Francisco Candido Xavier Fr Série André Luiz 10 Action Et Réaction Yjsp

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André Luiz nous montre que nos possibilités dans l’actuelle existence sont en relation avec nos actions du passé, de la même façon que nos actions d’aujourd’hui conditionneront nos possibilités de demain.L’auteur spirituel décrit les régions inférieures de la sphère spirituelle, reportant la souffrance (de celle ou celui qui s’est condamné à une conscience de fautes) après la mort physique, et nous montre les nouveaux chemins, qui peuvent être choisis et parcourus pour la recherche du bonheur. Pour cela, il nous présente des cas réels, nous offrant des orientations, sur le débit à soulager, la loi de cause à effet, les préparatifs pour la réincarnation, les sauvetages et la valeur de la prière. .

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Action Et R?action (French Edition)

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francisco candido xavier

ACTIONREACTION

PAR LESPRIT ANDRE LUIZ

Francisco Candido Xavier

ACTION REACTION

Srie Andr Luiz (Collection: La Vie dans le Monde Spirituel)Tome 10

Andr Luiz nous montre que nos possibilits dans lactuelle existence sont en relation avec nos actions du pass, de la mme faon que nos actions daujourdhui conditionneront nos possibilits de demain.

Lauteur spirituel dcrit les rgions infrieures de la sphre spirituelle, reportant la souffrance (de celle ou celui qui sest condamn une conscience de fautes) aprs la mort physique, et nous montre les nouveaux chemins, qui peuvent tre choisis et parcourus pour la recherche du bonheur. Pour cela, il nous prsente des cas rels, nous offrant des orientations, sur le dbit soulager, la loi de cause effet, les prparatifs pour la rincarnation, les sauvetages et la valeur de la prire. .

Lorsque llve est prt, le matre apparat.

Edition brsilienne originale

francisco candido xavier

Srie Andr Luiz (Collection: La Vie dans le Monde Spirituel)Tome no 10

Nosso Lar, la Vie dans le Monde Spirituel, Les MessagersMissionnaires de la Lumire Ouvriers de la Vie Eternelle Dans le Monde Suprieur Agenda Chrtien Libration, par l'esprit Andr Luiz Entre le Ciel et la Terre Dans les Domaines de la Mdiumnit Action et Raction Evolution entre deux MondesMcanismes de la MdiumnitEt la Vie Continue

Srie Andr Luiz (Collection: La Vie dans le Monde Spirituel)Livres complmentaires

Conduite spirite Sexe et destin Dsobsession

OUVRAGES DEJA TRADUITS EN FRANAIS

Srie: Andr Luiz (Collection La vie dans le monde Spirituel) 1-16Nosso Lar, la Vie dans le Monde Spirituel, Les MessagersMissionnaires de la Lumire Ouvriers de la Vie Eternelle Dans le Monde Suprieur Agenda Chrtien Libration, par l'esprit Andr Luiz Entre le Ciel et la Terre Dans les Domaines de la Mdiumnit Action et Raction Evolution entre deux MondesMcanismes de la MdiumnitEt la Vie ContinueConduite spirite Sexe et destin Dsobsession

Srie: Emmanuel Les Romans de lhistoire Il y a deux mille ans50 ans plus tardAv ChristPaul et EtienneRenoncement

Srie: Source ViveChemin, Vrit et Vie. Notre PainLa Vigne de LumireSource de Vie

DiversArgentChoses de ce Monde (Rincarnation Loi des Causes et Effets)Chronique de lAu-delContes SpirituelsDirectivesIdal SpiriteJsus chez VousJustice DivineLe ConsolateurLettres de lautre mondeLumire ClesteMatriel de constructionMomentNousReligions des EspritsSignal vertVers la lumire

TABLES DES MATIERES

Avant-propos7A propos des nologismes et du sens des mots8Lexique9 propos du centenaire10

Lumire parmi les ombres12Commentaires de lInstructeur18Lintervention dans la mmoire26Quelques Esprits rcemment dsincarns36mes malades44Dans les cercles de la prire55Une conversation prcieuse63Prparatifs pour le retour72Lhistoire de Silas83Comprhension93Le temple et le parloir107Dette aggrave116Dbit stationnaire124Sauvetage interrompu132Remarques opportunes141Dbit allg148Une dette qui touche sa fin159Rachats collectifs166Sanctions et aides173Une surprise mouvante179

Srie Andr Luiz: Prsentation de chaque livre (1-16)187-192Bibliographie de Francisco Candido Xavier195Listes des ouvrages en brsilien198

AVANT-PROPOS

Ce livre fait partie d'une srie de treize ouvrages qui seront traduits en franais au fil du temps. Ils ont tous t psychographis , c'est--dire reu par criture automatique voir ce sujet Allan Kardec, Le Livre des Mdiums sujet 157 , par le plus connu des mdiums brsiliens, Francisco Cndido Xavier galement connu sous le surnom de Chico Xavier.

Chico est n au Brsil, dans la ville de Pedro Leopoldo, tat du Minas Grais, en 1910. Trs tt il travailla au dveloppement de sa mdiumnit. Durant toute sa vie, ce n'est pas moins de 437 ouvrages qu'il crira sous la dicte de divers Esprits, dont Emmanuel, son guide spirituel, et Andr Luiz, mdecin de son vivant qui vcut au Brsil o il exerait sa profession.

Andr vcut sa vie sans s'inquiter des choses spirituelles jusqu' ce que vienne sa dsincamation. Cette tape est conte dans le premier livre de la srie, le plus vendu ce jour, Nosso Lar : La vie dans une colonie spirituelle . On y dcouvre l'arrive du mdecin dans l'au-del aprs qu'il ait quitt son corps physique. Mdecin sur la Terre, perdu dans l'ternit, on le voit voluer, se questionner, remettre ses croyances en question et grandir spirituellement. Il nous raconte son histoire tel qu'il l'a vcue et ressentie.

Cette srie a pour but de montrer aux incarns que nous sommes, que rien ne s'arrte la mort du corps physique, loin de l.

Ces lectures pourront certainement surprendre de par l'aspect extraordinaire des rcits. Pourtant, celui qui a lu ou lira Le Livre des Esprits, coordonn par Allan Kardec, avec attention, pourra y voir la concrtisation des prceptes et des fondements de la doctrine dlivre par les Esprits.

La vie existe des degrs que nous ne souponnons mme pas, et nos frres de l'invisible sont l pour nous clairer, nous guider, pour nous redonner un peu de confiance et de srnit face aux grands questionnements de la vie et de la mort.

Chacun de ces treize ouvrages aborde un thme li au Spiritisme, la vie des Esprits dans leurs relations quotidiennes entre eux mais aussi avec les incarns travers la mdiumnit.

Ainsi, c'est une porte que nous voudrions ouvrir, aux lecteurs de langue francophone, sur un univers grandiose, tel qu'il est, dans toute son immensit, toute sa splendeur ; l'Univers qui nous entoure.

LE TRADUCTEUR

A PROPOS DES NEOLOGISMES

Allan Kardec, lui-mme, disait dans Introduction l'tude de la doctrine spirite du Livre des Esprits que pour les choses nouvelles il faut des mots nouveaux .

Le Spiritisme est une doctrine nouvelle qui explore des domaines nouveaux. Ainsi, afin de pouvoir en parler clairement, nous avons besoin d'un vocabulaire limpide, parlant.

De plus, dans le respect des livres originaux, ces traductions ont eu besoin de l'emploi de mots n'existant pas dans la langue franaise pourtant si riche. D'autres termes, d'autres expressions ont, quant eux, un sens un peu diffrent de celui gnralement attribu.

Tout cela se trouve expliqu dans le court lexique qui suit.

LEXIQUE

Ce petit lexique a pour but d'expliquer les nologismes employs et le sens de certains mots dans leur acception spirite.

DSOBSESSION : Travail d'assistance mdiumnique durant lequel une discussion s'tablie entre l'Esprit obsesseur et une personne charge de l'orientation spirituelle. Nologisme.

OBSESSEUR: Esprit, incarn ou dsincarn, se livrant l'obsession d'une autre personne, elle-mme incarne ou dsincarne. Nologisme.

ORIENTATION SPIRITUELLE : discussion visant aider et clairer un Esprit souffrant sur sa condition et sur les opportunits d'amlioration de son tat. Se pratique lors des sances de dsobsession , par des orienteurs incarns ou dsincarns.

OBSESSION : Acte par lequel un Esprit exerce un joug sur un autre Esprit (voir ce sujet Le Livre des Mdiums, ch. 23 - De l'obsession).

PSYCHOGRAPHIE : Du grec psufch (me) et graphia (criture) ; fait d'crire sous la dicte d'un Esprit. Type de mdiumnit. Nologisme. psychographier

PSYCHOPHONIE : Du grec psufch (me) et phnia (voix) ; fait de parler sous l'influence d'un Esprit. Mdiumnit d'incorporation. Nologisme.

PRISPRIT : Enveloppe semi-matrielle de l'Esprit. Chez les incarns, il sert de lien ou d'intermdiaire entre l'Esprit et la matire ; chez les Esprits errants, il constitue le corps fluidique de l'Esprit. (Le Livre des Mdiums, chapitre 32 - Vocabulaire Spirite)

prispritique : qui est relatif au prisprit. Nologisme.

VAMPIRE : les vampires, dans le Spiritisme, sont des tres qui absorbent l'nergie et les sensations des personnes. Il ne s'agit plus de buveurs de sang mais de buveurs de fluides qui sont, en ralit, des Esprits ignorants, encore trs attachs aux sensations et la matire.

VOLITION : Exercice de la volont dans une exprience parapsychologique. (Petit Robert) Acte par lequel les Esprits se dplacent au moyen de leur volont. Ils flottent pour ainsi dire dans l'air, et glissent sur la terre.

voliter

propos du centenaire

Le 18 avril 1957, la Codification Kardeciste, sous lgide du Christ de Dieu, clbrera son premier centenaire dun travail prcieux auprs de lHumanit terrestre.

Un sicle de travail, de rnovation et de lumire

Afin de contribuer aux hommages rendus cet vnement mmorable, Andr Luiz a crit les pages de ce livre.

En lcrivant, notre ami a rvl une partie des rgions infrieures o la conscience coupable se projette, au-del du corps physique. Il la rvle afin de souligner limportance de lexistence corporelle, comme tant une vritable faveur de la Misricorde Divine, pour que nous nous adaptions la Justice Indfectible.

Cest pour cela quil entremle les fils de ses considrations la narration des relations entre la sphre des Esprits incarns et les cercles de purgation, o sattardent les compagnons librs de la chair, qui devinrent complices dans la dlinquance, crant ainsi, travers les carts de leur propre conduite, lenfer extrieur qui nest rien dautre que le reflet de nous-mmes quand, par le relchement et par la cruaut, nous nous livrons la pratique des actions avilissantes qui nous contraignent une sgrgation temporaire dans les rsultats dplorables de nos propres erreurs.

