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Environnement: contrainte ou opportunité?
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EN PRATIQUESOMMAIREN°36 - AVRIL 2010
Dossier
Environnement: contrainte ou opportunité?
Pour l’entreprise, la démarche vers le développement durable représente-t-elle une contrainte ou peut-elle se traduire en opportunités? Les deux, en fait: tout dépend de l’attitude retenue. Notre dossier explore des ré-
ponses positives.
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L’ambition de la Belgique ne peut se limiter à rattraper son retard
L a demande croissante d’énergie et la nécessité
absolue de réduire les émissions de CO2 contrai-
gnent tous les acteurs de la société à passer à la
vitesse supérieure et à agir. « L’effi cacité énergé-
tique est un élément clé de la réponse à apporter et donc un défi
central pour les prochaines décennies, souligne Thomas Leysen,
président de la Fédération des entreprises de Belgique (FEB). Les
investissements en effi cacité énergétique ont souvent un intérêt
économique évident mais leur potentiel se voit fréquemment
sous-estimé ou sous-exploité en raison de divers obstacles. »
À la demande de la FEB, McKinsey & Company a étudié la si-
tuation belge et a analysé comment notre pays pourrait de-
venir l’une des économies les plus effi caces en termes d’éner-
gie, d’ici à 2030. Dans de nombreux domaines, la Belgique
est à la traîne par rapport à ses voisins. La consommation
énergétique par mètre carré dans les bâtiments se révèle de
50% à 100% plus élevée, la consommation d’énergie du trafi c
routier est une des plus fortes et les améliorations de l’effi ca-
cité énergétique dans l’industrie sont importantes mais infé-
rieures de 40% à celles des meilleurs pays européens.
Dans son étude, McKinsey & Company ne se contente pas
de calculer les possibilités d’économies d’énergie en Belgique
mais avance aussi quelques pistes concrètes. De nombreu-
« Les entreprises vont devoir affronter des obligations, mais elles vont également rencontrer des opportunités de marché. »
FISCALITÉ DOSSIER : OPTIMISATION DES COÛTS
La combinaison de l’augmentation de la population, de la croissance économique globale et des modes de consommation hypothèque l’avenir de la planète. L’effi cacité énergétique constitue un élément essentiel de la solution à apporter dans le cadre de la lutte contre le changement climatique. C’est pourquoi la FEB a estimé qu’il était grand temps de se pencher sur la performance énergétique de notre pays… où McKinsey décèle un important potentiel d’amélioration.
FISCALITÉ DOSSIER
TEXTE : LAURENT CORTVRINDT
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ses entreprises belges ont déjà réalisé des efforts en matière
d’effi cacité énergétique au cours des dernières années. « Tou-
tefois, nous sommes convaincus que presque chaque entreprise
peut encore réaliser des économies d’énergie: rénovation des
bureaux, augmentation de l’effi cacité des transports de mar-
chandises et de personnes, optimalisation des processus indus-
triels… ». Le parc immobilier, le transport routier et l’industrie
représentent ensemble 90% de la consommation d’énergie
primaire totale de la Belgique.
L’étude McKinsey & Company montre que la Belgique pour-
rait réaliser, d’ici à 2030, une économie annuelle de 5,2 mil-
liards d’euros par le biais de mesures ambitieuses visant à
améliorer l’effi cacité énergétique (NB : cette économie sur la
facture énergétique varie en fonction du prix du pétrole entre
3,5 milliards et 10 milliards d’euros d’ici à 2030). La Belgique
pourrait donc diminuer de 29% sa consommation énergéti-
que attendue pour 2030.
Le potentiel d’économie le plus important se situe dans les bâ-
timents (48% de la consommation énergétique attendue en
2030), suivi par l’industrie avec 22% et par le transport routier
avec 21%. Selon les spécialistes de McKinsey, l’amélioration
de l’effi cacité énergétique génère non seulement des écono-
mies mais également d’autres avantages dont l’importance
est cruciale dans le contexte économique actuel: réduction
des émissions de CO2, accélération de la création d’emplois,
Thomas Leysen: « Les investissements en effi cacité énergétique ont souvent un intérêt économique évident mais leur potentiel se voit fréquemment sous-estimé ou sous-exploité en raison de divers obstacles. »
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nouveaux marchés pour les services et les produits et amé-
lioration de la compétitivité de notre pays.
QUATRE PISTESLe développement durable de notre industrie est un sujet
« chaud » à la FEB. « Les entreprises vont devoir affronter des
obligations, mais elles vont également rencontrer des oppor-
tunités de marché, explique Isabelle Callens, directeur du dé-
partement économique. La FEB met en avant ses industries
éco-innovantes, nous les présentons à chaque mission princière,
comme ce fut très récemment le cas en Inde. Les ‘green tech-
nologies’ constituent un des marchés sur lesquels on observe la
plus haute croissance, avec le secteur pharmaceutique et celui
de la santé. »
Selon Isabelle Callens, chaque entreprise va devoir entrepren-
dre une démarche vers le développement durable. « Pour amé-
liorer spontanément son image car si elle ne le fait pas, elle ris-
que sérieusement de perdre des parts de marché et de subir des
coûts. Les entreprises qui font des efforts vont recevoir un certain
nombre d’exemptions. C’est notamment le cas des entreprises
qui concluent des accords de branche. » L’étude McKinsey mon-
tre donc que le retour sur investissement est bien réel pour le
développement durable. Même s’il faut parfois attendre que
quelques années s’écoulent. Or, des entreprises mise à mal par
la crise et qui rencontrent parfois des diffi cultés à accéder au
crédit ne peuvent se permettre un tel luxe. Aussi, la FEB avance
une série de pistes prioritaires pour la Belgique, en vue d’une
économie plus performante sur le plan énergétique.
