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LE JOURNAL FRANÇAIS DES ÉTATS-UNIS Juin 2013 france-amerique.com Guide TV5Monde AUGUSTINE, L’HYSTÉRIQUE HISTORIQUE DU DR CHARCOT CINÉMA LE NEW YORK D’ALAIN DUCASSE GASTRONOMIE FRANCOPHONIE ENTRETIEN AVEC L’AMBASSADEUR À L’ONU 100 ANS D’EXPLOITS ! TOUR DE FRANCE

France-Amérique Juin 2013

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Numéro de Juin 2013

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LE JOURNAL FRANÇAIS DES ÉTATS-UNIS Juin 2013

france-amerique.com

Guide TV5MondeAUGUSTINE, L’HYSTÉRIQUE HISTORIQUE DU DR CHARCOT

CINÉMA

LE NEW YORK D’ALAIN DUCASSE

GASTRONOMIEFRANCOPHONIE

ENTRETIEN AVEC L’AMBASSADEUR À L’ONU

100ANS D’EXPLOITS !

TOUR DE FRANCE

2 FRANCE - AMÉRIQUE JUIN 2013

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SOMMAIRE

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Vie en France

Chronique Écopar Évariste Lefeuvre

Chronique Livres par Jean Le Gall

FrancophonieRencontre avec Filippe Savadogo, ambassadeur de l’OIF à l’ONU

Libre-échangeUn accord transatlantique delicat

À la uneLe Tour de France, 100 ans d’exploits

CinémaAugustine, l’hysterique historique du docteur Charcot

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PortfolioLes maximonstres de Charles Freger

HistoireDelacroix, itineraire d’une vie

Saveurs Le New York d’Alain Ducasse

Point final Les 1001 vies de Madeleine Malraux

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Instantanés

Annuaire

Petites annonces

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JUIN 2013

Poster par Billy Craven, un sérigrapheur installé à Chicago.www.billycravenposters.com

NOUS AVONS DÉMÉNAGÉ ! Veuillez prendre note de notre nouvelle adresse : FrancePress LLC, 115 East 57th St, 11th Fl. New York, NY 10022. Tel 646.202.9828 Fax 646.202.9847

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VIE EN FRANCE

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Des chevaux et des hommesPour la premiere fois, Carolyn Carlson, 68 ans, grande chamane de la danse contemporaine, ex-choregraphe associee à l’Opera de Paris et patronne du centre choregraphique de Roubaix, rencontre Bartabas, 54 ans, le centaure de la plaine Saint-Denis, fondateur de la troupe Zingaro et de l’Academie du spectacle equestre de Versailles. Avec seize danseurs, vingt chevaux et neuf ecuyers (dont huit femmes), le spectacle We Were Horses, à decouvrir du 7 au 23 juin à la Grande Halle de la Villette, transformera le groupe de chevaux en corps de ballet. Le tout sur la superbe partition de Philip Glass, Music In Twelve. ■

21 JUIN

BALLET ÉQUESTRE

La musique dans la peauCumba, jazz ou rock, metal, techno ou country, il y en a pour tous les goûts le 21 juin. Le premier jour de l’ete est consacre à la Fête de la musique en France depuis 1982 à l’initiative de Jack Lang, alors ministre de la Culture. Plus de 20 000 concerts sont ainsi prevus à travers l’Hexagone pour en prendre plein les oreilles ou remuer les hanches en rythme. Ce rendez-vous est devenu une veritable institution, reunissant musiciens amateurs ou confirmes, ferus collectionneurs de vinyles et fans de variete. Un tel elan federateur ne pouvait que se repandre… Make Music a repris l’idee aux États-Unis. Dans huit villes dejà, le 21 juin, les coins de rue, les parcs et les bars sont envahis par les melodies. ■

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VIE EN FRANCE

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DIPLOMATIE

DÉFENSE

Un Pentagone à ParisLe « Pentagone à la française » devrait être inaugure en 2015 à Balard, dans le XVe arrondissement de la capitale. Ce nouveau siege du ministere de la Defense regroupera sur un même site de plus de 145 000 metres carres les administrations centrales et l’etat-major de la Defense ; soit pres de 9 300 militaires et civils actuellement disperses sur une quinzaine de sites en Île-de-France. Le projet prevoit aussi la construction de 235 000 metres carres repartis entre le futur ministere de la Defense et un ensemble de bureaux. Le groupe Bouygues a ete choisi en fevrier 2011 pour mener, dans le cadre d’un partenariat public prive (PPP) de trente ans, cette operation dont le coût a ete evalue à 4,2 milliards d’euros pour l’État. ■

Marc Lasry renonce à l’ambassade américaine L’affaire paraissait bien engagee. Marc Lasry devait remplacer Charles Rivkin en tant qu’ambassadeur des États-Unis à Paris. Barack Obama aurait propose en mars dernier le poste à ce proprietaire d’Avenue Capital, l’un des hedge funds les plus rentables des États-Unis. Francophone d’origine marocaine, le milliardaire qui a leve au moins 1 million de dollars pour la campagne presidentielle democrate de 2012 devait prendre ses fonctions avant la fin de l’ete. Mais l’arrestation de son ami et partenaire de jeu russe Ilya Trincher, accuse d’organiser des parties de poker illegales aux États-Unis, l’aurait contraint à y renoncer. La confirmation de la defection de Marc Lasry par la Maison Blanche, qui n’a pas voulu s’exprimer sur les motifs de cette decision, a souleve une vague de speculations dans la presse anglo-saxonne. Les postes d’ambassadeur etant valides par le Senat, Marc Lasry aurait prefere se retirer pour eviter un vote de defiance des senateurs et ajouter une epine de plus dans le pied de Barack Obama. ■

Plus d’anglais dans le supérieurLa ministre de l’Enseignement superieur Genevieve Fioraso prevoit d’elargir l’offre en anglais à l’universite. Jusqu’ici, la loi Toubon de 1994 posait comme principe qu’en France, dans n’importe quelle ecole ou universite publique ou privee, tous les enseignements devaient être dispenses en français, la langue de la Republique. À deux exceptions pres : pour les cours de langues et lorsque l’enseignant est un intervenant etranger. La nouvelle proposition de loi de la ministre suscite dejà des reactions du côte des associations de francophones, du Quebec ou de l’Academie française. « Mon projet de loi n’est ni jacobin ni girondin. Il est pragmatique, s’est defendue la ministre qui souhaite augmenter le rayonnement de la recherche française. Si nous n’autorisons pas les cours en anglais, nous n’attirerons pas les étudiants de pays émergents comme la Corée du Sud et l’Inde. Et nous nous retrouverons à cinq à discuter de Proust autour d’une table, même si j’aime Proust… » ■

ENSEIGNEMENT

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VIE EN FRANCE

Il y a cinquante-et-un ans, sortait sur les ecrans français Le Jour le plus long, l’un des plus grands blockbusters de l’histoire du cinema. Diffusee tres largement à la television, l’œuvre reunit sur la pellicule John Wayne, Robert Mitchum, Henry Fonda, Bourvil ou encore Arletty. Retraçant la journee du 6 juin 1944, le film a ete tourne dans differents decors se rapprochant au mieux, selon les producteurs, des plages normandes. Si la Corse a ete choisie pour figurer Omaha Beach, l’île de Re a accueilli d’autres scenes. Ainsi, des blockhaus en polystyrene ont ete construits sur la plage de la Conche des Baleines. Mais d’autres plages ont ete utilisees. Jean-Claude Galloyer, ancien figurant, se souvient de la journee du 20 novembre 1961 : « Ce jour-là, nous avons tourné la scène du débarquement symbolisant Utah Beach, sur la plage des Sablanceaux, à Rivedoux. J’étais à l’École des apprentis mécaniciens de Saintes à l’époque, et nous avions tous été engagés pour jouer les figurants. Nous étions 1 500, auxquels se sont ajoutés

Le Jour le plus long… tourné sur l’île de RéSébastien Drouet

LE SAVIEZ-VOUS ?

des éléments de l’école de Rochefort, de la base aérienne de Bordeaux, soit 6 000 personnes au total… » Placee sous les ordres du cascadeur Gil Delamare, toute cette joyeuse troupe, regroupant de faux GI ou soldats anglais munis de fusils en contreplaque, a dû faire six prises dans la journee. Partis de Saintes avec des rations militaires, ayant eu droit, tout de même, à un the au citron, les figurants n’ont pas aperçu l’ombre des stars decrites plus haut, dont certaines ont pourtant pose le pied sur l’île à cette occasion, mais pour d’autres scenes que celle du debarquement. ■

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Les debats recurrents sur les finances publiques à Washing-ton, qu’il s’agisse de la falaise fiscale, de la sequestration ou

des prochaines negociations sur le pla-fond de la dette federale, ont longtemps masque l’intensification de la concur-rence fiscale entre États americains.

Laisses exsangues par une crise im-mobiliere qui a considerablement reduit leurs recettes fiscales, les États ont un temps procede à des licenciements mas-sifs : plus de 700 000 emplois publics ont ete detruits entre 2009 et aujourd’hui. Certaines mesures ont provoque des greves d’une envergure rare, comme celle des professeurs de Chicago, la pre-miere en 25 ans, en septembre 2012.

La priorite aujourd’hui ne va plus seulement au contrôle des coûts mais aussi à la recherche de nouveaux vec-teurs de croissance. La refonte de la fis-calite locale fait partie des leviers utilises pour attirer des entreprises ou favoriser certains secteurs d’activite. Mais l’equa-tion n’est pas facile à resoudre : com-ment s’extraire de la dependance vis-à-vis des transferts federaux, encourager la diversification du tissu productif, sans pour autant reduire l’acces aux biens publics de la classe moyenne (education, infrastructures…) ?