Von Liszt, minent criminologue des temps modernes, fait observer que ltat, dans sa reprsentation dorganisme suprieur, abstraction faite, bien entendu, des groupes criminels qui lentranent parfois dans les funestes abus du pouvoir, ne peut se passer de peines afin de maintenir lordre juridique. La ncessit de conservation de ltat justifie la peine. Avec cette conclusion, les anciennes controverses parmi les thories du Droit Pnal disparaissent presque totalement, car quelque soit le climat dengagement politique, la tendance punir est congnitale chez lhomme commun, face la ncessit de maintenir, autant que possible, lintangibilit de lordre dans le plan collectif.

Mais Andr Luiz nous fait sentir que le Spiritisme rvle une conception de la justice encore plus ample.

La crature ne se trouve pas simplement subordonne au critre des criminologues du monde, considrs comme defficaces chirurgiens dans le traitement ou dans lextirpation de la gangrne sociale. Plus ltre est clair, plus il est responsable, plus il se livre naturellement aux jugements de sa propre conscience, sur Terre ou en dehors, chaque fois quil sengage dans les ronciers de la culpabilit.

Ainsi, ses pages ont pour objectif de souligner que les principes codifis par Allan Kardec ouvrent une nouvelle re pour lesprit humain, lobligeant pratiquer un examen de conscience dans le rajustement des chemins tracs par Jsus pour le vritable progrs de lme, et ils expliquent que, de ce fait, le Spiritisme discipline notre libert, non seulement pour que nous ayons sur Terre une vie sociale qui nous rende meilleurs, mais galement pour que nous ayons dans le champ de lesprit, une vie individuelle harmonieuse dment ajuste aux impratifs de la Vie Universelle Parfaite, en accord avec les normes de la Justice ternelle, labores par le suprme quilibre des Lois de Dieu.

Voici pourquoi, alors que nous les prsentons au lecteur ami, nous reconnaissons dans les postulats que nous avons embrasss, non seulement un sanctuaire de consolations sublimes, mais galement un temple de responsabilits dfinies, pour considrer que la rincarnation est un stage sacr de recommencement de nos expriences et que la Doctrine Spirite, revivifiant lvangile du Seigneur, est un rayon resplendissant sur la route volutive, nous aidant rgnrer le destin lui-mme pour ldification de la flicit relle.

En rsum, lAuteur nous dmontre que nos possibilits daujourdhui nous lient aux ombres dhier, exigeant notre travail infatigable en faveur du bien, pour la construction de Demain, sur les bases rdemptrices du Christ.

Exaltant ainsi les mrites inestimables de luvre dAllan Kardec, nous le flicitons, avec motion, en ce centenaire bni.

Emmanuel

Pedro Leopoldo, le 1er janvier 1957.

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Lumire parmi les ombres

Oui, affirma lInstructeur Druso, avec sagesse. Ltude de la situation spirituelle de la crature humaine, aprs la mort du corps, ne peut tre relgue au second plan. Toutes les civilisations qui prcdrent la gloire occidentale dans les temps modernes consacrrent une attention particulire aux problmes doutre-tombe. Lgypte entretenait un change constant avec les trpasss, et elle enseignait que les morts devaient comparatre devant un rigoureux jugement entre Anubis, le gnie la tte de chacal, et Horus, le gnie la tte de faucon, et devant Mat, desse de la justice, dcidant si les mes devaient monter vers la splendeur solaire ou si elles devaient revenir vers les labyrinthes de lpreuve, sur Terre, dans des corps dforms et vils. Les hindous reconnaissaient que les dsincarns, conformment aux dcisions du Juge des Morts, slevaient vers le Paradis ou descendaient dans les prcipices du royaume de Varuna, le gnie des eaux, afin dtre enferms dans des chambres de torture, attachs les uns aux autres par dinfernaux serpents. Les Hbreux, les Grecs, les Gaulois et les Romains nourrissaient des croyances plus ou moins similaires, convaincus que llvation cleste tait rserve aux Esprits droits et bons, purs et nobles, les tourments de lenfer chouant ceux qui se rabaissaient dans la perversit et dans le crime, dans les rgions de supplice, hors ou au sein du monde, travers la rincarnation dans des corps vieillis par lexpiation et la souffrance. La conversation nous fascinait. Hilario et moi tions en visite la Manso Paz, remarquable cole de rajustement dont Druso tait le directeur dvou et ami. Situ dans les rgions infrieures, ltablissement tait une sorte de monastre Saint Bernard, au cur dune zone afflige par une nature hostile, la diffrence prs que la neige, pratiquement constante autour du clbre couvent incrust dans les dfils entre la Suisse et lItalie, tait ici remplace par une ombre paisse qui, en cet instant, spaississait, agite et terrible, autour de linstitution, comme si elle se trouvait fouette par un vent incessant. Le refuge accueillant, qui se trouvait sous la juridiction de Nosso Lar[1], avait t fond il y a plus de trois sicles, se ddiant laccueil des Esprits malheureux ou infirmes, dcids travailler pour leur propre rgnration, tres qui slvent jusqu des colonies de perfectionnement dans la Vie Suprieure ou qui retournent vers la sphre des hommes pour la rincarnation rectificatrice. Pour cette raison, lnorme pt de maisons, pareil une vaste citadelle installe avec toutes ses ressources dfensives et de scurit, entretient des secteurs dassistance ainsi que des cours dinstruction, dans lesquels des mdecins, des prtres, des infirmiers et des professeurs, trouvent, aprs la mort terrestre, des apprentissages ainsi que des occupations de la plus haute importance. Nous prtendions effectuer quelques observations propos de la loi de causalit le karma des hindous et, dment recommands par le Ministre de lAide, nous nous trouvions ici, enchants par les paroles de lorienteur qui, dvou, poursuivit aprs une longue pause: Il convient de noter que la Terre est perue sous les plus divers angles. Pour lastronome, il sagit dune plante qui gravite autour du Soleil; pour le guerrier, cest un champ de bataille o la gographie se modifie la pointe de la baonnette; pour le sociologue, elle reprsente un grand abri dans lequel diverses races sinstallent; mais pour nous, la Terre est une prcieuse arne de service spirituel, pareille un filtre o lme se purifierait, peu peu, au cours des millnaires, affinant des qualits divines pour lascension dans la gloire cleste. Voici la raison pour laquelle il faut soutenir la lumire de lamour et de la connaissance au sein des tnbres, de la mme manire quil est ncessaire de maintenir le remde au cur de la maladie. Alors que nous coutions, nous vmes au dehors, travers la matire transparente de la large fentre, la convulsion de la Nature. Un vent fort, hurlant, qui emportait avec lui une substance obscure, pareille de la boue vaporeuse, remuait avec violence en un trange tourbillon, telle une cascade de tnbres... Et du corps monstrueux de cette terrible tornade, des visages humains apparaissaient en dabominables grimaces, vocifrant des maldictions et gmissant. Ils apparurent soudainement, attachs les uns aux autres comme une vaste chane de cratures accroches entre elles, quand vient le danger, dans le but instinctif de dominer et de survivre. Tout comme nous, Druso contempla le triste spectacle avec de la piti qui transparaissait sur son visage. Il nous fixa en silence, comme sil nous invitait la rflexion. Il semblait nous dire combien ce travail dans ce paysage de souffrance lui faisait mal, quand Hilario demanda: Pourquoi nouvre-t-on pas les portes ceux qui crient l dehors? Ne sommes-nous pas dans un poste de secours? Si, rpondit lInstructeur, mu. Mais le salut nest important que pour ceux qui dsirent se sauver. Et aprs une petite pause, il reprit: De ce ct-ci de la tombe, tout cela reprsenta pour moi la plus douloureuse surprise qui soit, la rencontre avec toutes ces btes humaines, qui habitaient le temple de la chair, sous lapparence de personnes communes. Si nous les accueillons sans la prparation ncessaire, ils nous attaqueraient sur le champ, ravageant notre institut dassistance pacifique. Et nous ne pouvons perdre de vue que lordre est la base de la charit. Malgr lexplication ferme et sereine, Druso sefforait se concentrer sur le panneau extrieur, si grande tait la compassion qui se peignait sur son visage. Peu aprs, rtablissant son expression faciale, lInstructeur dit: Nous faisons face aujourdhui une importante tempte magntique, et de nombreux habitants des rgions infrieures sont arrachs par louragan comme des feuilles sches par un coup de vent. Et ont-ils conscience de cela? demanda Hilario, perplexe. Trs peu dentre eux en ont conscience. Les tres qui se maintiennent ainsi dcouverts, aprs la tombe, sont ceux qui ne trouvent pas le refuge moral du moindre principe noble. Leur cur est tourbillonnant et entnbr, comme la tourmente elle-mme, en raison des penses dsordonnes et cruelles quils nourrissent. Ils hassent et dtruisent, mordent et blessent. Les installer maintenant dans les sanctuaires de secours tablis ici, reviendrait au mme que dabriter des tigres au milieu des fidles qui prient dans un temple. Mais restent-ils indfiniment dans ce terrible dsquilibre? insista mon compagnon, angoiss. Lorienteur tenta de sourire et rpondit: Non. De telles phases dinconscience et de perte de repres passent galement comme la tempte, bien que la crise puisse durer pendant de nombreuses annes. Frappe par la tourmente des preuves que la douleur lui impose, de lextrieur vers lintrieur, lme se reconstruit peu peu, se calmant jusqu finalement embrasser les responsabilits quelle a cres pour elle-mme. Alors vous voulez dire que le plerinage de purgation de lEsprit, aprs la mort, dans les endroits de tnbres et de souffrance, nest pas suffisant pour que les dbits de la conscience soient rachets... dis-je mon tour. Exactement, expliqua lami, en coupant mes considrations rticentes. Le dsespoir quivaut la folie dans laquelle les mes se jettent en des explosions dabsence de retenue et de rvolte. Il ne fait pas office de paiement dans les tribunaux divins. Il serait draisonnable que le dbiteur rgle par des cris et des injures les engagements quil a contracts par le fruit de sa propre volont. Dailleurs, nous ressortons toujours plus malheureux des dsordres mentaux auxquels nous nous abandonnons, imprvoyants, car nous nous trouvons plus endetts. La fivre de la folie et de la rbellion termine, lEsprit coupable revient vers le remords et la pnitence. Il se calme comme la terre qui retrouve la srnit et la patience, aprs avoir t insulte par un tremblement de terre, bien quelle ait t froisse et blesse. Alors, limage du sol qui nouveau sert aux plantations profitables, il se soumet la semence rnovatrice de ses destins. Une attente tourmente stait empare de nous quand Hilario demanda: Ah! si les mes incarnes pouvaient mourir dans le corps, quelques jours par an, non pas comme cela se produit lors du sommeil physique dans lequel elles se ressourcent, mais avec une pleine conscience de la vie qui les attend!... Oui, ajouta lorienteur. Cela modifierait rellement laspect moral du monde; cependant, lexistence humaine, pour aussi longue quelle soit, est un simple apprentissage au cours duquel lEsprit a besoin de bnfiques restrictions afin de rparer son chemin. En utilisant une nouvelle machine physiologique parmi ses semblables, il doit rpondre la rnovation qui le concerne et cela exige la centralisation de ses forces mentales dans lexprience terrestre laquelle il sattache temporairement. Les paroles fluides et sages de lInstructeur taient pour nous source dun singulier enchantement et, parce que je me sentais le devoir de profiter de chaque minute, je rflchis en silence quant la qualit des mes dsincarnes qui souffraient la pression de la tourmente extrieure. Druso perut mon questionnement intrieur et sourit, comme sil attendait ma question claire et positive. Pouss par la force de son regard, je fis respectueusement observer: Face au douloureux spectacle auquel il nous est donn dassister, nous sommes naturellement amens penser lorigine de ceux qui vivent la plonge dans ce tourbillon dhorreur... Sagit-il de dlinquants communs ou de criminels accuss de grandes fautes? Trouverions-nous par ici des tres primitifs comme nos indignes par exemple? La rponse amie ne se fit pas attendre. De telles demandes menvahirent galement lesprit, quand je suis venu ici, dit-il. Voici cinquante annes successives que je suis dans ce refuge de secours, de prire et despoir. Jai franchi le seuil de ce centre en tant que grave infirme, aprs le dliement davec mon corps terrestre. Jai trouv ici un hpital et une cole. Protg, je me suis mis tudier ma nouvelle situation, dsirant servir. Jai t brancardier, cooprateur de nettoyage, infirmier, professeur, magntiseur, jusqu ce quil y a quelques annes de cela, je reoive, avec une grande joie, la tche dorienter linstitution, sous le commandement positif des instructeurs qui nous dirigent. Contraint de patientes et laborieuses recherches, en raison de mes devoirs, je peux vous assurer que les paisses tnbres alentour proviennent des consquences qui sentnbrent dans les crimes dlibrs, teignant la lumire de lquilibre. Dans ces rgions infrieures, les mes ne transitent pas simplement au sein dune quelconque affliction purgative, car elles se trouvent dans les erreurs naturelles des expriences primaires. Chaque tre sera soumis, par lattraction magntique, au cercle dvolution qui lui est propre. Jusqu ce que leur monde mental se dveloppe, les sauvages, dans leur grande majorit, vivent presque toujours confins dans la fort qui rsume leurs intrts et leurs rves, se retirant lentement de son champ tribal, sous la direction des Esprits bienveillants et sages qui les assistent. Et les mes notoirement primitives, cheminent, pour la plupart, sous linfluence de gnies bienfaisants qui les soutiennent et les inspirent, travaillant avec sacrifice dans les bases de linstitution sociale et profitant des erreurs, enfants des bonnes intentions, la manire de prcieux enseignements qui garantissent lducation de ces mes. Je puis ainsi vous assurer: il ny a que les esprits qui, connaissant les responsabilits morales, les fuient dlibrment dans lobjectif dlirant de leurrer Dieu lui-mme, qui rsident dans les zones infernales proprement dites. De cette manire, lenfer peut absolument tre dfini comme tant un vaste champ de dsquilibre, tabli par la mchancet calcule, ne de laveuglement volontaire et de la perversit absolue. Il y vit, parfois pendant des sicles, des Esprits qui se bestialisrent, fixs dans la cruaut et dans lgocentrisme. Mais reprsentant une large province vibratoire en connexion avec lHumanit terrestre, puisque toutes les souffrances infernales sont des crations de cette dernire, ces tristes endroits fonctionnent comme des cribles ncessaires tous les Esprits qui glissent dans les dsertions dordre gnral, ngligeant les responsabilits que le Seigneur leur accorde. De cette manire, toutes les mes dj investies dans la connaissance de la vrit et de la justice, et de ce fait, responsables pour ldification du bien, et qui, sur Terre, sgarent dans un dlit ou un autre, manquant dattention envers le devoir ennoblissant que le monde lui indiqua, demeurent dans ces lieux pendant des jours, des mois ou des annes, aprs la mort de leur corps, reconsidrant leurs attitudes avant que ne survienne la rincarnation qui leur permettra de se rajuster aussi rapidement que possible. De cette manire... Hilario se disposait effectuer des conclusions, mais Druso, saisissant son ide, coupa en rsumant: De cette manire, les gnies infernaux qui imaginent gouverner cette rgion avec un pouvoir infaillible, vivent ici pour une dure indtermine. Les cratures perverses qui sassimilent eux, bien que souffrant de leur domination, se laissent retenir ici pendant de longues annes. Et les mes dvoyes dans la dlinquance et dans le vice, avec des possibilits dune prochaine rcupration, se trouvent en ces lieux engages dans des stages, brefs ou rguliers, apprendre que le prix des passions est terriblement trop lev. Les centres de fraternit et dassistance comme celui-ci, fonctionnent, actifs et diligents, accueillant quand cela se fait possible les cratures dsincarnes de ce dernier type qui, bien que ntant pas totalement libres des complexits obscures avec lesquelles elles se jetrent dans les tnbres, se mettent souffrir le repentir et le remords, le dchirement et la douleur, et les prparent au retour vers les expriences de nature expiatoire, dans la chair. Je me souvenais de lpoque o javais march, mon tour, sur les sentiers de lombre, au moment de ma sparation davec le vhicule physique, confrontant mes propres tats mentaux du pass et du prsent, quand lorienteur poursuivit: Sil est facile de reconnatre que les tnbres forment un cadre qui fait ressortir plus fortement la lumire, lenfer, en tant que rgion de souffrance et de disharmonie, peut tout fait tre considr comme un tablissement apte au filtrage de lEsprit qui se trouve sur le chemin conduisant la Vie Suprieure. Tous les lieux infernaux surgissent, vivent et disparaissent avec lapprobation du Seigneur, qui tolre de telles crations des mes humaines, comme un pre accepte les plaies que se sont faites ses enfants, et qui en profite pour les aider valoriser la sant. Les Intelligences consacres la rbellion et la criminalit, pour cette raison, bien quelles affirment travailler pour leur propre compte, demeurent au service du Seigneur qui corrige le mal par le mal lui-mme. De ce fait, tout dans la vie nest que mouvement en direction de la victoire du bien suprme. Druso allait poursuivre, mais une sonnerie invisible retentit dans lair et, se rvlant alert par limposition de linstant, il se leva et nous dit simplement: Amis, voici venu le moment de notre conversation avec les interns qui taient dj pacifis et lucides. Nous ddions quelques heures, deux fois par semaine, une telle activit. Nous nous levmes dun commun accord et le suivmes, prestement. [1] Note de lauteur spirituel: Cit spirituelle de la Sphre Suprieure.

