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Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111 Année académique 2009-2010 J. BRICMONT Unité de Physique théorique & mathématique Chemin du Cyclotron 2, B-1348 LLN Bâtiment M. de Hemptinne (Cyclotron) B330

Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

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Introduction à la dynamique non linéaire

PHYS 2111Année académique 2009-2010

J. BRICMONTUnité de Physique théorique & mathématique

Chemin du Cyclotron 2, B-1348 LLNBâtiment M. de Hemptinne (Cyclotron) B330

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Table des matières

1. Notions de base sur les systèmes dynamiques2. Linéarisation – Le Théorème de la variété stable-instable3. Le théorème de Poincaré-Bendixson4. Exemples élémentaires de systèmes chaotiques5. Le Fer à cheval6. Éléments de théorie ergodique

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Références

1. Ouvrages du niveau maîtrises

[1] K.T. Alligood, T.D. Sauer, J.A. Yorke, Chaos, An Introduction to DynamicalSystems, Springer, Textbooks in Mathematical Sciences (1997).Un ouvrage très proche du plan suivi dans le cours. Excellent à la fois pour lesmathématiciens et les physiciens. J.A. Yorke est le premier auteur (en 1975) àavoir utilisé le terme “chaos" en théorie des systèmes dynamiques, dans le titred’un de ses articles. Ce nom, comme on le sait, a eu un succès extraordinaire. . .

[2] E.A. Coddington, N. Levinson, Theory of Ordinary Differential Equations,McGraw-Hill (1955).Classique de la théorie des équations différentielles ordinaires. Voir le chapitre16, pour le Théorème de Poincaré-Bendixson (en bibliothèque).

[3] R.L. Devaney, An Introduction to Chaotic Dynamical Systems (second edition),Addison-Wesley, The Advanced Book Program (1989).Excellent livre sur les systèmes dynamiques à temps discret. Surtout recom-mandé pour les mathématiciens (en bibliothèque).

[4] P.G. Drazin, Nonlinear Systems, Cambridge Texts in Applied Mathematics(1992).Une introduction à la théorie des bifurcations et du chaos. Le chapitre 8 contientun très bon exposé de la méthode de Melnikov (en bibliothèque).

[5] M. Hirsch, S. Smale, Differential Equations, Dynamical Systems and LinearAlgebra, Academic Press (1974).Introduction aux équations différentielles ordinaires. Voir chapitre 11, pour leThéorème de Poincaré-Bendixson (en bibliothèque).

[6] J. Mawhin, N. Rouche, Equations différentielles ordinaires, Tome 1 : Théoriegénérale, Masson et Cie (1973).Excellent ouvrage d’introduction aux équations différentielles ordinaires. Undes seuls en français (en bibliothèque).

[7] S.H. Strogatz, Nonlinear Dynamics and Chaos (with applications to Physics,Biology, Chemestry and Engineering), Addison-Wesley, Sudies in Nonlinearity(1994).Excellent ouvrage sur les systèmes dynamiques et le chaos. Voir le chapitre 10pour la fonction logistique et une introduction à la bifurcation de Feigenbaumet aux idées de la renormalisation (comparable à [1], mais plus faible du pointde vue de la ‘rigueur mathématique’).

[8] M. Tabor, Chaos and Integrability in Nonlinear Dynamics, An Introduction,John Wiley & Sons (1989).

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Un des rares ouvrages discutant la théorie des systèmes dynamiques à la fois dupoint de vue de l’intégrabilité et du chaos. Le chapitre 6 traite d’applications àla mécanique quantique et le chapitre 7 constitue une bonne introduction à lathéorie des solitons (en bibliothèque).

2. Ouvrages plus avancés.

[9] J. Moser, Stable and Random Motions in Dynamical Systems, Princeton Uni-versity Press (1973).Ouvrage de référence pour les aspects du chaos qui touchent au problème des3 corps, à la mécanique céleste et à la théorie des perturbations des systèmesintégrables (problème des petits diviseurs et théorème de Kolmogorov-Arnold-Moser). Contient aussi une discussion du fer à cheval de Smale en relation avecles points homoclines et le théorème de Birkhoff-Smale (en bibliothèque).

[10] S. Wiggins, Intoduction to Applied Nonlinear Dynamical Systems and Chaos,Springer, Texts in Applied Mathematics 2 (1990).Ouvrage de troisième cycle sur les systèmes dynamiques. Voir chapitre 1 pour leThéorème de Poincaré-Bendixon et chapitre 4 pour le fer à cheval de Smale, lespoints homoclines, la formule de Melnikov et une preuve détaillée du théorèmede Birkhoff-Smale (en bibliothèque).

[11] P. Collet, J-P. Eckmann, Iterated Maps of the Interval as Dynamical Systems,Birkhaüser (1980).

[12] P. Walters, An Introduction to Ergodic Theory, Springer (1982).

[13] I.P. Cornfeld, S.V. Foman, Ya-G. Sinai, Ergodic Theory, Springer (1982).

3. Ouvrages de vulgarisation écrits par des scientifiques.

[14] P. Bergé, Y. Pomeau, M. Dubois-Gance, Des rythmes au chaos, Editions OdileJacob, coll. Opus (nouvelle édition 1997).Ouvrage écrit par un physicien théoricien et deux physiciens expérimentateurs.

[15] F. Diacu, P. Holmes, Celestial Encounters, The Origins of Chaos and Stability,Princeton University Press (1996).Ouvrage écrit par deux mathématiciens. Un vaste panorama de la théorie dessystèmes dynamiques, en prenant comme point de départ le célèbre mémoirede H. Poincaré sur le problème des 3 corps. A la fois intéressant du point devue scientifique et historique (en bibilothèque)

[16] I. Ekeland, Le Calcul, l’Imprévu, Ed. du Seuil (1984).Ouvrage écrit par un mathématicien.

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[17] J. Barrow-Green, Poincaré and the Three Body Problem, Amer. Math. Soc.,History of Mathematics, Vol. 11 (1996).Ouvrage d’Histoire des Sciences, écrit par un mathématicien. Analyse détailléedu célèbre mémoire de H. Poincaré sur le problème des 3 corps et de l’erreurcommise dans la première version couronnée par le prix du roi Oscar II (enbibliothèque).

[18] E. N. Lorenz, The essence of chaos, UCL Press (1993).Ouvrage écrit par un météorologue. L’inventeur du célèbre système de Lorenzet de “l’effet papillon".

[19] B. Mandelbrot, Les Objets Fractals , Flammarion (3ème édition 1989).Ouvrage écrit par un mathématicien (l’inventeur des Fractals).

[20] D. Ruelle, Hasard et Chaos, Editions Odile Jacob (1991).Ouvrage écrit par un physicien théoricien, a proposé une ‘théorie’ de la turbu-lence basée sur la notion d’attracteur étrange.

[21] Chaos et Déterminisme (Collections d’articles). Points Sciences, Ed. du Seuil(1992).(articles de mathématiciens et de physiciens).

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I NOTIONS DE BASE SUR LES SYSTÈMES DY-NAMIQUES

Un système dynamique consiste en un ensemble d’états possibles, avec uneloi qui détermine de façon unique l’état présent du système en fonction de ses étatspassés. Aucun élément aléatoire n’est admis dans notre définition d’un systèmedynamique déterministe. Par exemple, un modèle possible pour déterminer le prixde l’or en fonction du temps serait de dire que le prix du jour est celui de la veille plusou moins un dollar, avec les deux possibilités équiprobables. Au lieu d’être appelésystème dynamique, un tel modèle est souvent appelé un processus aléatoire oustochastique. Une réalisation typique d’un tel modèle pourrait être de jouer à pileou face chaque jour pour déterminer le nouveau prix. Ce type de modèle n’est pasdéterministe, et est rejeté de notre définition de système dynamique.

Dans ce cours, nous considérerons deux types de systèmes dynamiques. Sila loi est appliquée à des temps discrets, nous parlerons de système dynamique àtemps discret. Un exemple est fourni par un modèle de la croissance d’une popu-lation animale. On sait que si quelques animaux (des deux sexes !) sont mis dans unvaste espace réunissant toutes les conditions favorables à leur vie, en moyenne leurnombre croît. Pour évaluer cette croissance, point n’est besoin de dénombrer con-tinûment le cheptel. En effet, des naissances interviennent au printemps, des mortsen hiver. Il est donc préférable de n’effectuer le dénombrement qu’“à temps discret",par exemple tous les ans à une date fixe. L’expérience montre qu’au début, les ani-maux étant peu nombreux, chaque année qui passe voit leur population multipliéepar un certain nombre C. Exprimée sous forme algébrique, cette loi de croissances’écrit

Pn+1 = CPn, (1.1)

où l’indice n indique le numéro d’ordre de l’année. Le nombre C peut être de l’ordrede 2 ou 3 pour les mammifères de taille moyenne ; il est considérablement plusélevé pour de petits animaux comme les souris ou les lapins ! L’équation ci-dessus‘s’intègre’ facilement :

Pn = Cn P0, (1.2)

où P0 désigne la population initiale. On a donc une croissance exponentielle. Onpeut aussi visualiser ce résultat graphiquement. Ce type de visualisation nous seratrès utile dans la suite :

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Chapitre 1 — Notions de base sur les systèmes dynamiques

Un tel modèle d’évolution des populations n’est réaliste que pour des petitsnombres d’individus. Même avec un taux de croissance C=3 par exemple, si l’onpart de dix individus ils seront trente l’année suivante, nonante au bout de deuxans et, au bout de dix ans, ils seraient près de soixante mille ! L’espace, doncla nourriture, venant à manquer pour les grands nombres, une saturation, voireune décroissance, ne manquent pas d’intervenir. Le mathématicien Pierre-FrançoisVerhulst (1804–1849) a proposé déjà au siècle passé un modèle plus réaliste, ensuggérant que le taux de croissance d’une population ne serait pas constant maisdépendrait de l’importance de cette population. Plus précisément, il estimait que letaux de croissance devait être proportionnel à l’écart, à la valeur maximale, que lapopulation pouvait atteindre. Donc C n’est plus constant mais doit s’écrire :

C = K(L− Pn) ,

où L représente la population maximale. La loi de croissance s’écrit alors :

Pn+1 = KPn(L− Pn). (1.3)

Il est commode, pour le calcul, de faire apparaître une “population réduite" x = P/L,de sorte que l’on a :

xn+1 = axn(1− xn). (1.4)

x, population réduite, varie entre 0 et 1 et a doit être choisi entre 0 et 4. Verhulst aappelé cette formule “fonction logistique", et ce nom lui est resté jusqu’à nos jours.Elle sert de modèle universellement utilisé pour l’étude des systèmes dynamiques.Notez que contrairement à (1.1), (1.3) est une loi non linéaire (et non monotone).Cette formule, très en avance sur son époque, est assez vite tombée dans l’oubli–ainsi que son auteur– pendant près d’un siècle. Des démographes américains l’ontredécouverte au début de ce siècle, mais il a fallu attendre les années soixante pourqu’elle apparaisse comme un modèle de portée universelle. Comme nous auronsl’occasion de le voir à plusieurs reprises dans ce cours, il s’agit d’un des exemples de

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systèmes dynamiques les plus extraordinaires que l’on puisse rencontrer en dimension1.

L’autre type très important de systèmes dynamiques que nous étudierons estessentiellement la limite de systèmes discrets, où l’évaluation se fait à des intervallesde temps de plus en plus brefs. Dans ce cas, la loi devient une équation différentielleet l’on parle alors souvent de système dynamique à temps continu. À titred’exemple, l’équation

P ≡ dP

dt= CP, (1.5)

peut être vue comme une limite continue de l’équation (1.1). Pour C > 0, elledécrit aussi un modèle simple de croissance d’une population, quand la populationest petite. La solution est bien connue :

P (t) = P0 eCt, (1.6)

où P0 = P (0) désigne la population initiale. Un autre exemple de système dy-namique continu est fourni par l’équation différentielle logistique

P = KP (L− P ), (1.7)

qui peut être vue comme une version continue de l’équation (1.3). En fait, on peutrésoudre facilement cette équation différentielle (faites-le) :

P (t) =LP0 e

LKt

L− P0 + P0 eLKt. (1.8)

Utilisant cette formule, on voit facilement que ce modèle prédit la croissance oula décroissance de la population initiale vers l’équilibre L. Comme nous le ver-rons, contrairement à son modèle continu, la fonction logistique peut modéliser descomportements ‘beaucoup plus compliqués’. Ceci illustre un phénomène que nousrencontrerons plusieurs fois dans le cours : à dimensions égales (dans ce cas 1), unsystème dynamique discret est souvent beaucoup plus compliqué que son analoguecontinu.

1. Équations différentielles ordinaires

Soitf : Ω→ Rn , x→ f(x)

une application de classe Ck , k ≥ 1, d’un ouvert Ω ⊆ Rn dans Rn. Nous écrirons

x = (x1, x2, . . . , xn), f = (f1, f2, . . . , fn).

On appelle équation différentielle vectorielle autonome du premier ordre uneéquation du type

x = f(x), (1.9)

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Chapitre 1 — Notions de base sur les systèmes dynamiques

ce qui est une écriture abrégée pour le système d’équations différentielles ordinairesdu premier ordre

x1 = f1(x1, . . . , xn)...

xn = fn(x1, . . . , xn).

Le qualificatif autonome se rapporte au fait que le second membre dans l’équation(1.9) ne dépend pas explicitement du temps. Nous reviendrons ultérieurement dansle cours sur le cas d’un système non autonome.

On appelle solution de l’équation (1.9) toute application dérivable x : I → Rn,définie sur un intervalle non vide I ⊆ R et telle que, pour tout t ∈ I

x(t) ∈ Ω et x(t) = f(x(t)).

Nous rappelons le théorème d’existence et d’unicité qui assure que le système(1.9) est bien un système dynamique (à temps continu) au sens défini précédemment.Pour la démonstration, voir par exemple [6, chapitre 4, p.79].

Théorème 1.1 (Existence et Unicité).

Supposons que f soit de classe C1 sur Ω. Alors, pour tout nombre réel t0 et toutvecteur x0 ∈ Ω, il existe un intervalle ouvert I contenant t0, sur lequel il existe unesolution de l’équation (1.9) qui satisfait à la condition initiale x(t0) = x0 et cettesolution est unique.

Le problème de trouver une solution de l’équation (1.9) satisfaisant à la conditioninitiale x(t0) = x0, est appelé problème de Cauchy. L’ensemble (t, x(t))|t ∈ Is’appelle une trajectoire du système dynamique. L’ensemble x(t)|t ∈ I s’appelleune orbite du système dynamique. L’ouvert Ω est parfois appelé l’espace de phase,par analogie avec l’exemple d’un système hamiltonien. L’espace R × Ω est alorsappelé l’espace de phase élargi. En fait, le théorème d’existence et d’unicité estencore vrai sous des hypothèses un peu plus faibles que celles énoncées dans lethéorème. Il suffit que f soit localement lipschitzienne sur Ω.

Définitions : (i) On dit que f est lipschitzienne sur Ω, si il existe une constante Ltelle que

‖f(x)− f(y)‖ ≤ L‖x− y‖, (1.10)

pour tout x, y dans Ω. La constante L est appelée une constante de Lipschitz pourf .

(ii) On dit que f est localement lipschitzienne sur Ω, si tout point de Ω possèdeun voisinage ouvert inclus dans Ω sur lequel f est lipschitzienne.

Exercice : Montrez qu’une fonction de classe C1 sur un ouvert Ω de Rn est localement

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lipschitzienne.

Corollaire 1.2 Les orbites d’une équation différentielle vectorielle autonome nes’intersectent jamais. En particulier, une même orbite ne peut se recouper.

Démonstration. Cela résulte de l’observation que, pour un système autonome, six(t) est une solution, alors pour tout s fixé ∈ R, la fonction

y(t) = x(t+ s)

est encore une solution du système. Donc, si x1(t) et x2(t) sont deux solutionstelles que x1(t1) = x2(t2), par unicité de la solution du problème de Cauchy, on anécessairement

x1(t+ t1) = x2(t+ t2),

et donc les deux solutions coïncident.

Interprétation géométrique. On pense souvent à un système dynamique du type(1.9) comme à la donnée d’un champ de vecteurs sur l’ouvert Ω de Rn. Pour ce faire,on attache à chaque point x de Ω, le vecteur f(x). Trouver la solution du problèmede Cauchy telle que x(t0) = x0, revient à trouver une courbe x(t) qui en t = t0 passepar x0 et telle que à chaque instant la tangente à cette courbe au point x(t) coïncideavec le champ de vecteurs évalué en ce point.

Flot. On note

φt(x) := l’unique solution du système x = f(x) qui passe par x en t = 0. (1.11)

L’application (à temps t fixé) x → φt(x) s’appelle le flot du système dynamique(1.9), par analogie avec l’image d’un fluide.

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Chapitre 1 — Notions de base sur les systèmes dynamiques

Proposition 1.3 ∀x ∈ Ω, ∀t, s ∈ R, on a

φt(φs(x)) = φt+s(x), (1.12)

pour autant que t et s soient suffisamment petits pour que les deux membres del’égalité soient définis.

Démonstration. Fixons s ∈ R. Puisque l’équation (1.9) est autonome, φt+s(x) estune solution de (1.9) qui en t = 0 passe par φs(x). Par définition du flot, φt(φs(x))est aussi une solution de l’équation (1.9) qui passe par φs(x) en t = 0. Donc, envertu de l’unicité de la solution du problème de Cauchy, on doit avoir (1.12).

Il découle immédiatement de cette proposition que

φt (φ−t(x)) = φ0(x) = x.

Aussi, ∀t0 ∈ R, la solution du problème de Cauchy

x = f(x), x(t0) = x0,

est donnée par φt−t0(x0), c’est-à-dire que la trajectoire de cette solution dans R×Ωest obtenu en translatant la trajectoire de la solution qui passe par x0 en t = 0.

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Champ de vecteurs (a) et trajectoires (b) dans l’espace de phase élargi R× Ω

L’utilité d’un modèle pour donner une information sur un processus dynamiquedépend du fait que la solution du problème aux valeurs initiales ne dépend pastrop de la condition initiale, du moins à des échelles de temps ‘petites’. En parti-culier, pour une équation différentielle fixée et deux conditions initiales différentes,on voudrait que, au plus les conditions initiales sont proches, au plus les solutionsrestent proches, pour des petites valeurs de t. C’est ce que l’on appelle la dépen-dance continue par rapport aux conditions initiales. Pour de grandes valeurs de t,on ne peut espérer que les solutions restent nécessairement proches. La sensibilitépour des grandes valeurs de t est appelée la sensibilité par rapport aux conditionsinitiales. Nous en reparlerons plus tard. En général, on a le résultat suivant (voirpar exemple [6, chapitre 5, p.111]) :

Théorème 1.4 Dépendance continue par rapport aux conditions initiales.Supposons que f : Ω ⊆ Rn → Rn soit lipschitzienne sur Ω et soit L une constantede Lipschitz. Soient x(t) et y(t) deux solutions de (1.9), et soit [t0, t1] un intervallesur lequel les deux solutions sont définies. Alors,

‖x(t)− y(t)‖ ≤ ‖x(t0)− y(t0)‖eL(t−t0), (1.13)

pour tout t ∈ [t0, t1].

Les équations d’ordre supérieur peuvent toujours se ramener à un système dupremier ordre. Illustrons ceci sur l’exemple de l’équation scalaire (x ∈ R)

x(n) = f(x, x, x, . . . , x(n−1)), (1.14)

où x(n) désigne la nième dérivée de la fonction x(t) par rapport à t. Définissons lesnouvelles variables

x1 = x, x2 = x, x3 = x, . . . , xn = x(n−1).

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Chapitre 1 — Notions de base sur les systèmes dynamiques

Ces nouvelles variables satisfont le système autonome du premier ordre

x1 = x2, x2 = x3, . . . , xn−1 = xn,

(1.15)

xn = f(x1, x2, . . . , xn),

qui a la forme (1.9).

Voici deux exemples très simples qui nous font comprendre la portée du Théorème1.1. sur l’existence et l’unicité des solutions.

Exemple 1. Soit le problème de Cauchy

x = x2 , x(t0) = x0. (1.16)

Nous résolvons cette équation par séparation des variables. Tant que x(t) 6= 0, on a

(1/x2)dx

dt= 1.

En intégrant du temps t0 au temps t, on obtient :

∫ t

t0

(1/x2)dx

dtdt =

∫ t

t0

dt = t− t0.

En faisant le changement de variables x = x(t), on a

t− t0 =

∫ x(t)

x(t0)

dx

x2= − 1

x(t)+

1

x(t0).

En résolvant pour x(t), on trouve

x(t) =1

1/x0 + t0 − t=

x0

1 + x0(t0 − t). (1.17)

Remarquons que si x(t) = 0, pour un certain t, alors nécessairement x(t) ≡ 0 pourtout t. Cela résulte du fait que x(t) = 0, pour tout t, est une solution et de l’unicitéde la solution du problème de Cauchy. Donc on a trois possibilités. Si x0 = 0, lasolution est identiquement nulle et définie sur l’intervalle ]−∞,+∞[. Si x0 > 0, lasolution est définie par (1.17) sur l’intervalle ]−∞, t0 +1/x0[. Finalement, si x0 < 0,la solution est définie sur l’intervalle ]t0 +1/x0,+∞[. Cet exemple illustre le fait quele Théorème 1.1 ne garantit l’existence de la solution que sur un intervalle de temps‘suffisamment petit’ autour de t0. La solution du problème de Cauchy peut exploseren un temps fini.

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Exemple 2. Soit maintenant l’équation

x = x2/3.

Son second membre est bien défini et continu pour tout x ∈ R, mais il ne possèdepas de dérivée en x = 0. En fait la fonction f(x) = x2/3 n’est pas localementlipschitzienne sur R. En effet, si c’était le cas, il existerait un voisinage U de 0 etune constante L tels que

|x2/3| ≤ L|x| , sur U.

Mais alors L ≥ |x−1/3|, relation fausse pour x suffisamment petit. Nous serons doncassurés d’avoir l’existence et l’unicité des solutions seulement si nous choisissons unouvert Ω sur lequel f est localement lipschitzienne. Par exemple, on peut prendreΩ =]0,+∞[. Dans ce cas la solution issue de x0 au temps t0 s’écrit

x(t) = (x1/30 + (t− t0)/3)3.

Elle est définie sur l’intervalle maximal ]t0 − 3x1/30 ,+∞[. On peut évidemment

raisonner de même pour Ω =] − ∞, 0[, ce qui fournit des solutions définies surl’intervalle maximal ]−∞, t0 − 3x

1/30 [. On peut aussi, dans cet exemple, considérer

Ω =]−∞,+∞[, mais comme les conditions du Théorème 1.1 d’existence et d’uniciténe sont pas vérifiées sur Ω, on s’attendra à trouver en défaut soit l’existence, soitl’unicité des solutions, soit les deux. En fait x(t) ≡ 0, pour tout t, est trivialementune solution de l’équation et donc le problème de Cauchy possède toujours au moinsune solution. C’est d’ailleurs un théorème que la continuité du second membre surΩ suffit pour assurer l’existence d’une solution du problème de Cauchy (voir parexemple [2]). Mais cet exemple montre que la continuité ne suffit pas à assurerl’unicité des solutions. En effet, par un point quelconque de l’axe des t, passent uneinfinité de trajectoires maximales constituées chacune d’un segment de l’axe des tde longueur arbitraire, prolongé à son extrémité droite par une courbe en forme de“demi-parabole" montante et prolongé de manière analogue, mais vers le bas, à sonextrémité gauche.

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Chapitre 1 — Notions de base sur les systèmes dynamiques

2. Équations différentielles autonomes sur la droite

Soit une équation différentielle ordinaire autonome sur la droite (on dit aussiéquation scalaire)

x = f(x) , x ∈ R , f de classe Ck , k ≥ 1. (1.18)

Un point p tel que f(p) = 0 est appelé un équilibre. Par unicité de la solution duproblème de Cauchy, toute solution qui débute en p reste indéfiniment égale à p.Donc si x(t) est une solution telle que x(t0) = x0 n’est pas un équilibre, f(x(t)) 6= 0pour tout t dans l’intervalle maximal de définition de la solution. Analytiquement,le calcul d’une telle solution se ramène donc au calcul d’une intégrale

t− t0 =

∫ x(t)

x0

dx

f(x),

ce qui peut être compliqué . . . Géométriquement, on voit de suite que toutes lesorbites s’approchent d’un équilibre (quand t tend vers plus ou moins l’infini) oudivergent vers l’infini (en un temps fini ou infini).

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Donc, toute solution d’une équation différentielle autonome scalaire est mono-tone. Un tel système ne conduit jamais à des mouvements oscillatoires. De plus, sila solution est bornée pour tout t ≥ 0 (resp. t ≤ 0), elle tend nécessairement vers unéquilibre quand t→ +∞ (resp. t→ −∞). Par exemple, dans le cas de l’équationdifférentielle logistique (1.7), on a le graphe suivant pour f (P ) :

qui montre que la solution correspondant à P (0) = P0, avec P0 > 0, approche Lquand t → +∞. Donc la population s’approche de façon monotone de sa capacitélimite. On peut dessiner facilement l’allure qualitative des trajectoires des solutions.Par exemple, si P0 < L/2, le point dans l’espace des phases bouge de plus en plusvite jusqu’à ce qu’il traverse P = L/2, où la parabole atteint son maximum. Puis lavitesse du point diminue en s’approchant de P = L. Cela signifie que la populations’accroît d’abord de façon accélérée et que la concavité du graphe de P (t) est tournéevers le haut. Puis, après P = L/2, la dérivée dP/dt commence à décroître et doncla concavité de P (t) est tournée vers le bas en se rapprochant asymptotiquementde P = L. Si P0 est entre L/2 et L, les solutions décélèrent dès le début. Doncces solutions ont une concavité tournée vers le bas pour tout t. Si la populationinitiale dépasse la capacité limite L(P0 > L), alors P (t) décroît vers P = L et saconcavité est tournée vers le haut. Finalement si P0 = 0 ou P0 = L, la populationreste constante. Clairement P0 = 0 est un équilibre instable, tandis que P0 = L estun équilibre stable.

La discussion précédente est qualitative. Nous allons maintenant décrire plusprécisément comment se fait l’approche vers l’équilibre. Pour cela, nous introduisonsles

Définitions. Soit p un équilibre du système x = f(x), x ∈ R.

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Chapitre 1 — Notions de base sur les systèmes dynamiques

(i) On dit que l’équilibre p est hyperbolique si f ′(p) 6= 0.

(ii) Le systèmeξ = f ′(p)ξ, (1.19)

s’appelle le système linéarisé autour de l’équilibre p.Si l’on introduit

ξ = x− p,l’écart à la position d’équilibre, on a :

ξ = f ′(p)ξ + o(ξ),

et l’on s’attend donc intuitivement à ce que le système linéarisé (1.19) soit une‘bonne approximation’ du système (1.18) au voisinage de p. Ceci est vrai dans lecas d’un équilibre hyperbolique comme le montre le théorème suivant :

Théorème 1.5 Soit p un équilibre hyperbolique de l’équation x = f(x), x ∈ R.

(i) Si f ′(p) < 0, ∃δ > 0 tel que ∀x satisfaisant |x− p| < δ, on a

limt→+∞

φt(x) = p.

Dans ce cas on dit que p est un équilibre attractif ou un attracteur.

(ii) Si f ′(p) > 0, ∃δ > 0 tel que ∀x satisfaisant |x−p| < δ, à l’exception de x = p,∃t > 0 tel que |φt(x) − p| ≥ δ. Dans ce cas on dit que p est un équilibrerépulsif ou une source.

Démonstration. Par définition de la dérivée et puisque f(p) = 0, on a :

(∀ε > 0)(∃δ > 0)(|x− p| < δ, x 6= p⇒ f ′(p)− ε < f(x)

x− p < f ′(p) + ε). (1.20)

Supposons que f ′(p) < 0. Choisissons ε > 0 tel que f ′(p)+ε < 0 et soit δ > 0 commeen (1.20) correspondant à cet ε. Soit x tel que |x − p| < δ. Alors, nécessairement,|φt(x)− p| < δ, ∀t ≥ 0 (justifiez !), et donc

d

dtlog |φt(x)− p| = f(φt(x))

φt(x)− p < f ′(p) + ε , ∀t ≥ 0.

En intégrant de 0 à t cette inégalité, on obtient :

log|φt(x)− p||x− p| < (f ′(p) + ε) t , ∀t ≥ 0,

d’où|φt(x)− p| < |x− p|et(f ′(p)+ε) , ∀t ≥ 0. (1.21)

18

Page 19: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

En passant à la limite pour t→ +∞, puisque f ′(p) + ε < 0, on obtient (i).

Pour établir (ii), nous choisissons ε > 0 tel que f ′(p)− ε > 0 et prenons le δ > 0correspondant donné par (1.20). Supposons qu’il existe un x ∈]p − δ, p + δ[ pourlequel l’énoncé (ii) ne soit pas vérifié, ce qui veut dire que |φt(x) − p| < δ, ∀t ≥ 0.On montre alors comme précédemment que

d

dtlog |φt(x)− p| > f ′(p)− ε , ∀t ≥ 0,

d’où l’on déduit que

|φt(x)− p| > |x− p|et(f ′(p)−ε) , ∀t ≥ 0. (1.22)

Mais alors, puisque f ′(p)− ε > 0, nécessairement, pour t suffisamment grand, φt(x)doit sortir de l’intervalle ]p− δ, p+ δ[, ce qui est la contradiction recherchée.

Que peut-on dire de la stabilité d’un équilibre quand f ′(p) = 0 ? Rien en général.Considérons les exemples suivants :

(a) x = −x3 , (b) x = x3 ,

(c) x = x2 , (d) x = 0.

Dans chaque cas f ′(0) = 0 et la stabilité est différente, comme le montre la figureci-dessous. Dans le cas (a) l’équilibre est stable, dans le cas (b) il est instable. Lecas (c) est un cas hybride que nous appellerons semi-stable. Finalement, dans le cas(d), on a toute une droite de points fixes ; une perturbation par rapport à l’équilibrep = 0 ne s’en éloigne et ne s’en rapproche pas.

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Page 20: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 1 — Notions de base sur les systèmes dynamiques

La notion d’équilibre hyperbolique peut se définir pour une équation différentiellevectorielle autonome, nous y reviendrons au chapitre 2.

3. Itérations

Soit M un sous ensemble de Rm et f une fonction f : M → M . Une équationaux différences, aussi appelée équation aux récurrences ou itération, est une équationde la forme

xn+1 = f(xn) , n = 0, 1, 2, . . . , (1.23)

où xn ∈ M . On pense à la variable n comme à l’équivalent du temps t dans leséquations différentielles ordinaires. Comme f ne dépend pas explicitement de n, onparlera d’équation aux différences autonome.

Pour tout x ∈M , on appelle orbite (positive) de x l’ensemble

O+(x) = x, f(x), f(

f(x))

, . . . , fn(x), . . .,

où fn = f f . . .f , c’est-à-dire f composée n fois avec elle-même ; x est l’analoguede la condition initiale pour les équations différentielles. La notation fn ne signifiepas la fonction f(x) élevée à la puissance n, une fonction que nous n’utiliseronsjamais ; elle ne signifie pas non plus la nième dérivée de f , que nous notons f (n)(x).Si f est bijective, on peut définir l’orbite complète de x

O(x) = fn(x), n ∈ Z,

ainsi que l’orbite (négative) de x, O−(x) = f−1(x), f−2(x), . . .. Un des objectifsest de comprendre le comportement des itérés de f pour des grandes valeurs de n,tout comme dans le cas des équations différentielles où l’on essaie de comprendre lecomportement des solutions quand t→∞. On appelle cela étudier le comportementasymptotique des solutions.

Une itération peut apparaître lorsque l’on fait une approximation aux différencesfinies d’une équation différentielle, ou une équation différentielle peut apparaîtrecomme la limite continue d’un processus discret. Par exemple, si P (t) satisfaitl’équation logistique (1.7), nous définissons Pn = P (n h), n = 0, 1, . . ., pour un choixsuffisamment petit de h, et nous approximons la dérivée

dP

dt|t = nh ≈ Pn+1 − Pn

h,

ce qui conduit à l’équation

Pn+1 = Pn

(

(1 + hKL)− hKPn

)

.

20

Page 21: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

Si l’on pose Pn = (L + 1/hK)xn, on voit que xn satisfait l’équation (1.4) de lafonction logistique, avec

a = 1 + hKL. (1.24)

Un autre exemple bien connu d’itération est fourni par la méthode de Newtonpour trouver les racines d’un polynôme ou plus généralement les zéros d’une fonctiondérivable f(x) d’une variable. On part d’un réel x0 et l’on considère la récurrence

xn+1 = xn −f(xn)

f ′(xn).

Pour la plupart des choix de la condition initiale x0, il est bien connu que la suite x0,x1, x2, . . . converge vers une racine de f . Mais la méthode de Newton ne convergepas toujours. Par exemple, il peut arriver que l’itération converge vers un cycle depériode > 1.

On voit déjà sur cet exemple que, contrairement au cas d’une équation différen-tielle scalaire, une itération en dimension 1 peut avoir des solutions oscillatoires.

Les équations différentielles peuvent encore déterminer des itérations autrement.Par exemple, soit une équation vectorielle autonome dans R3 ,

x = f(x),x = (x, y, z).

Prenons alors un point xn = (xn, yn, 0) dans un domaine D du plan d’équation z = 0(voir dessin ci-dessous), et définissons un autre point xn+1 dans ce plan comme suit.On résout l’équation différentielle avec la condition initiale x (0) = xn. Soit t lepremier instant t > 0, pour lequel l’orbite x(t) recoupe le domaine D et notonsxn+1 = x(t). Bien sûr il se peut que l’orbite ne recoupe jamais le domaine D et dansce cas l’itération n’est pas définie. Mais, dans certains cas, cette application est biendéfinie, on l’appelle l’application de Poincaré ou l’application de premier retour duplan z = 0. On peut étudier de même des applications de Poincaré correspondantà des surfaces non planes dans R3, ou faire une construction similaire pour dessystèmes à plus de 3 variables.

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Chapitre 1 — Notions de base sur les systèmes dynamiques

4. Itérations en dimension 1

Puisque la fonction logistique fa(x) = ax(1 − x) peut être vue comme unediscrétisation de l’équation logistique, on s’attend à ce que pour des petites valeursdu pas de discrétisation h, l’itération se comporte comme son analogue continu, c’est-à-dire que les orbites tendent vers un équilibre. En vertu de (1.24) cela correspondà des valeurs de a légèrement supérieures à 1.Les considérations qui suivent sont purement descriptives et de nature expérimentale.Vous pouvez vous-même, à l’aide d’un ordinateur ou d’une calculatrice, faire vospropres expériences et calculer de nombreux exemples pour différentes valeurs dea. Il y a derrière tout ceci une théorie mathématique très profonde dont nousreparlerons plus tard dans le cours.

Si 1 < a < 3, on voit qu’après une période de croissance les itérés successifsconvergent vers un état d’équilibre p. La population finit par se stabiliser et, chaqueannée à la même époque, nous retrouvons le même nombre d’individus. Par exemple,les 50 premiers itérés de l’application f(x) = 2,8 x(1− x) à partir de x0 = 0.3 sontdonnés par

0.588, 0.67832, 0.61097, 0.66552, 0.62329, 0.65744, 0.6306, 0.65225, 0.6351, 0.64889,0.63793, 0.64673, 0.63971, 0.64534, 0.64085, 0.64445, 0.64157, 0.64388, 0.64204,0.64351, 0.64233, 0.64328, 0.64252, 0.64313, 0.64264, 0.64303, 0.64272, 0.64297,0.64277, 0.64293, 0.6428, 0.6429, 0.64282, 0.64289, 0.64283, 0.64288, 0.64284, 0.64287,0.64285, 0.64286, 0.64285, 0.64286, 0.64285, 0.64286, 0.64285, 0.64286, 0.64286,0.64286, 0.64286, 0.64286,. . .

et donc l’itération converge vers 0.64286. On peut répéter cela à partir de conditions

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PHYS2111

initiales différentes et l’on voit que l’on arrive toujours au même résultat. Cela secomprend facilement si l’on représente graphiquement l’itération

À l’exception de x0 = 0 et x0 = 1, toutes les conditions initiales conduisent à p= 9/14 = 0.64286, . . . , qui correspond à l’intersection de la parabole avec la droitey = x.

