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353 Rev Mal Respir 2007 ; 24 : 353-7 Rev Mal Respir 2007 ; 24 : 353-7 © 2007 SPLF. Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Doi : 10.1019/20064228 Cas clinique Infections pulmonaires à Nocardia S. Couraud 1 , R. Houot 2 , M. Coudurier 1 , A.C. Ravel 1 , B. Coiffier 2 , P.J. Souquet 1 Résumé Introduction Les pneumopathies à Nocardia sont dues à des actinomycètes aérobies, filamenteux, semi-acido-alcoolo résis- tants et habituellement à coloration de Gram positive. Observation Nous rapportons ici deux cas de pneumopathies à Nocardia. Le premier cas est celui d’un homme de 62 ans aux antécédents d’autogreffe hématopoïétique et de traitement par fludarabine pour une hémopathie maligne. Lors d’un bilan de fiè- vre, il est mis en évidence une pneumopathie à N. farcinica sur prélèvement endobronchique. Le second cas concerne un homme de 61 ans, aux antécédents de corticothérapie au long cours et de chimiothérapie cytotoxique. Le bilan d’une pleurop- neumopathie permet de mettre en évidence sur une hémocul- ture et sur la ponction pleurale une infection disséminée à N. nova (cérébrale, pleurale, pulmonaire et splénique). Conclusion La nocardiose est une cause peu fréquente de pneumopathie touchant le plus souvent l’adulte immunodéprimé (corticothérapie, infection par le virus de l’immunodéficience humaine, transplantation, tumeur solide ou hématopoïétique). Des symptômes pleuropulmonaires associés à une altération de l’état général, des signes cutanés et neurologiques, doivent la faire suspecter. Le laboratoire de bactériologie doit être prévenu dès que possible de cette éventualité pour optimiser la recher- che du micro-organisme. Mots-clés : Bacteriemie • Pneumopathie • Épanchement pleural • Nocardiose • Nocardia. Réception version princeps à la Revue : 12.06.2006. 1 ère demande de réponse aux auteurs : 15.06.2006. Réception de la réponse des auteurs : 16.06.2006. 2 e demande de réponse aux auteurs : 04.10.2006. Réception de la réponse des auteurs : 23.11.2007. Acceptation définitive : 27.11.2007. 1 Service de pneumologie, Centre Hospitalier Lyon Sud, CHU Lyon, Pierre Bénite, France. 2 Service d’hématologie clinique, Centre Hospitalier Lyon Sud, CHU Lyon, Pierre Bénite, France. Correspondance : S. Couraud Service de pneumologie, Centre Hospitalier Lyon Sud, CHU Lyon, 69495 Pierre Bénite. [email protected]

Infections pulmonaires à Nocardia

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Rev Mal Respir 2007 ; 24 : 353-7

Rev Mal Respir 2007 ; 24 : 353-7 © 2007 SPLF. Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservésDoi : 10.1019/20064228

Cas clinique

Infections pulmonaires à Nocardia

S. Couraud1, R. Houot2, M. Coudurier1, A.C. Ravel1, B. Coiffier2, P.J. Souquet1

Résumé

Introduction Les pneumopathies à Nocardia sont dues à desactinomycètes aérobies, filamenteux, semi-acido-alcoolo résis-tants et habituellement à coloration de Gram positive.

Observation Nous rapportons ici deux cas de pneumopathies àNocardia. Le premier cas est celui d’un homme de 62 ans auxantécédents d’autogreffe hématopoïétique et de traitement parfludarabine pour une hémopathie maligne. Lors d’un bilan de fiè-vre, il est mis en évidence une pneumopathie à N. farcinica surprélèvement endobronchique. Le second cas concerne unhomme de 61 ans, aux antécédents de corticothérapie au longcours et de chimiothérapie cytotoxique. Le bilan d’une pleurop-neumopathie permet de mettre en évidence sur une hémocul-ture et sur la ponction pleurale une infection disséminée àN. nova (cérébrale, pleurale, pulmonaire et splénique).

Conclusion La nocardiose est une cause peu fréquente depneumopathie touchant le plus souvent l’adulte immunodéprimé(corticothérapie, infection par le virus de l’immunodéficiencehumaine, transplantation, tumeur solide ou hématopoïétique).Des symptômes pleuropulmonaires associés à une altération del’état général, des signes cutanés et neurologiques, doivent lafaire suspecter. Le laboratoire de bactériologie doit être prévenudès que possible de cette éventualité pour optimiser la recher-che du micro-organisme.

