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58 La planification des programmes d’alphabétisation des adultes centrés sur les élèves Susan E. Malone Robert F. Arnove UNESCO : Institut international de planification de l’éducation

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La planification des programmesd’alphabétisation des adultescentrés sur les élèves

Susan E. MaloneRobert F. Arnove

UNESCO : Institut international deplanification de l’éducation

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Principes de la planification de l’éducation – 58

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Dans cette collection* : 1. Qu’est-ce que la planification de l’éducation ? P.H. Coombs 2. Les plans de développement de l’éducation et la planification économique et sociale, R. Poignant 3. Planification de l’éducation et développement des ressources humaines, F. Harbison 4. L’administrateur de l’éducation face à la planification, C.E. Beeby 5. Le contexte social de la planification de l’éducation, C.A. Anderson 6. La planification de l’enseignement : évaluation des coûts, J. Vaizey, J.D. Chesswas 7. Les problèmes de l’enseignement en milieu rural, V.L. Griffiths 8. Le rôle du conseiller en planification de l’enseignement, A. Curle 9. Les aspects démographiques de la planification de l’enseignement, Ta Ngoc Châu10. Coûts et dépenses en éducation, J. Hallak11. L’identité professionnelle du planificateur de l’éducation, A. Curle12. Planification de l’éducation : les conditions de réussite, G.C. Ruscoe13. L’analyse coût-bénéfice dans la planification de l’éducation, M. Woodhall14. Planification de l’éducation et chômage des jeunes, A. Callaway16. Planification de l’éducation pour une société pluraliste, Chai Hon-chan17. La planification des programmes d’enseignement primaire dans les pays en voie de

développement, H.W.R. Hawes18. Planification de l’aide à l’éducation pour la deuxième décennie du développement, H.M.

Phillips19. Les études à l’étranger et le développement de l’enseignement, W.D. Carter20. Pour une conception réaliste de la planification de l’éducation, K.R. McKinnon21. La planification de l’éducation en relation avec le développement rural, G.M. Coverdale22. La planification de l’éducation : options et décisions, J.D. Montgomery23. La planification du programme scolaire, A. Lewy24. Les facteurs de coûts dans la planification des systèmes de technologies éducatives, D.T. Jamison25. Le planificateur et l’éducation permanente, P. Furter26. L’éducation et l’emploi : une étude critique, M. Carnoy27. Planification de l’offre et de la demande d’enseignants, P. Williams28. Planification de l’éducation préscolaire dans les pays en développement, A. Heron29. Moyens de communication de masse et éducation dans les pays à faible revenu : répercussions

sur la planification, E.G. McAnany, J.K. Mayo30. La planification de l’éducation non formelle, D.R. Evans31. Education, formation et secteur traditionnel, J. Hallak et F. Caillods32. Enseignement supérieur et emploi : l’expérience de l’IIPE dans cinq pays en développement,

G. Psacharopoulos et B.C. Sanyal33. La planification de l’éducation comme processus social, T. Malan34. Enseignement supérieur et stratification sociale : une comparaison internationale, T. Husén35. Un cadre conceptuel pour le développement de l’éducation permanente en URSS, A. Vladislavlev36. Education et austérité : quelles options pour le planificateur ? K.M. Lewin37. La planification de l’éducation en Asie, R. Roy-Singh38. Les projets d’éducation : préparation, financement et gestion, A. Magnen39. Accroître l’efficacité des enseignants, L. Anderson40. L’élaboration des programmes scolaires à l’échelon central et à l’échelon des écoles, A. Lewy41. Planification des ressources humaines : méthodes, expériences, pratiques, O. Bertrand42. Redéfinition de l’éducation de base en Amérique latine : les enseignements de

l’Ecole Nouvelle colombienne, E. Schiefelbein43. La gestion des systèmes d’enseignement à distance, G. Rumble44. Stratégies éducatives pour les petits Etats insulaires, D. Atchoarena45. Evaluation de la recherche en éducation fondée sur l’expérimentation et sur les enquêtes, R.M. Wolf46. Droit et planification de l’éducation, I. Birch47. Utilisation de l’analyse sectorielle de l’éducation et des ressources humaines, F. Kemmerer48. Analyse du coût de l’insertion scolaire des populations marginalisées, Mun C. Tsang49. Un système d’information pour la gestion fondé sur l’efficience, Walter W. McMahon50. Examens nationaux : conception, procédures et diffusion des résultats, John P. Keeves51. Le processus de planification et de formulation des politiques d’éducation : théorie et pratiques,

W.D. Haddad, assisté par T. Demsky52. A la recherche d’un enseignement adapté : l’orientation vers le travail dans l’éducation, W. Hoppers53. Planifier pour l’innovation en matière d’éducation, Dan E. Inbar54. Analyse fonctionnelle de l’organisation des ministères d’éducation, R. Sack et M. Saïdi55. Réduire les redoublements : problèmes et stratégies, T. Eisemon56. Faire davantage participer les filles et les femmes à l’éducation, N. P. Stromquist57. Installations et bâtiments éducatifs : ce que les planificateurs doivent savoir, J. Beynon

* Série publiée également en anglais. Autres titres à paraître.

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La planification des programmesd’alphabétisation des adultes centréssur les élèves

Susan E. MaloneRobert F. Arnove

Paris 1998UNESCO : Institut international de planification de l’éducation

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L’Agence suédoise d’aide au développement international (Asdi) afourni une aide financière pour la publication de cette brochure.

Publié en 1998 par l’Organisation des Nations Uniespour l’éducation, la science et la culture7, place de Fontenoy, 75700 ParisImprimé en France par Stedi, 75018 Paris

Maquette de couverture : Bruno PfäffliISBN 92-803-2168-4

© UNESCO 1998

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Principes de la planification de l’éducation

Les brochures de cette collection sont destinées principalement à deuxcatégories de lecteurs : ceux qui occupent déjà des fonctions dansl’administration et la planification de l’éducation, dans les pays en dé-veloppement comme dans les pays industrialisés ; et d’autres, moinsspécialisés – hauts fonctionnaires et décideurs politiques, par exem-ple – qui cherchent à connaître de façon plus générale le mécanismede la planification de l’éducation et les liens qui la rattachent au déve-loppement national dans son ensemble. Ces brochures sont, de ce fait,destinées soit à l’étude individuelle, soit à des cours de formation.

Depuis le lancement de cette collection en 1967, les pratiques etles concepts de la planification de l’éducation ont subi d’importantschangements. Plusieurs des hypothèses qui étaient sous-jacentes auxtentatives antérieures de rationaliser le processus du développementde l’éducation ont été critiquées ou abandonnées. Toutefois, si la plani-fication centralisée, rigide et obligatoire, s’est manifestement révéléeinadéquate, toutes les formes de planification n’ont pas été abandon-nées. La nécessité de rassembler des données, d’évaluer l’efficacitédes programmes en vigueur, d’entreprendre des études sectorielles etthématiques, d’explorer l’avenir et de favoriser un large débat sur cesbases s’avère au contraire plus vive que jamais pour orienter la prisede décision et l’élaboration des politiques éducatives.

La planification de l’éducation a pris une envergure nouvelle. Outreles formes institutionnelles de l’éducation, elle porte à présent sur tou-tes les autres prestations éducatives importantes, dispensées hors del’école. L’intérêt consacré à l’expansion et au développement des sys-tèmes éducatifs est complété, voire parfois remplacé, par le soucicroissant d’améliorer la qualité du processus éducatif dans son ensem-

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Principes de la planification de l’éducation

ble et d’évaluer les résultats obtenus. Enfin, planificateurs etadministrateurs sont de plus en plus conscients de l’importance desstratégies de mise en œuvre et du rôle joué à cet égard par les diversmécanismes de régulation : choix des méthodes de financement, d’exa-men et de délivrance des certificats et diplômes, ou d’autres structuresde régulation et d’incitation. La démarche des planificateurs répond àune double préoccupation : mieux comprendre la valeur et le rôle del’éducation par l’observation empirique des dimensions particulièresqui sont les siennes, et contribuer à définir des stratégies propres àamener le changement.

Ces brochures ont pour objet de refléter l’évolution et les chan-gements des politiques éducatives et de mesurer leurs effets sur laplanification de l’éducation ; de mettre en lumière les questions quise posent actuellement en la matière et de les analyser dans leurcontexte historique et social ; et de diffuser des méthodes de planifi-cation pouvant s’appliquer aussi bien aux pays en développementqu’aux pays industrialisés.

Afin d’aider l’Institut à bien identifier les préoccupations actuel-les dans les domaines de la planification et de l’élaboration despolitiques de l’éducation dans diverses parties du monde, un Comitéde rédaction a été mis en place. Il comprend deux rédacteurs enchef et des rédacteurs associés, venus de différentes régions, touséminents spécialistes dans leurs domaines respectifs. Lors de la pre-mière réunion de ce nouveau Comité de rédaction en janvier 1990,ses membres ont défini les sujets les plus importants à traiter dans lesnuméros ultérieurs sous les rubriques suivantes :

1. L’éducation et le développement.2. L’équité.3. La qualité de l’éducation.4. Structure, administration et gestion de l’éducation.5. Les programmes d’enseignement.6. Coût et financement de l’éducation.7. Techniques et approches de la planification.8. Systèmes d’information, suivi et évaluation.

Chaque rubrique est confiée à un ou deux rédacteurs.

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Principes de la planification de l’éducation

La collection correspond à un plan d’ensemble soigneusementétabli, mais aucune tentative n’a été faite pour éliminer les divergences,voire les contradictions, entre les points de vue exposés par les auteurs.L’Institut, pour sa part, ne souhaite imposer aucune doctrine offi-cielle. S’il reste entendu que les auteurs sont responsables des opinionsqu’ils expriment – et qui ne sont pas nécessairement partagées parl’UNESCO et l’IIPE – elles n’en sont pas moins dignes de fairel’objet d’un vaste débat d’idées. Cette collection s’est d’ailleurs fixéecomme objectif de refléter la diversité des expériences et des opi-nions en donnant à des auteurs venus d’horizons et de disciplines trèsvariés la possibilité d’exprimer leurs idées sur l’évolution des aspectsthéoriques et pratiques de la planification de l’éducation.

Cet ouvrage est consacré à la planification et à l’exécution desprogrammes d’alphabétisation. S’adressant aux praticiens de l’édu-cation qui travaillent aux niveaux central, régional ou local, il décritprécisément comment conceptualiser, concevoir, mettre en place, pi-loter et évaluer les programmes d’alphabétisation. Il insiste sur le faitque la planification aux niveaux national, régional et local nécessiteun processus qui intègre des approches allant de la « base au som-met » et du « sommet à la base ». Puis, constatant que l’un des défisdes programmes d’alphabétisation est de mobiliser les élèves, il seconcentre sur les relations entre les individus et propose une mé-thode de travail fondée sur le dialogue. Ainsi, une des principaleshypothèses de cet ouvrage est qu’un programme qui propose un en-seignement pertinent et centré sur l’élève est plus à même qu’unautre de motiver l’individu et d’avoir des conséquences positives ausein de la communauté.

Cette brochure est pratique et orientée vers l’action. Fondée surune expérience solide de ce qui fonctionne sur le terrain, sa lectureserait très utile pour tous ceux qui sont concernés par l’élaborationd’un programme d’alphabétisation. Susan E. Malone, qui a co-écritcet ouvrage avec Robert F. Arnove, est actuellement Professeurinvité à l’Université de Mahidol à Bangkok, Thaïlande, tout enétant affectée à l’Université du Texas à Arlington, Etats-Unis.Robert F. Arnove, codirecteur du National Literacy Programmes :Historical and Comparative Perspectives, est actuellement Pro-fesseur en éducation internationale comparée à l’Université d’Indiana

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Principes de la planification de l’éducation

à Bloomington, Etats-Unis. L’IIPE exprime une vive reconnaissanceaux auteurs pour leur contribution de grande valeur à notre collec-tion.

L’Institut voudrait aussi remercier Richard Sack, Secrétaire exé-cutif de l’Association pour le développement de l’éducation en Afriqueet rédacteur spécial pour cette publication, pour le rôle très actif qu’ila joué dans sa préparation.

Jacques Hallak Sous-Directeur général, UNESCO

Directeur, IIPE

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Composition du Comité de rédaction

Président : Jacques HallakSous-Directeur général de l’UNESCODirecteur, IIPE

Rédacteurs en chef : Françoise CaillodsIIPE

T. Neville PostlethwaiteUniversité de HambourgAllemagne

Rédacteurs associés :Jean-Claude EicherUniversité de BourgogneFrance

Claudio de Moura CastroBanque interaméricaine de développementEtats-Unis d’Amérique

Kenneth N. RossIIPEFrance

Richard SackSecrétaire exécutif (ADEA)France

Sibry TapsobaCentre de recherches pour ledéveloppement international (CRDI)Sénégal

Rosa Maria TorresFondation KelloggArgentine

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Les auteurs souhaitent exprimer leur gratitude à H. S. Bhola pour sescommentaires constructifs sur le projet initial de cette monographie.

Remerciements

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Préface

Les programmes, les campagnes et les projets d’alphabétisation sonttrès complexes à mettre sur pied. La chaîne des événements, petits etgrands, qu’exige leur réalisation comporte de multiples dimensions etn’a rien de linéaire. Planifier ces événements, et plus encore leur chaînetout entière, est une tâche très particulière. A la différence de la scola-rité formelle, il n’existe pas de systèmes sous-jacents, de basesinfrastructurelles et organisationnelles. L’âge de la population cible desprogrammes d’alphabétisation a tendance à être hétérogène. Les mé-thodes pédagogiques sont diverses et étroitement adaptées au contexte.Les programmes et les campagnes d’alphabétisation ont souvent eude solides motivations politiques et idéologiques.

L’importance des initiatives d’alphabétisation pour un dévelop-pement durable est clairement reconnue. Cependant, la manière deles réussir fait l’objet de nombreuses recherches, de débats et d’ex-périmentations. Sur la base d’une expérience directe et d’exemplesconcernant une dizaine de pays d’Asie, d’Afrique, d’Amérique la-tine et d’Europe, cette brochure est axée sur la gestion desprogrammes d’alphabétisation. Elle arrive néanmoins à la conclusionque le facteur primordial de réussite de ces programmes est la qua-lité, la conviction et la compétence des personnes qui les animent. Lelivre examine également avec soin les promesses non tenues desprogrammes et des campagnes d’alphabétisation.

Lorsque l’on traite le sujet sous cet angle, la gestion englobe uncertain nombre de facteurs, dont les programmes d’études, les livreset autres matériels pédagogiques, la logistique, le rôle des élèves etdes communautés, l’évaluation, les ONG et l’Etat. Dans ce contexteoriginel complexe, l’ouvrage met essentiellement l’accent sur les poli-tiques et les programmes participatifs, fondés sur la communauté etadaptés aux adultes, qui répondent aux besoins quotidiens des indivi-dus et de leurs communautés.

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Préface

Cette monographie est destinée à constituer une ressource (ouun guide) utile pour ceux qui planifient et exécutent, à tous les ni-veaux de la « chaîne des événements », des programmes conduisantà l’acquisition de mécanismes élémentaires durables et habilitantspour les individus et pour les communautés.

Les auteurs de cette brochure possèdent une vaste expériencepratique et théorique de l’élaboration des programmes d’alphabétisa-tion. Susan Malone a participé à l’établissement de programmesd’alphabétisation en langue maternelle en Papouasie-Nouvelle-Guinée,en Thaïlande et en Australie septentrionale. Robert Arnove a étudiéles programmes d’alphabétisation au niveau local en Amérique la-tine, notamment au Nicaragua.

Richard SackRédacteur associé

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Table des matières

Préface 11

Introduction 15

I. Penser et planifier l’alphabétisation 18L’alphabétisation et son rôle dans le développement 18La planification et l’exécution en tant que processuscyclique 20La planification, l’exécution et la gestion en tant queprocessus participatif 21Résumé 23

II. La prise de décisions préliminaire 24Les décisions sur les principes directeurs du programme 24Les décisions sur les buts et les objectifs du programme 25Les décisions sur la dimension etl’étendue du programme 27Les décisions sur la/les langue(s) véhiculaire(s) 31Les décisions sur les types de cours d’alphabétisationqui seront organisés 32Résumé 34

III. Les stratégies d’exécution et d’entretiendes programmes 35Stratégie 1. La recherche préliminaire 38Stratégie 2. La promotion 41Stratégie 3. Le recrutement et la formationdu personnel d’alphabétisation 44Stratégie 4. La conception des programmes d’études 48Stratégie 5. La conception et la production dumatériel de lecture 53Stratégie 6. L’évaluation 62Résumé 69

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Table des matières

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IV. Les caractéristiques des programmesd’alphabétisation durables 71Caractéristique 1. L’utilisation judicieusedes ressources humaines, matérielles et financières 72Caractéristique 2. Les relations de coopérationentre les organismes qui soutiennent les programmes 76Caractéristique 3. Les infrastructures institutionnalisées 77Caractéristique 4. Les perspectives ouvertespour l’éducation permanente 79Résumé 82

Conclusion 83

Références 85

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Introduction

Cette brochure est consacrée à la planification de programmes d’al-phabétisation des adultes centrés sur les élèves, tels que favorisantun développement centré sur les populations. Elle est destinée à ceuxqui sont responsables de la planification, de l’exécution et de la ges-tion des programmes d’alphabétisation aux niveaux national,infranational et local. Les analyses qui suivent sont fondées sur troisprincipes. Premièrement, la planification, l’exécution et la gestion sontdes parties interdépendantes d’un processus unique, plutôt que desactivités séparées. La planification ne s’achève pas quand commencel’exécution, pas plus que celle-ci ne s’achève quand commence lagestion. Par nécessité, un ouvrage sur la planification de l’alphabéti-sation est donc également axé sur l’exécution et la gestion desprogrammes d’alphabétisation.

Deuxièmement, la planification aux niveaux national, infranationalet local est un processus intégré allant aussi bien « de la base ausommet » qu’en sens inverse. A tous les niveaux, les planificateursprennent en compte les buts, les objectifs et les activités contenusdans les plans établis à chacun des autres niveaux. Par exemple, leplan directeur d’un programme au niveau provincial devra être enharmonie avec la politique générale et les plans correspondants auniveau national et faciliter l’exécution des plans qui ont été (ou quiseront) élaborés par les communautés locales.

Troisièmement, la planification de l’alphabétisation exige uneaptitude à avoir une vision globale, à considérer les différentescomposantes du programme comme un ensemble intégré et àexaminer, au-delà du programme lui-même, la manière dont les élèvesadultes utiliseront ce qu’ils auront appris dans leur milieu social. Laconceptualisation d’un programme d’alphabétisation comme un« système » qui entre en interaction avec d’autres systèmes sociétaux(économique, socioculturel, politique, religieux) attire l’attention des

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Introduction

responsables de sa planification, de son exécution et de sa gestion surla manière dont l’initiative d’alphabétisation pourrait influer sur cessystèmes et être en retour influencée par ceux-ci. La planificationd’un programme d’alphabétisation axé sur l’emploi pour les femmesmigrantes est un exemple de « planification en termes de systèmes ».Dans ce cas, les planificateurs devront prendre en compte lesperspectives de gains salariaux offertes aux femmes dans ce secteur(le système économique), l’attitude de la communauté à l’égard desfemmes qui travaillent à l’extérieur (le système socioculturel) et lapolitique gouvernementale relative aux migrants en général (le systèmepolitique). « Penser en termes de systèmes » vient nous rappeler quel’alphabétisation est un acte politique, économique et socioculturelaussi bien qu’un processus d’apprentissage de la lecture, de l’écritureet du calcul.

La suite de cette brochure est divisée en cinq chapitres. Le chapitreI examine diverses manières de réfléchir sur l’alphabétisation et laplanification, chacune ayant des conséquences différentes pour le pro-gramme et pour ceux qui doivent en bénéficier. Le chapitre II présenteplusieurs questions préliminaires sur lesquelles il est nécessaire deprendre des décisions avant que ne commence la planification descomposantes spécifiques du programme. Le chapitre III examine sixstratégies d’exécution, qui sont les composantes essentielles de toutplan directeur d’un programme, quels que soient sa dimension ou lecontexte dans lequel il se déroule. Le chapitre IV présente une analysedes caractéristiques communes aux programmes d’alphabétisation« réussis » – ceux qui ont atteint leurs buts et qui se sont poursuivispendant plusieurs années. Le dernier chapitre conclut sur un résumédes points essentiels et sur leurs implications pour les planificateurs del’éducation.