À partir de a = 3, nous découvrons un changement important de comportement.Calculons par exemple les premières itérations de f(x) = 3.3 x(1 − x), à partir detrois conditions initiales x0 différentes:

x0 = 0.2000, 0.5280, 0.8224, 0.4820, 0.8239, 0.4787, 0.8235, 0.4796, 0.8236, 0.4794,0.8236,

0.4794, 0.8236, 0.4794, 0.8236, . . .

x0 = 0.5000, 0.8250, 0.4764, 0.8232, 0.4804, 0.8237, 0.4792, 0.8236, 0.4795, 0.8236,0.4794,

0.8236, 0.4794, 0.8236, 0.4794, . . .

x0 = 0.9500, 0.1568, 0.4362, 0.8116, 0.5047, 0.8249, 0.4766, 0.8232, 0.4803, 0.8237,0.4792,

0.8236, 0.4795, 0.8236, 0.4794, . . .

On voit que, après extinction du comportement transitoire, x prend maintenant deuxvaleurs d’équilibre qui se succèdent alternativement, p1 = 0.4794 et p2 = 0.8236.Cela veut dire en pratique que la population retournera à l’identique tous les deuxans seulement (une année sur deux elle est plus élevée, et entre deux, plus faible).Ce changement de régime, faisant passer pour une valeur parfaitement définie duparamètre a d’un régime à un seul état d’équilibre à celui où il y en a deux (lapériode a doublé), est appelé “bifurcation".

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Chapitre 1 — Notions de base sur les systèmes dynamiques

Si nous continuons à augmenter progressivement a, nous arrivons à une nouvellevaleur de a = 3,45 environ, pour laquelle le régime change encore. Cette fois, cene sont plus deux états d’équilibre qui se succèdent périodiquement mais quatre.En somme, il nous faut maintenant attendre tous les quatre ans pour retrouver unepopulation identique à ce qu’elle était (quatre ans auparavant) ! Nous avons encorefranchi un point de bifurcation à partir duquel la période du phénomène est devenuequadruple de ce qu’elle était au départ.

Vous aurez peut-être deviné que ce processus de doublement se répète à l’infiniet que, pour de nouvelles valeurs de a, d’autres bifurcations interviennent, à partirdesquelles la période est à chaque fois doublée donc, au bout du compte, multipliéepar 8, par 16, etc. Ce qui, par contre, n’est pas du tout évident, mais est essentiel,c’est le fait que les valeurs de a se resserrent de plus en plus. Ces bifurcationssuccessives sont de plus en plus voisines et finissent par s’accumuler en une valeura∞ (3.57 environ), au delà de laquelle ce n’est plus huit ans, seize ans, etc., qu’il fautattendre pour retrouver la valeur d’une population antérieure, mais un temps infini.Autrement dit, on ne retrouve plus jamais une séquence obtenue antérieurement !Nous annoncions quelques surprises, celle-ci est de taille. a∞ constitue la limite entredeux régimes qualitativement différents. Pour a inférieur à a∞, les populations serépètent : en attendant –selon les valeurs de a– deux, quatre, huit, seize, trente-deuxans . . . , on retrouve la séquence déjà vue. C’est l’éternel retour, en quelque sorte, etcette répétition permet de prévoir l’avenir en se fondant sur le passé : le régime estprévisible. Au contraire, si a est supérieur (un peu supérieur) à a∞, rien de tel n’estplus possible ! Même en attendant très longtemps on ne peut retrouver du “déjà vu"et les valeurs de x se succèdent de façon apériodique et désordonnée, erratiquementen somme, comme si elles obéissaient au seul fait du hasard. Le régime est doncdevenu imprévisible. Ci-dessous, nous donnons la représentation graphique d’uneitération correspondant à a = 3.9 :

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Page 25: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

Il ne faudrait pas croire cependant que toutes les valeurs de a supérieures à a∞conduisent à des comportements non périodiques. En fait, ce qui se passe au-delà dea∞ est assez compliqué. Il y a des “fenêtres périodiques". Par exemple, il apparaîtune fenêtre périodique de période 3 pour 3.8284 . . . ≤ a ≤ 3.8415 . . .; c’est-à-direque, pour ces valeurs de a, les orbites tendent vers des orbites de période 3 ! Nousn’insisterons pas d’avantage sur ce qui se passe exactement au-delà de a∞. Une façonde visualiser l’ensemble de la situation est de réaliser sur ordinateur un diagrammede bifurcation. On réalise un tel diagramme de la façon suivante.(1) On choisit une valeur de a, en commençant par a = 1, et 1500 (par exemple)valeurs de a équidistantes entre 1 et 4,(2) On choisit au hasard un point x dans l’intervalle [0, 1],(3) On calcule les 500 premiers itérés (par exemple) de fa(x), on ignore les 100 pre-miers itérés pour éliminer les comportements transitoires et on représente graphique-ment les itérés à partir du 101ème,(4) On augmente a du pas choisi et on recommence l’opération.On aboutit ainsi à la figure suivante où les valeurs de a, 1 ≤ a ≤ 4, sont mises enabscisse :

En faisant un agrandissement du diagramme, on voit mieux la fenêtre périodiquede période 3 dont nous avons parlé et qui apparaît au-delà de a∞ ≈ 3.57 :

25

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Chapitre 1 — Notions de base sur les systèmes dynamiques

Soit an, n = 1, 2, 3,. . . la suite des valeurs auxquelles se produisent les dou-blements de période. En essayant de calculer précisément cette suite le physicienMitchell Feigenbaum (1979) a observé que les an convergeaient de façon géométriquevers a∞. Pour n suffisamment grand, la distance entre les points de bifurcations suc-cessifs diminue d’un facteur approximativement constant. En fait

δ = limn→∞

an − an−1

an+1 − an

= 4.6692016 . . . .

Voici les quelques premiers an calculés sur ordinateur (ce n’est pas très facile àfaire !) :

a1 = 3, a2 = 3.449 . . . , a3 = 3.54409 . . . , a4 = 3.5644 . . . , a5 = 3.568759 . . . ,

a∞ = 3.569946 . . .

Feigenbaum a également observé que le nombre δ a une portée universelle :on trouve le même δ dans les itérations de toutes les familles à un paramètred’applications f : [0, 1] → [0, 1] telles que f(0) = f(1) = 1 et qui possèdent ununique maximum quadratique entre 0 et 1. Par exemple la famille d’applications

xn+1 = a sin πxn

conduit au même δ ! La cascade de doublement de périodes a été observée et δmesuré dans des réactions chimiques et des expériences hydrodynamiques. (voir[1, 7, 11, 17]).

Pour commencer à comprendre d’un point de vue théorique les doublements depériodes, nous avons besoin de mieux cerner la notion de stabilité d’un point fixe oud’une orbite périodique d’une itération.

Définition. Soit une itération xn+1 = f(xn), xn ∈ R, f de classe C1. On appellepoint fixe hyperbolique de f un point p tel que f(p) = p et |f ′(p)| 6= 1.

Les concepts d’attracteur et de source sont les mêmes que pour les équationsdifférentielles scalaires. p est un attracteur si tout point suffisamment proche de p

26

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PHYS2111

est attiré vers p, par itération. De même p est une source s’il existe un intervalleouvert contenant p tel que tout point dans cet intervalle (à l’exception de p) quittecet intervalle après suffisamment d’itérations. Voir l’énoncé du Théorème 1.5 pourune formulation en termes de ε, δ, où il suffit de remplacer φt par fn. On a alorsun théorème analogue au Théorème 1.5 :

Théorème 1.6 Soit p un point fixe hyperbolique d’une application f.

(i) Si |f ′(p)| < 1, alors p est un attracteur.

(ii) Si |f ′(p)| > 1, alors p est une source.

Démonstration. Par définition de la dérivée on a :

(∀ε > 0)(∃δ > 0)(|x− p| < δ, x 6= p⇒ |f ′(p)| − ε <∣

f(x)− f(p)

x− p

< |f ′(p)|+ ε).

Supposons que |f ′(p)| < 1. Choisissons ε > 0 tel que |f ′(p)| + ε < 1 et soit δ > 0correspondant à cet ε. Soit x tel que |x− p| < δ. Alors, puisque p est un point fixede f ,

|f(x)− p| = |f(x)− f(p)| < (|f ′(p)|+ ε)|x− p|.En particulier |f(x)− p| < δ et donc, par induction, on en déduit que

|fn(x)− p| < (|f ′(p)|+ ε)n|x− p|. (1.25)

En passant à la limite pour n→∞, puisque |f ′(p)|+ ε < 1, on obtient (i).

Pour établir (ii), nous choisissons ε > 0 tel que |f ′(p)| − ε > 1 et prenons δ > 0correspondant à cet ε, comme ci-dessus. Si il existe x 6= p dans l’intervalle ]p − δ,p+ δ[ tel que les itérés de x restent dans cet intervalle, on en déduit que

|fn(x)− p| > (|f ′(p)| − ε)n|x− p|, (1.26)

et donc nécessairement, puisque |f ′(p)|− ε > 1, fn(x) doit quitter l’intervalle ]p− δ,p+ δ[ pour n suffisamment grand, ce qui est une contradiction.

Si p est un point fixe de f tel que |f ′(p)| = 1, on ne peut en général rien dire dela stabilité de p comme le montrent les exemples suivants où f(0) = 0 et f ′(0) = 1 :

(a) f(x) = x+ x3, (b) f(x) = x− x3, (c) f(x) = x+ x2.

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Chapitre 1 — Notions de base sur les systèmes dynamiques

Définition. Soit f une itération. Nous dirons que p est un point périodique depériode k, si fk(p) = p. Le plus petit entier positif k pour lequel fk(p) = p estappelé la période primitive de p. Nous noterons l’ensemble des points périodiquesde période (non nécessairement primitive) k par Perk(f). L’ensemble des itérés d’unpoint périodique forme une orbite périodique.

Définition. Soit p un point périodique de période primitive k d’une itération f .L’orbite périodique de p est dite attractive si p est un attracteur de l’application fk.Elle est dite répulsive si p est une source de l’application fk.

Par la règle de dérivation des fonctions composées, on a

(f 2)′(x) = f ′(f(x))f ′(x).

Donc la dérivée de f 2 en un point périodique de période primitive 2, est simplementle produit des dérivées de f évaluées aux deux points de l’orbite. En particulier, ladérivée de f 2 est la même quel que soit le point de l’orbite où on l’évalue. Le fait quecette dérivée soit la même aux deux points de l’orbite montre que cela fait sens deparler de la stabilité de cette orbite. Il en va évidemment de même pour les orbitesd’un point périodique de période primitive k. Soit p1, p2, . . . , pk l’orbite d’un telpoint. On a :

(fk)′(p1) =(

f(fk−1))′

(p1)

= f ′(

fk−1(p1))

(fk−1)′(p1)

= f ′(

fk−1(p1))

f ′(

fk−2(p1))

. . . f ′(p1)

= f ′(pk)f′(pk−1) . . . f

′(p1).

On a donc le

Test de stabilité pour les orbites périodiques

L’orbite périodique p1, . . . , pk d’un point de période primitive k est attractive si

|f ′(pk) . . . f′(p1)| < 1, (1.27)

et répulsive si|f ′(pk) . . . f

′(p1)| > 1. (1.28)

Par exemple, dans le cas de l’application f(x) = 3.3 x(1−x), l’orbite périodique0.4794, 0.8236 est attractive puisque f ′ (0.4794) f ′ (0.8236) = - 0.2904.

À titre d’exemple, essayons de prévoir théoriquement les premiers doublementsde période de la fonction logistique fa(x) = ax(1− x), pour 0 ≤ a ≤ 4. Les pointsfixes de fa(x) sont donnés par

fa(x) = x⇐⇒ x = 0 ou x = 1− 1/a.

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PHYS2111

Donc l’origine est un point fixe pour toutes les valeurs de a, tandis que p = 1− 1/aest un point fixe compris entre 0 et 1 seulement si a ≥ 1. Puique f ′

a(0) = a, l’origineest stable si a < 1 et instable si a > 1. À l’autre point fixe p on a f ′

a(p) = 2− a etdonc p est stable si |2 − a| < 1, c’est-à-dire si 1 < a < 3. Quand a > 3, p devientinstable.

Montrons maintenant que la fonction logistique possède une orbite périodiquede période primitive 2 quand a > 3. On calcule que

(fa)2(x) = x ⇐⇒ a2x(1− x)[1− ax(1− x)]− x = 0

⇐⇒ x(a− 1− ax)(a2x2 − a(a+ 1)x+ a+ 1) = 0.

On trouve donc, en plus des deux points fixes de fa, x = 0 et x = p, deux autrespoints fixes :

q1 =a+ 1 +

(a− 3)(a+ 1)

2a, q2 =

a + 1−√

(a− 3)(a+ 1)

2a,

qui sont réels pour a > 3. On a donc établi l’existence d’une orbite périodique depériode primitive 2 pour a > 3. Étudions la stabilité de cette orbite. Pour cela oncalcule

(fa)′(q1)(fa)

′(q2) = a(1− 2q1)a(1− 2q2)

= 4 + 2a− a2.

Donc l’orbite périodique q1, q2 est stable seulement pour |4+2a−a2| < 1, c’est-à-dire pour 3 < a < 1 +

√6 = 3,449. . . Ci-dessous on a représenté les graphes de (fa)

2

pour a < 3, a = 3 et a > 3.

29

Page 30: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 1 — Notions de base sur les systèmes dynamiques

On peut maintenant expliquer intuitivement pourquoi les doublements de périodese répètent à l’infini, quand la valeur du paramètre a continue à augmenter. Lesgraphes de fa et (fa)

2 changent petit à petit, de telle sorte que les points fixesde (fa)

2 perdent aussi leur stabilité. Considérons par exemple le carré autour dupoint fixe q1 sur la figure ci-dessous. À l’intérieur de ce carré, nous observons unecourbe localement parabolique qui contient un point fixe stable, c’est-à-dire que noussommes exactement dans la même situation que antérieurement, lorsque 1 < a < 3.Donc lorsque le point fixe q1 devient instable par déformation de la courbe, onpeut s’attendre au même phénomène que précédemment : le point fixe q1 de (fa)

2

donnera lieu à deux points fixes stables de la fonction (fa)2(fa)

2 = (fa)4. La même

conclusion s’applique bien sûr au point fixe q2, qui est aussi un extremum, mais cettefois un minimum. À la fois q1 et q2 deviennent instables pour a = 1+

√6, valeur au-

dessus de laquelle (fa)2 n’a plus de points fixes stables. Néanmoins la fonction (fa)

4

a maintenant 4 points fixes stables, qui forment une orbite périodique attractive defa, de période primitive 4. En répétant le même raisonnement sur le graphe de (fa)

4,avec maintenant quatre petits carrés (dont un seul seulement est dessiné sur la figureci-dessous), on voit que lorsque a augmente, ces 4 points fixes vont devenir instablesà leur tour et produire 8 points fixes stables de l’application (fa)

8, correspondantà l’apparition d’une orbite périodique attractive de fa, de période primitive 8. Onobserve donc bien, à mesure que a s’accroît, une cascade de doublements de période.Ceci bien sûr ne constitue qu’une étude très sommaire du phénomène. La route desdoublements de période est une des routes qui conduisent à ce que l’on appelle “lechaos".

30

Page 31: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

II LINÉARISATION - LE THÉORÈME DE LA VA-RIÉTÉ STABLE-INSTABLE

1. Le cas des itérations

Soitf : R2 → R2 : (x, y)→ f(x, y) =

(

f1(x, y), f2(x, y))

(2.1)

un difféomorphisme de classe Cr, r ≥ 1. Supposons que p ∈ R2 soit un point fixe def , c’est-à-dire que f(p) = p. Au voisinage de p, on a

f(q) = p+ Aξ + o(ξ), (2.2)

où ξ = q − p désigne l’écart par rapport au point fixe et

A := df(p) =

∂f1

∂x(p)

∂f1

∂y(p)

∂f2

∂x(p)

∂f2

∂y(p)

(2.3)

est la matrice jacobienne de f au point p. Donc, par itération, on obtient

fn(q) = p+ Anξ + o(ξ). (2.4)

L’application ξ → Aξ s’appelle l’application linéarisée au voisinage du point fixep. On sait (voir cours d’algèbre) que, par un changement linéaire de coordonnées,on peut toujours ramener A à l’une des trois formes canoniques suivantes à entréesréelles :

i) A =

(

λ 00 µ

)

; ii) A =

(

λ σ0 λ

)

; iii) A =

(

α −ββ α

)

. (2.5)

où, dans le cas ii) , σ 6= 0 et peut être choisi strictement positif et arbitrairementpetit.

Définition 2.1. On dit que p est un point fixe hyperbolique de f si A ne possèdeaucune valeur propre sur le cercle unité du plan complexe, c’est-à-dire |λ| 6= 1, pourtoute valeur propre λ de A.

Comme dans le cas des itérations en dimension 1, nous allons montrer que, dansle cas d’un équilibre hyperbolique, le système linéarisé donne une image correcte dela dynamique au voisinage de l’équilibre. Pour cela nous introduisons la définitionsuivante :

Définition 2.2. Soit B un voisinage de p.

(i) On appelle variété stable locale de p dans B, l’ensemble

SB = q|fn(q) ∈ B, ∀n ≥ 0. (2.6)

Page 32: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 2 — Linéarisation – Le théorème de la variété stable-instable

(ii) On appelle variété instable locale de p dans B, l’ensemble

UB = q|f−n(q) ∈ B, ∀n ≥ 0. (2.7)

Pour un point fixe hyperbolique, on a trois cas possibles :

(1) toutes les valeurs propres sont à l’intérieur du cercle unité, auquel cas on ditque p est un attracteur ;

(2) toutes les valeurs propres sont à l’extérieur du cercle unité, auquel cas ont ditque p est une source ;

(3) il y a une valeur propre à l’intérieur du cercle unité et une valeur propre àl’extérieur du cercle unité, auquel cas on dit que p est un point selle.

Les deux premières situations sont semblables au cas des itérations en dimension1 (voir le Théorème 1.6). La troisième situation est nouvelle. Ce sera la plusintéressante, du moins pour l’étude des propriétés chaotiques de f . Occupons nousd’abord de comprendre la dynamique de f au voisinage d’un point fixe attractif oud’une source. On a le

Théorème 2.3.

(i) Si p est un attracteur, alors il existe un voisinage B de p tel que SB = B etUB = p.

(ii) Si p est une source, alors il existe un voisinage B de p tel que SB = p et UB

= B.

Démonstration. Remarquons que les assertions (i) et (ii) sont équivalentes, puisquep est une source pour f si et seulement si p est un attracteur pour f−1. Il suffit doncde démontrer (i). On peut toujours supposer (par un changement de coordonnéesaffine) que p = 0 et A a l’une des trois formes données en (2.5). Il est commoded’utiliser la norme euclidienne pour faire la démonstration :

‖(q1, q2)‖ =√

q21 + q2

2.

On montre facilement qu’il existe ρ < 1 tel que

‖Aq‖ ≤ ρ‖q‖.

Suivant les cas énumérés en (2.5), il suffit de prendre ρ = max(|λ|, |µ|) dans le casi) ; ρ = |λ| + σ et σ tel que |λ| + σ < 1 dans le cas ii) ; ρ =

α2 + β2 dans le casiii) .

Soit ε > 0 tel que ρ+ ε < 1. Puisque

limq→0

‖f(q)− Aq‖‖q‖ = 0,

32

Page 33: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

il existe δ > 0 tel que pour tout q satisfaisant ‖q‖ < δ, on a

‖f(q)−Aq‖ < ε‖q‖,

et donc‖f(q)‖ < ‖Aq‖+ ε‖q‖ ≤ (ρ+ ε)‖q‖.

Par induction, on en déduit que

‖fn(q)‖ < (ρ+ ε)n‖q‖, (2.8)

et donc tous les points de la boule B = q ∈ R2 : ‖q‖ < δ restent dans cette boulepar itération (positive) de f , c’est-à-dire que SB = B. En fait, on a montré que lesitérés successifs tendent nécessairement vers zéro. Montrons que UB = (0, 0). Soitq ∈ B tel que f−n(q) ∈ B, ∀n ≥ 0. Alors, en remplaçant q par f−n(q) dans (2.8), onobtient

‖q‖ < (ρ+ ε)n‖f−n(q)‖ < (ρ+ ε)nδ, ∀n ≥ 0,

et donc nécessairement q = (0,0) . Ceci achève la démonstration.

Nous allons maintenant étudier le cas d’un point selle. Dans ce cas, les deuxvaleurs propres de A sont nécessairement réelles. En effet, si A possède une valeurpropre complexe, l’autre valeur propre est nécessairement complexe conjuguée, etdonc les deux valeurs propres de A ont le même module.

À titre d’exemple si µ = 1/λ, avec 0 < λ < 1, les orbites de l’applicationq → Aq, sont situées sur des hyperboles xy = constante (d’où le nom de point fixehyperbolique). L’axe des x est un sous-espace stable de dimension 1 et l’axe des yun sous-espace instable de dimension 1 . Dans la figure ci-dessous on a pris λ = 1

2

et µ = 2 :

Le théorème de la variété stable-instable dit que, au voisinage d’un point sellede f , la figure ci-dessus est légèrement “déformée"; il existe deux courbes différen-tiables invariantes par f , l’une stable sous f et l’autre instable, dont les tangentes

33

Page 34: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 2 — Linéarisation – Le théorème de la variété stable-instable

en p coïncident avec les directions stables-instables du système linéarisé. On peuttoujours supposer, par un changement de coordonnées affine, que p = (0, 0) et queles axes stable et instable du système linéarisé correspondent respectivement à l’axedes x et l’axe des y. Remarquons aussi que la variété instable UB de f coïncide avecla variété stable de f−1; il suffira donc d’établir l’existence de la variété stable de f .

L’idée de la preuve (assez technique) de ce résultat est très simple; elle est deramener l’existence de la variété stable locale à l’existence d’un point fixe d’uneapplication contractante dans un espace fonctionnel approprié. Ecrivons

f(x, y) =(

λ x+ g(x, y), µ y + h(x, y))

, (2.9)

où g(x, y) et h(x, y) dénotent les termes non linéaires de f au voisinage de (0,0).Supposons qu’une telle “courbe stable" (x, s(x)) existe sur un petit voisinage del’origine, alors nécessairement

f(

x, s(x))

=(

λ x+ g(x, s(x))

, µ s(x) + h(

x, s(

x)))

,

doit encore se trouver sur la courbe (x, s(x)), c’est-à-dire que l’on a

µ s(x) + h(

x, s(x))

= s(

λ x+ g(

x, s(x)))

,

d’où

s(x) =1

µ

[

s(

λ x+ g(

x, s(x)))

− h(

x, s(x))

]

. (2.10)

Cette équation peut s’écrire symboliquement

s = Φ(s), (2.11)

et donc s est un point fixe de l’application Φ.

Avant de passer à la preuve du résultat nous allons montrer que l’équation (2.10)peut être utilisée en pratique pour calculer le développement de Taylor de s(x) auvoisinage de x = 0.

Exemple 2.4. Soit l’application

f(x, y) =(x

2+ x3 + y2, 2y + x2 + x y

)

.

34

Page 35: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

On a

λ =1

2, µ = 2, g(x, y) = y2 + x3, h(x, y) = x2 + x y

et donc (2.10) s’écrit

s =1

2

[

s(x

2+ s(x)2 + x3

)

−(

x2 + x s(x))

]

.

En substituants(x) = s2x

2 + s3x3 + s4x

4 + . . .

dans cette équation, on obtient

s2x2 + s3x

3 + s4x4 + . . . =

x2

2

(s2

4− 1)

+x3

2

(s3

8− s2

)

+x4

2

( s4

16− s3 + s2

)

+ . . .

En identifiant les deux membres terme à terme, on voit donc que l’on peut résoudreinductivement pour s2, s3, s4, . . ., ce qui donne

s(x) = −4

7x2 +

32

105x3 − 1472

3255x4 + . . .

Théorème 2.5 (Théorème de la variété stable - instable).

Soit f : R2 → R2 un difféomorphisme de classe Cr, r ≥ 1. Supposons quep = (0, 0) soit un point fixe hyperbolique de f avec

df(0, 0) =

(

λ 00 µ

)

, λ, µ ∈ R, |λ| < 1 et |µ| > 1.

Alors il existe un voisinage carré B = [−δ, δ]× [−δ, δ] de (0, 0) sur lequel la variétéstable locale SB de (0, 0) dans B est donnée par le graphe d’une fonction de classeCr; c’est-à-dire qu’il existe une fonction s sur [−δ, δ] de classe Cr telle que

SB =(

x, s(x))

: x ∈ [−δ, δ]

. (2.12)

De plus, s′(0) = 0.De même la variété instable locale UB de (0,0) dans B est le graphe d’une fonction

u(y) de classe Cr :

UB =(

u(y), y)

: y ∈ [−δ, δ]

, (2.13)

et u′(0) = 0.

Démonstration. Nous utiliserons de manière répétée l’observation suivante : tra-vailler sur un petit voisinage du point fixe est équivalent à travailler sur un voisinagede taille fixée et à supposer que les termes non linéaires de f sont petits. En effet,écrivons

f(x, y) =(

λ x+ g(x, y), µ y + h(x, y))

,

35

Page 36: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 2 — Linéarisation – Le théorème de la variété stable-instable

et posons x = δx′, y = δy′. En termes des nouvelles coordonnées, f devient

f ′(x′, y′) =

(

λ x′ +1

δg(δ x′, δ y′), µ y′ +

1

δh(δ x′, δ y′)

)

,

et doncdf ′(x′, y′) = df(δ x′, δ y′).

Puisque les dérivées partielles des termes non linéaires s’annulent en (0,0) et sontcontinues, on peut toujours s’arranger, en prenant δ suffisamment petit, pour queces dérivées soient aussi petites que l’on veut sur

(x′, y′)| |x′| ≤ 1 ; |y′| ≤ 1

.

Donc, en supprimant les ’ , pour n’importe quel ε positif, on peut supposer que

∂ g

∂ x

∣,∣

∂ g

∂ y

∣,∣

∂ h

∂ x

∣et∣

∂ h

∂ y

∣≤ ε pour |x| ≤ 1; |y| ≤ 1. (2.14)

Nous pouvons traiter ε comme un “paramètre ajustable" dans toute la démonstra-tion. Ajuster ε revient à ajuster δ, c’est-à-dire à déterminer la grandeur du voisinagecarréB sur lequel la construction fonctionne. En utilisant le théorème de la moyenne,on déduit de (2.14) que

∣g(x1, y1)− g(x2, y2)

∣=

∂ g

∂ x(z)(x1 − x2) +

∂ g

∂ y(z)(y1 − y2)

∣(2.15)

≤ ε(

|x1 − x2|+ |y1 − y2|)

où z est un point sur le segment ouvert joignant (x1, y1) à (x2, y2). De même

∣h(x1, y1)− h(x2, y2)

∣≤ ε(

|x1 − x2|+ |y1 − y2|)

. (2.16)

Étape 1. Soit

H =

s : [−1, 1]→ [−1, 1]

∣s(x1)− s(x2)

∣≤ |x1 − x2|, ∀x1, x2

, (2.17)

l’espace des fonctions lipschitziennes continues (de constante de Lipschitz 1) sur[-1,1] à valeurs dans [−1, 1]. Muni de la distance

d(s1, s2) = max−1≤x≤1

∣s1(x)− s2(x)

∣, (2.18)

H est un espace métrique complet. Définissons

Φ : H → H, (2.19)

36

Page 37: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

par la formule (2.10) :

Φ(s)(x) =1

µ

[

s(

λ x+ g(

x, s(x)))

− h(

x, s(x))

]

. (2.20)

De (2.15) et (2.16), comme g(0, 0) = h(0, 0) = 0, on obtient que |g(x, y)| ≤ 2ε et|h(x, y)| ≤ 2ε, pour |x| ≤ 1, |y| ≤ 1, et on en déduit que

∣λ x+ g

(

x, s(x))∣

∣≤ |λ|+ 2ε, si |x| ≤ 1. (2.21)

Donc, si l’on choisit ε > 0 suffisamment petit pour que |λ| + 2ε ≤ 1, Φ(s)(x) estbien défini et

∣Φ(s)(x)

∣≤ 1

|µ|(1 + 2ε). (2.22)

On a également∣

∣Φ(s)(x1)− Φ(s)(x2)

∣≤ 1

|µ|∣

∣s(

λ x1 + g(

x1, s(x1)))

− s(

λ x2 + g(

x2, s(x2)))∣

+1

|µ|∣

∣h(

x1, s(x1))

− h(

x2, s(x2))∣

≤ 1

|µ|(

|λ||x1 − x2|+∣

∣g(

x1, s(x1))

− g(

x2, s(x2))∣

)

(2.23)

+1

|µ|∣

∣h(

x1, s(x1))

− h(

x2, s(x2))∣

≤ 1

|µ|(

|λ|+ 4ε)

|x1 − x2|,

la dernière inégalité résultant de (2.15) et (2.16).Puisque |λ| < 1 et |µ| > 1, on peut choisir ε positif suffisamment petit pour que

l’on ait à la fois dans (2.21), (2.22) et (2.23)

|λ|+ 2ε ≤ 1 ;1

|µ|(1 + 2ε) ≤ 1 et1

|µ|(|λ|+ 4ε) ≤ 1, (2.24)

et donc l’application Φ est bien définie de H dans H .

Étape 2. Montrons que (en choisissant éventuellement ε plus petit), Φ telle quedéfinie en (2.19) et (2.20) est une contraction, c’est-à-dire que

d(

Φ(s1),Φ(s2))

≤ kd(s1, s2), k < 1. (2.25)

On a

Φ(s1)(x)− Φ(s2)(x) =1

µ

[

s1

(

λ x+ g(

x, s1(x)))

− s2

(

λ x+ g(

x, s1(x)))

+s2

(

λ x+ g(

x, s1(x)))

− s2

(

λ x+ g(

x, s2(x)))

−h(

x, s1(x))

+ h(

x, s2(x))

]

37

Page 38: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 2 — Linéarisation – Le théorème de la variété stable-instable

et donc

|Φ(s1)(x)− Φ(s2)(x)| ≤1

|µ|d(s1, s2) +1

|µ|∣

∣g(

x, s1(x))

− g(

x, s2(x))∣

+1

|µ|∣

∣h(

x, s1(x))

− h(

x, s2(x))∣

∣(2.26)

≤ 1

|µ|(1 + 2ε)d(s1, s2),

la dernière inégalité résultant à nouveau de (2.15) et (2.16). Donc si l’on choisit εpositif tel que

k :=1

|µ|(1 + 2ε) < 1, (2.27)

l’application Φ est une contraction. Par le théorème des application contractantes, Φpossède donc un unique point fixe s dans H . Remarquons que, puisque la fonctionidentiquement nulle s(x) ≡ 0 est dans H , l’unique point fixe s de Φ peut êtreobtenu par itération de Φ à partir de s0(x) ≡ 0, comme limite uniforme de la suitesn+1 = Φ(sn),

s = limn→∞

sn. (2.28)

Il en résulte en particulier que s(0) = 0.

Étape 3. Il faut montrer que si f est de classe Cr, r ≥ 1, l’unique point fixe s de Φ(défini comme en (2.28)) est de classe Cr également. Cette partie est assez techniqueet nous ne nous y attarderons pas. Le cas le plus simple est celui où f est analytique(on dit parfois f est de classe Cω, ce qui signifie que f possède un développement deTaylor convergent au voisinage de chaque point). Dans ce cas, par un argument decontraction dans un espace de fonctions analytiques complexes (i.e. holomorphes),les itérés sn construits en (2.28) à partir de s0 ≡ 0 sont des fonctions holomorphes,et la limite s est analytique comme limite uniforme de fonctions holomorphes. Deplus

s′ = limn→∞

s′n,

et comme s′n(0) = 0 (ce que l’on prouve par induction, en effet si s(0) = s′(0) = 0,on vérifie facilement, à partir de la définition de Φ en (2.20), que Φ(s)′(0) = 0), ona que

s′(0) = 0.

Étape 4. Il reste à établir qu’il n’y a pas d’autres points dans la variété stable localeSB de f que ceux situés sur le graphe de l’unique point fixe s de Φ. Considéronsdeux points z1 = (x1, y1) et z2 = (x2, y2) dans le carré B = [−1, 1]× [−1, 1] et notons

z′i = (x′i, y′i) := f(zi), i = 1, 2,

leurs images respectives par f . Il suffit de montrer que si |x1− x2| ≤ |y1− y2| (nousdirons dans ce cas que z1 et z2 sont alignés verticalement) alors

|y′1 − y′2| ≥ σ|y1 − y2|, avec σ > 1 et

(2.29)

|x′1 − x′2| ≤ |y′1 − y′2|.

38

Page 39: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

Cela implique en effet que les orbites de points verticalement alignés divergent ex-ponentiellement tant qu’elles restent dans B. Donc étant donné x ∈ [−1, 1], il existeau plus un y ∈ [−1, 1] tel que les itérés fn(x, y) restent dans B pour tout n ≥ 0.Comme nous avons déjà exhibé un tel y, à savoir s(x), cela montre qu’il n’y a pasd’autres points de la variété stable locale SB que ceux situés sur le graphe de s.Montrons que (2.29) a bien lieu. En effet, en utilisant (2.15) et (2.16) on a

|y′1 − y′2| ≥ |µ| |y1 − y2| −∣

∣h(x1, y1)− h(x2, y2)

≥(

|µ| − 2ε)

|y1 − y2| = σ|y1 − y2|

et

|x′1 − x′2| ≤ (|λ|+ 2ε)|y1 − y2|

≤ (|λ|+ 2ε)

σ|y′1 − y′2|,

et, en vertu de (2.24) et (2.27), on a

σ = |µ| − 2ε > 1 et |λ|+ 2ε ≤ σ.

Ceci achève la démonstration du théorème.

Remarque. Le théorème de la variété stable - instable se généralise au cas d’undifféomorphisme f : Rn → Rn de classe Cr, r ≥ 1. La notion de point fixe hyper-bolique est inchangée : elle signifie que A ne possède aucune valeur propre sur lecercle unité. L’application linéarisée A = df(p) aura maintenant k valeurs propresà l’intérieur du cercle unité et n − k valeurs propres à l’extérieur du cercle unité.Il existera alors une variété stable locale de dimension k et une variété instable lo-cale de dimension n − k en p, dont les espaces tangents en p correspondront auxsous-espaces linéaires stable et instable de l’application linéarisée df(p).

2. Le cas des équations différentielles

Soit p un équilibre d’une équation différentielle dans le plan

z = g(z), z =

(

xy

)

∈ R2, g(p) = 0. (2.30)

Au voisinage de p, on a

g(z) = A(z − p) + . . . , avec A = dg(p). (2.31)

Définition 2.1. On dit que p est un point fixe hyperbolique si Re(λ) 6= 0, pourtoute valeur propre λ de A.

Le lien avec la notion introduite dans le cas des itérations se fait via l’itérationdu flot φt, t fixé. On a en effet

39

Page 40: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 2 — Linéarisation – Le théorème de la variété stable-instable

φt(z) = φt(p) + dφt(p)(z − p) + . . .

= p+B(t)(z − p) + . . . , (2.32)

où B(t) = dφt(p), représente la matrice jacobienne en p de l’application φt, pour unt fixé.

Proposition 2.2.B(t) = exp(tA). (2.33)

Démonstration. On a d’une part, en utilisant (2.30), (2.32) et (2.31) (dans cetordre):

ddtφt(z) = g

(

φt(z))

= g(

p+B(t)(z − p) + . . .)

= AB(t)(z − p) + . . . .

D’autre part, en différentiant (2.32), on a:

ddtφt(z) = B(t)(z − p) + . . . .

En comparant les deux équations, cela donne

B(t) = AB(t),

dont la solution telle que B(0) = l’identité est (2.33). 2

La formule (2.33) montre que

valeurs propres de B(t) = exp(tλ), où les λ sont les valeurs propres de A.

On voit donc que p sera un point fixe hyperbolique du difféomorphisme φt si etseulement si

|exp(tλ)| 6= 1, ∀ valeurs propres de A⇔ Re(λ) 6= 0 ∀ valeurs propres de A.

Définition 2.3. Soit B un voisinage de p. On définit respectivement SB et UB lavariété stable et instable locale de p dans B comme suit:

SB = q ∈ B : φt(q) ∈ B ∀t ≥ 0UB = q ∈ B : φ−t(q) ∈ B ∀t ≥ 0.

À nouveau, il y a 3 cas possibles:

40

Page 41: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

1) Re(λ) < 0, ∀λ (p est un attracteur)

2) Re(λ) > 0, ∀λ (p est une source)

3) il existe une valeur propre λ < 0 et une valeur propre µ > 0(p est un point selle).

Tous les théorèmes de la section précédente s’étendent immédiatement au cas deséquations différentielles. Dans le cas d’un point selle, le calcul de la variéte stablelocale (ou instable locale) se ramène à nouveau à la solution d’un problème de pointfixe. Soit

x = λx+ g(x, y), λ < 0,

y = µy + h(x, y), µ > 0, (2.34)

où g(x, y) et h(x, y) représentent les termes non linéaires au voisinage du point fixep = (0, 0).

