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GREENPEACE MEMBER 2014, Nº 2 Le tournant écologique des articles de sport p. 11 DOSSIER: sport et environnement p. 11 Désastre dans la ruche p. 42 Maïak: nouveaux succès de campagne p. 56

Greenpeace Magazine 2014/02

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N° 2 — 2014

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Édito — «Le prix du succès, c’est se dévouer, travailler dur et persévérer dans l’engagement pour ce qu’on veut atteindre», disait Frank Lloyd Wright, le célèbre architecte américain du Musée Guggenheim à New York. C’est précisément l’attitude que défend Greenpeace. Nous maintenons le cap dans nos projets, souvent couronnés de succès. Le moteur de notre travail, c’est la passion et sur-tout la ténacité. Des qualités particulièrement nécessaires en ce moment dans l’Arctique: si les autorités russes ont relâché les 30 militants incarcérés pendant des mois après une action contre une plateforme pétrolière de Gazprom, elles sé-questrent toujours notre navire, l’Arctic Sunrise. Et Gazprom a commencé en décembre à exploiter le pétrole de l’Arctique, un revers que nous essuyons dans notre combat. Mais la lutte continue. Greenpeace n’abandonne pas.

Car la ténacité paie: une vérité une nouvelle fois démontrée par notre lutte contre Wilmar, le plus gros produc-teur d’huile de palme du monde. Après des années de négo-ciations, Wilmar garantit dorénavant que son huile de palme ne provient pas de terres défrichées illégalement dans la forêt vierge. Le géant de l’huile de palme a cédé sous la pres-sion de l’opinion publique mobilisée par Greenpeace et celles de ses gros clients, eux aussi interpellés par Greenpeace. Persévérance, passion, constance: voilà des qualités illustrées également par le sport. C’est aussi pour cela que nous avons choisi de consacrer le dossier de ce numéro (p. 11)aux disciplines sportives. Quel est l’impact écologique du sport? Difficile de trancher pour l’ensemble des activités sportives. Le sport connaît des volets sombres, notamment, mais pas seulement, en termes d’écologie (p. 14+38). Mais le sport peut aussi être un facteur de motivation et un multiplicateur quand il s’agit de diffuser les valeurs écologiques et l’amour de la nature. Que ce soit dans un stade aux États-Unis (p. 16), lors d’une randonnée urbaine (p. 29)ou dans une industrie des articles de sport soucieuse de dura-bilité (p. 24). L’évidence du lien entre le sport et la nature apparaît notamment dans l’entretien que nous a accordé la gigathlète Nina Brenn (p. 34). Là aussi, c’est l’endurance, la passion et la ténacité qui nous mènent au but.

La rédaction

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Le � ort, un fa� eur de motivation écologiqueFaits et chi� res du monde des � orts 14 + 38

Reportage 16

Aux États-Unis, des clubs de � ort invitent les fans à la réfl exionÉclairage 24

Les fabricants d’articles de � ort réagissent aux tendances vertes Essai 29

La randonnée urbaine, une a� ivité écologique et autonome Entretien 34

La gigathlète Nina Brenn s’exprime sur la consommation et la nature

Abeilles En compagnie de la reine: 42

les hauts et les bas d’un jeune apiculteurNucléaire Axpo renonce aux livraisons d’uranium 56

de Maïak: histoire d’un succès de campagne

Forêt pluviale La forêt du Grand Ours au Canada: 59

l’arrêt de l’abattage redonne ses droits à la nature

Huile de palmeLE GÉANT DE L’HUILE DE PALME WILMAR S’ENGAGE À PRODUIR E EN R ESPECTANT L’EN VIRONNEMENT 62

Le lien (la carte)LE MONDE EN PEINTUR E 40

PhotoreportageMANTA: R AY OF HOPE 48

En a� ion 2Le mot de la dire� ion 10Mentions légales 10Campagnes 64Brèves 68Mots fl échés écologiques 72

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Milan, 19 février 2014 Des habits exempts de toxiquesPour le lancement de la semaine de la mode à Milan, des militants Greenpeace hissent une banderole de 100 m2 dans la galerie Vi� orio Emanuele II. Greenpeace demande ainsi aux créateurs de mode de se tourner vers les textiles sans produits chimiques dangereux.

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© DAV I D S O RC H E R / G R E E N P E AC E

Cincinnati (USA), 4 mars 2014 Prote� ation � e� aculairePro� er & Gamble, le géant des biens de consommation, coopère avec des produ� eurs indonésiens d’huile de palme dont l’a� ivité menace la forêt pluviale. Les bande-roles su� endues par Greenpeace au siège principal de la multinationale dénoncent la de� ru� ion de l’habitat du tigre et de l’orang-outan.

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Budape� , 30 janvier 2014 Un avertissement frappantÀ Budape� , des militants Greenpeace expriment leur opposition à l’extension de la centrale nucléaire de Paks. Avec l’aide de la Russie, deux nouveaux réa� eurs devraient s’ajouter aux réa� eurs en service depuis les années 1980 et dont la durée de vie s’étend jusqu’en 2037. L’opposition politique lu� e contre le projet.

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Beznau, 5 mars 2014 Visite à domicileUne centaine d'a� ivi� es Greenpeace en provenance de six pays prote� ent contre le maintien en exploi-tation de la centrale nucléaire de Beznau, dans le canton d'Argovie. Ils demandent la mise hors service immé diate de la plus vieille centrale du monde, dont le mode de con� ru� ion totalement dépassé con� itue une menace pour la population.

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Notre déménagement, prévu pour � n juin, n’a rien à voir avec le résultat de la votation populaire sur l’immigration de masse. Ni d’ailleurs avec l’atten-tisme du Parlement fédéral à propos de la mise hors service de nos centrales nucléaires vétustes. Nous ne quittons pas la Suisse, nous ne lâchons pas prise!

Mais bientôt, nous n’aurons plus de tables individuelles de travail. Dans nos nouveaux bureaux, à la coopéra-tive Kalkbreite à Zurich, nous pratique-rons la libre circulation des personnes: tout notre personnel cherchera chaque jour sa place de travail. Avec à la clé une économie de place, car le nombre de tables sera inférieur au nombre de collaboratrices et collaborateurs. Une situation voulue: dans l’esprit de l’ini-tiative sur les résidences secondaires, il ne sera plus possible de se garder sa place au chaud quand on est absent. C’est d’ailleurs un choix consciemment opéré par notre personnel, soucieux d’e� cacité énergétique et de durabili-té. Et la réduction de nos frais de loyer nous permettra d’allouer encore plus de ressources au travail de terrain en Suisse et à travers le monde.

La coopérative Kalkbreite qui abri-tera nos deux espaces de bureaux est exemplaire sur le plan de l’habitat et du travail. La surface habitable des logements est limitée à 35 m2 par personne (la moyenne zurichoise étant de 41 m2). En contrepartie, les vastes pièces d’usage en commun sont ou-vertes à tous, y compris aux locataires des bureaux. Les habitants renoncent à leur voiture personnelle et le site n’o� re pas de place de parc aux entre-prises implantées. Mais 300 places de stationnement de vélos et la proximité du réseau de tram, de bus et de train créent les conditions d’une mobilité en phase avec l’environnement. Le dépôt de tram au centre du complexe

n’est pas de l’espace perdu puisqu’il a été couvert d’un toit et sera bientôt une zone verte de détente ouverte à la population.

La Suisse fait face à un problème d’espace. La consommation de surface habitable par personne et la mobilité ont connu une croissance nettement plus forte que la démographie. Chacun veut toujours davantage. Les lacunes en aménagement du territoire et les contraintes systémiques pour toujours plus de croissance jettent une ombre inquiétante: le libéralisme économique n’aime pas les limitations.

Notre déménagement prend le contre-pied de cette évolution. En ré-duisant nos espaces de bureaux, nous favorisons les échanges, les rencontres et les confrontations d’idées! Les réponses unidimensionnelles ne s’at-taquent pas aux causes de la probléma-tique de l’espace. Il faut au contraire des solutions multiples comme l’éco-nomie verte ou la � scalité écologique, plus lourdes à mettre en place, mais aussi plus durables. À Kalkbreite, nous poursuivrons le travail sur ces ques-tions cruciales.

Markus Allemann et Verena Mühlberger,co-direction de Greenpeace

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MENTIONS LÉGALES – GREENPEACE MEMBER 2/2014

Éditeur / adresse de la rédaction Greenpeace SuisseHeinrichstrasse 147 Case postale8031 Zurich Téléphone 044 447 41 41Téléfax 044 447 41 [email protected]

Changements d’adresse: [email protected]

Équipe de rédaction: Tanja Keller (responsable), Matthias Wyssmann, Hina Struever, Roland Falk, Marc RüeggerAuteurs:Verena Ahne, Esther Banz, Wolfgang Hassenstein, René P. Moor, Mathias Plüss, Samuel Schlae� i, Jürgen Schmieder, Markus TischerPhotographes: Cortis & Sonderegger, Paul Hilton, Oliver Salge, Douglas SeifertIllustration: Janine WigetTraduction en français:Nicole Viaud et Karin VogtMaquette:Hubertus DesignImpression:Stämp� i Publikationen SA, BernePapier couverture et intérieur: 100% recycléTirage:108 500 en allemand, 22 500 en françaisParution: quatre fois par année

Le magazine Greenpeace est adressé à tous les adhérents (cotisation annuelle à partir de 72 francs). Il peut re� éter des opinions qui divergent des positions o� cielles de Greenpeace.

Pour des raisons de lisibilité, nous renonçons à mentionner systématiquement les deux sexes dans les textes du magazine. La forme masculine désigne impli-citement les personnes des deux sexes.

Dons: compte postal 80-6222-8Dons en ligne: www.greenpeace.ch/donsDons par SMS: envoyer GP et le montant en francs au 488 (par exemple, pour donner 10 francs: GP 10)

VERS UN NOUVEL ESPACE

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Si le � ort e� souvent perçu comme une passion et une philosophie de vie, il peut aussi faire fi gure de modèle en matière écolo-gique. C’e� ainsi que des clubs de football améri-cain équipent leurs � ades selon des critères de pointe en termes d’écolo-gie ou que des adeptes de la randonnée urbaine évitent toute technologie nuisible à l’environnement dans leur a� ivité. De même, certains fabricants d’articles de � ort excluentles sub� ances toxiques de leur produ� ion. Ces a� eurs peuvent aider chacun d’entre nous à se surpasser en matière de durabilité. M

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Pour assister à un événement sportif, 55% des Suisses se déplacent en voiture ou à moto. Parmi ceux qui font eux-mêmes du sport, 43% prennent la voiture pour aller le pratiquer. 5 à 7% des rejets de CO2 du trafic suisse sont issus des déplacements en lien avec le sport.

À partir de 2014, la Formule 1 se donne de nouvelles règles pour rendre ce sport plus écologique. Les voitures de course ne pourront consommer que 45 litres d’essence aux cent kilomètres, contre 70 auparavant.

Le Tour de France est la troisième plus grande manifestation sportive du monde, après la Coupe du monde de football et les Jeux olympiques. Les 198 participants de l’édition 2013 étaient accompagnés de 1600 véhicules, le ratio était donc de huit voitures ou motos par vélo. Mais l’essentiel des dégâts écologiques est dû au public. Une étape peut attirer un demi-million de spectateurs, laissant jusqu’à vingt tonnes de déchets derrière eux.

L’Everest passe pour la «plus haute poubelle du monde». Malgré de gros efforts de nettoyage, quelque 50 tonnes de déchets provenant des expéditions sont dispersées dans la montagne.

Les Jeux olympiques d’été 2012 à Londres devaient être «les Jeux les plus verts de tous les temps». En dépit de la construc-tion de quelques bâtiments énergétiques, l’événement a dégagé environ 3,4 millions de tonnes de CO2, dont la moitié par les spec-tateurs et l’autre moitié par les travaux de con-struction. Un volume qui équivaut au dixième des émissions annuelles totales de la Suisse.

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Un seul véliplanchiste au milieu d’un petit lac (par exemple de la taille du Rotsee lucernois) suffit à chasser la plupart des oiseaux de la surface des eaux et des berges. Un sport tendance encore plus fatal pour les oiseaux est le kitesurf. Le surfeur est littéralement porté et même soulevé dans les airs. Selon les con-ditions de vent, la voile rase pratiquement les zones de repos et de reproduction des oiseaux.

La Suisse compte deux millions de randonneurs, un million de joggeurs et un demi-million d’adeptes de la marche nordique. Les ventes de chaussures de marche et de course s’élèvent à 650 000 paires par année.

Pour la saison 2012—2013, le mar-ché suisse a écoulé 276 000 paires de skis et 37 000 snowboards. Un recul d’un quart pour les skis et de deux tiers pour les snowboards par rapport au début du siècle. Nombreux sont ceux qui se tournent vers le matériel de loca-tion, nettement plus écologique.

À Dubaï, l’une des villes les plus chaudes du globe, on fait du ski dans une halle. Une pratique qui exige chaque nuit la produc-tion de 20 tonnes de neige. La différence detempé rature entre la halle et l’air extérieur peutdépasser les 50° C. La consommation d’éner-gie pour le refroidissement est considérable, mais les milliers de visiteurs qui arrivent en avion dévorent encore bien plus de ressources.

Le Championnat d’Europe de foot-ball 2008 en Autriche et en Suisse a produit environ 900 tonnes de déchets.

Présentation par Mathias Plüss

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l y a des lieux trop intenses, même pour des cerveaux habitués aux sur-charges sensorielles les plus folles. Le Staples Center, ce�e énorme arène située en plein centre de Los Angeles, en fait partie. Ce soir, les

Lakers a�rontent les Indiana Pacers. L’am-biance e� empreinte de sueur, de bière et de sauce au fromage. Mark Wahlberg e� présent, Ashton Kutcher aussi, tout comme Jack Nicholson, qui se plaint des arbitres et fu�ige les baske�eurs. Les haut-parleurs di�usent de la musique, les �e�ateurs hurlent, tandis qu’un couple âgé ciblé par l’énorme écran vidéo e� incité à s’embras-ser. Quelque part, un enfant pleure.

Dans ce genre de situation, il e� ins-tru�if de prêter a�ention à ce qui manque. Par exemple, il n’y a pas d’eau dans les uri-noirs. Il y a six ans, les exploitants de l’arène ont remplacé les 178 urinoirs du �ade par une technologie sans eau. Les économies s’élèvent à plus de 26 millions de litres d’eau par année. Autre absent au tableau, les gobelets jetables. Car ici, on rapporte le réci-pient après consommation. Les poubelles surdimensionnées que l’on trouve un peu partout aux États-Unis sont également ban-nies. Au Staples Center, on pratique le tri des déchets. Au centre de presse, la seule pou-belle e� dédiée aux déchets recyclables. Et c’e� su sant, car tous les matériaux utilisés sont précisément recyclables.

Multiplicateur � ortifAux États-Unis, la politique ne parvient pas à sensibiliser la population à l’environnement. Mais d’autres organisations se me� ent à l’écologie, notamment des associations � ortives professionnelles.

par Jürgen Schmieder, Los Angeles

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Les photographes Adrian Sonderegger (né en 1980) et Jojakim Cortis (né en 1978) ont étudié la photographie à la Haute École d’art de Zurich et travaillent en duo depuis 2006. Travaillant surtout pour la presse, ils créent des images fortes souvent basées sur des mises en scène complexes, mêlant réalité et fiction. www.ohnetitel.ch

Les modèles fi gurant sur les photos sont des collabo-rateurs de Greenpeace.

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es 500 mots d’ObamaLe Staples Center e� le premier�ade aux États-Unis à avoir obtenu la certification ISO 14001 pour une ge�ion environne-mentale exemplaire. La halle,

qui abrite les matchs à domicile des Lakers, des Clippers, des Kings et des Sparks, accueille aussi des concerts et des manifes-tations comme la remise des Grammy Awar-ds. Le site e� emblématique de la capacité du �ort professionnel américain à devenir un leader de la prote�ion de l’environnement.

Di cile à croire, alors que, vus de l’e x-térieur, les Américains sont souvent consi-dérés comme des sédentaires dès qu’on les prive de leur voiture. Autre fait moqué, les États-Unis ont classé monument hi�orique le Wienerschnitzel, un re�aurant perme�ant de s’alimenter en voiture et qui représente-rait particulièrement bien le mode de vie ca-lifornien. Enfin, on réduit souvent les États-Unis à l’importance de leurs rejets de CO2, surpassés uniquement par la Chine selon une étude de la Commission européenne.

Dans son récent discours sur l’état de l’Union, le président Barack Obama s’e�

illu�ré par un feu d’artifice de 7000 mots. Là aussi, il e� utile de s’intéresser à ce qui manque. En e�et, Obama e� re�é très vague sur la politique environnementale et n’a évoqué aucune idée ou proposition de loi dans ce domaine. Moins de 500 mots étaient consacrés à la politique énergétique, visant d’ailleurs principalement la contro-verse sur la fra�uration hydraulique pour l’extra�ion de gaz et de pétrole. À la grande déception des écologi�es, comme l’exprime Eric Pi�a, président des Amis de la Terre: «La qualité rhétorique du discours n’e� pas à la hauteur du sérieux de la thématique.»

e réveil écologique du �ortIl e� vrai qu’Obama a lancé de nombreux projets écologiques au cours de sa présidence. Il e� d’ailleurs le premier président américain à avoir présenté un

va�e plan de prote�ion du climat. Il paraît toutefois réticent quand il s’agit de la nature et de l’environnement. Son discours était certes émaillé d’une belle déclaration: «Le changement climatique e� un fait. Si un jour nos descendants nous regardent dans les yeux en nous demandant si nous avons tout fait pour leur laisser un monde plus �able et plus sûr, avec de nouvelles sources d’éner-gie, je veux que nous puissions répondre: ‹Yes, we did›.» Mais Obama ne dit rien des moyens qu’il souhaite me�re en œuvre pour répondre à ce�e exigence.

