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REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - DÉCEMBRE 2010 - N°427 // 81 Rubrique proposée par Gérard Guez, avocat à la Cour - [email protected] DROIT DES SOCIÉTÉS GESTION Faut-il emprunter à 100 % ? Hormis l’achat de laboratoires, pour les- quels la situation n’a pas de précédent, et dont le financement dépend de variables nouvelles, votre banquier sera réticent à financer 100 % de votre investissement. Par ailleurs, il veillera à ce que le total de vos emprunts soit en rapport avec le mon- tant de vos capitaux propres. Essayez, si possible, de respecter le ratio suivant : fonds propres > ou = dettes à long et moyen terme. N’oubliez pas également de vérifier que votre capacité d’autofinancement (résultat net + dotations aux amortissements) vous permet de faire face à vos échéances d’emprunts. Il peut être aussi plus intéressant de recou- rir à un emprunt total ou partiel alors même que vous disposez des fonds pour financer votre investissement. En effet, le recours au financement externe peut engendrer un effet de levier intéressant du point de vue de la rentabilité financière de votre entreprise. Autrement dit, la rentabilité financière des capitaux investis dans votre entreprise peut augmenter si vous enga- gez des investissements sans les autofi- nancer. Vous devez toutefois mesurer au préalable le degré de cet effet de levier. Mais la recherche d’une meilleure renta- bilité financière ne doit pas menacer la rentabilité économique de votre entreprise. Il faut donc vérifier que la rentabilité de l’in- vestissement est bien supérieure au coût de l’emprunt ! À défaut, vous risqueriez de faire passer votre résultat dans le rouge. Il convient de vous assurer ensuite que l’impact de votre choix de recourir à l’em- prunt plutôt qu’à l’autofinancement ne réduise pas trop le résultat. Assurez-vous aussi que la capacité d’au- tofinancement prévisionnelle de votre entreprise (résultat net + dotations aux amortissements après investissement par emprunt) vous permettra de faire face aux échéances en capital de l’emprunt sans créer de tensions financières excessives. Contrôlez le coût réel de votre emprunt Les taux d’intérêt actuellement pratiqués sont relativement attractifs. Mais ne vous polarisez pas uniquement sur le taux d’in- térêt. Préférez-lui le taux effectif global (TEG) qui comprend les coûts accessoires à l’emprunt (assurances, frais de dossier, commissions diverses...). Et accordez une attention toute particulière aux garanties exigées par votre banquier. N’allongez pas inutilement la durée de l’emprunt. Mieux, la réduction de sa durée peut vous permettre de réaliser de substantielles économies. Quelle est l’incidence fiscale de votre choix ? L’autofinancement ne génère aucun frais supplémentaire du point de vue comptable et fiscal. Vous ne pouvez que déduire l’amortissement du bien acquis sur sa durée normale d’utilisation. À l’inverse, le financement par emprunt vous permet de déduire, en plus de l’amor- tissement, les intérêts courus sur l’exer- cice. Ainsi, cette déduction fiscale vous permet d’atténuer le coût du crédit. Et plus l’économie d’impôt sur vos bénéfices générée par la déduction des intérêts est importante, plus le coût réel « net fiscal » du crédit est faible et plus vous avez intérêt à emprunter. Attention : seuls les intérêts sont déductibles. La partie de vos men- sualités qui correspond au remboursement du capital ne l’est pas. Selon le choix du mode de remboursement, constant ou progressif, avec différé ou non, le coût fiscal annuel de l’emprunt peut être tota- lement différent. Pensez-y ! Conclusion Le taux que vous pouvez aujourd’hui obte- nir de votre banquier et l’effet de levier financier et fiscal attaché à l’endettement peuvent légitimement vous inciter à garder intactes vos réserves de trésorerie. Vous disposerez alors d’une poire pour la soif qui vous mettra en position de faire face aux nécessités induites par la « nouvelle donne » en biologie. Investissement : emprunt ou autofinancement ? Suite de l’article publié dans le précédent numéro de RFL EIRL La loi du 15 juin 2010, qui devrait entrer en vigueur au plus tard le 15 décembre 2010, permet aux exploitants individuels qui adopte- ront le statut d’entrepreneur indivi- duel à responsabilité limitée (EIRL) de mettre leur patrimoine personnel à l’abri de leurs créanciers pro- fessionnels grâce au mécanisme du patrimoine d’affectation, sans création d’une personne morale. Ce nouveau statut sera ouvert à tous les entrepreneurs individuels, y compris les auto-entrepreneurs, quelle que soit la nature de leur activité (commerciale, artisanale, libérale, agricole). Le secrétaire d’Etat chargé du Commerce, de l’Artisanat, et des PME a précisé que le nouveau statut de l’EIRL sera ouvert aux entrepreneurs individuels qui exer- cent une activité professionnelle en nom propre, créateurs ou déjà en activité et que la personne qui a choisi d’agir dans le cadre d’une société n’est plus un entrepre- neur individuel et ne peut donc pas recourir au statut de l’EIRL. Il en résulte que les associés de SCP qui sont responsables indéfi- niment et solidairement des dettes sociales, ne pourront pas recourir à ce statut. Pour limiter leur res- ponsabilité, ils peuvent seulement décider de transformer la SCP en société d’une forme dans laquelle les associés ne sont responsables qu’à concurrence de leurs apports, cette transformation n’entraînant pas la création d’une personne morale nouvelle. Le secrétaire d’Etat a également précisé que les associés de SCP ne peuvent pas non plus recourir à la déclaration d’insaisissabilité prévue aux articles L 526-1 et sui- vants du Code de commerce, qui permet à un entrepreneur individuel de protéger sa résidence principale et ses biens immobiliers non affec- tés à un usage professionnel.