Plusieurs termes reviennent fréquemment dans cette brochure.Intervenants et groupes d’intervenants sont utilisés par référenceà tous les individus et entités qui sont impliqués dans l’initiative d’al-phabétisation et concernés par elle – les planificateurs, les responsablesde la mise en œuvre, les gestionnaires, les donateurs, les soutiens dontelle dispose, et les élèves-adultes eux-mêmes. Infrastructures fait ré-férence aux contextes ou aux systèmes qui sont nécessaires à l’entretiendes différentes composantes du programme. Par exemple, une

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Introduction

infrastructure d’évaluation comportera les personnes, les procédures,les formulaires et les échéanciers qui seront mis en place pour s’assu-rer que le programme sera régulièrement évalué et que les résultatsdes évaluations feront partie intégrante de la planification en cours.ONG fait référence aux organisations non gouvernementales qui sou-tiennent les programmes d’alphabétisation, et cela, dans l’idéal, encoopération avec les agences gouvernementales. National,infranational et local font référence au champ d’application géogra-phique du programme d’alphabétisation. Un programme au niveaunational implique la nation toute entière, ou une partie importante decelle-ci, et est financé soit par le gouvernement, soit par une ou plu-sieurs ONG, soit enfin par le gouvernement et par des ONG travaillantensemble. Les programmes infranationaux sont ceux qui sont mis enœuvre dans un ou plusieurs Etats ou provinces, ou dans un ou plu-sieurs groupes linguistiques. Un programme au niveau local est ciblésur un seul segment de la population, tel qu’un village, ou sur ungroupe identifiable vivant au sein d’un milieu social plus vaste, parexemple un groupe de femmes établi dans une colonie de migrants.Dans les contextes multilingues, la référence au niveau local peut aussis’appliquer aux programmes destinés à un groupe linguistique res-treint qui occupe plus d’un seul village.

Pour utiliser l’information présentée dans ces chapitres, nous sug-gérons le processus suivant. En premier lieu, parcourez l’ensemble dela brochure pour avoir une idée générale des facteurs qui doivent êtreexaminés dans la planification d’un programme d’alphabétisation du-rable. Au fur et à mesure de votre lecture, notez par écrit les idées quivous semblent le plus en rapport avec votre situation. En second lieu,faites une esquisse générale de votre plan en y incluant l’informationdont vous disposez déjà. Ensuite, sur la base des idées présentées ici,de votre propre expérience de la planification (plus spécifiquement enalphabétisation) et de votre connaissance de votre propre situation,définissez le type d’information complémentaire dont vous aurez be-soin. Une fois que vous aurez collecté cette information nouvelle,votre équipe sera prête à entreprendre l’élaboration des composantesspécifiques de votre plan. Ne l’oubliez pas, vous êtes celui qui sait lemieux ce qui « fonctionne » ou non, dans votre situation : n’hésitezdonc pas à adapter les idées qui sont présentées ici pour qu’ellesfonctionnent au mieux pour vous.

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I. Penser et planifier l’alphabétisation

La façon dont les gens travaillent ensemble pour mener des activitésplanifiées est influencée par plusieurs facteurs. Le premier est lecontexte dans lequel se déroulent ces activités - les « règles » socia-les, écrites ou non, qui guident les interactions en général. C’est lecas, par exemple, des politiques gouvernementales qui guident lesinitiatives de développement et des normes sociétales qui influencentles interactions entre classes sociales différentes ou entre femmes ethommes. Les ressources qui sont disponibles pour exécuter les acti-vités planifiées sont également des facteurs qui affectent les initiativesde coopération pour l’alphabétisation. Un programme d’alphabétisa-tion des adultes disposant d’un financement adéquat sera conduitd’une manière très différente d’un programme qui serait médiocre-ment financé, et un programme destiné à un groupe linguistiquerestreint parlant une langue jusque-là non écrite sera planifié diffé-remment d’un programme qui s’adressera à un groupe possédantune longue tradition écrite et un matériel de lecture très diversifié.Un troisième facteur concerne la manière dont les gens conçoiventl’alphabétisation et la façon dont le programme devrait être conduit.La suite de ce bref chapitre met l’accent sur ce troisième facteur,car il affecte les rapports existant entre ceux qui sont impliqués dansla planification, l’exécution et la gestion des programmes d’alphabé-tisation et influe sur les résultats à court et à long termes du programme,aussi bien pour les élèves que pour la société dans laquelle il se déroule.

L’alphabétisation et son rôle dans le développement

La façon dont les gens pensent le développement et dont ils leplanifient a commencé à évoluer dans les années quatre-vingt.Jusque-là, la plupart des programmes de développement étaient fondéssur l’hypothèse que les sociétés progressent inévitablement, mais sur

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Penser et planifier l’alphabétisation

des périodes de temps variables, vers la modernité. Le but était doncd’aider les nations en développement (ou des segments de la populationà l’intérieur de ces nations) à établir les systèmes de valeurs, les pratiqueset les infrastructures qui pourraient accélérer leur progrès socio-économique et les rapprocher des plus « développées ».

Certaines définitions plus récentes sont axées sur le renforce-ment de la communauté plutôt que sur la modernisation. Ledéveloppement est conçu comme un processus dans lequel des indi-vidus qui vivent et travaillent ensemble améliorent leur capacité àdéfinir les problèmes, à prévoir des solutions et à impulser et contrô-ler un changement constructif. Dès lors, on se préoccupe moinsd’intensifier l’industrialisation et de développer l’économie, et da-vantage d’encourager et d’appuyer ceux qui entreprennent de contrôlerde manière responsable le monde qui les entoure.

Comme les conceptions du développement, les conceptions del’alphabétisation et de son rôle dans le processus de développementont évolué. Les approches « traditionnelles » considéraientl’alphabétisme comme une compétence technique impliquant le dé-codage et le codage de symboles écrits. On partait de l’hypothèseselon laquelle les gens devaient apprendre à associer correctementles signes figurant sur une page imprimée aux sons correspondantsavant de trouver un sens dans l’écrit et de l’utiliser. Une fois qu’ilsavaient maîtrisé ces compétences de base, les nouveaux alphabéti-sés devaient continuer à se perfectionner et à renforcer leur aptitudeet leur motivation à utiliser la lecture, l’écriture et le calcul à leursfins personnelles.

Certaines approches plus récentes de l’alphabétisation considè-rent que la lecture ne se réduit pas à coder et décoder des symbolesimprimés. L’alphabétisation est alors considérée comme une partieintégrante du développement, un outil qui aide les élèves à mieuxcomprendre les forces politiques et sociales qui influent sur leur vie.Cette prise de conscience politique et sociale n’est pas atteinte lors-que les élèves ont acquis les compétences de base en lecture, enécriture et en calcul. Aussi bien le contenu des leçons que la manièredont les rudiments de lecture, d’écriture et de calcul sont enseignésdoivent permettre aux élèves d’acquérir confiance et aptitudes pour

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participer activement à la prise de décisions sur les sujets qui les con-cernent. Une expérience tirée du programme d’alphabétisation de massede l’Inde confirme ce point :

L’alphabétisation en elle-même n’avait ni signification ni perti-nence pour ceux avec qui nous travaillions – ceux qui vivaient enmarge de la vie urbaine, déshumanisés par l’existence physiqueet matérielle propre aux contextes de pauvreté urbaine... Les fem-mes ne suivaient nos cours d’alphabétisation que le temps detrouver du travail, n’importe quel travail qui puisse les aider àaugmenter le maigre revenu mensuel de leur famille. Elles de-mandaient sans ménagement à nos enseignants de partir, ou des’en tenir à l’enseignement des enfants. Apprendre à signer deleur nom ou à écrire l’alphabet n’allait pas les aider à remplir desestomacs vides.

Nous avons donc cessé de nous préoccuper de l’alphabétisationcomme d’une fin en soi ou d’un élément central de notre travail.Nous avons commencé à travailler en coopération avec les gensafin d’essayer de comprendre leurs préoccupations et leur diffi-cultés immédiates et quotidiennes ; d’apprendre ensemble àanalyser les problèmes et à en comprendre les causes profon-des ; et enfin de prévoir comment nous pourrions, ensemble,trouver les réponses, et surtout agir. (Ramdas, 1987, pp. 55-56.)

La planification et l’exécution en tantque processus cyclique

Les conceptions de la formulation et de l’exécution des politiquesont également commencé à changer au cours des années quatre-vingt. Jusque-là, on concevait généralement ces deux tâches commedes activités séquentielles distinctes, l’exécution d’une politique com-mençant quand sa formulation s’achevait.

Les recherches qui ont commencé à la fin des années 1970 (cf.Pressman et Wildavsky, 1979) ont révélé au contraire que l’une etl’autre ne sont pas des processus distincts, mais qu’elles constituentun cycle qui se répète tout au long de la durée d’un programme : une

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Penser et planifier l’alphabétisation

politique est formulée, mise en œuvre, évaluée (de manière formelleou informelle), adaptée, de nouveau mise en œuvre, réévaluée, etainsi de suite. La reconceptualisation de ce processus fournit auxplanificateurs de l’alphabétisation un certain nombre d’éclaircisse-ments précieux. Elle fait de l’évaluation une partie intégrante duprocessus de prise de décisions et d’exécution. Elle souligne égale-ment l’importance de la collaboration entre ceux qui planifient, ceuxqui exécutent et ceux qui assurent la gestion à chaque niveau duprogramme, ainsi que de la flexibilité intégrée permettant d’adapterles plans directeurs des programmes en fonction des besoins.

La planification, l’exécution et la gestion en tant queprocessus participatif

Dans les approches de l’alphabétisation axées sur le développe-ment, chaque groupe d’intervenants – ceux qui fournissent auprogramme un appui financier ou d’un autre ordre, ceux qui assumentl’ensemble des responsabilités au niveau de l’exécution et de la gestion,et les futurs élèves eux-mêmes – est représenté dans la prise dedécisions. La prise de décisions en commun permet d’assurerl’adéquation des programmes aux personnes qui sont censées enbénéficier et développe le sens de la responsabilité mutuelle et del’appropriation des programmes, éléments essentiels de la durabilité.Une étude portant sur seize projets de développement en Afrique eten Asie a défini les avantages à long terme de cette approcheparticipative des projets de développement :

...les projets avaient davantage de chances de réussite quand leursobjectifs correspondaient aux priorités des plus pauvres, et quandles bénéficiaires prévus étaient régulièrement consultés et impliquésdans la prise de décisions à tous les stades du cycle du projet. Bienque certaines réussites de projets excluant toute participation aientpu être attestées, les avantages qui en résultaient avaient peu dechances de se maintenir à long terme sans une implication plus directedes bénéficiaires. (M. Robinson, 1992, p. 35.)

Plusieurs programmes d’alphabétisation à échelle limitée organi-sés en Afrique occidentale illustrent cette approche participative au

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niveau local. Au Cameroun, des comités constitués au sein de chaquecommunauté ont assumé la responsabilité de rechercher des appuispour leur programme d’alphabétisation des adultes, et de déterminerles besoins de la communauté auxquels celui-ci pourrait répondre (Ro-binson, 1990). En Côte d’Ivoire, un programme d’alphabétisationbilingue a débuté avec l’apprentissage du calcul plutôt que de la lec-ture et de l’écriture, ainsi que le besoin en avait été défini par lesélèves (Burmeister, 1987). Enfin, au Ghana, dans des projets d’al-phabétisation en langue maternelle, les membres de chaquecommunauté ont assumé la responsabilité de tous les aspects de leursprogrammes, depuis le choix des enseignants jusqu’à la préparation età la diffusion de la documentation (Hampton, 1994).

Le processus de prise de décisions participative n’est pas sansposer certains problèmes. Les intervenants peuvent par exemple s’ac-corder sur les buts de leur programme, mais non sur les moyens deles atteindre. Des groupes différents peuvent avoir des priorités dif-férentes, ou encore ne pas partager le même sens de l’urgence desdifférentes composantes de leur programme. Ils peuvent être en dé-saccord sur le choix des dirigeants ou sur l’utilisation des ressources.Ceux qui ont la responsabilité globale du programme peuvent consi-dérer que l’implication des intéressés dans la prise de décisions prenddavantage de temps et est d’un moindre « rendement » que s’ils fai-saient le travail eux-mêmes. Les personnes qui sont invitées à participerpeuvent aussi être embarrassées et intimidées par le système danslequel elles ont été invitées à entrer. Il appartient aux intervenants dedécider si les avantages qui en résulteront, à court et à long termes,pour le programme et pour ses bénéficiaires valent la peine d’affron-ter les difficultés qu’ils pourraient rencontrer. Les expériences vécuesdans le monde entier semblent indiquer qu’il en est effectivementainsi.

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Penser et planifier l’alphabétisation

Résumé

Ce chapitre a examiné trois questions sous-jacentes qui influentsur la manière dont les programmes d’alphabétisation sont planifiés,mis en œuvre et entretenus. La première est relative à la manièredont les organisateurs et les instigateurs d’un programme concep-tualisent l’alphabétisation et sa place dans le développement. Ladeuxième question concerne leur manière de conceptualiser la plani-fication et l’exécution, soit comme des processus séparés et séquentiels,soit comme des processus intégrés et cycliques. Enfin, la troisièmequestion conerne leur conception de leur propre rôle vis-à-vis desautres personnes qui seront impliquées dans le programme et concer-nées par celui-ci. La manière dont les organisateurs et les instigateursd’un programme réagissent à ces questions constitue leur premièredécision – consciente ou inconsciente – sur le mode d’élaboration etd’entretien du programme.

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II. La prise de décisions préliminaire

Avant de commencer à élaborer le plan de mise en œuvre de leurprogramme d’alphabétisation, les planificateurs doivent examinercertaines questions de plus grande ampleur relatives à la nature gé-nérale du programme : Quels seront les principes qui le guideront ?Quels seront ses buts et ses objectifs ? Quelle sera la dimension duprogramme ? Quelles langues seront utilisées ? Quels types de coursva-t-on organiser ?

Ce chapitre répond aux interrogations ci-dessus. Il présente plu-sieurs points qu’il convient d’examiner avant de planifier lescomposantes spécifiques du programme. Les analyses qui suiventsont de nature générale, si bien que les planificateurs aux niveauxnational, infranational et local peuvent utiliser leur créativité pouradapter les idées qu’elles contiennent à leurs situations spécifiques.Des expériences vécues dans différentes régions du monde fournis-sent des exemples montrant la diversité des méthodes qui appliquentces idées dans des contextes variés.

Les décisions sur les principes directeurs du programme

Les principes directeurs sont des déclarations générales qui diri-gent l’action et le comportement de ceux qui sont impliqués dans laplanification, l’exécution et la gestion d’un programme d’alphabétisa-tion. Dans les programmes centrés sur les élèves, les principes directeurssont le produit d’un dialogue entre les représentants de tous les grou-pes d’intervenants. Un principe directeur destiné à un programmed’alphabétisation des adultes à l’échelle de la communauté pourrait

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La prise de décisions préliminaire

être : « Les méthodes d’instruction et le matériel de lecture doiventconfirmer et enrichir les expériences vécues par les élèves. » Les prin-cipes directeurs d’un programme à l’échelle de la nation ou de l’Etatpourraient être : « Les agences organisatrices doivent travailler en-semble plutôt que de rivaliser pour la mise en œuvre et la gestion duprogramme. » Un autre principe directeur pourrait être qu’« à chaqueniveau et en tout lieu où le programme sera mis en œuvre, la prioritédoit être accordée à l’identification et à l’utilisation des ressources quisont déjà disponibles, plutôt que de dépendre de ressources extérieu-res pour le maintien du programme. »

Les décisions sur les buts et les objectifs du programme

Les buts du programme. Ils décrivent en termes généraux ceque les intervenants espèrent dans l’avenir obtenir comme résultatdu programme d’alphabétisation – ses conséquences à long terme,telles qu’elles sont prévues pour les élèves, pour la communauté,pour le système éducatif et pour la nation tout entière. Ils décriventun avenir idéal, mais ils sont assez réalistes pour que les intervenantssoient encouragés par l’observation de leurs propres progrès. Lesbuts des programmes d’alphabétisation centrés sur les élèves sonten harmonie avec les politiques et les plans nationaux, et aussi avecles buts éducatifs des futurs élèves – autrement dit, leurs raisons desouhaiter être alphabétisés. Par exemple, dans un programme d’al-phabétisation à l’échelle d’une ville et destiné à la jeunesseextrascolaire ou aux jeunes sans emploi, un des buts formulés par lesélèves pourrait être de posséder les connaissances, les compétenceset la motivation qui leur permettront de trouver et de conserver unemploi bien rémunéré. Un but complémentaire du programme – for-mulé cette fois par ses organisateurs – pourrait être que le taux decriminalité enregistré chez les jeunes de la ville se réduise. Un desbuts d’un programme d’alphabétisation transitionnel organisé par l’Etatà l’intention des nouveaux immigrants pourrait être que les élèvesimmigrants deviennent partie intégrante de leur nouvelle société (undes buts des organisateurs), et aussi qu’ils apprennent à parler cou-ramment la langue de leur nouveau pays (un but complémentairepour les élèves).

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Le processus de détermination des buts d’un programme com-mence par la recherche d’un accord entre les intervenants, à chaqueniveau de la mise en œuvre, sur les raisons pour lesquelles le pro-gramme est nécessaire – les problèmes qu’il est censé résoudre – et parl’obtention d’un consensus sur son utilité générale. Aux niveaux natio-nal et infranational, la détermination des buts pourrait être l’élémentcentral des premières sessions de planification, auxquelles participe-raient des représentants des différents groupes qui mettront en œuvre,géreront et appuieront le programme à ce niveau, en collaboration avecdes représentants des futurs élèves. Au niveau local, les buts d’unecommunauté en matière d’alphabétisation pourraient être formulés aucours de réunions formelles ou de discussions informelles avec les fu-turs élèves et les animateurs de la communauté, ainsi qu’avec des agencesgouvernementales et ONG locales.

Les objectifs du programme. Ils décrivent les cibles spécifi-ques qui doivent être atteintes dans le laps de temps couvert par leplan directeur du programme. Ce sont des déclarations explicites surla base desquelles le programme sera périodiquement évalué, au coursd’un processus au terme duquel doivent être atteints ses buts à longterme. Les objectifs sont assez souples pour pouvoir être ajustés sil’évaluation révèle qu’ils sont irréalistes ou qu’ils n’ont pas l’utilitépour laquelle ils ont été prévus. Un des objectifs d’un programmed’alphabétisation communautaire destiné à la jeunesse extrascolairepourrait être en rapport avec le nombre d’élèves qui auront suivil’ensemble du cours dans les deux premières années. Au niveauinfranational, un des objectifs pourrait spécifier le nombre d’ensei-gnants qui seront formés au cours d’une période donnée ou le nombrede centres de formation qui seront établis. Au niveau national, un desobjectifs pourrait spécifier le nombre d’Etats ou de provinces danslesquels des centres de production de documentation seront établisau cours des trois premières années. Que la planification ait lieu auxniveaux national, infranational ou local, le processus de formulationdes objectifs exige la connaissance des ressources et des activitésqui sont nécessaires au maintien du programme, ainsi que la prise encompte des ressources qui sont déjà disponibles et des activités quise déroulent déjà.

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La prise de décisions préliminaire

Les décisions sur la dimension etl’étendue du programme

Les décisions portant sur la dimension et l’étendue d’un pro-gramme d’alphabétisation sont influencées par les besoins et les butsdes élèves et par le contexte politique, économique et sociocultureldans lequel sera organisé le programme. Les trois approches les pluscourantes sont celles de la campagne de masse et des projets à grandeéchelle ou à échelle limitée. Bhola (1994) a établi une distinctionentre les initiatives d’alphabétisation à grande échelle et à échellelimitée en baptisant les premières « programmes » et les secondes« projets ». Dans cette monographie, le terme « programme » feraréférence aux initiatives d’alphabétisation en général.