Quelques jours après ce discours, le secrétaire d’État annonçait que l’oléoduc Key�one XL, prévu entre le Canada et le golfe du Mexique, pourrait être con�ruit. Obama aurait signalé qu’il allait donner son accord pour ce projet se chi�rant en mil-liards de dollars, pour autant que les rejets de CO2 n’augmentent pas de manière signi-ficative. Mais sans que cet engagement ait un cara�ère contraignant. Et sans précision sur ce que serait une augmentation «non significative» et donc encore acceptable.

La politique américaine ne parvient pas à sensibiliser la population à la prote�ion de l’environnement. Même si plus de 70% des habitants aimeraient se pencher sur la ques-tion, selon un sondage. Il faut donc d’autres modèles, par exemple le �ort. «La popula-tion commence à comprendre l’influence du �ort sur l’environnement et l’impa� des M

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changements sur la nature», dit Michael Pfahl. Ce chargé de cours à l’Université de l’Ohio étudie depuis des années les interac-tions entre le �ort et l’environnement. Ancien conseiller environnemental du club de basketball Cleveland Cavaliers, il a publié de nombreux articles sur les organisations �ortives et leur capacité à agir pour la sauvegarde de la planète, notamment The Environmental Awakening in Sport. Il s’ex-plique sur ce�e notion de réveil environne-mental: «Le �ort e� en passe d’endosser ses re�onsabilités, mais c’e� un processus qui ne sera jamais vraiment achevé.»

e Staples Center, un modèle à suivreLa Green Sports Alliance (GSA) joue un rôle moteur dans ce�e évolution. Créée en février 2010 dans le Nord-Oue� amé-

ricain sous la forme d’un atelier de managers de �ort, ce�e organisation à but non lucra-tif compte aujourd’hui plus de 210 membres. Parmi eux, des ligues �ortives comme la NHL, la NBA ou la MLB, l’association améri-caine de tennis, des clubs professionnels, des universités et des exploitants d’arènes �ortives. La GSA se donne l’obje�if de «rendre le monde plus écologique grâce au �ort». Sco� Jenkins, membre du comité, explique la démarche de l’organisation: «Notre plus grand défi, c’e� d’a�irer l’a�en-tion de la population. Nous devons faire en sorte que la durabilité devienne un élément du quotidien, étroitement lié à nos autres intérêts.» Sco� Jenkins dirige le �ade du club de baseball Sea�le Mariners. Il incite ses collaborateurs à un comportement exemplaire et à aborder sy�ématiquement la durabilité avec les visiteurs du �ade: «Nous voulons être un modèle pour la société.»

Diverses études montrent que l’in-fluence du �ort dans la société s’apparente à celle de la religion. Les jours de match, les adeptes des clubs vont en pèlerinage dans les cathédrales modernes que sont les �ades et certains athlètes sont vénérés comme des prophètes. L’e�et multiplicateur e� énorme. Chaque année, le Staples Center accueille plus de quatre millions de personnes qui viennent acclamer Kobe Bryant ou Chris Paul, mais qui perçoivent aussi la manière de fon�ionner de ce �ade un peu particulier. Dès lors que le public reconnaît les pratiques écologiques qui per-me�ent en outre d’économiser de l’argent, il pourrait bien les adopter à la maison.

L’exemple des urinoirs illu�re le rapport confli�uel entre la politique et la prote�ion de l’environnement. «Nous voulions passer à la nouvelle technologie, mais la ville de Los Angeles a mis deux ans avant d’avaliser ce sy�ème dont on ne savait pas encore que faire. Il y avait des préjugés. Certains suppo-saient qu’il serait source de mauvaises odeurs», explique Bill Po�or�, ingénieur en chef. Aujourd’hui, les �e�ateurs sont nom-breux à vouloir se renseigner sur une tech-

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nologie dont ils ont eux-mêmes vu l’e caci-té au Staples Center. «Les économies d’eau signifient une baisse de coûts de 30 000 dollars par année», précise Po�or�. Les res-taurants et bars de Los Angeles sont nom-breux à avoir repris l’idée que leurs gérants découvrent en général lors d’une visite au Staples Center.

omment réduire les dé-chets les jours de match?La GSA entend utiliser les clubs de �ort pour créer un e�et boule de neige et convertir ceux qui pensent

que le changement climatique e� une chimère cata�rophi�e. L’organisation ne décerne pas de label et n’émet pas de lignes dire�rices. Sa démarche consi�e à déve-lopper des solutions individuelles pour chaque organisation �ortive, en coopéra-tion avec le Conseil de défense des res-sources naturelles (Natural Resources De-fense Council, NRDC) et l’Autorité fédérale de prote�ion de l’environnement. Comment réduire les déchets les jours de match? Peut-on poser des capteurs solaires sur le toit du �ade? Doit-on vraiment inciter les �e�ateurs à dévorer un hamburger géant avec triple portion de viande à la pause?

«Il s’agit d’élaborer des �ratégies viables sur la durée, explique le �éciali�e Michael Pfahl. Le �ort capte l’a�ention et a donc les moyens de toucher le public en permanence.» Les Cavaliers de Cleveland ont commencé par sensibiliser leur propre personnel en o�rant des gobelets et des fontaines d’eau au lieu de cane�es, en renon-çant à imprimer les courriels et les �atis -tiques, et en lançant un concours de durabi-lité parmi les collaborateurs.

Pour les Mariners de Sea�le, une équipe de baseball, Sco� Jenkins, membre du comité de la GSA, a choisi de rééquiper le �ade. Depuis 2006, la consommation a baissé de 25% pour l’eau, de 30% pour l’élec-tricité et même de 60% pour le gaz. La part de déchets recyclables e� passée de 12 à 81%. «C’e� là un domaine dans lequel chacun peut s’impliquer. Les fans ont été un peu surpris de ne pas trouver de poubelles normales, mais ils ont vite appris à jeter les choses biodégradables ou recyclables dans les bonnes corbeilles», précise Jenkins.

De leur côté, les Trail Blazers, une équipede basket de Portland, ont rénové leur arène en passant commande chez des four-nisseurs écologiques. Et ils ont misé sur un mode de tran� ort plus écologique. 30% des � e� ateurs et plus de 40% des salariés rejoignent maintenant le � ade en tran� orts publics ou à vélo. L’arène e� la seule halle de � ort des États-Unis à porter le label d’or du Green Building Council.

Chaque membre de la GSA entame donc son propre cheminement vers un mode de fon� ionnement plus vert. «Toute forme d’évolution vers plus d’écologie e� un pas en avant», commente Sco� Jenkins.

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remier mouvement écolo-gique dans les années 1950Les e�orts a�uels du �ort américain s’inscrivent dans une démarche à long terme. «Il y a eu trois vagues succes-

sives de mouvements écologiques aux États-Unis; la première remonte aux années1950», relate Michael Pfahl. Le �ort jouait déjà un rôle important en la matière. L’origine de ce�e mouvance se situe à la Squaw Valley, dans le Nord californien, qui a accueilli les Jeux olympiques d’hiver de 1960. Une photo de 1954 montre un havre de paix, avec des montagnes saupoudrées de neige, de nombreux arbres et un chemin rural. On se croirait à l’époque de la ruée vers l’or, un siècle plus tôt.

Pourtant, six ans plus tard, la région voit le déroulement des Jeux olympiques d’hiver. «Au départ, cela semblait impossible, rappelle David Antonucci, auteur du livre Snowball’s Chance qui relate l’expérience. Mais les organisateurs n’ont pas uniquement aménagé des zones de compétition. Les bâtiments étaient presque tous conçus pour une utilisation ultérieure. Et les a�eintes à la nature ont été limitées.» Les athlètes étaient logés dans une maison commune perme�ant de rejoindre à pied les sites des compétitions.

alt Disney renonce à un parc thématiqueCes cinquante dernières années, la Squaw Valley e� devenue une ma -g nifique zone de �orts

d’hiver. Encore une fois, il e� utile de recher-cher ce qui manque: la pi�e de bob, par exemple. «Seules deux nations avaient confirmé leur participation, dit David Anto-nucci. Vu les coûts de con�ru�ion et les problèmes écologiques d’une telle pi�e, le comité d’organisation a été autorisé en 1957 à supprimer les courses de bob pour ce�e édition des Jeux.» Un autre élément qui ne s’e� pas réalisé e� le parc thématique prévu sur le site par Walt Disney, personnali-té impliquée dans l’organisation des Jeux. Les prote�ations des écologi�es l’ont fina-lement convaincu de renoncer à son projet. Les citoyens continuent d’ailleurs de s’a�iver à l’heure a�uelle pour empêcher la

con�ru�ion d’un trop grand nombre d’hô-tels cinq étoiles et de villas dans la région.

Il y a quelques semaines, l’endroit a reçu la visite de journali�es russes. Étaient-ils envoyés par le président Poutine pour ju�i-fier les con�ru�ions mon�rueuses et la déva�ation de la nature pour les Jeux olym-piques de Sotchi? Il aurait été pratique de pointer les pratiques des Américains il y a cinquante ans pour se disculper de ses propres agissements… «Mais la situation n’e� pas comparable. À la Squaw Valley, les re�onsables ont pris soin de préserver la nature», e�ime David Antonucci. Les reporters russes sont repartis passablement déçus.

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n cofondateur de Microso� écologiquement engagéLa deuxième vague écolo-gique prend son essor dans les années 1990, sous la présidence de Bill Clinton.

Celui-ci incite surtout les milieux écono-miques à s’engager en faveur de l’environne-ment. C’e� à ce�e époque que Philip Anschutz fait con�ruire le Staples Center à Los Angeles. Il planifie aussi le �ade de l’équipe de football Galaxy, une arène égale-ment labellisée verte. Un autre entre-preneur vert e� Paul Allen, cofondateur de Microso� et propriétaire des clubs Sea�le Seahawks (football américain), Portland Trail Blazers (basket-ball) et Sea�le Sounders FC (football). Convaincu de la prote�ion de l’environnement, il obtient le recyclage de 97% du béton lors de la démolition de l’an-cien �ade des Seahawks. Un béton réutilisé à 35% pour la con�ru�ion du nouveau �ade. Les trois équipes de Paul Allen feront d’ailleurs partie des membres fondateurs de la Green Sports Alliance.

es Eagles, champions de l’écologieC’e� donc une troisième vague verte qui déferle aujourd’hui aux États-Unis. Pour la voir au mieux de sa forme, il faut se

rendre à Philadelphie, dans le club de foot-ball américain des Eagles. «Ce sont les champions de l’écologie, e�ime Michael Pfahl. D’abord, ils me�ent réellement en œuvre leurs projets. En outre, ils ont dé-veloppé un sy�ème capable d’enthousias-mer les �e�ateurs. Par exemple une application perme�ant aux fans de surveiller l’évolution des initiatives écologiques.»

Pour une fois, il e� plus �imulant de s’intéresser à ce qu’on voit qu’à ce qui manque au tableau. Les quatorze éoliennes in�allées devant le �ade et les 11 000 pan-neaux solaires sur le toit produisent plus de 30% de l’énergie nécessaire au �ade. Le re�e e� couvert par des pre�ataires éner-gétiques soucieux de l’environnement. 98,9% des déchets de l’arène sont recy-clables. L’huile de friture pour les snacks e� transformée en biodiesel, les mets non consommés sont di�ribués aux personnes sans domicile fixe. Et l’association de pro-M

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tection des animaux PETA e�ime que l’arène des Eagles e� le �ade le plus favo-rable aux végétariens des États-Unis.

«Nous sommes propriétaires et mana-gers d’une équipe présente à la télévision à l’échelle nationale, dit Chri�ina Lurie. Nous e�érons que nos inve�issements dans les énergies renouvelables inciteront les autres entreprises à faire encore mieux que nous.» L’idée e� ici aussi de surveiller ses propres pratiques écologiques, tout en amenant les �e�ateurs du �ade à s’asso-cier à la démarche. L’initiative des Eagles s’appelle «Go green», rappelant aussi les couleurs du club.

es contradi�ions inévitables«Des chercheurs travaillent a�uellement sur une enveloppe extérieure des bâtiments capable d’absor-

ber le gaz carbonique. Quand ces re-cherches auront abouti, nous choisirons cer-tainement ce�e option. L’idée e� de s’améliorer en permanence», ajoute Chri�inaLurie. Une propriétaire de club qui ne se limite pas aux belles déclarations, c’e� cer-tainement une motivation forte pour le pu-blic. Une qualité malheureusement trop rare dans les milieux politiques, où les beaux discours ne sont souvent pas concrétisés.

Les e�orts de la Green Sports Alliance ne doivent toutefois pas faire oublier que l’empreinte écologique du �ort américain e� loin d’être négligeable. Les �ortifs sont con�amment en déplacement aérien. Les Mariners de Sea�le feront près de 84 000 km en avion pour leurs 81 matchs à l’extérieur de la saison 2014. Le 27 o�obre 2013, la ligue de football américain NFL envoyait les 49ers de San Francisco et les Carolina Panthers à Londres pour un match. Inauguré en 2009, le �ade des Dallas Cowboys a coûté 1,3 milliard de dollars et dévore en un seul match autant d’énergie quela ville de Nairobi. «Sur le fond, l’impa� du �ort sur la nature e� négatif, con�ate Michael Pfahl. Il e� impossible d’être écolo-gique à 100%, les contradi�ions sont inévitables. Ce que nous pouvons faire, c’e� minimiser notre influence sur la nature.

La Green Sports Alliance tente a�uelle-ment de s’élargir, tant aux États-Unis pour

intégrer notamment les universités et les petits clubs qu’à l’échelle mondiale. Les Freezers de Hambourg, une équipe de ho-ckey sur glace, ont déjà adhéré, tout comme la Tele2 Arena de Stockholm et The Hydro de Glasgow. La prochaine étape pourrait être une coopération avec le Comité interna-tional olympique ou la FIFA.

e �ade aux 1727 capteurs solairesLe �ort américain tente a�uel-lement de réussir là où la politique échoue. Avec un suc-cès considérable. À la sortie

du Staples Center, les fans ont beau déplorerla défaite des Lakers, ils auront tout de même vu les 1727 capteurs solaires du toit, les bornes de recharge pour les voitures éle�riques au parking, les urinoirs sans eau, les gobelets consignés, les snacks embal-lés dans du papier recyclable, et les tran�ortsen commun moins chers pour les déten-teurs d’une entrée au �ade.

Évidemment, une visite au Staples Center ne sauvera pas la planète. Mais les �e�ateurs a�entifs et soucieux de dura-bilité pourraient bien développer leur propre réflexion écologique.

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14Feu vert pour les articles de � ort Les articles de � ort et les vêtements d’extérieur sont source de pollution.

Leur produ� ion contribue à détruire l’expérience de la nature que les fabricants prome� ent à leur clientèle.Nombre de marques ont compris le problème et tentent de réduire leur empreinte écologique par des matériaux naturels et recyclables.par Samuel Schlaefl i

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500 tonnes de skis et de snow-boards jetés aux ordures chaque année en France: le ga�illage e� énorme. Bois, acier, fibre de verre, pla�ique à base de pétrole et vernis toxiques — autant de res-

sources qui finissent aux déchets encom-brants puis à l’usine d’incinération. Sans par-ler de l’énergie nécessaire à la fabrication des articles en que�ion. «Ce que nous pou-vons faire pour réduire les nuisances éco-logiques, c’e� produire des articles fon�ion-nels, e�hétiques, simples et durables», disait Yvon Chouinard, fondateur du géant du vêtement d’extérieur Patagonia. Il e� un peu la conscience écologique de la branche, avec des produits rési�ants à l’usage qui ne se démodent pas après une seule saison. Idéalement, on les gardera toute sa vie.

