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DROIT ADMINISTRATIF I Cours de M. Michel ERPELDING Travaux dirigés de Mme Eva CHARTIER 7 e séance : Le régime juridique des services publics Documents : 1) Le droit applicable - Document n° 1 – TC, 25 mars 1996, Berkani - Document n° 2 – TC, 7 24 juin 1968, Société Distilleries bretonnes 2) Les principes fondamentaux des services publics a) Le principe d’égalité devant le service public - Document n° 3 – CE, 9 mars 1951, Société des concerts du Conservatoire. - Document n° 4 – CE, 10 mai 1974, Denoyez. - Document n° 5 – CE Ass., 28 mars 1997, Société Baxter. - Document n° 6 – CE Sect., 18 décembre 2002, Duvignères. - Document n° 7 – art. 147 de la loi n° 98-657 du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions. b) Le principe de continuité - Document n° 8 – CE, 7 juillet 1950, Dehaene. - Document n° 9 – CE, 30 novembre 1998, Rosenblatt. - Document n° 10 – CC, Décision n° 2012-650 DC du 15 mars 2012 - Document n° 11 – CE Ass., 12 avril 2013, Force Ouvrière Énergie et Mines (extraits) c) Le principe d’adaptabilité - Document n° 12 – CE Sect., 18 mars 1977, Chambre de commerce de La Rochelle. - Document n° 13 – CE Ass., 2 février 1987, Société TV 6. d) Le principe de neutralité - Document n° 14 – CE Ass., 14 avril 1995, Koen - Document n° 15 – CE, 16 février 2004, M. B.

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DROIT ADMINISTRATIF I

Cours de M. Michel ERPELDINGTravaux dirigés de Mme Eva CHARTIER

7 e séance   : Le régime juridique des services publics

Documents :

1) Le droit applicable

- Document n° 1 – TC, 25 mars 1996, Berkani- Document n° 2 – TC, 7 24 juin 1968, Société Distilleries bretonnes

2) Les principes fondamentaux des services publics

a) Le principe d’égalité devant le service public

- Document n° 3 – CE, 9 mars 1951, Société des concerts du Conservatoire.- Document n° 4 – CE, 10 mai 1974, Denoyez.- Document n° 5 – CE Ass., 28 mars 1997, Société Baxter.- Document n° 6 – CE Sect., 18 décembre 2002, Duvignères.- Document n° 7 – art. 147 de la loi n° 98-657 du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les

exclusions.

b) Le principe de continuité

- Document n° 8 – CE, 7 juillet 1950, Dehaene.- Document n° 9 – CE, 30 novembre 1998, Rosenblatt. - Document n° 10 – CC, Décision n° 2012-650 DC du 15 mars 2012 - Document n° 11 – CE Ass., 12 avril 2013, Force Ouvrière Énergie et Mines (extraits)

c) Le principe d’adaptabilité

- Document n° 12 – CE Sect., 18 mars 1977, Chambre de commerce de La Rochelle.- Document n° 13 – CE Ass., 2 février 1987, Société TV 6.

d) Le principe de neutralité

- Document n° 14 – CE Ass., 14 avril 1995, Koen- Document n° 15 – CE, 16 février 2004, M. B. - Document n° 16 – TA Dijon, 28 août 2017, Ligue de défense judiciaire des musulmans- Document n° 17 – CE, 4 juillet 2018, Association pour la neutralité de l’enseignement de l’histoire

turque dans les programmes scolaires

Exercice   : Rédigez une dissertation sur le sujet suivant : « Le principe de neutralité du service public ». Rédigez entièrement l’introduction et les transitions entre les parties. Prévoyez un plan détaillé en deux parties, deux sous-parties, avec environ quatre idées par sous-partie.

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Document n° 1 - TC, 25 mars 1996, Berkani

Vu, enregistrée à son secrétariat le 6 novembre 1995, la lettre par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, transmet au Tribunal le dossier de la procédure opposant M. X... au Centre régional des oeuvres universitaires et scolaires (CROUS) de Lyon-Saint-Etienne ;

Vu le déclinatoire de compétence présenté le 14 mars 1994 par le préfet de la région Rhône-Alpes, préfet du Rhône et tendant à ce que le conseil de prud'hommes de Lyon se déclare incompétent et renvoie devant la juridiction administrative la demande par laquelle M. X... réclame la condamnation du CROUS de Lyon-Saint-Etienne à lui payer des indemnités de préavis, de licenciement, de congés et des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Vu le jugement, en date du 3 juillet 1995, par lequel le conseil de Prud'hommes de Lyon a condamné le CROUS de Lyon-Saint-Etienne à payer à M. X... 25.849,78 F au titre de l'indemnité de licenciement, 16.326,20 F au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, 1632,60 F au titre des congés payés et 146.935,80 F à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif ;Vu l'arrêté du 3 août 1995 par lequel le préfet de la région Rhône-Alpes, préfet du Rhône, a élevé le conflit ;

Vu, enregistrées comme ci-dessus les observations présentées au nom de M. X... et tendant d'une part à ce que l'arrêté de conflit soit déclaré nul tant en raison de sa tardiveté que de l'appel interjeté par le CROUS de Lyon-Saint-Etienne devant la cour d'appel de Lyon et d'autre part à ce que la compétence du conseil de Prud'hommes soit confirmée ;Vu, enregistrées comme ci-dessus, le 15 décembre 1995, les observations du ministre du travail et des affaires sociales et tendant à ce que soit déclaré nul le jugement du 3 juillet 1995 du conseil de Prud'hommes de Lyon et à ce que l'arrêté de conflit soit confirmé, par les motifs que l'article 21 du décret du 5 mars 1987 dispose que les personnels ouvriers sont des agents contractuels de droit public ; […]

Sur la compétence :Considérant que les personnels non statutaires travaillant pour le compte d'un service public à caractère administratif sont des agents contractuels de droit public quel que soit leur emploi ;Considérant que M. X... a travaillé depuis 1971 en qualité d'aide de cuisine au service du CROUS de Lyon-Saint-Etienne ; qu'il s'ensuit que le litige l'opposant à cet organisme, qui gère un service public à caractère administratif, relève de la compétence de la juridiction administrative et que c'est à juste titre que le préfet de la région Rhône-Alpes, préfet du Rhône, a élevé le conflit ; […]

Document n° 2 – TC, 7 24 juin 1968, Société Distilleries bretonnes

Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ; le-décret du 26 octobre 1849, modifié et complété par celui du 25 juillet 1960 ; la loi du 24 mai 1872 ; le décret du 30 septembre 1953 ; les lois de finances du 21 juillet 1960 et du 21 décembre 1961 ; le décret du 29 juillet 1961 ;

*1* Considérant que si, en vertu du paragraphe ler de l'article 1er du décret du 29 juillet 1961, le Fonds d'orientation et de régularisation des marchés agricoles a été créé sous la dénomination d'établissement public à caractère industriel et commercial, il résulte des termes du paragraphe 2 dudit article que cet organisme a pour mission « de préparer les décisions gouvernementales relatives aux interventions de 1'Etat sur les marchés agricoles et de les exécuter » ; qu'à cet effet, il passe avec les exportateurs, selon les modalités fixées et les pouvoirs conférés par les ministres compétents, des « contrats » comportant pour les intéressés une subvention allouée avec des ressources qu'il reçoit exclusivement de l'Etat ; qu'il ne poursuit aucune action propre et se borne à réaliser les buts déterminés par l'Etat avec les moyens fournis par ce dernier ; qu'ainsi il exerce, en réalité, une action purement administrative ; que, d'autre part, les contrats qu'il conclut dans les conditions ci-dessus définies ont pour objet l'exécution même du service public dont il est investi ; que, dès lors, les litiges soulevés par leur exécution ressortissent à la compétence de la juridiction administrative ;

*2* Cons. qu'il résulte de ce qui précède que la demande de la Société « Distilleries bretonnes » tendant à obtenir une augmentation de l'aide du Fonds d'orientation et de régularisation des marchés agricoles ressortit contrairement à ce qu'ont décidé le Tribunal administratif de Paris et le Tribunal de commerce de la Seine, à la compétence de la juridiction administrative ; ... (Compétence des tribunaux de l'ordre administratif pour connaître de la demande dirigée par la Société «Distilleries bretonnes » contre le Fonds d'orientation et de régularisation des marchés agricoles ; sont déclarés nuls et non avenus : le jugement rendu le 18 juillet 1967 par le Tribunal de commerce de la Seine, ensemble l'assignation donnée devant ce tribunal ainsi que toute la procédure subséquente, à l'exception de l'arrêt susvisé de la Cour d'appel de Paris du 30 avril 1968, en tant qu'il

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prononce le renvoi au Tribunal des Conflits ; Annulation du jugement du Tribunal administratif de Paris du 6 février 1967).

Document n° 3 - CE, 9 mars 1951, Société des concerts du Conservatoire.

Requête de la Société des Concerts du Conservatoire, tendant à l'annulation de la décision implicite résultant du silence gardé pendant plus de quatre mois par le Président du Conseil des ministres et par laquelle celui-ci a rejeté la demande d'indemnité de la société requérante en réparation du préjudice né de suppression, par les services de la Radiodiffusion française, de la retransmission de ses concerts ;

Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 ;

*1* Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite de la sanction infligée par le Comité de direction de la société des concerts du Conservatoire, conformément aux statuts de celle-ci, à deux membres de cette association qui, au lieu d'assurer leur service dans son orchestre, ont, malgré la défense qui leur en avait été faite, prêté leur concours à un concert organisé à la radiodiffusion française le 15 janvier 1947, l'administration de la radiodiffusion française a décidé de suspendre toute retransmission radiophonique des concerts de la société requérante jusqu'à ce que le ministre chargé des Beaux-Arts se soit prononcé sur la demande de sanction qu'elle formulait contre le secrétaire général de ladite société ;

*2* Cons. qu'en frappant la société requérante d'une mesure d'exclusion à raison des incidents susrelatés sans qu'aucun motif tiré de l'intérêt général pût justifier cette décision, l'administration de la radiodiffusion française a usé de ses pouvoirs pour un autre but que celui en vue duquel ils lui sont conférés et a méconnu le principe d'égalité qui régit le fonctionnement des services publics et qui donnait à la société requérante, traitée jusqu'alors comme les autres grandes sociétés philharmoniques, vocation à être appelée le cas échéant, à prêter son concours aux émissions de la radiodiffusion ; que cette faute engage la responsabilité de l'Etat ; que, compte tenu des éléments de préjudice dont la justification est apportée par la société requérante, il sera fait une juste appréciation des circonstances de la cause en condamnant l'Etat à payer à la société des concerts du Conservatoire une indemnité de 50.000 francs avec intérêts au taux légal à compter du 24 février 1947, date de la réception dé sa demande de dommages-intérêts par le président du Conseil des ministres ;... (Décision en ce sens ; dépens à la charge de l'Etat).