Premièrement, créer une « Green Bank » dont la vocation se-
rait de stimuler le fi nancement des projets visant à améliorer
l’effi cacité énergétique dans l’industrie. « Nous arrivons à la
fi n du travail préparatoire. Les différentes banques se montrent
prêtent à accorder un taux réduit pour ce qui touche aux in-
vestissements en matière d’effi cacité énergétique. Mais nous
demandons également aux régions que cette Green Bank puis-
se bénéfi cier de leur garantie, afi n de ne pas ajouter un risque
supplémentaire aux banques et une nouvelle charge aux en-
treprises. Mais le risque pour le gouvernement sera très faible
par rapport aux objectifs que l’on pourrait atteindre en termes
de réduction de CO2 et face aux bénéfi ces à tirer quand on peut
compter sur des entreprises plus saines, etc. »
NOUVELLE MENTALITÉDeuxièmement, les certificats énergétiques existants – qui
ne sont pour le moment obligatoires qu’en cas de vente ou
de location – doivent informer de façon suffisamment claire
non seulement de l’état actuel du bâtiment mais également
des mesures les plus efficaces et rentables pour l’améliorer.
Ils devront en outre indiquer le lien avec les incitants exis-
tants susceptibles d’encourager ce type d’investissements.
Un aperçu clair des économies d’énergie prioritaires peut en
effet inciter l’habitant à investir efficacement et à réduire
sa facture énergétique à terme. Pour atteindre cet objectif,
il convient de former un nombre suffisant d’experts. De
Isabelle Callens: « Les entreprises qui font des efforts vont recevoir un certain nombre d’exemptions. C’est notamment le cas des entreprises qui concluent des accords de branche. »
DOSSIER
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La démarche vers le développement durable pour les entre-
prises est-elle un risque ou une opportunité?
Roland Moreau (directeur général de la Direction générale
de l’environnement au Service public fédéral de la santé
publique, de la sécurité de la chaîne alimentaire et de l’en-
vironnement): « Les deux. Cela dépend en fait de l’attitude
des entreprises, qui répondent en faveur de l’un ou de l’autre
de manière très différente. L’écologie n’est pas une question
de mode. Si on considère la tendance sur le long terme, le
discours de Thomas Leysen, président de la FEB, est le bon:
la pression sur les ressources naturelles est évidente, nous
manquerons un jour de pétrole et le prix des énergies va
immanquablement continuer à grimper. L’entreprise vision-
naire, qui souhaite assurer sa survie et la durabilité de ses
activités à terme, doit absolument anticiper ces évolutions.
Continuer à développer des produits gros consommateurs
d’énergie ou dont les émissions polluantes seraient à la
limite de la norme n’a plus aucun sens. La crise pétrolière
étant passée par là, les entreprises ont commencé se mon-
trer attentive à leur consommation énergétique et essayent
de la réduire en se repositionnant sur le marché avec des
produits plus verts. L’entreprise qui n’a pas vu cette tendan-
ce arriver se retrouve hors-jeu. Souvent, le directeur fi nan-
cier a comme défaut de raisonner à court terme. La fi nance,
c’est fréquemment l’excitation du cours de bourse et des
chiffres quotidiens. Et parfois, le directeur fi nancier oublie
la vision à long terme et favorise le maintien d’une activité
parce que la marge est encore intéressante. Alors que pen-
dant ce temps, la concurrence a peut-être développé un
produit plus effi cace ou moins polluant qui rencontrera ou
encouragera des normes plus sévères. »
Au plus fort de la crise économique et fi nancière, des voix se sont
élevées contre le bien fondé de cette démarche volontariste…
Roland Moreau: « Face à la crise, certaines entreprises se
voient forcées de délaisser temporairement leur horizon
à 5 ou 10 ans pour assurer leur survie pour 2010. Dans ce
contexte, il est naturel que des normes environnementales
qui vont demander quelques investissements ou qui ris-
quent d’amener des pénalités soient vues négativement.
On observe par exemple qu’en France, une grande partie
des mesures du Grenelle de l’environnement, annoncées
exemplaires, sont reportées ou affaiblies. On veut sauver
l’emploi avant tout. Mais ceci ne change rien à la tendance
lourde à long terme et les vainqueurs de demain seront
ceux qui n’auront pas coupé dans leurs programmes d’éco-
innovation. Ce serait bien que les directeurs fi nanciers ap-
puient les services R&D dans ces moments plus diffi ciles. »
Les aides publiques sont malgré tout minimes…
Roland Moreau: « Au niveau fédéral, on note les aides à
la mise en circulation des véhicules faiblement émetteurs
de CO2. En Région fl amande, il existe certaines primes par
rapport à la directive éco-design de la Commission euro-
péenne et des encouragements à l’éco-innovation. Il est
évident que les primes sur les panneaux photovoltaïques
ont permis de développer un nouveau marché. Les certifi -
cats verts ont encouragé largement le développement des
énergies renouvelables, en particulier le parc éolien en Mer
du Nord. Les entreprises qui se sont mises sur ces créneaux
en ont bénéfi cié. Ce soutien à l’innovation ou aux énergies
renouvelables doit être cohérent et s’inscrire dans la durée.
Par contre, réduire soudainement ces primes constitue, à
mes yeux, un message négatif. Les entreprises apprécient
modérément les modifi cations de législation et ces ‘allers-
retours’, en particulier les directeurs fi nanciers qui aiment
pouvoir planifi er. Changer les règles du jeu en cours de route
se révèle très contre-productif: d’une part, on pénalise ceux
qui ont fait l’effort de se lancer dans une nouvelle activité et
d’autre part on décourage ceux qui voudraient tenter une
aventure similaire à l’avenir. »
« LE DIRECTEUR FINANCIER A SOUVENT COMME DÉFAUT DE RAISONNER À COURT TERME »
Roland Moreau: « Ce serait bien que les directeurs fi nanciers appuient les services R&D dans ces moments plus diffi ciles. »
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plus, les frais liés à ces certificats peuvent être fiscalement
déductibles et des mécanismes de financement sociaux
doivent être prévus.
Troisièmement, inciter les entreprises possédant un parc de
voitures de société à mener une « green car policy » (par exem-
ple: accorder la priorité à l’achat de véhicules moins énergi-
vores, encourager l’écoconduite). Au niveau du parc automo-
bile, d’importants efforts peuvent encore être fournis en vue
de réduire la consommation d’énergie. La fi scalité verte peut
être une solution à cet égard. La FEB est également convaincue
que la Belgique possède les atouts requis pour devenir leader
dans le domaine de l’électrifi cation du parc de véhicules. Une
percée dans ce domaine devrait s’accorder parfaitement avec
des initiatives sectorielles et régionales tournées vers l’avenir.