Radical, une petite entreprise de neuf collaborateurs qui produit des snowboards depuis 1984 en ville de Zurich, s’inscrit dans ce�e logique. Une production annuelle de 450 snowboards fabriqués à la main, surtout avec du bois suisse de peuplier, de frêne et de hêtre. «Nos planches ne se di�endent pas après trois ans d’usage, comme c’e� souvent le cas», dit Mark Farner, patron de la manufa�ure. Pour le flex et la cambrure de la planche, l’entreprise accorde même une garantie à vie. La robu�esse de la con�ruc-tion s’accompagne d’une base extra-dure en graphite. Pour 2500 francs, l’adepte peut se faire fabriquer sa planche selon ses goûts, c’e� l’o�re «sur mesure» pour laquelle il e� possible de remplacer les carres et la base une fois usées. «J’ai des clients qui ont fait refaire deux fois leur planche et l’utilisent depuis plus de vingt ans», relate Mark Farner non sans fierté. Il a fait le choix de la qualité et de longévité, pour réduire l’empreinte écologique de ses produits et répondre à l’exigence de la durabilité.

a scène du snowboard se met au vertD’autres fabricants ont découvertla mouvance durable, comme Niche, une marque américaine qui propose des snowboards

eco-friendly. Du�in Morell, l’un des fonda-teurs de Niche, explique sa démarche: «Nous avons compris que la produ�ion clas-

sique de snowboards e� relativement toxique. Or, ce �ort e� totalement tributaire de l’environnement, et nous avons donc cherché de meilleures solutions.» Minimiser les impa�s négatifs de la con�ru�ion de snowboards sur la nature e� devenu un obje�if prioritaire. En coopération avec un produ�eur de colle, Niche a développé une alternative biologique aux résines époxydes classiques à base de pétrole. Résultat, une colle composée à moitié de résidus renouve-lables issus de la fabrication de papier et d’agrocarburants. Au lieu de la fibre de verre utilisée pour une bonne cambrure de la planche, Niche fait intervenir des dérivés de basalte recyclables. Le carbone pour le sup-port longitudinal e� remplacé par le chanvre pressé. Les parties en bois proviennent d’une exploitation durable des forêts et les

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14carres sont majoritairement en acier recy-clable. «La demande e� en croissance, car notre clientèle e� renseignée sur les ques-tions écologiques», dit Du�in Morell. Les gros produ�eurs ont d’ailleurs pris le train en route: Burton, leader mondial du snow-board, propose aujourd’hui un modèle au noyau de bois certifié FSC, sans vernis toxiques et avec des carres en acier recy-clables à 90%.

n plein air, mais pas n’importe commentLa produ�ion de snowboards écologiques e� la dernière incarnation en date d’une ten-dance lourde dans le domaine

des �orts de plein air. Impossible au-jourd’hui d’acheter une ve�e tout temps ou un sous-vêtement thermique sans rencontrerla thématique de la durabilité. Ce se�eur économique e� d’ailleurs en plein essor. La preuve, le nouveau magasin Transa, à côtéde la gare centrale de Zurich, qui e� une véritable halle d’usine pleine de vêtements d’extérieur et d’articles de �ort. Transa compte a�uellement 270 salariés et son chi�re d’a�aires e� passé de 36 à 56 millionsde francs ces deux dernières années. Selon l’European Outdoor Group, l’association de la branche, les détaillants ont réalisé un chi�re d’a�aires de dix milliards d’euros en Europe (hors skis, snowboards et vélos).

Pourtant le boom du se�eur outdoor repose sur un paradoxe. Alors que la branche con�ruit son image sur la nature, elle contribue à la détruire par sa consommation d’énergie, ses déchets, ses rejets de CO2et ses produits chimiques toxiques et faible-ment biodégradables. Mais la plupart des fabricants ont aujourd’hui conscience du problème. Les sites des marques proposent généralement toute une panoplie d’infor-mations sur la durabilité et la re�onsabilité sociale, et les entreprises engagent du personnel �écialisé dans ce domaine. Jürg Buschor, connaisseur de la branche et éditeur du magazine Outdoor Guide, con�ate un revirement depuis cinq ans environ: «Auparavant la durabilité était généralement du ressort des services de marketing et on se bornait à de petites a�ions en trompe-l’œil». Aujourd’hui la que�ion e� une priorité relevant souvent de la dire�ion de l’entreprise.

Car l’environnement e� devenu un argument décisif pour la clientèle. L’an der-nier, le principal salon d’articles de �ort ISPO, à Munich, doublait sa surface consa-crée aux initiatives sociales et écologiques pour répondre à la forte demande des expo-sants. Et un rapport de 2012 de la banque J. Safra Sarasin sur la durabilité des fabricantsd’articles de �ort con�ate que le marché des produits verts ou éthiques connaît une forte croissance ces dernières années. Observation confirmée par Simon Schwarz, chargé de la durabilité chez Transa: «La clientèle e� plus sensible à la produ�ion durable dans le se�eur outdoor que dans la mode.» Bien informés, les clients de Transa interpellent le personnel de vente sur les critères écologiques, sociaux et éthiques.

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C’e� aussi l’e�et des campagnes de sensibilisation des ONG et des associations de consommateurs. Les sites comme rankabrand.org ou wegreen.de perme�ent de comparer les marques outdoor et de s’informer sur leur score en matière de dura-bilité. Les classements se fondent sur des informations di�onibles sur internet, par exemple les rapports de durabilité. Ce�e mé-thode peut cependant créer des di�orsions, car un meilleur rang peut être le reflet d’une meilleure communication.

éphalées et coton bioLa société Patagonia se retrouve régulièrement aux premières places de ce type de classements. Pion-nière pour les que�ions

environnementales, ce�e firme américaine s’e� con�ruit une forte crédibilité. Son fondateur Yvon Chouinard e� un �éciali�e internationalement reconnu de l’escalade, célèbre pour ses expéditions des années 1950 et 1960 dans le parc national de Yose-mite. Sa petite manufa�ure de grappins d’escalade e� devenue l’un des leaders de l’équipement outdoor, avec 1900 employés et un chi�re d’a�aires de 575 millions de dollars l’an dernier. Yvon Chouinard s’e� in-téressé aux que�ions environnementales avant les autres. Dès 1996, Patagonia passait au coton biologique, alors que la culture bio était encore cantonnée dans les milieux alternatifs et que les ONG n’en parlaient pas encore. Ce revirement e�, selon l’hi�oire o cielle de l’entreprise, une réa�ion dire�e aux e�ets toxiques con�atés en lien avec le coton de produ�ion classique. En e�et, les salariés d’un magasin Patagonia de Bo�on se plaignaient de fréquents maux de tête. Une inve�igation technique en révéla la cause: les vapeurs de formaldéhyde déga-gées par les �ocks de coton de la cave. La firme commandita alors un rapport sur la culture indu�rielle de coton et prit connais-sance des ravages provoqués par les pe�i-cides. L’idée de passer à autre chose faisait son chemin.

Dans les années 1990, Patagonia était aussi parmi les premiers fabricants à pro-duire de la fibre polaire à base de polye�ers recyclés. Ces dernières années, la firme indique avoir recyclé 92 millions de bouteilles

en pla�ique. Et les vêtements en fibre polaireusés sont aujourd’hui repris par les magasins Patagonia. Une société partenaire se charge alors du recyclage en transfor-mant les textiles en fils de polye�er. Par rapport à la produ�ion conventionnelle de fibre polaire, les économies se montent à 70% de l’énergie et des rejets de CO2.

e problème du fluorL’exemple de Patagonia a été suivi par de nombreux fabri-cants outdoor qui travaillent au-jourd’hui sur des matières biologiques ou recyclables. Un

problème demeure cependant: les composés de fluor toxiques qui ne se dégradent pas dans la nature. Ces composés sont en parti-culier utilisés sur les ve�es hardshell afin d’améliorer la prote�ion contre la saleté, l’huile et l’eau. Patagonia et d’autres produc-teurs ont annoncé bannir l’acide perfluo-roo�anoïque (APFO ou PFOA en anglais) de leur chaîne de produ�ion d’ici à 2015, mais ne veulent pas renoncer aux autres compo-sés fluorés à cause des exigences de

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14 fon�ionnalité. Or, des alternatives exi�ent: R’ADYS, un petit fabricant de vêtements de �ort de montagne basé à Nidau, près de Bienne, e� le premier à passer pour sa colle�ion d’été 2014 à une imperméabilisa-tion exempte de fluor. La technologie Bar-rier Eco qui permet ce changement a été développée par HeiQ, un �éciali�e suisse de l’apprêtage des textiles. Avec des polymères fortement ramifiés, il e� possible de se passer de fluor. Une année a su à reconvertir la produ�ion et l’augmentation des prix e� minime. La propriété hydro-phobe de ces textiles e� tout à fait compa-rable à celle des vêtements fluorés, explique Adrian Ruh�aller, le président de R’ADYS. «Les pertes concernent uniquement la fonc-tion oléophobe, laquelle n’e� pas décisive pour notre domaine et notre clientèle.» Adrian Ruh�aller aborde là un problème général de l’excès d’ingénierie: à quoi bon utiliser une membrane intégralement oléophobe et une rési�ance à l’eau et au vent conçue pour une expédition en Himalaya pour des clients qui iront simplement promener leur chien en soirée? Le client outdoor classique e�-il prêt à renoncer à une partie des

cara�éri�iques de ses vêtements pour des considérations écologiques? En fin de compte, ce sera à la clientèle de répondre, par ses décisions d’achat, à ce�e que�ion que se pose l’indu�rie.

Les exigences de GreenpeaceAu vu des problèmes écologiques et sanitaires,

la campagne Detox de Greenpeace demande l’élimination complète de l’ensemble des composés fluorés. Une vingtaine de sociétés internationales du domaine de la mode ont signé l’engagement Detox et se sont publiquement engagées à exclure tous les produits chimiques dangereux — y compris les composés fluorés – de leur chaîne de produc-tion d’ici à 2020. Mais le secteur outdoor peine à suivre le mouvement. Aucune marque de cette branche n’a pris d’engagement Detox pour l’instant. Informations plus précises: www.greenpeace.ch/modetox.

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Zones urbaines, zones de randonnée La marche à pied en ville et dans les agglomérations, c’e� l’occasion de se ressourcer, de se di� érencierde la masse et de pratiquer une alternative � ortive indépendante de l’indu� rie et des tran� orts. L’empreinte écologique de ce� e pratique e� minime.

L’indu� rie des � orts de plein air et du tourisme a défi ni une image de la nature, les endroits appropriés pour la découvrir et les équipements nécessaires. Idéalement, il faut faire des centaines ou des milliers de kilomètres, souvent en avion, pour ensuite parcourir une petite di� ance à pied, en expédition ou en randonnée. La plupart semblent mieux connaître l’Himalaya, les Andes ou les montagnes Rocheuses que leur propre ville.

Centre économique et culturel, lieu d’habitation et de trafi c, la ville e� tout cela. Mais pour se détendre et s’aérer, on part à la campagne ou à la montagne, on va skier, grimper, faire du vélo, longer un lac ou une crête. Le clivage entre la ville et la campagne e� fortement ancré dans nos têtes. À tel point qu’ilparaît absurde de partir en randonnée en milieu urbain. Mais les e� rits commencent à s’ouvrir: les grandes villes allemandes possèdent toutes leur guide de randonnée. Am� erdam propose une carte de randonnée et Vienne, une vingtaine de promenades signalisées sur le territoire de la ville, dont deux randonnées de 120 kilomètres de long. Pour la Suisse, un trio de journali� es — Jürg Frischknecht, Ursula Bauer et Marco Volken — produisait il y a deux ans un ouvrage remarquable sur la randonnée à Zurich, qui en e� déjà à son troisième tirage. La randonnée urbaine semble donc une discipline recherchée.

Faire le plein pour un euroQuel e� l’a� rait des randonnées en ville? «Tout

être humain e� arti� e, chaque randonnée e� une œuvre d’art ou du moins une expérience qui transcende le quotidien et l’e� ace», e� ime l’auteur allemand Ulrich Grober. À condition de revenir sur sa propre conception de la ville. Pour réussir une

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randonnée, il faut prendre un point de vue extérieur et neutre. Qui perme� ra de s’ouvrir à tout ce qui fait l’urbanité: croise-ments de routes, � ations d’épuration, sites indu� riels, jardins, passages souterrains, îlots piétons, bordures de rivières, signalisations lumineuses, a ches publicitaires, façades vieillies, verrières interminables, sans oublier le bruit, les odeurs, les gazouillements d’oiseaux, les voitures, les vélos, les bus et les habitants! Flâner dans les rues sans obligations, sans pression, crée un regard nouveau. Ulrich Grober en a fait l’expérience: «Il e� 14 h 05. Au retour de la vallée de la Ruhr, en entrant dans Düsseldorf, j’ai une série de petits chocs. Au dernier moment, je vois le feu rouge d’une rue latérale. D’habitude ignorées, les a ches me paraissent aujourd’hui très agressives. Une chaîne de fa� -food me propose de faire le plein pour un euro. Un opérateur de téléphonie mobile veut doper mes sens. Heureu-sement, une bande d’enfants e� en train de repeindre une pallissade devant une usine fermée, sous la surveillance de l’inévitable éducateur. Leur slogan: qui ne voit pas le ciel en lui-même le cherchera en vain dans tout l’univers.»

Découvrir la ville à pied, c’e� se ressourcer le corps, l’âme et l’e� rit. C’e� aussi, à condition d’être su samment réceptif, faire une expérience riche en enseignements socioculturels: comment vit le citadin? Comment agence-t-il son entrée de maison, son rebord de fenêtre, son jardin, sa cour intérieure, sa boîte aux le� res et son abri à vélo? Comment communique-t-il? On trouve des gra tis et des a ches sauvages de tout type: indications aux détenteurs de chiens, fi ches signalétiques de chats perdus ou retrouvés, annonces de recherche urgente d’appartement, rappels à l’ordre de conciergesdésillusionnés. Thomas Widmer, chroniqueur de randonnée appenzellois, déclare: «La ville e� , avec l’agglomération, l’e� ace le plus fascinant de Suisse.» Il évoque un � e� acle «autrement plus impressionnant que la campagne». Le randonneur va de surprise en surprise: «Adolescents ivres en soirée, mères cocaïnées sur les terrains de jeu, automobili� es fous furieux dès le point du jour. Concert de gens du voyage à l’ombre d’un gra� e-ciel. Et même chalets, fermes, forêts et rochers, dès que l’on qui� e le centre-ville.»

Rouler, c’e� l’impuissanceLa randonnée commence donc dès le pas de porte.

Pourquoi prendre un moyen de tran� ort quand on peut se déplacer à pied? «Marcher, c’e� la force; rouler, c’e� l’impuis-sance», disait déjà Johann Go� fried Seume, un voyageur du début du XIXe siècle qui s’e� rendu de Grimma, près de Leipzig, jusqu’à Syracuse. Une raison parmi d’autres d’aborder le microcosme de la ville par ses propres forces. Les avantages pratiques sont patents. Libre choix du point de départ et d’arrivée, possibilité d’écourter la randonnée grâce au réseau des tran� orts publics, re� auration et provisions di� onibles un peu partout, pauses et changements de dire� ion en option permanente. Au gré de son humeur, le randonneur se transforme en fl âneur doucement emporté par le mouvement de la ville. Il ne s’agit pas de faire le tour des a� ra� ions, les M

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yeux collés sur le guide de voyage. La randonnée urbaine n’e� pas la visite guidée. Autonome, le randonneur profi te sans pression et sans hâte de la liberté que lui o� rent ses jambes. La curiosité et une discrète impertinence perme� ent de s’amuser de l’un ou l’autre passant, de jeter un regard furtif dans un jardin, d’écouter la di� ute d’un couple bruyant ou de capter l’odeur d’un � and de kebab. Et ce sans équipement, sans produits de haute technologie � écialement conçus pour les � orts d’extérieur. Une bonne paire de chaussures, une ve� e, un porte-monnaie, c’e� tout. Une démarche on ne peut plus écologique. Une ascèse temporaire, adaptable aussi bien aux dimensions d’un plan de ville qu’à une carte à l’échelle 1:25 000.

La ville, un champ d’expérimentationL’e� ace urbain o� re des possibilités infi nies de se

di� raire. La dimension aussi bien � atiale que temporelle change la perception des choses. Se presser à travers le trafi c de fi n de journée, c’e� bien di� érent que se promener un dimanche matin dans un quartier résidentiel. Et pour la randon-née urbaine, pas de saison interdite! La ville s’o� re à nous tout au long de l’année.

Vues de loin, toutes les villes ont quelque chose en commun. Labyrinthes ouverts, sans commencement et sans fi n, elles proposent de multiples per� e� ives. Il n’y a qu’à se lancer, par exemple en tournant sy� ématiquement d’abord à gauche, puis à droite, puis à nouveau à gauche, etc. Ce schéma droite-gauche crée des parcours passionnants, au départ imprévu et à l’arrivée incertaine. Même pas besoin de plan de la ville pour s’y retrouver. Autre expérience à tenter, la traversée campagne-ville-campagne. La randonnée commencera dans une zone rurale près de la ville. Celle-ci sera alors traversée de bout en bout, avec ses quartiers périphériques, son centre-ville et sa vieille ville. L’itinéraire prend fi n de l’autre côté de la ville, à nouveau dans une zone de campagne. La taille plutôt mode� e de nos cités permet de réaliser un tel projet en quatre ou cinq heures de marche. Les impressions recueillies lors d’une telle excursion je� eront une lumière nouvelle sur la régionurbaine et ses nombreux contra� es. Le randonneur a� entif remarquera en outre combien le trajet de l’extérieur vers le centre e� di� érent de celui du centre à la périphérie. Une troisième expédition suivra le pourtour de la ville pour en faire entièrement le tour, à la découverte de la lisière entre les zones résidentielles, indu� rielles et agricoles.

Sortir en villeÀ une époque où l’indu� rie cherche à se rendre

nécessaire à n’importe quel type de loisirs, la randonnée en ville fait exception. Ni à la mode ni sexy, elle e� simplement écologique et facile. Toutes les infra� ru� ures pour la pratiquer exi� ent déjà. La position assise, que nous gardons souvent même en déplacement, n’e� pas vraiment physiologique. Mieuxvaut réa� iver le mécanisme de mobilité biologique de l’être humain: la marche à pied. La ville et l’agglomération sont des M

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Exemple de randonnée urbaine à GenèveGenève, ce n’est pas seule-

ment l’ONU, le jet d’eau et Calvin; c’est aussi un zoo gratuit, le Rhône et le plus long immeuble de Suisse.