Les campagnes de masse. Ces campagnes sont généralemententreprises à l’initiative du gouvernement et dépendent du caractèresoutenu et intensif de l’impulsion gouvernementale aux niveaux na-tional, infranational et local, généralement avec l’appui des ONGconcernées. Le but d’une campagne est d’alphabétiser un grand nom-bre de personnes sur une durée spécifiée afin de consolider deschangements sociaux et/ou politiques à grande échelle (ibid.). Ellemobilise de vastes ressources humaines et matérielles. La prise dedécisions est centralisée, même si la gestion au jour le jour peut s’ef-fectuer au niveau local. Les programmes d’études et les matérielsd’instruction sont centrés sur les questions que le gouvernement con-sidère comme importantes, même si l’adaptation des idées au contextelocal peut s’opérer avec une certaine souplesse.

Le programme d’alphabétisation du Vietnam est un exemple decampagne de masse – en fait trois campagnes séparées, qui ont étéentreprises entre 1954 et la fin des années soixante-dix. Le but deces campagnes était de promouvoir l’unité nationale et la croissanceéconomique en améliorant le niveau d’alphabétisation de la popula-tion. Les ateliers de formation d’enseignants ont mis l’accent sur lepatriotisme aussi bien que sur les stratégies pédagogiques. Le gou-vernement a fourni des instructeurs à temps complet et du matériel

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d’enseignement, mais les coopératives de village étaient censées assu-mer la responsabilité du financement des cours des premier et deuxièmeniveaux. Les décisions prises au niveau national ont été mises à exé-cution par des volontaires au sein des communautés locales. Ces troiscampagnes ont toutes été réalisées dans un contexte de conflit armé etd’embargos économiques et sans financement ni appui extérieurs (ONGVan Cat, in Bhola, 1984).

Au Nicaragua, la croisade en faveur de l’alphabétisation visaitégalement à élaborer une identité nationale nouvelle et unifiée. Leprogramme a été entrepris par le nouveau gouvernement en 1980,mais la planification et la prise de décision devaient être plus décen-tralisées. Une Commission nationale de coordination, composée devingt-cinq organisations gouvernementales, politiques, militaires, édu-catives, culturelles, religieuses et locales ou « de masse », a été établieau sein du département de l’éducation afin de déterminer une politi-que d’ensemble et de faciliter sa mise en œuvre. Des commissionsde coordination parallèles ont également été établies au niveau dé-partemental, municipal ou local. L’essentiel de la planification réellede la mise en œuvre du programme a eu lieu au niveau municipal. Etc’est aussi dans les municipalités que les organisations ont travailléensemble dans la plus étroite coopération et que la participation desfuturs bénéficiaires a été la plus forte (Arnove, 1987).

Un avantage de l’approche de la campagne de masse est demettre le pouvoir et les ressources du gouvernement à la dispositiondu programme d’alphabétisation. Les gouvernements ont les moyensd’établir un climat politique favorable et de mobiliser des ressourceset un soutien populaire dont ne disposent généralement pas les pro-grammes plus restreints. Un inconvénient de cette approche est quel’entretien du programme sur une période prolongée exige un niveaud’engagement politique et économique que peu de gouvernementssont capables ou désireux de maintenir. Un autre problème potentielest qu’une campagne de masse, qui suppose que la prise de déci-sions descende du sommet vers la base, risque de décourager, auniveau local, les initiatives et le sentiment d’appropriation du pro-gramme d’alphabétisation, alors que ces éléments sont nécessaires àla survie de ce dernier quand l’appui gouvernemental vient à décli-ner. Un troisième inconvénient potentiel est qu’une campagne de

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La prise de décisions préliminaire

masse peut se révéler être un outil d’endoctrinement plutôt que depromotion de l’équité. Enfin, l’approche de la campagne de masseconvient mal aux contextes multilingues et/ou multiculturels. Les pro-grammes d’études et les matériels d’enseignement centralisés sontinefficaces si les élèves ne comprennent pas la langue d’enseigne-ment et si le contenu des cours n’est pas en relation avec les propresbuts éducatifs.

Les projets à grande échelle. Les projets de ce type cou-vrent également de multiples secteurs politiques, géographiques et/ou socioculturels, mais ils n’ont pas l’intensité ni la focalisation unifi-catrice des campagnes de masse (Bhola, 1994). La responsabilitépremière des projets à grande échelle peut incomber soit à un orga-nisme gouvernemental, soit à une ou plusieurs ONG, à moins que leprogramme ne soit organisé conjointement par un organisme gouver-nemental et par une ONG travaillant en coopération. Les buts etobjectifs généraux peuvent être établis par les organisateurs, mais ilest plus facile d’adapter les décisions aux niveaux infranational etlocal, car le contrôle exercé « au sommet » est plus limité. Les déci-sions concernant la langue véhiculaire et le contenu de l’enseignement,par exemple, peuvent être laissées à l’appréciation des communau-tés locales.

Comme exemple de projet à grande échelle, nous citerons leprogramme national d’alphabétisation et de sensibilisation de laPapouasie-Nouvelle-Guinée, établi en 1989 par le gouvernement afind’appuyer les ONG et les communautés qui avaient mené pendantdes décennies leurs propres projets à échelle limitée (Malone, 1989).La responsabilité de ces projets incombait principalement aux grou-pes qui en avaient pris l’initiative à l’origine. L’appui gouvernementalcomportait l’élaboration de principes directeurs pour les program-mes d’études et de prototypes de matériels de lecture susceptiblesd’être adaptés à des situations linguistiques et culturelles diverses,l’organisation d’ateliers de formation et l’allocation à des ONG et àdes communautés de bourses destinées à la formation d’enseignantset la production de textes.

Un avantage des projets à grande échelle, qui sont établis enréponse à des initiatives communautaires, est qu’ils tablent sur des

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infrastructures déjà en place aux niveaux infranational et local. Unestructure décentralisée tend à réduire le contrôle exercé du sommetsur la base, ce qui laisse la responsabilité des décisions concernantchacun des programmes à ceux qui savent ce qui est nécessaire etce qui fonctionnera le mieux, dans leur cas particulier. Par exemple,les programmes d’études et le matériel de lecture pourront être modifiéspour s’adapter aux buts éducatifs des élèves. Un des inconvénientspossibles est qu’un programme à grande échelle nécessite la coordi-nation et le soutien permanents d’un organisme central. Si le programmedépend de la participation volontaire de certaines ONG, il peut êtremis en danger si ces ONG se retirent ou perdent leur financement. Lecontrôle décentralisé peut aussi engendrer un recoupement des initia-tives dans le cas où, par exemple, chacune des ONG organisatricesproduit ses propres schémas de programmes d’études ou ses manuelspour enseignants, ou établit ses propres centres de production de ma-tériel. Enfin, l’utilisation de langues multiples peut compliquerl’élaboration des matériels de lecture et d’enseignement et constituerun fardeau pour des ressources humaines et matérielles limitées.

Les projets à échelle limitée. Les projets de ce type sont adap-tés à un public spécifique (un seul groupe linguistique ou dialectal,une seule communauté ou un seul groupe d’intérêts au sein d’unecommunauté) et ont une utilité spécifique (éducation sanitaire, plani-fication familiale, production de revenus, etc.). Ils sont généralementorganisés par une ONG qui assume également la responsabilité deformer des enseignants et de fournir des matériels d’enseignementet de lecture.

Le programme d’alphabétisation des adultes destiné aux Adivaside la province de l’Andhra Pradesh, en Inde, est un exemple deprojet à échelle limitée (Gustafsson, 1991). Ce programme, qui estintégré à un programme de développement local, a pour but d’aiderla population à se perfectionner dans sa langue maternelle, afin defaciliter sa transition vers la langue régionale, le telegu, et d’amélio-rer sa situation économique. Les institutions locales assument laresponsabilité de la gestion et de la supervision du programme, del’élaboration du programme d’études et du matériel de lecture, durecrutement et de la formation du personnel.

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Les projets à échelle limitée trouvent généralement leur origineen dehors de la bureaucratie et en coopération étroite avec les élèves.Ils tendent à présenter davantage de souplesse que les projets oucampagnes à grande échelle et sont à même de répondre plusrapidement aux besoins changeants de ceux à qui ils s’adressent.L’inconvénient le plus évident des projets à échelle limitée est qu’ilsatteignent un nombre de personnes relativement restreint. Enfin, lesoutien dont ils bénéficient reposant sur une base restreinte, ces projetssont mis en danger lorsque les infrastructures locales n’ont pas étésolidement établies et que la population locale ne dispose pas del’équipement nécessaire à leur entretien.

Les décisions sur la/les langue(s) véhiculaire(s)

Dans les contextes de multilinguisme, le choix d’une langue vé-hiculaire pour l’alphabétisation, ou pour l’éducation en général, estune tâche complexe qui doit prendre en compte une multitude defacteurs sociaux, culturels, économiques et politiques. Certains gou-vernements choisissent d’utiliser une seule langue pour leurs campagnesou leurs projets à grande échelle afin de favoriser l’unité nationale oud’alléger la charge que constitue la production de matériels d’alphabé-tisation et la formation d’enseignants. D’autres soutiennent quel’utilisation d’une seule langue joue un rôle de sélection : parmi ceuxqui parlent une langue minoritaire, seuls ceux qui consentent à sacri-fier leurs langues et cultures traditionnelles peuvent évoluer avec succèsdans le système éducatif. Certains de ceux qui préconisent l’utilisationde la langue maternelle pour l’éducation première soutiennent aussiqu’une charge cognitive trop lourde est imposée aux élèves, qui « sontcensés apprendre dans une langue étrangère, auprès d’enseignantsqui parlent une langue étrangère, en utilisant des textes écrits dans unelangue étrangère, au sujet de concepts qui sont étrangers à l’expé-rience quotidienne de chacun d’entre eux » (Gustafsson, 1991, 33).

Jusqu’aux années quatre-vingt, les programmes d’alphabétisationen langue maternelle et à grande échelle, avec ou sans transfert ulté-rieur vers une langue dominante, ont été rares dans les sociétésmultilingues. Un nombre de gouvernements relativement limité a éla-boré des politiques linguistiques et d’alphabétisation favorables aumultilinguisme, et plus rares encore sont ceux qui ont consacré le

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temps et les ressources nécessaires à l’élaboration et à l’entretien deprogrammes d’alphabétisation en plusieurs langues. Parmi les ex-ceptions, on peut citer les programmes d’éducation préscolaire enNamibie et en Papouasie-Nouvelle-Guinée (Harlech-Jones, 1986[Namibie] ; Département national de l’éducation, 1991 [Papouasie-Nouvelle-Guinée]). Dans ces deux pays, ces programmes visaient àéduquer les enfants dans leur langue locale pendant les trois premiè-res années de leur scolarité, après quoi ils accédaient aux classes duprimaire, dans lesquelles l’anglais était la langue véhiculaire. Ces pro-grammes d’ampleur nationale destinés aux enfants peuvent servir demodèles à des programmes d’alphabétisation des adultes à grandeéchelle dans d’autres pays, à condition que les agences organisatri-ces soient disposées à assumer les engagements nécessaires à detelles initiatives.

Les décisions sur les types de cours d’alphabétisationqui seront organisés

Une autre question que les planificateurs sont amenés à exami-ner est celle du/des type(s) de cours qui seront créés pour répondreaux besoins spécifiques des élèves et renforcer les capacités qu’ilspossèdent déjà. On peut distinguer quatre types généraux de cours,fondés sur quatre stades généraux d’éducation.

L’alphabétisation de base. Les cours d’alphabétisation de basesont destinés aux personnes qui ont reçu antérieurement une éduca-tion formelle ou non formelle très limitée ou inexistante, mais dont lesbuts personnels ou professionnels exigent l’acquisition de la lecture,de l’écriture et du calcul. Le programme d’études, les méthodes d’en-seignement et le matériel de lecture s’appuient sur une bonnecompréhension par les élèves de leur langue et de leur culture etcommencent immédiatement à les encourager à participer active-ment aux affaires du monde qui les entoure.

Le perfectionnement. Dans les cours de perfectionnement,les lecteurs qui ont atteint un niveau de base consolident et élargis-sent l’utilisation qu’ils font de la lecture, de l’écriture et du calculpour répondre à l’élargissement de leurs buts en matière éducative.Des cours de perfectionnement peuvent aussi être établis pour aider

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des adultes plus instruits à entrer dans le système d’éducation for-melle ou dans des programmes de formation professionnelle en lespréparant à des examens d’entrée ou en les mettant en contact avecle type de matériel de lecture qu’ils seront censés utiliser dans leprogramme d’éducation permanente.

L’alphabétisation transitionnelle. Dans les contextes de bi-linguisme ou de multilinguisme, les cours de transition sont destinésaux personnes qui sont devenues aptes à la lecture dans leur languematernelle et qui désirent ensuite transférer leurs compétences enmatière d’instruction vers une deuxième (ou une troisième) langue.Le fait de qualifier ce type de cours d’alphabétisation de « transition-nel » présuppose que les élèves parlent déjà une deuxième langue etsont désormais prêts à apprendre à lire et écrire dans celle-ci.

La postalphabétisation. Les possibilités éducatives depostalphabétisation permettent aux élèves de poursuivre leur éduca-tion dans les systèmes formels ou professionnels ou en participant àdes cours thématiques, des clubs de lecture et autres activités édu-catives dans leur communauté locale. Il est très important, pour lesadultes qui ont atteint le stade de la postalphabétisation, de disposerd’une diversité de matériels de lecture qui soient pour eux intéres-sants et pertinents (voir chapitre III).

Les décisions sur le type de cours qui seront créés gagnent àêtre fondées sur l’évaluation, par les futurs élèves eux-mêmes, deleur aptitude à utiliser l’alphabétisation pour atteindre leurs buts. Ainsi,la jeunesse extrascolaire qui a acquis à l’école primaire une aptitudede base en lecture peut être retombée dans le semi-alphabétismeaprès avoir quitté le système éducatif formel. Des cours de perfec-tionnement pourraient l’aider à retrouver et à enrichir ce qu’elle aappris antérieurement afin de la préparer à poursuivre son éducationou de l’aider à acquérir des compétences spécifiques en vue d’unemploi. Dans les contextes multilingues, les cours de transition pour-ront être appropriés si les membres de la communauté qui sont déjàalphabétisés dans leur langue maternelle souhaitent le devenir égale-ment dans leur deuxième langue. En Inde, les Adivasi (qui ont étéévoqués précédemment) ont appris à lire et à écrire dans leur languematernelle pour faciliter leur transition vers l’alphabétisation en telegu,

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qui est la langue régionale. Dans d’autres cas, des gens qui sont déjàalphabétisés dans leur deuxième langue veulent effectuer un trans-fert pour revenir à leur langue maternelle. Par exemple, leGouvernement du Paraguay a pris l’initiative de cours spéciaux d’al-phabétisation, dans le cadre du système éducatif formel, à l’intentiondes élèves parlant le guarani qui avaient dû apprendre à lire et àécrire en espagnol, la langue véhiculaire, mais qui étaient cependantplus à l’aise lorsqu’ils utilisaient leur langue maternelle, le guarani(Engelbrecht et Ortiz, 1983).

Au niveau local, les différences existant entre les élèves en ma-tière d’instruction influent également sur la manière d’organiser lescours. Par exemple, un groupe de femmes pourra choisir de se diviseren deux cours séparés si certains de ces membres ont atteint une cer-taine maîtrise de la langue alors que d’autres en sont encore au stadede l’alphabétisation de base. Au contraire, les deux groupes pourrontdécider de rester ensemble pour que les lecteurs les plus avancéspuissent servir de tuteurs aux débutants. Les décisions sur la manièrede diviser et/ou d’organiser leurs cours seront alors fondées sur lesaptitudes, les attitudes et les buts des femmes elles-mêmes.

Résumé

Ce chapitre a examiné plusieurs questions qui doivent être étu-diées avant d’entreprendre de planifier les composantes spécifiquesd’un programme d’alphabétisation. On peut espérer que les principesdirecteurs, les buts et les objectifs établis par le dialogue entre tous lesintervenants influenceront la prise de décisions tout au long de l’exis-tence du programme. Les décisions relatives à la dimension et à l’ampleurdu programme d’alphabétisation, à la/les langue(s) utilisée(s) et au(x)type(s) de cours d’alphabétisation qui seront créés affecteront les dé-cisions ultérieures sur d’autres composantes du programme, telles quela formation d’enseignants et la production de matériels. Ces décisionspréliminaires et la manière dont elles seront prises affecteront égale-ment l’idée que les intervenants multiples se feront du programme, etpar conséquent de leur degré d’acceptation.

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III. Les stratégies d’exécution et d’entretiendes programmes

Dans la terminologie militaire, les « stratégies » sont des plans visantà installer des troupes et des équipements sur les positions les plusfavorables afin d’atteindre des objectifs. En matière d’alphabétisa-tion, les stratégies se composent de plans visant à utiliser au mieux lepersonnel, le financement, le matériel et les fournitures pour attein-dre les objectifs (et par conséquent les buts à long terme) d’unprogramme d’alphabétisation. La plupart des stratégies d’alphabéti-sation comportent six composantes en forme de plans :

• La recherche préliminaire : collecter l’information qui sera utili-sée pour la planification du programme ;

• La promotion : générer et entretenir un intérêt pour le programmeet un sentiment d’appropriation chez ceux qui sont censés enbénéficier ou l’appuyer ;

• Le recrutement et la formation : identifier le personnel qui seranécessaire pour l’initiative d’alphabétisation, élaborer des critè-res de recrutement et planifier la formation qui sera dispenséeavant et pendant le service ;

• L’élaboration des programmes d’études : définir les buts éduca-tifs et les résultats attendus de l’apprentissage, élaborer lesprogrammes d’études et les manuels pour enseignants, et enfinplanifier le contenu des cours au niveau de la communauté ;

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• L’élaboration et la production de matériel de lecture : identifierles sujets qui intéressent les élèves ; développer les infrastructu-res ou les systèmes de soutien pour la rédaction et l’illustrationde matériel de lecture et pour sa production et sa distribution auxcommunautés locales ;

• L’évaluation : déterminer si le programme d’alphabétisation at-teint ses objectifs, s’il répond vraiment aux besoins de ceux quiétaient censés en bénéficier, et par conséquent s’il est en passed’atteindre ses buts à long terme.

Ces six éléments stratégiques sont communs à la plupart des pro-grammes d’alphabétisation, quelles que soient leur dimension ou leurlocalisation. Qu’il s’agisse d’un programme d’alphabétisation transi-tionnelle dirigé par l’Etat et destiné à des immigrants à Londres, d’unprogramme d’alphabétisation à base communautaire organisé par ungroupe local de femmes au Kenya, ou d’une campagne d’alphabétisa-tion de masse au Nicaragua, la stratégie des programmesd’alphabétisation comportera toujours, par exemple, un plan de pro-motion ou de mobilisation destiné à informer le public du programmeet à l’encourager à y participer. Ces mêmes six éléments stratégiquesse retrouvent également aux niveaux de l’exécution et de l’administra-tion. Si l’on reprend l’exemple de la promotion, un programmed’alphabétisation à grande échelle a besoin de promotion dans lesdépartements ministériels, les agences de financement et les ONG quile soutiennent aux niveaux infranational, national et international, ainsiqu’auprès des élèves potentiels et de ceux qui sont susceptibles de lesoutenir au niveau local.

Cependant, si ces six éléments stratégiques généraux sont com-muns à la plupart des programmes d’alphabétisation qui connaissentla réussite, la manière dont ils sont mis en œuvre est spécifique àchaque contexte. Un « plan d’action » pour chacun de ces élémentspourra comporter les composantes suivantes : (1) définir les activitésqui seront menées pour la mise en œuvre du plan dans ce contexte ;(2) établir le cadre temporel de l’accomplissement de chaqueactivité ; (3) identifier les personnes qui seront responsables dechacune des activités et les ressources qui seront nécessaires ;

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Les stratégies d’exécution etd’entretien des programmes

Tableau 1. Exemples d’activités de promotion pour unprogramme d’alphabétisation au niveau de la province

Stratégie 2 : promotion

Activité 1 Produire des articles bimensuels sur le programme d’alphabétisationqui seront publiés dans le journal de la province

Cadre Les articles, qui seront publiés dans l’édition de vendredi,temporel devront être rédigés et mis au point pour le mardi précédent.