Une initiative écologique ambitieuse pourrait dès lors fournir
un nouvel élan à notre secteur automobile.
Enfi n, quatrièmement, la Belgique ne pourra mettre à profi t
de manière optimale son énorme potentiel en matière d’effi -
cacité énergétique qu’au prix d’un changement fondamental
des mentalités et des comportements. L’enseignement revêt
un rôle crucial à cet égard. C’est pourquoi la FEB estime que
l’enseignement secondaire doit veiller à une sensibilisation
effi cace et que la formation à l’effi cacité énergétique doit
être rendue obligatoire, tant dans l’enseignement technique
que dans l’enseignement supérieur.
Pour Thomas Leysen, l’ambition de la Belgique ne peut se
limiter à rattraper le retard encouru en matière d’effi cacité
énergétique. « Nous devons placer la barre plus haut et de-
venir l’une des économies les plus performantes sur le plan
énergétique. L’effi cacité énergétique concerne non seulement
les différents niveaux de pouvoir mais est aussi essentielle pour
de nombreux secteurs. Une approche coordonnée est dès lors
absolument nécessaire. » Pour Isabelle Callens, les techno-
logies vertes sont l’avenir de la Belgique et de l’Europe qui
ne peuvent se permettre de rater ce train. « Nous essayons
de sensibiliser les consciences en montrant les bons exemples,
comme Colruyt, qui a signifi cativement investi dans l’effi ca-
cité énergétique avec un ROI très rapide. Face aux objectifs
de Kyoto et post-Kyoto, face à la taxe carbone qui ne saurait
tarder, nous plaidons pour que les entreprises qui usent des
meilleures technologies soient exemptées de taxes, pour éviter
toute délocalisation. »
« Presque chaque entreprise peut encore réaliser des économies d’énergie. »
DOSSIER
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Les choses bougent en Wallonie
E nergy Pooling est un service offert au sein de
chaque Chambre de Commerce et d’Industrie
de Wallonie. Pour toutes les provinces, il est
subventionné par la Région Wallonne (sauf
pour la province de Liège où l’Europe intervient). Energy Pooling
propose donc ses services gratuitement. Son objectif consiste
à aider les entreprises à diminuer leurs factures énergétiques
de manière rationnelle. « Toutes les entreprises wallonnes, acti-
ves dans l’industrie ou le tertiaire, peuvent nous contacter, ex-
plique Samantha Straet, conseillère énergie de la CCI Connect
Namur. Seule obligation: être implanté sur le sol wallon. »
FORMATION ET SUIVIEnergy Pooling est reconnu comme facilitateurs industrie. « Ce
qui signifi e que nous pouvons représenter la Région wallonne
sur cette thématique, en tant qu’experts. Nous respectons donc
une totale neutralité par rapport aux fournisseurs et ne privi-
légions jamais arbitrairement une solution au détriment d’une
autre. Notre travail vise à encourager les organisations hésitan-
tes à entreprendre une démarche d’économie d’énergies. » Pour
y parvenir, Energy Pooling travaille sur trois axes: l’information,
la formation et répondre aux questions qu’une entreprise peut
se poser en termes d’économie d’énergie.
L’information est véhiculée à travers deux canaux. Le premier
concerne des conférences intitulées « Tribunes énergie ». Il s’agit
de conférences techniques portant sur un sujet bien précis, com-
me le froid ou l’éclairage… « En règle générale, durant une demi-
journée, un professionnel vient expliquer le principe de fonctionne-
ment d’une thématique. Ensuite, nous proposons une visite au sein
d’une entreprise qui a réalisé l’investissement dont il est question.
Nous privilégions les débats entre pairs. En d’autres mots: un entre-
preneur qui parle à des collègues. La thématique doit rester compré-
hensible et la visite doit servir d’exemple à suivre. » Les participants
aux Tribunes ne deviendront donc pas des spécialistes en pom-
pes à chaleur ou en éclairage à la fi n de la conférence. « Mais nous
espérons leur donner envie de progresser dans leur réfl exion. »
Le second canal d’information prend la forme de fi ches techni-
ques et de fi ches investissement. Les fi ches techniques abordent
un thème précis en quatre pages. Deux pages sont adressées aux
fi nanciers et deux pages se destinent aux techniciens. Elles re-
prennent les coûts, les retours, les primes disponibles et des trucs
et astuces pour résoudre les problèmes les plus courants. Les
Le réseau des Chambres de Commerce et d’Industrie de Wallonie, en collaboration avec la Région Wallonne, a mis sur pied le projet Energy Pooling Wallonie. Son objectif: soutenir les entreprises dans leurs démarches de maîtrise et de réduction des factures énergétiques, en agissant simultanément sur la production et la consommation rationnelle. Une aide précieuse… et surtout gratuite.
TEXTE : LAURENT CORTVRINDT
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Procéder à des économies d’énergie, utiliser ou produire des éner-
gies renouvelables, c’est une bonne chose. Mais pour une entre-
prise, encore faut-il que la démarche prouve sa rentabilité fi nan-
cière, surtout en période de crise! Deli XL, soutenue par Energy
Pooling, en a fait l’heureuse expérience.
Deli XL, entreprise de distribution spécialisée dans le food service,
a vu le jour en 1918. Depuis, la fi rme s’est fortement développée
et propose comme atout principal une offre multi température.
Deli XL compte deux sièges d’exploitation, en Wallonie à Thuin
et en Flandre, à Kruibeke. Plus de 450 personnes y travaillent
pour 4.500 clients, dont les principaux sont actifs dans la cuisine
de collectivité dans les secteurs commercial (parcs de loisirs, hô-
tels, chaîne de restauration rapide…), social (hôpitaux, homes,
écoles…) et privé (grossiste, traiteur…), en Belgique comme au
Grand-duché du Luxembourg.
Le concept logistique de Deli XL s’articule autour de trois axes,
dans un objectif d’effi cacité et de rapidité. Une méthode de
gestion spécifi que, une offre multi température permettant de
ne passer qu’une commande et un transport adapté assurant
une seule et unique livraison. La sécurité alimentaire prend éga-
lement place au cœur des préoccupations de l’entreprise avec
l’obtention de la certifi cation Iso 22.000. Soucieuse de préserver
l’environnement en réduisant ses émissions de CO2, de réduire
ses consommations d’énergie et de diminuer par conséquent
ses factures d’énergie, Deli XL a mis en place, depuis 2008, un
ambitieux programme « Energy Saving » d’utilisation rationnelle
de l’énergie et de protection de l’environnement.