Non cooperative et souvent perçue comme une course à l’abîme, la concur-rence fiscale porte sur ce que l’on ap-pelle les « bases fiscales mobiles » : biens, epargne, capital et, dans une moindre mesure, travail – si la mobilite est forte. Les États sont souverains en matiere de fiscalite, qu’il s’agisse du champ d’appli-cation, des taux, de l’assiette. Les strate-gies sont tres variees : alors que le New Hampshire propose une taxation tres genereuse du revenu des individus (flat tax de 5%), le Nouveau Mexique vient d’adopter une baisse du taux d’imposi-tion des societes.

Les entreprises (Intel, Nike…) mon-naient souvent leur presence sur le ter-ritoire en echange d’une taxation qui leur est favorable : elles preconisent le principe du single sales factor, qui consiste à taxer les seules ventes realisees sur le

territoire, aux depens de la traditionnelle regle de repartition (Tax Apportionment) basee sur l’emploi, les ventes et les instal-lations. Le manque à gagner budgetaire de l’État s’accompagne souvent d’une baisse des depenses.

Il existe une vaste litterature theo-rique et empirique sur la concurrence fiscale. L’une des principales conclusions est la livraison d’un niveau sous-optimal de services publics. Par ailleurs, à l’instar de ce qui a pu s’observer en Europe, les classes moyennes – peu mobiles – sont generalement les plus affectees, ce qui accentue les inegalites. Mais le vrai debat est celui qui oppose efficacite (moins de distorsions fiscales) et equite (progressi-vite de l’impôt) dont la reponse depasse

La guerre des États aura bien lieu

Évariste Lefeuvre est chef économiste de Natixis North America. Normalien,

agrégé d’économie, il a co-écrit, avec David Abiker, le Dictionnaire posthume de la finance, signé en

2010, La Logique du hasard (Éditions Eyrolles) puis, en novembre dernier,

La Renaissance américaine (Éditions Leo Scheer).

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nin de loin le seul champ de l’economie.

Mais attention. Ce qui s’apparente à de la concurrence fiscale n’est peut-être rien d’autre qu’un ensemble de reponses isolees à un phenomene plus global : soumis à des chocs mondiaux similaires (concurrence des emergents, reorgani-sation mondiale des lignes de produc-tions, hausse du prix des matieres pre-mieres), les États ont reagi de maniere non coordonnee, ne se livrant pas tant à une concurrence fiscale qu’à une ten-tative (desesperee et synchronisee) de ne pas subir l’exclusion economique en suivant la tendance mondiale de baisse des taxes des entreprises. L’impact sur le marche du travail est le même. Les remedes à y apporter au niveau federal sont neanmoins differents. ■

LA CHRONIQUE ÉCO

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CHRONIQUE LIVRES

Je suis installe à bord d’un TGV. Nous nous deplaçons donc à tres grande vitesse, sans jamais demander notre direction aux

derniers paysans qui ne regardent plus passer ce long morceau de fierte nationale – nous avons invente de ces choses, jadis. Dans mon compartiment, deux hommes travaillent. Ils ont pour leurs ecrans d’ordinateur un même regard de croyants. J’entrevois des colonnes formant des tableaux ; non point des lettres, des versifications ou des manifestes. Une femme tient une petite cage sur ses genoux, dans laquelle un chat prend cette pose geniale, imaginee par de lointains parents pour plaire aux gens de bon goût et aux pharaons. Si ce chat pouvait parler, sa maîtresse ne le comprendrait pas. C’est autrement manifeste : mes trois voisins boudent. L’insatisfaction pese dans leurs joues. Le contrôleur, du genre bavard et bravache, fait entendre ses critiques à l’endroit de la Societe Nationale des Chemins de Fer, du gouvernement, du president. Je pense : « Les Français ne votent pas pour se choisir un guide, mais pour appointer un petit employé ». D’ailleurs, un quotidien national, au centre de la table, nous annonce une rafale de « chocs » decides par le petit employe. Ils sont de moralisation, de simplification, de croissance ; ils sont une ivrognerie politique de plus. Je me souviens : « Cela semble absurde. Mais détrompez-vous : ça l’est ! » (Wittgenstein). Feignant une curiosite somnolente, je retourne ce journal pour qu’il ne m’agresse pas davantage.

C’est une matinee où tout ce qui est spirituel semble avoir foutu le camp. On peut devenir fou à force d’avoir raison. Avant cela, la possibilite de vivre en retrait devient presque seduisante. Un desir reveille par ma lecture toute recente de Joseph Mitchell et du Secret de Joe Gould.

« Joe Gould était un curieux petit bonhomme sans le sou, incapable de travailler, débarqué à New York en 1916, qui esquiva les coups, déjoua les feintes et s’acharna à tenir bon pendant plus de trente-cinq ans ». Le front couvert de crasse, habille d’un pardessus trop grand, confronte à la soif

le rendez-vous qu’ils n’avaient pas encore pris, draguant sa secretaire, puis lui soutirant quelques dollars au pretexte tres urgent de soins medicaux. La suite est à l’avenant : chaque rencontre est monnayee par Gould car ainsi semble-t-il vivre comme tout le monde, c’est-à-dire de contreparties. Un dejeuner, des pintes, un billet : de quoi obtenir les indispensables renseignements sur lui-même et sur son œuvre invisible. Car il appert que c’est du donnant-perdant. L’un paie, l’autre promet de livrer des pages de l’Histoire Orale qui ne viennent jamais. Où se cachent-elles donc, ces palanquees de notes ? Chez une amie, à Long Island, assure-t-il en allant jusqu’à evoquer le cadenas de la porte de la cave qui maintient l’Histoire Orale dans un mystere enterre.

Tout au plus Mitchell parvient-il à mettre la main sur des extraits de la grande œuvre, des pages aureolees de gin et de biere plutôt que de genie litteraire. Aussi crut-il necessaire de faire parler Gould des heures et des nuits pour qu’il lui fasse le recit, confus et anecdotique, de l’Histoire Orale. L’article de Mitchell put enfin paraître et Joe Gould devint relativement celebre. Un abondant courrier lui parvint et plusieurs des auteurs de ces lettres y joignirent des billets verts. Le journaliste tenta de trouver un editeur à Gould mais, etrangement, celui-ci fuyait les possibilites de publication. « Pourquoi diable avoir pris toute cette peine, si, au fond de vous-même, vous avez décidé depuis toujours qu’elle serait publiée à titre posthume ? Je commence à croire, poursuivis-je, que l’Histoire Orale n’existe pas. Cette remarque avait jailli de mon inconscient (…), l’instant d’après, en jetant un coup d’œil au visage de Gould, j’eus la certitude, la certitude absolue que, par mégarde, je venais de découvrir la vérité sur l’Histoire Orale ».Vous lirez ailleurs / ce qu’il convient d’ecrire / à propos de ce livre / qui ne fut pas ecrit. Et toujours, vous tomberez sur cette question : pourquoi Gould ne l’a-t-il pas ecrite, sa foutue Histoire Orale ? Mais pardi : parce qu’il n’y parvint pas, parce qu’il echoua. Un echec aux meilleures consequences, « Car c’est dans l’échec seul que la liberté vit ; Et toute réussite bientôt l’anéantit » (Philippe Murray). ■ [email protected]

Une certaine manière d’être libre

plus souvent qu’à la faim, Gould etait une figure du Greenwich Village des annees 30-40. Une vie de boheme circonscrite à ce seul quartier, vers où convergeaient alors tous les excentriques de l’univers (« les branques et les désaxés et les éclopés et ceux qui ont connu leur moment de gloire et ceux qui auraient pu et ceux qui voudraient bien et ceux qui ne pourront jamais »).

Ses boires et inconsequences mises à part, Gould s’etait d’abord signale en traduisant des textes poetiques dans la langue des mouettes (ce qui donnait generalement ceci : « Scrii-iik ! Scrii-iik ! Scrii-iik ! »). Sa reputation grandit lorsqu’il entreprit l’ecriture d’une œuvre monumentale cette fois, sobrement intitulee « l’Histoire Orale ». À l’entendre, celle-ci se composait de neuf millions de mots – onze fois la Bible ! Il s’agissait de consigner dans des montagnes de pages ce que les conversations populaires abandonnaient de propos pertinents : « Si vous écoutez une conversation entre deux vieux messieurs dans un bar ou deux vieilles dames sur un banc de parc, il se peut que vous jugiez que ce sont des foutaises de la pire espèce, alors que moi, il se peut qu’en écoutant la même conversation j’y trouve une signification historique ».

En 1942, le projet de l’Histoire Orale fut connu au-delà du Village. Un journaliste du New Yorker, Joseph Mitchell, voulut rencontrer cet hurluberlu avec l’intention d’en faire le portrait ainsi qu’il en avait pris l’habitude avec les marginaux les plus remarquables. Mais c’est Joe Gould lui-même qui vint à sa rencontre, anticipant

Par Jean Le Gall

Le Secret de Joe Gould, de Joseph Mitchell. Traduit de l’anglais par Sabine Porte. Éd. Autrement (18 €).

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France-Amérique : Quelles sont vos priorités en tant que représentant permanent de la Francophonie à l’ONU ?Filippe Savadogo : Ma mission aupres de l’ONU et plus largement aux États-Unis est de promouvoir les interêts de notre organisation. La Francophonie du XXIe siecle a trois grands objectifs aux Nations Unies. Le premier est naturellement de defendre plus generalement le Multilinguisme et particulierement la langue française et le fait francophone aux Nations Unies :

Le monde francophone represente aujourd’hui 77 pays et membres observateurs presents sur tous les continents, soit pratiquement un tiers des pays accredites à l’ONU. Or le Français qui est la seconde langue de travail n’a toujours pas la place qu’il merite ! Nous nous devons d’exercer une

vigilance bienveillante sur les questions de traduction, d’interpretariat et de recrutement.

