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J.L. Charbonnier - 16 mai 2007 - Urfist de Paris
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~Comment concevoir des activités de formation documentaire dans l’enseignement supérieur ?
GREMI, séminaire du 16 mai 2007
Contribution de Jean-Louis Charbonnier IUFM des Pays de la Loire
J.L. Charbonnier - 16 mai 2007 - Urfist de Paris
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Comment concevoir des activités de formation documentaire dans l’enseignement supérieur ?
D’où je parle…
De ma retraite, mais aussi… De ma fonction de formateur de professeurs et des interventions que j’ai eu l’occasion de faire, à
ce titre, dans les colloques d’Arc et Senans (1991) et de Toulouse (1993)
De ma participation aux groupes de travail sur la formation à l’information scientifique et
technique de la sous-direction des bibliothèques en 1998 ainsi qu’à son colloque de 1999
(Paris VIII), avec G. Losfeld
J.L. Charbonnier - 16 mai 2007 - Urfist de Paris
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Comment concevoir des activités de formation documentaire dans l’enseignement supérieur ?
1. La formation documentaire
dans le supérieur comme
problème
2. Didactiser !
3. Le génie didactique
4. Faire de la pédagogie
1. La formation documentaire
dans l’enseignement
supérieur comme
problème
J.L. Charbonnier - 16 mai 2007 - Urfist de Paris
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1. La formation documentaire dans l’enseignement supérieur comme problème
I. Des pré-requis ?
Qu’entend-on par là ? S’agit-il de savoirs et/ou
compétences formels connus/maîtrisés de tous
et exigibles en début de formation ? Ou bien
veut-on dire que, dans une formation, les
apprentissages doivent s’articuler les uns aux
autres, de manière méthodique et enchaînée ?
Dans le premier cas, que faire de
l’hétérogénéité prévisible des étudiants et de
leurs acquis ? Il faut se défier d’une vision
cumulative des apprentissages, et se poser
plutôt la question de ce que sont ces acquis et
des obstacles qu’ils peuvent constituer dans la
formation proposée.
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1. La formation documentaire dans l’enseignement supérieur comme problème
II. Des « allants-de-soi » ?
Ce que chacun devrait savoir ou faire
sans l’avoir appris, parce que cela s’imposerait per
ipse. Forme d'ethnocentrisme pratique qui naturalise
les pratiques culturelles et sociales, ce qui dispense
l’appareil de formation de les enseigner. Les
« curriculums cachés » mis en lumière par la
sociologie de l’éducation et certains didacticiens en
sont largement pourvus.
Ils s’accompagnent d’un déni relatif à
l’existence de ces savoirs comme transmissibles.
Cette conception fait bon ménage avec l’opinion fort
répandue que l’enseignement secondaire n’envoie pas
des bacheliers capables de suivre utilement les
formations supérieures.
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1. La formation documentaire dans l’enseignement supérieur comme problème
III. Des savoirs intuitifs ?
Variante plus élaborée des « allants de soi », nul besoin
d’en assurer une formation systématique dans la mesure
où chacun pourrait, par son expérience personnelle, par
une présence à soi, acquérir ce qu’il ne sait pas encore,
pourvu que les occasions de faire l’expérience de ces
pratiques soient offertes à l’étudiant, à travers la
proposition d’exposés ou d’autres travaux plus personnels
que les travaux académiques.
Encore faudrait-il s'interroger sur la nature de ces
« savoirs » dans la mesure où ils ne semblent pas pouvoir
s’exprimer de manière articulée et cohérente, c’est-à-
dire transmissible et communicable par les moyens d’une
connaissance scientifiquement fondée.
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1. La formation documentaire dans l’enseignement supérieur comme problème
IV. Montrer ou faire comprendre ?
Si la formation à l’information reste du
domaine de l’indicible, du moins peut-on espérer
« montrer » ce qu’il faudrait faire pour acquérir ces
pratiques si recherchées, si indispensables dans un
univers d’information toujours en mouvement.
En vérité, il s’agit de la première, et la
plus répandue, forme de « formation » à l’information
qui ait vu le jour dans l’enseignement supérieur
français.
Il s’agit principalement, en un nombre
d’heures très limité, de faire des démonstrations de
différents dispositifs ou instruments d’information et de
documentation. Comment passer de l’instrumental à
la compréhension ?
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1. La formation documentaire dans l’enseignement supérieur comme problème
V. Pratique experte ou éclairée : Connaître pour
comprendre
La question de l’expertise recherchée
peut nous égarer si nous ne prenons pas la peine de
l’expliciter. S’agit-il de faire des étudiants experts en
système d’information-documentation ou bien de leur
permettre de devenir de bons experts dans la
connaissance des instruments et des processus
d’information-documentation dans leur domaine
d’étude et de pratique ?