« Il faut savoir que notre empreinte écologique n’est pas négligea-
ble, souligne Philippe Delsaert, Operation Director et respon-
sable du projet ‘Energy Saving’. Notre consommation annuelle
d’électricité s’élève à 6 millions de kWh. Soit l’équivalent de la
consommation électrique annuelle de 2000 ménages. Pour le gaz,
nous dépassons les 150.000 m3, soit la consommation annuelle de
45 ménages. Enfi n, nos 110 camions de transport ont besoin d’un
million de litres de gasoil tous les 12 mois. » Procéder à des écono-
mies d’énergie, utiliser ou produire des énergies renouvelables,
c’est une bonne chose. Mais pour un entrepreneur et pour son
activité, encore faut-il que la démarche prouve sa rentabilité
fi nancière, surtout en période de crise! « Aussi, nous avons fait
appel au service Energy Pooling de la CCIH, afi n de structurer et
faciliter la mise en œuvre de notre programme. »
AUDIT INTERNEDans un premier temps, Philippe Smekens, conseiller énergie à
la CCIH, a fourni toute la documentation nécessaire à l’évalua-
tion des solutions et des incitants fi nanciers concernant l’uti-
lisation rationnelle de l’énergie et l’utilisation des énergies re-
nouvelables pour Deli XL. Il a ensuite rassemblé une équipe de
spécialistes, « partenaires » potentiels (comptabilité énergéti-
que, confi guration et optimalisation de la gestion du froid, bu-
reau de projet, auditeur agréé et spécialiste en formation audit
énergétique, contrôle d’isolation d’enveloppes de bâtiments
par thermographie infrarouge…) du plan « Energy Saving ».
« Energy Pooling nous a aussi proposé de suivre l’évolution de
nos investissements. La première étape du projet, en 2008, a vu
l’analyse de nos factures d’énergie et la comptabilisation des
consommations des postes les plus énergivores: la production
de froid ainsi que l’éclairage et le chauffage de milliers de m2 de
halls. La deuxième étape, en 2009, consistait en la formation à
l’audit énergétique d’un responsable technique de Deli XL, afi n
qu’il puisse non seulement établir le bilan énergétique du site de
Thuin mais aussi établir, réaliser et suivre les pistes de réduction
de consommation d’énergie en connaissance de cause. » Enfi n,
la troisième étape, de 2009 à 2010, a veillé à établir un plan
d’investissement sur base des résultats de la formation (37 pis-
tes d’amélioration URE rentables ont été mises en évidence) et
du retour sur investissement. Quatorze pistes ont été retenues
pour la phase 1, avec un ROI inférieur à 1 an.
100.000 € D’ÉCONOMIECes pistes concernent essentiellement l’amélioration du pro-
cessus de dégivrage des évaporateurs, le contrôle électronique
des éléments motorisés des groupes de froid en fonction de
la demande, la récupération de calorie sur les groupes de froid
(désurchauffe), l’amélioration de l’isolation des accès (50 por-
tes d’embarquement) des halls réfrigérés et l’utilisation ration-
nelle de l’éclairage des halls en fonction de leur activité. Cette
première phase permettra la réduction d’émission de 500 ton-
nes de CO2, la réduction d’un équivalent énergétique de 2,5
millions de kWh et l’économie de plus de 100.000 € par an.
« La quatrième étape verra, en 2010, la réalisation des investis-
sements sous contrôle d’un bureau d’étude et l’évaluation des
résultats. Le bénéfi ce réalisé pourra servir de fonds d’investis-
sement pour la phase 2, à savoir la réalisation des pistes à plus
grand retour sur investissement. Enfi n, un volet complémentaire
de sensibilisation du personnel à l’éco-consommation sera mis
en place dans la phase 1, grâce à un programme de communica-
tion interne. Avec comme but de rendre le personnel d’avantage
conscient et acteur du programme d’économie d’énergie. »
Parallèlement au programme « Energy Saving », des démar-
ches environnementales sont mises en places : participation
au Club Environnement organisé en 2010 par la CCIH; pro-
jet d’utilisation de l’eau de pluie (20.000 m2 de toit) pour les
sanitaires, l’eau de lavage des conteneurs de produits surge-
lés et l’eau de lavage d’une future station de nettoyage des
camions; projet de participation citoyenne à un parc éolien;
projet de valorisation énergétique de déchets, etc. « Deli XL
n’attend pas la relance économique pour investir dans l’éco-
nomie d’énergie et la protection de l’environnement. Ce genre
d’investissement est très rentable! »
« CES INVESTISSEMENT SONT TRÈS RENTABLES »
DOSSIER
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fi ches investissement, quant à elle, compilent, en un recto-verso,
un investissement réalisé par une entreprise. « Elles expliquent le
projet suivi et précisent la durée du retour sur investissement. »
Les formations assurées par Energy Pooling ont pour but d’ap-
prendre à une ressource interne d’une organisation à se doter
d’outils pour réaliser son propre audit énergétique et gérer la
consommation énergétique de son entreprise. « Nous visons plus
particulièrement les entreprises qui ne disposent pas de moyens
fi nanciers nécessaires pour investir dans un audit énergétique tra-
ditionnel. Ces formations industries et audit tertiaire se déroulent
sur cinq demi-journées. Nous enseignons une partie théorique et les
exercices pratiques se basent sur l’entreprise de chaque participant.