Le deuxieme objectif est de consolider une presence de personnels francophones sur les operations de maintien de la paix, notamment en milieu francophone, comme à Haïti, en Republique democratique du Congo (RDC), en Côte d’Ivoire ou ailleurs.

Enfin, les accords de cooperation entre la Francophonie et l’ONU consistent à federer nos energies et mobiliser les pays francophones pour atteindre les Objectifs du millenaire pour le developpement et d’autres plateformes d’action qui nous sont cheres, comme par exemple la professionnalisation des femmes, l’elimination des violences faites aux femmes et aux filles ou encore le multilinguisme. À cet egard, le monde francophone est à la fois attentif à la fracture numerique et à la

Filippe Savadogo est Représentant permanent de l’organisation internationale de Francophonie à l’ONU. Ambassadeur du Burkina Faso en France pendant 10 ans, puis ministre de la Culture de 2007 à 2011, cet homme de communication a également longuement présidé au rayonnement international du cinéma africain à la tête du Fespaco, festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou. En poste à New York depuis 14 mois, il se veut l’ambassadeur d’une Francophonie dans toutes ses dimensions.

Propos recueillis par Agnès Kerr

FRANCOPHONIE

M. Filippe Savadogo lors de la remise de ses lettres de créance au Secrétaire genéral des Nations Unies, M. Ban Ki-moon.

Rencontre avec Filippe Savadogo, ambassadeur de la Francophonie

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FRANCOPHONIE

pluralite des medias ; L’internet ne doit pas faire oublier que la presse, la television et la radio demeurent tres importantes, particulierement dans les pays en developpement.

Quelle est l’influence de la Francophonie dans les relations commerciales internationales ?Le developpement economique est aujourd’hui au programme de notre organisation parce que nous ne pouvons pas simplement nous reunir autour d’une langue que nous avons en partage sans tenir compte des questions qui nous preoccupent. Si la Francophonie promeut la diversite et le dialogue des cultures à travers le monde, elle a aussi une dimension strategique de refus d’un monde unipolaire. On se souvient que les cours du coton, dont un grand nombre de pays francophones sont producteurs, ont ete l’objet d’âpres discussions à l’Organisation mondiale du Commerce (OMC) et à la Banque mondiale pendant plusieurs annees ; l’election du Bresilien Roberto Azevêdo, nouveau directeur general de l’OMC souligne la volonte des pays en developpement d’être pris en compte dans les negociations multilaterales.

Autre exemple, les pays francophones africains, à travers l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des affaires (l’OHADA), s’organisent pour mettre en place une legislation moderne adaptee aux acteurs economiques.

Plus recemment, le Sommet de la Francophonie à Kinshasa a adopte une resolution sur la bonne gouvernance dans les industries extractives et forestieres qui va ameliorer notre environnement economique. La mondialisation doit avoir un visage humain.

Quel bilan retenez-vous du dernier Sommet de la Francophonie à Kinshasa, en République démocratique du Congo ?Ce que nous retenons en premier, et comme on le dit en Amerique, « nous l’avons fait ». C’est un defi que la Francophonie a releve, malgre les difficultes et les crises, cela grâce à l’audace et à la volonte des chefs d’États et de gouvernements. C’est d’autant plus important que la Republique democratique du Congo, pays de pres de 70 millions de personnes aux ressources et potentialites importantes, sera le plus grand pays francophone au cours du siecle.

C’etait aussi la premiere fois qu’un Sommet etait organise en Afrique centrale qui compte plusieurs pays francophones. Cela a ete l’occasion de prêter une attention particuliere au developpement de l’Afrique. Nous saluons la vision de notre Secretaire general, le President Abdou Diouf pour l’avoir realise.

Quel regard portez-vous sur l’intervention de la France au Mali ? Quelle est l’implication de l’OIF pour le rétablissement de la stabilité dans la région ? Le Mali est un pays membre de la Francophonie, et l’OIF, à travers son president Abdou Diouf, a ete aux premieres loges de la recherche de solutions à cette crise. Nous avons tout de suite appele à une intervention pour retablir l’ordre republicain car nous etions en possession d’informations delicates sur l’avenir d’un Mali entre les mains de groupes armes. Ceux-ci ont ete demanteles grâce à l’aide de la France et à la dynamique impulsee par la Francophonie pour creer un front uni. Nous saluons le deploiement de la Mission integree des Nations unies pour la stabilisation au Mali (Minusma) à

partir du mois de juillet. Voici un cas precis où un contingent francophone est souhaitable pour pouvoir communiquer avec les populations. Nous attendons beaucoup de cette demarche onusienne pour la stabilisation au Mali et dans la region, comme pour la reconstruction des mausolees et des biens culturels detruits.

Quelle est la vitalité de la francophonie en Amérique ?La culture fait partie de l’« ADN » de la Francophonie depuis sa creation, à travers la promotion de l’apprentissage du français, l’education, les cooperations universitaires bien sûr, mais nous devons aussi promouvoir toutes les dimensions de sa diversite : musicale, cinematographique, artistique. Sur le continent americain, du Quebec à la Caraïbe en passant par la Louisiane, la culture francophone est restee ancree en depit d’influences diverses. À New York, ville cosmopolite par excellence, la journee officielle de la Francophonie, le 20 mars, a donne lieu à une serie d’initiatives etendues sur un mois pour sortir la Francophonie des sentiers battus et de l’ONU, avec la participation d’associations et d’artistes comme Maryse Conde, romanciere guadeloupeenne et professeure emerite à l’universite Columbia, honoree du prix special de la Francophonie 2013, le styliste nigerien Alphadi, ou les musiciens haïtiens de Tabou Combo et du groupe de jazz franco-tunisien Afro-groove. C’etait une vraie fête de la diversite culturelle, car la Francophonie, c’est une multitude d’accents, de couleurs, de saveurs et d’experiences à partager.

Les Alliances françaises des États-Unis qui sont composees de milliers de Francophiles et de Francophones font un travail extraordinaire que nous accompagnons avec toutes nos forces. ■

12 FRANCE - AMÉRIQUE JUIN 2013

LIBRE-ÉCHANGE

Les partisans de ce traité promettent une « libéralisa-tion par le haut, relevant les standards mondiaux en matière de commerce ». Quels sont les enjeux princi-paux derrière ce discours ?Une partie de ce futur traite propose l’unification des normes entre les États-Unis et l’Europe. Au sein de l’Union, quand un pays decide qu’un produit est sûr, ce dernier est accepte com-me tel par tous les autres pays membres. Les États-Unis ont des normes differentes en matiere environnementale, sanitaire, de securite, de protection de la vie privee. Ces differences sont des obstacles au commerce. Des estimations ont ete faites par des economistes sur ce type de barriere. Cela represente des surcoûts qui s’elevent entre 10 et 20%, beaucoup plus impor-tants que les droits de douane classiques. Les industriels euro-peens et americains demandent des normes moins exigeantes aux pouvoirs publics, il y a un risque d’un mouvement vers le bas. L’homologation de normes est tres technique, il faut avancer point par point. Cela prendra plusieurs annees.

Les négociations officielles sur un accord de libre-échange entre l’Union européenne et les États-Unis devraient débuter en juin. Guillaume Daudin, professeur d’économie à l’université Paris-Dauphine et chercheur associé à l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) revient sur les enjeux d’un tel accord.

Négociationsdélicates pour un accord transatlantique

Propos recueillis par Vincent Dozol

F. rance-Amérique : Quelle est l’origine des négo- ciations de cet accord de libre-échange ?Guillaume Daudin : L’ensemble des acteurs princi-paux de l’economie mondiale se sont attaches à faire

en sorte que la crise ne s’accompagne pas d’un retour du pro-tection-nisme, contrairement à ce qui avait ete le cas dans les annees 1930. Un groupe de travail est actif depuis 2011. Les negociations officielles ont commence cette annee, en fevrier 2013. Elles font partie d’un mouvement qui a debute avec les bloca-ges sur les accords de Doha, sous l’egide de l’OMC. Negocier des traites bilateraux est apparu comme une des so-lutions pour remplacer les discussions dans le cadre du multi-lateralisme. Par exemple, des traites ont ete signes recemment avec la Coree du Sud, d’abord par l’Europe, ratifies par tous les États membres, puis par les États-Unis.

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Quels seraient les intérêts d’un tel accord, pour la France en particulier ? À l’echelle europeenne, les etudes montrent que si on liberali-sait completement le commerce entre l’Europe et les États-Unis, on realiserait un gain d’environ 1% du PIB pour les deux partis. Ce n’est pas enorme et beaucoup moins important que la qualite de la gestion macroeconomique [au niveau des politiques economiques des États ou de l’UE, ndlr]. Je n’ai pas connaissance d’etudes particulieres sur la France. Des gains indirects pourraient aussi être realises avec l’augmentation de la concurrence sur les marches des pays signataires, ce qui in-citerait les entreprises à faire des gains de productivite. Les pays seraient incites à reorganiser la structure productive pour s’adapter au nouvel etat de la concurrence. Les change-ments d’emplois peuvent amener des situations de chômage de longue duree. Ces gains à long terme impliquent des pertes à court terme.

Le commissaire européen au commerce, Karel de Gucht, a annoncé que l’exception culturelle serait ex-clue des négociations, répondant à une demande fran-çaise. La France est-elle isolée sur cette question ?La defense de l’exception culturelle est presente dans beau-coup de pays. Mais c’est particulierement en France, où la production culturelle est extrêmement protegee, que cet ar-gument est repris par le gouvernement de maniere forte.