Personnes La responsabilité sera assumée par rotation par le personnelresponsables de la province, mais d’autres personnes seront invitées à appor-

ter leur contribution.

Ressources Coopération du rédacteur en chef du journal ; rapports dunécessaires personnel chargé de l’alphabétisation aux niveaux provincial et

local sur ses programmes ; récits composés par des élèves adulteset autres ; information sur les innovations qui interviennent dansl’initiative d’alphabétisation.

Contraintes Possibilité de problèmes d’accès à l’information, aux récits,possibles etc., provenant de programmes locaux (nécessité de maintenir

une bonne communication ; de favoriser l’établissement de rap-ports réguliers ; d’encourager les enseignants à soumettre à lapublication des récits composés par les élèves).

Activité 2 Soumettre à la station de radio de la province les textes d’émissionsbimensuelles

Cadre Les textes devront être écrits et mis au point, un mercredi surtemporel deux, pour l’émission de la semaine suivante.

Personnes La responsabilité sera assumée par rotation par le personnel deresponsables la province chargé de l’alphabétisation. Les volontaires seront

encouragés à proposer leurs idées d’émissions personnelles.

Ressources Coopération de la station de radio de la province ; création etnécessaires interprétation par les enseignants et les élèves, ou par les élèves

des écoles primaires ou secondaires, de sketches en rapport avecl’alphabétisation ; information sur les différents programmes dela province ; chansons composées par les élèves sur leurs expé-riences en matière d’alphabétisation.

Contraintes La préparation de programmes bimensuels peut imposer unepossibles pression excessive au personnel de la province (il peut être né-

cessaire de se limiter à une périodicité mensuelle). Inciter les gensà produire des sketches et des chansons peut poser un problème(nécessité de constituer immédiatement un large groupe de colla-borateurs et de s’assurer que leurs contributions seront reconnueset utilisées dans toute la mesure du possible).

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(4) déceler les facteurs qui risqueraient d’empêcher de mener à biences activités et les moyens qui permettraient éventuellement de sur-monter ces problèmes. Le tableau ci-dessus présente des exemplesd’activités qui pourraient faire partie d’un plan d’action de promotiondans un programme d’alphabétisation au niveau de la province ou del’Etat.

La suite de ce chapitre examine les six éléments stratégiquesnécessaires à la mise en œuvre de programmes d’alphabétisationdurables. Chaque stratégie est analysée sous l’angle de sa finalité,ainsi que des problèmes et des questions qui doivent être pris encompte lorsque l’on planifie sa mise en œuvre et son entretien.

Stratégie 1. La recherche préliminaire

La recherche préliminaire consiste à définir, à collecter et à inter-préter l’information qui sera nécessaire aux décisions en matière deplanification. On trouvera ci-dessous certaines catégories généralesd’information, avec les questions de recherche qui s’y rattachent :

• Les facteurs motivants sur lesquels sera fondé le programme.- Aux niveaux national et infranational : Dans l’esprit

des différents intervenants, à quoi le programme d’alphabétisa-tion devrait-il servir ? Quels sont leurs buts à court et à longtermes pour le programme ?

- Au niveau local : Quels sont les problèmes décelés parles élèves potentiels qu’un programme d’alphabétisation pourraitpermettre de résoudre ? De quelle manière pensent-ils qu’unprogramme d’alphabétisation pourrait les aider ?

• Le contexte socioculturel, politique et économique qui influerasur l’exécution et l’entretien du programme.

- Aux niveaux national et infranational : Quelle a été,dans le passé, l’attitude du gouvernement en ce qui concernel’appui à apporter à l’éducation non formelle en général, et plusspécifiquement à l’éducation de base des adultes ? Quelle a été,dans le passé, son attitude par rapport aux minoritésethno-linguistiques nationales? Quel genre d’appui politique peut-on attendre pour le programme? Comment pourrait-il être intégré

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Les stratégies d’exécution etd’entretien des programmes

dans les buts et objectifs nationaux et dans les autres initiativespour le développement organisées par le gouvernement ? Quellessont les ONG qui pourraient être disposées à travailler ensembleà la planification, à l’exécution et à l’entretien du programme ?

- Au niveau local : Quels facteurs socioculturels con-vient-il de prendre en considération lorsqu’on planifie le contenudes cours et du matériel de lecture ? Qui peut enseigner et à quidans cette société ?

• La/les langue(s) ou dialecte(s) qui seront utilisés.- Aux niveaux national et infranational : Les futurs

élèves ont-ils en commun une langue qui puisse être utilisée dansles cours d’alphabétisation, ou bien chaque groupe linguistiqueaura-t-il besoin d’apprendre d’abord dans sa langue maternelleavant d’effectuer un transfert vers une langue permettant uneplus large communication ? Quelle évolution linguistique doit avoirlieu pour que l’alphabétisation initiale puisse se dérouler dans lalangue maternelle des élèves ?

- Au niveau local ou linguistique : Un seul dialecte peut-il être utilisé par l’ensemble de la communauté linguistique ? Lalittérature orale traditionnelle peut-elle être retranscrite à l’écrit?Quels sont les documents écrits qui sont déjà disponibles dans lalangue ou le dialecte véhiculaires ?

• Les ressources qui sont disponibles pour l’exécution et l’entre-tien du programme.

- Aux niveaux national et infranational : Quels sontles départements ministériels qui pourraient être intéressés parla production de matériel de sensibilisation (sur la santé et l’agri-culture, par exemple) à l’usage des nouveaux lecteurs ? Lesinstituts pédagogiques ou les centres de formation profession-nelle peuvent-ils être utilisés comme lieux de formationd’alphabétiseurs ? Quelles sont les ressources disponibles pourl’envoi des fournitures destinées aux cours et du matériel delecture aux enseignants locaux ?

- Au niveau local : Quels sont les groupes communau-taires qui pourraient être disposés à organiser le programme ?Existe-t-il des bâtiments qui pourraient être utilisés pour les cours ?

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Existe-t-il dans la communauté des personnes qui peuvent êtreformées comme alphabétiseurs ou superviseurs?

• Le potentiel d’intégration de l’initiative d’alphabétisation dans lessystèmes d’éducation formelle et non formelle (professionnelle) (cettequestion est examinée plus en détail dans le chapitre IV).

- Aux niveaux national et infranational : Les adultes quiauront atteint un niveau de maîtrise de la langue écrite seront-ilsen mesure de participer à un programme de formation profes-sionnelle ? Les jeunes pourront-ils réintégrer le systèmed’éducation formelle une fois qu’ils auront retrouvé la maîtrisede la lecture, de l’écriture et du calcul ?Les méthodes de recherche. La recherche préliminaire exige

deux types de compétences : les compétences techniques des spé-cialistes de l’éducation et les compétences socioculturelles de ceuxqui seront responsables des programmes locaux. L’équipe chargéede cette recherche pourra utiliser une ou plusieurs méthodes pour lacollecte de l’information, en fonction des objectifs de la recherche,du temps et des ressources disponibles, et du type de relations queles planificateurs souhaitent commencer à établir avec les différentsintervenants :

• Les discussions informelles. Celles qui auront lieu avec les fu-turs bénéficiaires du programme peuvent être un moyen dediscerner les besoins et les buts des élèves sur lesquels serontbasés le programme d’études et le matériel de lecture. Avant d’en-treprendre un programme d’éducation de base parmi lespopulations pauvres de la Colombie rurale, des membres du per-sonnel du Ministère de l’Education se sont réunis avec desmembres des communautés pour définir leurs buts éducatifs im-médiats et à long terme, et pour déterminer les activités éducativesqui répondraient le mieux à leurs préoccupations et à leurs atten-tes. Cette information a constitué la base du plan établi pour cetterégion (Colombie, 1993).

• Les réunions officielles. On peut utiliser les réunions officiellesavec les agences gouvernementales et non gouvernementales con-cernées pour promouvoir le programme comme pour réunir del’information en vue de la planification. En Papouasie-

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Les stratégies d’exécution etd’entretien des programmes

Nouvelle-Guinée, le coordonnateur local d’un programme d’al-phabétisation en langue maternelle a rencontré des fonctionnairesde l’éducation de la circonscription et de la province pour lesinformer sur le programme, voir avec eux quelles ressources gou-vernementales pourraient être mises à sa disposition et lesencourager à participer à la planification et à la prise de décisions.

• Les instruments d’enquête. Des instruments d’enquête différentspeuvent être préparés pour des populations différentes. Des ques-tionnaires peuvent être expédiés aux personnes alphabètes et desformulaires de questions peuvent être utilisés pour les entretiensindividuels et en groupe. Ils pourront servir à collecter de l’infor-mation pour une base de données sur l’alphabétisme (concernantpar exemple le nombre d’abandons scolaires au sein de la com-munauté) et à connaître l’attitude des gens à l’égard du programmed’alphabétisation et la façon dont ils le perçoivent (comment lesadultes au sein d’une communauté décrivent-ils les perspectiveséducatives qui se présentent à eux ?). Les entretiens de groupeprésentent un avantage supplémentaire : les réponses peuvent êtreutilisées pour stimuler la poursuite des entretiens et la résolutiondes problèmes par les personnes interrogées.

• Les médias. On peut utiliser les médias électroniques ou impri-més pour la recherche et pour la promotion du programmed’alphabétisation. Par exemple, on pourra conclure des émissionsradiophoniques ou des articles de presse, présentant ou commen-tant les avantages potentiels de l’alphabétisation, en invitant lesauditeurs ou les lecteurs à envoyer aux organisateurs du pro-gramme des informations sur les besoins de leur communauté enmatière d’alphabétisation et sur les programmes d’alphabétisa-tion qui ont déjà été établis dans leur secteur.

Stratégie 2. La promotion

Les programmes d’alphabétisation pour le développement sontcentrés sur les destinataires : ils considèrent ceux qui sont censés enbénéficier comme des partenaires pour le développement plutôtque comme des cibles du développement et sont le produit d’unecollaboration permanente entre les différents groupes d’intervenants.

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Le but de la promotion est donc en premier lieu d’encourager lepublic non alphabétisé à réfléchir de manière critique sur les voiesspécifiques par lesquelles l’alphabétisation pourrait lui être profitableet sur les problèmes qu’elle pourrait l’aider à résoudre, et en secondlieu de favoriser une participation active des gens à la planification età l’entretien du programme. Cette approche du développement peutrevêtir une importance particulière dans les contextes où les bénéfi-ciaires potentiels ont été maintenus à l’écart de la prise de décisionsdans le passé. La promotion sert plus spécifiquement à :

• Fournir une information préliminaire sur le programme d’alphabéti-sation et sur ce qui sera nécessaire pour l’établir et l’entretenir.

• Inviter des représentants de chacun des groupes d’intervenants – bailleurs de fonds, représentants gouvernementaux, ONG etfuturs élèves – à travailler ensemble à la planification du pro-gramme dans leurs secteurs respectifs et à entreprendre dedéfinir et/ou de développer les infrastructures qui seront néces-saires pour assurer sa durabilité.

• Encourager les intervenants à entreprendre l’identification desressources qui peuvent être utilisées pour l’exécution et l’entre-tien du programme et pour les informer sur toute aide extérieurecomplémentaire qui serait disponible.

Planifier en vue de la promotion. Pour la promotion, les pos-sibilités ne sont limitées que par l’ingéniosité avec laquelle lesplanificateurs font usage des ressources disponibles. Au niveau local,par exemple, on peut exécuter des saynètes lors de rassemblementspublics. Les écoles peuvent organiser des concours lors desquels lesélèves réaliseront des dessins illustrant la valeur de l’alphabétisation,ceux qui seront jugés les meilleurs pouvant être affichés dans toutela communauté. Au sein de celle-ci, les personnes alphabétisées peu-vent écrire aux agences gouvernementales, aux ONG, aux entrepriseset autres soutiens et bailleurs de fonds potentiels pour solliciter leurimplication. Aux niveaux infranational et national, les stations de radiopeuvent diffuser des programmes sur l’alphabétisation, prévoir untemps d’antenne pour les questions des auditeurs et faire des annon-

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Les stratégies d’exécution etd’entretien des programmes

ces régulières sur les cours d’alphabétisation qui sont prévus. Lesjournaux et les feuilles d’informations peuvent publier des articles etdes récits. Des cérémonies officielles aux niveaux national, infranationalet local peuvent être organisées pour inaugurer l’initiative d’alphabé-tisation.

En Tanzanie, les planificateurs ont utilisé une grande diversitéd’activités pour promouvoir leur campagne nationale d’alphabétisation.Les programmes radiophoniques ont souligné l’importance del’alphabétisation et fourni des informations sur les événements quiallaient se dérouler dans ce domaine. Une page consacrée àl’alphabétisation a paru régulièrement dans le journal national. Lesécoliers et les élèves adultes ont écrit, dans le cadre d’un concoursnational, des chansons et des poèmes dans lesquels ils décrivaientleurs manières d’utiliser l’écrit et le calcul. Les meilleures contributionsont été diffusées à la radio et publiées dans les journaux. Des slogansen faveur de l’alphabétisation ont été imprimés sur des tee-shirts etdes timbres commémoratifs ont été émis (Mpogolo, 1990).

Une méthode différente a été utilisée pour promouvoir un pro-gramme d’alphabétisation des adultes au niveau du groupe linguistiquechez les Quechuas de la région montagneuse de l’Equateur. Dans ceprogramme, de jeunes musiciens quechuas se sont déplacés de vil-lage en village à l’occasion de « fêtes de l’éducation ». Ils ont jouéde la musique quechua traditionnelle, exécuté de brèves saynètesconsacrées à la vie rurale et organisé des spectacles de marionnet-tes. Parmi les thèmes qui ont été présentés figuraient les problèmesliés à l’analphabétisme. A la fin de chaque séance du soir, les troupesitinérantes demandaient aux villageois de débattre des rapports existantentre ce qu’ils avaient observé dans les chansons et les saynètes etleur propre existence. Ces représentations avaient pour but d’encou-rager les villageois à constituer sur une base communautaire desorganisations en faveur de l’alphabétisation et du développement quipourraient les aider à répondre aux besoins spécifiques qu’ils avaientdéfinis (Kleymeyer et Moreno, 1989).

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Stratégie 3. Le recrutement et la formation du personneld’alphabétisation

Le recrutement pour un programme d’alphabétisation consisteà déterminer les activités qui auront lieu pour l’exécution et l’entre-tien du programme, à définir les qualifications qui seront nécessairesau personnel responsable de ces activités et à s’assurer les servicesde personnes possédant ces qualifications. La formation consiste àaider ces personnes à acquérir la motivation, les connaissances et lescompétences qui leur permettront d’assumer leurs fonctions de ma-nière créative et efficace.

Le recrutement d’alphabétiseurs. Le processus d’établisse-ment des qualifications et de sélection des personnes qui occuperontles différents postes est conditionné par les principes directeurs, lesbuts et les objectifs du programme et par le contexte dans lequelauront lieu les différentes activités. A tous les niveaux de la mise enœuvre, le personnel des programmes d’alphabétisation centrés surles élèves a besoin de posséder, outre les qualifications techniques etprofessionnelles, des attributs personnels particuliers. Il doit disposerdes ressources permettant l’adaptation des idées et de l’informationà sa situation spécifique et être respecté par ceux avec qui il tra-vaille. Il doit être conscient du contexte social, culturel et linguistiquedans lequel vivent les différents groupes d’élèves et avoir vocation àaider les individus et les communautés pour qu’ils atteignent leursbuts en matière d’éducation.

Si les activités spécifiques peuvent varier, les stratégies de re-crutement comportent toujours un certain nombre de composantes :

1) Déterminer les activités qui exigeront du personnel à chaqueniveau de la mise en œuvre du programme.

• Au niveau national, il sera nécessaire de disposer de personnelpour les activités suivantes :- Conduire la recherche préliminaire.- Planifier le programme national et faciliter la planification aux

niveaux infranational et local.

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Les stratégies d’exécution etd’entretien des programmes

- Assurer la coordination et la gestion générales au niveau na-tional, y compris la promotion, le recrutement et la formation,la conception des programmes d’études et du matériel, et l’éva-luation.

• Au niveau infranational, il sera nécessaire de disposer de per-sonnel pour les activités suivantes :- Conduire la recherche préliminaire dans la province ou l’Etat,

ou dans la circonscription.- Planifier le programme pour la province ou l’Etat, ou pour la

circonscription, et faciliter la planification au niveau local.- Coordonner et/ou conduire des vérifications et évaluations

continues aux niveaux infranational et local.- Assurer la coordination et la gestion générales du programme

dans la province ou l’Etat, ou dans la circonscription, y com-pris la promotion, le recrutement et la formation, et la conceptiondes programmes d’études et du matériel.

• Au niveau local, il sera nécessaire de disposer de personnelpour les activités suivantes :- Conduire la recherche préliminaire dans la communauté.- Planifier le programme local (et aider à la planification des

programmes national et infranational).- Promouvoir le programme au sein de la communauté.- Entretenir l’équipement et les fournitures destinés aux cours.- Concevoir et/ou adapter le programme d’études et le matériel

de lecture.- Dispenser les cours.- Participer aux évaluations régulières de différents aspects du

programme.- Assurer la gestion et la coordination générales du programme

local.

2) Déterminer les critères de recrutement de personnel pour cha-que poste et à chaque niveau, sur la base d’une appréciationréaliste des personnes qui pourraient être disponibles. (Par exem-ple, la qualification requise pour un formateur d’enseignants auniveau infranational pourrait consister à être titulaire d’un certi-ficat d’aptitude à l’enseignement). Le montant du financement

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disponible déterminera dans quelle mesure le programme devrafaire appel à des volontaires, qui ne seront pas nécessairementdisponibles. (Voir chapitre IV.)

3) Définir le soutien financier et/ou d’un autre ordre dont aurontbesoin les différents personnels et projeter la capacité de fournirce soutien.

4) Planifier la méthode de recrutement. Aux niveaux national etinfranational, les procédures de recrutement suivent les politi-ques et les pratiques des départements ministériels et des ONGrespectifs. Pour le recrutement de personnel au niveau local, oncommence par informer les membres de la communauté sur lesqualifications essentielles du personnel pour chaque poste (parexemple, les enseignants doivent être capables de lire couram-ment et d’écrire lisiblement dans la langue d’enseignement) etpar leur demander d’identifier les personnes qui possèdent cesqualifications et qui sont susceptibles d’être acceptées par l’en-semble de la communauté.

La formation en tant que processus continu. La formation envue de programmes d’alphabétisation des adultes centrés sur les élèvescomporte à la fois une composante formelle (cours de formation avantet pendant le service) et une composante informelle (observation etpratique sous la supervision d’un enseignant ou d’un inspecteurexpérimentés). L’idéal serait que formations formelle et informelleaient en commun un certain nombre de caractéristiques générales :

• Les bénéficiaires de la formation participent à la définition de cedont ils ont besoin d’apprendre et à l’évaluation de leur propreprogression dans leur apprentissage.

• Bénéficiaires de la formation et formateurs entretiennent des re-lations de soutien mutuel.

• L’accent est mis sur les caractéristiques de l’apprentissage desadultes, notamment dans ce qui le différencie de celui des enfants.

• Les bénéficiaires de la formation sont encouragés à adapter cequ’ils ont appris au contexte local.

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Les stratégies d’exécution etd’entretien des programmes

• La formation de formateurs est une priorité. Les enseignantsexpérimentés qui ont manifesté des compétences et une sensibi-lité particulières sont encouragés à devenir des formateurs etsont équipés à cet effet.

La formation formelle et informelle pour une alphabétisation cen-trée sur les élèves repose aussi bien sur les connaissances et surl’expérience des bénéficiaires que sur les compétences du formateuret encourage un dialogue où chacun facilite l’apprentissage de l’autre.Un processus de formation fondé sur un soutien mutuel fournit auxbénéficiaires un modèle qu’ils suivront plus tard dans leurs proprescours. Aider les élèves-alphabétiseurs à se considérer comme desfacilitateurs et des coapprenants peut être un processus long et diffi-cile, notamment pour ceux dont les expériences d’apprentissageantérieures ont mis l’accent sur la connaissance en tant que produittransféré de l’enseignant à des élèves passifs, plutôt que généré pardes activités participatives. En Afrique du Sud, par exemple, les coor-donnateurs de la formation ont constaté que ses nouveaux bénéficiairesétaient choqués et embarrassés par les méthodes de formation parti-cipatives, jusqu’au moment où ils réalisaient que leurs connaissanceset leurs expériences personnelles constituaient des ressources pré-cieuses, à la fois pour leur propre apprentissage ultérieur et pourcelui des formateurs (von Kotze, 1992).