Document n° 4 - CE, 10 mai 1974, Denoyez

REQUETE DU SIEUR DENOYEZ Z... TENDANT A L'ANNULATION DU JUGEMENT DU 7 JUIN 1972 PAR LEQUEL LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE POITIERS A REJETE SA DEMANDE DIRIGEE CONTRE LA DECISION DU 3 JUIN 1971 DU PREFET DE LA CHARENTE-MARITIME REFUSANT D'UNE PART DE LE FAIRE BENEFICIER DU TARIF APPLIQUE AUX HABITANTS DE L'ILE DE RE PAR LA REGIE DEPARTEMENTALE DES PASSAGES D'EAU, D'AUTRE PART DE LUI RESTITUER UN TROP-PERCU DU PRIX DEPUIS 1964 ET ENFIN D'ABROGER LE TARIF DES CARTES D'ABONNEMENT EN VIGUEUR DEPUIS JANVIER 1972 SUR LA LIAISON LA PALLICE-SABLANCEAUX, ENSEMBLE A L'ANNULATION DE LADITE DECISION ET DU TARIF "ABONNEMENT" DE 1972 ; [2nde requête similaire, jonction] […]

SUR LES CONCLUSIONS DES REQUETES TENDANT A L'ANNULATION DES DECISIONS DU PREFET DE LA CHARENTE-MARITIME :CONS. QUE LES SIEURS Y... ET X..., TOUS DEUX PROPRIETAIRES DANS L'ILE DE RE DE RESIDENCES DE VACANCES, ONT DEMANDE AU PREFET DE LA CHARENTE-MARITIME DE PRENDRE TOUTES DISPOSITIONS POUR QUE LA REGIE DEPARTEMENTALE DES PASSAGES D'EAU, QUI EXPLOITE LE SERVICE DE BACS RELIANT LA PALLICE A SABLANCEAUX ILE DE RE , LEUR APPLIQUE DORENAVANT NON PLUS LE TARIF GENERAL MAIS SOIT LE TARIF REDUIT RESERVE AUX HABITANTS DE L'ILE DE RE, SOIT, A DEFAUT, LE TARIF CONSENTI AUX HABITANTS DE LA CHARENTE-MARITIME ; QUE, PAR DEUX DECISIONS, RESPECTIVEMENT EN DATE DES 3 JUIN ET 27 OCTOBRE 1971, LE PREFET A REFUSE DE DONNER SATISFACTION A CES DEMANDES ; QUE, PAR LES JUGEMENTS ATTAQUES, LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE POITIERS A REJETE LES REQUETES INTRODUITES CONTRE CES DECISIONS PAR LES SIEURS Y... ET X... ;CONS. QUE LE MERITE DES CONCLUSIONS DES REQUETES EST SUBORDONNE A LA LEGALITE DES TROIS TARIFS DISTINCTS INSTITUES, SUR LA LIAISON ENTRE LA PALLICE ET L'ILE DE RE, PAR LE CONSEIL GENERAL DE LA CHARENTE-MARITIME ET MIS EN VIGUEUR PAR UN ARRETE PREFECTORAL DU 22 MAI 1970 ;CONS. QUE LA FIXATION DE TARIFS DIFFERENTS APPLICABLES, POUR UN MEME SERVICE RENDU, A DIVERSES CATEGORIES D'USAGERS D'UN SERVICE OU D'UN OUVRAGE PUBLIC IMPLIQUE, A MOINS QU'ELLE NE SOIT LA CONSEQUENCE NECESSAIRE D'UNE LOI, SOIT QU'IL EXISTE ENTRE LES USAGERS DES DIFFERENCES DE SITUATION APPRECIABLES, SOIT QU'UNE

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NECESSITE D'INTERET GENERAL EN RAPPORT AVEC LES CONDITIONS D'EXPLOITATION DU SERVICE OU DE L'OUVRAGE COMMANDE CETTE MESURE ;CONS., D'UNE PART, QU'IL EXISTE, ENTRE LES PERSONNES RESIDANT DE MANIERE PERMANENTE A L'ILE DE RE ET LES HABITANTS DU CONTINENT DANS SON ENSEMBLE, UNE DIFFERENCE DE SITUATION DE NATURE A JUSTIFIER LES TARIFS DE PASSAGE REDUITS APPLICABLES AUX HABITANTS DE L'ILE ; QU'EN REVANCHE, LES PERSONNES QUI POSSEDENT DANS L'ILE DE RE UNE SIMPLE RESIDENCE D'AGREMENT NE SAURAIENT ETRE REGARDEES COMME REMPLISSANT LES CONDITIONS JUSTIFIANT QUE LEUR SOIT APPLIQUE UN REGIME PREFERENTIEL ; QUE, PAR SUITE, LES REQUERANTS NE SONT PAS FONDES A REVENDIQUER LE BENEFICE DE CE REGIME ;CONS., D'AUTRE PART, QU'IL N'EXISTE AUCUNE NECESSITE D'INTERET GENERAL, NI AUCUNE DIFFERENCE DE SITUATION JUSTIFIANT QU'UN TRAITEMENT PARTICULIER SOIT ACCORDE AUX HABITANTS DE LA CHARENTE-MARITIME AUTRES QUE CEUX DE L'ILE DE RE ; QUE LES CHARGES FINANCIERES SUPPORTEES PAR LE DEPARTEMENT POUR L'AMENAGEMENT DE L'ILE ET L'EQUIPEMENT DU SERVICE DES BACS NE SAURAIENT, EN TOUT ETAT DE CAUSE, DONNER UNE BASE LEGALE A L'APPLICATION AUX HABITANTS DE LA CHARENTE-MARITIME D'UN TARIF DE PASSAGE DIFFERENT DE CELUI APPLICABLE AUX USAGERS QUI RESIDENT HORS DE CE DEPARTEMENT ; QUE, PAR SUITE, LE CONSEIL GENERAL NE POUVAIT PAS LEGALEMENT EDICTER UN TARIF PARTICULIER POUR LES HABITANTS DE LA CHARENTE-MARITIME UTILISANT LE SERVICE DE BACS POUR SE RENDRE A L'ILE DE RE ; QUE, PAR VOIE DE CONSEQUENCE, LES SIEURS Y... ET X... NE SAURAIENT UTILEMENT SE PREVALOIR DES DISPOSITIONS ILLEGALES DU TARIF DES PASSAGES POUR EN DEMANDER LE BENEFICE ; QU'ILS NE SONT, DES LORS PAS, SUR CE POINT, FONDES A SE PLAINDRE QUE, PAR LES JUGEMENTS ATTAQUES, LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE POITIERS A REJETE LEURS REQUETES ;SUR LES AUTRES CONCLUSIONS DE LA REQUETE DU SIEUR Y... :CONS., D'UNE PART, QUE LES CONCLUSIONS EN INDEMNITE ET LES CONCLUSIONS TENDANT AU REMBOURSEMENT DU TROP-PERCU QUE LE SIEUR Y... IMPUTE A L'APPLICATION QUI LUI A ETE FAITE DES TARIFS EN VIGUEUR NE SAURAIENT, EN CONSEQUENCE DE CE QUI A ETE DIT CI-DESSUS, ETRE ACCUEILLIES ;CONS., D'AUTRE PART, QUE LES CONCLUSIONS TENDANT A L'ANNULATION DES TARIFS D'ABONNEMENT ETABLIS POUR L'ANNEE 1972 ONT ETE PRESENTEES POUR LA PREMIERE FOIS EN APPEL ; QU'ELLES SONT, PAR SUITE, IRRECEVABLES ;... REJET AVEC DEPENS .

Document n° 5 - CE Ass., 28 mars 1997, Société Baxter

Vu 1°), sous le n° 179 049, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 26 mars 1996 et 25 juillet 1996 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par la société Baxter, ayant son siège ..., représentée par son directeur général, par la société B. Braun Medical SA, ayant son siège ..., représentée par le président de son directoire et par la société Fresenius France, ayant son siège 5 place de Marivel à Sèvres (92316 Cedex), représentée par le président de son directoire ; les sociétés Baxter, B. Braun Medical SA et Fresenius France demandent au Conseil d'Etat:- d'annuler pour excès de pouvoir l'article 12 de l'ordonnance du 24 janvier 1996 relative aux mesures urgentes tendant au rétablissement de l'équilibre financier de la sécurité sociale ;

- de condamner l'Etat à leur verser une somme de 20 000 F au titre de l'article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;Vu 2°), sous le n° 179 050, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 26 mars 1996 et 25 juillet 1996 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par le laboratoire Aguettant, ayant son siège social ... (69353 Cedex 07), représenté par son président-directeur général ; le laboratoire Aguettant demande au Conseil d'Etat :- d'annuler pour excès de pouvoir l'article 12 de l'ordonnance du 24 janvier 1996 relative aux mesures urgentes tendant au rétablissement de l'équilibre financier de la sécurité sociale ;- de condamner l'Etat à lui verser une somme de 10 000 F au titre de l'article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; [...]