Dans le secteur agricole, l’Europe a des difficultés à s’entendre sur la politique agricole commune (PAC). Dans ces conditions, comment négocier avec la pre-mière agriculture mondiale ?L’agriculture est un marche en realite tres protege aussi bien dans l’Union europeenne qu’aux États-Unis. Pas de la même maniere, pas sur les mêmes secteurs. L’Amerique protege son marche grâce à des subventions tres importantes aux agriculteurs. L’Europe utilise plutôt les droits de douane. Cette question ne se pose donc pas unilateralement. Des gains sont realisables pour les deux partenaires. L’UE est-elle vraiment prête à liberaliser son marche agricole ? Je ne vois pas en quoi ce qui etait complique à negocier pour Doha serait plus simple en bilateral. Il va falloir detricoter un peu la PAC et detricoter une partie des gains de l’agriculture americaine. Il n’est pas certain que les negociateurs y arrivent. Les negociateurs pour la France seront-ils prêts à ac-cepter de ne plus avoir le droit d’interdire les OGM* sur lesquels les Americains sont bien plus tolerants ? De nouveau, la question de l’uniformisation des normes va se poser. On peut essayer de s’entendre sur les droits de douane, qui sont en realite dejà tres faibles. S’il y a des points specifiques où l’on peut avancer, tres bien. Ce traite pourra alors servir de point de reference pour de futurs accords multilateraux. ■*Autorisés aux États-Unis depuis 1996, les organismes génétiquement modifiés (OGM) représentent désormais 90% des surfaces plantées sur le territoire dont la quasi–intégralité des cultures de maïs (88%), de coton (90%) et de soja (94%). L’Amérique concentre environ la moitié de la production mondiale. En Europe, en vertu du principe de précaution, les OGM sont strictement réglementés. Seule la mise en culture de deux semences génétiquement modifiées est autorisée (maïs et pomme de terre). La France, l’Allemagne et six autres pays de l’UE ont adopté des clauses de sauvegarde pour en refuser la culture sur leur territoire.

LIBRE-ÉCHANGE

Le volume de commerce de marchandises entre les États-Unis et l’Union européenne s’élevait à plus de 454 milliards d’euros en 2011, avec une balance légèrement excédentaire pour l’UE (17% d’exportations contre 11% d’importations). Pour la France, les États-Unis comptent pour 6% de ses exportations et 6,4% de ses importations.Dans les services (900 milliards d’euros), les États-Unis comptent pour 25% des exportations de l’UE et 28% de ses importations. En matière d’investissements directs à l’étranger (IDE), les États-Unis sont les premiers détenteurs des stocks en UE (41% en 2010) contre 28%

des stocks d’IDE européens aux États-Unis.Source : Centre d’études prospectives et d’informations internationales (CEPII)

En chiffres

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À LA UNE

Ariane Pellaton

Le 29 juin, le Tour de France entre en piste pour sa centième édition. Toujours plus largement suivi dans le monde, cet événement sportif est aussi un tour de force logistique. Plongée dans les coulisses de sa préparation.

Premier evenement sportif annuel au monde, le Tour de France s’elance pour une centieme ronde. Du 29 juin au 21 juillet, la course deploiera ses per-formances et resserrera les distances. Convergeant

vers sa nature festive autant que sportive, ils seront quelque 10 millions de spectateurs au bord des routes, 3,5 milliards devant leurs televiseurs, repartis entre 190 pays et 60 chaînes en direct.

De Porto-Vecchio à Paris, la Grande Boucle sera une audace, comme elle le fut en 1903. Tour de France bijou, l’edition 2013 est un tour de force. Maître orfevre de l’eve-nement, Jean-Louis Pages œuvre depuis quatre ans au depart

inedit de Corse, depuis deux ans à l’arrivee au Mont-Saint-Michel, presentes et penses comme des ecrins sur lesquels se detacheront les coureurs. Ainsi la camera aura-t-elle à la fois la competition et le Mont-Saint-Michel en ligne de mire, ce qui implique entre autres la clôture de l’acces au site de 4 h à 22 h. « À Nice, sur la promenade des Anglais, il faut trouver un créneau afin que l’aéroport fonctionne et qu’on puisse faire voler notre hélicoptère pour les images. » À Ajaccio, l’arrivee a pour toile de fond les îles Sanguinaires. « Au bout de la route, c’est la mer. On doit prévoir un retour de la caravane publicitaire avant le passage des coureurs », la manœuvre consistant à refouler 200 vehicules, dans la ville ambulante qu’est le Tour de France.

TOUR DE FRANCE

Duel au sommet de l’Aubisque entre les Français Christophe Moreau et Pierrick Fédrigo - Tour 2010.

100 ANS D’EXPLOITS

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À LA UNE

Dates clés 1er juillet 1903 : Le premier Tour de France compte six étapes et 2 428 km, contre 21 étapes et environ 3 300 km en 2013. Les coureurs roulaient de jour comme de nuit.

1903 : Vainqueur, Maurice Garin s’impose en 94h33. En 2012, Bradley Wiggins en 87h34.

1905 : Le Tour de France s’élève, émaillé du ballon d’Alsace. Le franchissement des Pyrénées figure au programme dès 1910, celui des Alpes dès 1911.

1919 : Instauration du maillot jaune. Le prix du meilleur grimpeur est introduit en 1933, caractérisé depuis 1975 par le maillot blanc à pois rouges.

1930 : La caravane publicitaire entre en scène.

1934 : le Tour de France se garnit d’étapes contre-la-montre.

1937 : Officialisé parmi le matériel autorisé, le dérailleur fait bondir les moyennes horaires.

1951 : Lunaire, le mont Ventoux s’inscrit dans le scénario du Tour. En 1952, le Tour dresse un autre mythe, la montée à l’Alpe d’Huez et ses 21 virages. Pour la première fois, il déploie une arrivée d’étape en altitude.

1954 : Amsterdam accueille le premier départ à l’étranger du Tour de France, qui s’exporte comme marque. Dernière création : le Saitama Criterium by Le Tour de France, au Japon, en octobre 2013.

1975 : Le Tour inaugure l’arrivée finale sur les Champs-Élysées. En 2013, pour la première fois, l’étape se courra au soleil couchant.

2013 : L’ultime étape s’élancera de Versailles. Le Tour n’a plus visité la cité royale depuis 1989. L’Américain Greg Lemond remportait l’épreuve devant le Français Laurent Fignon, lors du contre-la-montre final, pour 8 secondes. Le plus petit écart jamais enregistré au classement final.

Convoi exceptionnel !Au total, ce ne sont pas moins de 2 400 vehicules et 4 500 personnes qui se de-placent au quotidien, sans compter les spectateurs. Lorsqu’il a debute en 1984 au service de la logistique, Jean-Louis Pages en gerait respectivement 1 000 et 2 000. « Il fallait la moitié, voire le tiers des surfaces » aujourd’hui indispensables à l’accueil de l’epreuve, qui sont de 7 hectares pour les arrivees, et 4 pour les departs. Alors que le Tour de France n’est encore qu’une abstraction, jusqu’à 600 techniciens se consacrent à ce qui deviendra une ephemere aire d’arrivee à chaque etape. Il est 4 h du matin lorsque Jean-Louis Pages trace la ligne finale à la craie, dans un silence roi. Le Tour se monte des cet instant en origami geant : 150 poids lourds transformes notamment en tribunes de presse, podium et espaces VIP, 35 km de câbles, 5 km

de barrieres. « Le podium mesure 15 m de long, 7 m de haut, 7 m de profondeur, et pèse 20 tonnes. En 1984, c’était une caravane de camping qui se dépliait, de la marque La Bohème », se rememore Jean-Louis Pages. En guise de publicites, « le responsable venait avec des panneaux en bois et se plaçait derrière les coureurs. On a évolué avec le temps, mais il faut garder une dimension humaine. Il faut que le Tour de France continue d’aller là où il a besoin d’aller sportivement. »

Le gigantisme est la frontiere du Tour. « Si on était dans une logique de développement outrancier, on aurait cinq bus VIP supplémentaires, là où on en a trois. On pourrait avoir 600 véhicules dans la caravane. Il y a une dizaine d’années, on s’est aperçu qu’avec 200, on était dans une approche gérable. On a une sorte de norme à laquelle on est obligé de se tenir, pour que le Tour de France corresponde à un événement itinérant. L’itinérance et ses aléas est une grande partie du Tour. Sur la ligne d’arrivée, j’essaie de garder la poignée de main, le casse-croûte, la discussion, pour prendre la mesure de ce que le Tour est en train de vivre. Le Tour de France, c’est une ambiance, une atmosphère. Le vrai défi est là. La technique, on parvient toujours à l’adapter ». Le Tour de France, en sa centieme peregrination, reste une hardiesse. Qu’on evoque seulement les spectateurs. « Il était logique de renforcer les mesures de sécurité. Mais il ne faudrait pas qu’à terme, on nous interdise l’Alpe-d’Huez avec 900 000 personnes. Combien y aura-t-il de gens à l’Alpe, et combien y en aura-t-il au Ventoux, le 14 juillet ? Si on analyse vraiment la situation, il s’agit d’un stade à ciel ouvert. Or, un stade contient 80 000 personnes. »

Le passage de la caravane publicitaire... toujours un événement !