La randonnée commence à la gare Cornavin pour longer le cours sinueux du Rhône jusqu’au village de La Plaine, dans l’arrière-pays. À la gare, prendre le boulevard James-Fazy qui longe la basilique Notre-Dame. Pour-suivre sur le boulevard, traverser le pont de la Coulouvrenière et tourner directement à droite. Dépasser l’imposant bâtiment des Forces motrices et continuer jusqu’à la hauteur du prochain pont. Emprunter la rue des Deux-Ponts à gauche et traverser l’Arve. Suivre ensuite le signal de randonnée jusqu’au parc ani-malier du Bois de la Bâtie. Visite gratuite et conseillée pour découvrir des espèces animales menacées. Depuis le parc, l’itinéraire jusqu’à La Plaine est signalisé par des panneaux jaunes.

Le contraste entre l’agitation de la ville et la promenade paisible au bord de l’eau apparaît plei-nement une demi-heure après le point de départ. Tandis que la rive gauche du Rhône est quasi intacte, la rive droite est parse-mée de blocs locatifs et de cons-tructions industrielles. Après deux heures de marche, on arrive à la Cité du Lignon. Conçue à l’origine pour 10 000 personnes, elle abrite aujourd’hui 5700 habitants. Le site est marqué par deux tours et le plus long bâti-ment de Suisse, s’étirant sur 980 mètres en un parcours sinu-eux, à l’image du Rhône.

Le chemin passe par des zones boisées de protection de la nature, impressionnantes par leurs grands chênes. La saison rêvée pour cette randonnée sera donc le printemps ou l’été, quand le feuillage protège du soleil et de la pluie. La randonnée dure six heures, mais peut s’interrompre après deux heures à l’hôpital de Loëx, après quatre heures à Aire-la-Ville ou après cinq heures à Cartigny, avec à chaque fois accès à une ligne de bus. La gare de La Plaine est régulièrement desservie par le train pour Genève.

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e� aces rêvés pour ce� e a� ivité. Avec à la clé l’expérience d’une liberté ine� érée. Benedikt Loderer, critique d’architec-ture et lui-même un pionnier de la randonnée urbaine, prétend: «Le vrai prote� eur de la nature, c’e� celui qui re� e à la maison.» Pour une fois, il a tort. Mais laissons Johann Go� fried Seume lui répondre, lui qui disait: «Tout le monde se sentirait mieux, si l’on marchait plus souvent.»

Exemple de randonnée à Bâle:Bâle, ce n’e� pas seulement le Rhin, le zoo et

l’indu� rie chimique; c’e� aussi un château d’eau, un dinosaure et même une alpe.

Ce� e randonnée en boucle débute à la gare centrale et traverse le quartier Gundeldingen vers le sud. Sur la colline appelée Ba� erie, on tombe sur un dinosaure grandeur nature et un château d’eau accessible aux visiteurs. Tout près, la prairie nommée Auf der Alp évoque bien le paysage alpin, avec ses pâturages et ses vaches. Prochaine étape: Klo� er-fi echten, le centre alternatif d’exécution de peines et de mesures du canton de Bâle-Ville. Un peu plus loin, la ville reprend ses droits. Traversée du faisceau des voies ferrées de la gare, en dire� ion du quartier Saint-Alban avec sa vallée. Le bac de Saint-Alban permet alors de traverser le Rhin entre le Grand- et le Petit-Bâle, où l’on découvrira des rues au fl air oriental et à l’ambiance des Balkans. Très animées par beau temps, les places de Clarama� e et de l’ancienne caserne mènent à nouveau au bord du Rhin. En prenant le plus ancien pont de Bâle, Mi� lere Rheinbrücke, on aboutit à la vieille ville et sa place du marché. De là, il su t de suivre le mouvement des passants pour se retrouver au point de départ. La ran-donnée dure trois heures sans compter les pauses.

Pour aller plus loin: Rafael Matos Wasem: Genève à pied, 10 parcours à thèmes, Éditions Slatkine, GenèveISBN 978-2832103067

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«La nature e� là, tout simplement.»La gigathlète Nina Brenn e� championne de sa discipline et aime te� er ses limites. Un entretien sur la consommation de la nature, l’extrémisme et les contradic-tions.

es tabloïdes alémaniques l’appellent la «reine du giga». Nina Brenn e� la championne inconte� ée du Gigathlon. Ce� e course d’endurance passepour la plus dure de Suisse.

Inventée par un publicitaire zurichois, la com-pétition comprend cinq disciplines: course à pied, natation, cyclisme, V.T.T. et roller. Sur une di� ance d’environ 200 kilomètres, le Gigathlon e� aussi une traversée de la Suisse,avec ses cols, ses lacs, ses forêts et ses vallées. Un a� e� qui plaît particulièrement à Nina Brenn: la course se déroule sur plu-sieurs jours dans des paysages variés, entre localités et villages, et non dans un � ade. Elle apprécie moins les courses comme le Ironman, qui se tient dans la région de Zurich (ou Rapperswil). Depuis dix ans, la gagnante de l’édition 2013 du Gigathlon e� presque toujours classée dans les trois premiers rangs du triathlon Inferno*.

Greenpeace: Nous nous promenons dans le domaine skiable de Flims. Vous travaillez à temps partiel à Zurich, mais vous vivez ici, dans les Grisons. À cause des montagnes? — Nina Brenn: Oui, j’ai grandi dans l’agglomération zurichoise, mon mari vient de Coire. Notre fi ls Flurin e� né en 2006et nous voulions tous deux qu’il découvre la nature et les montagnes. Je ne voudrais plus me passer de la vie en montagne.

C’e� la vue qui vous plaît tant? — Quand on se lève à cinq heures du matin à Flims et qu’on court dans les hauteurs au lever du soleil, on se retrouve une heure plus tard dans une solitude absolue baignée de la première lumière du jour. C’e� un sen-timent indescriptible.

Quelle di� érence d’altitude parcourez -vous entre le lieu de départ et le point le plus élevé? — Environ 2000 mètres. C’e� une que� ion d’entraînement. J’adore m’entraîner pour franchir facilement les montées.La légèreté me donne presque l’impression de voler.

En compétition, vous devez passer de A à B le plus rapidement possible, c’e� donc la vitesse que vous recherchez dans l’en-traînement. Arrivez-vous tout de même à profi ter du paysage? — Oh oui, c’e� même très intense dans le cadre compétitif. Le dernier Gigathlon e� encore présent dans M

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Vous travaillez donc à limiter les dégâts? — Oui, c’e� bien ça.

Les projets de con� ru� ion que vous suivez impliquent des a� eintes graves à la nature. Cela ne vous fait pas mal au cœur? — Oui et non. Je ne suis peut-être pas superécologi� e. Moi aussi, j’apprécie les avantages d’une liaison ferroviaire plus rapide, qui supposent certains travaux de con� ru� ion. Et je ne suis pas forcément opposée aux autoroutes.

Mais se borner à limiter les dommages, c’e� fatigant à la longue. — Il faut un cer-tain pragmatisme. Mais c’e� le vote du peuple souverain qui décidera d’un nouveau tunnel ou d’une autoroute. Les études d’impa� écologique et le suivi environne-mental, c’e� déjà un acquis en tant que tel pour la nature. Cela ne va pas de soi. Par contre, ce qui me dérange, c’e� que le train soit si cher et l’essence si bon marché.

Vous considérez-vous comme une pro-te� rice de la nature? — Pas au sens extrême. Je suis écologi� e, mais pas d’une manière extrémi� e.

C’e� quoi, l’extrémisme, à vos yeux? — Je conduis de temps en temps une voiture et je prends parfois l’avion pour aller au bord de la mer. Je compense alors les rejets de CO2… Ce qui me fait moi-même sourire, comme vous le voyez.

Qu’e� -ce que vous percevez consciem-ment lors d’une course en forêt? — L’ensemble, mais aussi les détails comme les champignons. La forêt de Flims e� une

ma tête avec toutes ses images. Je me rappelle bien mieux du paysage qu’après une simple promenade.

Comment cela? — Peut-être parce qu’en compétition, je suis près de mes limites.Certaines images se gravent alors dans la mémoire, on reconnaît les endroits, même des années plus tard.

Le Gigathlon, c’e� courir, nager, faire du cyclisme, du V.T.T., du roller. Quel type de � ort vous permet le mieux de faire l’expé-rience de la nature? — Il n’y a pas vraiment de di� érence, c’e� plutôt l’intensité qui infl uence la perception. La nature e� aussi beaucoup plus présente pour moi lors d’une course que lors de l’entraînement.

Vous pratiquiez déjà le jogging comme jeune adulte et avez suivi une formation d’ingénieure fore� ière à l’EPFZ. La fascina-tion de la forêt e� -elle née de vos courses à travers les bois? — Oui, je voulais faire mes études dans une branche en lien avec la nature. Je ne souhaitais pas me limiter au � ort, il me fallait aussi une a� ivité intel-le� uelle � imulante.

Qu’e� -ce qui vous a� ire le plus en forêt? — Au départ ce n’était pas forcé-ment la forêt qui m’intéressait, j’aurais aussi pu étudier la biologie ou les sciences envi-ronnementales. Mais la forêt e� un domaine particulièrement écologique. Aujourd’hui je travaille dans un bureau d’ingénieurs, je rédige des études d’impa� écologique et fais du suivi environnemental de la phase de réalisation des projets de con� ru� ion.

Concrètement, en quoi consi� e votre a� ivité? — Je suis généralement sur de gros projets, par exemple le projet de nou-veau tunnel de l’Albula des Chemins de fer rhétiques. Nous venons de fi naliser le rapport d’impa� écologique. La prochaine étape e� le suivi environnemental de la phase de réalisation. La forêt e� a� e� ée par les travaux à l’entrée du tunnel. J’ai donc étudié l’impa� du projet sur la fl ore et la faune fore� ière de l’endroit, avec défi nition des mesures de prote� ion et de compen-sation et bilan de défrichement. Et j’accom-pagne aussi la décon� ru� ion du chantier de transit alpin de Sedrun, qui concerne une grande zone fore� ière défrichée. J’étais également impliquée dans le chantier de l’autoroute de Knonauer Amt, dans le canton de Zurich.

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zone de prote� ion de la roche, avec des a� e� s à la fois très diversifi és et ressem-blants, des pierres et des arbres couverts de mousse. Au début, je me perdais réguliè-rement, malgré mon sens de l’orientation.

Faire du � ort en plein air, n’e� -ce pas se borner à consommer la nature? — Oui, la nature e� là, tout simplement, et nous en profi tons dans une certaine mesure. Mais il faut aussi voir ce que nous rendons à l’environnement: l’amour et le re� e� de la nature, c’e� ce qui compte.

Pourtant, vous vivez dans un domaine skiable, où les con� ru� ions sont nom-breuses. — C’e� à cause de notre maison qui était déjà con� ruite ici. Et ayant grandi en ville, j’apprécie les infra� ru� ures qui me perme� ent généralement de renoncer à la voiture, ce qui ne serait pas simple si nous vivions dans une région reculée. J’essaie de montrer à notre fi ls Flurin que c’e� beau-coup plus cool de monter en montagne avec ses propres moyens. Mais je ne lui interdis pas le télésiège, car je sais que mon a� itude personnelle e� assez extrémi� e dans ce domaine.

Vos opinions deviennent extrémi� es dès qu’il s’agit de performance physique…

Oui, je trouve que la montagne doit se mériter! C’e� trop facile de se laisser porter par une in� allation mécanique! Ceux qui prennent le télésiège pour ensuite redescendre en V.T.T., je ne peux pas les prendre au sérieux.

Vous montez donc toujours par vos propres forces? — Oui, et c’e� toujours une grande joie. Si je prends un véhicule, c’e� peut-être pour arriver au pied de la montagne, ou alors à la descente – jamais à la montée. Une expérience que je re-commande à tous.

A� uellement, on pointe du doigt les adeptes du V.T.T. de descente, avec leur lampe frontale qui dérangerait les animaux sauvages. Une critique exagérée? — Non, pas du tout. Les nouvelles lampes sont insupportables pour les bêtes sauvages et donc un problème écologique sérieux. Il faut davantage sensibiliser les gens à ce� e que� ion.

Avez-vous parfois l’impression de perturber la nature par la pratique de votre � ort? — Je ne traverserais jamais une zone de prote� ion de la faune à V.T.T. ou à

ski. Cela dérange les animaux sauvages et la perturbation de leur repos hivernal diminueleurs réserves d’énergie. À la montée, on e� moins rapide, mais on dérange tout de même.Même à raque� es, je ne m’aventurerais jamais dans ces zones.

Le � ort renforce-t-il la discipline personnelle? — Probablement. On dit sou-vent que le � ort e� une école de vie.

Quelle e� l’importance re� e� ive de l’expérience de la nature et de la discipline? — La nature e� tout ce qui compte, sinon je ne pratiquerais pas ce � ort de ce� e façon.

Vous sentez-vous une fon� ion de mo-dèle? — Je ne suis pas aussi connue que d’autres � ortifs de haut niveau, et je ne suis pas présente sur les réseaux sociaux. Cela ne m’intéresse pas de partager mes résul-tats d’entraînement avec le monde entier. Je préfère vivre le plus écologiquement pos-sible et transme� re ces valeurs à mon fi ls Flurin.

Concernant l’écologie, dans quelles conditions refuseriez-vous un � onsor, même généreux? — Un jour, j’ai été conta� ée par une banque. Là, je n’ai pas eu à réfl échir: faire de la publicité pour un établissement bancaire, c’e� exclu. Cela vaut aussi pour les fabricants automobiles et les entreprises du se� eur de l’énergie. Je suis heureuse de ne pas dépendre des � onsors, c’e� un privilège dont je jouis en raison de mon a� ivité professionnelle.

Dernière que� ion: vous ne vous ennuyez jamais lorsque vous passez des heures à courir ou à faire du vélo? — Non. C’e� tellement fascinant d’écouter la nature. Et quand j’en ai assez, je fais demi-tour. Ce n’e� jamais une contrainte.* Le triathlon Inferno, avec son dénivelé de 5500 mètres, est l’un des plus durs au monde.

Nina Brenn est née en 1979 dans le canton de Zurich, où elle a passé son enfance. Elle vient d’une famille sportive et participe très tôt à des courses et compétitions d’athlétisme pour enfants. À 16 ans, elle découvre le cyclisme. Après des études d’ingénieure forestière, elle s’établit à Flims avec son mari. Leur fils Flurin naît en 2006. Nina Brenn participe généralement à cinq compétitions par année.

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14Discrimination

Campagne contre le sexisme

Fin janvier l’Association suisse des services des sports (ASSS) lançait une campagne contre le sexisme et l’homophobie dans le sport. Sami Kanaan, président de l’ASSS et conseiller admi-nistratif de la ville de Genève, rappelle que les sportives lesbiennes et les sportifs gay sont sou-vent discriminés et n’osent pas afficher leur orientation sexuelle. Cette situation est source de souffrance. «Notre campagne veut sensibiliser le grand public au fait que, dans le sport, c’est bien la performance qui compte, pas l’orientation sexuelle», ajoute Sami Kanaan.

Prix écologiquePrix écologique

Promotion des manifestations vertes

Les événements sportifs exemplaires sur le plan de la durabilité étaient jusqu’ici récompensés par le prix ecosport.ch de Swiss Olympic. Six mani-festations ont été décorées l’an dernier, notam-ment la Fête fédérale de lutte suisse et des jeux alpestres et la Fête fédérale de gymnastique. Ce prix sera dorénavant remplacé par ProfilEVENT, un outil élaboré par Swiss Olympic et les offices fédéraux du sport, de l’environnement, de l’amé-nagement du territoire et de l’énergie. Une consultation gratuite est proposée aux organisa-teurs de manifestations en termes de transports écologiques, d’efficacité énergétique et de ges-tion des déchets. ProfilEVENT accorde en outre chaque année un soutien financier aux événements sportifs pour leurs mesures écologiques et durables. Données nécessaires et critères dispo-nibles sur swissolympic.ch.

BlogBlog

Sport and Politics

Expert en politique sportive internationale, le journaliste Jens Weinreich travaille notamment sur le financement des grands événements et la corruption dans les milieux du sport. Son blog s’appelle Sports and Politics (www.jensweinreich.de). Ancien responsable de la rubrique sportive de la Berliner Zeitung, il est indépendant depuis 2008. Ses travaux ont été récompensés par de nombreux prix.

Sotchi

Pas de médaille pour la nature et les droits humains

«Les Jeux les plus verts de tous les temps», annonçait Vladimir Poutine. Et ce à Sotchi, une station balnéaire subtropicale sans aucune infrastructure de sports d’hiver. Le village olym-pique est situé dans une réserve naturelle classée au patrimoine mondial par l’UNESCO depuis 1999. Dès 2010, Greenpeace et le WWF cessaient les négociations avec les organisateurs qui ignoraient toutes leurs critiques. Dans un rapport de la même année, le Programme des Nations Unies pour l’environ nement (PNUE) relevait l’insouciance de la Russie en termes de protec-tion des écosystèmes. Mais personne n’a pu arrê-ter la grande machine olympique déjà lancée.