Mots-clés : Bacteriemie • Pneumopathie • Épanchement pleural • Nocardiose • Nocardia.

Réception version princeps à la Revue : 12.06.2006. 1ère demande de réponse aux auteurs : 15.06.2006. Réception de la réponse des auteurs : 16.06.2006. 2e demande de réponse aux auteurs : 04.10.2006. Réception de la réponse des auteurs : 23.11.2007. Acceptation définitive : 27.11.2007.

1 Service de pneumologie, Centre Hospitalier Lyon Sud, CHU Lyon, Pierre Bénite, France.

2 Service d’hématologie clinique, Centre Hospitalier Lyon Sud, CHU Lyon, Pierre Bénite, France.

Correspondance : S. Couraud Service de pneumologie, Centre Hospitalier Lyon Sud, CHU Lyon, 69495 Pierre Bé[email protected]

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[email protected]

Summary

Introduction Nocardial pneumonias are due to a genus of aero-bic, filamentous, partly acid-alcohol fast, mainly Gram positive,actinomycetes.

Case report We report here two cases of nocardial pneumonia.The first was a 62 year old man with a history of fludaribine treat-ment and bone marrow transplant for lymphocytic leukaemia.During the investigation of pyrexia evidence of N. farcinicainfection was found in the bronchial secretions. The secondcase was a man of 61 receiving long term corticosteroids andcytotoxic chemotherapy. Investigation of a pneumonia withpleural effusion found evidence, on culture of blood and pleuralfluid, of disseminated infection with N. nova (cerebral, pleural,pulmonary and splenic).

Conclusion Nocardiosis is a rare cause of pneumonia mainlyoccurring in immuno-compromised adults (corticosteroid the-rapy, HIV infection, transplantation, cancer or leukaemia). Itshould be suspected in the presence of pleuro-pulmonary symp-toms associated with neurological and cutaneous signs, generaldeterioration and weight loss. The microbiology laboratoryshould be advised of this eventuality as soon as possible in orderto optimise the search for the organism.

Key-words: Bacteriemie • Pneumonia • Pleural effusion • Nocardiosis • Nocardia.

Nocardial pulmonary infectionS. Couraud, R. Houot, M. Coudurier, A.C. Ravel, B. Coiffier, P.J. Souquet

Introduction

Le genre Nocardia, proposé en 1889, est en perpétuelleévolution [1, 2]. Ainsi, en 2005, au moins, deux nouvellesespèces (N. jejuensis [3] et N. ignorata [4]) ont été répertoriées.Les Nocardia, appartiennent aux actinomycètes aérobies[1, 5]. Ce sont des micro-organismes filamenteux de 0,5 à1,2 μm de diamètre, de forme bacillaire ou coccoïde, partielle-ment acido-alcoolo résistants (présence d’acide mycolique) ethabituellement à coloration de Gram positive. Selon l’observa-toire Français des nocardioses, 64 espèces sont répertoriéesdans le genre. On les trouve répartie de façon ubiquitaire (sol,eau, flore et air). Les espèces pathogènes sont dans 80 à 90 %des cas N. abscessus et N. cyriacigeorgica (anciennement asso-ciées sous le nom de N. asteroides type IV), N. farcinica,N. Nova et plus rarement N. brasiliensis et N. otidiscaviarum[1, 5, 6]. Il existe trois formes cliniques chez l’homme : cuta-née, pulmonaire et disséminée.