Soit (x, s(x)), le graphe de la variété stable locale. On exprime que la solution(x(t), y(t)) de (2.34) qui part d’un point (x, s(x)) reste sur la variété stable locale,c’est-à-dire:

y(t) = s(

x(t))

. (2.35)

En utilisant (2.34) et (2.35), on obtient:

x = λx+ g(

x, s(x))

, (2.36)

s′(x)x = µs(x) + h(

x, s(x))

. (2.37)

En substituant (2.36) dans (2.37), on obtient

s′(x)(

λx+ g(

x, s(x)))

= µs(x) + h(

x, s(x))

. (2.38)

Pour trouver s(x), il suffit alors de résoudre l’équation de point fixe (2.38) sous laforme d’une série

s(x) = c2x2 + c3x

3 + . . . (2.39)

en déterminant inductivement les coefficients c2, c3, . . ..

Exemple. Soit le système

x = −x,y = y + x2.

Avec les notations précédentes, on a λ = −1, µ = 1, g = 0, h = x2, et l’équation(2.38) s’écrit

−xs′(x) = s(x) + x2.

En substituant (2.39) dans cette équation on obtient

−2c2x2 − 3c3x

3 − 4c4x4 + . . . = x2 + c2x

2 + c3x3 + c4x

4 + . . . ,

41

Page 42: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 2 — Linéarisation – Le théorème de la variété stable-instable

d’où

−2c2 = 1 + c2 ⇔ c2 = −1

3−kck = ck, k ≥ 3⇔ ck = 0, k ≥ 3.

Donc s(x) = −13x2.

On peut dans cet exemple intégrer explicitement le système:

x(t) = k1e−t, y(t) =

(

−1

3k2

1e−3t + k2

)

et,

avec k1, k2 deux constantes d’intégration arbitraires. On voit que si k2 = 0, lasolution devient

x(t) = k1e−t, y(t) = −1

3k2

1e−2t,

et correspond à la variété stable. Notez que l’on a bien y(t) = −13x(t)2! Quand

k1 = 0, la solution devient

x(t) = 0, y(t) = k2et,

et correspond à la variété instable du système, qui dans ce cas coïncide avec l’axedes y.

Remarque. La notion de point fixe hyperbolique se définit de la même façon pourun système x = g(x), x ∈ Rn, et le théorème de la variété stable-instable se généralisefacilement au cas général.

3. Systèmes non autonomes dans le plan

Application de Poincaré

Soit un système non autonome dans le plan

~x = ~f(~x, t), ~x ∈ R2, (2.40)

où ~f(~x, t) est une fonction (vectorielle) de classe Cr, r ≥ 1, T -périodique en t, c’est-à-dire

~f(~x, t+ T ) = ~f(~x, t). (2.41)

Contrairement au cas autonome, les orbites dans le plan d’un tel système peuventse recouper.

Soit t0 ∈ R fixé. On définit l’application de Poincaré (relative à t0)

Pt0 : R2 → R2, (2.42)

de la façon suivante. Soit ~q ∈ R2 et soit ~x(t; t0, ~q) l’unique solution de (2.40) telleque ~x(t0; t0, ~q) = ~q. On définit

Pt0(~q) = ~x(t0 + T ; t0, ~q). (2.43)

La proposition suivante montre que l’application de Poincaré Pt0 nous donne unevue “stroboscopique" de la solution; au lieu d’observer la solution de façon continue,nous l’observons à des intervalles de temps réguliers de durée T .

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Page 43: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

Proposition 1P n

t0(~q) = ~x(t0 + nT ; t0, ~q). (2.44)

Démonstration. Soit~y(t) = ~x(t+ T ; t0, ~q).

En utilisant (2.41), on a

d

dt~y(t) = ~f(~y(t), t+ T ) = ~f(~y(t), t).

Donc ~y(t) est une solution de (2.40) qui vérifie

~y(t0) = ~x(t0 + T ; t0, ~q) = Pt0(~q).

En vertu de l’unicité de la solution du problème de Cauchy, on en déduit que

~x(t+ T ; t0, ~q) = ~x(t; t0, Pt0(~q)),

d’oùP 2

t0(~q) = ~x(t0 + T ; t0, Pt0(~q)) = ~x(t0 + 2T ; t0, ~q).

Par induction, on déduit (2.44).⊓⊔

On peut donner une vue géométrique de l’application de Poincaré. Pour ce faire,on récrit le système (2.40) comme un système autonome de trois équations différen-tielles dans R3 en introduisant le temps t = x3 comme variable supplémentaire

x1 = f1(x1, x2, x3)x2 = f2(x1, x2, x3)x3 = 1.

(2.45)

Soit ~φ t(.) le flot de (2.45). On vérifie facilement que

~φ t(~q, t0) = (~x(t+ t0; t0, ~q), t+ t0), (2.46)

d’où, en utilisant (2.44), on obtient

~φ nT (~q, t0) = (P nt0(~q), t0 + nT ), n ∈ Z. (2.47)

Puisque f(~x, t) est T -périodique, on peut penser à t = x3 comme à une variableangulaire en identifiant x3 et x3 +T , x3 ∈ R/TZ = S1, et voir le système dynamique(2.45) comme un système dynamique sur R2 × S1. L’équation (2.47) montre quel’application de Poincaré Pt0 dans cet espace revient à calculer les intersectionssuccessives de l’orbite ~φ t(~q, t0) avec le plan Π ≡ x3 = t0, voir la figure ci-dessous.

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Page 44: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 2 — Linéarisation – Le théorème de la variété stable-instable

Proposition 2 Soit ~p ∈ R2. La solution ~x(t; t0, ~p) est T -périodique si et seulementsi ~p est un point fixe de l’application de Poincaré Pt0.

Démonstration. Si ~x(t + T ; t0, ~p) = ~x(t; t0, ~p), ∀t, en posant t = t0, on obtientPt0(~p) = ~p. Inversément, si cette relation est satisfaite, ~x(t+T ; t0, ~p) est une solutionde (2.40) qui en t = t0 vaut ~p. Par unicité de la solution du problème de Cauchy,on en déduit que ~x(t+ T ; t0, ~p) = ~x(t; t0, ~p), ∀t.

⊓⊔Remarque. Comme les solutions d’une équation différentielle peuvent “exploser"

en un temps fini, il se pourrait que l’application de Poincaré ne soit pas partout biendéfinie. Néanmoins, en vertu de la dépendance continue des solutions par rapportaux conditions initiales, cette application est toujours bien définie au voisinage d’unpoint fixe, qui comme nous venons de le voir, correspond à une solution T -périodique.

Il est naturel de se demander comment les applications de Poincaré Pt0 et Pt1

sont reliées entre elles. On a le résultat suivant

Proposition 3 Les applications de Poincaré Pt0 et Pt1 sont (localement) Cr con-juguées, c’est-à-dire qu’il existe un difféomorphisme (local) h : R2 → R2 tel que

h Pt0 = Pt1 h. (2.48)

Démonstration. Il suffit de vérifier que l’application h définie par le flot

R2 × t0 → R2 × t1 : (~q, t0)→ φ t1−t0(~q, t0) ≡ (h(~q), t1), (2.49)

vérifie (2.48). (2.46) donne h(~q) = ~x(t1; t0, ~q). Par définition de Pt1 , on en déduitque

Pt1(h(~q)) = ~x(t1 + T ; t0, ~q).

D’autre part, en utilisant à nouveau (2.46),

h(Pt0(~q)) = h(~x(t0 + T ; t0, ~q)) = ~x(t1; t0, ~x(t0 + T ; t0, ~q)).

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Page 45: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

Par unicité de la solution du problème de Cauchy, on a que ~x(t; t0, ~x(t0 +T ; t0, ~q)) =~x(t+ T ; t0, ~q), donc

h(Pt0(~q)) = ~x(t1 + T ; t0, ~q) = Pt1(h(~q)),

ce qu’il fallait établir.

⊓⊔Remarque. Il se peut que l’application (2.49) ne soit pas partout bien définie.

Néanmoins cette application est toujours bien définie au voisinage d’un point fixede l’application de Poincaré; h est donc bien un difféomorphisme local au voisinaged’un tel point.

Le pendule forcé périodiquement

Considérons le mouvement d’un pendule amorti dont le pivot est soumis à une forced’excitation périodique

x+Bx+ (1− A sin t) sin x = 0.

En posant x1 = x, x2 = x, A = εa, B = εb, le système s’écrit

x1 = x2

x2 = −sin x1 + ε (a sin t sin x1 − b x2).(2.50)

Dans la suite nous noterons Pt0,ε l’application de Poincaré du système. Lorsqueε = 0, on a les équations du pendule habituel; le système est hamiltonien avec

H(x1, x2) =x2

2

2+ 1− cos x1.

Puisque dans le cas autonome ε = 0, ~x(t; t0, ~q) = ~x(t− t0; 0, ~q), à partir de (2.46) et(2.47) on voit facilement que l’application de Poincaré Pt0,0 correspond à l’itérationdu flot

P nt0,0(~q) = ~x(nT + t0; t0, ~q) = ~x(nT ; 0, ~q) ≡ φnT (~q), (2.51)

avec T = 2π dans le cas de (2.50). Le portrait de phase est représenté ci-dessous

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Page 46: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 2 — Linéarisation – Le théorème de la variété stable-instable

Les deux séparatrices correspondent aux mouvements du pendule (que l’on ob-serve jamais) qui atteignent l’équilibre instable x = ±π en un temps infini, dansle sens horloger ou anti-horloger. Ces orbites séparent l’espace de phase en deuxrégions bien distinctes, correspondant aux oscillations et aux rotations du pendule.En fait, comme x = −π et x = π correspondent à la même position du pendule, ilfaut identifier les droites x = −π et x = π, ce qui revient à s’imaginer l’espace dephase comme un cylindre, sur lequel les deux séparatrices tendent toutes deux versle même équilibre hyperbolique de type selle.

Passons maintenant au système perturbé ε 6= 0. Beaucoup de résultats de lathéorie moderne des systèmes dynamiques concernent la compréhension du portraitde phase de l’application de Poincaré Pt0,ε, qui est en général très compliqué. Leséquations non autonomes dans le plan fournissent les exemples les plus “simples"d’équations différentielles pouvant conduire à une situation chaotique. Comme nousle verrons au chapitre suivant, les systèmes autonomes dans le plan ne sont jamaischaotiques.

Dans l’exemple (2.50), on voit immédiatement que le système possède encoreun équilibre en x1 = ±π, x2 = 0, qui correspond au mouvement périodique (duà l’excitation du pivot) du pendule dans sa position d’équilibre instable. Pour εsuffisamment petit, cet équilibre est encore hyperbolique et donne lieu à un pointfixe de type selle de l’application de Poincaré Pt0,ε. En vertu du Théorème 2.5, ilexiste donc une variété stable et une variété instable en ce point. Les points sur lavariété stable correspondent à des mouvements qui tendent vers l’équilibre x = πquand t→ +∞ et ceux sur la variété instable à des mouvements qui tendent vers cetéquilibre quand t→ −∞. Une caractéristique fondamentale du cas ε = 0, due à laconservation de l’énergie, est que tout mouvement qui tend asymptotiquement vers

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Page 47: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

l’équilibre instable quand t→∞, tend nécessairement vers ce même équilibre quandt→ −∞. Géométriquement, cela se traduit par le fait que les variétés stable et in-stable coïncident. Il n’y a aucune raison qu’il en soit de même dès que ε 6= 0, étantdonné que l’on a plus la conservation de l’énergie. Mais on peut se demander s’ilexiste encore des solutions de (2.50) qui tendent asymptotiquement vers l’équilibreinstable x = π quand t → +∞ et quand t → −∞. Géométriquement de tellessolutions (si elles existent!) correspondent à un point d’intersection de la variétéstable et de la variété instable dans la section de Poincaré. Poincaré a appelé un telpoint un point homocline; il a appelé la solution correspondante une solution double-ment asymptotique, on utilise aussi l’expression solution homocline. Comme nous leverrons au chapitre 5 (Le fer à cheval), l’existence d’un point homocline transverse,c.à.d. d’un point où les variétés stable et instable s’intersectent transversalement(avec des tangentes différentes) engendre une dynamique chaotique.

Existence de points homoclines transverses

L’équation (2.50) est du type suivant. On considère une petite perturbation nonautonome T - périodique d’un système hamiltonien autonome plan

~x = ~f(~x) + ε~g(~x, t), ~x ∈ R2, (2.52)

où ~f,~g sont de classe Cr, r ≥ 1, et

~f(~x) =(∂H

∂x2,−∂H

∂x1

)T

, ~g(~x, t+ T ) = ~g(~x, t).

Proposition 4 Supposons que pour ε = 0, le système (2.52) possède un équilibrehyperbolique ~p0. Alors, pour ε suffisamment petit, l’application de Poincaré Pt0,ε pos-sède un unique point fixe hyperbolique ~pε(t0) tel que limε→0 ~pε(t0) = ~p0. L’ensembledes points

~pε(t),−∞ < t <∞,quand t varie (avec ε fixé), est une solution T -périodique de (2.52).

Démonstration. PosonsG(~x, ε) = Pt0,ε(~x)− ~x.

Par hypothèse G(~p0, 0) = 0. Par le théorème des fonctions implicites, pour établirla thèse, il suffit de montrer que

∂(G1, G2)

∂(x1, x2)|(~x=~p0,ε=0) 6= 0. (2.53)

On calcule facilement que

∂(G1, G2)

∂(x1, x2)|(~x=~p0,ε=0) = dét(dPt0,0(~p0)− Id).

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Page 48: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 2 — Linéarisation – Le théorème de la variété stable-instable

Par hypothèse, ~p0 est un point fixe hyperbolique de Pt0,0 et donc 1 n’est pas unevaleur propre de dPt0,0(~p0), ce qui établit (2.53). Si φt dénote le flot de l’équationautonome (2.45) associée à (2.52), on a nécessairement

φt(~pε(0), 0) = (~pε(t), t),

ce qui établit que ~pε(t),−∞ < t <∞ est une solution T -périodique de (2.52).⊓⊔

Donc en général, un équilibre hyperbolique ~p0 du système non perturbé donnelieu non pas à un équilibre hyperbolique du système perturbé, mais bien à uneorbite T -périodique hyperbolique, i.e. un point fixe hyperbolique de l’applicationde Poincaré. Dans le cas d’un attracteur (resp. d’une source) toutes les solutionsvoisines de cette orbite périodique s’en approchent (resp. s’en éloignent) quandt→ +∞.

Dans la suite, nous supposerons que le système non perturbé (2.52) ε = 0,possède un point fixe hyperbolique ~p0 de type selle et une orbite homocline

Γ0 : ~x = ~γ0(t), −∞ < t <∞, limt→±∞

~γ0(t) = ~p0, (2.54)

comme sur la figure (a) ci-dessous.

Dans ce cas, le point fixe ~pε(t0) de l’application de Poincaré Pt0,ε sera encorede type selle, pour ε suffisamment petit. On a donc une variété stable globale dedimension 1

S(~pε(t0)) = ~q ∈ R2 | P nt0,ε(~q)→ ~pε(t0) quand n→ +∞,

et une variété instable globale de dimension 1

U(~pε(t0)) = ~q ∈ R2 | P−nt0,ε(~q)→ ~pε(t0) quand n→ +∞.

La courbe définissant la variété stable (ou instable) globale ne peut jamais se re-couper (voir chapitre 5). Un point d’intersection de ces deux courbes

~q ∈ S(~pε(t0)) ∩ U(~pε(t0)),

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Page 49: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

tel que les tangentes aux deux courbes soient distinctes en ce point, s’appelle unpoint homocline transverse. Du point de vue dynamique, la solution ~x(t; t0, ~q)qui en t = t0 vaut ~q se rapproche indéfiniment quand t → +∞ et quand t → −∞de la solution T -périodique ~pε(t),−∞ < t <∞; c’est une solution doublementasymptotique à cette solution périodique.

Soit ~γ0(t) l’orbite homocline (2.54) du système non perturbé. On peut montreren général qu’il existe, pour ε suffisamment petit, deux solutions ~γ s

ε(t; t0) et ~γ uε (t; t0)

de (2.52) telles que

~γ sε(t; t0) = ~γ0(t− t0) + ε~γ s

1(t; t0) +O(ε2), t ∈ [t0,∞[, limn→+∞

P nt0,ε(~γ

sε(t0; t0)) = ~pε(t0),

~γ uε (t; t0) = ~γ0(t− t0) + ε~γ u

1(t; t0) +O(ε2), t ∈]−∞, t0], limn→+∞

P−nt0,ε(~γ

uε (t0; t0)) = ~pε(t0).

La fonction

H(~γ uε (t0; t0))−H(~γ s

ε(t0; t0))

est une mesure en ~γ0(0) de la distance entre la variété instable et la variété stablede ~pε(t0), voir la figure (b) ci-dessus. On peut montrer que

H(~γ uε (t0; t0))−H(~γ s

ε(t0; t0)) = εM(t0) +O(ε2),

avec

M(t0) =

∫ ∞

−∞~f(~γ0(t)) ∧ ~g(~γ0(t), t+ t0)dt, (2.55)

où, pour ~u = (u1, u2)T , ~v = (v1, v2)

T ∈ R2, ~u ∧ ~v = u1v2 − u2v1. M(t0) s’appellel’ intégrale de Melnikov (voir la Section 3.5 pour un résultat plus simple maisde même nature, dans le cas des systèmes plans autonomes). Le résultat suivant(que nous acceptons sans démonstration) permet d’établir l’existence de points ho-moclines.

Théorème 1 (Melnikov, 1963). Supposons qu’il existe t0 tel que M(t0) = 0 etM ′(t0) 6= 0. Alors, pour ε suffisamment petit, il existe un unique τε tel que limε→0 τε =t0, et les variétés stable et instable S(~pε(τε)) et U(~pε(τε)), dans la section de Poincarét = τε, s’intersectent transversalement en un point ~qε, avec limε→0 ~qε = ~γ0(0).

Remarque. Comme toutes les applications de Poincaré Pt,ε sont conjuguées entreelles, si les variétés stable et instable se coupent transversalement dans une sectionde Poincaré, il en va de même dans toutes les sections de Poincaré.

Exemple. Dans le cas de l’exemple (2.50) du pendule amorti soumis à uneexcitation périodique, on a pour ε = 0 deux orbites homoclines

Γ±0 : ~γ ±

0 (t) =(

± 2 arctan(sinh t),±2 sech t)

, −∞ < t <∞.

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Page 50: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 2 — Linéarisation – Le théorème de la variété stable-instable

L’intégrale de Melnikov (2.55) avec ~γ0(t) = ~γ+0 (t) donne

M(t0) =

∫ ∞

−∞

(

2 sech t−2 sinh t sech2t

)

∧(

02 a sin (t+ t0) sinh t sech2(t)− 2 b sech t

)

dt

= 4 a

∫ ∞

−∞sinh t sech3t (sin t0 cos t+ cos t0 sin t) dt− 4 b

∫ ∞

−∞sech2 t dt

= 4 a cos t0

∫ ∞

−∞sinh t sech3t sin t dt− 8 b,

le premier terme étant nul vu que l’on intègre une fonction impaire de t. L’intégralerestante peut s’évaluer par la méthode des résidus et l’on trouve finalement

M(t0) =2 a π

sinh (π/2)cos t0 − 8 b.

Donc M(t0) admet des zéros simples pour autant que

|b| < π |a|4 sinh (π/2)

≈ 0, 34 |a|. (2.56)

La condition (2.56) est assez intuitive; elle signifie que, pour avoir une solutiondoublement asymptotique de (2.50), qui tend vers (x1 = ±π, x2 = 0) quand t →±∞, le coefficient du terme de frottement ne peut pas être trop grand par rapportà l’amplitude d’excitation. En particulier, s’il n’y a pas de frottement (b = 0), ilexiste toujours une solution doublement asymptotique, pour ε suffisamment petit.On aurait bien sûr trouvé la même condition si l’on avait fait le calcul avec ~γ−0 (t).

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Page 51: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

III LE THÉORÈME DE POINCARÉ-BENDIXSON

Pour la plupart des systèmes dynamiques, il est impossible d’intégrer explicitementles équations. Le mieux que l’on puisse espérer est de décrire le comportement àlong terme (t → +∞) des solutions. Le théorème de Poincaré-Bendixson décritles comportements asymptotiques des systèmes autonomes dans le plan et montreque ceux-ci sont particulièrement simples: essentiellement, les trajectoires tendentvers un équilibre ou un cycle limite. En particulier, de tels systèmes ne sont jamaischaotiques, dans le sens précis qui sera donné à ce terme dans la suite du cours.

1. Ensembles ω-limite et α-limite

Soitx = F (x), x ∈ Rn (3.1)

(F (x) de classe Cr, r ≥ 1) un système dynamique.On notera φt(·) le flot correspondant:

φt(x) = l’unique solution du système passant par x en t = 0.

Problème: caractériser les comportements asymptotiques (t → +∞) des trajec-toires.

Définition

· (1) q ∈ Rn est appelé un point ω-limite de p ∈ Rn ⇔

∃tn, tn → +∞ tel que φtn(p)→ q.

· (2) q ∈ Rn est appelé un point α-limite de p ∈ Rn ⇔

∃tn, tn → −∞ tel que φtn(p)→ q.

Remarque: α et ω désignent respectivement la première et la dernière lettre del’alphabet grec.

Exemples

· (1) q est un point ω limite de p etq est un point α limite de r.

· (2)

Page 52: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 3 — Le théorème de Poincaré-Bendixson

Tout point de γ est un point ω-limite de p. Tout point de γ’ est un pointα-limite de p.

Notation ω(p) = ensemble des points ω-limite de pα(p) = ensemble des points α-limite de p.

Remarques

(1) Si p1, p2 appartiennent à la même trajectoire, alors ω(p1) = ω(p2) et α(p1) =α(p2). On notera ω(γ) (resp. α(γ)) l’ensemble des points ω-limite (resp. α-limite) d’une trajectoire γ.

(2) Pour n ≥ 3, la structure des ensembles ω-limite et α-limite peut être extrême-ment riche et compliquée, par exemple on peut obtenir des ensembles fractales(ensembles de dimension fractionnaire).

Définition: On appelle région trappe (ou sous-ensemble positivement invariant)pour le champ de vecteurs (3.1) un sous-ensemble compact M ⊂ Rn tel que

∀p ∈M, φt(p) ∈M, ∀t ≥ 0.

Remarque importante: On peut considérer également des sous-ensembles compactsM ⊂ Rn négativement invariants, c’est-à-dire:

∀p ∈M,φt(p) ∈M, ∀t ≤ 0.

Tous les résultats que nous énoncerons dans ce chapitre sont valides pour des sous-ensembles négativement invariants, en remplaçant ω(p) par α(p).

Exemple: Considérons l’équation de Duffing

x = x− x3 − δx , δ ≥ 0,

m

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Page 53: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

x = y ≡ f(x, y)y = x− x3 − δy ≡ g(x, y).

(3.2)

Pour δ = 0, ce système est conservatif. L’hamiltonien est donné par

H(x, y) =y2

2− x2

2+x4

4.

Pour δ > 0, on adH

dt= 〈∇H, (f, g)〉 = −δy2 ≤ 0.

Comme ∇H =(

∂H∂x, ∂H

∂y

)

est un vecteur perpendiculaire aux courbes de niveau de

la fonction H(x, y) qui pointe dans le sens de H croissant, cette inégalité exprimeprécisément que les courbes de niveau du système conservatif (δ = 0) sont des régionstrappes pour le système dissipatif (δ > 0).

courbes de niveau de H(x, y)

Régions trappes pour l’éq. de Duffing δ > 0.

Lemme 1 : Soit M ⊂ Rn une région trappe pour le champ de vecteurs x = F (x), x ∈Rn, alors ∀p ∈M on a:

(i) ω(p) 6= φ.

(ii) ω(p) est fermé.

(iii) ω(p) est invariant sous le flot, c-à-d. q ∈ ω(p)⇒ φs(q) ∈ ω(p), ∀s ∈ R.

(iv) ω(p) est connexe.

Remarque: ω(p) est supposé être muni de la topologie induite par Rn, c-à-d. lesouverts (resp. les fermés) de ω(p) sont les traces des ouverts (resp. des fermés) deRn sur ω(p) ce qui veut dire

O ⊂ ω(p) est ouvert⇔ O = U ∩ ω(p) avec U ouvert de Rn

F ⊂ ω(p) est fermé⇔ F = A ∩ ω(p) avec A fermé de Rn.

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Page 54: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 3 — Le théorème de Poincaré-Bendixson

Avec cette définition des ouverts et des fermés de ω(p), la locution ω(p) est connexe

signifie qu’il n’est pas possible d’écrire ω(p) comme union disjointe de 2 fermésnon vides, ou ce qui est équivalent, il n’est pas possible d’écrire ω(p) comme uniondisjointe de deux ouverts non vides, ce qui est encore équivalent à dire que les seulssous-ensembles de ω(p) qui sont à la fois ouverts et fermés sont l’ensemble vide etω(p) (vérifier ces affirmations).

Démonstration

(i) Soit une suite tn telle que limn→+∞

tn = +∞ et soit pn = φtn(p). Puisque M

est compact, pn possède une sous-suite convergente dont la limite appartientà ω(p). Donc, ω(p) 6= φ.

(ii) Il suffit de montrer que le complémentaire de ω(p) est ouvert. Soit q 6∈ ω(p).Alors il doit exister U(q) un voisinage de q tel que

U(q) ∩

φt(p)|t ≥ T

= φ, pour un certain T > 0.

Donc U(q) ∩ ω(p) = φ. Comme q est arbitraire, le résultat est établi.

(iii) Soit q ∈ ω(p) et q = φs(q). Soit une suite tn → +∞ , telle que φtn(p) → q.Puisque

φtn+s(p) = φs(

φtn(p))

→ φs(q) = q,

cela montre que q ∈ ω(p). En fait, il y a une petite lacune à combler dans cetargument : il n’est pas évident que φs (q) existe pour tout s ∈] −∞,+∞[.Puisque M est une région trappe, φs(q) existe certainement pour tout s ∈[0,+∞[, donc il suffit de montrer que φs(q) existe pour tout s ∈] − ∞, 0].Soient t1 < t2 < ... < tn < ... tels que φtn(p)→ q. φs(φtn(p)) = φtn+s(p) existepour tout s tel que tn + s > 0, c-à-d. pour tout s ∈ [−tn, 0]. Passant à lalimite pour n→∞, on voit que φs(q) existe pour tout s ∈]−∞, 0].

(iv) On prouve cette affirmation par l’absurde. Supposons que

ω(p) =(

ω(p) ∩A1

)

∪(

ω(p) ∩A2

)

= F1 ∪ F2,

où A1, A2 sont des fermés de Rn, F1 ∩ F2 = φ, F1 6= φ et F2 6= φ. Commeω(p) est fermé, F1 et F2 sont encore fermés dans Rn. Puisque F1 ∩ F2 = φ, ilexiste V1 et V2 voisinages de F1 et F2 tels que V1 ∩ V2 = φ. Puisque l’orbitede p passe un nombre infini de fois près de F1 et de F2 (c’est-à-dire dans V1

et dans V2), elle doit aussi, par continuité, se trouver infiniment souvent endehors de V1 et de V2. Donc, quelque soit T > 0, il existe t > T tel queφt(p) ∈ M\(V1 ∪ V2) = K. Donc on peut trouver une suite tn, tn → +∞telle que φtn(p) ∈ K. Puisque K est compact, en passant éventuellement àune sous-suite, on a φtn(p) → q, q ∈ K. Cela voudrait dire que q ∈ ω(p) etdonc q ∈ V1 ∪ V2, ce qui est la contradiction recherchée.

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Page 55: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

Corollaire 2: q ∈ ω(p)⇒ ω(q) ⊂ ω(p).

Démonstration Soit r ∈ ω(q), alors ∃tn, tn → +∞ tq φtn(q)→ r. Par la propriété(iii) du lemme 1, φtn(q) ∈ ω(p). Puisque ω(p) est fermé (propriété (ii) du lemme 1),r ∈ ω(p).

2. Section de Poincaré

À partir de maintenant nous supposerons que le système (3.1) est un système plan:

x = f(x, y) q = (x, y) ∈ R2

y = g(x, y)(3.3)

Définition: Soit S un segment ouvert dans R2. S est appelé une section locale

transverse du champ F (q) = (f(q), g(q)) ⇔ F (q) n’a pas de points fixes sur S etne devient jamais tangent à S. Une telle section est souvent appelée une section de

Poincaré.

〈F (q), ~n〉 > 0 (ou < 0)∀q ∈ S.

Remarque: Si q ∈ R2 n’est pas un équilibre, c-à-d. F (q) 6= 0, alors il existe toujoursune section locale transverse en q.

Redressement d’un champ de vecteurs (n = 2)

Soit q ∈ R2, t.q. F (q) 6= 0. Soit S une section locale transverse en q, et ~e = (e1, e2)un vecteur unitaire dans la direction de S. Pour (t, s) ∈ R2 suffisamment petits,définissons

Ψ(t, s) = φt(q + s~e ).déf

55

Page 56: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 3 — Le théorème de Poincaré-Bendixson

Proposition 3: Supposons que le champ F (x) soit de classe Cr(r ≥ 1). Il existeU voisinage de l’origine dans R2 et V voisinage de q dans R2 tel que l’applicationΨ : U → V soit un difféomorphisme de classe Cr (bijection de classe Cr dont l’inverseest de classe Cr). De plus, dans les coordonnées (t, s) le flot du champ F (x) est donnépar

(t0, s0) 7−→ φt(t0, s0) = (t+ t0, s0) (3.4)

Démonstration Pour montrer que Ψ est un difféomorphisme local au voisinage de(0, 0), par le théorème des fonctions réciproques (J. Mawhin, Analyse, p. 187), ilsuffit de montrer que le déterminant de la matrice jacobienne de Ψ(t, s) est différentde 0, en t = s = 0. En effet, on calcule facilement que l’on a:

∂(ψ1, ψ2)

∂(t, s)

t=s=0

=

f(q) g(q)e1 e2

= 〈F (q), ~n〉 6= 0.

De plus,

φt(

ψ(t0, s0))

= φt(

φt0(q + s0~e ))

= φt+t0(q + s0~e ) = Ψ(t+ t0, s0),

ce qui établit la formule (3.4).Le fait important qu’il faut retenir de cette proposition et que nous utiliserons

dans la suite est que toute trajectoire qui rentre dans V coupe la section transverse.Voici la clef de la preuve du Théorème de Poincaré-Bendixson. Nous y verrons pourla première fois l’idée de section de Poincaré à l’œuvre.

Proposition 4: Soit S ⊂M une section locale transverse de F (q).Alors O+(p)=

défφt(p)|t ≥ 0 intersecte S selon une suite monotone, c-à-d. si pi=ième

intersection de φt(p) avec S, alors pi ∈ [pi−1, pi+1].

Démonstration La démonstration est visuelle:

p3 doit se trouver icisi φt(p) recoupe encore S.

La région hachurée est une région trappe. Cela résulte du fait que S est une sectionlocale transverse et que les trajectoires d’une équation autonome ne se coupent pas.Donc si l’orbite φt(p) recoupe encore une fois S, elle doit nécessairement le faire enun point p3 tel que p2 ∈ [p1, p3].

Remarque. Dans cette démonstration, on utilise implicitement le fait qu’unecourbe fermée simple continue décompose le plan en 2 régions distinctes (Théorème

56

Page 57: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

de Jordan). Ceci n’est évidemment plus le cas en dimension n ≥ 3 et donne indirecte-ment la raison pour laquelle le théorème de Poincaré-Bendixson ne se “généralise"pas en dimension n ≥ 3.

Corollaire 5: ω(p) intersecte S en au plus un point.

Démonstration

Cette trajectoire ne peutplus repasser à proximitéde q1, d’où q1 6∈ ω(p),contradiction.

La démonstration se fait par l’absurbe. Supposons que ω(p) intersecte S en au moins2 points q1, q2, q1 6= q2. Soient V1 et V2 deux voisinages de q1 et q2 sur lequel lechamp de vecteurs peut être redressé. Puisque q1 et q2 ∈ ω(p), la trajectoire φt(p)intersecte V1 et V2 une infinité de fois et donc J1 et J2, ce qui est incompatible avecle fait que O+(p) intersecte S selon une suite monotone, donc q1 = q2.

Proposition 6: Si ω(p) ne contient pas de points fixes, alors ω(p) est une orbitepériodique.Démonstration Soit q ∈ ω(p), q n’est pas un point fixe. On va montrer que l’orbite deq, φt(q), t ∈ R est une trajectoire périodique γ. Donc γ ⊂ ω(p). Mais alors puisqueω(p) est connexe, ne contient pas de points fixes et est constitué de trajectoires, ondoit nécessairement avoir que ω(p) = γ. [En effet, si ω(p)\γ 6= φ, par connexitéde ω(p), il existe r ∈ γ ∩ ω(p)\γ. Soit S une section locale transverse en r. Toutvoisinage de r contient un point u ∈ ω(p)\γ, et, pour u suffisamment proche de r,l’orbite passant par u coupera S. Mais alors S contient deux points distincts deω(p), ce qui contredit le Corollaire 5].

57

Page 58: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 3 — Le théorème de Poincaré-Bendixson

Soit r ∈ ω(q). Puisque q ∈ ω(p), ω(q) ⊂ ω(p) et donc r ∈ ω(p). Cela montre que rn’est pas un point fixe. Soit S une section locale transverse passant par r. Puisquer ∈ ω(q), l’orbite φt(q) traverse S une infinité de fois, c-à-d. ∃tn, tn → +∞ tqφtn(q) ∈ S et φtn(q) → r. Comme φt(q) ⊂ ω(p) et que ω(p) intersecte S en auplus un point (Corollaire 5), on doit avoir

φt1(q) = φt2(q) = φt3(q) = · · · = r

donc φt2−t1(q) = q et φt(q) est une orbite fermée.

Remarque. Il suit de la démonstration précédente que deux possibilités peuventse présenter. Soit q ∈ orbite de p, auquel cas φt(p) est une orbite périodique, soitq 6∈ orbite de p, auquel cas

limt→+∞

d(

φt(p), γ)

= 0,

où d(φt(p), γ) dénote la distance de φt(p) à γ. Dans ce cas, on dit que γ = ω(p) estun cycle limite.

3. Le théorème de Poincaré-Bendixson

Théorème 1 (Poincaré-Bendixson). Soit x = F (x), x ∈ R2 et soit M une régiontrappe pour le champ de vecteurs F (x) qui ne contient qu’un nombre fini d’équilibres.Alors, ∀p ∈M on a une des trois possibilités suivantes:

(i) ω(p) est un équilibre

(ii) ω(p) est une orbite périodique

(iii) ω(p) est constitué d’un nombre fini d’équilibres connectés par des trajectoires.

Remarque. 1) Dans le cas où ω(p) est une orbite périodique, soit ω(p) coïncideavec la trajectoire passant par p, auquel cas φt(p) est une orbite périodique, soit

58

Page 59: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

la trajectoire passant par p s’enroule autour d’une trajectoire périodique que l’onappelle un cycle limite.

2) Dans le cas (iii), on peut montrer qu’il existe au plus une trajectoireconnectant deux équilibres distincts. Une telle trajectoire s’appelle une solution

hétérocline. Une trajectoire située dans ω(p) qui connecte un équilibre à lui-mêmes’appelle une solution homocline.

ω(p) = γ1 ∪ γ2 ∪ γ3 ∪ γ4 ∪ q1, q2, q3, q4 ω(p) = γ1 ∪ γ2 ∪ γ3 ∪ q

Démonstration du Théorème de Poincaré-Bendixson

1er cas: ω(p) ne contient que des équilibres. Alors puisqu’il n’y a qu’un nombre finid’équilibres et que ω(p) est connexe, il faut donc que ω(p) se réduise à un équilibre.2ème cas: ω(p) ne contient aucun équilibre, alors la proposition 6 montre que ω(p)est une orbite périodique.3ème cas: ω(p) contient des équilibres et des points réguliers (= points où F (q) 6=0). Soit γ ⊂ ω(p) une trajectoire passant par un point régulier, il faut montrer queγ connecte 2 équilibres, c-à-d. ω(γ) = un équilibre et α(γ)= un autre équilibre.La preuve se fait à nouveau par l’absurde. Supposons que ω(γ) contienne un pointrégulier r,

et soit S une section locale transverse au voisinage de r. Alors comme γ ⊂ ω(p) etω(p) coupe S en au plus un point, le même argument que celui utilisé dans la propo-sition 6 montre que γ est nécessairement une orbite périodique, mais alors ω(p) = γet ω(p) ne contiendrait pas d’équilibres, ce qui est la contradiction recherchée. Onmontre de la même façon que α(γ)= un équilibre.Il reste à établir que 2 équilibres distincts dans ω(p) sont connectés par au plus une

59

Page 60: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 3 — Le théorème de Poincaré-Bendixson

trajectoire dans ω(p). Supposons qu’il y en ait deux que nous appelons γ1, γ2 ⊂ ω(p).

p1, p2 équilibres dans ω(p).