Quatre ans plus tard, la répression est impi-toyable contre les opposants aux Jeux olympiques de Sotchi. Ceux qui critiquent encore la des-truction de réserves naturelles irremplaçables, la construction de routes et d’hôtels de luxe, la pollution des eaux de source par des métaux lourds, les décharges illégales de déchets de construction et l’érosion du sol sont jetés en pri-son. Le 12 février, l’écologiste russe Evgueni Vitichko est ainsi condamné à trois ans de colonie pénitentiaire par un tribunal de Krasnodar. Officiellement parce qu’il n’aurait pas respecté les règles de sa condamnation avec sursis pour sa participation en 2011 à une manifestation de protestation contre une construction illégale du gouverneur de Krasnodar. En réalité, les autorités ont voulu empêcher la présentation par Vitichko d’un rapport de son organisation Environmental Watch on North Caucasus (EWNC) sur les destruc-tions environnementales autour des Jeux olym-piques. En route vers Sotchi, Vitichko a été arrêté par la police pour «injures sur la voie publique» et condamné à quinze jours de prison. Neuf jours plus tard suivait la condamnation à la colonie

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pénitentiaire. Andrey Petrov de Greenpeace Russie connaît bien EWNC et constate que la répression s’est fortement durcie avec les Jeux olympiques. «Les activistes sont intimidés par la police, entra-vés dans leur liberté de mouvement et chassés des lieux. Le gou vernement a manifestement peur.» Yulia Genin, juriste spécialiste du droit environ nemental, fait état de la surveillance phy-sique et téléphonique des bureaux d’EWNC tout au long des Jeux. Visé par deux actions en justice, Suren Gasarjan, un autre membre d’EWNC, s’est exilé à Tallinn dès 2012. Mais pour le Comité international olympique, tout ceci est «not games-related» et n’a donc rien à voir avec les Jeux. Pourtant Human Rights Watch a fourni des preuves détaillées des violations des droits humains commises en lien avec les manifesta-tions olympiques: exploitation de travailleurs migrants, expulsion des habitants, discrimination des homosexuels, entrave au travail des journa-listes et des activistes. Dans une interview accor-dée à l’hebdomadaire Die Zeit, Suren Gasarjan déclarait: «Ce n’est pas une occasion de se réjouir, car les Jeux olympiques ont détruit notre nature unique. Sotchi n’est plus une station balnéaire, les écosystèmes sont saccagés.»

Neige recycléeNeige recyclée

De la vieille neige pour allonger les saisons

Alors que les hivers sont plus doux, les stations de sports d’hiver commencent à utiliser de la neige recyclée, selon le concept du snowfarming. La neige de printemps en haute altitude est couverte de bâches ou de sciure et réutilisée en automne pour les pistes de ski alpin et de ski de fond avant la chute des nouvelles neiges. La saison peut ainsi commencer plus tôt. L’Institut pour l’étude de la neige et des avalanches (SLF) à Davos démontrait il y a plusieurs années déjà que 80% de la neige couverte peut ainsi être pré-servée durant l’été.

Mais la Commission internationale pour la protection des Alpes (CIPRA) juge d’un œil critique la technique du snowfarming, qui est synonyme de consommation inutile de courant et d’eau, de manipulation des écosystèmes et d’atteintes au paysage.

Ride Greener

Le fun en respectant le climat

Les fans du snowboard et les adeptes du free ride passent tout leur temps libre en montagne. À proximité des glaciers, ils sont témoins du changement climatique, sans pour autant renon-cer à se déplacer en voiture, en avion ou en hélicoptère sur les sites les plus éloignés. Un groupe de champions de ski et de snowboard a voulu pointer cette contradiction en créant l’initiative Ride Greener. Un site internet (www.ridegreener.com), un magazine, des cours et des manifestations visent à sensibiliser la scène du snowboard aux pratiques respectueuses du climat et des animaux sauvages. Avec la produc-tion du premier film traitant du snowboard et du ski sous l’angle du climat: Steps: The Ride Greener. On y voit des sauts spectaculaires et des descentes magiques, mais aussi la montée à la seule force des muscles et l’arrivée en montagne en train. Les Alpes sont suffisamment attractives pour la pratique de ce sport — l’avion et l’hélicop-tère, c’est pour les paresseux, estiment les prota-gonistes. Financé notamment par Alpiq et myclimate, le film peut être visionné gratuitement sur www.stepsfilm.com.

Violations de droits

Travailleurs exploités sur les chantiers du Qatar

Les conditions réservées aux travailleurs des chantiers de la Coupe du monde de football de 2022 au Qatar sont déplorables. Les accidents mortels sur les chantiers se comptent déjà par douzaines. La protection juridique est inexistante pour les travailleurs, qui sont privés de passeport à l’entrée au pays et restent liés à leur employeur. Après visite des lieux, le quotidien anglais The Guardian parle d’esclavagisme moderne.

Pour demander au gouvernement du Qatar de respecter les droits des milliers de travailleurs migrants, signez la pétition lancée par Amnesty International: www.amnesty.org.

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Le Scientific Visualization Studio du Goddard Space Flight Center de la NASA fait se rencontrer l’art et la science. À partir de masses de données, il produit de fascinantes animations diffusées ensuite sur internet. Cette carte n’est qu’un arrêt sur image: chaque jour, 30 millions d’observations de ballons et de stations météo donnent un portrait dynamique de notre atmosphère en proie au changement

LE MONDE EN PEINTURE www.greenpeace.ch/le-lien

PARTICULES DE POUSSIÈRE

La désertifi cation qui progresse con-duit à des nuages de poussière qui voyagent loin.

SELS MARINS

Les cyclones toujours plus fréquents cata-pultent les sels marins dans l’atmo� hère.

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climatique. Les couleurs permettent d’identifier les aérosols tournant autour de la Terre: poussières et fumées, sels marins et sulfates. Les cyclones les trans-forment en tourbillons poussés par le vent. La modélisation de tels mouvements nous aide à comprendre comment ces facteurs influencent notre climat.

LE MONDE EN PEINTURE www.greenpeace.ch/le-lien

PARTICULES DE SULFATE

Elles proviennent des volcans et des carburants fossiles brûlés.PARTICULES DE

FUMÉE

Les brûlis des forêts anciennes dégagent des quantités de parti-cules polluantes.

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LES DÉBUTS DÉSASTREUX D’UN

APICULTEUR AMATEUR

La mort des abeilles dans le monde, les films sur les abeilles au cinéma et des ruches qui prolifèrent... Mais celui qui se lance dans l’apiculture ne s’adonne pas à un hobby à la mode. Il s’immerge dans une sous-culture terre à terre avec de grandes responsabilités. L’auteur de cet article élève des abeilles depuis deux ans. Il sait ce qu’est un vrai désastre et connaît la nécessité de suivre régulièrement la littérature spécialisée.

par Markus TischerIllustrations de Janine Wiget

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To start from scratch – depuis cette année, cette expression a un sens nouveau pour moi. Si elle n’était jusqu’ici qu’une � gure de rhétorique sou-vent utilisée en anglais ou entendue dans des chansons pop, je sais désormais qu’elle pourrait venir du monde des apiculteurs.

«Partir de zéro» – pour nous, cela veut dire passer chaque week-end à racler des plaques de bois. Au fond, nous travaillons avec un maté-riau sympathique: les cadres où les ouvrières bâtissent les alvéoles sont en bois d’aulne, les «ruches suisses» que j’ai moi-même construites sont en épicéa. Mais ce rucher, fabriqué avec amour, est contaminé, hautement infectieux. Nous sommes en zone interdite: «loque euro-péenne des abeilles», tel est le verdict de l’ins-pecteur. Mais qu’est-ce que ça signi� e concrète-ment? Nous le découvrons sur l’a� che «Épizooties dangereuses frappant les abeilles», qu’il vient d’apposer sur le mur du rucher. D’abord, nous allons devoir tuer les abeilles. Puis nous devrons appliquer de la soude caus-tique et un désinfectant sur tous les matériaux avec lesquels elles ont été en contact. Depuis quelques semaines, nous nous essayons au métier d’apiculteur. Ce qui frustrait notre prédé-cesseur en � n de carrière, nous en faisons l’expérience dès nos débuts.

La vocation

d’apiculteurL’a� che concernant les épizooties fait partie de la ruche en kit. Le rucher est, quant à lui, joli-ment situé, comme dans un conte de fées. On y trouve vraiment tout ce qu’il faut et il peut ac-cueillir jusqu’à seize colonies d’abeilles. Dans ce singulier et mystérieux mélange d’ustensiles high-tech et low-tech, on trouve aussi un porte-

rayons, un entonnoir à abeilles, un extracteur centrifuge ou un lève-cadre: tout un jargon auquel je me suis habitué très facilement. Rien n’a été oublié, même le plus improbable – jusqu’à la colle spéciale qui permet de marquer la reine (à condition d’en voir une) au moyen d’une pastille numérotée...

Je possédais déjà un outil d’apiculteur: un «enfumoir» en métal pour projeter de la fumée à base d’herbes séchées à l’intérieur de la ruche. Des amis me l’avaient o� ert pour mon 40e anni-versaire, deux ans plus tôt. J’avais apparemment mentionné un peu trop fort que je souhaitais élever des abeilles... Ce monde me paraissait fascinant. D’abord la communication entre les insectes; puis leur origine, qui remonte à des temps immémoriaux; mais aussi ce côté mysté-rieux, poétique: bref, tout le caractère existentiel d’une vie d’abeille. Cet outil qui suscitait bien des questions est resté sur la bibliothèque, pour la dernière phase de l’apprentissage théorique du métier d’apiculteur…

C’est du sérieuxCette phase devait s’achever avec mon dernier déménagement. Peu après, mon meilleur ami évoque par hasard mes ambitions en discutant avec mes nouveaux voisins. Or, il s’avère que l’apiculteur de 80 ans qui habite juste à côté cherche – en vain jusqu’ici – un successeur. Pour-quoi ne pas saisir l’occasion? «C’est vous qui voulez reprendre mes abeilles?», demande-t-il lors de notre premier contact. Il ne s’écoulera guère de temps jusqu’à la signature du contrat.

Entretemps, je le rencontre quand même plusieurs fois, lui et sa femme. Il faut le convaincre, gagner sa con� ance. Oui, nous avons compris que nous ne pourrions plus partir en vacances qu’en dehors de la saison des abeilles, soit entre octobre et février. Oui, je lui promets d’apprendre le b.a.-ba du métier en suivant le cours organisé par les Amis des abeilles zurichois, auprès desquels je me suis déjà inscrit. Notre prédécesseur était le dernier apiculteur du village. Bientôt, je le serai à mon tour. Encore une chose: nous devons nous abon-ner à la Schweizerische Bienen-Zeitung. Pour l’heure, il nous prête les numéros qu’il possède. Les articles s’intitulent: «Ne pas oublier la loque européenne», «Liste des communes dans les-quelles l’utilisation de streptomycine est indiquéeen 2012» ou «Comment � xer rapidement du

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� l de fer sur les cadres à couvain». Et les «Observations apistiques» trouvent ici des lec-teurs attentifs.

L’heure de vérité

En hiver, je reçois Der Schweizerische Bienenvater,la bible des apiculteurs alémaniques. Je suis l’un des derniers à recevoir cet ouvrage de réfé-rence en cinq tomes sous ce titre. Récemment, il a été rebaptisé Das Schweizerische Bienenbuch,les éditeurs ayant tenu compte du fait que ce domaine jusqu’ici réservé à des vieux messieurs excentriques se féminise et se rajeunit. Fort de ce savoir séculaire, nous attendons impatiem-ment notre première saison, le moment crucial où, au printemps, les colonies entreprennent leur premier vol.

Cela signi� e que nous passons aux choses sérieuses. Pour les abeilles, c’est le moment où elles vont pouvoir vider leur poche rectale, après le long repos hivernal. Nous attendons. Assez longtemps... Soudain, l’une de nos huit colonies se réveille en� n. Deux autres ne donnent que de faibles signes de vie. Peu de vols. De jour en jour, il devient manifeste que nous ne serons pas épargnés par la dure réalité. La moitié des colo-nies d’abeilles suisses n’a pas survécu à l’hiver.

Combien de temps devons-nous attendre? Je demande à mon prédécesseur – encore quelques jours, jusqu’à ce que nous ouvrons les ruches ensemble. Le spectacle est a� igeant: cinq colonies sont mortes, les ruches sont pleines de cadavres. Deux colonies sont très faibles, leur bourdonnement est à peine perceptible. Seule la colonie n° 1 donne l’impression d’être en bonne santé. C’est un spectacle qui a poussé ces dernières années de nombreux apiculteurs à jeter l’éponge. De nos jours, l’apiculture n’est pas un passe-temps anodin pour les débutants. C’est une responsabilité, car une petite erreur peut conduire au désastre et décider de la vie ou de la mort du rucher.

Tentatives d’explicationUne chose est sûre: la mort des abeilles a plusieurs causes. Dans notre cas, il semble qu’il y ait deux raisons principales. Les abeilles n’étaient pas su� samment protégées contre le varroa. Si l’on n’intervient pas correctement pour lutter contre ce � éau – le bon moment et la bonne température sont décisifs –, nombreuses sont les abeilles qui ne réussiront pas à sur-monter un long hiver. La fascinante grappe dans laquelle elles se réchau� ent mutuellement – se déplaçant tantôt à l’extérieur, dans la zone moins agréable de cet agglomérat, tantôt à l’inté-rieur, bien au chaud – n’est alors pas assez grosse pour maintenir la température nécessaire. La température du corps d’une abeille est proche de celle des humains.

Le varroa avait sans doute quelque chose à voir avec la seconde cause de ce désastre, la «loque européenne», maladie bactérienne très contagieuse. En e� et, les insectes sont plus vulnérables quand les colonies sont a� aiblies et décimées par l’acarien. Une abeille parasitée vit trois fois moins longtemps qu’une abeille saine. Le � lm de Markus Imhoof, Des abeilles et des hommes, m’a, une fois de plus, montré de quelle manière monstrueuse le varroa destructors’attaque aux abeilles: transposé à taille hu-maine, un tel acarien est aussi gros qu’un lapin adulte. Toujours est-il que l’inspecteur déballe aussitôt sa bouteille de gaz pour «soufrer» sous nos yeux les deux colonies infectées. Après ce spectacle atterrant, il nous conseille de les faire incinérer, de même que les survivantes des colo-nies mortes. Il ne nous reste que la colonie n° 1 qui, jusqu’ici, ne présente aucun signe extérieur de l’épizootie. Bien que les autorités recom-mandent de liquider une colonie en présence d’un taux d’infestation de plus de 50%, nous sommes décidés à la sauver.

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Premiers secours

Si l’apiculteur a quelques nuits d’insomnie, nous autres novices, nous regardons l’assainissement prévu avec un certain pragmatisme. Première-ment, nous devons désinfecter méticuleuse-ment la ruche a� n d’éliminer toute trace d’agents pathogènes. Cela nous oblige à en� ler à chaque fois nos combinaisons de protection et à nettoyer à fond l’intérieur des caissons avec des moyens mécaniques, chimiques et thermiques. Nos nouvelles colonies doivent être préservées des funestes bactéries. Deuxièmement, il s’agit de sauver la colonie n° 1. Pas question de démar-rer sans aucune abeille! Et la seule chance de l’éviter, c’est de prendre une mesure draco-nienne: mettre la colonie n° 1 en quarantaine. Pour cela, nous devons transférer les abeilles sous forme d’essaim dans une vieille caisse.

La veille au soir, nous étudions rapidement la bible des apiculteurs pour savoir ce dont nous avons besoin avant de mettre au point les détails avec notre prédécesseur. C’est le premier de toute une série d’exercices que nous accompli-rons désormais à l’aube, avant d’aller travailler et sans avoir encore pu pro� ter des connais-sances du cours. Au début, cela rend un peu nerveux de transbahuter dans une caisse des milliers d’insectes qui bourdonnent, en donnant quelques coups de poing énergiques sur les cadres que l’on vient de retirer. Nous poussons délicatement les abeilles récalcitrantes à l’aide d’une brosse. Au début, je ne me rendais pas vraiment compte de ce qu’une petite abeille doit endurer. Une colonie vit maintenant dans une cave sombre de notre maison. Ce ne sera pas la dernière fois que nos colocataires vivront une expérience surprenante: une grappe d’au moins 20 000 abeilles se met à bourdonner dès que quelqu’un allume la lumière.

La caisse – nous nous en sommes assurés – est hermétiquement fermée. Après trois jours de diète, la colonie n° 1 doit avoir éliminé tous les agents pathogènes de la loque européenne et être prête à réintégrer son ancienne ruche désin-fectée. Encore une chose qu’il faut faire le ma-tin, lorsque les abeilles sont moins agressives. Et n’e� ectuez surtout pas une telle opération à lava-vite, car elles ressentent le stress de l’apicul-teur. Elles n’aiment pas la sueur.

Di� cile de pratiquer cet exercice avec � egme. Cela ne va pas sans piqûres. Il arrive que le dard des abeilles transperce nos jeans, et parfois, nous avons l’imprudence d’oublier notre voile blanc. Notre prédécesseur, lui, n’en porte jamais; il a son cigare. «Les piqûres font partie du métier», dit-il. Nous en ferons bientôt l’expérience. Car la colonie n° 1 semble pour l’instant sauvée. Mais déployer tant d’e� orts pourune seule colonie n’en vaut pas la peine – et nous voulons plus d’abeilles...