Observation n 1

Monsieur P., 62 ans, a pour antécédent principal un lymphome folliculaire.Il a bénéficié de plusieurs cures de chimiothérapie de 1999 à 2004 avec uneautogreffe hématopoïétique conditionnée par Cyclophosphamide – Etopo-side – Irradiation corporelle totale en 2001, et par fludarabine associé aucyclophosphamide en 2002. Ces traitements ont entraîné un syndrome myé-lodysplasique et une immunodépression sévère. Il est hospitalisé en mai 2005pour fièvre accompagnée de toux et d’altération de l’état général traînantdepuis plusieurs mois. L’examen clinique retrouve un syndrome de condensa-tion de la base gauche ainsi qu’une rhinorrhée purulente. Sur le plan biologi-que, il existe un syndrome inflammatoire (CRP à 166 mg/L, fibrinogénémieà 8,7 g/L). Le scanner thoracique et sinusien confirme la présence d’unemasse tissulaire hilaire gauche, partiellement nécrotique, englobant la bron-che lingulaire et les bronches segmentaires, ainsi qu’un aspect en verre dépoli,un comblement alvéolaire de la lingula, et trois nodules parenchymateux duchamp pulmonaire gauche. Les sinus maxillaires et ethmoïdaux apparaissentcomblés. Le lavage broncho-alvéolaire retrouve 1 000 UFC/mL Streptococcuspneumoniae et 10 000 UFC/mL bacille à coloration de Gram positive (BG+).Une antibiothérapie probabiliste est entreprise par l’association pipéracilline+ tazobactam (4 g × 4/jour), ofloxacine (200 mg × 2/j) et voriconazole(200 mg matin et soir) permettant d’obtenir une apyrexie à J + 6. Le BG+ estidentifié par séquençage comme N. farcinica. L’antibiothérapie est alorsmodifiée pour une association amoxicilline (1 g × 3/j pendant 2 semaines) etcotrimoxazole (800 mg de sulfaméthoxazole + 160 mg de triméthoprime× 2/j pendant 6 mois) et le patient quitte le service pour son domicile. Lorsd’une consultation de surveillance à 1 mois, on constate une très nette amé-lioration de l’état général et une disparition de la rhinorrhée. À 2 mois, lescanner de contrôle note une persistance de la condensation de la lingula. À 4mois, le patient reprend ses activités sportives, n’a plus aucune manifestationORL et l’auscultation de la base gauche est normale. Le diagnostic retenu estdonc celui d’infection à N. farcinica avec localisation pulmonaire et sinu-sienne probable.

Observation n 2

Monsieur C., 61 ans, est hospitalisé pour prise en charge d’une pleuropneu-mopathie fébrile. On retrouve dans ses antécédents un syndrome de Sweet(dermatose aiguë fébrile neutrophilique) corticodépendant à 50 mg/j depuis1 an et une leucémie myélomonocytaire chronique depuis 2 ans traitée parhydroxyurée puis par 6 cures de cytarabine. Lors d’une hospitalisation, il pré-sente un épisode d’hypoxie avec fièvre, des crépitants des deux bases et unsyndrome inflammatoire (Leucocytes à 55,49 109/L, CRP à 158 mg/L) dansun contexte d’altération de l’état général. On note par ailleurs un panaris du

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pouce droit et un abcès cutané fessier. Le scanner thoracique montre unépanchement pleural droit associé à une condensation alvéolaire des lobesinférieurs droit et gauche (fig. 1). Un traitement par double antibiothérapieprobabiliste par amoxicilline et acide clavulanique (1 g + 200 mg × 3/j) asso-ciés à la gentamicine (3 mg/kg/j) est instauré pendant 5 jours. Devant l’ineffi-cacité de celle-ci et la suspicion d’une porte d’entrée cutanée, le traitement estmodifié par oxacilline (1 g × 3/j) associée à la pristinamycine (1 g × 3/j).L’évolution est défavorable avec une persistance de la fièvre et des signes respi-ratoires et généraux. À J + 7, un tableau de confusion s’installe brutalement.Le scanner retrouve de multiples lésions intracérébrales « en cocarde », sus etsous tentorielles avec œdème important (fig. 2) ainsi qu’un aspect hétérogènedu pôle supérieur de la rate. Au même moment, un bacille à coloration deGram positive suspect de Nocardia est isolé dans le liquide pleural et sur unehémoculture périphérique. Une nouvelle antibiothérapie adaptée au germesuspecté est débutée par cotrimoxazole (800 mg de sulfaméthoxazole+ 160 mg de triméthoprime) deux fois par jour associé au céfotaxime (2 g/j) et àl’amikacine (15 mg/kg/j). L’évolution clinique est alors très rapidement favo-rable (apyrexie stable, régression des troubles neurologiques, sevrage en oxy-gène et amélioration de l’état général). Le germe est identifié par séquençagecomme N. nova. Le diagnostic retenu est donc celui d’infection disséminée àN. nova avec localisation pleuropulmonaire, cérébrale, splénique et cutanée.Un scanner de contrôle réalisé J + 15 montre la quasi-disparition des lésionscérébrales et une stabilisation thoracique. Malheureusement, le patient pré-sente une acutisation de son hémopathie et décède dans le service dans uncontexte de détresse respiratoire aiguë brutale à J + 22.