Soient q1 ∈ γ1, q2 ∈ γ2 et S1, S2 deux sections locales transverses au voisinage deq1 et q2. Puisque q1, q2 ∈ ω(p), O+(p) = φt(p)|t ≥ 0 coupe S1 et S2 en au moins2 points a et b (voir la figure). La région hachurée est alors une région trappe etdonc φt(p) ne peut plus repasser arbitrairement près des points de γ1 et γ2 situés endehors de la région trappe, ce qui est la contradiction recherchée.

Pour pouvoir utiliser le théorème de Poincaré-Bendixson, il est parfois utile dedisposer d’un critère qui permet de conclure qu’une région trappe ne contient pasde trajectoires fermées.

Critère de Bendixson Soit Ω un domaine simplement connexe du plan R2 etsupposons que ∂f

∂x+ ∂g

∂y6= 0 et ne change pas de signe dans Ω, alors l’équation (3.3)

ne possède pas de trajectoires fermées dans Ω.

Démonstration. Supposons que Ω contienne une trajectoire fermée γ.

trajectoire fermée de période T .

Alors,∫

γ

fdy − gdx =

∫ T

0

(

fdy

dt− gdx

dt

)

dt

= 0 (en utilisant(3.3)).

Or, par le théorème de Green, on a∫

γ

fdy − gdx =

∫ ∫

S

(

∂f

∂x+∂g

∂y

)

dxdy

6= 0 (par hypothèse),

ce qui est la contradiction recherchée.

60

Page 61: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

4. Exemples d’applications du Théorème de Poincaré-Ben-dixson

Établir l’existence d’une orbite périodique.

Pour établir l’existence d’une orbite périodique à partir du Théorème de Poincaré-Bendixson, on doit trouver une région trappe M qui ne contient pas d’équilibres.

Considérons à titre d’exemple le système

x = y +1

4x(1− 2r2) , y = −x+

1

2y(1− r2),

où r2 = x2 + y2. Cherchons d’abord les points fixes de ce champ de vecteurs. Lapremière équation donne

y = −1

4x(1− 2r2)

et après substitution dans la deuxième équation on trouve

−x(

1 +1

8(1− 2r2)(1− r2)

)

= 0.

Donc il y a un point fixe à l’origine (x, y) = (0, 0) et tout autre point fixe doit vérifierl’équation

2r4 − 3r2 + 9 = 0.

Comme cette équation n’a pas de racines réelles, l’origine est donc le seul point fixedu système. En différentiant l’expression r2 = x2 + y2 par rapport à t, on trouverr = xx+ yy et, en passant aux coordonnées polaires x = r cos θ, y = r sin θ, on a

rr = x

(

y +1

4x(1− 2r2)

)

+ y

(

−x+1

2y(1− r2)

)

=1

4x2(1− 2r2) +

1

2y2(1− r2)

=1

4r2(1 + sin2 θ)− 1

2r4,

d’où

r =1

4r(1 + sin2 θ)− 1

2r3.

Notons que r > 0 pour tout θ pour autant que r4− r3

2> 0, c’est-à-dire r2 < 1

2et que

r < 0 pour tout θ pour autant que r − r3 < 0, c’est-à-dire r > 1. Soit

M =

(r, θ)∣

√2

2≤ r ≤ 1

.

Puisque l’origine est le seul point fixe du système, la région M ne contient pasd’équilibres. Puisque r > 0 si r <

√2

2et r < 0 si r > 1, toutes les trajectoires restent

dans M , pour tout t ≥ 0. Comme M est compacte, c’est donc une région trappequi ne contient pas d’équilibres. En vertu du Théorème de Poincaré-Bendixson, ilexiste donc au moins une orbite périodique dans M .

61

Page 62: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 3 — Le théorème de Poincaré-Bendixson

Équation de Liénard et de Van der Pol.

On appelle équation de Liénard une équation du type

x+ f(x)x+ x = 0, f(x) de classe Cr, r ≥ 1. (3.5)

Hypothèses

a) F (x) =∫ x

0f(s)ds est une fonction impaire.

b) F (x)→ +∞ quand x→ +∞ et ∃β > 0 tel que pour x > β, F (x) soit positiveet strictement croissante.

c) ∃α > 0 tel que pour 0 < x < α, F (x) < 0.

Cas typique pour F (x):le nombre d’oscillations deF (x) entre −β et +β est arbi-traire.

On va établir leThéorème 2 Sous les hypothèses a) b) et c), l’équation de Liénard possède aumoins une solution périodique. Si de plus α = β, alors il existe une unique solutionpériodique qui est l’ensemble ω-limite de tout point p ∈ R2, p 6= (0, 0).

DémonstrationPour étudier l’équation (3.5) il est commode de faire le changement de variables(x, x)→ (x, y = x+ F (x)) de sorte que

x = y − F (x)y = −x (3.6)

Ce système possède (0, 0) comme unique équilibre. Soit

H(x, y) =1

2(x2 + y2),

déf

l’énergie du système conservatif x = y, y = −x. Utilisant (3.6) on a:

H = 〈(x, y), (x, y)〉 = −xF (x) ≥ 0, si |x| ≤ α,

ce qui montre que les orbites débutant sur un cercle de rayon inférieur à α ne peuventpas entrer à l’intérieur de celui-ci.Remarquons que le caractère impair de la fonction F (x) implique que si (x(t), y(t))

62

Page 63: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

est une solution du système (3.6), alors la réflection (−x(t),−y(t)) de cette solutionà travers l’origine est encore une solution.

trappe: cercle autour de l’originede rayon suffisamment petit, psuffisamment grand

Notons v+ = (0, y)|y > 0 et v− = (0, y)|y < 0, F+ = (x, F (x))|x > 0 etF− = (x, F (x))|x < 0. L’allure du champ de vecteurs rend plausible l’assertionque toute trajectoire débutant sur v+, traverse d’abord F+, puis v−, puis F−, puisv+ etc ... (il n’est pas difficile de montrer ceci rigoureusement).Soit p ∈ v+ et notons α(p) la première intersection de la trajectoire issue de p avecv−. On va montrer que si p est suffisamment grand alors

H(

α(p))

−H(p) =1

2

(

|α(p)|2 − |p|2)

< 0. (3.7)

La réflection de l’orbite joignant p à α(p) est une autre orbite qui nous permet dedéfinir une région trappe pour le champ de vecteurs (région hachurée sur la figure).D’après le théorème de Poincaré-Bendixson, comme cette région trappe ne contientaucun équilibre, elle contient nécessairement une orbite fermée.Il reste à établir l’inégalité (3.7) pour p suffisamment grand. Pour ce faire on sub-divise l’orbite allant de p à α(p) en trois chemins comme indiqués sur la figure. Ona

H(

α(p))

−H(p) =

(∫

γ1

+

γ3

)

dH +

γ2

dH

=

(∫

γ1

+

γ3

)

dH

dt

dt

dxdx+

γ2

dH

dt

dt

dydy

=

(∫

γ1

+

γ3

) −xF (x)

y − F (x)dx+

γ2

F(

x(y))

dy. (3.8)

On peut supposer que α(p) → −∞ quand p → +∞, sinon il n’y a rien à établir.Dans ce cas, les intégrales sur γ1 et γ3 tendent vers zéro quand p → +∞. Celarésulte de ce que lorsque p→ +∞, tous les points de l’arc γ1 (resp. γ3) tendent vers+∞ (resp. −∞) (justifiez !) et que xF (x) est bornée sur l’intervalle d’intégration[0, β]. Nous allons établir que l’intégrale le long de γ2 tend vers −∞ quand p→ +∞.Comme F (x(y)) > 0 le long de γ2 et que l’on intègre de y positif à y négatif, on aque

γ2

F(

x(y))

dy <

γ2

F(

x(y))

dy,

63

Page 64: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 3 — Le théorème de Poincaré-Bendixson

pour n’importe quel sous-arc γ2 de γ2. Choisissons γ2 comme sur la figure, où R estfixé une fois pour toutes, suffisamment proche de (β, 0). Puisque le long de γ2

F(

x(y))

≥ δ = F (R) > 0

et que l’on intègre de y positif à y négatif, on a que∫

γ2

F(

x(y))

≤ −δ · |RS|,

où S est défini sur la figure. Puisque |RS| devient arbitrairement grand quandp → +∞, on en déduit que l’intégrale le long de γ2 et donc de γ2 tend vers −∞quand p→ +∞. En combinant les résultats obtenus, on obtient donc que

H(

α(p))

−H(p) < 0,

pour p suffisamment grand, et donc |α(p)| < |p| (puisque H(p) = 12|p|2).

Il reste à établir l’unicité de cette solution périodique quand α = β. Ce cascontient comme cas particulier celui de l’équation de Van der Pol

x− ε(1− x2)x+ x = 0, ε > 0,

F (x) = ε

(

x3

3− x)

. (3.9)

F (x) a l’allure suivante:

Soit p0 ∈ v+ tel que la trajectoire issue de p0 intersecte F+ en (α, 0) = (β, 0). Nousallons montrer que la fonction

δ(p) =déf

H(

α(p))

−H(p)est telle que

δ(p) > 0 si 0 < p ≤ p0 (3.10)δ(p) décroît strictement vers −∞ quand p→ +∞, dès que p ≥ p0.

64

Page 65: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

Donc il existe un unique q0 > p0 tel que δ(q0) = 0. À cause de l’invariance destrajectoires sous la réflection (x, y) → (−x,−y), la solution issue de q0 est alorsl’unique solution périodique du système.Établissons (3.10). Pour p ≤ p0,

δ(p) =

γ

dH =

γ

F(

x(y))

dy.

Puisque F (x(y)) < 0 pour 0 < x < α et que l’on intègre de y positif à y négatif, onvoit bien que δ(p) > 0.Pour p > p0, on partage à nouveau le chemin γ en trois chemins γ1, γ2 et γ3 commeen (3.8). Lorsque p croît, le long de γ1, la fonction y − F (x) croît et donc

γ1

−xF (x)

y − F (x)dx

décroît. Il en va de même pour l’intégrale le long de γ3. Pour ce qui est de∫

γ2

F(

x(y))

dy

quand p croît, le domaine d’intégration en y s’agrandit et le graphe de x(y) s’éloignevers la droite. Comme F (x) est croissante et que l’on intègre de y positif à ynégatif, cela montre également que cette intégrale décroît quand p augmente. Enconclusion, δ(p) décroît pour p ≥ p0 et, puisque l’intégrale le long de γ2 tend vers−∞ quand p → +∞ et δ(p0) > 0, δ(p) possède un unique zéro pour p > p0, quicorrespond à l’unique solution périodique du système. Le théorème de Poincaré-Bendixson implique que cette solution périodique est l’ensemble ω-limite de toutpoint p 6= (0, 0) ∈ R2 (justifiez !).

Ensembles limites qui ne sont pas des orbites périodiques.

Nous discutons maintenant un exemple qui illustre les possibilités (i) et (iii) énoncéesdans le Théorème de Poincaré-Bendixson. Soit le système

x =∂H

∂y+ λH

∂H

∂x

y = −∂H∂x

+ λH∂H

∂y

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Page 66: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 3 — Le théorème de Poincaré-Bendixson

où λ ∈ R, H(x, y) = y2 − 2x2 + x4.

• Quand λ = 0, la fonction H(x, y) garde une valeur constante le long de toutetrajectoire (x(t), y(t)) du système puisque l’on a

d

dtH(

x(t), y(t))

=∂H

∂xx+

∂H

∂yy

=∂H

∂x

∂H

∂y− ∂H

∂y

∂H

∂x= 0.

Le système est conservatif. Il possède trois équilibres (0,0), (1,0) et (-1,0). Lessystèmes linéarisés au voisinage de ces équilibres correspondent respectivement à unpoint selle en (0,0) et deux centres en (±1,0). Les orbites du système non linéairesont données par les courbes H(x, y) = constante; le point selle reste un point selleet les centres restent des centres

• Quand λ 6= 0, on voit facilement que les équilibres doivent vérifier

(

∂H

∂x

)2

+

(

∂H

∂y

)2

= 0

et donc ils sont encore donnés par (0,0) et (±1,0). L’analyse des systèmes linéarisésau voisinage des équilibres ne change pas (vérifier cette affirmation). On calcule

facilement dH/dt le long d’une trajectoire(

x(t), y(t))

:

dH

dt= λH

[

(

∂H

∂x

)2

+

(

∂H

∂y

)2]

.

Donc la courbe H(x, y) = 0 est encore invariante sous le système. Elle est constituéede 3 orbites: l’équilibre et les deux boucles β1 et β2 (voir la figure ci-dessous).

• Quand λ > 0, le long de toute trajectoire débutant à l’intérieur d’une boule on aH < 0 et dH/dt < 0. Il suit du Théorème de Poincaré-Bendixson que l’ensembleω-limite d’une telle trajectoire est (1,0) (si elle débute à l’intérieur de β1) ou (-1,0)(si elle débute à l’intérieur de β2) (justifiez ! montrez qu’il ne peut y avoir d’orbitepériodique à l’intérieur d’une boucle).

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Page 67: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

• Quand λ < 0, on a dH/dt > 0 à l’intérieur des boucles et dH/dt < 0 à l’extérieurde celles-ci. Il suit alors du Théorème de Poincaré-Bendixson que l’ensemble ω-limited’une trajectoire débutant à l’intérieur d’une boucle βi (i = 1,2) est βi ∪ (0, 0) etl’ensemble ω-limite d’une trajectoire débutant à l’extérieur des boucles est (0, 0)∪β1 ∪ β2. L’ensemble α-limite d’une trajectoire débutant à l’intérieur d’une boucleest soit l’équilibre (1,0), soit l’équilibre (-1,0).

5. Perturbations autonomes d’un système hamiltonien plan

Dans cette section, on considère un système plan de la forme

~x = ~f(~x) + ε~g(~x), ~x = (x1, x2)T ∈ R2, (3.11)

où ε est un petit paramètre et ~f,~g sont de classe Cr, r ≥ 1. On suppose que lesystème non perturbé défini par ε = 0

~x = ~f(~x), (3.12)

est hamiltonien, i.e.

~f(x1, x2) =(∂H

∂x2(x1, x2),−

∂H

∂x1(x1, x2)

)T

, (3.13)

et qu’il possède une famille à un paramètre de solutions périodiques

Γr : ~x = ~x(t, r),

67

Page 68: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 3 — Le théorème de Poincaré-Bendixson

où les fonctions ~x(t, r) ont une période minimale Tr et r appartient à un intervalleI fini ou semi-infini de R.

Considérons la section de Poincaré S ⊂ R2 définie par

S = ~x(0, r) | r ∈ I. (3.14)

Notons ~x(t, r, ε) la solution du système perturbé (3.11) qui tend vers ~x(t, r) quandε → 0, normalisée de telle façon que ~x(0, r, ε) = ~x(0, r). Soit Tr(ε) le temps depremier retour dans la section de Poincaré. Clairement Tr(0) = Tr. La fonction

h(r, ε) ≡ H(~x(Tr(ε), r, ε))−H(~x(0, r)) = εM(r) +O(ε2), (3.15)

est une mesure de la distance entre ~x(Tr(ε), r, ε) et ~x(0, r). Nous allons montrer que

M(r) =

∫ Tr

0

f(~x(t, r)) ∧ g(~x(t, r)) dt, (3.16)

où pour ~u = (u1, u2)T , ~v = (v1, v2)

T , ~u∧~v = u1v2−u2v1. M(r) s’appelle l’intégralede Melnikov le long du cycle Γr.

Acceptant ce résultat pour un moment, soit

h(r, ε) =1

εh(r, ε) = M(r) +O(ε).

Supposons qu’il existe r0 tel que M(r0) = 0 et M ′(r0) 6= 0. Dans ce cas

h(r0, 0) = 0 et∂h

∂r(r0, 0) 6= 0.

En vertu du théorème des fonctions implicites, il existe donc une unique fonction

r(ε) = r0 +O(ε),

définie sur un voisinage suffisamment petit de 0 telle que

h(r(ε), ε) = 0⇔ H(~x(Tr(ε)(ε), r(ε), ε))−H(~x(0, r(ε))) = 0,

ce qui montre que la solution du système perturbé (3.11) partant de la conditioninitiale ~x(0, r(ε)) est périodique. Cette solution est en fait un cycle limite du systèmeperturbé, qui tend vers l’orbite périodique Γr0

du système non perturbé (3.12), quandε→ 0.

Théorème 2 Supposons qu’il existe r0 ∈ I tel que

M(r0) = 0 et M ′(r0) 6= 0, (3.17)

avec M(r) défini comme en (3.16). Alors, pour ε 6= 0 suffisamment petit, le système(3.11) possède un unique cycle limite hyperbolique proche de Γr0

.

68

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PHYS2111

Démonstration. En vertu de la discussion précédente, il nous reste à établir laformule (3.16), ainsi que le fait que la solution périodique du système perturbé estun cycle limite hyperbolique, i.e. |P ′

ε(r(ε))| 6= 1, où Pε : I → I, ε 6= 0, dénotel’application de Poincaré du système perturbé.

En développant

~x(t, r, ε) = ~x(t, r) + ε~y(t, r) +O(ε2),

et en substituant dans (3.11), on obtient que ~y(t, r) est solution de l’équation auxvariations

~y = df(~x(t, r))~y + ~g(~x(t, r)). (3.18)

En particulier on obtient

~x(Tr(ε), r, ε) = ~x(Tr(ε), r) + ε~y(Tr(ε), r) +O(ε2)

= ~x(Tr, r) + ε[~f(~x(Tr, r))∂Tr

∂ε(0) + ~y(Tr, r)] +O(ε2).

Par hypothèse, les solutions ~x(t, r) du système non perturbé (3.12) sont périodiquesde période Tr, i.e. ~x(Tr, r) = ~x(0, r). De là on obtient

H(~x(Tr(ε), r, ε))−H(~x(0, r)) =

ε dH(~x(0, r))[~f(~x(0, r))∂Tr

∂ε(0) + ~y(Tr, r)] +O(ε2).

Par définition du champ de vecteur hamiltonien ~f (3.13) on a

dH(~x)~u = ~f(~x) ∧ ~u, ∀~u ∈ R2,

et donc

H(~x(Tr(ε), r, ε))−H(~x(0, r)) = ε ~f(~x(0, r)) ∧ ~y(Tr, r) +O(ε2). (3.19)

La clef du calcul consiste à observer que le terme en ε dans (3.19) est effectivementcalculable en termes de quantités connues. En effet, en utilisant (3.12) et (3.18), ona

d

dt(~f(~x(t, r)) ∧ ~y(t, r)) = (d~f(~x(t, r))~f(~x(t, r))) ∧ ~y(t, r)+

~f(~x(t, r)) ∧ (df(~x(t, r))~y(t, r) + ~g(~x(t, r)))

= tr[d~f(~x(t, r))]~f(~x(t, r)) ∧ ~y(t, r) + ~f(~x(t, r)) ∧ ~g(~x(t, r)),(3.20)

où la dernière égalité résulte de l’identité

(A~u) ∧ ~v + ~u ∧ (A~v) = tr(A) ~u ∧ ~v, ∀ matrice A 2× 2, ∀~u,~v ∈ R2,

avec tr(A) =trace de A. Puisque ~f est hamiltonien, on a

tr(d~f(~x)) =∂f1

∂x1(~x) +

∂f2

∂x2(~x) =

∂2H

∂x1∂x2(~x)− ∂2H

∂x2∂x1(~x) = 0.

69

Page 70: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 3 — Le théorème de Poincaré-Bendixson

En intégrant l’équation (3.20) de 0 à Tr, puisque ~x(Tr, r) = ~x(0, r) et ~y(0, r) = 0, onobtient

~f(~x(0, r)) ∧ ~y(Tr, r) =

∫ Tr

0

~f(~x(t, r)) ∧ ~g(~x(t, r))dt. (3.21)

En substituant (3.21) dans (3.19), on obtient précisément l’équation (3.15) avecM(r) défini comme en (3.16).

Notons Pε : I → I l’application de Poincaré du système perturbé. En vertu de(3.15) on a

H(~x(0, Pε(r)))−H(~x(0, r)) = εM(r) +O(ε2).

En différentiant cette équation par rapport à ε et en évaluant le résultat en ε = 0,un simple calcul montre que

Pε(r) = r + εM(r)

c′(r)+O(ε2), (3.22)

où c(r) = H(~x(t, r)) = H(~x(0, r)). Notons que c(r) est une fonction croissante oudécroissante de r, et donc c′(r) 6= 0.

Soit r(ε) = r0+O(ε) la valeur de r correspondant à l’unique orbite périodique dusystème perturbé, qui tend vers Γr0

quand ε tend vers 0. L’équation (3.22) impliqueque

P ′ε(r(ε)) = 1 + ε

M ′(r0)

c′(r0)+O(ε2), (3.23)

où ′ dénote la dérivée par rapport à r. Puisque M ′(r0) 6= 0, cela montre que, pour εsuffisamment petit, cette orbite périodique est un cycle limite hyperbolique attractifou répulsif, selon que ε M ′(r0)/c

′(r0) est négatif ou positif.⊓⊔

Exemple. Soit l’équation de Van der Pol

x = y + ε(

x− x3

3

)

y = −x.

Le sytstème non perturbé (oscillateur harmonique) est hamiltonien pour H = 12(x2+

y2). Hormis l’équilibre (0, 0), ses solutions sont toutes périodiques de période mini-male 2π et données par

~x(t, r) = (r cos t,−r sin t)T , r > 0.

On calcule immédiatement à partir de (3.16) que

M(r) =

∫ 2π

0

(

−r sin t−r cos t

)

r cos t− r3

3cos3t

0

dt

=

∫ 2π

0

(

r2 cos2t− r4 cos4t

3

)

dt =π r2

4(4− r2).

70

Page 71: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

PuisqueM(2) = 0 et M ′(2) = −4π 6= 0,

on en déduit que l’équation de Van der Pol possède pour ε suffisamment petit, ununique cycle limite qui tend vers le cercle de centre 0 et de rayon 2 quand ε tendvers 0. Comme

c(r) = H(~x(t, r)) =r2

2,

on a que M ′(2)/c′(2) = −2π < 0. Donc, en vertu de (3.23), le cycle limite est stablepour ε > 0 et instable pour ε < 0.

Pour une étude de la localisation et de la forme du cycle limite de l’équation deVan der Pol quand ε→∞, voir l’exercice 17 du Chapitre 3.

On peut aussi se demander ce qu’il advient des séparatrices d’un système planhamiltonien sous l’influence d’une petite perturbation. Soit

~x = ~f(~x) + ε~g(~x, µ), (3.24)

une petite perturbation d’un système hamiltonien, où µ = (µ1, . . . , µn) ∈ Rn dénoteun paramètre. Supposons que pour ε = 0, le système possède une orbite homocline

Γ0 : ~x = ~γ0(t), −∞ < t <∞,

à un point fixe de type selle ~x0, i.e.

limt→±∞

~γ0(t) = ~x0.

On définit alors l’intégrale de Melnikov suivante

M(µ) =

∫ ∞

−∞~f(~γ0(t)) ∧ ~g(~γ0(t), µ)dt. (3.25)

Par un raisonnement semblable à celui fait précédemment, on obtient le résultatsuivant:

Théorème 3 Supposons qu’il existe µ0 ∈ Rn tel que

M(µ0) = 0 et∂M

∂µ1(µ0) 6= 0. (3.26)

Alors pour ε 6= 0 suffisamment petit, il existe µ(ε) = µ0 + O(ε) tel que le système(3.24) avec µ = µ(ε) possède une unique orbite homocline à un point selle ~x0(ε),proche de Γ0.

Exemple. Considérons une équation de Duffing perturbée

x = yy = x− x3 + ε (µ1y + µ2x

2y).(3.27)

71

Page 72: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 3 — Le théorème de Poincaré-Bendixson

Pour ε = 0, le système est hamiltonien avec

H(x, y) =y2

2− x2

2+x4

4.

Ce système comporte deux orbites homoclines Γ+0 et Γ−

0 au point selle ~x0 = (0, 0),d’équations respectives

Γ±0 : y2 = x2 − x4

2, x > 0 ou x < 0,

correspondant à une énergie nulle. Nous calculons l’intégrale de Melnikov (3.25) lelong de Γ+

0 (le calcul est semblable le long de Γ−0 ), en utilisant le fait que le long de

la trajectoire on a dt = dx/x = dx/y:

M(µ) =

∫ ∞

−∞~f(~γ+

0 (t)) ∧ ~g(~γ+0 (t), µ)dt = 2

√2

0

x

1− x2

2(µ1 + µ2x

2)dx

=4

15(5µ1 + 4µ2).

Donc, en vertu du Théorème 2, si µ2 = −5µ1/4, pour ε 6= 0 suffisamment petit,il existe un µ(ε) = µ1(1,−5/4)T + O(ε), tel que le système (3.27) avec µ = µ(ε)possède deux orbites Γ±

ε homoclines au point selle ~x0(ε) = (0, 0), qui tendent vers Γ±0

quand ε→ 0. Notons que le point selle ~x0(ε) est indépendant de ε, ce qui n’est pasle cas en général. On peut aussi montrer que les orbites Γ±

ε sont stables si εµ1 < 0et instables si εµ1 > 0.

The graphic of the system (3.27) for small ε 6= 0, µ2 = −5µ1/4 + 0(ε) and εµ1 < 0.

72

Page 73: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

IV EXEMPLES ÉLÉMENTAIRES DE SYSTÈMES≪ CHAOTIQUES ≫

1. L’application x→ 2x mod 1

On considère l’application f : I → I où I = [0, 1[, définie par

f(x) = 2 x mod 1. (4.1)

Il s’agit d’une itération très simple. On prend un nombre quelconque compris entre0 et 1 (1 non compris), on le multiplie par 2 et si le résultat dépasse l’unité, onsoustrait 1. L’application f est non linéaire, discontinue et non inversible. Cetteapplication est représentée sur la figure ci-dessous :

Figure 1

Remarque. La discontinuité de f n’est pas essentielle. Soit U : I → S1 ⊂ C définiepar U(x) = e2πix, où S1 = z ∈ C| |z| = 1, et soit F : C→ C définie par F (z) = z2,alors

U f = F |s1 U.Géométriquement, F correspond au doublement des angles sur le cercle. F estcontinue (et même analytique), non linéaire et non inversible.

Rappelons que tout x ∈ [0, 1[ admet un unique développement binaire

x =

∞∑

n=1

bn2n, (4.2)

avec bn = 0 ou bn = 1 et satisfaisant aussi à la condition supplémentaire que la suitedes bn ne se termine pas par une suite de 1. Cette dernière condition est nécessairepour assurer l’unicité du développement. En effet

1

2=

0

2+

1

22+

1

23+

1

24+ · · ·

Page 74: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 4 — Exemples élémentaires de systèmes << chaotiques >>

Pour calculer le développement (4.2), on multiplie le nombre x par 2 et on prend sapartie entière pour déterminer b1. On répète ensuite le processus, en multipliant lereste par 2 et en prenant la partie entière, on trouve b2, et ainsi de suite. On écritsouvent

x = ·b1b2b3 . . . (4.3)

Par exemple

1/4 = ·01000 . . . = ·010 , 7/10 = ·1011001100110 . . . = ·10110,

où la barre supérieure signifie une répétition infinie de la même suite.

Les bn sont bien sûr des fonctions de x, et il sera parfois utile d’écrire

x =b1(x)

2+b2(x)

22+b3(x)

23+ . . . (4.4)

Les graphes des fonctions b1(x), b2(x), b3(x), . . . sont comme ci-dessous :

Figure 2

La représentation binaire fournit une représentation très commode pour étudierla dynamique de f .

Proposition 4.1. Dans la représentation binaire, l’application f (4.1) est donnéepar

x = · b1b2b3b4 . . . → f(x) = · b2b3b4 . . . , (4.5)

Autrement dit, f décale la suite vers la gauche, en éliminant le premier termeb1.

Démonstration. Puisque

2x = b1 +

∞∑

n=1

bn+1

2n,

et que la somme de la série infinie dans le second membre de cette égalité est stricte-ment inférieure à 1, on a deux possibilités. Si b1 = 0, alors

f(x) = 2x mod 1 = 2x = · b2b3b4 . . .

74

Page 75: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

et si b1 = 1, on a

f(x) = 2x mod 1 = 2x− 1 = · b2b3b4 . . .

La formule (4.5) est fondamentale et permet de comprendre aisément la dy-namique de f . Elle va nous permettre d’illustrer une des caractéristiques princi-pales de ce que l’on appelle “chaos”, la sensibilité par rapport aux conditions ini-tiales. Prenons deux points x et y dans [0, 1[ dont le développement binaire nediffère que par le coefficient bn+1 (pour un n fixé, par exemple n = 9). On a donc|x − y| = 2−(n+1). Mais après n itérations, ces deux points seront séparés d’unedistance de 1

2, |fn(x)− fn(y)| = 1

2!

Définition 4.2. Soit f : M → M,M ⊂ R. On dit que f possède la propriétéde sensibilité par rapport aux conditions initiales (en abrégé, possède lapropriété SCI) si

∃d > 0, ∃C <∞ tel que ∀x ∈M, ∀ε > 0, ∃y ∈M, ∃n ≤ C| log ε|,

avec |y − x| < ε et |fn(y)− fn(x)| ≥ d. (4.6)

Intuitivement, une application possède la propriété de sensibilité par rapport auxconditions initiales s’il existe des points arbitrairement proches de x qui se séparentde x d’une distance d’au moins d, après un nombre d’itérations pas trop grand c’est-à-dire qui ne croît que logarithmiquement lorsque ε diminue (n ≤ C| log ε|; notonsque la constante C ici pourrait être éliminée en changeant la base du logarithmequ’on prendra ici égale à 2). Concrètement, supposons que l’on fixe une précisiond que l’on veut avoir sur nos prévisions (par exemple, météorologiques) concernantun système dont l’évolution est modélisée par f . Notre connaissance des conditionsinitiales du système (x ici) est nécessairement imparfaite. Le nombre ε mesurecette imprécision. Si de meilleurs instruments de mesure permettent de réduireε d’un facteur 2k, le temps n sur lequel nos prévisions resteront valables (c’est-à-dire, avec une imprécision inférieure à d) n’augmentera que de Ck. Le fait qu’uneaugmentation exponentielle (2k) dans la précision des données ne se traduit que parune augmentation linéaire (Ck) de la durée pendant laquelle nos prévisions sontfiables est la signature essentielle du chaos.

Il est utile, à titre d’exercice, de comparer la condition (4.6) avec la conditionque f , et donc fn pour tout n, soit uniformément continue :

∀n, ∀d > 0, ∃ ε tel que, ∀x, y ∈M,

|x− y| ≤ ε implique

|fn(x)− fn(y)| ≤ d,

et de remarquer que ces deux conditions sont parfaitement compatibles. Dans lepremier cas on choisit n grand (mais pas trop grand) en fonction de ε tandis que

75

Page 76: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 4 — Exemples élémentaires de systèmes << chaotiques >>

dans le deuxième, on fixe n et on choisit ε petit en fonction de n.

Nous aurons besoin du lemme suivant :

Lemme 4.3. Pour qu’un ensemble E ⊂ I = [0, 1[ soit dense (dans I), il suffit que

∀y ∈ I, ∀N entier positif, ∃x ∈ E tel que bn(x) = bn(y), ∀n ≤ N. (4.7)

Démonstration. Soit ε > 0 et y ∈ I. Il faut montrer qu’il existe x ∈ E tel que|x − y| < ε. Soit N tel que 2−N < ε. Pour ces choix de y et N , prenons x commeen (4.7). Alors

|x− y| ≤∞∑

n=N+1

|bn(x)− bn(y)|2n

≤ 1

2N< ε. (4.8)

Théorème 4.4. Soit f l’application définie en (4.1),

(i) f possède la propriété SCI.

(ii) L’ensemble des points dont l’orbite est périodique est dense.

(iii) Il existe une orbite dense (en fait tous les points, sauf un ensemble de mesurenulle, ont une orbite dense).

Démonstration.(i) Fixons x ∈ I et ε > 0. Choisissons n tel que 2−(n+1) < ε (par exemple, en choi-sissant n = [| log ε|], on peut prendre C = 1 dans (4.6)). Ecrivons le développementbinaire de x

x = · b1b2 . . . bnbn+1bn+2 . . .

et définissonsy = · b1b2 . . . bn(1− bn+1)bn+2 . . . ,

c’est-à-dire que y est obtenu en modifiant seulement le (n+1)ème terme du développe-ment de x. Clairement,

|x− y| = 2−(n+1) < ε et |fn(x)− fn(y)| = 1

2.

Donc on peut dans ce cas prendre d = 12

dans la définition 4.2.

(ii) Soit E l’ensemble des points dont l’orbite est périodique. Clairement

E = x dont le développement binaire est périodique.

On veut montrer que E est dense dans I. On applique le lemme 4.3. Soit y ∈ I etN un entier positif. On définit x ∈ E à partir de y comme suit :

x = · b1(y)b2(y) . . . bN(y)0.

76

Page 77: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

x satisfait à la condition (4.7), ce qui prouve que E est dense dans I.Notons qu’on a ajouté un zéro après bN (y) pour éviter la suite 1, qui est exclue

par définition et qui pourrait apparaître si bi(y) = 1, ∀i = 1, ..., N .

(iii) On va pour l’instant seulement établir l’existence d’une orbite dense (voirl’interprétation probabiliste ci-dessous, pour la démonstration du fait que l’ensembledes points dont l’orbite est dense est de mesure de Lebesgue 1). Pour obtenir uneorbite dense, on ordonne toutes les suites finies de 0 et de 1 d’abord selon leurlongueur, et pour une longueur quelconque, selon un ordre quelconque, par exemplelexicographique. On a par exemple :

(0)(1)(00)(01)(10)(11)(000)(001)(010)(011)(100)(101)(110)(111) etc . . .

Puis on construit un point x ∈ I en mettant toutes ces suites finies l’une aprèsl’autre :

x = · 0100011011000001010011100101110111 . . .

Il est facile de voir que l’orbite de x,E = fn(x), n = 0, 1, 2, 3, . . ., satisfait aucritère (4.7) et donc que cette orbite est dense dans I. En effet, soit y ∈ I et N unentier positif. La suite

b1(y)b2(y) · · · bN(y)

apparaît quelque part dans le développement binaire de x. Mettons qu’elle appa-raisse entre les places k + 1 et k +N , c’est-à-dire

bk+n(x) = bn(y) pour n = 1, . . . , N.

Puisquefk(x) = · bk+1(x)bk+2(x) . . . bk+N(x) . . . ,

on abn(fk(x)) = bn(y), ∀n ≤ N.

Donc, fk(x) est un élément de E (l’orbite de x) qui satisfait (4.7). Ceci et le lemmeprouvent que l’orbite de x est dense dans I.

Définition 4.5. On dit qu’un point p d’une application f est finalement pério-dique de période k si il existe un entier N ≥ 0 tel que fn+k(p) = fn(p), pour toutn ≥ N .

Exercice 4.6. Montrez que pour l’application f(x) = 2x mod 1, l’ensemble despoints finalement périodiques de période 1 coïncide avec l’ensemble des rationnelsdyadiques dans l’intervalle I = [0, 1[. Un rationnel dyadique est un nombre de laforme p

2n avec p ∈ Z, n ∈ N .

Remarque Pour bien comprendre la définition 4.2, considérons l’application sui-vante :

f : M →M

77

Page 78: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 4 — Exemples élémentaires de systèmes << chaotiques >>

oùM = x = (r, θ) ∈ R2 | 1 ≤ r ⊆ R2,

et f(r, θ) = (r, θ + αr) avec α > 0. Il est facile de démontrer que ∃C < ∞ tel que∀x ∈M, ∀ε > 0 ∃y ∈M, ∃n ≤ Cε−1 avec

|y − x| ≤ ε et |fn(y)− fn(x)| ≥√

2.