Comment se procurer une colonie d’abeilles

Qui aurait pu s’imaginer qu’à la caserne des pompiers de Zurich, la liste d’attente des per-sonnes intéressées par des colonies d’abeilles était déjà close pour cette année? Ce soir-là vers 22 heures, à l’Auberge du Cerf à Egg, nous assis-tons à l’assemblée générale de l’association des apiculteurs du district de Meilen – un petit tuyau de notre prédécesseur qui a aussi fait le déplace-ment. Pendant qu’on nous sert une copieuse assiette de charcuterie, nous essayons de nouer des contacts avec des apiculteurs expérimentés. Il doit bien y en avoir un qui nous con� era l’une de ses colonies.

C’est la deuxième fois en une semaine que j’assiste à une telle manifestation. La saison des abeilles vient de commencer. Pourtant, il est bientôt manifeste que nous n’avons aucune chance. Les pertes enregistrées l’hiver dernier ont été telles que personne ne veut partager ses abeilles avec nous. Il ne nous reste plus, ce soir, qu’à écouter la conférence sur les plantes mel-lifères. Et si on répondait à une annonce dans la Schweizer Bienenzeitung? Si on achetait une colonie à Vals et qu’on la transportait dans l’Un-terland zurichois? La solution viendra � nale-ment de l’ancien collègue de travail d’un ami, un apiculteur bio qui se montre disposé à nous céder une colonie. Le transport doit avoir lieu le

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dimanche soir, dans une voiture de tourisme que nous avons aménagée en conséquence. Or, c’est une «ruche suisse» complète que le sym-pathique apiculteur nous con� e avec sa colonie d’abeilles – et même la plus résistante. Ses di-mensions sont telles que nous devons déployer des e� orts prodigieux pour la faire entrer dans la voiture... Tandis que nous faisons route, un bourdonnement intense se fait entendre dans l’habitacle. Notre installation n’est pas tout à fait étanche. L’opération se termine bien, mais avec quelques piqûres. Il fait déjà nuit quand les quelque 30 000 abeilles sont en� n installées dans la ruche. Des tranches d’oignons crus sur les piqûres devraient empêcher qu’elles n’en� ent – c’est du moins ce que nous voulons croire...

Observation du trou d’envol

Finalement, nous suivons aussi le cours. Après toutes ces émotions, de solides bases théoriques ne peuvent pas nous faire de mal. Un samedi après-midi sur deux, nous écoutons les explica-tions de notre professeur qui s’avère être un défenseur infatigable de la «ruche suisse» – alors que, dans le monde entier ou presque, on utilise des ruches Dadant à toit plat, de simples caisses qu’on peut poser n’importe où. Mais nous apprenons qu’un apiculteur qui a un vrai rucher et une ruche suisse avec ouverture à l’ar-rière est «à tu et à toi avec la reine». Le respon-sable du cours de base I des Amis des abeilles zurichois prône l’apiculture intuitive. On peut quasiment tout déduire en observant le compor-tement des abeilles: l’observation du trou d’en-vol serait d’ailleurs pratiquement la principale activité de l’apiculteur. Je comprends pourquoi.

Moi aussi, j’aime � âner le matin autour du ru-cher avec ma tasse de café à la recherche de symptômes notables. Il su� t de savoir les déce-ler, interpréter ce qui se trouve sur la planche de vol – des larves curieuses, des abeilles mortes, etc. Les déjections et les déchets fournissent des informations importantes concernant, par exemple, l’état du couvain, les symptômes d’épi-zooties et des tendances à former des essaims. On peut tout savoir, sans avoir besoin de déran-ger toute la colonie. Car chaque observation à l’intérieur de la ruche peut être considérée comme une atteinte massive à l’intégrité d’un vaste organisme. Mais il y a aussi la pratique. Dans la ruche, il y a des colonies d’abeilles vi-vantes qui sont là pour nous l’enseigner.

Durant le cours, personne ne demande pourquoi, après leur avoir pris la plus grande part de leur miel, on les nourrit chaque année avec de l’eau sucrée. Notre professeur pense qu’on pourrait faire des expériences et leur lais-ser plus de miel. Le cours est bien fréquenté; il y a aussi des femmes et un très jeune homme. J’ai même récemment rencontré mon médecin de famille qui suit un cours parallèle. Ce que nous apprenons ici, nous l’avons souvent prati-qué dans la réalité. Nous avons véri� é que la colonie n° 1 n’a pas de maladies et que la reine a pondu des œufs. Nous avons réussi la repro-duction des abeilles de la colonie n° 2. Nous avons prélevé de fascinantes cellules de reines. Nous avons procédé à leur marquage à l’aide d’une pastille collée. Nous avons même failli marquer un faux bourdon. Nous avons essayé d’empêcher que les abeilles essaiment. Entre-temps, la loque européenne a aussi contaminé le rucher-école – cette épizootie peut vraiment toucher tout le monde. En tout cas, mieux vaut ne pas procéder intuitivement pour lutter contre le varroa – cela constitue même le contenu capital du cours. Nos armes sont organiques: elles s’appellent acide oxalique et acide formique.

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À l’apiculteur de contrôler ses colonies

Cette année passée en symbiose avec les abeilles représentait un dé� pour moi et cette expérience m’a subjugué. Déjà, la beauté du rucher peut vous réconcilier avec les circons-tances les plus ingrates. C’est une bonne façon de commencer la journée, un exercice pour trouver la sérénité et admirer la parfaite organi-sation sociale des abeilles.

L’abeille est une créature qui assume de multiples tâches et qui les accomplit métho-diquement durant sa courte vie. D’abord, elle nettoie les cellules, puis soigne le couvain; plus tard, elle produira de la cire, construira des alvéoles, transformera la nourriture, montera la garde. Ce n’est qu’à la � n, qu’elle deviendra une ouvrière.

Nous sommes fascinés par ce qui se passe dans ces ruches suisses. Et nos colocataires

s’étonnent de voir de nouveaux outils étranges dans la maison... Certains prennent nos réci-pients d’eau sucrée pour du produit de vaisselle. On nous parle de phénomènes curieux, comme cet essaim qui s’est échappé à la Pentecôte, alors que nous étions partis trois jours à la montagne.

Plus tard, nous avons cherché cet essaim dans le voisinage, mais � nalement, il a bien fallu se rendre à l’évidence: nos trois jours de randonnée s’étaient soldés par une colonie en moins. – Un jour, ma collègue de travail m’an-nonce au téléphone qu’on vient de trouver un essaim d’abeilles. Mon aide-apiculteur, revêtu d’une combinaison de protection, avec sa caisse à essaim et son savoir tiré de la bible des apicul-teurs, le capturera une heure plus tard sous les yeux des voisins. L’essaim est venu enrichir notre petit centre de recherches zoogénétique sur les abeilles – et notre stock d’anecdotes.

Tout est bien qui � nit bien? Nous avons au moins réussi à mettre en marche l’extracteur centrifuge. La colonie n° 1 s’est bien rétablie, au point de fournir de quoi fabriquer 20 kilos de miel. Ridicule pour les vieux briscards, mais bien plus que ce que nous avions espéré. Je déclare aux autorités que nous enverrons cinq colonies hiberner lors de la prochaine saison. «Contrôler les stocks est un devoir pour l’apiculteur», peut-on lire dans le dernier numéro de la Schweizerischen Bienenzeitung, qui vient de paraître...

Markus Tischer (46 ans) est journaliste culturel et apiculteur. Ce texte est le récit de l’année 2012. La suite a été plus réjouissante: pas de maladie, une récolte de miel généreuse… mais aussi de nombreuses piqûres. Il commence la saison 2014 avec huit colonies; toutes sauf une ont survécu à cet hiver doux.

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Texte de Paul Hilton Photos de Paul Hilton et Douglas Seifert

Imagine que tu nages juste au-dessous de la surface de l’eau, par une belle matinée ensoleillée dans la mer tropicale d’Indonésie... L’eau est si claire et si calme que tu peux même voir ton reflet se dessiner au-dessus de toi. Ton corps est parfaitement conçu pour évoluer sans peine dans les eaux turquoise – tel un immense oiseau dans un ciel bleu fluide. Alors que, tout en glissant sous l’eau, tu filtres ta nourriture, tu entends soudain le bourdonnement d’hélices qui s’ap-prochent. Et au moment où tu identifies le bruit, tu es traverseépar la douleur aiguë d’un tube d’acier qui transperce ton corps. Il pénètre dans ton dos et s’enfonce dans tes organes. Tu te jettes à droite, à gauche, mais tu n’arrives pas à te libérer et tu es remorquée, comme un objet flottant à la surface. Et plus tu te débats, plus les crampons s’enfoncent douloureu-sement dans ta chair. Durant trente minutes, tu luttes pour ta vie et t’affaiblis tandis que l’eau se teinte de rouge sang.À la surface, tu vois et tu entends les hommes de l’équipage qui psalmodient une chanson ancestrale censée empêcher que tu leur échappes. Un filin d’acier se déplace devant ta tête et t’attrape au moyen de son nœud coulant. Tu es alors foudroyée par une douleur vive, tout devient noir – une petite pointe en acier pénètre dans ta tête – bientôt, tu ne ressens plus rien... Ton corps somptueux avec ses ailerons noirs est hissé à bord à l’aide d’un crochet. Là, il sera dépecé: on tranche d’abord la tête, les ailerons et la queue, puis on arrache les branchies du cou. Tu es désormais un diable de mer sans éclat, exterminé dans un acte d’une impitoyable barbarie, et tu vas alimenter le commerce douteux des «remèdes» de la médecine chinoise traditionnelle.

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1 Les bancs de raies manta sont de plus en plus rares. Leur chair finit dans les casseroles et e� traitée pour devenir un pseudo-médicament exotique.De nombreux �ocks n’arrivent plus à se renouveler. 2 Une razzia gratifiante: un kilo de raie manta peut valoir jusqu’à 500 dollars. Selon les e�imations,jusqu’à 80 000 kilos sont vendus chaque année sur les marchés chinois. 3 Fin d’un poids lourd des mers: les raies manta adultes peuvent peser plus d’une tonne et avoirune envergure de six mètres. 4 Ce�e raie qui aurait pu vivre cinquante ans e� dépecée en un in�ant: chaque année, on e�ime que 3400 raies manta sont commercialisées. 5 Les morceaux de raies sont mis à sécher. En Asie, les branchies sont transformées en une poudre qui e� supposée purifier le sang. 6 Une vendeuse dans un entrepôt de produits séchés: jadis, les ailerons de requin avaient la cote; aujourd’hui, les �ocks de raies sont li�éralement pillésdans les eaux tropicales et subtropicales.

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Chronique de Maïak — irradiée et oubliée

15 juin 1949Maïak est mise en service

Le premier réacteur nucléaire de Maïak fait partie du projet d’armement nucléaire soviétique. Il est considéré comme le premier complexe de production de matériel � ssile en URSS.

29 septembre 1957Une cuve de plutonium explose

Une cuve métallique contenant 300 m3 de déchets hautement radioactifs, renfermant du plutonium, explose. Une zone de 23 000 km2, où vivent 250 000 personnes, est contaminée.

15 juillet 2009Greenpeace révèle que l’écobilan fourni

par Axpo est falsi� é Greenpeace publie un rapport qui montre que le combustible utilisé à Beznau n’est pas de l’uranium issu du désarmement nucléaire. NOK/Axpo déclarent que les recherches de Greenpeace sont infondées.

8 septembre 2010Axpo avoue que l’uranium provient

de MaïakDurant l’émission Rundschau, Manfred Thumann, PDG d’Axpo, reconnaît pour la pre-mière fois que les centrales de Beznau et de Gös-gen achètent leur combustible auprès de Maïak.

4 o� obre 2010Greenpeace adresse une lettre

ouverte à Axpo Greenpeace somme la direction d’Axpo de garantir une transparence totale sur ses a� aires avec Maïak et d’assumer sa responsabilité. La lettre s’adresse aussi aux cantons d’AG, GL, SH, ZG et ZH ainsi qu’à di� érentes entreprises électriques. Elle rappelle que leur responsabilité d’actionnaires est engagée.

15 novembre 2010Greenpeace visite les environs

de MaïakCette visite sur place est déprimante: une région immense est contaminée. Dans chaque famille, on trouve des malades du cancer, notamment

AXPO N’ACHÈTE PLUS D’URANIUM À

MAÏAK

Le complexe nucléaire de Maïak, tristement célèbre, est situé dans l’Oural sibérien. Après soixante ansd’exploitation et plusieurs accidents graves, les cours d’eau, le sol et l’air de la région sont sérieusement contaminés. Jusqu’ici, comme l’ont révélé des recherches de Greenpeace, Axpo se procurait son combustible auprès de Maïak. Une chronique ex-plique comment l’engage-ment de Greenpeace et d’autres acteurs a porté ses fruits.

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atteints de leucémie. Les autorités ferment les yeux, tandis que la population mène une lutte interminable pour obtenir de l’aide.

19 novembre 2010Axpo veut aller à Maïak.

Greenpeace aussi!Mise sous pression, Axpo fournit des détails sur l’origine du combustible et signale des zones d’ombre dans la chaîne de livraison de l’uranium. D’autres clari� cations suivent. Le PDG d’Axpo, Manfred Thumann, s’explique: «Nous allons peut-être découvrir des choses qui ne nous plairont pas.» Axpo annonce une visite du complexe de Maïak. Observateur critique, Greenpeace doit être du voyage.

21 décembre 2010La centrale de Gösgen aussi

impliquéeOutre Beznau et Mühleberg, Gösgen se ravitail-le également auprès de Maïak. Greenpeace attire l’attention des actionnaires et des con-sommateurs d’électricité de la centrale et, outre une transparence totale, leur demande

d’assumer leur responsabilité. Alpiq, dont di� é-rents cantons et entreprises électriques détiennent des participations, est le principal actionnaire de Gösgen.

16 février 2011Une longue attente après la lettre ouverte

à Axpo et AlpiqEn décembre 2010, des rencontres abec le conseil d’administration et la direction d’Axpo ont lieu. Sans donner suite aux exigences de Greenpeace, Axpo promet des clari� cations qui doivent être publiées dans un rapport. Dans les cantons actionnaires (AG, GL, SH, ZH, ZG), les responsables sont informés de la situation à Maïak grâce à des interventions parlementaires.Là encore, les autorités répondent que des clari� cations sont en cours, mais que, pour l’heure, aucune prise de position n’est possible. Greenpeace ne reçoit de réponses qu’au compte-gouttes à la lettre adressée à Alpiq et à ses actionnaires. La direction invoque des clari� cations avec les parties impliquées. Les questions ne pourront être traitées qu’à une date ultérieure. On refuse de recevoir Greenpeace.

Aux alentours de Maïak, de nombreuses personnes souffrent de leucémie — les autorités ferment les yeux.

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7 avril 2011Des collaborateurs tirent la sonnette

d’alarmeL’o� ce nucléaire russe Rosatom reçoit alors une lettre anonyme dont les auteurs disent être des collaborateurs du centre de retraitement de Maïak. Selon eux, des systèmes de refroidisse-ment et des canalisations spéciales de plusieurs bâtiments menacent de rendre l’âme. Ils écri-vent que lors de réparations e� ectuées en 2009, des tuyaux avaient été installés, alors qu’«ils ne seraient même pas admis dans un logement».

20 mai 2011Axpo veut savoir pourquoi la radioactivité

augmente dans la Tetcha Les mesures e� ectuées par Greenpeace dans les eaux de la Tetcha à la � n 2010 montrent qu’en l’espace de deux ans, les taux de strontium et de tritium ont considérablement augmenté. Les résultats posent de nouvelles questions que Greenpeace envoie à Axpo avant son voyage d’investigation à Maïak. Car, bien qu’Axpo ait assuré par écrit qu’une participation était «en principe» possible, le voyage se fera sans Green-peace. Ce revirement met en doute la crédibi-lité de l’expédition et n’est pas glorieux de la part d’une entreprise appartenant aux cantons.

20 juin 2011Axpo ne pourra pas visiter Maïak

Une délégation d’Axpo aurait dû se rendre sur le site de Maïak, mais la visite est annulée, car Rosatom ne souhaite pas que quiconque accède au complexe. Cette visite aurait pourtant permis de se rendre compte si les standards environ-nementaux exigés étaient respectés. D’après les recherches de Greenpeace, on peut présumer que des substances radioactives continuent d’être déversées dans la Tetcha. Selon l’organisation, la seule réaction crédible à cette interdiction serait pour Axpo de résilier aussitôt tous ses contrats de livraison avec Rosatom.

12 novembre 2011Des explications bien maigres sur la

situation en RussieAxpo informe qu’elle renonce jusqu’à nouvel ordre à ses livraisons d’uranium en provenance de Maïak, en raison du manque de transpa-

rence concernant les conditions de production. Simultanément, elle annonce qu’elle continuera de se ravitailler en uranium auprès d’une autre centrale russe, à Seversk. Greenpeace reconnaît qu’en prenant cette mesure, Axpo est en� n sur la bonne voie. Une analyse des clari� cations présentées par Axpo à propos de la situation en Russie montre toutefois que trop de questions restent ouvertes. Les véritables risques que les complexes nucléaires de Maïak et de Seversk font courir à l’environnement sont minimisés, les arguments de fond et leur interprétation sont sélectifs. Des atteintes à l’environnement qui seraient intolérables en Suisse sont acceptées comme conformes aux «normes russes». Rem-placer l’uranium de Maïak par celui de Seversk est une alternative qu’on ne peut, et de loin, quali� er de durable.