Même avec une excellente modélisation de la part des forma-teurs, rares sont les nouveaux enseignants qui pourront assimiler etretenir la méthode participative appliquée à l’enseignement s’ils n’enont d’autre expérience que celle d’un cours de formation de courtedurée. Les élèves-alphabétiseurs ont besoin en permanence d’avoirl’occasion d’observer des enseignants expérimentés faisant preuve,dans leurs cours, des attitudes et du comportement souhaitables etde s’exercer sous leur tutelle. Dans l’idéal, le processus de forma-tion de ces nouveaux enseignants devrait donc comporter :(1) plusieurs semaines d’observation d’un enseignant expérimentédans son milieu de travail ; (2) une participation à un atelier de for-mation ; (3) une période d’exercice de l’enseignement sous le contrôlede cet enseignant expérimenté ; (4) une participation régulière à desateliers de formation en cours de service, afin de répondre aux be-soins de formation spécifiques au fur et à mesure qu’ils apparaissent.

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Stratégie 4. La conception des programmes d’études

Dans les programmes qui considèrent l’apprentissage commeun processus participatif dirigé par les intéressés eux-mêmes, lesprogrammes d’études et les méthodes d’enseignement sont conçuspour aider les élèves à atteindre leurs buts personnels en matièred’alphabétisme. Les décisions qui les concernent prennent donc encompte les caractéristiques générales des élèves adultes :

• Ils possèdent une expérience et des connaissances considéra-bles en rapport avec des sujets variés, sont conscients de leursproblèmes propres et ont leurs propres buts éducatifs.

• Ils n’apprennent pas de la même manière que les enfants et nedésirent pas recevoir un enseignement semblable à celui qui estdispensé aux enfants.

• Ils ont de nombreuses responsabilités et ne veulent pas être im-pliqués dans des activités qu’ils considèrent comme une pertede temps.

• Ils peuvent ne pas être intéressés par un apprentissage individua-lisé et ne pas être à l’aise dans des situations concurrentielles ou,au contraire, aimer la concurrence et mieux apprendre seuls.

• Ils peuvent manquer d’amour propre à cause de leur inaptitudeà utiliser les médias imprimés, d’expériences scolaires antérieu-res infructueuses, de leur médiocre statut social ou – s’ilsappartiennent à une minorité ethnique – du médiocre statut deleur langue et de leur culture.

Outre ces caractéristiques générales, les élèves adultes arriventaux cours d’alphabétisation avec des niveaux divers d’aptitude à lalecture, à l’écriture et au calcul et, dans certains cas, en s’exprimantdans une langue qui n’est pas la langue véhiculaire.

Il est clair qu’il n’existe pas un programme d’études « généri-que » et unique qui conviendra à chaque groupe d’élèves. Au débutdu processus de conception de ces programmes, on commence donc

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Les stratégies d’exécution etd’entretien des programmes

par s’informer sur les élèves eux-mêmes et par définir ce qu’ils sou-haitent apprendre. Au cours de la phase de planification, on s’efforcede déterminer les buts éducatifs des futurs élèves – les raisons pourlesquelles ils veulent s’alphabétiser. Ainsi, les femmes d’un villagerural d’Asie pourraient souhaiter apprendre à lire, à écrire et à calculerafin de pouvoir entreprendre et entretenir un projet lucratif. Les butséducatifs de ces femmes seraient alors d’être en mesure de tenir desregistres commerciaux et de gérer leurs propres comptes bancaires.

Si les buts éducatifs des élèves répondent à la question : « Pour-quoi ? », le programme d’études répond à la question : « Quoi ? »Bien qu’il existe de nombreuses définitions différentes du programmed’études, cette terminologie fait ici référence à l’ensemble organiséde résultats attendus de l’apprentissage – les connaissances, les com-pétences, les attitudes et les comportements qui permettront aux élèvesadultes d’atteindre leurs buts éducatifs (Posner et Rudnitsky, 1994).Pour les femmes du village rural de l’Asie déjà cité, les résultats atten-dus de l’apprentissage seraient les connaissances et les compétencesspécifiques en relation avec la lecture, l’écriture et le calcul, qui leurseront nécessaires pour tenir des registres commerciaux et gérer leurscomptes bancaires.

Cette définition du programme d’études contient implicitement lapossibilité d’une inadéquation de l’ensemble des résultats attendus del’apprentissage – autrement dit du fait que les élèves, bien qu’ils aientacquis les connaissances et les compétences inscrites au programme,demeurent incapables d’atteindre leurs buts éducatifs. La conceptiondes programmes d’études exige donc une évaluation continue des ré-sultats de l’apprentissage, afin de vérifier si le programme permetréellement aux élèves d’atteindre ces buts. Si les résultats attendus del’apprentissage ont été obtenus sans que les buts éducatifs aient étéatteints, le programme d’études doit être révisé.

Si les buts éducatifs répondent à la question « Pourquoi ? » etle programme d’études à la question « Quoi ? », la méthoded’enseignement répond, quant à elle, à la question « Comment ? ».La méthode d’enseignement inclut toutes les activités d’apprentissageplanifiées qui sont utilisées pour obtenir les résultats attendus del’apprentissage. Ainsi, si l’on utilise l’approche de Freire (1990), une

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La planification des programmes d’alphabétisationdes adultes centrés sur les élèves

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des méthodes d’enseignement pourra comporter un dialogue entreles élèves, facilité par l’enseignant, sur un centre d’intérêt économique,social ou politique qui aura été défini par les élèves eux-mêmes.

Cette distinction entre les buts éducatifs, le programme d’étudeset la méthode d’enseignement permet de mieux exposer leurs fonc-tions respectives ; cependant, dans la pratique, la séparation entreces trois notions est généralement moins nette. Les buts éducatifsinfluent sur la conception du programme d’études, qui influe à sontour sur les décisions relatives à la méthode d’enseignement qui serautilisée.

L’approche des programmes d’études et des méthodes d’ensei-gnement adoptées par ceux qui dispensent l’alphabétisation estinfluencée par leur propre manière de concevoir ce que l’on nomme« alphabétisation ». D’un côté, certains considèrent qu’il s’agit d’unetechnique que les personnes alphabétisées utilisent à leurs fins per-sonnelles. De ce point de vue, devenir alphabète est un processuséducatif, mais non nécessairement politique. Les programmes d’étu-des et les méthodes d’enseignement sont censés aider les élèvesadultes à acquérir progressivement les compétences techniques etles comportements que les alphabétiseurs considèrent commeessentiels pour écrire et lire couramment. On part du principe quelorsqu’ils auront acquis les compétences techniques essentielles, lesélèves seront en mesure de les utiliser à leurs propres fins. D’unautre côté, une approche alternative de l’alphabétisation considèreque le processus par lequel les gens apprennent à lire, à écrire et àcalculer influe sur la manière dont ils utiliseront la lecture, l’écritureet le calcul dans leur existence. Ceux qui adoptent cette approchesoutiennent que le programme d’études et les méthodes d’enseigne-ment doivent s’enraciner dans le contexte social des élèves et lesencourager d’emblée à réfléchir sur la manière dont ils pourront uti-liser leur instruction pour résoudre les problèmes qui les concernentet atteindre leurs buts personnels. Par exemple, les programmes d’étu-des et les méthodes d’enseignement destinés à aider les élèves adultesà améliorer leur potentiel de rémunération doivent être différents deceux destinés à les aider à accéder aux livres sacrés de leur religion ouà faire connaître plus efficacement les besoins de leur communautéaux agences gouvernementales.

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Les stratégies d’exécution etd’entretien des programmes

Planifier l’élaboration des programmes d’études. S’iln’existe pas suffisamment de spécialistes pour préparer un programmed’études pour chaque groupe d’élèves (ruraux et urbains, hommes etfemmes, ceux qui sont intéressés par l’utilisation de l’éducation pourcommuniquer avec leur famille et ceux qui désirent établir une coo-pérative commerciale), des schémas de programmes d’études conçusaux niveaux infranational, national et international peuvent être adap-tés aux buts éducatifs des différents groupes d’élèves. Un schéma deprogramme d’études est un modèle ou une esquisse qui aide les ensei-gnants à organiser leur programme d’études sur différents thèmes –par exemple la santé, la vie communautaire et la culture – qui sontpertinents pour l’ensemble des élèves adultes de la région. Les thèmeset le contenu du programme d’études peuvent ensuite être adaptés àchaque groupe d’élèves. L’Asia-Pacific Programme of Education forAll Training Material for Literacy Personnel de l’UNESCO (1989)est un exemple de ce type de schéma de programme d’études.

Le processus de conception, d’adaptation, d’utilisation et de ré-vision d’un schéma de programme d’études pour l’alphabétisationdes adultes peut comporter les étapes suivantes :

• Au cours d’ateliers nationaux ou infranationaux, des spécialistesdes programmes d’études et des enseignants expérimentés éla-borent un schéma de programme pour des cours d’alphabétisationdes adultes autour de thèmes généraux présentant un intérêt àl’échelle nationale ou régionale (amélioration de la vie familialeet communautaire, activités rémunératrices, santé, etc.) qui pour-ront être modifiés en fonction des buts éducatifs d’un groupeparticulier d’élèves.

• Dans le cadre d’un dialogue avec les futurs élèves, les élèves-alphabétiseurs des communautés locales déterminent les butséducatifs des élèves et les thèmes spécifiques qui présentent unintérêt pour eux.

• Au cours d’ateliers de formation avant l’emploi, les élèves-alphabétiseurs se familiarisent avec la finalité, le contenu et lesméthodes d’enseignement associés au schéma de programme

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La planification des programmes d’alphabétisationdes adultes centrés sur les élèves

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d’études, puis modifient celui-ci en fonction des thèmes définispar les élèves.

• Les élèves-alphabétiseurs s’exercent à enseigner les leçons qu’ilsont préparées aux autres participants. Cet entraînement leur per-met de se familiariser avec le programme d’études et de déceleret corriger les défauts que pourraient comporter leurs méthodesd’enseignement.

• Dans les communautés des élèves, le programme d’études esttesté dans des cours pilotes et révisé en fonction des nécessités.

Un programme d’alphabétisation organisé aux Pays-Bas fournitun exemple d’approche centrée sur l’élève au niveau du programmed’études et de l’enseignement. Dans ce programme, les tuteurs, aulieu de suivre un seul et unique manuel pour enseignant, ont collaboréavec les élèves adultes pour planifier des activités d’apprentissage enrelation directe avec les aptitudes de ces derniers et avec leur expé-rience quotidienne. Les activités fondées sur le thème de la santéconsistaient, par exemple, à apprendre à écrire des lettres adressées àune compagnie d’assurances ou à rédiger un récit sur une expériencevécue en milieu hospitalier (Bohnenn, 1987). Un programme d’alpha-bétisation des femmes en Afrique du Sud a utilisé la même approche :les activités d’enseignement étaient fondées sur des problèmes et desexpériences tirés de la vie quotidienne des femmes, et celles-ci étaientencouragées à jouer le rôle d’animatrices des cours, alors que les en-seignants assumaient celui de facilitateurs (Mlambo, 1987).

Dans ces deux cas, le contenu du programme d’études et desactivités d’apprentissage était spécifiquement adapté pour aider lesélèves à atteindre leurs buts éducatifs personnels et à renforcer leurconfiance dans leurs propres capacités. Cette approche présente unautre avantage : les élèves peuvent appliquer immédiatement leursacquisitions dans leur vie quotidienne. Un de ses inconvénients estque, dans la mesure où les périodes de cours ne sont pas très structu-rées, les enseignants doivent se montrer habiles à favoriser les débatsentre les élèves. Les enseignants qui n’ont pas cette aptitude risquentde revenir à une méthode d’enseignement axée sur le cours magistral,qui laisse peu de place au dialogue et réaffirme que la connaissance

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Les stratégies d’exécution etd’entretien des programmes

appartient exclusivement à l’enseignant, responsable de sa transmis-sion aux élèves. Une fois encore, cette perspective souligne combienil est important que la formation dispensée avant le service et en coursde service suive scrupuleusement la méthode d’enseignement fondéesur la fonction d’« enseignant-facilitateur » et fournisse à ses bénéfi-ciaires de multiples occasions de s’exercer au rôle de facilitateurs.

Stratégie 5. La conception et la production du matérielde lecture

Le matériel de lecture des élèves adultes est fondé, comme leprogramme d’études et les méthodes d’enseignement utilisés dansleurs cours, sur les buts éducatifs qu’ils ont eux-mêmes définis.Comme nous l’avons déjà observé, les adultes n’apprennent généra-lement pas à lire parce que quelqu’un leur a dit qu’ils devaient lefaire. Ils le font parce qu’ils ont certains buts personnels et parcequ’ils considèrent que l’alphabétisation les aidera à atteindre ces buts.Si elle leur est effectivement utile, ils continueront de l’utiliser commeune ressource. Dans le cas contraire, il est probable qu’ils s’en dé-sintéresseront et qu’ils finiront par perdre toutes les aptitudes à lalecture et à l’écriture qu’ils avaient acquises. Malheureusement, cepoint est souvent négligé par les planificateurs, que ce soit au niveauinternational ou aux niveaux national, infranational et local. Un fac-teur qui contribue couramment à la médiocrité du taux de survie àlong terme des programmes d’alphabétisation réside dans le fait queles planificateurs n’ont pas pris en compte la nécessité permanentede disposer d’une certaine diversité de matériel de lecture, intéres-sant et approprié, dans la/les langue(s) des lecteurs. Pour quel’alphabétisation soit durable, il est essentiel que les infrastructuresde la conception de la documentation (rédaction, illustration et pré-paration pour l’impression de livres, de jeux, d’affiches, etc.) et de saproduction (impression ou duplication du matériel de lecture à l’aidede l’impression offset, de la photocopieuse, du duplicateur ou de lasérigraphie) soient en état de se maintenir de manière autonome.

On peut distinguer quatre types généraux de matériel de lecturesur la base des quatre stades généraux d’alphabétisation décrits auchapitre II :

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La planification des programmes d’alphabétisationdes adultes centrés sur les élèves

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• Le matériel qui sert à la présentation du processus de lecture.Le matériel de lecture destiné aux cours d’alphabétisation initialeaide les nouveaux lecteurs à se familiariser avec l’écrit imprimé età expérimenter l’aide que l’alphabétisation peut leur apporter pouratteindre leurs buts éducatifs. Les récits relatifs à des expérien-ces vécues et à des thèmes familiers (selon le principe consistantà aller du connu vers l’inconnu) pourront être limités en longueuret en complexité, mais sans aller jusqu’à rendre la langue emprun-tée et artificielle. Les documents fonctionnels tels que lesbordereaux bancaires de dépôt et de retrait ou les formulaires decommandes commerciales peuvent également être présentés àce stade, si ces matériels sont en rapport avec les buts éducatifsdes élèves, s’ils sont rédigés dans une langue qu’ils comprennent,et enfin si les élèves sont déjà familiarisés avec le contexte danslequel ce matériel est utilisé.

• Le matériel qui aide les élèves à se perfectionner. A ce stade,la raison d’être du matériel utilisé est d’aider les élèves à utiliserles médias imprimés avec davantage d’assurance et de les inci-ter à recourir plus largement à la lecture et à l’écriture pourrépondre à leurs besoins quotidiens et à participer activement auprocessus de développement. Des idées nouvelles sont présen-tées au fur et à mesure que s’accroissent la longueur et lacomplexité linguistique de ce matériel.

• Le matériel qui aide les gens à opérer le transfert de la lec-ture et de l’écriture de leur première à leur deuxième (outroisième) langue. A ce stade, le matériel utilisé est conçu àpartir du principe selon lequel les lecteurs parlent et compren-nent déjà cette deuxième langue. Ici, les lecteurs ont besoin dedictionnaires, de recueils d’expressions, de récits légendaires,de chansons, de poésie et de récits dans leurs première etdeuxième langues.

• Le matériel destiné à l’éducation permanente. Une fois qu’ilssont capables de s’exprimer couramment dans leurs langues par-lées, les élèves adultes sont en mesure d’utiliser le texte imprimépour une multitude d’usages qui imposent d’avoir accès à une

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Les stratégies d’exécution etd’entretien des programmes

documentation de plus en plus diversifiée. Malheureusement, c’està ce stade que le système cesse souvent de fonctionner, notam-ment dans les groupes linguistiques minoritaires dépourvus d’unelongue tradition écrite. Pour répondre aux besoins de ce public delecteurs, il est essentiel de planifier des infrastructures de productionde documentation écrite, qui continueront à fournir aux lecteursun matériel de lecture pertinent et stimulant.

On a souvent tendance, dans la production de matériel destiné àdes programmes d’alphabétisation des adultes et notamment celuiqui est lancé et contrôlé de façon centralisée, à se concentrer sur lesthèmes fonctionnels (tels que la santé, l’agriculture ou l’environne-ment) ou sur des thèmes susceptibles de renforcer le sens civique etl’unité nationale, car ceux-ci sont considérés comme importants pourles planificateurs au niveau central. Cependant, en tant qu’individusvivant dans une communauté, les élèves ont d’autres occasions delire en dehors de leurs besoins fonctionnels et civiques. Les modesd’emploi des engrais et autres conseils aux agriculteurs peuvent cons-tituer une information pratique importante, mais si le matériel de lecturequi est mis à leur disposition se limite à cela, il est peu probable queles nouveaux élèves acquièrent une habitude durable de la lecture.La planification de la production de matériel de lecture exige doncque l’on prenne en compte la diversité des centres d’intérêt culturels,sociaux, spirituels et politiques du lecteur. Le matériel créé aux ni-veaux international et national sur des thèmes d’intérêt général peutêtre complété par du matériel conçu et produit aux niveauxinfranational et local sur des thèmes d’intérêt local. Le tableau 2 ci-après présente plusieurs types de matériel qui peuvent être élaborésà l’usage des élèves adultes.

La conception et la production de matériel de lecture destiné àdes élèves adultes qui vivent dans des contextes divers et parlent deslangues diverses est une tâche ardue ; mais les expériences vécuesdans plusieurs pays indiquent qu’elle est réalisable (Bohnenn, 1987 ;Gouvernement du Liberia, 1987 ; Malone, 1989 ; Wendell, 1982). Encomplément du matériel produit dans des services de production cen-traux, des technologies diverses permettent aux communautés deproduire leur propre matériel de lecture. Les programmes de publica-

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La planification des programmes d’alphabétisationdes adultes centrés sur les élèves

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Tableau 2. Les différents types de matériel de lecture à l’usagedes élèves adultes

Livres et brochures Autres matériels imprimés

Produits àl’extérieur de lazone locale ettraduits ou

adaptés selon lesbesoins pour uneutilisation locale

• posters• jeux• bulletins• journaux• calendriers• graphiques• cartes• documentsfonctionnels(relevés decomptesbancaires, etc.)

Produits locale-ment et en

relation avec lecontexte local

• posters• jeux• bulletins• calendriers

Produits àl’extérieur de lazone locale ettraduits ou

adaptés selon lesbesoins pour uneutilisation locale

• information(santé, agricul-ture, etc.)• textes histori-ques et autresdocumentsfavorisant uneprise deconsciencecivique• biographies degrandes figuresnationales• textes sacrés• récits concer-nant desgroupesculturelsdifférents àl’intérieur et àl’extérieur dupays• récits dis-trayants

Produits locale-ment et en

relation avec lecontexte local

• biographies• autobiogra-phies• textes histori-ques etlégendes• récits dis-trayants sur desactivités et desexpériencesfamilières• informationfonctionnelleintroduite dansdes récitsconcernant desgens, des lieux,des activités,des problèmes,etc., familiers àl’élève• chansons etpoésie

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Les stratégies d’exécution etd’entretien des programmes

tion informatisée font de chaque ordinateur un centre de productionpotentiel. Les photocopieuses permettent de reproduire du matérielde lecture à un nombre d’exemplaires limité. Dans les régions où latechnologie électronique n’est pas disponible, on peut utiliser les du-plicateurs traditionnels et la sérigraphie pour produire des livres, desaffiches, des bulletins et d’autres matériels afin de répondre aux be-soins des nouveaux élèves en matière de lecture.