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Commentaires de lInstructeur

La pice dans laquelle nous nous rendmes tait confortable et ample; mais lassemble expressive qui la remplissait tait, en grande partie, dsagrable et triste.

la clart de plusieurs lampadaires, nous pouvions observer, depuis la large estrade o nous avions pris place avec lorienteur, les visages difformes qui, en plus grand nombre, se rassemblaient en ce lieu.

Ici et l, des infirmiers et des assistants, dont la position spirituelle tait facilement discernable par la prsence sympathique avec laquelle ils encourageaient les souffrants, sinstallaient.

Jvaluai le nombre des infirmes qui se trouvaient amasss en face de nous, environ deux cents. Plus des deux tiers dentre eux prsentaient des difformits physionomiques. Les personnes qui se seront rendues dans un tablissement spcialis dans les maladies de la peau, analysant lensemble des malades les plus graves, pourront imaginer ce qutait cette assemble dmes silencieuses et difficilement reconnaissables. Remarquant la quitude presque totale qui rgnait dans le local, je faisais part Druso de mon tonnement compte tenu que la tempte faisait rage au-dehors. Le gnreux ami mapprit que nous nous trouvions dans un salon intrieur de la citadelle, extrieurement revtu disolants phoniques.

Intgrant lquipe de la direction, Hilario et moi fmes connaissance de compagnons agrables et distingus, les Assistants Silas, Honorio et la sur Clestine, trois des plus remarquables assesseurs de cette institution daide.

La moindre conversation, au-del des salutations communes, nous fut impossible, car aprs avoir indiqu lun des infirmes quil chargea de faire la prire douverture, prire que nous coutmes avec motion, lorienteur prit la parole et sexprima avec naturel, comme sil tait en train de converser dans un groupe damis: Frres, nous continuons, aujourdhui, notre commentaire propos du courage. Ne me croyez pas spar de vous autres cause de vertus que je ne possde pas. La parole facile et imposante est, bien souvent, dans notre bouche, un devoir pineux qui nous oblige la rflexion et la discipline.

Je suis, ici aussi, un compagnon lattente du retour. La prison rdemptrice de la chair nous fait signe de revenir. Cest que le dessein de la vie travaille avec et en nous, par tous les moyens, afin de nous guider vers la perfection. Alors que nous rduisons ses impulsions amies en sens inverse la Loi, nous crons en nous-mmes affliction et souffrance.

Dans le plan physique, un grand nombre dentre nous imagine que la mort sera le point final nos problmes, tandis que de nombreux autres se prennent pour des privilgis de la Bont Infinie, car ils ont fait preuve dattitudes superficielles, dans les temples religieux.

Cependant, le voyage du spulcre nous enseigna une grande et nouvelle leon nous nous trouvons indissolublement lis nos propres uvres. Nos actes tissent les ailes de la libration ou les menottes de la captivit, pour notre victoire ou notre perte.

Nous ne devons notre destin personne, si ce nest nous-mmes.

Cependant, sil est vrai que nous nous trouvons aujourdhui, sur les ruines de nos ralisations dplorables, nous ne sommes pas pour autant sans esprance.

Si la sagesse de notre Pre Cleste ne peut se passer de la justice pour tre perue, cette mme justice ne se rvle pas sans amour. Si nous sommes nos propres victimes, nous sommes galement les bnficiaires de la Tolrance Divine qui nous ouvre les sanctuaires de la vie afin que nous sachions expier et sacquitter, restaurer et rembourser. Alors que nous nous trouvions dans les derniers rangs, nous tuions le temps en instillant en nos semblables des sentiments et des penses que nous ne dsirions pas pour nous-mmes, quand nous ntablissions pas, par cruaut et par orgueil, de vastes semailles de haine et de perscution.

Mais avec de telles attitudes, nous avons cr pour notre mal la disharmonie et la souffrance qui assigent notre existence, comme dimplacables fantmes.

Le pass parle en nous, avec les cris du crancier exigeant, accumulant au-dessus de notre tte les fruits amers de la plantation que nous avons faite... Viennent alors les dsajustements et les infirmits qui prennent notre esprit dassaut, dsarticulant nos corps de chair. Nous imaginions que la transition du spulcre tait un bain miraculeux qui librerait notre Esprit, mais nous ressuscitons dans le corps subtil actuel avec les maux que nous avons aliments en notre tre. Ainsi, nos liaisons avec les retardataires demeurent actives. Les liens daffection mal dirige et les chanes de laversion nous emprisonnent, encore, auprs de compagnons incarns et dsincarns, dont un grand nombre se trouve en proie des dsquilibres plus graves et crasants que les ntres.

Nourrissant des dsirs de rgnration et damlioration, nous sommes aujourdhui des cratures qui se rveillent entre lEnfer et la Terre, sharmonisant trs troitement les unes avec les autres, comme nous et nos actes.