En effet, si x = (r, θ), on peut prendre y = (r+ε, θ), C = πα, et n tel que π

2≤ αnε ≤

π, ce qui est possible pour ε petit, (vérifier !).Dans cet exemple, il y a une forme de “sensibilité aux conditions initiales”, mais

où l’erreur n’augmente que linéairement en n ou , pour le dire autrement, où uneamélioration d’un facteur 2k dans notre connaissance des conditions initiales (ε)mène à une augmentation d’un facteur 2k dans la durée pendant laquelle nos prévi-sions sont fiables puisque l’erreur est d’ordre nαε. Le fait qu’une petite erreur surles conditions initiales mène à une erreur donnée sur le résultat obtenu après untemps suffisamment long est un phénomène très général et n’est pas caractéristiquedu ‘chaos’, contrairement à ce qu’on lit parfois dans la littérature. Ce qui est car-actéristique du chaos, c’est la sensibilité “exponentielle” inclue dans la définition4.2.

Interprétation probabiliste

Soit L la mesure de Lebesgue sur I, c’est-à-dire la longueur. En regardant les graphesdes fonctions bn(x) sous la formule (4.4), on voit facilement par exemple que

Lx|b1(x) = 1, b2(x) = 0, b3(x) = 1 = L[5/8, 6/8[= 1/8,

Lx|b1(x) = 1 = L[1/2, 1[= 1/2,

Lx|b2(x) = 0 = L([0, 1/4[∪[1/2, 3/4[) = 1/2,

Lx|b3(x) = 1 = L([1/8, 1/4[∪[3/8, 1/2[∪[5/8, 3/4[∪[7/8, 1[) = 1/2,

et donc

Lx|b1(x) = 1, b2(x) = 0, b3(x) = 1 = Lx|b1(x) = 1Lx|b2(x) = 0Lx|b3(x) = 1 !

On généralise facilement. Si ε = 0 ou 1,

Lx|bn(x) = ε = 1/2,

et si ε1, · · · , εn est une suite de 0 et de 1, alors

Lx|b1(x) = ε1, . . . , bn(x) = εn = Lx|b1(x) = ε1 . . . Lx|bn(x) = εn =

(

1

2

)n

.

On voit donc que l’on peut utiliser les fonctions bn(x) comme modèle d’un jeu depile ou face. Pour ce faire on établit le dictionnaire suivant :

pile 0face 1nème jet (n = 1, 2, 3, . . .) bn(x)événement ensemble mesurableprobabilité d’un événement mesure de l’ensemble correspondant.

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Page 79: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

Il est alors facile de comprendre intuitivement pourquoi presque tous les points (parrapport à la mesure de Lebesgue) ont une orbite dense : en effet, dans le jeu de pileou face, si l’on jette indéfiniment la pièce, la probabilité que n’importe quelle suitefinie de 0 et de 1 apparaisse quelque part est 1. En effet, soit ε1 . . . εn une suite finiequelconque de 0 et de 1. La probabilité que cette suite n’apparaisse jamais est pluspetite que la probabilité qu’elle n’apparaisse ni entre le premier et le nème jet, ni entren + 1ème jet et le jet d’indice 2n, ni . . . entre le jet d’indice kn + 1 et celui d’indice(k + 1)n, pour tous les k ∈ N. Or la probabilité d’apparition de la suite ε1 . . . εn

dans les jets d’indice kn + 1, . . . (k + 1)n pour un k donné est égale à 2−n; donc laprobabilité qu’elle n’apparaisse pas dans cet intervalle vaut 1 − 2−n < 1. Il suffitalors d’observer que, si on a une famille infinie d’événements indépendants chacun deprobabilité inférieure à 1−δ, avec δ > 0, la probabilité pour qu’aucun d’entre eux nese produise est zéro ((1− δ)∞ = 0). Ici, la famille infinie d’événements correspondaux différents k. Donc, pour chaque suite finie ε1, . . . , εn, la probabilité qu’ellen’apparaisse nulle part est zéro. Il suffit maintenant de remarquer que l’ensemble detoutes les suites finies est dénombrable et qu’une union dénombrable d’ensembles demesure (= de probabilité) nulle est de mesure nulle. Une façon imagée d’exprimerce résultat (due à Borel) est de dire qu’un singe tapant à la machine (“au hasard”)suffisamment longtemps finira par écrire n’importe quelle suite finie de symboles telleque la Bible, les œuvres de Shakespeare ou les réponses aux questions d’examen.

Donc, en vertu du dictionnaire :

Lx|n’importe quelle suite finie de 0 et de 1 apparaisse

quelque part dans le développement binaire de x = 1.

De là on déduit, comme dans le théorème 4.4., que l’orbite sous f de n’importelequel de ces x est dense, et donc que l’ensemble des points dont l’orbite n’est pasdense est de mesure nulle.

Interprétation géométrique

Définissons I0, [0, 1/2[ et I1 = [1/2, 1[ une partition de I = [0, 1[, I = I0⋃

I1, I0⋂

I1 =∅. De ce qui précède, on déduit aisément que pour x ∈ I, bn+1(x) = 0 (resp.bn+1(x) = 1) si et seulement si fn(x) ∈ I0 (resp. fn(x) ∈ I1). Donc au lieu depenser à la suite b = (b1(x), b2(x), b3(x), . . .) comme donnant le développement bi-naire de x, on peut voir b comme l’itinéraire de x, c’est-à-dire la suite des indices(0 ou 1) correspondant aux intervalles (I0 ou I1) “visités” par l’orbite de x. Doncl’itinéraire, qui est une façon grossière de voir la trajectoire (on visite successivementdes intervalles), en fait détermine univoquement x ∈ I. De plus, à tout itinérairecorrespond un x, ce qui reflète le caractère chaotique du système. En effet, on peutprendre une suite b quelconque de 0 et de 1, par exemple le résultat d’un jeu (infini)de pile ou face (0 = pile, 1 = face). Il existe un x qui “visite” I0 au temps n si lerésultat du nème jet est pile et I1 s’il est face. Comme on le verra plus loin, cettefaçon de penser a une portée plus générale.

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Page 80: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 4 — Exemples élémentaires de systèmes << chaotiques >>

On prend habituellement les trois propriétés du théorème 4.4 comme définition duchaos.

Définition 4.7. f : M →M est dite chaotique si(i) f possède la propriété SCI.(ii) f possède une orbite dense dans M .(iii) l’ensemble des points périodiques de f est dense dans M .

La première propriété exprime l’imprévisibilité du système. La deuxième propriétéexprime le caractère indécomposable du système : le système ne peut pas êtredécomposé en deux ouverts disjoints (non vides) invariants sous f (en effet, deuxtels ouverts intersectent nécessairement chacun l’orbite dense de f). Finalement, latroisième propriété exprime le fait que, au milieu de ce comportement aléatoire, il ya néanmoins un élément de régularité, un ensemble dense de points périodiques.

Exercice 4.8. Soit f : [0, 1[→ [0, 1[ définie par f(x) = (x+ p) mod 1, où p est unnombre irrationnel. Vue comme application définie sur le cercle (en identifiant 0 et1), f correspond à une rotation d’angle constant. Montrez que tous les points ontune orbite dense et que f n’est pas chaotique. En particulier, f ne possède pas lapropriété SCI.

Exercice 4.9. Soit f : [0, 1[→ [0, 1[ définie par f(x) = px mod 1, p ∈ N, p 6= 0, 1.Montrez que f est chaotique.

2. L’application <<en tente>>

L’exemple suivant montre l’intérêt du point de vue des itinéraires, il va aussi nouspermettre d’établir que la fonction logistique fa(x) = ax(1 − x), que nous avonscommencé à étudier dans le chapitre 1, est chaotique pour a = 4.

On considère f : I = [0, 1]→ I = [0, 1], définie par

f(x) = 2x si x ≤ 1

2, (4.9)

= 2(1− x) si1

2≤ x.

Notons qu’ici I, contrairement à la Section 4.1, désigne l’intervalle fermé [0, 1].Le graphe de f a la forme d’une tente, aussi nous appellerons f l’application “en

tente”.

80

Page 81: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

Figure 3

Soit∑

= s = (s0, s1, s2, . . .)|sj = 0 ou 1, (4.10)

c’est-à-dire l’ensemble des suites de 0 et de 1. Soit I0 = [0, 1/2] et I1 = [1/2, 1]. Ondéfinit

S : I →∑

: x→ S(x) =(

s0(x), s1(x), s2(x) . . .)

, (4.11)

par la méthode des itinéraires :

sn(x) = 0 si fn(x) ∈ I0, (4.12)

= 1 si fn(x) ∈ I1.Remarquez qu’il y a une orbite spéciale, ou plutôt un groupe d’orbites, pour lesquellesl’itinéraire n’est pas bien défini, puisque les intervalles I0 et I1 s’intersectent enx = 1/2. L’orbite correspondante est 1/2, 1, 0, 0, . . ., à laquelle on peut associerles deux suites

S(1/2) = (0, 1, 0, 0, 0, . . .) ou S(1/2) = (1, 1, 0, 0, 0, . . .).

En fait, à tout point x dont l’orbite “atterrit” en 1/2 pour un certain n, on peutfaire correspondre deux suites :

(s0, s1, . . . , sn−1, 0, 1, 0, 0, 0, . . .) ou (s0, s1, . . . , sn−1, 1, 1, 0, 0, 0, . . .). (4.13)

A l’exception de ces points, qui sont de la forme p2k (p entier) et sont finalement

envoyés sur le point fixe x = 0, tous les autres points ont un itinéraire univoquementdéfini. Cette ambiguité est évidemment reliée à celle qui affectait le développementbinaire de x dans la Section 4.1. Si l’on veut absolument que l’application S soitpartout bien définie, une façon de faire est d’introduire une relation d’équivalence ∼

sur Σ, en déclarant équivalentes les deux suites en (4.13). On note alors Σ′ l’espacequotient Σ′ = Σ/∼ et l’on a une application bien définie

S : I → Σ′. (4.14)

Ci-dessous, on a représenté schématiquement quelques itinéraires.

81

Page 82: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 4 — Exemples élémentaires de systèmes << chaotiques >>

Figure 4

Proposition 4.10. L’application S définie en (4.14) est bijective.

Démonstration. On écrit x ∈ [0, 1] sous forme binaire x = .b1(x)b2(x)b3(x) . . ., avecbn(x) = 0 ou bn(x) = 1. On accepte n’importe quelle suite de 0 et de 1. Lesnombres de la forme p/2k ∈]0, 1[ ont alors deux représentations binaires. x = 1 a lareprésentation binaire .1111 . . . Utilisant la définition (4.9) de f , on voit que

f(x) = .b2(x)b3(x) . . . si b1(x) = 0,

= .(

1− b2(x))(

1− b3(x))

. . . si b1(x) = 1,

ce qui peut s’écrire

f(x) = .(

|b1(x)− b2(x)|) (

|b1(x)− b3(x)|)

. . .

Par induction, on déduit facilement que

fn(x) = .(

|bn(x)− bn+1(x)|) (

|bn(x)− bn+2(x)|)

. . . ,

et doncs0(x) = b1(x)

sn(x) = |bn(x)− bn+1(x)|, n = 1, 2, . . . (4.15)

Remarquez que les nombres binaires ·b1b2 . . . bn1000 . . . = ·b1b2 . . . bn0111 . . . sont(comme il se doit) envoyés sur des suites équivalentes au sens de (4.13). Inversément,

82

Page 83: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

la formule (4.15) montre que la suite des sn, n = 0, 1, 2, . . . permet de reconstruirela suite des bn, n = 1, 2, . . . inductivement, via

b1 = s0, b2 = |b1 − s1|, . . . , bn+1 = |bn − sn|, . . . (4.16)

On vérifie aisément que si deux suites sont équivalentes au sens de (4.13), ellesdéfinissent deux développements binaires équivalents et donc le même point x ∈[0, 1]. Donc (4.16) est l’application inverse de S, ce qui établit la proposition.

Il est maintenant évident que, au niveau de l’espace des suites Σ (ou plus précisé-ment Σ′), la dynamique de l’application f se traduit par le décalage σ : Σ′ → Σ′:

σ(s0, s1, s2, . . .) = (s1, s2, s3, . . .). (4.17)

En effet, par définition de S,

S f = σ S. (4.18)

Nous allons montrer à partir de cette observation que l’application f possède lapropriété SCI. En effet soit x ∈ I et ε > 0 arbitraires. Soit n tel que 2−n < ε(par exemple, avec n = 2 [| log ε|], on peut satisfaire (4.6) avec C = 2) et soit(s0(x), s1(x), . . .) l’itinéraire de x. Soit y n’importe quel point de I dont l’itinérairea la forme

S(y) =(

s0(x), s1(x), . . . , sn−1(x),(

1− sn(x))

,(

1− sn+1(x))

, . . .)

, (4.19)

c’est-à-dire que les n premiers intervalles visités par y sont les mêmes que ceux visitéspar x, mais les (n+ 1)ème et (n+ 2)ème intervalles visités par y, sont tous les deuxdifférents de ceux visités par x, après quoi on n’impose plus aucune condition sur y.Alors, en utilisant (4.16) et l’inégalité (4.8), on a

|x− y| ≤ 2−n < ε, (4.20)

et, puisque

S(

fn(x))

=(

sn(x), sn+1(x), . . .)

et

S(

fn(y))

=((

1− sn(x))

,(

1− sn+1(x))

, . . .)

, (4.21)

on a nécessairement

|fn(y)− fn(x)| ≥ 1/4. (4.22)

En effet, par construction (cfr figure 4), fn(x) et fn(y) ne peuvent pas être tousles deux dans I0 ou dans I1 et si l’un appartient à I01, l’autre n’appartient pas àI11 (c’est-à-dire qu’il appartient à I10). Donc, leur distance est au moins égale àL(I01) = L(I11) = 1

4. Donc, on peut (par exemple) prendre d = 1

4dans la définition

4.2.

83

Page 84: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 4 — Exemples élémentaires de systèmes << chaotiques >>

Pour montrer que f est chaotique, il reste à établir les conditions (ii) et (iii) dela définition 4.7. Pour cela, on a besoin du

Lemme 4.11. Pour que E ⊂ I soit dense, il suffit que S(E) ⊂ Σ′ ait la propriétésuivante

∀t ∈ Σ′, ∀N entier positif, ∃s ∈ S(E) tel que ti = si, ∀i < N. (4.23)

Démonstration. Il suffit d’observer que, en vertu de (4.16), (4.23) implique que lespoints x et y de I dont les itinéraires sont respectivement s et t, ont un développe-ment binaire qui coïncide nécessairement jusqu’au Nème terme, et de répéter alorsla preuve du lemme 4.3.

Ce lemme étant acquis, la preuve que f satisfait les conditions (ii) et (iii) de ladéfinition 4.7 est identique à celle du théorème 4.4. Il suffit de répéter les argumentsau niveau des itinéraires. On a donc établi le

Théorème 4.12. L’application “en tente” (4.9) est chaotique.

La fonction logistique avec a = 4

Le graphe de l’application≪ en tente≫ (4.9) est très semblable à celui de l’applicationlogistique pour a = 4 :

g(x) := f4(x) = 4x(1− x). (4.24)

En fait ces deux applications sont conjuguées au sens de la définition suivante :

Définition 4.13. Les applications f et g sont (topologiquement) conjuguées sielles sont reliées par un homéomorphisme, c’est-à-dire que l’on a

C f = g C, (4.25)

pour une application bijective C, telle que C et C−1 soient continues.

Remarque On peut penser à C comme à un changement de coordonnées; (4.25) peuts’écrire

f = C−1 g Cce qui implique

fn = C−1 gn C. (4.26)

Remarquons que l’inverse d’une bijection continue entre ensembles compacts (telsque I = [0, 1]) est toujours continue. Il suffit donc de vérifier que C est bijectif etcontinu. Notons aussi qu’on s’intéresse souvent à des conjugaisons différentiables

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Page 85: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

(de classe Ck) c’est-à-dire telles que C et C−1 soient de classe Ck (ou encore que Csoit un difféomorphisme de classe Ck).

Proposition 4.14. L’application “en tente” f (4.9) et la fonction logistique g (4.24)sont conjuguées via l’application C : I → I, définie par

C(x) = (1− cosπx)/2. (4.27)

Démonstration. On a

g(C(x)) = 4

(

1− cosπx

2

)(

1 + cos πx

2

)

= sin2 πx,

Pour 0 ≤ x ≤ 12, on a

C(f(x)) =1− cos 2πx

2= sin2 πx,

et pour 12≤ x ≤ 1,

C(f(x)) =1− cos 2π(1− x)

2= sin2 πx.

Remarquons que C est de classe C∞ mais C−1 bien que continu, n’est pas declasse C1, comme on le voit sur le graphe.

Figure 5

Corollaire 4.15. Pour a = 4, l’application logistique est chaotique.

Que l’ensemble des points périodiques soit dense et qu’il existe une orbite densepour l’application logistique avec a = 4 est immédiat vu que l’application est con-juguée à l’application “en tente” qui possède ces propriétés. En effet, (4.26) im-plique que, si x est périodique pour f(fn(x) = x), alors C(x) est périodique pourg(gn(C(x)) = C(x)). Soit Per (f) (resp. Per (g)) l’ensemble des points périodiquessous f (resp. g). Pour montrer que Per (g) est dense il suffit donc de montrer que :

∀ε > 0, ∀y ∈ I, ∃x ∈ Per (f)

85

Page 86: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 4 — Exemples élémentaires de systèmes << chaotiques >>

tel que |y − C(x)| ≤ ε.Mais, comme C est continu, on sait qu’il existe un δ > 0 tel que si |C−1(y)−x| ≤ δ

alors |y − C(x)| ≤ ε et, comme Per (f) est dense, on peut trouver x ∈ Per (f) telque |C−1(y)− x| ≤ δ.

Le même type d’argument permet de démontrer l’existence d’une orbite dense.Mais, comme tel, il n’implique pas immédiatement la propriété SCI. En effet, cettepropriété dépend de la façon dont la distance entre fn(x) et fn(y) dépend de |x−y|et de n. Et le simple fait que C et C−1 soient continus ne suffit pas pour transposerces propriétés de f à g1.

Pour démontrer la propriété SCI pour g, on peut utiliser la méthode des itiné-raires.

Donc, à tout point x ∈ I, on fait correspondre son itinéraire (s0(x), s1(x), . . .)par la formule

sn(x) = 0 si gn(x) ∈ I0,= 1 si gn(x) ∈ I1.

Ci-dessous, on a représenté schématiquement quelques itinéraires :

Figure 6

Remarquons que C préserve I0 et I1, c’est-à-dire que x ∈ I0 (ou I1) ssi C(x) ∈ I0(ou I1). Donc, gn(x) ∈ I0 (resp. I1) est équivalent à C−1(gn(x)) ∈ I0 (resp. I1)et, par (4.26), est équivalent à fn(C−1(x)) ∈ I0 (resp. I1). Ce qui veut dire quel’itinéraire sous g de x est identique à celui, sous f , de C−1(x). Pour démontrerla propriété SCI, considérons un x donné ; on peut trouver un y tel que (4.6) soitvérifié, pour f avec x remplacé par C−1(x) et y remplacé par C−1(y). Pour obtenir la

1Exercice : Montrez que si C et C−1 étaient uniformément Lipschitziennes c’est-à-dire que∃L <∞ tel que ∀x, y, L−1|C(x) − C(y)| ≤ |x− y| ≤ L|C(x)− C(y)|, alors (4.26) implique que, sif possède la propriété SCI, g la possède aussi.

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PHYS2111

propriété SCI pour g, il faut se donner un d approprié et vérifier que |x−y| ≤ ε avecn ≤ C| log ε|. Notons que ce n’est pas immédiat parce que, pour g, les intervallescorrespondant à des itinéraires finis de longueur donnée ne sont pas tous de la mêmelongueur, contrairement à ce qui se passait pour f . Néanmoins, par construction,

x, y ∈ [C(x1), C(x2)],

où [x1, x2] désigne un intervalle correspondant à un itinéraire fini de longueur n pourf (et, donc, |x2 − x1| = 2−n). Donc, |x− y| ≤ C(x2)− C(x1) et, utilisant (4.7), ona :

C(x2)− C(x1) =

∫ x2

x1

C ′(x)dx =1

2

∫ x2

x1

π sin πxdx

≤ π

2

∫ x2

x1

dx =π

2(x2 − x1) =

π

2n+1.

Donc, étant donné x et ε > 0 arbitraires, en prenant n tel que π2n+1 < ε, ce qui est

possible pour n ≤ C| log ε|, on peut toujours trouver un y à une distance inférieureà ε de x tel que, après n itérations, les deux points seront séparés d’une distancesupérieure à d = L(I01) = L(I11) > 0.

3. Exposants de Lyapunov

Pour quantifier la sensibilité par rapport aux conditions initiales, on utilise souventla notion de nombre de Lyapunov ou d’exposant de Lyapunov. Si x1 désigne unecondition initiale, l’écart après n itérations pour une condition initiale voisine x1 +εest approximativement

|fn(x1 + ε)− fn(x1)| ≈ ε|(fn)′(x1)| = ε

n∏

i=1

|f ′(xi)|, (4.28)

où x1, x2, x3, . . . est l’orbite de x1. Pour obtenir (4.28), on utilise

(fn)′(x1) =

n−1∏

k=0

f ′(

fk(x1))

,

qui est obtenu en itérant

(f g)′(x) = f ′(

g(x))

g′(x),

et le fait que fk(x1) = xk+1, par définition. Donc, pour n grand, l’erreur ε estmultipliée en moyenne par

∏ni=1 |f ′(xi)|1/n à chaque itération.

Définition 4.16. Soit f une application différentiable sur la droite réelle R. Lenombre de Lyapunov L(x1) de l’orbite x1, x2, x3, . . . est défini comme

L(x1) = limn→∞

n∏

i=1

|f ′(xi)|1/n,

87

Page 88: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 4 — Exemples élémentaires de systèmes << chaotiques >>

si cette limite existe. Comme on va le voir, il est plus facile de travailler avecle logarithme de cette formule. On définit donc l’exposant de Lyapunov h(x1)comme

h(x1) = limn→∞

(1

n)

n∑

i=1

ln |f ′(xi)|, (4.29)

si cette limite existe. Remarquez que h existe si et seulement si L existe et ln L = h.

Exercice 4.17. Montrez que si le nombre de Lyapunov de l’orbite de x1 sousl’application f est L, alors le nombre de Lyapunov de l’orbite de x1 sous l’applicationfk est Lk.

Clairement, pour une orbite périodique x1, x2, . . . , xk, x1, x2, . . . de période k,l’exposant de Lyapunov est

h(x1) =1

k

k∑

i=1

ln |f ′(xi)|. (4.30)

Définition 4.18. Soit f une application différentiable. Une orbite x1, x2, . . . , xn, . . .est dite asymptotiquement périodique si elle converge vers une orbite périodiquequand n→∞ ; cela signifie qu’il existe une orbite périodique y1, y2, . . . , yk, y1, y2, . . .telle que

limn→∞

|xn − yn| = 0. (4.31)

Théorème 4.19. Soit f une application sur la droite réelle R de classe C1. Si uneorbite x1, x2, . . . de f satisfait |f ′(xi)| 6= 0 pour tout i et est asymptotiquementpériodique à une orbite périodique y1, y2, . . ., alors ces deux orbites ont les mêmesexposants de Lyapunov.

Démonstration. Nous utilisons le fait que si une suite infinie de nombres sn convergevers s quand n→∞, alors la suite des moyennes converge vers la même limite

limn→∞

1

n

n∑

i=1

si = s.

Soit k la période de l’orbite périodique. Si k = 1, alors y1 est un point fixe de f eth(y1) = ln |f ′(y1)|. Puisque limn→∞ xn = y1, par continuité de la dérivée de f et dela fonction ln x pour x strictement positif, on a

limn→∞

ln |f ′(xn)| = ln limn→∞

|f ′(xn)| = ln |f ′(y1)|,

et donc

limn→∞

1

n

n∑

i=1

ln |f ′(xi)| = ln |f ′(y1)|.

88

Page 89: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

Si k > 1, alors y1 est un point fixe de fk et l’orbite de x1 sous fk est asymptotiqueà y1. Donc l’exposant de Lyapunov de l’orbite de x1 sous fk est ln |(fk)′(y1)|. Enutilisant l’exercice 4.17, on obtient que l’exposant de Lyapunov de l’orbite de x1

sous l’action de f est 1/k ln |(fk)′(y1)|, ce qui (en vertu de (4.30)) est l’exposant deLyapunov de l’orbite périodique de y1 sous f .

Définition 4.20. Soit f une application sur la droite réelle R, et soit x1, x2, . . .une orbite bornée de f . On dit que cette orbite est chaotique si

1. x1, x2, . . . n’est pas asympotiquement périodique.2. L’exposant de Lyapunov h(x1) est strictement positif.

Par exemple, dans le cas de l’application x→ 2x mod 1 ou pour l’application “entente”, tant que nous considérons des orbites qui n’aboutissent pas à 1

2, nous avons

que

limn→∞

1

n

n∑

i=1

ln |f ′(xi)| = limn→∞

1

n

n∑

i=1

ln 2 = ln 2. (4.32)

Remarquons que les seules orbites asymptotiquement périodiques pour cette ap-plication sont celles qui sont finalement périodiques : en effet, si deux points ont desdéveloppements binaires qui diffèrent sur un ensemble infini d’indices, alors leursorbites ne satisfont pas (4.31). Par ailleurs, on sait que les nombres rationnelsont, dans n’importe quelle base, un développement qui est finalement périodique etvice-versa2. Donc pour l’application x → 2x mod 1, les orbites de tous les pointsirrationnels sont chaotiques.

La meilleure image intuitive que l’on puisse se faire d’un système chaotique estde dire qu’il s’agit d’un système pour lequel “la majorité des orbites” (excepté cellesd’un ensemble dénombrable de points, c’est-à-dire d’un ensemble de mesure nulle)sont chaotiques (au sens de la définition 4.20). Ci-dessous nous donnons une figurereprésentant les exposants de Lyapunov (calculés sur ordinateur) pour la famillelogistique fa(x) = ax(1 − x) en fonction de a. Un exposant de Lyapunov positifest “la signature du chaos”. Pouvez-vous expliquer les valeurs de a pour lesquellesl’exposant de Lyapunov est 0 ou −∞ ?

2En effet, si on calcule de façon usuelle le développement décimal de la fraction p

q, p, q ∈ N,

celui-ci devient finalement périodique, parce qu’il existe au plus un nombre fini de restes possibleset ils doivent donc forcément finir par se répéter. Le même raisonnement s’étend évidemment àn’importe quelle base. Par ailleurs, en sommant une série géométrique, on voit qu’un développe-ment périodique donne lieu à un nombre rationnel.

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Chapitre 4 — Exemples élémentaires de systèmes << chaotiques >>

Figure 7

90

Page 91: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

V LE FER À CHEVAL

Pour un difféomorphisme de classe Cr(r ≥ 1) du plan dans le plan, il est possible queles variétés stable – instable globales d’un point selle s’intersectent transversalement.Ce phénomène fut découvert pour la première fois par Poincaré dans le contexte duproblème des trois corps. Il engendre une dynamique “chaotique”. Poincaré a appeléde telles intersections des points homoclines ; dans le cas d’un difféomorphismeprovenant d’une section de Poincaré au voisinage d’une orbite périodique, les pointshomoclines correspondent à des solutions qui tendent asymptotiquement vers lasolution périodique quand t→ +∞ et t→ −∞.

Dans ce chapitre nous étudions une transformation, inventée par le mathémati-cien Smale, qui donne une image de la dynamique au voisinage d’un point homocline.

1. Les points homoclines

Définition 5.1. Soit f : R2 → R2, un difféomorphisme de classe Cr(r ≥ 1) etsoit p un point fixe hyperbolique de f , de type selle. On définit la variété stable(globale) en p comme

S(p) =

q ∈ R2∣

∣fn(q)→ p, quand n→ +∞

. (5.1)

De même, la variété instable (globale) en p est définie par

U(p) =

q ∈ R2∣

∣f−n(q)→ p, quand n→ +∞

. (5.2)

Soit B un petit voisinage de p, sur lequel les variétés stable – instable localesde p dans B, SB et UB, sont représentées par le graphe d’une fonction. Alors,nécessairement,

S(p) =⋃

n≥0

f−n(SB) (5.3)

etU(p) =

n≥0

fn(UB). (5.4)

En effet, si q ∈ S(p), alors pour n suffisamment grand, tous les fk(q) sont dans B,pour k ≥ n. Par définition de la variété stable locale dans B, cela veut dire quefn(q) ∈ SB, et donc q ∈ f−n(SB). Ceci établit (5.3), on raisonne semblablementpour établir (5.4).

Une conséquence du théorème de la variété stable-instable est que S(p) et U(p)sont des courbes. La courbe définissant la variété stable (ou instable) globalene peut jamais se recouper (on dit que ce sont des variétés topologiques, dedimension 1). En effet, si il existait un point q ∈ S(p) tel que la courbe S(p) serecoupe en q, alors pour n suffisamment grand, fn(O∩S(p)) ⊆ SB, où O désigne unpetit voisinage ouvert de q. Comme fn est un difféomorphisme, cela voudrait dire

Page 92: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 5 — Le fer à cheval

que le variété instable locale SB se recoupe en fn(q), ce qui est impossible puisqueSB est le graphe d’une fonction de classe Cr, r ≥ 1. Néanmoins, il peut arriverque la variété stable intersecte la variété instable.

Définition 5.2. Soit f un difféomorphisme de classe Cr(r ≥ 1) du plan, et soit pun point fixe hyperbolique de f , du type selle. Un point h qui appartient à la foisà la variété stable et à la variété instable de p et qui est distinct de p, s’appelle unpoint homocline. Donc si h est un point homocline, fn(h) → p et f−n(h) → pquand n→ +∞. L’orbite d’un point homocline s’appelle une orbite homocline.

Figure 5.1

Dans la suite nous n’analyserons que le cas où les variétés stable-instable s’inter-sectent transversalement en un point homocline h, comme sur la figure 5.1.

Si l’on prend un petit carré R autour du point fixe p, par itération (positive) def , il s’étire le long de la variété instable de p ; par itération (positive) de f−1, ils’étire le long de la variété stable de p. En particulier, il existe des entiers positifsl et k, tels que f−l(R) s’étend le long de la variété stable jusqu’à inclure le pointhomocline h, et fk(R) s’étend le long de la variété instable jusqu’à inclure à nouveauh, comme indiqué sur la figure 5.2. Donc l’application fk+l transforme le domaineD = f−l(R) en fk(R) qui a la forme d’un fer à cheval. Cette observation est due aumathématicien Smale, qui en a déduit un modèle simple très utile de la dynamiqueau voisinage d’un point homocline. Ce modèle est connu sous le nom de fer à chevalde Smale. Nous allons maintenant l’étudier en détail.

92

Page 93: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

Figure 5.2

2. Le modèle simple

On définit une application

f : D → R2, D =

(x, y) ∈ R2∣

∣0 ≤ x ≤ 1, 0 ≤ y ≤ 1

, (5.5)

qui contracte dans la direction x, dilate dans la direction y et replie en partie Ddans lui-même, comme sur la figure 5.3 ci-dessous :

Figure 5.3

Une partie de D est envoyée par f en dehors de D, mais nous nous intéresseronsplutôt à l’action de f sur les rectangles “horizontaux”

H0 =

(x, y) ∈ R2∣

∣0 ≤ x ≤ 1, 0 ≤ y ≤ 1/µ

et

93

Page 94: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 5 — Le fer à cheval

(5.6)

H1 =

(x, y) ∈ R2∣

∣0 ≤ x ≤ 1, 1− 1/µ ≤ y ≤ 1

.

Nous supposerons que f agit de façon affine sur H0 et H1 et les envoie sur lesrectangles “verticaux”

f(H0) ≡ V0 =

(x, y) ∈ R2∣

∣0 ≤ x ≤ λ, 0 ≤ y ≤ 1

et

(5.7)

f(H1) ≡ V1 =

(x, y) ∈ R2∣

∣1− λ ≤ x ≤ 1, 0 ≤ y ≤ 1

,

où λ et µ sont deux paramètres caractérisant la transformation ; on suppose 0 <λ < 1/2 et µ > 2. On peut écrire explicitement l’action de f sur H0 et H1

f |H0 :

(

xy

)

→(

λ 00 µ

)(

xy

)

f |H1 :

(

xy

)

→(

−λ 00 −µ

)(

xy

)

+

(

)

(5.8)

(vérifier à partir de la figure 5.3) ; nous n’utiliserons néanmoins pas ces formulesexplicites dans la suite.

Figure 5.4

On définit f−1 : D → R2 comme sur la figure 5.4 : dilatation dans la direction x,contraction dans la direction y et repliement tel que f−1(V0) = H0, f

−1(V1) = H1,et f−1 agit de façon affine sur V0 et V1.

Nous allons étudier la dynamique de f sur l’ensemble des points, Λ, qui restentdans D sous toutes les itérations possibles de f ; donc Λ est défini comme l’ensemble

Λ =⋂

n∈Z

fn(D). (5.9)

94

Page 95: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

Notre but est de décrire géométriquement Λ et d’établir un codage sur Λ. Plusprécisément, soit

Σ =

s = (sn)n∈Z

∣sn ∈ A = 0, 1

, (5.10)

Σ diffère du chapitre 4 en ce que les suites sont indicées par n ∈ Z. Soit p ∈ Λ.Puisque Λ est invariant sous f , pour tout n ∈ Z, fn(p) ∈ D et fn+1(p) ∈ D. Celasignifie que, nécessairement, fn(p) ∈ H0 ou fn(p) ∈ H1. On définit une application

S : Λ→ Σ : p→ S(p) =(

sn(p))

n∈Z

, (5.11)

par la méthode des itinéraires :

sn(p) = 0 , si fn(p) ∈ H0

(5.12)

sn(p) = 1 , si fn(p) ∈ H1.

On munit Λ et Σ d’une distance. Comme Λ ⊂ R2, on prend la distance usuelle surΛ et, sur Σ, on définit la distance

d(s, t) =∑

i∈Z

|si − ti|2|i|

(5.13)

Nous utiliserons souvent le

Lemme 5.3 Soient s, t ∈ Σ. Alors, si N est un entier positif ou nul,

si = ti pour |i| ≤ N ⇒ d(s, t) ≤ 1

2N−1

(5.14)

d(s, t) <1

2N⇒ si = ti pour |i| ≤ N.

Démonstration. Si si = ti pour |i| ≤ N , alors

d(s, t) =

+∞∑

i=N+1

|si − ti|2−i +

−∞∑

i=−(N+1)

|si − ti|2i

≤ 1

2N−1.

La deuxième assertion se prouve par l’absurde. Supposons qu’il existe un i, avec|i| ≤ N et si 6= ti. Alors on a

d(s, t) ≥ 1

2|i|≥ 1

2N,

ce qui est une contradiction.

On a le

95

Page 96: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 5 — Le fer à cheval

Théorème 5.4. S : Λ → Σ défini par (5.11), (5.12) est un homéomorphisme,c’est-à-dire que S est une bijection et que S et S−1 sont continus, pour les distancesdéfinies ci-dessus. De plus, la dynamique sur Λ est conjuguée au décalage sur Σ

S f |Λ = σ S, (5.15)

oùσ(s)n = sn+1. (5.16)

Remarque. Comme dans le cas des itérations en dimension 1 étudiées au chapitre 4,le fait que S est une bijection qui conjugue f et σ a des conséquences remarquablessur la dynamique : pour une suite quelconque de symboles, s, il existe p ∈ Λ, telque fn(p) ∈ H0 ou H1, selon que sn vaut 0 ou 1. C’est la correspondance donnéepar S qui permet d’établir le caractère chaotique de f |Λ.

Figure 5.5

Pour analyser Λ, commençons par l’observation suivante : si V est un rectanglevertical (voir figure 5.5), alors f(V )∩D est composé exactement de deux rectanglesverticaux, l’un dans V0, l’autre dans V1. Chacun d’eux a une largeur égale à λ foisla largeur de V . Vice-versa, soit H un rectangle horizontal, alors f−1(H) ∩ D estcomposé exactement de deux rectangles horizontaux, l’un dans H0, l’autre dans H1.Chacun d’eux à une hauteur égale à 1/µ fois la hauteur de H .

Construisons maintenant Λ étape par étape. On sait que D ∩ f(D) = V0 ∪ V1,ce que l’on écrit

D ∩ f(D) =⋃

s−1∈A

Vs−1.

96

Page 97: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

Passons à

D∩f(D)∩f 2(D) = D∩f(

D∩f(D))

= D∩f(V0∪V1) =(

D∩f(V0))

∪(

D∩f(V1))

.

Grâce à l’observation faite précédemment, on remarque que D ∩ f(V0) et D ∩ f(V1)sont chacun constitués de deux rectangles verticaux (voir figure 5.6), de largeur λ2,ce que nous noterons

D ∩ f(V0) = V00 ∪ V10 et D ∩ f(V1) = V01 ∪ V11

et doncD ∩ f(D) ∩ f 2(D) =

(s−1,s−2)

Vs−1s−2

avecVs−1s−2

=

p ∈ D∣

∣p ∈ Vs−1

et f−1(p) ∈ Vs−2

.