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beaux paysages, 20% les champions et leurs exploits. « Les motivations sont assez stables ces six dernières années », constate le directeur d’etudes, Mohamed Hazene, « et elles se hiérarchisent de la même manière, la principale étant les paysages ». Le Tour de France, ne dans le contexte pari-sien, bourgeois et industriel de la Belle Époque, « symbole des cultures populaires » des 1930 avec la democratisation de la bicyclette – comme le note le sociologue Philippe Gaboriau –, federe au-delà de la geste sportive. En juin 2011, se-lon un sondage de l’Institut français d’opinion publique, 49% des Français declaraient aimer le Tour, les ouvriers (47%) comme les professions intermediaires (49%). Un interêt qui s’elargit sur le plan mondial. Laurent Lachaux releve « 5 000 heures de retransmission en 2012, soit trois fois plus qu’en l’an 2000 ». La part des revenus issus des droits TV, il la chiffre à 50%. En 1990, le specialiste en histoire du sport, Serge Laget, la situait à 20%.

À qui profite le Tour ?Dans les tourments qu’a vecu le cyclisme ces

quinze dernieres annees face à la pieuvre du dopage, le Tour de France fait toujours recette. « Les quatre grands partenaires et les partenaires officiels sont fidèles depuis plus de 15 ans », poursuit Laurent Lachaux. « Nous n’avons enregistré aucune défection en raison de soucis économiques. Quant au problème du dopage, on n’a perdu aucun partenaire. » Quid des États-Unis ? « Le vélo a été un peu mouvementé. Mais on sent qu’il se développe dans le déplacement urbain. » En termes de contrats, « on a un partenaire, PowerBar, et un licencié, Icon Health & Fitness, qui représente 80% des vélos d’entraînement sur le marché mondial. Dans son offre, il exploite la licence Tour de France », à savoir le droit d’utiliser le logo et l’appellation.

Strategiquement, ASO vise à « avoir des marques fortes dans la durée, et qui veulent s’engager avec de l’animation. Être dans le Tour implique une responsabilité à ce niveau. Le Tour de France, c’est un orchestre symphonique où chacun vient avec sa partition. On essaie d’avoir la provenance la plus large qui soit. » Aussi la proportion d’un tiers de partenaires hors de la France est-elle « plutôt en progression. On regarde aussi du côté de l’Inde, de la Chine, de la Russie. » Et d’ajouter : « L’Asie nous intéresse. Le cyclisme et la science de la course sont complexes, il faut des années pour les maîtri-ser, ce qui manque encore un peu à l’Asie. Nous avons des coureurs japonais. Les premiers Chinois vont arriver bientôt. »

Si l’aspect commercial fut notamment à l’origine du Tour de France, celui-ci impose d’autres valeurs, certes captives d’un point de vue mercantile, mais pas seulement. Le defi eco-nomique, Laurent Lachaux le decrit ainsi : « Garder la fraîcheur d’un événement qui va partout, qui doit continuer à aller partout et gratuitement, dans l’univers du sport d’aujourd’hui où on ne parle que de manifestations payantes dans des endroits clos. » Bastion du dernier sport romantique, dans son itinerance et dans la dra-maturgie qui se noue face aux elements, le Tour de France reste une audace. Anachronique, intemporel. ■

À LA UNE

Des frontières mouvantesDans une societe où l’automobile a pris depuis belle lurette le dessus sur le cycle, quand bien même le velo se developpe comme moyen vert de transport, le Tour de France doit au-jourd’hui se faufiler. « La sécurité est la préoccupation de tous les instants », commente Thierry Gouvenou, de la direction spor-tive, et par ailleurs ancien coureur. « Faire une course est un jeu de quilles, c’est un casse-tête permanent. On n’a quasiment plus de ville où il n’y a pas de ronds-points, d’îlots. On est obligé de composer avec. Parfois, il nous faut changer 30 à 40 km de parcours, car le tracé serait trop dangereux. Certaines villes sont inaccessibles à une épreuve cycliste. » S’il souhaite continuer « d’aller au centre des villes et au sommet des montagnes », le Tour de France doit toutefois encore et toujours adapter la scene, comme il le fit des 1905 lorsqu’il voulut dynamiser le spectacle en elevant ses routes. « Il y a 25-30 ans, le Tour était une course française, italienne, belge. Actuellement, dans la mondialisation, le niveau global des coureurs a beaucoup augmenté. Le terrain qui créait la différence fait désormais l’objet de sprints. L’innovation tient dans des arrivées de moyenne montagne inédites. Et depuis quelques années, on essaie de revenir au bord de mer, en escomptant de belles bordures. » Jouant sur l’effet du vent, les coureurs apparaissent alors en eventails, dans des mouvances tactiques puissamment visuelles.

Conçu au depart pour promouvoir le journal L’Auto, ancêtre du quotidien L’Équipe, le Tour de France reste une affaire qui tourne, et l’image n’y est pas etrangere. Direc-teur commercial et marketing d’ASO, societe organisatrice, Laurent Lachaux souligne l’anciennete du Tour, sur laquelle capitaliser, mais aussi le decor. « On est là pour mettre en valeur la beauté des lieux et collectivités territoriales qui nous accueillent. » Dans une etude de Sportlabgroup realisee en 2012 sur les motivations des Français à suivre le Tour, 41% citaient les

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Arsène Alancourt dans les Pyrénées, en 1923.

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CINÉMA

Guénola Pellen

Pour son premier long-métrage, Alice Winocour met en scène l’histoire d’Augustine, la célèbre patiente hystérique du Dr Charcot. Présenté comme le grand-père de la psychanalyse moderne, ce médecin, interprété avec justesse par Vincent Lindon, a fait de l’hystérie féminine son cheval

de bataille, aidé dans ses recherches par la patiente Augustine.

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Box

Augustinel’hystérique historique

Le film tire son titre du nom de cette jeune employee de maison soignee en 1885 à la Salpêtriere. Augustine, jouee par la jeune chanteuse française Soko, est servante dans une bonne famille.

Cette jeune femme de 19 ans aux cheveux noirs de jais et au visage rond comme la lune, est atteinte d’hysterie dite « ovarienne ». Un soir alors qu’elle sert le dîner, elle fait une crise spectaculaire devant les yeux meduses des convives. Tombant à terre, elle se raidit tout entiere, se tordant au sol telle une possedee. Au reveil, son œil droit s’est ferme, une moitie de son corps est devenue totalement insensible et sa main gauche est etrangement recroquevillee. Cas d’ecole, Augustine est emmenee à l’hôpital. Là-bas, reperee par « l’eminent » docteur Charcot, la jeune femme devient une bête de foire que l’on exhibe sans vergogne devant

des parterres d’academiciens, en allant jusqu’à susciter des crises sur commande, pour satisfaire l’appetit voyeuriste d’hommes de bonne societe, scandant leur fascination face aux cris et gemissements de ces femmes hypnotisees et que l’on raccompagnait sous les applaudissements, une fois les delires sexuels termines. Tout en courbes, le corps de Soko est filme avec passion par la camera d’Alice Winocour. Oubliez les dissertations scolaires et la poussiere academique. Sous les costumes d’epoque et les decors gothiques, dans le clair-obscur des cabinets de l’hôpital de la Salpêtriere, le personnage d’Augustine est confronte à ses pulsions. Son corps, manipule par les medecins comme un objet, devient le theâtre de son interiorite refoulee. Sa revolte, exprimee par des troubles fonctionnels ou des crises emotionnelles, devient la nôtre. ■

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CINÉMA

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France-Amérique : Qu’est-ce qui vous a attirée vers Charcot et l’univers de la psychiatrie ?Alice Winocour : D’abord mes lectures. Dans La guérison par l’esprit, Stefan Zweig presente Mesmer, le fameux magnetiseur, et Freud, l’eleve de Charcot. Il raconte les decouvertes de ces medecins de l’âme, comme un enquêteur. Ensuite j’ai frequente assidûment la bibliotheque Charcot, qui possede un fonds extraordinaire sur l’histoire de la psychiatrie. C’est là que j’ai decouvert l’existence de la Cite des femmes de la Salpêtriere. Je me suis immediatement demandee quelle atmosphere pouvait regner dans un tel lieu. Ces femmes, malades, de condition modeste, observees comme des rats de laboratoire. J’ai ete tres frappee par les photographies, les dessins et les comptes rendus minutieux... Et puis il y a les ecrits de Charcot sur les « presentations du mardi ». Les malades y sont exhibees comme des objets. Charcot provoque la crise d’hysterie par l’hypnose, pour illustrer sa demonstration. C’est un veritable spectacle. Pour moi, tout cela evoquait quelque chose de tres sulfureux... Ensuite, j’ai decouvert Augustine, cette patiente vedette des presentations de Charcot, connue du tout-Paris. C’etait la plus photographiee, la plus jolie tout simplement. Nous pouvons suivre son evolution au jour le jour, et soudain, plus rien, juste cette phrase sibylline au bas d’un rapport : « Ce soir, Augustine s’est enfuie de la Salpêtrière déguisée en homme. » Tout est en place pour une intrigue : pourquoi, comment ? Que s’est-il passe entre Charcot et Augustine ? Nous connaissons tout des observations : horaires, examens, ustensiles utilises mais rien sur leur relation humaine. J’ai voulu imaginer le hors-champ. J’ai donc d’abord fait beaucoup de recherches et puis j’ai essaye de tout oublier, pour aller vers la fiction et le cinema.

Vous mêlez fiction et histoire... Je n’ai pas voulu faire un film historique. Je me suis inspiree de personnages et de faits reels mais ce n’est pas du tout une reconstitution, encore moins un documentaire. Par exemple, j’ai choisi de ne pas montrer la violence qui pouvait regner entre les femmes, ou la brutalite de certains examens. De toute façon, cet univers est si dur qu’on ne peut pas le representer au cinema. J’ai ete obligee de passer par la fiction, d’aller vers le film fantastique, le romantisme noir... Pour moi, le vrai sujet, ce sont les rapports entre les hommes et les femmes, et les luttes feminines. Je filme surtout un rapport de domination entre un homme et une femme, dans une societe corsetee dans tous les sens du terme. Je vois ces femmes comme des pionnieres feministes, mon recit est un hommage à leur lutte. Encore aujourd’hui, l’hysterie reste un mystere, le desir aussi, finalement je voulais faire un film sur ces enigmes. Ce melange de fascination et de peur qu’eprouvent les hommes envers les femmes existe toujours. D’une certaine façon, les maladies modernes comme l’anorexie ou les automutilations, sont des revoltes du corps feminin.