Sur la légalité de l'article 12 de l'ordonnance attaquée : […]Considérant que l'assujettissement aux trois nouvelles contributions des seules entreprises exploitant des spécialités pharmaceutiques résulte des termes mêmes de la loi d'habilitation du 30 décembre 1995 ; que, par suite, la société Baxter, la société B. Braun Medical SA, la société Fresenius France et le laboratoire Aguettant ne sauraient utilement soutenir que les dispositions de l'article 12 de l'ordonnance méconnaîtraient, dans cette mesure, le principe d'égalité devant les charges publiques ;Considérant que ni l'institution de trois contributions différentes, ni l'existence de règles d'exonérations spécifiques à chacune d'entre elles ne méconnaissent le principe d'égalité devant l'impôt, dès lors que toutes les entreprises exploitant des spécialités pharmaceutiques sont soumises dans les mêmes conditions à chacune des trois contributions ; qu'eu égard à l'objet du prélèvement exceptionnel qu'elle institue, l'ordonnance pouvait, sans

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méconnaître le principe d'égalité, exonérer des deux premières contributions les entreprises dont le chiffre d'affaires hors taxe réalisé en France en 1995 au titre des spécialités pharmaceutiques remboursables et des médicaments agréés à l'usage des collectivités est inférieur à 100 millions de francs, sauf si elles sont filiales à 50 pour 100 au moins d'une entreprise ou d'un groupe dont le chiffre d'affaires consolidé réalisé en France au titre de ces mêmes spécialités dépasse cette limite ;Considérant que le principe d'égalité n'implique pas que des entreprises se trouvant dans des situations différentes doivent être soumises à des régimes différents ; qu'ainsi, à supposer que certaines entreprises assujetties se fussent trouvées dans une situation différente du fait de la passation d'une convention avec les pouvoirs publics en application de l'accord cadre conclu le 25 janvier 1994 entre l'Etat et le syndicat national de l'industrie pharmaceutique l'ordonnance pouvait, sans méconnaître le principe d'égalité, les assujettir aux trois contributions dans les mêmes conditions que les entreprises non signataires d'une telle convention ; […]

Document n° 6 - CE Sect., 18 décembre 2002, Duvignères

Vu la requête, enregistrée le 27 avril 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Joëlle X..., ; Mme X... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 23 février 2001 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a refusé de faire droit à sa demande tendant à l'abrogation, d'une part, du décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique en tant que ce décret n'exclut pas l'aide personnalisée au logement des ressources à prendre en compte pour l'appréciation du droit au bénéfice de l'aide juridictionnelle et, d'autre part, dans la même mesure, de la circulaire du 26 mars 1997 ; 2°) de condamner l'Etat à lui rembourser le droit de timbre, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; […]

Considérant que la demande de Mme X..., à laquelle la lettre du 23 février 2001 du garde des sceaux, ministre de la justice, dont l'annulation est demandée, a opposé un refus, doit être regardée, contrairement à ce qui est soutenu en défense, comme tendant à l'abrogation, d'une part, du décret du 19 décembre 1991 portant application de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et, d'autre part, de la circulaire du 26 mars 1997 relative à la procédure d'aide juridictionnelle en tant que ces deux textes n'excluent pas l'aide personnalisée au logement des ressources à prendre en compte pour l'appréciation du droit des intéressés au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la lettre du 23 février 2001 en tant qu'elle porte refus d'abroger partiellement le décret du 19 décembre 1991 : Considérant que la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique prévoit que cette dernière est accordée sous condition de ressources ; que son article 5 dispose que " sont exclues de l'appréciation des ressources les prestations familiales ainsi que certaines prestations à objet spécialisé selon des modalités prévues par décret en Conseil d'Etat " ; que l'article 2 du décret du 19 décembre 1991, pris sur le fondement de ces dispositions, indique que sont exclues des ressources à prendre en compte pour apprécier le droit au bénéfice de l'aide juridictionnelle " les prestations familiales énumérées à l'article L. 511-1 du code de la sécurité sociale ainsi que les prestations sociales à objet spécialisé énumérées à l'article 8 du décret du 12 décembre 1988 (à) " ; que le premier de ces textes mentionne l'allocation de logement familiale mais non l'aide personnalisée au logement instituée par l'article L. 351-1 du code de la construction et de l'habitation ; que cette dernière prestation n'est pas non plus au nombre de celles que retient l'article 8 du décret du 12 décembre 1988 relatif à la détermination du revenu minimum d'insertion ; qu'il résulte ainsi de l'article 2 du décret du 19 décembre 1991 que l'aide personnalisée au logement doit, à la différence de l'allocation de logement familiale, être prise en compte parmi les ressources permettant d'apprécier le droit au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

Considérant que le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que la différence de traitement qui en résulte soit, dans l'un comme l'autre cas, en rapport avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des différences de situation susceptibles de la justifier ;

Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de la loi du 10 juillet 1991 que le législateur a entendu, d'une part, exclure l'allocation de logement familiale des ressources à prendre en compte pour apprécier le droit au bénéfice de l'aide juridictionnelle, d'autre part, laisser au pouvoir réglementaire le soin de définir les modalités suivant lesquelles certaines " prestations sociales à objet spécialisé " doivent être retenues au même titre ; qu'ainsi, la possibilité de traiter de manière différente les personnes demandant le bénéfice de l'aide juridictionnelle, suivant qu'elles perçoivent l'aide personnalisée au logement ou l'allocation de logement familiale, résulte, dans son principe, de la loi ;

Considérant, toutefois, que l'aide personnalisée au logement et l'allocation de logement familiale, qui sont exclusives l'une de l'autre, poursuivent des finalités sociales similaires ; qu'en outre, l'attribution à une famille de la première ou de la seconde dépend essentiellement du régime de propriété du logement occupé et de l'existence ou non d'une convention entre le bailleur et l'Etat ; que, par suite, le décret contesté ne pouvait, sans créer une

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différence de traitement manifestement disproportionnée par rapport aux différences de situation séparant les demandeurs d'aide juridictionnelle suivant qu'ils sont titulaires de l'une ou de l'autre de ces prestations, inclure l'intégralité de l'aide personnalisée au logement dans les ressources à prendre en compte pour apprécier leur droit à l'aide juridictionnelle ; qu'ainsi, le décret du 19 décembre 1991 méconnaît, sur ce point, le principe d'égalité ; que, dès lors, Mme X... est fondée à demander l'annulation de la décision contenue dans la lettre du 23 février 2001 par laquelle le garde des sceaux a refusé de proposer l'abrogation partielle de ce décret ; […]

Document n° 7 – art. 147 de la loi n° 98-657 du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions

Article 147Les tarifs des services publics administratifs à caractère facultatif peuvent être fixés en fonction du niveau du revenu des usagers et du nombre de personnes vivant au foyer. Les droits les plus élevés ainsi fixés ne peuvent être supérieurs au coût par usager de la prestation concernée. Les taux ainsi fixés ne font pas obstacle à l'égal accès de tous les usagers au service.

Document n° 8 – CE, 7 juillet 1950, Dehaene

Vu la requête présentée par le sieur Dehaene [Charles], chef de bureau à la Préfecture d'Indre-et-Loire, ladite requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 10 mars 1949, et tendant à ce qu'il plaise au Conseil annuler : 1° un arrêté du préfet d'Indre-et-Loire en date du 13 juillet 1948 le suspendant de ses fonctions ; 2° un arrêté du préfet d'Indre-et-Loire en date du 30 juillet 1948 lui infligeant un blâme ; Vu la Constitution de la République française ; Vu les lois du 19 octobre 1946, du 27 décembre 1947 et du 28 septembre 1948 ; Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 ; […]

En ce qui concerne le blâme : Considérant que le sieur Dehaene soutient que cette sanction a été prise en méconnaissance du droit de grève reconnu par la Constitution ;

Considérant qu'en indiquant, dans le préambule de la Constitution, que "le droit de grève s'exerce dans le cadre des lois qui le réglementent", l'assemblée constituante a entendu inviter le législateur à opérer la conciliation nécessaire entre la défense des intérêts professionnels, dont la grève constitue l'une des modalités, et la sauvegarde de l'intérêt général auquel elle peut être de nature à porter atteinte ;

Considérant que les lois des 27 décembre 1947 et 28 septembre 1948, qui se sont bornées à soumettre les personnels des compagnies républicaines de sécurité et de la police à un statut spécial et à les priver, en cas de cessation concertée du service, des garanties disciplinaires, ne sauraient être regardées, à elles seules, comme constituant, en ce qui concerne les services publics, la réglementation du droit de grève annoncée par la Constitution ;

Considérant qu'en l'absence de cette réglementation, la reconnaissance du droit de grève ne saurait avoir pour conséquence d'exclure les limitations qui doivent être apportées à ce droit, comme à tout autre, en vue d'en éviter un usage abusif ou contraire aux nécessités de l'ordre public ; qu'en l'état actuel de la législation il appartient au gouvernement, responsable du bon fonctionnement des services publics, de fixer lui-même, sous le contrôle du juge, en ce qui concerne ces services, la nature et l'étendue desdites limitations ;

Considérant qu'une grève qui, quel qu'en soit le motif, aurait pour effet de compromettre dans ses attributions essentielles l'exercice de la fonction préfectorale porterait une atteinte grave à l'ordre public ; que dès lors le gouvernement a pu légalement faire interdire et réprimer la participation des chefs de bureau de préfecture à la grève de juillet 1948 ;

Considérant qu'il est constant que le sieur Dehaene, chef de bureau à la préfecture d'Indre-et-Loire, a, nonobstant cette interdiction, fait grève du 13 au 20 juillet 1948 ; qu'il résulte de ce qui précède que cette attitude, si elle a été inspirée par un souci de solidarité, n'en a pas moins constitué une faute de nature à justifier une sanction disciplinaire ; qu'ainsi le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'en lui infligeant un blâme le préfet d'Indre-et-Loire a excédé ses pouvoirs ; […] Document n° 9 – CE, 30 novembre 1998, Rosenblatt

Vu l'ordonnance du 24 octobre 1996, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 29 octobre 1996, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Bordeaux a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 81 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la requête présentée à cette cour par Mme Martine ROSENBLATT et autres ;