De la sorte, à la fi n de la formation, les participants possèdent déjà
une ‘photo’ de leur consommation et des pistes d’amélioration. Ils
ont déjà réalisé l’audit de leur entreprise. »
Enfi n, les entreprises peuvent poser leurs questions à Energy Poo-
ling. Notamment par téléphone si elles touchent aux primes, aux
investissements, etc. « Parallèlement, nous développons de plus
en plus un autre service, appelé ‘pré-check energy’. Nous nous ren-
dons dans une entreprise pour procéder à son diagnostic énergéti-
que. Après cette visite, nous fournissons un rapport qui reprend les
points d’attention, les problèmes décelés, les pistes d’amélioration,
les incitants fi nanciers liés et une estimation du retour sur investis-
sement. Et bien entendu, par après, nous accompagnons les entre-
prises qui le souhaitent. Et si possible, nous parlons de leurs actions
pour montrer que les choses bougent en Wallonie. »
Philippe Delsaert: « Procéder à des économies d’énergie, utiliser ou produire des énergies renouvelables, c’est une bonne chose. Mais pour un entrepreneur et pour son acti-vité, encore faut-il que la démarche prouve sa rentabilité fi nancière, surtout en période de crise! »
Certaines entreprises wallonnes n’hésitent pas à investir
pour réduire leurs factures d’énergie et par conséquent
diminuer leur impact sur l’environnement. A Gilly, l’impri-
merie Bietlot a fait baisser sa consommation d’électricité
de 58% en remplaçant son système d’éclairage intérieur…
Exemple d’une fi che Energy Pooling.
Imprimerie Bietlot : Remplacement du système d’éclairage intérieur
Activité: Imprimerie plano
CA: 13 M €
Effectif: 66 personnes
Nature de l’opération: Amélioration photométrique de l’éclai-
rage et diminution de la puissance installée.
Concrètement, l’entreprise a remplacé 185 luminaires de type T8,
munis chacun de deux lampes de 58W, par 147 luminaires de
type T5, munis de deux tubes de 35W. Avant les travaux, les lu-
minaires industriels étaient dotés de réfl ecteurs laqués blancs. Ils
sont désormais équipés de réfl ecteurs lisses en aluminium poli.
L’entreprise a également procédé au remplacement de ses bal-
lasts ferromagnétiques par des ballasts électroniques. Au fi nal, la
puissance installée après travaux est de 0.94W/m²/100 lux.
Bilan énergétique de l’opération
- Consommation en 2008: 159.590 kWh d’électricité
- Consommation en 2009: 66.679 kWh d’électricité
Gains de l’opération
- Economies d’énergie: 92.000 kWh/an (soit 58% d’écono-
mie d’énergie sur la consommation électrique)
- Réduction des émissions de gaz à effet de serre 37 tonnes
de CO2
/ an
- Impact humain: amélioration de la productivité et de la
sécurité du personnel
Les chiffres clés
- Temps de retour sur investissement: 47 mois
- Temps de retour sur investissement (avec subsides): 35 mois
(L’entreprise a bénéfi cié de la prime du fonds énergie n°22
- Remplacement du système d’éclairage intérieur. La réduc-
tion de ses consommations électriques étant supérieure à
50%, la prime s’est élevée à 30% du montant de la facture
– montant maximal de la prime = 10.000 €. L’imprimerie a
également pu bénéfi cier d’une déduction fi scale équivalant
à 15,5% du montant de la facture.)
58% D’ÉCONOMIE
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Comment réaliser le bilan environnemental d’une organisation?
Marc Bosmans: « Tout dépend du type de secteur concerné.
La réponse à apporter pour une activité administrative se
révèlera totalement différente de celle destinée à une acti-
vité de production industrielle. Les liens avec les fournisseurs
et les clients ne sont pas les mêmes, la taille des structures
varie, etc. La structure de l’organisation est-elle très hiérar-
chisée, avec une communication très rigide? C’est souvent le
cas dans les grandes entreprises. Dans les PME, par contre,
la communication écrite est beaucoup moins fréquente. Tout
se passe à l’oral et dès lors, on travaille davantage par habi-
tude plutôt qu’en suivant des procédures. Et donc, l’approche
du bilan environnemental variera fondamentalement. »
Ce qui signifi e, plus techniquement?
Marc Bosmans: « Il faut d’abord faire la différence entre une
démarche environnementale et le développement durable, au
scope beaucoup plus large, avec notamment le volet respon-
sabilité sociétale qui intervient. En pratique, nous travaillons
essentiellement sur l’environnemental. On distingue principale-
ment trois approches, selon la demande du client. La première,
élémentaire, est une analyse rapide qui permet de comprendre
l’impact d’une entreprise sur l’environnement. Il faut d’abord
mesurer un impact pour ensuite le comprendre et par après es-
sayer de le diminuer. C’est le seul bon chemin à suivre. Il peut
s’agir d’un bilan carbone où on répertorie tous les impacts
environnementaux pour les traduire, pour une grande partie,
en émissions carbone. Le bilan carbone propose l’avantage de
reprendre tous les impacts, directs et indirects, de l’entreprise:
la consommation d’énergie, les transports, les achats, les pro-
ductions de l’entreprises mises sur le marché. Cet outil est très
demandé par les entreprises qui cherchent à communiquer en
interne avec leurs employés ou vers l’extérieur. Techniquement,
la démarche n’est vraiment pas très contraignante. La deuxième
approche est menée pour des organisations qui doivent faire
face à une consommation énergétique très élevée. Les respon-
sables ont généralement déjà fait une première approche et
souhaitent travailler spécifi quement sur les énergies parce que
c’est un levier facile à actionner pour générer un revenu. Nous
nous dirigeons alors directement vers un audit énergétique,
une analyse ‘pure et dure’ d’ingénierie et de gestion d’un bâti-
ment, afi n d’imaginer des pistes d’amélioration. Enfi n, troisième
approche: la mise en place d’un système de management en-
Le bilan environnemental est une approche analytique et systématique qui prend en compte les relations entre les différents éléments, leurs effets réciproques ainsi que les effets de compensation, de synergie et d’antagonisme. Génère-t-il un réel bénéfi ce pour l’entreprise? Peut-être. Mais pas immédiatement. Entretien avec Marc Bosmans, Head of Department Sustainable Organisations chez RDC-Environment.
Mesurer, pour comprendre et agir
FISCALITÉ DOSSIER
TEXTE : LAURENT CORTVRINDT
« Une entreprise certifi ée ISO ou EMAS est garantie de pouvoir compter sur un management environnemental effi cace. »
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vironnemental. Soit les certifi cations EMAS et ISO 14001 ou le
label Entreprise éco-dynamique, uniquement à Bruxelles. Dans
ce cas, nous allons coacher les entreprises pour les obtenir. Très
important: la démarche doit venir de l’interne car un groupe de-
vra y soutenir le projet. »
Quel retour sur investissement peut-on espérer?