Nous nous trouvons imprgns du rve de rnovation et de paix, aspirant limmersion dans la Vie Suprieure. Cependant, qui pourrait acqurir la respectabilit sans sacquitter face la Loi?

Personne navance sans payer les dettes contractes.

Comment parcourir le chemin des anges, les pieds attachs dans lornire des hommes qui dnoncent nos fautes en contraignant notre mmoire plonger dans les ombres?! ...

Druso fit une courte pause et, aprs avoir fait un geste loquent, comme sil voquait le paysage extrieur tortur, il poursuivit dun ton mouvant: Les souffrances infernales stirent, autour de notre pied--terre de travail et despoir

Combien dmes ptrifies dans la rbellion et dans lindiscipline sadonnent lavilissement delles-mmes? Le Ciel reprsente une conqute, sans tre quelque chose dimpos.

La Loi Divine, fonde sur la justice indfectible, fonctionne avec impartialit pour tous. Cest la raison pour laquelle notre conscience reflte les tnbres ou la lumire de nos crations individuelles.

Alors quelle claire notre vision, la lumire nous rvle la route. Alors quelles nous aveuglent, les tnbres nous enchanent la prison de nos erreurs.

En harmonie avec les Desseins Suprieurs, lEsprit rvle lhorizon tout proche et marche, courageux et serein, devant lui, afin de le dpasser; cela dit, celui qui abuse de la volont et de la raison, rompant le courant des bndictions divines, modle lombre autour de lui, sisolant dans de douloureux cauchemars, incapable de poursuivre en avant.

Dfinissant ainsi la position qui nous est particulire, nous pouvons dire que nous sommes des mes entre la lumire des aspirations sublimes et la brume des dbits scabreux, pour qui la rincarnation, en tant que recommencement de lapprentissage, est une concession de la Sublime Bont quil nous revient de mettre profit, dans le rachat indispensable.

En ralit, nous souffrirons encore longtemps les effets des liens avec nos complices et associs dintemprance et de drglement, mais, disposant de nouvelles opportunits de travail dans le champ physique, il est possible de reconstruire le destin en se librant des obscurs engagements et, par-dessus tout, en promouvant de nouvelles semailles daffection et de dignit, dclaircissement et dascension.

Nous soumettant aux dispositions des lois qui prvalent dans la sphre corporelle, nous aurons la flicit de retrouver danciens ennemis, sous le voile de loubli temporaire, qui ainsi nous rendra le prcieux rapprochement plus facile. Ainsi, il ne dpendra que de nous de les transformer en amis et compagnons, car souffrir leur incomprhension et leur antipathie, avec humilit et amour, nous sublimerons nos sentiments et nos penses, en crant de nouvelles valeurs de vie ternelle au sein de nos mes.

Devant la pause que lInstructeur fit dans ses considrations, je me tournai en direction de lassemble qui lcoutait, suspendue dans lenthousiasme dune mditation leve.

Plusieurs infirmiers qui se trouvaient ici avaient leur regard embu de larmes, tandis que dautres affichaient le visage extatique des personnes qui se maintiennent entre la consolation et lesprance.

Druso, qui sentait galement leffet de ses paroles sur les auditeurs rconforts, continua:

Nous sommes des Esprits endetts dans lobligation de tout donner en faveur de notre rnovation. Commenons articuler des ides rdemptrices, ds prsent, afin de rendre possible la reconstruction de notre futur.

Disposons-nous pardonner ceux qui nous ont offenss, avec le dsir sincre de demander pardon nos victimes.

Alors que nous cultivons la prire avec le service envers le prochain, nous reconnaissons dans la difficult le bon gnie qui nous aide, nous mettant au dfi par le plus grand effort fournir.

Runissant toutes les possibilits qui se trouvent notre porte, nous rpandons, dans les provinces de tnbres et de douleur qui nous entourent, laide de la prire et le concours du bras fraternel, prparant le retour vers le champ de la lutte le plan corporel o le Seigneur nous aidera oublier le mal et replanter le bien, par lentremise de la bndiction dun corps nouveau. Pour nous, hritiers dun long pass coupable, la sphre des corps physiques symbolise la porte de sortie de lenfer que nous avons cr.

Surmontant nos infirmits morales et teignant les anciens vices, dans la victoire sur nous-mmes, nous purifions les qualits de notre esprit, afin quen nous levant, nous puissions tendre des mains amies ceux qui gisent dans la boue de linfortune.

Nous, qui avons commis des erreurs dans les ombres, voyageurs tourments de la souffrance, nous, qui connaissons le dsert de glace et le supplice du feu dans lme oppresse, se pourrait-il que nous trouvions une plus grande joie que celle de gravir quelques chelons dans le Ciel, afin de redescendre, avec assurance, vers les enfers, de manire sauver ceux que nous aimons, aujourdhui perdus comme hier nous ltions, dans les cavernes de la misre et de la mort?

Les dizaines de personnes prsentes sentre-regardrent, saisies dadmiration et heureuses.

cette hauteur de ses commentaires, le mentor se trouvait nimb dune douce clart qui manait de son thorax en scintillements opalins.

Je posai mon regard sur mon compagnon et, percevant ses yeux embus de larmes, je cherchai touffer ma propre motion.

LInstructeur ne parlait pas comme un enseignant, grand renfort de thorie. Il imprimait sa voix une inflexion qui nappartient quaux personnes portant en elles une douleur soufferte pendant longtemps, et il sadressait aux humbles compagnons, rassembls ici, comme si chacun dentre eux avait t un enfant cher son cur.

Supplions le Seigneur, poursuivit-il de manire mouvante, afin quil nous concde les forces pour atteindre la victoire, victoire qui natra en nous, par la pleine comprhension. Ce nest quau prix du sacrifice dans le rajustement que nous obtiendrons le passeport librateur!...

Le dirigeant du centre stant tu, une dame de lassemble se leva, triste, et, marchant jusqu nous, elle sadressa lui en larmes:

Mon ami, pardonnez mon intervention. Quand donc partirai-je pour le champ terrestre, auprs de mon fils? Je lui rends visite autant que possible, dans les tnbres... Il ne me voit pas ni ne mentend... Sans se rendre compte de la misre morale laquelle il sabandonne, il continue se montrer autoritaire et orgueilleux... Cependant, Paulo nest pas pour moi un ennemi... Cest un fils quil ne mest donn doublier... Ah! comment lamour peut-il contracter de tels dbits?!...

Oui... sexclama Druso avec rserve. Lamour est la force divine que nous tranons souvent dans la boue. Nous la prenons, pure et simple, la vie par laquelle le Seigneur nous a crs, et avec elle, nous inventons la haine et le dsquilibre, la cruaut et le remords, qui nous figent indfiniment dans les ombres... Cest presque toujours plus par lamour que nous nous garons dans de poignants labyrinthes, en ce qui concerne la Loi... amour mal interprt... mal conduit

Comme sil revenait dune rapide fugue dans son monde intrieur, il alluma un nouvel clat dans son regard, effleura les mains de la femme torture et annona:

Nous esprons que vous pourrez bientt vous unir votre garon dans la prcieuse entreprise du rachat. Selon les informations dont nous disposons, il ne restera plus longtemps dans les inhibitions dans lesquelles il se trouve encore. Faisons preuve de srnit et de confiance Pendant que la pauvre femme se retirait avec un patient sourire, lInstructeur nous dit: Notre sur possde dexcellentes qualits morales, mais elle na pas su orienter le sentiment maternel avec son fils qui se trouve dans les ombres. Elle lui a inspir des ides de supriorit malsaine, qui se condensrent dans son esprit, lui facilitant des accs de rbellion et de brutalit. Transform en un tyranneau social, le malheureux sest retrouv prisonnier, sans sen rendre compte, dans le marcage tnbreux, aprs la mort du corps, et linfortune mre, se sentant responsable pour la plantation de tromperies qui ruina sa vie, sefforce aujourdhui de le retrouver.

Et parviendra-t-elle accomplir un tel dessein? demanda Hilario avec intrt.

Sans lombre dun doute, rpliqua notre ami, persuasif.

Mais... comment?

Notre amie, qui a ramolli la fibre de la responsabilit morale par lexcs de rconfort, reviendra la rincarnation dans un milieu trs pauvre o elle recevra, quand elle sera nouveau une jeune femme, alors sans protection, lenfant quelle a elle-mme rendu problmatique dans les anciens garements de femme futile et riche. Le manque de moyens conomiques lui sera inspirateur dhrosme et de courage, rgnrant sa vision de la vie et purifiant ses nergies dans la forge de la difficult et de la souffrance.

Et triompheront-ils dans la dure tentative? demanda mon compagnon, nouveau fortement intrigu. La victoire est la joie que tous nous leur souhaitons. Et sils perdaient dans la bataille venir?

nen pas douter, dit lorienteur avec, dans la voix, une loquente intonation, ils reviendront dans les prcipices qui nous entourent en de pires conditions

Aprs un triste sourire, Druso ajouta:

Chacun dentre nous, les Esprits endetts, amne avec lui, au moment de renatre dans la chair, un reflet du ciel quil rve de conqurir et un vaste manteau de lenfer quil a cr pour lui-mme. Quand nous navons pas assez de force pour aller la rencontre du ciel qui nous confre des opportunits dascension jusqu lui, nous retombons dans lenfer qui nous fascine en arrire

Notre amphitryon allait poursuivre, mais un vieillard chancelant vint jusqu nous et lui dit humblement:

Ah! Instructeur, je suis las de travailler dans les obstacles dici-bas!... Voici vingt ans que je porte des malades atteints de folie et rvolts jusqu cet asile!... Quand donc aurai-je un corps sur Terre afin de pouvoir me reposer dans loubli de la chair, aux pieds des miens?...

Druso lui effleura la tte et rpondit, mu:

Ne faiblit pas, mon fils! Console-toi! Cela fait galement de nombreuses annes que nous sommes attachs ce centre, par les injonctions de notre devoir. Servons avec allgresse. Le jour de notre dpart sera dtermin par le Seigneur.

Le vieil homme se tint silencieux, le regard triste. Tout de suite aprs, lorienteur fit vibrer une petite clochette et lassemble se mit laise pour une conversation libre. Un jeune homme lexpression sympathique sapprocha de nous et, aprs nous avoir affectueusement salus, il observa, inquiet:

Instructeur ami, en coutant vos paroles ducatives et ardentes, je demeure songeur quant aux nigmes de la mmoire... Pourquoi y a-t-il cet oubli de ce ct-ci de la mort physique? Si jai eu dautres existences avant la dernire, dont je cherche maintenant corriger les erreurs, pour quelle raison ne men souviens-je pas? Avant de partir pour le champ physique, dans le plerinage qui ma donn le nom par lequel je rponds aujourdhui, je dois avoir laiss de bons amis dans la vie spirituelle, comme quelquun qui voyage sur Terre dun continent lautre laisse communment des liens daffection avec des personnes qui lui sont chres et qui ne loublient pas... Comment justifier lamnsie qui ne me permet pas de me souvenir des compagnons que je dois possder en dautres lieux?