Comment avez-vous tourné les scènes d’hystérie ? Je me suis pose beaucoup de questions ! Durant ces « crises », le corps fait des choses « anormales », des mouvements brusques et inattendus, « hors de propos », il echappe à tout contrôle. Comment atteindre une certaine verite alors que le

corps ment ? Le corps devient scene de theâtre, ce qui est tres difficile à filmer. J’ai vu beaucoup de films de possession et je m’en suis inspiree. En fait, Soko, la comedienne, est entravee par des liens pour ces scenes, j’ai voulu montrer que son corps la depasse. De son côte, Vincent Lindon exprime tres bien à la fois le contrôle du personnage et son côte bouillonnant, c’est un acteur tres « physique », Charcot est comprime dans la raideur, la rigidite de l’epoque. Lui l’etudie comme un entomologiste mais il est petit à petit trouble par ce corps et donc rattrape par sa propre sexualite. Je voulais montrer comment le rapport s’inverse. Lacan a cette phrase : « L’hystérique est une esclave qui cherche un maître sur qui régner », c’etait ma feuille de route pour le film. Finalement, Augustine provoque Charcot, elle va prendre le pouvoir sur lui. Là encore, bien sûr, c’est mon imagination... ■Augustine, un film d’Alice Winocour. Avec Vincent Lindon, Stéphanie Sokolinski (Soko), Chiara Mastroianni. En salles américaines à compter du 17 mai.

Alice Winocour, réalisatrice du film Augustine.3 questions à…

June 21-30, 2013 • Crest TheatreFeaturing 2 Weekends of: Newest Premieres and Rare Cult Classics

Infamous Late Night Movies & Breakfasts • Short FilmsEnglish Subtitles • Post Screening Discussions • Special Guests

Food, Wine & Champagne!

12th Season!Sacramento French Film Festival

SacramentoFrenchFilmFestival.org • 916-44-CREST

Scan QR code for program, trailers

and ticket info

My Life is a French Movie!

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PORTFOLIO

Cerbul (Stag), Corlata, Roumanie, 2010-2011 Caretos, Lazarim, Portugal, 2010-2011

Guénola Pellen

Chaque annee, de la France à la Bulgarie, de la Finlande à la Sardaigne, du Portugal à la Grece en passant par la Suisse

et l’Allemagne, des hommes celebrent par des rituels ancestraux les saisons, la vie, la mort. Le temps d’une masca-rade multiseculaire, ils entrent litterale-ment dans la peau du « sauvage » en devenant ours, chevre, cerf ou sanglier, homme de paille, diable ou monstre aux

mâchoires d’acier. Leurs costumes, faits de peaux de bêtes ou de vegetaux, ser-tis d’ossements ou ceintures de cloches, chapeautes de cornes ou de bois de cerfs, siderent par l’extraordinaire diversite et la prodigieuse beaute de leurs formes. Le photographe français Charles Freger les a observes deux hivers durant. Ses portraits revelent les costumes saisis-sants d’une etonnante richesse. Exposes dans un premier temps à la Yossi Milo

gallery de Chelsea, ils sont à decouvrir à la galerie new-yorkaise Hermes sur Madison Avenue jusqu’au 8 juin. Wilder Mann fait egalement l’objet d’un tres beau livre disponible en français et en anglais chez Thames & Hudson pour la France et chez Dewi Lewis Publishing pour les États-Unis. ■

LES MAXIMONSTRES DE

CHARLES FRÉGER

www.charlesfreger.comw

PORTFOLIO

Babugeri, Bansko, Bulgarie, 2010-2011

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HISTOIRE

Anne Prah-Perochon

Le monde artistique commémore cette année la mort, il y a cinquante ans, du peintre Eugène Delacroix. « La plus belle palette de France », selon Cézanne.

ITINÉRAIRE D’UNE VIEDelacroix

À l’eglise Saint-Sulpice, à Paris, on peut admirer dans la chapelle des Saints-Anges une fresque magistrale peinte en 1861 par le grand artiste Eugene Delacroix. Cette scene intitulee Combat de Jacob avec

l’Ange represente le testament de l’artiste qui, lui aussi, deposait à jamais sa palette et ses pinceaux puisqu’il mourut en août 1863.

En 1859, pour se rapprocher de Saint-Sulpice où il travail-lait à son dernier chef-d’œuvre, Delacroix vint habiter une petite place ombragee de magnolias et nichee en plein cœur de Saint-Germain-des-Pres, la ravissante place Furstenberg, dans le VIe arrondissement, qui semble encore de nos jours à des annees-lumiere de l’agitation de la capitale ! C’est ainsi

La Liberté guidant le peuple, d’Eugène Delacroix

qu’elle dut apparaître au peintre, alors que la campagne d’embel-lissement de Paris (ou d’enlai-dissement, c’est selon les goûts) menee par le baron Haussmann, battait son plein. Delacroix, « la plus belle palette de France » comme l’appelait Cezanne avec admira-tion, n’avait plus que trois ans à vivre. À son grand deplaisir, Paris changeait de jour en jour et etait maintenant radicalement diffe-rente de la ville qu’il avait connue dans sa jeunesse, lorsque la capi-tale ne s’etendait pas plus loin que les grands boulevards, et que Montmartre et Auteuil etaient des banlieues eloignees. Les Champs-Élysees n’etaient encore qu’une route de campagne à tra-

vers champs, où il etait possible d’acheter du lait directement dans les fermes avoisinantes. Les lieux à la mode etaient le Pa-lais-Royal avec ses restaurants de luxe et le jardin des Plantes avec son zoo attenant où les Parisiens se precipiterent lorsqu’il fit l’acquisition d’une girafe en 1827. Le jeune Delacroix – il est ne en 1798 – y passait de longues heures à observer les felins, notant sur papier leur anatomie et leurs attitudes.

Il est difficile de trouver plus parisien que Delacroix pour-tant ne en banlieue, à Charenton-sur-Maurice. À la mort de son pere, Charles Delacroix, survenue en 1805, sa mere, Victoire, vint s’installer avec ses deux enfants, Eugene et Henriette, au 114, rue de l’Universite. Comme de nombreux Parisiens de la haute bourgeoisie – Charles-Maurice de Tal-leyrand, le plus brillant homme d’État du XIXe siecle, passait pour être le pere biologique du peintre – Eugene Delacroix frequentait au 123, rue Saint-Jacques le lycee imperial, l’ac-tuel lycee Louis-le-Grand, qui vit passer entre ses murs, au cours des siecles, les jeunes Moliere, Voltaire, Victor Hugo. Éleve brillant, Delacroix remporte les prix de latin et de grec et, faut-il s’en etonner, de dessin ! Apres le lycee, il s’inscrit à l’École des beaux-arts au 14, rue Bonaparte.

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HISTOIRE

Sans avoir la fibre revolutionnaire et hesitant à jouer un rôle actif dans les combats des rues (où en revanche ses amis Daumier et Dumas payerent de leur personne), Delacroix a neanmoins legue à la posterite l’un des plus touchants epi-sodes de la revolution de 1830 avec son celebre tableau La Liberté guidant le peuple. Au-delà des barricades, à côte de la femme, robuste allegorie de la Liberte, Delacroix s’est re-presente, l’expression menaçante, brandissant un mousquet et un drapeau tricolore. C’est aussi la premiere fois que le gamin des rues, Gavroche, immortalise par Victor Hugo dans Les Misérables, est represente.

La Nouvelle-AthènesAmoureux de la Rive gauche depuis son enfance, c’est pour se rapprocher de Josephine de Forget, une cousine eloignee avec laquelle il entretiendra une liaison de trente ans, que Delacroix se resigne en 1844 à traverser la Seine pour venir habiter au 58, rue Notre-Dame-de-Lorette, où il demeurera jusqu’en 1857. Ce quartier un peu à l’ecart de l’activite bruyante de la gare Saint-Lazare, des grands magasins et de Pigalle, denomme la Nouvelle-Athenes en raison de son unite architecturale neoclassique, devint un havre de calme pour les artistes romantiques, les chanteurs, les peintres et les ecrivains. L’un des plus beaux ensembles du quartier est le square d’Orleans, où habitaient Theophile Gautier, Victor Hugo, Chopin et George Sand. Tout à côte au 40, rue Saint-Lazare, Alexandre Dumas s’etait fait une reputation, lorsque le 30 mai 1833 il avait donne un bal costume symbolisant l’ere romantique. Malgre son plaisir à vivre dans ce quartier plaisant, Delacroix n’a jamais cesse d’être attire par la Rive gauche.