Poser la question de l’expertise conduit
à s’interroger sur ce qui constitue l’expertise :
l’habileté sensori-motrice ou la compréhension des
fondements et référents intellectuels qui sont à l’œuvre
dans les processus d’information ?
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1. La formation documentaire dans l’enseignement supérieur comme problème
VI. La dimension épistémologique
Cette formation ne peut trouver sens
qu’adossée à la formation scientifique ou professionnelle
suivie par l’étudiant. En ce sens, elle contribue à sa
formation épistémologique dont beaucoup se plaignent
qu’elle soit délaissée dans l’ambiance assez positiviste qui
caractérise l’université française.
En effet, appréhender comment
fonctionnent les processus de recherche et de
traitement de l’information scientifique dans sa
propre discipline doit bien entretenir quelque rapport avec
les paradigmes essentiels de celle-ci et introduire à une
posture critique de distanciation propice à l’ »affiliation »
dont A. Coulon a montré qu’elle jouait un rôle important
dans la réussite des parcours universitaires des étudiants.
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2. Didactiser
!
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2. Didactiser !
I. Oser la didactique ?
I. Pour sortir du syncrétisme propre à la posture qui consiste à vouloir « former à l’information », sans identifier d’autres contenus qu’instrumentaux.
II. Pour rendre visible/lisible les contenus d’enseignement et leur articulation : pour les étudiants comme pour la communauté des enseignants.
III. Pour penser la didactisation des savoirs et compétences visés pour les étudiants
IV. Pour choisir, de manière réfléchie et dans une intention stratégique, les contenus qu’ils convient d’enseigner et la manière dont ils peuvent être appris.
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2. Didactiser !
II. Comment faire apprendre ?
a) Les étudiants sont-ils « terres vierges », « tabulae rasae » ou récipients vides ? : leurs représentations ne sont pas à prendre à la légère, fussent-elles entachées d’erreurs. De toutes façons, l’autorité magistrale ne suffira jamais à les « extirper ».
b) Déconstruire (non pas détruire) pour construire. On ne construit que sur du donné. Ce « constructivisme » est à prendre comme une démarche partant de l’activité propre de l’étudiant, et de ses erreurs, et non de « la science » dans sa majesté pour le conduire vers des représentations plus valides.
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2. Didactiser !
III. Penser des situations didactiques
I. Ce ne sont pas seulement des séquences de contenus mais des dispositifs stratégiques pour faire changer les étudiants. Pour cela :
II. Identifier les représentations des étudiants en relation avec ces contenus, analyser quels obstacles elles peuvent mettre à l’entreprise didactique ;
III. Travailler ces représentations dans des situations didactiques propres à les faire affleurer en révélant les impasses dans lesquelles elles conduisent les étudiants.
IV. Organiser le dispositif didactique afin que l’étudiant fasse l’épreuve des limites, épreuve sans laquelle il n’a pas de raison de changer en acceptant de rentrer dans l’apprentissage.
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2. Didactiser !
IV. Identifier les savoirs pertinents à transmettre, les objets à apprendre :
a) Se défier de l’illusion que les acquis antérieurs (quand il y en a) puissent s’actualiser spontanément ;
b) Construction partagée avec les enseignants de la filière et des groupes en formation pour identifier les objets les plus pertinents et les intéresser (M. Callon) au projet de formation documentaire.
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3. Le génie didactique :
concevoir des dispositifs
d’enseignement-
apprentissage opératifs
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3. Le génie didactique : concevoir des dispositifs d’enseignement-apprentissage opératifs
I. Savoirs à transmettre, savoirs transmis, savoirs appris
I. Cette catégorisation est fondamentale dans la mesure où elle permet de faire la distinction entre ce que disent les curriculums, ce qu’élaborent les enseignants et ce qu’en font les étudiants.
II. Elle permet aussi de prendre en compte la différenciation des activités entre les enseignants et les étudiants. Les uns et les autres ne font pas la même chose même s’il travaillent sur un objet qui peut paraître identique.
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3. Le génie didactique : concevoir des dispositifs d’enseignement-apprentissage opératifs
II. La transformation didactique
I. Même à l’université, l’activité d’enseignement suppose une activité de transformation didactique qui « aménage » les connaissances à acquérir pour les rendre accessibles aux étudiants.
II. Cette transformation suppose une activité propre de l’étudiant, plus ou moins consciemment organisée par le dispositif pédagogique. Elle est souvent masquée par les formes canoniques (CM, TD) mais, cependant, est réelle, au moins dans les cas où « ça marche ».
III. C’est pourquoi il importe que cette transformation didactique s’explicite dans un projet didactique.
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3. Le génie didactique : concevoir des dispositifs d’enseignement-apprentissage opératifs
III. S’appuyer sur les obstacles didactiques
I. Les obstacles didactiques sont, schématiquement, de deux ordres :
Ceux qui sont liés à des difficultés intrinsèques liées à la complexité du savoir considéré (par exemple, la notion de moteur de recherche) et ceux qui sont liés aux représentations « spontanées » des étudiants (sans quitter l’exemple des moteurs de recherche, on peut se rendre compte combien les étudiants sont largement redevables de ce que les médias en disent).