Bien, dit sagement Druso, les Esprits qui dans la vie physique rpondent leurs devoirs avec exactitude, retrouvent sans problme les domaines de la mmoire, ds quils se dfont du corps dense, rentrant en communion avec les liens nobles et dignes qui les attendent dans la Vie Suprieure, afin de poursuivre le travail de perfectionnement et de sublimation qui les concerne; cependant, pour nous, consciences proccupes, la mort dans le vhicule physique ne reprsente pas la libration. Nous perdons notre enveloppe physiologique, mais nous demeurons lis au pilori invisible de nos fautes; et la faute, mon ami, reprsente toujours un coin dombre qui clipse notre vision. Nos facults mmorielles, propos de nos chutes morales, sapparentent, dune certaine manire, des plaques photographiques qui, si elles ne sont pas correctement protges, deviennent toujours inutiles.

Le mentor fit une brve pause dans ses considrations et continua:

Reprsentons-nous la pense comme un lac. Si les flots sont calmes et limpides, la lumire du firmament peut sy reflter avec assurance. Mais si ces flots sont constamment agits par la rvolte, les images se perdent avec la rupture engendre par les eaux mobiles, principalement quand la vase accumule sur le fond apparat la surface. Il est vident que nous sommes ici, dans les zones infrieures, des tres humains fort loigns de la rnovation spirituelle, mme si nous sommes dsincarns.

Le jeune homme lcoutait, visiblement surpris, et il tait sur le point de poser de nouvelles questions pendant la pause qui stait faite, mais anticipant ses paroles, Druso insista sur un ton amical:

Observe la ralit en elle-mme. Malgr les tudes auxquelles tu participes actuellement et malgr les sublimes espoirs qui occupent prsent ton cur, ta pense demeure retenue dans les lieux et paysages dont tu aurais d te dfaire aprs la mort. Alors que tu te trouves sur le chemin de la spiritualit, tu tidentifies dobscures rminiscences qui se trouvent loin dans le temps: le foyer, la famille, les engagements imparfaitement tenus, ... Tout cela reprsente du lest qui dirige ton esprit vers le monde physique, o nos dbits rclament sacrifice et paiement.

Cest vrai, cest vrai... soupira le jeune homme, chagrin.

Mais lInstructeur poursuivit:

Sous hypnose, notre mmoire peut rgresser et tre retrouve par moments. Mais cela est un phnomne de compulsion... Et il convient de satisfaire la sagesse de la Nature en tout. Librons le miroir de la pense qui gt sous la boue du repentir, du remords et de la culpabilit, et ce miroir divin refltera le Soleil avec toute la splendeur de sa puret.

Druso allait poursuivre, mais larrive dun collaborateur empcha la conclusion du sujet.

3

Lintervention dans la mmoire

Le nouveau compagnon, que le dirigeant du centre nous prsenta comme tant lAssistant Barreto, dit, une douleur lointaine lui assombrissant le regard:

Instructeur Druso, trois des frres rcemment interns dans lInfirmerie Cinq sont entrs en crise dangoisse et de rbellion Je sais ce qui se passe, rpondit lorienteur. Il sagit de la folie par tlpathie hallucinatoire. Ils ne sont pas encore suffisamment forts pour rsister limpact des forces perverses qui leur sont envoyes, distance, par les compagnons malheureux.

Que faut-il faire?

vacue les patients normaux et applique dans linfirmerie les rayons de choc. Nous navons pas dautre solution.

Le messager se retira en nous frlant, alors quun autre travailleur se prsentait dj, informant:

Instructeur, lcran de contrle qui ne fonctionnait pas en raison de la tempte, prsent en dclin, vient de transmettre un douloureux message... Deux de nos expditions de recherches se trouvent en difficult dans les dfils des Grandes Tnbres...

La position a-t-elle t prcisment indique?

Oui.

Porte les textes reus lapprciation du directeur des oprations urgentes. Laide doit tre envoye aussi tt que possible. Un autre collaborateur vint jusqu nous, de manire inattendue, et demanda:

Instructeur, je vous supplie de prendre des mesures pour la rsolution du cas Jonas. Nous avons reu un message de nos frres nous informant que sa rincarnation pourrait tre dfinitivement interrompue. Pour la premire fois, je vis dans le regard du dirigeant de la Manso une intense proccupation. Rvlant une norme surprise, il demanda lmissaire:

En quoi consiste lobstacle?

Ccina, la future mre, se refuse le recevoir aprs avoir senti ses fluides. Nous sommes en train dassister la quatrime tentative davortement, au cours du troisime mois de gestation, et nous faisons tout ce qui est possible pour la maintenir dans la dignit maternelle.

Un signe de sereine fermet passa sur le visage de Druso; il dit:

Cela est inutile. La jeune mre lacceptera, selon ses propres engagements. De plus, nous avons besoin de linternement de Jonas dans le corps physique, durant, au minimum, sept annes terrestres. Amenez Ccina jusquici, aujourdhui mme, ds quelle se sera abandonne au sommeil naturel, afin que nous puissions laider par une intervention magntique ncessaire.

Dautres lments de service arrivaient et, affam dclaircissements comme je me trouvais, je cherchai un recoin tout proche, en compagnie de lAssistant Silas, que je bombardai de questions, sur un ton discret, de manire ne pas perturber la salle.

Qui taient ces travailleurs? tait-ce juste que le dirigeant du centre ft importun de la sorte, par tant de consultations, quand les travaux dadministration pouvaient tre clairement sous-diviss? Lami sempressa de rpondre mes questionnements, mexpliquant que les messagers ntaient pas de simples travailleurs, mais des conducteurs de service en sous-commandements dtermins. Chacun dentre eux, Assistants et Assesseurs, cultivs et dignes, avec dnormes responsabilits ne venaient recourir Druso quaprs avoir pris toutes les mesures possibles dans le cadre de leur autorit. Il ne sagissait donc pas dun problme de centralisation, mais de lutte intensive. Et ce cas de rincarnation en attente? osai-je demander, respectueux. Le centre pouvait-il donner son point de vue avec assurance dans la rsolution dun tel sujet?

Silas sourit, bienveillant, et rpondit:

Afin que je me fasse comprendre, il convient de prciser que sil existe des rincarnations lies aux plans suprieurs, nous avons celles que prennent leurs racines directement dans les plans infrieurs. Si le pnitencier est actif parmi les hommes, en fonction de la criminalit qui svit dans le monde, lenfer existe, dans la Spiritualit, en fonction de la culpabilit au sein des consciences. Et comme nous pouvons dj compter dans la sphre corporelle sur une justice sincrement dsireuse daider les dlinquants dans le rtablissement, travers la libration conditionnelle et les prisons-coles organises par les autorits qui dirigent les tribunaux humains au nom des lois, ici aussi, les reprsentants de lAmour Divin peuvent mobiliser des potentiels de misricorde au profit des Esprits endetts, ds quils se rvlent dignes du secours qui raccourcit leur sauvetage et leur rgnration.

Ca veut dire, mexclamai-je, quen bonne logique terrestre, et recourant un langage quutiliserait un homme dans lexprience physique, il y a des rincarnations en parfaite connexion avec les plans infernaux...

Oui. Pourquoi cela ne serait-il pas possible? Elles font office de prcieuses opportunits de libration des cercles tnbreux. Et comme de telles renaissances dans la chair nont dautres caractristiques que celles de travail expiatoire, ce sont bien souvent des entreprises planifies et excutes depuis ici, par des bienfaiteurs accrdits pour agir et aider au nom du Seigneur.

Et dans ces cas, demandai-je, lInstructeur Druso sest vu dlgu les pouvoirs ncessaires afin de rsoudre les problmes de cet ordre?

Notre dirigeant, rpondit lami serviable, comme il est juste, ne jouit pas de facults illimites et cette institution est suffisamment grande pour absorber ses plus grandes attentions. Cependant, durant les processus rincarnatoires, il intervient comme une autorit intermdiaire. De quelle manire?

Deux fois par semaine, nous nous runissons dans le Cnacle2[1] de la Manso, et les messagers de la lumire, par des instruments adapts, dlibrent sur le sujet, apprciant les cas que notre centre leur soumet.

Les messagers de la lumire?

Oui, ce sont les prposs des Intelligences angliques qui ne perdent pas de vue les contres infernales, car mme si les gnies de lombre ne le reconnaissent pas, les forces du Ciel veillent sur lenfer qui existe afin de contrler le travail rgnrateur sur Terre.

Et, souriant, il ajouta:

Tout comme le malade exige un remde, nous avons besoin de la purge spirituelle afin dtre habilits pour la vie dans les sphres suprieures. Lenfer pour lme qui la rig en elle-mme, reprsente ce que la forge est pour le mtal: il sy pure et sy modle convenablement

Le compagnon allait poursuivre, mais un bruit trange attira notre attention au moment mme o un missaire franchit une des portes, situe ct de nous et, sapprochant de Druso, il annona:

Instructeur, depuis que la tempte sest calme, lassaut des rayons destructeurs a repris...

Lorienteur eut un geste de proccupation et recommanda:

Branchez les batteries dannulation. Nous observerons notre dfense depuis lAiguille de Surveillance.

Ensuite, il nous invita laccompagner.

Silas, Hilario et moi, le suivmes sans hsiter.

Nous traversmes de trs vastes couloirs et de larges salles qui suivaient une pente ascendante graduelle, jusqu ce que nous commencions monter de manire plus franche.

Le lieu connu sous le nom dAiguille de Surveillance tait une tour pourvue dun escalier hlicodal, qui se trouvait quelques dizaines de mtre au-dessus du grand et complexe difice.

Au sommet, nous prmes place dans un petit cabinet dans lenceinte duquel dintressants appareils nous permirent dobserver le paysage extrieur.

Ils ressemblaient de petits tlescopes qui fonctionnaient comme des metteurs de rayons qui liminaient le brouillard, nous permettant davoir une notion exacte du milieu oppressant qui nous entourait, peupl de cratures agressives et exotiques qui fuyaient, pouvantes, devant le grand groupe dentits qui manuvrait de curieuses machines, lapparence de petits canons.

Serions-nous assaillis par une arme offensive? demandai-je, intrigu.

Cest exactement cela, confirma Druso, calmement. Mais ces attaques sont communes. Nos malheureux frres simaginent dloger notre centre par cette invasion, et nous livrer linaction, afin de dominer la rgion.

Et ces machines? quoi servent-elles? demanda mon compagnon, effray.

Nous pouvons les dfinir comme tant des canons de bombardement lectronique, expliqua lorienteur. Les dcharges sur nous sont mticuleusement tudies afin quelles nous atteignent sans erreur dans la vitesse de tir.

Et si elles nous atteignaient? demanda mon collgue.

nen pas douter, elles provoqueraient ici des phnomnes de dsintgration, susceptibles de nous conduire notre perte complte, sans parler des perturbations quelles creraient chez nos frres malades, encore incapables de fournir le moindre effort pour se dplacer vers une autre destination, car les rayons projets contre nous contiennent des principes de torture qui provoquent les pires crises de terreur et de folie.