Figure 5.6

On peut continuer ainsi, pour tout k (voir figure 5.7 pour k = 3) ; on prouvefacilement par induction que D ∩ f(D) ∩ . . . ∩ fk(D) est composé de 2k rectanglesverticaux de largeur λk :

D ∩ f(D) ∩ . . . ∩ fk(D) = D ∩ f(

D ∩ f(D) ∩ . . . ∩ fk−1(D))

=⋃

(s−2,...,s−k)

D ∩ f(Vs−2...s−k)

=⋃

(s−1,s−2,...,s−k)

(

Vs−1∩ f(Vs−2...s−k

))

≡⋃

(s−1,...,s−k)

Vs−1...s−k

avecVs−1...s−k

=

p ∈ D|f−i+1(p) ∈ Vs−i, i = 1, . . . , k

.

97

Page 98: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 5 — Le fer à cheval

Figure 5.7

Avant de passer à la limite k →∞, le point important à réaliser est qu’il y a 2k

suites possibles de 0 et de 1 de longueur k, et que chacune de ces suites correspond àun rectangle vertical dans le processus. A la limite k →∞, puisque une intersectiondécroissante d’ensembles fermés non vides dans un ensemble compact est non vide,il est clair que nous obtenons un nombre infini de “rectangles” et que la largeur deces “rectangles” est nulle, puisque limk→∞ λk = 0. Donc

∞⋂

n=0

fn(D) =⋃

(s−1,...,s−k,...)

Vs−1...s−k... (5.17)

est constitué par un ensemble infini de lignes verticales

Vs−1...s−k ... = p ∈ D|f−i+1(p) ∈ Vs−i, i = 1, 2, . . .,

que l’on peut mettre en bijection avec les suites (s−1, s−2, . . .) formées de 0 et de 1.Cet ensemble est non dénombrable (puisqu’il existe une surjection de l’ensemble deces suites sur [0,1], définie par x =

∑+∞i=1 s−i2

−i). Par ailleurs, il est de mesure nulle :il est inclus pour tout k, dans D ∩ f(D) ∩ . . . ∩ fk(D), qui est de mesure (2λ)k, etλ < 1/2. Remarquons aussi que, puisque

f−i+1(p) ∈ Vs−i⇔ f−i(p) ∈ Hs−i

,

on a que

Vs−1...s−k... =

p ∈ D|f−i(p) ∈ Hs−i, i = 1, 2, . . .

. (5.18)

On peut refaire les mêmes raisonnements avec f−1 et les rectangles horizontaux. Ona (voir figure (5.8))

D ∩ f−1(D) =⋃

s0∈A

Hs0,

et doncD ∩ f−1(D) ∩ f−2(D) =

s1∈A

D ∩ f−1(Hs1) ≡

(s0,s1)

Hs0s1

98

Page 99: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

avecHs0s1

=

p ∈ D|p ∈ Hs0et f(p) ∈ Hs1

.

Voir figure 5.9 ci-dessous.

Figure 5.8

Figure 5.9

En continuant, on obtient

D ∩ f−1(D) ∩ f−2(D) ∩ f−3(D) =⋃

(s0,s1,s2)

Hs0s1s2

avecHs0s1s2

=

p ∈ D|p ∈ Hs0, f(p) ∈ Hs1

et f 2(p) ∈ Hs2

,

voir la figure 5.10 ci-dessous.

Figure 5.10

99

Page 100: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 5 — Le fer à cheval

Par induction, on obtient que

D ∩ f−1(D) . . . ∩ f−k(D) =⋃

(s0,s1,...,sk−1)

Hs0s1...sk−1

est composé de 2k rectangles horizontaux de hauteur (1/µ)k

Hs0s1...sk−1=

p ∈ D∣

∣f i(p) ∈ Hsi

, i = 0, . . . , k − 1

.

Passant à la limite k → ∞, on obtient un ensemble non dénombrable, de mesurenulle, de lignes horizontales. Cet ensemble est indicé par les suites (s0, s1, s2, . . .)

∞⋂

n=0

f−n(D) =⋃

(s0,s1,...,sk,...)

Hs0s1...sk... (5.19)

oùHs0s1...sk... =

p ∈ D∣

∣f i(p) ∈ Hsi

, i = 0, 1, 2, . . .

.

Donc, en combinant (5.17), (5.18) et (5.19), on voit que Λ est un ensemble infinide points ; chacun de ces points correspond à l’unique intersection entre une ligneverticale Vs−1...s−k... et une ligne horizontale Hs0...sk...

Λ =∞⋂

n=0

fn(D) ∩∞⋂

n=0

f−n(D)

=⋃

(s−1, . . . , s−k, . . .)(s0, . . . , sk, . . .)

(Vs−1...s−k... ∩Hs0...sk...) (5.20)

avec

Vs−1...s−k... ∩Hs0...sk... =

p ∈ D∣

∣f i(p) ∈ Hsi

, i = 0,+1,−1, 2,−2, . . .

.

Ceci montre que le codage S : Λ → Σ défini en (5.11), (5.12), établit une bijectionentre Λ et Σ.

Démonstration du théorème 5.4. On vient d’établir le caractère bijectif de S. Il resteà établir que S et son inverse S−1 sont des applications continues. Pour montrerque S est continue, il faut montrer que

∀p ∈ Λ, ∀ε > 0, ∃δ > 0 : |q − p| < δ ⇒ d(

S(q), S(p))

< ε.

Soit N tel que 12N−1 < ε. Comme f et f−1 sont continues, toutes les applications

f i, |i| ≤ N le sont aussi. Donc, en prenant δ suffisamment petit, on peut supposerque si |q − p| < δ, alors f i(p)et f i(q) sont simultanément dans H0 ou H1, pour

100

Page 101: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

|i| ≤ N , parce que la distance entre H0 et H1 est fixe (1− 2µ). Mais, comme q, p ∈ Λ,

cela revient à dire que

S(q)i = S(p)i, ∀i tel que |i| ≤ N,

et donc, en vertu de (5.14),

d(

S(q), S(p))

≤ 1

2N−1< ε.

Comme S est une bijection continue entre espaces compacts métriques (Λ et Σ),son inverse S−1 est automatiquement continue et on a bien un homéomorphisme.On peut aussi le vérifier directement en regardant la figure 5.11 ci-dessous. Montrerque S−1 est continue revient à montrer que

∀s, ∀ε > 0, ∃δ > 0 : d(t, s) < δ ⇒ |S−1(t)− S−1(s)| < ε.

Choisissons N tel que

λN +1

µN+1< ε,

et soit δ = 12N . Alors, en vertu de (5.14),

d(t, s) < δ ⇒ ti = si pour |i| ≤ N.

Cela implique (voir figure 5.11) que S−1(t) et S−1(s) appartiennent tous les deuxà l’intersection d’un petit rectangle vertical de largeur λN et d’un petit rectanglehorizontal de hauteur 1

µN+1 , et donc on a

|S−1(t)− S−1(s)| ≤ λN +1

µN+1< ε.

Ceci achève la démonstration du théorème.

Figure 5.11

101

Page 102: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 5 — Le fer à cheval

En raisonnant comme au chapitre 4, le théorème 5.4 nous fournit immédiatementque l’application f |Λ est chaotique. Il y a néanmoins une différence majeure parrapport aux exemples que nous avons traités au chapitre 4. L’ensemble Λ est unensemble de mesure nulle et c’est seulement sur cet ensemble invariant que nousétablissons que la dynamique est chaotique. Dans les exemples du chapitre 4, nousavons établi que la dynamique était chaotique sur tout “l’espace de phase” du sys-tème, à savoir l’intervalle [0, 1]. Ceci veut dire que si l’on prend un point “au hasard”dans D, on ne le prendra pas dans Λ. Donc la probabilité d’observer les mouvementsque nous exhibons ici est nulle ! Néanmoins, l’existence de cette dynamique chao-tique sur un ensemble de mesure nulle a des conséquences “dramatiques”, notammentdans le cas de la mécanique hamiltonienne : la non-intégrabilité du système. Cetteaffirmation a un sens technique précis sur lequel nous reviendrons, mais pour le mo-ment on peut y penser comme signifiant que le système ne peut pas être résolu entermes de “formules explicites” (comme c’est le cas par exemple pour le problème deKepler, problème des 2 corps).

Corollaire 5.5 La dynamique du fer à cheval (5.5) restreinte au sous-espace inva-riant Λ (5.9) est chaotique.

Démonstration. Rappelons que l’on entend par là que le système dynamique

f |Λ : Λ→ Λ

possède

(i) un ensemble dense (dans Λ) d’orbites périodiques

(ii) une orbite dense (dans Λ)

(iii) la propriété SCI (sur Λ)

On utilise le fait que la dynamique sur Λ est conjuguée au décalage

σ : . . . s−2s−1 · s0s1 . . . → . . . s−1s0 · s1s2 . . . ,

la seule différence est que l’on a maintenant des suites infinies dans les deux sens.Quand on itère f , on décale vers la gauche et quand on itère f−1, vers la droite.Comme S : Λ → Σ est un homéomophisme, on peut vérifier toutes les assertionstopologiques en utilisant la distance (5. 13) sur Σ.

(i) Soit t ∈ Σ et ε > 0. Soit N tel que 1/2N−1 < ε. On construit

s = t−N . . . t−1 · t0 . . . tN ,où la barre signifie que l’on répète indéfiniment la séquence finie dans les deuxdirections. s a une orbite périodique de période 2N + 1 et, en vertu de (5.14),d(t, s) ≤ 1/2N−1 < ε.

(ii) On définit par exemple s en juxtaposant toutes les suites possibles finies de 0 etde 1 à droite du point décimal

102

Page 103: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

s = . . . · 0100011011 . . .

Si t est une séquence arbitraire et ε > 0, on choisit N tel que 1/2N−1 < ε. On peuttoujours s’arranger pour que un itéré convenable de s, σk(s), soit tel que

(σk(s))i = ti, pour |i| ≤ N,

et donc d(t, σk(s)) ≤ 1/2N−1 < ε.

(iii) On prend

d = 1− 2

µ,

la distance entre H0 et H1. On va montrer que

∀p ∈ Λ, ∀ε > 0, ∃ q ∈ Λ, ∃ n avec |q − p| < ε et |fn(q)− fn(p)| ≥ d.

Soit n tel que λn−1 + 1/µn < ε et soit s = S(p), la suite doublement infinie cor-respondant à p. On définit q ∈ Λ n’importe quel point dont la suite t = S(q)vérifie

ti = si pour |i| ≤ n− 1 , tn = 1− sn.

Puisque ti = si pour |i| ≤ n− 1,

|q − p| ≤ λn−1 + 1/µn < ε,

et puisque tn diffère de sn, fn(q) et fn(p) n’appartiennent pas au même rectangle

horizontal, H0 ou H1, et donc

|fn(q)− fn(p)| ≥ 1− 2

µ= d.

Ceci achève la démonstration.

3. Applications

Poincaré, dans son étude du problème des 3 corps, fut le premier à réaliser quel’existence de points homoclines transverses complique terriblement la structure dessolutions. L’orbite sous l’action de l’application de Poincaré d’un point homoclinetransverse ~q0, P n(~q0), n ∈ Z, produit (de façon évidente) des points homoclinestransverses. Sur la figure (a) ci-dessous ~q0 est envoyé sur ~q1, ~q1 sur ~q2, etc.; commel’application de Poincaré P préserve l’orientation, la variété instable coupe la variétéstable en ~q0 et ~q1 dans le même sens, donc il doit exister au moins une intersectionintermédiaire ~r0 entre ~q0 et ~q1, ~r1 entre ~q1 et ~q2, etc. Ces deux suites infinies ~qnet ~rn donnent lieu à des points homoclines de première espèce. Dans le cas dupendule forcé, ces points correspondent à des mouvements homoclines qui atteingentla position renversée instable en un tour. Mais il y a plus! Les petits arcs de la variétéinstable qui joignent les points homoclines de première espèce, sont envoyés de plusen plus près du point selle ~p par itération positive de P . En se rapprochant du

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Page 104: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 5 — Le fer à cheval

point fixe, ces arcs ne peuvent rester au voisinage de celui-ci, car seuls les pointssur la variété stable ont cette propriété. Donc, en se rapprochant du point selle,la variété instable doit se mettre à osciller de plus en plus violemment, sans jamaisse recouper néanmoins, voir la figure (b). Ceci conduit à des points homoclinesde deuxième espèce, de troisième espèce, etc. Dans le cas du pendule forcé, celacorrespond à des mouvements homoclines en deux tours, en trois tours, etc. Onpeut faire un raisonnement semblable pour la variété stable, sous itération négativede P . Dans son célèbre ouvrage “Les méthodes nouvelles de la mécanique céleste”(1899), Poincaré écrit:

“Que l’on cherche à se représenter la figure formée par ces deux courbes et

leurs intersections en nombre infini dont chacune correspond à une solution

doublement asymptotique, ces intersections forment une sorte de treillis, de

tissu, de réseau à mailles infiniment serrées; chacune de ces courbes ne doit

jamais se recouper elle-même, mais elle doit se replier elle-même d’une manière

très complexe pour venir recouper une infinité de fois toutes les mailles du

réseau. On sera frappé de la complexité de cette figure, que je ne cherche

même pas à tracer. Rien n’est plus propre à nous donner une idée de la

complexité du problème des trois corps ...”

Figure 5.12.

Le dessin ci-dessus ainsi que la figure 5.2 et les résultats de ce chapitre suggèrentque la présence d’une intersection homocline entraîne l’existence d’une structurede fer à cheval. C’est ce qu’affirme le théorème suivant dont la démonstration esttrès technique et dépasse le cadre de ce cours. La difficulté de la démonstrationest d’estimer la “petitesse” de R et “la grandeur de k et ℓ” (figure 5.2) pour avoirla contraction et la dilatation nécessaires, qui garantissent que les hypothèses dumodèle simple que nous venons d’étudier sont satisfaites.

Théorème 5.6 (Théorème de Birkhoff-Smale) Soit f : R2 → R2 un difféomor-phisme de classe Cr(r ≥ 1) qui possède

104

Page 105: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

- un point fixe hyperbolique, de type selle,- un point homocline transverse h.

Alors, il existe N < ∞, un ensemble Λ, invariant sous fN , et un homéomor-phisme S : Λ→ Σ tel que

S fN | Λ = σ S,où Σ et σ sont définis comme en (5.10) et (5.16). Autrement dit, la dynamiqued’une puissance appropriée de f , laisse invariant un sous-ensemble sur lequel elleest conjuguée au décalage construit sur deux symboles.

Dans le cas du pendule forcé l’analogue de la figure (5.12) (b) a la forme suivante:

Figure 5.13.

De plus on peut exhiber, au moyen du théorème de Birkhoff-Smale une famillede mouvements associés au jeu de pile ou face.

Théorème 4 Supposons que l’application de Poincaré du système (2.50) possèdeun point homocline transverse, ce qui est le cas pour ε 6= 0 suffisamment petit, si lacondition (2.56) est satisfaite. Alors, quelle que soit la suite (sk)k∈Z, sk ∈ −1,+1,il existe une solution de (2.50) qui passe une infinité de fois par x1 = 0 aux tempstk, . . . < t−2 < t−1 < t0 < t1 < t2 < . . ., dans le sens horloger (c.à.d. x2(tk) < 0) sisk = −1 et dans le sens anti-horloger (c.à.d. x2(tk) > 0) si sk = +1.

En langage imagé, le sens des rotations du pendule périodiquement forcé peutêtre associé à un jeu de pile ou face.

Pour comprendre intuitivement ce théorème, il faut se reporter à la figure 5.13,qui illustre une légère variante de la construction du fer a cheval. Les bandes“horizontales” H0 et H1 sont transformées par une puissance appropriée fN del’application de Poincaré en des bandes “verticales” fN(H0) et fN(H1), comme in-diqué sur la figure. Puisque les droites x1 = −π et x1 = +π sont identifiées, cesimages intersectent H0 et H1, tout comme dans la construction du fer à cheval. Ondéfinit un codage :

S : Λ ≡∞⋂

k=−∞fNk(H0

H1)→ Σ ≡ ′sk)k∈Z, sk ∈ −1, 1,

105

Page 106: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 5 — Le fer à cheval

parsk(p) = +1 si fNk(p) ∈ H0, sk(p) = −1 si fNk(p) ∈ H1.

Il faut alors montrer (et c’est là toute la difficulté) que, pour un choix approprié deH0 et H1, S est un homéomorphisme. Remarquons qu’un point dans H0 est envoyépar P (au voisinage de la variété stable-instable) dans la région où x2 = x > 0, tandisqu’un point dans H1 est envoyé dans la région où x2 = x < 0. Donc le symbole +1peut s’interpréter comme un passage du pendule par la position d’équilibre stableavec x > 0, et le symbole −1 comme un passage avec x < 0. Comme toutes lessuites sont réalisables (puisque S est surjective), cela établit le résultat.

Figure 5.14: Poincaré map for the perturbed pendulum.

Donnons finalement un exemple d’application des idées de la dynamique symbo-lique au problème restreint des 3 corps. L’obtention de ce résultat est plus délicateque dans le cas du pendule soumis à une force extérieure périodique.

On considère la situation suivante, étudiée par V. Alekseev et K. Sitnikov dansles années 60. Deux corps de masses égales m1 = m2 se déplacent dans le plan surdes ellipses qui ont en commun un foyer, tandis qu’un 3e corps de masse “nulle”, quenous appellerons la comète, se déplace sur une droite L perpendiculaire au plan etpassant par le foyer commun, comme sur la figure ci-dessous. Le fait que le 3e corpssoit de masse nulle signifie qu’il n’influence pas le mouvement des deux autres corps(mais est influencé par ceux-ci). On appelle ce modèle un problème ‘restreint’ à 3corps à cause de cette non-interaction qui simplifie le problème; la solution de ceproblème ‘simplifié’ est néanmoins, comme on va le voir, très compliquée.

106

Page 107: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

Figure 5.15

Dans ce système l’année est le temps T que mettent les deux corps à accomplirune révolution complète. Soit z la coordonnée décrivant le mouvement de la comètesur la droite L, de telle sorte que z = 0 corresponde à la position du centre de masse.Si l’on normalise les unités de telle façon que m1 = m2 = 1

2et G = 1 (la constante

de gravitation), l’équation du mouvement de la comète est donnée par

d2z

dt2= − z

(z2 + r2(t))32

,

où r(t) = r(t + T ) est la distance de chaque planète au centre de masse. Avec lesnormalisations choisies

r(t) =1

2(1− ǫ cos t) +O(ǫ2),

où ǫ > 0 désigne l’excentricité de l’orbite des planètes.

Pour formuler le résultat, nous considérons une solution z(t) possédant un nom-bre infini de zéros tk, k ∈ Z, ... < tk < tk+1 < ..., z(tk) = 0. Nous introduisonsensuite les entiers

sk =

[

tk+1 − tkT

]

,

qui mesurent le nombre de révolutions complètes des deux planètes entre deux pas-sages successifs de la comète dans le plan. On a le

107

Page 108: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 5 — Le fer à cheval

Théorème 5.7. Pour une excentricité suffisamment petite ǫ > 0, il existe unentier m = m(ǫ) tel que toute suite d’entiers s = (..., s−1, s0, s1, ...), avec sk ≥ m,correspond à une solution de l’équation différentielle ci-dessus.

En d’autres mots, on peut faire une comète sur mesure, en programmant celle-cide sorte qu’elle revienne quand on veut. Si l’on choisit n’importe quelle suite denombre entiers (plus grands qu’un nombre qui dépend de l’excentricité de l’orbitedes corps massifs), par exemple 21, 215, 37, 469, 79, 724,..., on peut faire démarrerla comète (la lancer à un instant donné avec une vitesse particulière) pour qu’ellerevienne traverser le plan au cours des années qu’on a spécifiées, et seulement pen-dant ces années (une année étant le temps que mettent les deux corps massifs à faireune révolution complète).

Remarquons que l’obtention de ce type de résultat nécessite de conjuguer ladynamique (sur un ensemble invariant approprié) au décalage sur un nombre infinide symboles.

4. Ensembles de Cantor

L’ensemble Λ dont il est question dans le théorème 5.4 et le théorème de Birkhoff-Smale est ce que l’on appelle un ensemble de Cantor. Nous allons l’étudier plus endétail !

Tout ensemble ouvert de la droite réelle est une réunion finie ou dénombrabled’intervalles ouverts deux à deux disjoints. Comme tout ensemble fermé est le com-plémentaire d’un ensemble ouvert, on en déduit que tout ensemble fermé de la droiteréelle peut être obtenu, en retirant de la droite réelle un nombre fini ou une infinitédénombrable d’intervalles ouverts. Comme exemples élémentaires d’ensembles fer-més de la droite réelle, on peut citer, les points isolés, les intervalles fermés et les réu-nions de tels ensembles pris en nombre fini. Un exemple plus compliqué d’ensemblefermé de la droite réelle est fourni par l’ensemble triadique de Cantor que nousnous proposons de considérer ici.

Soit F0 l’intervalle fermé [0, 1]. Supprimons l’intervalle ouvert ]1/3, 2/3[ et dési-gnons l’ensemble fermé qui reste par F1. Ensuite supprimons les “tiers du mileu” dechaque intervalle restant : ]1/9, 2/9[ et ]7/9, 8/9[ et désignons l’ensemble fermé quireste (comportant quatre intervalles fermés) par F2. En répétant ce procédé (voirla figure 5.12), on obtient une suite décroissante d’ensembles fermés Fn. L’ensemblede Cantor est défini comme

C =

∞⋂

n=0

Fn.

C contient, évidemment, les points

0, 1, 1/3, 2/3, 1/9, 2/9, 7/9, 8/9, . . .

c’est-à-dire les extrémités des intervalles supprimés. Mais ces points n’épuisent pasl’ensemble C. En effet, les points de l’intervalle [0, 1] qui appartiennent à l’ensemble

108

Page 109: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

C peuvent être caractérisés de la manière suivante. Ecrivons chacun des nombresx, 0 ≤ x ≤ 1, dans le système de base 3 :

x =a1

3+a2

32+ . . .+

an

3n+ . . . ,

où les nombres an peuvent prendre les valeurs 0, 1, 2. Tout comme dans le cas desdéveloppements décimaux (ou binaires), certains nombres admettent deux représen-tations différentes. Par exemple

1

3=

1

3+

0

32+ . . .+

0

3n+ . . . =

0

3+

2

32+ . . .+

2

3n+ . . . .

On vérifie aisément que l’ensemble C contient tous les points x, 0 ≤ x ≤ 1, et ceux-là seulement , qui admettent au moins un développement triadique tel que la suitea1, a2, . . . , an, . . . ne contienne pas le chiffre 1. En fait, on a une bijection

S : C → Σ =

(a1, a2, . . . , an, . . .) avec an ∈ A = 0, 2

.

L’ensemble Σ est non dénombrable. En effet, on peut définir

g : C → [0, 1] : x→ g(x) =

∞∑

n=1

an

22−n ≡

∞∑

n=1

bn2−n,

avec bn = 0 pour an = 0 et bn = 1 pour an = 2. g est surjective et donc C a au moinsla cardinalité du continu (ensemble en bijection avec [0, 1]). Mais C est une partie del’intervalle [0, 1], donc sa cardinalité ne peut pas être supérieure à celle du continu.g n’est pas bijective. On vérifie facilement que g envoie les bords des intervallesretirés sur le même point. Donc g peut s’étendre en une application continue de[0, 1]→ [0, 1] en définissant g comme constante sur les intervalles retirés ; le graphede g est parfois appelé “escalier du diable”, voir figure 5.16 ci-dessous. L’ensemble deCantor est un ensemble parfait, ce qui veut dire que C est fermé (comme intersectionde fermés) et que tout point de C est un point limite d’autres points de C (justifier !).La mesure de C est nulle. En effet, la longueur de Fn est (2/3)n et C ⊂ Fn, pourtout n. Donc C ne contient aucun intervalle ouvert, on dit que C est complètementdiscontinu.

Figure 5.16

109

Page 110: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 5 — Le fer à cheval

Figure 5.17

Définition 5.7. Un sous-ensemble d’un espace métrique complet qui est compact,complètement discontinu et parfait est appelé un ensemble de Cantor.

On peut démontrer qu’un ensemble parfait dans un espace métrique complet n’estpas dénombrable. On dit en général qu’un ensemble est complètement discontinu siles composantes connexes de cet ensemble sont réduites à des points.

Proposition 5.8. L’ensemble invariant Λ sous la dynamique du fer à cheval, définien (5.9), est un ensemble de Cantor.

Démonstration. Λ est un sous-ensemble fermé borné de R2, et donc il est compact.Comme l’application S : Λ→ Σ est un homéomorphisme, nous pouvons établir lesautres propriétés en travaillant avec Σ. Σ est non dénombrable (par un argumentsemblable à celui utilisé pour l’ensemble triadique de Cantor). En fait

Σ = . . .× A× A× A× A× . . . =∞∏

i=−∞Ai, où Ai = A = 0, 1.

L’ensemble fini A = 0, 1 est naturellement muni de la distance

d(a, b) ≡ |a− b| ∀a, b ∈ A.

A est un espace discret (c’est-à-dire que tous les sous-ensembles de A sont ouverts) etdonc, A est complètement discontinu. Il en résulte que Σ (muni de la distance définieen (5.14)) est complètement discontinu, comme produit d’espaces complètementdiscontinus. Il reste à montrer que Σ est parfait. Pour cela il suffit de vérifier que

∀s ∈ Σ, ∀ε > 0, ∃t ∈ Σ avec d(t, s) < ε.

Clairement, en vertu de (5.15), si l’on choisit N tel que 1/2N−1 < ε, tout t ∈ Σqui satisfait ti = si pour |i| ≤ N , et qui est distinct de s, convient. Ceci achève ladémonstration de la proposition.

110

Page 111: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

VI ÉLÉMENTS DE THÉORIE ERGODIQUE

1. Introduction

On a vu dans les chapitres précédents que la trajectoire d’un certain nombre desystèmes dynamiques est en pratique imprévisible. Face à cette situation, on peutchercher à prédire, non pas les trajectoires, mais des aspects ‘statistiques’ de celles-ci,par exemple le temps passé, en moyenne, par une trajectoire dans un sous-ensemblede l’ensemble dans lequel les trajectoires évoluent3. Considérons par exemple lafigure 14. On étudie l’application logistique f4(x) = 4x(1 − x) sur [0, 1] introduiteau chapitre 4, et on dessine l’histogramme représentant le temps total passé parune trajectoire “quelconque” (c’est-à-dire dont les conditions initiales sont “prisesau hasard”) dans de petits intervalles: on a découpé l’intervalle [0, 1] en 200 seg-ments [ i

200, i+1

200[, i = 0, 1, 2, ..., 199, et représenté le temps passé dans chacun de ces

intervalles au cours des 50.000 premières itérations.La figure du bas représente une courbe ‘théorique’ donnée par 250

π√

(x(1−x), qui est

bien en accord avec les données. Un des buts de ce chapitre sera d’expliquer cephénomène empirique, ce qui sera fait à la fin de la section 3.

Nous allons d’abord définir précisément ce que veut dire ‘temps passé en moyenne’;ensuite nous donnerons une propriété abstraite des transformations qui implique quel’on puisse prédire ces temps pour les trajectoires correspondantes. On verra ensuitedes exemples de transformations satisfaisant à cette propriété ainsi que quelques ap-plications. Le but ici étant purement introductif, on ne cherchera pas à formuler lesrésultats de façon la plus générale possible ni à en donner toujours des démonstra-tions complètes. De plus, on supposera ci-dessous, sans le mentionner chaque fois,que toutes les fonctions et tous les ensembles sont mesurables. Pour une introductionplus approfondie, voir [12] chapitres 0 et 1.

3Pour les étudiants qui ont suivi un cours de physique statistique: dans ce domaine, on estincapable de prédire l’état de chaque molécule d’un gaz mais on est capable d’analyser les propriétéspossédées, en moyenne, par un grand nombre de molécules. Ici, la situation est analogue: le ‘grandnombre’ de molécules est remplacé par des ‘temps suffisamment longs’ et les propriétés statistiquespar les temps moyens.

4La figure est adaptée à partir de celle dans [11], p. 16.

Page 112: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 6 — Éléments de théorie ergodique

2. Définitions et théorèmes

Soit X un ensemble, µ une mesure de probabilité sur X et T une transformation deX dans X. Pour simplifier les idées, on peut penser à X comme un sous-ensemble deRn, et à µ comme une mesure de probabilité absolument continue sur X, c’est-à-direqu’il existe une fonction intégrable ρ(x) ≥ 0, avec

Xρ(x)dx = 1 et on définit:

µ(A) =

A

ρ(x)dx ∀ A ⊂ X. (6.1)

112

Page 113: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

Définition 6.1. La mesure µ est invariante sous T si, ∀ A ⊂ X,

µ(T−1A) = µ(A), (6.2)

oùT−1A = x|Tx ∈ A. (6.3)

Remarque. On peut réécrire (6.2) de façon équivalente:

∀F : X → R,

X

F (Tx)dµ(x) =

X

F (x)dµ(x) (6.4)

Pour vérifier cela, on peut écrire∫

X

F (x)dµ(x) = limn→∞

X

Fn(x)dµ(x) (6.5)

où Fn =∑n

i=1 ciIAiavec ci ∈ R et IA la fonction indicatrice de l’ensemble A, pour des

choix convenables de suites ci et Ai. Ecrire (6.5) peut se faire avec Fn une fonctionen escaliers dans le cadre de l’intégrale de Riemann et une foncton ‘simple’ dansle cadre de celle de Lebesgue (utilisée ici). Et, pour des fonctions Fn =

∑ni=1 ciIAi

(6.4) suit immédiatement de (6.2). Inversément, si on prend F (x) = IA(x) dans(6.4), on obtient (6.2).

Exemples.1. Soit X = [0, 1[, dµ = dx (c’est-à-dire ρ = 1) et

T = Tαx→ x+ α mod 1, α ∈ [0, 1]. (6.6)

Alors dµ est invariante sous T (par changement de variable y = x+ α mod 1).2. Soit X = [0, 1[, dµ = dx

Tx = 2x mod 1. (6.7)

Alors, dµ est invariante sous T . En effet, T−1A = B1 ∪ B2, se compose de deuxensembles disjoints, l’un dans [0, 1

2[, l’autre dans [1

2, 1[ avec µ(B1) = µ(B2) = 1

2µ(A).

3. Soit X = [0, 1[×[0, 1[, dµ = dxdy et T la transformation du boulanger définieau chapitre 4, exercice 9: T (x, y) = (2x mod 1, y

2+ [2x]

2) où [x] est la partie entière

de x.Alors µ est invariante sous T . Pour indiquer la démonstration de cela, observons

que l’aire d’un rectangle est préservée par la transformation T , ainsi que par soninverse (faites le dessin correspondant). On peut ensuite étendre le résultat à desensembles quelconques (mesurables) en utilisant des techniques de théorie de lamesure (prendre des unions et des intersections de rectangles ainsi que des passagesà la limite).

4. L’exemple le plus important de mesure invariante est la mesure de Lebesguedans l’espace des phases pour les transformations engendrées par le flot hamiltonien.

113

Page 114: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 6 — Éléments de théorie ergodique

Soit le système d’équations:

q =∂H

∂p

p = −∂H∂q

(6.8)

où q,p ∈ Rn et H est l’hamiltonien supposé de classe C2 d’un système mécanique.Si on note φt le flot correspondant à (6.8) (en supposant qu’il est bien défini pourtout t ∈ R), alors la mesure de Lebesgue dans R2n est invariante sous φt, pour toutt ∈ R (théorème de Liouville).

Comme la fonction H est invariante sous (6.8), il s’ensuit que la mesure deLebesgue restreinte à une surface définie par H = E est également invariante. Onappelle cette dernière mesure la mesure de Liouville.

Pour démontrer le théorème de Liouville, considérons un système plus général,de la forme

x = f(x), (6.9)

où x ∈ Rm, et soit D un ensemble de mesure finie dans Rm. Soit V (t)= mesure(φt(D)), où φt est le flot associé à (6.9).

Alors on a, ∀t,d

dtV (t) =

φt(D)

div fdx (6.10)

où div f =∑m

i=1∂fi

∂xi.

Si on pose m = 2n, x = (q,p) et qu’on prend pour f le membre de droite de(6.8), on a immédiatement div f =

∑mj=1

∂2H∂qj∂pj

= ∂2H∂pj∂qj

= 0 puisque H est de classe

C2 et donc V (t) = mesure (D) ce qui démontre l’invariance de la mesure de Lebesguesous φt.

Pour démontrer (6.10), considérons t = 0 (l’extension à t quelconque est immé-diate; il suffit de remplacer D par φt(D)). On a, par la formule du changement devariables dans les intégrales multiples,

V (t) =

φt(D)

dx =

D

det(∂φt(x)

∂x)dx (6.11)

Par (6.9) on a ddtφt(x)t=0 = f(x). Donc,

∂φt(x)

∂x= 1| + t

∂f

∂x+O(t2) (6.12)

quand t→ 0. Observons que, par définition du déterminant,

det(1 + tA +O(t2)) = 1 + t Tr A+O(t2)

où Tr A =∑m

i=1Ai parce que seuls les éléments de matrice diagonaux de A donnentune contribution d’ordre t et pas d’ordre t2 (vérifiez ceci !). Donc,

d

dtdet(1 + tA+O(t2))|t=0 = Tr A.

114

Page 115: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

Or, avec A = ∂f

∂x, Tr A = div f , et en combinant ceci avec (6.11) et (6.12) on obtient

(6.10).Le simple fait qu’il existe une mesure finie invariante µ pour une transformation

T a une conséquence remarquable.

Théorème du retour de Poincaré

Soit T : X → X et µ une mesure T -invariante telle que µ(X) <∞. Alors ∀A ⊂ X,avec µ(A) > 0, ∃B ⊂ A avec µ(A\B) = 0 et tel que ∀x ∈ B, ∃ suite (ni)

∞i=1, ni ∈ N,

avec n1 < n2 < n3... et T nix ∈ A.

Remarques

1. Le théorème signifie que pour tout ensemble A, aussi petite que soit sa mesureµ, presque tous les points (par rapport à µ) reviennent dans A infiniment souvent.On peut même raffiner l’énoncé et montrer qu’ils reviennent dans le sous-ensembleB, mais la démonstration de cela est laissée comme exercice.

2. Ce théorème appliqué à l’exemple du flot hamiltonien a la conséquence (para-doxale) suivante: prenons un gaz dans une pièce isolée, concentrons-le dans un coinC de la pièce, et laissons-le ensuite évoluer librement. Supposons que le gaz obéitaux lois de la mécanique classique, c’est-à-dire, comme la pièce est supposée êtreisolée, qu’il obéit à une évolution donnée par (6.8) pour un H raisonnable et in-dépendant du temps, avec n égal au nombre de degrés de liberté du système (quiest énorme, de l’ordre dû nombre d’Avogadro). L’énergie totale E du système estsupposée finie et est conservée par l’évolution temporelle. Il est facile de montrerque, pour ce système, la mesure de Liouville, c’est-à-dire la mesure de Lebesguerestreinte à la surface dans R2n définie par H = E est finie.

Le théorème du retour implique que toutes les molécules du gaz reviendronsinfiniment souvent, toutes en même temps, dans C. En effet, il suffit de prendreA ⊂ R2n l’ensemble où toutes les particules ont leur position dans C (et des mo-ments quelconques, compatibles avec la contrainte donnée par l’énergie totale dusystème). Il est facile de voir que cet ensemble a une mesure de Liouville stricte-ment positive (mais minuscule comparée à la mesure totale de la surface d’énergieH = E). Précisons que la suite donnée par le théorème dépend de x, ce qui veut direque tous les points de A ne reviennent pas en même temps dans A, mais, commechaque point de A représente une configuration du gaz tout entier, on obtient bienque toutes les molécules de ce gaz reviennent en même temps dans C.

Cette conséquence contredit notre idée induitive de l’évolution (irréversible) d’unsystème physique: dans l’expérience imaginée ici, le gaz va se répandre uniformémentdans la pièce et rester éternellement dans cet état.

La réponse ‘physique’ à ce paradoxe est de dire que le temps qu’il faudrait atten-dre pour voir un tel retour se produire est beaucoup plus long que l’âge de l’univers.En effet, le théorème et sa preuve ne donnent aucune estimation concrète sur cestemps de retour. Et, évidemment, aucun système physique ne pourrait rester réelle-ment isolé pendant des temps aussi longs.