II. Ils ne doivent pas être évités ni contournés mais incorporés dans la situation didactique afin que les étudiants s’y confrontent, de telle manière qu’ils puissent se décentrer de leur propre système de représentation (pour commencer la déconstruction).
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3. Le génie didactique : concevoir des dispositifs d’enseignement-apprentissage opératifs
IV. Permettre et provoquer la conceptualisation
I. Les gammes d’exercices sont rarement formatrices dans la mesure où elles ne mobilisent pas nécessairement l’étudiant par les enjeux qu’elles proposent.
II. La conceptualisation est un processus qui doit être vécu par l’étudiant et non forcé par l’enseignant. Personne ne peut le faire à la place du premier. Par contre, le second est dans l’ardente obligation de tout faire pour qu’elle ait lieu, pendant ou au terme du parcours.
III. Pour la provoquer, rien ne vaut les situations où le conflit cognitif puisse se manifester, dans un travail de groupe, et où les errances deviennent des étapes du parcours d’accès à la connaissance, ce qui est aussi, sur le plan épistémologique, la réalité du travail de construction scientifique.
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3. Le génie didactique : concevoir des dispositifs d’enseignement-apprentissage opératifs
V. Évaluer-s’évaluer
V. Le couple ne peut être dissocié car les deux pratiques doivent s’articuler.
VI. S’évaluer : être en mesure de rapporter sa propre activité à celle que l’on se représente ; mais aussi verbaliser ses essais et erreurs, ses « trouvailles », comprendre pourquoi la question s’est résolue ou pourquoi non.
VII. Évaluer : se mettre sous le regard de la norme car on assume sa responsabilité dans un parcours socialisé, car les apprentissages sont ordonnés à des exigences socialement construites, y compris lorsqu’il s’agit de culture personnelle.
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4. Faire de la pédagogie
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4. Faire de la pédagogie
I. Le « triangle didactique »
Largement diffusée par J. Houssaye, cette schématisation des interactions pédagogiques est devenue un classique, pourquoi s’en priver ?
Le savoir
L’enseignantL’apprenant
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4. Faire de la pédagogie
II. Contextualiser / décontextualiser
On retient souvent qu’il faut rechercher la « décontextualisation » pour permettre l’apprentissage par transfert d’acquis. On oublie trop souvent que pour cela il faut d’abord veiller à ce qu’il y ait « contextualisation » !
L’extraction des singularités d’un contexte donné ne peut se poser hors d’un processus qui se développe dans une série de conditions singulières mais dont l’articulation a été pensée pour produire un effet de formation.
La volonté de faire accéder à des « savoirs transversaux », c’est-à-dire réinvestissables dans des contextes très variés est louable, mais à quelles conditions peut-elle s’appliquer ?
II. Que la variété des situations didactiques mises en œuvre soit importante et effective ;
III. Que les étudiants aient été systématiquement sollicités pour en dégager, par conceptualisation, les traits génériques ;
IV. Que le transfert soit effectivement possible.
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4. Faire de la pédagogie
III. Rapports avec les curriculums et programmes d’étude de la filière suivie
L’orientation d’un étudiant vers une filière donnée est censée répondre à un choix fondé sur la qualité propre de la filière et l’intérêt qu’elle suscite. Elle doit constituer l’horizon, certes dépassable, de la formation documentaire mais ce ne peut être qu’en elle, que l’étudiant trouvera le sens des savoirs et pratiques qu’on veut lui faire acquérir.
C’est là que les savoirs documentaires peuvent devenir féconds. En instrumentant (intellectuellement et pratiquement) les étudiants dans leur travail d’intellectuels en formation et en exploitant la substance de la matière d’étude, la formation documentaire les fait accéder également à l’expérience d’une posture de recherche, associée à une réflexion sur la validité de telle investigation, sur l'établissement de tel fait, sur l’interrogation des sources de la construction intellectuelle, autrement dit, à une posture épistémologique.
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4. Faire de la pédagogie
IV. Permettre que le sens de l’activité de formation documentaire émerge (valeur de son usage et affiliation) du point de vue de l’étudiant.
Il ne suffit pas que les enseignants soient persuadés de la pertinence de cette formation. Il importe donc que la mobilisation des étudiants fasse partie des fondements pédagogiques des dispositifs de formation proposés. Ateliers, travaux de groupes, coopération, écriture et production collective incluant un engagement personnel et une part de responsabilité, pas seulement morale mais aussi scientifique sont des ressorts pédagogiques essentiels qui n’excluent pas, quand le besoin peut se manifester, des formes plus académiques de travail, par apports d’information, par exemple.
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Fin