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux le 17 janvier 1995, présentée par Mme Martine ROSENBLATT, infirmière anesthésiste, demeurant 4, place du C.F. Pommis, à Julian (65290), Mme Françoise DOMEC, infirmière anesthésiste, demeurant 18, Lot "Les Jardins du chemin du Roy", à Tarbes (65000), Mme Françoise CAZES, infirmière anesthésiste, demeurant rue du Levant, à Bours (65460), Mme Nicole LOUIT, infirmière anesthésiste, demeurant 54, boulevard Jean Moulin, à Tarbes (65000), Mme Liliane LAFFORGUE, infirmière anesthésiste, demeurant 22, rue Joliot Curie, Résidence "Les cimes", à Tarbes (65000) et M. Serge POUYLEAU, infirmier anesthésiste, demeurant 8, rue de l'étrier, à Tarbes (65000), tendant 1°) à l'annulation du jugement du 17 novembre 1994 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande dirigée contre la décision du 7 juin 1991 du directeur du Centre hospitalier intercommunal de Tarbes Vic-en-Bigorre modifiant le tableau du service minimum mis en place dans les salles de réveil des blocs réparatoires ainsi que leurs conclusions tendant à la condamnation du centre hospitalier à leur payer une somme de 10 000 F au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; 2°) à l'annulation de la décision susanalysée du 7 juin 1991 et à la condamnation du Centre hospitalier à leur payer une somme de 10 000 F au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; […]

Considérant qu'en raison d'une grève des infirmiers spécialisés en anesthésie et en réanimation, commencée le 21 mai 1991 et poursuivie pour une durée qualifiée d'illimitée par ses organisateurs, le directeur du Centre hospitalier intercommunal de Tarbes Vic-en-Bigorre a modifié, par la décision du 7 juin 1991, dont Mme ROSENBLATT et autres, infirmiers anesthésistes, demandent l'annulation, le tableau du service minimum mis en place dans les salles de réveil des blocs opératoires ; qu'il a ainsi prévu la présence d'un infirmier supplémentaire de 10 H à 18 H, du lundi au vendredi, à compter du lundi 10 juin 1991 ; qu'il a, par la même décision, désigné les personnels grévistes affectés à ce service minimum ; […]

Considérant qu'au terme de l'article 10 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, portant droits et obligations des fonctionnaires, ceux-ci "exercent le droit de grève dans le cadre des lois qui le réglementent" ; qu'en l'absence d'une telle réglementation, il revient aux chefs de services, responsables du bon fonctionnement des services placés sous leur autorité, de fixer eux-mêmes, sous le contrôle du juge, en ce qui concerne ces services, la nature et l'étendue des limitations à apporter au droit de grève en vue d'en éviter un usage abusif ou contraire aux nécessités de l'ordre public ou aux besoins essentiels de la Nation ;

Considérant qu'à la date à laquelle le directeur du Centre hospitalier intercommunal de Tarbes Vic-en-Bigorre a décidé d'accroître d'une personne les effectifs nécessaires à la continuité du service dans les salles de réveil des blocs opératoires, la grève de durée illimitée des infirmiers spécialisés en anesthésie et en réanimation, était commencée depuis dix-huit jours ; que, eu égard à ces circonstances, la décision prise par le directeur du centre hospitalier, en vue d'assurer l'indispensable continuité du service, n'a pas porté une atteinte excessive au droit de grève des infirmiers spécialisés en anesthésie et en réanimation, en fixant à trois, au lieu de cinq ou six en temps normal, le nombre de ceux qui devaient être présents dans les salles de réveil des blocs opératoires durant la journée ; que, pour déterminer les effectifs jugés ainsi nécessaires, le directeur a pu légalement prendre en compte l'ensemble des besoins des blocs opératoires et non seulement celui des urgences ;  Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme ROSENBLATT et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision du directeur du Centre hospitalier intercommunal de Tarbes-Vic-en-Bigorre du 7 juin 1991 ; […]

Document n° 10 – CC, Décision n° 2007-556 DC du 16 août 2007, Loi relative à l'organisation du service et à l'information des passagers dans les entreprises de transport aérien de passagers et à diverses dispositions dans le domaine des transports

[…] 1. Considérant que les députés et les sénateurs requérants défèrent au Conseil constitutionnel la loi relative à l'organisation du service et à l'information des passagers dans les entreprises de transport aérien de passagers et à diverses dispositions dans le domaine des transports ; qu'ils mettent en cause certaines dispositions de son article 2 ;

2. Considérant que l'article 2 de la loi déférée insère dans le titre Ier du livre Ier de la première partie du code des transports un chapitre IV intitulé : « Dispositions relatives au droit à l'information des passagers du transport aérien » et comprenant les articles L. 1114-1 à L. 1114-7 ; que la section 1 de ce chapitre comporte l'article L. 1114-1 qui détermine le champ d'application de la loi ; que la section 2 comporte l'article L. 1114-2 qui instaure, dans les entreprises, établissements ou parties d'établissement concourant directement à l'activité de transport aérien de passagers, une procédure facultative de prévention des conflits ;

3. Considérant que la section 3 de ce chapitre, qui comprend les articles L. 1114-3 à L. 1114-6, est relative à « l'exercice du droit de grève » ; que les dispositions du premier alinéa de l'article L. 1114-3 imposent aux salariés des établissements ou entreprises entrant dans le champ d'application de la loi et « dont l'absence est de nature à affecter directement la réalisation des vols » d'informer leur employeur de leur intention de participer à la grève au plus tard quarante-huit heures à l'avance ; que, selon le deuxième alinéa du même article, le salarié qui a

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déclaré son intention de participer à la grève et qui renonce à y participer en informe son employeur au plus tard vingt-quatre heures avant l'heure prévue de sa participation à la grève ; que la même obligation d'information pèse, en vertu du troisième alinéa de l'article L. 1114-3, sur le salarié qui participe à la grève et qui décide de reprendre son service ; qu'en vertu de l'article L. 1114-4, le salarié qui n'a pas informé son employeur de son intention de participer à la grève dans les conditions prévues à l'article L. 1114-3 est passible d'une sanction disciplinaire ; qu'en vertu du même article cette sanction peut également être prise à l'encontre du salarié qui, de façon répétée, n'a pas informé son employeur de son intention de renoncer à participer à la grève ou de reprendre son service ; 4. Considérant que les dispositions de la section 4, qui comprend l'article L. 1114-7, sont relatives à l'« information des passagers » ; qu'elles confèrent à tout passager le droit de disposer, au plus tard vingt-quatre heures avant le début de la perturbation, d'une information gratuite, précise et fiable sur l'activité assurée, en cas de perturbation du trafic aérien liée à une grève dans une entreprise, un établissement ou une partie d'établissement entrant dans le champ d'application de la loi ;

5. Considérant que, selon les auteurs des saisines, en imposant aux salariés de déclarer leur intention de faire grève quarante-huit heures avant le début du mouvement social, le législateur a porté une atteinte disproportionnée à l'exercice du droit de grève ; que constituerait également une telle atteinte l'obligation pesant sur les salariés de prévenir leur employeur vingt-quatre heures à l'avance de leur absence de participation à la grève ou de leur décision de reprendre leur service ;

6. Considérant qu'aux termes du septième alinéa du Préambule de 1946 : « Le droit de grève s'exerce dans le cadre des lois qui le réglementent » ; qu'en édictant cette disposition, les constituants ont entendu marquer que le droit de grève est un principe de valeur constitutionnelle mais qu'il a des limites et ont habilité le législateur à tracer celles-ci en opérant la conciliation nécessaire entre la défense des intérêts professionnels, dont la grève est un moyen, et la sauvegarde de l'intérêt général auquel la grève peut être de nature à porter atteinte ; qu'il est, à ce titre, loisible au législateur de tracer la limite séparant les actes et les comportements qui constituent un exercice licite de ce droit des actes et comportements qui en constitueraient un usage abusif ;

7. Considérant, en premier lieu, que, d'une part, il ressort des travaux parlementaires qu'en imposant aux salariés des entreprises entrant dans le champ d'application de la loi d'informer leur employeur de leur intention de participer à un mouvement de grève, le législateur a entendu mettre en place un dispositif permettant l'information des entreprises de transport aérien ainsi que de leurs passagers afin, notamment, d'assurer le bon ordre et la sécurité des personnes dans les aérodromes et, par suite, la préservation de l'ordre public qui est un objectif de valeur constitutionnelle ; que, d'autre part, l'obligation de déclaration préalable, avant toute participation à une grève, instituée par les dispositions de la loi déférée, pèse sur les seuls salariés « dont l'absence est de nature à affecter directement la réalisation des vols » ; qu'elle ne concerne ainsi que les salariés occupant un emploi de personnel navigant ou assurant personnellement l'une des opérations d'assistance en escale mentionnée à l'article L. 1114-1, de maintenance en ligne des aéronefs, de sûreté aéroportuaire, de secours et de lutte contre l'incendie ou de lutte contre le « péril animalier » ;

8. Considérant, en second lieu, que le législateur a imposé aux salariés qui avaient déclaré leur intention de participer à la grève de prévenir leur employeur de leur absence de participation vingt-quatre heures au moins à l'avance afin de permettre à leur employeur de les affecter ; qu'il a également, aux mêmes fins, imposé à ceux qui participent à la grève d'informer leur employeur vingt-quatre heures au moins avant la reprise de leur service, alors que le mouvement de grève se poursuit ; que, par les dispositions de l'article L. 1114-4, le législateur n'a permis que soit prise une sanction disciplinaire qu'à l'encontre du salarié qui, abusant du droit de grève, s'abstient « de façon répétée » d'informer son employeur soit de son intention de renoncer à participer à la grève, soit de reprendre son service ;

9. Considérant que l'obligation de déclaration préalable ne s'oppose pas à ce qu'un salarié rejoigne un mouvement de grève déjà engagé, auquel il n'avait pas initialement l'intention de participer, ou auquel il avait cessé de participer, dès lors qu'il en informe son employeur au plus tard quarante-huit heures à l'avance ; qu'en outre, la méconnaissance de ces obligations de déclaration individuelle préalable n'a de conséquences ni sur le caractère licite de la grève ni sur l'obligation pour l'employeur de rémunérer le salarié pour les heures pendant lesquelles il n'est pas en grève ;

10. Considérant que, par ces dispositions, le législateur a entendu maintenir l'effectivité du dispositif de déclarations individuelles préalables quarante-huit heures avant la participation à la grève, mis en place par la loi déférée, en assurant, après un délai de vingt-quatre heures, la fiabilité de ces déclarations ; que les aménagements ainsi apportés aux conditions d'exercice du droit de grève ne sont pas disproportionnés au regard de l'objectif poursuivi par le législateur ; que, par suite, les dispositions de l'article 2 de la loi déférée ne sont pas contraires à la Constitution ;