Non loin de nous, un bruit sinistre vibrait dans latmosphre. Nous avions limpression que des milliers de projectiles invisibles fendaient violemment lair, sifflant courte distance avant de terminer leur course dans des claquements secs, qui nous inspiraient une terrifiante impression.

Peut-tre parce quHilario et moi dmontrions une pouvante impossible dissimuler, Druso dit paternellement:

Soyons tranquilles. Nos barrires dannulation fonctionnent efficacement.

Et il nous indiqua du regard une tonnamment longue muraille, constitue de milliers de hampes mtalliques, entourant la citadelle dans toute son tendue, comme sil stait agi dune grande quantit de paratonnerres habilement disposs.

De tous les coups assns contre le flan attaqu surgissaient des tincelles lectriques qui fulguraient aux points de contact, attires par les barres verticales.

Dans sa beaut terrible, le spectacle se caractrisait, lil nu, par le scintillement des contrastes, entre lombre et les flashs de lumire.

Ici, les conflits sont incessants, nous dit lorienteur. Mais nous avons appris dans ce centre que la paix nest pas une conqute de linertie mais le fruit de lquilibre entre la foi dans le Pouvoir Divin et la confiance en nous-mmes, dans le travail pour la victoire du bien.

Mais cet instant, un serviteur du centre pntra dans la pice et dit:

Instructeur Druso, conformment aux ordres donns, le malade recueilli la nuit passe, a t install dans le cabinet daide magntique, attendant votre intervention.

Est-il parvenu dire quelque chose?

Non. Il continue seulement pousser quelques gmissements de temps autre.

Aucun indice didentification?

Aucun.

Linfatigable mentor nous invita le suivre, expliquant que lopration venir pourrait offrir dimportants lments dtude pour le travail que nous nous disposions raliser. Un bref moment plus tard, nous nous trouvions tous les quatre dans une salle aux proportions rgulires, qui primait par sa simplicit et par une couleur dun bleu reposant.

tir en dcubitus[2] dorsal sur une table dmontable, un homme difforme se trouvait l, respirant peine.

Afin de nous rfrer avec franchise la crature qui se trouvait sous nos yeux, il nous faut affirmer que laspect du malheureux en arrivait tre repoussant, malgr les soins dont il avait fait lobjet.

Il paraissait souffrir dune inqualifiable hypertrophie, ses bras et ses jambes tant normes. Cependant, lendroit o laugmentation volumtrique de linstrument prisprital se faisait la plus troublante, ctait justement le masque physionomique, dans lequel tous les traits se confondaient, comme si nous nous tions trouvs face une trange sphre la place de la tte. Sagissait-il dun homme qui se serait dsincarn au cours dun accident terrestre, attendant ici le soulagement immdiat qui est d aux accidents communs?

Druso perut notre question silencieuse et expliqua:

Il sagit dun compagnon difficilement identifiable, amen en ces lieux par une de nos expditions de secours.

Mais a-t-il t rcemment libr du monde physique? demanda mon collgue, aussi douloureusement impressionn que moi.

Pour le moment, nous ne le savons pas, prcisa lorienteur. Cest une de ces pauvres mes qui aura laiss le cercle physique sous lempire dune terrible obsession, si terrible quil naura pas pu recueillir le soutien spirituel des lgions charitables qui oprent dans les tombeaux. Il a indubitablement quitt le corps dense sous une absolue subjugation mentale, sombrant dans dangoissants problmes.

Mais pourquoi une telle calamit? demanda Hilario, saisi par la stupfaction.

Mon ami, rpliqua Druso, bienveillant, ne serait-il pas plus juste de sonder les motifs pour lesquels nous avons dcid de contracter des dbits aussi lourds? Et, modifiant le ton de sa voix, qui prit une inflexion triste et mouvante, il conseilla: Les rgions infernales sont bondes de souffrance que nous crons nous-mmes. Il nous faut quilibrer le courage et la compassion au mme niveau, pour rpondre avec assurance nos engagements en ces lieux. Je fixai le malheureux frre qui se maintenait dans une profonde frustration, comme linfirme qui se trouve dans le coma et, considrant les impratifs de notre apprentissage, je demandai:

Pourrons-nous connatre la raison de la surprenante difformit que nous sommes en train dexaminer?

Lorienteur perut lessence constructive de ma demande et rpondit:

Le phnomne, dans son entier, est de nature spirituelle. Rappelez-vous que la douleur, dans le vhicule physique, est un fait rel dans le cerveau, mais purement imaginaire dans lorgane qui croit la ressentir. travers les cellules crbrales, lesprit enregistre la disharmonie corporelle, contraignant le trouble organique au service, parfois tortur et difficile, du rajustement. Ici aussi, laspect anormal, voire monstrueux, rsulte des dsquilibres dominants de lesprit qui, corrompu par le vice de certaines impressions ou enflamm par la souffrance, perd temporairement le contrle de la forme, permettant ainsi que les dlicats tissus du corps prisprital se perturbent, agits, en conditions anormales. Au cours dune telle situation, lme peut tomber sous lempire dIntelligences perverses, et il en dcoule les faits regrettables qui produisent lanimalisation transitoire par effet hypnotique.

Mais je notai que, compatissant, lInstructeur ne dsirait pas prolonger les explications qui ne se rfraient pas laide due aux malheureux, et je me tus.

Druso se pencha sur lui avec lextrme douceur dune personne qui ausculterait un frre bien aim, et annona: Essayons de lcouter. Incapable de contenir ltonnement qui me saisit, je demandai: Il dort?

Le mentor fit un geste affirmatif, expliquant:

Notre malheureux ami se trouve sous une terrible hypnose. Il a t indniablement conduit cette situation par de redoutables adversaires qui, nen pas douter, figrent sa pense dans un douloureux souvenir, de manire le torturer.

Mais, insistai-je, mu, un tel martyre pourrait-il survenir sans motif juste?

Mon ami, dit expressivement lorienteur, lexception du chemin glorieux des grandes mes, qui lisent dans le sacrifice lapostolat damour par lequel elles aident les compagnons de lHumanit, le roncier de la souffrance ne prolifre pas sans les racines de la culpabilit. Afin datteindre la misre dans laquelle il se trouve, notre frre aura accumul des dbits excessivement lourds.

Ensuite, coupant court tout dsir de divagation, il ajouta:

Dsintgrons les forces magntiques qui dominent ses centres vitaux et aidons sa mmoire afin quil se libre et parle.

En raison, peut-tre, de mon regard qui lana une demande muette dclaircissement plus important, il ajouta:

Il ne serait pas juste dagir sur la base dhypothses. Il est indispensable dcouter les dlinquants et les victimes, afin qu travers leurs informations, nous sachions par o commencer luvre de secours.

Je cherchai faire taire les questions inopportunes et je mabandonnai lattente. Tout de suite aprs, lAssistant, Hilario et moi, tablmes une chane de prires, instinctivement, sans stre au pralable consults. Et comme si nos forces runies fortifiaient lInstructeur qui affichait une expression calme et optimiste, celui-ci se mit oprer magntiquement, appliquant des passes de dispersion sur le compagnon en prostration.

Linfirme ragit par des mouvements graduels, comme sil mergeait dun long sommeil.

Aprs quelques minutes, lorienteur posa sa main droite sur la tte difforme, donnant limpression de vouloir appeler sa mmoire au rveil ncessaire et, par la suite, le pauvre frre se mit gmir, rvlant la terreur dune personne qui soupirerait pour se dtacher dun cauchemar.

Parce que Druso interrompit lopration, le maintenant dans cet tat, Hilario demanda, afflig:

Doit-il alors demeurer ainsi, la limite de la veille, sans reprendre le contrle de lui-mme? Le retour immdiat la ralit nest pas souhaitable, expliqua le mentor ami. Il pourrait souffrir dune regrettable crise de folie aux graves consquences. Il restera parmi nous, dans cet tat, avec lesprit enchevtr lide fixe qui emprisonne ses penses dans le mme cercle vicieux, afin que nous venions connatre le problme crucial, sans la moindre distorsion. Les paroles de lorienteur dnotaient une grande exprience de la psychologie des Esprits victimes dans les tnbres.

Aprs une nouvelle intervention du mentor sur la glotte, le malheureux desserra les paupires et, carquillant les yeux, il commena hurler:

Au secours! Au secours!... je suis coupable, coupable!... Je nen peux plus... Pardon! Pardon!

Sadressant Druso quil prit, visiblement, pour un magistrat, il sexclama:

Votre honneur, votre honneur!... finalement, je peux enfin parler! Laissez-moi parler!...

Le dirigeant de la Manso lui effleura sa tte tourmente et rpliqua sur un ton amical:

Parle, dis ce que tu dsires.

Le visage du pensionnaire se couvrit de larmes, laissant entrevoir la surexcitation des somnambules qui transforment la faiblesse en nergie inattendue, et commena parler avec componction:

Je suis Antonio Olimpio... le criminel!... Je dirai tout. En vrit, jai pch, jai pch... pour cela, il est juste... que je souffre dans lenfer... Le feu torture mon me sans la consumer... Je sais que cest le remords... Si javais su, je naurais pas... commis la faute... mais je nai pu rsister lambition... Aprs la mort de mon pre... je me suis vu dans lobligation... de partager notre domaine agricole avec mes deux frres, plus jeunes... Clarindo et Lonel... Mais javais en tte des plans... Je voulais transformer la proprit... que jadministrais... en grande source de revenus, mais... le partage membarrassait... Je me suis rendu compte que mes frres... avaient des ides diffrentes des miennes... et jai commenc machiner le projet... que jai fini par excuter Une crise de sanglots brouilla sa voix, mais Druso, le soutenant magntiquement, insista: Continue, continue

Jai alors cru, poursuivit le malade avec un accent plus ferme, que je pourrais seulement tre heureux si je supprimais mes frres et... quand linventaire des biens tait sur le point dtre effectu, je les ai invits venir se promener avec moi... en barque... pour inspecter un grand lac de notre proprit... Mais auparavant, je leur avais donn boire une liqueur qui les endormirait... Jai calcul le temps que la drogue rclamerait pour agir avec certitude et... alors que nous conversions... dun geste dlibr je dsquilibrai lembarcation en un endroit connu... pour ses eaux profondes... ds que je perus chez eux des signes de fatigue... Ah! quelle calamit inoubliable!... Jentends encore leurs cris dhorreur propres glacer le sang, alors quils imploraient de laide... mais... le corps engourdi... ils trouvrent la mort en quelques minutes... Jai nag, la conscience lourde, mais fermement dcid dans mes projets malaviss... abordant le rivage et hurlant laide... Avec une attitude tudie, je dpeignis un accident fictif... Cest ainsi que je suis entr en pleine possession de la ferme, la lguant, plus tard, Luis... mon fils unique... Je fus un homme riche et tenu pour honnte... Largent me fit acqurir les considrations sociales et les privilges publics que la politique confre tous ceux qui se font vainqueurs dans le monde... par la sagacit et par lintelligence... De temps autre, je me souvenais de mon crime... nuage perptuel qui venait assombrir ma conscience... mais... en compagnie dAlzira... lpouse inoubliable... je cherchai des distractions et des voyages qui retenaient mon attention... Je nai jamais pu tre heureux... Durant la jeunesse de mon fils... ma femme tomba gravement malade... et de la fivre qui la dvora pendant de nombreuses semaines... elle passa la folie... qui la conduisit se noyer dans le lac... par une nuit dpouvante. Veuf... je me demandais si elle navait pas t le jouet... du fantme de mes victimes... mais... je craignais toutes les allusions autour de la mort... et je cherchai simplement jouir de la fortune qui tait mienne...