Marc Bosmans: « Deux types de retours sont à calculer. Le pre-
mier concerne l’investissement fondamental que l’entreprise
voudra engager. Ici aussi, il varie fort d’une action à l’autre et
selon les entreprises. Tout dépend de l’effi cacité énergétique
dont peut déjà témoigner l’entreprise quand nous arrivons. Si
elle travaille déjà bien, le ROI peut se révéler rapide et impor-
tant. Si tout est encore à construire, il faudra forcément atten-
dre un peu. La rentabilité de la mise en place d’un système de
management environnemental est délicate à calculer car l’en-
treprise va apprendre à fonctionner autrement. Une série de
gains ne pourront pas forcément être mis en relation directe
avec les actions entreprises. Sur ce premier type de ROI, un
client grand consommateur d’énergie m’a expliqué avoir récu-
péré la somme investie en deux mois. Le second ROI concerne
le conseil que nous donnons en tant que tel. Si nous proposons
de changer de chaudière lors d’un audit énergétique, le ROI
sera immédiat et chiffrable. Soulignons néanmoins que nous
possédons uniquement un rôle de conseil, et non décisionnel.
Il faut donc que l’audit soit suivi d’actes pour mesurer un chan-
gement. Suite à des propositions issues d’un bilan carbone, le
ROI se mesure immédiatement sur les factures. »
Dès lors, quels intérêts des labels pour le responsable fi nancier?
Marc Bosmans: « Un premier type de label concerne les pro-
duits et ‘touche’ plus particulièrement les départements en-
vironnement, design ou marketing. L’intérêt est essentielle-
ment commercial (B2C). Se voir attribuer un label de qualité
biologique ou de commerce équitable touche une part de plus
en plus importante des consommateurs. Concernant l’appro-
che organisationnelle, les certifi cations et labels généraux
se révèlent relativement peu nombreux. EMAS, ISO 14001
et Entreprise éco-dynamique prouvent qu’une entreprise a
mis en place un système de management environnemental.
Cela signifi e que l’entreprise a établi un système pour arriver
d’un problème environnemental à une solution, en s’inscri-
vant dans une démarche d’amélioration continue. Ces labels
sont-ils importants, fi nancièrement parlant? Relativement
peu, hormis dans des secteurs plus spécifi ques où ils sont
exigés pour décrocher un marché, comme par exemple de
plus en plus souvent pour les marchés publics ou européens.
Notons qu’au niveau de l’affi chage du bilan environnemen-
tal des produits, l’approche est différente et ce sont les stan-
dards de la méthode de l’Analyse du Cycle de Vie (ISO 14040 et
14044 :2006) qui doivent être suivis. Cette approche ‘produit’
fait l’objet d’un autre département au sein de RDC qui accom-
pagne les entreprises dans leur démarche d’éco-conception
et de communication sur les impacts de leurs produits. »
Quelles différences entre ces trois certifi cats?
Marc Bosmans: « Le label Entreprise éco-dynamique est de
loin le moins sévère et le moins contraignant. Il ne vise pas
toute la roue de Deming (Plan-Do-Check-Act). Seuls ‘plan’ et
‘do’ sont considérés. Le ROI y est donc beaucoup plus rapide.
Surtout parce que l’investissement humain est relativement
limité. Il faut compter 2,5 jours de consultance pour sa mise
en place, en sachant que 2,5 jours de consultance sont payés
par le Région de Bruxelles-Capitale. EMAS et ISO 14001 exi-
gent de plus gros budgets de certifi cation et d’accompagne-
ment. Rien ne sert de mettre les trois en route et de se doter
de trois systèmes de management. Pour une PME, je dirais que
le label Entreprise éco-dynamique suffi t car mieux adapté. Il
permet d’ailleurs de passer par après vers une certifi cation
ISO ou EMAS. Les audits de contrôle ont lieu tous les trois ans
et ne coûtent presque rien. Les suivis d’ISO 14001 ou d’EMAS,
annuels quant à eux, exigent un audit externe beaucoup plus
poussé. Et la facture sera forcément plus lourde. Mais une en-
treprise certifi ée ISO ou EMAS est garantie de pouvoir comp-
ter sur un management environnemental effi cace. »
Marc Bosmans: « Il faut d’abord mesurer un impact pour en-suite le comprendre et par après essayer de le diminuer. C’est le seul bon chemin à suivre. »
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Comment met-on en place ce management environnemental?
Marc Bosmans: « Il s’agit en premier lieu de déterminer la direction
souhaitée. Ensuite, nous analysons les impacts directs (consom-
mation énergétique, fl otte automobile, rejets d’eau, émission de
bruit, etc.) et indirects (déplacement domicile-travail, produits mis
sur le marché, fournisseurs, etc.). Sur cette base, nous élaborons
un plan d’action. Celui-ci commence par le contrôle de la législa-
tion environnementale, à savoir est-ce que l’entreprise est en or-
dre avec toutes les obligations de la législation environnementale.
Ce n’est quasiment jamais tout-à-fait le cas. Après, nous mettons
en place le système de management à proprement parler. Cette
étape passe par la rédaction de la politique environnementale, la
défi nition des responsabilités, la mise en place de procédures spé-
cifi ques aux différents métiers de l’organisation, les procédures
en cas d’accidents, le système de documentation, etc. Nous es-
sayons toujours de nous greffer sur les documents déjà existant.
Pour EMAS ou ISO14001, il faut compter de six mois à un an et un
total d’une trentaine de jours, toutes personnes confondues, que
les collaborateurs de l’entreprise devront accorder au consultant
pour que celui-ci puisse mener son travail à bien. » (NDLR: estima-
tion pour une PME, selon la taille de l’entreprise, la durée peut se
révéler sensiblement plus longue).
Le groupe Martin’s Hotels compte onze enseignes en Bel-
gique. Son crédo: une « gestion familiale » créative, atten-
tive au bien-être de chacun et respectueuse du patrimoi-
ne. John C. Martin, propriétaire et créateur du groupe, est
particulièrement sensible au respect de l’environnement.