Les approches de la conception et de la production dematériel de lecture. Quatre approches de la conception et de laproduction de matériel de lecture varié peuvent être examinées, enallant de la plus simple à la plus complexe : (1) ces matériels peuventêtre composés par les élèves eux-mêmes ; (2) ils peuvent être com-posés par d’autres membres de la communauté ; (3) des prototypesde matériel de lecture conçus à l’extérieur de la communauté peu-vent être modifiés et/ou traduits pour s’intégrer dans le contexte local ;(4) enfin, le matériel d’intérêt général peut être produit à l’écheloncentral.

Les matériels composés par les élèves eux-mêmes. Le maté-riel de lecture peut trouver son origine dans les discussions portant,pendant les cours, sur des questions qui concernent les élèves adul-tes. Au cours de ce processus, les élèves discutent d’un thèmeapproprié, puis ils composent leur propre récit, poème, chanson, etc.,sur ce thème. Le groupe dicte cette composition à l’enseignant, quil’écrit sur un tableau ou sur une affiche afin de l’utiliser dans la leçonde lecture du jour. Si les élèves décident qu’elle mérite d’être con-servée, la composition peut devenir l’objet d’une brochure ou d’uneaffiche et être illustrée par les élèves. Ainsi, dans des programmesd’alphabétisation organisés aux Fidji, aux Iles Salomon et dans d’autresîles du Pacifique, les élèves adultes ont confectionné leurs propresaffiches concernant l’assainissement, la nutrition, les problèmes sani-taires et la planification familiale, puis ils ont produit leurs propreslivres, bandes dessinées et feuilles d’information (Jones, 1991). Lematériel de lecture produit par les élèves et présentant un intérêt plusgénéral peut être reproduit et distribué à d’autres communautés ouencore, dans les contextes de multilinguisme, traduit dans d’autreslangues.

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La planification des programmes d’alphabétisationdes adultes centrés sur les élèves

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Pour la réussite de ce processus, l’enseignant doit être préparéà poser des questions qui suscitent le dialogue et à encourager lesmembres du groupe à participer aux débats. Ce processus a pouravantages de garantir un matériel adapté aux élèves, d’assurer unebonne rentabilité pour un nombre limité d’élèves si l’on utilise la tech-nologie locale, et enfin de souligner, à l’intention des nouveaux lecteurs,le fait que leurs idées puissent être traduites par écrit pour être pré-servées et communiquées à d’autres personnes.

Le matériel original conçu par d’autres membres de lacommunauté. Les alphabétiseurs et d’autres membres instruits de lapopulation locale peuvent concevoir du matériel de lecture sur desthèmes intéressant les élèves adultes de leur communauté. Le matérielconçu sur le plan local à l’usage des nouveaux lecteurs pourratransmettre des informations fonctionnelles sous la forme de récitsmettant en scène des activités et des personnes familières (un récitpourra évoquer, par exemple, un problème sanitaire rencontré par lacommunauté, ou une personne qui, au niveau local, a surmonté unedifficulté courante). On pourra aussi, si cela est opportun, mettre parécrit des récits traditionnels, des chansons, des poèmes et des adagesreligieux recueillis sous forme orale.

Comme exemple de cette approche de la production de matérielde lecture, on peut citer un programme d’alphabétisation en languematernelle organisé en Papouasie-Nouvelle-Guinée sur une basecommunautaire. On a présenté aux jeunes gens de la communautéqui avaient appris à lire dans la langue nationale la forme écrite deleur langue et les techniques de base d’une écriture créative. Ils ontécrit des légendes locales et des récits sur les événements et lesactivités qui étaient familiers à la communauté. Ceux qui avaient desaptitudes artistiques ont illustré les brochures. Une liste de contrôlepour la préparation des textes a été créée pour aider chacun à prépa-rer les textes des autres. Les jeunes gens ont ensuite appris àtransférer leurs récits et leurs illustrations sur des stencils et à lesimprimer en utilisant un duplicateur manuel et du matériel de sérigra-phie. En neuf mois, plus de 120 brochures différentes ont été produites.Elles ont ensuite été testées pendant deux ans dans la classe et dansl’ensemble de la communauté, après quoi les plus réussies ont été

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Les stratégies d’exécution etd’entretien des programmes

réunies sous la forme d’un ensemble de dix-sept livres de lecture de50 pages et imprimés en offset.

Un avantage de cette approche fondée sur la communauté estque le matériel de lecture évoque des thèmes familiers aux lecteurset est écrit dans une langue qu’ils comprennent. Ce matériel peutêtre produit pour un coût relativement bas et en quantités limitées.Un des inconvénients est que le processus nécessite l’accès à desfournitures et à une technologie qui ne sont pas disponibles dans tousles contextes. Un autre inconvénient réside dans le fait que le maté-riel produit à l’aide de la technologie locale (par exemple la sérigraphieet les duplicateurs manuels) peut être moins attrayant pour les lec-teurs que le matériel imprimé en offset. Il peut donc être nécessaire,à un moment donné, de réunir et de réimprimer les meilleures pro-ductions locales en utilisant un mode de présentation plus élaboré surle plan technologique.

Les prototypes de matériel de lecture modifiés et/ou traduitspour être intégrés dans le contexte local. Une troisième manièred’accroître la quantité et la diversité des matériels de lecture desti-nés aux adultes consiste à modifier et/ou à traduire des prototypes dematériel de lecture produits au niveau central afin de les adapter auxcontextes linguistique et culturel locaux. Une des applications de cetteméthode (adaptée de Trainum, 1989) présente les composantes sui-vantes :

(1) Des quantités limitées de brochures prototypes rédigées dans unelangue nationale ou régionale, et portant sur des thèmes divers,sont produites sur un site central en utilisant des programmes depublication assistée par ordinateur.

(2) Une liste de ces thèmes est distribuée aux alphabétiseurs de lacommunauté, qui sélectionnent ceux qui intéresseront les lecteurslocaux. Les brochures prototypes correspondantes sont alors en-voyées à la communauté, ainsi que les fournitures nécessaires àla production de matériel de lecture après traduction (voir ci-dessous).

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La planification des programmes d’alphabétisationdes adultes centrés sur les élèves

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(3) Des écrivains locaux apprennent les principes et les méthodespermettant de modifier et/ou de traduire des textes à partir deprototypes afin de les adapter aux lecteurs adultes de leur com-munauté. Une fois que les modifications et/ou les traductions ontété approuvées, la production du matériel de lecture s’effectueen utilisant une des méthodes suivantes :

• Si les participants à l’atelier disposent d’ordinateurs, les illus-trations et la mise en page (avec des emplacements en blancréservés pour les textes) de chacun des livres prototypes sontenregistrées sur disquettes et envoyées sur le site de l’atelier.Le texte traduit est inséré aux endroits réservés appropriés etles pages sont imprimées et reproduites.

• Si l’on ne dispose pas d’ordinateurs sur le site de l’atelier, unesolution alternative à cette méthode peut consister à dactylogra-phier ou à écrire manuellement le texte traduit et à l’envoyer surle site central de production, où il sera inséré aux endroits appro-priés. Les livres traduits sont ensuite imprimés, reproduits etréexpédiés à la communauté.

• Une seconde solution alternative peut être utilisée si l’on nedispose pas d’ordinateurs au niveau local. Dans ce cas, les pagesdu livre prototype, avec ses illustrations, son foliotage et sesemplacements réservés pour les textes, sont imprimées sur desstencils (en utilisant une imprimante matricielle) sur le site deproduction central. Les stencils imprimés correspondant auxpages de chacun des livres prototypes sont envoyés à l’atelier.Une fois que le texte traduit a été vérifié et approuvé, il estdactylographié ou écrit manuellement dans les emplacementsappropriés sur chaque stencil. On utilise ensuite du matériel desérigraphie ou des duplicateurs manuels pour produire le nombresouhaité d’exemplaires du nouveau livre.

Un des avantages de cette approche est qu’elle rend possible laproduction de quantités limitées de matériels divers rédigés dans deslangues et des dialectes multiples – considération qui a son impor-tance pour des gouvernements qui s’efforcent de répondre aux besoinsde leurs minorités linguistiques en matière d’éducation initiale. Un

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Les stratégies d’exécution etd’entretien des programmes

problème potentiel inhérent à cette approche est que des traducteursinexpérimentés risquent de traduire les textes littéralement, ce quiengendrera la confusion et/ou un langage emprunté que les nouveauxlecteurs comprendront difficilement. Un autre problème potentielréside dans le fait qu’une compréhension inadéquate du texte origi-nal – par exemple une recette de fluide de réhydratation pour lesnourrissons atteints de diarrhée – peut donner lieu à une traductiondangereusement inexacte. Des matériels de lecture clairement rédi-gés, une bonne compréhension des principes et des techniques detraduction et un contrôle consciencieux peuvent aider à surmonterces difficultés potentielles.

Le matériel de lecture portant sur des thèmes d’intérêtgénéral et produit au niveau central dans une langue commune.Bien que leur premier matériel de lecture soit centré sur des thèmesqui leur sont familiers, la plupart des lecteurs adultes souhaiterontaussi accéder à l’information et aux idées concernant le mondeextérieur à leur communauté. En fait, si le contenu de leur bibliothèquese limitait à ce qu’ils connaissaient déjà avant de commencer à suivredes cours d’alphabétisation, ils n’auraient guère de raisons d’apprendreà lire. La quatrième approche consiste donc à former des personnesappartenant à des agences gouvernementales et non gouverne-mentales à la production de matériel de lecture à plusieurs niveaux,en relation avec leurs secteurs de compétences particuliers. AuxFidji, par exemple, des affiches rédigées en lingua franca et dansdes langues locales par diverses agences régionales, telles quel’Organisation mondiale de la santé, le South Pacific RegionalEnvironment Programme et le National Diabetes Centre, ont étédistribuées à des cours d’alphabétisation des adultes, pour stimulerles débats sur des thèmes en rapport avec la santé et l’environnement(Jones, 1991). Dans l’idéal, le matériel fonctionnel produit au niveaucentral devrait être conçu en collaboration avec les communautés delecteurs. Au Liberia, un séminaire de production de matériel de lecturea été conduit en 1987 à l’intention des représentants de onze ministèreset ONG libériens. Les participants étaient divisés en quatre groupes,dont chacun était responsable de la conception de matérield’alphabétisation des adultes, en relation avec l’un des quatre thèmesprincipaux : l’agriculture, la culture, la santé et les femmes dans ledéveloppement. Afin de déterminer, dans chaque catégorie, les

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La planification des programmes d’alphabétisationdes adultes centrés sur les élèves

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thèmes spécifiques susceptibles d’intéresser les nouveaux lecteurs,l’atelier s’est tenu dans une zone rurale où avaient lieu des coursd’alphabétisation. Chacun des quatre groupes de participants arencontré les superviseurs, les organisateurs et les alphabétiseurslocaux afin de s’informer sur l’environnement dans lequel sedéroulaient les programmes d’alphabétisation de la communauté etd’établir les profils des élèves adultes. Le matériel qui a été produitpar chacun des quatre groupes était directement fondé surl’information recueillie à l’occasion de ces visites dans des villages(Gouvernement du Liberia, 1987).

Un des avantages de cette approche centralisée est qu’elle peutmultiplier la diversité et la quantité du matériel de lecture mis à la dis-position des élèves adultes, une fois qu’ils ont acquis les aptitudes etl’assurance nécessaires pour aborder des idées et des informationsnouvelles, écrites dans des styles qui leur sont moins familiers et éven-tuellement dans une deuxième langue. Un de ses inconvénientspotentiels est que le matériel à production centralisée peut exiger unniveau d’aptitude à la lecture courante et de maîtrise d’une deuxièmelangue que les nouveaux lecteurs n’ont pas encore acquis. Le premierde ces problèmes peut être surmonté si le matériel de lecture est classéselon sa complexité et son contenu, en allant des textes courts et sim-ples aux textes plus longs et plus difficiles. Le second problème potentielmontre que les cours d’alphabétisation transitionnelle doivent être par-tie intégrante du plan directeur du programme.

Stratégie 6. L’évaluation

L’évaluation est le moyen par lequel les concepteurs, les prati-ciens et les bénéficiaires des programmes d’alphabétisation des adultescentrés sur les élèves évaluent le processus de mise en œuvre de cesprogrammes et la mesure dans laquelle ils ont atteint leurs objectifs àcourt terme et leurs buts à long terme. Elle possède une autre fonc-tion tout aussi importante : elle permet de déterminer les raisons pourlesquelles le programme a atteint ou non ses buts et ses objectifs. Ontrouvera ci-dessous une liste des motivations générales d’une éva-luation régulière des programmes d’alphabétisation, suivies (entreparenthèses) d’exemples des questions-types qui pourront être po-sées pour susciter de l’information :

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Les stratégies d’exécution etd’entretien des programmes

• Prendre la mesure de ce qui a été réalisé à chaque stade dela mise en œuvre du programme par rapport aux objectifsétablis pour ce même stade. (Si l’un des objectifs d’une forma-tion organisée au niveau de la province était que vingt formateurssoient entièrement préparés à conduire des cours de formation àla fin de la première année de mise en œuvre, combien sont-ils àavoir effectivement été préparés et comment assument-ils leurrôle ? Si l’un des objectifs d’un programme communautaire étaitde disposer, au bout de six mois, de dix brochures traitant dequestions sanitaires et rédigées dans la langue locale, combiende ces brochures ont effectivement été produites ?)

• Déterminer si le programme répond aux buts éducatifs desélèves à court et à long termes. (Si les élèves ont déclaré qu’aubout de six mois, ils désiraient être capables de gérer leurs opéra-tions bancaires de manière indépendante, comment définissent-ilsles progrès qu’ils ont réalisés à cet égard au terme de cette pé-riode ? Quels sont les problèmes qu’ils rencontrent encore ?)

• Apprendre à connaître les problèmes existants afin de con-cevoir des solutions appropriées. (Quels sont les problèmesqui font obstacle à la coopération entre les agences gouverne-mentales et les ONG, aux niveaux national ou infranational, etcomment ces relations peuvent-elles être améliorées ? Au ni-veau local, pourquoi certains enseignants se tournent-ils versl’utilisation, avec des adultes, de la même méthode d’enseigne-ment que celle qu’ils ont connue à l’école dans leur enfance etque peut-on faire pour les aider à surmonter cette tendance ?)

• Déterminer les buts et les objectifs qu’il est nécessaire deréviser. (Quel était le degré de réalisme de l’objectif de forma-tion des formateurs, et que faut-il changer ? Les buts à longterme établis par les organisateurs du programme intègrent-ilsencore les buts éducatifs des élèves eux-mêmes ? Sinon, com-ment peut-on concilier les uns et les autres ?)

• Apprécier les résultats du programme par rapport à ses coûts.(Si la somme X a été dépensée pour la tenue d’un atelier nationaldestiné à des participants venus de tout le pays, les résultats

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La planification des programmes d’alphabétisationdes adultes centrés sur les élèves

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justifient-ils cette dépense, ou bien les fonds destinés à la forma-tion seraient-ils utilisés plus efficacement si l’on organisait desateliers au niveau de la circonscription ? Est-il rentable de pro-duire et de distribuer du matériel de lecture à partir d’un site central,ou serait-il préférable d’établir des services de production au ni-veau de la région, de la province ou de la circonscription ?)

• Fournir de l’information aux organismes de financement etaux autres intervenants. (Si un organisme de financement afourni une subvention pour la formation à la production de maté-riels d’enseignement, combien de matériels a-t-on effectivementproduits et comment sont-ils reçus par les élèves adultes ?)

• Acquérir des connaissances approfondies qui pourront êtrepartagées avec d’autres. (Si un Etat ou une province voisinsdésirent utiliser ce programme comme modèle, quelles sont, parmiles leçons qui en découlent, celles qui les aideront à planifier leurnouveau programme ?)

• Déterminer la qualité du matériel qui a été produit. (Les su-jets sont-ils appropriés au public prévu ? Le contenu lesintéresse-t-il ? La formulation utilisée est-elle adaptée à leur ni-veau de lecture ? L’information est-elle présentée de manièreclaire et intelligible ? Ce matériel est-il utilisé ?)

Les évaluateurs internes et externes. L’évaluation desprogrammes d’alphabétisation à chaque niveau de la mise en œuvrepeut faire intervenir des évaluateurs internes et externes. Lesévaluateurs externes apportent dans ce processus leurs compétencesthéoriques et techniques, leur optique d’observateurs extérieurs et, ilfaut le souhaiter, une certaine objectivité. Les évaluateurs internessont familiarisés avec le contexte dans lequel se déroule leprogramme ; ils comprennent les relations existantes et la structuredu système décisionnel ; ils connaissent les valeurs des intervenantslocaux et les espoirs qu’ils ont mis dans le programme ; enfin, ils sontaptes à interpréter les attitudes et le comportement des gens qu’ilsinterrogent.

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Les stratégies d’exécution etd’entretien des programmes

Les types d’évaluation. Les évaluations fournissent des in-formations qui peuvent aider à réaliser et à gérer un programmed’alphabétisation (évaluations formatives) et des informations sur l’in-cidence à long terme du programme sur les individus, les groupes, lescommunautés, les institutions et la société en général (évaluationssommatives). Les évaluations formatives sont généralement con-duites par des évaluateurs internes – ceux qui participent à l’exécutionet à la gestion du programme, y compris les élèves. Elles ont lieu àintervalles réguliers pendant toute la durée du programme, afin deproduire une information en relation avec les questions générales sui-vantes :

• Dans quelle mesure a-t-on progressé vers les buts et les objectifsà court et à long termes du programme ?

• Quelle est l’efficacité des infrastructures qui ont été établies pourla promotion, le recrutement et la formation, pour la conceptiondes programmes d’études, et pour la conception et la productiondu matériel de lecture ?

• Quelles difficultés a-t-on décelées dans le programme ?

• Quels sont les points forts du programme ?

• Comment le plan directeur du programme peut-il être modifiépour surmonter ses difficultés et s’appuyer sur ses points forts ?

Les évaluations sommatives sont conduites à la fin d’unprogramme ou après que les élèves ont achevé leur coursd’alphabétisation. Si des évaluateurs internes peuvent aider à planifieret à conduire une évaluation sommative et participer à l’interprétationde ses conclusions, les évaluateurs principaux sont généralement despersonnes venues de l’extérieur qui n’ont pas participé à laplanification ou à l’exécution du programme et pour lesquelles lesrésultats de l’évaluation ne devraient pas constituer un enjeu. Lesévaluations sommatives fournissent une information en relation avecles questions générales suivantes :

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• Dans quelle mesure les buts à long terme des organisateurs duprogramme et les buts particuliers des élèves coïncident-ils ?

• Comment aurait-on pu atteindre les mêmes buts à un moindre coût ?

• Quels ont été les résultats qui n’avaient pas été prévus ?

• Parmi les leçons que les participants ont tirées de cette expé-rience, quelles sont celles qui les aideront à maintenir et à élargirle programme ou qui seront bénéfiques à d’autres dans la plani-fication de leurs propres programmes ?

L’objet de l’évaluation. Les évaluations peuvent être aussibien qualitatives que quantitatives. Les évaluations qualitatives ré-pondent à la question : « Quel a été le degré de réussite de nosactivités ? » Elles décrivent :

• L’impact du programme d’alphabétisation sur la vie des élè-ves. (Comment utilisent-ils ce qu’ils ont appris ? Commentqualifient-ils la pertinence de ce qu’ils apprennent dans les coursou de ce qu’ils lisent dans les livres ? Quel est leur sentiment surleur aptitude à atteindre leurs buts ? Comment le programme a-t-il influencé leurs attitudes concernant leur langue et leur culture,ou leur avenir dans un contexte social plus vaste ?)

• Le comportement et les attitudes des enseignants. (Quels ty-pes de relations les enseignants ont-ils dans leurs cours avec lesélèves adultes ? Comment les enseignants qualifient-ils leur rôlevis-à-vis des élèves ? Comment les élèves qualifient-ils le rôledes enseignants ? Comment la participation au programme d’al-phabétisation a-t-elle influé sur l’idée que les enseignants sefaisaient d’eux-mêmes ? Quelles incidences a-t-elle eu sur leursbuts personnels et professionnels ?)

