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La bataille de la Marne Du 5 au 10 septembre 1914 a lieu la première grande bataille de la Première Guerre Mondiale, la bataille de la Marne. Cette bataille est souvent surnommée « le miracle de la Marne » car de prime abord, la victoire française semblait impossible. La guerre qui a débuté en août 1914 mobilise des armées dune taille encore jamais vue. Les différents états- majors misent sur une guerre rapide, facilitée par les chemins de fer, l automobile, les armes nouvelles comme la mitrailleuse. Chacun sait que ladversaire est bien équipé, mais les états-majors allemand, russe, français et britannique préparent la possibilité dune guerre depuis si longtemps quils pensent avoir trouvé la parade à toutes les situations stratégiques et tactiques. Leurs plans sont minutieux et intellectuellement construits à tel point quils se sentent invincibles. Les Allemands pensent lemporter grâce à leur rapidité de mouvement à travers la Belgique alors que les Français sont certains que les offensives répétées des Allemands seront la source de leur affaiblissement. Mais ces stratégies ont leurs limites : en France, loffensive de Joffre se heurte à des corps de réserve allemands qui nauraient pas dû se trouver face à des soldats français. La route de Paris semble ouverte aux Allemands. Mais dans leur précipitation, la bataille de la Marne sera un douloureux réveil. Le projet allemand : le plan Schlieffen Fin août - début septembre 1914, loffensive allemande se passe comme prévu selon le plan Schlieffen. Lobjectif pour Schlieffen est danéantir les Français sur le front Ouest pour ensuite mobiliser l armée allemande sur le front Est, face aux Russes. Schlieffen se refuse à proposer un plan offensif pour l Allemagne passant par la frontière commune entre la France et lAllemagne. En effet, depuis 1871 et le passage de l Alsace à lAllemagne, la France a construit une série de forteresses dans lesquelles sont un bon nombre de soldats à l été 1914. De plus, des combats sur ce front menaceraient directement les régions industrielles et minières de l Ouest de lAllemagne. Enfin, cest une région escarpée et rurale, donc peu propice à des ravitaillements pour l armée. Le projet est de violer la neutralité de la Belgique et de rejoindre la France par le Nord et les Ardennes. Une fois la Belgique passée, les Allemands traverseraient les plaines de Picardie et profiteraient de lindustrialisation massive dans le Nord de la France pour utiliser les industries et les réseaux ferroviaires. La route vers Paris étant dégagée, la capitale française serait vite prise et larmée française étant à lEst, prise à revers. Carte extraite de lAtlas de la Première Guerre Mondiale dYves Buffetaut

La bataille de la Marne · PDF fileLes armées allemandes exercent toujours une forte pression mais leur poids n’est plus le même qu’au début du mois, car elles se trouvent à

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Page 1: La bataille de la Marne · PDF fileLes armées allemandes exercent toujours une forte pression mais leur poids n’est plus le même qu’au début du mois, car elles se trouvent à

La bataille de la Marne

Du 5 au 10 septembre 1914 a lieu la première grande bataille de la Première Guerre Mondiale, la bataille de

la Marne. Cette bataille est souvent surnommée « le miracle de la Marne » car de prime abord, la victoire française

semblait impossible.

La guerre qui a débuté en août 1914 mobilise des armées d’une taille encore jamais vue. Les différents états-

majors misent sur une guerre rapide, facilitée par les chemins de fer, l’automobile, les armes nouvelles comme la

mitrailleuse. Chacun sait que l’adversaire est bien équipé, mais les états-majors allemand, russe, français et

britannique préparent la possibilité d’une guerre depuis si longtemps qu’ils pensent avoir trouvé la parade à toutes

les situations stratégiques et tactiques. Leurs plans sont minutieux et intellectuellement construits à tel point qu’ils

se sentent invincibles. Les Allemands pensent l’emporter grâce à leur rapidité de mouvement à travers la Belgique

alors que les Français sont certains que les offensives répétées des Allemands seront la source de leur

affaiblissement. Mais ces stratégies ont leurs limites : en France, l’offensive de Joffre se heurte à des corps de

réserve allemands qui n’auraient pas dû se trouver face à des soldats français. La route de Paris semble ouverte aux

Allemands. Mais dans leur précipitation, la bataille de la Marne sera un douloureux réveil.

Le projet allemand : le plan Schlieffen

Fin août - début septembre 1914, l’offensive allemande se passe comme prévu selon le plan Schlieffen.

L’objectif pour Schlieffen est d’anéantir les Français sur le front Ouest pour ensuite mobiliser l’armée allemande

sur le front Est, face aux Russes. Schlieffen se refuse à proposer un plan offensif pour l’Allemagne passant par la

frontière commune entre la France et l’Allemagne. En effet, depuis 1871 et le passage de l’Alsace à l’Allemagne, la

France a construit une série de forteresses dans lesquelles sont un bon nombre de soldats à l’été 1914. De plus,

des combats sur ce front menaceraient directement les régions industrielles et minières de l’Ouest de

l’Allemagne. Enfin, c’est une région escarpée et rurale, donc peu propice à des ravitaillements pour l’armée.

Le projet est de violer la neutralité de la Belgique et de rejoindre la France par le Nord et les Ardennes.

Une fois la Belgique passée, les Allemands traverseraient les plaines de Picardie et profiteraient de

l’industrialisation massive dans le Nord de la France pour utiliser les industries et les réseaux ferroviaires. La route

vers Paris étant dégagée, la capitale française serait vite prise et l’armée française étant à l’Est, prise à revers.