Investissement : emprunt ou autofinancement ?

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Page 1: Investissement : emprunt ou autofinancement ?

REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - DÉCEMBRE 2010 - N°427 // 81

Rubrique proposée par Gérard Guez, avocat à la Cour - [email protected]

DROIT DES SOCIÉTÉSGESTION

Faut-il emprunter à 100 % ?

Hormis l’achat de laboratoires, pour les-quels la situation n’a pas de précédent, et dont le financement dépend de variables nouvelles, votre banquier sera réticent à financer 100 % de votre investissement.

Par ailleurs, il veillera à ce que le total de vos emprunts soit en rapport avec le mon-tant de vos capitaux propres. Essayez, si possible, de respecter le ratio suivant :

fonds propres > ou = dettes à long et moyen terme.

N’oubliez pas également de vérifier que votre capacité d’autofinancement (résultat net + dotations aux amortissements) vous permet de faire face à vos échéances d’emprunts.

Il peut être aussi plus intéressant de recou-rir à un emprunt total ou partiel alors même que vous disposez des fonds pour financer votre investissement. En effet, le recours au financement externe peut engendrer un effet de levier intéressant du point de vue de la rentabilité financière de votre entreprise. Autrement dit, la rentabilité financière des capitaux investis dans votre entreprise peut augmenter si vous enga-gez des investissements sans les autofi-nancer. Vous devez toutefois mesurer au préalable le degré de cet effet de levier.

Mais la recherche d’une meilleure renta-bilité financière ne doit pas menacer la rentabilité économique de votre entreprise. Il faut donc vérifier que la rentabilité de l’in-vestissement est bien supérieure au coût de l’emprunt ! À défaut, vous risqueriez de faire passer votre résultat dans le rouge.

Il convient de vous assurer ensuite que l’impact de votre choix de recourir à l’em-prunt plutôt qu’à l’autofinancement ne réduise pas trop le résultat.

Assurez-vous aussi que la capacité d’au-tofinancement prévisionnelle de votre entreprise (résultat net + dotations aux amortissements après investissement par emprunt) vous permettra de faire face aux échéances en capital de l’emprunt sans créer de tensions financières excessives.