Le malheureux fit une longue pause afin de se ressaisir, devant notre attente, avant de poursuivre:

Mais pauvre de moi!... Ds que mes yeux physiques se fermrent... devant la tombe... les prires payes ne me servirent rien... car mes frres que jimaginais morts... se firent visibles devant moi... Transforms en vengeurs, ils mattendaient ct de ma tombe... Ils me jetrent le crime au visage... me couvrirent dinsultes et me torturrent sans compassion... jusqu ce que... peut-tre... fatigus de me rouer de coups... ils me conduisirent dans une caverne tnbreuse... o jai t rduit au cauchemar dans lequel je me trouve... Je ne vois... dans mes penses... que la barque dans un crpuscule sinistre... entendant les hurlements de mes victimes... qui sanglotent et clatent de rire trangement... Pauvre de moi!... Je suis prisonnier de lembarcation terrible... sans que je puisse me dtacher... Qui me fera dormir ou mourir?... Comme si la fin de la confession lui avait apport un certain repos, le malade se plongea dans une profonde apathie. Druso lui essuya ses larmes, lui adressa quelques paroles de rconfort et de douceur, et recommanda lAssistant de le ramener linfirmerie spcialise. Ensuite, pensif, il nous dit:

Nous savons dj le ncessaire afin dtablir un point de dpart dans la tche dassistance. Nous reviendrons sur son cas le moment opportun. Et, lair lointain, il ajouta, aprs une longue pause:

Que Jsus nous protge.

Il ne nous fut, ds lors, plus possible dajouter la moindre observation, car un messager venait informer lInstructeur quun groupe de dsincarns rcents tait prt arriver, et nous laccompagnmes dans le travail quil dfinissait comme tant une tche dinspection. [1] Note de lAuteur Spirituel: temple priv de linstitution. [2] Note du Traducteur: dcubitus: position du corps au repos lorsquil est allong sur un plan horizontal

4

Quelques Esprits rcemment dsincarns

Nous atteignmes une large enceinte construite limage dun patio intrieur aux proportions justes et amples.

Jeus limpression de pntrer dans un hall norme, quelque peu similaire certaines gares ferroviaires terrestres, car des dizaines dentits se trouvaient en attente dans les installations prvues cet effet, installations qui se trouvaient disposes sur le pourtour de la salle avec soin.

dire vrai, je ne vis aucun des visages reflter la moindre marque de pleine allgresse.

Les diffrents groupes se divisaient entre la proccupation et la tristesse, certains dentre eux tant engags dans de discrtes conversations.

Nous pouvions percevoir, sur notre passage, divers dialogues, lexemple dun un cercle restreint o nous entendmes des phrases comme celles-ci:

Crois-tu quelle puisse prsent se dvouer au juste changement?

Difficilement. Elle sest pendant trs longtemps concentre dans la perte de contrle de sa vie. Un peu plus loin, nous entendmes de la bouche dune femme qui sadressait un jeune homme au visage angoiss:

Mon garon, fais preuve de srnit. Selon les informations de lAssistant Claudio, ton pre ne sera pas en condition de nous reconnatre. Il aura besoin dune longue priode de temps pour revenir lui. Il ntait possible de saisir que des fragments de conversation comme ceux-ci lors de notre traverse. un certain endroit de ce lieu mouvement, Druso nous confia avec gnrosit aux bons soins de Silas, mentionnant les obligations urgentes auxquelles il devait consacrer son attention.

Nous nous retrouverions le jour suivant. Laimable promesse mobligea considrer laspect du temps.

En raison de lombre rgnante, nous ne pouvions savoir sil sagissait de la journe ou de la nuit. Cest la raison pour laquelle se trouvait ici une grande horloge, au large cadran qui recouvrait les vingt-quatre heures. Elle avait pour moi le mme office que la boussole pour le voyageur, et elle minforma que nous tions en pleine nuit.[1]

Le son dinvisibles cloches rsonnait prsent dans lair et, se rendant compte de notre curiosit, Silas expliqua que le convoi entrerait dans le hall dici quelques minutes.

Je profitai de ce moment pour poser les questions qui me semblaient ncessaires.

Quelle espce dtres attendions-nous ici? Des dsincarns rcents en quelles conditions? Comment sorganisait le convoi? Venait-il quotidiennement linstitution, rpondant un horaire prcis?

Le compagnon, qui se disposait nous assister, expliqua que les entits qui se trouvaient sur le point dentrer faisaient partie dune quipe de dix-neuf personnes, accompagnes de dix serviteurs du centre, qui orientaient leur excursion. Il sagissait de dsincarns rcents en dsquilibre mental, mais crditeurs dune assistance immdiate, du fait quils ne se trouvaient pas plongs dans le dsespoir, pas plus quils ne staient entirement compromis avec les forces dominantes dans les tnbres. Il expliqua aussi que le groupe tait constitu de travailleurs spcialiss, sous la responsabilit dun Auxiliaire, et quils voyageaient, sans vhicules imposants, emportant seulement le matriel indispensable la locomotion dans le lourd milieu des ombres, aids par quelques chiens intelligents et serviables. La Manso comptait deux groupes de cette nature. Quotidiennement, lun deux atteignait ce domicile de rajustement, se remplaant dans le pieux travail de secouriste. Cependant, prcisa-t-il, leur arrive ne se fait pas heure fixe, du fait que le plerinage dans les domaines des tnbres obit communment des facteurs circonstanciels.

Notre interlocuteur avait peine termin que lexpdition pntrait dans le vaste hall.

Les cooprateurs responsables taient apparemment calmes. Cependant, le regard de certains dentre eux laissait transparatre une profonde proccupation.

Par contre, les tres recueillis, lexception de cinq individus qui se trouvaient sur des brancards, en complte dysharmonie et endormis, rvlaient des perturbations manifestes qui, pour quelques-uns, sexprimaient par une folie dsagrable, bien quelle et t sans danger.

Pendant que les infirmiers, doux et attentifs, svertuaient les aider, et que les chiens, extnus, se couchaient, ces tres qui venaient darriver parlaient et se plaignaient, dmontrant une parfaite absence mentale de la ralit, inspirant piti et gne.

Silas nous invita nous mettre luvre.

Effectivement, il nous revenait de faire quelque chose au nom de la coopration.

Le chef du groupe sapprocha de nous et lAssistant nous le prsenta dun geste amical.

Il sagissait de lAuxiliaire Macdo, prcieux conducteur des travaux de secours.

Proches et parents des nouveaux venus nous entouraient prsent, avec des expressions dallgresse et de souffrance. Plusieurs femmes que javais vues, auparavant, se tenant dans une attente inquite, versaient des larmes discrtes. Je remarquai que les cratures rcemment dlies du corps dense, perturbes comme elles se trouvaient, portaient en elles tous les signes des maladies que leur avait imposs la dsincarnation. Un bref examen clinique aurait sans doute pu rendre possible la lecture du diagnostic individuel. Une dame sympathique sapprocha dune jeune femme qui avanait, soutenue par la douceur dune des infirmires de linstitution, et, la prenant dans ses bras, elle pleurait sans mots. La jeune femme rcemment libre recevait son affection en demandant, de manire mouvante:

Ne me laissez pas mourir!... Ne me laissez pas mourir!...

Se rvlant enferme dans le souvenir des derniers instants dans le corps terrestre, le regard tortur et larmoyant, elle avana vers Silas en sexclamant:

Mon pre! Mon pre, laissez-moi recevoir la bndiction du sacrement de lextrme-onction, mais que la faux de la mort soit loigne de mon me!... Jai essay dteindre ma culpabilit dans la source de la charit envers les laisss-pour-compte, mais lingratitude dont jai fait preuve envers ma mre parle trs fort dans ma conscience malheureuse!... Ah! pourquoi lorgueil ma-t-il ainsi rendue aveugle, au point de la condamner la misre?!... Pourquoi, il y a vingt ans, ne possdai-je pas la comprhension que jai maintenant? Une petite pauvre, mon pre! Vous rappelez-vous delle? Elle tait une humble actrice qui mleva avec une immense douceur!... Son existence a tourn autour de moi... Des feux de la rampe festive, elle est descendue vers le rude labeur domestique afin de conqurir notre pain... Elle avait la socit contre elle, et mon pre, sans faire preuve de courage pour lutter au nom de notre flicit tous, la laissa se traner dans lextrme pauvret, couard et infidle aux engagements quil avait librement accepts

La malheureuse fit une courte pause, ses larmes se mlant celles de cette noble femme qui la tenait contre sa poitrine et, lesprit emprisonn dans la confession quelle faisait in extremis, elle reprit, comme si le prtre se trouvait ct delle:

Pardonnez-moi, mon pre, au nom de Jsus, mais alors que jtais jeune et que je rentrais en possession de limportante dote que mon pre mavait lgue, je me mis avoir honte de lange maternel qui avait tendu ses blanches ailes sur ma vie et, malliant lhomme vaniteux que javais pous, je lexpulsai de notre maison!... Oh! je ressens encore le froid de cette terrible nuit dadieux!... Je lui ai lanc au visage de cruelles phrases... Afin de justifier ma bassesse de cur, je lai calomnie sans piti!... Voulant mlever dans lestime de lhomme que javais pous, jai menti en affirmant quelle ntait pas ma vritable mre! Je lai montre comme tant une voleuse qui mavait vole la naissance!... Je me souviens du regard de douleur et de compassion quelle me lana au moment de partir... Elle ne se plaignit pas, pas plus quelle ne ragt... Elle ma seulement contempl, tristement, les yeux boursoufls davoir tant pleur!... cet instant, la dame qui la soutenait caressa ses cheveux en bataille et chercha la rconforter: Ne tagite pas. Repose-toi... repose-toi

Ah! Quelle est cette voix? cria la jeune femme affole par langoisse.

Et, ttonnant les mains affectueuses qui caressaient ses joues, elle sexclama, sans les voir: Oh! mon pre, on dirait quelle se trouve ici, auprs de moi!...

Et, levant ses yeux teints et suppliants au ciel, elle implora, en pleurs:

mon Dieu, ne me laissez pas la rencontrer avant que jaie pu payer mes dbits!... Seigneur, ayez piti de moi, pcheresse qui vous a offens, humiliant et blessant la mre pleine damour que vous mavez donne!...

Mais avec laide de deux infirmires, la sympathique dame qui la cajolait la mit sur un lit portable, avant de lui imposer le silence laide dune tendresse infinie.