• La qualité des ressources. (Comment les personnes impliquéesdans la mise en œuvre et la gestion qualifient-elles les ressour-ces dont elles disposent ? Comment qualifient-elles les initiativesdes différentes entités impliquées dans le programme ? Comment

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Les stratégies d’exécution etd’entretien des programmes

les élèves adultes qualifient-ils le matériel de lecture dont ils dis-posent ?)

Alors que les évaluations qualitatives répondent à la question :« Quel a été le degré de réussite de nos activités ? », les évaluationsquantitatives répondent à la question : « Quels ont été, en termeschiffrés, les résultats de nos activités? » Elles fournissent des infor-mations sur :

• Les élèves, les enseignants, les superviseurs et les cours.(Combien de personnes étaient inscrites aux cours ? Parmi les parti-cipants, quel est le pourcentage de ceux qui ont achevé le programme ?Combien d’enseignants et de superviseurs ont été formés ? Combiend’entre eux occupent encore leur emploi après un certain laps detemps ?)

• Les chiffres de production et d’utilisation du matériel. (Com-bien de brochures relatives aux questions sanitaires – ou àl’agriculture, etc. – ont-elles été produites à l’usage des nouveauxlecteurs ? Combien de prototypes de matériel de lecture a-t-onproduits? Combien d’enseignants ont-ils réclamé la série consa-crée aux projets rémunérateurs, ou à la conscience civique, etc. ?)

• Les aptitudes de l’élève. (Quels ont été les résultats obtenus parles élèves dans les tests de lecture, d’écriture et de calcul à la finde la période d’enseignement ?)

• Les dépenses engagées par rapport au nombre d’enseignantsformés, aux chiffres de production de matériel, etc. (Quel aété le budget de la formation de l’année antérieure ? Quelles ontété les autres sources de financement ? Quel a été le coût totalde la formation ?)

Bien que les évaluations qualitatives et quantitatives soient icidécrites séparément, elles entretiennent généralement, dans la prati-que réelle, des relations plus étroites, et les unes comme les autressont nécessaires pour comprendre parfaitement un programmed’alphabétisation des adultes. Par exemple, outre l’information

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concernant les résultats des tests subis par les élèves, les organisa-teurs du programme pourront également souhaiter connaître lamanière dont les élèves adultes définissent l’incidence d’un pro-gramme d’alphabétisation sur leur existence. Les gestionnaires duprogramme pourront souhaiter évaluer la qualité des textes de lec-ture qui auront été produits, mais ils auront aussi besoin d’informationssur le nombre d’exemplaires de chacun des titres produits, ainsi quesur leurs coûts de production. Ils pourront souhaiter savoir combiend’enseignants ont été formés sur une période donnée, mais aussicomment les enseignants ont appliqué la méthode d’enseignementqu’ils avaient apprise au cours des ateliers de formation. Pour répon-dre à ces besoins d’information divers, plusieurs types d’instrumentspourront être utilisés dans le cadre d’un seul projet d’évaluation : lesentretiens, les questionnaires, l’observation, les tests, l’auto-évalua-tion (écrite ou orale), les enquêtes et l’étude de documents écrits(comptes rendus, procès verbaux, etc.).

La planification de l’évaluation. Elle implique l’examen dé-taillé et la discussion de plusieurs questions préliminaires relativesaux points suivants :

• Pourquoi l’évaluation est-elle nécessaire ? A quelles fins spé-cifiques servira-t-elle? A qui bénéficiera-t-elle ?

• Qui décidera des domaines soumis à l’évaluation et des ques-tions qui seront posées ? Prévoit-on une participation desbailleurs de fonds ? Des planificateurs gouvernementaux ? DesONG impliquées dans le programme ? Des enseignants ? Desélèves ? Des communautés ? De l’ensemble des intervenants ?

• Quels seront les domaines soumis à l’évaluation ? Les métho-des de formation ? Le comportement des enseignants ? Le matérielde lecture ? L’attitude des élèves ? Leur niveau en lecture ?

• Quand les évaluations auront-elles lieu ? Le programme fera-t-ill’objet d’une évaluation à son début, afin de savoir s’il existe unconsensus sur ses buts et ses objectifs ? Sera-t-il évalué à la finde chaque année de sa mise en œuvre, afin de vérifier comment ilatteint les objectifs ? Sera-t-il évalué cinq ans après que les élèves

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Les stratégies d’exécution etd’entretien des programmes

adultes auront achevé leurs cours d’alphabétisation, afin de dé-terminer l’incidence à long terme du programme sur leurexistence ?

• Comment les résultats de l’évaluation seront-ils utilisés ? Leplan directeur du programme existant sera-t-il révisé pour pren-dre en compte les résultats de l’évaluation ? Si oui, qui participeraà l’interprétation de l’information qui guidera le processus derévision ? Les résultats seront-ils publiés ? Si oui, qui participeraà la préparation du rapport ?

Bien que l’on admette généralement que les évaluations réguliè-res et continues sont essentielles pour la pérennité des programmesd’alphabétisation – comme de toute initiative pour le développement–, peu de plans directeurs (et de budgets) de programmes d’alphabé-tisation sont intégrés dans le processus d’exécution et de gestion. Parconséquent, des erreurs continuent d’être commises, des besoins de-meurent insatisfaits, et les espoirs et les rêves des bénéficiairespotentiels persistent à ne pas se réaliser. Les évaluations ne sont pasnécessairement coûteuses, surtout si l’on s’abstient de verser des ho-noraires importants aux experts extérieurs. Equiper les représentantsdes différents groupes d’intervenants pour qu’ils participent à l’éva-luation de leur programme est une décision rentable, ayant pour autreavantage, tout aussi important, de confirmer que le programme sou-mis à l’évaluation leur appartient réellement.

Résumé

Ce chapitre a examiné les six composantes d’une stratégie effi-cace de mise en œuvre d’un programme durable d’alphabétisationdes adultes centré sur les élèves. La recherche préliminaire fournitl’information sur laquelle est fondé le plan directeur du programme.La promotion a pour objet de mobiliser les ressources humaines,matérielles et financières qui seront nécessaires à l’exécution et àl’entretien du programme. Le recrutement et la formation sont né-cessaires pour définir les différents postes de travail dont on devradisposer pour entretenir le programme, établir les qualificationsnécessaires pour chacun de ces postes, et enfin désigner, recruter etformer les personnes qui pourront assumer ces rôles avec efficacité.

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La conception des programmes d’études est le processus qui con-siste à prendre connaissance des buts éducatifs des élèves, à définirles acquisitions qui leur permettront d’atteindre ces buts, et à conce-voir des méthodes d’enseignement et des activités d’apprentissagequi permettront ces acquisitions. La conception et la production dumatériel de lecture qui, dans sa diversité, permettra aux élèves d’at-teindre leurs buts éducatifs et les encouragera à considérer l’éducationcomme un processus permanent, doivent être planifiées. Enfin, l’éva-luation est nécessaire à l’appréciation continue des différentescomposantes du programme d’alphabétisation et de l’incidence glo-bale du programme sur la vie des élèves et des enseignants, et sur lasociété en général. Considérées conjointement, ces six composantesreprésentent une stratégie globale destinée à répondre à la question :« Comment arriver à ces objectifs à partir de la situation actuelle ? »Comme dans la plupart des plans à long terme, la qualité du pro-gramme dépendra de nombreux impondérables, notamment ladiversité des ressources humaines qui participeront à sa planifica-tion, à son exécution et à sa gestion, ou qui lui apporteront leur appui.Encourager, équiper et habiliter l’ensemble de ces participants seraun élément essentiel de la « réussite » à long terme du programme.

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IV. Les caractéristiques des programmesd’alphabétisation durables

Pourquoi un si grand nombre de programmes d’alphabétisation desadultes qui avaient démarré de manière si prometteuse n’ont-ils pasréussi à atteindre leurs buts ? Bien que chaque programme soit unique,une étude de la documentation appropriée révèle plusieurs caractéris-tiques générales de ces programmes qui n’ont pu se maintenir :• Leur direction manquait de fermeté.• Ils ne bénéficiaient pas du soutien convaincu et continu des in-

tervenants.• Les initiatives des entités qui les appuyaient étaient médiocre-

ment coordonnées.• Les enseignants ne disposaient pas d’une formation adéquate.• Les méthodes d’enseignement n’étaient pas appropriées.• L’offre de matériel de lecture pertinent et intéressant était ina-

déquate.• On n’avait pas établi d’infrastructures pour les différentes com-

posantes du programme.

A l’inverse, les programmes d’alphabétisation qui se sontmaintenus dans la durée et qui sont considérés comme des réussitespar ceux qui les planifient, les gèrent, les appuient et les évaluentprésentent un ensemble de caractéristiques différentes. La plusfondamentale de celles-ci – et qui est soulignée tout au long de cetouvrage – est que ces programmes sont appréciés par les personnesauxquelles ils sont censés être utiles : les élèves ont fait l’expériencede leurs avantages dans leur existence et participent activement àleur entretien et à leur amélioration. Les autres caractéristiques de

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ces programmes en relation avec leur durabilité sont l’utilisationjudicieuse des ressources humaines, les relations de coopération entreles entités qui les appuient, l’existence d’infrastructures qui ont étéétablies et institutionnalisées pour entretenir les différentes composantesdu programme, et les perspectives d’éducation permanente ouvertesaux élèves adultes. La suite de ce chapitre sera consacrée à l’examende ces quatre caractéristiques des programmes durables.

Caractéristique 1. L’utilisation judicieuse desressources humaines, matérielles et financières

Peu nombreux sont les gouvernements, les ONG, les organis-mes de financement ou les communautés locales qui ont les capacitésou la conviction nécessaires pour assumer l’entière responsabilité dufinancement d’un programme d’alphabétisation sur une période detemps prolongée. Les programmes ont plus de chances de durer quandils sont soutenus activement par des institutions diverses aux niveauxnational, infranational et local et lorsqu’ils utilisent judicieusement lesressources humaines, matérielles et financières fournies par ces en-tités.

La disponibilité de personnes convaincues et bien équipées cons-titue la ressource la plus importante pour la durabilité d’un programmed’alphabétisation, quel qu’il soit. Il est nécessaire de disposer de per-sonnes connaissant le contexte dans lequel intervient un programme,car elles permettront d’en établir les buts et les objectifs et participe-ront activement à la planification et à la prise de décisions en coursde programme. Elles seront responsables de l’exécution, de la ges-tion et de l’évaluation de leur programme, de la conception desprogrammes d’études et du matériel de lecture, ainsi que de l’ensei-gnement dispensé.

Le développement de ces ressources humaines (qui a été évoquédans le chapitre III) comporte le recrutement des meilleurs postulantspour chaque tâche et la mise à leur disposition de la formation et del’appui permanent dont ils ont besoin pour remplir efficacement leursfonctions. L’un des moyens par lesquels les organismes gouvernementauxet les ONG manifestent leur appui à un programme d’alphabétisation

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Les caractéristiques des programmesd’alphabétisation durables

consiste à mettre leur propre personnel à sa disposition, afin qu’il apporteson aide aux différentes composantes du programme. Par exemple, uninstitut pédagogique pourra fournir du personnel qui aidera à la formationde formateurs ; une ONG provinciale pourra désigner des membres deson personnel, qui aideront les communautés à établir leurs proprescentres de production de matériel ; les enseignants ou les dirigeantsreligieux locaux pourront offrir leur service pour enseigner dans descours d’alphabétisation des adultes. Le fait de détacher ou d’emprunterdu personnel provenant d’autres organismes présente l’avantaged’apporter des compétences particulières aux programmesd’alphabétisation tout en continuant d’être appuyé financièrement parl’organisme qui le délègue. Un inconvénient éventuel de cette méthodeest que si cet organisme vient à changer de priorités, s’il perd son proprefinancement ou quitte le secteur, le programme d’alphabétisation setrouvera privé de la direction dont il a besoin. Ainsi, dans l’idéal, lepersonnel détaché – notamment celui qui est affecté à des postes deresponsabilité – devrait former, dès son entrée en fonction, des personneshomologues qui pourraient assurer la relève.

Une autre possibilité de ressources en personnel est offerte par lesecteur du volontariat. Ainsi, l’extension des programmes d’alphabéti-sation à base communautaire au Ghana a été possible en dépit du faitque ces programmes n’avaient pas de sources de financement à longterme. Tous les enseignants et la plupart des superviseurs à tempspartiel étaient des volontaires qui recevaient un remboursement « in-formel » des communautés pour lesquelles ils travaillaient. Lefinancement extérieur limité qui était disponible fut utilisé pour uneformation approfondie et pour l’acquisition de matériel pédagogique(Hampton, 1994). Le programme national d’alphabétisation du Nica-ragua dépendait également d’enseignants volontaires qui recevaientun imperméable, des bottes, une lanterne, des fournitures d’enseigne-ment élémentaire et environ 15 $US par an en témoignage dereconnaissance pour la tâche qu’ils accomplissaient (Arnove, 1994).

Recourir à des travailleurs volontaires – notamment ceux quisont familiarisés avec le contexte socioculturel dans lequel ils tra-vaillent – a plusieurs avantages : ils apportent à leur tâche unemotivation particulière et sont, dans l’idéal, des membres estimés descommunautés qu’ils servent. En contrepartie, l’inconvénient poten-

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tiel est que le personnel volontaire ne possède pas toujours la qualifi-cation professionnelle des travailleurs détachés ou salariés. Il peutégalement être difficile aux volontaires, notamment dans les zonesles plus pauvres, de garder intact leur enthousiasme pour un pro-gramme s’ils ne reçoivent pas, sous une forme ou sous une autre,une rémunération pour leurs efforts.

Les ressources matérielles sont également nécessaires à ladurabilité des programmes. L’ingéniosité dans la détermination et l’uti-lisation de ces ressources peut permettre à un programme de survivreen dépit de problèmes financiers. Par exemple, quand les fonds quipermettraient la construction de nouveaux bâtiments font défaut à unprogramme, les cours, la production de matériel et les ateliers deformation d’enseignants peuvent être organisés dans des demeuresprivées, des lieux de culte, des salles de classe vides, et même sousdes arbres. Quand l’imprimerie offset et les ordinateurs ne sont pasdisponibles, les enseignants peuvent utiliser des duplicateurs manuelsou du matériel de sérigraphie pour produire leurs textes de lecture.Quand on ne dispose pas de papier neuf, on peut le remplacer, pourles cours et pour la production locale de livres, par le verso non im-primé des prospectus publicitaires et des feuilles pour imprimanteusagées. Les sacs en papier épais et le carton peuvent servir à fabri-quer les couvertures des livres produits au niveau local. Enfin, quandon ne dispose pas même de papier usagé, les élèves peuvent s’exer-cer à écrire sur de l’écorce, sur des feuilles de bananier, et mêmedans le sable ou dans la poussière. S’il est très improbable que lesprogrammes d’alphabétisation auxquels font défaut des éléments debase aussi essentiels que le papier, les crayons et les livres puissentse maintenir sur une longue période, la créativité dans la détermina-tion et l’utilisation des ressources disponibles peut les aider à traverserdes périodes de difficultés financières.

Tôt ou tard, bien entendu, des ressources financières serontégalement nécessaires pour qu’un programme se maintienne,notamment aux niveaux national et infranational. L’argent est nécessairepour conduire les cours de formation, acheter les fournitures, concevoirles programmes d’études et le matériel de lecture, effectuer lesévaluations et payer les salaires. Même les programmes qui sont censésêtre financièrement indépendants peuvent exiger une aide financière

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Les caractéristiques des programmesd’alphabétisation durables

lorsqu’ils s’élargissent. Pour mieux assurer la pérennité de leursprogrammes, les planificateurs et les gestionnaires doivent identifierdes organismes de financement divers, préparer des propositions definancement raisonnables et cohérentes et concevoir des infrastructuresautonomes de reddition des comptes et d’établissement des rapports. Siles gestionnaires ne possèdent aucune expérience dans ce domaine, cescompétences peuvent être intégrées dans leur processus de formation.Les organismes qui soutiennent le programme – départementsministériels, entreprises ou ONG – peuvent conduire des cours deformation en gestion de brève durée, à l’occasion desquels les élèves-gestionnaires apprendront à rédiger des propositions, à tenir des registreset à préparer des rapports financiers.

Outre les contributions financières des organismes de finance-ment, les communautés locales peuvent contribuer à l’entretien deleur programme en acquittant des droits de scolarité ou en fournis-sant de la nourriture ou des services aux enseignants et aux ateliersde formation locaux. Les entreprises peuvent aussi être encoura-gées à appuyer les programmes d’alphabétisation, comme dans lenord de la Thaïlande, où un groupe de chefs d’entreprises a contri-bué au financement d’un programme d’alphabétisation en languematernelle pour un groupe ethnique rural minoritaire.

Les programmes d’alphabétisation durables ne sont pas nécessai-rement ceux qui possèdent des budgets importants, mais plutôt ceuxqui font un usage judicieux des ressources dont ils disposent. Un habi-tant d’un village de montagne de Mélanésie a résumé ce point danscette observation concernant deux époux pauvres mais avisés qui par-ticipaient à un échange communautaire de viande cuite : « Ce coupleest très admiré parce que, bien que n’ayant que quelques animaux àpartager, il les a répartis sagement et tous ses amis et ses parents sontrentrés chez eux le cœur joyeux. Au contraire, les riches, qui possè-dent de nombreux animaux, ont distribué leur viande avec insoucianceet ont contrarié bon nombre de leurs amis et de leurs parents. » Il en vade même des ressources humaines, matérielles et financières utiliséesdans l’alphabétisation pour le développement : ceux qui les utilisentsagement peuvent satisfaire un grand nombre de personnes, mêmequand ces ressources sont limitées.

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Caractéristique 2. Les relations de coopération entre lesorganismes qui appuient les programmes

Les organismes gouvernementaux et les ONG aux niveaux na-tional, infranational et local possèdent des forces et des ressourcesdifférentes, qui peuvent toutes contribuer à renforcer la durabilité desprogrammes d’alphabétisation des adultes. Les organismes de finan-cement tendent à considérer que les ONG sont plus efficientes que lesbureaucraties gouvernementales dans l’utilisation des fonds et plusaptes à répondre rapidement et efficacement aux besoins expriméspar la population des communautés locales. Les ONG pourraient doncréussir mieux que les organismes gouvernementaux à attirer des fi-nancements extérieurs pour leurs projets. En revanche, les organismesgouvernementaux ont accès à des ressources financières, matérielleset humaines et à des appuis politiques à grande échelle dont ne dispo-sent pas les ONG, et ils peuvent assurer des liaisons entre unprogramme d’alphabétisation des adultes et d’autres initiatives pour ledéveloppement. D’un côté, en coopérant avec le gouvernement, lesONG peuvent atteindre un plus large secteur de la population que sielles agissaient seules ; d’un autre côté, les organismes gouvernemen-taux, s’ils établissent des partenariats avec les ONG, peuventparticiper plus efficacement au développement au niveau local etfournir les structures institutionnelles et décisionnelles qui encoura-geront et soutiendront l’autosuffisance. L’arrangement le plusproductif est donc celui aux termes duquel les organismes gouverne-mentaux, les ONG, les bailleurs de fonds extérieurs et lescommunautés locales assument chacun la responsabilité d’aspectsspécifiques du programme d’alphabétisation et participent tous à saplanification, à la prise de décisions et à son soutien.

Deux exemples de ce type d’initiatives de coopération ont étédécrits au chapitre II. Le premier était celui de la campagne natio-nale d’alphabétisation de 1980 au Nicaragua, au cours de laquelle lesministères de l’Education, de la Culture, de l’Intérieur, des Servicessociaux, de la Santé, de la Planification et des Transports ont coo-péré avec des ONG nationales et locales à la planification, à lamobilisation et à la réalisation de la campagne (Arnove, 1989). Lesecond exemple était celui du programme national d’alphabétisation

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de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, entrepris en 1989 par le Départe-ment national de l’éducation pour appuyer les initiativesd’alphabétisation de certaines ONG et des autorités provinciales. CesONG continuent d’être des partenaires actifs du Département de l’édu-cation pour la formation et la production de matériel aux niveauxnational et infranational.