Aussi, depuis quelques semaines, Martin’s Hotels a décidé
de structurer ses actions par la mise en place d’un manage-
ment environnemental, en se donnant un an pour décro-
cher la certifi cation EMAS. Un groupe de travail comprenant
un représentant de chaque hôtel et des principaux services
centraux a été mis sur pied.
But de l’opération: mettre en place une déclaration envi-
ronnementale qui reprend les différents niveaux où chaque
individu peut agir individuellement et pour la collectivité.
« L’objectif de notre démarche consiste à réduire l’impact en-
vironnemental du groupe mais sans mettre à mal la société
et sans risques pour l’emploi, explique Laurent Stroobants,
general manager du Martin’s Central Park à Bruxelles. Com-
me dans une maison, notre groupe peut agir sur différents
thèmes. Toutefois, nous ne pouvons pas attaquer tous les
fronts simultanément. Mais désormais, les investissements
prennent l’environnement en considération : tri des déchets,
remplacement progressif des ampoules, calcul des émissions
carbone des hôtels et du parc automobile, etc. La consultance
apporte bien entendu des frais mais chaque action entreprise
génère un ROI garanti estimé entre 3 et 6 mois, dans un pre-
mier temps. Soit un investissement tout à fait cohérent, sans
mettre en péril la trésorerie. »
D’autant plus que les gestes simples se cachent parfois là
où on ne les attend pas. Saviez-vous, par exemple, qu’un
mètre de tuyauterie de chauffage non isolée équivaut cha-
que jour, en perte d’énergie, à une ampoule qui brûle durant
24 heures? Instaurer un management environnemental
requiert, naturellement, un vrai volontarisme. « Mais avec
un peu d’information, le personnel se sent très vite impliqué.
Plus le temps passe, plus nous allons réduire notre impact
environnemental et donc faire baisser notre consommation.
Spontanément, nous avons également décidé de compenser
les émissions carbone des séminaires résidentiels au sein de
nos hôtels. Ceci afi n de témoigner de la dynamique générale
qui anime l’entreprise. » Un autre investissement. Mais éga-
lement un excellent produit d’information qui génère une
image de marque.
COMPENSATION CARBONE CHEZ MARTIN’S HOTELS
« La démarche doit venir de l’interne car un groupe devra y soutenir le projet. »
Laurent Stroobants: « La consultance apporte bien en-tendu des frais mais chaque action entreprise génère un ROI garanti estimé entre 3 et 6 mois, dans un pre-mier temps. Soit un investissement tout à fait cohérent, sans mettre en péril la trésorerie. »
DOSSIER
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Q uand Cameleon quitte l’avenue Georgin, à
Evere, la direction se met à la recherche d’une
nouvelle implantation en Région bruxelloise
afin de faciliter l’accès aux usagers des trans-
ports en commun, cyclistes et piétons, qu’ils soient clients
ou membres du personnel. Cameleon veut également s’im-
prégner dans son quartier et participer à un projet de ville,
entre autres en ouvrant une crèche communale pour 39
enfants et en rendant ses terrasses et cafétéria accessibles
aussi en dehors des jours d’ouverture du magasin. Le terrain
rêvé est déniché avenue Ariane, à Woluwe-Saint-Lambert.
La machine est lancée.
Le nouveau magasin eco-construit de Cameleon à Woluwe fait l’unanimité. Véritable réussite architecturale, cet espace commercial harmonieux prouve, en chiffres, que l’éco-construction peut soutenir le business. Le surcoût « vert » et sociétal du projet est estimé à 16%. Mais, en moins d’un an, le chiffre d’affaires a augmenté de 40%.
Cameleon a réalisé une prouesse de bon sens
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Cameleon veut innover et, surtout, intégrer la dimension
environnementale à chaque étape du travail de conception,
de développement et de réalisation du projet. D’un terrain
vague émergent rapidement 17.000 m², pour un investisse-
ment global de 15 millions d’euros « clé sur porte ». Sur ces
15 millions, Augustin Wigny, administrateur délégué, consi-
dère que 16% sont liés à l’environnement. Soit un « surcoût »
de 2,5 millions d’euros qui éviteront l’émission de 7.250 ton-
nes de CO2 sur une période de 30 ans. Ces 2,5 millions se ré-
partissent en trois « types » d’investissements.
COHÉRENCE ÉCOLOGIQUE Premièrement, des investissements réducteurs de consom-
mation de CO2: isolation optimale, équipements électriques
et chaudières performantes, ventilation naturelle… Ils repré-
sentent environ 50% du surcoût. « Sur base des prix actuels
des énergies, nous considérons un temps de retour de 10 ans,
explique-t-il. In fi ne, cet investissement se révèle donc raison-
nable car on peut estimer que les prix des énergies vont conti-
nuer à augmenter. Nous devrions économiser au minimum
100.000 euros d’énergie chaque année. »
Le deuxième type d’investissement se révèle plus marginal
et concerne les énergies renouvelables: eau chaude solaire et
panneaux photovoltaïques. L’installation de panneaux produit
14.000 kWh, soit l’équivalent de quatre ménages bruxellois et
de 5% à 10% des besoins du bâtiment Cameleon, dépendant
des mois de l’année et des exigences en électricité. « A la base,
le rendement est très largement négatif avec un ROI estimé sur
25 ans. Mais, grâce à l’intervention de l’Etat, avec les certifi cats
verts et les subsides, le ROI tombe à 10 ans. Le photovoltaïque
est raisonnable uniquement avec ces subsides. »
Enfi n, les derniers 50% touchent aux investissements de
« cohérence écologique »: une toiture verte, des ruches, des
moutons, etc. « Nous ne calculons aucun rendement, si ce n’est
un retour marketing et une expérience du client. Aussi, nous
considérons que nous pouvons allouer 0,5% de notre CA à ce
budget. Et sur base du succès du centre commercial, nous es-
timons un ROI entre 8 et 10 ans. Il s’agit d’une dépense à mi-
chemin entre le marketing et la CSR. »
+20% ET +40%En partant d’un terrain vague, Augustin Wigny et son équipe
décident de relever un triple défi : construire un espace com-
mercial sans air conditionné, privilégiant la lumière naturelle
et où la circulation verticale s’effectue essentiellement grâce
à des escaliers. « Nous souhaitions casser le paradigme des cen-
tres commerciaux ‘boites à chaussures’, fermés et noirs, où on
coupe les sens aux clients, avec une lumière et un air contrôlés et
des escalators pour la circulation verticale. Bien sûr, nous étions
un peu effrayés: est-ce que le client allait suivre la démarche? »
Commercialement parlant, les nouvelles sont plutôt ras-
surantes. Le client semble décontracté, il ne reste pas plus
longtemps dans le bâtiment, mais il y dépense davantage.