Document n° 11 – CE Ass., 12 avril 2013, Force Ouvrière Énergie et Mines (extraits)

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Vu 1°, sous le n° 329570, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 9 juillet et 12 octobre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la Fédération Force Ouvrière Énergie et Mines, dont le siège est 60, rue Vergniaud à Paris (75013), représentée par son représentant statutaire ; la Fédération Force Ouvrière Énergie et Mines demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir, d'une part, la décision du 15 juin 2009 par laquelle le directeur général délégué de la société Électricité de France (EDF) a décidé la réquisition de salariés chargés des opérations d'arrêt de tranches de centrales nucléaires, et d'autre part, la décision du 15 juin 2009 par laquelle le directeur « optimisation amont aval et trading » d'EDF a demandé la disponibilité au plus tôt à la sollicitation du réseau électrique des tranches nucléaires Cattenom 1, Dampierre 1, Dampierre 4, Cruas 1, Paluel 1 et Bugey 3 ;2°) de mettre à la charge de la société EDF le versement d'une somme de 3 500 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

[suivent trois requêtes similaires émanant d’autres syndicats]

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le traité instituant la Communauté européenne, notamment son article 82 et le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, notamment son article 102 ;Vu la Constitution ;Vu le code de commerce ;Vu le code général des collectivités territoriales ;Vu le code de l'énergie ;Vu le code du travail ;Vu la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 ;Vu la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 ;Vu le décret n° 2004-1224 du 17 novembre 2004 ;Vu l'arrêté du 5 juillet 1990 modifié fixant les consignes générales de délestages sur les réseaux électriques ;Vu le code de justice administrative ; […]

1. Considérant que les requêtes de la Fédération Force Ouvrière Énergie et Mines, de la Fédération nationale des mines et de l'énergie CGT, de la Fédération des syndicats Sud Énergie et de la Fédération Chimie Énergie CFDT sont dirigées contre les mêmes décisions ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'au début du printemps 2009, 17 des 58 réacteurs du parc nucléaire de la société Électricité de France (EDF) étaient arrêtés pour la réalisation d'opérations de maintenance et de renouvellement du combustible usagé, conformément à la programmation pluriannuelle de ces opérations ; que des mouvements de grève ont affecté, à compter du 9 avril 2009, les réacteurs ainsi placés à l'arrêt, entraînant un décalage important dans les opérations nécessaires à leur redémarrage ; qu'à la date du 15 juin 2009, les opérations de maintenance et de renouvellement du combustible étaient encore bloquées, du fait de la poursuite de la grève, pour huit réacteurs ; que, par décision du 15 juin 2009, le directeur général délégué de la société EDF a décidé que seraient requis, sous peine de sanctions disciplinaires, certains des salariés chargés de ces opérations perturbées par les mouvements de grève ; qu'en application de cette décision, le même jour, le directeur « optimisation amont aval et trading » d'EDF a demandé la disponibilité au plus tôt à la sollicitation du réseau électrique des réacteurs nucléaires Cattenom 1, Dampierre 1, Dampierre 4, Cruas 1, Paluel 1 et Bugey 3 ; que, par des notes du 15 juin 2009, le directeur général adjoint « production et ingénierie » a transmis aux directeurs des centres nucléaires de production d'électricité concernés les décisions du directeur général délégué et du directeur « optimisation amont aval et trading » ; que les fédérations requérantes demandent l'annulation de ces décisions et notes, la Fédération Chimie Énergie CFDT demandant en outre l'annulation des décisions individuelles réquisitionnant les salariés de la société EDF ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation des décisions prises le 15 juin 2009 par le directeur général délégué et le directeur « optimisation amont aval et trading » de la société Électricité de France :

En ce qui concerne la légalité externe des décisions attaquées :3. Considérant, en premier lieu, qu'en indiquant dans le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, auquel se réfère le préambule de la Constitution du 4 octobre 1958, que le droit de grève s'exerce dans le cadre des lois qui le réglementent, l'Assemblée Constituante a entendu inviter le législateur à opérer la conciliation nécessaire entre la défense des intérêts professionnels dont la grève constitue l'une des modalités et la sauvegarde de l'intérêt général, auquel elle peut être de nature à porter atteinte ; qu'en l'absence de la complète législation ainsi annoncée par la Constitution, la reconnaissance du droit de grève ne saurait avoir pour conséquence d'exclure les limitations qui doivent être apportées à ce droit, comme à tout autre, en vue d'en éviter un usage abusif, ou bien contraire aux nécessités de l'ordre public ou aux besoins essentiels du pays ;

4. Considérant qu'en l'état de la législation, il appartient à l'autorité administrative responsable du bon fonctionnement d'un service public de fixer elle-même, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et l'étendue de ces limitations pour les services dont l'organisation lui incombe ; que dans le cas d'un

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établissement public responsable de ce bon fonctionnement, ainsi que dans celui d'un organisme de droit privé responsable d'un service public, seuls leurs organes dirigeants, agissant en vertu des pouvoirs généraux d'organisation des services placés sous leur autorité, sont, sauf dispositions contraires, compétents pour déterminer les limitations à l'exercice du droit de grève ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, alors applicable : « Le service public de l'électricité a pour objet de garantir l'approvisionnement en électricité sur l'ensemble du territoire, dans le respect de l'intérêt général. / Dans le respect de la politique énergétique, il contribue à l'indépendance et à la sécurité d'approvisionnement (...), à la maîtrise de la demande d'énergie, à la compétitivité de l'activité économique (...) / Il concourt à la cohésion sociale, en assurant le droit à l'électricité pour tous (...) » ; qu'aux termes du dernier alinéa du même article : « Le service public de l'électricité est organisé, chacun pour ce qui le concerne, par l'État et les communes ou leurs établissements publics de coopération » ; qu'il résulte de ces dispositions législatives que la garantie de l'approvisionnement sur l'ensemble du territoire national constitue l'objet du service public de l'électricité, qui doit répondre notamment, dans des considérations de sécurité suffisantes, aux besoins essentiels des consommateurs ;

6. Considérant qu'à la date des décisions attaquées, le parc de production nucléaire contribuait à hauteur de près de 80 % à la production de l'électricité en France, le fonctionnement des centres nucléaires de production d'électricité implantés sur le territoire national apportant ainsi une contribution indispensable à l'approvisionnement sur le territoire métropolitain ;

7. Considérant que la société Électricité de France, qui en l'état actuel du système de production électrique exploite la totalité de ces centres, est chargée, à ce titre, d'une mission d'intérêt général répondant à un besoin essentiel du pays ; que, par ailleurs, en vertu de l'article 24 de la loi du 9 août 2004 relative au service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières, l'État détient plus de 70 % du capital de cette société dont le président du conseil d'administration et le directeur général sont nommés par décret en conseil des ministres ; qu'au demeurant, en adoptant les dispositions aujourd'hui codifiées aux articles L. 336-1 et suivants du code de l'énergie relatives à l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique, le législateur a tiré les conséquences de la spécificité des 58 réacteurs du parc nucléaire français mis en service entre 1978 et 2002, dont l'entreprise EDF, sous le statut d'établissement public à caractère industriel et commercial puis de société anonyme, a depuis l'origine assuré le bon fonctionnement ; qu'ainsi, et alors même qu'en vertu du dernier alinéa de l'article 1er de la loi du 10 février 2000 précité, le service public de l'électricité est organisé, chacun pour ce qui le concerne, par l'État et les communes ou leurs établissements publics de coopération et qu'en vertu du II de l'article 15 de la même loi, la société Réseau de Transport d'Electricité (RTE), gestionnaire du réseau public de transport, assure à tout instant l'équilibre des flux d'électricité sur le réseau, la société EDF est responsable d'un service public en ce qu'elle exploite les centres nucléaires de production d'électricité ;

8. Considérant que les organes dirigeants de la société EDF sont, dès lors, compétents, dans les conditions mentionnées aux points 3 et 4 ci-dessus, pour déterminer les limitations à apporter au droit de grève de ses agents, sans préjudice des dispositions de l'article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales définissant les pouvoirs de réquisition du représentant de l'État dans le département et de l'article 21 de la loi du 10 février 2000 concernant les pouvoirs du ministre chargé de l'énergie en cas d'atteinte grave et immédiate à la sécurité et à la sûreté des réseaux publics de transport et de distribution d'électricité, et nonobstant les clauses du contrat de service public signé le 24 octobre 2005 entre l'État et Électricité de France, qui, en tout état de cause, a un caractère exclusivement contractuel et ne peut être utilement invoqué dans le présent litige d'excès de pouvoir ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, contrairement à ce que soutiennent les fédérations requérantes, les dirigeants de la société Électricité de France avaient compétence pour édicter les règles applicables, en cas de poursuite de la grève, aux agents dont la présence à leur poste était indispensable au redémarrage des réacteurs dont l'interruption prolongée du fonctionnement aurait porté atteinte aux besoins essentiels du pays ; […]

12. Considérant, en troisième lieu, que les décisions attaquées, qui présentent un caractère réglementaire, n'avaient pas à être motivées ;

En ce qui concerne la légalité interne des décisions attaquées :13. Considérant, en premier lieu, que si, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, les dirigeants de la société EDF sont compétents, dans les conditions mentionnées aux points 3 et 4, pour déterminer les limitations à apporter au droit de grève de ses salariés travaillant dans les centres nucléaires de production d'électricité en vue d'en éviter des conséquences graves dans l'approvisionnement du pays en électricité, c'est dans la mesure où les solutions alternatives à l'exercice d'un tel pouvoir font défaut ; qu'il y a lieu ainsi, compte tenu du caractère non directement substituable de l'énergie électrique, de ses caractéristiques physiques en vertu desquelles elle ne peut être stockée en quantité importante et des contraintes techniques du fonctionnement des centres nucléaires de production d'électricité, de rechercher préalablement la possibilité de mettre en œuvre d'autres moyens de production, de recourir aux capacités d'importation des réseaux transfrontières ou de faire appel à la diminution volontaire ou contractuelle de la demande d'électricité ;