Retour au Quartier latinVers la fin de sa vie, le peintre revint habiter les lieux de sa jeunesse, au 6, rue Furstenberg, où il decida de faire construire un atelier. Cependant, ce n’etait pas la seule nostalgie qui ramenait Delacroix dans ce quartier : l’artiste avait enfin accepte de peindre des fresques pour la cha-pelle des Saints-Anges, à l’eglise Saint-Sulpice, bien que la commande datât de 1847. De son atelier, il gagnait à pied Saint-Sulpice malgre une toux qui lui vrillait la poitrine. L’eglise etant humide, Delacroix dut à plusieurs reprises cesser ce travail de galerien. « Je crois que j’y mourrai », ecrit-il prophetiquement dans son Journal. L’hiver 1862 l’eprouva durement et au printemps suivant, il n’eut plus la force de peindre. Le 13 août 1863, à 19 h, il s’eteignait. Enterre au cimetiere du Pere-Lachaise, Delacroix est entoure de ses nombreux amis, grandes figures romantiques telles que Marie d’Agoult, l’egerie de Franz Liszt, Balzac, Chopin, Manet, Gericault, Nerval. ■

Vocabulaire

Une vocation née au LouvreDelacroix aimait à raconter que sa vocation de peintre etait nee à l’âge de dix ans, lorsqu’il visita pour la premiere fois le palais du Louvre, recemment converti en un Museum natio-nal, enrichi des chefs-d’œuvre rapportes dans les fourgons des armees napoleoniennes, pour la plus grande joie des historiens d’art decides à en faire le plus grand musee du monde. « La vue de ces tableaux va décider de ma vocation : élève lorsque j’entrai au Louvre, j’en ressortis peintre », ecrira-t-il plus tard. Juchés sur des escabeaux, voire des echelles pour les grands tableaux, innombrables etaient les copistes au Louvre : jeunes filles du monde qui pratiquaient la peinture, rapins interesses qui ven-daient leurs productions aux touristes de passage, eleves de l’École des beaux-arts qui apprenaient leur metier. Delacroix etait de ceux-là. La restauration des Bourbons sur le trône de France en 1815 ramena d’Angleterre les nombreux emigres et retablit les liens culturels entre les deux pays. Au Louvre où il copiait les grands maîtres, Delacroix fit à cette epoque la connaissance d’un Anglais, Richard Bonington, qui peignait de merveilleuses vues de Paris à partir d’un fiacre stationne sur les quais. Pendant quelque temps, le Français partagea une mansarde avec lui et un autre Anglais, Thomas Fielding, au 2, rue Jacob. De la fenêtre de son atelier, Delacroix pouvait voir l’eglise Saint-Sulpice et le Pantheon dont il fit un char-mant lavis.

L’ami des RomantiquesHomme du monde jusqu’au bout des doigts, Delacroix ado-rait les receptions elegantes, les bals et les soirees musicales et devint rapidement un des habitues des salons parisiens. C’est dans un de ces salons que Victor Hugo lut pour la premiere fois sa preface de Cromwell et qu’Alfred de Musset presenta sa poesie. En 1827, il s’installe au 13, quai Voltaire, au 6e etage, dans un appartement qu’avait occupe le paysagiste Horace Vernet. Plus tard, Delacroix le louera à Camille Corot. C’etait un grand appartement avec de superbes vues sur la Seine qui s’etendaient jusqu’au Louvre, parfait pour peindre : « Je peux aller de ma chambre à mon atelier en pantoufles », aimait-il à dire plaisamment. Le charme des lieux etait encore accru par la proximite de ses amis. Ainsi, à quelques pas, au 19, quai Malaquais, habitait en 1832 George Sand dont la liaison avec Jules Sandeau se terminait, tandis que commençait celle avec Musset. C’est là qu’Aurore Dupin est veritablement devenue George Sand dont le mepris total des convenances, les cigares et l’habit masculin, attiraient les uns et scandalisaient les autres. En 1833, durant les moments dechirants qui suivirent la rupture de Sand avec Musset, Delacroix se represente dans un dessin aux côtes de la romanciere. Dans un moment de colere, Sand avait coupe sa superbe criniere et l’avait envoyee à son amant. C’est ainsi que Delacroix l’a dessinee en ces heures de malheur : pâle, amaigrie, epuisee par les insomnies, l’air d’un page avec sa chevelure ecourtee.

Le peintre des barricadesDe ses fenêtres Delacroix avait vue sur le Louvre, le pont Royal et plus loin les Tuileries où eclata la revolution de 1830.

Battait son plein = was in full swing Juchés = perchedRapins = daubers

Mansarde = atticLavis = wash drawingGamin des rues = street urchin

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SAVEURS

d’Alain DucasseLe New York

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SAVEURS

Restaurants chics, petits delis et epiceries, les quatre coins de la Grosse Pomme sont passes au crible du maître, qui accorde of course une place de choix à la cuisine hexagonale.

Au nord de Manhattan, celui qui decrocha trois fois trois etoiles au Guide Michelin rend visite à ses pairs, les membres du club tres select des toques françaises de New York. Dans l’Upper East Side, il casse la croûte avec le grand Daniel Boulud, puis traverse Cen-tral Park pour s’attabler chez Jean-Georges Vongerichten. Ils papo-tent autour d’un ris de veau braise à la reglisse mais dejà, à travers les grandes fenêtres de ce grand restaurant, Ducasse lorgne vers le grouillant Midtown.

On descend avec lui quelques blocs pour faire une halte à La Grenouille, un elegant et traditionnel restaurant familial où Charles Masson concocte queues de bœuf et souffles au chocolat dans les plus grandes regles de l’art. Impossible de traverser Midtown sans faire un detour par chez Benoit, qui excelle au rayon des grands classiques - quenelle de brochet, cassoulet - tandis qu’au bar, c’est brandade de morue et œufs mayo. L’adepte de cuisine de terroir ne manque pas de saluer Christian Delouvrier, à La Mangeoire, où les escargots aux tomates confites à l’ail font les beaux jours de cette brasserie incontournable de Midtown East.

Une fois atteint le sud de l’île, le chef-vedette poursuit le peri-ple au Balthazar, une brasserie parisienne à la new-yorkaise. On s’installe avec lui sur une banquette de cuir bordeaux qui rappelle les sieges du metro pour un poulet rôti et ses legumes dores. De Soho, on remonte au nord vers le West Village pour frimer au tres branche Cafe Gitane de l’Hôtel Jane, une cantine de style marocain retapee à la mode de l’epoque coloniale française. Devant la pyra-mide de couscous et les irresistibles sandwiches de pain aux cereales, à l’avocat et au piment, on se prend à rêver de Mediterranee.

Mais c’est dans l’East Village que Ducasse acheve son periple francophile. Lumiere sur le DGBG Kitchen & Bar, où on fait une ultime etape pour, au choix, une andouille de Louisiane au gombo ou une merguez et ses epinards au citron et à la menthe de Tunis. Rejouissances reservees à ceux à qui il resterait en-core des forces – et sur-tout de l’appetit. Les autres se desaltereront avec un simple demi de biere, tra-ditionnellement servi à la pression. ■

Estelle Lenartowicz

J’aime New York, paru chez Alain Ducasse Édition. Auteurs : Alain Ducasse et Alex Vallis. Photographe : Pierre Monetta. Disponible en librairie au prix de 35 euros.

Prenez un géant de la gastronomie française et plongez-le dans la plus mythique et alléchante des métropoles. Placez à ses côtés un photographe de talent et vous obtiendrez 600 pages d’un voyage culinaire au cours duquel Alain Ducasse a répertorié, et Pierre Monetta superbement illustré, ses 150 adresses new-yorkaises préférées.

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Café Gitane

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POINT FINAL

Comme les chats, Madeleine Malraux, 99 ans aujourd’hui, a eu plusieurs vies. Pianiste virtuose et seconde épouse de l’écrivain et ministre André Malraux, égérie d’un

microcosme francophile dans le New York des années 70, amie de Jackie Kennedy et d’Isaac Stern, ambassadrice d’une élégance à la française... Grâce à Madeleine Malraux, dont le journal reconstitué est paru en octobre dernier, on s’immerge dans cette grande

histoire du XXe siècle, racontée « Avec une légère intimité »*. Portrait d’une femme rare, qui n’a cessé de se réinventer, sous la plume de sa petite-fille.

Céline Malraux

Madeleine MalrauxLes mille et une vies de

Madeleine et André Malraux à Boulogne, en 1947. Madeleine Malraux à New York.

JUIN 2013 FRANCE - AMÉRIQUE 27

POINT FINAL

Scene du New York State Theater, 25 mai 1975. La Sonatine de Ravel deploie ses mouvements ondoyants sous les longues mains d’une pianiste vêtue de voile rouge. Ses cheveux bruns sont releves en chignon. Son

regard, tendu, concentre, se pose alternativement sur le clavier puis sur la danseuse etoile Violette Verdy, en bleu, qui devoile la grâce et l’invention endiablee de George Balanchine aux côtes de son partenaire masculin, Jean-Pierre Bonnefous, lui-même habille de blanc. La pianiste qui rythme cet extraor-dinaire pas-de-deux, joyau de ce tres français Festival Ravel, c’est Madeleine Malraux, l’epouse de l’ecrivain et ministre de la Culture, dont elle vient de quitter l’ombre grandissante pour amorcer sa renaissance americaine. À la voir, au cœur de cette decennie flamboyante des seventies, egerie glamour et talen-tueuse d’un microcosme de happy few new-yorkais, dont les figures ne sont autres qu’Isaac Stern, Igor Stravinsky, Nicolas Nabokov ou le choregraphe George Balanchine, qui se doute-rait qu’une poignee d’annees tout juste la separe du drame, de l’innommable perte de deux enfants ? Retour en arriere. Mai 1961, Andre Malraux est au sommet du pouvoir, aux côtes du general de Gaulle. Son epouse, Madeleine, est l’une des plus elegantes « femme de », parmi ces cercles amidonnes qui font le corset de l’epoque. Discrete, mais chaleureuse et delicate, Madeleine sait se faire apprecier de tous : des officiels d’une vie publique qui les ronge insidieusement, mais aussi des artistes, dont Malraux se fait l’ambassadeur genial. Soudain, la nouvelle tombe. Les deux fils d’Andre, que Madeleine a eleves depuis toujours, sont victimes d’un tragique accident de voiture. À l’oree d’un deuil insoutenable, les Malraux doivent accueillir les Kennedy en visite officielle. C’est paradoxalement là que naîtra cette amitie si particuliere qui unira les deux epouses, Madeleine et Jackie. Entre ces deux souffrances tues, demeure Alain, le fils de Madeleine et de Roland, son premier epoux et frere d’Andre. Car côte drames, chez les Malraux, on n’en est pas au galop d’essai. Remontons un peu plus loin dans le temps. Nous sommes avant-guerre. Madeleine s’appelle encore Lioux. Elle est soliste et professeur de piano au conservatoire de Toulouse. Cette jeune femme independante et sportive, dotee d’un immense talent pour la musique, croise le chemin de Roland Malraux, frere du prix Goncourt, lui-même jour-naliste et traducteur. La guerre scelle leur amour d’un mariage en noir. Alors que la promesse d’un enfant se profile, l’urgence de la Resistance happe le courage et la presence de Roland, qui disparaît, on ne sait vraiment où. Prisonnier ? Vivant ? Mort ?