7 janvier 2014Greenpeace a gagné: l’uranium de Maïak,

c’est � ni!Axpo renonce à l’uranium de Maïak! L’exploitant suisse cesse ainsi de s’approvisionner auprès d’un complexe nucléaire qui contamine le système hydrologique de toute une région depuis des années.

Nous saluons la décision d’Axpo, qui répond ainsi à l’une de nos exigences. En 2009, nous avions déjà prouvé que, malgré ses dénégations, Axpo utilisait de l’uranium recyclé du complexe de Maïak en Russie. À l’automne 2010, Axpo a fi ni par le reconnaître dans un entretien accordé à l’émission de TV alémanique Rundschau. Depuis, Axpo a essayé de présenter le complexe nucléaire russe sous un jour favorable. Florian Kasser, � éciali� e du nucléaire auprès de Greenpeace Suisse, déclare: «La pression exer-cée par Greenpeace a été e� cace. Axpo a été obligée de réaliser que les contaminations radio-a� ives n’étaient pas compatibles avec ses propres normes en matière d’environnement et de sécurité.»

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LE REFUGE DE L’OURS KERMODE

C’est l’un des plus beaux succès de Greenpeace: de vastes pans de la forêt tem-pérée humide du Grand Ours au Canada sont aujourd’hui protégés. Oliver Salge s’est une nouvelle fois rendu dans cette forêt unique, pour laquelle il s’est battu pendant vingt ans. Il y a rencontré le légendaire ours Kermode.

par Wolfgang Hassenstein

«C’était un moment magique, se souvient Oliver Salge. D’abord, j’ai vu sa silhouette entre les troncs, puis il s’est avancé et a marché vers la rive.» Spécialiste des forêts auprès de Green-peace Allemagne, il est un photographe natu-raliste enthousiaste. Avoir pu immortaliser l’un des rares ours Kermode – aussi appelés «ours esprit» – constitue l’apogée de son engagement de longue date pour la protection de la forêt tempérée humide du Grand Ours, l’une des plus vastes en zone tempérée.

Ce paradis naturel exceptionnel ne compte que de rares habitants, pour la plupart des au-tochtones. À Klemtu, ils ont fondé le Spirit Bear Lodge: ils emmènent leurs hôtes à la découverte du paysage typique de � ords à bord de canots à moteur – dans le royaume du pygargue à tête blanche, de la baleine et de l’ours Kermode. «Les Indiens disent que l’ours esprit est revenu sur Terre pour nous rappeler la période glaciaire», raconte Oliver Salge. Il n’y en a que quelques centaines dans la forêt. C’était la deuxième fois seulement que j’en croisais un dans la région. Les ours vivent cachés, protégés de la main destructrice de l’homme. Cela n’a pas toujours été le cas.

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Oliver Salge au pied d’arbres géants vieux de milliers d’années: autrefois menacés, ceux-ci sont désormais protégés.

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«Le jeudi est le jour de la coupe à blanc»C’est en brandissant cette banderole qu’en

1995, des militants de Greenpeace s’étaient réunis devant le bâtiment des éditions Gruner & Jahr à Hambourg. Oliver Salge, alors âgé de 24 ans, était de la partie. À l’époque, de nom-breux journaux étaient imprimés sur du papier fabriqué à partir de bois des forêts anciennes, dont le Stern qui paraissait chaque jeudi. Les militants avaient rapporté du Canada une énorme souche d’arbre et étaient revenus chaque jour pendant six semaines, jusqu’à ce que les éditeurs s’inclinent et exigent de leurs fournisseurs du papier d’autre provenance. Les coupes cessèrent et d’âpres négociations s’ensuivirent. Depuis 2006, 2,1 millions d’hectares – soit la moitié de la super� cie de la Suisse – sont sous stricte protection.

«Me retrouver aujourd’hui dans cette forêt ancienne tout en sachant que c’est grâce à nous qu’elle a été préservée, c’est un sentiment fabuleux», explique Oliver Salge. Le jeune militant est depuis longtemps devenu un colla-borateur � xe de Greenpeace Allemagne, où il dirige aujourd’hui le secteur Océans et Forêts.

«Actuellement, les dernières négociations avec les industriels du papier sur la protection des forêts sont terminées, poursuit-il. Je voulais encore une fois m’informer de l’évolution des choses et prendre des photos de la forêt.»

Salge ne pensait sans doute pas voir l’«ours esprit». Il s’est fait conduire encore une fois à son point de chute préféré. Il a attendu des heures sous la pluie, jusqu’à ce que la fourrure blanc crème de l’animal apparaisse. «Le guide Jason, � ls du grand chef Qwatsinas qui est décédé, est venu me voir», raconte-t-il. Les membres de sa tribu avaient taillé un totem pour lui, en remerciement de son engagement. Le totem se dresse désormais dans le bureau central de Greenpeace à Hambourg, tel un véri-table symbole. «Avoir pu observer l’ours esprit en compagnie de Jason rend cette journée doublement inoubliable.»Oliver Salge (42 ans) dirige le secteur Océans et Forêts auprès de Greenpeace Allemagne.

Dans la forêt du Grand Ours au bord du Pacifique: un «ours esprit» cherche de la nourriture près d’un banc de moules.

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ENGAGEMENT EN FAVEUR DE LA

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La consommation effrénée d’huile de palme détruit les forêts d’Indonésie. Mais Wilmar, le plus gros négociant mondial, accepte désormais leur protection.

par Verena Ahne

Finis l’abattage du bois et les brûlis dans des forêts qui méritent d’être protégées! Finies les nouvelles plantations sur des sols tourbeux! Finies l’exploitation et la violation des droits des communautés autochtones ou des em-ployés. Transparence assurée sur toute la chaîne d’approvisionnement, collaboration avec les ONG et autres groupes d’intérêts, réduction des émissions de CO2 dans les usines existantes... Ce qui se lit comme le cahier des charges d’une organisation écologique fait partie, depuis décembre 2013, de la nouvelle politique d’entre-prise du géant de l’huile de palme. Wilmar s’est engagé à appliquer cet arsenal de règles. Et avant la � n 2015, ses fournisseurs et sous-trai-tants doivent également s’y conformer – faute de quoi leurs contrats seraient résiliés.

S’il ne s’agit pas (une fois encore) de simples déclarations d’intention, ce serait un véritable succès pour la lutte contre la mort des forêts primaires. Car le temps presse: «l’huile de palme constitue sans doute la menacela plus grave et la plus immédiate pour la plupart des espèces dans le monde.» C’est ce queconcluaient les scienti� ques David Wilcove et Lian Pin Koh dans un article publié il y a cinq ans. Depuis, la situation a encore empiré.

La graisse alimentaire la plus utilisée en ChineLa demande mondiale d’huile végétale bon

marché augmente: par rapport à d’autres plantes oléagineuses comme le soja ou le colza, les palmiers à huile fournissent un rendement à l’hectare nettement plus élevé. Leur culture est donc très lucrative. La croissance de la popu-lation, des ordonnances absurdes sur les biocar-burants et une conscience plus aiguë de la santé (L’huile de palme ne contient pas de graisses trans) font exploser la demande. Dans des pays comme la Chine, cette huile orange compte parmi les principales graisses alimentaires; en Occident, environ la moitié des produits vendus dans les supermarchés – des cosmétiques aux lessives, du chocolat à la pizza ou aux bis-cuits – contient désormais de l’huile de palme (ou des dérivés).

Depuis les années 1980, la super� cie des plantations a doublé: des centaines de milliers d’hectares de forêts primaires ont été sacri� és le long de l’Équateur – seule zone où cette plante par ailleurs relativement peu exigeante pousse – pour céder la place à la monoculture d’huile de

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palme. La situation est particulièrement dramatique en Indonésie et en Malaisie, mais aussi en Afrique.

Wilmar – le plus gros pro� teurL’huile de palme est un facteur économique

si puissant qu’en dépit des promesses politiques, elle l’emporte souvent sur l’intérêt public: protection climatique, droits de l’homme, pro-tection des autochtones, biodiversité des forêts tropicales dont nous avons impérativement besoin, et espèces animales menacées d’extinc-tion, comme le tigre, le rhinocéros ou l’éléphant de Sumatra.

Le plus gros pro� teur de ce boom est le groupe Wilmar, avec son réseau international de sociétés. À lui seul, il traite et commercialise un tiers de l’huile de palme produite dans le monde. Avec des e� ets catastrophiques: dans l’écobilan des 500 plus grandes entreprises cotéesen Bourse, réalisé par Newsweek, Wilmar est arrivé au dernier rang en 2011 et 2012. Le fonds de pension norvégien en a tiré les conséquences et a revendu ses participations dans Wilmar et 22 autres producteurs d’huile de palme.

Le groupe a � ni par céder à la pression internationale et, en décembre dernier, il a réo-rienté sa politique entrepreneuriale. Certes, une telle décision a valeur d’exemple pour d’autres exploitants de grandes plantations; mais encore faut-il que tous respectent ces objectifs. Car seuls 4% de la production de Wilmar provient de ses propres plantations – 96% de l’huile de palme est achetée en sous-traitance, à des entre-prises comme Duta Palma, l’un des plus gros producteurs indonésiens, qui n’est pas non plus un agneau...

L’espace vital du tigre de Sumatra menacéL’an dernier, un rapport de Greenpeace a

révélé que Duta Palma était coupable: coupable du défrichement systématique de la forêt an-cienne, pour laquelle un moratoire a été imposé en 2011 et renouvelé en 2013; coupable du brûlage de forêts de tourbières ayant jusqu’à huit mètres d’épaisseur et dont la particularité est de stocker de grandes quantités de CO2; coupable de participer à l’extinction du tigre de Sumatra – qui vit dans de nombreuses zones concernées – et d’autres espèces menacées; cou-pable en� n de nombreuses violations des

droits humains, qui se sont soldées par des blessés et des morts, aussi bien dans la zone d’intervention de Duta Palma que dans celle de certains de ses fournisseurs. Tout cela explique que la société ait été exclue d’un organisme pourtant aussi conciliant que la Table ronde pour une huile de palme durable (RSPO).

Cet organisme a été créé en 2004, a� n de contribuer à une production d’huile de palme supportable pour l’environnement. Toutefois, outre certaines ONG et organisations écologistes,les membres sont, pour la plupart, des pro-ducteurs et des négociants d’huile de palme, des commerçants, des banques et autres investis-seurs, dont les intérêts sont moins axés sur la protection de la nature que sur leurs immenses pro� ts. Le «label de qualité» décerné par la RSPO n’est pas très exigeant à l’égard des pro-ducteurs. Même si les critères ont été revus l’an dernier, les forêts de tourbières et d’autres à haute teneur en carbone sont encore exploitées; la publication du bilan carbone est en outre facultative, et l’utilisation de pesticides haute-ment toxiques n’est pas interdite...

Un tel laxisme suscite l’indignation depuis des années. Pour y remédier, certains produc-teurs novateurs se sont associés en juin 2013 à des organisations de défense de l’environne-ment pour fonder le Palm Oil Innovation Group (POIG), qui souhaite promouvoir une produc-tion durable. À la di� érence de la RSPO, Green-peace est représentée dans le POIG.

Sur le terrain aussi, l’opposition à une exploitation aussi méprisante à l’égard des êtres humains et de la nature se renforce. Un tribu-nal régional a récemment condamné la société indonésienne PT Kallista Alam à une amende de 30 millions de dollars pour avoir déboisé illégalement la forêt du Parc naturel de Tripa à Sumatra. Ce jugement est un signal fort: les procureurs ont laissé entrevoir que, désormais, de tels cas seraient traités avec sévérité.

Et Wilmar? Le groupe ne va pas pouvoir se reposer sur cet e� et d’annonce. Nous contrô-lerons avec soin que les promesses faites soient tenues. Car il en va de la survie des forêts primaires, avec toute leur biodiversité.

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Frack Free UK!En Grande-Bretagne, la guerre contre l’extra� ion de gaz de schi� e bat son plein. Le gouvernement de David Cameron encourage le fracking — la frac-turation hydraulique —, une technique très contes-tée, et appâte les grands groupes énergétiques au moyen d’incitations fi scales afi n qu’ils inve� issent dans la pro� e� ion. Une va� e coalition d’orga-nisations de défense de l’environnement (dont Greenpeace UK) s’y oppose. Les habitants des régions concernées sont soit sceptiques, soit contre, car les risques pour la nappe phréatique et l’environnement sont désormais connus. Par ailleurs, compte tenu du changement climatique, il e� absurde d’inve� ir dans les énergies fossiles au lieu de miser de manière conséquente sur les énergies renouvelables. Pour briser la rési� ance, le Premier mini� re Cameron a décidé que les communes se verront reverser l’intégralité du pro-duit de l’impôt résultant des futures extra� ions. L’o� re e� alléchante, car bon nombre d’entre elles doivent se ba� re contre des di� cultés fi nancières à cause des précédentes coupes budgétaires.Infos sur la campagne: #FrackFree UK.

Centrales nucléaires: «40 ans, ça su� t»

Nous ne sommes pas les cobayes de l’indu� rie nucléaire! — c’e� ce que pensent les 41 355 per-sonnes qui ont signé la pétition «40 ans, ça su� t». Plus de 30 organisations ont aidé à colle� er des voix. La pétition exige du Conseil fédéral et du Par-lement qu’ils limitent le fon� ionnement des cen-trales nucléaires à 40 ans. En décembre dernier, des membres de Greenpeace ont remis la pétition devant le Palais fédéral, accompagnés d’un lapin cobaye fl uorescent. La centrale de Beznau fêtera son 45e anniversaire en septembre et c’e� la plus ancienne encore en service dans le monde.

Un travail de maturité engagé

Chaque année, 20 000 jeunes rédigent un travail de maturité et doivent pour cela approfondir un thème particulier. Pour beaucoup, c’e� un sup-plice — surtout s’ils ne sont pas passionnés par le sujet. Cela ne doit pas être forcément le cas. Amne� y International, Greenpeace et Helve-tas ont publié un guide qui fourmille d’idées de thèmes importants et de conseils concrets pour réussir des travaux de maturité engagés.Le lycéen Simon Zimmermann, par exemple, l’a utilisé et trouve que cela en valait la peine: «J’y ai appris à me concentrer sy� ématiquement sur mon obje� if.» Le thème choisi — la mort des abeilles — l’a occupé intensément pendant des mois et e� devenu pour lui une véritable passion. «Ce qui m’intéresse en particulier, c’e� ce que chacun de nous peut faire pour lu� er contre l’ef-fondrement des colonies d’abeilles. J’élève désor-mais des abeilles dans mon jardin de la manière la plus naturelle possible.» Grâce à ce travail, Simon Zimmermann a acquis une vision di� érenciée de ce thème complexe: «Interdire les pe� icides nui-sibles aux abeilles serait une solution plus simple et plus dire� e pour empêcher leur di� arition. Mais je trouve qu’il faut aussi sensibiliser les api-culteurs et les mobiliser. Ils doivent réaliser que les abeilles ne sont pas des animaux de rente, mais des animaux sauvages.» L’apiculture, en cherchant à accroître les rendements, a empêché la séle� ion naturelle et a� aibli la rési� ance aux parasites et aux maladies. Simon Zimmermann a décidé d’approfondir la que� ion de l’utilisation des pe� icides dans la produ� ion de denrées alimentaires en faisant des études de sciences alimentaires à l’EPF de Zurich.Vous trouverez le guide Travail de maturité: idées, conseils et in� iration ainsi que des conseils pour rédiger des textes de qualité ou mener une interview à l’adresse: www.greenpeace.ch/ecole. Dès le mois d’août 2014, nous publierons égale-ment un guide pour le travail de diplôme de l’école professionnelle — grâce à ce� e expérience réus-sie, à nouveau en collaboration avec Helvetas et Amne� y International.

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Le tran� ort du charbon menace la Grande Barrière

de corailLe mini� re au� ralien de l’Environnement a autori-sé le groupe indien Adani à con� ruire le plus grand port à charbon du monde près de la Grande Barrière de corail, protégée par l’UNESCO. Trois millions de mètres cubes de fonds marins doivent être dra-gués. Selon Thilo Maack, � éciali� e des océans chez Greenpeace, ce projet con� itue une menace sérieuse pour la Grande Barrière et encourage l’extra� ion de charbon, nuisible pour le climat. En 2013, Glencore X� rata avait su� endu un tel projet dans la baie de Keppel (Queensland) — soi-disant à cause de la chute des cours du charbon.

Tirs à boulets rouges contre Greenpeace à cause

du riz OGMPatrick Moore et sa société Allow Golden Rice ont sorti l’artillerie lourde contre Greenpeace: «L’inter-di� ion du riz doré génétiquement modifi é, riche en vitamine A, e� fatale pour de nombreux enfants des pays du tiers monde», prétend-il. Ce que l’on ne dit pas, c’e� que cet ancien collaborateur de Greenpeace Canada a viré de bord au début des années 1990. Depuis, il travaille pour des agences de relations publiques, plaide pour la coupe à blanc des forêts anciennes et défend les grands groupes miniers ou la produ� ion de PVC (voir la li� e de ses a� ivités sur www.sourcewatch.org).Greenpeace persi� e et signe: la raison majeure de la carence en vitamine A e� la pauvreté. Une alimentation saine et variée et des suppléments nutritifs peuvent y remédier. Le «riz doré» e� une fi celle de communication utilisée par le lobby du transgénique pour ouvrir la porte à l’exploitation commerciale et la culture intensive de plants OGM dans des pays comme l’Inde ou les Philippines.