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14. Considérant que s'il appartient à la société EDF, seule exploitante des centres nucléaires de production d'électricité, de prendre les dispositions nécessaires pour assurer le bon fonctionnement du service public dont elle a la charge, elle doit le faire au vu, non seulement de ses propres données mais aussi des analyses prévisionnelles de l'équilibre entre offre et demande d'électricité en France établies par la société RTE, gestionnaire du réseau public de transport ; que, contrairement, par ailleurs, à ce que soutiennent les fédérations requérantes, l'arrêté du 5 juillet 1990 modifié fixant les consignes générales de délestages sur les réseaux électriques a pour unique objet de définir le service prioritaire à maintenir en toutes circonstances, et ne saurait avoir pour effet de limiter, dans la durée, l'alimentation en électricité aux seuls usagers relevant des catégories qu'il définit ;

15. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, notamment des notes de la société RTE des 5 et 22 juin 2009, que les mouvements de grève mentionnés au point 2 ci-dessus ont entraîné des retards dans les opérations de maintenance et de renouvellement du combustible usagé de huit réacteurs nucléaires, qui, à la date du 15 juin 2009, faisaient craindre à juste titre, au vu des informations et des prévisions météorologiques alors disponibles, que ni les capacités de production électrique françaises mobilisables, ni les importations possibles, ni la mise en œuvre des procédures de diminution volontaire ou contractuelle de la demande d'électricité, qui relevaient chacune, en l'espèce, pour l'essentiel de la société EDF, ne permettent au gestionnaire du réseau public de transport de préserver, à la mi-juillet, l'équilibre entre la demande et l'offre d'électricité avec la marge de sécurité minimale indispensable, de telle sorte que toute nouvelle dégradation de la disponibilité du parc de production nucléaire aurait alors directement menacé la garantie de l'approvisionnement en électricité ;

16. Considérant, en troisième lieu, que, par les décisions attaquées, les dirigeants de la société EDF, après avoir vainement adressé des sommations interpellatives aux représentants des syndicats de salariés ayant déposé des préavis de grève, ont décidé que seraient requis les salariés dont l'intervention était strictement nécessaire à la bonne exécution, pour six des huit réacteurs encore affectés par les mouvements de grève, dix semaines après leur déclenchement et alors qu'ils étaient périodiquement reconduits, des opérations destinées à permettre le redémarrage de ces réacteurs dans les meilleurs délais ; que le dispositif contesté, mis en place par la direction de la société EDF par les décisions attaquées, n'a eu ni pour objet ni pour effet de contraindre l'ensemble des personnels concernés à remplir un service normal, mais seulement de répondre de la continuité des fonctions indispensables pour assurer la remise en service des réacteurs arrêtés et éviter, en l'absence de solution alternative, des conséquences graves dans l'approvisionnement du pays en électricité ;

17. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les fédérations requérantes ne sont pas fondées à soutenir que les décisions attaquées seraient entachées d'erreur de droit, reposeraient sur des faits inexacts ou porteraient une atteinte disproportionnée au droit de grève du personnel de la société Electricité de France ;

18. Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article 82 du Traité instituant la Communauté européenne, devenu l'article 102 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne : « Est incompatible avec le marché commun et interdit, dans la mesure où le commerce entre États membres est susceptible d'en être affecté, le fait pour une ou plusieurs entreprises d'exploiter de façon abusive une position dominante sur le marché commun ou dans une partie substantielle de celui-ci (...) » ; que les articles L. 420-1 et L. 420-2 du code de commerce prohibent, lorsqu'elles ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché, les actions concertées, conventions, ententes expresses ou tacites ou coalitions, l'exploitation abusive par une entreprise ou un groupe d'entreprises d'une position dominante sur le marché intérieur ou une partie substantielle de celui-ci ainsi que, dès lors qu'elle est susceptible d'affecter le fonctionnement ou la structure de la concurrence, l'exploitation abusive par une entreprise ou un groupe d'entreprises de l'état de dépendance économique dans lequel se trouve à son égard une entreprise cliente ou fournisseur ;

19. Considérant que les décisions attaquées ne caractérisant ni une action concertée, ni l'exploitation abusive d'une position dominante ou de l'état de dépendance économique d'une entreprise cliente ou fournisseur, le moyen tiré de la violation de l'article 82 du Traité instituant la Communauté européenne et des articles L. 420-1 et L. 420-2 du code de commerce ne peut qu'être écarté ;

20. Considérant que, par suite, les fédérations requérantes ne sont pas fondées à demander l'annulation pour excès de pouvoir des décisions du directeur général délégué et du directeur « optimisation amont aval et trading » de la société Électricité de France du 15 juin 2009 ; […]

Document n° 12 - CE Sect., 18 mars 1977, Chambre de commerce de La Rochelle

REQUETES DES CHAMBRES DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE LA ROCHELLE, BELFORT ET LILLE-ROUBAIX-TOURCOING, TENDANT A L'ANNULATION DE LA DECISION DU 13 NOVEMBRE 1974 DU SECRETAIRE D'ETAT AUX TRANSPORTS AUTORISANT LA COMPAGNIE AIR-INTER A CESSER L'EXPLOITATION DES LIGNES AERIENNES PARIS-BELFORT, PARIS-LA-ROCHELLE ET

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PARIS-LILLE ; VU LE CODE DE L'AVIATION CIVILE ; L'ORDONNANCE DU 31 JUILLET 1945 ET LE DECRET DU 30 SEPTEMBRE 1953 ; LE CODE GENERAL DES IMPOTS ;CONSIDERANT JONCTION ; SANS QU'IL SOIT BESOIN DE STATUER SUR LA FIN DE NON-RECEVOIR OPPOSEE PAR LE SECRETAIRE D'ETAT AUX TRANSPORTS : CONS. QU'EN APPLICATION DES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 6 DE L'ARRETE DU 18 MAI 1966 AUTORISANT, POUR UNE PERIODE DE VINGT ANS A COMPTER DU 1ER JANVIER 1967, LA COMPAGNIE AIR-INTER A ASSURER, A L'INTERIEUR DU TERRITOIRE METROPOLITAIN, LE TRANSPORT DE PASSAGERS, DE FRET ET DE POSTE ET VALANT AGREMENT DE LADITE COMPAGNIE AU SENS DES DISPOSITIONS DU DECRET DU 12 NOVEMBRE 1954, ALORS EN VIGUEUR, UNE CONVENTION A ETE SIGNEE LE 8 MAI 1974 ENTRE LE SECRETAIRE D'ETAT AUX TRANSPORTS ET AIR-INTER FIXANT LES CONDITIONS D'APPLICATION DUDIT ARRETE ET DEFINISSANT LES RAPPORTS ENTRE L'ETAT ET LA COMPAGNIE ; QUE CONFORMEMENT AUX DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 330-7 DU CODE DE L'AVIATION CIVILE QUI SUBORDONNENT A L'ACCORD DU MINISTRE LES PROGRAMMES D'EXPLOITATION DES COMPAGNIES AUTORISEES, LA CONVENTION D'UNE PART DETERMINE LE RESEAU DE LIGNES QUE LA COMPAGNIE S'ENGAGE A EXPLOITER ET SUR LESQUELLES "AUCUNE AUTRE ENTREPRISE DE TRANSPORT AERIEN NE SERA AUTORISEE A EXPLOITER DES SERVICES AERIENS REGULIERS" ET D'AUTRE PART STIPULE EN SON ARTICLE 3 QUE "LE MINISTRE PEUT, APRES AVIS DU CONSEIL SUPERIEUR DE L'AVIATION MARCHANDE, AUTORISER LA COMPAGNIE A ABANDONNER L'EXPLOITATION DES LIGNES QUI AURAIENT PERDU LEUR JUSTIFICATION" EN RAISON NOTAMMENT "D'UNE TRANSFORMATION PROFONDE DES CONDITIONS ECONOMIQUES DE LEUR EXPLOITATION" ; QUE CES STIPULATIONS QUI REGLENT L'ORGANISATION MEME DU SERVICE PUBLIC ASSURE PAR LA COMPAGNIE AIR-INTER ONT UN CARACTERE REGLEMENTAIRE ; QUE PAR SUITE LA CHAMBRE DE COMMERCE DE LA ROCHELLE, LA CHAMBRE DE COMMERCE DE BELFORT ET LA CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE LILLE-ROUBAIX-TOURCOING SONT RECEVABLES A EN INVOQUER LA MECONNAISSANCE A L'APPUI DE LEURS POURVOIS TENDANT A L'ANNULATION DE LA DECISION EN DATE DU 13 NOVEMBRE 1974 PAR LAQUELLE LE SECRETAIRE D'ETAT AUX TRANSPORTS ESTIMANT, APRES AVIS DU CONSEIL SUPERIEUR DE L'AVIATION MARCHANDE, QUE LES LIGNES DESSERVIES PAR LA COMPAGNIE AIR-INTER, EN VERTU DE LA CONVENTION DU 8 MAI 1974, ENTRE PARIS D'UNE PART ET LA ROCHELLE, BELFORT ET LILLE D'AUTRE PART, AVAIENT PERDU LEUR JUSTIFICATION, A AUTORISE LADITE COMPAGNIE A LES ABANDONNER ;CONS. QU'IL RESSORT DES PIECES DU DOSSIER QU'ENTRE LE 1ER OCTOBRE 1973, DATE A LAQUELLE AVAIT ETE APPRECIEE LA SITUATION SERVANT DE BASE AUX DISPOSITIONS DE LA CONVENTION DU 8 MAI 1974 ET LE 13 NOVEMBRE 1974 DATE A LAQUELLE EST INTERVENUE LA DECISION ATTAQUEE, UNE TRANSFORMATION PROFONDE DE LA CONJONCTURE ECONOMIQUE, LIEE NOTAMMENT AUX HAUSSES DES PRIX DES PRODUITS PETROLIERS EST SURVENUE ET S'EST TRADUITE, POUR CHACUNE DES TROIS LIGNES AERIENNES CONCERNEES, PAR UNE BAISSE SENSIBLE DU MOUVEMENT DES PASSAGERS ET PAR UNE AGGRAVATION DE SON DEFICIT D'EXPLOITATION ; QU'IL RESSORT EN OUTRE DES PREVISIONS, NON CONTESTEES, DU CONSEIL SUPERIEUR DE L'AVIATION MARCHANDE, LORS DE SA CONSULTATION PREALABLE A LA DECISION ATTAQUEE, LE 31 OCTOBRE 1974, QUE LA DEGRADATION DE LA SITUATION CI-DESSUS INDIQUEE DEVAIT SE POURSUIVRE AU COURS DES ANNEES 1975 ET 1976 ; QUE DES LORS LES FAITS INVOQUES PAR LE SECRETAIRE D'ETAT A L'APPUI DE LA DECISION ATTAQUEE SONT DE NATURE A MOTIVER LEGALEMENT CELLE-CI ; CONS. PAR AILLEURS QUE LES USAGERS D'UN SERVICE PUBLIC QUI N'EST PAS OBLIGATOIRE N'ONT AUCUN DROIT AU MAINTIEN DE CE SERVICE AU FONCTIONNEMENT DUQUEL L'ADMINISTRATION PEUT METTRE FIN LORSQU'ELLE L'ESTIME NECESSAIRE ; QUE DES LORS LES REQUERANTES NE SONT PAS FONDEES A SOUTENIR QUE L'ABANDON DES LIGNES LITIGIEUSES MECONNAIT LA CONTINUITE DU SERVICE PUBLIC NI QUE L'INTERRUPTION DU FONCTIONNEMENT DE CES TROIS LIGNES, AU VU D'UNE SITUATION ECONOMIQUE QUI LEUR ETAIT PROPRE ET QUI DIFFERAIT DE CELLE DES AUTRES LIGNES DONT L'EXPLOITATION ETAIT MAINTENUE, CONSTITUE UNE VIOLATION DU PRINCIPE DE L'EGALITE DES USAGERS DEVANT LE SERVICE PUBLIC ; [REJET DES REQUETES AVEC DEPENS].