Discussion

Les infections à Nocardia restent sous-estimées car proba-blement sous-diagnostiquées. Si elles peuvent toucher l’adulteimmunocompétent [7, 8], les nocardioses restent des patholo-

gies de l’individu fragilisé sur le plan immunitaire et dont onconnaît les facteurs de risques. L’infection par le virus del’immunodéficience humaine (VIH) en est un, notamment encas de taux de CD4 inférieur à 100/mm3, même si la fré-quence des nocardioses y est faible (en partie grâce à la pro-phylaxie systématique de la pneumocystose [2, 6, 9]).L’administration au long cours de corticostéroïdes [2, 6, 9,10], comme dans notre cas n° 2, est également un facteur derisque important (14 cas sur 36 dans la série de Kontoyiannis[10]). Les patients transplantés, porteurs d’hémopathie mali-gne (cas n° 1) ou de tumeur solide ainsi que les toxicomanesintraveineux sont également des populations à risque. La con-tamination peut se faire de deux façons différentes : par voiecutanée et par inhalation. Il existe trois formes cliniques : cuta-née, pulmonaire et disséminée. La forme cutanée est liée àl’inoculation transcutanée suite à un traumatisme [2] ; elle estfréquente dans les pays tropicaux et les zones tempérées chau-des [1] et peut toucher le sujet immunocompétent [1, 11].Elle est responsable d’une infection des tissus cutanés et sous-cutanés, pouvant prendre plusieurs formes dont le classiquemycétome (nodule inflammatoire chronique sous cutanéd’aspect pseudo-tumoral). Elle peut ensuite s’étendre en pro-fondeur vers les fascias, les muscles et les os [2, 11]. L’infec-tion, reste, dans ce cas, habituellement localisée à proximité dupoint d’inoculation. Le mode de contamination le plus fré-

Fig. 1.

Tomodensitométrie thoracique de Monsieur C. (cas n° 2) du 30 octobre 2005.

Fig. 2.

Tomodensitométrie cérébrale de Monsieur C. (cas n° 2) du 7 novembre 2005.

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quent reste l’inhalation, responsable des formes pulmonaires.Le tableau clinique est celui d’une pneumopathie infectieuseaiguë ou subaiguë accompagnée d’une altération importantede l’état général [2]. L’aspect radiologique est aspécifique : onretrouve indifféremment syndromes alvéolaires plus ou moinssystématisés, infiltrats interstitiels ou réticulonodulaires voiredes aspects de miliaires ainsi que des nodules ou des masses(jusqu’à 80 % des cas), fréquemment excavés [2, 9, 10], asso-ciés à des adénopathies médiastinales. Ce caractère pseudo-tumoral peut parfois conduire à des errances diagnostiquesvoire à des prises en charge excessives [2]. Un épanchementpleural est souvent associé (15 à 25 % des cas [2, 9, 10]). Lacomplication principale de ce mode de contamination est lerisque de dissémination secondaire par voie hématogène, res-ponsable de nocardiose systémique, définie par l’atteinte d’aumoins deux organes [2]. Le site le plus fréquemment atteintdans ce cas est le cerveau, avec la constitution d’un ou de plu-sieurs abcès (cas n° 2), voire, plus rarement, de méningites [1,11]. Cette localisation, dont la fréquence varie de 2 à 25 % descas selon les séries [1, 2, 10], fait toute la gravité de cette formepuisque la mortalité atteint alors jusqu’à 66 % en cas de loca-lisations multiples [2]. Les autres sites de prédilection sont lapeau (cas n° 2) et les tissus sous cutanés, les os et les articula-tions, le rein, le cœur [10] et les yeux [2]. Les lésions spléni-ques, comme supposées pour notre cas n° 2 et sinusiennespour notre cas n° 1, semblent peu fréquentes. Les examens lesplus rentables pour la mise en évidence du germe sont assuré-ment les prélèvements endobronchiques, les biopsies de peau,les ponctions et biopsies des sites supposés (dont les ponctionspleurales) et les ponctions lombaires [2]. Le diagnostic estexclusivement bactériologique (pas de sérologie) et tout isole-ment de Nocardia sp. doit être considéré comme pathologi-que. L’isolement de la bactérie sur hémoculture, comme dansnotre cas n° 2, est rare [2, 10]. L’examen direct retrouve desfilaments bactériens avec des colonies en forme de « balle decoton » [1, 2]. Nocardia peut se développer sur les milieux deculture usuellement utilisés mais les colonies sont fréquem-ment masquées par les germes à croissance rapide et il est tou-jours indispensable de mentionner au laboratoire la suspicionde Nocardia [1, 6] et de proposer de recenser le cas auprès del’Observatoire Français des Nocardioses basé à Lyon. Unealternative est l’utilisation du milieu spécifique de Tayer-Martin [2, 6]. La plupart du temps leur croissance prend 3 à5 jours mais peut parfois durer plusieurs semaines [2, 6]. S’ilest possible, en théorie, de déterminer le genre Nocardia parl’étude de certaines caractéristiques (hyphes aériens, résistanceaux antibiotiques…), il n’en reste pas moins vrai que celui-cidevra être confirmé par la biologie moléculaire avec le séquen-çage de l’ARNr 16S qui permet le diagnostic de genre etd’espèce [1]. Le traitement repose sur une antibiothérapie sys-témique [1, 2, 6, 9, 10, 11] qui doit être adaptée à la gravité dutableau, aux localisations de la maladie mais aussi à l’espèce[2]. Les sulfamides, et notamment le cotrimoxazole, restent letraitement de référence [2, 6, 9, 10] ; dans la série de Kon-toyiannis et coll. (36 cas) la réponse au traitement par sulfami-