Contrôlez le coût réel de votre emprunt

Les taux d’intérêt actuellement pratiqués sont relativement attractifs. Mais ne vous polarisez pas uniquement sur le taux d’in-térêt. Préférez-lui le taux effectif global (TEG) qui comprend les coûts accessoires à l’emprunt (assurances, frais de dossier, commissions diverses...). Et accordez une attention toute particulière aux garanties exigées par votre banquier. N’allongez pas inutilement la durée de l’emprunt. Mieux, la réduction de sa durée peut vous permettre de réaliser de substantielles économies.

Quelle est l’incidence fiscale de votre choix ?

L’autofinancement ne génère aucun frais supplémentaire du point de vue comptable et fiscal. Vous ne pouvez que déduire l’amortissement du bien acquis sur sa durée normale d’utilisation.

À l’inverse, le financement par emprunt vous permet de déduire, en plus de l’amor-tissement, les intérêts courus sur l’exer-cice. Ainsi, cette déduction fiscale vous permet d’atténuer le coût du crédit. Et plus l’économie d’impôt sur vos bénéfices générée par la déduction des intérêts est importante, plus le coût réel « net fiscal » du crédit est faible et plus vous avez intérêt à emprunter. Attention : seuls les intérêts sont déductibles. La partie de vos men-sualités qui correspond au remboursement du capital ne l’est pas. Selon le choix du mode de remboursement, constant ou progressif, avec différé ou non, le coût fiscal annuel de l’emprunt peut être tota-lement différent. Pensez-y !

Conclusion

Le taux que vous pouvez aujourd’hui obte-nir de votre banquier et l’effet de levier financier et fiscal attaché à l’endettement peuvent légitimement vous inciter à garder intactes vos réserves de trésorerie. Vous disposerez alors d’une poire pour la soif qui vous mettra en position de faire face aux nécessités induites par la « nouvelle donne » en biologie. ■■

Investissement : emprunt ou autofinancement ?Suite de l’article publié dans le précédent numéro de RFL

EIRLLa loi du 15 juin 2010, qui devrait entrer en vigueur au plus tard le 15 décembre 2010, permet aux exploitants individuels qui adopte-ront le statut d’entrepreneur indivi-duel à responsabilité limitée (EIRL) de mettre leur patrimoine personnel à l’abri de leurs créanciers pro-fessionnels grâce au mécanisme du patrimoine d’affectation, sans création d’une personne morale. Ce nouveau statut sera ouvert à tous les entrepreneurs individuels, y compris les auto-entrepreneurs, quelle que soit la nature de leur activité (commerciale, artisanale, libérale, agricole).

Le secrétaire d’Etat chargé du Commerce, de l’Artisanat, et des PME a précisé que le nouveau statut de l’EIRL sera ouvert aux entrepreneurs individuels qui exer-cent une activité professionnelle en nom propre, créateurs ou déjà en activité et que la personne qui a choisi d’agir dans le cadre d’une société n’est plus un entrepre-neur individuel et ne peut donc pas recourir au statut de l’EIRL. Il en résulte que les associés de SCP qui sont responsables indéfi-niment et solidairement des dettes sociales, ne pourront pas recourir à ce statut. Pour limiter leur res-ponsabilité, ils peuvent seulement décider de transformer la SCP en société d’une forme dans laquelle les associés ne sont responsables qu’à concurrence de leurs apports, cette transformation n’entraînant pas la création d’une personne morale nouvelle.

Le secrétaire d’Etat a également précisé que les associés de SCP ne peuvent pas non plus recourir à la déclaration d’insaisissabilité prévue aux articles L 526-1 et sui-vants du Code de commerce, qui permet à un entrepreneur individuel de protéger sa résidence principale et ses biens immobiliers non affec-tés à un usage professionnel. ■■