115

Page 116: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 6 — Éléments de théorie ergodique

Néanmoins, le résultat de Poincaré est remarquable parce qu’il montre qu’onpeut obtenir des informations sur un système mécanique quelconque par la penséepure. De plus, ces retours peuvent être observés pour des systèmes à un petit nombrede degrés de liberté.

3. Il est facile de voir pourquoi l’hypothèse que µ(X) < ∞ est nécessaire: soitX = R, et µ la mesure de Lebesgue (on a µ(R) = ∞), et Tx = x + 1, (T préservela mesure µ) et A = [0, 1

2]. Aucun point de A ne revient dans A.

Passons à la

Démonstration du théorème du retour

Soit, pour N ≥ 0 AN =∞⋃

n=N

T−nA. Les points de AN sont ceux qui sont envoyés

dans A par T n pour un n ≥ N . Donc B = A⋂

(∞⋂

N=0

AN) sont les points de A qui

reviennent infiniment souvent dans A, c’est-à-dire que, pour tout x ∈ B, il existe

une suite (ni) comme dans l’énoncé (comme pour chaque x ∈ B, il existe des n

arbitrairement grands avec T nx ∈ A, on construit la suite inductivement en prenant

pour ni+1 le premier tel n strictement plus grand que ni).

Montrons que µ(B) = µ(A), ce qui, vu que X est de mesure finie, est équivalent

à µ(A\B) = 0. On a T−1AN = AN+1 et donc µ(AN) = µ(AN+1), vu que T

préserve la mesure. Donc µ(A0) = µ(AN), ∀N . Comme A0 ⊃ A1 ⊃ ... ⊃ AN ,

et que X est de mesure finie, on a µ(A0\AN) = 0∀N et donc, vu qu’une union

dénombrable d’ensembles de mesure nulle est de mesure nulle, µ(A0\(∞⋂

N=0

AN )) =

µ(∞⋃

N=0

(A0\AN )) = 0. Donc, µ(B) = µ(A⋂

(∞⋂

N=0

AN)) = µ(A⋂

A0) = µ(A), vu que

A ⊂ A0.

Lorsqu’on a une transformation T et une mesure invariante sous T , ainsi qu’unefonction bornée (ou intégrable) F : X → R, on peut former les moyennes temporelles

1

N

N−1∑

n=0

F (T nx) (6.13)

ainsi que les limites N →∞ (si elles existent) de ces quantités.Si on prend F = IA la fonction indicatrice d’un sous ensemble A ⊂ X, la quantité

(6.13) égale le temps passé en moyenne (jusqu’au temps N) dans A et la limite, sielle existe, égale τA, le temps moyen passé dans A.

116

Page 117: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

Nous avons, à propos des limites de ces moyennes, les théorèmes fondamentauxsuivants dans lesquels nous introduisons l’espace L1(X, dµ) des fonctions intégrableset l’espace L2(X, dµ) des fonctions de carré intégrable. Comme µ(X) = 1, toutesles fonctions bornées appartiennent à la fois à L1(X, dµ) et à L2(X, dµ), et on peut,si on veut, restreindre les théorèmes ci-dessous à des fonctions bornées.

Théorème ergodique de Birkhoff

Si F ∈ L1(X, dµ), alors la limite

limN→∞

1

N

N−1∑

n=0

F (T nx) (6.14)

existe presque partout, c’est-à-dire que l’ensemble des x pour lesquels la limiten’existe pas est de mesure µ nulle, et cette limite définit une fonction F ∗(x) ∈L1(X, dµ) qui satisfait à:

F ∗(Tx) = F ∗(x) presque partout, (6.15)

et∫

X

F ∗(x)dµ(x) =

X

F (x)dµ(x). (6.16)

On a également le

Théorème ergodique moyen de von Neumann

Si F ∈ L2(X, dµ), alors

limN→∞

1

N

N−1∑

n=0

F (T nx)− F ∗(x)

2

dµ(x) = 0 (6.17)

où F ∗ est comme dans le théorème précédent, c’est-à-dire que (6.13) tend vers F ∗

au sens de la convergence dans L2(X, dµ).

Remarque. Si la fonction F est bornée, par exemple si F = IA pour A ⊂ X,alors F ∈ L1(X, dµ) ∩ L2(X, dµ), c’est-à-dire qu’elle satisfait aux hypothèses desdeux théorèmes, et il est facile de voir que, dans ce cas-là, la convergence énoncéedans le théorème de Birkhoff implique celle dans le théorème de von Neumann.La principale raison pour laquelle le théorème de von Neumann est mentionné estqu’il est beaucoup plus simple à démontrer que le théorème de Birkhoff. Nousallons donner cette démonstration maintenant en supposant de plus, pour simplifierla démonstration, que T est inversible, ce qui est le cas dans les exemples 1 et 3ci-dessus, mais pas dans l’exemple 2.

117

Page 118: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 6 — Éléments de théorie ergodique

Observons tout d’abord que H ≡ L2(X, dµ) est un espace de Hilbert5 et quel’opérateur U définit par

(UF )(x) = F (Tx) (6.18)

satisfait ∀F , G ∈ H,< UF,UG > = < F,G > (6.19)

où <,> dénote le produit scalaire dans H.Cela suit immédiatement le (6.4) et de la définition du produit scalaire. Si T est

inversible alors U l’est aussi et, par (6.19), U est unitaire. On peut alors réécrire(6.19) comme

U∗U = I (6.20)

où U∗ est l’opérateur adjoint de U et I l’identité, donc U∗ = U−1.Avant de démontrer le théorème, faisons deux remarques élémentaires:

- Si U est un opérateur unitaire, alors UF = F est équivalent à U∗F = F vuque U∗ = U−1.

- Si A est un opérateur dans un espace de Hilbert

kerA∗ = (Im A)⊥ (6.21)

où kerA∗ = F |A∗F = 0, Im A = AF |F ∈ H, et E⊥ désigne l’espaceorthogonal à E.

En effet, F ∈ kerA∗ signifie que ∀G ∈ H, (G,A∗F ) = 0 ou, par définition del’adjoint, (AG,F ) = 0 c’est-à-dire F ∈ (Im A)⊥.

SoitE = F ∈ H|UF = F (6.22)

le sous-espace propre de U de valeur propre 1 et soit P le projecteur de H sur E.Notons que tout F ∈ H peut s’écrire

F = PF + F (6.23)

où F ∈ E⊥. On a, trivialement, que les fonctions constantes appartiennent à E etque PF (Tx) = PF (x).

Remarquons finalement que, par définition de U , pour démontrer le théorèmeergodique moyen, il suffit de démontrer que, pour tout opérateur unitaire U dansH, et ∀F ∈ H,

limN→∞

‖ 1

N

N−1∑

n=0

UnF − PF‖ = 0, (6.24)

5Pour les étudiants qui ne sont pas familiers avec la notion d’espace de Hilbert, disons que ce sontdes espaces de dimension infinie, par exemple, comme ici, des espaces de fonctions. Ces espacessont munis d’un produit scalaire, lequel définit leur norme et, pour cette raison, ils possèdentégalement un bon nombre de propriétés des espaces de dimension finie, Rn ou Cn. Toutes lespropriétés utilisées ici sont familières pour Cn.

118

Page 119: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

où la norme est celle de H. On a alors que F ∗ = PF et (6.15) suit la définition deP . Il est facile de vérifier (6.16), en écrivant

F ∗(x)dµ(x) =< G,PF >=< PG,F >=

F (x)dµ,

avec G = 1, en utilisant le fait qu’un projecteur est auto-adjoint et que P1 = 1, vuque 1 ∈ E.

Démonstration du théorème ergodique moyen

Nous allons prouver (6.24). Observons que, si F ∈ PH, UnF = F , ∀n, et PF = F ;donc le résultat est trivialement vrai dans ce cas.

Soit maintenant F = (1− U)G, pour G ∈ H. On a

1

N

N−1∑

n=0

UnF =1

N(G− UNG)

−→N→∞ 0 (6.25)

vu que ‖UNG‖ = ‖G‖. Comme U est borné, on peut étendre (6.25) à F ∈Im (1− U) où E désigne la fermeture de E, c’est-à-dire qu’on peut étendre (6.25)à des limites de suites Fn = (1 − U)Gn pour Gn ∈ H. Mais, par les remarquesqui précèdent la démonstration, Im (1 − U)⊥ = ker(1 − U∗) = F |U∗F = F =F |UF = F = E.

Par conséquent, pour tout F ∈ Im (1− U), PF = 0 et (6.24) est valable aussipour F ∈ Im (1− U) = E⊥. Mais, comme tout F peut s’écrire F = PF + F , avecF ∈ E⊥ et que (6.24) vaut à la fois pour un tel F et pour PF , (6.24) est vrai pourtout F ∈ H. 2

Le théorème ergodique affirme l’existence d’une série de limites, celles de toutesles sommes de type (6.13), pour toutes les fonctions F spécifiées et pour presquetous les x (par rapport à µ). Mais il ne nous dit que peu de choses sur cette limite,F ∗(x), à part, cfr (6.24), qu’elle est donnée par la projection de F sur le sous-espace,E, en général inconnu.

Mais, et c’est ici que le théorème devient ‘utile’, il existe une classe de transfor-mations T pour lesquelles la fonction F ∗ est facile à calculer.

Définition 6.2. Soit T une transformation de X et µ une mesure invariante sous T .T est ergodique (par rapport à µ) si les seules fonctions dans L2(X, dµ) satisfaisant

F (x) = F (Tx) µ presque partout (6.26)

sont les constantes. En d’autres termes, l’espace E, défini dans (6.22) est de dimen-sion un.

Notons que cette définition implique à la fois T et µ. On peut donc également laconsidérer comme une définition des mesures µ ergodiques par rapport à T . C’estun sous-ensemble des mesures invariantes sous T .

119

Page 120: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 6 — Éléments de théorie ergodique

Mais le corollaire évident et important des théorèmes ergodiques appliqués auxtransformations ergodiques est que, par (6.15), F ∗ doit être constant si T est er-godique et, par (6.16) et

Xdµ(x) = 1, F ∗ =

XF (x)dµ(x). Nous avons donc

le

Corollaire. Soit T une transformation de X dans X et µ une mesure invariantesous T pour laquelle T est ergodique, alors pour tout F ∈ L2(X, dµ),

limN→∞

1

N

N−1∑

n=0

F (T nx) =

X

F (x)dµ(x) (6.27)

µ presque par tout (ainsi qu’au sens de la convergence dans L2(X, dµ)).Remarquons finalement que si F = IA, pour A ⊂ X, le temps moyen passé dans

A,τA = µ(A),

si les hypothèses du corollaire sont satisfaites.Pour obtenir des applications intéressantes des théorèmes ergodiques, il ‘suffit’ de

vérifier que (6.26) implique que F est constante pour des transformations données,et ensuite de calculer

XF (x)dµ(x) pour les F convenablement choisis (en général

F = IA pour A ⊂ X).

3. Exemples et applications

Considérons d’abord chacun des exemples de transformation donnés plus haut etvoyons s’ils sont ergodiques.

Exemple 1. Il faut distinguer entre α ∈ Q et α 6∈ Q. Commençons par α ∈ Q

c’est-à-dire α = pq

avec p, q ∈ N soit Fm(x) = exp(2πimqx) où m ∈ Z. Il est facilede vérifier que

Fm(Tαx)= exp(2πimq(x+ p

q))

= exp(2πimqx) = Fm(x),

vu que mq pq

= mp ∈ Z et e2πiℓ = 1 ∀ℓ ∈ Z.Comme, pour m 6= 0, Fm(x) n’est pas constant, on en conclut que Tα n’est pas

ergodique pour α ∈ Q.Si α 6∈ Q, utilisons le fait que, si F ∈ L2(X, dx), F peut être développée en série

de Fourier:F (x) =

n∈Z

cn exp(2πinx) (6.28)

où la série à droite converge dans L2(X, dx) et où les coefficients cn sont univoque-ment déterminés par

cn =

∫ 1

0

F (x) exp(−2πinx)dx

120

Page 121: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

Si F (x) = F (Tαx), en utilisant (6.28), on obtient∑

n∈Z

cne2πinx =

n∈Z

cne2πinxe2πinα,

et comme les coefficients de la série de Fourier sont univoquement déterminés, onobtient que

cn(e2πinα − 1) = 0 ∀n ∈ Z. (6.29)

Mais pour α 6∈ Q, il n’existe pas de n 6= 0 tel que exp(2πinα) = 1, vu que lesseules solutions de cette équation sont de la forme α = m

n, avec m ∈ Z. Donc (6.29)

implique cn = 0, pour n 6= 0, ce qui, par (6.28), implique

F (x) = c0

c’est-à-dire est constante et, donc, que Tα est ergodique.Le fait que Tα est ergodique implique que l’orbite de presque tout point est dense.

En effet, il suffit d’appliquer (6.27) avec F = IA, pour A un intervalle quelconque.De plus, dans ce cas-ci, à cause de la structure de groupe de l’addition modulo 1sur [0, 1[, il est intuitivement clair que cela implique que l’orbite de tout point estdense.

Notons que ceci suit également du théorème de retour de Poincaré. En effet, ilsuffit de montrer que ∀ǫ > 0, ∀x ∈ [0, 1[ ∃n tel que

|nα− x| ≤ ǫ (6.30)

(les additions étant modulo 1).Le théorème de Poincaré implique que ∀ǫ > 0, ∃m tel que |mα| ≤ ǫ, et mα 6= 0

parce que α 6∈ Q.Considérons la suite (pmα)p∈N, dont tous les points sont distincts.Il est clair que |(p−1)mα−pmα| ≤ ǫ et donc, pour tout x, il existe un p tel que

n = pm satisfasse (6.30).L’ergodicité de la transformation Tα, pour α irrationnel, a une application géomé-

trique intéressante. Considérons le tore T2 = [0, 1]× [0, 1], avec l’addition modulo 1et les équations

x = a1

y = a2

avec (x, y) ∈ T2, dont les solutions sont évidemment

x(t) = a1t+ x(0) mod 1

y(t) = a2t+ y(0) mod 1. (6.31)

Si a2

a16∈ Q, la courbe dans T2 définie par (6.31) est dense. Pour montrer cela, il suffit

de vérifier que, pour tout x∗ ∈ [0, 1], la suite des intersections de la courbe définiepar (6.31) avec le cercle sur T2 défini par x = x∗ est dense dans ce cercle. Si on notetn la suite des temps où la courbe intersecte ce cercle, et yn les coordonnées selon yde ces intersections, on a, à partir de (6.31)

tn+1 = tn +1

a1

121

Page 122: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 6 — Éléments de théorie ergodique

et, par conséquent,yn+1 = yn +

a2

a1.

Comme a2

a16∈ Q, on obtient, à partir de (6.27) appliqué à T = Tα et F = IA, pour A

un intervalle quelconque, que la suite yn intersecte A une infinité de fois et que, parconséquent, la suite des intersections est bien dense dans le cercle défini par x = x∗.

Ceci nous donne un exemple de courbe paramétrisée par R et dense dans T2.Comme la tangente à la courbe est partout non-nulle, et que la courbe ne s’intersectepas, on dit qu’il s’agit d’une immersion injective. Mais il ne s’agit pas d’une sous-variété plongée dans T2. En effet, un plongement ne doit pas seulement être injectif,mais doit être un homéomorphisme de R sur son image (c’est-à-dire sur la courbe vuecomme sous-ensemble T2 et munie de la topologie induite). Or, comme la courbepasse une infinité de fois dans chaque voisinage d’un point de la courbe, chaquevoisinage contient une suite (xn, yn) avec xn = x(tn), yn = y(tn) et tn → ∞. Donc,l’application inverse de la courbe, à valeur dans R n’est pas continue par rapport àla topologie induite sur la courbe par la topologie de T2.

On peut généraliser aisément cet exemple. Tout d’abord, si l’on considèrel’application Tα de Tm = [0, 1]m dans Tm donnée par x → x + α (mod 1 danschaque coordonnée) avec α = (α1, ..., αm) ∈ Rm tel que l’équation

∑mi=1 niαi = k

avec ni, k ∈ Z n’a de solution que pour ni = 0 ∀i, et k = 0, une extension du raison-nement établissant l’ergodicité de Tα, et utilisant les développements en séries deFourier à plusieurs variables, sur le tore Tm, montré que Tα est ergodique (Exercice:vérifiez cela).

Considérons maintenant sur Tn l’équation x = a, avec a ∈ Rn, et sa solutionx(t) = at+ x(0). Cela définit une courbe dans Tn qui est dense si le vecteur a estlinéairement indépendant sur les rationnels c’est-à-dire si l’équation

∑ni=1 niai = 0

avec ni ∈ Z n’a comme solution que ni = 0, ∀i. En effet, avec m = n−1 et αi = ai+1

a1

i = 1, ..., m, la condition précédente implique que Tα est ergodique sur Tm et doncque les intersections de la courbe x(t) avec le tore inclus dans Tn, de coordonnéex1 = x∗, pour x∗ quelconque, est dense dans ce tore. De là, il suit que la courbex(t) est dense dans Tn.

Exemple 2. Considérons maintenant T donné par x→ 2x mod 1 sur X = [0, 1[ avecdµ = dx. Utilisons à nouveau (6.28) appliqué à F (x) = F (Tx); on obtient

n∈Z

cn exp(2πinx) =∑

n∈Z

cn exp(2πi2nx)

ce qui, de nouveau par unicité des coefficients implique

cn = c2n ∀n ∈ Z. (6.32)

En itérant (6.32), on obtient

cn = c2kn ∀n ∈ Z, ∀k ∈ N. (6.33)

Mais comme F ∈ L2(X, dµ), on sait que∑

n∈Z|cn|2 < ∞, c’est-à-dire que cn → 0

quand |n| → +∞. Comme |2kn| → ∞ pour n 6= 0 quand k → ∞, (6.33) implique

122

Page 123: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

cn = 0, ∀n 6= 0, ce qui à nouveau, par (6.28), signifie que F = c0 et que T estergodique.

Exemple 3. La transformation du boulanger. Supposons, pour commencer, que F

est continument différentiable. Comme T (x, y) = (2xmod 1, y2+ [2x]

2), en différentiant

par rapport à y l’identité F (T (x, y)) = F (x, y), on obtient

∂yF (T (x, y)) =1

2D2F (T (x, y)) = D2F (x, y), (6.34)

où D2 dénote la dérivée par rapport à la deuxième composante. En prenant le supsur (x, y) de (6.34), on obtient

supx,y|D2F (x, y)| ≤ 1

2supx,y|D2F (x, y)|

et donc que D2F (x, y) = 0. On peut étendre cet argument pour montrer que siF ∈ L2(X, dµ) est invariant sous T , alors F est indépendant de y. Mais si F dépendseulement de x, on a F (T (x)) = F (2x mod 1) et on se ramène au cas précédent.Donc, la transformation de boulanger est elle aussi ergodique.

Exemple 4. Mentionnons finalement, sans démonstration, un dernier exemple detransformation ergodique. Soit X =]0, 1[ et Tx = 1

x ou · dénote la partie

fractionnaire. Alors dµ = dxlog 2(1+x)

et invariante sous T et T est ergodique parrapport à µ. L’intérêt de cette transformation, dite transformation de Gauss, vientde son lien avec les développements des nombres réels en fractions continues, c’est-à-dire des développements de la forme

x =1

a1 + 1a2+ 1

a3+...

, (6.35)

où an ∈ N. Pour obtenir (6.35), on écrit 1x

= [ 1x] + 1

x et on pose a1 = [ 1

x]. On a

alors

1x = Tx =

1

a2 + 1a3+ 1

a4+...

,

et on obtient inductivement

an =

[

1

T n−1x

]

(6.36)

Donnons maintenant quelques exemples d’applications de ce qui précède.

1. Distribution des premiers chiffres des puissances de 2Considérons la suite des puissances de 2:2, 4, 8, 16, 32, 64, 128, 256, 512, 1024,...

et formons la suite des premiers chiffres des nombres de cette suite:

2, 4, 8, 1, 3, 6, 1, 2, 5, 1, ... (6.37)

123

Page 124: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 6 — Éléments de théorie ergodique

Avec quelle fréquence le chiffre p ∈ 1, 2, ..., 9 apparaît-il dans cette suite? Cettequestion apparemment compliquée et sans relation avec la théorie ergodique a uneréponse fort simple utilisant cette théorie. En effet, que p soit le premier chiffre de2n signifie que, pour un r ∈ N,

p 10r ≤ 2n < (p+ 1)10r (6.38)

Prenant le logarithme en base 10 de cette relation on obtient

n log10 2 ∈ Jp ≡ [log10 p, log10(p+ 1)[ mod 1

ou encoreFréquence d’apparition de p dans la suite =

limN→∞

1

N

N−1∑

n=0

I(T nα (0) ∈ Jp) (6.39)

où I est la fonction indicatrice, Tα(x) = x + α mod 1 et α = log10 2. Si α 6∈ Q,on peut appliquer le théorème ergodique: si on remplace 0 par x dans (6.39), onobtient que la limite vaut, pour presque tout x,

µ(Jp) =

Jp

dx = log(1 +1

p). (6.40)

Il se fait, mais on ne le démontrera pas, que, pour la transformation Tα, la limite(6.39) est la même pour tout x et pas seulement pour presque tout x, et doncégalement pour x = 0. Par conséquent, la limite (6.39) vaut (6.40). Il reste àvérifier que α 6∈ Q. Si α = p

q, avec p, q ∈ N, on a 2q = 10p = 2p5p c’est-à-dire

2q−p = 5p, ce qui est impossible (un nombre pair ne peut être égal à un nombreimpair).

2. Presque tous les nombres réels sont normaux. Soit x ∈ [0, 1[. Avec quelle fré-quence les 0 et les 1 apparaissent-ils dans le développement de x en base 2, x =∑∞

n=1 an2−n? Si Tx = 2x mod 1, alors (cfr chapitre 4) an = 0 ←→ T n−1x ∈ [0, 12[.

Donc,Fréquence avec laquelle an = 0

= limN→∞

1

N

N−1∑

n=0

I(T nx ∈ [0,1

2[) =

∫ 1/2

0

dx =1

2(6.41)

presque partout par le théorème ergodique. On obtient évidemment le même résultatpour an = 1 et donc, on sait que, pour presque tous les nombres réels, les symboles0 et 1 apparaissent avec une fréquence 1

2dans leur développement binéaire. On peut

généraliser ce résultat, en considérant le développement en base p ou p = 2, 3... etl’application T : x → px mod 1. On en déduit aisément que pour presque tousles nombres réels, les symboles 0, 1, ... p − 1, apparaissent avec une fréquence 1

p.

Cette conclusion est une version plus précise et plus générale de “l’interprétationprobabiliste” donnée au chapitre 4.

124

Page 125: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111

On appelle normal en base p un tel nombre et normal un nombre qui est normalen base p pour tous les p = 2, 3, ....

Si on note Ap l’ensemble des nombres qui ne sont pas normaux en base p, onsait, par ce qui précède, que µ(Ap) = 0, où µ dénote la mesure de Lebesgue. Mais,comme une union dénombrable d’ensembles de mesure nulle est de mesure nulle,il suit que presque tout nombre est normal (mais trouver un exemple explicite detel nombre n’est pas évident). Il est par contre facile de donner des exemples denombres qui ne sont pas normaux: par exemple, en utilisant la notation du chapitre4, le nombre, écrit en base 2, 0 · 001, a une fréquence de 0 égale à 2/3 et de 1 égaleà 1/3 et donc n’est pas normal en base 2.

Il est facile de généraliser cet exemple et de montrer que, pour tout p, Ap, bienque de mesure nulle, est non-vide (et, en fait, est dense et non dénombrable).

3. Application aux fractions continues. En utilisant l’ergodicité de la mesure dµ(x) =dx

(log 2)(1+x)pour la transformation de Gauss (exemple 4 ci-dessus), on obtient, avec

les notations de cet exemple,

limN→∞

(a1 · ... · aN )1N =

∞∏

k=1

(1 +1

k2 + 2k)

log k

log 2 (6.42)

pour presque tous les x.En effet soit f(x) = log a1(x) c’est-à-dire f(x) = log k pour x ∈] 1

k+1, 1

k], k =

1, 2, ... On a, par ergodicité

limN→∞

1

N

N∑

n=1

log an(x) = limN→∞

1

N

N−1∑

n=0

f(T nx) =1

log 2

∫ 1

0

f(x)

1 + xdx.

Cette dernière intégrale vaut

1

log 2

∞∑

k=1

log k

∫ 1k

1k+1

dx

1 + x=

1

log 2

∞∑

k=1

log k log(1 +1

k2 + 2k),

et, en prenant l’exponentielle de cette relation, on obtient (6.42).On peut également écrire [a1, ..., an] = pn

qn, où [a1, ...an] représente la fraction

(6.35) mais arrêtée à l’ordre n (c’est-à-dire avec an+1 = ∞). Comme les ai ∈ N,pn, qn ∈ N et pn

qn→ x quand n→∞; pn

qnsont les ‘meilleurs’ (dans un certain sens qui

ne sera pas précisé ici) approximants rationnels de x. En utilisant l’ergodicité de latransformation de Gauss, on peut montrer que, pour presque tout x par rapport àla mesure de Lebesgue,

limn→∞

log qnn

=π2

12 log 2.

Pour la démonstration, voir [13], p. 175.

4. Finalement, on peut justifier l’histogramme mentionné dans la section 1. Ad-mettons tout d’abord que l’application (ou transformation) en tente introduite au

125

Page 126: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 6 — Éléments de théorie ergodique

chapitre 4 est ergodique6 par rapport à la mesure dµ = dx. On sait de plus que, sig(x) = f4(x) = 4x(1− x) et

C(y) =1− cosπy

2, y = C−1(x), (6.43)

g(x) = C f C−1(x) et gn(x) = C fn C−1(x), avec f l’application en tente.Donc, si on veut calculer le temps moyen passé par l’orbite de x dans un intervalle

J pour la transformation g,

limN→∞

1

N

N−1∑

n=0

I(gn(x) ∈ J),

il suffit de calculer

limN→∞

1

N

N−1∑

n=0

I(fn(y) ∈ C−1(J)) (6.44)

avec y = C−1(x). Mais, comme f est ergodique par rapport à la mesure de Lebesgue,(6.44) vaut

C−1(J)dy =

J(C−1)′(x)dx, pour presque tout y = C−1(x) par rapport

à la mesure de Lebesgue. De (6.43) on tire C ′(y) = π sinπy2

= π2

1− cos2 πy =π2

√1− cosπy

√1 + cosπy = π

x(1− x) avec x = 1−cos πy2

= C(y). Donc, la limite(6.44) vaut pour presque tout y = C−1(x),

J

dx

π√

x(1− x)(6.45)

ce qui correspond bien à l’observation empirique (le facteur 250 étant un facteurde normalisation = 50.000

200). Finalement, on peut montrer que le résultat est vrai

également pour presque tout x = C(y) par rapport à la mesure de Lebesgue, vu quel’image par la fonction C, dont la dérivée est bornée, d’un ensemble de Lebesgue demesure nulle est encore de mesure de Lebesgue nulle.

6L’application en tente est assez semblable à x→ 2x mod 1. Nous avons démontré l’ergodicitépour cette dernière transformation mais nous accepterons sans démonstration ce résultat pourl’application en tente.

126

Page 127: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

VII Notes supplémentaires

1. Extraits du livre de Strogatz, réf. 7:

1. Classification des systèmes linéaires en deux dimensions (chap. 5).

2. Exemple d’analyse complète d’un système non linéaire en deux dimensions(section 6.4).

3. Les fractals (chap. 11).

2. Textes sur l’histoire reliés, au chapitre 5 des notes.

1. L’histoire de l’erreur de Poincaré et la découverte des points homoclines, parYoccoz.

2. La découverte du fer à cheval par Smale.

Page 128: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

EXERCICES

Chapitre 1 — Notions de base

1. Soit l’équation x = 4x2 − 16.

a) Dessinez le champ de vecteurs sur la droite réelle.

b) Trouvez les points fixes et classifiez les.

c) Soit x(t) une solution telle que x(0) = x0 > 2. Quel temps faut-il pour que lasolution explose ?

2. Pour chaque cas, trouvez une équation x = f(x) qui a la propriété demandée. Siil n’y a pas d’exemples, justifiez votre réponse. On suppose dans tous les cas quef(x) est une fonction de classe C1.

a) Tout nombre réel est un point fixe.

b) Tout entier est un point fixe, et il n’y en a pas d’autres.

c) Il y a exactement trois points fixes, et ils sont tous stables.

d) Il n’y a pas de points fixes.

e) Il y a exactement 100 points fixes.

3. Pour certaines espèces d’organismes, le taux de croissance effectif est maximalpour une valeur intermédiaire de N . Par exemple, on peut imaginer qu’il est tropdifficile de trouver des partenaires quand N est très petit, et qu’il y a trop decompétition pour la nourriture et les autres besoins quand N est grand.

a) Montrez que N/N = r−a(N−b)2 fournit un modèle de cette situation, pourvuque r, a et b satisfassent certaines contraintes à déterminer.

b) Trouvez les points fixes du système et classifiez leur stabilité.

c) Dessinez l’allure des solutions pour différentes conditions initiales.

d) Comparez les solutions N(t) à celles trouvées dans le cas de l’équation logis-tique. Y a-t-il des différences qualitatives ?

Page 129: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111 – Exercices

4. Discutez la stabilité des points fixes des équations suivantes, en linéarisant leséquations. Si la linéarisation ne permet pas de conclure, utilisez un argumentgraphique pour étudier la stabilité.

a) x = x(1− x)b) x = tanx

c) x = x2(6− x)d) x = ax− x3 quand a > 0, a < 0 et a = 0. Discutez les trois cas.

5. Une particule voyage sur la demi-droite x ≥ 0 avec une vitesse donnée parx = −xc, où c > 0.

a) Trouvez les valeurs de c pour lesquelles l’origine x = 0 est un point fixe stable.

b) Choisissons c tel que x = 0 soit stable. Est-il possible que la particule atteignel’origine en un temps fini ? Quel est le temps nécessaire pour que la particulevoyage de x = 1 à x = 0, en fonction de c ? Reliez votre résultat à l’unicité oula non-unicité de la solution x(t) du problème de Cauchy, telle que x(0) = 0.

6. Montrez que la solution de l’équation x = 1 + x10 tend vers +∞ en un tempsfini, quelle que soit la condition initiale. (Indication : exprimez le temps mis pouratteindre +∞ sous forme d’intégrale et montrez que l’intégrale est finie).

7. Montrez que le problème de Cauchy x = x1/3, x(0) = 0, possède une infinité desolutions.

8. Considérons l’équation différentielle

x = x5 − x2,

où x = x(t) ∈ R. Déterminez les équilibres, leur stabilité et le comportementasymptotique de toutes les solutions.

9. Soit l’équation sur la droite x = f(x), où f : R → R est de classe C1. Dé-montrez analytiquement que cette équation ne possède pas de solutions périodiquesde période T > 0. (Indication : Faire une preuve par l’absurde et aboutir à une

contradiction en considérant∫ T

0

f(x(t))dx

dtdt).

10. Considérons un seau d’eau dont le fond est percé d’un trou. Soient h(t) lahauteur de l’eau restante dans le seau au temps t ; a la superficie du trou ; A la

129

Page 130: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 1 — Notions de base

superficie d’une section horizontale du seau (supposée constante) ; v(t) la vitesse del’eau passant par le trou.

a) En utilisant la conservation de la masse, montrez que av(t) = Ah(t).

b) En utilisant la conservation de l’énergie, montrez que v2 = 2gh. Déduisez-enl’équation h(t) = −C

h(t), où C =√

2g aA.

c) Soit la condition initiale h(0) = 0 (seau vide en t = 0), montrez que la so-lution h(t) est non-unique dans le passé, c’est-à-dire pour t < 0. Ceci est-ilintuitivement évident ?

11. Trouvez les points fixes de l’itération xn+1 = x2n et déterminez leur stabilité.

12. Soit l’itération xn+1 = sin xn. Montrez que la stabilité du point fixe x∗ = 0ne peut pas être déterminée par linéarisation. Montrez que x∗ = 0 est globalementstable à l’aide d’une représentation graphique.

13. Soit l’itération xn+1 = 3xn − x3n.

a) Trouvez tous les points fixes et déterminez leur stabilité.

b) Représentez graphiquement l’itération en débutant à x0 = 1.9.

c) Représentez graphiquement l’itération en débutant à x0 = 2.1.

d) Expliquez la différence entre les orbites trouvées en b) et c). Par exemple,établissez que l’orbite en b) restera bornée, tandis que pour l’orbite en c)|xn| → ∞, quand n→∞.

130

Page 131: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111 – Exercices

14. Soit l’itération xn+1 = cosxn. Comment se comporte xn lorsque n→∞ ?

15. Montrez que l’équation xn+1 = f(xn), où f(x) = 2x2 − 5x, possède une uniqueorbite périodique de période primitive 2. Étudiez la stabilité de cette orbite.

16. Considérons l’itération xn+1 = x2n + c. Pour quelles valeurs de c existe-t-il une

orbite périodique stable de période (primitive) 2 ? Quand est-elle superstable ?(C’est-à-dire que le produit des dérivées le long de l’orbite vaut zéro).

17. Soit 1 < r ≤ 2. On considère la famille d’applications fr : I = [0, 1]→ I = [0, 1]définie par :

fr(x) = rx, si 0 ≤ x ≤ 1

2,

= r(1− x), si1

2≤ x ≤ 1.

a) Représentez avec précision le graphe de l’application f 2r = fr fr : I → I.

b) Montrez que l’itération xn+1 = fr(xn) possède une unique orbite périodiquede période primitive 2, quelle que soit la valeur du paramètre r, 1 < r ≤ 2.Pour quelles valeurs de r(1 < r ≤ 2) cette orbite est-elle stable ? Instable ?

18. La méthode de Newton pour trouver les racines d’une équation g(x) = 0 consisteà trouver les points fixes de l’itération xn+1 = f(xn), où

f(xn) = xn −g(xn)

g′(xn).

a) Écrivez l’itération pour l’équation g(x) = x2 − 4 = 0.

b) Montrez que les points fixes de l’itération sont x = ±2.

c) Montrez que ces points fixes sont superstables.

d) Itérez l’application numériquement (sur une calculatrice), à partir de x0 = 1.Remarquez la convergence très rapide vers la bonne réponse !

131

Page 132: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 1 — Notions de base

19. Montrez que toute racine x∗ de l’équation g(x) = 0 correspond à un pointfixe superstable de l’application de Newton f (considérée dans l’exercice précédent),pour autant que g′(x∗) 6= 0.

20. Soit l’application f : [0, 1] → [0, 1] définie par f(x) = 4x(1 − x). On considèrel’itération xn+1 = f(xn).

a) Dessinez les graphes de f 2 = f f, f 3 = f f 2 et f 4 = f f 3.

b) Déterminez le nombre d’orbites périodiques (distinctes) de période primitivek, pour 1 ≤ k ≤ 4.

c) Étudiez la stabilité de ces orbites.

132

Page 133: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 2 — Linéarisation-Variétés stables-instables

1. Soit le système

x = 4x− 6y

y = 3x− 5y.

a) Déterminez les sous-espaces stables et instables et dessinez le portrait de phasedans les coordonnées x, y.

b) Donnez la solution générale du système dans les coordonnées x, y.

2.

a) Établissez le résultat énoncé au cours sur la réduction à la forme canoniqued’une matrice 2× 2 à entrées réelles.

b) En utilisant ce résultat, discutez l’allure de tous les portraits de phase possiblespour le système

x = Ax,

où A est une matrice 2× 2 à entrées réelles.

3. Calculez la variété instable locale en (x, y) = (0, 0) du système :

x = 3x+ 2y2 + xy

y = −y + 3y2 + x2y − 4x3,

jusqu’à l’ordre 3.

4. Considérez le système suivant d’équations, dans le quadrant x ≥ 0, y ≥ 0, etdessinez le portrait de phase en trouvant les points fixes et en déterminant leurstabilité :

x = 3x− 2x2 − xyy = 2y − xy − y2.

5. Soit le système

x = x(4− x− y)y = y(x− 2).

Page 134: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 2 — Linéarisation-Variétés stables-instables

a) Linéarisez les équations au voisinage des équilibres et déterminez les variétésstables et instables des systèmes linéarisés.

b) Calculez approximativement les variétés stables-instables du système non linéaireau voisinage des équilibres.

c) Déduisez-en l’allure du portrait de phase du système non linéaire au voisinagedes équilibres dans les coordonnées x, y.