Le ticket moyen a, en effet, augmenté de 20%. Bien entendu,
de nombreux éléments entrent en considération: l’offre, le
service, la géographie, la zone de chalandise, etc. « Mais il y
a également cette expérience de marché d’où l’on revient tou-
jours en s’étant fait plaisir. L’ambiance détendue semble favo-
riser l’acte d’achat. » Le succès commercial est en tout cas au
rendez-vous puisque Cameleon connaît une forte croissance
depuis son ouverture à Woluwé-Saint-Lambert. En dix mois,
le CA a augmenté de 40%. Et l’enthousiasme général se re-
fl ète également du côté du personnel chez qui on remarque
une baisse de l’absentéisme.
DES PARTICULARITÉS De son aventure, Augustin Wigny retient plusieurs « key lear-
nings ». Dès le début, l’environnement a occupé les débats. « Il
ne s’agissait pas de venir mettre une petite touche verte après
le gros œuvre. Nous avons veillé à l’orientation du bâtiment, à
la hauteur du puits de lumière pour créer un effet de chemi-
née et de tirage afi n d’aérer naturellement le bâtiment… Nous
avons reçu le terrain le 26 mars 2006. La première réunion avec
les architectes a eu lieu le 29 mars. Nous avons ouvert moins
de trois ans plus tard. Prendre l’environnement en considéra-
tion ne ralentit pas un chantier. Mais il faut conserver une co-
hérence dans la démarche. »
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Augustin Wigny: « Cet investissement se révèle raisonnable car on peut estimer que les prix des énergies vont continuer à aug-menter. Nous devrions économiser au minimum 100.000 euros d’énergie chaque année. »
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Par exemple, tous les entrepreneurs ont signé une charte.
« Pourquoi est-ce important? Imaginez qu’un entrepreneur
prenne du retard et commande certaines pièces par avion pour
gagner du temps et éviter les pénalités. Nous ne voulions pas de
matériaux qui suintent le kérosène. C’eut été en totale contradic-
tion avec la philosophie du projet. » Deuxième « key learning »:
du début projet à la fi n de la construction, les acteurs n’ont pas
changé. Cameleon est à la fois développeur du projet et exploi-
tant des surfaces. Il n’y a pas eu de transferts ou de monétisa-
tion du risque, par exemple entre le propriétaire du terrain, le
développeur, le propriétaire du bâtiment et l’exploitant.
« Or, nous avons abordé de nombreuses thématiques. Par
exemple, pour refroidir le bâtiment, l’utilisation de la fraîcheur
de la nuit et d’un courant d’air créé grâce à un système d’ouver-
ture mécanique des fenêtres fait, naturellement, légèrement
bouger les vêtements. Il y a donc un impact sur le système
de sécurité. S’il fallait leaser le bâtiment à un tiers, expliquer
cette particularité amènerait forcément une discussion sur le
prix du loyer. Autre point important: si nous avions demandé à
un tiers de développer le projet pour nous, nous n’aurions sans
doute pas assisté à toutes les réunions. Le résultat ne serait
certainement pas identique. Et par rapport aux projets où plu-
sieurs intervenants négocient simultanément, le regard d’un
seul acteur pour la prise de décision n’engendre pas les mêmes
implications fi nancières ou en termes de risque. »
PEU D’AIDESTroisième « key learning »: Augustin Wigny caractérise sou-
vent le bâtiment éco-construit comme « une prouesse de bon
sens ». « Nous n’avons pas utilisé de technologie révolution-
naire », explique-t-il. L’orientation de la construction a été
étudiée pour optimiser son exposition au soleil, l’éclairage
naturel a été privilégié, etc. « Ces vieilles recettes d’architec-
ture ont prouvé leur effi cacité au fi l des siècles. Néanmoins,
soutenir le bon sens tout au long d’un projet de cette dimen-
sion n’est pas chose aisée. Il faut faire preuve de vigilance pour
casser les points de repère et les paramètres fi xés par le secteur
de la construction. Malgré notre démarche environnementale
permanente, le bâtiment présente un surplus de 30% en puis-
sance électrique. L’ensemble des ingénieurs et des électriciens
ont, en effet, tous pris leur marge de sécurité. Je n’ose imaginer
le surplus pour un bâtiment standard… C’est un véritable gâ-
chis énergétique! »
Cameleon a reçu plusieurs distinctions pour son travail. No-
tamment le Prix Fedis de l’Espace commercial le plus réussi
de Belgique et la récompense bruxelloise du Bâtiment exem-
plaire en énergie et éco-construction. Mais l’écologie appor-
te-t-elle de la valeur à un bâtiment? C’est-à-dire, en termes
immobilier, est-ce qu’un locataire potentiel serait prêt à
payer un loyer plus élevé? « Nous pensons que oui. Car, très
clairement, la consommation énergétique sera bien plus basse.
En outre, les normes de revente et de cession des bâtiments
vont certainement se renforcer. Actuellement les audits éner-
gétiques sont purement informatifs. Mais la transmission du
bâtiment sera certainement bien vite liée à des obligations
énergétiques. Nous avons anticipé ces normes. Enfi n, l’argu-
ment marketing n’est pas négligeable. Le public et les médias
y sont réceptifs. »
Néanmoins, les aides sur lesquelles Augustin Wigny a pu
compter sont plutôt maigres. La Région de Bruxelles-Capitale
a participé à hauteur de 200.000 € pour le bâtiment exem-
plaire et l’investissement écologique. Pour l’installation pho-
tovoltaïque, Cameleon a également pu compter sur un chè-
que de la Région. Soit 40.000 € sur un coût total de 100.000 €.
« Et c’est tout… Les autres aides concernent l’emploi. Donc, sur
un total de 15 millions d’euros, le soutien s’avère plutôt limité.
Mais nous nous félicitons de notre investissement. »