tentere modifier leur consommation. Ils ont souhaité consulter auSAPA pour continuer avec les thérapeutes qui ont animé leMT (principe de la bonne relation thérapeutique) bien que’autres centres leur étaient proposés et que beaucoup lesvaient fréquentés. Tous ont tenté des réductions, soit avecatchs, soit avec des SN oraux. Cinq patients sur huit ontpté pour le sevrage dont une personne avec succès depuislus d’un an. Globalement, peu de rendez-vous sont restéson honorés (17 %), ce qui est inférieur à l’absentéisme deotre file active. En dehors de l’impact de l’entourage pro-essionnel, il faut souligner que l’affiliation s’est maintenueour une population habituellement réputée plus difficileue celle des fumeurs non atteints de pathologie psychia-rique. Le GMT semble augmenter l’adhésion au soin.

iscussion

e GMT n’a en définitive pas été très différent des GMTomposés de sujets non porteurs de troubles psychiatriques.lors que cette population est très dépendante du tabac, lesxes abordés sont les mêmes, les situations (craving, incon-ort émotionnel et frustrations sans fumer) analogues. Leimple fait de refléter cette absence de différence a étéoteur.La mixité de l’approche du GMT semble efficace même

i la série est très restreinte. La dimension groupale estout à fait indiquée pour cette population qui, face à’inconfort, est dans l’évitement ou la consommation. Cela

permis de pointer deux alternatives efficaces : s’interrogerur son propre fonctionnement et se faire aider pour ce pro-lème (groupe, collègues, professionnels etc.). Le fait que’abstinence ne soit qu’un objectif parmi d’autres est pri-ordial : cela étonne d’emblée mais libère et déculpabilise

nsuite. Le fait que les thérapeutes ne soient pas affiliés à lasychiatrie a, selon l’institution, aidé à libérer la parole et

ce que le groupe s’autorise à ne pas être trop compliant.L’originalité principale de ce GMT a été la mise en

vidence d’une croyance spécifique : la « maladie » psychia-rique empêche l’arrêt du tabac. Les propos de tous les

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50 R. Lemaréchal, L. Lebocey

Tableau 4 Impact du Groupe motivationnel tabac sur la démarche de changement des patients sur un an.Impact of TAG (1) on the process of change in patients over one year.

9 patients

Schizophrènes Dépressifs Bipolaire

1 2 3 4 5 6 7 8 9

Stade de motivation (Tableau 1)Première séance du GMT 3 3 2 2 2 2 3 2 2Première consultation 4 4 4 2 4 4 4 X 4

Objectif (Goal)Première séance du GMT Aucun Aucun Aucun Aucun Aucun Aucun Aucun Aucun AucunPremière consultation Arrêt Arrêt Arrêt Réduction Arrêt Réduction Arrêt X Arrêt

Utilisation de SNPremière séance du GMT Non Non Non Non Non Non Non Non NonPremière consultation Oui Oui Oui Oui Oui Oui Oui X Oui

AssiduitéConsultations honorées 2 11 2 10 10 2 5 0 11Consultations non honorées 2 0 1 2 0 1 2 0 1

Durée des arrêts (jours)Premier 6 427 4 63 21Second 30

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SN : substitut nicotinique.

articipants semblaient attester l’intégration du dogme de’automédication : ils fumaient pour contrôler leurs émo-ions, leurs humeurs, imposées selon eux par leur trouble. Leait de ramener ce dogme au rang d’hypothèse a permis auroupe, dans une large mesure, d’en poser de nouvelles et’expérimenter d’autres facons de faire face aux situationse la vie quotidienne, sans fumer.

Mais le dispositif n’aurait pas pu fonctionner sans le tra-ail des professionnels de l’ESAT qui ont accompagné etoutenu les participants à des moments clés, très anxio-ènes (première séance du GMT, consultation individuelle).ne fois affiliés, ils sont venus seuls. Nous pouvons égale-ent supposer que la présence d’un thérapeute connu desarticipants a facilité leur démarche. La filière de soinsevenait visible et facile à utiliser. Cette inscription danse soin semble attester de leur motivation et de l’alliancehérapeutique.

S’agissant d’une étude rétrospective, il nous manquees données qui permettraient de quantifier l’efficacitées actions individuelles entreprises. Enfin, nous n’avionsas mis en place d’outils évaluant la motivation maisous voyons, par la modification des stades de motivationTableau 4), l’augmentation de celle-ci.

onclusion

’idée selon laquelle les malades psychiatriques fumeursont hors de portée du soin s’avère inexacte dans ce GMT.lle est pourtant portée par les malades eux-mêmes. Il n’y

aucune raison de ne pas aborder la question tabagiquevec eux. Au contraire, l’idée que l’on est fumeur avant’être malade semble favoriser la responsabilisation. Leabagisme se révélant ne pas être aussi chronique que la

maladie », le changement redevient accessible, la moti-ation augmente. L’envie d’agir a été manifeste avec uneorte implication dans les expériences proposées entre leséances, des consultations qui ont concerné la majorité desarticipants avec une assiduité qui s’est maintenue et desevrages initiés.

L’étayage par l’institution avant, pendant et après le GMTst primordial pour créer et maintenir une dynamique deroupe, et ensuite soutenir la démarche individuelle.

Des études complémentaires sont nécessaires pouralider l’approche, notamment avec des effectifs plusmportants.

éclaration d’intérêts

es auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts enelation avec cet article.

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