Percevant mon motion, Silas expliqua aprs avoir veill linstallation de la malade:

Cette gnreuse dame qui la recueillie dans ses bras nest autre que la mre venue la rencontre de sa fille.

Que dites-vous?! sexclama Hilario, stupfait. Oui, elle laccompagnera tendrement, sans se faire reconnatre, afin que la pauvre dsincarne ne souffrt pas de chocs prjudiciables. Le traumatisme prisprital lui vaudra une longue priode de dsquilibre et daffliction.

Et pour quelle raison la malade a-t-elle dcid de se confesser, de cette manire? demanda mon collgue, intrigu.

Cest un phnomne commun, dit lAssistant. Les facults mentales de notre sur souffrante se sont figes dans le remords, cause du plus grand dlit quelle ait commis lors de sa dernire existence, et, depuis quelle a t plus intensment touche par les rflexions de la mort, elle sest entirement abandonne de telles rminiscences. Pour avoir entretenu la foi catholique romaine, elle simagine encore devant un prtre, saccusant pour la faute qui a macul sa vie

Javais t profondment bless par cette scne que moffrait la vrit, et dont la rudesse mobligeait une douloureuse mditation.

Il ny avait alors aucun mal dissimul sur Terre!...

Tous les crimes et toutes les fautes de la crature humaine se rvleraient un jour, en un certain lieu!... Silas entendit lamertume de mes rflexions et vint mon secours, observant: Oui, mon ami, vous observez avec justesse. La Cration de Dieu est une lumire glorieuse. La moindre ombre de notre conscience se trouve imprime dans notre vie jusqu ce que nous ayons lav la tache, avec la sueur du travail ou avec les larmes de lexpiation Et devant ces appels o raisonnaient angoisse et affection, dans les retrouvailles qui se droulaient ici, sous nos yeux, retrouvailles o parents et enfants, poux, amis se rapprochaient les uns des autres, lAssistant ajouta: Dune manire gnrale, ce genre dinquitude vient de ceux qui ont creus en eux-mmes de profondes crevasses infernales et qui se figent dans de dangereuses illusions, mais la Bont Infinie du Seigneur permet que les victimes difies dans la comprhension et dans le pardon se transforment, heureuses, en auxiliaires dvoues des anciens bourreaux. Comme il est facile de le vrifier, lincommensurable amour de notre Pre Cleste couvre non seulement les territoires glorifis du paradis, mais galement les provinces tourmentes de lenfer que nous crons

Une pauvre femme clata en sanglots convulsifs, auprs de nous, interrompant les paroles de notre ami. Les poings serrs, la malheureuse rclamait:

Qui me librera de Satan? Qui me librera du pouvoir des tnbres? Saints anges, secourez-moi! Tirez-moi des griffes du terrible Belphgor!... Silas nous convoqua pour prendre part une aide magntique immdiate. Les infirmiers prsents accoururent, empresss, pour empcher laggravation de la crise. Maudit! Maudit!... rptait la dmente, se signant. Invoquant le secours divin, travers la prire, je cherchai annuler ses mouvements dsordonns, la faisant sassoupir peu peu. Une fois lambiance devenue sereine, Silas nous invita sonder son esprit perturb, prsent sous la domination dune profonde hypnose.

Je cherchai dterminer la cause de sa disharmonie au cours dun rapide processus danalyse mentale, et je dcouvris, surpris, que la pauvre amie tait porteuse de penses abominables.

Comme si elle semblait tre enracine dans son cerveau, je voyais schapper de son champ intime la figure animalesque dun homme gigantesque, possdant une longue queue, avec la physionomie dun bouc dgnr, qui laissait voir des pieds griffus et deux cornes sur son crne, assis sur une chaise grossire, comme sil vivait en parfaite symbiose avec la malheureuse crature, dans une aimantation mutuelle. Devant ma question silencieuse, lAssistant expliqua: Cest un clich mental quelle a cr et nourri. Les ides macabres de la magie avilissante, quelles soient de la sorcellerie et du dmonisme que les glises dites chrtiennes propagent, sous le prtexte de les combattre, entretenant des croyances et des superstitions, au prix de conjurations et dexorcismes, gnrent des images comme celle-ci, qui se rpandent dans les esprits faibles et inattentifs, tablissant des pidmies de terreur hallucinatoire. Les Intelligences dsincarnes, livres la perversion, se servent de ces situations mal dlimites que la littrature ftichiste ou lenseignement sans surveillance distribuent sur la Terre, tour de bras, et leur impriment une vitalit temporaire, comme un artiste du crayon se sert des esquisses dun enfant, en les prenant pour base des dessins srs par lesquels il impressionnera lme infantile.

Cette explication mapparut comme une cl opportune dans la rsolution de nombreuses nigmes, au chapitre de lobsession, o les malades commencent se tourmenter eux-mmes avant dtre tourments par des tres qui sont en harmonie avec le dsquilibre qui est le leur.

Hilario, qui observait attentivement le duel intrieur entre linfirme prostre et la forme-pense qui se superposait sur sa tte, dit avec motion: Je me souviens avoir lu, il y a de nombreuses annes, sur Terre, un livre crit par Collin de Plancy, approuv par larchevque de Paris, qui relatait la description minutieuse de divers dmons, et je crois avoir vu une reprsentation imprime dans cet ouvrage, pareille celle que nous avons sous les yeux.

Silas prit les devants et confirma:

Exactement. Cest le dmon Belphgor, selon les annotations de Jean Weier, que les autorits imprvoyantes de lglise permirent de divulguer dans les cercles catholiques. Nous connaissons le livre auquel vous vous rfrez. Il est lorigine de trs grands obstacles chez des milliers de cratures qui par manque dattention accueillent de tels symboles de Satan, les offrant aux Esprits bestialiss qui sen servent afin de crer de terribles processus de fascination et de possession.

Je rflchissais quant au problme des moules mentaux dans la vie de chacun dentre nous, quand lAssistant surprit nen pas douter ma question, insista de bonne humeur:

Ici, il est facile de reconnatre que chaque cur difie lenfer o il semprisonne, en accord avec ses propres uvres. Ainsi, nous avons avec nous les diables que nous dsirons, selon la figurine choisie ou model par nous-mmes. Mais le service dassistance exigeait une grande attention et, de ce fait, nous retirmes linfirme vers une chambre propre et bien range qui lattendait.

Aprs que se fussent coules quelques minutes, nous revnmes dans le grand hall, alors dcongestionn et silencieux.

Seules quelques sentinelles de la nuit veillaient, infatigables et attentives.

Les tourments entrevus mobligeaient penser. Javais dj beaucoup tudi propos de la pense et de la fixation mentale, toutefois, langoisse de ces mes rcemment dsincarnes minspirait une profonde compassion et presque de la terreur.

Je confiai lami qui nous accompagnait, bienveillant, lindfinissable torture qui menvahissait et lAssistant expliqua avec sagesse:

En ralit, nous sommes encore loin de connatre tout le pouvoir crateur et agglutinant contenu dans la pense pure et simple et, de ce fait, nous devons tout faire pour librer les tres humains de toutes les expressions perturbatrices de la vie intime. Chaque chose qui nous asservit lignorance et la misre, la fainantise et lgosme, la cruaut et au crime, est un renforcement des tnbres contre la lumire et de lenfer contre le Ciel.

Et peut-tre parce que jeusse ardemment dsir encore quelques rflexions autour de ce sujet transcendant, Silas ajouta:

Vous souvenez-vous avoir lu une mmoire relative aux premires expriences de Marconi, aux abords du tlgraphe sans fil?

Oui, rpondis-je, je me souviens que ce savant, alors quil tait encore trs jeune, se consacra ltude des observations dHeinrich Hertz, le grand ingnieur allemand qui ralisa dimportantes expriences sur les ondulations lectriques, prouvant ainsi les thories de lidentit de la transmission entre llectricit, la lumire et la chaleur radiante, et je sais quune certaine fois, associant son oscilloscope lantenne de Popoff et au rcepteur de Branly, dans le jardin de la maison paternelle, il parvint transmettre sans fil, les signaux de lalphabet Morse... quest-ce que cela a voir avec la pense? LAssistant sourit et dit: La rfrence est importante pour nos considrations. Au-del delle, nous arrivons la tlvision, une des merveilles de lactualit terrestre

Et il ajouta:

Je me rfre au sujet pour rappeler que dans la radiophonie et dans la tlvision, les lectrons qui vhiculent les modulations de la parole et les lments de limage se dplacent dans lespace une vitesse similaire celle de la lumire, autrement dit, une vitesse de trois cent mille kilomtres par seconde. Or, un poste dmission et un autre de rception peuvent fonctionner en un mme local, ce qui amne comprendre quen un second endroit, les mots et les images peuvent tres mis et capts, simultanment, aprs avoir travers dimmenses espaces, en une fraction infinitsimale de temps. Imaginons prsent la pense, force vive et agissante, dont la vitesse dpasse celle de la lumire. mise par nous, elle nous revient invitablement, nous obligeant vivre, de manire spontane, dans son onde de formes cratrices, qui naturellement se fixent dans notre esprit quand elles sont alimentes par le combustible de notre dsir ou de notre attention. Il en dcoule la ncessit imprieuse de nous placer dans les idaux les plus nobles et dans les desseins les plus purs de la vie, car les nergies attirent les nergies de mme nature et, quand nous stationnons dans la viciation ou dans lombre, les forces mentales que nous extriorisons reviennent notre esprit, ravives et intensifies par les lments avec lesquels elles sharmonisent, faisant ainsi grossir les grilles de la prison o nous nous maintenons de manire irrflchie, transformant notre me en un mode ferm o les voix et les situations de nos propres penses, auxquelles sajoutent les suggestions de ceux qui sajustent notre manire dtre, nous imposent des hallucinations rptes, annulant, de manire temporaire, nos sens subtils.

Et, aprs avoir effectu une brve pause, il conclut:

Voil pourquoi, aprs la suppression du corps somatique, dans le phnomne vulgaire de la mort, la crature dsincarne, se trouvant dans un vhicule plus mallable et influenable, peut demeurer une longue priode de temps sous la domination de ses crations les moins constructives, se maintenant dans de grandes zones de souffrance et dillusion avec ceux qui vivent leurs mmes erreurs et cauchemars.

Lexplication ne pouvait tre plus claire.

Hilario et moi restmes silencieux, domins par un mme sentiment de respect et de rflexion.

Silas se rendit compte de notre attitude intrieure et nous invita gnreusement au repos pendant lequel, pour quelques heures, nous parviendrions nous dlasser... et penser. [1] Note de lAuteur spirituel: Nous nous rfrons aux rgions incrustes dans les domaines du globe terrestre, soumises aux mmes lois qui rgissent le temps.

5

mes malades

Le temps de repos auquel nous nous tions ddis termin, Silas, sous linspiration du dirigeant du centre, vint nous inviter une courte promenade dans les environs. Dailleurs, avec un tel rappel, Druso rpondait notre dsir dtudier les principes de causalit, chez les cratures rcemment dsincarnes.

Nous savions que la mort du corps dense tait toujours le premier pas pour la cueillette de la vie et, de ce fait, nous ntions pas sa