Document n° 13 - CE Ass., 2 février 1987, Société TV 6

1° Requête de la société T.V. 6 tendant à l'annulation du décret n 86-901 du 30 juillet 1986 portant résiliation du traité de concession conclu avec ladite société pour l'exploitation de la 6e chaîne de télévision ;2° Requête des sociétés Scorpio-Music, Aréna et Phathé-Marconi-Emi tendant aux mêmes fins ;Vu les articles 34 et 17 de la Constitution ; la loi n 79-587 du 11 juillet 1979; la loi n 82-652 du 29 juillet 1982 modifiée par les lois nos 83-632 du 12 juillet 1983, n 84-742 du1er août 1984 et n 85-1317 du 13 décembre 1985 ; le décret n 86-20 du 7 janvier 1986 pris pour l'application de l'article 79 de la loi n 82-652 du 29 juillet 1982 ; le décret n 86-234 du 21 février 1986 portant approbation du traité de concession et du cahier des charges de la 6 e

chaîne; le code des tribunaux administratifs ; l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ; la loi du 30 décembre 1977 ; […]

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Sur la légalité du décret attaqué :Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens des requêtes :

*6* Cons. qu'il résulte de l'exposé des motifs du décret attaqué que, pour résilier le traité de concession de la 6 e

chaîne de télévision, le gouvernement s'est fondé sur les modifications du régime juridique des services de télévision par voie hertzienne prévues par un projet de loi et sur les changements qui résulteraient de la mise en œuvre des principes posés par ce projet quant à la consistance et au fonctionnement des services de télévision, notamment du fait de la privatisation envisagée de l'une des chaînes de télévision du secteur public et des nouvelles règles concernant la diffusion des œuvres cinématographiques et leur interruption par des messages publicitaires ;

*7* Cons. que, s'il appartient à l'autorité concédante, en vertu des règles générales applicables aux contrats administratifs et sous réserve des droits d'indemnisation du concessionnaire, de mettre fin avant son terme, à un contrat de concession, elle ne peut ainsi rompre unilatéralement ses engagements que pour des motifs d'intérêt général justifiant, à la date à laquelle elle prend sa décision, que l'exploitation du service concédé doit être abandonnée ou établie sur des bases nouvelles; qu'au cas d'espèce, le gouvernement s'est fondé sur l'existence d'un projet de réforme de la communication audiovisuelle dont l'aboutissement, le contenu et les conséquences ne pouvaient être tenus pour certains avant la promulgation de la loi ; que, par suite, un tel motif ne pouvait légalement justifier une décision de résiliation, alors même qu'aux termes de l'article 1er du décret attaqué, celle-ci ne doit prendre effet qu'à l'expiration d'un délai suivant la mise en place de l'une des institutions dont la création est prévue dans le projet de loi ; qu'il suit de là que les sociétés requérantes sont fondées à demander l'annulation du décret attaqué ; ... (annulation du décret du 30 juillet 1986).

Document n° 14 - CE Ass., 14 avril 1995, Consistoire central des israélites de France et Koen

Vu la requête enregistrée le 17 avril 1991 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour le Consistoire central des israëlites de France, dont le siège est ..., pour l'association des élèves et anciens élèves juifs des grandes écoles et classes préparatoires, dont le siège est ..., pour M. Robert X... et l'association internationale pour la défense de la liberté religieuse, dont le siège est ... à Le Mee-sur-Seine (77350) et tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'article 8 du décret du 18 février 1991 modifiant le décret du 30 août 1985 relatif aux droits et obligations des élèves dans les établissements publics locaux d'enseignement du second degré ; […]

Sur la légalité du décret attaqué :Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 10 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 : "Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la loi" ; qu'aux termes de l'article 9 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 : "Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ; ce droit implique ( ...) la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le culte, l'enseignement, les pratiques et l'accomplissement des rites" ; qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 9 décembre 1905 : "La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées ci-après dans l'intérêt de l'ordre public" ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes du préambule de la Constitution du 7 octobre 1946 : "La Nation garantit l'égal accès de l'enfant et de l'adulte ... à l'instruction. L'organisation de l'enseignement laïque et gratuit à tous les degrés est un devoir de l'Etat" et qu'aux termes de l'article 2 du protocole additionnel n° 1 à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "Nul ne peut se voir refuser le droit à l'instruction. L'Etat, dans l'exercice des fonctions qu'il assumera dans le domaine de l'éducation et de l'enseignement, respectera le droit des parents d'assurer cette éducation et cet enseignement conformément à leurs convictions religieuses et philosophiques" ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 10 de la loi du 10 juillet 1989 susvisée : "Les obligations des élèves consistent dans l'accomplissement des tâches inhérentes à leurs études ; elles incluent l'assiduité et le respect des règles de fonctionnement et de la vie collective des établissements" ; qu'aux termes de l'article 3-5 ajouté au décret du 30 août 1985 par l'article 8 du décret attaqué du 18 février 1991 : "L'obligation d'assiduité mentionnée à l'article 10 de la loi du 10 juillet 1989 susvisée consiste, pour les élèves, à se soumettre aux horaires d'enseignement définis par l'emploi du temps de l'établissement ; elle s'impose pour les enseignements obligatoires et pour les enseignements facultatifs dès lors que les élèves se sont inscrits à ces derniers. - Les élèves doivent accomplir les travaux écrits et oraux qui leur sont demandés par les enseignants, respecter le contenu des programmes et se soumettre aux modalités de contrôle des connaissances qui leur sont imposées ..... - Le règlement intérieur de l'établissement détermine les modalités d'application du présent article" ; que si les requérants soutiennent que ces dispositions réglementaires portent atteinte à la liberté religieuse garantie aux élèves par les dispositions précitées, en donnant à l'obligation de respecter les horaires

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définis par l'emploi du temps de l'établissement un caractère général et absolu, sans prévoir la possibilité de dérogations fondées sur la pratique religieuse, lesdites dispositions n'ont pas eu pour objet et ne sauraient avoir légalement pour effet d'interdire aux élèves qui en font la demande de bénéficier individuellement des autorisations d'absence nécessaires à l'exercice d'un culte ou à la célébration d'une fête religieuse, dans le cas où ces absences sont compatibles avec l'accomplissement des tâches inhérentes à leurs études et avec le respect de l'ordre public dans l'établissement ; que par suite, l'article 8 du décret attaqué ne méconnaît aucun des principes ni aucune des dispositions invoqués par les requérants ; […]

Document n° 15 - CE, 16 février 2004, M. B.

Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-2 du code le justice administrative : Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale (...) ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, agent d'entretien de l'Office municipal d'habitations à loyer modéré de Saint-Dizier exerçant les fonctions de gardien d'immeuble, a sollicité, le 12 janvier 2004, l'autorisation de s'absenter tous les vendredis de 14 heures à 15 heures pour se rendre à la mosquée pour prier ; que cette demande a été rejetée par une décision de la présidente de l'Office en date du 20 janvier 2004 ;

Considérant que la liberté de culte présente le caractère d'une liberté fondamentale ; que toutefois, en estimant que les nécessités du fonctionnement normal du service public faisaient obstacle à ce que M. X soit autorisé à se rendre à la mosquée chaque vendredi de 14 heures à 15 heures, alors que le règlement horaire applicable aux gardiens d'immeubles de l'Office dont il relève prescrit, en ce qui concerne ce jour de la semaine, une présence obligatoire de 5 heures à 8 heures, de 9 heures à 11 heures et de 14 heures à 16 heures 30, la présidente de l'Office municipal d'habitations à loyer modéré de Saint-Dizier n'a pas porté une atteinte manifestement illégale à la liberté de M. X de pratiquer la confession de son choix ; Considérant au surplus qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision refusant l'autorisation d'absence sollicitée ait, en l'absence de circonstances particulières invoquées par l'intéressé, constitué une situation d'urgence de nature à justifier qu'il soit enjoint à l'Office, en application de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, de modifier à titre permanent les horaires de travail régissant les fonctions exercées par M. X ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que le juge des référés du tribunal administratif de Chalons en Champagne a, par l'ordonnance attaquée, rejeté la demande de M. X ; qu'il y a lieu de rejeter l'appel de ce dernier selon la procédure prévue à l'article L. 522-3 du code de justice administrative ; […]

Document n° 16 – CE, 4 juillet 2018, Association pour la neutralité de l’enseignement de l’histoire turque dans les programmes scolaires

Vu la procédure suivante :

- Par requête enregistrée le 24 juillet 2015 sous le n° 1502100, la Ligue de défense judiciaire des musulmans, prise en la personne de son président et représentée par Me Gardères, demande au Tribunal :

1°) d'annuler la décision du maire de Chalon-sur-Saône, rendue publique par un communiqué du 16 mars 2015, de ne plus proposer de menu de substitution dans les restaurants scolaires à compter de la prochaine rentrée scolaire, ensemble la décision ayant rejeté son recours gracieux ;2°) de condamner la ville de Chalon-sur-Saône à lui verser une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Elle soutient que la décision attaquée est entachée d'incompétence et de violation de la liberté de conscience et de culte.