Les avantages potentiels qu’une telle coopération interorganismespeut apporter aux programmes d’alphabétisation et de développe-ment posent une question importante : si ce type de coopération aune valeur aussi évidente, pourquoi l’observe-t-on aussi rarement àtravers le monde ? Le manque de coopération résulte bien souventde la défiance et parfois de la jalousie existant entre les organismesparticipants. Plus souvent, cependant, le manque de coopération ré-sulte de l’ignorance des buts et des intérêts communs – une ignorancequi ne peut être dissipée que si les canaux de communication sontmaintenus ouverts et fréquemment utilisés. Le fait de se parler et, cequi est peut-être plus important, de s’écouter mutuellement peut ouvrirla voie à l’établissement d’arrangements de coopération qui permet-tront d’atteindre des buts à long terme qu’aucun organisme– gouvernemental ou non gouvernemental – n’aurait pu atteindre parsa seule initiative.

Caractéristique 3. Les infrastructuresinstitutionnalisées

Une « institution » peut être considérée comme une activité hu-maine organisée qui a une utilité spécifique et qui est devenue partieintégrante de la société dans laquelle elle a été mise en place. Desprogrammes institutionnalisés ont été intégrés dans des infrastructu-res solidement établies aux niveaux national, infranational et local.Par exemple, une bibliothèque municipale administre un programmed’alphabétisation des adultes en milieu urbain, ou bien un programmed’alphabétisation pour la jeunesse extrascolaire est intégré dans unprogramme de formation professionnelle. Si les infrastructures n’exis-tent pas ou si elles sont inefficaces ou inappropriées, on en établit denouvelles, soit au sein d’un organisme existant, soit en tant qu’entitésdistinctes.

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L’avantage de l’intégration d’un programme d’alphabétisationdans une infrastructure établie est qu’elle peut conférer de la crédibilitéaux initiatives d’alphabétisation et rendre disponibles le personnel etles finances nécessaires à sa pérennité. L’inconvénient est que lacomposante alphabétisation peut se trouver ignorée (ou, pis encore,bloquée) si ceux qui prennent les décisions au sein de la structureétablie ont d’autres priorités. Un danger potentiel de l’intégration d’unprogramme d’alphabétisation dans un département ministériel uniqueest que le programme risque de se trouver isolé des autres organismeset ONG, qui peuvent alors renoncer à toutes leurs responsabilités ence qui le concerne. De plus, les institutions établies peuvent refuserou être incapables de s’adapter à l’approche du développementcentrée sur les intéressés qui est essentielle dans les initiativesd’alphabétisation des adultes. Confier la responsabilité du programmeà un département ministériel possédant un système de gestion « dusommet vers la base » solidement établi risque d’engendrer, une foisencore, une de ces initiatives pour le développement, planifiées etmises en œuvre au sommet, sans la participation de ceux que celaconcerne réellement. Les participants à une session de planificationpour un nouveau programme d’éducation de base des adultes enAfrique du Sud avaient peut-être ces problèmes potentiels présentsà l’esprit quand ils ont recommandé la création d’une ONG financéepar l’Etat ou d’une unité indépendante établie au sein d’un ministère,pour administrer le programme d’alphabétisation, au lieu d’en confierla responsabilité à un organisme étatique existant (Tyacke, Jacobsen,French, 1992). Les planificateurs étaient apparemment convaincusqu’une structure autonome nouvelle serait plus efficace et serait plusà même de donner la priorité au programme destiné aux adultes.

Cependant, que l’on crée des institutions nouvelles ou que l’onutilise celles qui existent, le développement des institutions en vue del’alphabétisation des adultes ne consiste pas seulement à trouver un« lieu d’accueil » pour les programmes d’alphabétisation. Il consisteégalement à établir des relations d’appui mutuel avec les entités qui,dans leur diversité, sont engagées dans le développement centré surles intéressés, et à travailler avec elles à l’établissement d’une largebase d’appui pour les programmes.

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Caractéristique 4. Les perspectives ouvertes pourl’éducation permanente

L’élément le plus important d’un programme d’alphabétisationdes adultes durable et réussi est la prise de conscience par les élèvesdes avantages à long terme de ce programme dans leur existence.« Alphabétisation » ne signifie pas seulement acquisition des compé-tences de base en lecture, en écriture et en calcul, et une planificationjudicieuse de l’alphabétisation implique aussi la planification de lapostalphabétisation – de l’intégration de l’initiative d’alphabétisationdans d’autres programmes qui favoriseront l’éducation permanente etl’épanouissement des élèves.

L’enseignement formel et professionnel offre despasserelles vers d’autres perspectives. Dans certains pays, lesadultes qui ont acquis l’aptitude à parler, à lire et à écrire dans lalangue dominante peuvent participer à un programme d’enseignementà distance, puis, à partir de là, entrer (ou, dans certains cas, revenir)dans le système d’enseignement formel. Dans d’autres contextes,les adultes postalphabétisés peuvent accéder au systèmed’enseignement professionnel, puis, une fois qu’ils ont acquis lescompétences nécessaires, au système d’enseignement formel.Plusieurs modèles ont été conçus pour ce type d’intégration. Dans leplan de postalphabétisation des jeunes et des adultes en Thaïlande(UNESCO, 1989), les élèves qui avaient suivi six mois de coursd’alphabétisation de base ou fonctionnelle pouvaient accéder au« niveau 1 » : cinq cents heures de cours d’enseignement classiqueou fonctionnel équivalant aux six premières classes de l’école primaire.Après avoir suivi avec succès ces cours de « niveau 1 », ils avaientla possibilité d’entrer dans le système d’enseignement formel au niveaudu premier cycle du secondaire (septième année d’études). Les élèvesqui choisissaient de rester dans le système d’enseignementprofessionnel pouvaient accéder au « niveau 2 », un programme dedeux ans de cours classiques, fonctionnels et professionnels. Au termede ce programme, ils pouvaient entrer dans le système d’enseignementformel au niveau du deuxième cycle du secondaire ou bien s’inscrire

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aux cours d’éducation permanente classiques et professionnels de« niveau 3 ». Enfin, les élèves qui avaient suivi les cours de ces troisniveaux avaient la possibilité d’entrer dans le système d’enseignementformel au niveau universitaire.

Dans le modèle qui a été proposé en Papouasie-Nouvelle-Guinée(Papouasie-Nouvelle-Guinée, Département de l’éducation, 1991, 7),les adultes qui avaient acquis une aptitude élémentaire à parler, à lire età écrire en anglais (la langue de l’enseignement formel) avaient accèsau College of Distance Education (CODE), où ils pouvaient progres-ser depuis l’équivalent du premier cycle du primaire jusqu’au terme dusecondaire, en suivant avec succès les cours par correspondance ap-propriés. Le CODE leur permettait d’accéder ensuite à une formationprofessionnelle ou à l’enseignement secondaire, et éventuellement àdes institutions postscolaires. Si ces deux modèles évoquent des possi-bilités passionnantes, le processus d’adaptation du système formel àl’accueil d’élèves adultes est plus problématique et exige un niveau deréforme de l’éducation qui risque d’excéder les capacités et la déter-mination politiques et économiques d’une nation. L’intégration duprogramme d’alphabétisation des adultes dans le système d’enseigne-ment professionnel peut constituer un but plus réaliste, du moins jusqu’àce que le programme d’alphabétisation soit solidement établi, que saréussite soit reconnue et que le gouvernement soit déterminé à offriraux élèves adultes des perspectives éducatives équivalentes à cellesqui sont ouvertes aux enfants.

Les perspectives éducatives à base communautaire. Lescours de postalphabétisation ou d’éducation permanente organisés dansles communautés locales constituent pour les adultes un moyen moinsambitieux, et néanmoins précieux, de poursuivre leur éducation. Lechoix des thèmes de ces cours appartient aux élèves eux-mêmes, surla base des besoins et des buts qu’ils ont définis. Une étude de ladocumentation consacrée à la question révèle que les thèmes les plusfréquemment traités dans les cours de postalphabétisation se regroupenten plusieurs catégories générales : (1) les questions liées à lacommunauté et à la citoyenneté (par exemple l’étude du système nationalde gouvernement) ; (2) les questions socioculturelles et spirituelles(récits ; légendes traditionnelles, chansons, poésie ; étude des livressacrés) ; (3) les connaissances et compétences fonctionnelles (entretien

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de véhicules, réparation de machines à coudre, création d’uneentreprise) ; et enfin (4) les questions sanitaires (planification familiale,nutrition). Les classes de postalphabétisation peuvent aussi être, pourles adultes, un moyen de s’engager activement dans les processus dudéveloppement, en prenant en charge des projets qui les impliquentdans des réformes politiques, économiques et éducatives (par exemplela rédaction de lettres de protestation contre le déboisement) ou enproduisant leur propres journaux ou feuilles d’information, dans lesquelsseront évoqués les problèmes qu’ils jugent importants. La durabilitéd’un programme de postalphabétisation est conditionnée, en premierlieu, par la mesure dans laquelle elle aide les élèves à atteindre leursbuts éducatifs. En second lieu, la réussite dépend de l’appui desorganisations concernées, telles que les services de santé oud’assurances, les constructeurs automobiles ou les associations deplanification familiale, qui sont disposées à produire du matériel de lectureen rapport avec les centres d’intérêt des élèves et adapté à leur niveaude lecture.

Entretenir un environnement propice à l’apprentissage. Sileur seul matériel de lecture est composé de vieux abécédaires – situa-tion qui n’est pas rare dans bien des programmes d’alphabétisation,notamment pour ceux qui parlent des langues minoritaires –, les élèvesadultes risquent d’en conclure rapidement que les avantages qu’ilspourraient trouver à être « alphabètes » ne valent pas les efforts qu’illeur faut déployer pour apprendre à lire et à écrire. En revanche, mêmesi l’accès aux programmes d’éducation permanente formelle et pro-fessionnelle est limité, les élèves adultes peuvent néanmoins êtreencouragés à continuer d’apprendre, et à utiliser les connaissancesacquises, si un matériel de lecture pertinent et intéressant est réguliè-rement disponible. Les bibliothèques et les clubs de lecturecommunautaires peuvent faire office de centres de ressources éduca-tives s’ils possèdent des livres, des journaux, des jeux et autres matérielsde lecture qui intéressent les lecteurs, les stimulent par des informa-tions et des idées nouvelles, et sont maintenus en bon état.

L’une des tâches qui incombent à ceux qui assurent la planifica-tion, l’exécution et la gestion est de favoriser la mise en placed’infrastructures nationales, infranationales et locales qui produirontun matériel de lecture que les gens auront envie d’utiliser – processus

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qui doit commencer avec la recherche préliminaire et la planification,et se poursuivre pendant toute la durée des programmes.

Résumé

Ce chapitre a examiné les caractéristiques essentielles des pro-grammes durables et réussis d’alphabétisation des adultes. Lapremière de ces caractéristiques réside dans le fait que des ressour-ces humaines, matérielles et financières adéquates ont été engagéesdans le programme et qu’elles sont utilisées avec discernement. Ladeuxième caractéristique est que le programme est soutenu de ma-nière continue par les initiatives de coopération d’organismesgouvernementaux et non gouvernementaux. La troisième est que lesinfrastructures de la mise en œuvre et de l’entretien du programmeont été institutionnalisées. La quatrième est que les élèves adultessont encouragés à poursuivre leur postalphabétisation et sont soute-nus dans leurs efforts pour atteindre leurs buts éducatifs à long terme.Il est clair que la planification visant à assurer la permanence d’unprogramme d’alphabétisation des adultes ne commence pas un, deux,trois ans ou plus après l’exécution de celui-ci. Les planificateurs avi-sés ont appris que, si l’on veut assurer la durabilité d’un programmesur une longue période, la planification pour l’avenir commence avecla planification de sa mise en œuvre.

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Conclusion

Planifier des programmes durables d’alphabétisation des adultes atoujours été une tâche complexe et difficile. Cependant, cette com-plexité n’a pas toujours été reconnue. Des tentatives diverses – quiont connu des degrés de réussite variables – se sont focaliser sur laréforme sociale, l’autodétermination, la résolution des problèmes oul’action politique, considérées comme des éléments influant de ma-nière décisive sur la durabilité. En acquérant de l’expérience et descompétences dans l’art d’envisager les implications socioculturelles,économiques, politiques, linguistiques et éducatives des programmesd’alphabétisation des adultes, les planificateurs ont découvert l’im-portance cruciale des élèves adultes eux-mêmes, en tant que ressourceessentielle de l’exécution et de l’entretien des programmes dont ilssont censés bénéficier. Le propos de cet ouvrage était donc de met-tre en lumière les innovations et les approches qui situent les élèvesadultes au centre actif – et non plus passif – du processus d’éducationaxée sur le développement.

Les programmes d’alphabétisation des adultes centrés sur les élè-ves qui sont fondés sur cette approche orientée « de la base vers lesommet » présentent plusieurs caractéristiques qui les différencientdes approches de l’alphabétisation des adultes plus traditionnelles,orientées « du sommet vers la base » :

1. Les élèves adultes participent pleinement à la planification, à l’exé-cution, à l’évaluation et à la gestion de leurs programmes.

2. Les programmes d’études et les méthodes d’enseignement aidentles élèves à gagner en confiance et en créativité pour résoudreleurs problèmes et atteindre leurs buts.

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3. Le matériel de lecture est fondé sur les centres d’intérêt desélèves, il est rédigé dans la/les langue(s) qu’ils parlent, il abordeles problèmes qu’ils ont définis, et il les aide à atteindre leursbuts personnels et collectifs.

4. Les individus et les groupes participants ne se contentent pas defavoriser l’enseignement de la lecture, de l’écriture et du calcul.Ils ont également vocation à réorganiser les normes et les struc-tures sociétales afin d’encourager et d’habiliter les élèves adultesà devenir des participants actifs dans les affaires économiques,politiques et socioculturelles du monde qui les entoure.

En dépit de tous leurs efforts, les planificateurs ne peuvent pasprévoir tous les éléments qui sont essentiels à la réussite et à la pé-rennité de leurs programmes d’alphabétisation des adultes axés surle développement. Les individus et les communautés qui sont censésbénéficier de ces programmes ont fréquemment leurs propres planset objectifs, qui peuvent demeurer inexprimés ou non perçus. Ceux-ci peuvent également s’exprimer en cours d’exécution du programme,auquel cas ses responsables doivent se montrer assez souples et enaccord avec la communauté pour pouvoir ajuster le programme àces éléments nouveaux. Dans la mesure où ces facteurs inexpriméssont en harmonie avec les buts et les objectifs du programme d’al-phabétisation, le projet a des chances d’aller de l’avant. Cependant,si les buts ou les stratégies du programme ne s’harmonisent pas avecceux de la communauté en général, et notamment des élèves adul-tes, des obstacles ne manqueront pas de surgir et la déception des’installer : autant d’éventualités qui mettent en évidence la néces-sité d’une communication continue, ouverte et confiante entre tousles intervenants.

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Publications et documents de l’IIPE

Plus de 1 200 ouvrages sur la planification de l’éducation ont étépubliés par l’Institut international de planification de l’éducation. Ilsfigurent dans un catalogue détaillé qui comprend rapports de recher-ches, études de cas, documents de séminaires, matériels didactiques,cahiers de l’IIPE et ouvrages de référence traitant des sujets sui-vants :

L’économie de l’éducation, coûts et financement.

Main-d’œuvre et emploi.

Etudes démographiques.

Carte scolaire et microplanification.

Administration et gestion.

Elaboration et évaluation des programmes scolaires.

Technologies éducatives.

Enseignement primaire, secondaire et supérieur.

Formation professionnelle et enseignement technique.

Enseignement non formel et extrascolaire : enseignement desadultes et enseignement rural.

Groupes défavorisés.

Pour obtenir le catalogue, s’adresser à l’Unité des publications de l’IIPE.

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L’Institut international de planification de l’éducation

L’Institut international de planification de l’éducation (IIPE) est un centre international, créépar l’UNESCO en 1963, pour la formation et la recherche dans le domaine de la planification del’éducation. Le financement de l’Institut est assuré par l’UNESCO et les contributions volon-taires des Etats membres. Au cours des dernières années, l’Institut a reçu des contributionsvolontaires des Etats membres suivants : Allemagne, Danemark, Inde, Irlande, Islande, Nor-vège, Suède, Suisse et Venezuela.

L’Institut a pour but de contribuer au développement de l’éducation à travers lemonde par l’accroissement aussi bien des connaissances que du nombre d’expertscompétents en matière de planification de l’éducation. Pour atteindre ce but, l’Institutapporte sa collaboration aux organisations dans les Etats membres qui s’intéressent àcet aspect de la formation et de la recherche. Le Conseil d’administration de l’IIPE,qui donne son accord au programme et au budget de l’Institut, se compose d’un maxi-mum de huit membres élus et de quatre membres désignés par l’Organisation desNations Unies et par certains de ses institutions et instituts spécialisés.

Président :Lennart Wohlgemuth (Suède), Directeur, Institut nordique d’Afrique, Uppsala, Suède.

Membres désignés :David de Ferranti

Directeur, Département de développement humain (DDH), la Banque mondiale,Washington, D.C., Etats-Unis d’Amérique.

Carlos FortinSecrétaire-général adjoint, La Conférence des Nations Unies sur le Commerce etle Développement (CNUCED), Genève, Suisse.

Miriam J. HirschfeldDirecteur, Division du développement des ressources humaines et du renforcementdes Capacités, Organisation Mondiale de la Santé (OMS), Genève, Suisse.

Jeggan C. SenghorDirecteur, Institut Africain de développement économique et de planificationéconomique des Nations Unies (IDEP), Dakar, Sénégal.

Membres élus :Dato’Asiah bt. Abu Samah (Malaisie)

Conseiller de société, Lang Education, Land and General Berhad, Kuala Lum-pur, Malaisie.

Klaus Hufner (Allemagne)Professeur, Université Libre de Berlin, Berlin, Allemagne.

Faïza Kefi (Tunisie)Présidente, Union Nationale de la Femme Tunisienne, Tunis, Tunisie.

Tamas Kozma (Hongrie)Directeur général, Institut hongrois pour la recherche en éducation, Budapest,Hongrie.

Teboho Moja (Afrique du Sud)Conseiller spécial du Ministre de l’Education, Pretoria, Afrique du Sud.

Yolanda M. Rojas (Costa Rica)Professeur, Université de Costa Rica, San José, Costa Rica.

Michel Vernières (France)Professeur, Université de Paris I, Panthéon-Sorbonne, Paris, France.

Pour obtenir des renseignements sur l’Institut s’adresser à :Secrétariat du Directeur, Institut international de planification de l’éducation,7-9 rue Eugène-Delacroix, 75116 Paris, France.

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L’ouvrage

Cet ouvrage présente aux lecteurs une vue d’ensemble des conceptset des pratiques qui sont à la base de la planification, de l’exécution etde la gestion des programmes d’alphabétisation des adultes. Tout enreconnaissant la complexité de l’élaboration de programmes d’alpha-bétisation faisant partie d’initiatives plus vastes pour le développe-ment, les auteurs présentent des approches pratiques d’une planifica-tion et d’une prise de décisions participatives, facilitant l’adaptationdes programmes aux élèves. Les questions spécifiques qui sont abor-dées concernent la prise de décisions préliminaire sur les principesdirecteurs du programme, ses buts, sa dimension, la/les langue(s)véhiculaire(s) et les types de cours qui seront organisés ; la formula-tion des stratégies de mise en œuvre et d’entretien du programme ; etenfin les mesures qui aideront à assurer sa durabilité.

Les auteurs

Susan E. Malone est Consultante internationale en alphabétisa-tion pour le Summer Institute of Linguistics. Elle est actuellementProfesseur invitée à l’Université de Mahidol à Bangkok, Thaïlande,tout en étant affectée à l’Université du Texas à Arlington, Etat-Unisd’Amérique.

Robert F. Arnove est Professeur d’éducation internationale etcomparative et Coordonnateur du programme de doctorat consacréà l’étude des politiques éducatives de l’Université de l’Indiana àBloomington. Il a largement collaboré à des programmes d’éducationpopulaire en Amérique latine et a codirigé National Literacy Pro-grammes : Historical and Comparative Perspectives.

ISBN 92-803-2168-4