Carte extraite de l’Atlas de

la Première Guerre

Mondiale d’Yves Buffetaut

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Les Belges puis les Français perdent rapidement du terrain. Rien que le 22 août, l’armée française compte

30 000 morts. Les Allemands pensent avoir le champ libre pour exécuter la manœuvre Schlieffen. Les Français,

derrière Joffre, tente de ralentir la progression de l’ennemi, comme à la place forte de Maubeuge. Les Alliés se

replient progressivement et Joffre leur ordonne de se rétablir au sud de la Marne pour y affronter l’ennemi dans une

bataille qui sera décisive.

Les armées allemandes s’approchent rapidement de Paris. Le gouvernement par pour Bordeaux. Le

3 septembre, des aviateurs français voient la 1ère armée allemande délaisser Paris pour marcher vers le Sud-Est.

Gallieni, chargé de la défense de la ville, ordonne de frapper le flanc de la 1ère armée allemande, ce qui a pour effet

immédiat de la stopper dans son avancée. Du coup, Joffre ordonne la fin de la retraite et de contre-attaquer

immédiatement. C’est le début de la bataille de la Marne.

Cette contre-offensive française a lieu le 6 septembre 1914. Elle est audacieuse et difficile à mettre en place. Il n’est

pas aisé pour une armée en retraite (1 million d’hommes partis se battre sur les frontières franco-belges et franco-

allemandes se replient) de faire volte-face. Toutes les armées alliées jouent un rôle : les différentes divisions de

l’armée française et le corps expéditionnaire britannique. Désormais, sur un front de 250 km, 2 millions d’hommes

se font face.

Rappel : forces et faiblesses de l’armée française

La France aligne dans son armée 3 700 000 hommes. 800 000

soldats de métiers, entraînés, et les réservistes et les territoriaux

davantage destinés à des opérations secondaires. Le moral des troupes

est excellent, le canon de 75 est un canon performant et le fusil Lebel,

malgré ses défauts, a une cadence de tir de 12 coups à la minute.

Cependant, l’équipement des soldats français est obsolète. Le sac

est trop lourd et le pantalon rouge garance est une cible parfaite dans les

champs. L’infériorité dans l’armement est aussi frappante : l’armée

française ne dispose que de 6 mitrailleuses par régiment contre 12 chez

les Allemands. Les munitions d’artillerie manquent au Français et leur

aviation est en-deçà de l’aviation allemande, en nombre et en qualité

(136 appareils français contre 250 allemands).

« Que des hommes ayant reculé pendant dix jours […]

puissent reprendre le fusil et attaquer au son du clairon, il

n’en a jamais été question dans nos écoles de guerre. » Général Von Kluck, à

propos du soldat

français de la Marne.

« On se fera tuer plutôt que reculer. » Général Joffre, à

propos de la contre-

offensive française.

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Les armées allemandes exercent toujours une forte pression mais leur poids n’est plus le même qu’au début

du mois, car elles se trouvent à présent loin de leur ligne de départ. Le commandement allemand perd

progressivement pied. La parfaite mécanique du plan Schlieffen, pensé une petite dizaine d’années auparavant et

reprise par le général Von Moltke, s’enraye. Il n’y a pas de solution de rechange. La 2e armée allemande craint d’être

prise en étau par les armées françaises et britanniques : le général Von Bülow ordonne alors le retrait de ses troupes

vers le Nord-Est. C’est la fin de la progression allemande et le début d’un recul progressif allemand.

Le front allemand se disloque petit à petit, ne formant plus un front uni. Les Français et les Britanniques

s’engouffrent dans cette brèche, mettant à mal les tactiques de l’état-major allemand. Dès lors, la défaite allemande

est consommée. Dès le 10 septembre, l’armée allemande entame une retraite générale et se replie sur la rive droite

de l’Aisne. La bataille de la Marne a brisé l’élan de l’armée allemande et a sauvé la France du désastre. Pour qu’elle

se transforme en déroute, il faudrait que la poursuite de la contre-attaque des Alliés soit menée avec vigueur et

rapidité. Mais les troupes ont souffert et cette victoire de la Marne a été très couteuse en hommes. Le repli

allemand s’effectue donc en ordre.

Ainsi, dès le 12 septembre, commence la bataille de l’Aisne et rapidement, la guerre des tranchées, qui sera

la caractéristique du front occidental pendant les quatre années de la guerre. Une guerre de tranchées qu’aucun

état-major, malgré toutes les tactiques envisagées, n’avait prévue.

L’épisode des taxis de la Marne

En faisant volte-face et en lançant la contre-attaque de l’armée française, Joffre a besoin de toujours plus

d’hommes sur le front de la Marne. C’est alors que le général Gallieni, en charge de la protection de Paris, décide

de réquisitionner 630 véhicules pour acheminer les soldats au front. Ce sont « les taxis de la Marne ». En effet,

les trains ne peuvent suffire pour transporter armes et hommes. Partis de l’esplanade des Invalides, ces taxis

acheminent à une vitesse moyenne de 25 km/h entre 3 à 4 000 soldats, ainsi emmenés en renfort sur le front de

l’Ourcq.

Cet épisode a fortement marqué la mémoire nationale. Même si l’essentiel des renforts a été acheminé

par le train et que l’envoi de ces taxis n’était pas gratuit (l’armée a payé 70 012 francs de course), la presse relaye

largement cet évènement qui participe au sursaut national : on met largement en avant la détermination,

l’énergie, le « génie français » de l’improvisation, l’unité nationale. Ces taxis sont associés au courage des soldats

et à la mobilisation de l’arrière, qui se tient prêt et sait se mobiliser. La légende de ces taxis est ainsi entretenue

pendant tout le conflit… et même après !

L’envoi des troupes

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La bataille de la Marne en cartes (extraites de l’Atlas de la Première Guerre Mondiale d’Yves Buffetaut)

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