- Par requête et mémoires enregistrés les 2 octobre et 26 novembre 2015 et 4 mai 2016 sous le n° 1502726, la Ligue de défense judiciaire des musulmans, prise en la personne de son président, M me C., Mme D. et M. E, représentés par Me Gardères, demandent au Tribunal :

1°) d'annuler la délibération du conseil municipal de Chalon-sur-Saône du 29 septembre 2015 ayant approuvé le règlement des restaurants scolaires, ensemble ce règlement, en ce qu'ils ont supprimé tout menu de substitution ;2°) de condamner la ville de Chalon-sur-Saône à leur verser une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Ils soutiennent qu'ils ont intérêt à agir et que la décision attaquée a violé la liberté de conscience et de culte garantie par l'article 9 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, l'article 1 er de la loi du 9 décembre

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1905, l'article 18 du pacte international relatif aux droits civils et politiques, l'article 9 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et l'article 10 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. ». […]

Considérant qu'il y a lieu de joindre les requêtes susvisées ;

Sur les conclusions à fin d'annulation : […]

En ce qui concerne le fond :S'agissant de la portée de la requête :Considérant que, compte tenu de l'argumentation énoncée par le dernier mémoire des requérants, ceux-ci doivent être regardés comme ayant entendu invoquer la méconnaissance, par les décisions attaquées, de l'intérêt supérieur des enfants fréquentant les cantines scolaires ;

S'agissant de l'intérêt supérieur des enfants :Sans qu'il soit besoin de tenir compte des observations dépourvues du caractère général requis par l'article R. 625-3 du code de justice administrative ;

Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant (CIDE) : « Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. » ;

Considérant que selon le 6 de l'observation générale n° 14 (2013) du Comité des droits de l'enfant des Nations Unies, « l'intérêt supérieur de l'enfant est un concept triple : a) C'est un droit de fond : Le droit de l'enfant à ce que son intérêt supérieur soit évalué et soit une considération primordiale lorsque différents intérêts sont examinés en vue d'aboutir à une décision sur la question en cause [...] b) Un principe juridique interprétatif fondamental : Si une disposition juridique se prête à plusieurs interprétations, il convient de choisir celle qui sert le plus efficacement l'intérêt supérieur de l'enfant [...]. c) Une règle de procédure : Quand une décision qui aura des incidences sur [...] un groupe défini d'enfants [...] doit être prise, le processus décisionnel doit comporter une évaluation de ces incidences [...] sur les enfants [...]. En outre, la justification d'une décision doit montrer que le droit en question a été expressément pris en considération. A cet égard, les Etats parties doivent expliquer comment ce droit a été respecté dans la décision, à savoir ce qui a été considéré comme étant dans l'intérêt supérieur de l'enfant, sur la base de quels critères et comment l'intérêt supérieur de l'enfant a été mis en balance avec d'autres considérations » ;

Considérant que si le service public de la restauration scolaire a un caractère facultatif et si l'obligation de proposer aux enfants un menu de substitution ne résulte d'aucune stipulation conventionnelle, d'aucune disposition constitutionnelle, législative ou réglementaire et d'aucun principe, la mesure consistant à mettre fin à une telle pratique affecte de manière suffisamment directe et certaine la situation des enfants fréquentant une cantine scolaire et constitue ainsi une décision dans l'appréciation de laquelle son auteur doit, en vertu de l'article 3-1 de la CIDE, accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur de l'enfant ;

Considérant que la conformité d'une telle mesure à l'article 3-1 de la CIDE s'apprécie, dans les conditions rappelées par l'observation générale n° 14 du Comité des droits de l'enfant des Nations Unies, au terme d'une mise en balance, au regard de chaque situation locale particulière, des différents intérêts en cause ;

Considérant, d'une part, qu'à partir de 1984 sans discontinuité, les cantines scolaires de Chalon-sur-Saône ont proposé un repas de substitution lorsque du porc était servi ; qu'un tel choix permettait la prise en compte, dans le respect de la liberté de conscience des enfants et des parents, de préoccupations d'ordre religieux ou culturel ; que les décisions attaquées ont retiré ce choix aux usagers du service, mettant ainsi fin à une pratique ancienne et durable qui n'avait jusqu'alors jamais fait débat, alors que les familles ne sont pas nécessairement en mesure de recourir à un autre mode de restauration ;

Considérant, d'autre part, que si une contrainte technique ou financière peut légalement motiver, dans le cadre du principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales, une adaptation des modalités du service public de la restauration scolaire, il ressort du rapport préalable devant le conseil municipal, du compte-rendu de la séance du conseil municipal, de la motivation des décisions attaquées et de la défense que ces décisions ont procédé non pas d'une telle contrainte mais d'une position de principe se référant à une conception du principe de laïcité ;

Considérant, enfin, que si la ville de Chalon-sur-Saône fait aussi valoir que lorsque par le passé un repas de substitution était servi, les enfants étaient fichés et regroupés par tables selon leurs choix ce qui permettait d'identifier leur religion en violation de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 et de l'article 226-16 du code pénal, l'impossibilité d'une méthode alternative, notamment par recours à des questionnaires anonymisés pour l'évaluation des besoins du service ou par mise en place d'un self-service, n'a pas, à la supposer même invoquée, été démontrée ;

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Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, dans les circonstances particulières de l'espèce, les décisions attaquées, même si l'information des familles a été prévue avant puis pendant la mise en oeuvre de la délibération attaquée, ne peuvent pas être regardées comme ayant accordé, au sens de l'article 3-1 de la CIDE, une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants concernés ; [annulation]

Document n° 17 – CE, 4 juillet 2018, Association pour la neutralité de l’enseignement de l’histoire turque dans les programmes scolaires

Vu les procédures suivantes :

1° Sous le n° 392400, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 6 août 2015 et 22 janvier 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association pour la neutralité de l'enseignement de l'histoire turque dans les programmes scolaires demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche refusant d'abroger l'arrêté du 15 juillet 2008 fixant le programme d'enseignement d'histoire-géographie-éducation civique pour les classes de sixième, de cinquième, de quatrième et de troisième du collège en tant qu'il prévoit l'évocation du " génocide des Arméniens " en classe de troisième ; 2°) d'enjoindre au ministre de l'éducation nationale d'abroger, dans cette même mesure, cet arrêté ;3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. […]

Sur le refus d'abroger l'arrêté du 15 juillet 2008 en tant qu'il prévoit l'enseignement du "génocide des Arméniens" :2. Considérant que les dispositions de l'arrêté du 15 juillet 2008 fixant le programme d'enseignement d'histoire-géographie-éducation civique pour les classes de sixième, de cinquième, de quatrième et de troisième du collège dont l'association requérante a demandé l'abrogation à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, ont été abrogées par l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2015 de la même ministre fixant les programmes d'enseignement du cycle des apprentissages fondamentaux, du cycle de consolidation et du cycle des approfondissements ; que, par suite, les conclusions par lesquelles cette association demande l'annulation de ce refus ont, en cours d'instance, perdu leur objet ; qu'il n'y a plus lieu d'y statuer ;

Sur le refus d'abroger l'arrêté du 9 novembre 2015 en tant qu'il prévoit l'enseignement du " génocide des Arméniens " :3. Considérant que l'annexe III de l'arrêté du 9 novembre 2015 déjà mentionné au point 2 fixe, pour le programme d'histoire en classe de troisième, le " Thème 1 : l'Europe, un théâtre majeur des guerres totales (1914-1945) ", pour lequel elle prévoit notamment, au titre des " Démarches et contenus d'enseignement ", les éléments suivants : " (...) En mobilisant les civils aussi bien que les militaires, la Grande Guerre met à l'épreuve la cohésion des sociétés et fragilise durablement des régimes en place. Combattants et civils subissent des violences extrêmes, dont témoigne particulièrement le génocide des Arméniens en 1915. En Russie, la guerre totale installe les conditions de la révolution bolchevique, le communisme soviétique stalinien s'établit au cours des années 1920 (...) " ; que l'association requérante demande l'annulation de la décision implicite par laquelle la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche a refusé d'abroger ces dispositions en tant qu'elles comportent l'enseignement, au titre du programme d'histoire, des faits qu'elles qualifient de " génocide des Arméniens " ; […]

6. Considérant que l'association requérante soutient, en troisième lieu, que l'arrêté attaqué porte atteinte aux libertés d'expression, de conscience et d'opinion des élèves, ainsi qu'à la neutralité du service public de l'éducation, en raison de l'usage de l'expression " génocide des Arméniens " et de l'orientation que celui-ci confère à l'enseignement des faits en question ; que, d'une part, la seule utilisation de ces termes, dont il ressort des pièces du dossier qu'ils se bornent à reprendre une formulation courante, notamment de la part d'historiens, et d'ailleurs reprise par la loi n° 2001-70 du 29 janvier 2001 relative à la reconnaissance du génocide arménien, n'est pas, par elle-même, de nature à porter atteinte à ces principes ; que, d'autre part, l'objet même du programme d'histoire, tel que le fixe l'arrêté litigieux, est de faire enseigner aux élèves l'état des savoirs tel qu'il résulte de la recherche historique, laquelle repose sur une démarche critique, fondée sur la liberté de soumettre à débat toute connaissance ; que, par suite, la prescription d'un tel enseignement par l'arrêté attaqué est, en elle-même, insusceptible de porter atteinte aux libertés d'expression, de conscience et d'opinion des élèves, ou de méconnaître la neutralité du service public de l'éducation ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'association requérante n'est pas fondée à demander l'annulation du refus implicite opposé par la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche ; que ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent, dès lors, qu'être également rejetées ; […]

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