des est nettement meilleure que pour d’autres molécules(70 % vs 31 %) [10]. La dose servant à traiter 90 % des loca-lisations pleuropulmonaires à N. astéroïdes [2] est de 5 à10 mg/kg/j de triméthoprime et de 25 mg/kg/j de sulfa-methoxazole en deux à trois prises. Néanmoins d’autres molé-cules peuvent être utilisées, parmi lesquelles l’imipénèmeassociée à l’amikacine et les céphalosporines de troisième géné-ration en dehors des espèces habituellement résistantes(N. farcinica, N. otidiscaviarum, N. transvalensis). La minocy-cline (200 mg × 2/j) parait une alternative de plus en plus uti-lisée [6] de même que le linézolide [6] et enfin, laciprofloxacine peut s’avérer intéressante pour sa diffusion pul-monaire et cérébrale mais est inactive sur N. nova [6]. Ladurée de cette antibiothérapie est variable selon les auteursmais toujours prolongée : de 9 à 12 mois pour les abcès céré-braux à 3 à 12 mois pour les infections pulmonaires et des tis-sus mous [6]. Enfin, la chirurgie (drainage ou ablation) peutprendre une place non négligeable dans le traitement des abcèscérébraux ou des collections tissulaires [2, 6].

Conclusion

Même si la nocardiose reste une maladie rare, l’attentiondu clinicien devra être attirée devant une pneumopathiefébrile, fréquemment associée à un épanchement pleural, dansun contexte d’altération de l’état général, associée à des lésionscutanées, chez un sujet immunodéprimé. Un bilan devra êtreréalisé à la recherche de dissémination hématogène. La recher-che de Nocardia pourra être réalisée sur tout type de prélève-ment, mais il est nécessaire de préciser le germe suspecté aulaboratoire. Le traitement, entrepris dès que possible, devracomporter une antibiothérapie adaptée prolongée (cotrimoxa-zole le plus souvent) et pourra être associé, si besoin, à un trai-tement chirurgical.

Remerciements

Pr P. Boiron de l’observatoire Français des nocardioses(université Claude Bernard Lyon 1) pour sa collaboration à larédaction.

Références

1 Euzeby JP : Dictionnaire de bactériologie vétérinaire. www.bacte-rio.cict.fr/bacdico Mars 2004.

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9 Mootsikapun P, Intarapoka B, Liawnoraset W : Nocardiosis in Srina-garind Hospital, Thailand : review of 70 cases from 1996-2001. Int JInfect Dis 2005 ; 9 : 154-8.

10 Kontoyiannis PD, Ruoff K, Hooper DC : Nocardia bacteriemia :report of 4 cases and review of the literature. Medicine (Baltimore)1998 ; 77 : 255-67.

11 Montoya JP, Carpenter JL, Holmes GP, Hurley DL, Winn R : Dis-seminated Nocardia transvalensis infection with osteomyelitis andmultiple brain abcesses. Scan J Infect Dis 2003 ; 35 : 189-212.