6. Soit le système

x = −y + ax(x2 + y2)

y = x+ ay(x2 + y2),

où a est un paramètre. Montrez que le système linéarisé donne une image incorrectedu système non linéaire au voisinage de l’origine quand a 6= 0. Discutez séparémentle cas a > 0 et a < 0. (Indication : Utilisez les coordonnées polaires pour étudier lesystème non linéaire).

7.

a) Soit l’équation du penduleθ + sin θ = 0.

En utilisant la conservation de l’énergie, dessinez le portrait de phase du sys-tème dans le plan (θ, ν = θ).

b) Supposons que l’on ajoute du frottement

θ + bθ + sin θ = 0, b > 0.

Écrivez les équations dans le plan de phase (θ, ν = θ). Linéarisez ensuite leséquations aux voisinages des équilibres et déduisez-en le portrait de phase dusystème.

8. Le système suivant décrit un modèle de compétition de Lotka-Volterra entre deuxpopulations :

x = x(3− x− 2y) y = y(2− x− y).a) Trouvez tous les équilibres du système et calculez les systèmes linéarisés au

voisinage des équilibres.

b) Esquissez le portrait de phase du système au voisinage des équilibres et déduisez-en l’allure générale du portrait de phase. Interprétez intuitivement votre ré-sultat.

134

Page 135: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111 – Exercices

9. Soit f la transformation du plan définie par

f(x, y) =(x

2+ y2, 2y + x2

)

.

Calculez le développement de Taylor de la variété instable locale de f en (0,0) jusqu’àl’ordre 4.

10. Soit f : R2 → R2 l’application

f(x, y) =(

2x+ y2 + xy,y

2+ y3 + x2

)

.

Calculez le développement de Taylor de la variété stable et de la variété instable dupoint fixe (0,0) jusqu’à l’ordre 3.

135

Page 136: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 3 — Le théorème de Poincaré-Bendixson

1. Soit le système

x = x− y − x(x2 + 5y2)

y = x+ y − y(x2 + y2).

a) Étudiez la stabilité de l’origine.

b) Réécrivez le système en coordonnées polaires.

c) Déterminez un cercle de rayon maximal, r1, centré à l’origine tel que le champde vecteurs pointe vers l’extérieur.

d) Déterminez un cercle de rayon minimal, r2, centré à l’origine, tel que le champde vecteurs pointe vers l’intérieur.

e) Montrez que le système possède au moins une orbite périodique dans la régiontrappe r1 ≤ r ≤ r2.

2. Soit le système

x = x− y − x3

y = x+ y − y3.

Démontrez qu’il existe un anneau A = (x, y) ∈ R2|0 < r1 ≤√

x2 + y2 ≤ r2 autourde l’origine dans lequel le système admet au moins une orbite périodique.

3. Soit le système

x = y +1

4x (1− 2r2)

y = −x+1

2y (1− r2)

où r2 = x2 + y2. Déterminez une région trappe en forme de couronne autour del’origine et déduisez-en l’existence d’un cycle limite.

4. Soit le système

x = y + x (1− 2b− r2)

y = −x+ y (1− r2)

où r =√

x2 + y2 et b est un paramètre, 0 ≤ b < 12.

Page 137: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111 – Exercices

a) Écrivez le système en coordonnées polaires.

b) Déterminez une région trappe en forme de couronne autour de l’origine etdéduisez-en l’existence d’une orbite périodique.

c) Établissez que si b = 0, il existe un unique cycle limite.

5. Soit le système

x = −x (x2 + y2 − 2x− 3) + y

y = −y (x2 + y2 − 2x− 3)− x.

a) En écrivant le système dans les coordonnées polaires, montrez que l’anneau1 < r < 3 est une région trappe pour ce système et déduisez-en l’existenced’au moins une orbite périodique dans cette région.

b) Montrez que le cycle limite trouvé en a) ne peut être contenu à l’intérieur du

cercle de centre

(

3

4, 0

)

et de rayon√

33/4.

6. Soit F (x, y) une fonction de classe C1 de R2 dans R telle que F (x, y) < 0 si r ≤ aet F (x, y) > 0 si r ≥ b, où r2 = x2 + y2 et 0 < a < b. Soit l’équation

x+ F (x, x) x+ x = 0.

a) Réécrivez l’équation sous la forme d’un système plan.

b) Montrez que l’équation possède au moins une solution périodique autre qu’unéquilibre.

7. Montrez que si une orbite d’un système autonome dans le plan contient un de sespoints ω-limite ou α-limite, il s’agit d’une orbite fermée ou d’un équilibre.

8. Montrez qu’une orbite périodique d’un système de classe C1 dans le plan intersecteune section locale transverse en au plus un point.

9. Soit γ une orbite périodique d’un système dynamique dans le plan

x = f(x, y), y = g(x, y),

137

Page 138: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 3 — Le théorème de Poincaré-Bendixson

où f(x, y) et g(x, y) sont de classe C1. Supposons que le domaine de définition dece système contienne l’ouvert U de R2 dont γ est le bord. Montrez que U contientun équilibre.

10. Soit un système dynamique de classe C1 dans le plan. Soit x un point tel qu’ilexiste une suite tn → ±∞ telle que φtn(x)→ x.

a) Montrez que soit x est un équilibre, soit x appartient à une orbite périodique.

b) Montrez par un exemple que cette affirmation n’est plus vraie en dimensionsupérieure à 2 (difficile).

11. Le système

x = x2 − y − 1

y = (x− 2) y

possède trois équilibres.

a) Linéarisez le système au voisinage des équilibres et dessinez les portraits dephase des systèmes linéarisés.

b) Déduisez-en l’allure du portrait de phase du système non linéaire.

c) En considérant les trois droites qui joignent les paires d’équilibres, montrezque le système ne possède pas d’orbite périodique autre que les équilibres.(Indication : Vous pouvez utiliser le résultat de l’exercice 9).

12. Soit le système

x =∂E

∂y+ λ E

∂E

∂x

y = −∂E∂x

+ λ E∂E

∂y,

où λ ∈ R et E(x, y) = y2 − 2x2 + x4.

a) Dessinez le portrait de phase quand λ = 0.

b) Montrez que, pour tout λ, les équilibres satisfont l’équation(

∂E

∂x

)

=

(

∂E

∂y

)

= 0.

Déduisez-en les coordonnées des équilibres.

138

Page 139: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111 – Exercices

c) Choisissons λ < 0. Montrez que ∀c ≥ 0, l’ensemble

A = (x, y) ∈ R2|0 ≤ E(x, y) ≤ cest une région trappe du système. Déduisez-en l’ensemble ω-limite de l’orbitepassant par le point (1,2) en t = 0.

d) Trouvez les ensembles ω-limite des orbites passant par(

12, 0)

et(

−12, 0)

ent = 0.

13. Soit le système

x = −x+ ay + x2y

y = b− ay − x2y,

avec a, b > 0.

a) Dessinez les équations des courbes le long desquelles x = 0 et y = 0.

b) Le point situé à l’intersection de ces deux courbes est un équilibre. Trouvez lacondition sur les paramètres a, b pour que cet équilibre soit instable.

c) Considérez le trapèze dont les sommets sont donnés par (0,0), (0, b/a), (b, b/a),l’intersection de la droite de coefficient angulaire -1 passant par (b, b/a) avecla courbe y = x/(a + x2) et l’intersection de la verticale abaissée à partir dece point avec l’axe des x. Montrez que ce trapèze est une région trappe pourle système.

d) Déduisez-en l’existence d’un cycle limite à l’intérieur du trapèze, lorsque lacondition d’instabilité de l’équilibre trouvée en b) est satisfaite.

14. Le théorème du point fixe de Brouwer dit qu’une application continue f de laboule unité

Bn = x ∈ Rn : ‖x‖ ≤ 1dans elle-même possède un point fixe (c’est-à-dire f(x) = x pour un certain x).Établissez ce théorème dans le cas n = 2, en supposant que f est de classe C1, endémontrant l’existence d’un équilibre du champ de vecteurs x = f(x)− x.

15. Soit H une intégrale première d’un système dynamique de classe C1 dans le plan,c’est-à-dire que H est une fonction à valeurs réelles constante le long des orbites.Montrez que s’il n’existe aucun ouvert du plan sur lequel la fonction H est constante,alors le système ne possède pas de cycles limites.

16. Déterminez l’unique cycle limite quand ε→ 0 de l’équation de Van der Pol

x− ε(1− x2) x+ x = 0, ε > 0.

139

Page 140: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 3 — Le théorème de Poincaré-Bendixson

17. Vérifiez que la région suivante

est une région trappe pour l’équation de Van der Pol dans la limite ε → ∞. Vouspouvez en déduire la localisation de l’unique cycle limite. Estimez la période de cecycle.

18. Peut-on appliquer le théorème de Poincaré-Bendixson sur un tore ? sur unesphère ?

19. Montrez que si µ3 µ5 < 0 et 0 < µ1µ5 < 9 µ23/40, pour ε 6= 0 suffisamment petit,

l’équation de Liénard

x = y − ε(µ1x+ µ3x3 + µ5x

5)y = −x

possède exactement deux cycles limites qui sont approximativement des cercles.Déterminez les rayons de ces cercles.

140

Page 141: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 4 — Exemples de systèmes chaotiques

1. Soit l’application f : I → I où I = [0, 1[, définie par

f = 2x mod 1.

- Montrez que les points dont l’orbite est dense dans I forment un ensembledense.

- Montrez que tous les points, sauf un ensemble de mesure nulle, ont une orbitedense. Ce dernier résultat implique la propriété précédente.

2. Soit f : I → I où I = [0, 1[ définie par

f(x) = px mod 1.

avec p ∈ N, p 6= 0, 1.Montrez que f est chaotique, c-à-d.

- f possède la propriété de sensibilité aux conditions initiales (SCI)

- f possède une orbite dense dans I

- l’ensemble des points périodiques de f est dense dans I.

3. Soit f : I → I où I = [0, 1[ définie par

f(x) = (x+ α) mod 1.

où α est un nombre réel.Vue comme une application définie sur le cercle (en identifiant 0 et 1), f correspondà une rotation d’angle constant.

- Montrez que si α est rationnel, tous les points ont une orbite périodique (cequi implique qu’il n’y a aucune orbite dense).

- Montrez que si α est irrationnel, tous les points ont une orbite dense (ce quiimplique qu’il n’y a aucune orbite périodique).

- Montrez que ∀α réel, f ne possède pas la propriété SCI et que donc f n’estpas chaotique.

Page 142: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 4 — Exemples de systèmes chaotiques

4. Soit f : [0, 1[→ [0, 1[, donnée par

f(x) = 3x mod 1.

Montrez qu’il existe un x tel que ∀n = 0, 1, 2, . . .f (n)(x) < 1

3si n est premier

f (n)(x) ≥ 23

si n n’est pas premier.Ce x est-il unique ?

5. Montrez qu’il existe un z ∈ S1 (= cercle unité) tel que z3nn≥0 est dense dansS1.Accessoirement, montrez que l’ensemble de tels z est dense dans S1.

6. Soit l’application f : [0, 1[→ [0, 1[, donnée par

f(x) = 2x mod 1.

Montrez qu’il existe des points dont l’orbite n’est ni périodique, ni finalement pério-dique, ni dense dans [0, 1[.

7. Soit l’application f : I = [0, 1[→ [0, 1[, donnée par

f(x) = 2x mod 1.

Soit x ∈ I. Soit

Ex = y ∈ I|∃n, f (m)(x) = f (m)(y)∀m ≥ n.Montrer que, pour tout x, Ex est dense.

8. Pour l’application x → 2x mod 1, soit ǫ > 0 et n = n(ǫ) = minn|∀x ∃y ∈I, |x− y| ≤ ǫ et |f (n)(x)− f (n)(y)| ≥ 1

2; n est le nombre minimal d’itérations après

lequel deux points, initialement à une distance ǫ, peuvent devenir séparés par une

distance 12. Montrez que lim

ǫ→0

| log2 ǫ|n(ǫ)

=1, c’est-à-dire ǫ ≃ 2−n(ǫ) ou que le “temps" n

croît logarithmiquement en fonction de ǫ.

9. Soit f la transformation du boulanger définie sur D = [0, 1[×[0, 1[ par f(x, y) =(x′, y′) où

x′ = 2x mod 1

y′ =y

2si x <

1

2

y′ =y + 1

2si x ≥ 1

2.

142

Page 143: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111 – Exercices

Notons (xn, yn) = fn(x, y).

- Montrez qu’il existe une infinité de points (x, y) ∈ D tels que

xn ≥1

2si n ≥ 0 est pair

xn <1

2si n ≥ 0 est impair

et donnez le développement binaire des deux coordonnées de ces points.

- Donnez sous forme binaire les coordonnées (x, y) des points tels que f (n)(x, y)→(0, 0) pour n→ +∞ et pour n→ −∞ (de tels points sont appelés points ho-moclines).Caractérisez-les géométriquement.

- Montrez que f a un ensemble dense de points périodiques, possède une orbitedense, ainsi que la propriété SCI.

10. Soit D = [0, 1[×[0, 1[ et f : D → D défini par f(x, y) = (x′, y′), où

x′ = 2x mod 1

y′ =y

3si 0 ≤ x ≤ 1

2

y′ =y

3+

2

3si

1

2≤ x ≤ 1.

a) Montrez que f est inversible de f(D)→ D et décrivez f−1

b) Soit Λ =⋂

n∈Z

f (n)(D). Au moyen d’un codage adéquat, montrez que l’ensemble

des points périodiques pour f est dense dans Λ. L’est-il dans D ? f possède-t-elle la SCI ?

11. Considérons une transformation du boulanger modifiée, f : D → D, où D =[0, 1[×[0, 1[ et f(x, y) = (x′, y′), avec x′ = 3x mod 1,

y′ =y

3si 0 ≤ x <

1

3

y′ =y + 1

3si

1

3≤ x <

2

3

y′ =y + 2

3si

2

3≤ x < 1.

143

Page 144: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 4 — Exemples de systèmes chaotiques

Le point (0,0) est un point fixe de cette transformation. Existe-t-il un ensembledense de points homoclines (c-à-d. tels que f (n)(x, y) → (0, 0) pour n → +∞ etn→ −∞) pour ce point fixe ?

12. Calculez les exposants de Lyapunov pour l’application en tente f : I = [0, 1]→I = [0, 1], définie par

f(x) = 2x si x ≤ 1

2

= 2(1− x) si1

2≤ x

144

Page 145: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 5 — Le fer-à-cheval et les fractals

1. Pour l’application fer-à-cheval, déterminez dans le plan le point fixe dont lecodage est 1.

2. - Calculez la dimension fractale de l’ensemble suivant et justifiez votreréponse: on divise en quatre un carré de côté L et on retire le carréen haut à droite.

L

On répète l’opération dans chaque carré restant et ainsi de suite.

- Le résultat dépend-t-il de L ?

- Quel serait le résultat si on gardait le carré en haut à droite en retirantles trois autres (et en répétant cette opération) ?

3. Calculez, en justifiant votre réponse, la dimension fractale de l’ensemble

K × [0, 1] ⊂ R2

où K = x =

∞∑

i=1

ai 4−i, ai = 0 ou 3. Géométriquement, K est obtenu en

retirant l’intervalle]1

4,3

4

[

de[

0, 1]

et en recommençant dans les intervalles restants.

4. Soit D = (x, y) ∈ R2|0 ≤ x ≤ 1, 0 ≤ y ≤ 1. Écrivons x =∞∑

i=1

ai 3−i, y =

∞∑

i=1

bi 3−i où ai, bi = 0, 1, 2 et soit Λ ⊂ D l’ensemble des points avec ai 6= 1, ∀i

et bi 6= 1, ∀i. Calculez la dimension de Λ en expliquant votre raisonnement.

5. Calculez la dimension fractale des “ensembles de Cantor" de la forme

x =

∞∑

n=1

an

pn| ∀n an /∈ i1, . . . iq où q < p, iα ∈ 0, . . . p− 1

Page 146: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 5 — Le fer-à-cheval et les fractals

(Géométriquement, on divise [0,1] en p intervalles de longueur 1/p et on retireles intervalles d’indice i1, . . . , iq puis on recommence dans chaque intervallerestant).Exemple: p = 6, q = 2, i1 = 2, i2 = 5.

0 1 2 3 4 5

6. - Montrez que la mesure (de Lebesgue) de l’ensemble Cα où l’on retireà chaque étape au milieu des intervalles restant une portion α de cetintervalle est nulle quelle que soit la portion d’intervalle retirée à chaqueétape.

- Par contre, montrez que le résultat est différent si on retire une portionα du premier intervalle, une portion α2 des deux intervalles restant,. . .

7. Calculez la mesure (de Lebesgue) de l’ensemble Cα où l’on retire un intervallede longueur α au milieu du segment [0, 1] à la premiere étape, 2 intervalles(au milieu du reste) chacun de longueur α2 à la deuxième étape etc . . . pourα ≤ 1/3.

α2 α α2α = 0, 2

Remarquez que Cα ne contient aucun intervalle; néanmoins la mesure de Cα

tend vers 1 lorsque α→ 0.

146

Page 147: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 6 — Éléments de théorie ergodique

1. Soit H un espace de Hilbert de dimension infinie, et ek∞k=1 une base de H.Montrez que l’opérateur linéaire U , défini par Uen = en+1 est une isométriemais n’est pas unitaire.

2. Montrez que l’application en tente T est ergodique par rapport à la mesure deLebesgue. Pour cela, considérez les développements de Fourier de f et de f T .

3. Soit Tn = [0, 1]n le tore de dimension n. Soit α ∈ Rn tel que l’équation∑

i αiki = m, pour k ∈ Zn et m ∈ Z, n’admette que la solution trivialek = 0 et m = 0. En vous aidant des transformées de Fourier, montrez quel’application Tα : Tn 7→ Tn : x + α est ergodique par rapport à la mesure deLebesgue sur Tn.

4. Trouvez la fréquence d’apparition de chaque chiffre dans les premiers chiffresdes puissances de 3. (Vous pouvez supposer que, dans le théorème ergodique,la convergence est assurée partout).

5. Soit T : [0, 1] 7→ [0, 1] : x→ x+α, pour un certain α ∈ Q. Montrez que T n’estpas ergodique par rapport à la mesure de Lebesgue en trouvant une fonctioninvariante dans L2 qui ne soit pas constante, et en trouvant un sous-ensembleinvariant non trivial. Trouvez ensuite une mesure pour laquelle T serait er-godique. Ecrivez le théorème ergodique pour cette mesure. L’informationapportée par le théorème ergodique vous semble-t-elle non-triviale?

6. Soit τ : [0, 1] 7→ [0, 1] définie par :

τ(x) =

4x si x ∈ [0, 14]

(2√x− 1)2 si x ∈ [1

4, 1]

Montrez que la mesure µ = 12√

xest invariante sous τ . Montrez également que

τ est ergodique par rapport à µ.

Page 148: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

SOLUTIONS

Chapitre 1

1. b) Points fixes : x = −2 (stable), x = 2 (instable)

c) Par intégration

∫ x(t)

x0

dx

x2 − 4= 4

∫ t

t0

ds = 4(t− t0)

on obtient

x(t) =4

1−(

1− 4x0+2

)

e16(t−t0)− 2

Pour x0 > 2 la solution explose en un temps

T =1

16ln

(

x0 + 2

x0 − 2

)

+ t0

2. a) f(x) = 0

b) f(x) = sin πx

c) impossible : entre 2 points fixes stables, il en existe toujours un instable.

d) f(x) = 1

e) f(x) = n’importe quel polynome ayant exactement 100 racines distinctes, par

exemple100∏

k=1

(x− k)

3. b) N = 0;N = ±√

r

a+ b

Page 149: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111 – Solutions

Pour b2a < r, 0 est instable et

r

a+ b est stable (−

r

a+ b < 0 n’est pas pris en

considération).

Pour b2a > r, 0 est stable,

r

a+ b aussi et −

r

a+ b est instable.

4. a) x = 0f ′(0) = 1 instable

x = 1f ′(1) = −1 stable

b) x = kπ k ∈ Z, f ′(kπ) = −1, instable

c) x = 0f ′(0) = 0 stable pour x < 0, instable pour x > 0.

x = 6 f ′(6) = −36, stable.

d) pour a > 0, x = 0 est instable et x = ±√a est stable ; pour a ≤ 0, x = 0 est

stable.

5. a) c > 0

b) on intègre −∫ 0

1

dx

xc=

∫ T

0

dt;

Pour 0 < c < 1, T =1

1− c ; si c ≥ 1, T =∞. Si T <∞, une orbite partant de 1

peut intersecter l’orbite x(t) ≡ 0. Donc xc ne peut pas être de classe C1, ce qui est

le cas pour 0 < c < 1.

6. Pour tout x0,∫ ∞

x0

dx

1 + x10=

∫ t

t0

ds <∞

parce que l’intégrale de gauche converge.

7. Cfr cours pour x2/3.

149

Page 150: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 1

8. x = 0 est stable pour x > 0, instable pour x < 0 et x = 1 est instable.

9. Comme x = f(x), on a

∫ T

0

x2dt =

∫ T

0

f(x)dx

dtdt =

∫ x(T )

x(0)

f(x)dx = 0

si x(T ) = x(0). Ceci implique x = 0 ∀t ∈ [0, T ], donc T = 0.

11. x = 0 f ′(0) = 0 attracteur

x = 1 f ′(1) = 2 source

12. Après une itération |x1| = | sin x0| ≤ 1, et il est facile de voir graphiquement

que |xn| → 0.

13. x = 0 instable, x = ±√

2 instable.

14. La solution de x = cosx, x = 0, 739 . . . est stable (f ′(x) < 1). On peut montrer

graphiquement que toute solution tend vers ce point fixe.

15. Points fixes : x = 0 (instable) et x = 3 (instable). En résolvant f 2(x) = x,

on obtient, outre ces points fixes, les points 1 ±√

2, tels que f(1 +√

2) = 1−√

2,

f(1 −√

2) = 1 +√

2, c-à-d. qu’ils forment une orbite périodique. En calculant

(f 2)′(1±√

2) = f ′(1 +√

2)f ′(1−√

2) = −31, on voit que cette orbite est instable.

150

Page 151: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111 – Solutions

16. Les points fixes sont1±√

1− 4c

2. En cherchant les solutions de f 2(x) = x on

trouve, en plus de ces points fixes, l’orbite périodique

−1±√

1− 4(c+ 1)

2

et le produit des dérivées sur cette orbite vaut 4(c + 1). Donc, l’orbite sera stable

pour (c+ 1) < 14

c-à-d. −54< c < 3

4. Elle est superstable pour c = −1.

17. On a le point fixer

r + 1et l’orbite périodique

r

1 + r2,

r2

1 + r2

. Le produit des

dérivées vaut r2 > 1, donc l’orbite est instable.

18.xn+1 = xn −

x2n − 4

2xn

.

19. Si g(x) = 0 et g′(x) 6= 0, alors f(x) = x− g(x)

g′(x)= x c-à-d. x est un point fixe

de f .

20. a) faire les graphes par ordinateur ;

b) et c) : f a 2 points fixes 0 et 3/4, f 2 a 4 points fixes, ceux de f ainsi que

1

8(5±

√5) qui forment une orbite périodique de période 2 ; f 3 a 8 points fixes :

ceux de f et deux orbites périodiques de f de période 3 ; f 4 a 16 points fixes : les

4 points fixes de f 2 et 3 orbites de f de période 4.

151

Page 152: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 2

1. Direction instable : v1 =

(

21

)

, λ1 = 1 ; direction stable : v2 =

(

21

)

, λ2 = −2.

Solutions x(t) = c1

(

21

)

et +c2

(

11

)

e−2t avec

(

x0

y0

)

= c1

(

21

)

+c2

(

11

)

qui

déterminent x0, y0.

2. Voir [7], section 5.2. (ci-joint)

3. La linéarisation donne x = 3x, y = −y, c-à-d. que l’axe y = 0 est la direction

instable. On écrit y = s(x) = s2x2 + s3x

3 + . . . et on obtient s2 = 0, s3 = −2/5.

4. Voir [7] Section 6.4 pour les dessins. Points fixes : (0,0), (0,2), (32,0), (1,1).

Pour (0,0) la linéarisation donne un nœud instable, avec λ1 = 3, v1 =

(

10

)

, λ2 =

2, v2 =

(

01

)

.

Pour (0,2) on a λ1 = 1, v1 =

(

−32

)

, λ2 = −2, v2 =

(

01

)

: point selle.

Pour (32,0), λ1 = −3, v1 =

(

10

)

, λ2 = 1/2, v2 =

(

37

)

; point selle.

Pour (1,1), λ1 =−3 +

√5

2v1 =

1

−1−√

5

2

λ2 =−3−

√5

2, v2 =

1

−1 +√

5

2

;

nœud stable.

Les axes x = 0 et y = 0 sont des trajectoires.

5. Equilibres (0,0), (4,0), (2,2).

Pour (0,0), on a λ1 = 4, v1 =

(

10

)

, λ2 = −2, v2 =

(

01

)

; point selle.

Page 153: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111 – Solutions

Pour (4,0), on a λ1 = −4, v1 =

(

10

)

, λ2 = 2, v2 =

(

2−3

)

; point selle.

Pour (2,2), on a λ1 = −1± i√

3 ; spirale stable.

Pour (0,0), la variété stable est x = 0, la variété instable y = 0 ; pour (4, 0) on

opère le changement les variables x = x′ + 2y′ + 4, y = −3y′ qui nous donnent les

coordonnées autour de (4,0) et avec comme axes les vecteurs v1 =

(

10

)

, v2 =(

2−3

)

. Le système d’équations devient :

x′ = x′2 − 3x′y′ − 2y′2 − 4x′

x′ = y′(x′ + 2y′ + 2).

Pour la variété stable, on obtient y′ = s(x′) = 0 et pour la variété instable, x′ =

−14y′2 + 7

10y′3.

6. Le système linéarisé (x = −y, y = x) donne

(

xy

)

= c1

(

i1

)

eit+c2

(

−i1

)

e−it

et (0,0) est un centre.

Pour le système non-linéaire, on obtient en coordonnées polaires r = ar3, θ = 1 et

on voit que pour a < 0, on a une spirale stable, pour a = 0 un centre, pour a > 0

une spirale instable. On voit donc que l’approximation n’est valable que pour a = 0

(auquel cas elle se confond d’ailleurs avec le système d’équations).

7. Pour b > 0, on obtient 2 points fixes (0,0) et (π,0).

Pour (0,0), λ =−b ±

√b2 − 4

2c-à-d. une spirale stable pour b < 2 et un point fixe

stable pour b ≥ 2.

153

Page 154: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 2

Pour (π,0), λ =−b ±

√b2 + 4

2; point selle.

8. Points fixes (0,0), (0,2), (3,0), (1,1).

Pour (0,0) , λ = 3, 2 ; nœud instable.

Pour (0,2), λ = −1,−2 ; nœud stable.

Pour (3,0), λ = −3,−1 ; nœud stable.

Pour (1,1), λ1 = −1 −√

2, v1 =

( √21

)

, λ2 = −1 +√

2, v2 =

(

−√

21

)

; point

selle.

Pour les dessins, voir [7], Section 6.4. (ci-joint)

9. s(x) = s2x2 + s3x

3 + s4x4, avec s2 = −4

7, s3 = s4 = 0.

u(y) = u2y2 + u3y

3 + u4y4, avec u2 = 2

7, u3 = u4 = 0.

10. Variété stable : x = s(y) = s2y2 + s3y

3 avec s2 = −47, s3 = 32

105. Variété instable :

y = u(x) = u2x2 + u3x

3 avec u3 = 0, u2 = 2/7. Notez que ici l’axe des x est instable

et l’axe des y stable pour le système linéarisé.

154

Page 155: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 3

1. a) Les valeurs propres de la linéarisation autour de (0,0) sont 1 ± i ; spirale

instable.

b) En coordonnées polaires, on a

r = r(1− r2)− r3 sin2 2θ

θ = 1 + 4r2 cos θ sin3 θ = 1 + 2r2 sin 2θ sin2 θ.

c-d) r1 = 1√2, r2 = 1.

e) Il faut vérifier qu’il n’y a pas de points fixes dans la couronne 1√2≤ r ≤ 1.

Pour cela on vérifie, en tracant le graphe de 1+2r2 sin2 θ sin2 θ, que θ > 0 dans cette

couronne. On peut ensuite appliquer le théorème de Poincaré-Bendixson.

2. En coordonnées polaires, on a

r = r(1− r2(cos4 θ + sin4 θ))

θ = 1 +r2

2cos 2θ sin 2θ = 1 +

r2

4sin 4θ.

L’anneau est 1 ≤ r ≤√

2.

Dans cet anneau θ ≥ 1− 24

= 12

; donc, pas de points fixes.

3. En coordonnées polaires, on obtient

r =1

4(1− 2r2 + sin2 θ)

θ =1

8sin 2θ − 1.

Page 156: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 3

Anneau : 1√2≤ r ≤ 1 ; θ ≤ −7

8⇒ pas de points fixes.

4. En coordonnées polaires,

r = r(1− r2)− 2br cos2 θ

θ = b sin 2θ − 1

√1− 2b ≤ r ≤ 1

θ ≤ −1

2pour b ≤ 1

2⇒ pas de points fixes.

Si b = 0, r = 1 est l’unique cycle limite.

5. a) En coordonnées polaires,

r = −r(r2 − 2r cos θ − 3)

θ = −1.

L’anneau est 1 ≤ r ≤ 3.

b) Impossible parce que l’anneau ci-dessus est une région-trappe et θ ≡ −1, ce

qui fait que toute trajectoire tourne autour de l’origine et il n’existe pas de telle

trajectoire qui soit contenue dans l’intersection de l’anneau et du cercle de centre

(34, 0) et de rayon

√334

.

6.

r =−y2

rF (x, y)

θ = −1− F (x, y)y2

r2.

156

Page 157: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111 – Solutions

Donc a ≤ r ≤ b est une région-trappe, et le seul point fixe est l’origine.

8. S’il y avait plus d’une intersection, on aurait une région-trappe dont la frontière

serait composée de la trajectoire et du segment de la section transverse entre les

deux intersections et la trajectoire ne pourrait pas être fermée.

9. L’intérieur de γ est une région-trappe qui contient par conséquent soit un ou

plusieurs équilibres, soit une orbite périodique γ′. Dans le premier cas, on a le

résultat, dans le second, on répète le raisonnement avec l’intérieur de γ′ et ainsi de

suite. S’il se répète à l’infini, on obtient néanmoins un équilibre dans l’intersection

de toutes ces régions-trappe, par le théorème des fermés emboîtés.

11. Equilibres : (± 1,0), (2,3); en (1,0) on a λ1 = 2, λ2 = −1. v1 =

(

10

)

, v2 =(

13

)

, point selle. En (-1,0), λ1 = −2, λ2 = −3. v1 =

(

10

)

, v2,

(

11

)

, nœud

stable. En (2,3), λ1 = 1, λ2 = 3, v1 =

(

13

)

, v2

(

11

)

, nœud stable.

Les droites joignant les équilibres (y = 0, y = x + 1, y = 3(x − 1) sont des orbites

du systèmes. Or une orbite périodique devrait entourer un ou plusieurs équilibres

et par conséquent intersecter une de ces droites, ce qui est impossible (deux orbites

distinctes ne s’intersectent jamais).

12. Cfr notes fin du chapitre 3.

157

Page 158: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 4

1. Voir notes Théorème 4.4.

2. On reprend la démonstration faite dans les notes pour p = 2 (Th. 4.4) en

remplaçant le développement en base par celui en base p.

3. Si α = nm

, alors fm(x) = x ∀x. Pour α irrationnel, voir chapitre 6.

De plus ∀x, y |(fn(x) − fm(y)) mod 1| = |(x − y) mod 1| ; donc, la distance entre

deux points sur le cercle ne peut pas croître.

4. On prend x =∞∑

n=1

an 3−n avec an = 0 si n est premier, n = 2 si n n’est pas

premier.

5. Soit F : S1 → S1, F (z) = z3 et f : [0, 1[→ [0, 1[, f(x) = 3x mod 1. On vérifie

que F (U(x)) = U(f(x)), avec U(x) = e2πix. Par conséquent, il suffit de trouver un

x dont l’orbite sous f soit dense dans [0, 1[ et cela a été fait à l’exercice 2.

6. Soit par exemple, x =∞∑

n=1

an 2−n avec an = 0 sauf si n est une puissance de 10,

auquel cas an = 1.

7. Soit a1, . . . , aN une suite finie quelconque. Il suffit de montrer qu’il existe y ∈ Ex

tel que bn(y) = an ∀n ≤ N . Il suffit de prendre bn(y) = an, ∀n ≤ N , bn(y) =

bn(x), ∀n > N .

Page 159: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

PHYS2111 – Solutions

9. Soit x =∞∑

n=0

sn 2−(n+1), y =∞∑

n=1

s−n 2−n et soit s (x, y) = (sn)+∞n=−∞. Il est facile

de voir que la suite s (f(x, y)) = σ s où σ décale vers la gauche : (σs)n = sn+1.

- Si s (x, y) est tel que sn = 1 si n ≥ 0 est pair, sn = 0 si n ≥ 0 est impair, et

sn est quelconque pour n < 0, alors (x, y) satisfait la condition.

- Il suffit que ∃N tel que sn = 0 pour n ≤ −N et pour n ≥ N . Géométriquement

il s’agit des points de la forme(

p2N ,

q2N

)

p, q ∈ N, p, q ≤ 2N .

- On peut répéter les arguments utilisés pour x→ 2x mod 1.

10. a) f−1(x, y) = (x′, y′) où y′ = 3y mod 1

x′ =x′

2si y <

1

3

x′ =x′ + 1

2si y ≥ 2

3

b) On écrit x =∞∑

n=0

sn 2−n et y =∞∑

n=1

s−n 3−n sn = 0, 1 pour n ≥ 0,

s−n = 0, 1, 2, et s (x, y) = (sn)+∞n=−∞. On a que s (f(x, y)) = σ s où (σs)n = sn+1

pour n 6= −1 et (σs)−1 = 2s0.

Λ correspond à l’ensemble des suites avec sn 6= −1 ∀n < 0, c-à-d. [0, 1] × C où

C est l’ensemble tryadique de Cantor. En effet 2s0 = 0 ou 2 et le décalage vers la

gauche fait que, dans Λ, sn = 0 ou 2, ∀n < 0. Au moyen des arguments habituels,

on voit que l’ensemble des points périodiques est dense dans Λ mais pas dans D

(Λ\D est ouvert) et que f possède la SCI.

159

Page 160: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 4

11. On écrit x =∞∑

n=0

sn 3−n, y =∞∑

n=1

s−n 3−n et on procède comme dans l’exercice

9. L’ensemble des points homoclines correspond aux suites telles que ∃N < ∞,

sn = 0 ∀n ≤ −N et ∀n ≥ N .

12. Comme |f ′| = 2 (sauf en x = 12) on a λ1 = log 2.

160

Page 161: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 5

1. Le point 1 correspond au seul point fixe autre que (0,0). Il faut résoudre x =

−λx+ 1, y = −µ(y − 1) ce qui donne x = 11+λ

, y = µ1+µ

.

2. Il suffit d’un carré de côté 12n à chaque étape, donc d = 0 (ce qui est évident

puisque, dans la limite, l’ensemble se réduit à un point). Dans l’autre cas, il faut 3n

carrés de côté 12n et d = ln 3

ln 2.

3. Il faut 2n × 4n carrés de côté 4−n pour couvrir K donc d = ln 8ln 4

= 32.

4. Il faut 4n carrés de côté 3−n, donc d = ln 4ln 3

. Alternativement, l’ensemble est un

produit de deux ensembles de Cantor, donc d = 2 ln 2ln 3

.

5. d =ln(p− q)

ln p.

6. a) Soit ℓn la longueur des intervalles restants à la neme étape. On a ℓn =

(1− α)ℓn−1, ℓ0 = 1 ; donc ℓn = (1− α)n → 0 quand n→∞.

b) On a ℓn = (1−αn)ℓn−1, ℓ0 = 1 ; donc ℓn =

n∏

i=1

(1−αi) et ℓ∞ =

∞∏

i=1

(1−αi) 6= 0

car∞∏

i=1

(1−αi) = exp(∞∑

i=1

ln(1−αi)) ≥ exp−(

1

1− α

∞∑

i=1

αi

)

= exp

(

− α

(1− α)2

)

6=

0 où on a utilisé ln(1− x) ≥ −x1−α

pour x ≤ α ; qui se vérifie en écrivant

Page 162: Introduction à la dynamique non linéaire PHYS 2111

Chapitre 5

ln(1− x) = −∫ 1

1−x

dy

y≥ −x

1− x ≥−x

1− α.

7. La somme des longueurs des intervalles retirés vaut∞∑

n=1

2n αn =2α

1− 2α→ 0

lorsque α→ 0.

162