Nul ne peut dire ce qui se passera si ce riz OGM contamine les variétés traditionnelles. Le rapport de Greenpeace Golden Illusion, paru en 2013, discute cet argument parmi d’autres. Lien vers le rapport: greenpeace.ch/goldenrice

Public Eye Awards 2014: et le prix e� a� ribué à...

Sergey Vakulenko Comme tous les ans, les � ars de la fi nance et de la jet-set se sont retrouvées en janvier au fo-rum de Davos. Le Public Eye Award, décerné par Greenpeace et la Déclaration de Berne, a rappelé à ce� e occasion que derrière la façade, la réalité e� moins reluisante... Le Prix du jury, décerné par des � éciali� es d’éthique économique, de l’environnement et des droits humains, e� allé ce� e année à Gap, le géant américain du textile. Contrairement aux autres fabricants de vêtements, Gap refuse de signer un accord sur la prote� ion des ouvriers d’usine textile au Bangladesh — un accord qui fait pourtant l’unanimité après les centaines de morts dues à des incendies ou à l’e� ondrement de bâtiments. Le Prix du public a quant à lui été décerné à Gazprom, qui a obtenu plus de 95 000 voix en ligne (sur 280 000). Le consortium gazier russe a été di� ingué pour ses forages pétroliers à haut risque dans l’Ar� ique. Greenpeace a pu reme� re aussitôt le prix à Sergey Vakulenko, chef de la � ratégie et de la planifi cation chez Gazprom. Vakulenko, qui était en train de déjeuner, a qui� é sans un mot le re� aurant et pris la fuite (photo ci-dessous) — une manière peu élégante de ré-agir à la critique, mais qui montre que ce «prix de la honte» n’e� pas apprécié dans les dîners réunissant le gratin du monde des a� aires. Les nominations pour 2015 peuvent être envoyées jusqu’à fi n août. Plus d’infos sur publiceye.ch.

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Les Indiens Cris tiennent tête au géant du bois canadien

Le Grand Conseil des Cris a obtenu gain de cause après avoir porté plainte contre le géant du bois canadien Produits fore� iers Résolu: celui-ci a perdu trois de ses certifi cats FSC qui l’autorisaient à exploiter huit millions d’he� ares de forêt. L’en-treprise avait violé les droits coutumiers des com-munautés autochtones et l’exploitation de la forêt ancienne, écologiquement sensible, menaçait l’habitat des troupeaux de caribous sauvages. La décision de l’organisme de certifi cation renforce la crédibilité du label FSC en matière de ge� ion durable des forêts, alors que plusieurs critiques avaient pointé du doigt ses conditions d’a� ribu-tion trop laxi� es.

Greenpeace Photo Award: à la recherche de vrais pros de

la photo«Témoigner» — ce� e idée sur laquelle repose la philosophie de Greenpeace sous-tend égale-ment le Greenpeace Photo Award, décerné pour la première fois en 2012. Entretemps, les premiers lauréats ont mis en œuvre leur projet: Flurina Rothenberger a montré les conséquences du changement climatique dans une banlieue de Dakar, tandis que Jules Spinatsch retraçait l’his-toire de la technologie nucléaire depuis la Guerre froide — deux témoignages visuels qui ont été ex-posés au début de l’année à la galerie Coalmine à Winterthour. A� uellement, les soumissions de projet pour l’édition du Photo Award 2014 sont en cours. Les prix seront décernés en partenariat avec le célèbre magazine de reportage GEO. Ils récompenseront les idées de projet perme� ant de présenter un problème environnemental de manière novatrice. Les photoreportages qui en ré-sulteront seront publiés dans le magazine Green-peace et dans GEO.www.photo-award.org

Le Parlement de l’UE exige la prote� ion de l’Ar� ique

En adoptant une résolution en mars dernier, le Par-lement européen a plaidé en faveur de la création d’une aire marine protégée autour du pôle Nord. Même si ce� e résolution n’e� juridiquement pas contraignante, elle lance un signal fort à l’adresse de la Commission européenne et du Service euro-péen pour l’a� ion extérieure (SEAE). Jusqu’à pré-sent, ces autorités n’ont en e� et soulevé aucune obje� ion contre l’indu� rialisation croissante de l’Ar� ique. La prote� ion de l’Ar� ique devrait dé-sormais enfi n fi gurer à l’agenda des mini� res de l’Union européenne.Ce� e résolution reprend la principale exigence de Greenpeace, qui réclame une aire protégée dans l’Ar� ique, et pourrait entraîner l’interdi� ion des forages pétroliers et de la pêche indu� rielle ainsi qu’un moratoire sur la pêche en haute mer dans les eaux de l’Ar� ique. Le Parlement européen exige, en outre, de la part du Conseil ar� ique des accords contraignants concernant les forages pétroliers o� shore afi n d’empêcher toute pollution de l’environnement au pôle Nord. Le Conseil ar� ique e� un forum intergouvernemental dont font partie les États et territoires ar� iques. Il a jusqu’à présent toujours rejeté à la majorité l’exigence de la création d’une aire protégée— seule la Finlande soutient les ef-forts dans ce� e voie. C

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En été 2014, Greenpeace Suisse emménagera dans ses nouveaux bureaux de l’immeuble de la coopérative Kalkbreite. Si notre choix s’e� porté sur ce bâtiment fl ambant neuf, c’e� parce que nous partageons les visions de ce projet durable et tourné vers l’avenir. En tant qu’organisation écologi� e, nous a� achons de l’importance à un concept énergétique progressi� e et montrer des solutions re� e� ueuses de l’environnement fait partie de notre travail. C’e� la raison pour laquelle nous donnons le bon exemple. L’énergie que nous utiliserons ne proviendra que de sources renouvelables. Grâce à une meilleure isolation des murs extérieurs et des techniques de bâtiment performantes sur le plan énergé-tique, la consommation au mètre carré sera ré-duite de 70%. En passant à un sy� ème de po� es de travail fl exibles, nos besoins en matière d’es-pace baisseront d’environ 33% par collaborateur. Notre consommation de chau� age diminuera d’à peu près 80%, ce qui corre� ond aux principes d’e� cience et de su� sance prônés par Green-

peace et par la coopérative Kalkbreite. Le tournant énergétique a besoin de la contribution de chacun de nous.

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Société à 2000 wa� s: Greenpeace donne l’exemple

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En Inde, depuis que les paysans utilisent de petites pompes à die-sel mobiles, l’irrigation et, par conséquent, la sécurité alimen-taire se sont considérablement améliorées. Dans l’État du Bihar, environ dix millions de pompes sont en service. Cela entraîne tou-tefois d’importantes émissions de CO2 et le diesel ponctionne sérieusement le budget des petits cultivateurs. Greenpeace Inde et l’Innovation Lab argentin ont donc lancé un concours visant à créer des pompes non polluantes. Les développeurs pouvaient déposer

leur esquisse sur un site internet, la comparer aux autres et l’amélio-rer, selon une procédure de «co-opétition» – associant coopération et compétition. Il en est résulté 255 modèles de pompe. Un paysan canadien bricoleur, un o� cier de l’armée indienne à la retraite, un ingénieur amateur hongrois – en tout, un millier de personnes de 58 pays ont échangé leurs expé-riences et leurs idées. En décembre,les lauréats se sont vus décerner o� ciellement leur prix – trois pompes solaires – dans la capitale du Bihar. Ils ont pu ensuite parler métier avec les paysans de la région. Au cours de l’année, une équipe de bénévoles testera les nouvelles pompes et les perfectionnera, jusqu’à ce qu’elles puissent être commercialisées sur les marchés villageois en Inde. Selon le co- organisateur Ingo Boltz, cette ex-périence fructueuse montre le vaste potentiel de mobilisation au niveau du design de projet: le problème à résoudre a fait naître une communauté d’apprentissage et de travail. L’ouverture du concours à tous et la visibilité sur internet ont permis une inspira-tion mutuelle, des feed-back et des améliorations – et au � nal, un produit «vert» qui a de grandes chances de s’imposer face à ses concurrents polluants. Plus d’infos sur: greenpeacechallenge.jovoto.com

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Technologie

Des pompes sans diesel

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Rési� ance

Vingt ans de rébellion: les zapatistes à la fêteDans l’État du Chiapas au Mexique,les zapatistes ont commémoré le 20e anniversaire du soulèvement de 1994. Le mouvement compte aujourd’hui 100 000 membres dans un millier de communes danslesquelles des écoles autogérées, des systèmes médicaux et des pro-jets de développement ont été mis sur pied. La rébellion portée par les communautés indigènes s’est depuis longtemps étendue à d’autres régions. Dans l’État voisin d’Oaxaca, un projet de parc éolien d’une puissance de 396 mégawatts a été abandonné parce que la population locale s’y opposait. Les grandes sociétés électriques n’avaient pas pris la peine de l’im-pliquer et ont voulu, au dernier moment, la contraindre par la forceà donner son accord.

Risques naturels

Des avalanches au musée

Jusqu’au 14 septembre, le Jardin des Glaciers de Lucerne présente une exposition consacrée aux avalanches. De la formation d’un cristal de glace en temps réel au glissement fulgurant de la masse de neige, on y découvre la fas-cination qu’exerce ce prodigieux spectacle naturel, mais aussi ses dangers. Pourquoi est-il di� cile de prévoir les risques d’avalanche? Comment se protéger? L’exposi-tion White Glory – White Risk, réali-sée en coopération avec la Haute école pédagogique de Lucerne, l’Institut pour l’étude de la neige et des avalanches à Davos et la Suva, répond à ces questions.www.gletschergarten.ch/Lawinen-White-Glory-White-R.183.0.html

Éle� roniqueÉle� ronique

LE FAIRPHONE ARRIVE…

… mais il faudra encore du temps jusqu’à ce qu’il soit vraiment équitable. La petite entreprise hollandaise Fairphone a réussi en un temps record à concevoir et à produire un smartphone que de nombreux utilisa-teurs attendaient: il doit en effet satisfaire à des critères sociaux et écologiques d’un bout à l’autre de la chaîne – des matières premières au montage final. Les 25 000 premiers exemplaires ont été livrés en janvier, la prochaine vague de commande est en route. Le volume d’appareils commercialisés n’est pas suffisant pour avoir de l’impact sur les conditions de production, mais c’est déjà un bon début et l’avenir nous dira quelles améliorations sont encore néces-saires. Nous sommes impatients de connaître les résul-tats des tests.www.fairphone.com

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Mines

LA FIÈVRE DE L’OR EST RETOMBÉE À ROSIA

MONTANA

Il y a une année, les organisateurs de la campagne Salvati Roșia Montană étaient invités à Zurich pour protester contre le European Gold Forum, un congrès de l’industrie des mines d’or. Le 10 décembre dernier, ils ont pu fêter un important succès: après avoir manifesté durant des semaines dans toute la Roumanie et organisé des actions de solidarité dans le monde entier, ils ont réussi à convaincre le Parle-ment roumain de mettre à la trappe la révision d’une loi sur l’extraction minière. La nouvelle loi aurait permis à la compagnie canadienne Gabriel Resources d’expulser de force les paysans du village de Roșia Montană. Ces derniers refusent depuis plus de dix ans de vendre leurs terres pour qu’on y exploite une immense mine d’or et bloquent le projet. Salvati Roșia Montană a ainsi confirmé sa réputation d’être l’un des mouvements environnementaux les plus im-portants en Europe de l’Est. Les actions de Gabriel Resources ont baissé de moitié depuis l’an dernier. Mais les orpailleurs ne lâchent pas prise: le European Gold Forum se réunira à nouveau à l’Hôtel Park Hyatt de Zurich, du 6 au 8 mai 2014.

Film documentaire

La marche des sans-terre

Millions Can Walk – tel est le titre du documentaire consacré à Ekta Parishad, le mouvement des sans-terre en Inde: en 2012, des milliers de personnes ont par-couru 400 kilomètres à pied pour se rendre à Delhi, a� n d’y réclamer une juste répartition des terres cultivables. Cette marche impres-sionnante, qui s’est déroulée dans la plus pure tradition de la résis-tance non violente chère à Gandhi, a rappelé le sort des millions de paysans sans terres et d’Adivasi (autochtones indiens). Actuelle-ment, Ekta Parishad et le gouver-nement central de Delhi négocient la mise en œuvre de ces revendi-cations. Plus d’infos sur: www.millionscanwalk-fi lm.com.

Matières premières

La Banque mondiale soutient

l’industrie minière

Le commerce des métaux est en crise, les prix ayant chuté l’an der-nier. Les grandes sociétés minières comme Glencore Xstrata, Rio Tinto et BHP Billiton ont lancé des programmes d’économie a� n de garantir les béné� ces. Or, la Banquemondiale vole à leur secours en lançant un fonds d’un milliard de dollars destiné à compléter la cartographie des ressources mi-nières en Afrique. Les grands groupes auraient tort de se priver du plaisir d’exploiter l’Afrique. Et ils savent désormais où trouver des réserves lorsque le marché repartira à la hausse.

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Livre

La transition, c’est maintenant!

The Power of Just Doing Stu� , le toutdernier livre de Rob Hopkins, au-teur du célèbre ouvrage Manuel de transition: de la dépendance au pétrole à la résilience locale publié en 2010, est actuellement dispo-nible en anglais et en allemand. Dans son nouveau livre, le défen-seur britannique de l’environne-ment dresse un bilan intermédiaireet expose sa vision de la manière dont les êtres humains pourraient surmonter leur dépendance pétro-lière, la consommation excessive des ressources et un ordre éco-nomique tendancieux, exclusive-ment axé sur la croissance. Il s’agit d’une approche locale, soutenue par de petits groupes qui initient à la base des processus de change-ment dans leur commune ou leur quartier. La force de ce livre réside dans son e� et motivant et dans ses exemples concrets, grâce aux-quels Hopkins montre comment la passivité peut être surmontée: en faisant soi-même quelque chose,sans attendre que d’autres le fassent pour nous! Des initiatives solaires aux jardins communau-taires et aux marchés bio, il s’agit toujours de savoir «comment nous

pouvons remplacer l’objectif de la croissance par les objectifs du bien-être, du bonheur, de la com-munauté et de la solidarité». Les arguments sont solidement étayés et devraient convaincre les au-torités communales et les PME queHopkins considère comme des alliés pour la transformation de notre monde actuel en une société post-fossile dotée d’une plus grande force de résilience (résis-tance) sur le plan local. Un livre utile pour toutes celles et tous ceux qui cherchent à avoir une vision globale des choses.Rob Hopkins, The Power of Ju� Doing Stu� : How Local A� ion Can Change the World, UIT Cambridge, Cambridge, 2013, 160 pages. ISBN 978-0857841179

Textiles

De petits chefs-d’œuvre

Ils seront bientôt sur le marché: des vêtements à base de lait de vache! Aussi absurde que l’idée puisse paraître, Anke Domaske l’a réalisée en lançant la marque Qmilk. Avant la Seconde Guerre mondiale, on avait déjà produit à partir de lait des � bres pouvant être tissées. Qmilk est un produit 100% naturel, idéal pour les allergiques et les hypersensibles, fabriqué à partir d’une in� me portion des deux millions de tonnes d’excédents de lait qui sont détruits chaque année en Alle-magne. Mario Stucki, étudiant en chimie et en bioingénierie à l’EPF de Zurich, a, lui aussi, réussi une véritable prouesse: devant les pro-blèmes posés par les substances toxiques dans les vêtements de sport (voir la campagne Detox de Greenpeace), il a mis au point un tissu hydrofuge sans composé de � uor, et ce dans le cadre de son travail de master, réalisé en seize semaines seulement! Le label Honschi a taillé une veste dansce tissu. Certes, l’éto� e est encore un peu raide au toucher, mais Mario Stucki a montré que l’on pou-vait produire des vestes non toxiques. Gore-Tex a intérêt à retrousser ses manches...

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Tirage au sort de 10 vignettes solaires 2014 Un an d’électricité solaire pour votre téléphone mobile, smartphone ou tablette! Vous vous procurez tout simplement le courant à votre prise habituelle et nous fournissons la quantité d’énergie solaire équivalente au réseau électrique. La vignette solaire couvre les frais supplémentaires pour l’énergie solaire. Envoyez la solution jusqu’au 31 mai 2014 par courriel à [email protected] ou par voie postale à Greenpeace Suisse, rédaction magazine, mots � échés écolos, case postale, 8031 Zurich. La date du timbre postal ou de réception du courriel fait foi. La voie juridique est exclue. Il ne sera entretenu aucune correspondance.

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Radical chic: Vivienne We� wood

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AZB8031 Zürich

Aux Bernoises et Bernois! VOTEZ OUI

À L’INITIATIVE «MÜHLEBERG À L’ARRÊT»

Et à tous les autres! ENCOURAGEZ

VOS AMIS BERNOIS À ALLER VOTER

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Votation cantonale bernoise du 18 mai 2014

OUIà l’initiative populaire «MÜHLEBERG À L’ARRÊT»

www.mühleberg-a-l-arret.ch