Deux absents en communÀ la Liberation, Madeleine apprend le deces de Roland, dans le naufrage du Cap Arcona, le navire qui l’eloignait du camp de Neuengamme deserte par les Allemands. De son côte, Andre est veuf de sa compagne Josette Clotis, fauchee par le tortillard de Saint-Chamant, qui lui laisse deux fils, Vincent et Gauthier. Les deux ombres, petries de traumatismes, vont reconstruire ensemble l’ebauche d’une famille, la tentative d’une harmonie, avec ces trois garçonnets à elever. D’abord, simplement sous le même toit. Puis en tant que couple. S’en suivent vingt ans de vie commune, dans ce grand hôtel particulier de Boulogne où trône le piano double de Madeleine, orne des quelques feuil-lets quotidiens d’Andre, qu’il lui laisse la delicatesse de relire. Entre ecrits sur l’art – La Psychologie de l’Art, parue en 1947, est dediee à Madeleine –, voyages autour du monde, rencontres des plus grands et responsabilites politiques, le curseur se de-

place progressivement de la sphere intime à la sphere publique. Madeleine a mis sa carriere de pianiste entre parentheses pour incarner cet equilibre qui faisait defaut à Andre, pour être la mere de trois orphelins, pour oublier qu’elle a perdu son grand amour, Roland, catalysant tous ses rêves. Quand la tragedie frappe à nouveau, avec l’accident mortel de Vincent et Gau-thier, puis avec l’attentat chez eux, à Boulogne – en pleine crise algerienne – blessant atrocement la fille de leurs proprietaires, le couple Malraux, contraint de demenager, quitte definiti-vement le cadre de leur harmonie et s’installe au pavillon de la Lanterne à Versailles. Le quotidien se transforme en enfer, dont une separation ineluctable delivre Madeleine, non sans humiliation.

Renaissance new-yorkaiseC’est à New York que Madeleine se releve, parrainee tout à la fois par un petit monde d’artistes, par le genie de la finance Andre Meyer, qui la prend sous son aile, et par la belle Jac-kie Kennedy. Ces relations, Madeleine les a forgees au fil du temps, depuis que la France, par l’intermediaire de Malraux, a prête aux États-Unis La Joconde. L’occasion d’un sejour tres officiel au cours duquel les epouses Malraux et Kennedy – que le magazine Life avait alors consacrees comme « egalement rayonnantes » –, se sont rapprochees.

À partir de la fin des annees 60, Madeleine s’envole dans un tourbillon americain qui la propulse loin de l’atmosphere grinçante et empesee d’une vie qu’elle n’avait pas choisie. On croit en elle, elle existe à nouveau pour ce qu’elle est…

9 janvier 1968Concert au Carnegie Hall hier soir, aux côtes d’Isaac Stern. Sonates de Mozart. La salle, pourtant comble, ne m’a pas tel-lement impressionnee, grâce à la presence rassurante d’Isaac (pourtant nous n’avions repete que trois fois). Et le Steinway – magnifique toucher – se conformait parfaitement à l’inten-tion de mes doigts. Quelle chance de retrouver cette compli-cite musicale dont j’avais même oublie l’existence… Et je crois que j’ai bel et bien renoue avec la scene. Apres le concert, nous avons eu un grand souper au champagne. Isaac m’a embras-see à la russe, sur les levres, la bouche pleine de champagne… C’etait un peu degoûtant, mais plutôt drôle ! (…)

Une decennie piquante, luxueuse, enivrante dont Made-leine fait son miel et qu’elle commente avec humour et lucidite.

8 janvier 1969Jackie Onassis et moi, ainsi qu’une petite bande, sommes allees au club El Morocco, sur East 54th. Comme il etait gauche ! Jackie se moquait, pas trop mechamment, de lui... Je ne sais pourquoi, j’ai eu le sentiment que je n’avais rien à faire là, entre fauteuils zebres et feuilles de palmier. Il y a des moments où j’emprunte une vie, un peu comme ces belles robes de collec-tion que les couturiers me prêtent, avant de me les donner tout à fait.

Les amities new-yorkaises, sinceres, demeureront au-delà du retour de Madeleine à Paris, qui ouvre un nouveau cha-pitre dans cette vie en forme de « concert au cœur du siecle », et poursuit cette destinee digne d’Hollywood, à la fois flam-boyante, tragique et musicale. ■

*Avec une légère intimité – Le Concert d’une vie au cœur du siècle, un livre deMadeleine et Céline Malraux (Baker Street/Larousse)

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INSTANTANÉS

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1 Denver, CO – Le 25 avril a été lancée la dernière édition du J’adore French Film Festival, organisée par l’Alliance Française locale et la Denver Film Society. Douze films ont été projetés pendant quatre jours après une inauguration en présence de l’acteur Jean-Pierre Darroussin (à droite) et du consul général de Los Angeles Axel Cruau (à gauche). © Jon Yamamoto

2 Nashville, NC – Le 30 avril, le scientifique Jo-seph Parello a été nommé chevalier dans l’ordre de la Légion d’honneur par la conseillère en sciences à l’ambassade, Annick Suzor-Weiner. Il était ainsi félicité pour ses contributions à la collaboration franco-améri-caine en science biochimique.

3 Portland, OR – Le 20 avril, l’Alliance Française a or-ganisé son premier dîner-gala, sous le signe de la Belle Époque, en partenariat avec la FACC du Pacifique Nord-Ouest. Parmi les 230 convives, ici LuAnn Rukke et Pascale Theurier Beard, du conseil d’administration de l’Alliance, sont entourées d’une danseuse de French cancan et du comédien John Ellingson. © Ben Trimbo

4 New York, NY – Le 13 avril, les Bretons de la Grosse Pomme ont invité à un match de football amical les marins de la frégate militaire Aquitaine, de passage pour des essais de leur nouveau navire. En présence également de vétérans de guerre français, le Stade brestois mené par le président de BZH NY Charles

Kergaravat (debout tout à droite) a remporté la partie 7-2.

5 Chicago, IL – Le 12 avril, la Nuit des Étoiles, gala annuel de la FACC, a célébré l’année de la Dordogne. Dégustations de vins et de produits du terroir étaient notamment au programme de cette soirée coordon-née par Juan-Luis Goujon, le président du conseil de la FACC-Chicago, Emmanuèle van Houdenhoven, sa di-rectrice (elle-même originaire de Dordogne), Bernard Cazeau, sénateur dudit département et Graham Paul, le consul général de France à Chicago. © Thomas Vangel

6 Miami, FL – Le 20 avril, la French International Pro-gram Association (Fipa) a tenu son gala qui cette an-née avait pour thème : la nuit hollywoodienne. Pour promouvoir l’enseignement bilingue dans les écoles publiques de Miami, la présidente de l’association Sophie Jamet (à droite, ici avec Frédéric Audouze en Austin Powers) a levé des fonds lors d’une soirée chez le consul général.

7 New York, NY – Le 23 avril, Fabrice Jaumont (à gauche) a reçu les insignes de chevalier dans l’ordre des Palmes académiques des mains d’Antonin Baudry, conseiller culturel à l’ambassade de France à New York, visiblement ému. L’attaché à l’éducation de l’ambassade se voit ainsi récompensé pour son travail en faveur de la création de programmes bilingues dans

les écoles publiques aux États-Unis. © Laura Pertuy

8 Boston, MA – Le 3 mai, le French Cultural Center de Boston a organisé son bal annuel sur le thème Saint-Germain-des-Prés. La directrice du Centre, Cathe-line van den Branden, a présidé une soirée de levée de fonds qui évoquait avec élégance la Rive gauche parisienne dans les années d’après-guerre. © Russ

Mezikofsky Photography

9 Arnaudville, LA – Du 19 au 24 avril s’est tenue la pre-mière édition de la Semaine Française d’Arnaudville, célébrant culture, économie et développement dura-ble dans un cadre francophone, rassemblant Tudual Hervieux, président du Groupement Culturel Breton, Cheikh Niang, ambassadeur de la République du Sé-négal aux États-Unis, Jay Dardenne, lieutenant-gou-verneur de Louisiane, Marco Félez, le président des Articulteurs, collectif breton venu pour l’événement, et Jean-Claude Brunet, consul général de France à La Nouvelle-Orléans.

10 New York, NY – Le 18 avril, Pierre Cournot (au mi-lieu) a reçu les insignes de chevalier dans l’ordre de la Légion d’honneur des mains de Gérard Araud (à droite), ambassadeur de France à l’ONU. Lors de son discours, le consul général de France Bertrand Lor-tholary (à gauche) a remercié l’avocat du consulat pour ses services rendus depuis vingt ans. © Raymond Hamlin

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